Tag: Comité pour une Internationale Ouvrière

  • Israel/Palestine : Manifestation à Tel Aviv en opposition aux raids militaires

    Des nationalistes israéliens ont lâchement attaqué des militants du Mouvement Socialiste de Lutte, section du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO)

    Mouvement Socialiste de Lutte (CIO-Israël/Palestine)

    Le samedi 21 juin, quelques dizaines de manifestants, Juifs comme Arabes, et parmi lesquels des militants du Mouvement Socialiste de Lutte ont manifesté face au ministère de la défense, à Tel Aviv. Cette action de protestation visait à dénoncer l’instrumentalisation par le gouvernement israélien du tragique enlèvement de trois adolescents israéliens en Cisjordanie comme prétexte à une multiplication d’opérations militaires. Une sanction collective a été imposée à la population palestinienne.

    Jusqu’ici, cinq Palestiniens – dont deux enfants et un adolescent – ont été tués au cours de l’opération militaire israélienne lancée sur la Cisjordanie. Des centaines de personnes ont été arrêtées et emprisonnées sans procès. Le nombre de ‘‘détenus administratifs’’ dans les prisons israéliennes a presque doublé en une semaine.

    Les principales villes Palestiniennes, et particulièrement Khalil/Hebron, sont assiégées. En parallèle aux incursions quotidiennes en Cisjordanie, l’armée israélienne a effectué de nombreuses frappes aériennes sur Gaza.

    Pendant la manifestation, les militants du Mouvement Socialiste de Lutte ont expliqué qu’aucune de ces grotesques pratiques de répression et de sanction collective ne pourrait apporter la sécurité aux Israéliens ou aux adolescents enlevés. Au contraire, la politique du gouvernement met précisément en place les conditions pour une nouvelle aggravation de la situation et de potentielles nouvelles effusions de sang.

    Un petit nombre de voyous nationalistes israéliens s’est rendu à cette manifestation en espérant une confrontation avec les manifestants. Deux lâches nationalistes, qui n’avaient pas osé s’opposer physiquement à nous durant l’action ont suivi quatre d’entre nous alors qu’ils rentraient chez eux. Alors que nous marchions à travers un grand parking, ils nous ont attaqués par derrière, nous ont frappés à coups de poings et ont immédiatement pris la fuite lorsque nous avons commencé à les repousser.

    Trois des militants ont dû recevoir des soins médicaux à l’hôpital. L’un d’entre eux, Eyal Yablonko, a dû se faire poser des points de suture à l’arcade sourcilière et a ses lunettes brisées. Nous avons pu identifier les assaillants sur des photos et des vidéos, avec l’aide d’autres manifestants. Une plainte a été déposée au commissariat de police.

    Cette attaque n’était pas seulement dirigée contre notre organisation, mais contre toute voix critique vis-à-vis de l’action du gouvernement. Elle s’est passée dans un contexte où les membres du gouvernement et de larges parts des médias pro-establishment incitent à agir contre quiconque oserait soulever la question des motivations qui se cachent derrière les récentes attaques militaires.

    Netanyahu et son gouvernement essaient d’instrumentaliser l’enlèvement pour faire taire la contestation croissante à l’encontre de leur politique d’occupation, d‘expansion des colonies et d’emprisonnements sans procès. Cela inclut les diffamations racistes portées à l’encontre des députés de la population palestinienne en Israël et des membres palestiniens de la Knesset (le parlement) – comme Haneen Zoabi, qui a reçu des menaces de mort. Ils ont même dû subir un interrogatoire de police.

    Mais ces actes, comme la lâche agression contre les manifestants, ne feront pas taire les critiques contre les actions du gouvernement israélien et ne stopperont pas l’augmentation du mécontentement vis-à-vis de la politique du gouvernement et des élites capitalistes israéliennes au pouvoir.

    A côté du besoin d’une résistance de masse en Cisjordanie face aux raids militaires, les militants du Mouvement Socialiste de Lutte appellent à l’organisation de protestations plus larges, déterminées et bien protégées à l’intérieur d’Israël contre les opérations militaires, les occupations en cours, les colonies et l’emprisonnement sans procès.

  • Action de solidarité face à l’ambassade brésilienne (2)

    Voici quelques photos de l’action tenue hier en solidarité avec les mouvements sociaux brésiliens actuellement en lutte, et notamment en solidarité avec les travailleurs du Métro de Sao Paolo, dont plusieurs dizaines sont aujourd’hui menacés de licenciement pour faits de grève. Cette action s’est produite dans le cadre d’un appel international du Comité pour une Internationale Ouvrière, dont le PSL est la section belge. Des actions similaires ont eu lieu dans divers pays.

    Photos de PPICS.

  • Élections européennes : un sérieux avertissement

    Les élections européennes du mois de mai ont été une succession de défaites pour les gouvernements et partis traditionnels dans un pays après l’autre. Ce fut une véritable révolte des électeurs contre les gouvernements et les partis traditionnels. Mais bien que la gauche soit en progrès dans certains pays, les médias dominants n’ont toutefois parlé que de la victoire du Front national en France et de l’UKIP au Royaume-Uni.

    Par Robert Bechert, Comité pour une Internationale Ouvrière

    Les élections européennes du mois de mai ont été une succession de défaites pour les gouvernements et partis traditionnels dans un pays après l’autre. Beaucoup de politiciens ont cédé à la panique en voyant de nouvelles forces politiques gagner du terrain, tandis que les vieilles formations sont en déclin. Malgré le faible taux de participation, ces élections ont révélé à quel point l’Europe est ébranlée par les conséquences de la crise économique mondiale qui a débuté en 2008. Partout dans le continent, le niveau de vie est en baisse (voire s’est complètement effondré dans certains cas). Certains pays ont connu d’immenses mouvements de contestation et de lutte de classe. Tout cela a alimenté les tensions croissantes au sein de la zone euro et de l’Union européenne. Ces divisions seront encore accrues par la croissance des forces “eurosceptiques” et anti-austérité.

    Le Front national français, le parti d’extrême-droite dirigé par Marine Le Pen, a fait la une des journaux en sortant premier du scrutin en France. Au Royaume-Uni, les conservateurs ont été rabaissés à la troisième place pour la première fois depuis la fondation de leur parti il y a 180 ans – la première place étant maintenant occupée par l’UKIP (Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni). Dans d’autres pays (Autriche, Danemark, Grèce, Hongrie, Suède) on voit des partis d’extrême-droite, voire néofascistes, faire de grands progrès, sans compter le succès de forces de droite en Belgique et, dans une moindre mesure, en Allemagne. Tout cela a fait dire aux médias que l’Europe connait à présent un tournant à droite – malgré les succès remportés par les forces de gauche et anti-austérité en Grèce, en Irlande et en Espagne.

    Les élections nous donnent une “photographie” de l’évolution des évènements à un moment donné, mais ce n’est pas tout le film. C’est encore plus le cas lorsqu’on parle des élections européennes pour le soi-disant “parlement” européen, une assemblée qui n’a en réalité presque aucun pouvoir et qui est généralement considérée comme n’étant rien de plus qu’un endroit « où on mange bien ». La conséquence en est que le taux de participation aux élections européennes est généralement encore plus faible que celui des élections nationales – sauf là où ce scrutin est combiné à d’autres, comme en Belgique où le vote est part ailleurs obligatoire. Néanmoins, ces résultats sont une illustration de la situation actuelle en Europe.

    Ce scrutin s’est déroulé six ans après le début de la plus grande crise internationale du système capitaliste depuis les années ’30, dans un contexte de turbulences économiques et sociales continues, de chômage de masse partout en Europe, avec seulement quelques pays qui connaissent une reprise vacillante. Par ailleurs, ces élections se sont également produite dans un contexte de relatif “calme politique”, avec peu de luttes ou mouvements à grande échelle, alors qu’en plus, dans la majorité des pays, il n’existe aucun grand parti qui s’oppose à l’austérité. Malgré cela, les élections de mai ont bel et bien été révélatrices de la méfiance, de l’aliénation et de l’opposition croissantes envers les gouvernements nationaux dans de nombreux pays européens

    Le vote anti-austérité

    Des années de chute du niveau de vie ont sapé la confiance qui existait envers l’ordre capitaliste actuel. Les résultats des élections correspondent bien à ceux d’un récent sondage, en mai 2013, qui révélait que seulement 31 % des Européens faisaient confiance aux institutions de l’Union européenne (contre 57 % en 2007). Pire encore, seuls 25 % des Européens annonçaient en mai 2013 faire confiance à leur gouvernement national, contre 41 % en 2007. Ce phénomène est particulièrement marqué dans les pays qui ont le plus souffert de la crise.

    Les gouvernements qui étaient au pouvoir au début de la crise ont été vaincus, et ceux qui les ont remplacé n’ont pas suscité plus d’enthousiasme. Par exemple, en Espagne, depuis la chute de la dictature de Franco à la fin des années ’70, les deux principaux partis qui ont dominé les gouvernements successifs étaient le Parti populaire (conservateur) et l’ancien parti social-démocrate PSOE ; ces deux partis obtenaient traditionnellement toujours beaucoup de voix : en 2009, 81 % des électeurs espagnols avaient voté pour l’un ou l’autre. Mais aujourd’hui la somme de leurs votes n’atteint que 49 %. Par contre, on voit de tout nouveaux partis, formés à peine quelque mois avant les élections, obtenir un franc succès, comme le parti de gauche “Podemos” (“On peut”) qui a fait 8 % des voix et est ainsi déjà devenu le 4ème parti du pays. La troisième place est quant à elle dévolue à la Gauche Unie (IU, Izquierda Unida) qui a remporté 10 % (+4 % par rapport au dernier scrutin).

    En Irlande, le Parti travailliste a perdu énormément de voix à la suite de sa participation au gouvernement pro-austérité, tandis que les forces anti-austérité – et notamment le Sinn Féin (parti nationaliste irlandais) – ont beaucoup progressé. À la suite de cette véritable raclée électorale, Eamon Gilmore, président du Parti travailliste, qui était aussi vice-Premier ministre de ce gouvernement, a démissionné de son poste ; tout comme d’ailleurs le dirigeant du PSOE espagnol Alfredo Rubalcaba. Le soutien que le Socialist Party (section irlandaise du CIO) a obtenu pendant les élections européennes combinées à des élections partielles à Dublin-Ouest, a démontré la puissance de la base que notre section s’est construite lors de sa lutte contre l’austérité et pour une alternative véritablement socialiste.

    Dans d’autres pays, la situation n’évolue pas si clairement à gauche. Aux Pays-Bas, le Parti travailliste (PvdA, Partij van de Arbeid), un parti bourgeois qui participe à la coalition du gouvernement, s’en est sorti avec à peine 9 %. On est loin de son score d’il y a trente ans, qui était de 34 % ! Mais pas besoin d’aller si loin : il y a deux ans seulement, ce parti avait remporté 25 % lors des élections législatives. À présent, le vote du Parti travailliste néerlandais est même inférieur à celui du Socialistische Partij (SP, un parti de gauche plus radical) – 10 %. Cependant, le SP néerlandais, même s’il bénéficie du soutien critique du CIO, est loin de proposer un programme socialiste véritable aussi clair que celui qui est proposé par les partis affiliés au CIO dans le reste du monde. Certes, le SP a accru son vote (il était de 7 % aux élections européennes de 2009), mais il est en (légère) baisse par rapport à celui des élections législatives de 2012, et bien en-dessous du score obtenu en 2006, qui était de 17 %. Néanmoins, le fait que le SP se présente en tant que force de gauche en opposition à l’austérité a permis de limiter l’avancée de l’extrême-droite populiste du “Parti de la liberté” (PVV, Partij voor de Vrijheid) dirigé par Geert Wilders – même si ce parti a quand même obtenu 13 %.
    Les forces de gauche ou anti-austérité n’ont réellement progressé que dans un tout petit nombre de pays, parmi lesquels la Belgique, l’Espagne, la Grèce, l’Irlande et les Pays-Bas. Même en Grèce, où Syriza (Synaspismós Rizospastikís Aristerás, “Coalition de la gauche radicale”) est sortie première du scrutin, ce résultat n’a pas été dû au fait qu’elle se soit renforcée depuis les élections cruciales de 2012 (où elle avait failli s’emparer du pouvoir), mais tout simplement par dépit, tandis que les électeurs se détournent de “Nouvelle Démocratie”, le parti au pouvoir. Au même moment, on voit toujours un franc soutien au parti néofasciste “Aube dorée” (Khrysí Avgí).

    En Allemagne, bien qu’une relative stabilité et un fort taux de participation aient permis à Angela Merkel et à ses chrétiens-démocrates (CDU, Union chrétienne-démocrate) de gagner en nombre de votes (mais pas en termes de pourcentages), un nouveau parti formé l’an passé, appelé “Alliance pour l’Allemagne” (AfD, Allianz für Deutschland) a remporté 7 %. Les alliés bavarois de Merkel, regroupés dans le CSU (Union chrétienne-sociale), dégringolent carrément, leurs électeurs se détournant vers l’AfD. Le parti de gauche “Die Linke”, au sein duquel participe le CIO, a lui aussi gagné en termes de nombre de voix (près de 200 000 électeurs), tout en perdant en termes de pourcentage (7 %).

    En Italie, le nouveau gouvernement de Matteo Renzi, 100 jours après sa mise en place, s’en est bien sortie. Le Parti démocratique (PD, un parti “social-démocrate” similaire au PS français, a remporté son meilleur score jamais obtenu : 41 %. Cela reflète en réalité l’ampleur du désespoir qui s’est emparé dans ce pays à l’économie dévastée. L’Italie a en effet perdu 25 % de sa capacité industrielle depuis le début de la crise en 2008. Même si le Mouvement 5 étoiles (M5S, Movimento Cinque Stelle) s’est plutôt tassé lors de ces élections, il pourrait se maintenir pendant un certain temps sur base de la désillusion qui grandira envers Renzi après que celui-ci se soit installé au pouvoir, et tant qu’il n’existe pas une réelle alternative de gauche et de la classe des travailleurs.

    Sur le court terme, beaucoup de gens espèrent que Renzi pourra faire sortir l’Italie de sa crise profonde. Leurs espoirs se fondent en partie sur la mise en place d’une baisse de taxe de 80 € par mois pour toutes les personnes qui gagnent entre 18 000 et 23 500 € par mois. Mais sa popularité pourrait ne pas durer bien longtemps, vu que Renzi désire en réalité utiliser sa victoire pour mettre en place un programme néolibéral. Parviendra-t-il à le réaliser ? Rien n’est moins sûr…

    La tendance général partout en Europe était la perte du soutien envers les gouvernements nationaux. En Suède, les “modérés” (conservateurs de droite) du Premier ministre Fredrik Reinfeldt sont tombés à la troisième place, à 14 %, derrière les social-démocrates et les écologistes. Au Portugal, les partis de droite au gouvernement n’obtiennent ensemble que 28 % ; par contre, on voit des groupes marginaux comme le Parti de la Terre (MPT), un parti écologiste conservateur, passer de 0,6 % à 7 % des voix.
    Dans des pays où le pouvoir est détenu par des partis qui se déclarent de “gauche”, ce sont généralement les partis de droite, et bien souvent d’extrême-droite, qui ont progressé. La France est vraiment l’exemple le plus frappant de cette tendance : le Parti “socialiste” de François Hollande continue à péricliter, tandis que le Front national (FN) est maintenant devenu le premier parti. Cela n’a fait qu’intensifier les tensions et rivalités au sein de l’UMP (“Union pour une majorité populaire”, le parti de Sarkozy et Chirac).

    De même, au Danemark, c’est le Parti du Peuple Danois (DF – Dansk Folkeparti, de droite) qui a tiré le plus grand profit de l’impopularité des social-démocrates au pouvoir (dont le parti est passé de 25 % en 2011, à 19 % à présent). Avec cette perte de soutien, il n’est pas étonnant de voir la Première ministre (et présidente du parti social-démocrate) Helle Thorning-Schmidt maintenant raconter à tout le monde qu’elle cherche un poste à l’Union européenne. Ce que nous voyons en France comme au Danemark, est que les partis d’opposition qui sont véritablement de gauche n’ont pas tiré les leçons de la dégénérescence (voire de la trahison) des partis de “gauche” qui sont au gouvernement.

    Tout cela signifie-t-il la faillite de la gauche, en plein milieu de la plus grande crise économique des 80 dernières années ? Devons-nous nous résigner à voir la droite bénéficier de la colère croissante de la population ? Nous entendons ces questions sans arrêt. Bien qu’il nous faille répondre à cette menace qui nous vient de la droite, il faut également aussi aller plus loin lorsque nous voyons la manière dont le résultat de ces élections est présenté dans les médias. Car ce que nous voyons devant nous, c’est une véritable campagne de propagande anti-socialiste, orchestrée par tous les médias pour présenter le “socialisme” (y compris le socialisme véritable, le nôtre) comme étant quelque chose de démodé, de ringard, appartenant à une autre époque.

    La faillite de la vieille “ex-gauche”

    Tout d’abord, nous devons bien nous demander ce que nous entendons par “gauche”. Ce n’est pas simplement une question du nom du parti. Aujourd’hui, il y a toute une série de partis pro-capitalistes qui, pour des raisons soit historiques, soit électorales, s’appellent “socialistes”, “social-démocrates”, “travaillistes”… Il est possible que ces partis, jadis, aient défendu les intérêts des travailleurs, se soient battus pour le socialisme, et même pour la révolution socialiste. Mais cela fait des décennies que ces partis ont été dirigés par des politiciens pro-capitalistes qui se sont efforcés de transformer ces partis en formations complètement pro-capitalistes. Cela signifie qu’une fois au gouvernement, ils finissent à présent toujours par défendre le système capitaliste, même s’ils peuvent être de temps à autre en faveur de la mise en place de l’une ou l’autre réforme progressiste (assurance-santé, cantine gratuite à l’école, etc.) – et même ces quelques réformes semblent avoir disparu de leur programme aujourd’hui. À cause de la dégénérescence de ces partis et de la perte à présent quasi-totale de leurs racines ouvrières, nous nous trouvons dans la plupart des pays devant la nécessité de créer de nouveaux partis des travailleurs.

    C’est pourquoi la crise à laquelle sont confrontés les gouvernements soi-disant de “gauche” comme le PS français, n’est pas du tout une preuve de la faillite du socialisme. Dans beaucoup de pays, ce sont justement ces partis “socialistes”, “social-démocrates” ou “travaillistes” qui ont été l’instrument des capitalistes pour mettre en œuvre leurs attaques néolibérales, comme au Danemark et en France, ou qui ont participé en tant que partenaires dans la mise en œuvre de ces attaques, comme en Grèce, en Irlande ou aux Pays-Bas. C’est cette politique qui est la raison de leur perte de soutien parmi leur base traditionnelle et qui les rend dégoutants aux yeux de la jeunesse.

    Au début, nous avions vu dans de nombreux pays une tendance vers la gauche au moment où la crise a frappé. Il y avait un large sentiment d’opposition au fait que la “population” soit appelée à payer les pots cassés pour une crise provoquée par un petit groupe de banquiers. Dans certains pays, surtout en Europe méridionale (Espagne, Portugal, Italie, Grèce), on a vu un renouveau de la lutte de classe. On a vu toute une série de grèves et manifestations contre les mesures d’austérité, en particulier contre la dictature de la “troïka” de la Commission européenne, de la Banque centrale européenne (BCE) et du Fonds monétaire international (FMI) avec leurs soi-disant “plans de renflouement” qui n’ont fait qu’endetter encore plus ces pays tout en semant la désolation.
    Au même moment, on a vu se développer des mouvements comme Occupy ou les Indignés, qui ont commencé à remettre en question le règne des “1 %”, tant sur le plan idéologique que politique, et même à remettre en question le système capitaliste lui-même. Un point tournant a été le renversement de Moubarak en Égypte, qui a contribué à radicaliser ces mouvements. Pendant tout un temps, la place Tahrir était considérée comme un symbole de révolte.

    Tout cela nous a fourni tous les matériaux requis pour construire un puissant mouvement, capable de lutter contre l’impact de la crise et de remettre en question le capitalisme. Mais personne n’est venu construire ce mouvement. Les matériaux se sont gâtés. On n’a vu aucun programme ou stratégie claire de la part des principaux dirigeants syndicaux (pour la plupart acquis au capitalisme) pour lutter contre la crise et l’austérité ; dans beaucoup de pays, aucune force socialiste, voire simplement de gauche, n’a émergé ou n’a eu le potentiel de construire un tel mouvement de masse.

    En Allemagne, les dirigeants syndicaux ont accepté l’idée selon laquelle les travailleurs devraient faire des sacrifices pour garder leur emploi. Beaucoup de gens pensent que cette stratégie a fonctionné, vu que l’Allemagne aujourd’hui connait une reprise au niveau de ses exportations, même si le niveau de vie a continué à stagner ou à baisser. Mais il suffirait d’une baisse de ces exportations pour qu’une période de vives turbulences démarre en Allemagne aussi.

    Dans de nombreux pays européens, il y a eu beaucoup de luttes. En Grèce surtout, où il y a eu 36 grèves nationales depuis 2010, sans compter des milliers de manifestations et mouvements partout dans le pays. Mais ces grèves n’étaient pas connectées à une campagne de mobilisation constante des masses, non seulement contre les attaques, mais contre le système lui-même qui a causé cette crise. Aux yeux de nombreux dirigeants syndicaux, ces mouvements étaient juste un prétexte pour permettre d’évacuer la colère des travailleurs puis de laisser le mouvement retomber, tout en leur permettant de dire qu’ils avaient “fait quelque chose”. Le résultat ? La population grecque a vécu un véritable effondrement de son niveau de vie ; c’est le tissu social lui-même qui a été ébranlé. Les salaires ont été diminués de 60 %, le chômage est officiellement de 27 %, et le New York Times a écrit qu’entre 800 000 et un million de gens qui travaillent ont un retard de salaire d’au moins un mois, et que les services publics comme la santé ou l’enseignement sont au bord de la faillite.

    C’est ce contexte qui explique l’énorme engouement pour Syriza lors des deux élections de 2012 en Grèce. Les travailleurs et les jeunes ont senti que faire grève continuellement un jour – deux jours ne les mènerait nulle part, et ont donc décidé de passer à l’action politique. Pendant la campagne électorale de mai 2012, Syriza appelait à la formation d’un “gouvernement de gauche”, qui a été largement suivi par la population. Le parti est passé de 5 % en 2009 à 17 % en 2012, pour obtenir 30 % aux élections un mois après. Mais la direction de Syriza a commencé à reculer. L’appel à un “gouvernement de gauche” a été élargi pour inclure également des partis pro-capitalistes “de gauche”, et les dirigeants ont expliqué qu’ils n’étaient pas pour la révolution mais qu’ils allaient tenter de travailler dans le cadre du système. Alors que lors des dernières élections, Syriza avait fait campagne avec le slogan « Dégagez-les tous », il n’a pas été capable d’accroitre son soutien, même s’il est devenu le premier parti du pays.

    Les populistes de droite et l’extrême-droite

    Voilà ce qui explique la croissance des néofascistes comme Aube dorée. Ce parti a remporté 536 400 voix pour les élections européennes, soit 9 % de l’électorat. Il y a cinq ans, il n’en avait que 23 550. Lors du premier tour des élections communales, organisées une semaine avant les élections européennes, Aube dorée a obtenu 16 % à Athènes (et 11 % pour la région Attique, qui inclut Athènes).

    Tout comme les partis de droite populiste ou d’extrême-droite dans d’autres pays, Aube dorée est parvenue à s’emparer des problèmes réels et à leur fournir une “solution” – une réponse raciste et nationaliste. Sa croissance impressionnante est le reflet de la profondeur de la crise en Grèce ; c’est le résultat de la polarisation politique qui découle inévitablement d’une telle situation.
    Beaucoup de jeunes font partie des personnes les plus touchées par la crise. Le chômage des jeunes est en moyenne de 24 % en Europe (56 % en Grèce, 53 % en Espagne). Tous ces jeunes sont en concurrence les uns avec les autres pour obtenir un emploi, ce qui signifie qu’ils accepteront plus facilement un travail mal payé et dans de mauvais conditions – cela a pour effet une diminution générale des salaires, un affaiblissement des syndicats (beaucoup de jeunes ne reçoivent pas de contrat mais un travail “à la semaine” ou “à la journée”) et, dans le contexte de la libre circulation des personnes, cela peut susciter de l’hostilité entre travailleurs de différents pays. En France, le chômage des jeunes est de 24 %, et les sondages montrent que, parmi les jeunes de 18-24 ans, le FN est le premier parti – 26 % –, tandis que le dirigeant du Front de gauche, Mélenchon, n’obtient que 16 %.
    Le FN est parvenu à se construire une base en utilisant des revendications sociales, l’hostilité envers les politiciens traditionnels et le nationalisme (« Une politique française, pour les Français et avec les Français »). Mais le Front de gauche n’a pas apporté une réponse claire par rapport aux problèmes concrets, et n’est pas non plus très clair par rapport à ses relations avec la coalition de François Hollande. Malgré la descente vertigineuse du PS au gouvernement, le FdG qui obtenait auparavant 95 000 voix n’en obtient toujours que 1 200 000 (6 %), tandis que le FN est passé de 3 619 000 à 4 711 000 voix (25 %).

    En même temps, ces élections-ci ont tout de même prouvé que la montée de la droite et de l’extrême-droite n’est pas quelque chose d’inévitable. Nous voyons que la gauche, même avec un programme limité, est capable d’empêcher la droite de progresser – c’est le cas en Espagne, en Allemagne et aux Pays-Bas. Mais ce ne sera pas pour toujours. Tout échec de la gauche peut ouvrir la porte à la droite. La polarisation en Grèce est en partie le résultat de la crise, mais elle est également à imputer à la faillite totale de la social-démocratie représentée par le parti Pasok (Panelli?nio Sosialistiko? Ki?nima, Mouvement socialiste panhellénique). Au moment des élections de 2009, la crise venait à peine de commencer, et beaucoup de gens espéraient que la “gauche” les tirerait de là : le Pasok était sorti grand vainqueur avec 44 %, 3 millions de voix. À ce moment-là, Aube dorée ne faisait même pas 10 000 voix (0,29 %). Mais aujourd’hui, Aube dorée fait plus de voix que l’“Alliance Olivier” qui inclut entre autres le petit parti qu’est devenu le Pasok.
    L’extrême-droite est aussi très présente en Europe centrale et orientale, comme en Hongrie où le parti néofasciste Jobbik (Jobboldali Ifjúsági Közösség, Alliance des jeunes de droite) a également obtenu environ 7 % (il a en fait perdu 70 000 voix, vu que le taux de participation a fortement chuté – 29 % de la population a voté seulement). La Slovaquie bat tous les records avec un taux de participation d’à peine 13 %. Même en Croatie, qui vient de rejoindre l’Union européenne, l’enthousiasme ne semble pas être de mise, vu que le taux de participation était d’à peine 25 %.

    Malgré le faible taux de participation, ces résultats constituent un avertissement pour tous les politiciens de la classe dirigeante qui soutiennent encore ce qu’ils appellent le “projet européen”. Le renforcement des forces eurosceptiques, surtout de droite, et le regain de croissance des forces de gauche et anti-austérité dans certains pays, nous mène vers encore plus de tensions au sein de l’Union européenne, surtout au sein de la zone euro.

    La crise est toujours là

    Juste après les élections, le Financial Times citait François Heisbourg, président (français) de l’Institut international d’études stratégique, un “think-tank” londonien, qui disait que « La crise de l’euro est comme un cancer en rémission – une menace qui peut réemerger à tout moment ». De nombreuses menaces pèsent en effet toujours sur l’euro.

    Le danger d’une baisse du commerce mondial pourrait être source de gros problèmes pour les pays qui comptent sur leurs exportations pour se sortir de la crise, surtout en ces temps d’austérité à tous les niveaux. Cela affaiblirait notamment la position de l’Allemagne. La crise ukrainienne menace les banques autrichiennes, et de nouvelles sanctions contre la Russie nuirait également fortement aux intérêts allemands. Au sein de la zone euro, la France et l’Italie réclament plus de flexibilité par à l’austérité imposée par l’UE, et espèrent une réduction de la valeur de l’euro – ce qui pourrait avoir lieu, vu que la BCE cherche à éviter la déflation (la déflation étant une crise inverse de celle de l’inflation, lorsque tous les prix diminuent sans arrêt).

    Il est clair que le système bancaire de la zone euro présente toujours de nombreuses faiblesses. La BCE a déjà pompé 1000 milliards d’euros dans le système financier européen afin d’éviter son effondrement. Mais le Financial Times estimait début avril qu’il faudrait encore 700 milliards d’euros pour maintenir le système, au même moment où le FMI annonçait que les problèmes des banques de la zone euro constituent une menace pour la stabilité du système financier mondial. Il y a beaucoup de discussions autour de quelle stratégie employer pour éviter la déflation et pour renforcer la croissance, mais cela pourrait couter très cher. Le journal allemand Frankfurter Allgemeine Zeitung rapportait également en avril que pour faire monter l’inflation de 0,2 % (pour contrer la déflation), la BCE devra encore racheter des actifs pour une valeur de 1000 milliards d’euros. Il est vrai que Mario Draghi, le gouverneur de la BCE, a déclaré en 2012 qu’il fera “Tout ce qu’il faudra” pour sauver l’euro, il y a tout de même des limites à ce que les différents pays – surtout l’Allemagne – sont prêts à dépenser pour sauver leurs voisins.

    Malgré une reprise de la croissance dans certains pays, le PIB de la zone euro était toujours début 2014 2,5 % en-dessous de ce qu’il était à son maximum avant la crise, début 2008. La situation est toujours incertaine. L’an dernier, les entreprises européennes ont remboursé des “mauvaises dettes” pour un total de 360 milliards d’euros, soit 3,1 % de leur chiffre d’affaires total. Mais début 2014, ce chiffre d’affaires a diminué. Une nouvelle vague de crise ébranlerait également les pays les plus stables comme l’Allemagne, la Belgique, l’Autriche, etc. tout en brisant tout espoir de développement en Europe centrale et orientale.

    Un retour de la crise attiserait à nouveau les tensions entre différents pays. Dans de telles circonstances, il y aurait de plus en plus de pressions pour une scission ou une réorganisation de la zone euro, du fait que les classes dirigeantes des différents pays auraient à lutter pour leurs propres intérêts nationaux tout en cherchant à contenir la colère au sein de leurs propres pays. Beaucoup de gens sont déjà très fâchés par rapport à la “troïka” dans les pays qui ont le plus souffert des soi-disant “plans de renflouement”. De manière plus générale, beaucoup de gens sont indignés par rapport à ce qu’ils considèrent comme une domination allemande (ou plus précisément, de l’impérialisme allemand) au sein de l’UE. Tout cela peut évidemment mener à plus de rivalités nationales, à plus de décisions prises de manière unilatérale par tel ou tel pays, et donc à la désintégration de l’euro et de l’Union européenne telle que nous la connaissons.

    Les défis à venir

    Juste avant les élections, le Financial Times remarquait que : « Les Européens voient un monde dans lequel les bénéfices de la mondialisation ne concernent que les 1 % les plus riches. Tout ce qu’ils voient, c’est que leur revenu stagne, que leur emploi est précaire, et que leurs enfants sont sans travail ». Dans de nombreux pays, nous connaissons en ce moment une période de calme au niveau des luttes ; il ne faut pas se tromper dans notre analyse de ce que cela veut dire. Ce calme ne veut pas dire que la population accepte passivement la situation ou accorde le moindre crédit dans les beaux discours des politiciens et des gouvernements. Les résultats des élections montrent bien que toute une série de tensions sont en train de se développer sous la surface, qui sapent l’ancien ordre établi.

    Il y aura inévitablement de nouvelles luttes, de nouveaux mouvements des travailleurs, de la jeunesse, et d’autres couches de la population, parmi lesquels de plus en plus de gens tireront la conclusion qu’ils ne peuvent pas continuer comme ça, quand une crise vient après l’autre. De nouvelles expériences seront faites, de nouvelles leçons seront tirées. Il y aura de plus en plus de concurrence entre les différentes organisations qui misent sur le mécontentement pour se construire une base. Au Royaume-Uni, la question reste posée de savoir si l’UKIP sera vraiment capable de s’implanter en tant que formation durable dans le paysage politique (comme le FN en France ou le FPÖ en Autriche) ou s’il n’est que phénomène temporaire mais qui pourrait mener à de nouveaux développements à droite.

    Nous allons voir toute une série de nouvelles occasions pour la gauche, qui lui donneront la possibilité de damer le pion à l’extrême-droite. L’extrême-droite n’a en réalité rien à offrir derrière ses slogans populistes, parce qu’elle ne remet pas en question le système capitaliste. Cela veut dire que son programme ne permettra pas d’apporter la moindre solution aux problèmes réels de la population laborieuse. Si nous disposions d’une force de gauche socialiste, armée d’un programme socialiste largement diffusé, et qui montre qu’elle est véritablement prête à réaliser ce programme, alors nous pourrions vaincre l’extrême-droite. Notre défi est de construire cette force.

    Les élections du mois de mai ont été révélatrices de la situation de la gauche en Europe. Dans beaucoup de pays, comme la Grèce, l’Espagne, les Pays-Bas, le Portugal ou l’Allemagne, les partis de gauche ont d’importantes positions, qui peuvent être utilisées pour faire progresser les luttes et reconstruire le mouvement des travailleurs. En Belgique, le succès du Parti du Travail (PTB/PvdA), qui vient de gagner ses tous premiers députés au niveau national et régional, lui donne la possibilité de jouer un rôle crucial – la question restant cependant posée, de savoir si les dirigeants de ce parti sont prêts à abandonner l’approche dirigiste qu’ils ont héritée de leur passé maoïste. En Irlande, le vote anti-austérité a été si puissant que nous voyons s’ouvrir une nouvelle période, qui peut nous offrir de nouvelles possibilités pour construire une force socialiste.

    Mais des victoires électorales ne sont pas par elles-mêmes une garantie de l’avenir d’un parti ou du rôle qu’il jouera. Nous avons toujours en mémoire le triste exemple de la Refondation communiste en Italie ou du Parti socialiste écossais, qui ont gaspillé leur incroyable potentiel. Les partis sont sans arrêt soumis au test des évènements, sans arrêt confrontés à de nouveaux défis.
    Les élections ne sont pas la plus facile des formes de lutte, et les résultats ne progressent pas de manière linéaire. En Irlande, Paul Murphy, candidat du Parti socialiste (CIO irlandais) n’a pas été réélu à son siège de député européen, en partie parce qu’un autre parti de gauche, le Socialist Workers Party (SWP) a présenté son propre candidat contre lui. Mais le même jour, notre camarade Ruth Coppinger a été élue au parlement irlandais (ce qui porte à deux le nombre de nos députés en Irlande), et nous avons également gagné de nouveaux conseillers communaux.

    Les victoires électorales remportées par la gauche peuvent devenir d’importants points de soutien pour aider les luttes à venir et contribuer à reconstruire le mouvement des travailleurs. Mais cela ne se fera pas de manière automatique. Le progrès de l’extrême-droite et des néofascistes est un avertissement. L’Europe capitaliste sera frappée par de nouvelles crises et de nouveau troubles. De nouveaux mouvements des travailleurs et de la jeunesse surviendront inévitablement. L’épreuve pour tous sera la victoire ou non des ces luttes, et la reconstruction effective du mouvement ouvrier dans le cadre d’une perspective socialiste.

  • Grèce : Syriza en tête aux élections européennes

    Des membres du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) élus à Volos

    Le parti de gauche Syriza est arrivé en tête des élections européennes en Grèce, dépassant même le parti de droite Nouvelle Démocratie, principal parti au pouvoir. Andros Payiatsos, secrétaire général de Xekinima, le parti-frère du PSL en Grèce, revient dans le texte ci-dessous sur la signification de ces résultats ainsi que sur la percée de Xekinima dans la ville de Volos (une importante ville portuaire et industrielle de 144.000 habitants).

    Andros Payiatsos, Xekinima (CIO-Grèce)

    Le parti de gauche grec Syriza est devenu le premier parti du pays, devançant de 3,9% la Nouvelle Démocratie aux élections européennes. Cette différence est toutefois essentiellement due à une perte de soutien pour la Nouvelle Démocratie. Le nombre de suffrages recueillis par Syriza a en effet diminué depuis les élections de juin 2012. Il s’agit d’une perte importante de 138.000 voix, ce qui représente plus de 8% des votes obtenus en 2012.

    Ainsi donc, alors que Syriza “célèbre” sa position de premier parti du pays, les partis de la coalition gouvernementale, la Nouvelle Démocratie et le PASOK (le parti social-démocrate traditionnel), soupirent de soulagement et disent que Syriza ne possède pas un soutien suffisant pour constituer un gouvernement. Syriza a mené campagne autour de l’idée d’utiliser le scrutin européen pour se débarrasser du gouvernement. «Le 25 nous votons, le 26 ils s’en vont » était le mot d’ordre central de la campagne! Mais la coalition gouvernementale n’est pas immédiatement menacée d’effondrement.

    Les sentiments sont très mitigés, en particulier parmi les rangs de Syriza. Les gens sont heureux que Syriza soit devenu le premier parti du pays et soit capable de viser la victoire aux prochaines élections. Mais il est clair que Syriza n’est pas assez fort pour disposer d’un gouvernement majoritaire ou pour provoquer la chute du gouvernement dans l’immédiat, comme souhaité par de nombreuses personnes.

    Aube Dorée

    Un autre facteur qui explique cet enthousiasme très réservé, même parmi la base de Syriza, est le résultat important recueilli par le parti Aube Dorée, près de 9,5% des voix, en dépit du fait qu’Aube Dorée a démontré être un gang meurtrier. La plupart de sa direction est actuellement en garde à vue et le parti est bien connu pour être une organisation nazie, de nombreuses preuves ayant été fournies par les médias et le système judiciaire.

    Cette hausse du soutien électoral pour Aube Dorée s’explique fondamentalement par la profondeur de la crise et par l’absence totale d’issue offerte par les partis de gauche pour sortir de celle-ci.

    Le principal facteur expliquant ces évolutions est le fait que SYRIZA se soit de plus en plus orientée vers la droite au cours de ces deux dernières années et que le KKE (Parti Communiste Grec) et ANTARSYA (une alliance « anticapitaliste de gauche ») aient suivi une politique sectaire en refusant de collaborer avec les autres forces. Cela crée un vide politique dans la société, un vide utilisé par les néo-nazis.

    Ce manque de politiques socialistes audacieuses de la part de Syriza est l’explication de base quant à son incapacité à inspirer et attirer les masses de travailleurs grecs. La baisse du soutien pour Syriza était particulièrement élevée dans les quartiers de la classe ouvrière d’Athènes, du Pirée et de Salonique. Le KKE et ANTARSYA ont également obtenu de faibles scores aux élections européennes – le KKE recevant seulement 6% et ANTARSYA 0,7%.

    “Votez pour la Gauche – Luttez pour faire tomber le gouvernement!”

    Des élections locales se sont déroulées en même temps que les élections européennes en Grèce. Xekinima (la section grecque du Comité pour une Internationale Ouvrière et parti-frère du PSL) a présenté une vingtaine de candidats dans différentes villes, district et conseils régionaux, non pas partout où des forces de Xekinima étaient présentes, mais là où existaient des listes ayant un profil de gauche militant ainsi qu’une approche «fédératrice» et ouverte envers les autres forces de Gauche. L’un des slogans que nous avons utilisés le plus fréquemment était «Votez pour la Gauche – Luttez pour faire tomber le gouvernement ». Nous avons expliqué la nécessité de disposer d’un programme socialiste, les insuffisances du programme de Syriza et l’erreur sectaire de la gauche en refusant de collaborer ensemble.

    Dans environ 60% des cas, nous présentions des candidats avec Syriza, dans d’autres, avec Antasya et dans le cas d’un conseil local, avec le parti communiste KKE. Xekinima a été la seule organisation à gauche à se présenter avec tous les partis de gauche dans différentes circonscriptions – alors que les trois principaux partis de gauche refusent de se parler les uns les autres. Inutile de dire que la campagne de Xekinima était une campagne indépendante, basée sur notre propre matériel et nos propres positions politiques.

    Nos résultats ont été très bons. Nous avons en général pu compter sur un bon soutien dans des listes comptant entre 38 candidats et 70 candidats, en fonction de la taille des circonscriptions. Les régions ont une moyenne de 850.000 personnes, les districts peuvent atteindre la taille de 200.000 habitants.

    Les plus grands succès obtenus par Xekinima le furent à Volos, où Xekinima se présentait avec SYRIZA et à Zografou (dans le Grand Athènes) où Xekinima se présentait avec ANTARSYA. Notre camarade Nikos Kanellis a été élu dans un conseil de district de la ville de Volos en ayant reçu le vote de 750 électeurs, ce qui le place au quatrième rang sur 40 candidats. Costas Iatropoulos a été élu au conseil municipal de Volos, avec près 650 votes, ce qui le plaçait en seconde position. Une autre camarade, Marianthi Kypridou, est arrivée en quatrième position à la même élection, avec près de 470 votes. Les résultats officiels ne sont pas encore connus, mais la chance est réelle qu’elle puisse elle aussi intégrer le conseil municipal de Volos.

    Les élections européennes n’ont pas été très bonnes pour Antarsya, mais cette formation a obtenu le score respectable de 2,5% aux élections locales. A Zografou, Xekinima a collaboré avec Antarsya et la liste commune, appelée «Mouvement Zografou » a reçu 4% – un succès qui est dans une large mesure à attribuer à la présence de militants de gauche en général, mais aussi à la présence de Xekinima. Notre camarade Irene Ploumbidi a reçu le plus grand nombre de votes individuels, arrivant première sur les 38 candidats et recevant 15% des votes de la liste « Mouvement Zografou ». Le système de représentation au conseil municipal adopté par le Mouvement Zografou est basé sur un système de rotation, comme il s’agit d’une alliance de différents groupes et forces. Sur cette base, notre camarade Irene sera la première conseillère à remplacer la tête de liste, qui sera le premier à représenter la liste au conseil.

    Ces élections ont constitué la plus grande campagne jamais lancée par Xekinima. Nous avons produit un total de 250.000 tracts diffusés partout. Notre intervention a eu un impact, et nos résultats n’auront pas manqué d’être notés par le reste de la Gauche à travers le pays.

    Xekinima a vendu plus de 1.200 exemplaires de son journal, et a tenu un certain nombre de réunions publiques réussies, environ 20 au total. Nous avons pu élargir notre périphérie et un certain nombre de nouveaux camarades ont rejoint nos rangs.

  • USA : victoire pour les 15$ à Seattle !

    La lutte paie !

    Seattle est la première grande ville à adopter un salaire minimum de 15 $ de l’heure. 100.000 travailleurs vont ainsi pouvoir sortir de la pauvreté et des millions de personnes à travers le pays et au-delà vont être inspirées par cette lutte et cette victoire !

    Par Socialist Alternative

    Le 29 mai, le comité du conseil municipal en charge du dossier du salaire minimum a donc pris la décision d’élever le salaire minimum à Seattle de façon à ce qu’il soit le plus élevé du pays . Ce n’est toutefois pas encore une loi, ce ne sera le cas que lorsque le conseil municipal entier aura pu voter sur cette question, le lundi 2 juin.

    Selon la proposition de loi, à partir du premier avril 2015, tous les travailleurs des grandes entreprises comme McDonald’s, Starbucks, Macy’s et Target verront leurs salaires immédiatement augmentés jusqu’à 11 $ de l’heure. D’ici 2025, tous les travailleurs gagneront un minimum de 18 $ de l’heure. Selon diverses estimations, les entreprises de Seattle devront payer 3 milliards $ de plus sous forme de salaire au cours des dix prochaines années ! Voilà qui démontre que ‘‘la lutte paie’’, que les gens de la rue peuvent s’en prendre aux plus grandes corporations du monde et l’emporter pour autant qu’ils s’organisent et ripostent.

    Une véritable socialiste élue au Conseil municipal

    Le mouvement des travailleurs des fast foods, inspiré par le mouvement Occupy, a poussé la revendication des 15 $ de l’heure sur le devant de l’actualité dans tout le pays. Ensuite, la pression s’est accrue à Seattle lorsque le mouvement des travailleurs a réussi à gagner un vote sur les 15 $ en novembre dernier à SeaTac, une petite ville proche de Seattle. Mais c’est l’élection de la candidate de Socialist Alternative, Kshama Sawant, fin de l’année dernière qui a été décisive pour créer un véritable moment politique qui n’a su être brisé. Sawant avait fait campagne sur base d’un programme où figurait en bonne place la revendication des 15$ de l’heure, et cela a ouvert un large débat à travers toute la ville. Elle fut élue avec près de 100.000 voix en novembre 2013.

    ‘‘Sawant a démontré qu’être socialiste n’est plus un problème dans la gestion de la fonction publique. Plus important encore, la campagne des 15 $ de l’heure a nourri un modèle de démocratie par la base qui défie le processus politique contrôlé par les entreprises. Les observateurs s’attendent à ce que le projet de loi passe fin mai 2015. Si c’est le cas, la victoire – bien qu’imparfaite – validera l’approche de Socialist Alternative, gonflera ses rangs et ouvrira plus d’espace pour une politique socialiste aux Etats-Unis’’ Arun Gupta, Al Jazeera America, “Learning from a Socialist in Seattle,” May 21, 2014

    Il était important de gagner les élections, mais il l’était tout autant de voir comment Sawant et son parti, Socialist Alternative, allaient utiliser ce siège au Conseil municipal comme plate-forme pour les mobilisations sociales. Contrairement aux politiciens typiques de l’establishment, Sawant a utilisé sa position et l’attention des médias pour construire un puissant mouvement. Peu de temps après son élection, Kshama Sawant et Socialist Alternative ont lancé une campagne – 15 NOW – pour instaurer la pression la plus élevée autour de la revendication du salaire minimum de 15 $ de l’heure. 15 NOW a développé 11 groupes d’action de base dans divers quartiers de la ville afin de mobiliser, d’aider à faire descendre les habitants dans les rues et d’intervenir dans les forums publics. Avec ces groupes d’action de base et la tenue de conférences démocratiques, 15 NOW a donné la possibilité aux activistes d’avoir réellement en leurs mains propres la lutte pour les 15 $ de l’heure.

    Grâce à sa position publique, Kshama Sawant a été en mesure de contrer la propagande des médias dominants acquis aux grandes entreprises et de dénoncer les tentatives du monde des affaires de noyer le thème des 15 $ et de se cacher derrière l’impact que cette mesure aurait pour les petites entreprises et les petits commerces. Socialist Alternative a su démontrer comment un élu pouvait être utilisé afin de construire un mouvement et pour le renforcer. Socialist Alternative, la campagne 15 NOW et le mouvement syndical ont instauré une pression suffisante de la base pour forcer les grandes entreprises à concéder les 15 $ minimum de l’heure. Il s’agit d’une une réalisation historique aux Etats-Unis.

    Il nous faut un parti indépendant pour représenter les travailleurs et les jeunes

    Le mouvement des travailleurs et les défenseurs des idées du socialisme ont mis sur la table la revendication des 15 $. Le Parti Démocrate a quant à lui invité les grandes entreprises à cette table en cherchant à édulcorer cette exigence.

    Au départ, tous les politiciens du Parti Démocrate se sont opposés aux 15 $. Mais au vu du développement d’un gigantesque soutien public, les deux principaux Démocrates en lice pour le poste de maire se sont prononcés en faveur des 15 $ en septembre 2013. Après avoir remporté l’élection en novembre, le maire Ed Murray a déclaré qu’il soutenait les 15 $, mais qu’il voulait le faire de manière à ce que cela ‘‘fonctionne pour les entreprises aussi’’.

    Murray a ainsi mis en place un comité consultatif de dirigeants patronaux et syndicaux (mais surtout patronaux) pour négocier un compromis. L’establishment politique et patronal a bien dû reconnaitre qu’il était impossible de stopper les 15 $, mais il a cherché à utiliser le processus de négociation pour insérer un certain nombre de mesures favorables aux entreprises, comme d’appliquer l’augmentation sur une longue période de plusieurs années. Le monde des affaires s’est battu jusqu’au dernier jour pour diluer plus encore le projet de loi.

    Lors du vote du 29 mai en comité, une majorité des membres du conseil du Parti Démocrate a proposé de repousser la date d’application de la loi jusqu’à avril 2015 et d’inclure un sous-salaire minimum pour les adolescents ainsi qu’un ‘‘salaire de formation.’’ La campagne 15 NOW et Socialist Alternative appellent les syndicats, les activistes et chaque partisan des 15 $ à venir assister ce lundi 2 juin à la séance du Conseil municipal de Seattle, où le projet de loi sera finalisé, afin de se battre pour l’élimination des échappatoires pro-patronat ajoutés le 29 mai, y compris le délai de mise en œuvre et le ‘‘salaire de formation’’.

    Tout cela a illustré que même si le Parti Démocrate recourt à une rhétorique plus progressiste que les Républicains, ces deux partis sont fondamentalement soumis à la défense des intérêts des grandes entreprises. Alors qu’une seule élue socialiste authentique au conseil municipal de Seattle a été en mesure de construire un mouvement pour gagner les 15 $ en moins d’un an, les politiciens du Parti Démocrate n’ont pas ménagé leurs efforts pour assurer que le salaire minimum de 15 $ de l’heure soient le plus favorable possible aux patrons. Au niveau national, les Démocrates ne sont pas parvenus à organiser sérieusement la lutte pour un salaire minimum de 10,10 $ de l’heure, ils ne se servent de cette question que comme gadget électoral pour les élections de 2014.

    C’est pourquoi Socialist Alternative soutient, à l’instar de ce que nous avons fait durant la campagne électorale de Kshama, que les travailleurs ont besoin de leur propre alternative politique contre les partis Démocrates et Républicains. Compte tenu de l’énorme aliénation éprouvée face au Congrès, de la grande méfiance à l’égard des politiciens et de la nécessité de défendre les travailleurs et leurs familles, il existe une occasion unique de construire un nouveau parti large des travailleurs.

    Le travail de Kshama Sawant et de Socialist Alternative a démontré qu’il est possible de faire entendre une voix politique indépendante pour contester les deux partis du big-business. La victoire de Kshama et de Socialist Alternative peut se propager à travers le pays.

    Une stratégie combattive pour le mouvement des travailleurs

    Seattle a réussi à gagner le salaire minimum le plus élevé des États-Unis, mais le monde du capital est parvenu à affaiblir les 15 $ de diverses façons. Le délai pour que cette revendication soit pleinement d’application est déraisonnable, de 3 à 10 ans en fonction de la taille de l’entreprise, et il existe aussi une pénalité pour les pourboires et une déduction pour les soins de santé pour les 10 premières années. Ce n’était pas inévitable. Au cours des 6 derniers mois, Socialist Alternative s’est énergiquement engagé dans un débat au sein du mouvement syndical sur la meilleure stratégie à adopter. Nous exhortons les syndicalistes, les activistes et les dirigeants syndicaux à examiner l’expérience de cette lutte, à en discuter avec nous et à en tirer les leçons nécessaires pour l’avenir.

    À notre avis, la stratégie de ceux qui dirigent les principaux syndicats n’a pas été axée sur le renforcement du mouvement de la base, mais plutôt orientée vers le processus de négociation du maire avec les entreprises. Ils considéraient cette approche comme nécessaire en conséquence de leur manque de confiance envers la capacité du mouvement des travailleurs de pouvoir l’emporter dans le cadre d’un affrontement direct et ouvert avec les grandes entreprises.

    Après les décennies de recul des luttes que nous avons connues, cette faible confiance en les capacités de la classe ouvrière est compréhensible. Le débat autour des 15 $ a cependant été une énorme occasion d’essayer de mobiliser de nouvelles couches de travailleurs dans un mouvement de lutte, ce qui aurait instauré davantage de pression tout en permettant à une nouvelle génération d’acquérir l’expérience de l’organisation et d’en tirer les leçons politiques. Cela aurait été une manière de commencer à reconstruire le mouvement des travailleurs sur des bases combattives.

    C’est dans ce contexte que nous avons défendu de déposer un référendum pour les 15 $. Si les grands syndicats avaient soutenu cette menace, les entreprises auraient pu être forcées à faire des concessions plus grandes encore. La collecte des 100.000 signatures pour déposer ce référendum aurait été l’occasion de toucher de larges couches de la population et de les insérer dans l’organisation de la lutte tout en répondant aux arguments anti-travailleurs des entreprises et des médias (concernant le délai d’application, le salaire de formation, la question des pourboires,…).

    Les syndicats américains ont d’énormes ressources et disposent d’un grand poids politique. Ils ont des millions de dollars et des millions de membres qui pourraient être mobilisés derrière une campagne audacieuse pour augmenter le salaire minimum.

    Les grèves dans les fast foods ont joué un rôle crucial en attirant l’attention sur la question des salaires de misère, mais le mouvement pourrait être beaucoup plus fort si les syndicats en finissaient une bonne fois pour toutes avec leur dépendance à l’égard du Parti Démocrate et s’ils mobilisaient toute la force des travailleurs à travers la construction d’un mouvement de masse démocratiquement dirigé.

    Au cours des trois dernières décennies, la stratégie des syndicats a été de tenter de cajoler les grandes entreprises en espérant obtenir des concessions seulement. Cela n’a fait qu’accroitre la soif du monde des entreprises. Il est temps d’abandonner cet effort futile.

    Et nous devons nous rappeler qu’aucune réforme n’est garantie sous le capitalisme. Les grandes entreprises pourraient contester ce qui a été gagné à Seattle par un référendum ou d’autres moyens. Notre mouvement doit être prêt à se mobiliser et à défendre ce que nous avons gagné.

    Rejoignez la lutte pour le socialisme !

    “A la fin,” a écrit Arun Ivatury et Rebecca Smith pour CNN.com, “la percée réalisée à Seattle démontre (…) que lorsque les travailleurs sont bien organisés et qu’il existe un large soutien pour de meilleurs salaires, même les entreprises qui résistent à cette idée sont forcées de payer plus.” (15 mai 2014)

    Socialist Alternative soutient chaque réforme possible qui peut être obtenue sous le système capitaliste. La lutte pour les 15 $ a démontré que lorsque nous sommes organisés, nous pouvons vaincre.

    Mais cette lutte a aussi démontré que tant que nous restons à l’intérieur du cadre du capitalisme, les grandes entreprises vont se battre bec et ongles pour défendre leur pouvoir et leurs profits. La lutte pour de meilleurs salaires, pour un enseignement gratuit et de qualité, pour des soins de santé accessibles à tous, pour des logements abordables, pour la défense de l’environnement, et la justice sociale en général doit être une lutte pour une transformation socialiste de la société, basée sur une véritable égalité et sur la satisfaction des besoins de l’Humanité.

  • Irlande : Ruth Coppinger fait son entrée au Parlement

    Hier, Ruth Coppinger est officiellement entrée au Parlement irlandais (lire notre article au sujet de son élection). Comme c’est de tradition, elle a été félicitée par les autres partis. Joe Higgins, également parlementaire de notre section irlandaise le Socialist Party, a lui aussi accueilli sa collègue de parti. Dans la vidéo ci-dessous, Joe commence à parler à 4:30.

    Plus tard au cours de cette journée, Ruth Coppinger a pris la parole dans un débat parlementaire au sujet du logement. Elle a dénoncé le manque d’investissements publics pour les logements sociaux.

  • Grèce : de grandes opportunités pour la gauche

    Interview publiée la semaine dernière sur le site sozialismus.info (site de la section allemande du Comité pour une Internationale Ouvrière).

    Les 18 et 25 mai, des élections municipales ont lieu en Grèce qui peuvent menacer la survie du gouvernement Samaras et renforcer la gauche. Xekinima, notre organisation-soeur en Grèce, présente 19 candidats à Athènes, Thessalonique, Volos ainsi qu’à d’autres endroits. Nous en avons discuté avec Katerina Klitsa, candidate à Thermaikos (Thessalonique).

    Avec le “retour sur les marchés” le gouvernement Samaras et les médias estiment, à quatre semaines des élections locales et européennes, que le plus dur est passé pour la Grèce. Le bout du tunnel est-il vraiment en vue ?

    Katerina: “La vérité, c’est que rien n’a changé pour la toute grande majorité des Grecs. Le gouvernement fait du show pour les élections et la plupart des personnes le savent. La dette publique n’a fait que croître (de 148% en 2010 à 175% aujourd’hui) et est loin d’être payée. Mais dans le cadre des élections, le gouvernement a distribué des ‘dividendes sociaux’, des primes symboliques et uniques pour les plus pauvres qui ont reçu 647 euros par famille. L’objectif de cette contribution est de créer l’illusion que tout va mieux. Mais les problèmes sont toujours énormes. Seul un tiers des 800.000 demandes d’un ‘dividende social’ a effectivement été accordé. Dans beaucoup de cas, la contribution a directement été retenue par les banques comme élément des programmes de dettes. L’économie continue à se contracter et il n’y a pas de travail.”

    Ici, au bureau de Xekinima, nous avons parlé avec deux activistes qui cherchent un (meilleur) emploi. Mariana a un diplôme de psychologie et travaille dans une institution pour personnes déficientes mentales. Elle explique que son employeur avait proposé un contrat à temps partiel de 250 euros par mois. “C’est peu mais j’hésite à accepter cet emploi ou continuer à chercher autre chose.” Le dilemme de Mariana s’est solutionné quelques jours plus tard lorsqu’il a été annoncé que 2,1 millions d’euros devaient être économisés dans les soins de santé. Par conséquent, du personnel sera licencié plutôt qu’engagé. Stavroula travaille à temps partiel depuis un mois comme vendeuse dans une boutique de vêtements au centre-ville. Elle nous montre sa fiche de paie : 299 euros nets pour 105 heures prestées. Stavroula survit parce qu’elle peut vivre dans une habitation qui appartient à ses parents et a, de plus, trouvé un colocataire.

    Que fait la gauche dans la campagne électorale et comment est-elle vue par la population ?

    Katerina: “Les partis de gauche et surtout Syriza et sa direction ont fait des compromis sur beaucoup de thèmes. En 2012, ils étaient encore contre le mémorandum, maintenant Tsipras et d’autres leaders parlent de ‘renégocier’. Il n’est donc pas étonnant que plus de 60% des propres électeurs de Syriza ne pensent pas que le parti mettra fin à la politique de la troïka. Quand nous interpellons les gens en rue avec des slogans tels que ‘Les municipalités aux mains de la gauche’, il y a de la méfiance. Beaucoup émettent des doutes quant au fait que même si Syriza avait la majorité, cela mènerait à du changement. Dans les sondages, Syriza a encore une petite avance sur le parti gouvernemental de droit Nouvelle Démocratie. C’est un énorme pas en avant, cela ne fait que deux ans que Syriza a fait une percée lors des élections parlementaires. Entre-temps, la popularité de la gauche s’est bien renforcée.

    “Mais même les autres forces de gauche n’offrent pas de solutions. Presque 90% de leur propagande électorale et de leurs discours sont consacrés à critiquer le gouvernement et seuls 10 % à de propres propositions. Le parti communiste KKE s’oppose surtout à Syriza plutôt que de mettre en avant un programme plus radical. Aucune perspective claire n’est offerte à la population grecque. Cela facilite la propagande du gouvernement selon laquelle ils prétendent être les seuls à pouvoir offrir la stabilité au pays.

    “D’autre part, la fasciste Aube Dorée peut aussi en profiter. Le parti participe aussi aux élections même si une partie de ses cadres est en prison. Le soutien reste important, entre 3,5% et 6,5%, et ce, malgré le fait qu’il est généralement connu qu’il s’agit d’un parti d’assassins. Il faut rechercher la base de ce soutien dans la politique de la troïka. Pour l’instant, il ne semble pas qu’Aube Dorée obtiendra un maire quelque part mais le parti est à nouveau à l’avant-plan et s’implante dans les quartiers, même à Thessalonique où Aube Dorée était très faible auparavant.

    Pourquoi Xekinima a de propres candidats sur les listes de Syriza ?

    Katerina: “Il ne suffit pas d’avoir de bonnes idées et propositions, nous avons besoin de gens qui popularisent ces revendications. Xekinima plaide pour une collaboration de la gauche en Grèce, nous estimons que KKE, Syriza et Antarsya doivent s’unir pour présenter des listes communes aux élections sur lesquelles il y aurait aussi de la place pour d’autres organisations de gauche. De telles listes lors des élections locales et européennes auraient pu changer l’image de la gauche. Mais le KKE et Antarsya surtout s’opposent à une telle collaboration, pour eux les divergences politiques sont plus importantes que la lutte contre la troïka et la construction d’un mouvement ouvrier. Nous estimons que c’est une erreur et qu’une gauche unie serait plus forte.

    “Syriza est de loin la force de gauche la plus forte. Une gouvernement dirigé par Syriza inciterait beaucoup de personnes à renforcer la lutte pour l’obtention de leurs revendications. Cela donnerait une nouvelle dynamique aux mouvements. La direction de Syriza n’est certainement pas radicale ou conséquente, il appartiendra aux activistes, il nous appartiendra, de nous battre pour que nos revendications soient rencontrées et pousser la direction à gauche même si nous ne leur faisons pas confiance. Dans nos tracts, nous insistons surtout sur notre programme et sur ce que la gauche doit faire. Nous présentons notre programme pas celui de la direction de Syriza.

    “Dans certaines villes où la direction de Syriza présente surtout d’anciens mandataires du PASOK comme candidats et où ces candidats ont une très mauvaise réputation du fait de leurs anciennes positions ou du manque d’un programme de gauche, nous nous présentons avec d’autres forces de gauche. Ainsi, nous avons quelques candidats sur la moins grande liste anticapitaliste Antarsya.”

    Quels sont les points de programme les plus importants ?

    Katerina: “Si la gauche gagne les élections municipales, nous ne pourrons accepter les mesures d’austérité, nous devrons mobiliser la population contre la politique antisociale et réclamer plus de moyens pour les municipalités de la part du gouvernement. Nous devrions nous opposer à tout licenciement dans les municipalités. Les besoins quotidiens des gens doivent être traités au niveau municipal, par exemple avec des magasins municipaux et du soutien aux mouvements de solidarité, entre autres dans les soins de santé. L’impôt municipal sur les grandes entreprises doit être augmenté. Les maires de gauche doivent être présents à chaque mouvement de lutte et s’opposer au programme qui bride les moyens réservés aux municipalités. Nous avons besoin d’une implication démocratique et d’un contrôle des habitants, par exemple, via des comités de quartier. Des conseils municipaux de gauche doivent aussi construire des municipalités antifascistes. Ils doivent soutenir et renforcer des activités antifascistes.”

    A ton avis, que se passera-t-il après les élections ?

    Katerina: “Il y a beaucoup de possibilités en fonction de qui de Syriza ou de la Nouvelle Démocratie aura le plus de voix. Tout est encore ouvert. Si Syriza gagne les élections européennes avec une grande avance sur Nouvelle Démocratie, il n’est pas exclus que le gouvernement démissionne et que de nouvelles élections arrivent. Si le parti gouvernemental gagne, la confiance en soi sera renforcée pour poursuivre la politique actuelle. C’est pourquoi, nous appelons pour les élections européennes à renforcer Syriza pour mettre le gouvernement sous pression. Cela renforcerait le mouvement ouvrier et cela montrerait à la population qu’une altvernative est possible.

    “Le résultat des élections municipales peut être très varié. Les municipalités où la gauche gagnera doivent construire un réseau commun pour mieux mener la lutte contre les diktats de la troïka et pousser des améliorations. Quoi qu’il en soit, la lutte continue, tant contre le gouvernement, la troïka et la crise que pour les préoccupations quotidiennes des gens. Nous devons continuer à réclamer une gauche unie et un gouvernement de gauche qui offre une réponse à la crise capitaliste sous forme d’un programme qui reprend en mains publiques, les banques et les secteurs-clé de l’économie pour arriver une société socialiste sans exploitation.”

  • Sri Lanka : Interview de Siritunga Jayasuriya

    Par Geert Cool

    De par la présence d’une population tamoule dans notre pays, l’actualité au Sri Lanka y a suscité un plus grand intérêt pour les militants de gauche et les défenseurs des idées du socialisme. Presque 10 ans après le tsunami dévastateur qui a provoqué des milliers de morts et presque cinq ans après la fin meurtrière de la guerre civile longue de plusieurs décennies qui a fait rage dans le pays, le régime du président Rajapakse commence à montrer ses premières fissures. Nous en avons parlé avec Siritunga Jayasuriya, secrétaire général d’United Socialist Party, section du Comité pour une Internationale Ouvrière au Sri Lanka et parti-frère du PSL.

    Dix ans après le tsunami et cinq ans après la fin officielle de la guerre, le gouvernement de Rajapakse parle d’une forte croissance économique et de prospérité. La situation est-elle vraiment meilleure pour le commun de la population ?

    Siritunga: “Une partie importante de la population qui a, à l’époque, été touchée par le tsunami en supporte encore les conséquences aujourd’hui. Presque 10 à 15 % des victimes de l’époque éprouvent toujours des problèmes consécutifs au tsunami. C’est particulièrement le cas dans l’est du pays, dans et autour de Pottuvil et dans d’autres villes de l’est. Beaucoup n’ont toujours pas de maison et vivent dans des centres d’accueil temporaires. Après le tsnunami, il y a eu beaucoup de soutien de l’ouest mais il n’y a pas eu de plan pour aider les victimes. Lors de la reconstruction, beaucoup d’argent a disparu et il y a eu de la discrimination surtout vis-à-vis de la population de l’est.

    “Le gouvernement dit que maintenant, tout va bien et qu’il y a une croissance économique. Mais ce soi-disant développement économique ne bénéficie pas à la plus grande partie de la population. Il y a des travaux d’infrastructure, mais quelles sont les priorités ? Les grands prêts de la Chine sont utilisés pour servir le planning du président et de sa famille pas pour la population.

    “Prenez Hambantota, le district dont Rajapakse est originaire. On y a construit un nouveau port maritime, un nouvel aéroport, un nouveau stade,… qui ont d’ailleurs tous été appelés comme Rajapakse. Mais dans le port, il n’y a pas de bateaux, au stade, pas la moindre équipe de cricket. On dépense beaucoup d’argent et le rêve de Rajapakse était de concurrencer Singapour. Mais pourquoi construire un nouveau port à une distance relativement courte des ports existants de Galle et de Colombo ? Les facilités ne sont pas adaptées et la réexpédition de navires depuis Colombo coûte plus cher au pays et à la communauté. La population n’en tire aucun avantage, seul compte le prestige du président et de sa famille.

    “Alors que le gouvernement augmente les taxes sur les biens de base comme les oignons et les pommes de terre, ce qui crée des problèmes à la population, la taxe sur les voitures de sport de luxe a été supprimée. Le fait que le fils du président se ballade volontiers en Lamborghini n’y est pas étranger. Cela résume bien le projet du gouvernement et pourquoi le mécontentement augmente.

    “Lors des élections provinciales, ce mécontentement croissant a été vérifié. Le gouvernement a perdu et cela l’inquiète. Il y a un peu de confusion sur ce qui va se passer maintenant. Nous en saurons certainement plus le 1er mai. Alors, tous les partis organiseront des activités et des marches dans le pays. Même le gouvernement le fait et profite de l’occasion pour faire des déclarations.”

    Malgré le mécontentement croissant, l’opposition officielle ne semble pas bien s’en tirer. L’UNP (United National Party) de droite a à peine progressé. Comme cela se fait-il ?

    Siritunga: “L’UNP est un parti capitaliste pro-occidental qui n’a aucun progrès à offrir à la population. En fait, le programme de l’UNP est aujourd’hui exécuté par ce gouvernement, c’est un programme de réformes néolibérales. Le manque d’alternative proposée par l’UNP met le parti en crise et le fait stagner. Lors de ces élections, le dépérissement a stoppé mais il n’y a pas eu de progression.

    “Le fait que le gouvernement ait maintenant peu de soutien même à Colombo a constitué un nouveau facteur lors de ces élections provinciales. Le fait que le gouvernement avait peu de soutien dans le nord et l’est n’était pas nouveau. Mais maintenant, les Tamouls et les musulmans dans la capitale ont massivement voté contre le gouvernement. Aucun des candidats tamouls ou musulmans de la coalition gouvernementale n’a obtenu de siège. Cela indique une forte méfiance à l’égard du gouvernement. A Colombo, un parti tamoul, le Democratic People’s Front (DPF) de Mano Ganeshan, a obtenu un bon résultat et deux élus. Ce parti comporte des éléments de gauche, le bon résultat obtenu exprime principalement le fait que les Tamouls de la capitale voulaient voter pour un parti tamoul.

    “Cinq ans après la fin de la guerre, ces élections ont clairement démontré que les trois grandes communautés du pays, la majorité cingalaise et les minorités tamoule et musulmane prennent chacune leur voie. Il n’y a pas de plus grande unité nationale comme le prétend le gouvernement tout au contraire. Cela ne s’est pas exprimé par les armes mais via l’isoloir. Le système capitaliste n’est pas à même de construire l’unité.”

    Une résolution des Nations Unies à Genève exige une enquête internationale sur les crimes de guerre au Sri Lanka. Le gouvernement de Rajapakse y a réagi très négativement. Est-il question de conciliation ?

    Siritunga: “Le gouvernement essaie de créer un nouveau spectre LTTE (Tigres de libération de l’Îlam Tamoul). Pour les élections provinciales, une rhétorique anti-impérialiste d’opposition aux USA a été utilisée. Cela n’a pas fonctionné. Maintenant, on recourt à nouveau à la division nationale en mettant en avant un danger de terrorisme.

    “Une majorité de la population ne veut absolument pas de retour à la guerre. Même les Tamouls ou les musulmans ne le veulent pas. Personne ne veut le retour de la guerre. Mais si le problème persiste et que les minorités n’obtiennent pas de droits et de libertés, un retour à la violence n’est pas exclu à l’avenir. La population tamoule au nord et à l’est ne veut pas la guerre, elle veut diriger sa propre province et disposer de la liberté. La présence militaire et la répression menée au nord conduisent à de nouvelles frustrations.”

    Quelles réponses l’United Socialist Party met en avant ?

    Siritunga: “Sur les 66 ans d’indépendance, tant la coalition gouvernementale autour SLFP que l’UNP ont chacun détenu le pouvoir pendant 33 ans. Ils ont démontré qu’ils n’apportent aucune solution aux problèmes socio-économiques et à la question nationale. Beaucoup d’argent a été consacré à la guerre et il y a de l’argent pour le développement mais pour les besoins sociaux de la majorité de la population, il n’y a rien.

    “Il faut un gouvernement de travailleurs et de pauvres. Pour y parvenir, nous devons unifier le mouvement ouvrier et la gauche. Il y a pour l’instant des centaines de syndicats. Rien que pour le rail, il y en a 50. L’USP défend l’idée d’une convention nationale de représentants élus des syndicats pour décider d’actions à mener. Les dirigeants syndicaux actuels sont une entrave à l’aboutissement d’une telle convention démocratique nationale.

    “Nous devons, nous les partis de gauche, lutter ensemble contre le capitalisme. Dans la crise à venir, l’USP jouera un rôle actif. Notre participation électorale en était les prémices. Sans publicité, nous avons obtenu 605 voix à Galle et 739 à Kaluthara. Dans la période à venir, nous continuerons à discuter avec la population et à construire une alternative socialiste. Une gauche unie dans la lutte contre le néolibéralisme et pour le socialisme nous renforcerait.”

  • 1974 – 2014 : Le Comité pour une Internationale Ouvrière a 40 ans !

    Lutte et solidarité pour le socialisme

    La solidarité internationale est un aspect vital de la lutte pour le socialisme. Le PSL se bat pour un monde libéré de la pauvreté, de la guerre et des inégalités. Mais cela nécessite bien plus que de simplement soutenir les travailleurs en lutte dans d’autres pays, aussi important que ce soit. Nous devons également construire une forte organisation internationale, capable d’aider la classe des travailleurs à renverser le système capitaliste pour le remplacer par le socialisme démocratique. Le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO, dont le PSL est la section belge) a été créé pour contribuer à atteindre cet objectif lors d’une réunion qui a réuni 46 camarades issus de 12 pays, le 21 avril 1974. Aujourd’hui, le CIO est représenté dans 48 pays, sur tous les continents.

    Dans l’article ci-dessous, Robert Bechert, qui est membre du Secrétariat International du CIO et avait participé à la réunion de fondation du CIO, explique pourquoi la construction d’une internationale est toujours une nécessité vitale au 21ème siècle.

    Depuis le début du 20e siècle, chaque décennie a été le témoin de révolutions durant lesquelles la classe des travailleurs et les pauvres ont tenté de mettre fin à l’oppression et à l’exploitation dont ils souffrent sous le règne du capitalisme. A leurs côtés ont également eu lieu de nombreuses luttes de masse, des contre-révolutions et de puissants développements qui ont changé la face du monde.

    Ces 40 dernières années n’ont pas fait exception. A peine quatre jours après la constitution du Comité pour une Internationale Ouvrière, 48 ans de gouvernement militaire et dictatorial prenaient fin au Portugal avec la Révolution du 25 avril, la Révolution des Œillets. Quelques mois plus tard, la junte militaire grecque s’écroula. Mais l’histoire ne se développe pas en ligne droite. Dans ces deux pays, la classe dirigeante a été capable de survivre pour défendre son système, principalement parce que les mouvements de masse qui les menaçaient ne disposaient pas de stratégie correcte abordant la manière de remplacer le capitalisme, ni de direction capable de mener ce combat.

    Crise capitaliste

    Ces 25 dernières années ont été compliquées par la chute de l’Union Soviétique et des autres états staliniens. Le fait que ces régimes aient été dirigés par des élites totalitaires privilégiées indique clairement que ces Etats ne peuvent pas être considérés comme socialistes. Cependant, le fait que ces Etats reposaient sur une économie planifiée, nationalisée et non capitaliste démontrait que le capitalisme n’est pas l’unique système possible.

    Après 1989, la chute de ces Etats et la restauration du capitalisme ont été utilisées par la classe dirigeante dans le cadre de sa contre-offensive qui faisait suite à la radicalisation connue durant les années ‘60-‘80 afin qu’elle défende idéologiquement qu’il n’existait pas d’alternative au capitalisme. Cela a aidé à accélérer le mouvement vers la droite et pro-capitaliste pour une grande partie du mouvement des travailleurs.

    Mais depuis le début de la dernière crise globale du capitalisme, en 2008, nous sommes entrés dans une nouvelle ère mondiale. Dans de nombreux pays, particulièrement les principaux pays impérialistes, les conditions de vie ont baissé ou sont en train de chuter. Mais un des éléments parmi les plus importants de la période actuelle est que la combinaison du processus de globalisation et du développement des communications a renforcé la conscience internationale des masses.

    Un nombre croissant de personnes parmi la population considère que les questions liées à l’économie, à la guerre et à l’environnement sont des thèmes internationaux qui sont également liés au système capitalisme, ou au moins à la domination des grandes banques et des grandes entreprises. En même temps, davantage de gens sont conscients du potentiel inhérent aux avancées scientifiques et technologiques pour autant qu’elles soient utilisées en fonction des intérêts de la population et de l’environnement plutôt qu’au profit des entreprises. Mais le plus important, c’est que l’expérience accumulée au cours de la lutte contre l’austérité ainsi que la politique d’austérité elle-même ont forgé une compréhension de la nécessité de fondamentalement changer de société. Des événements comme le renversement du dictateur égyptien Moubarak et du dictateur tunisien Ben Ali en 2011 ont donc eu un impact mondial.

    Ces développements ont fourni une importante base potentielle pour une organisation socialiste internationale, reliant ensemble des mouvements des quatre coins du globe. Ce siècle a déjà connu des mouvements et des combats ayant adopté un caractère international, comme l’opposition à l’invasion de l’Irak menée par les Américains et les Britanniques, les manifestations des mouvements Occupy/Indignados, les manifestations anti-austérité en Europe, l’impact des révolutions tunisienne et égyptienne de 2011 ou encore la récente lutte internationale des dockers.

    La fondation du CIO a pris place en des temps révolutionnaires

    Mais si le mouvement des travailleurs n’est pas capable de livrer des réponses concrètes aux problèmes actuels, le danger est alors présent que les réponses nationalistes réactionnaires puissent obtenir un certain soutien, installant les bases pour de futurs conflits chauvinistes ou ethniques au sein d’Etats ou entre eux. Un des objectifs que le CIO s’est assigné est d’armer le mouvement des travailleurs d’un programme et d’une stratégie pour à la fois remporter des victoires au cours de batailles immédiates mais aussi débarrasser le monde de l’emprise venimeuse du capitalisme, en commençant par expliquer le rôle central de la classe des travailleurs à cette fin.

    Le fait que la fondation du CIO ait pris place durant une période très troublée et radicale n’était en rien un accident. Le long redressement économique qui a suivi la seconde guerre mondiale touchait à sa fin. Mais déjà avant que la crise pétrolière de 1973 n’arrive pour symboliser le changement de situation économique, l’Europe et ensuite l’Amérique Latine ont été touchés par des mouvements révolutionnaires et des crises. Au Vietnam, l’impérialisme américain a fait face à sa première défaite militaire. Les régimes staliniens ont été secoués par le printemps de Prague en 1968 dans ce qui était alors la Tchécoslovaquie et par les vagues de grèves ouvrières en Pologne. Ces mouvements n’étaient pas pro-capitalistes mais recherchaient en essence à établir une démocratie des travailleurs.

    A ce moment, les syndicats étaient puissants, mais pas seulement en terme de nombre de membres. En Grande-Bretagne, le berceau du CIO, les victoires remportées par les mineurs et la défaite du gouvernement conservateur aux élections de 1974 avaient notamment illustré leur puissance potentielle.
    Le début d’une crise capitaliste généralisée a approfondi la radicalisation politique des mouvements ouvriers de nombreux pays. L’expérience amère du renversement sanglant du gouvernement Allende au Chili en 1973 avait provoqué une large discussion sur les moyens de parvenir au socialisme et aussi de prévenir que la contre-révolution n’entrave le chemin du mouvement des travailleurs. C’était vraiment une période de luttes internationales.

    En 1974, la dictature espagnole de Franco, face à une révolution se développant, était en train de tomber. Mais la classe dirigeante espagnole a cherché et obtenu l’aide des dirigeants du monde du travail pour contenir le mouvement révolutionnaire. Il a été capable d’établir une démocratie capitaliste.

    Dans ce contexte, les marxistes qui ont été à la base du Comité pour une Internationale Ouvrière, à l’époque groupés en Grande-Bretagne autour du journal ‘‘The Militant’’ (ils ont depuis constitué le Socialist Party), ont commencé à rechercher une audience plus large en Grande-Bretagne et dans d’autres pays, principalement en Europe, mais aussi au Sri Lanka où l’histoire particulière du pays, où un mouvement trotskiste avait été soutenu par les masses, a permis que nos idées y trouvent un premier écho.

    Cependant, malgré les soulèvements révolutionnaires qui ont eu lieu à travers le monde à la fin des années ’60 et dans les années ’70, l’idée d’une réelle internationale ouvrière était devenue moins centrale dans le mouvement des travailleurs, même si cela restait un point attractif pour de nombreux activistes. Cela faisait suite à l’échec tant de l’Internationale Socialiste que de l’Internationale Communiste de rester des organisations capable d’organiser la lutte internationale pour changer de monde. Mais au 21e siècle, avec l’interdépendance très claire des différentes parties du monde, la question de l’action internationale est à nouveau posée avec acuité.

    A côté de la nécessité de solutions globales, l’expérience du mouvement des travailleurs a montré encore et encore que des manifestations peuvent remporter quelques revendications prises individuellement, mais qu’elles restent par contre insuffisantes pour fondamentalement changer la situation. Cela, ce n’est possible qu’avec le renversement du système capitaliste. Mais pour y parvenir avec certitude, le mouvement des masses a besoin d’un programme d’action concret adapté tant à la situation nationale qu’internationale ainsi qu’une direction, ce qui requiert un parti.

    Comment remporter des victoires de façon permanente ?

    Aujourd’hui les capitalistes font preuve de peu d’optimisme. Ils manquent de confiance en eux, comme cela a été révélé dans les discussions portant sur la possibilité d’arrêter d’injecter de l’argent dans l’économie via l’assouplissement quantitatif (AQ) et les effets que cela pourrait avoir.

    Ces conditions préparent de nouvelles périodes de lutte et de révolution. En général, dans cette période de crise, la plupart des luttes ont jusqu’ici été défensives, contre l’attaque menée par la classe dirigeante, mais dans les pays qui ont connu une croissance économique, comme le Brésil et la Chine, il s’agissait de batailles offensives destinée à remporter de nouvelles conquêtes sociales.

    En Grèce, les travailleurs ont mené le nombre incroyable de 36 grèves générales depuis 2010, mais ils n’ont pas réussi à bloquer l’attaque de la classe dirigeante. Mais ça n’exclut pas de voir arriver une nouvelle radicalisation, peut-être initiée sur le plan politique. A chaque instant, des couches du mouvement ouvrier tirent des leçons de leur expérience.

    Les révolutions et les luttes de masse de ces dernières années ont à nouveau posé les vieilles questions abordant la manière de consolider des conquêtes sociales et de renverser l’ordre ancien. L’Égypte est le dernier exemple en date où, en février 2011, les masses ouvrières avaient potentiellement le pouvoir entre leurs mains, sans hélas avoir entièrement compris ou vu ce qui devait être fait pour que ce potentiel devienne réalité.

    De puissantes révolutions peuvent complètement balayer l’ancien ordre des choses mais, comme ce fut le cas au Portugal en 1975, il peut revenir si la classe des travailleurs ne sécurise pas son pouvoir. Évidemment, chaque révolution et chaque lutte a ses propres caractéristiques. Mais les leçons qui peuvent être tirées de la manière dont la classe ouvrière et les pauvres ont été capables d’arriver au pouvoir et d’y rester en 1917 sont toujours pertinentes et de première importance.

    En certains points, la situation actuelle est similaire à celle de la fin du 19e siècle, au moment où se sont développés les mouvements ouvriers de masse. Aujourd’hui, il est question de la reconstruction ou de la rénovation des organisations du monde du travail. Mais le fait que, dans de nombreux pays, les travailleurs aient fait l’amère expérience de la décadence ou de la chute des vieilles organisations ouvrières – particulièrement les anciens partis sociaux-démocrates et communistes qui se sont transformés en organisations pro-capitalistes ou totalement capitalistes – est un facteur compliquant.

    Reconstruire et réarmer le mouvement des travailleurs

    Dans de nombreux pays, le Comité pour une Internationale Ouvrière joue un rôle clé dans cette reconstruction, et là où c’est approprié, soutient qu’il faut commencer à créer de nouveaux partis politiques des travailleurs en tant qu’étape vers la création d’un mouvement de masse des travailleurs. Il ne s’agit pas simplement de propagande. En Grande-Bretagne, en Afrique du Sud et au Nigéria, nous avons participé aux étapes ayant précédé la formation de nouveaux partis. En Australie, au Sri Lanka, aux USA, en Irlande, ou encore en Suède, les camarades du CIO participent aux élections sous leurs propres couleurs.

    Là où des partis de gauche existent, comme le PSoL au Brésil et Die Linke en Allemagne, les camarades du CIO y sont actifs tout en défendant les étapes par lesquelles il faut passer pour continuer à les construire en tant qu’organisations défendant les idées du socialisme. Il s’agit d’une partie de notre tradition au CIO. Depuis les origines, nous ne sommes pas passifs, nous participons aux luttes, grandes et petites, et les initions.

    Mais à bien des points de vue, ces quatre premières décennies ne sont véritablement qu’une préhistoire. Nous sommes déjà dans une période tumultueuse, tout est soit remis en question, soit sur le point de l’être. Les expériences de cette période du capitalisme, la crise environnementale croissante et l’absence d’avenir pour une couche grandissante de la jeunesse provoqueront des tempêtes révolutionnaires.

    Le CIO jouera son rôle dans ces événements, ce qui inclut la construction d’un mouvement qui pourra finalement mettre un terme à ce système capitaliste brutal, chaotique et injuste, et ainsi faire de la vie un plaisir pour tous.

  • Afrique du Sud : Le WASP participera aux élections de 2014!

    Moses Mayekiso – ancien secrétaire général du syndicat des métallos NUMSA – sera tête de liste du WASP

    Le Workers and Socialist Party (WASP) est enregistré pour les prochaines élections de l’Assemblée nationale ainsi que pour les élections législatives dans les provinces du Nord-Ouest, de Limpopo et de Gauteng. La composition de la liste nationale a été rendue publique ce 13 mars lors d’une conférence de presse tenue à Johannesburg.

    Le candidat à la présidence et tête de liste nationale du WASP est Moses Mayekiso, militant syndical de premier plan au cours des années ‘70 et ‘80, actif au sein du Metal & Allied Workers Union (Mawu) dont il est devenu secrétaire général. Le Mawu fut, avec d’autres syndicats, à la base de la création de la fédération syndicale Cosatu en 1985. Le Mawu fut également la colonne vertébrale de la création du Syndicat national des métallurgistes d’Afrique du Sud (le Numsa), dont Moses fut le premier secrétaire général. Il fut élu à ce poste alors qu’il était en prison, sur base de son activisme contre l’apartheid et pour le mouvement ouvrier. Une campagne internationale avait alors exigé sa libération et des manifestations pour la « liberté du camarade Moses » ont eu lieu dans de nombreuses villes à travers le monde.

    Moses était encore secrétaire général du Numsa quand ce syndicat a adopté une résolution appelant à la création d’un nouveau parti des travailleurs en 1993. Il a maintenant rejoint le WASP et a pris place au sein de sa direction.

    Il fut aussi le premier président la South African National Civic Association (SANCO – le «quatrième» membre de l’Alliance tripartite) et a consacré ses efforts ses dernières années à reconstruire ce mouvement sur base de véritables principes socialistes au vu du lamentable échec de la SANCO pour relayer la marée montante des protestations. Moses fut aussi député de l’ANC (African National Congress) de 1994 à 1996, mais a démissionné pour se concentrer sur le travail de terrain visant à construire la SANCO à la suite de la chute de l’apartheid.

    Les listes du WASP représentent la classe des travailleurs et les pauvres du pays

    Tous les candidats sur les listes du WASP sont des travailleurs, des syndicalistes et des activistes des communautés ou parmi la jeunesse. Ceux qui peuvent le mieux représenter les intérêts de la classe ouvrière sont des membres de la classe ouvrière. Le WASP rejette la ‘professionnalisation’ de la politique et cette idée selon laquelle les gens ordinaires n’auraient ni les compétences ni la capacité d’assumé une position élue.

    Les principaux candidats qui ont parlé lors de la conférence de presse de présentation des listes sont : Mametlwe Sebei (figure-clé de la vague de grève qui a suivi le massacre des mineurs en grève de Marikana en août-septembre 2012), Weizmann Hamilton (secrétaire général du Democratic Socialist Movement – DSM section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Afrique du Sud et parti-frère du PSL, l’une des organisations fondatrices du WASP – militant de longue date anti-apartheid et syndical), Liver Mngomezulu (secrétaire général du syndicat du transport National Transport Movement union, NTM), Matron Mhlanga (membre exécutif de l’African Traders Organisation, ATO), Sithembile Nqulo (mineur, Carletonville), Lebogang Mtsweni (militant du syndicat du métal Numsa), Jabulani Madlala (militant du syndicat du métal NUMSAà l’usine Toyota de Durban), Paul Gaaje (travailleurs aux services médicaux d’urgence, Fochville), Nkosinathi Mpopo (mineur, Rustenburg).

    Des représentants des travailleurs au salaire d’un travailleur

    Le salaire de base d’un député en Afrique de Sud est de 72.000 rands par mois (environ 4.820 euros), ce qui signifie concrètement que les élus sont déconnectés de la vie quotidienne des travailleurs et des pauvres. Ils figurent parmi les mieux payés du pays et se placent de ce fait au sein de l’élite. Le WASP rejette totalement ces positions privilégiées de soit-disant “élus du peuple”.

    Chaque élu du WASP ne recevra comme salaire que l’équivalent de celui d’un ouvrier qualifié. Le restant sera reversé pour la construction du WASP ainsi que pour soutenir les luttes des travailleurs et des jeunes. Les salaires et dépenses des élus du WASP seront publiquement disponibles afin que chaque citoyen sud-africain puisse les contrôler. Le WASP fera usage du droit à révoquer ses élus si ceux-ci deviennent corrompus ou ne respectent pas le manifeste du parti. Ce droit de révocation ne sera pas au seul usage de la direction du WASP, mais aussi des membres et affiliés du WASP.

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