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  • Journée internationale des femmes 2014

    Combattre l’austérité et l’oppression partout dans le monde

    Cela fait plus d’un siècle à présent que le 8 mars est devenu la Journée internationale des femmes – une journée pour commémorer et célébrer les luttes des travailleuses et des femmes pauvres contre l’exploitation au travail, dans la société et au sein de leur foyer. Au fil des ans, cependant, le sens réel de cette journée a été déformé.

    Clare Doyle (Comité pour une Internationale Ouvrière)

    Dans les États staliniens qui prétendaient (à tort) être socialistes, cette date était devenue une journée prétexte à quelques beaux discours vides de sens afin de remercier la contribution que les femmes travailleuses apportaient à la société. (Les hommes étaient censés leur acheter des fleurs et faire la vaisselle pour la journée !). Dans les pays capitalistes, elle est devenue une simple opportunité commerciale, comme la Saint-Valentin ou la fête des Mères, pour faire de l’argent en vendant des cadeaux, des cartes de vœux, des vêtements, des diners romantiques,…

    Autour de la date du 8 mars, les médias de différents pays rapportent quelques informations – certaines utiles, d’autres fallacieuses – sur la détresse des femmes dans la société moderne. Beaucoup parlent de l’oppression des femmes comme si celle-ci était la faute des hommes, et non le produit d’une société divisée en classes sociales et basée sur l’inégalité en termes de puissance et de richesse. Partout dans le monde, de nombreux hommes sont encore éduqués de manière à considérer leur rôle d’homme comme supérieur à celui de la femme, dans la famille comme en-dehors.

    Cette année, on a un peu parlé de la “quatrième vague” du féminisme, mais sans que ne soit proposée la moindre solution par rapports aux problèmes très concrets que connaissent les travailleuses et paysannes qui constituent la moitié de la population mondiale.

    Pour les socialistes, la Journée internationale des femmes doit avoir pour but de se souvenir de ce qui a changé, et de ce qui reste à faire. Via la lutte, certains des pires aspects de l’inégalité des femmes ont été atténués. Dans tous les cas, il est salutaire de se souvenir d’à quel point la route est encore longue, et de rappeler quel impact peuvent avoir les véritables socialistes dans le cadre de cette lutte.

    Réformes, et manque de réformes

    De grandes réformes ont été obtenues lors du 20e siècle dans de nombreux pays – droits politiques, sociaux et reproductifs, possibilité de travailler et meilleurs salaires, accès à l’enseignement, institution de soins de santé et services sociaux ciblés. Beaucoup de ces changements ont donné aux femmes une plus grande liberté de choix de vie. En même temps, on a vu le développement de toute une série d’équipements électro-ménagers à prix accessible (machines à laver, aspirateurs, etc.) qui ont eux aussi contribué à alléger le fardeau des corvées domestiques qui, dans notre société de classe, repose principalement sur leurs épaules.

    Parfois, comme en Russie en 1917, ces réformes ont été le résultat direct de la révolution. Ailleurs, comme en Europe après la Deuxième Guerre mondiale, ou même en Asie, la décision des États d’organiser des programmes ciblés de soins de santé et d’enseignement pour les femmes provenait de la menace de révolution. Parfois, des avancées ont été obtenues par des mouvements efficaces – surtout les syndicats – dans lesquels hommes et femmes marchaient ensemble en menant une agitation politique spécifique et des manifestations de masse.

    D’un autre côté, la vie des femmes rurales dans la plupart des régions du monde est restée inchangée depuis des siècles. Elles mènent dans leur campagne une vie de travail incessant – elle y travaillent leur terre leurs enfants sur le dos, et doivent encore s’occuper de toute la famille. Les paysannes n’ont bien souvent aucun accès à la maternité ni aux soins de santé, et perdent beaucoup de leurs enfants à la naissance ou dans les cinq premières années de leur vie. Des millions de femmes meurent elles-mêmes de maladies facilement évitables, souvent liées à l’enfantement.

    Dans beaucoup de pays, les femmes sont considérées comme des citoyens de second rang et sont forcées par la tradition et par la religion d’obéir à leurs pères, à leurs maris et à leurs frères. Elles n’ont pas accès, ou alors très peu, à l’enseignement, aux loisirs ou aux soins de santé.

    Parce que les possessions familiales (l’héritage) se transmettent souvent de père en fils, les filles sont considérées comme des fardeaux ; de ce fait, des millions de femmes sont “éliminées” avant même leur naissance, ou peu après. La dernière estimation du nombre de femmes “manquantes” dans la population mondiale s’élève à 117 millions (New Internationalist, octobre 2013). Trois quarts de ces petites filles “manquantes” auraient été tuées avant la naissance, un quart par infanticide ou par négligence discriminatoire avant l’âge de cinq ans. Ce phénomène est surtout répandu en Inde et en Chine, même s’il est présent sur tous les continents.

    L’excision aussi d’ailleurs, reste une pratique répandue partout dans le monde. Selon une enquête récemment parue dans la presse, les campagnes menées dans les écoles afin d’encourager les jeunes filles à résister à cette pratique barbare indiquent que 140 millions de femmes dans le monde ont été “excisées”. Les campagnes menées au Royaume-Uni et en France semblent avoir un effet, mais combien de millions de femmes encore ne pourront connaitre la chance de jamais ressentir le moindre plaisir sexuel du fait de cette tradition innommable ?

    Comment peut-on changer les mentalités ?

    Les femmes de tous les continents sont-elles réellement condamnées à une vie d’épreuves et de dégradation perpétuelle ? Le dernier numéro du magazine d’Amnesty International donnait cette impression, avec le récit des problèmes que connaissent les femmes dans huit pays – le Bahreïn, le Zimbabwé, la Colombie, l’Afghanistan, le Sri Lanka, le Guatemala et le Cambodge.

    Dans les grandes villes chaotiques d’Asie, d’Afrique et d’Amérique latine, des dizaines de millions de femmes travaillent de longues heures dans des ateliers répugnants ou sur les marchés, risquant leur vie ou à tout le moins, des blessures graves. Les porteuses du marché d’Accra, au Ghana, dorment par terre la nuit, en groupe pour être protégées. Les femmes Dalit en Inde sont forcées de nettoyer les toilettes avec leurs mains, ou fouillent dans les décharges pour trouver de quoi survivre. Lors d’une campagne pour visant à briser les liens entre profession et caste, les femmes de Patna ont haussé le ton, ont jeté leurs paniers dans des brasiers et ont refusé de poursuivre ce travail. Les campagnes autour des nombreux problèmes des femmes a mené à toute une série de réformes, mais la seule manière d’obtenir de réelles améliorations est par l’action de masse et la lutte politique.

    Après le désastre de Rana Plaza en avril l’an dernier au Bangladesh (l’effondrement du bâtiment d’une grande usine textile, au cours duquel plus de 1100 personnes ont perdu la vie, et 4000 autres ont été blessées et ont perdu leur travail), les travailleurs – surtout des femmes – ont organisé des manifestations sonores et très efficaces afin d’exiger des compensations et de nouveaux emplois. Leur action a attiré l’attention sur les immenses profits que se font des compagnies telles que Benetton, Walmart, Primark, Matala et Bon Marché dans une industrie qui pèse 48 milliards de dollars à l’échelle mondiale.

    Pour les opprimés d’Afrique et d’ailleurs, le développement du Workers and Socialist Party (WASP) d’Afrique du Sud est comme un phare dans la tempête. Ce nouveau parti a inscrit sur son étendard des revendications de base pour “un enseignement gratuit et financé par l’État, de la crèche à l’université” et “des soins de santé gratuits, accessibles à tous”, en plus de la nationalisation des mines, des plantations, des banques et des grandes entreprises sous le contrôle démocratique des travailleurs.

    Les campagnes contre la multitude d’injustices infligées aux femmes et à leurs enfants sont cruciales. Les articles parus sur les sites du CIO, comme sur notre site socialistworld.net, ont révélé le scandale de l’esclavage domestique et la riposte des femmes indonésiennes et philippines à Hong Kong, des femmes et de leurs enfants au Pakistan. D’autres de nos articles ont attiré l’attention sur des femmes travaillant dans les écoles et les hôpitaux et faisant preuve d’une grande détermination dans leur riposte contre les coupes budgétaires.

    Même dans les pays “développés”, les femmes – surtout les femmes issues de communautés immigrées – ont tendance à constituer le gros de la main d’œuvre employée pour des tâches ingrates et parfois dangereuses : ateliers, usines d’assemblage électroniques, nettoyage et services domestiques. Cette surexploitation dans nos sociétés ne peut être combattue que par l’organisation par les syndicats de campagnes spécifiques et de luttes industrielles. Les victoires, modestes certes, mais bien réelles, obtenues par les nettoyeurs de Londres l’an dernier ont démontré que la lutte paie.

    Retour en arrière

    Aujourd’hui, la crise mondiale du système capitaliste frappe durement l’ensemble des travailleurs et des pauvres du monde entier. Ce sont eux qui sont censés, selon nos “dirigeants”, payer le prix de la crise dans la souffrance de l’austérité, tandis que les 1 % des personnes les plus riches du monde, qui possèdent tout autant que les 50 % les plus pauvres, deviennent tous les jours de plus en plus riches. L’austérité et le ralentissement économique ont surtout un impact sur les femmes dans leur vie de tous les jours.

    Partout dans le monde, les revenus, les opportunités d’emploi et le financement des programmes sociaux sont à la baisse – pour les femmes comme pour les familles dont elles ont la charge. Les contrats “zéro-heures” et les emplois à temps partiel sont désormais bien souvent le meilleur que puisse offrir le système capitaliste à des millions de femmes et de jeunes qui ont le risque de ne jamais pouvoir trouver un emploi. L’histoire semble régresser, tandis que chaque nouvelle génération de travailleurs et de pauvres connait à présent une situation pire que celle que connaissait ses parents.

    Non seulement en Grèce, mais aussi en Europe et aux États-Unis, des millions de gens dépendent de l’aide alimentaire, de “restaurants du cœur” et d’œuvres de charité. L’Espagne, la Grèce et l’Irlande ont connu une nette réduction de leur taux de natalité depuis le début de la crise, vu que de plus en plus de couples décident qu’un enfant est une dépense qu’ils ne peuvent se permettre. Les histoires de bébés que des parents pauvres en Grèce sont obligés de donner en adoption, sont autant de condamnations révoltantes des programmes d’austérité exigés par les banquiers et par les riches politiciens. Des millions d’enfants, même dans les pays dits modernes et développés, sont aujourd’hui confrontés à la pauvreté et à la faim.

    Même en Suède, une tempête de privatisations a ruiné le légendaire “État-providence”. Les maisons de repos, les cliniques et les écoles sont rachetés et revendus en tant qu’entreprises devant faire du profit. On s’attend maintenant à des attaques sur les droits de maternité et de paternité, aux côtés d’autres soi-disant réformes dans le but de baisser les taxes sur les riches.

    La crise sociale et économique a été accompagnée par de nouvelles attaques sur les droits à l’avortement dans divers pays. Des manifestations de masse en Espagne contre les tentatives d’annuler des lois progressistes, comme la loi sur l’avortement dans les 14 premières semaines, ont révélé la profonde colère et l’empressement des jeunes femmes à se battre. En Irlande, les socialistes vrais ont joué un important rôle dans la mise sous pression du gouvernement pour obtenir des réformes légales, après la mort de la jeune Savita Halappanavar fin 2012, décédée parce que son médecin refusait de l’avorter alors qu’elle était en danger de mort.

    L’alternative politique

    Avant cette dernière crise très profonde, qui a révélé l’incapacité du capitalisme à satisfaire même les besoins de base de l’immense majorité de la société, il y avait une période de triomphalisme et de jubilation par rapport à la soi-disant absence d’alternative à ce système pourri. C’est ce qui avait suivi l’effondrement des économies planifiées staliniennes. « Il n’y a pas d’alternative », tel était la devise de Margaret Thatcher à son heure de gloire. Quand elle est décédée l’an dernier, beaucoup de personnes se sont réjouies de la mort de cet ennemie des travailleurs, mais cela n’empêche pas que depuis lors, le mouvement ouvrier n’a toujours pas acquis une très grande confiance dans sa capacité à changer les choses de manière radicale.

    L’affaiblissement distinct des traditions combatives des syndicats et la dégénérescence des partis que les travailleurs soutenaient traditionnellement (partis “socialistes” français, allemand, espagnol…), a eu un effet sur la société dans beaucoup de pays. Les premières luttes féministes telles que l’égalité de salaire, le droit à l’avortement, les droits des LGBT, la lutte contre la violence domestique, etc. avaient permis d’obtenir de nombreuses avancées. Les représentations sexistes dans les médias ou dans la publicité, qui rabaissaient les femmes et approuvaient la violence envers les femmes, étaient moins tolérées. Aujourd’hui, l’histoire semble régresser sur ces thèmes également. Sur la question LGBT par exemple, les avancées dans certains pays sont aujourd’hui contrebalancés par de véritables attaques dans d’autres.

    En même temps que le reste des coupes dans les budgets publics, on a eu une diminution de l’aide aux personnes qui souffrent de violence domestique, alors que l’on rapporte une hausse de ces violences dans de nombreux pays. Les socialistes ont été à la pointe de la lutte contre cette tendance, en mettant en avant le problème de la violence domestique et en convaincant d’autres personnes, comme les syndicats, de reprendre ce thème dans leurs campagnes. On a également vu à quel point la lutte de classe peut changer la conscience des femmes et l’attitude envers les femmes lors de la grève des mineurs au Royaume-Uni il y a 40 ans (voir prochains articles sur le site de notre section anglaise à ce sujet).

    Le logement

    Les scandales du logement, dans un pays après l’autre, affectent des millions de femmes qui tentent de s’en sortir tout en gardant un toit au-dessus de la tête de leurs familles. Les spéculateurs et les riches laissent des millions de maisons à l’abandon, tandis que de plus en plus de familles se voient jetées à la rue, en Amérique comme ailleurs, parce qu’elles n’ont pas de quoi payer le loyer ou l’emprunt à la banque.

    On a vu plusieurs mouvements anti-expulsion se produire, dans lesquels participent souvent des femmes très courageuses. Au Kazakhstan, les manifestants étaient prêts à se battre jusqu’au bout, en organisant des manifestations de masse et des grèves de la faim. Ce désespoir leur venait du fait qu’ils ont vu les grandes banques se faire renflouer par l’État, au même moment où on leur dit que leurs maisons leur seront enlevées. En Espagne, les huissiers ont été chassés par les manifestants (dont de nombreuses femmes) au moment où ils s’apprêtaient à expulser des familles de leurs maisons ou appartements. Alors que dans ce pays, tout comme en Irlande, des centaines de milliers de nouvelles maisons récemment construites restent vides !

    Aux États-Unis aussi, des foyers ont été sauvés par des campagnes telles que celle organisée dans la ville de Minneapolis par nos camarades de Socialist Alternative. En Écosse, l’injuste taxe “de la chambre vide” (Bedroom tax) a été vaincue par une campagne de masse dirigée par les socialistes. Les mouvements des “paysans sans terre” et des “sans abris” du Brésil sont eux aussi soutenus par des milliers de femmes. Ces mouvements ont regagné une nouvelle dynamique dans un contexte ou des milliards de dollars sont dépensés pour la construction de stades et d’hôtels de luxe en vue de la Coupe du monde de football qui s’y déroulera cette année.

    Des guerres et des révolutions

    Les femmes sont en général plus nombreuses que les hommes dans la plupart des camps de réfugiés – victimes de conflits ou de guerres civiles. De la Syrie à l’Irak, du Soudan à la Somalie, les personnes qui fuient les conflits ne possèdent rien – ni vêtements, ni nourriture, ni abri pour eux et pour leurs enfants. Les viols de masse sont monnaie courante dans les camps de réfugiés, tout comme ils sont utilisés en tant qu’arme de guerre. Les ONG, les organisations charitables et les Nations-Unies ne sont pas capables de s’en prendre aux causes de ces catastrophes. Parfois, elles font elle-mêmes partie du problème ! Les guerres sont des phénomènes qui font inévitablement partie de la vie sous le capitalisme.

    La lutte pour le socialisme est une question de vie ou de mort. La construction de forces qui puissent mener à la transformation victorieuse de la société commence dans certains pays, vu que de plus en plus de gens y sont maintenant en train de tirer les conclusions nécessaires concernant le capitalisme. Nous avons vu, l’année passée, des mouvements de masse atteindre des proportions révolutionnaires, avec de nombreuses femmes dans les rues participant aux combats – en Turquie, en Thaïlande, en Ukraine… Elles luttaient pour chasser du pouvoir des régimes discrédités et corrompus, mais sans une alternative claire par rapport au règne des patrons, des banquiers et de leurs représentants politiques, leurs sacrifices seront en vain.

    Dans beaucoup de pays où des avancées pour les femmes ont été obtenues précédemment, des gouvernements réactionnaires sont maintenant en train de tenter de revenir plusieurs siècles en arrière – au moyen-âge ! Dans d’autres pays, comme en Russie sous le régime de Vladimir Poutine, qui est maintenant en train de préparer l’invasion de l’Ukraine, on utilise des méthodes qui rappellent celles du stalinisme, voir du tsarisme. Nadejda Tolokonnikova, une des “Pussy Riot” emprisonnées pour avoir chanté une “prière punk” dans une cathédrale du centre de Moscou, a été placée en cellule d’isolement après sa grève de la faim visant à dénoncer le “régime d’esclavage”en vigueur dans sa prison. Les prisonniers doivent travailler 17 heures par jour et subir des punitions d’inspiration “goulag” pour la moindre “incartade” – forcés d’aller s’exercer dehors alors que le temps ne le permet clairement pas, privés de toilette pendant une journée, etc.

    La lutte contre l’exploitation capitaliste

    Les véritables socialistes se battent contre toute injustice dans la société, concentrent leur lutte autour de slogans qui démontrent la putréfaction du système capitaliste et de tous ses “représentants”. Notre programme par rapport aux questions concernant les travailleuses et les femmes pauvres est défini dans de nombreux tracts, brochures, journaux et livres.

    Un des principaux principes du socialisme est que toutes les femmes doivent avoir le droit de décider elles-mêmes si elles veulent des enfants ou non, sans que ne soit prise en compte la moindre contrainte financière ou autre. Ceci signifie : l’accès à la contraception et à l’avortement mais aussi aux centres de fertilité pour tous, gratuitement et sur simple demande, ainsi que des allocations familiales pour chaque enfant, qui représentent réellement le coût de l’éducation d’un enfant. Il est scandaleux qu’aujourd’hui au contraire, des services telles que l’aide à la conception et les soins de grossesse sont perçus comme autant de moyens de gagner de l’argent.

    Les politiciennes

    Il faut bien garder à l’esprit que le fait d’avoir plus de femmes en politique ou plus de femmes élues au gouvernement n’est en rien une garantie que l’on aura une politique qui sera plus en faveur des intérêts des femmes. Au Rwanda, il y a deux femmes politiciennes pour chaque député masculin, la majorité des députés sont des femmes ; pourtant le Rwanda reste un des pays d’Afrique où les femmes ont le plus de risques de violence domestique ou de violence liée au genre. Il faudra plus que veiller à l’équilibre dans les institutions représentatives du pays ou même à la tête du pays pour mener la lutte contre la subordination des femmes dans la société. Demandez au Allemandes ce qu’elles pensent d’Angela Merkel, aux Brésiliennes ce qu’elles pensent de Dilma Roussef, aux Chiliennes ce qu’elles pensent de Michelle Bachelet.

    En Inde, où plusieurs femmes se sont déjà retrouvées à la tête du gouvernement au niveau régional ou national, très peu de choses ont changé et les femmes continuent à être traitées comme des citoyens de seconde classe. On a récemment beaucoup parlé du trafic de petites filles nées dans les plantations de thé de l’Assam qui sont vendues comme domestiques pour des femmes riches ou nobles, qui trouvent cela normal car “chez nous c’est comme ça”. Le nombre de viols rapportés à la police à Delhi et à Mumbai a doublé depuis qu’a éclaté un scandale par rapport à deux cas particulièrement horribles qui ont été repris par les médias internationaux. Depuis, les campagnes publiques et les manifestations de masse ont donné aux femmes indiennes le courage d’aller se plaindre à la police, même si ce genre de crimes est encore présent partout dans la société.

    Les attitudes réactionnaires envers les femmes dans la société, l’interdiction de livres, comme on l’a vu dernièrement avec un livre sur l’histoire de l’hindouïsme, en plus des restes du système de castes, devront être combattus plus vigoureusement encore si le parti chauvin de droite Parti du peuple indien (BJP – Bharatiya Janata Party) dirigé par Narendra Modi devait arriver au pouvoir lors des élections du mois de mai.

    Bien que la vision politique et le programme des candidats soient plus importants que leur genre si nous parlons de la lutte de la moitié de la population mondiale pour un meilleur traitement, les travailleuses et femmes pauvres sont certainement encouragées par la victoire de quelqu’un tel que notre camarade Kshama Sawant lors des récentes élections de Seattle – où elle a gagné son siège malgré le fait qu’elle soit une femme immigrée et socialiste.

    Kshama a attiré une large attention des médias pour ses puissants discours contre le capitalisme, contre les banquiers et contre les 1 % de riches, et pour la nationalisation des grandes banques, de l’industrie et pour une planification démocratique de l’économie. Le slogan central de sa campagne – un salaire minimum à 15 $ de l’heure pour tous – a suscité un grand écho parmi les travailleurs. Pour les femmes qui sont souvent moins bien payées, la pleine entrée en vigueur de ce nouveau salaire permettrait de réparer une des plus grandes injustices auxquelles ces femmes sont confrontées tous les jours. Pour un travail égal, leurs salaires seraient augmentés en plus d’être remis à niveau avec le salaire de leurs collègues masculins (qui augmenterait lui aussi).

    L’hostilité affichée par les patrons et par les politiciens qui mangent avec eux envers la revendication d’un salaire minimum expose toute la corruption de l’ensemble du système de profits. La lutte contre toute forme de répression et d’oppression revient à mener la lutte au finish dans le cadre de batailles politiques et syndicales.

    La seule manière d’obtenir la transformation complète de la vie que connaissent les femmes, en même temps que l’éradication de toutes les formes d’exploitation, est de lutter pour une alternative au capitalisme. Lutter ensemble pour l’objectif commun d’une société socialiste qui rassemblerait hommes et femmes dans le but commun d’une émancipation de l’ensemble de la classe des travailleurs.

    Au fur et à mesure que le capitalisme se retrouve embourbé dans une série de crises économiques et sociales de plus en plus grandes, des centaines, des milliers et des millions de gens seront petit à petit convaincus, par leur propre expérience et par l’agitation des socialistes vrais, de la nécessité d’en finir avec ce système injuste. Le soutien affiché envers des candidats tels que Kshama Sawant, le WASP sud-africain, et les idées et le programme du Comité pour une Internationale Ouvrière, ne feront que s’accroitre au fur et à mesure que s’approfondira la crise. Le socialisme représente la clé pour mettre fin à toute forme d’exploitation ; c’est la seule manière de développer une société harmonieuse, libérée de la guerre, de la misère, de l’injustice et de toute forme de discrimination et d’inégalité.

  • Cuba : De nouvelles luttes pour de vieux défis

    En décembre dernier s’est tenue une réunion du Comité Exécutif International du Comité pour une Internationale Ouvrière, dont le PSL/LSP constitue la section belge. Un représentant d’un collectif cubain, Obseratorio Critico (Observatoire critique), était également présent. Voici ci-dessous l’intervention qu’il a faite à cette réunion au sujet de la situation cubaine.

    Prise de parole de Rogelio M. Díaz Moreno (Observatorio Critico) lors de la réunion internationale du CIO

    Les conquêtes de la révolution

    Nous savons combien il est difficile de transmettre la complexe et intéressante réalité qui y existe. La fin du soi-disant camp socialiste a coûté à Cuba plus de 80% de ses marchés et de ses subventions soviétiques. En plus de cela, l’agression impérialiste du gouvernement américain s’est accrue, le blocus économique s’est intensifié et le financement des groupes d’opposition de droite a augmenté de plusieurs millions de dollars. En outre, l’activité des groupes promouvant des actes terroristes dans mon pays est toujours tolérée sur le territoire des USA. L’ingérence impérialiste des USA a été et sera un facteur crucial dans le cas de Cuba, car elle alimente les tendances réactionnaires et conservatrices du gouvernement cubain actuel, qui utilise cela comme prétexte pour harceler les forces de gauche, socialistes et indépendantes de sa bureaucratie.

    Rappelons que lors du triomphe de la Révolution, les forces victorieuses fusionnèrent dans un parti unifié sur base des mouvements qui dirigèrent la lutte. Fondamentalement, il s’agissait des mouvements interclassistes du Mouvement du 26 juillet et du Directoire révolutionnaire, ainsi que du Parti communiste de nature stalinienne, cela avec l’appui décisif de la paysannerie.

    Le programme initial de ce parti n’était pas socialiste, bien que progressiste du point de vue nationaliste bourgeois. La réforme agraire était son drapeau principal. Mais la lutte de classe qui a suivi a radicalisé et polarisé la politique du moment. La réforme agraire, la nationalisation des entreprises, la campagne d’alphabétisation, l’intégration de la population dans des organes de défense de la révolution, la transition vers une économie planifiée excluant l’économie de marché, et un fort investissement social, parmi d’autres politiques, ont permis la transformation de l’État, même s’il manquait les éléments de contrôle et de démocratie ouvriers. Ainsi, ce système, assorti des subventions soviétiques, a permis de sortir de la situation de pauvreté atroce antérieure à la révolution, pour arriver à une société d’un bien plus grand développement humain. Mais c’est 30 ans plus tard, quand le Mur de Berlin est tombé, que la plus grande épreuve que le socialisme cubain a eu à traverser commença.

    Après la chute du Mur de Berlin

    Dans les années qui ont suivi, le gouvernement a pu continuer à s’enorgueillir de sa capacité gigantesque à pouvoir mobiliser des manifestations en sa faveur. Cependant, il y a eu recours à des moyens de pression sur les manifestants et la corruption a sévi parmi les organisateurs.

    Nous ne pouvons pas non plus ignorer l’émigration d’environ un demi-million de Cubains au cours des 20 dernières années. De plus, après des décennies d’une politique qui s’est effectuée sans contrôle et sans mesures démocratiques pour participer aux prises de décisions de la politique nationale, un fossé insurmontable s’est créé entre la direction et les travailleurs. Le discrédit de l’idéologie soviétique a laissé un vide dans les rues cubaines, rapidement occupées par la philosophie symbolisée par la ville de Miami.

    Cette philosophie est basée sur le fait de considérer la prospérité comme synonyme de consommation et le prestige personnel et social comme étant réduit à pouvoir montrer aux autres son haut niveau de vie. Chez beaucoup, cela a naturellement engendré une grande frustration ainsi qu’une tendance à recourir au crime pour satisfaire ces besoins. Cela a également été alimenté par les élites bureaucratiques corrompues, qui adoptent ouvertement ce mode de vie, loin des idéaux de la rigueur socialiste dont le paradigme le plus mémorable est la figure disparue d’Ernesto Che Guevara.

    La politique économique du gouvernement n’a été capable que de stimuler cette mentalité de consommation, dans le cadre de sa tentative désespérée de s’attirer des devises convertibles. Les politiques sociales les plus importantes sont néanmoins restées, comme la sécurité d’emploi, le maintien de services d’enseignement, de santé et de sécurité sociale universelle. Cela a contribué à conserver le régime au pouvoir, même si, dans le même temps, les Cubains ont souffert de graves pénuries de produits alimentaires et industriels, de pannes de courant, etc.

    Le modèle chinois ? 

    Nous pouvons aujourd’hui contempler la dérive lente, mais déterminée, vers une transition qui rappelle le modèle chinois : un système d’économie de marché sous le contrôle strict d’une force politique bureaucratique et autoritaire. Nous n’avons pas encore atteint ce point, mais l’ouverture au petit capitalisme national et au grand capital transnational qui se produit actuellement, en plus des coupes budgétaires dans les politiques sociales et dans les droits des travailleurs, nous incline à nous attendre à un tel développement.

    La première fois qu’a été soulevé à Cuba le licenciement de près d’un million de travailleurs, il n’y a eu aucune résistance de la part de direction de la CTC, la centrale syndicale. Mais au niveau de la base, les travailleurs sont en ébullition. Toutefois, sans organisation consciente, le mécontentement en est resté au niveau individuel, même s’il s’agit d’une multitude d’individus. Cette colère a malgré tout convaincu le gouvernement de temporiser les choses et d’accorder des concessions.

    Un nouveau code du travail

    Les inégalités et le mécontentement s’intensifient, ainsi que les tendances individualistes et aliénantes. La dernière étape de ce processus est caractérisée par l’introduction d’un nouveau projet de Code du travail qui actualise certains principes de l’ancien code devenu ‘’obsolète’’, tel que le droit et le devoir de chaque citoyen d’avoir un travail. C’en sera donc fini de la sécurité d’emploi pour les travailleurs. Ils pourront, en effet, être licenciés plus facilement avec seulement la petite promesse de chercher des alternatives à l’employé congédié. Le syndicat conservera le droit d’émettre une opinion dans certains cas.

    Voilà la situation dans le domaine de l’économie publique. Dans la sphère privée, la nouvelle classe émergente de capitalistes aura d’énormes possibilités pour exploiter ses employés. Nous n’avons trouvé aucun moyen de défense efficace des travailleurs dans ce secteur, concernant les droits minimaux, tels que les heures de travail, le salaire minimum, les vacances, les droits parentaux, les contrats de négociation collective, la défense contre la discrimination sur des critères de race, de genre ou d’orientation sexuelle. (Quelques jours plus tard, le Code a été adopté et il est supposé qu’il donnera des moyens de défense, au moins en théorie. Il reste à voir comment ils seront appliqués dans la pratique, NDT).

    Solidarité internationale

    Il faut saisir toutes les occasions pour dénoncer la bureaucratie qui insiste pour se présenter comme de véritables partisans du socialisme et de la souveraineté nationale, tout en vendant le pays par petits morceaux aux capitalistes locaux et internationaux. Il faut continuer à rappeler à tous que chaque citoyen a le droit d’être protagoniste de ses conditions et de la transformation de sa propre vie. Il faut apprendre à récupérer l’exercice de ce droit qui se trouve aujourd’hui dans les mains d’une élite appartenant au passé.

    C’est dans ce cadre que nous nous sommes rendus à cette réunion du Comité pour une Internationale Ouvrière et que nous renforçons notre courage et notre espoir. Ici, nous avons testé la force de la solidarité qui peut s’établir entre les socialistes du monde entier.

    Nous exprimons notre gratitude pour l’adhésion à notre cause de l’émancipation sur tous les terrains sociaux, contre la domination qui opprime ceux qui travaillent, ceux qui ont la peau noire ou une orientation sexuelle non majoritaire, etc., pour le soutien démontré contre toutes les causes de l’injustice qui existent dans notre pays et contre lesquelles nous ne nous lasserons jamais de combattre.

    Au nom de l’Observatoire critique de Cuba et de moi-même, encore une fois, je vous remercie beaucoup.

  • Espagne 2014. Une reprise ? Pour qui ?

    Que l’année 2014 soit celle de la grève générale politique !

    Voici ci-dessous une version légèrement adaptée de l’éditorial de l’édition de février du journal La Brecha, publication de nos camarades de Socialismo Revolucionario, la section du Comité pour une Internationale Ouvrière dans l’Etat espagnol. Si cet article traite de la situation qui prévaut dans l’État espagnol, les leçons tirées des évènements économiques, politiques et sociaux de l’année 2013 sont extrêmement riches pour les travailleurs et les jeunes de toute l’Europe, dans le cadre de leur lutte contre l’austérité.

    Pour l’État espagnol, l’année 2013 a représenté une aggravation des principaux processus mis en branle par la crise capitaliste qui a explosé il y a 5 ans de cela. Le naufrage de l’économie a continué à jeter des millions de personnes dans une extrême pauvreté au cours d’une année à nouveau marquée par des licenciements massifs, des attaques contre les salaires et des expulsions de logements. La profonde crise politique du système se poursuit avec un gouvernement en permanence dans les cordes. La crise de légitimité des institutions capitalistes et de l’Etat lui-même a connu de nouveaux épisodes, en particulier autour de la question nationale en Catalogne.

    Mais nous avons également assisté à d’importantes avancées réalisées dans le processus parallèle clé qui se développe également et qui constitue une source d’inspiration dans ces moments de crise économique et sociale. Il s’agit du processus de l’activité de la classe ouvrière et de la résistance sociale, ce qui représente en soi les premières ”pousses vertes” de la lutte pour une société nouvelle. Dans l’ensemble, 2014 nous offre la promesse de puissants événements et de grandes opportunités. Tous ces processus vont se poursuivre et s’approfondir.

    L’année 2014, une année de reprise ? Pour qui ?

    Tout au long de l’année 2014, nous allons assister à la constante tentative de la classe dirigeante, avec la collaboration active du gouvernement et des médias dominants, ”d’élever l’atmosphère générale” dans la société. Il s’agit essentiellement d’une tentative visant à diluer la colère des masses et de la résistance en nous assurant que la reprise économique a commencé et que des temps meilleurs sont à venir. Ils promettent d’ailleurs que cette année, l’économie va croitre de… 0,6% !

    Pour les marxistes et pour la classe des travailleurs, la question clé est de savoir quel sera le caractère de cette croissance. Cela va-t-il changer le cours de la crise ? Cela va-t-il provoquer une hausse de notre niveau de vie ? Si les réponses à ces questions sont négatives, nous sommes en droit de légitimement nous demander : quelle valeur peut donc bien avoir ce qu’on qualifie de croissance à nos yeux ?

    Tout d’abord, nous devons expliquer que pour atténuer la brutalité de la crise – un chômage de masse qui couvre plus d’un quart de la main-d’œuvre – presque tous les économistes (même capitalistes) conviennent que la croissance doit être supérieure à 2% au moins. Aucun économiste sérieux ne prédit un tel niveau de croissance pour cette année ou celles à venir. La quantité infime d’emplois en cours de création nous donne un aperçu du type de reprise que le capitalisme espagnol nous réserve : l’extinction des contrats à durée indéterminée et des bonnes conditions de travail. Les patrons profitent de la crise pour réaliser une contre-révolution sur le marché du travail et pour imposer un nouveau modèle basé sur la précarité et des conditions de vie misérables.

    Ensuite, cette situation cauchemardesque est combinée avec toute une vague d’attaques contre nos conquêtes sociales et nos droits démocratiques, la classe dirigeante tirant également parti de la crise pour éliminer les conquêtes historiques du mouvement ouvrier, comme le droit de manifester et de faire grève, ou encore de librement décider de son propre corps et de sa maternité. Cette réalité – qui comprend également la destruction de l’État-providence et des services publics – dévoile la base dont ils ont besoin pour leur prétendue ”reprise” : une destruction constante de notre niveau de vie pour finalement imposer en Espagne et au continent des normes issues du “tiers monde”.

    Pour une année 2014 combative avec une lutte constante et généralisée ! Pour une grève générale politique !

    Le prix du plus grand obstacle au développement de la lutte en 2013 doit être accordé aux dirigeants des principaux syndicats. Comme nous l’avons expliqué à plusieurs reprises dans les pages de La Brecha, ils ont joué un rôle-clé dans le maintien en place du gouvernement, malgré les crises profondes dans lesquelles il est empêtré.

    Mais malgré ce rôle de frein qu’ils ont joué, nous avons pu voir tout au long de l’année 2013 que les travailleurs ont continué leur lutte et l’ont intensifiée, en recourant à des méthodes de plus en plus militantes. 2013 a été l’année de la grève illimitée, à partir du secteur de l’éducation dans la région des Baléares jusqu’à la grève héroïque de plus de 100 jours de l’usine Panrico. Ces exemples se distinguent très nettement de la politique que les dirigeants syndicaux continuent à défendre, faite de grèves purement symboliques et insuffisantes d’une journée, sans intensification de la lutte et sans la moindre continuité, ce qu’exige pourtant la situation actuelle.

    Ce fut encore l’année de victoires importantes, en particulier celle des nettoyeurs de rue de Madrid [qui sont parvenus à repousser les menaces de licenciement et de réduction de leurs salaires de 40% grâce à l’action de la grève illimitée, NDLR] qui ont ainsi montré la voie que doit prendre l’ensemble des travailleurs. Une fois de plus cependant, le rôle de frein joué par les dirigeants syndicaux a empêché pareils exemples de militantisme d’obtenir une expression généralisée au niveau de l’État.

    Le récent mouvement de lutte qui s’est développé dans le quartier de Gamonal, à Burgos [où des mobilisations de masse répétées ont attiré l’attention à l’échelle nationale et ont paralysé un important projet spéculatif, NDLR] est un autre exemple de la façon dont la lutte peut obtenir des résultats pour peu qu’elle soit menée de façon déterminée et militante et qu’elle soit basée sur un soutien de masse.

    Dans la perspective des nouvelles attaques auxquelles les travailleurs, les jeunes et les pauvres auront à faire face en 2014 – notamment avec les contre-réformes sur les retraites et sur le droit à l’avortement – il est essentiel que ce militantisme soit exprimé à une échelle toujours plus grande. Il est urgent de mettre sur table la question d’une action généralisée, et en particulier de l’unification de la force et des luttes de la classe des travailleurs au sein d’une nouvelle grève générale.

    Cependant, il est tout aussi essentiel que les grèves générales qui seront nécessaires en 2014 se différencient fondamentalement de celles établies sous le modèle des dirigeants syndicaux en 2012, c’est-à-dire uniquement organisées sous une pression insupportable de la base, de façon symbolique et isolée, seulement suivies de longues périodes de démobilisation.

    Nous avons besoin d’une nouvelle grève générale capable d’unir les luttes et d’élever l’atmosphère de combativité et la confiance de la classe ouvrière au sens large. Nous n’avons pas besoin d’une simple grève de protestation, il nous faut une grève générale avec des revendications et des objectifs capables d’unifier les luttes de la classe ouvrière autour de la lutte pour une solution générale aux problèmes qui les provoquent, en commençant par assurer la chute du gouvernement et en initiant la lutte pour une alternative politique favorable aux travailleurs.

    Pour l’unité de la classe des travailleurs dans leur lutte pour la liberté de tous les peuples nationaux

    En ce qui concerne la question nationale, nous assistons à un nouveau tournant, en particulier en Catalogne (bien que cette question devienne de plus en plus importante également au pays basque).

    D’une part, le PP (et le parti social-démocrate PSOE avant lui) ne se lassent pas de parler de“l’unité indiscutable de la patrie”, mais ce politiciens semblent perdre leur ferveur patriotique dès lors qu’il s’agit de s’agenouiller devant les exigences de la troïka. D’autre part, en Catalogne, les partis CiU et ERC prétendent défendre la cause de la lutte pour l’autodétermination et les intérêts du ”peuple”, mais ils n’ont aucun problème à saigner le ”peuple” avec leur politique d’austérité. Ils ont promis la tenue d’un référendum concernant l’indépendance catalane, mais ont admis n’avoir aucune stratégie (ni même de volonté) pour répondre à l’inévitable interdiction de celui-ci par le gouvernement du PP, avec le soutien du PSOE.

    La seule force sociale capable de lutter de manière conséquente pour les droits de tous les peuples de la nation afin qu’ils puissent décider de leur propre avenir, c’est la classe des travailleurs. Il s’agit de la seule classe capable de libérer la Catalogne, et la société espagnole, de la misère de la crise du capitalisme. C’est dans la lutte de classe contre les gouvernements soumis au marché, unis au niveau de l’État et au niveau international, que la base d’une véritable solution à la question nationale pourra être trouvée, ce pour quoi le système capitaliste a maintes fois démontré son incapacité.

    Cette solution est celle de la lutte pour une confédération libre et volontaire des peuples ibériques, construite sur le ciment du droit universel à l’autodétermination, y compris le droit à l’indépendance. Une telle lutte ne peut être gagnée qu’en menant le combat pour société socialiste, fondée sur la propriété publique démocratique des richesses et des secteurs-clés de l’économie .

    Ceci souligne la nécessité de forger et de renforcer l’unité de la classe des travailleurs et de ses organisations, en commençant par un front uni de la gauche, du mouvement ouvrier et des mouvements sociaux, dans la lutte pour faire tomber le PP et disposer enfin d’un gouvernement des travailleurs.

  • Israël/Palestine : participation record à la conférence ”Socialisme”

    Un mécontentement grandissant dans la société engendre un intérêt pour les idées socialistes

    Plus de 160 participants ont récemment pris part à la conférence ”Socialisme” organisée par le Mouvement Socialiste de Lutte (Socialist Struggle Movement, section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Israël/palestine). Il s’agissait de la sixième année où un tel événement était organisé, et il s’agit à ce jour de la plus grande édition. Elle a réuni des militants israéliens et palestiniens, des syndicalistes et des socialistes actifs dans différents domaines. La très bonne participation à cet événement n’est qu’une des nombreuses indications illustrant qu’une couche croissante de la société est à la recherche d’une alternative à la politique raciste et pro-capitaliste du gouvernement Netanyahu. Cela ouvre la voie à un intérêt croissant pour les idées socialistes.

    Yasha Marmer, Socialist Struggle Movement (SSM, CIO-Israël/Palestine)

    Cette conférence, qui s’est tenue vers la fin de l’année 2013, a duré deux jours et comprenait plus de 10 sessions de discussion différentes, sur la lutte contre l’austérité et le coût élevé de la vie, sur l’expropriation continue des masses palestiniennes et la lutte pour une solution juste et équitable; sur le processus révolutionnaire au Moyen-Orient et en Afrique du Nord; sur la lutte contre le sexisme ou encore sur la crise mondiale du capitalisme et le combat pour une alternative socialiste.

    L’une des caractéristiques qui rend ce type d’événement véritablement unique est d’avoir l’occasion d’entendre des orateurs de la toute première ligne de front de la lutte sociale. Cette année, ce fut tout particulièrement une réussite.

    L’événement a accueilli des militants israéliens et palestiniens et des activistes membres de six syndicats différents, à côté de militants impliqués dans le combat contre le plan Prawer (un plan raciste visant les bédouins, sur lequel le gouvernement a dû provisoirement reculer), d’habitants impliqués dans la lutte contre les expulsions de maisons ou encore d’activistes de mouvements sociaux et d’initiatives antisexistes en lutte contre la ”culture du viol”. Tamar Gozhansky, un ancien député de gauche très connu de Hadash / AlJaba (Front démocratique pour la paix et l’égalité), et Daphni Leaf, figure de proue du mouvement de protestation massif de 2011 (ce mouvement avait vu un demi-million de personnes descendre dans les rues, dans le cadre des révoltes de masses qui ont suivi la révolution tunisienne, NDT), ont également pris la parole. Le dirigeant des cheminots devenu bête noire du régime, Gilla Edrai, a quant à lui envoyé ses salutations à l’assemblée.

    Non aux expulsions, non à la politique du ”diviser pour régner”

    La conférence a débuté avec deux discussions parallèles, l’une portant sur la lutte contre le sexisme l’autre sur lutte pour un logement décent. La seconde a été introduite par Neta Most (SSM) et a couvert à la fois la lutte pour des logements publics et contre les expulsions motivées par le profit ainsi que la lutte contre l’expropriation raciste des Bédouins arabes du Néguev/Naqab. L’un des orateurs, Amir Abu-Qvidar, est un résident du village bédouin ”non reconnu” par les autorités, il a expliqué la logique raciste qui se trouve derrière le plan Prawer qui menace d’exproprier de leurs terres et maisons entre 30 et 40.000 citoyens arabes de l’Etat d’Israël (plus sur le Plan Prawer (en anglais)). Rozin Basharat, qui participe également à cette lutte contre le plan Prawer, a parlé de son expérience sur le terrain, du rôle majeur joué par les Palestiniennes dans la lutte ainsi que de leur place dans la lutte globale contre l’expropriation et l’oppression nationale.

    Yossi Cohen, porte-parole des résidents de l’un des quartiers de Tel Aviv menacé d’expulsion, a également parlé lors de cette session. Dans son cas, l’expulsion est lancée par un des plus grands magnats de l’immobilier en Israël, Itzhak Techouva, qui veut construire des logements de luxe.

    La discussion a donc porté sur deux luttes différentes concernant le logement et la dignité d’existence, mais qui sont loin d’être séparées.

    La discussion a mis l’accent sur les défis de la période qui nous fait face, mais aussi sur la possibilité de lier ces mobilisations entre elles – ce qui est une nécessité cruciale – et de surmonter la politique de diviser-pour-régner de l’élite capitaliste israélienne.

    Une vague de syndicalisation

    Plus tard dans la journée, les syndicalistes de différents lieux de travail se sont réunis pour discuter du développement sans précédent de la syndicalisation et des luttes syndicales de l’année écoulée, en parallèle avec les attaques du gouvernement contre le mouvement organisé des travailleurs. Parmi les orateurs se trouvait Shlomi Sheked-Almozalino, dirigeant syndical à l’entreprise de télécommunications Pelephone. Shlomi a raconté comment les travailleurs y ont remporté des victoires après une dure bataille pour la reconnaissance des syndicats dans l’entreprise. Ils ont ainsi pu avoir leur première convention collective de travail, qui couvre les 3000 salariés de l’entreprise. La lutte et la victoire des travailleurs de Pelephone constituent l’un des symboles de la vague actuelle de syndicalisation. Plus de 25.000 travailleurs ont rejoint les rangs syndicaux au cours de l’année 2013 uniquement.

    Yasser Abu Arish du comité d’action des travailleurs de la société de crédit Leumi Card (qui regroupe 1200 travailleurs) a parlé de la lutte – toujours en cours – pour arracher une première convention collective de travail dans cette entreprise ainsi que de la façon dont la syndicalisation peut aider à combattre la discrimination raciste qui existe contre les Arabes-palestiniens sur le marché de l’emploi israélien, ce dont il a personnellement fait l’expérience.

    Parmi les autres orateurs se trouvaient Naor Kapulnik, un militant du SSM qui participe également à cette lutte pour la syndicalisation des travailleurs dans une société de crédit; Anat Heyman, dirigeant d’un combat similaire à HaKameri, le plus grand théâtre de Tel-Aviv; et Hadas Zuqrat du secrétariat du syndicat des travailleurs sociaux.

    Les syndicalistes réunis étaient de divers horizons, du syndicat Histadrout (principal syndicat israélien) à ”Pouvoir aux travailleurs”. C’est assez inhabituel étant donné le manque de forums de discussion et de coordination entre syndicalistes, y compris au sein d’Histadrout. Il s’agit du résultat des politiques de droite menées par la direction d’Histadrout.

    L’une des propositions du SSM discutée était justement la création d’un tel forum pour que la base syndicale puisse discuter, dans le but de coordonner et de développer les luttes ainsi que pour faire pression sur les syndicats afin de résister ensemble à l’offensive des patrons et du gouvernement. Cette idée a reçu un large soutien des syndicalistes présents, tant de la tribune que du public, parmi lequel se trouvaient le dirigeant du syndicat des journalistes Maariv et Ami Vatury, de la direction de ”Pouvoir aux travailleurs”.

    La conférence s’est poursuivie par une séance portant sur la lutte contre l’austérité et la cherté de la vie et d’une autre abordant la lutte contre l’occupation et pour une solution socialiste au conflit israélo-palestinien. Cette seconde session a été suivie par de nombreux jeunes et comprenait une introduction effectuée par Shahar Ben-Khorin (SSM) qui a parlé de l’incapacité des négociations en cours à satisfaire toutes les aspirations nationales ou sociales des masses palestiniennes ou à apporter une paix durable. Il a tiré quelques conclusions de l’échec des accords d’Oslo, des soulèvements palestiniens de masse – les Intifadas – et de la lutte contre l’apartheid en Afrique du Sud. Shahar a parlé de la nécessité de développer des forces basées sur la classe des travailleurs autour d’un programme socialiste, des deux côtés de la division nationale, afin de mener la lutte pour l’égalité des droits et pour l’autodétermination, dans le cadre du combat pour une transformation socialiste de la société dans cette région minée par la guerre et la pauvreté.

    Appel pour un nouveau front socialiste

    La séance de clôture de la conférence, le lendemain, a porté sur la construction d’une alternative politique face aux partis pro-capitalistes. L’impact du profond mouvement de masse de 2011 est toujours présent et de nouveaux combats contre le gouvernement sont à venir.

    Les orateurs de cette discussion étaient Or-Ly Barlev, militant des mouvements sociaux; Shelly Dvir, conseillère nouvellement élue à Tel-Aviv; Inbal Hermony, syndicaliste de premier plan du syndicat des travailleurs sociaux; Tamar Gozhansky, ancien député de Hadash / AlJaba et du Parti communiste; et Eyal Atsei Pri du Mouvement du SSM.

    La session a commencé avec la projection d’une vidéo de la victoire électorale de Kshama Sawant à Seattle, aux États-Unis. Ensuite, Yasha Marmer (SSM) a introduit la discussion en demandant aux intervenants ce qui empêchait pareille victoire de ce produire dans le pays. Il a également présenté l’appel du SSM pour le lancement d’un nouveau front socialiste destiné à rassembler les travailleurs et les jeunes des deux côtés de la frontière nationale, dont beaucoup sont maintenant en lutte. Alors que la question nationale pose de grands défis pour la construction d’un mouvement qui cherche à unir les Juifs et les Arabes dans leur lutte pour une alternative socialiste, les militants du SSM et d’autres intervenants ont souligné le grand potentiel qui existe dans la société pour un tel mouvement étant donné le contexte de la région et les récents développements internationaux.

    Gozhansky a exprimé son soutien à la construction d’un tel front des forces socialistes et a proposé d’engager des discussion en ce sens avec le SSM et d’autres forces. D’autres orateurs ont évoqué la nécessité de la construction d’un large mouvement de lutte pour un changement révolutionnaire. Cette session était donc un excellent point de départ pour que différentes forces de la gauche socialiste discutent de leur développement et des efforts destinés à unir la classe des travailleurs de tous les milieux dans le combat pour un changement de société.

  • Hong Kong : Pour une lutte unitaire contre l’oppression et la discrimination des travailleurs immigrés !

    Ce dimanche, des milliers d’employés de maison ont manifesté dans les rues de Hong Kong afin de réclamer justice suite au cas symptomatique d’une employée indonésienne victime de maltraitances de la part de ses employeurs. Voici ci-dessous l’article de nos camarades de Socialist Action, section du Comité pour une Internationale Ouvrière à Hong Kong.

    Par Socialist Action (CIO-Hong Kong)

    Le cas d’une employée de maison indonésienne torturée, Erwiana Sulitiyaningsih, a exposé au grand jour la vie extrêmement dure des immigrés à Hong Kong. Erwiana a non seulement dû subir la violence de la part de ses employeurs, mais elle n’avait pas non plus été payée durant les huit mois où elle les avait servi, sans même recevoir un jour de congé. Cette affaire ne constitue toutefois que le sommet de l’iceberg. Mais après cet exemple, plus de travailleurs osent s’exprimer publiquement sur la façon dont leurs employeurs abusent d’eux. Le système de l’esclavage moderne qui sévit à Hong Kong est devenu un scandale international.

    Une politique injuste

    Les agences de recrutement constituent un exemple brutal de l’exploitation capitaliste. Ces agences obligent les travailleurs domestiques immigré à payer le prix fort pour qu’on leur ”présente” un travail. Les agences ne se soucient que de leur profit, sans aucune considération pour les conditions de travail des travailleurs. La règle des 2 semaines est extrêmement injuste pour les travailleurs immigrés, elle les contraint à rester avec un mauvais employeur plutôt que de risquer d’être expulsés de Hong Kong (le droit hongkongais dispose que les employés de maison étrangers doivent trouver un nouvel emploi et obtenir un visa de travail dans les deux semaines suivant la fin de leur contrat, faute de quoi ils doivent quitter Hong Kong, NDT) ! La loi exigeant que ces travailleurs doivent vivre avec leur employeur les prive de toute vie indépendante. Ce droit humain fondamental ne s’applique pas aux immigrés à Hong Kong. Ils perdent donc leur propre vie privée et certains travailleurs sont obligés de travailler de nuit également. Socialist Action revendique l’abrogation de la règle des 2 semaines et le droit des travailleurs à vivre de façon autonome. Nous exigeons une forte expansion du nombre de logements publics, y avec de logements indépendants bons marchés pour les travailleurs immigrants actuellement exclus du logement public.

    Combattons l’exploitation capitaliste !

    Les immigrés sont victimes de discrimination systémique ainsi que du racisme des autorités, ils doivent subir de longues heures de travail pour des salaires misérables et une faible protection au travail. Le gouvernement a délibérément érigé des murs pour séparer les travailleurs immigrés du reste de la classe ouvrière afin qu’ils puissent être plus facilement exploités dans les intérêts des grandes entreprises, qui s’opposent à ce que plus de moyens soient accordés aux services sociaux tels que la garde d’enfants, les soins aux personnes âgées ou qui refusent encore toute réduction des heures de travail, ce qui permettrait aux travailleurs de passer plus de temps avec leurs familles.

    Seule l’organisation et la création de syndicats combatifs s’opposant résolument à cette ségrégation pourra livrer une solution. L’élite milliardaire craint les luttes des immigrés car leur combat pour de meilleures conditions de travail et de salaire pourrait se joindre à la lutte menée à Hong Kong pour les droits démocratiques, les droits de tous les travailleurs et pour une meilleure protection sociale de base. Dans de plus en plus de pays, les travailleurs ripostent – comme nous l’avons encore tout récemment vu au Cambodge et en Indonésie – avec de nouveaux syndicats de combat et de grands mouvements de grève pour un salaire décent.

    Luttons contre le racisme !

    Socialist Action se bat pour l’obtention des droits démocratiques et pour une protection juridique pour les immigrés et tous les travailleurs – le droit d’adhérer à un syndicat, le droit à la négociation collective, le droit de grève, et un droit de séjour identique pour chacun. La seule façon de se débarrasser des agences de recrutement privées qui enfreignent la loi est de les remplacer par une autorité publique gratuite et à but non lucratif afin de gérer l’embauche des immigrés, sous contrôle démocratique. Il faut également reconnaître qu’au vu de l’état famélique des services sociaux à Hong Kong, les travailleurs domestiques étrangers fournissent des services sociaux essentiels qui ont un grand impact économique.

    Le cas d’Erwiana est un signal d’alerte et de réveil qui illustre la nécessité d’une lutte commune pour les droits des femmes, contre le racisme et pour une protection égale à tous les travailleurs. Le racisme est attisé par les médias et les politiciens afin de diviser et d’affaiblir la lutte pour les droits des travailleurs et les droits démocratiques. Socialist Action est d’avis qu’il est crucial de construire un mouvement de masse à Hong Kong contre toutes les discriminations. Tout comme d’autres groupes, nous serons ainsi également présents à la marche de la Journée internationale des femmes le 8 mars prochain. Luttons pour l’égalité des femmes et contre le racisme et toutes les tentatives des capitalistes de nous diviser et nous affaiblir.

    Socialist Action déclare :

    • Il faut poursuivre les employeurs !
    • Abolition du système privé des agences de recrutement. Tout le travail domestique doit être placé sous un nouveau secteur public non-marchand.
    • Pour le droit des travailleurs immigrés de vivre leur vie de façon indépendante. Pour la construction de 50.000 logements publics chaque année afin d’en finir avec les listes d’attentes, et avec un provision pour les immigrés.
    • Pour un salaire minimum de 40 HK$ par heure et un temps de travail de 8 heures par jour, sans exception !
    • Pour la construction de syndicats combatifs et pour des conventions collectives de travail pour tous les travailleurs, travailleurs immigrés inclus.
    • Pour une augmentation massive des fonds publics alloués aux services à la petite enfance et à l’aide aux personnes âgées. Taxons les riches, les banques et les grandes compagnies.
    • Pour que tous les services publics soient placés sous propriété, gestion et contrôle démocratiques – pour la fin des privatisations et de la sous-traitance.
    • Solidarité internationale !
  • 7e École d’Été latino-américaine

    La 7e école d’été du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) organisée en Amérique latine fut la plus grande édition jusqu’à ce jour. 180 personnes se sont ainsi réunies à Sao Paulo, au Brésil, du 7 au 14 janvier. Des camarades étaient présents du Brésil, du Venezuela, de Cuba mais aussi de Suède, des USA, d’Allemagne et en présence de Tony Saunois, du Secrétariat International du CIO. Malheureusement, les camarades du Chili et de Bolivie n’ont pas pu participer à l’événement en raison de problèmes de transport. Du Brésil, des camarades étaient présents de 10 Etats différents, dont Sao Paulo, Rio, Rio Grande do Norte, Pareba et Serra. Au cours de la semaine, un meeting public a été organisé avec une participation de 200 personnes environ, dont des représentants de courants de gauche au sein du P-SOL et des camarades membres d’un mouvement de sans-abris, le MTST. Deux conseillers municipaux du du PSOL, Paulo Eduardo Gomes et Renatinho, étaient aussi présents et ont chacun pu prendre la parole durant ce meeting public marqué par une grande combativité.

    Par des correspondants du CIO

    • Amérique latine : de retour dans l’épicentre de la lutte mondiale

    L’école d’été a compris des débats et des discussions concernant la situation mondiale ainsi que la vague de luttes et la nouvelle phase de la crise qui s’ouvrent aujourd’hui en Amérique latine. Des discussions ont notamment été menées au sujet de la construction de nouveaux partis de gauche et du rôle que joue le PSOL dans ce cadre, à côté de commissions qui ont porté sur divers aspects de la théorie et de la pratique marxistes comme la question de l’Etat, la méthode transitoire, réforme ou révolution, etc. Les rapports qui ont été livrés au sujet de Cuba ainsi qu’au sujet de la récente victoire remportée aux USA par l’élection de Kshama Sawant à Seatttle ont pu compter sur un écho enthousiaste.

    Inévitablement, l’enthousiasme des camarades brésiliens à la suite de l’éruption de la lutte de masse de juin dernier et dans le cadre des perspectives de luttes ultérieures a dominé cette école d’été. L’année 2014 devrait voir naître une nouvelle vague de luttes au Brésil et dans d’autres pays d’Amérique latine. Au Brésil, les protestations de masse ont totalement changé le rapport de forces et les travailleurs et les masses ont maintenant plus de confiance pour riposter contre les attaques lancées par la classe dirigeante. Cela sera notamment centré autour des protestations qui se tiendront dans le cadre de la Coupe du monde de football dans les prochaines semaines et les prochains mois.

    A Sao Paulo, au cours de ces derniers mois, plus de 100 occupations ont déjà pris place, réalisées par des familles de sans-abris qui reconstruisent leur foyer sur des terrains occupés. L’occupation la plus récente a réuni plus de 30.000 personnes et s’appelle “Nouvelle Palestine”. Une autre illustration de la colère bouillonnante qui existe dans la société a été le développement de larges protestations de la jeunesse au cours de ces derniers jours. Des “Rolezinhos” ont été organisées par des milliers de jeunes dans de nombreuses villes à travers le pays. Ces actions impliquent des jeunes des régions les plus pauvres, qui entrent dans des centres commerciaux et y manifestent. Bien d’autre sont encore prévues. Ces jeunes veulent ainsi attirer l’attention sur le fait qu’ils sont dans la pratiques exclus de ces centres car ils sont incapables d’y acheter quoi que ce soit. Ces protestations ont été déclarées illégales et les jeunes qui entrent maintenant dans un centre commercial doivent montrer leur carte d’identité et sont menacés d’amendes s’ils participent à une action de protestation.

    Cette répression n’a toutefois pas réussi à assombrir la combativité de la jeunesse. Suite à la crainte de nouvelles protestations, le sommet des pays ”BRIC” qui devait initialement se tenir au moment des manifestations contre la coupe du monde a d’ailleurs été reporté. La peur de ce qui peut se développer dans le cadre de cette coupe hante la classe dirigeante et le gouvernement. Ils craignent également le déclenchement de mutineries massives dans les prisons contre les conditions de vie qui y existent. Des manifestations de masse sont prévues à partir du 25 janvier. Cette nouvelle vague de lutte se combinera à la campagne électorale du PSOL, qui a la possibilité d’accroître son bloc parlementaire, ce qui souligne la nécessité pour le PSOL d’adopter un programme socialiste pour défier le gouvernement et construire une véritable alternative. Les membres de LSR (section du CIO au Brésil) sont pleinement impliqués dans cette lutte ainsi que dans les manifestations qui se développent actuellement.


    Brésil : L’occupation ‘Novo Palestina’

    Vidéos de membres du Comité pour une Internationale Ouvrière lors d’un meeting de masse

    Une occupation massive de terres est organisées par le MTST (le “mouvement des travailleurs sans terre”) dans les environs de Sao Paolo, au brésil. ‘Novo palestina’ fait partie des plus de 100 occupations de terrains qui ont pris place à Sao Paolo au cours de ces derniers mois. Il s’agit d’une indication de la vague de lutte qui est en gestation dans le contexte de la préparation de la coupe du monde de football.

    L’occupation ‘Novo Palestina’ est extrêmement bien organisée, avec des comités démocratiquement élus. 9.000 familles et plus de 30.000 personnes sont impliquées dans cette occupation. Des commissions sont élues pour organiser le camp, construire des sanitaires, organiser la défense et la sécurité,… Les propriétaires des terrains occupés réclament de la municipalité de Sao Paolo qu’elle trouve une solution.

    Ci-dessous, voici des vidéos de 3 camarades du CIO – Tony Saunois du Secrétariat International du CIO avec Andre Ferrari de LSR (CIO-Brésil) et Bilbo Goransson de Rattvisepartiet Socialisterna (CIO-Suède) – prenant la parole lors d’un meeting sur les lieux de l’occupation.

  • Hong Kong : Action de protestation contre l’assassinat de grévistes au Cambodge

    Nos camarades de Socialist Action (CIO-Hong Kong) ont participé à une action tenue devant le consulat du Cambodge organisée par la HKCTU (Hong Kong Confederation of Trade Unions, Confédération syndicale de Hong Kong), des groupes de travailleurs immigrés et d’autres partisans de la grève des travailleurs du textile au Cambodge, qui ont subi une répression sanglante. Au moins quatre travailleurs ont été tués par les forces de l’ordre, plusieurs autres ont été blessées et plus de 10 grévistes sont maintenant hors la loi! Solidarité !

    Socialist Action (CIO-Hong Kong)

  • Amérique latine : de retour dans l'épicentre de la lutte mondiale

    Rapport de la discussion sur l’Amérique latine au Comité Exécutif International du CIO

    La réunion de décembre du Comité Exécutif International (CEI) du CIO a marqué le début d’une nouvelle phase tumultueuse de la situation en Amérique latine. Le débat en séance plénière fut présenté et conclu par André Ferrari, de Libertade Socialismo e Revolução (LSR, la section brésilienne du CIO). Après une période durant laquelle l’Amérique latine fut quelque peu en marge de l’épicentre des évènements qui ont secoué le monde au cours des premières années de la crise, les évènements actuels sur le continent acquièrent à présent une importance grandissante pour les perspectives et la situation mondiale.

    Par Dany Byrne

    Cette nouvelle phase met fin à une conjoncture assez prolongée de stabilité économique relative, et de continuité politique. Dans la dernière décennie et demie, les principaux gouvernements du continent jouissaient d’une continuité sans précédent, avec la réélection répétée de ses dirigeants les plus proéminents, et la domination, qui en apparence semblait fort peu menacée, de différents blocs politiques dirigeants passant le pouvoir de chef de file en chef de file, tels que les Kirchner en Argentine, l’aile droite Uribe-Santos en Colombie, etc.

    Fin de la « lune de miel » économique

    Dans de nombreux cas, cette stabilité a été basée sur un soi-disant « miracle économique »: l’idée qu’apparemment l’Amérique latine avait « évité le pire » de la crise capitaliste mondiale, et que ses principales économies continuaient à croître rapidement. Toutefois, les choses, sous la surface, étaient plus compliquées. André a expliqué comment la force des principales économies d’Amérique latine au cours de cette dernière période a été basée en grande partie sur la demande forte et continue de produits de base, en particulier de la part de Chine.

    Cette croissance ne représentait pas une sorte d’émancipation du continent sud-américain, et signifiait encore moins l’entrée de ce continent dans le club du « monde développé ». En fait, une désindustrialisation importante a eu lieu et l’activité économique sur le continent a été limitée à la production et à l’exportation de matières premières. Ce nouveau modèle a également laissé l’économie latino-américaine beaucoup plus vulnérable à l’impact du ralentissement actuel dans les soi-disant «économies émergentes», emmenées par la Chine. En effet, cette année verra le plus faible taux de croissance pour l’Amérique latine depuis plus de 10 ans, entre 2% et 2,5%.

    André et d’autres camarades qui sont intervenus dans la discussion (du Vénézuela, de la Bolivie, du Chili, de Cuba, de Suède, d’Irlande, des Etats-Unis et du Secrétariat international du CIO) ont indiqué comment cette fin de la « lune de miel » économique de l’Amérique latine a déjà été traduite en termes d’une plus grande agitation sociale et politique. On l’a vu dans chacune des quatre plus grandes économies du continent – Brésil, Mexique, Argentine et Colombie – qui, entre elles, représentent plus de 75 % de l’économie latino-américaine.

    Le Mexique et la Colombie dans la tourmente

    Au Mexique , les élections de cette année ont vu le parti PAN, d’obédience néo-libérale, écarté du pouvoir et remplacé par le PRI, qui avait occupé le pouvoir pendant plus de 70 ans. Toutefois, le PRI (traditionnellement plus «protectionniste») a continué fidèlement avec les politiques du PAN, notamment la privatisation rampante des secteurs du pétrole et de l’électricité. Cela a été facilité par le pacte néo-libéral « Pacto por Mexico », qui vise à obtenir l’accord de tous les partis pour une série de «réformes», et qui a été honteusement soutenu à l’origine même par le parti de la gauche traditionnelle, le PRD. André, ainsi que Alan Jones des États-Unis, ont souligné la dégénérescence politique du PRD dans les dernières années, ainsi que la scission qui en est issue pour former « Morena », organisé par Lopez Obrador (candidat de gauche vaincu par la fraude lors des élections de 2006, aussi connu sous le nom de « AMLO »). Cependant, AMLO tient aujourd’hui une position plus «modérée» que précédemment, plus proche de celle de Lula au Brésil que lors de sa campagne de 2006. La politique de sa campagne de 2012 pour les élections présidentielles a été particulièrement faible et démagogique.

    Cependant , malgré l’absence d’une gauche révolutionnaire de masse et combative, le processus d’attaques néo-libérales n’a pas pu avancer sans la résistance héroïque de secteurs importants de la classe ouvrière. Des camarades ont évoqué les grèves des travailleurs de l’électricité contre la privatisation, ainsi que celle des enseignants. Deux luttes qui ont fait face à une brutale répression de l’État, dans une atmosphère de plus en plus militarisée, alors que le gouvernement tente de doper sa puissance militaire dans la «guerre» contre les narco-trafiquants.

    La Colombie, un autre des principaux piliers de la droite traditionnelle pro-américaine sur le continent, a également connu la tourmente. Le gouvernement Santos a été contraint de modérer ses positions, en particulier en ce qui concerne la guerre avec la guérilla des FARC (avec lesquels des négociations sont en cours avec le gouvernement). Cependant, cela a conduit à une scission au sein de l’aile droite, avec Uribe, le prédécesseur de Santos, défendant une position plus intransigeante, et s’engageant dans la compétition électorale contre Santos pour les élections de l’année prochaine, où ce dernier sera également contesté par le « Front Patriotique », une large force de gauche alignée avec certaines sections de la guérilla.

    Il y a également eu une énorme reprise des luttes sociales avec un mouvement massif des travailleurs ruraux qui a jeté le gouvernement dans la crise, ainsi qu’un mouvement solide dans l’éducation impliquant conjointement des enseignants et des élèves dans des actions de grève. La répression brutale de l’appareil d’État reste une grande caractéristique du pays, les assassinats de militants étant monnaie courante. La réunion du CEI a d’ailleurs adopté une résolution en solidarité avec les ouvriers d’une usine de Nestlé où des militants syndicaux ont récemment été tués.

    L’Argentine entre dans une nouvelle crise, des gains pour la gauche révolutionnaire

    En Argentine, le régime de Kirchner, relativement stable jusqu’à récemment, est également entré dans la crise. Tout en essayant de donner l’impression d’un certain déplacement vers la gauche, avec la nomination d’un nouveau ministre supposément «gauchiste» au ministère des Finances le gouvernement de Christina Kirchner est en réalité engagé dans un virage à droite, comme en témoignent les nouveaux arrangements afin de repayer la dette des créanciers américains, et l’entente visant à dédommager massivement la multinationale espagnole YPF après son expropriation partielle l’année dernière. Elle prépare également un nouvel « ajustement » -entendez austérité- massif d’ici à 2015.

    La reprise des luttes provoquée par cette situation s’est traduite lors des élections législatives, où le FIT (« Front Ouvrier de la Gauche » – une alliance d’organisations trotskystes) a reçu 5 %, avec 1,2 millions de voix, et remporté trois députés (qui auraient été 4 s’il n’y avait pas eu de fraude électorale évidente) et des députés régionaux dans 7 régions. Particulièrement frappant fut le cas de Salta, où le PO (la plus grande composante du FIT) a reçu 27 %, le score le plus élevé pour un parti lors de ces élections. Ce grand pas en avant a été partiellement facilité par le passage à droite du « centre-gauche », ce qui a laissé un certain espace à combler, mais reflète également des années de travail patient parmi les travailleurs et les mouvements sociaux.

    Tony Saunois, du Secrétariat International du CIO, a souligné que la question fondamentale est maintenant une question de perspectives pour le FIT, de savoir quelle va être la façon avec laquelle celui-ci peut se développer en tant que nouvelle force de masse. Cela posera des questions tactiques importantes, entre autres sur comment se positionner face au discrédit/aux scissions de la tradition péroniste, qui continue de dominer le mouvement ouvrier argentin. Bien que l’audience de masse obtenue par le FIT semble avoir servi à atténuer l’approche traditionnellement assez sectaire de certaines de ses composantes, la nécessité de maintenir une orientation vers le mouvement de masse des travailleurs et des jeunes, tout en plaidant pour un programme socialiste révolutionnaire, reste une question-clé.

    Le Brésil, crucial pour l’ensemble du continent

    Le pays le plus crucial pour le CIO en Amérique latine reste le Brésil, en raison de son importance régionale et de la base impressionnante que nous avons construit dans ce pays depuis de nombreuses années. Économiquement, il est passé du statut de LA puissance régionale à la croissance la plus faible de tous les pays du «BRICS» (= Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud). Le « Lulaisme », précédemment une référence pour le capitalisme dans la région, fut pour la première fois cette année confronté à l’explosion massive de la colère de la rue. Alors que la présidente Dilma Roussef reste relativement forte et est encore susceptible de gagner les prochaines élections présidentielles, la stabilité de son gouvernement, autrefois incontestée, a été mis en doute pour la première fois. André a expliqué comment un nouveau facteur est entré sur la scène politique – « la rue ».

    Luciano, également membre de LSR (CIO au Brésil) a parlé du mouvement massif qui a explosé en juin, en expliquant que si son déclenchement fut la hausse des prix de transport, en réalité, il s ‘agissait d’une révolte généralisée contre tout l’ordre des choses. L’accueil de la Coupe du Monde et des Jeux Olympiques, et les millions gaspillés sur des projets d’infrastructure massifs pour faciliter ce processus, a permis d’exposer les inégalités abyssales, où des millions de personnes croupissant dans les favelas se font dire qu’il n’y a « pas d’argent » pour améliorer leur sort.

    Ce mouvement n’était pas un évènement isolé, mais l’aboutissement d’un processus de remontée des luttes des travailleurs et des luttes sociales en général, déjà évident en 2012 (l’année du plus grand nombre de grèves au Brésil depuis 16 ans). Cette année a vu une nouvelle vague de lutte des travailleurs, y compris une grève de 300.000 travailleurs de l’administration publique qui a duré pendant des mois ainsi que l’immense grève des enseignants dans l’État de Rio de Janeiro, dans lequel les camarades de LSR ont joué un rôle crucial.

    Comme dans d’autres pays, le mouvement a été marqué par une répression brutale, avec l’usage industriel de tirs de balles en caoutchouc et beaucoup d’emprisonnements arbitraires. La répression a été renforcée sous toutes ses formes, mais plus particulièrement par la police militaire dans les favelas. Cependant, il y a eu un changement important dans l’état d’esprit des opprimés, en particulier dans la jeunesse, qui a perdu la peur. Cette nouvelle confiance a également été affichée dans la façon dont le mouvement a répondu à la victoire partielle obtenue lorsque les prix des transports ont été réduits: au lieu de s’arrêter, les protestations se sont multipliées, non seulement par leur taille, mais aussi en terme de revendications et d’exigences plus radicales et plus profondes.

    Si un certain « sentiment anti-parti » existait dans le mouvement, cela doit être en pris en compte afin d’aider à développer la compréhension de la nécessité d’un instrument politique pour la lutte. LSR a réussi à recruter des couches significatives de gens issus du mouvement, malgré cet état d’esprit complexe.

    La nécessité que le « PSOL » (= Parti pour le Socialisme et la Liberté, une formation large de gauche dans laquelle nos camarades sont impliqués) de se développer comme une force de masse, de lutte, et indépendante de la bourgeoisie, afin de donner une voix politique à ces luttes et les doter d’un programme socialiste, est cruciale pour pouvoir surmonter la crise de direction politique qui existe au sein de ce parti. Malheureusement, l’aile droite du parti a réussi à frauduleusement maintenir sa majorité lors du récent congrès du PSOL; toutefois, le bloc de gauche au sein duquel LSR participe a également émergé renforcé dans sa lutte contre les accords de coalition sans scrupules avec les partis bourgeois prônés par l’aile droite, et pour l’adoption d’un programme véritablement socialiste. Paolo Eduardo Gomes, conseiller municipal pour le PSOL à Niteroi, et proche collaborateur de LSR, était invité à la réunion du CEI et a également parlé lors de cette session, soulignant l’urgence et la nécessité pour le PSOL de se développer comme une force socialiste combative.

    Chili

    Cette année, les élections présidentielles au Chili ont aussi reflété l’entrée dans une nouvelle ère. Encore une fois, c’est le reflet avant tout d’une reprise de la lutte de classes, en particulier suite au mouvement de masse mené par les étudiants en faveur d’un enseignement gratuit, soutenu au cours des dernières années. La coalition de la « nouvelle majorité » que Michèle Bachelet a conduit au pouvoir est en fait davantage une « nouvelle minorité », sachant que la majorité des électeurs se sont abstenus au premier et au deuxième tours, ce qui reflète une désillusion de masse et une méfiance profonde dans le système politique.

    Patricio Guzman, de Socialismo Revolucionario (SR, le CIO au Chili), ainsi que d’autres camarades, ont expliqué la situation actuelle dans ce pays. En vue d’assurer sa réélection, Bachelet a eu besoin de la couverture de gauche du Parti Communiste, lequel s’est incorporé récemment dans la coalition de la Concertation et est maintenant susceptible d’entrer dans le gouvernement de Bachelet. Dans ce contexte, la nécessité d’une gauche indépendante, challengeant le pôle Bachelet -lequel a déjà gouverné à l’aide de politiques néo-libérales entre 2005 et 2009 – s’imposait plus que jamais. Le candidat qui de prime abord se profilait pour remplir cet espace fut Marcel Claude, autour duquel un mouvement (« Todos a la Moneda ») s’est développé. SR a été impliqué dans le développement de ce mouvement depuis ses débuts, et présenta des candidats pour le conseil régional et les listes du Sénat, remportant des résultats très respectables (Celso Calfullan a remporté 16.000 votes pour le conseil régional, et Patricio Guzman 13.000 pour le Sénat).

    SR est cependant intervenu dans cette campagne en étant conscient des limites et des contradictions de celle-ci. Marcel Claude a commencé la campagne avec un discours et un programme assez radical, exigeant par exemple la nationalisation du secteur du cuivre et de toutes les ressources naturelles, ainsi qu’une Assemblée constituante pour en finir avec la constitution de Pinochet -laquelle est toujours en vigueur. Cependant, au cours de la campagne, il a commencé à se déplacer vers la droite, édulcorant sensiblement son discours, allant même à un certain point jusqu’à nier qu’il était de gauche! Cela a eu un impact concret sur ​le développement de sa campagne. Bien qu’il avait initialement rassemblé des milliers de supporters à des rassemblements de masse -dont de nombreux jeunes et étudiants-, et était prédit dans les sondages de résultats avoisinant les 7 %, la campagne a perdu son élan au fur et à mesure que les élections approchaient, et Claude n’a finalement obtenu que 2,8 %.

    Patricio a aussi expliqué comment le soutien de SR pour cette campagne a été combinée avec une intervention politique opposant au programme de Marcel Claude un programme clairement socialiste, revendiquant la propriété publique et la gestion démocratique par les travailleurs des grands moyens de production. Nous avons également durant la campagne aidé à organiser les secteurs les plus avancés du mouvement des jeunes et des travailleurs, au travers du «Front des travailleurs pour Marcel Claude » qui implique la fédération, très militante, des employés de banque, et un certain nombre de groupes d’extrême gauche. Grâce à ce front, nos camarades ont pu faire avancer le débat sur la nécessité de poursuivre la construction d’une alternative politique ouvrière de masse après les élections. Pour cette raison, ce front ouvrier a été maintenu, et Socialismo Revolucionario, qui a connu une croissance importante dans les derniers mois, va se battre pour faire en sorte que ce front se développe selon des lignes socialistes, comme une étape vers un nouveau parti de masse servant les intérêts de la classe ouvrière.

    La réunion a débattu de la question de savoir comment est-ce que les marxistes révolutionnaires se positionnent vis-a-vis de premiers pas, dans un sens large, vers la recomposition de la gauche et du mouvement ouvrier, comme on l’a vu lors de la récente campagne chilienne; de telles initiatives en effet, tout en représentant des pas en avant importants, n’ont pas à ce stade un caractère socialiste ou même de classe clairement défini. Le CIO souligne à chaque étape la nécessité de lutter au sein du mouvement pour une politique socialiste révolutionnaire, et pour la construction de forces de masse indépendantes, par et pour la classe ouvrière, en maintenant bien haut la bannière du marxisme révolutionnaire. Cependant, comme Tony Saunois l’a entre autres expliqué, dans cette lutte, nous devons être prêts à nous engager dans des initiatives et des formations qui attirent de nouvelles couches de travailleurs et de jeunes dans la lutte contre l’austérité, contre le capitalisme et l’oppression, avec la compréhension que ces initiatives représentent des étapes transitoires et vivantes dans le processus de recomposition de la gauche et du mouvement ouvrier organisé. Ce dernier, jamais et nulle part, n’a pris directement une forme « pure », mais s’est au contraire toujours formé dans des batailles avec d’autres courants et confusions politiques existantes. Cette méthode a permis à nos forces d’intervenir avec succès dans des formations plus larges au Chili et au Brésil, mais aussi en Europe.

    Vénézuela et Bolivie

    La nouvelle phase de crise et d’instabilité sur le continent a également secoué les pays-clés du processus révolutionnaire « bolivarien » des 10-15 dernières années. Johan Rivas, de Socialismo Revolucionario (CIO au Vénézuela) a expliqué comment la mort de Chavez a ouvert une nouvelle situation dans laquelle les contradictions du processus bolivarien, longtemps expliqués par le CIO, ont été mises à nu. La base fondamentale de cela est que, malgré les réformes progressistes et les nationalisations mises en œuvre par le « chavisme » au cours des 15 dernières années, le capitalisme n’a à aucun moment été complètement renversé. Cela a conduit à une situation dans laquelle, sous l’impact d’une crise économique profonde – avec des éléments de « stagflation » (stagnation économique + inflation) – la droite, précédemment discréditée et désorientée, a été en mesure de faire des gains importants, et ce y compris parmi la base du chavisme, comme en témoigne les dernières échéances électorales. Entre la réélection de Chavez en novembre dernier et l’élection de son successeur Nicolas Maduro en avril, le chavisme a perdu 2 millions de votes, une tendance qui a été maintenue par la suite dans les élections législatives et locales.

    Alors que l’énorme autorité et le charisme de Chavez avaient contribué à maintenir la stabilité et l’unité du gouvernement dans ces conditions, son remplacement par Maduro ouvre une situation beaucoup plus instable. La «guerre économique» menée par les patrons et la droite, à laquelle Maduro fait référence, est en réalité facilitée par les politiques du gouvernement, qui inclut des éléments de conciliation avec le secteur privé et l’impérialisme, et il existe une aile au sein du chavisme lui-même qui est en train de flirter avec certains secteurs de l’opposition. Il y a aussi une fissure croissante entre les ailes civile et militaire au sein du gouvernement, cette dernière ayant été renforcée depuis la mort de Chavez.

    Dans cette situation, la seule force capable d’empêcher durablement un retour au pouvoir de la droite, et de mettre un terme à la situation économique difficile des masses, est la classe ouvrière qui doit lutter pour sa propre expression politique indépendante, afin de lutter pour une rupture révolutionnaire avec le capitalisme. SR se bat pour le développement d’une gauche alternative pour les travailleurs et es pauvres, s’appuyant sur la base militante du chavisme et sur les secteurs-clés des travailleurs en lutte, lesquels ont mené des mouvements de grève importants dans les derniers mois, y compris des occupations et la mise en œuvre du contrôle ouvrier au niveau local.

    En Bolivie, le gouvernement de Morales s’est tourné contre sa propre base, les travailleurs et les paysans, de manière plus décisive, avec un certain nombre de nouvelles mesures anti-ouvrières, en particulier la nouvelle loi sur les pensions implémentée cette année. Cela, à son tour, a provoqué une nouvelle vague de lutte contre ces mesures, dont le point culminant fut la grève générale illimitée de la confédération syndicale COB, qui a duré une semaine. Plus important encore, l’idée de construire un parti des travailleurs – dont l’absence fut une des principales faiblesses du mouvement révolutionnaire qui a mené Morales et son parti, le MAS, au pouvoir – a été reprise par des secteurs avancés du mouvement ouvrier. Cela a conduit à l’importante initiative lancée par la COB en février, pour la construction d’un nouveau parti des travailleurs (PT). Cependant, le développement futur de cette initiative n’est pas clair à ce stade. Franco d’ASR (Alternativa Socialista Revolucionaria, la section du CIO en Bolivie) a souligné combien il est nécessaire de lutter pour l’indépendance continue du PT vis-à-vis du gouvernement, et pour son renforcement en tant que force politique de masse dotée d’un programme révolutionnaire, plutôt que de le voir transformer en un simple outil de négociation pour la bureaucratie syndicale du COB.

    Cuba

    La discussion a été profondément enrichie par la présence importante, pour la première fois, d’un représentant d’Observatorio Critico, un réseau cubain de militants de gauche. Rogelio a expliqué les contradictions croissantes qui ont émergé dans la société cubaine sur la base des nouvelles réformes pro-marché limitées mises en œuvre par le gouvernement de Raul Castro. Alors que pour beaucoup au sein de la bureaucratie cubaine, ces réformes signifient le début d’un processus en vue du rétablissement de l’économie de marché, Tony Saunois a expliqué qu’il serait erroné de croire qu’un tel processus à Cuba sera une simple répétition de l’effondrement de l’URSS ou du processus d’ouverture au marché capitaliste tel qu’il s’est effectué en Chine. Les racines profondes des gains de la révolution cubaine dans la conscience de millions de Cubains signifie que dans les faits, un tel processus peut être ralenti ou même inversé sous la pression des événements et des masses. Cette discussion a mis au jour la nécessité pour les marxistes révolutionnaires d’approfondir la compréhension de la révolution cubaine et surtout de sa situation actuelle, afin d’approfondir et d’élaborer le programme nécessaire pour la défense de la révolution contre l’impérialisme, et son approfondissement sur la base de la démocratie ouvrière et du socialisme international.

    André Ferrari a conclu la discussion, en soulignant les possibilités importantes de croissance pour le CIO, en taille et en influence, dans la période à venir, y compris la possibilité de pénétrer de nouveaux pays comme la Colombie ou le Pérou. La nouvelle conjoncture passionnante qui s’ouvre en Amérique Latine verra ce continent propulsé une fois encore vers l’épicentre de la situation, et de la révolution, mondiale. Les pas importants qui ont été faits par le CIO au Brésil, au Chili, au Vénézuela et ailleurs serviront à améliorer considérablement la possibilité pour que les idées du socialisme révolutionnaire soient situées dans la ligne de front des batailles et des victoires de la classe ouvrière en Amérique Latine dans la période à venir, dans la lutte pour une confédération socialiste de la région.

  • Suède. Riposte de masse contre la violence néonazie

    Dimanche dernier a eu lieu à Kärrtorp (au sud de Stockholm) la plus grande manifestation antiraciste de l’histoire de Suède. 20.000 personnes se sont rassemblées, suite à l’attaque d’une manifestation par des néonazis armés.

    Par Rättvisepartiet Socialisterna (CIO-Suède)

    Durant tout le mois de novembre, une organisation néonazie violente (Le Mouvement de la Résistance Suédoise, SMR) avait augmenté son taux d’activité dans la région. Des croix gammées ont été peintes partout, plusieurs immigrés ont été agressés et le groupe a été observé en train de s’entraîner sur le terrain de sport local.

    La section locale de Rättvisepartiet Socialisterna (RS, section du Comité pour une Internationale Ouvrière, CIO, en Suède) a discuté de la nécessité d’une campagne antifasciste impliquant la population locale et la jeunesse autant que faire ce peut. D’autres également étaient désireux de mener campagne, et un réseau antifasciste a été constitué, avec un appel à manifester le dimanche 15 décembre. 800 personnes sont venues, une réponse locale assez massive face aux néonazis. Mais ces derniers sont intervenus dans ce rassemblement non-violent. 40 d’entre eux sont arrivés en courant à la manière des militaires, lançant des bouteilles, de puissants pétards, des bâtons et des pierres au sein de la manifestation antifasciste, où se trouvaient notamment des parents avec leurs poussettes!

    Après une minute de chaos, le service d’ordre et les manifestants ont constitué des chaînes humaines pour défendre la manifestation. Après une autre minute, les manifestants ont commencé à avancer vers les néonazis qui ont dû faire marche arrière. Les néonazis ont reçu quelques coups alors qu’ils étaient repoussés le long des rues, pour finalement s’enfuir à travers bois.

    Ce fut une victoire spectaculaire. La police a fait l’objet de critique extrêmement vives pour avoir négligé de défendre les manifestants et pour avoir plus tard protégé les néonazis de la colère des manifestants. Une mère qui venait de sauver ses enfants a demandé à l’un des officiers de police pourquoi ils n’avaient pas arrêté les néonazis. ”Vous n’êtes pas beaucoup mieux qu’eux”, a-t-il répondu.

    La police et certains médias ont d’abord tenté de présenter les événements comme une émeute et une confrontation entre deux groupes. Il a fallu quelques jours de pression et de critiques pour que la police admette détenir des informations concernant une attaque et dise enfin que l’ensemble des 26 personnes arrêtées étaient des néonazis.

    Le réseau antifasciste a su capter une large attention en déposant plainte contre la police pour son rôle de protection de criminels néonazis. ”Au lieu d’arrêter les coupables de violations flagrantes, la police les a défendus”, a ainsi déclaré aux médias le porte-parole du réseau Ammar Khorshed, par ailleurs également membre de la section locale de Rättvisepartiet Socialisterna. Ce dernier a été interviewé à la télévision nationale et dans les journaux tous les jours de la semaine suivante.

    la date du 22 décembre a ensuite été choisie pour une nouvelle manifestation antifasciste. L’écho a immédiatement été très large. 15.000 ont indiqué sur Facebook leur intention d’être présent. Les activités locales de campagne ont illustré que tout le monde connaissait l’organisation de cette manifestation. Une section locale des Etudiants contre le racisme a également été formée.

    Une véritable vague d’antiracisme et d’antifascisme a déferlé sur le pays. Des manifestations ont été organisées dans près de 25 villes et villages. 3000 personnes ont ainsi manifesté à Göteborg, 2000 à Umeå, 1000 à Malmö et ainsi de suite.

    La manifestation de Kärrtorp est devenue la plus grande manifestation contre le racisme et le fascisme jamais organisée en Suède. Et soudainement, tous les partis représentés au Parlement, à l’exception du parti raciste des Démocrates Suédois, ont dit qu’ils allaient eux aussi participer à la mobilisation, y compris les dirigeants de la social-démocratie, le Parti de Gauche, et le Président du Parlement.

    Le réseau antifasciste a toutefois résisté à cette pression et a évité de mettre ces “célébrités” politiques sur la liste des orateurs. Ceux qui ont pu prendre la parole ont été des activistes locaux, des militants qui ont effectivement réalisé tout le travail de campagne sur le terrain. Un certain nombre d’artistes, tous bien connus pour leurs positions antiracistes et critiques contre le système, se sont portés volontaires et ont pu prendre la parole.

    Le dimanche 22, les manifestants sont arrivés par milliers en métro, en bus, à pied, pour constituer un cortège massif qui a souligné le soutien extrêmement fort dont dispose la lutte contre le racisme ainsi qu’exprimé la colère contre l’attaque néonazie. De nombreux participants ont également salué le fait que la campagne ait été menée de la base et sur le terrain.

    Sur la place, des milliers de personnes ont d’abord écouté les percussions de Riot Samba, Sambomban et Yakumbe. Ensuite, la marche s’est ébranlée vers le terrain de sport. ”Nous sommes maintenant sur le terrain de football où ont été découvertes des activités néonazies. Des marches militaires ont été organisées, avec des saluts nazis, ici, sur ce terrain de football. Maintenant, nous le reprenons à nouveau. Et nous le reprenons à jamais, nous écraserons le nazisme”, a déclaré un responsable sous les applaudissements.

    Le premier orateur était Peter Myllykoski, membre de Rättvisepartiet Socialisterna et responsable du service d’ordre de la manifestation. ”Les néonazis nous ont attaqués – une attaque armée et planifiée. C’est nous – tous les manifestants – qui, collectivement, ont chassé ensemble les néonazis. C’était une grande victoire, non ?”, a-t-il demandé à la foule, recevant des applaudissements massifs et un ”oui” retentissant. Il a également critiqué la police pour son comportement du dimanche précédent : “Vous savez probablement que nous avons déposé plainte contre la police. Ils ont sous-estimé la menace, ils n’ont pas réussi à agir et, finalement, ont même protégé les néonazis. Maintenant, nous voulons des réponses de la police et des tribunaux : les néonazis vont-ils être punis ? Que 23 des 26 arrêtés aient été relâchés n’est pas un bon signal. Ni d’ailleurs le fait qu’ils sont accusés d’émeute alors qu’ils y a tentative d’assassinat.”

    L’orateur suivant était Lena Ezelius, dirigeante de la section locale de Kommunal (syndicat des travailleurs communaux). Elle a expliqué comment le racisme tente d’instrumentaliser l’injustice sociale pour s’en prendre aux immigrés: ”Ce n’est pas la faute des immigrés si la pauvreté des enfants et les différences entre classes sont de plus en plus fortes en Suède. Ce n’est pas les immigrés qui sont à la base du fait que les entreprises suédoises exploitent une main-d’œuvre étrangère dans de très mauvaises conditions. Ce n’est pas les immigrés qui ont diminué les budgets pour l’enseignement et le soins aux personnes âgées alors que l’argent de nos impôts va dans les poches des patrons.”

    Plusieurs autres intervenants – militants politiques, artistes, activistes locaux – ont également pris la parole. Le discours de Petri Myllykoski’s disait encore au sujet de la manifestation : “Kärrtorp a appris que l’antiracisme vient d’en bas, des gens ordinaires. De nombreuses personnes ont ressenti la nécessité de s’organiser eux-mêmes, localement et à travers tout le pays, contre le fascisme et le racisme. Stopper le racisme et le fascisme nécessite une lutte commune contre toutes les injustices et contre toutes les tentatives de nous diviser.”

    Durant cette manifestation, nous avons vendu 400 exemplaires de notre journal hebdomadaire ”Offensiv” et obtenus 25 abonnements. Pourtant, la plupart des membres de Rättvisepartiet Socialisterna étaient mobilisés dans le service d’ordre de la manifestation. De nombreux participants ont également fait part de leur intérêt pour en savoir plus sur nos activités, en comprenant que c’était notre section locale qui avait été à la base de la campagne antifasciste à Kärrtorp et que le rôle de notre organisation avait été crucial pour construire le réseau antifasciste à la base de cette manifestation massive. D’un autre côté, une journaliste de droite a écrit qu’elle avait quitté la manifestation “attristée et apeurée” à cause de l’atmosphère de gauche radicale présente.

    Les manifestations qui se sont déroulées dans tout le pays illustrent le potentiel présent pour le lancement d’un nouveau mouvement antiraciste contre le parti raciste des Démocrates Suédois et contre les groupes néonazis de même que contre les politiques néolibérales qui offrent au racisme un terreau pour se développer.

  • [INTERVIEW] USA : Victoire éclatante pour une socialiste révolutionnaire à Seattle!

    Des “conséquences fracassantes” aux Etats-Unis et internationalement

    Le soir du 15 novembre 2013 restera une date marquant une étape historique dans la construction d’un nouveau mouvement socialiste aux États-Unis, la plus grande puissance capitaliste au monde. Kshama Sawant, candidate de Socialist Alternative (les partisans du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) aux USA) a été capable de remporter un siège au conseil de Seattle après que son adversaire ait concédé avoir perdu. C’est la première fois depuis de nombreuses décennies qu’un socialiste révolutionnaire remporte une élection aux Etats-Unis en battant le parti Démocrate, un parti qui prétend être favorable aux travailleurs. Le décompte des voix se poursuit toujours et confirme l’avance croissante de Kshama Sawant dans cette ville. En date du 18 novembre, Kshama avait reçu le suffrage de 93.168 personnes.

    Sarah Wrack, Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles)

    Pourquoi avez-vous, avec Socialist Alternative, decide de vous presenter à ces élections ?

    L’an dernier, nous avions déjà mené campagne pour la Chambre des représentants de l’Etat de Washington, j’étais alors candidate contre le président de la Chambre, Frank Chopp, probablement le parlementaire le plus puissant de l’Etat (Lire notre article Socialist Alternative remporte un score historique contre le Président de la Chambre des Représentants de l’Etat de Washington).

    Derrière notre décision de mener cette campagne électorale, il y a notre analyse politique des conditions qui ont émergé suite au mouvement Occupy. Ce mouvement a été très actif puis, vers fin 2011 – début 2012, il a commencé à bifurquer vers des campagnes telles que Occupy Homes au Minnesota (contre les expulsions et les saisies immobilières) et ainsi de suite. Mais dans la plupart des cas, le mouvement commençait à perdre son souffle. Le sujet le plus important à ce moment était la réélection de Barak Obama et le fait que, pour ceux qui se considèrent comme des progressistes, la priorité était d’obtenir cette réélection parce qu’il était impensable de voir le Républicain Mitt Romney arriver à la Maison Blanche.

    Bien entendu, Socialist Alternative est d’accord pour dire que l’aile droite ne doit pas disposer d’une telle opportunité, mais nous avons également fait remarquer que les Démocrates ne constituent en rien une alternative et que dans l’ensemble, la classe des travailleurs n’a pas bénéficié de la politique des deux partis du Big Business, qui sont dans les faits deux ailes d’un même grand parti pro-capitaliste.

    En fait, l’administration Obama est en elle-même un bon exemple de la manière dont les Américains progressistes placent leurs espoirs dans les Démocrates années après années pour ensuite devoir faire face à toute une série de trahisons. Toutes les promesses concernant les soins de santé, les détentions à Guantanamo Bay, la fin de l’occupation de l’Afghanistan et les attaques de drones,… n’ont pas été tenues. Les attaques de drones ont augmenté, la présidence d’Obama a été marquée par le plus grand nombre d’expulsions de sans-papiers et, en tant que professeur, je peux vous garantir que l’assaut contre l’enseignement public et contre les syndicats d’enseignants a été plus aigu sous Obama.

    La question qui se posait à Socialist Alternative était de voir comment pouvoir poursuivre les discussions politiques et d’approfondir la clarification portant sur la nécessité de rompre avec les deux partis de Wall Street et de rompre également avec le système capitaliste lui-même. Lancer notre propre campagne et illustrer par la pratique ce qu’une campagne populaire véritablement indépendante pouvait être nous a semblé constituer une stratégie efficace.

    Nous avons mené campagne en refusant l’argent des grandes entreprises et sans chercher le soutien de l’establishment du parti Démocrate.

    L’an dernier, nous avons obtenu 29% des voix, un score tout à fait remarquable : plus de 20.000 personnes avaient voté pour nous. Et nous nous sommes battus pour notre droit d’avoir ‘‘Socialist Alternative Party’’ sur le bulletin de vote (et non tout simplement le nom du candidat), tout comme nous avons cette année aussi mené ouvertement campagne sous le nom de Socialist Alternative.

    Comment la campagne a-t-elle été organisée?

    Les premières personnes impliquées ont été les membres de Socialist Alternative. Notre objectif principal au début était de développer la plate-forme de la campagne. Le thème fut discuté et débattu dans toutes les sections locales de Socialist Alternative. Nous avons particulièrement souligné trois points, dont la revendication d’un salaire minimum de 15 $ de l’heure, ce que nous avions déjà défendu l’an dernier. Cette année, puisque nous étions impliqués dans une campagne menée à travers toute la ville, notre revendication d’un salaire minimum a été discutée dans toute la ville de Seattle. Le second point concernait le droit de disposer d’un logement abordable et d’un contrôle des loyers. Le troisième était l’instauration d’une taxe sur les millionnaires pour financer le transport en commun et l’enseignement.

    Notre campagne était placée sous le slogan : ‘‘make Seattle affordable for all’’ (rendre Seattle abordable pour tous), car Seattle est une ville très riche mais profondément inégalitaire. Y vivre est inabordable pour la grande majorité des gens, et en particulier dans les rangs des travailleurs à bas salaire.

    Dès le début, il était clair que ces revendications attiraient l’attention enthousiaste de la classe des travailleurs à Seattle, ce qui nous a aidé à développer notre réseau de volontaires. De nombreuses personnes se sont senties galvanisées à l’idée d’une campagne électorale tellement différente du business-as-usual des politiciens pro-capitalistes.

    Le fait que nous nous sommes engagés, en cas de victoire, à ne garder que le salaire moyen d’un travailleur a particulièrement suscité l’intérêt. Un membre du conseil de Seattle (qui en comprend 9) gagne 120.000 dollars par an, un salaire très élevé qui n’est devancé qu’au conseil de Los Angeles. La plupart des gens ne savaient pas qu’il en était ainsi et nous avons bénéficié d’un large écho en affirmant que nous ne garderions que le salaire moyen d’un travailleur, en consacrant le reste à la construction des mouvements pour la justice sociale.

    C’est donc à travers la politique à la base de la campagne que nous avons été capables de construire une grande base de bénévoles. Plusieurs membres de Socialist Alternative ont travaillé à temps plein pour les organiser. Nous avions un bureau de campagne où étaient organisées des réunions de travail quotidiennement, en collaboration avec la direction locale de Socialist Alternative.

    Nous avons de cette manière pu être en mesure de prêter attention à tout ce qui se passait dans la ville et de profiter de toutes les opportunités pour parler de la campagne, pour la faire connaître et disposer d’espaces dans les médias, chose véritablement nécessaire puisque nous étions en lutte contre un puissant Démocrate implanté au conseil depuis 16 ans déjà. Nous avons été capables de faire fortement ressortir les conséquences néfastes de sa politique mais aussi de celle de l’administration de Seattle en général et de montrer à quel point ces politiciens sont totalement en dehors de la réalité quotidienne des travailleurs. Grâce à tous ces efforts, nous avons pu construire une base de plus de 350 bénévoles, une grande source d’énergie pour la campagne.

    Dans la dernière ligne droite, ce qui a beaucoup aidé la campagne, ce fut l’organisation d’une centaine d’actions le week-end précédant le jour du scrutin. Des partisans de Socialist Alternative se sont placés avec des affiches à tous les carrefours majeurs de la ville, plusieurs bannières ont été déployées au-dessus des autoroutes autour de la revendication d’un salaire minimum.

    Cela nous a vraiment aidé pour convaincre les gens d’aller voter. La politique de la ville est tellement hors de la réalité des travailleurs et de leurs familles qu’il est normal que nombre parmi eux ne fassent pas attention à la campagne électorale, qu’ils trouvent ennuyeuse. Ils considèrent les membres du conseil comme de riches blancs issus de la classe supérieure, qui ne sont pas au courant de ce qui se passe sur le terrain et ne s’en soucient pas. Le défi auquel nous avons dû faire face ne consistait donc pas seulement à influencer des électeurs, mais aussi à pousser les habituels abstentionnistes à aller voter pour cette fois.

    Nous avons également désiré approfondir le dialogue avec les gens. Nous sommes marxistes, nous ne pensons pas que l’arène électorale est la plus favorable pour la construction des mouvements sociaux. Nous avons voulu montrer un exemple de la manière dont cela pouvait être fait, avec une implication active dans la campagne. Je pense que c’était là notre plus grand défi, et que nous nous en sommes plutôt bien sortis.

    Mais nous ne pouvons pas tout simplement parler de notre campagne. Nous devons aussi mentionner qu’elle a été menée au même moment que la lutte des travailleurs des fast food. A Seattle tout particulièrement, ces travailleurs en lutte étaient très confiants en leurs possibilités, et nous nous sommes montrés solidaires de leur combat. Un scrutin portant sur l’instauration d’un salaire de 15 $ de l’heure a aussi été lancé à Seatac, une ville voisine de Seattle où se trouve l’aéroport international. Le thème était très précisément la question du salaire des travailleurs des aéroports. Tout cela a contribué à l’élan de la campagne.

    Comment les gens ont-ils réagi au fait que vous vous êtes présentés ouvertement comme socialistes ?

    Pour la plupart des gens, ce qui est surtout ressorti, c’est que nous luttions pour un salaire minimum de 15 $ de l’heure.

    Ce qui est vraiment attiré l’attention, c’était l’audace dont nous avons fait preuve sur cette question, contrairement à ce qui se fait généralement. Pas mal de gens qui approuvaient notre campagne et avaient l’expérience des partis bourgeois nous disaient : ‘‘vous devez baisser le ton, ne critiquez pas tellement l’administration.’’ On m’a même souvent demandé: ‘‘pourquoi devez-vous toujours commencer chaque discours en disant: ‘‘Je suis un membre de Socialist Alternative’’?’’

    Ils voulaient me dissocier de Socialist Alternative parce que la politique électorale américaine est normalement centrée sur des personnes et des personnalités, pas sur des organisations collectives ou l’effort collectif. Mais nous avons complètement rejeté cela. Nous avons été plus audacieux et avons été implacables en présentant notre politique et affirmant clairement que chaque personne qui aimait cette campagne et son aspect combatif devait savoir que cela avait directement à voir avec le fait que nous sommes des socialistes révolutionnaires.

    Beaucoup de gens ne se souciait du reste pas tellement de l’étiquette, ils se souciaient du fond de la campagne. Mais pour une certaine couche, cela était important. Certains disaient ‘‘Eh bien si c’est ça une campagne socialiste, et que je suis d’accord avec tout, alors peut-être bien que je suis moi-même un socialiste, peut-être que j’ai besoin d’entrer en discussion avec Socialist Alternative.’’ Des personnes ont rejoint notre organisation, où sont en discussion à cette fin, parce qu’ils ont approuvé ce que nous avons dit et que leur confiance a été renforcée par notre ardeur à nous battre pour la victoire.

    Quels sont vos projets maintenant ?

    Tout d’abord aujourd’hui [le 17 Novembre] nous avons un grand meeting pour réunir tous ceux qui ont participé à la campagne et pour célébrer notre victoire. Mais il sera également question de donner une idée de la voie à suivre pour l’avenir : que doit-il maintenant se passer ?

    Nous ne voulons pas limiter à parler de la campagne et de ce que nous allons faire au conseil de Seattle, nous voulons aussi aborder la signification de cette victoire. Quelle est la signification de la victoire d’un socialiste révolutionnaire au conseil d’une grande ville américaine ? En de nombreux points, il s’agit d’un bouleversement pour la gauche en général, en particulier aux Etats-Unis mais aussi au niveau international. Si cela a été possible, qu’est ce qu’on peut faire d’autre ?

    La raison pour laquelle nous obtenons l’attention des médias nationaux et internationaux n’est pas que nous avons gagné un siège au Conseil de Ville. Normalement, tout le monde s’en fiche. Ce qui est frappant, c’est qu’une personne ouvertement socialiste remporte un siège, que la campagne n’a pas bénéficié de l’argent des grandes entreprises et qu’elle n’a pas reposé sur l’appareil du parti Démocrate pour l’emporter. Nous avons besoin que la gauche tire parti de ces enseignements et se rende compte qu’il existe une ouverture pour construire des mouvements et construire une alternative anticapitaliste viable qui luttera pour les travailleurs, contre les deux partis de Wall Street.

    Au Conseil, notre première priorité sera de pousser l’application d’un salaire minimum de 15 $ de l’heure. Nous allons rédiger une ordonnance à cette fin à destination du Conseil. Mais nous n’avons aucune illusion sur le fait que cela sera facile. Les grandes entreprises vont résister bec et ongles parce que Seattle est une ville importante, et qu’il leur faut éviter tout précédent. Cela pourrait avoir un effet domino sur d’autres villes. Nous devons donc continuer à soutenir la construction d’une mobilisation de masse autour de cette revendication.

    Une des choses à laquelle nous allons maintenant œuvrer est l’organisation d’un meeting de masse, notre objectif est de réunir 10.000 personnes mais nous verrons comment ça se passe, début d’année prochaine, en soutien à cette revendication des 15 $ de l’heure.

    J’ai vu beaucoup de commentaires disant qu’il y a quelque chose d’unique à Seattle. Bien sûr, il y a toujours des choses différentes d’une situation à l’autre, mais je pense qu’il est important pour la gauche de partout réaliser que, compte tenu de la crise du capitalisme (et en particulier en Europe au vu de la politique d’austérité qui y a été appliquée), il est absolument certain que de grandes possibilités existent. Si cela peut se produire dans l’antre de la bête, il n’y a aucune raison que cela ne puisse pas être fait ailleurs. Mais ce n’est pas automatique, et c’est pourquoi nous devons consciemment construire nos forces.

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