Le gouvernement a choisi ce qu’il veut protéger – et ce n’est ni notre santé ni notre niveau de vie !


« Je le dis haut et fort : notre pays, notre économie et nos entreprises ne peuvent pas supporter un nouveau confinement » – déclaration du gouvernement De Croo. Et donc – bien que les chiffres augmentent de façon alarmante, bien que les hôpitaux débordent et que les soins réguliers doivent être reportés, bien que les experts de la santé recommandent des mesures plus sévères – les mesures se limitent à tuer la vie sociale.

Par Anja Deschoemacker

Alors que les ministres s’isolent lorsqu’ils sont testés positifs, le personnel de santé doit aller travailler. Les tests préventifs sont limités car la capacité de test n’est toujours pas suffisante. La recherche des contacts (le tracing) n’en est toujours nulle part. Lorsque l’enseignement doit passer en code orange, selon les baromètres mis en place, il est rapidement décidé que le code orange signifie que toutes les écoles restent ouvertes.

Quarantaine, conditions de travail sûres, accès aux tests,… tout cela est réservé aux ministres, aux cadres supérieurs des entreprises – aux personnes considérées comme « importantes » par le gouvernement et le patronat. Pour nous – les travailleurs, leurs enfants et leurs parents – il n’y a que l’espoir d’une immunité de groupe. Dans la guerre contre le virus, nous sommes de la chair à canon. Ce qui doit être sauvé, ce n’est pas nous, mais les entreprises.

Cependant, les économistes sont très clairs : ce qu’il faut pour une reprise économique, c’est la confiance des consommateurs. Et cette confiance des consommateurs dépend de la mesure dans laquelle les gouvernements parviennent à garder le virus sous contrôle. La politique actuelle du gouvernement est donc contre-productive sur tous les fronts. C’est le refus de faire passer la santé publique avant tout qui rend la reprise économique impossible.

Le gouvernement est piégé par la perspective à court terme de ceux qu’il sert : les grandes entreprises. Car rien ne leur est imposé pour garantir la sécurité des travailleurs. Il est interdit de se réunir avec sa famille ou ses amis et les amendes sont élevées pour les personnes à faibles revenus. Mais votre patron peut décider que vous devez vous tenir près de vos collègues ou servir les clients dans des espaces non ventilés. Et les gouvernements décident que vos enfants doivent aller à l’école dans une classe exiguë qui rend impossible l’enseignement en sécurité.

Le gouvernement ne prévoit rien non plus pour empêcher les capitalistes de sortir leur argent du pays lorsqu’ils ferment des entreprises et que les salaires et les indemnités de licenciement doivent être payés par la collectivité. L’affaire Mega World (anciennement Blokker) en est un bon exemple. Toute une série d’entreprises licencient du personnel parce qu’elles font des pertes pour la première fois depuis des décennies. « Entreprendre avec succès » signifie que vous réservez les bénéfices aux actionnaires et que vous répercutez les coûts sur la société. Merci au gouvernement !

Beaucoup disent maintenant : « ce gouvernement n’a rien appris de la première vague ». Les De Croo et Vandenbroucke ne sont pas idiots. Ils savent que leur politique va coûter des vies, que le personnel de santé sera exténué, que les étudiants et les enseignants vont forcément propager le virus, que le personnel de santé testé positif qui doit travailler transmettra le virus aux patients vulnérables. Ce n’est pas de la stupidité, c’est un choix politique !

Pour arriver à une situation qui permette de suivre des cours, d’enseigner et de travailler en toute sécurité, il faudra l’imposer. C’était déjà le cas lors de la première vague et il n’en est pas autrement aujourd’hui. Les travailleurs devaient le faire eux-mêmes sur le lieu de travail, sans aucun encouragement de la direction syndicale et dans certains cas même explicitement contre la direction syndicale, qui offrait la paix sociale en cadeau aux patrons et aux gouvernements.

Toutes les mesures de protection et les concessions sociales faites par le gouvernement ont été imposées à la base par cette lutte : pas par “l’unité nationale” et la “paix sociale” qui n’est respectée que par les directions syndicales alors que les capitalistes continuent à défendre leurs intérêts. Pour que l’économie fonctionne pour la majorité des gens, ce qui signifie aussi aujourd’hui pouvoir être utilisé pour garantir la santé publique et sauver des vies, il faut se battre.

Les syndicalistes combatifs et autres militants de la société civile ont une tâche importante à accomplir dans les semaines à venir : orienter une action fondée sur la discussion pour faire comprendre au gouvernement et aux patrons que nous ne sommes pas prêts à risquer nos vies et celles de nos enfants, parents et grands-parents pour rendre les plus riches encore plus riches. Après tout, une économie qui tourne autour des besoins de la majorité de la population ne devrait pas produire de nouveaux milliardaires(1) mais la sécurité et un bon niveau de vie pour tous.

1) Comme le couple De Raedt-Verheyen qui a reçu un milliard d’euros en septembre dernier lorsqu’il a vendu son groupe de laboratoires CMA-Medina au Biogroupe français, et est ainsi devenu milliardaire au détriment de notre assurance maladie.

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