Tag: Comité pour une Internationale Ouvrière

  • La lutte des classes émergente et la crise capitaliste en Asie

    Conférence Internationale du CWI

    « Si l’économie et les relations mondiales sont dominées par les développements sociaux et économiques dramatiques en Chine, alors pour l’Asie le pas et l’ampleur de ces développements sont encore plus significatifs. » Clare Doyle ouvrit la discussion sur les développements en Asie lors de la conférence du Comité Exécutif International du CWI en décembre dernier. Une fois que l’économie chinoise commencera à faiblir, voire à s’effondrer, cela aura des conséquences terribles à l’intérieur de la Chine et à travers toute la région.

    Article de www.socialistworld.net

    Bien que la plupart des économies en Asie sont toujours sujettes à une croissance relativement grande, celle-ci est extrêmement fragile. Tout comme la Chine, ces économies reposent sur une main d’œuvre bon marché, sur de hauts niveaux d’investissement, et sur le commerce, avec les USA aussi bien qu’avec les autres pays asiatiques.

    Elles n’ont pas été capables de développer aucun marché interne sérieux pour y écouler leurs marchandises. La course néolibérale mondiale vers les superprofits, conduite à la fois par les capitalistes nationaux et internationaux, n’a mené à aucune amélioration de la capacité de la majorité asiatique frappée par la pauvreté à acheter même les produits vitaux de base. Au contraire, énormément de pays asiatiques ont été ceux où le fossé entre riches et pauvres s’est le plus vite creusé.

    Le boom présent, mené par les investissements, pourrait rapidement laisser place à une nouvelle crise asiatique comme celle de 1997, mais à une échelle encore plus grande. La crise de 1997 a été suivie par des mouvements de masse, qui dans certains cas ont pris des proportions révolutionnaires. Un certain nombre de régimes dans la région ont été ébranlés quand la dictature du Général Suharto, en Indonésie, fut défaite. Maintenant, et surtout si l’immense bulle de surproduction chinoise devait éclater, ou si des luttes de classe majeures devaient commencer dans ce pays, nous pourrions nous attendre à des convulsions révolutionnaires encore plus grandes qui se répercuteront sur toute la région.

    L’Asie est toujours le foyer d’un grand nombre de régimes qui emploient des méthodes dictatoriales pour maintenir leur prise sur le pouvoir. Certains, incluant la Chine, interdisent même les droits démocratiques les plus basiques à leurs citoyens. 60 prisonniers en Chine ont été arrêtés pour « offenses par internet ». La Chine est 159è sur 167 dans le classement de liberté de la presse qui a été établi par « Reporters sans frontières ». Les demandes pour les droits élémentaires peuvent, dans des circonstances telles que celles qui existent sous les dictatures asiatiques, devenir révolutionnaires par elles-mêmes.

    Des manifestations de rue, des grèves générales, ont été aperçues à travers toute la région – de l’Indonésie et des Philippines, avec des protestations massives contre le décollage des prix du carburant et de la nourriture, jusqu’à l’Inde et à la Corée du Sud, où des millions de travailleurs sont partis en grève contre les privatisations et la dérégulation.

    Hong Kong a accueilli un quart de million de manifestants dans ses rues le 4 décembre, qui demandaient le droit élémentaire au suffrage universel, et a été chamboulé par des manifestations anti-OMC dans la semaine qui a suivi. Aucune des grandes puissances mondiales n’était optimiste quant aux discussions qui n’ont pas abouti à quoi que ce soit pour aucune d’entre elles. Comme il a été suggéré lors de la discussion, peu d’élites asiatiques anticipent l’avenir avec confiance.

    Ces perspectives soulignent l’urgence de la construction de nouveaux partis des travailleurs de masse, et de cadres révolutionnaires forts dans la région.

    La Chine

    Le CWI a, depuis un certain temps, été enclin à mieux comprendre les processus qui se déroulent en Chine, et en particulier les attentes et l’attitude de sa population. Dans la rapide industrialisation et transition vers les relations capitalistes de marché qui a terriblement accéléré lors des dernières années, la grande majorité de la population a été laissée de côté. Il y a plus de pauvres absolus en Chine qu’en Inde. Des 248 millions de foyers ruraux, 200 millions dépendent de parcelles de terre d’une taille moyenne de 0.65 hectares ! D’un autre côté, la plus grande classe ouvrière du monde a été créée.

    Mais, en dépit de l’étiquette « communiste » officielle de l’élite dirigeante en Chine, ainsi que Laurence Coates, de Suède, a fait remarquer, aucune protection légale n’existe pour 60% des lieux de travail. « Ceci est la plus grande force de travail non-syndiquée du monde », où l’on parle d’un syndicat en tant qu’authentique organisation des travailleurs, indépendante de l’Etat. Et pourtant, « il y a 160 grèves ou manifestations chaque jour, et de 90 à 120 manifestations dans les zones rurales ». Et comme le montra PerAke Westlund, ceci signifie qu’il y en a maintenant plus dans les villes qu’à la campagne.

    Néanmoins, les fermiers et leurs familles sont constamment impliqués dans des conflits brutaux avec les forces de l’Etat quand ils mènent bataille contre les expropriations du gouvernement ou des investisseurs privés. Depuis 1992, une région de la taille de l’Italie a été illégalement saisie par des privés. Il y a une résistance opiniâtre contre le bulldozing des maisons entrepris afin de faire de la place pour les sites de construction des Jeux Olympiques, et une bataille particulièrement tragique fut le blocage durant trois semaines d’une grand’ route à Chonging, une ville de 30 millions d’habitants ( avant la fin de notre Conférence, des rapports nous sont parvenus, faisant état d’un des pires massacres de civils depuis celui de la place Tiananmen, au village de Dongzhou dans la province de Guangdong ).

    La catastrophe de Harbin a éveillé la colère et l’indignation de 9 millions de personnes dans la région à qui on avait menti. Des souvenirs de la manière dont a été étouffée l’affaire de l’épidémie de SARS, et les craintes d’une grippe aviaire pourraient se raviver et se développer sans avertissement officiel. La rancœur vis-à-vis des désastres de ce genre, ou de ceux vécus dans l’industrie minière – où 10 000 travailleurs meurent chaque année – s’accumule. Les suicides touchent un quart de million de fermiers pauvres chaque année. Combien de temps faudra-t-il avant que ce niveau de frustration et de colère prenne la forme de luttes – d’abord régionales, puis nationales – comparables à celles de la fin du 19è siècle et du début du 20è siècle en Russie ? demanda Clare.

    Les membres du Parti Communiste Chinois ( PCC ) vont avoir de plus en plus difficile à étouffer les informations au sujet de ces calamités et, le pire pour eux, au sujet de la corruption et de la mauvaise gestion de leurs propres dirigeants nationaux et locaux. Même en gonflant le nationalisme en guise de diversion, ils pourraient susciter des mouvements de protestation qui pourraient se retourner contre eux-mêmes.

    En s’accrochant à l’image de Mao et en prêchant toujours la parole « marxiste », tout en poursuivant le tournant vers des relations capitalistes complètes dans la production, le PCC tient une épée à double tranchant. Il y a d’office des sentiments profondément ancrés en faveur de la justice, de l’égalité, de la propriété et de l’entreprise collectives dans la majorité de la population. Etant donné que l’« expérience » d’une ouverture vers le capitalisme a commencé en Chine il y a plus de 30 ans, les illusions qu’il peut bénéficier à la population doivent s’être réduites à peau de chagrin.

    En tentant d’éviter la « thérapie de choc » de la transition directe vers le capitalisme qui accompagna la chute de l’Union Soviétique, le PCC accumule ce qui deviendra une explosion gigantesque quand les choses iront mal pour eux. Au sujet de ce qu’ils feront le jour où l’économie chinoise se prendra un mur, le débat est toujours ouvert, mais il serait douteux que la clique dirigeante actuelle échappe à l’orage. Lors d’une crise, certaines mesures de renationalisation pourraient être introduites, mais un retour complet à la propriété étatique et à la planification centralisée de jadis n’est pas sur l’agenda.

    En commentant certains points qui avaient été relevés au cours de la discussion sur la Chine, Peter Taaffe, de Grande-Bretagne, fit remarquer que pour le moment, il ne faisait aucun doute que cette économie au turbo allait toujours de l’avant. Il mentionna la difficulté à se reposer sur les statistiques officielles en provenance du régime (et depuis la fin de la Conférence, les derniers chiffres ont été révisé jusqu’à plus 20% !). Mais Peter sentait aussi qu’il n’y avait guère besoin d’être trop pressé pour pouvoir caractériser la nature actuelle de la société chinoise. PerAke de Suède cita un rapport de l’OCDE (Organisation de Coopération et de Développement Economique) qui disait que la Chine a terminé sa transition d’une « économie planifiée centralisée » vers une « économie de marché libre », mais exprima son accord quant à l’importance de toujours réévaluer la situation concrète. La futur proche contient de grands défis pour le CWI en terme d’analyse et en terme de construction d’un soutien pour les idées et traditions du trotskysme.

    Une période tumultueuse s’ouvre sans aucun doute en Chine, dans laquelle le développement de syndicats indépendants et d’une direction révolutionnaire de la classe ouvrière seront cruciaux. Il est nécessaire d’avoir un programme qui appelle à la lutte dans les secteurs publics contre les privatisations, pour un vrai contrôle des travailleurs, au moyen de la démocratie ouvrière, dans les secteurs publics, pour la renationalisation, et pour un gouvernement ouvrier qui établirait des droits démocratiques pour tous. Mais un tel programme doit être élaboré et développé à travers le dialogue et l’implication des travailleurs en lutte à l’intérieur de ce vaste pays lui-même.

    En guise de note de bas de page à ses commentaires, Clare mentionna le retournement de veste récent du grand gourou Den Xiaoping – l’homme qui a fourni la base idéologique qui décrivait le capitalisme en tant que premier stade du communisme. Apparemment, il serait maintenant en train de dire que l’économie de marché occidentale devrait être bannie des universités, et qu’on devrait y réinstaurer l’économie marxiste !

    La région

    Le reste de la discussion lors de cette session lors de cette session a été surtout concentré sur les développements au sein des pays principaux où le CWI possède des forces, mais l’on fit mention d’un ou deux autres développements significatifs dans la région. Le nouveau parti des travailleurs en Corée du Sud, par exemple, le Parti Démocratique du Travail Coréen ( PDTC ), qui comptait 10 parlementaires et 60 000 membres, était en train de subir un important revers. Un scandale de corruption a mené à la démission de la direction entière de la fédération syndicale indépendante qui l’avait fondé – la CSC, Confédération Syndicale Coréenne. Une importante élection partielle en Ulsan a été perdue par le parti, et la CSC elle-même éprouvait des difficultés à mobiliser les lourds bataillons dans l’industrie d’ingénierie pour ses campagnes contre les intérims et les contrats à durée déterminée.

    A travers la région, les prix du carburant croissants et le retrait des subsides ont mené à de grands mouvements de protestation. Il est possible que les plus fréquents et les plus larges de ces mouvements dans la période récente se soient déroulés en Indonésie. Sous couvert de la lutte contre le terrorisme, des mesures de répression ont été introduites, qui ramenèrent à la surface des souvenirs du régime dictatorial de Suharto.

    Un agréable effet secondaire dû à la pression exercée par l’impérialisme américain dans la région, depuis le 11 septembre et après le désastre du tsunami, a été le pas en avant vers la « résolution des conflits » – en Aceh, Indonésie, au Cachemire, et au Sri Lanka. Mais, sur base du capitalisme, ni une solution finale ni une authentique coopération interethnique ne peuvent être garanties. Ces processus vont connaître des progrès – démilitarisation, démobilisation, négociations – puis de nouvelles explosions de conflit.

    Peter Taaffe montra, par analogie avec ces processus, la nature de va-et-vient de la lutte pour un accord en Afrique du Sud lors des années 90-94. La bourgeoisie voulait un arrangement, mais le pays était en état de quasi guerre civile avant que le suffrage universel ne soit établi. Il utilisa aussi l’exemple de ce que De Gaulle avait réalisé dans les années 50 en France, en guise de perspective quant à ce que pourrait faire le nouveau président sri lankais. Mahinda Rajapakse a été élu sur une base de non-réconciliation avec les combattants de la « libération », les Tigres tamouls. Alors que De Gaulle avait été élu avec le slogan anti-indépendance d’« Algérie française ». De la même manière que, pour éviter une longue et dommageable guerre, De Gaulle se décida à conclure un accord de paix avec le Front de Libération National (FLN), qui accorda l’indépendance au pays, ainsi Rajapakse, sous la pression de l’impérialisme, pourrait être forcé de s’asseoir à la table de négociation avec les TLTE (Tigres de Libération Tamouls d’Eelam), et d’adopter un certain genre de compromis pour éviter une résolution dans la guerre ouverte.

    Cette discussion d’une journée sur l’Asie, à la Conférence de l’Exécutif International du CWI, fut particulièrement enrichie par les contributions de participants actifs à la lute des clases dans la région. Ces camarades expérimentés comprennent bien l’importance vitale qui doit être accordée à la recherche de perspectives pour le développement des événements, de sorte à intervenir le plus efficacement possible. C’est seulement de cette manière qu’il est possible de canaliser les énergies de ces partis et groupes qu’ils représentent sur ces activités qui vont renforcer leurs propres aptitudes de combat, et celles des travailleurs et des pauvres de leurs pays. Ce faisant, ils préparent les forces du CWI à prendre l’avantage des opportunités qui s’ouvrent pour la construction et la consolidation des forces du changement socialiste révolutionnaire.

    Pakistan

    L’arrière-plan de la discussion a été établie par les récents accomplissements majeurs des forces du CWI au Pakistan et au Sri Lanka – en réponse aux deux grands désastres « naturels » des douze derniers mois, et lors des dernières grèves et élections importantes.

    La réputation du SMP (Mouvement Socialiste Pakistanais) et de la campagne pour les droits syndicaux (Trade Union Right Campaign Pakistan, TURC-P) a grandi à pas de géant lors de la lutte de 65 000 travailleurs contre la privatisation des télécommunications – la plus grande grève du secteur public depuis 30 ans – et, plus récemment, durant la magnifique mobilisation d’aide pratique et politique qui a eu lieu après la destruction massive du tremblement de terre en Octobre.

    Treize camarades et sympathisants du PSM ont été élus en tant que conseillers locaux au cours des élections presque démocratiques organisées par le Général Mousharaf. Ils sont maintenant capables d’utiliser ces positions pour aider les travailleurs de bon nombre d’entreprises à s’organiser (seuls 3% des 11 millions de travailleurs pakistanais sont syndiqués, ce travail est donc crucial dans la région). « Le Pakistan est une nation piégée entre une mosquée et une garnison », déclara Khalid Batti en guise d’introduction à sa contribution. Sous Mousharaf, les militaires ont consolidé leur domination. Ils possèdent en tout un capital de 13 milliards de dollars, ce qui représente 24% du PNB. L’armée pakistanaise est maintenant le plus grand propriétaire terrien du pays, possédant au moins 18 millions d’hectares de terre. Elle est devenue, économiquement, l’aile dominante de la classe dirigeante, et a constamment colporté l’idée que l’armée est la seule force à qui l’on peut faire confiance. Depuis le tremblement de terre, il y a eu un changement terrible dans l’attitude de la population. Une haine de mase a explosé contre l’armée. En dépit de tout son armement nucléaire, elle n’a pu trouver que 26 hélicoptères à sa disposition, et a pris 5 jours pour atteindre les zones affectées et commencer son travail de secouriste, alors que les maisons, hôpitaux et écoles de millions de personnes s’étaient effondrés autour d’eux.

    Maintenant, la situation s’est changée en son contraire. Ces jours-ci, insulter les militaires passe pour une expression d’amour pour son pays ! Un sondage récent a montré que 78% de la population ne fait plus confiance à l’armée, que seuls 11% se fient à la police, et que seuls 3% croient en la justice des tribunaux. « 99% des gens détestent les Américains – la classe dirigeante américaine, bien sûr. Surtout pour ce qu’ils sont occupés à faire en Afghanistan », dit Khalid. « 90% de la population souhaite une révolution violente… ils veulent pendre les riches. » Tel est le niveau de pauvreté – 63% vivent sous le seuil de pauvreté, et les salaires ont chuté de 35% l’an passé. La CIA maintenant reconnaît le Pakistan comme un « grand danger pour la stabilité en Asie ».

    Mousharaf s’est trouvé sans aucune base sociale, et a tenté (sans succès apparemment, depuis notre Conférence) de former des alliances avec de vieux adversaires tels que l’ancien Premier Ministre, Nawaz Sharif, qu’il a évincé par son coup d’état militaire, ou tels que Benazir Bhutto du PPP (Parti Populaire Pakistanais). Mousharaf recherchait le soutien de Bhutto, en particulier pour arriver à une sorte de compromis avec l’Inde au sujet du Cachemire. Sous la pression énorme de l’impérialisme américain, il semblerait qu’une période de normalisation des relations peut être à l »ordre du jour, avec peut-être l’établissement d’une zone démilitarisée au Cachemire.

    Comme Khalid l’expliqua, Benazir instaurerait en général le même genre de programme que Mousharaf, y compris en ce qui concerne sa politique économique. Elle accomplirait encore plus de réformes, et n’annulerait aucune privatisation. Elle se vante aussi d’être capable d’« écraser les fondamentalistes de manière plus efficace ».

    En fait, les groupes musulmans fondamentalistes de droite ont déjà subi des pertes considérables de soutien au cours de la dernière période. Seul le tremblement de terre et l’inaction criminelle du gouvernement leur a donné une chance de récupérer un peu.

    A la fin de sa contribution, Khalid cita le fait qu’une grosse vague de hausse du fondamentalisme approche au Bengladesh proche. Jusqu’ici, la « société la plus séculière » de la région, ce pays a connu 700 attaques à la bombes massives lors des quatre derniers mois. L’arrivée d’une franche dictature militaire n’est pas exclue, et le gouvernement américain la soutiendrait. Ainsi que l’a montré la manifestation de masse qui a parcouru le Bangladesh en protestation à une journée de bombardements en août, « la classe ouvrière est la seule force capable de mettre un frein à cette recrudescence de barbarie », et le Bangladesh est un pays dans lequel le CWI doit commencer à construire une base.

    Durant la discussion, Peter Taaffe, qui visita le Pakistan cette année, mentionna le fait que le sentiment prérévolutionnaire se développe à l’intérieur du pays battu par la misère. Il nous rappela aussi d’une discussion importante au sein du CWI quant à la nature de l’Islam politique. Il avait été déclaré qu’en Orient, les formes modérées du fondamentalisme islamique étaient d’une variété assez douce, mais qu’en fait, on a assisté depuis lors à la croissance de formes particulièrement virulentes de « jihadisme ». Il fit remarquer aussi que certaines des plus grandes organisations musulmanes populaires peuvent s’avérer être un grand, voire très grand obstacle, au développement des idées et des partis socialistes.

    Sri Lanka

    Les camarades de l’USP (United Socialist Party, CWI) au Sri Lanka ont joué un rôle vital au sein de la lutte des pauvres de l’île pour la survie et la justice après le passage du tsunami. Le secrétaire du parti, Siritunga Jayasuriya, déclara lors de la Conférence du Comité Exécutif International que « Avec l’aide des camarades du CWI, nous fûmes la seule organisation à agir rapidement au Sri Lanka » Si le gouvernement n’avait pas été si lent à agir, il aurait pu sauver les vies de dizaines de milliers de gens, y compris celles des 2000 personnes qui ont péri dans un train lorsque ce dernier a été jeté hors de ses rails par la seconde vague tueuse. « Ils peuvent téléphoner très vite à New York pour sauver leurs actions et leurs parts, mais ne sont pas capables de prendre le cornet quand il s’agit de vies ! » dit-il.

    L’USP en 2005 a reçu un petit électorat, comparé à celui des deux principaux partis capitalistes, mais est maintenant le troisième parti du pays. « Sur l’échelle de Richter du mouvement ouvrier », comme Peter Taaffe inclut dans sa contribution, « le vote pour l’USP est extrêmement significatif ».

    Siri lui-même a été candidat, et a montré du doigt l’immense publicité qui nous a été faite après les résultats. Un journaliste a dit qu’une véritable bombe a été lancée au milieu des procédures quand Siri a été capable de s’exprimer à la télévision juste après le discours d’introduction de Mahinda Rajapakse. Siri a fait le point sur les conséquences horribles de l’attitude ouvertement communautariste du vainqueur, qui avait polarisé la société sur des bases ethniques. C’est la première fois dans l’histoire que le président a été élu uniquement par la population singhalaise. « Vous avez lâché les chiens, et vous allez avoir du mal à les faire rentrer dans le chenil ! » a-t-il dit, se référant aux forces du JVP (le Front de Libération Populaire) et du JHU (l’organisation des moines bouddhistes), et à la vague de chauvinisme singhalais qu’il a déclenchée.

    La minorité opprimée des Tamilophones du Sri Lanka, dit Siri, savent qu’ils n’ont rien à attendre du nouveau président. Et c’était Chandrika Bandaranaike – la chef de son parti (le Parti de la Liberté du Sri Lanka) – qui avait remporté la victoire avec 62% des voix quand elle avait dit « Je mettrai un terme à la guerre » durant les élections de ’94. « C’est comme quand j’étais gosse, et que mon père m’amenait au manège. On pense avoir voyagé quelque chose comme 2 miles, mais quand on descend, on est toujours au même endroit ! C’est ce que les Tamils ressentent. »

    Plus tard dans la discussion, Mahinda du Sri Lanka nous parla du scandale des 400 000 personnes toujours sans travail après le tsunami, et des dizaines de milliers de familles qui vivent toujours dans des logements temporaires. L’anniversaire du tsunami était proche, mais avec le gouvernement actuel, il n’y aurait aucune réactivation de l’accord connu sous le nom de « P-TOMS » pour la distribution de ressources de survie vers toutes les zones du pays, incluant les parties septentrionales et orientales contrôlées par les TTLTE.

    Le JVP pousse à la guerre, et insiste sur le besoin d’un Etat unitaire, sans aucun élément de décentralisation du pouvoir. Depuis les élections, il y a eu beaucoup d’intérêt dans notre parti pour les Tamilophones qui réalisent que l’USP est le seul parti qui les a défendus. Mais nos camarades reçoivent des coups de fils menaçants de gens qui ne désirent pas les voir défendre les droits de la minorité tamile. D’un autre côté, nous avons également reçu des centaines d’appels de félicitations une fois que les résultats électoraux ont été connus.

    Beaucoup de ceux qui pensaient que la gauche était écrasée et avaient rompu avec les idées socialistes ont maintenant reconnu que l’USP est la force de gauche principale au Sri Lanka. La parti doit s’approprier de nouvelles sources d’énergie et d’initiative afin de réaliser toutes les ouvertures magnifiques qui s’offrent à lui. L’USP peut devenir une réelle force pour un changement socialiste au Sri Lanka, et agir en tant que balise pour les autres socialistes dans la région, et internationalement.

    La Malaysie

    Développant en détail des points importants sur la Malaisie, Ravie, du Parti Socialis Malaysia (PSM) parla des grands espoirs de la population malaise en le fait que, quand Abdullah Badawi a pris le poste de Premier Ministre de Mahathir Mohammad il y a de ça deux ans, tout allait changer pour le mieux. Il avait promis de mener une bataille contre la corruption, et pour améliorer les droits démocratiques de façon significative. En fait, à part assurer que l’ancien vice-Premier Ministre de Mahathir, Anwar Ibrahim, soit bien relâché de prison et libre de toute décharge à son nom, Badawi n’a fait que régler leur compte à quelques petits politiciens et hommes d’affaires corrompus, sans toucher aux « gros requins » qui constituent le vrai problème. Il a promulgué une version progressive et « politiquement correcte » de l’Islam afin de contrecarrer l’opposition du Parti Islamique (PAS), ainsi que des valeurs et traditions du « premier-monde » pour remplacer celles du « tiers-monde »

    Badawi et le gouvernement de Front National ont maintenu, et même renforcé, l’agenda pro-capitaliste de Mahathir. La brutalité policière et la corruption à chaque niveau du gouvernement sont devenues de plus en plus courantes. La destruction environnementale, telle que le problème du brouillard de pollution, est devenue encore pire. De la main d’œuvre étrangère illégale est renvoyé chez elle par la force. Les droits des travailleurs et de leurs syndicats sont sous attaque, et de nouvelles tentatives de privatisation des soins de santé, de l’éducation et des produits de base tels que l’eau courante sont opérées. La TVA qui sera appliquée dès 2007 va se matérialiser par plus de taxes pour les consommateurs, pour accroître les profits des capitalistes.

    La Malaysie est à présent le pays avec la plus grande disparité entre riches et pauvres en Asie du Sud-Est. Le parti au pouvoir en Malaysie – l’Organisation Nationale des Malais Unie (ONMU) – est parvenu à maintenir son emprise totalitaire sur le pouvoir depuis 48 ans depuis l’indépendance. C’est le parti dominant en Malaysie dans le BN, ou Front National, avec différents autres petits partis raciaux (Chinois, Indiens, et autres). Il a pu s’accrocher au pouvoir politique pendant 48 ans car il a correctement utilisé la règle du « diviser pour régner » qui lui ont été apprises par le Colonialisme Britannique. La « Nouvelle Politique Economique », et d’autres mesures, a été conçue au départ pour alléger la pauvreté des Malais, mais a été utilisée à la place pour créer des magnats malais qui seraient en mesure de concurrencer les hommes d’affaires chinois ! Les compagnies d’Etat, qui ne représentent que 5% des firmes cotées sur les bourses Malaises, mais qui valent 36% de sa capitalisation sur le marché, sont en crise. La rhétorique nationaliste employée pour justifier l’établissement d’entreprises étatiques semble maintenant être passé en-dehors de la mode. Une part de 5% des Telekom a été vendue à un partenaire singapourien. « C’est un Américain qui dirige maintenant la fonderie de micro-puces de SilTerra, et c’est un Hollandais qui gère les trains de navetteurs à Kuala Lumpur ». Volkswagen pourrait acheter une partie de proton, la fabrique de voitures nationale, qui est entrée en lutte, tout comme d’autres entreprises d’Etat, telles que Malaysian Airlines, ou la Banque Islamique.

    Face aux emplois qui se font aspirer vers la Chine, Ravie expliqua que le gouvernement Malaisien a tenté d’attirer de nouveaux investissements étrangers, en mettant en œuvre de nouvelles lois du travail qui devraient permettre de maximiser la flexibilité et de minimiser le coût de la main d’œuvre, notamment grâce à la réduction des droits syndicaux.

    Seuls 8% des travailleurs sont membres en Malaisie du Congrès Malais des Syndicats (Malaysia Trade Union Congress – MTUC) qui, malgré l’élection de quelques leaders « radicaux », semble totalement passif, et désoriente les militants de base. Le MTUC est unique en tant qu’organisation multiraciale, multi-religieuse et plurilingue, avec la capacité de devenir une organisation trsè puissante de la classe ouvrière, comme dans les années 40 et 50. Mais à présent, il n’y a aucune organisation pour secouer le MTUC afin qu’il représente réellement les travailleurs.

    Ravie expliqua comment le gouvernement malais a constamment utilisé l’Internal Security Act et d’autres lois de détention préventive contre les travailleurs, les syndicalistes, les étudiants, les activistes, les partis d’opposition et les medias qui critiquent le gouvernement et défendent les droits démocratiques. Il fit un exposé de la plupart des forces d’opposition, et des perspectives pour la bourgeoisie malaisienne d’utiliser Angwar Ibrahim afin de protéger leur système contre une opposition croissante.

    Il y a un vide énorme au sein de la gauche malaisienne, dit-il. Tout comme Clare l’avait indiqué dans son introduction, le PSM est le seul parti politique de Malaisie qui a soutenu les luttes de la classe ouvrière et des pauvres contre la brutalité du capitalisme. Les régimes stalinistes et maoïstes avec leurs « socialisme » et « marxisme » déformés ont été un obstacle dans le passé pour le développement d’une véritable direction à la classe ouvrière, et bloqué beaucoup de lutte des travailleurs dans différents pays, mais l’internationalisme socialiste était vital pour tirer de ces expériences toutes les conclusions nécessaires.

    L’Inde

    L’existence persistante de grands partis « communistes » en Inde complique encore aujourd’hui la tâche des marxistes. Non seulement ces partis déforment complètement les idées du marxisme, mais à travers leur taille, rendent difficile la mise en avant de l’idée d’un nouveau parti des travailleurs. Les deux partis « communistes » – le CPI (Parti Communiste Indien) et le CPI(M) (Parti Communiste Indien (Marxiste))- soutiennent de l’extérieur le gouvernement de Front Démocratique. Il paraîtrait que celui-ci empêche la poursuite des privatisations et des autres mesures de dérégulation. La forte grève générale de 50 millions de travailleurs le 29 septembre, contre les mesures néolibérales du gouvernement, a montré leur capacité à mobiliser de larges couches de travailleurs, même sans faire d’efforts. Avec des élections prévues au Kerala et au Bengale Occidental, où le CPM contrôle le gouvernement régional, leur image de « gauche » doit être maintenue.

    Mais, en fait, ces administrations montrent bien jusqu’à quel point ils ont abandonné les idées de la lutte pour le socialisme. La devise de Buddhadeb Bhattachariee (ou « Bouddha »), la tête du gouvernement basé à Calcutta, est « la réforme ou la mort » ! Il est célèbre pour encourager les multinationales à se déplacer au Bengale Occidental en leur promettant une main d’œuvre conciliante et en déclarant les grèves illégales, même dans les technologies de l’information, que son gouvernement a désigné comme étant un « service essentiel » ! Clare rappela le scandale des 47 million de dollars des impôts prélevés sur les contribuables (travailleurs) britanniques et qui ont été dépensés par le Département pour le Développement International pour payer les travailleurs au Bengale Occidental et préparer le terrain aux campagnes de privatisations massives du Parti « Communiste ».

    Dans sa contribution à la discussion, Jagadish de Socialist Alternative (CWI-Inde) fut emphatique quant au caractère bourgeois des dirigeants du CPI(M) – ils sont plus comme un parti social-démocrate de droite. Au Kerala, qu’il visita récemment, le CP était un des plus gros propriétaires d’entreprises privées !

    La partie la plus pénible de son discours fut la comparaison de quelques statistiques au sujet de la réalité des deux « géants » asiatiques – la Chine et l’Inde. La valeur de l’économie chinoise est de 1 266 miliards de dollars, tandis que celle de l’Inde est de 510 milliards. Les Investissements Directs Etrangers, d’une valeur de 4,5 miliards en Inde, valent moins de 10% des IDE en Chine. L’espérance de vie est de 8 ans plus élevée en Chine, et le taux de génération d’électricité y est trois fois plus grand.

    « Si l’économie indienne doit décoller, alors elle a besoin de beaucoup d’élan », dit Jagadish, citant Thomas Freidman du New York Times. Même le niveau d’éducation de la nouvelle classe ouvrière en Inde était affectée par l’infrastructure qui existait lors de la période précédente. Comme le commentait Dagga du Nigeria lors de la session précédente, le rapide taux de développement actuel en Chine est lié au développement, pendant des décennies, sous une économie planifiée d’infrastructures de base, d’éducation, etc. Jagadish exposa que, bien que neuf millions d’étudiants soient diplômés en Inde chaque année, seuls 200 000 offres d’emploi leur sont disponibles. Il n’y a pas que les fermiers désespérés qui recourent au suicide pour résoudre leurs problèmes, mais aussi de jeunes gens qualifiés, dont les espoirs en un futur bien rempli s’écrasent sur les rochers de la réalité.

    A la question de déterminer la taille de la classe moyenne grandissante en Inde, il est difficile de répondre. Elle n’est certainement pas assez étendue en elle-même que pour mettre en route un niveau de croissance économique sain, étant donné la pauvreté absolue du reste de la population. Au concours des plus grands niveaux de corruption du monde, l’Inde doit être parmi les premiers. Tout en haut de la société, se trouvent les oligarchies monopolistiques tels que les frères Tata et Hinduja, ainsi que divers poids lourds du gouvernement, parmi lesquels la corruption est notoirement monnaie courante. Mais même les fonctionnaires responsables de la distribution des cartes de rationnement parmi les couches les plus pauvres de la société amassent une fortune. Ils sont les récipiendaires de bakchichs petits mais réguliers de la part de ceux qui veulent échanger leurs cartes de rationnement jaunes contre les cartes vertes, de sorte à recevoir un peu plus de subsides qui leur permettront de s’acheter quelques produits vitaux !

    « Pour les riches en Inde », dit Jagadish, « la mondialisation est une belle œuvre lyrique ; pour les pauvres et les travailleurs ordinaires, ce n’est qu’une morne tragédie ».

    Les autres pays de la région

    Au cours de la discussion, les camarades d’Australie, d’Autriche et du Kazakhstan apportèrent d’intéressantes contributions sur les autres développements dans la région. L’Australie est une puissance importante dans l’Asie Pacifique, et tente d’y jouer un rôle impérialiste. Elle a à présent le bénéfice d’un excédent commercial, expliqua Steve Jolly, mais ce qui se passe en Chine ne présage rien de bon pour l’Australie. Les emplois s’envolent. L’insatisfaction vis-à-vis du gouvernement, y compris envers les avancées dans les lois anti-terroristes, est croissante, et une initiative pour un nouveau parti des travailleurs a été rpise au Victoria.

    Ayant visité la Malaisie en septembre pour le week-end Socialisme 2005 du PSM, Steve était impatient de pouvoir aller plus loin dans la coopération, la solidarité et les échanges mutuels d’idées ploitiques avec ces camarades. Steve insista sur les leçons à tirer des événements dans la région. Tout en se félicitant de la tendance vers la résolution des conflits, les échecs des gouvernements et des mouvements d’opposition à obtenir des rapports complets sur les tueries atroces perpétrées par l’Armée Indonésienne au Timor Oriental et, maintenant, en Aceh, sont inacceptables.

    Au Viêt Nam, ainsi que Sonja Grusch, d’Autriche, nous l’exposa, les deux tiers de la population sont soit au chômage, soit sous-employés. Sonja a récemment visité le pays, et écrit à ce sujet. La moitié de tous ceux qui ont un emploi se trouvent dans le secteur public, bien que ces emplois semblent ne contribuer qu’à 38% de la production du pays. 25% du PNB est maintenant produit à travers l’étranger. La classe capitaliste est très avancée dans son processus de formation. Il va certainement y avoir certaines illusions dans le capitalisme, mais il y a aussi eu d’importantes grèves à Than Pho Ho Chi Minh et ailleurs. Le Viêt Nam est un pays avec de grandes traditions trotskystes, profondément enterrées mais, puisque le capitalisme sera incapable de satsifaire aux besoins basiques de la population, elles vont être remises à jour.

    Sergei du Kazakhstan décrivit la situation dans le pays, qui a maintenant sa place parmi les dix plus grands producteurs de pétrole. C’est ce qui se cache derrière l’arrogance du président-dictateur Nazarbayev et de ses sbires. Personne ne fut surpris d’apprendre que Nazarbayev avait à nouveau remporté les toutes dernières élections (en fait 90% des voix ) ! Vu que sa famille contrôle chacune des neuf chaînes de TV du pays.

    Le soi-disant « parti communiste » a été incapable de construire la plus infime des oppositions, sans parler de sa capacité à présenter une alternative de classe claire au capitalisme mafieux de Nazarbayev. Il a perdu plus de la moitié de ses voix depuis les 12% qu’il avait reçu lors des élections précédentes. Mais il y a eu d’importantes grèves dans les usines détenues par des étrangers, et des occupations de terres face à la privatisation.

    Les camarades du CWI au Kazakhstan, face à d’âpres conditions de répression politique, anticipent sur le fait que, surtout en réponse à l’inflation florissante, il va y avoir un accroissement considérable des luttes de classe à travers le pays. Ceci fournira l’occasion à leurs jeunes camarades de construire un embryon de futur parti des travailleurs des masses.

    Conclusions

    « Les contributions des camarades lors de cette discussion ont souligné l’accroissement en fréquence et en amplitude de la lutte des classes » dit Kevin Simpson lors de la conclusion de cette session. Elles ont aussi indiqué l’accumulation des connaissances et de la compréhension de cette Internationale, et l’influence grandissante de nos partis et groupes politiques. Il y a une montée de la lutte des classes en Chine, mais apporter une compréhension de la situation concrète et de la conscience des travailleurs est vital afin de construire les forces anticapitalistes et, en particulier, révolutionnaires.

    La liberté d’opération de bon nombre de compagnies en Chine, qui appartiennent de manière évidente à des privés ou à des étrangers, est sévèrement restreinte. Si des compagnies étrangères tentent de poursuivre des opérations qui vont à l’encontre des intérêts du PCC au pouvoir, elles sont fermées. Derrière les entreprises « privées » en Chine, se tient une importante présence étatique. S’il devait y avoir un effondrement de l’économie, la réponse du gouvernement chinois ne serait pas une simple répétition de ce que Poutine a fait en Russie, mais il pourrait y avoir un retournement du processus de privatisation. Nous devons aussi être prudents, comme nous le fûmes pour la question de l’Europe Orientale dans les années 80-90, en reconnaissant que la présence d’entreprises dirigées selon les lois du marché n’est pas suffisante en tant que preuve d’un fonctionnement totalement capitaliste d’une société.

    Tandis que certaines couches de la société – en Inde et en Chine par exemple – peuvent bénéficier des hauts taux de croissance, d’autres sections sont pris dans une spirale de pénurie – les professueurs, avocats, et autres membres de la classe moyenne. Le conflit principal dans la région, qui détermine la plupart des dénouements dans la région, est la rivalité entre les deux puissances – la Chine et les USA. C’est une lutte pour le prestige, la puissance, les marchés, et les ressources pétrolières.

    Mais les couches dirigeantes en Asie elle-même ne sont pas confiantes vis-à-vis du futur. Une source d’instabilité importante en Asie est l’émergence de la lutte des classes. Le développement d’une conscience de classe et de nouvelles formations est d’importance vitale pour le CWI dans l’élaboration de ses stratégies et tactiques. Là où il y a une exploitation de masse des travailleurs, on peut avoir des explosions de colère spontanées, mais il existe toujours un gouffre énorme entre l’avant-garde et la majorité des travailleurs. Ceci a été illustré lors de la grève des PTCL au Pakistan, où beaucoup de travailleurs trouvèrent une « solution » par l’incendie de tous les échangeurs téléphoniques !

    Le travail des camarades du CWI dans la région, surtout les tâches onéreuses entreprises dans les zones sinistrées du Pakistan et du Sri Lanka, ont préparé le terrain à une accélération de la croissance de notre Internationale. Kevin insista sur l’importance extrême des expériences précédentes de débats et de prises de décision souvent amers et difficiles, par exemple ceux qui ont eu lieu lors de l’accord Indo-Lankais à la fin des années 80. A la lumière de ceci, ainsi que des leçons de valeur apprises dans la période plus récente, les groupes et partis du CWI en Asie sont bien placés pour se développer en forces trotskystes massives, ou du moins, dans la période la plus immédiate, semi-massives.

  • Un nouveau stade du capitalisme mondial et du mouvement international des travailleurs

    Conférence internationale du CIO

    Une réunion du Comité Exécutif International du Comité pour une Internationale Ouvrière s’est tenue en Belgique du 6 au 11 décembre 2005. 65 membres venant des sections du CIO en Asie, en Amérique Latine, aux Etats-Unis et en Europe ont pris part à cette réunion qui a été très fructueuse et qui a reflété les progrès significatifs en termes de forces et d’influence réalisés par beaucoup des partis et des organisations affiliés au CWI. La première session de la conférence a adopté la résolution ci-dessous à l’unanimité, après discussions et vote d’amendements. Cette résolution était proposée par le Secrétariat International en tant que base à la discussion. Cette session a couvert les développements dans l’économie mondiale et dans la situation aux Etats-Unis, en Chine, en Europe et en Irak.

    D’autres sessions ont débattu de la lutte des classes en Asie (spécialement au Pakistan, au Sri Lanka, en Inde et en Malaisie), en Amérique Latine et en Afrique, des perspectives pour la construction de nouveaux partis des travailleurs ainsi que des luttes et du travail menés par les sections du CIO. Des rapports de ces discussions seront publiés le plus tôt possible.

    Rarement dans l’histoire du capitalisme les perspectives pour les divers pays, voire les continents, ont-elles été aussi influencées, ou même déterminées, par les événements et processus mondiaux.

    La phase en cours de la mondialisation capitaliste présente des similitudes, mais en même temps des différences, avec la phase de “mondialisation” (bien que celle-ci n’ait pas été appelée ainsi à l’époque) de la fin du 19è et du début du 20è siècle, phase qui connut une fin catastrophique avec la Première Guerre Mondiale. Cette période a été marquée par l’exportation de capital vers les « colonies », qui devinrent des marchés protégés et, en même temps, des sources de matières premières bon marché. Cette situation se traduisit par un jeu permanent de manœuvres et des conflits entre les différentes puissances impérialistes. Une telle lutte ne pouvait se résoudre que par la guerre.

    On retrouve, bien entendu, de nombreuses caractéristiques de cette période dans la situation actuelle : une lutte féroce entre les puissances impérialistes pour le contrôle des ressources, en particulier du pétrole, et une concurrence économique pour conquérir des positions et la supériorité sur les marchés, accompagnées de conflits et d’interventions militaires, telle que la Guerre en Irak. Ces affrontements se sont manifestés avant tout dans le conflit qui se développe entre la Chine et les Etats-Unis et qui va dominer les développements dans le monde lors de la prochaine période. Tandis que la menace d’un conflit inter-impérialiste majeur ne se pose pas à court ou à moyen terme, il existe, par contre, une menace très réelle de guerres commerciales de grande ampleur entre les blocs impérialistes.

    Ce processus de mondialisation capitaliste diffère par contre, dans certains aspects, de la période d’avant la Première Guerre Mondiale. A ce moment-là, le capitalisme exportait les capitaux vers les possessions coloniales en tant que moyen d’extraire des matières premières à bon marché et de les revendre plus chères comme produits manufacturés, recevant par conséquent, selon la citation de Marx, “plus de travail pour moins de travail”. Ces termes inégaux dans le commerce mondial existent toujours et sont, en fait, devenus pires encore pour le monde néo-colonial. Cependant, au cours des dernières décennies, les Investissements Directs à l’Etranger (IDE) ont été concentrés dans la “triade” Europe-USA-Japon.

    Cette situation a maintenant été modifiée dans une certaine mesure par les exportations colossales de capitaux vers la Chine – qui reçoit maintenant presque autant d’IDE que les USA – et, dans une certaine mesure, vers l’Europe de l’Est et l’ex-URSS, au fur et à mesure que le capitalisme cherche à relocaliser son potentiel productif afin d’exploiter les matières premières et la réserve de main d’oeuvre fortement éduquée mais bon marché fournie par la chute du stalinisme. Entre 1990 et 2003, les IDE ont grimpé en flèche et le rapport entre le stock d’IDE et la production globale est passé de 9 à 23%. Cette évolution, combinée à d’autres facteurs, telles que les soi-disant révolutions de la communication et de l’information, reflète une intégration colossale de l’économie mondiale, ce qui, en retour, signifie, comme Marx l’avait prédit, que les événements qui se produisent dans les arènes nationales vont être de plus en plus façonnés par les processus à l’échelle mondiale.

    Le monde néo-colonial est intégré dans ce système, mais encore principalement en tant que source de matière premières à bas prix. L’émergence de la Chine, toutefois, pourrait menacer l’hégémonie à long terme de la triade, et particulièrement des USA, tant sur les plans économique que militaire, pour autant que la Chine puisse maintenir de manière ininterrompue son taux de croissance actuel, ce qui n’est pas certain du tout. La menace d’une crise ou d’une récession économique mondiale pourrait avoir un profond impact en Chine, de même que l’inévitable résistance de la classe ouvrière chinoise aux conditions de travail inhumaines dans les usines, aux bas salaires, à la pollution,… Une hausse salariale, en résultat d’une lutte de masse, pourrait provoquer une nouvelle relocalisation des investissements de la Chine vers d’autres pays et régions à bas salaires, ce qui pourrait affecter sa croissance.

    Actuellement, les USA – et par conséquent l’économie mondiale – dépendent entièrement sur la Chine, et, dans une certaine mesure, sur le capitalisme asiatique dans son ensemble. Un extraordinaire pacte non-écrit, digne de Faust, existe entre les deux “partenaires”. Les USA font en ce moment face à leur plus gros déficit budgétaire jamais enregistré : le Fonds Monétaire International estime qu’il va bientôt atteindre les 760 milliards de dollars, soit 6,1% du produit intérieur brut (PIB) de 2005, bien que des prévisions récentes suggèrent un chiffre un peu plus bas de 706 milliards de dollars.

    La croissance mondiale est surtout concentrée en Chine et aux Etats-Unis, tandis que l’Asie, l’Allemagne, et les pays exportateurs de pétrole ont des surplus commerciaux record. Comme l’a écrit le Financial Times : “C’est un monde bizarre, dans lequel des pays relativement pauvres prêtent d’immenses sommes d’argent aux consommateurs américains à des taux extrêmement bas.” Peter Dixon, de la Commerzbank, a expliqué que : “Les Etats-Unis connaissent un déséquilibre terrible, à la fois externe, en terme de déficit budgétaire, et interne, par suite au haut niveau d’endettement et de la faible épargne. On ne peut supporter ces déséquilibres que pendant un certain temps. Les investisseurs étrangers possèdent des bons du Trésor US pour une valeur de 12 trillions de dollars, qui sont autant de créances octroyées par les contribuables.”

    Le résultat de tout ceci est ce que les économistes bourgeois appellent des “déséquilibres” non durables. Ceci veut dire que les économies asiatiques, entraînées par la Chine, ont vu leurs réserves de change en monnaies étrangères passer de 36% du total mondial (USA exceptés) à 69% aujourd’hui. Les réserves chinoises ont explosé, comptant désormais pour les deux tiers des réserves de l’Asie dans son ensemble. Ces réserves sont à une majorité écrasante des actifs en dollars US accumulés par la plupart des banques centrales asiatiques aux dépens des investissements dans les industries locales. L’Asie, menée par la Chine, garantit l’économie américaine et rebouche les gouffres béants dans les déficits américains. En même temps, le marché des dettes gouvernementales, qui implique l’achat des Bons du Trésor américain, est toujours à flot car les capitalistes, gonflés de profits record, y déversent leur argent plutôt que dans un investissement productif.

    Tout ceci a contribué à alimenter une hausse des dépenses des consommateurs, et un déclin dans l’épargne, menant à “un boom du logement américain qui devient de plus en plus insoutenable” (Financial Times). Comme les commentateurs bourgeois les plus sérieux et nous l’avons expliqué, ce château de cartes financier pourrait s’effondrer à n’importe quel moment : “Les déséquilibres sont proches du point de chute”, a écrit le même Financial Times. Charles Dumas, du Lombard Street Research, a averti que “L’économie dans sa totalité est liée aux gains de capital… Si les prix des maisons cessent d’augmenter, l’économie américaine va avoir des problèmes.” Le taux de change du dollar pourrait s’effondrer à n’importe quel moment, laissant les banques centrales asiatiques face à des pertes de capital immenses sur leurs possessions en dollars. Pour cette raison, elles pourraient être tentées de se “désinvestir” en dollars, au profit d’autres devises qui, à leur tour, pourraient déclencher la chute du dollar.

    Le Boom – pour combien de temps ?

    Combien de temps le boom peut-il durer ? Cette question n’est pas préoccupante que pour nous ou pour le mouvement ouvrier, elle l’est aussi pour les devins du capitalisme eux-mêmes. Ce boom n’a duré aussi longtemps que parce que le capitalisme mondial, entraîné par les Etats-Unis, s’est tenu à une politique de dépense, alimentée par les mesures “quasi-keynésiennes” élaborées en faveur des riches, comme les réductions de charge et les baisses des impôts pour les plus riches. De plus a été mis en place un régime de taux d’intérêt historiquement bas – baptisé par dérision “argent gratuit” par certains économistes bourgeois – et donc de déficits massifs et insoutenables. Un crash est certain, bien que les réponses à “comment”, “quand” et « de quelle ampleur » demeurent incertaines. Toutefois,la fragilité sous-jacente de l’économie mondiale est telle que l’économie capitaliste mondiale pourrait connaître des dérapages dans les mois qui viennent.

    L’élastique pourrait cependant être étiré encore un peu avant d’atteindre le point de rupture, ce qui pourrait encore soutenir le cycle économique actuel pendant une année ou deux de plus. Mais, comme l’a prédit l’Institut d’Economie Internationale basé à Washington, les balances vont continuer à se déséquilibrer jusqu’à ce que les marchés deviennent nerveux, les rendements des titres vont commencer à monter et, à ce moment, les gouvernements vont commencer à devenir très nerveux. “Des ajustements plus grands sont plus douloureux. Les gens préfèrent l’ignorer et agir sur base d’une économie de vœux pieux” (Financial Times). Par conséquent, la phase actuelle pourrait s’arrêter brusquement, plongeant une Europe déjà stagnante dans un tourbillon économique et politique encore plus grand, aggravant une crise déjà sérieuse pour le régime Bush, et même bloquant la croissance apparemment inarrêtable de la Chine.

    A moyen et long terme, les perspectives économiques pour la Chine, et leurs effets sur le capitalisme mondial, sont centrales. Elles ont déjà eu un effet notable en soutenant le boom actuel au-delà de ses limites, en conjonction avec la “super liquidité” dans l’économie mondiale. Peut-elle fournir une plate-forme plus stable, pour une nouvelle phase de croissance encore plus longue pour le capitalisme mondial ? Les économistes bourgeois l’espèrent avec ferveur. Ils proclament que l’effondrement des “économies panifiées” – le terme par lequel ils désignent le stalinisme, en Europe de l’Est et dans l’ex-URSS – et l’avancée de la Chine vers le capitalisme, ont doublé la force de travail au niveau mondial tandis que le même stock de capital demeure.

    Ils espèrent que l’afflux apparemment infini de travail bon marché pourra aider à une “renaissance” de leur système. Un tel espoir est problématique, pour ne pas en dire plus. Tandis que les investissements en Chine et en Europe de l’Est ont pu – et continueront à pouvoir – donner un coup de souffle au capitalisme, ils ont principalement accru “l’offre”, c’est-à-dire les forces productives. Mais cela se produit dans un contexte de surcapacité grandissante, en particulier dans les industries manufacturières, l’automobile,… De plus, la demande du marché, surtout en Chine, en Europe de l’Est et en Russie, hors des quelques centres urbains, est limitée à cause du faible niveau de vie et de l’appauvrissement des masses.

    Mais si, contre toute attente, le capitalisme était capable d’exploiter ainsi la Chine et l’Europe de l’Est, allongeant ainsi son cycle de vie, ce ne serait pas encore la fin de l’histoire. Premièrement, il y a les coûts environnementaux dans cette période de réchauffement terrestre : la hausse des émissions de carbone, la fonte des calottes glaciaires,… Sur la base du capitalisme, la planète ne peut pas absorber les taux de croissance actuels, même en ne tenant pas compte de la Chine et de l’Inde. La Chine peut être le théâtre de spectaculaires feux d’artifice économiques mais elle est aussi, avec les Etats-Unis, un des plus gros pollueurs au monde. La planète, avec ou sans la Chine, ne peut pas supporter un capitalisme résurgent qui entraînerait le monde encore plus loin dans des abysses de la dégradation environnementale irréversible. Qui plus est, le néo-libéralisme, sans lequel il n’y aurait pas de mondialisation capitaliste ( dérégulation, ouvertures des frontières pour le capital… ) en tant que telle, est une politique que le capitalisme mondial n’a pas d’autre choix, à ce stade, que de mettre en oeuvre partout à travers le globe.

    Ceci a provoqué et va, dans le futur, inévitablement continuer à provoquer une résistance furieuse, incluant des explosions révolutionnaires, de la part de la classe ouvrière et des masses pauvres. Même durant la période pendant laquelle le capitalisme était “relativement progressiste”, au 19e siècle et au début du 20e siècle, la tendance, comme Marx l’a toujours fait remarquer, était de diminuer la part de la classe ouvrière afin de stimuler la profitabilité des grosses entreprises. Cela a provoqué les émeutes des travailleurs peu qualifiés et à bas salaires en Grande-Bretagne à la fin du 19e siècle, contribué à la révolution russe de 1905 et à la montée du mouvement des travailleurs en Amérique et en Europe.

    Toutefois, au contraire de la phase du capitalisme d’avant 1914, cette résistance a aujourd’hui été rendue muette ou affaiblie par l’absence du facteur subjectif, un parti de masse de la classe ouvrière capable d’agir comme un pôle d’attraction. La classe dirigeante a été renforcée dans sa capacité à affaiblir la résistance des travailleurs par l’offensive idéologique qu’elle a conduite et par l’application du néo-libéralisme. Néanmoins, une opposition de masse a retenu la main, bien que temporairement, de certaines des classes dirigeantes européennes.

    La Chine

    Les problèmes auxquels est confronté le capitalisme mondial sont, à l’heure actuelle, de taille monumentale, ils s’accumulent et ils sont, sur le long terme, ingérables. Les implications de la montée de la Chine, et son impact sur le capitalisme mondial, sont des problèmes importants, pour l’Europe aussi bien que pour le reste du monde. Toutes les conséquences que cette montée implique ne se sont pas encore manifestées pleinement. La Chine est maintenant le centre manufacturier du monde ; chaque semaine, nous entendons le « bruit de succion » des emplois qui disparaissent des pays industriels avancés en direction de la Chine et de l’Europe de l’Est. Ce processus paraît implacable et impossible à stopper. La Chine et, dans une moindre mesure, l’Inde (dans ce dernier cas, principalement à travers l’expansion des technologies d’information) se sont développées en tant que région de fabrication industrielle à base de main d’oeuvre peu qualifiée et bon marché. La Chine assemble des importations d’Asie, puis les réexporte.

    Cependant, la Chine se concentre désormais sur une production innovative, à haute technologie. Tandis qu’une grande proportion des IDE en Chine provient des Etats-Unis, le capitalisme asiatique a, lui aussi, relocalisé une part non négligeable de ses industries vers la Chine. Taïwan, par exemple, a transféré pratiquement la totalité de sa base manufacturière vers le continent. Le Japon a fait de même. Ceci a mené à une situation soulignée par un rapport récent de l’Union Européenne qui avertissait que “La Chine émerge en tant que plate-forme manufacturière la plus compétitive jamais connue”. Selon ce rapport, presque 20% des exportations chinoises sont déjà classifiées comme étant “à haute technologie” et, comme le souligne ce rapport, “Avec deux millions de diplômés chaque année, nous avons toutes les raisons de croire que ce pourcentage va s’accroître”. La part du PNB chinois alloué à la recherche et au développement grimpe de 10% chaque année, alors qu’il ne monte que de 0,02% chaque année en Europe ! (même si évidemment, l’UE part, à ce stade, d’un niveau plus élevé).

    Jusqu’à récemment, les économistes bourgeois pouvaient se rassurer avec l’idée que, bien que la production industrielle se déplace vers la Chine, les établissements de recherche et de développement, et donc le monopole de la technique et de la technologie, resteraient toujours concentrés dans le pays d’origine. Ainsi, Dyson, le fabriquant d’aspirateurs britannique, a délocalisé ses établissements de production en Asie, tout en maintenant ses R&D en Angleterre. Mais la montée de la base technologique chinoise, en partie facilitée par l’emprunt ou le “vol” direct aux autres pays, pourrait bien ne plus permettre le maintien de cette zone de confort.

    Ce processus aboutit même à une tendance à “l’élagage” dans l’industrie manufacturière en Amérique. On peut illustrer cela par la récente crise de General Motors, un des plus gros fleurons de l’industrie américaine, qui a annoncé 30 000 licenciements. Ford fait face à des problèmes similaires, qui sont symptomatiques du déclin de l’industrie américaine. Comme nous l’avons expliqué, l’économie américaine est relativement affaiblie par l’émergence de l’impérialisme chinois.

    Alors que les Etats-Unis demeurent toujours la plus puissante des puissances impérialistes, c’est une puissance qui connaît un déclin relatif. Si cette tendance à un rééquilibrage vers la Chine au détriment des USA et des puissances impérialistes européennes devait se poursuivre (et beaucoup de facteurs peuvent encore retarder ou contrarier le processus), cela créerait des convulsions sociales et politiques au sein des vieilles puissances impérialistes. Cela renforcerait aussi énormément le prolétariat chinois, en termes de nombre et de poids social. Sa conscience politique en ce moment est toutefois à un bas niveau.

    Les implications de cette relocalisation massive de l’industrie et des emplois, vers la Chine et ailleurs, soulèvent plusieurs problèmes importants en relation avec la théorie marxiste. Marx, et avant lui Adam Smith, faisaient une distinction entre les travails “productif” et “non-productif”. Le travail productif créait une nouvelle valeur (en langage moderne, de la “valeur ajoutée”) tandis que le travail non-productif, bien que souvent vital pour les rouages du capitalisme, ne crée pas de nouvelle richesse, mais est rémunéré par un prélèvement sur les profits, les salaires, les revenus,… qui, au final, proviennent de la valeur créée par le travail productif.

    Marx faisait remarquer que le surplus de richesse créée par le travail de la classe ouvrière est réparti entre rente, profit, et intérêt. Ce n’est pas seulement dans la transformation des matières premières que la nouvelle richesse est créée dans le processus de production. Mais l’industrie productive (les entreprises manufacturières et leurs satellites) sont la plus importante source de richesse. Par conséquent, perdre une base manufacturière, et toutes les entreprises et industries connectées avec elle, signifie, dans le meilleur des cas, rentrer dans un état de dépendance vis-à-vis de pays industriels plus puissants.

    Certains pays peuvent se tailler une place en tant que pays capitaliste “rentier”, spécialisé dans les “services” telles que les banques, le tourisme,… Leur situation peut être améliorée, comme c’est le cas, par exemple, pour le Royaume-Uni, par un revenu provenant des gros investissements à l’étranger, incluant la super-exploitation des masses dans le monde néo-colonial. En même temps, ce pays peut devenir un gros receveur d’IDE, comme cela a été aussi le cas en Grande-Bretagne jusque à présent.

    Mais ceci ne concerne que le court terme, et ne sera pas forcément vrai dans l’avenir. Toutefois, pour certaines économies, et même pour des continents entiers, cette situation montre le danger d’avoir une base industrielle qui se rétrécit et donc de devoir se reposer sur des “services”. Ceci, selon la formule de l’ancien Premier Ministre britannique Harold Macmillan, revient à “faire la lessive des autres”. Sur le long terme, la perte d’une force économique réelle se fera sentir dans d’autres domaines.

    La force industrielle se reflète au final en un “pouvoir doux” diplomatique et, à un certain stade, en puissance militaire, qui donne le potentiel pour un “pouvoir dur”. La perspective d’une Chine accumulant cette puissance économique et militaire excite à présent l’opposition de la classe dirigeante américaine. Le gonflement du surplus commercial de la Chine dans son commerce bilatéral avec les Etats-Unis a provoqué des conflits au niveau des textiles, des chaussures,… Cette situation va vraisemblablement générer dans l’avenir un « retour de bâton » protectionniste incontrôlable. Cette perspective est également liée aux grognements des Etats-Unis face au renforcement constant de la puissance militaire chinoise, lié à la recherche avide par la Chine de ressources naturelles de plus en plus importantes pour alimenter sa croissance économique. Et cette expansion l’amène directement nez à nez avec la classe dirigeante américaine, elle aussi impliquée dans ce “Grand Jeu”, en particulier pour le contrôle du pétrole.

    En Asie, on assiste clairement à l’émergence d’un bloc, emmené par la Chine, en opposition à l’impérialisme japonais allié aux USA. Ce conflit a déjà conduit à un renforcement du nationalisme nippon. Les effets de ces rivalités inter-impérialistes ont aussi amené la Chine à une collaboration croissante avec la Russie de Poutine et ceci, ironiquement, à un degré encore supérieur à celui qui existait entre les deux anciens régimes staliniens.

    Si on ajoute à cela le blocage des négociations mondiales dans le cadre de l’Organisation Mondiale du Commerce (OMC) et de Doha – incluant des conflits à l’intérieur du bloc européen sur l’agriculture, l’élargissement et d’autres problèmes – on ne doit pas chercher bien loin pour imaginer un avenir fait de rivalités accrues et de conflits qui pourraient être dramatiquement aggravés par une récession économique mondiale, ou même par un simple blocage de la croissance.

    Bien qu’en termes absolus, le commerce mondial se soit accru, l’économie mondiale, dans sa phase de reprise depuis 2001, a fait l’expérience d’une “croissance en récession”, c’est-à-dire d’un petit développement des forces productives tout en restant incapable de résoudre le chômage endémique, en particulier en Europe, où les chiffres officiels du chômage dépassent les 20 millions.

    Lors de la dernière période, la classe dirigeante aux Etats-Unis et dans d’autres pays a opéré une politique de “keynésianisme pour les riches”, en accordant des réductions de taxes pour les plus fortunés. Bush a réduit les impôts de 700 millions de dollars pour les plus riches des Américains. Mais ces coupes dans le budget n’ont pratiquement eu aucun effet en terme de hausse des dépenses de consommation.

    Après la catastrophe du cyclone Katrina, Bush a été forcé d’annoncer un programme de reconstruction. Au même moment, il a proclamé qu’il allait réduire le déficit fédéral de 50% d’ici au jour où il quitterait la Maison Blanche. Ces coupes vont être concentrées dans les budgets des soins de santé, des pensions, du logement et autres programmes fédéraux. En d’autres mots : les pauvres feront les frais de ces coupes. Le grignotage des réserves du capitalisme poussera, dans le cas d’une grave récession, la classe dirigeante à se tourner à nouveau vers la “presse à billets” et à prendre le risque de laisser libre cours aux pressions inflationnistes. Mais, comme dans les années 70, elle pourrait être menacée de stagflation si elle recoure à ces mesures.

    Tant que la “croissance en récession” actuelle se poursuit, les capitalistes peuvent faire face ensemble, tout en se faisant de temps à autre des coups bas, mais sans tomber dans une complète fragmentation au travers d’une véritable guerre commerciale. Mais une récession, ou même une période de moindre croissance, entraînera des conflits, qui, à leur tour, pourront aggraver énormément les problèmes de l’économie mondiale. Le facteur fondamental – bien sûr ni immédiatement ni directement, mais en dernière instance – est le développement des forces productives en tant que principale force motrice dans la formation de la conscience de classe, et particulièrement celle de la classe ouvrière, et l’effet de ce processus sur les événements politiques.

    La crise de confiance de la classe capitaliste

    Ce qui est frappant dans la situation mondiale actuelle est que la bourgeoisie est confrontée à une crise de confiance sans précédent, et cela dans le monde entier. Celle-ci est particulièrement prononcée en Europe et en Amérique. La catastrophe en Irak, combinée aux développements sociaux et économiques, a été un facteur majeur, contribuant à ce processus aux Etats-Unis, en Angleterre et en Australie. La défaite subie sur la Constitution de l’Union Européenne en France et aux Pays-Bas a eu un effet similaire et a démoralisé les classes dirigeantes de ces pays, ainsi que dans d’autres pays européens. Cette perte de confiance se produit avant même que se développent de sérieux problèmes économiques pour les classes dirigeantes sous la forme d’une récession ou d’une crise.

    Elle se manifeste de manière éclatante au sein de la plus grande des puissances impérialistes, les Etats-Unis eux-mêmes. La clique néo-conservatrice qui dirige à travers la présidence de George Bush s’est révélée un désastre sans appel pour le capitalisme américain. Son règne montre quelques parallèles, mais à une échelle beaucoup plus grande encore, avec celui de Thatcher en Grande-Bretagne, 20 ans plus tôt. L’”héritage” laissé par celle-ci a été une société divisée et de plus en plus appauvrie, cachée sous le vernis du “progrès” économique. C’est ce qui a condamné depuis lors ses successeurs conservateurs à l’ignominie et à la défaite, élection après élection. La présidence de Bush menace de faire de même pour le parti républicain, non seulement à cause de la guerre désastreuse et impossible à gagner en Irak, mais aussi à cause de la gestion économique qu’elle a appliquée aux Etats-Unis.

    La présidence de Bush est maintenant en “chute libre”. Elle n’est pas seulement embourbée dans la débâcle irakienne, mais elle a été sérieusement mise à mal par les répercussions de Katrina dans la société et les classes sociales. Elle doit maintenant faire face à des scandales de corruption, qui menacent de remonter jusqu’à Cheney et qui ont déjà mouillé plusieurs républicains d’importance, comme le Congressiste Robert Ney, connu sous le nom de “Maire du Capitole”, et Tom DeLay, surnommé “Le Marteau” à cause de sa manière de faire respecter la discipline dans le Parti Républicain au sein du Congrès.

    Toute une section de la classe dirigeante américaine est maintenant en train de “rogner les ailes” au régime Bush. La corruption est endémique dans le monde capitaliste et parmi les classes dirigeantes à échelle internationale. Elle reflète partiellement un changement dans la composition de cette couche dirigeante, qui, internationalement, est devenue de plus en plus parasitaire, et est aussi la conséquence de l’absence de partis de masse des travailleurs, qui avaient pu contenir certains des “excès” du capitalisme dans le passé.

    Tandis que le premier mandat de l’administration Bush a été marqué par les tentatives des néo-conservateurs pour affirmer la puissance de l’impérialisme américain, le second a été une claire démonstration des limites de cette puissance, comme nous l’avions prédit dans les documents de notre dernier Congrès Mondial. Ceci n’est pas seulement évident dans la guerre en Irak, mais a été illustré récemment en Argentine, lors du Sommet des Amériques, au cours duquel les tentatives de Bush pour relancer l’Accord de Libre-Echange des Amériques (ALEA) ont été rejetées par les “Cinq Dragons”, à savoir l’Argentine, le Venezuela, le Brésil, le Paraguay et l’Uruguay.

    Francis Fukuyama fut le prophète de la “Fin de l’Histoire” après la chute du Mur de Berlin, une formule par laquelle il affirmait que la démocratie libérale bourgeoise était le stade ultime du progrès historique de l’humanité. Il n’y a rien de nouveau là-dedans. L’erreur de base des économistes classiques – Adam Smith et David Ricardo – était déjà de considérer le capitalisme comme le mode d’existence normal de l’humanité. Mais ces grands économistes classiques pouvaient avoir une certaine excuse : ils vivaient avant que le capitalisme “ait atteint sa plaine maturité, avant que le capitalisme ne soit devenu vieux” ( Trotsky ).

    Fukuyama a avancé des arguments similaires dans une période de crise et de déclin de ce système. Les Etats-Unis eux-mêmes devaient être l’étoile la plus radieuse dans ce firmament. Cependant, lui-même dit maintenant qu’”au niveau des élites, les dirigeants peuvent chercher à retrouver de bonnes relations avec Washington en faisant fi de leurs propres intérêts, mais, au niveau des masses, il y a eu un glissement sismique dans la manière dont la plus grande partie du monde perçoit les Etats-Unis, dont l’image n’est plus la Statue de la Liberté, mais le prisonnier encapuchonné d’Abu Ghraib.”

    La guerre en Irak, comme celle du Vietnam, a provoqué des convulsions dans la société américaine, même si le nombre de morts en Irak n’est encore que d’un trentième de ce qu’il fut pour le Vietnam. Cependant, le problème de l’Irak se croise, comme c’était aussi le cas pour le Vietnam, avec de sérieux problèmes économiques. C’est ce qui fait se plaindre les commentateurs bourgeois sur le fait que “personne n’a la volonté ou la moindre idée” de ce qu’il faudrait faire pour éviter la désagrégation économique. George Bush, véritable “vilain petit canard”, pris dans une tourmente politique, est incapable de prévenir la catastrophe imminente. Plus grave encore, disent certains, est le fait que les Etats-Unis sont tellement dépourvus de stratèges que, dans l’éventualité d’une crise économique sérieuse, ils n’ont personne de la “stature de Franklin D. Roosevelt” qui pourrait se porter en avant pour “conduire le pays dans une nouvelle direction “.

    Roosevelt, à travers sa politique du New Deal, aurait “sauvé” le capitalisme américain à son époque. Mais son programme n’était largement constitué, comme le fit remarquer Trotsky, que de “réformes sociales” bien présentées mais limitées, qui ne purent résoudre la crise économique sous-jacente qui s’étala en Amérique tout au long des années ‘30. Seule l’approche de la Seconde Guerre Mondiale et le développement de la production de guerre commencèrent à tirer les Etats-Unis hors de la plus grande crise économique de leur histoire. Cette voie, une nouvelle “Troisième Guerre Mondiale”, n’existe pas pour le capitalisme.

    Roosevelt joua effectivement un rôle crucial à l’aide de méthodes quasi-keynésiennes qui semblèrent engager les Etats-Unis dans une direction nouvelle ; politiquement, ses mesures minimales de création d’emploi pacifièrent en effet une portion de la classe ouvrière américaine et encouragèrent la croyance en un “avenir plus radieux”.

    Aujourd’hui, cependant, commente un journaliste américain dans le Financial Times, “Si une crise de l’ampleur de celle de 1929-32 devait frapper les USA maintenant [il est intéressant de noter que ceci puisse être avancé comme une perspective crédible, I.S.], le pays dans son ensemble ne trouverait pas un Roosevelt avec un programme de New Deal pour affronter un Herbert Hoover des Républicains. Ils auraient un Hoover timide et inefficace pour les Démocrates qui devrait se dresser contre un Républicain comme Calvin Coolidge, un défenseur borné des pires aspects du système existant. Si tel avait été le choix en 1932, les fondations mêmes de l’Etat américain auraient été en grand danger.” [5 Octobre 2005]

    Les Etats-Unis sont confrontés à une énorme crise de direction et à une crise économique non moins sérieuse, aussi bien qu’à une émergence des sentiments de classe, qui s’additionnent pour annoncer un avenir de convulsions politiques pour les Etats-Unis et, par conséquent, pour le monde entier.

    La défaite de Schwarzenegger, au cours des référendums en Californie, n’est que le sommet de l’iceberg des mouvements de classe qui sont en train de se préparer en Amérique. La division qui s’est opérée au sein de l’AFL-CIO (American Federation of Labor / Congress of Industrial Organizations) – bien que la manière dont elle va se développer ne soit pas encore claire – est un reflet du mécontentement qui existe vis-à-vis de la bureaucratie conservatrice au sein des syndicats américains. La perspective existe d’une conjonction entre le mouvement anti-guerre grandissant et des mouvements de classe qui prennent eux aussi de l’ampleur sur des questions économiques. Les attaques en préparation contre les travailleurs peuvent déjà se voir dans les usines Delphi où sont fabriquées des pièces de voitures et qui viennent de remplir un dossier “Chapitre 11 faillite”. La direction de cette entreprise qui emploie 56.000 travailleurs aux Etats-Unis et 129.000 à l’extérieur exige de ramener les salaires aux USA de 27 $ à 9,5$ par heure, ainsi que des coupes dans l’assurance santé !

    De telles attaques vont mener à de puissantes luttes de la classe ouvrière américaine dans la période à venir. L’émergence d’un mouvement de classe grandissant aux Etats-Unis sera un des développements les plus significatifs dans la prochaine période et elle aura d’importantes répercussions internationales.

    Le sentiment anti-guerre et la catastrophe irakienne ont conduit une partie des Démocrates à redécouvrir leur “conscience” et à commencer récemment à s’opposer à la guerre. Le Congressiste Démocrate de Pennsylvanie, John Murtha, qui a servi dans les Marines pendant 37 ans, appelle maintenant à un retrait immédiat des troupes américaines d’Irak. Vu les liens étroits qu’il possède avec l’armée, il parle probablement au nom de toute une aile du corps des Marines américains. Mais, au même moment, Hillary Clinton, une candidate très en vue pour la prochaine élection présidentielle, continue à soutenir la guerre, que son mari a pourtant décrite comme une “énorme erreur”.

    La profondeur de la crise aux Etats-Unis a trouvé un reflet dans l’ampleur sans précédent des critiques publiques envers la Maison Blanche faites par deux anciens Présidents Démocrates, Bill Clinton et Jimmy Carter, ainsi que par certaines sections de la direction du Parti Républicain, comme Brent Scowcroft. Les antagonismes sociaux croissants dans la société américaine sont en train de saper l’image des deux partis, Républicains comme Démocrates, dans l’esprit des masses, préparant le terrain pour la constitution d’un nouveau parti de masse.

    La politique américaine au Moyen-Orient

    L’aggravation de la crise en Irak et la croissance du mouvement anti-guerre aux Etats-Unis ont soulevé la question du retrait des troupes américaines. Le gouvernement irakien évoque maintenant la possibilité d’un retrait dans un délai de douze mois. Un retrait complet ne serait pas possible à cause de l’approfondissement de la crise en Iraq. Toutefois, une “réduction” à une force d’à peu près 100.000 personnes, concentrée autour de bases-clés et de zones stratégiques, est une possibilité. En l’absence d’un mouvement des travailleurs unifié et non-sectaire, un retrait complet aurait pour conséquence un conflit sectaire et ethnique encore plus grand. Sur la base du capitalisme, il n’y a pas de perspectives pour l’établissement d’une démocratie bourgeoise stable. Le développement d’un conflit ethnique et sectaire pourrait aboutir à la scission de l’Irak en trois “Etats”, ce qui donnerait comme perspective le remplacement de Saddam et de son régime brutal par trois régimes répressifs et réactionnaires, dirigés par trois “mini-Saddam”. Les forces impérialistes font face à un problème insoluble de leur point de vue. Le prix en est payé par le peuple irakien et par les autres peuples de toute cette région.

    La crise en Iraq montre clairement les limites existantes à la capacité de l’impérialisme américain à intervenir directement ailleurs. L’impérialisme américain veut apparemment toujours un changement de régime en Syrie et en Iran, mais il est incapable d’entreprendre une autre aventure militaire. Même le bombardement de l’Iran, bien qu’il reste envisageable, n’est guère probable. La politique de Bush a amené le régime théocratique et réactionnaire d’Ahamdinejad à adopter une ligne de conduite encore plus dure. Cependant, la nature répressive de ce régime provoque une opposition étendue en Iran et il a déjà été trop loin. Il en va de même en Syrie où les Etats-Unis espèrent une nouvelle “révolution orange” qui fera tomber ces régimes et installera des gouvernements plus pro-US.

    Au même moment, les événements en Israël et en Palestine ont ouvert une nouvelle phase de crise. L’élection de Peretz à la tête du Parti Travailliste témoigne, d’une manière déformée, des divisions massives de classes qui s’ouvrent au sein de la société israélienne. Ce développement très significatif a été en partie détourné par Sharon, qui a rompu avec le Likoud et créé un nouveau parti. Derrière tout ceci gît le cadavre des accords d’Oslo, la fin de la seconde Intifada, et l’acceptation, par une section entière de la classe dirigeante israélienne (et à présent, par Sharon) de la feuille de route américaine.

    Ceci revient à accepter qu’Israël devra retracer ses frontières derrière le “mur de sécurité” nouvellement construit qui sera plus “défendable”. Dans les faits, ceci veut dire laisser tomber certains territoires (mais, évidemment, pas les zones et les colonies cruciales) mais ce ne sera pas un retraçage des frontières à la situation d’avant 1967. La peureuse classe dirigeante palestinienne, à travers l’Autorité Palestinienne, a bien accueilli ces nouveaux développements. Pourtant, malgré le retrait israélien de Gaza, ceux-ci ne représentent pas une victoire pour le peuple palestinien et ne résoudront pas le conflit national dans cette zone-clé.

    La crise dans toute la région va être aggravée par le cauchemar irakien en cours et par la situation explosive qui s’ouvre en Iran, en Arabie Saoudite, et dans d’autres pays. Ces processus soulignent le désastre que représentent la politique étrangère américaine et les classes dirigeantes de la région pour les populations du Moyen-Orient. Nous devons observer les conflits de classe latents qui sont en cours de développement dans la région et qui préparent la base pour une nouvelle phase dans laquelle les idées socialistes et révolutionnaires vont se développer, ce que laissent déjà entrevoir les grèves récentes qui ont eu lieu au Qatar, aux Emirats Arabes Unis et au Koweït.

    L’Europe

    La défaite de la Constitution européenne en France et aux Pays-Bas a eu un effet dévastateur sur les classes dirigeantes européennes. Elle les a démoralisées et a sapé leur confiance politique. Le processus d’intégration européenne a été interrompu. Au même moment, des tensions accrues et des conflits ont fait surface entre les différents Etats européens, comme la confrontation entre la Grande-Bretagne et la France au sujet de la Politique Agricole Commune (PAC) et entre tous les pays de l’UE et le Royaume-Uni au sujet de la « remise » budgétaire accordée à cette dernière.

    En général, les économies européennes sont stagnantes et ont subi une légère montée de l’inflation. La peur de l’inflation a tout d’abord conduit à un débat autour de la relève des taux d’intérêt orchestrée par la Banque Centrale Européenne. Cette politique a ensuite été abandonnée, avant que ces taux soient à nouveau augmentés en décembre. Mais cette politique ne peut qu’aggraver la stagnation économique qui règne en Europe.

    Les nouveaux pays de l’Union en Europe de l’Est n’ont pas rattrapé les pays occidentaux. La croissance économique qu’ont connue quelques pays ne s’est faite que sur la base d’une main d’oeuvre bon marché. Il y a eu une polarisation sociale massive, qui n’a cessé de s’élargir. Une caractéristique de ces pays est l’absence de stabilité des gouvernements. Les tensions sociales qui se sont fait jour en Pologne indiquent la perspective de remous sociaux.

    Le processus d’élargissement européen a eu pour résultat une plus grande instabilité et de plus fortes tensions au sein de l’Union Européenne. La crise en cours en Europe se reflète particulièrement à l’heure présente en Allemagne, en France, en Italie et au Portugal. Les développements en cours dans ces pays ainsi que le mouvement de grève actuel en Belgique sont des prémisses de la manière dont vont se dérouler les événements dans la prochaine période à travers l’Europe.

    Les élections en Allemagne, avec la défaite de Schröder (bien que ce ne soit pas encore la défaite de son plan néo-libéral), représentent un recul pour le programme de la classe dirigeante. L’émergence du WASG a été un facteur crucial dans ce processus. Le gouvernement de coalition CDU – SPD issu de ces élections est un gouvernement faible, qui va être paralysé par des scissions et des indécisions. Plus encore, il va fournir des opportunités pour le développement d’une force plus puissante à partir du processus de formation d’une nouvelle force de gauche à partir du WASG, du Parti de Gauche / PDS et d’autres forces et militants. Ceci pourrait être accompagné par des actions dans les entreprises en opposition aux délocalisations d’usines, aux baisses de salaires et à l’intensification des mesures anti-travailleurs prises par le gouvernement de Grande Coalition.

    Certains commentateurs bourgeois reconnaissent à demi-mots que l’offensive néo-libérale en Allemagne ne peut pas être poursuivie, en ce moment, de la manière dont ils l’espéraient au départ. Avant les élections, la bourgeoisie espérait qu’une coalition menée par la CDU irait plus loin que Schröder, qui rencontrait une opposition à ses plans néo-libéraux à l’intérieur même de son parti et des syndicats. Ils s’attendaient à une nette victoire pour un gouvernement dirigé par la CDU, qui pourrait affronter la classe ouvrière allemande. Les résultats électoraux ont infligé une défaite à ces perspectives.

    La faiblesse du gouvernement et le potentiel pour l’éclatement d’une crise rapide se sont même reflétés dans le vote pour élire Merkel en tant que Chancelière. 51 parlementaires de la coalition au pouvoir ont voté contre elle ! Même à l’intérieur de son propre parti, elle a dû faire face à une opposition, des dirigeants de premier plan de Landers refusant de devenir ministres dans son gouvernement.

    Pendant la campagne électorale, Merkel avait promis de diminuer les taxes sur le revenu et d’augmenter la TVA. Une des premières mesures qu’elle a annoncée une fois en place a été la hausse du taux de la TVA de 3 points, afin de réduire le déficit budgétaire qui s’élève à 35 milliards d’euros. L’impérialisme allemand a payé au prix fort politiquement et économiquement la “victoire de l’unification”. L’Allemagne de l’Est a englouti 1.300 milliards d’euros en subsides depuis 1991, simplement pour voir son taux de chômage demeurer à 18,4%. La politique d’augmentation des taxes ne va pas aider à stimuler la croissance en Allemagne où les dépenses de consommation sont faibles. Elle va par contre renforcer les tendances à la récession.

    Le gouvernement Schröder a été capable, grâce aux dirigeants syndicaux, d’empêcher un mouvement général de lutte contre son Agenda 2010. Mais il sera beaucoup plus dur pour ce gouvernement faible, issu d’une coalition entre perdants (tous les partis sauf le WASG-PDS ont perdu des voix aux dernières élections), de tenir la classe ouvrière en échec. Déjà, les fonctionnaires ont exprimé leur colère vis-à-vis des attaques annoncées et quelques grèves locales à caractère défensif ont éclaté. Cela montre que l’arrivée au pouvoir de cette coalition va ouvrir une nouvelle phase de crise en Allemagne, qui pourrait voir un mouvement plus général contre les mesures néo-libérales du gouvernement.

    Les attaques néo-libérales contre la classe ouvrière ont aussi provoqué des crises sociales en France, en Espagne, en Italie, en Belgique et au Portugal. En fait, c’est une révolte continentale qui couve. Le premier instinct de la bourgeoisie quand elle est confrontée à des crises sociales est de plier sous le vent. Certains de ses stratèges ont argumenté qu’en Allemagne, le genre d’attaque frontale lancée par Schröder et promise par Merkel pourrait mettre le feu aux poudres et ils ont, par conséquent, préconisé la prudence : mieux vaut attaquer “par en-bas”, secteur par secteur, ou même entreprise par entreprise, plutôt que par une offensive nationale et générale. C’est pourquoi on assiste aujourd’hui à une tentative concertée de rompre avec le système de négociations nationales entre employeurs et syndicats.

    En France, de Villepin a réagi à la grève générale en octobre en déclarant qu’il “était à l’écoute”. Cela ne veut pas du tout dire que la bourgeoisie va abandonner sa politique néo-libérale, mais bien qu’une résistance de masse peut la forcer à une retraite temporaire, comme ce fut en partie le cas à l’occasion de la lutte pour les pensions au Royaume-Uni et ailleurs. De plus, si l’économie mondiale devait imploser, les conséquences économiques pourraient être telles que la bourgeoisie pourrait, temporairement, mettre au placard sa politique néo-libérale pour se tourner vers des mesures accrues d’intervention étatique et actionner davantage la “pompe” à dépenses du gouvernement, même au prix d’une plus grande inflation. En fait, une phase où cette politique deviendra une tendance dominante parmi les classes dirigeantes est inévitable à un certain stade. Mais, comme nous l’avons expliqué plus haut, la marge pour des méthodes keynésiennes classiques est limitée et celles-ci ne pourraient être mises en oeuvre qu’au prix d’une hausse de l’inflation.

    L’explosion d’émeutes de masse en France est venue en réponse à la politique néo-libérale de Chirac et de Villepin et aux conditions sociales désespérées qui règnent dans les ghettos qui entourent la plupart des villes françaises. Ces émeutes sont le reflet des intenses contradictions sociales et de classes qui existent tout autant que le racisme vicieux de l’Etat français. Ces troubles sociaux n’étaient pas des mouvements “raciaux et ethniques”, comme la droite française a tenté de le faire croire. C’était une explosion de la colère des sections les plus pauvres et les plus délaissées de la société – y compris une couche de blancs pauvres.

    C’était un mouvement inorganisé, mené par ceux qui n’ont aucun moyen politique au travers desquels canaliser et exprimer leur colère et leur rage. La responsabilité d’une telle éruption de colère revient au capitalisme français, à la classe dirigeante ainsi qu’aux Partis Socialiste et Communiste qui ont, dans les faits, abandonné la classe ouvrière et la jeunesse. Ces émeutes sont aussi une condamnation de la LCR et de Lutte Ouvrière qui ont failli – la LCR pour des raisons opportunistes, LO pour des raisons sectaires – à la tâche de construire une alternative politique qui aurait pu canaliser la colère et l’amertume ressenties par les jeunes impliqués dans les émeutes.

    Le gouvernement français a néanmoins décrit ces émeutes comme racistes et les a utilisés pour accroître les sentiments racistes en France. Il a mis en oeuvre une répression brutale qui comprend la réintroduction de l’Etat d’urgence (pour la première fois pour une période prolongée depuis 1961) et l’utilisation de couvre-feu. Ces mesures ont été appliquées sur une base sélective dans 30 départements et ont impliqué le recours aux CRS (la police anti-émeutes), la présence de la police dans les rues, l’utilisation d’hélicoptères et de couvre-feux. Plus de 3.000 personnes ont été arrêtées, y compris des parents de jeunes impliqués dans les émeutes.

    L’utilisation de telles mesures montre les caractéristiques semi-bonapartistes de l’appareil d’Etat français. Mais, au même moment, des méthodes de plus en plus répressives et anti-démocratiques ont été adoptées aussi en Grande-Bretagne, aux Etats-Unis, en Australie et dans d’autres pays.

    Jusqu’ici, l’Angleterre, l’Irlande et la Suède avaient appliqué, dans les faits, une politique de “porte ouverte” vis-à-vis de l’immigration, dans le but de faire venir des travailleurs d’autres pays et de les utiliser comme main d’oeuvre bon marché afin de se servir d’eux pour forcer une baisse des salaires. Les âpres luttes menées par les travailleurs irlandais et corses dans les compagnies de ferries montrent l’importance que cette question va prendre dans la prochaine période.

    L’utilisation de travailleurs immigrés pour forcer les salaires et les conditions de travail à la baisse est en train d’être appliquée d’une manière plus généralisée à travers toute l’Europe. Les effets dramatiques de ces changements peuvent signifier que, dans de nombreux pays, les problèmes de l’immigration et du racisme pourront devenir une question centrale, ce qui risque d’augmenter les craintes des travailleurs dans les pays affectés par cette politique et d’être utilisé par l’extrême-droite pour attiser les sentiments racistes.

    Dans certains pays, comme en Autriche, l’extrême-droite a subi des défaites électorales. De manière significative, dans les élections récentes en Allemagne, l’émergence du WASG-PDS a empêché l’extrême-droite de progresser. Mais ceci ne veut pas dire que toute menace a été supprimée. Le danger existe toujours que l’extrême-droite réalise des progrès électoraux lors de futures élections, surtout si la situation économique se détériore, en jouant sur les peurs des travailleurs et sur les sentiments racistes, en particulier s’il n’existe aucune alternative de gauche crédible.

    Nous devons être préparés à faire face à la question du racisme et, en particulier, à en faire un aspect central de notre travail dans la jeunesse et de l’activité de nos sections dans les pays où ce problème se pose. Il sera nécessaire dans notre travail militant de mettre en avant deux thèmes principaux pour répondre aux idées racistes. D’un côté, une campagne au sein du monde du travail pour gagner les travailleurs immigrés aux syndicats et aux organisations des travailleurs et pour qu’ils reçoivent les mêmes conditions de travail et le même salaire que les travailleurs autochtones. D’un autre côté, une campagne contre le racisme, le nationalisme réactionnaire et les préjugés ethniques.

    Au stade actuel, la nature de l’explosion de colère en France a permis au gouvernement d’obtenir un soutien accru pour les méthodes répressives. Toutefois, ce n’est pas Chirac qui en a retiré quoi que ce soit, mais de Villepin et Sarkozy. Bien que les travailleurs et la jeunesse comprennent que la cause des émeutes se situe dans les conditions sociales et le racisme de l’Etat, 68% des Français, selon un sondage du CSA, soutiennent la prolongation de l’état d’urgence. Le même sondage montre que 75% des gens qui ont voté pour LO/LCR sont en faveur de l’état d’urgence.

    Cependant, de tels sentiments ne sont qu’une réponse temporaire à la crise et peuvent rapidement changer, surtout en France où le gouvernement tente de faire avancer à grands pas ses mesures néo-libérales. Le Parti Socialiste a penché vers la “gauche” en réponse à la crise actuelle. Cependant il reste un parti bourgeois et n’offre aucune alternative à la classe ouvrière. 69% des gens interrogés pensent que le PS ne peut pas remporter les prochaines élections et un pourcentage identique pense que ce parti aurait mené la même politique que le gouvernement actuel s’il avait été au pouvoir. L’expérience du dernier gouvernement socialiste reste bien ancrée dans la conscience des masses.

    Ces développements en Allemagne et en France sont centraux dans la situation qui se développe actuellement en Europe. Au même moment, d’autres pays sont entrés dans une période de crise et de remous sociaux. L’Italie est l’ « homme malade » de l’Europe, à la fois économiquement et politiquement. Le gouvernement Berlusconi est entraîné d’une crise à l’autre et il tente maintenant de se sauver en changeant les règles pour les élections qui doivent avoir lieu en avril prochain, afin d’essayer de rester au pouvoir.

    En dépit de ces changements, les sondages d’opinion indiquent qu’il subsiste toujours une forte possibilité que ce soit l’ « Union », l’alliance de centre-gauche actuellement dans l’opposition, qui remporte ces élections. Il n’est pas impossible non plus qu’utilisant le sentiment anti-Berlusconi pour se justifier, certains dirigeants du PRC puissent aller au-delà d’un soutien à l’alliance électorale de centre-gauche et rejoindre un possible gouvernement de centre-gauche. S’ils font un tel pas, nous devrons nous y opposer. Un tel développement ne manquerait pas de provoquer à un certain moment une nouvelle crise au sein du PRC, car un gouvernement de centre-gauche entrera inévitablement en conflit avec la classe ouvrière et la jeunesse.

    Le Portugal, qui connaît une situation économique désespérée, est, sans aucun doute, à la veille d’une nouvelle explosion sociale. Si on y ajoute la vague de grèves en Belgique et l’opposition qui se développe contre le gouvernement Blair en Grande-Bretagne, ces événements nous mènent à une situation plus explosive et plus favorable à la construction et au renforcement de nos sections à travers l’Europe.

    Conclusions et tâches

    En Europe, et à l’échelle internationale, il est clair qu’une nouvelle période favorable, faite de difficultés accrues pour le capitalisme et d’un sentiment croissant de résistance dans la classe ouvrière, a maintenant commencé à s’ouvrir. La prochaine période va inévitablement comporter nombre d’aspects contradictoires prenant la forme de pas en avant faits par les travailleurs en matière de lutte, d’organisation et de conscience politique, qui se combineront avec d’autres complications et des défaites. Toutefois, des opportunités, nouvelles et importantes, vont se présentent et elles permettront à nos sections d’accomplir des pas significatifs, de renforcer notre influence et de gagner davantage de membres dans beaucoup de sections.

    Ceci va demander à nos sections d’aiguiser nos interventions et de prendre des initiatives audacieuses. Nous pourrons avoir un impact majeur dans les luttes de classe qui commencent maintenant à se développer si nous intervenons correctement, comme le montre l’intervention formidable que Joe Higgins et les autres camarades en Irlande ont menée dans la lutte des ferries irlandais. Il est surtout important que nous soyons capables d’intervenir pas seulement en expliquant nos méthodes et notre programme général, mais aussi et surtout en avançant des propositions spécifiques correctes quant à la manière d’organiser et de mener à bien les luttes en cours. Quand nous intervenons dans des mouvements, que ce soit dans des entreprises ou ailleurs, nous devons s’assurer que nos tactiques et nos propositions soient pleinement discutées et évaluées dans les sections à tous les niveaux.

    La prochaine période va nous donner de bien plus grandes opportunités pour construire nos sections que tout ce que nous avons connu lors de la décennie précédente. Nous devons être prêts à des changements rapides et à des bonds dans la conscience politique et prêts à faire les pas nécessaires pour intervenir quand de tels changements se produisent.

    Le CIO n’adopte pas une tactique universelle qui serait valable dans chaque pays, sans prendre en considération les conditions spécifiques qui existent. Mais, dans beaucoup de pays, la question d’un nouveau parti de masse des travailleurs se fait sentir comme une question cruciale. Il est essentiel que nos sections évaluent et réévaluent sans arrêt les tactiques et les tâches que nous devons adopter pour faire face à cette question essentielle.

    Le tournant vers le WASG en Allemagne et le P-SOL au Brésil ont déjà produit des gains importants pour ces sections. Les initiatives que nous prenons en Grande-Bretagne et en Belgique pour lancer des campagnes majeures afin de construire des partis des travailleurs montrent les initiatives que nous devons être prêts à prendre quand la situation le permet.

    Par dessus tout, il est nécessaire que toutes nos sections accordent une attention spéciale au recrutement et au développement politique de la nouvelle génération de camarades. Les avancées dans notre travail jeunes et dans nos interventions au sein de la classe ouvrière doivent être les priorités principales pour nos sections. Nous devons prendre des mesures spéciales pour intégrer et développer politiquement la nouvelle génération de recrues. Ceci doit être la priorité la plus importante dans le travail et l’activité de toutes nos sections et de tous nos membres dans la prochaine période. La période qui s’annonce nous donnera beaucoup plus d’opportunités favorables pour renforcer nos sections et pour inscrire le CIO sur la carte politique du monde.

0
    0
    Your Cart
    Your cart is emptyReturn to Shop