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Le gouvernement perd sa majorité – il est temps de le faire chuter
Le sondage réalisé à la mi-mai par VTM, RTL, Het Laatste Nieuws et Le Soir confirme que la contestation se développe. Tous les partis du gouvernement perdent des plumes, particulièrement la N-VA et le CD&V. Les plus grands gagnants sont le Vlaams Belang qui regagne une partie de l’électorat de la N-VA, et le PTB qui devient le troisième parti en Wallonie avec plus de 13 % des voix ! Le PS ne profite pas de son rôle dans l’opposition fédérale et continue de perdre du terrain. Trop associé à la politique néo-libérale, ce dernier a perdu toute crédibilité en tant qu’alternative de gauche. Il suit le même chemin que le PS français.
Par Els Deschoemacker, édito de l’édition de juin de Lutte Socialiste
Le gouvernement fédéral s’est fixé l’objectif de modifier l’ADN de la Belgique en voulant faire passer des contre-réformes brutales sans tenir compte de la concertation sociale. Il risque néanmoins de se retrouver bloqué par la résistance sociale qui se développe rapidement aujourd’hui, tout comme avec le mouvement de grèves de 2014.
Le rejet de cette politique se généralise plus largement qu’auprès de la base syndicale. La classe des travailleurs est la plus grande victime de la politique d’austérité et elle est descendue dans les rues dès le coup d’envoi de cette version belge du gouvernement de Margareth Thatcher. Mais même parmi des couches de la classe qui ont moins l’habitude de critiquer les orientations politiques, le mécontentement se fait entendre de plus en plus fortement. Même les magistrats risquent de rejoindre les protestations. Le tsunami austéritaire et son sillage de manque d’investissements et de personnel bloquent tant l’accès à la justice que la qualité des procédures.
La grève des agents pénitentiaires mais aussi celle des ouvriers de SAS (sous-traitant de Volvo à Gand) ont fait voir une détermination et une combativité inédites. Cela illustre la confiance et l’idée que des victoires importantes sont nécessaires et possibles en s’organisant dans la lutte. Propositions après propositions ont été rejetées par un vote optant en faveur de la poursuite de la grève. Au moment de l’impression de ce journal, nous ne savons toujours pas ce que les agents pénitentiaires vont obtenir, mais le ministre Geens, tout d’abord opposé à la moindre concession, a déjà mis sur table trois propositions ouvrant ainsi la voie à de plus grandes concessions vis-à-vis du nombre d’agents et à des investissements dans l’infrastructure, revendications parmi les plus importantes pour les grévistes.
Les dirigeants des grandes entreprises prennent peur de ce mécontentement grandissant à la base de la société et de son organisation. Ils appellent le gouvernement à prendre les choses en main et à agir en technocrate. Herman Daems, ancien professeur d’économie de la KU Leuven et aujourd’hui président de cette même université, membre de plusieurs conseils d’administration, se plaint ouvertement du modèle belge de concertation sociale : ‘‘Nous vivons dans un modèle de concertation aux nombreux groupes d’intérêts, ce qui fait qu’aucune décision claire ne peut être prise. Tout le monde dit que le gouvernement belge doit faire des priorités, mais quand il le fait, la moitié du pays crie que ce sont des mauvaises priorités. C’est un État fatigué. (…) Ce n’est pas une conséquence de l’augmentation des compétences des Régions, mais du modèle de concertation avec plusieurs partenaires sociaux, groupes d’intérêts, etc.’’ (1) Ce sont toujours les contrôleurs aériens, les bagagistes, les syndicats policiers, ceux qui demandent plus de sécurité, qui sont attaqués dans les médias. Ce sont toujours les agents pénitentiaires ou les cheminots qui sont accusés de prendre en otage toute la société pour la défense de leurs propres intérêts.
Mais qui prend qui en otage ? Nous ne vivons pas dans un ‘‘État en faillite’’, mais dans un ‘‘système en faillite’’ qui échoue à garantir à la majorité de la population une vie décente avec un revenu convenable, un travail, un logement, une pension et des soins de santé. Quand une forme de protestation s’élève et refuse de courber l’échine, c’est que la majorité sociale n’a plus d’autres choix. Dans le cas des bagagistes, c’était même simplement pour exiger le paiement correct de leurs salaires.
Les sondages illustrent que les recettes des partis capitalistes sont dépassées. Le paysage politique n’est divisé que sur la manière de continuer sur cette voie. Certains plaidaient même l’abolition pure et simple des organes de concertation démocratique pour assurer une dictature plus directe des intérêts du capital !
Mettre au pouvoir une politique dans les intérêts de la majorité, c’est le véritable enjeu auquel on fait face. La première tâche du plan d’action est de mettre sur place un mouvement de masse pour faire tomber le gouvernement. Ce gouvernement n’est plus capable de résister à un mouvement de grève de quelques jours ou semaines. La question la plus importante qu’il faut, dès maintenant, commencer à discuter est celle de l’alternative politique à défendre : un gouvernement dans l’intérêt des travailleurs appliquant un programme qui place les leviers économiques de la société sous son contrôle et qui les utilise au service de la classe des travailleurs.
Ce gouvernement est fini. Pas parce qu’il n’est pas efficace ou incapable, mais parce qu’il ne sert que le capitalisme belge. L’intérêt ‘‘commun’’ dont il se réclame souvent n’est rien de plus que l’intérêt de la classe capitaliste. L’État est de plus en plus démantelé pour n’être réduit qu’à ça. L’opposition à cette logique ne va que croître !
(1) Le Knack, 18 mai 2016