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  • Irlande : Campagne contre la ‘‘Household Tax’’

    Le gouvernement irlandais veut instaurer une ‘‘Household tax’’, soit un impôt foncier de 100 euros sur chaque maison et est la suite logique de la précédente taxe sur l’eau. Avec cette taxe, un pensionné ou un travailleur précaire devra débourser exactement la même chose qu’un millionnaire ! C’est tout particulièrement dégueulasse dans le contexte actuel de l’Irlande. Ce nouvel impôt n’a absolument rien à voir avec l’amélioration des services proposés par les collectivités locales, il ne s’agit que de continuer de saigner les travailleurs et leurs familles pour payer le renflouement des banques.

    Socialist Party (CIO-Irlande)

    En Irlande, chacun sait fort bien que cet impôt commencera à 100 euros, mais grimpera implacablement si nous nous laissons faire. L’Economic Social and Research Institute (un think tank influent en Irlande) réclame que cette taxe se poursuive pour des années et des années, son principal économiste, John Fitzgerald, allant même jusqu’à dire qu’il ne s’agit là que d’un ‘‘début’’ et qu’il va falloir augmenter cette taxe jusqu’à 800 euros en plus d’une taxe sur l’eau de 500 euros.

    La vie quotidienne devient déjà intolérable en Irlande avec les nombreuses coupes salariales, l’augmentation des taxes ou des hypothèque,… Jusqu’où cela peut-il encore aller ?

    Balayant toutes leurs promesses électorales, le Fine Gael (centre-droit) et le Parti Travaillsite (la coalition au pouvoir depuis les récentes élections) veulent totalement collaborer aux diktats de l’Union Européenne, de la Banque Centrale et du Fonds Monétaire International. Pour la population, cela signifie de faire face à de nouvelles mesures d’austérité. Cette politique, en plus des licenciements et du chômage, qui se mène depuis déjà un moment et qui consiste à pomper les moyens des ménages, a fait chuter la consommation personnelle de 13 milliards d’euros en 3 ans dans le pays. L’austérité cause des ravages à travers l’Europe, elle ne fera qu’empirer la crise et de garantir la faillite.

    Can’t Pay! Won’t Pay!

    Ce nouvel impôt n’est pas une fatalité. Nous pouvons le vaincre, mais uniquement avec une campagne de non-paiement de la taxe construite par la base, avec l’implication réelle de la population, dans chaque secteur de la société. Le Socialist Party (parti-frère du PSL en République irlandaise) plaide en ce sens. Dans les années ‘90, le Socialist Party avait dirigé une campagne similaire, l’Anti Water Charges Federation, contre une taxe sur l’eau, une campagne couronnée de succès.

    La construction de cette campagne massive de non-paiement, y compris aux tribunaux et par une opposition politique résolue, avait alors forcé le gouvernement de l’époque de supprimer cette taxe. Les élections partielles de 1996 à Dublin West étaient devenues un véritable referendum sur cette question, l’establishment politique avait été profondément ébranlé. Joe Higgins s’y était présenté et n’avait raté son élection que de peu (il fut élu au Parlement l’année d’après).

    Le ministre Bruton a déclaré que cette taxe n’était ‘‘que de 100 seulement’’. Cette somme constitue déjà un fardeau actuellement pour les ménages irlandais, et elle grimpera au delà des 1.000 euros très vite, la troïka européenne ayant exigé de nouveaux impôts de ce type pour les deux années à venir. Le gouvernement ne fait en fait que tâter le terrain pour l’instauration de nouvelles taxes, plus lourdes, à l’avenir. Si cette Household Tax est facilement acceptée, le gouvernement se sentira plus confiant pour poursuivre cette politique, et l’amplifier. Construire une campagne massive de non-paiement maintenant, c’est aussi rendre plus difficile l’application d’autres attaques par la suite.

    Ne nous laissons pas intimider!

    Le gouvernement fera tout pour forcer la population à céder, avec la menace d’amendes draconiennes et de condamnations aux tribunaux. Cela contraste violement avec l’attitude très douce adoptée par les autorités face aux criminels en col blanc millionnaires qui ont détruit l’économie ! Aucun banquier ou homme d’affaire n’a été inquiété. En construisant une puissante campagne de désobéissance civile de masse, implantée dans chaque région, la solidarité peut donner confiance aux ménages pour s’unir et maintenir leur refus de payer cette taxe. Il est impossible de tirer des milliers de personnes devant les tribunaux.

    Opposition politique

    Le Parti Travailliste est maintenant du côté du Fine Gael et du Fianna Fail (centre droit) pour soutenir l’instauration de taxes qui frapperont les ménages – en dépit des différentes annonces dans les médias durant la dernière campagne électorale. Il faudra se souvenir de cette trahison cynique tandis que les politiciens travaillistes qui disent s’opposer à cette taxe tout en restant bien tranquille au sein du Parti Travailliste ne sont que de vulgaires opportunistes. Le Sinn Fein a déclaré qu’il s’opposait à la Household Tax, mais a malheureusement décidé de ne pas mettre ses ressources et ses moyens derrière une campagne de non-paiement, qui reste la seule façon de mettre en échec cette véritable escroquerie. Ceci décevra sans doute beaucoup d’électeurs du Sinn Fein.

    Le Socialist Party / United Left Alliance est le seul parti qui propose clairement le boycott et est actif dans la construction d’une campagne nationale, indépendante et basée sur une implication active de la population. Notre expérience dans ce type de campagne est par ailleurs unique dans le pays.

    En dépit de la propagande quotidienne des médias traditionnels, il existe de grandes richesses inexploitées en Irlande. Le pays n’est pas s’est pas brisé. L’Irlande reste en 6e position sur les 27 pays de l’Union Européenne en termes de richesse financière. Naturellement, cette richesse est concentrée dans quelques mains seulement. La Banque Centrale a rapporté qu’en mai 2011, il y avait quelque 120 milliards d’euros en dépôt dans les banques irlandaises – pourquoi ne pas instaurer un impôt sur la fortune plutôt que de faire subir de nouvelles taxes à la population et de prendre en otage notre enseignement et nos services de santé ? Les ressources naturelles de gaz et de pétrole pourraient également être exploitées au profit de la société irlandaise, plutôt que pour une ou deux multinationales.

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  • Ecole d’été du CIO : Kazakhstan, une situation explosive

    Le Kazakhstan actuellement des développements importants. Une grève de travailleurs du pétrole dure depuis plus de 2 mois, et cette situation de contestation se retrouve plus généralement dans le pays. Aujourd’hui, les masses du pays commencent à ne plus avoir peur, et un scénario ‘‘à la tunisienne’’ n’est pas à exclure pour les prochaines années.

    La grève des travailleurs de KazMunaiGas

    La grève a commencé dans une filiale de l’entreprise nationale de pétrole, décrite comme une entreprise nationale mais sous le contrôle d’un seul homme, le beau-frère du président Nazarbaïev, qui possède également d’autres entreprises dans le secteur. A la base, les travailleurs demandaient que l’entreprise respecte la législation sociale.

    Là où se trouvent les champs pétroliers, les conditions sont très pénibles. Ce sont des déserts où la température peut atteindre 40° l’été, et -40° l’hiver. Rien ne pousse dans la région, tout doit être acheminé, et les salaires permettent à peine de pouvoir acheter la nourriture, qui coûte très cher. Ces derniers mois, il y a eu plusieurs morts sur le site, mais la direction refuse de reconnaitre sa responsabilité. Elle envoie ainsi une lettre de licenciement à la famille pour s’assurer de n’être plus responsable.

    Dans un premier temps, les travailleurs ont écrit au président et à diverses autres personnes pour chercher un soutien, durant toute une année, mais sans résultat. Ils en sont donc arrivés à la conclusion qu’ils ne pouvaient compter que sur eux même. Les syndicats leur ont mis des bâtons dans les roues et, l’an dernier, un travailleur a même été passé à tabac sur ordre des responsables syndicaux. Cela été la goutte d’eau qui a fait débordé le vase.

    Les travailleurs ont donc organisé leur propre conférence afin d’élire leurs propres délégués, mais les syndicats ont refusé de signer les papiers permettant de reconnaitre cette conférence. D’autre part, les travailleurs avaient transmis à la police toutes les informations relatives à l’agression, mais elle n’a rien fait. Finalement, la grève a éclaté le 17 mai dernier.

    Cette grève a été déclarée illégale, des grévistes ont été licenciés et leur avocat a même été arrêté sous l’accusation de vol de documents le jour même du déclenchement de la grève. Directement, els grévistes ont envoyé un piquet devant les locaux de la police, et un des travailleurs, accusé d’avoir organisé le piquet, a directement été arrêté lui aussi. L’un des syndicalistes arrêté est diabétique et, durant les premiers temps de son enfermement, on a refusé de lui donner de l’insuline, ce qui est considéré comme de la torture au regard du droit international. La seule manière de libérer ces camarades est que la grève soit victorieuse, car on ne peut rien attendre de la justice, totalement corrompue.

    Peu après le déclenchement de la grève, une usine d’une ville voisine est également partie en grève, en solidarité. Les travailleurs de cette entreprise avaient l’habitude des pratiques de la direction. Lors d’une grève précédente portant sur les salaires, leur dirigeant syndical avait été accusé de détention de drogue, un piège des plus grossiers. Ensuite, des sous-traitants sont eux-aussi entrés en grève en solidarité. Aujourd’hui, quelque 18.000 personnes sont impliquées dans la lutte, ce à quoi il faut encore ajouter les familles. La lutte se déroule dans conditions très dures. Beaucoup de grévistes sont licenciés, des maisons de grévistes sont brulées et l’un d’entre eux est décédé de crise cardiaque durant une action. Il y a quelques semaines, les femmes des grévistes ont manifesté et elles aussi ont dû subir une lourde et violente répression policière.

    Des travailleurs en lutte sont entrés en grève de la faim et après une semaine, quand la grève de la faim commence à avoir un sérieux impact sur le corps, on leur a refusé l’assistance médicale, ce qui n’est pas seulement illégal, mais aussi contre le serment d’Hippocrate. D’autres travailleurs ont toutefois décidé de rejoindre la grève de la faim et ont tenté d’installer des tentes devant l’hôtel de ville. Lorsque la police est intervenue, ils ont décidé de s’installer sur la route principale de la ville. La police a commencé à tenter d’arrêter tout le monde, et des grévistes ont alors ouvert leur ventre pour protester. La police a essayé d’assurer qu’aucune information ne circule au sujet du conflit, elle a donc aussi arrêté tous les journalistes. Il y avait un mariage non loin, et le caméraman a lui aussi été arrêté.

    Contrôle de l’information

    Ce n’est pas tr ès compliqué pour le régime de contrôler l’information, tout étant détenu par une seule personne: le beau-fils de Nazarbaïev. Les droits de l’Homme n’existent tout simplement pas dans le pays. Les travailleurs sont exploités comme des esclaves et la liberté de la presse ou la liberté de pensée est quasiment inexistante. L’essentiel des journaux sont aux mains de la famille présidentielle et, lorsqu’un journal indépendant essaie de se développer, il n’est pas rare que ses journalistes soient battus. Même les blogs sont bloqués, et le contrôle d’internet est intense. Une loi est même passée pour que chacun soit considéré comme un journaliste pour ce qu’il écrit sur internet, et puisse donc être passé en jugement et envoyé en prison. Dans celle-ci, les tortures sont monnaie courante. La situation qui y existe a été récemment dénoncée par un journaliste, qui connaissait particulièrement bien le sujet pour y été envoyé par deux fois, condamné par de fausses accusations.

    Les grévistes ont essayé de briser le contrôle de l’information, et une grande nouvelle est arrivée avec la déclaration du chanteur Sting. Sting a annulé un concert prévu en juin à Astana, la capitale du Kazakhstan pour protester contre la répression touchant les grévistes. Les organisateurs kazakh du concert ont quant à eux évoqué des "raisons techniques et d’organisation" pour expliquer cette annulation. Sting a notamment déclaré : ‘‘Des grèves de la faim, des travailleurs emprisonnés et des dizaines de milliers (de personnes) en grève représentent un piquet de grève virtuel que je n’ai nullement l’intention de franchir.’’ Cela et d’autres choses ont permis que toute la population du pays soit désormais au courant de ce qui se passe. Mais le gouvernement déclare toujours qu’il ne se passe rien de grave.

    Cette attitude est typique du régime. Pendant 20 ans, celui-ci a assuré que l’activité du président avait grandit le pays, contre toute logique puisque, dans les faits, tout a été détruit. Toutes les entreprises qui avaient été laissées après la chute de l’URSS ont été détruites. C’est toute la production basée sur la transformation qui a disparu, et seule l’extraction de matières premières a été soutenue. Ce pays très riche, aux ressources naturelles énormes, a connu une désindustrialisation, et tous les bénéfices ont été directement orientés vers les poches de la famille du président Nazarbaïev.

    Un pays aux ressources naturelles gigantesques

    Quant à l’extraction de pétrole, elle n’obéit qu’à une vision à très court terme, où on pompe tout maintenant, sans penser aux conséquences pour le lendemain. On trouve aussi de l’uranium dans le pays, mais toute l’extraction s’effectue à ciel ouvert, sans tenir compte des effets dangereux sur la population. L’extraction de charbon s’effectue aussi à ciel ouvert et quand le filon est épuisé, ils repartent en laissant le trou béant. Un des très bons amis du président est le géant de l’acier Mittal, et, là comme ailleurs, les bénéfices gigantesques s’expliquent par les très bas salaires, le manque totale de protection et le déni de la moindre règle de sécurité. Dans les mines, il est commun pour les travailleurs de se demander : le coup de grisou sera-t-il pour aujourd’hui ou pour demain ? De fait, les décès sont fort nombreux. Uniquement l’an dernier, pas moins de six explosions ont eu lieu dans les mines.

    Le Kazakhstan est un pays gigantesque, équivalent à la surface de l’Europe Occidentale, mais avec une population de 15 millions de personnes environ. Selon BP, le pays abrite 3% des réserves mondiales connues de pétrole, et 1% des réserves mondiales de gaz. Ces ressources naturelles attirent bien entendu une grande convoitise, et il n’est dès lors pas surprenant de voir que les puissances étrangères se taisent sur les actes du régime, et vont même jusqu’à considérer que le Kazakhstan est une démocratie ! En 2010, le président Nazarbaïev a même été nommé à la tête de la présidence tournante de l’OSCE (Organization for Security and Cooperation in Europe, l’Organisation pour la Sécurité et la coopération en Europe). Pourtant, à l’occasion des élections de 2005, la même OSCE avait critiqué le caractère non-démocratique de celles-ci… Le pays est aussi une des clés des jeux géopolitiques de la région, c’est l’arène de conflits d’intérêts entre les USA, l’Union Européenne, la Chine et la Russie.

    Un pays taillé sur mesure pour une seule famille

    Le pays ne comprend pas de logements sociaux, et les logements normaux sont extraordinairement chers. La population doit emprunter à des taux mirobolants afin de pouvoir se loger. Quand la crise économique a frappé le Kazakhstan, les banques ont rencontré de grands problèmes et il a fallu les sauver. Par contre, pas le moindre centime n’a été dépensé pour soutenir les familles endettées. La question d’organiser la défense de la population est sans cesse plus cruciale face aux taux hypothécaires trop élevés,… Maintenant, les banques procèdent à des expulsions en laissant les gens à la rue. Un des dirigeants du mouvement ‘‘Touche pas à nos logements’’ est actuellement menacé d’emprisonnement, la police tente de le condamner avec des charges criminelles. Un peu plus tôt, sa voiture avait été sabotée, on avait trafiqué sa pédale de frein et le frein à main.

    En fait, une seule famille est défendue et protégée dans le pays : celle du président, au pouvoir depuis plus de vingt ans. La constitution du pays a d’ailleurs été écrite par le président lui-même et, en mai 2010, ce dernier a à nouveau modifié la constitution pour y introduire la notion de ‘‘chef de la nation’’, ce dernier étant immunisé de toute poursuite, cette immunité étant à vie et même étendue à sa famille. Exemple illustratif : un des beaux-fils de la famille présidentielle tient un night club dans la capitale. Un soir, il a été tabassé par un client trop saoul, une quarantaine de policiers ont ensuite été licenciés pour ne pas avoir assez bien assuré la protection de la famille du président.

    Une des principales caractéristiques du régime est la concentration énorme de richesses aux mains du clan Nazarbaïev, combinée à l’héritage du stalinisme en termes de culte de la personnalité et de népotisme (il a été président du Conseil des ministres de la République socialiste soviétique kazakhe de 1984 à 1989 et premier secrétaire du Parti communiste kazakh de 1989 à 1991).

    Nazarbaïev s’est maintenu au pouvoir en falsifiant les votes, mais pas seulement. Maintenant, la falsification touche également le taux de participation aux élections, car plus personne ne veut aller voter. La blague est célèbre dans le pays ; aux prochaines élections, le taux de participation sera de 102%… Lors des élections d’avril 2011, Nazarbaïev a été réélu dès le premier tour avec 95,55 % de suffrage pour un taux de participation de 89,99%. Trois candidats étaient en lice, les deux ‘‘opposants’’ au président étant en fait là pour faire de la figuration. L’organisation de défense du droit au logement a manifesté dans la capitale à 200 personnes pour revendiquer de présenter un candidat, mais ces 200 personnes ont directement été arrêtées. Quant aux résultats électoraux, qui rappellent ceux dont se revendiquaient Moubarak ou Bel Ali, un de nos camarades qui était observateur durant ces élections a pu concrètement voir comment parvenir à un tel ‘‘soutien’’…

    Pour êtres crédibles, les élections devaient au moins obtenir 4 millions de votants. Le régime a donc forcé les gens à aller voter ou utilisé des subterfuges, comme d’envoyer des bus ‘‘d’électeurs’’ d’un bureau de vote à l’autre pour y voter, remonter dans le bus, et se diriger à un autre bureau. Dans le bureau de vote où le camarade était, il a peut-être vu 100 personnes passer voter, mais en fin de journées, plus de 1000 personnes s’étaient officiellement déplacées au vu du nombre de bulletins… Dans certaines usines, les travailleurs recevaient 25 à 30 euros de bonus (une somme énorme par rapport aux salaires) pour aller voter pour le président tandis que les étudiants qui n’allaient pas voter étaient menacés de ne plus pouvoir suivre leurs études.

    Le rôle de la jeunesse

    D’année en année, on observe une diminution du nombre d’étudiants. La loi sur la refonte de l’enseignement supérieur tient à assurer que l’enseignement supérieur sera entièrement privatisé d’ici quelques années, et que seuls les très riches pourront y assister. Le régime part du principe que des gens éduqués risquent de trop réfléchir et de commencer à s’opposer à lui. D’ailleurs, pour les jeunes qui ont reçu une instruction et qui ne font pas partie des cercles dirigeants, il est très difficile de trouver un emploi ou un logement.

    On trouve de plus en plus de jeunes dans la capitale, comme l’économie rurale s’effondre et que l’exode vers les villes est gigantesque. Le pays est couvert de villes fantômes où personne n’habite plus. Tous les subsides sont consacrés à Astana, la capitale, les autres villes ne recevant rien. A ce rythme, d’ici quelques années, le pays sera vide, à l’exception des zones d’extraction de matières premières et des deux grandes villes ; Alma-Ata et Astana, gigantesque capitale futuriste qui, comme Las Vegas, ne sera bientôt plus qu’un point lumineux dans le désert.

    La jeunesse se rend de plus en plus compte qu’elle n’a pas d’avenir avec le régime, cette colère commence à se transformer en conscience politique. Lorsque nos camarades ont visité les grévistes du pétrole, des travailleurs leur ont dit : nous avons près de 10.000 jeunes chômeurs ici, voulez-vous nous aider à les organiser ?

    Il est très difficile de dire quand, mais il est certain que le moment où la jeunesse va se soulever dans le pays est assez proche. Les capitalistes ne résoudront jamais les problèmes de la population, ils ne cherchent même pas à légèrement les atténuer, aveuglés par leur soif de profits à court terme.

    Potentiel révolutionnaire

    Actuellement, l’Etat s’attaque très durement à nos camarades. Notre organisation voit son influence grandir car la population est de plus en plus dégouttée par le ‘‘travail’’ de l’opposition officielle et, par contre, ils peuvent voir quelles actions nous menons, à la fois avec notre section dans le pays (soutien actif aux luttes pour défendre les logements, soutien actif aux grèves et à leur organisation,…) ainsi qu’avec notre internationale (plusieurs visites de camarades, visite du député européen du CIO Joe Higgins l’an dernier et celle de son remplaçant Paul Murphy cette année,..).

    Dans le cas des grévistes du secteur pétrolier, nous avons pris l’initiative d’un comité de soutien national, dont une des principales tâches est de récolter du soutien financier pour les grévistes. Nous essayons d’impliquer le plus de monde dans ces comités, y compris des artistes et des chanteurs. Un photographe européen reconnu a déjà vendu plusieurs photos pour soutenir financièrement les familles des grévistes, tandis que de nombreux groupes rock ont déclaré soutenir la grève et sont en train d’organiser un concert de soutien.

    Cette grève est de la plus haute importance, et nous devons assurer de tout mettre en œuvre pour assurer sa victoire. Il y a de grandes chances pour que les mineurs partent eux aussi en lutte en cas de victoire de leurs camarades du pétrole, et cela pourrait enclencher un processus de luttes de grande ampleur dans le pays. Et contrairement à la Tunisie ou à l’Egypte, le CIO aura des forces actives et reconnues dès le début du processus révolutionnaire. Bien évidemment, nous devons aussi penser à la possibilité d’une défaite à cause d’une trop grande répression durant trop longtemps, à cause du manque d’expérience des dirigeants des grévistes pour tenir suffisamment longtemps dans ce contexte extrêmement tendu,… Le gouvernement utiliserait cet élément décourageant, qui pourrait faire taire la contestation sociale pendant un certain laps de temps. Mais, pour revenir à l’expérience de la lutte de Gafsa en Tunisie, la défaite a néanmoins constitué une expérience très riche pour la suite. Le potentiel est véritablement présent pour une explosion à caractère révolutionnaire dans le pays.

    Bien entendu, le régime est parfaitement au courant du danger qu’il court, lui aussi regarde vers le Moyen Orient et l’Afrique du Nord, mais avec effroi. Un des leviers sur lequel il peut jouer est celui de la composition ethnique du pays. Le Kazakhstan est la dernière république à avoir déclaré son indépendance de l’URSS, et la seule où l’ethnie locale n’était pas majoritaire dans le pays. Depuis lors, Nazarbaïev a tenté de susciter le développement d’un sentiment national dans le pays, et beaucoup de Kazakhs sont revenus dans le pays, tandis que des Russes ou membres d’une autre nationalité sont repartis. Le sentiment national est un outil pour détourner l’attention des gens des problèmes sociaux et, en période de crise sociale aigüe, cela restera un des derniers recours du régime.

    Les Kazakhs sont favorisés pour postes dans services publics alors que, dans beaucoup d’entreprises, les Kazakhs ont des postes subalternes par rapport aux autres ethnies ou aux travailleurs d’origine étrangère. Les entreprises chinoises sont par exemple de plus en plus présentes dans le pays. Mais elles arrivent avec leurs propres travailleurs qualifiés, tandis que les travailleurs locaux n’ont que des postes subalternes, mangent dans une cantine différente,… Les travailleurs étrangers sont de façon générale mieux payés, d’autant plus que les attaques dans l’enseignement supérieur entraînent une pénurie de main d’œuvre qualifiée dans le pays, compensée par l’arrivée de techniciens étrangers. La ségrégation est réelle, fort pesante, et peut en dernier recours être utilisée par le régime pour détourner une contestation sociale en une contestation de type nationaliste.

    Il y a bien entendu également la question de la répression, particulièrement féroce. Nos camarades y font régulièrement face, comme en ont témoignés les nombreux appels à la solidarité que l’ont a pu voir sur le site du CIO (socialistworld.net) ou sur celui-ci. Il sera nécessaire pour le CIO de renforcer cette campagne de solidarité avec nos camarades kazakhs ainsi qu’avec les travailleurs en lutte dans ce pays, par exemple en organisant des protestations devant des sites ou des sièges d’entreprises occidentales qui profitent de la situation sociale du Kazakhstan pour augmenter leurs profits (GAP, Zara, Metro,…). C’est particulièrement vrai dans le cas de la Grande-Bretagne. En décembre dernier, une délégation officielle s’est rendue au Kazakhstan, et le Prince Andrew a lui-même traité avec les oligarques liés au régime. Des entreprises telles que British Gaz ont des intérêts dans le pays.

    Au Kazakhstan même, nous devons orienter nos efforts pour éviter qu’un changement de régime se résume à dégager Nazarbaïev. Un autre prétendant pourra essayer de se profiler pour sauver le régime capitaliste. Si Nazarbaïev est renversé, ou s’il décède et que sa succession n’est pas assurée (les rumeurs concernant l’état de santé du président sont nombreuses), l’impérialisme pourrait changer de tactique et peser de tout son poids pour hâter l’avènement au pouvoir d’un des partis d’opposition officiels, qui font tous partie de l’oligarchie qui détient l’économie entre ses mains. On assisterait alors à des privatisations massives dans les secteurs du pétrole et du gaz, ou une bonne partie de la production reste aux mains de l’Etat (et dans les mains de la famille du président dans les faits), d’où l’importance de revendications tells que le contrôle de la production par les travailleurs. Il est aussi possible que les explosions sociales se développent et se prolongent, et que le régime soit capable de gérer une transition post- Nazarbaïev, mais cela devra absolument être accompagné d’une répression féroce du mouvement des travailleurs.

    Là aussi, l’expérience révolutionnaire de Tunisie ou d’Egypte doit être regardée : il faut essayer de peser pour que la lutte ne soit pas simplement orientée vers le sommet de la pyramide, mais vers la pyramide elle-même, en amenant la question d’une société socialiste démocratique.

  • Ecole d’été du CIO – Joe Higgins : L’opposition à la dictature des marchés se développe

    Lors de l’école d’été du CIO qui s’est déroulé la semaine dernière, une discussion a été consacrée à la situation en Europe. En attendant un rapport de cette session plénière, voici ci-dessous l’intervention de notre camarade Joe Higgins, député du Socialist Party (CIO-Irlande) au Parlement irlandais.

    La crise du capitalisme européen est en préparation depuis des décennies et est le résultat de contradictions internes. Les nouvelles législations financières ont été mises en place dans la seconde moitié des années ’70, mais se sont renforcées après la crise de 1986. Dans les deux décennies qui ont suivi, la dérégulation et la mondialisation se sont extrêmement développées.

    En fait, il s’agissait d’une tentative de la bourgeoisie d’augmenter leurs profits avec des constructions financières puisque le profit dans la production n’était plus garanti de la même manière. En fait, ce processus avait déjà été expliqué par Marx. Cette orgie de spéculation est due au fait que les banques et les Hedges Funds essayaient de faire du profit sur la finance, le meilleur exemple étant les investissements dans les subprimes. La proportion dont le capital européen était devenu fictif est probablement le mieux illustrée par l’Irlande.

    Les banques irlandaises et du Royaume Uni ont investi 70 milliards d’euros vers l’Irlande ce qui, pour un pays de 4,5 millions d’habitants, était une spéculation insensée. Lorsque l’économie tournait encore, c’était surtout aux frais de la classe des travailleurs. Les prix des maisons ont explosé, les prêts hypothécaires sont passés de 20 à 40 ans,… A un certain moment, les prix de l’immobilier ont chuté, c’était le signal d’alarme pour les bourgeoisies européennes.

    La crise qui se développe en Espagne, au Portugal et en Grèce et une confirmation des perspectives précédentes du CIO. Nous avons toujours dit que c’était une folie économique d’imaginer que des économies aussi diverses que celle d’Irlande et d’Allemagne, par exemple, pouvaient être comprises dans un même espace monétaire.

    Maintenant, la réduction du taux pour les prêts accordés à l’Irlande, la Grèce,… est considérée comme une nouvelle extraordinaire. En Irlande: le taux passe de 5,5% à 3,5%, mais le montant des dettes reste le même. En bref, c’est un emplâtre sur une jambe de bois. Depuis deux semaines, lorsque la nouvelle a été annoncée, le Premier Ministre et le ministre des finances n’ont de cesse de parler de la ”grande nouvelle”. Dans une intervention au parlement irlandais, Joe Higgins les a comparés à des coqs qui crient à chaque bruit pendant la nuit, persuadés que le soleil se lève alors qu’il est encore minuit.

    Tout comme en Grèce, l’austérité et les coupes budgétaires ne résolvent rien, les problèmes continuent à croître. Le scandale autour de Murdoch a révélé aux masses les liens entre médias et politiciens. Mais en Europe, actuellement, la crise expose à des dizaines de millions de personnes la nature pourrie du monde de la finance et du capitalisme. En Grande Bretagne, les gens se demandent comment il est possible d’avoir accordé autant de pouvoir à l’empire Murdoch, sans le moindre contrôle. Au niveau économique, de plus en plus de gens vont également se poser cette question: comment est-il possible de vivre dans une telle dictature des marchés ?

    Partout, l’état d’esprit des masses est bien loin devant celui des dirigeants du mouvement ouvrier.

    Il y a un an, Joe Higgins, encore parlementaire européen à l’époque, avait relaté un meeting de Syriza où il était intervenu. La plupart des idées qu’il avait mise en avant – comme la nécessité d’organiser la résistance à l’échelle européenne avec par exemple une grève générale européenne de 24 heures, ou encore la nationalisation du secteur financier sous le contrôle démocratique de la population – étaient très bien passées. Aujourd’hui, l’approfondissement de la crise a rendu ces solutions encore plus concrètes aux yeux de beaucoup.

    L’establishment européen est responsable de la crise, nous ne devons rien attendre de lui. C’est à nous d’organiser la résistance au niveau européen, et cela va être de plus en plus accepté au fur et à mesure ou la classe des travailleurs sera affectée par la crise. Nous pouvons être confiants : nos analyses et nos idées correspondent de plus en plus à la conscience des masses.

  • Capitalisme en crise : Un monde en mutation

    Début avril s’est tenue la réunion annuelle du Bureau Européen du Comité pour une Internationale Ouvrière, dont le PSL est la section belge. Els Deschoemacker résume ici l’essentiel de la discussion qui y a pris place. Les thèses adoptées à cette réunion sont disponibles sur notre site (voir ici).

    Par Els Deschoemacker, article tiré de l’édition de mai de Lutte Socialiste

    Depuis le début de cette année, le capitalisme a subi de nombreuses secousses. Les masses tunisienne et égyptienne ont concrètement illustré qu’un mouvement révolutionnaire peut conduire à des changements réels tandis que le désastre nucléaire au Japon est l’énième exemple des conséquences de l’irresponsabilité d’un système capitaliste qui ne voit qu’à court terme. La maximalisation des profits a motivé la construction de centrales nucléaires là où elles n’auraient pas dû être implantées. La sécurité maximale était garantie, mais en mots uniquement. Dans les faits, toutes les règles et les conseils des spécialistes ont été bafoués ; les intérêts économiques et politiques immédiats de l’élite ont pesé bien plus lourd ! Les conséquences pour la population japonaise sont dramatiques.

    La conscience des travailleurs et des jeunes à travers le monde a été secouée, beaucoup de choses ont été clarifiées. Ces deux développements ont sans doute renforcé la colère concernant le fonctionnement de la société et nous ont enseigné d’importantes leçons sur ce qui est nécessaire afin d’aboutir à de véritables changements.

    L’impact des révolutions

    Une révolution a rarement eu un impact immédiat sur la volonté de lutte au niveau international au point de la révolution tunisienne ou égyptienne. La victoire, acquise par une ténacité et une volonté formidable de sacrifice des masses tunisiennes, a initié une vague qui continue à déferler sur les pays de la région. Le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord ne seront plus jamais comme avant. Même si la lutte n’est pas encore finie, même si la classe dominante fait tout son possible pour reconquérir le vide du pouvoir et même si les révolutions sont clairement menacées, les élites de la région doivent dorénavant tenir compte d’une population qui a déjà acquis sa première expérience de lutte révolutionnaire. Les salariés et les jeunes tunisiens ont mis en garde l’ancienne élite : ‘‘si vous voulez revenir, nous le pouvons aussi !’’ Ils ne sont pas prêts à perdre leurs droits récemment et chèrement acquis.

    Dans le monde entier, les régimes dictatoriaux ont muselé internet et ont censuré les nouvelles révolutionnaires afin d’éviter une révolte massive venant d’en bas. Les révolutions ont inspiré les travailleurs et les jeunes au-delà du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord. D’ores et déjà, nous protestons au Wisconsin ‘‘comme un Égyptien’’, nous crions en France ‘‘Sarkozy, dégage’’ ou nous menaçons de faire chuter l’élite en Grèce ‘‘comme Ben Ali’’.

    La nouvelle situation économique a causé la révolution

    Cette énergie a directement résulté de la crise économique auquel est confronté le capitalisme. Le chômage et les hausses des prix du pain et de la nourriture ont souvent été à l’origine de situations révolutionnaires. En Tunisie et en Égypte s’y est rajouté le ravage néolibéral de la société. Et l’eau a débordé du vase.

    Le capitalisme n’a pas de réponse face à cette crise, ni dans le monde néocolonial, ni ailleurs. Les stimuli précédents et les paquets de sauvetage qui ont sauvé les banques et les grandes entreprises ont bel et bien évité une dépression profonde comme celle des années trente, mais ils ont engendré de nouveaux problèmes. Une nouvelle crise a alors commencé: celle des dettes des gouvernements.

    Les premières victimes des montagnes de dettes trop élevées ont été les pays dits ‘périphériques’ en Europe, les maillons les plus faibles. Mais dans les pays industrialisés plus riches également, des dettes astronomiques se sont accumulées. Aux USA, moteur de l’économie mondiale, les dettes ont atteint les 100 % du PIB. Chaque jour, la dette augmente de quatre milliards de dollars ! La pression pour passer à des coupes budgétaires plus drastiques se fait aussi plus importante. Après l’offensive républicaine, un message très clair de l’agence de notation S&P a été adressé au gouvernement : commencez les coupes, sinon la note des USA sera abaissée.

    Un tel plan d’assainissement serait catastrophique pour la classe ouvrière américaine. La période des stimuli n’a déjà pas pu éviter que, pour la quatrième année consécutive, un million de personnes aient été expulsées de leurs propres maisons aux USA. Le pays compte aujourd’hui au moins 24 millions de chômeurs. Divers Etats sont au bord de la faillite et doivent sabrer dans leurs budgets en fermant des parcs, des écoles, des hôpitaux, des bibliothèques, en limitant les salaires et les droits syndicaux des travailleurs, etc.

    Le plan d’assainissement pour lequel l’opposition républicaine se bat réduirait à néant le peu de pouvoir d’achat encore présent dans l’économie et ferait déborder la faible croissance poussée par le gouvernement vers une nouvelle période de récession. Mais Obama et les Démocrates ne sont pas non plus vierges de tout péché dans les Etats locaux et dans les assainissements antisociaux au niveau local. Ils appellent eux aussi à ‘travailler dur’ et à l’instauration d’assainissements brutaux. La lutte des travailleurs du Wisconsin illustre toutefois que la lutte de classe est de retour aux USA. Une nouvelle période de radicalisation a commencé. Un élément de cette lutte contre les assainissements est le combat pour le lancement d’un mouvement politique pour et par les salariés et les jeunes, un mouvement totalement indépendant des deux grands partis du capitalisme. Ce sont des partis dont on sait qu’ils ne se distinguent que par le rythme des attaques qu’ils proposent.

    La politique des assainissements en Europe conduit à plus de dettes et de récession économique

    Après pas moins de quatre plans d’assainissement sur les finances publiques, on s’attend à ce que la dette du gouvernement grec (de 130% avant les plans) continue de grimper jusqu’à 160 % ! L’économie s’est rétrécie de 4,5 % en 2010 et presque tout le monde commence à reconnaître qu’une restructuration de la dette grecque est inévitable. Les perspectives de l’économie irlandaise ne sont pas meilleures. La crise bancaire s’étend, ce qui fait que les injections financières représentent déjà 50 % du PIB irlandais. La dette totale de l’Etat et des banques représente 122.000 euros par salarié. En 2013, l’Irlande paierait annuellement 10 milliards pour les intérêts sur sa dette, plus que ce que le pays consacre à l’enseignement ! Le Portugal aussi a été contraint de faire appel au fonds de sauvetage de la Banque Centrale Européenne et du Fonds Monétaire International. Il n’y a pas d’espoir que ces pays puissent encore rompre la spirale de la dette.

    Les critiques sur la politique d’assainissement se développent. Dans le quotidien flamand De Tijd (du 19 avril), il est fait référence à ce qui vit parmi la population grecque : ‘‘On est dans un cercle vicieux. Nous ne pouvons pas sortir de la crise avec une politique qui nous jette encore davantage dans la récession.’’ C’est un sentiment général qui revient tant en Grèce, qu’en Irlande ou au Portugal. Les politiciens ne peuvent plus descendre dans les rues sans être physiquement attaqués.

    Ni l’Union Européenne, ni le FMI n’arrivent à échapper à la colère du peuple. Ils sont rejetés, à raison, comme les chiens de garde des intérêts des banques allemandes et françaises. Les banques allemandes sont présentes dans les dettes irlandaise, grecque et portugaise à hauteur de 386 milliards d’euros. Pour l’ensemble des banques de la zone euro, ce montant s’élève à 560 milliards d’euros ! La crainte d’une nouvelle crise bancaire est très importante. Les plans de sauvetage servent uniquement à sauvegarder ces investissements et à faire payer la population locale.

    Même là où l’on parle d’un rétablissement économique après la crise (sur base des exportations notamment vers la Chine), les travailleurs ne sont pas à l’abri. Le redressement économique peut bien avoir conduit au retour des profits, des bonus et des dividendes record, les salariés n’en profitent pas. Ces derniers ne connaissent qu’attaques contre leurs salaires, leurs retraites et leurs soins de santé.

    Rompre avec le système et lutter pour le socialisme

    La majorité de la population nourrit une méfiance très profonde envers les partis bourgeois. Dans un sondage européen, seuls 6 % des sondés ont déclaré avoir confiance dans leur gouvernement, 46 % peu confiance et 32 % aucune confiance. Seuls 9 % trouvent que les politiciens sont honnêtes…

    Cela ne signifie pas encore que les illusions dans le système ont disparu. Lors de la manifestation du 26 mars à Londres, trois sentiments étaient présents. Une minorité importante était convaincue que la société actuelle ne fonctionne pas et est prête à considérer des solutions socialistes. Une autre partie voulait lutter contre toutes les mesures d’austérité, mais une grande partie trouvait aussi que les assainissements étaient quand même inévitables. Ils espèrent que les efforts d’aujourd’hui rétabliront finalement l’économie. Quand cet espoir s’évapora, nous serons confrontés à une situation explosive.

    La période qui est devant nous, sera marquée par des changements brusques. L’autre côté de la médaille, en revanche, c’est le danger de la contre-révolution, la réaction face à l’action. Si la gauche ne réussit pas à offrir une alternative progressiste et socialiste au vide que ce système pourri a créé, la droite et l’extrême-droite le feront avec une rhétorique populiste jouant sur l’égoïsme au détriment des plus faibles.

    Le retour aux recettes réformistes de l’état-providence n’offre pas d’issue. Cela n’était possible qu’avec une conjoncture exceptionnelle, pas dans une situation de crise capitaliste mondiale comme aujourd’hui. La crise systémique requiert une alternative qui propose de rompre avec ce système. En Irlande, la population s’est d’abord trouvée dans une situation de choc, un tremblement de terre politique a suivi. Mais le nouveau gouvernement est la copie de l’ancien et les illusions disparaîtront comme neige au soleil.

    Avec Joe Higgins au parlement, les véritables socialistes disposent d’une énorme plate-forme pour mener une opposition socialiste. Joe et le Socialist Party (notre section-sœur irlandaise) ont saisi cette position pour mettre sur pied une unité à gauche, l’United Left Alliance, qui compte désormais cinq parlementaires.

    Ils se rendent compte que la classe ouvrière n’aura aucun autre choix que de lutter. Avec l’ULA, ils veulent anticiper cela pour que les salariés irlandais puissent compter sur un instrument politique qui défende leurs revendications au Parlement et qui se serve de cette plate-forme pour populariser à son tour ces revendications.

  • [VIDEO] Paul Murphy s’en prend à Barroso, qui prétend “soutenir” l’Irlande

    La Commission européenne veut instaurer une législation qui assurerait que la population soit forcée de renflouer les banques et les spéculateurs. L’eurodéputé du CIO Paul Murphy, du Socialist Party (CIO-Irlande), a interpellé le président de la Commission européenne à ce sujet, sans toutefois que se dernier ne daigne répondre aux critiques…

    Paul Murphy, député européen

    Mon baptême du feu, mon tout premier discours au Parlement européen, s’est déroulé ce 5 avril. J’ai décidé d’utiliser l’opportunité de remettre en question la déclaration de Jose Manuel Barroso, le président de la Commission européenne, selon laquelle ‘‘L’Europe cherche à “soutenir” l’Irlande.’’ En dépit de cette affirmation, la Commission désire mettre en vigueur une législation qui assurerait que la population européenne soit forcée de soutenir et de renflouer les banques et les spéculateurs. Ces propositions signifieraient concrètement un état d’austérité permanent.

    La Commission espère introduire ce mécanisme d’austérité permanente via des modifications portées aux Traités européens, et espère que ces modifications pourront être effectuées sans qu’un référendum ne soit organisé. C’est une honte, et cela contredit totalement les affirmations du camp du ‘‘Oui’’ lors du débat autour du Traité de Lisbonne. Il est absolument impératif que la Gauche se batte pour un référendum autour de cet enjeu.

    Voici la vidéo de mon discours ; je posterai ces vidéos sur mon blog à l’avenir, de même que toute réponse que j’obtiendrai. Malheureusement, M. Barroso n’a pas daigné répondre à mon intervention.

    La traduction de cette prise de parole se trouve sous la vidéo


    Merci M. le Président.

    M. Barroso, le 19 janvier, en réponse à Joe Higgins, vous avez déclaré ici dans cette chambre que l’Europe essaie de soutenir l’Irlande. Avec l’abjecte capitulation du Fine Gael, du nouveau gouvernement Fine Gael-Labour face aux intérêts des spéculateurs, il est clair que ce n’est ni le Conseil ni la Commission qui accorde ce soutien, mais c’est la classe ouvrière en Irlande et en Europe qui se voit contrainte de soutenir les banques et spéculateurs européens en payant pour leurs pertes.

    Les propositions de gouvernance économique représentent une tentative de légaliser les coupes budgétaires et salariales. L’agenda d’austérité, les propositions d’amendes de centaines de milliers d’euros, sont conçues afin d’assurer que quelle que soit l’ampleur de l’opposition, les travailleurs payent pour la crise.

    Cette doctrine de choc à l’européenne sera facilitée par les modifications des traités, ce sur quoi l’establishment en Europe et en Irlande est déterminé à éviter un référendum. Le Socialist Party et la Gauche en Irlande vont exiger un référendum sur cette proposition d’austérité permanente.

    Merci.


  • [INTERVIEW] Paul Murphy, eurodéputé irlandais du CIO

    A l’occasion de l’entrée en fonction de Paul Murphy au Parlement Européen, en remplacement de Joe Higgins récemment élu au Parlement irlandais, voici une interview qu’il avait accordée à socialisme.be à la fin de la campagne électorale irlandaise, analysant la situation et le développement économique en Irlande ainsi que les résultats électoraux et les perspectives de lutte. Paul Murphy a également été l’organisateur national de cette campagne couronnée de succès.

    Interview réalisée par Navid (Bruxelles)

    Socialisme.be : Quelle était la situation économique en Irlande avant le début de la crise ?

    Paul Murphy : ‘‘L’économie connaissait une croissance, qui était toutefois construite sur une bulle spéculative insoutenable, sur le crédit et l’immobilier. Le prix de l’immobilier avait augmenté en Irlande plus rapidement que dans tout autre pays européen. Un travailleur sur huit travaillait dans l’industrie de la construction.

    ‘‘Tout cela n’a été possible que par le fait que le montant d’argent prêté aux gens ordinaires par les banques a augmenté plus rapidement que dans tout autre pays européen. Cette croissance économique était complètement insoutenable, et la faillite était inévitable.

    Socialisme.be : Comment l’Irlande est-elle passée du surnom de Tigre Celtique à celui de ‘‘Porc européen’’ (de l’acronyme anglais PIGS) ?

    PM : ‘‘Avec la faillite de la bulle immobilière, l’économie est entrée dans une importante spirale de décroissance, qui se poursuit. Le chômage a massivement augmenté, pour frapper aujourd’hui 450.000 personnes dans un pays qui compte 4,5 millions d’habitants. Quant aux politiques d’austérité du gouvernement, qui a appliqué 9 milliards d’euros de coupes budgétaires en deux ans, cela n’a fait qu’approfondir la crise.

    ‘‘Certains interprètent le fait que les travailleurs payent maintenant le prix de la crise n’est que la garantie des dettes bancaires privées. Les banques ne pouvaient pas récupérer la gigantesque somme d’argent prêtée. Au lieu de laisser les spéculateurs et les Hedge Funds subir ces pertes, l’Etat est intervenu et a garantit toutes ces dettes, ce qui signifie que ce sont les travailleurs qui doivent payer le prix pour le casino des spéculateurs.

    ‘‘La dette nationale est maintenant massive – si grande que dans quelques années, la taille de la dette sera plus grande que le Produit National Brut et que les intérêts à verser seront de 10 milliards d’euros par an !

    Socialisme.be : Pourquoi le gouvernement a-t-il chuté ?

    PM : ‘‘Le gouvernement était haït depuis le début de la crise. Pour la population, il était responsable de la politique qui a conduit à la crise. Sa réponse à la crise, les garanties des dettes bancaires et les attaques massives contre les travailleurs (coupes budgétaires, augmentation de taxes pour les travailleurs à bas salaires,…) ont été très correctement considérées par la population comme une sanction contre les travailleurs, alors que les banques ont été sauvées. La pression sur le gouvernement est devenue énorme, avec aussi quelques manifestations importantes de plus de 100.000 personnes. Mais les directions syndicales ont trahit ce mouvement.

    ‘‘Cette opposition massive a néanmoins créé une pression sérieuse sur le gouvernement, y compris quelques tensions entre les deux partis au gouvernement – le Fianna Faìl (les conservateurs) et le Green Party (les verts), et ont rendu très probable le fait que des élections anticipées allaient avoir lieu. L’intervention de l’Union Européenne et du Fonds Monétaire International a miné le soutien au gouvernement et, à la fin, une goutte d’eau a fait déborder le vase : les révélations concernant les étroits rapports entretenus entre le Teosach (le premier ministre) et de vieux banquiers qui avaient été sauvés. En conséquence, le gouvernement est tombé avec le départ du Green Party.

    Socialisme.be : Quel était le sentiment de la population à propos de la ces élections ?

    PM : ‘‘Ces élections étaient considérées par quasiment tout le monde comme une opportunité de sanctionner le Fianna Faìl et le Green Party. Au final, cela a été assez dramatique pour eux, les verts ont complètement été éjectés du Parlement et le principal parti du capitalisme Irlandais s’est effondré en passant de 78 sièges à 17 sièges.

    Socialisme.be : Quelles sont les différentes possibilités d’alternative et quels sont tes sentiments à leur propos ?

    PM : ‘‘La majorité des gens ne ressentent probablement pas qu’il existe une quelconque alternative pour le moment. Un climat de crainte a été crée par les partis de l’establishment et les médias et pour cette raison, la plupart des personnes ont été effrayées à l’idée qu’il n’y avait aucune possibilité de casser les projets de l’UE et du FMI et de ne pas payer la dette. Toutefois, cela va changer avec les attaques de du nouveau gouvernement et les luttes qui vont se développer en opposition. La recherche d’une alternative deviendra encore plus répandue.

    ‘‘Notre alternative est d’argumenter que les plans de l’UE et du FMI doivent être cassés, que nous devons refuser de payer les dettes des spéculateurs et qu’il faut défendre un programme réellement socialiste, avec un investissement massif de l’Etat dans la créations de centaines de milliers d’emplois dans les services publics et pour en finir avec la crise du chômage.

    Socialsime.be : Qu’est-ce que la ULA, et que proposez-vous ?

    PM : ‘‘La United Left Alliance est une alliance constituée du Socialist Party (parti-frère du PSL en Irlande), du Socialist Workers Party, du Tipperary Workers & Unemployed Action Group ainsi que d’un certain nombre d’indépendants de gauche et de socialistes. Cette alliance est le résultat concret d’une initiative prise par le Socialist Party afin de relancer les discussions entre ces groupes. Pour le moment, il s’agit d’une alliance électorale, mais nous voulons le développer en un parti de masse des travailleurs, des chômeurs et des jeunes.

    Socialisme.be : En quoi la ULA est-elle un élément important, tenant compte du système électoral particulier en Irlande (où l’on vote directement pour des personnalités et pas pour un parti) ?

    PM : ‘‘C’est important, car cela représente une réponse de la gauche face à l’énorme crise qui existe en Irlande. Pour cette raison, la ULA a été accueillie par beaucoup de gens comme un développement majeur. Nous avons reçu beaucoup de couverture dans les médias, ce qui a permis de nous présenter comme une véritable alternative au consensus néolibéral de tous les partis de l’establishment. Cela signifie aussi que nous sommes capables d’argumente au porte-à-porte que nos élus ne seront pas isolés, mais feront partie d’un groupe de députés véritablement de gauche.

    Socialisme.be : Que penses-tu du nouveau gouvernement ?

    PM : ‘‘Le prochain gouvernement sera une coalition du Fine Gael (chrétiens-démocrates, libéraux) et du Labour (travaillistes, sociaux-démocrates). Leur programme pour le gouvernement est la poursuite de la même politique : faire payer la crise aux travailleurs.

    ‘‘Par exemple, ils ont l’intention de supprimer 25.000 emplois supplémentaires dans les services publics, de privatiser des avoirs de l’Etat pour une valeur de 2 milliards de dollars et d’appliquer une taxe sur l’eau et sur les biens immobiliers. Malgré leur grande majorité (dans les résultats électoraux, ndlt), les gens n’ont d’illusions dans aucun de ces partis, et il est clair qu’avec la continuation de la crise, ces partis seront haïs en peu de temps.

    Socialisme.be : Que penses-tu du ‘Sinn Fein’, le parti nationaliste ‘‘de gauche’’ lié à l’IRA ?

    PM : ‘‘Le Sinn Fein a réalisé une percée électorale importante cette fois-ci – ils sont passés de 5 élus à 14, sur base de leur rhétorique ‘‘de gauche’’ adoptée ces dernières années. Le Sinn Fein a critiqué les ‘‘garanties de banques’’ et a appellé à ne pas payer, et s’est opposé aux attaques contre les travailleurs.

    ‘‘Toutefois, le Sinn Fein n’est pas un parti de gauche ou un parti des travailleurs crédible. Dans le Nord (en Irlande du Nord, ndlt), il fait partie de la coalition gouvernementale qui est là-bas en train d’appliquer 4 milliards de Livres d’assainissements pour cette année. Que des luttes se développent au Sud (en République d’Irlande, ndlt) et leur orientation ne sera pas d’organiser de grandes campagnes, mais uniquement de promouvoir leur propre parti. Une des tâches de la ULA doit être d’exposer les contradiction du Sinn Fein et d’aider à organiser ces campagnes.

    Socialisme.be : Maintenant que la ULA a 5 élus (dont deux du Socialist Party), quels sont vos projets ?

    PM : ‘‘Nous n’allons pas rester assis et nous plaindre au Dail (le Parlement irlandais), nous voulons organiser la population pour combattre les futurs plans d’austérité.

    ‘‘La ULA (et plus particulièrement le Socialist Party) ont déjà en un impact important au Daìl. Joe Higgins a déjà pu bénéficier d’une importante couverture médiatique pour son premier discours à son arrivée au Daìl, discours dans lequel il attaquait déjà le programme du nouveau gouvernement.

    ‘‘Cependant, il ne s’agit pas pour nous de réaliser de belles prouesses oratoires au Parlement, notre objectif principal est d’utiliser cette position au Daìl afin d’organiser des campagnes d’opposition massives contre les attaques. Nous sommes particulièrement actifs actuellement dans la préparation de la lutte contre les suppressions d’emploi dans le secteur public et contre l’instauration d’une double taxe sur l’eau et sur la propriété.

  • Irlande : Retour sur les dernières élections générales

    Après 14 années de politique néolibérale au profit des banquiers et des gros actionnaires menée par le Fianna Faìl (conservateurs), et plus récemment aidé par le Green Party ; le gouvernement haï de tous est tombé, après avoir fait payé le sauvetage des banques aux travailleurs et leurs familles et accepté l’intervention de l’Union Européenne et du Fonds Monétaire International ; poussé par ‘‘l’opposition’’, mais aussi (et surtout) par des manifestations massives.

    Par Navid (Bruxelles)

    Un scrutin-sanction

    Ces élections étaient considérées comme l’occasion de sanctionner les partis du gouvernement. Ainsi, le Fianna Faìl a-t-il connu une défaite historique en passant de 78 sièges à 17 sièges (42% à 17%) !!! Les verts, quant à eux, ont été complètement rayés en perdant les 6 sièges qu’ils avaient récemment acquis !

    Mais là où un quotidien bourgeois belge (La Libre, pour ne pas le citer…) analyse ce résultat de la manière qui suit : ‘‘l’appel à l’aide de l’étranger a meurtri la fierté nationale. Le scrutin de vendredi s’est ainsi transformé en référendum sur le plan.’’ (LaLibre.be – 27/02/2011), il faut aussi y voir un aspect de classe.

    Le gouvernement sortant n’a pas ‘‘meurtri la fierté nationale’’, il a plongé le pays dans une crise terrible ; transformant ce qui, a une époque pas si lointaine, était encore le ‘‘Tigre Celtique’’ (une des plus fortes économies européennes) en ‘‘Porc européen’’ (du nom ‘P.I.G.S.’ l’acronyme anglais des pays les plus touchés par la crise – Portugal, Italie, Irlande, Grèce, Espagne – et qui forme le mot ‘porc’ en anglais…) !

    C’est le gouvernement qui, en se faisant le servile larbin de la bourgeoisie, a fait chuter les salaires dans les service publiques de 20%, diminuer le salaire minimum de 11%, fait chuter le niveau de vie de 25%, pousse plus de 1,500 jeunes irlandais par semaine à quitter le pays en quête d’un job en plus de toutes les attaques et les coupes dans la sécurité sociale, l’enseignement, etc. … ! Ce scrutin a en fait été une sanction de toute la politique néolibérale, du système capitaliste !

    Quelle opposition ?

    Cependant, ce n’est pas spécialement ce qui apparaît dans les résultats… Ceux qui ont été ‘‘l’opposition’’ au sein du dernier gouvernement et qui ont remporté les élections sont loin de représenter une alternative réelle. Le Fine Gael (chrétiens-démocrates, libéraux) et le Labour Party (travaillistes, sociaux-démocrates) ont maintes fois prouvé dans quel camp ils se trouvaient : pas dans celui des travailleurs (le Fine Gael et le Labour étaient favorables au traité antisocial de Lisbonne). Aussi, ces deux partis sont fondamentalement d’accord avec le principe de faire payer la crise aux travailleurs et d’appliquer des coupes budgétaires à hauteur de 6 milliards d’euros. Même si le Labour parle ‘‘d’ajustements budgétaires’’, un peu à la manière de notre Elio Di Rupo qui préfère parler de ‘‘rigueur’’ au lieu ‘‘d’austérité’’…

    Quant au Sinn Fein, le parti nationaliste ‘‘de gauche’’ qui, avec sa rhétorique anti-establishment et anti-austérité, est passé de 5 à 14 sièges, il n’en reste pas moins le parti au gouvernement en Irlande du Nord et, là, c’est lui qui applique consciemment l’austérité… Alors, une opposition crédible ?

    United Left Alliance

    Mais face à tout cela, il y a la ULA. La United Left Alliance – une alliance de gauche radicale formée par le Socialist Party (parti-frère du PSL en République irlandaise), la People Before Profit Alliance et d’autres personnalités indépendantes – s’est présentée à ces élections en tant qu’alternative aux coupes budgétaires, à l’austérité et à la crise. Avec un programme défendant un investissement massif dans la création d’emplois, de meilleurs services publics, contre le payement des dettes par les travailleurs et contre les prétendus plans de ‘‘sauvetages’’ de l’Union Européenne et du FMI !

    Après une campagne intense, la liste unitaire de gauche a obtenu un excellent résultat, et le Parlement irlandais dispose maintenant de cinq élus qui défendront une réelle opposition de gauche à la politique néolibérale. Les élus de la ULA se sont engagés à vivre avec le salaire moyen d’un travailleur et à organiser la lutte, non seulement dans le Parlement, mais surtout dans la rue !

    Ainsi, Joe Higgins, élu au Parlement irlandais et qui vient maintenant de faire son entrée au Parlement irlandais, avait-il déclaré : “Nous allons représenter une réelle opposition et une réelle alternative. Et cela, nous n’allons pas seulement le faire au Parlement, mais également à l’extérieur. Des mouvements de la population vont arriver, des mouvements des travailleurs, des mouvements dans les communautés contre les attaques à venir. Le nouveau gouvernement va mener ces attaques contre la population travailleuse pour leur faire supporter les conséquences de la crise.”

    Les cinq sièges gagnés par la ULA (2 pour le Socialist Party, 2 pour la campagne People Before Profit et 1 indépendant) vont permettre d’utiliser le Parlement irlandais comme plateforme pour organiser les masses contre les futurs plans d’austérité !

    Joe Higgins (SP, Dublin, élu avec 19,0%), Clare Daly (SP, Dublin, élue avec 15,2%), Richard Boyd-Barret (PBP, Dublin, élu avec 10,9%), Joan Collins (PBP, Dublin, élue avec 12,9%) et Seamus Healy (Workers and Unemployed Action Group, Tipperary, élu avec 21,2%) seront de réels combattants pour les droits des travailleurs et de la jeunesse, des militants qui défendront la cause de gens ordinaires.

  • Paul Murphy remplace Joe Higgins comme eurodéputé du Socialist Party

    Hier, lors d’une conférence de presse, il a été annoncé que celui qui remplacerait Joe au Parlement Européen serait Paul Murphy. Malgré son jeune âge (27 ans), Paul est déjà militant de longue date du Socialist Party. Quant à Joe, il siégera maintenant avec Clare Daly au Parlement Irlandais, où ces deux militants du Socialist Party ont récemment été élus, de même que trois autres camarades de la liste unitaire ULA (United Left Alliance).

    Paul Murphy

    ‘‘Remplacer Joe Higgins à l’Europe est un défi intimidant. J’ai suivi de très près le travail de pionnier qu’il a effectué en défendant une opposition réellement socialiste au Parlement Européen tout autant que l’aide vitale qu’il a donné à différentes campagnes en Irlande et à travers l’Europe.

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    Joe Higgins à propos de Paul Murphy

    “Je suis très heureux de voir Paul Murphy prendre le siège d’eurodéputé pour Dublin au nom du Socialist Party et de la United Left Alliance. Paul va continuer à représenter le programme politique et l’alternative socialiste que le Socialist Party a défendus devant le peuple de Dublin lors des élections européennes de 2009. Grâce à son expérience acquise lors de différentes campagnes ainsi qu’en travaillant avec moi au Parlement Européen, je suis certain qu’il sera tout à fait capable de défendre une réelle opposition au consensus néolibéral qui règne au Parlement européen. Il travaillera en collaboration étroite avec moi-même ainsi qu’avec le Socialist Party et la United Left Alliance afin de donner une réelle représentation politique aux travailleurs et aux jeunes tout en les aidant à organiser des campagnes de masse pour contrer les attaques à venir du gouvernement Fine Gael / Labour.”

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    ‘‘Toutefois, pour moi, il s’agit de la suite et de l’extension des campagne et de l’activisme qui ont été miens depuis dix ans. Sur ce laps de temps, j’ai eu l’honneur de lutter aux côtés des travailleurs – en tant qu’organisateur de campagnes et militant – contre la bin tax (une taxe sur les sacs poubelles), en construisant deux campagnes majeures contre les droits d’inscription dans l’enseignement supérieur, en organisant la grève de travailleurs turcs de Gama en Irlande (qui recevaient des salaires de misère), en militant contre la mainmise de Shell sur notre pétrole et notre gaz et contre la construction d’une raffinerie en mer à la sécurité plus qu’incertaine près de Rossport, etc. En plus de cela, j’ai gagné une grande expérience en travaillant auprès de Joe au Parlement Européen en tant qu’attaché parlementaire ces deux dernières années.

    ‘‘Je vais m’efforcer de poursuivre le travail que Joe a entamé contre la politique de droite de l’Union Européenne, contre le consensus néolibéral qui règne au Parlement Européen et contre Mr. Barosso et les diktats de l’Union Européenne et du Fonds Monétaire International qui s’en prennent aux travailleurs d’Irlande pour leur faire payer la crise des spéculateurs et des banquiers.

    ‘‘Même si cela a très peu été relayé dans les médias en Irlande, Joe a régulièrement fait des interventions dans la Commission du commerce international du Parlement Européen. Je vais poursuivre ce travail en exposant comme il l’a fait la nature prédatrice de la politique commerciale de l’Union Européenne, faite d’exploitation des gens des pays sous-développés au bénéfice des multinationales européennes.

    ‘‘Cependant, la tâche ne sera pas seulement d’assister à des réunions à Bruxelles ou Strasbourg. Je vais utiliser cette position pour aider au développement de campagnes en Irlande pour construire l’opposition aux attaques prévues par le gouvernement Fine Gael / Labour.

    ”Le thème le plus critique à l’heure actuelle pour les jeunes et les travailleurs est le chômage et l’immigration forcée. A Dublin, nous avons le plus haut taux de chômage chez les jeunes en Europe : 24,2%. Des dizaines de milliers de jeunes sont forcés d’émigrer ailleurs pour rechercher du travail. Il nous faut une campagne de grande ampleur pour des investissements publics afin de créer de l’emploi et reployer l’économie. J’utiliserai ma position pour assister les chômeurs, les travailleurs et les jeunes dans le développement d’une telle campagne.

    ”Je travaillerai bien entendu en étroite collaboration avec les deux députés irlandais du Socialist Party ainsi qu’avec les trios autres élus de la United Lef Alliance. Et évidemment, comme tous les représentants du Socialist Party public, je ne vais garder comme salaire que le salaire moyen d’un travailleur, le reste de mon salaire de député européen sera donné à différents groupes de travailleurs, à différentes campagnes et à la lutte pour un changement socialiste de société.

  • Première réunion du nouveau Parlement irlandais: L’opposition de gauche se fait entendre

    Les cinq élus de la United Left Alliance, dont les deux membres de notre parti-frère irlandais le Socialist Party, ont fait leur entrée au Parlement à la suite d’une manifestation tenue jusqu’aux portes du bâtiment. La United Left Alliance a de suite rendu clair comme de l’eau de roche qu’elle va constituer une opposition active et combative. Joe Higgins, du Socialist Party, a déclaré que le nouveau gouvernement a le même “programme réactionnaire que l’ancien”, composé d’un “cocktail toxique d’austérité” venu du Fonds Monétaire International et de l’Union Européenne. Il a aussi dénoncé le Labour, les sociaux-démocrates qui forment la nouvelle coalition avec le Fine Gael (les chrétiens-démocrates).

    Au Parlement, comme il fallait s’y attendre, le nouveau gouvernement a obtenu une majorité. Mais il aura fort à faire avec une opposition de gauche, tant à l’extérieur qu’à l’intérieur du gouvernement. Joe Higgins a été choisi pour diriger une fraction parlementaire technique, dans laquelle se trouve entre autres la United Left Alliance. La constitution de cette fraction technique permettra aux élus de gauche d’avoir plus de temps de parole.

    Dans son allocution d’ouverture, Joe Higgins a de suite déclaré qu’il va lutter contre le nouveau gouvernement. “La première phrase du programme du gouvernement déclare qu’il y a eut une révolution démocratique en Irlande ce 25 février [date des élections, NDT]. Le dictionnaire définit une révolution comme le renversement d’un gouvernement ou d’un ordre social au profit d’un nouveau système. Si c’est cela une révolution, le programme du gouvernement est une trahison grotesque, car il s’agit du même programme réactionnaire de l’ancien ordre, quasiment à la lettre près.”

    Le précédent gouvernement a été sanctionné car il avait “placé en otage des spéculateurs et des banquiers toute une génération de jeunes travailleurs avec des hypothèques et des dettes monstrueuses.” Maintenant, la population doit payer le prix du sauvetage des banques avec des “coupes drastiques dans le niveau de vie” et “un cocktail toxique d’austérité.” Joe a conclu : “Une voix pour le nouveau gouvernement, ce n’est pas une voix pour la révolution et le changement, mais pour la contre-révolution et la continuité.”

    Clare Daly, second élu du Socialist Paty sur les listes de la United Left Alliance, a prévenu le gouvernement que la politique d’austérité rencontrera la résistance, dans les quartiers et dans les entreprises. Le novueau gouvernement sert uniquement les intérêts des grandes banques et des super-riches. Cela se heurtera rapidement à une opposition active, et Clare a assuré que le Socialist Party et la United Left Alliance y joueront un rôle.

  • Irlande: L’opposition de gauche au Parlement

    Le PSL félicite chaleureusement la liste unitaire irlandaise United Left Alliance pour ses excellents résultats, cinq de ses candidats ayant été élus dont deux membres du Socialist Party : Joe Higgins et Clare Daly. Joe siègera au Parlement irlandais et sera remplacé au Parlement Européen. Le nouveau gouvernement aura à faire avec une forte opposition de gauche.

    Les chrétiens-démocrates du Fine Gael ont remporté les élections avec 36% des voix, ils devront constituer une coalition avec les autres vainqueurs : les sociaux-démocrates du Parti Travailliste. Bien qu’ils prétendent être différents de la précédente coalition gouvernemantale, ils sont en fait partisans d’une politique d’austérité identique. Cette politique a conduit les conservateurs du Fianna Fail à connaître une défaite historique. Alors que ce parti connaissait encore un score de 40% aux dernières élections, ils n’ont ici reçu que 17% des voix. Le petit parti ‘écologiste’ qui était sont partenaire de coalition est plus que probablement éjecté du Parlement.

    A la gauche, la liste unitaire United Left Alliance a obtenu un excellent résultat. Les cinq sièges sont ceux de Joe Higgins (Dublin West), Clare Daly (Dublin North), Joan Burton (Dublin South Central), Seamus Healy (Tipperary) et Richard Boyd Barret (Dun Laoghaire).

    Joe Higgins a déclaré dans les médias: “Nous allons représenter une réelle opposition et une réelle alternative. Et cela, nous n’allons pas seulement le faire au Parlement, mais également à l’extérieur. Des mouvements de la population vont arriver, des mouvements des travailleurs, des mouvements dans les communautés contre les attaques à venir. Le nouveau gouvernement va mener ces attaques contre la population travailleuse pour leur faire supporter les conséquences de la crise.”

    Le score élevé obtenu par la gauche radicale pose la question d’une organisation plus large. Joe Higgins explique: “Beaucoup de discussions doivent avoir lieu, mais le Socialist Party part du principe qu’il existe un énorme vide à gauche. Il est nécessaire d’avoir un nouveau mouvement pour représenter la classe ouvrière dans sa signification la plus large: les travailleurs des secteurs privé et public, les pensionnés et les jeunes. Avec nos collègues de l’United Left Alliance et d’autres, nous allons entammer la discussion concernant ce nouveau mouvement.”

    Voici ci-dessous les résultats des élus de l’United Left Alliance:

    • Dublin West. Joe Higgins (Socialist Party): 19,0%
    • Dublin North. Clare Daly (Socialist Party): 15,2%
    • Dublin South Central. Joan Collins (People Before Profit): 12,9%
    • Tipperary South. Séamus Healy (Workers and Unemployed Action Group): 21,2%
    • Dún Laoghaire. Richard Boyd Barret (People Before Profit): 10,9%

    Quelques autres excellents résultats ont aussi été obtenus par le Socialist Party à Cork North Central, où Mick Barry a eu 9,2% ainsi qu’à Dublin South West, où Mick Murphy a eu 5,2%. Tous ensemble, les candidats de l’United Left Alliance ont obtenu 57.000 voix, soit 2,6% de toutes les voix (mais l’ULA ne s’est pas présentée dans tous les districts électoraux).


    L’expérience de l’United Left Alliance à ”Socialisme 2011”

    Venez écouter de vous-même comment cette campagne électorale s’est développée en Irlande et ce que signifie la crise capitaliste pour la population. A Socialisme 2011, nous aurons un orateur du Socialist Party irlandais. Matt Waine est conseiller communal à Dublin West, et parlera notamment au meeting central de Socialisme 2011 le samedi 12 mars.

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