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  • A quoi ressemblera le monde d’après ? Une stratégie de sortie du capitalisme s’impose !

    La crise du coronavirus a porté au paroxysme les multiples problèmes auxquels se heurte le capitalisme. L’économie mondiale déjà vacillante a plongé dans une crise qui ne peut être comparée qu’à la Grande Dépression des années ’30. A la mi-mai, 36 millions d’emplois avaient déjà été perdus aux États-Unis et l’on s’attendait à un chiffre de 59 millions pour l’Europe. Comment sortir au plus vite du confinement ? La question est posée par les actionnaires, mais aussi par de nombreuses travailleuses et travailleurs qui craignent pour leur emploi, leur avenir et leur santé.

    Par Nicolas Croes

    Leur déconfinement : chômage de masse et danger d’une seconde vague

    En Belgique, le mois de mai a été marqué par l’annonce du crash social chez Brussels Airlines, où 1.000 emplois sont menacés. Deux semaines plus tôt, un sondage du groupe de services en ressources humaines Acerta indiquait que 18% des travailleurs du pays craignent de perdre leur travail en raison de la crise actuelle. Le 18 mai, une étude de l’Economic Risk Management Group (ERMG) est venue le confirmer en révélant que les entreprises envisagent de licencier au moins un chômeur temporaire sur cinq. Concrètement, cela signifie que jusqu’à 180.000 personnes sont menacées de perdre leur emploi prochainement dans notre pays. A côté de cela, un gigantesque nombre de faillites est attendu, en particulier dans l’Horeca (jusqu’à 20%) et dans le secteur des arts et du spectacle (28%).

    La Banque nationale et le Bureau du Plan envisageaient en avril une contraction du Produit intérieur brut (PIB) belge de 8% pour l’année 2020. Un mois plus tard, la banque BNP Paribas Fortis révisait ses propres prévisions à la baisse en expliquant que le PIB du pays devrait s’effondrer de 11,1% en 2020 (contre 7,1% selon sa précédente estimation), tandis que l’hypothétique rebond en 2021 ne serait selon elle que de 4,3% au lieu des 7,6% qu’elle envisageait dans un premier temps.

    Au même moment, alors que les différents gouvernements en Europe avaient commencé à enclencher leurs plans de déconfinement, le directeur Europe de l’Organisation mondiale de la santé (OMS) Hans Klugge avertissait : ‘‘L’Europe doit se préparer pour une seconde vague mortelle du coronavirus’’ dans le courant de l’année. Il soulignait que l’affaiblissement de l’épidémie en Europe ne veut en aucun cas dire qu’elle touche à sa fin. Pour Emmanuel André, ex-porte-parole interfédéral de la lutte contre le covid-19, la politique d’austérité est coupable : ‘‘Cela fait des années que la Belgique fait des économies sur le contrôle et la prévention en matière de santé. Nous avons vite été dépassés par l’épidémie, parce qu’on avait investi trop peu en personnel et en ressources de prévention.’’ Il affirme que les pénuries accumulées ont nécessité des mesures drastiques telles que le confinement : ‘‘Si tout avait été en place dès le début, si on avait eu assez de tests, de masques, on n’aurait peut-être pas dû imposer de lockdown…’’

    Les recommandations de l’OMS ignorées par souci de rentabilité des entreprises et par aveuglement budgétaire n’ont pas manqué par le passé. Notamment concernant le danger d’une éventuelle pandémie mondiale. Rappelons qu’entre 2011 et 2018, la Commission européenne a recommandé à 63 reprises aux États membres de l’UE de privatiser certains pans du secteur de la santé ou de réduire les dépenses publiques en matière de santé. Et la manière dont les autorités des différents pays ont jusqu’ici géré la situation ne va pas non plus rassurer grand monde. Pour disposer d’une réponse globale aux crises sanitaire, économique et écologique, il faut nous débarrasser des œillères de la course au profit à court terme et de l’économie de la concurrence acharnée.

    5 propositions pour une stratégie de déconfinement

    1. Sans sécurité, pas question de travailler !

    La stratégie de déconfinement, en Belgique et ailleurs, se résume à un coup de dés pour remettre tout le monde au travail en comptant sur l’effet de l’été et l’arrivée rapide d’un vaccin sur le marché. A ce titre, les travailleuses et travailleurs des transports en commun bruxellois STIB/MIVB ont montré la voie en arrêtant de travailler en faisant usage du droit de retrait en considérant que les conditions n’étaient pas remplies pour que leur travail puisse se faire en toute sécurité. Ils ont raison : sans sécurité, pas question de travailler !

    Selon la ‘‘grande enquête Corona’’ de l’Université d’Anvers, plus de la moitié des personnes ayant contracté le Covid-19 ont vraisemblablement été contaminées au travail. Cela ne fait que confirmer les chiffres des contrôles menés par l’Inspection du travail entre le 23 mars et le 30 avril : dans 75% des cas, les règles de précaution étaient enfreintes.

    Puisque phases de déconfinement il y a, il doit en aller de même pour l’organisation des travailleurs. Personne n’est plus apte qu’eux à définir ce qui est nécessaire pour assurer la sécurité sur le lieu de travail. Les choses ne sont pas différentes en termes de menace de fermeture d’entreprises et de licenciements collectifs. Les organisations syndicales ne doivent pas laisser l’initiative aux autorités et aux actionnaires : des comités anti-crise doivent être constitués de toute urgence autour des délégations syndicales et des Comités pour la prévention et la protection au travail (CPPT) pour élaborer un cahier de revendication offensif ainsi que pour définir les méthodes d’action qui s’imposent, notamment l’organisation du contrôle de la sécurité sur le lieu de travail.

    2. Des masques et des vaccins gratuits & sauver l’emploi, pas les profits !

    Aucun lieu de travail n’aurait dû être rouvert sans assurer un approvisionnement suffisant de masques ainsi que des tests de dépistage. En France, fin mars, des associations de soignants ont exigé la ‘‘réquisition des moyens de production’’ de médicaments et matériel. De fait, sans remettre en cause le bien-fondé de la propriété privée des moyens de production, nous serons toujours confrontés aux étroites limites du marché et de la course aux profits.

    La même question est posée de manière très crue concernant le vaccin à venir. Pour Yves Van Laethem, président de la section ‘‘vaccin’’ du Conseil supérieur de la santé, ‘‘On avance de manière abstraite puisque personne n’a encore de données sur le premier vaccin qui va sortir, ses caractéristiques, etc. Par contre, ce qui est certain, c’est qu’il n’y en aura pas pour tout le monde’’. Ce constat est tout simplement scandaleux ! A l’Assemblée mondiale de la santé qui a eu lieu à la mi-mai, le CNCD-11.11.11 a défendu à juste titre que le vaccin ‘‘puisse être placé dans le domaine public et qu’il ne puisse pas être accaparé ni par un État puissant, ni par une grande entreprise.’’ Y parvenir exigera de construire une solide relation de force.

    La prise sous contrôle public s’impose également concernant les pertes d’emploi. Une des revendications centrales des luttes à venir doit être l’expropriation et la nationalisation sous contrôle démocratique des travailleuses et des travailleurs des entreprises qui menacent de délocaliser, qui procèdent à des licenciements collectifs ou qui sont nécessaire pour répondre correctement à la crise sanitaire. S’il est question de rachat ou d’indemnité, cela ne doit être que sur base de besoins prouvés : ce sont les travailleurs qui ont besoin de la solidarité de la collectivité, pas les capitalistes qui planquent leur argent dans des paradis fiscaux.

    3. Contre le chômage et la charge de travail insoutenable : la réduction collective du temps de travail

    Le prétexte de la crise est partout utilisé pour revenir sur les conquêtes sociales du mouvement ouvrier. En Belgique, le principe du repos dominical a été attaqué dans les supermarchés. Mais si l’on veut s’en prendre au chômage et que tout le monde travaille, il ne faut pas augmenter la durée du temps de travail, il faut au contraire la diminuer. Avant la crise, FGTB et CSC ont chacun défendu le principe de la réduction collective du temps de travail sans perte de salaire et avec embauches compensatoires et la semaine des 30 heures. Il est temps de sortir des campagnes de sensibilisation et de passer à l’offensive !

    Cette vieille revendication du mouvement ouvrier s’impose non seulement concernant le chômage, mais aussi face à la crise sanitaire. Combien de parents ne sont-ils pas sur les genoux aujourd’hui après avoir dû gérer leurs enfants et le télétravail ?

    4. Un plan radical d’investissements publics dans les soins de santé, l’enseignement, les transports en commun,…

    Les enjeux titanesques de la crise historique actuelle ne peuvent être laissés à l’arbitraire des capitalistes et de leur personnel politique. Nous devons saisir les richesses des banques et les utiliser dans le cadre d’un plan d’investissements massifs dans les soins de santé, dans l’enseignement, dans les transports en commun,… L’épargne pourrait ainsi être mobilisée pour répondre aux besoins sociaux, y compris en terme de développement du secteur culturel et de celui des loisirs.

    La revendication d’une ‘‘taxe des millionnaires’’ était déjà très populaire avant la crise. A l’occasion du Premier mai, le PTB en a proposé une nouvelle version sous la forme d’une ‘‘taxe corona’’ de 5% sur toutes les fortunes dépassant les 3 millions d’euros, soit 2% de la population belge. Le PSL soutient la lutte pour une fiscalité plus équitable mais prévient d’emblée : les capitalistes résisteront et s’organiseront, au besoin avec une fuite de capitaux (pour cela, les frontières ne seront pas fermées). D’autre part, cette taxe devrait rapporter 15 milliards d’euros, ce qui est très insuffisant pour répondre à la hauteur du défi. C’est pourquoi cette mesure doit à notre avis être immédiatement couplée à la nationalisation de la totalité du système bancaire ainsi qu’au non-paiement de la dette publique.

    Aucune réponse aux multiples crises (économique, sanitaire, écologique) ne peut être élaborée en faisant l’économie de ces armes cruciales contre la dictature des marchés.

    5. Un autre modèle de société, MAINTENANT !

    Pour réellement libérer l’humanité de l’angoisse, ce sont tous les secteurs clés de l’économie (énergie, pharmaceutique,…) qui devraient être saisis afin de fonctionner dans le cadre d’une planification démocratiquement élaborée de la production économique. Ce type de société, une société socialiste démocratique, s’impose de toute urgence alors que les sonnettes d’alarme tintent dans tous les sens. Ainsi, des températures invivables pour l’homme ont été atteintes cette année en raison du changement climatique alors que les climatologues s’attendaient à ce que cela n’arrive qu’en 2050.

    Le confinement a illustré que ce sont les travailleuses et les travailleurs qui font tourner le monde, il est absolument nécessaire qu’ils le prennent en main pour libérer l’être humain et la planète du capitalisme.

  • Québec. « Relance économique » en pandémie : un projet de loi démasque l’austérité à venir

    Le gouvernement conservateur et nationaliste de François Legault a échoué son coup de force législatif visant à « relancer » l’économie du Québec. Il n’a pas réussi à faire adopter son projet de loi 61, qui vise à lui donner des pouvoirs extraordinaires afin d’accélérer des projets d’infrastructures qui seront réalisés par le privé. Le premier ministre promet de revenir à la charge cet automne. D’ici là, il continuera de diriger la province canadienne la plus éprouvée par la COVID-19 à coup de décrets austères, tout en bénéficiant de l’aide financière historique d’Ottawa.

    Par Julien D., Alternative Socialiste (section d’Alternative Socialiste Internationale au Québec)

    Déposé le 3 juin, le projet de loi omnibus sur la relance de l’économie québécoise visait a « accélérer » la réalisation de 202 projets publics d’infrastructures en octroyant des pouvoirs exceptionnels au gouvernement. Ces projets étaient toutefois déjà prévus par le Plan québécois des infrastructures des 10 prochaines années, un plan mis au point avant la pandémie de la COVID-19. Les projets visés par le projet de loi 61 (PL61) concernent surtout la construction de nouvelles autoroutes ainsi que la rénovation et la construction de CHSLD1, de « maisons des aînés » et d’hôpitaux. Certains projets prévoient aussi la rénovation et l’agrandissement d’écoles.

    La réalisation d’une bonne partie de ces travaux est essentielle pour maintenir l’offre de services publics. Toutefois, le gouvernement de la CAQ2 propose d’accélérer leurs travaux en ouvrant une nouvelle boite de pandore néolibérale.

    La première mouture du PL61 donnait au gouvernement des droits d’exproprier des terrains sans contestation possible. Les octrois de contrats publics pouvaient se faire sans appel d’offres. La reddition de compte était restreinte à une fois l’an et les ministres concernés pouvaient être placés hors d’atteinte des tribunaux. Le gouvernement provincial pouvait contourner plusieurs lois relatives à la qualité de l’environnement, à l’aménagement du territoire ainsi qu’à la protection des espèces menacées pour faire construire plus vite. Enfin, le PL61 étendait l’état d’urgence sanitaire pour une durée indéfinie, permettant ainsi au gouvernement de continuer à décréter les conditions de travail dans le secteur public.

    Sauvé par la fin de session parlementaire

    Comme le gouvernement a déposé le PL61 de manière tardive, il devait obtenir l’accord unanime des partis d’opposition pour l’adopter. Il a dû mettre de l’eau dans son vin pour faire avancer le projet. Autrement, il aurait tout simplement pu l’adopter grâce à sa majorité parlementaire.

    Dans la nouvelle mouture du projet gouvernemental, les promoteurs ne peuvent plus simplement détruire un milieu naturel contre de l’argent. Ils devront d’abord chercher à éviter, puis à minimiser les impacts environnementaux avant de compenser financièrement. Ensuite, seules les villes pourront passer un contrat sans respecter les normes prévues par la Loi sur les contrats des organismes publics.

    Le gouvernement a aussi convenu de limiter l’état d’urgence jusqu’au 1er octobre, période durant laquelle la 2e vague de la COVID-19 devrait déferler. Il a aussi acquiescé à supprimer l’article qui lui aurait permis d’échapper aux poursuites judiciaires dans l’exercice de cette nouvelle loi.

    Le jeu des procédures a permis aux partis d’opposition de modifier puis de freiner l’adoption du PL61 à la clôture de la session parlementaire. Le gouvernement aura néanmoins les coudées franches pour faire adopter son projet de loi cet automne, à la reprise des travaux parlementaires. Les concessions de surface qu’il a accordées n’ont pas fondamentalement altéré la raison d’être du PL61.

    La raison d’être du PL61, c’est compenser le plus rapidement possible les pertes de profits des grandes compagnies privées grâce à l’argent public.

    L’accélération, une politique au service du privé

    Le premier ministre Legault a répété en conférence de presse vouloir « accélérer pour les aînés ». Or, il semble que sa volonté de ne « pas perdre de temps » découle surtout des pressions du milieu des affaires.

    Le Conseil du patronat estime depuis la fin avril que l’ensemble des activités économiques aurait dû reprendre, alors que le Québec connaissait son pic de décès au coronavirus. De son côté, la Fédération des chambres de commerce souhaite que les mesures du PL61 « puissent devenir permanentes » et qu’elles deviennent applicables à l’ensemble du secteur privé. L’alliance de l’immobilier, formée par les quatre plus importantes associations de l’industrie de la construction et de l’immobilier commercial, partage la même position.

    Soyons clairs, le PL61 n’est pas un plan de sortie de crise. Il n’implique aucun investissement supplémentaire pour les secteurs publics qui en ont immédiatement besoin: la santé et les services sociaux, le logement abordable et le transport collectif. Peu importe sa mouture, le PL61 bénéficie d’abord et avant aux firmes privées de génie-conseil qui s’occuperont des travaux et aux grandes compagnies de construction qui les réaliseront.

    L’accélération des projets d’infrastructure vise à sécuriser le plus rapidement possible leurs contrats et leurs profits, même si cela signifie nuire à notre santé, polluer notre environnement et gérer l’argent public de manière arbitraire et opaque.

    Opportunité de corruption et de collusion

    La plupart des organismes de surveillance – de la protectrice du citoyen au comité de suivi de la commission Charbonneau – ont reconnu que le PL61 ouvre la porte au crime organisé, à la corruption et à la collusion.

    Les décennies de coupures dans les services publics, en particulier dans le personnel d’ingénierie du Ministère des Transports du Québec (MTQ) et des municipalités, ont conduit à une perte d’expertise interne en termes d’évaluation de projet. Cette situation est à l’origine des scandales de corruption ayant touché le secteur de la construction durant les dernières années.

    La journée même où le président du Conseil du trésor, Christian Dubé, présentait le PL61 en conférence de presse, la vérificatrice générale du Québec, Guylaine Leclerc, publiait un rapport estimant que le MTQ est trop souvent incapable d’évaluer correctement la valeur des contrats qu’il octroie.

    Les « allègements » de procédures du PL61 risquent de replonger le Québec dans un nouveau cycle de collusion. Le premier ministre lui-même a reconnu la partisanerie derrière son projet de loi: les projets d’infrastructures choisis l’ont été en fonction du poids électoral de la CAQ au Québec!

    Contourner les lois pour rétablir le profit privé

    La CAQ tente de profiter de la crise actuelle pour en revenir aux belles années du néolibéralisme, voire à celles du libéralisme sauvage des années 30 sous Maurice Duplessis. Ce type d’économie « libérée » au maximum des contraintes de l’État ne sert ultimement qu’à une chose: garantir la profitabilité des grandes compagnies.

    La tentative du gouvernement québécois de contourner les lois environnementales en temps de pandémie s’inscrit dans une tendance canadienne. À titre d’exemple, le gouvernement fédéral de Justin Trudeau a annoncé au début juin qu’il exempte tous les forages d’exploration pétrolière réalisés en milieu marin, au large de Terre-Neuve, du processus d’évaluation environnementale. Même approche en Alberta où le gouvernement a suspendu sa réglementation environnementale, dont la reddition de compte des compagnies privées.

    L’austérité n’est pas une sortie de crise

    Du côté des secteurs public et parapublic, l’État du Québec est actuellement en négociation avec les syndicats représentant leurs employé·es en vue du renouvellement des conventions collectives 2020-2025. Le maintien de l’État d’urgence sanitaire jusqu’au 1er octobre permettra au gouvernement de garder le contrôle total sur leurs conditions de travail. La politique d’arrêtés ministériels pourra se continuer d’ici là.

    La ministre de la Santé et des Services sociaux, Danielle McCann, pourra aller de l’avant dans ses plans de régime minceur. Que ce soit la modulation des primes de risques ou le recalcul des horaires du personnel, tout est bon pour minimiser les dépenses gouvernementales en temps de pandémie!

    Le 1er juin dernier, le ministre des Finances, Éric Girard, a d’ailleurs dévoilé en entrevue à Radio-Canada qu’après les déficits importants causés par la crise actuelle, son gouvernement « va rapidement se mettre sur une trajectoire de déclin de la dette ». En clair, la CAQ prépare le grand retour de l’austérité, celle-là même qui est à l’origine de la catastrophe de la COVID-19 au Québec.

    Épicentre de la COVID-19 au Canada

    En date du 14 juin, plus de 5 222 personnes sont mortes de la COVID-19 au Québec, soit 64% de tous les décès au Canada. Le Québec compte pour plus de 54% de tous les cas d’infections au pays (53 952/98 787), bien qu’il ne compte que pour 23% de sa population. Plusieurs facteurs ont été avancés pour expliquer la plus grande prévalence de la COVID-19 au Québec: retour des vacances de la relâche, âge de la population, santé de la population, etc.

    D’autres, à commencer par le directeur de la Santé publique du Québec, Horacio Arruda, tentent de masquer la gestion catastrophique de la crise en personnifiant le coronavirus comme une bête qui rôde et peut frapper à tout instant.

    Mais l’hécatombe dans les CHSLD a forcé tout le monde à se rendre à l’évidence. Des décennies d’austérité budgétaire et de course au profit effrénée ont engendré un manque de personnel critique, des conditions de travail et des salaires minables, une désuétude des infrastructures, un manque de place, des services dysfonctionnels et même la présence de criminels notoires comme propriétaires de CHSLD privés.

    Au moins 85% des personnes décédées de la COVID-19 au Québec résidaient dans un CHSLD (privé ou public) ou une résidence privée pour aîné·es. Plus de 200 de ces établissements sont toujours touchés par l’épidémie. Les conditions de travail des personnes préposées aux bénéficiaires (PAB) – responsables des soins de base – sont si basses que seulement 38% d’entre elles font toujours ce travail après 5 ans. Avant la pandémie, le réseau de santé et des services sociaux connaissait déjà un manque à gagner d’environ 6 400 PAB par année.

    Appelées en renfort, les Forces armées canadiennes ont produit un rapport le 27 mai sur l’action de leurs 1 350 militaires ayant œuvré dans 25 CHSLD québécois. Le rapport pointe du doigt les politiques désastreuses des gestionnaires. Il souligne leur difficulté à gérer les zones de contamination, leur laxisme à implanter une utilisation correcte des équipements de protection et leur manque de personnel.

    L’hécatombe du privé

    Ce n’est pas un hasard si le nombre de décès et d’infections à la COVID-19 se concentre dans les CHSLD complètement privés. Même si ces derniers ne représentent que 9,7% de tous les CHSLD, ils constituent près du tiers des établissements présents sur la « liste rouge » gouvernementale, c’est-à-dire les endroits où plus de 25% des résidents et résidentes sont infectés.

    Déjà en 2012, le vérificateur général du Québec a sonné l’alarme quant à la gestion catastrophique des CHSLD. Malgré les rapports accablants, les plaintes étouffées et les grèves pour de meilleures conditions de travail en CHSLD, le gouvernement caquiste a tout misé sur la préparation de places en hôpital pour affronter le coronavirus. Cette stratégie s’est avérée catastrophique.

    Avec le nombre de cas et de décès qui diminue en juin, le gouvernement Legault fait passer le déconfinement en vitesse supérieure. Le PL61 soulève l’enjeu d’un retour général et sécuritaire au travail, autrement dit d’un véritable plan de sortie de crise sanitaire, écologique et économique.

    Davantage vulnérables à une 2e vague

    Bien que la courbe d’infections a été aplatie et que le nombre de cas et de décès reliés à la COVID-19 diminue, les travailleurs et les travailleuses n’ont toujours pas de données fiables sur la contagion ni sur les stocks d’équipements de protection individuelle. La pénurie de personnel en santé est pire qu’avant: 5 000 travailleurs et travailleuses sont infectées et de nombreux autres sont en arrêt de travail pour épuisement. Les urgences de la plupart des hôpitaux de Montréal demeurent dangereusement près de leur capacité maximale ou au-dessus.

    La stratégie du gouvernement nous dirige tout droit vers une 2e vague d’infections, probablement en automne. Ottawa vient tout juste de prolonger la durée de la Prestation canadienne d’urgence à 24 semaines. Or, il y a fort à parier que les différents paliers de gouvernement soutiendront que les coffres « sont vides » cet automne. Sans les programmes publics de stimulation de la consommation privée, les gouvernements capitalistes n’auront qu’une seule option pour « relancer » l’économie: couper dans les salaires, les conditions de travail et les emplois.

    Entre l’austérité et l’argent de l’État

    Le gouvernement Legault a le beau jeu pour maintenir la ligne de l’austérité. L’essentiel de l’aide financière octroyée depuis le début de la pandémie aux entreprises et aux personnes ayant perdu leur revenu provient d’Ottawa. Déjà à la mi-mai, le gouvernement fédéral a annoncé 154 milliards de $ en aide directe. Il s’agit du programme de sauvetage économique le plus colossal de l’histoire du pays.

    Lors de la crise financière de 2008, le gouvernement conservateur de Stephen Harper s’était contenté d’injecter 40 milliards de $ sur deux ans. Quant à lui, le gouvernement québécois s’en est essentiellement tenu à des investissements en infrastructure.

    Douze ans plus tard, la nouvelle crise économique – accélérée par la pandémie – présente une gravité inégalée dans l’histoire. Avec le confinement, le taux de chômage au Québec est passé de 4,5% en février à 17% en avril. La province a enregistré la baisse de l’emploi la plus prononcée au Canada (-18,7% ou -821 000) durant la même période. La fermeture de tous les chantiers de construction le 23 mars a eu un impact significatif sur ces données.

    Retour au travail hâtif

    Cela n’a pas empêché le gouvernement Legault d’opter pour le même type de stratégie de relance que Jean Charest en 2008, mais en la bonifiant d’une aide indirecte de 2,5 milliards de $ aux entreprises. La CAQ a surtout misé sur des politiques agressives de retour au travail, sans consultation des travailleurs et des travailleuses concernées.

    Les premières mesures de reprise des activités économiques ont été décrétées à la mi-avril, en pleine ascension du nombre de cas de COVID-19, et malgré les recommandations de plusieurs scientifiques.

    Les mines ont redémarré le 15 avril tandis que la construction résidentielle a repris 5 jours plus tard. Début mai, le commerce de détail a repris ses activités graduellement à l’extérieur de la grande région de Montréal. Déjà 90% des travailleurs et travailleuses de la construction étaient de retour à la mi-mai, soit une semaine avant la réouverture complète des chantiers. Les écoles primaires, les services de garde et le secteur manufacturier ont aussi repris leurs activités à la mi-mai.

    Selon l’Institut de la statistique du Québec, la reprise a effectivement permis au taux de chômage de baisser à 13,7% et à l’emploi de grimper en mai, mais à quel prix? Commentant les mesures de déconfinement de la fin avril, le Dr Arruda a déclaré espérer que « pas trop de gens vont mourir ». Depuis, plus de 2 700 décès se sont rajoutés au funeste bilan.

    Sortir du cycle de l’austérité

    Il existe une alternative au cycle austérité/sauvetage par l’État/austérité. Renflouer les poches du privé avec l’argent public à chaque crise n’est pas une solution durable, bien que cela semble être le seul horizon des parlementaires et des directions des centrales syndicales.

    Certes, une sortie de crise passe par des réinvestissements massifs en santé et dans les services sociaux. Toutefois, pour sortir définitivement de la crise actuelle, l’État doit créer des emplois écologiques et de qualité par la prise de contrôle de toutes les compagnies privées liées à la production de matériel et de services médicaux essentiels. Ces compagnies, tout comme celles des autres secteurs clés de l’économie, doivent être placées sous la gestion des travailleurs et des travailleuses qui y œuvrent. Une planification démocratique générale de la production est la seule manière de répondre durablement aux vrais besoins de la population.

  • Rassemblement du non-marchand pour une revalorisation du secteur

    La crise du coronavirus a mis en avant la pénurie et les conditions de travail du secteur non-marchand. Les métiers les plus nécessaires dans la société ne sont pas forcément les mieux rémunérés. Personnel insuffisant, manque de matériel, stress,… ce sont les conditions auxquelles le personnel du non-marchand est confronté chaque jour.

    Par une infirmière de Delta

    On voit depuis des semaines des mobilisations dans les hôpitaux, comme celui de Brugmann ou de Saint-Pierre. Le 18 juin ça a été le tour du Chirec, où plus d’une centaine des travailleurs et travailleuses ont fait un arrêt de travail d’une heure pour revendiquer des meilleurs conditions de travail, une revalorisation des salaires, plus de personnel, plus de matériel, ou même la démission de la ministre De Block.

    Mais les mobilisations ne doivent pas s’arrêter là, on doit construire un mouvement autour des revendications offensives et aller à l’encontre de la logique du système capitaliste pour qui les profits comptent plus que la santé.

  • Chèque consommation de 300 euros – Une mesure d’austérité qui ne dit pas son nom

    David Clarinval (MR), ministre fédéral du budget. Photo : wikipedia

    Samedi 6 juin, les dix partis qui soutiennent les pouvoirs spéciaux du gouvernement Wilmès se réunissaient pour s’accorder sur une série de mesures visant à réduire l’impact des conséquences économiques liées à la crise du coronavirus. L’une d’entre elles a fait l’objet d’une attention médiatique particulière.

    Par Jeremy (Namur)

    Elle consiste en l’octroi d’un chèque individuel de 300 € à faire valoir exclusivement dans les commerces locaux. La façon dont cette mesure nous a été vendue peut paraître séduisante : de nombreux travailleurs ont du faire face à des pertes de revenus partielles ou totales liées à la crise et des moyens financiers supplémentaires sont évidemment plus que bienvenus. En outre, les travailleurs indépendants et des PME sont parmi les plus durement touchés par la crise avec un taux de faillite anticipé à 40 % dans le secteur de l’Horeca dans les mois à venir. Le but affiché de cette mesure est donc à la fois de soutenir la consommation des ménages et l’activité des commerces locaux.

    Mais quand on y regarde d’un peu plus près, on s’aperçoit que cette disposition est bien loin d’être à la hauteur de la perte de revenu subi d’une part et de réponse à la crise qui arrive d’autre part. En effet, contrairement à ce que l’annonce laisse penser, le gouvernement n’envisage pas d’aller chercher l’argent dans les poches qui se sont enrichies pendant la crise. Il veut seulement donner la possibilité « aux entreprises qui le souhaitent et qui peuvent se le permettre » d’attribuer une prime à leurs employés, qui pourra être défiscalisée à hauteur de 300 €. Aucune disposition n’est prise pour rendre cette mesure contraignante pour l’employeur. Dans ces conditions, il est facile d’en anticiper les effets concrets.

    Tout d’abord, la mesure exclut d’emblée les personnes qui ont perdu leur emploi pendant la crise et qui sont pourtant celles qui ont le plus besoin d’une aide financière. D’autre part, avec le ralentissement de l’activité économique, on voit mal quelle petite entreprise en difficulté (Horeca ou autre) choisirait elle-même d’octroyer cette prime qui constitue pour elle une dépense supplémentaire… À moins que cela ne vienne remplacer une partie du salaire de son personnel ! Et nous touchons là au problème principal.

    Si, à première vue, l’attribution d’un tel chèque de soutien à la consommation semble revêtir des allures keynésiennes (relance de la consommation par l’État), un coup d’œil du côté de son mode de financement nous informe que nous sommes plutôt face à une mesure d’austérité qui ne dit pas son nom. En renonçant à taxer le capital de façon à pourvoir lui-même aux besoins de la population, le genre de demi-mesure discutée ici est le seul outil qu’il reste au gouvernement pour tenter de piloter une relance de l’économie par la consommation.

    Le gouvernement prétend en appeler à la bonne volonté des grands groupes capitalistes en leur demandant gentiment d’accorder une prime à leurs employés sur laquelle il se refuse à exercer le moindre contrôle ou à percevoir la moindre cotisation sociale. Mais on a tout lieu de penser que cette mesure constitue bien plutôt un nouveau crédit d’impôt accordé au patronat qui ne manquera pas d’instrumentaliser les difficultés liées à la crise pour diminuer d’autant le salaire des travailleurs, ou les primes qu’il s’était de toute façon engagé à payer.
    Que l’on soit clair, nous sommes favorables à toute mesure d’aide en faveur des travailleurs les plus durement touchés par la crise. Mais il est inacceptable de faire porter le coût d’une telle mesure à l’ensemble de la population en réduisant encore un peu le montant des cotisations patronales.

    Au mois d’avril dernier, le PSL a publié un programme d’urgence coronavirus. Ce dernier contient, entre autres, la revendication d’une aide financière pour les travailleurs indépendants en difficulté sur base des besoins avérés. La gestion catastrophique de la crise par le gouvernement soutenu par les partis traditionnels a démontré la nécessité d’une économie démocratiquement planifiée comprenant la nationalisation des secteurs clés de l’économie (agroalimentaire, pharmaceutique, énergie…). Dans ces secteurs, comme dans les autres, ce sont les travailleurs, et pas les patrons, qui sont les plus à même de prendre les décisions dans l’intérêt de la collectivité et c’est donc à eux que revient le droit et la responsabilité de décider démocratiquement ce qui est produit et comment.

  • La Santé en Lutte : Actions “Tournons leur le dos” réussies !

    Liège

    Ce dimanche, des centaines de personnes ont répondu à l’appel du groupe d’action militant La Santé en Lutte pour des rassemblements à Bruxelles, Charleroi, Liège et Namur afin tout à la fois de revendiquer un refinancement massif des soins de santé et de dénoncer la gestion scandaleuse de la crise Covid-19 de la part des autorités belges.

    Ces rassemblements se sont partout extrêmement bien déroulés en dépit de la pression policière et du refus d’accorder des autorisations. Comme le souligne très justement La Santé en Lutte : ‘‘Le droit de manifester, entre autres repris dans la Convention européenne des Droits de l’homme, est l’un des droits les plus fondamentaux en démocratie. Nous devons reprendre la rue et défendre nos conditions de travail, une augmentation des effectifs, nos salaires, l’accès aux soins, etc. La crise covid-19 n’est bien sûr pas finie et il est important d’en avoir conscience. Si nous sortons dans la rue nous devons le faire en garantissant notre sécurité sanitaire. Mais aujourd’hui il n’y a plus de raison de faire reprendre le travail et la consommation et continuer à interdire la lutte sociale.’’

    Et les raisons de reprendre le chemin de la lutte ne manquent pas, très certainement dans la santé ! Au micro de BX1 lors du rassemblement de Bruxelles, Naïma expliquait : “J’ai pas signé pour sacrifier ma vie. J’ai signé pour soigner des gens ! On est clairement de la chair à canon !” Stephen, membre de La Santé en Lutte, précisait quant à lui : ‘‘Avant le Covid, 1/3 des infirmiers et infirmières étaient à risque de burnout, aujourd’hui c’est 2/3 ! On voit les soignants tomber comme des mouches.’’

    Sur RTL, il précisait : ‘‘Le secteur des soins de santé pâtit depuis des années d’un sous-financement qui s’est révélé plus flagrant encore pendant la crise sanitaire liée au Covid-19. À certains moments, nous devions choisir qui allait porter un masque et qui pas. Le personnel des soins de santé et les personnes vulnérables ont été complètement oubliés.”

    Aux divers rassemblements, les pancartes et banderoles artisanales exprimaient une profonde colère : “le gouvernement compte ses sous, nous comptons les morts” ou encore “Maggie tue les soins”. A Liège, le PSL, qui était présent à chacun des divers rassemblements, est intervenu notamment avec une banderole sur laquelle était inscrit : ‘‘Le capital tue l’hôpital – Du blé pour la santé !’’

    La réussite de ces rassemblements est de très bonne augure pour la Grande manifestation de la santé appelée par La Santé en Lutte pour le mois de septembre prochain, une initiative qui a le potentiel de réunir des milliers de personnes derrière le personnel de la santé.

    Bruxelles

    Vidéo de La Santé en Lutte

    Vidéo du PSL-Liège

  • Leur stratégie de déconfinement est un danger

    Dès le début, le gouvernement Wilmès a couru après les faits. Les écoles qui ont décidé d’elles-mêmes de prendre des mesures dans la semaine du 9 mars. Les travailleurs sont partis en grève chez Audi à Forest le 16 mars pour exiger des mesures de sécurité. Sous la pression des faits, un semi-confinement a été annoncé par le gouvernement le 18 mars. Un semi-confinement, parce que la production non essentielle a continué à tourner.

    Par Michael (Gand)

    Le patronat espérait s’en tirer ainsi mais, dans les semaines qui ont suivi, des grèves ont éclaté chez Daikin, chez Carrefour et Delhaize,… pour faire appliquer des mesures de protection ou exiger une prime de risque. Le semi-confinement était essentiellement un exercice d’équilibre entre des intérêts opposés : les profits du grand capital et la santé publique. Le gouvernement a systématiquement placé les intérêts économiques en priorité. Il a transformé le confinement en une responsabilité individuelle, et alors que les petites entreprises du secteur de l’hôtellerie et de la restauration ont dû cesser leurs activités et que les travailleuses et travailleurs des secteurs essentiels donnaient le meilleur d’eux-mêmes, il est apparu à la mi-avril que 85% des entreprises contrôlées ne respectaient pas les mesures de sécurité.

    La stratégie de déconfinement est malade du même mal. Elle repose sur la nécessité de relancer la production pour faire des profits. Les moyens de protection individuelle pour un redémarrage en toute sécurité sont considérés comme un élément secondaire. Le ministre Koen Geens a déclaré au nom du gouvernement que les masques sont la chose la plus importante pour faciliter le déconfinement mais que si ce n’est pas possible, il faudra faire sans. Il en va de même pour la capacité de tests. Les vies humaines ne sont manifestement pas un incitant suffisant pour remettre en cause la logique des lois du marché et revendiquer la réquisition du matériel et des chaînes de production nécessaires.

    Avec ou sans masques, avec ou sans tests, l’enseignement devait reprendre. Non pas pour réduire le retard scolaire, mais pour permettre de remettre les parents au travail et de préparer la future main-d’œuvre. La première mesure a été l’annonce de la mise en place de garderies d’enfants, pour que les parents puissent aller travailler. Les aspects pratiques de la réouverture des garderies ont été considérés par le gouvernement comme étant d’une importance mineure. La seconde mesure a été fixée en donnant la ‘‘priorité’’ aux plus âgés, qui doivent être en mesure de passer au marché de l’emploi ou à l’enseignement supérieur. Il semblerait qu’une fois dans l’enseignement supérieur, on peut plus facilement les abandonner à leur sort. Et personne dans les gouvernements n’a parlé de la pression psychologique, de la solitude, de la peur et de l’insécurité des étudiants.

    Le grand débat des chaînes flamandes VTM et VRT du 9 mai était instructif. Outre quatre professeurs, le panel comprenait également la ministre De Block, le ministre De Croo, le gouverneur de la Banque nationale Pierre Wunsch, Bart De Wever et Pieter Timmermans (FEB). En d’autres termes : les architectes de l’austérité dans les domaines de la santé et de l’enseignement, les défenseurs des emplois précaires et des bas salaires. Tout comme dans le GEES (Groupe d’experts chargé de la stratégie de sortie), ceux qui font fonctionner la société au quotidien dans les domaines de la santé, des transports publics, de la distribution, du nettoyage, de la collecte des déchets, de l’éducation,… sont considérés comme des bêtes de somme et on se moque d’eux en tant qu’experts. Heureusement, certains pensent différemment, comme les conducteurs de De Lijn et de la STIB qui ont refusé de reprendre le travail sans l’équipement de protection promis. Ou encore le personnel soignant qui a littéralement tourné le dos à la politique antisociale de la Première ministre Wilmès lors de sa visite à l’hôpital Saint-Pierre le 16 mai dernier.

    Leur stratégie de déconfinement ne vise pas à absorber les dégâts humains causés par le confinement. Elle se concentre sur les intérêts économiques pour lesquels la classe ouvrière doit servir de chair à canon. Le gouvernement belge n’est pas seul dans ce cas. Au niveau mondial, la fin du confinement est une roulette russe sous la pression de la concurrence mondiale. Le risque d’une deuxième vague ne l’emporte apparemment pas sur le risque de perdre des parts de marché.

    Aux États-Unis, les employés de General Electrics ont exigé que les lignes de production soient utilisées pour fabriquer des appareils respiratoires. La classe ouvrière est capable de grandes choses lorsqu’elle assume son rôle dans la société ! Elle sait ce qui est nécessaire et ne se laisse pas guider par la recherche du profit à tout prix.

    L’ère post-coronavirus nous plongera dans une profonde récession économique. Même dans ce cas, les intérêts seront diamétralement opposés. Même dans ce cas, la classe capitaliste et ses politiciens risqueront des vies humaines. Les actions menées dans les transports publics et par le personnel infirmier à Bruxelles et en Wallonie montrent que nous ne les laisserons pas nous marcher dessus.

  • Le Brésil épicentre de la crise en Amérique du Sud

    L’impasse de la politique de Bolsonaro

    Avec plus de 15 000 morts à la mi-mai, le Brésil est devenu l’épicentre de l’épidémie de Covid-19 en Amérique du Sud. Les agences sanitaires alertent sur le fait que ce chiffre pourrait être largement sous-estimé et évoquent un nombre de décès jusqu’à 12 fois plus grand !

    Par Jeremy (Namur)

    Malgré l’ampleur de la catastrophe, le président Jair Bolsonaro continue de s’opposer aux mesures préconisées par l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) en matière de prévention et de confinement et prend le risque d’augmenter encore le nombre de victimes. Son unique action sur le plan sanitaire a été de promouvoir l’usage massif d’hydroxychloroquine (une molécule controversée utilisée dans le traitement du paludisme et dont l’efficacité contre le coronavirus n’est pas prouvée). Cette décision a par ailleurs poussé le ministre de la Santé à « ‘jeter l’éponge »’ après que le président l’a contraint à un ultimatum pour faire changer le protocole de test contre l’avis des médecins. C’est le deuxième ministre de la Santé à démissionner en moins d’un mois.

    Pour rappel, Bolsonaro est arrivé au pouvoir en 2018 au terme d’une campagne le présentant comme une alternative populaire aux élites corrompues (opération Lava Jato : Car Wash). Un discours qui a depuis largement été mis à mal par les affaires judiciaires le mettant en cause lui et sa famille. Ces affaires ont fini par l’éloigner de son ministre de la Justice démissionnaire, Sérgio Moro, un ancien allié primordial dans son accession au pouvoir. Aujourd’hui esseulé à la tête de l’État, Bolsonaro se cherche des alliés auprès des sénateurs centristes très proches des milieux d’affaires. Le fait que ces politiciens professionnels ne soient pas moins corrompus qu’au temps de sa campagne ne semble plus être un problème pour Bolsonaro.

    Mais les méthodes de Bolsonaro sont loin de faire l’unanimité y compris parmi les capitalistes qui se sont ralliés à lui tardivement par opportunisme et qui ont besoin d’un climat social apaisé pour faire marcher leurs affaires. Beaucoup s’inquiètent, à présent, de le voir jeter ainsi de l’huile sur le feu et lui reprochent son caractère incontrôlable. Ceci explique la trentaine de procédures de destitutions entamée contre Bolsonaro ; la droite traditionnelle espère tirer avantage de la crise politique pour récupérer le soutien perdu en 2018.
    Dans cette triple crise sanitaire, politique et économique, le mouvement des travailleurs organisé est le seul à pouvoir présenter un programme de rupture avec le capitalisme. Nos camarades du LSR (section-sœur du PSL/LSP au Brésil) encouragent toutes les initiatives populaires réclamant la destitution de Bolsonaro ainsi que de tout son gouvernement et autre représentant de sa politique.

  • De Lijn utilise du ruban adhésif pour protéger les conducteurs…

    Photo: Wikimedia

    Une protection sérieuse exige un investissement sérieux !

    La crise sanitaire actuelle montre à quel point les économies et l’indigence des moyens sont désastreux pour les transports publics. Au lieu de tout faire pour rendre les transports publics aussi sûrs que possible, les passagers sont invités à les utiliser le moins possible et à porter un masque. Pratiquement toutes les mesures destinées au personnel sont arrivées trop tard.

    Par un chauffeur de bus

    Depuis le 13 mars (le début du confinement), le personnel a menacé de passer à l’action et l’a fait. Il s’agissait d’abord de monter à l’arrière du bus et de ne plus percevoir d’argent. Après cela, il y a eu une discussion sur le nettoyage des bus avec notamment une grève dans le Limbourg. Il y avait un problème pour prendre le début du service au dépôt plutôt que sur la ligne à Anvers. Les techniciens manquaient de matériel de protection. Et un préavis de grève a été déposé concernant la protection des chauffeurs.

    Après seulement deux mois, un certain nombre de mesures sont déjà en cours de suppression. Par exemple, les bus ne seront désinfectés qu’à certains endroits sur une base quotidienne. Le vrai nettoyage a lieu toutes les six à huit semaines !

    Les bus circulent avec ce que De Lijn appelle un ‘‘compartiment fermé’’. Cela sonne bien mais dans les faits, ce n’est qu’une simple feuille de plastique fixée avec du ruban adhésif. La direction promet qu’il s’agit d’une solution temporaire et que d’autres mesures seront bientôt prises mais après plus de deux mois, on ne voit toujours rien venir. C’est révélateur de la situation d’un service public tel que De Lijn.

    La direction n’est pas en mesure de protéger le personnel et se décharge donc de ses responsabilités sur les voyageurs. Il leur suffit de porter un masque et de se laver les mains. Cette obligation de porter un masque pour les passagers est utilisée pour justifier que les chauffeurs travaillent dans des véhicules bondés.

    Il serait logique qu’il y ait une augmentation de la capacité, en plus d’un plan pour vraiment nettoyer et décontaminer tous les véhicules quotidiennement. Il serait logique d’utiliser des accompagnateurs, des stewards et une deuxième personne dans les véhicules pour accompagner les passagers et comme contrôle social. Rien de tout cela n’est sur la table. De plus, même avec des services réduits, il y a encore des lignes qui ont été supprimées par manque de personnel et/ou de matériel de conduite.

    Un certain nombre de choses peuvent être résolues par des mesures temporaires. Par exemple, les chauffeurs des sociétés d’autocar au chômage pourraient être utilisés. Mais les choses doivent changer structurellement : de sérieux investissements publics sont nécessaires. Nos transports publics ont besoin d’un plan d’urgence.

    Ce plan doit répondre aux préoccupations justifiées du personnel concernant l’hygiène et les conditions de travail. Maintenant qu’il est clair qui est le ‘‘personnel essentiel’’ que De Lijn conduit, d’autres revendications doivent également être mises sur la table : la réduction du temps de travail, la réduction de l’âge de la retraite, des installations sanitaires décentes, la réduction des interruptions de service … Cela doit être combiné avec des investissements importants pour que la capacité de service puisse augmenter et qu’un personnel suffisant puisse être déployé.

    Cela ne tombera pas du ciel. Dans plusieurs villes, on signale qu’un nouveau plan de réseau est en cours de préparation ou sera préparé avant la fin de 2021 dans le cadre de l’accessibilité de base. Une constante est que toute expansion ou amélioration sera payée par un transfert de moyens, c’est-à-dire par la suppression d’autres lignes. Pour de réelles améliorations, nous devons organiser le personnel et les passagers ensemble dans une lutte pour des transports publics de qualité.

     

  • La saga des masques : le manque de planification menace notre santé

    D’ici le 4 mai, nous devions tous avoir obtenu un masque gratuit. C’était l’échéance que le gouvernement fédéral s’était fixée. Comme chacun l’aura remarqué, ce délai n’a pas été respecté. Malgré le fait que cinq ministres sont maintenant responsables des masques, le manque de planification conduit au chaos.

    Les masques sont obligatoires dans les entreprises où la distanciation est impossible et dans les transports publics. Il est également recommandé de les porter ailleurs. Mais les masques gratuits ne sont pas disponibles. Certaines communes en ont délivré, mais ce n’est pas le cas partout. Pour le ministre Geens : ‘‘Il n’est pas possible de mettre en place à court terme une production nationale qui fournisse suffisamment de masques pour tout le monde’’. C’est pourquoi un appel d’offres a été lancé. Pendant ce temps, la population a été encouragée à coudre ses propres masques.

    Le 12 mars, les centres de soins résidentiels ont été fermés et les premières mesures ont été annoncées. Cependant, il a fallu attendre la fin du mois d’avril pour qu’il soit décidé de fournir des masques à tout le monde. Pourquoi si longtemps ? Il est dit que les possibilités de production sont insuffisantes mais, entre-temps, il y a des initiatives privées. Par exemple, Ontex a annoncé qu’elle pourrait lancer une production annuelle de 80 millions de masques chirurgicaux à Eeklo à partir de septembre. Pourquoi l’initiative est-elle laissée aux entreprises privées ? Le gouvernement a scandaleusement réfléchi à la manière de réquisitionner le personnel soignant, mais il n’est apparemment pas possible de réquisitionner les chaînes de production pour produire des équipements de protection.
    Il est d’ailleurs remarquable que les supermarchés soient autorisés à vendre des masques à un moment où il y a encore pénurie, même concernant le personnel soignant. Selon le gouvernement, il y a suffisamment de masques en production pour permettre la vente. Pour le personnel de santé sur les genoux, c’est une nouvelle gifle : apparemment, il existe encore des stocks de masques chirurgicaux dans notre pays, mais le gouvernement n’exige pas qu’ils soient utilisés dans les soins de santé. Au lieu d’exiger les masques, le gouvernement a cédé au chantage des acteurs commerciaux.

    Protéger notre santé est impossible en respectant les intérêts commerciaux. Nous avons besoin d’une approche planifiée, mais celle-ci entre en confrontation avec la course aux profits. Le manque de protection augmente le risque d’une deuxième vague d’infections et d’un nouveau confinement. Le même problème se pose avec le développement d’un vaccin : au lieu que toutes les connaissances disponibles soient partagées, les sociétés pharmaceutiques se mènent concurrence pour être les premières à commercialiser un vaccin. Cela ralentit le développement, et en laissant l’initiative aux mains du secteur privé, il peut aussi y avoir un problème dans ce domaine pour distribuer rapidement le vaccin à toute la population.

    La saga des masques illustre la faillite de ce système. Réquisitionnons les lignes de production nécessaires pour assurer une approche systématique de notre protection et de notre santé !

  • 14 juin : Action de La Santé en Lutte “Tournons leur le dos”

    Appel de La Santé en Lutte // Événement Facebook

    Rassemblons-nous pour faire une haie de déshonneur le dimanche 14 juin à 14h :

    • A Bruxelles, dos au cabinet De Block et au ministère de la Santé (Boulevard du Jardin Botanique 50, 1000 Bruxelles)
    • A Charleroi, dos au ministère de la Finance (Rue Jean Monnet 14, 6000 Charleroi)
    • A Liège, dos au MR (Vinâve d’Ile 9 , 4000 Liège)

    ? Venez avec vos banderoles, vos slogans, vos masques, votre blouse blanche, verte, noire, rouge, enfin, venez comme vous êtes !

    – Parce que Maggie de Block a cru qu’elle pouvait nous réquisitionner comme des pions, tournons-lui le dos.
    – Parce que Sophie Wilmès ose dire qu’elle écoute et comprend la souffrance des soignant·e·s après avoir amputé le budget de la santé de 900 millions d’euros, tournons-lui le dos.
    – Parce que l’Etat a laissé mourir nos ainé·e·s dans des conditions inhumaines, tournons-lui le dos.
    – Parce que nous sommes en colère contre la gestion de cette crise et la mise en danger systématique des travailleur·euse·s de première ligne, tournons-leur le dos.
    – Parce qu’on nous a envoyé soigner sans matériel, sans masque, sans effectif suffisant, tournons-leur le dos.
    – Parce que le gouvernement a minimisé les risques pour pouvoir rationner le matériel de protection, tournons-lui le dos.
    – Parce qu’ils ont maintenu l’activité économique tant qu’ils le pouvaient, au péril de nos vies, tournons leur le dos.
    – Parce qu’on ne fait pas de bénéfices ni d’économies sur la maladie, tournons le dos à la marchandisation !
    – Parce que la sécurité sociale n’est pas une variable d’ajustement, tournons le dos aux politiques d’austérité !
    – Parce que nos dirigeants nous traitent avec mépris, rassemblons-nous pour leur tourner le dos.

    Ce monde politique et ses ambitions financières ne nous représentent pas !

    Contre le retour à l’anormal renversons la table de monde marchand pour construire un « après » plus juste, plus humain, plus démocratique, plus égalitaire.

    Luttons pour un accès à des soins de qualités pour toutes et tous.

    Luttons pour un renforcement de nos métiers et de nos salaires, pour une révision des normes d’encadrement, pour une démocratie dans nos institutions de soins, pour plus d’effectifs, pour des contrats stables, pour une santé basée sur l’humain plutôt que sur les chiffres, pour une sécurité sociale forte, …

    ? Revendications de La Santé en Lutte : https://lasanteenlutte.org/nos-revendications/

    Respectons la distance physique et les gestes barrières.

    ? Si vous voulez organiser un rassemblement dans un autre lieu, dans votre ville, contactez La Santé en Lutte !

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