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Tag: Comité pour une Internationale Ouvrière
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Tunisie: le rappeur Klay BBJ acquitté!
Une modeste mais importante victoire dans la lutte pour la liberté d’expression
Le rappeur engagé Ahmed Ben Ahmed, alias Klay BBJ, qui avait été condamné par contumace à 21 mois de prison pour des chansons entravant soi-disant “les bonnes mœurs” (voir notre article à ce sujet) a été acquitté lors d’un procès en appel ce jeudi.
Par des correspondants du CIO
Klay, ainsi qu’un autre rappeur répondant au nom d’artiste de ‘Weld El 15′ (Alaa Yaacoubi), après avoir été violemment arrêtés sur scène et maltraités physiquement par la police à la suite d’un concert dans la ville de Hammamet au mois d’août, avaient été tous les deux condamnés à une peine d’emprisonnement de 21 mois, sans avoir été convoqués au tribunal ou même avoir été informés de la tenue de leur procès.
Klay avait décidé de faire appel de cette décision, tandis que Weld El 15 est en cavale depuis sa condamnation. Un premier procès en appel le 26 septembre avait décidé d’une réduction de peine à six mois de prison ferme pour Klay. L’avocat du rappeur avait fait appel de ce nouveau verdict, ce qui a finalement conduit au récent acquittement, jeudi. L’avocat a déclaré que Weld El 15 ferait désormais appel lui aussi.
Les militants et sympathisants du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) dans le monde entier avaient vocalement exprimé leur indignation face à la condamnation de ces jeunes artistes engagés (voir entre autres la vidéo ci-dessous, une chanson de rap produite par des partisans du CIO provenant de 5 pays différents), et réclamant l’abandon des poursuites à l’égard de Klay BBJ et Weld El 15).
Il ne fait aucun doute que la pression qui s’était accumulée contre cette condamnation, nationalement et internationalement – incluant entre autres une lettre de protestation signée par 12 députés européens de gauche à l’initiative de Paul Murphy, parlementaire du Socialist Party (section du CIO en République irlandaise) – a contribué à la libération de Klay. Le CIO salue cette victoire importante, qui s’inscrit dans le cadre de la bataille acharnée qui se déroule actuellement en Tunisie contre les tentatives répétées de limiter la liberté d’expression et de faire taire toutes les voix critiques du régime en place.
Nous nous félicitons également de l’initiative récente de rappeurs tunisiens d’avoir formé un syndicat national pour défendre leurs droits contre la répression de l’Etat. Ce genre d’initiatives pourrait encourager à lier la défense des droits des artistes ainsi que la lutte de la jeunesse des quartiers pauvres – desquels proviennent la grande majorité des rappeurs tunisiens – au mouvement ouvrier organisé.
La lutte continue
Le régime d’Ennahda s’est largement appuyé sur le code pénal hérité de l’ancien régime de Ben Ali, toujours en vigueur, et a reproduit des traits assez similaires à ce régime afin de faire taire ses opposants: brutalité policière, tortures, arrestations arbitraires, attaques contre les journalistes, et même assassinats politiques.
Même au cours du procès en appel devant se prononcer sur le sort de Klay BBJ, des journalistes et des représentants d’ONG venus assister au procès, telles que Human Right Watch, ont été empêchés par la police d’entrer au sein du tribunal. Pendant ce temps, des dizaines de musiciens et autres artistes demeurent en prison ou dans la clandestinité.
Ces exemples montrent que si une bataille a été gagnée, la lutte ne doit pas s’arrêter pour autant! Comme Klay BBJ le disait dans une lettre ouverte qu’il a écrit lorsqu’il était encore en prison: “La liberté d’expression, dans ce pays, la Tunisie, est limitée. Je dis toujours le droit mot, et jamais je ne baisserai la tête…No Pasaran”
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Fermeture de l’usine Opel à Bochum – pas de riposte ?
Pour la première fois depuis la seconde guerre mondiale, une usine automobile (celle d’Opel à Bochum, qui appartient à General Motors) est sur le point de fermer en Allemagne. Afin de sauver l’emploi, nous défendons la nationalisation des entreprises qui procèdent à des licenciements collectifs, sous le contrôle des travailleurs, avec par exemple l’instauration d’une semaine de travail de 30 heures sans perte de salaire.
Stephan Kimmerle, Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO)
- Industrie. Ne jamais gâcher une bonne crise ?
- General Motors / Opel annonce la fin de la production de voitures à Bochum d’ici 2016
- Industrie automobile européenne : Une autre crise est en cours…
Au cours de la nuit du 9 au 10 septembre dernier, 150 travailleurs d’Opel, écœurés par les plans de restructuration, sont entrés en grève spontanée après un meeting de 17 heures organisé par leur comité d’entreprise. Durant le meeting, la colère bouillonnante de ces travailleurs qui réclament la garantie de l’avenir de leurs postes, de leurs familles et de leur région était très visible. Cette grève a toutefois subi d’énormes pressions patronales, sans recevoir le soutien du syndicat. C’est ce qui a permis à la direction de parvenir à mettre fin à la grève et d’empêcher son extension aux travailleurs qui arrivaient le matin.
La région de la Ruhr, déjà appauvrie, souffrira des énormes conséquences de la fermeture d’Opel. Mais la résistance est des plus limitées, en net contraste avec les traditions militantes de cette usine qui a connu nombre de grèves. Parmi elles, une grève spontanée et non-reconnue par le sommet syndical avait éclaté en 2004 et avait duré 6 jours pour protester contre le licenciement de milliers de travailleurs. Une autre, en 2000, avait résisté à la délocalisation et la division des travailleurs.
Mais cette fois, aucune résistance n’aura été opposée au coup de grâce contre ces 5000 travailleurs (3200 dans l’usine et environ 2000 chez les fournisseurs directs et les sous-traitants sur le site), malgré des traditions combatives.
En mars 2013, plus de trois quarts des travailleurs de Bochum avaient rejeté un accord proposé par la direction au syndicat IG Metall et au comité d’entreprise. En échange de vagues promesses, les travailleurs devaient accepter de mettre un terme à la production de voitures en 2016, d’être moins bien payés, et d’abandonner les conventions collectives et toute possibilité de promotion. Alors que toutes les usines d’Opel en Allemagne ont été contraintes par le syndicat et le comité d’entreprise à accepter ce plan, les travailleurs de Bochum ont refusé de financer leurs propres funérailles avec des réductions salariales.
En riposte, la direction de General Motors a annoncé en avril 2013 la fermeture définitive de l’usine pour fin 2014. 5 mois plus tard, rien n’a changé, et aucune piste n’a été avancée pour contre-attaquer.
Une attaque de la direction en accord avec les syndicats
Il y a en Europe un surplus de 7 millions de voitures (Financial Times, 1er août 2013). Sur un marché en déclin généralisé, Opel se porte particulièrement mal. Ses parts de marché en Europe de l’Ouest sont passées de 11% en 2011 à 6,8% au premier semestre 2013. Le syndicat allemand IG Metall a déclaré que les usines Opel en Europe fonctionnent à 50% de leurs capacités.
General Motors a mis fin à la production à Anvers en décembre 2010. Les travailleurs des autres usines ont été menacés et forcés à accepter des conditions de travail et des salaires inférieurs.
Au centre du problème, la soumission des syndicats et des comités d’entreprise à la ‘‘course vers le fond’’ : un plan de chantage visant à diviser les travailleurs pour assurer la logique de compétitivité et de profits des patrons.
En mai 2012, le syndicat britannique Unite a accepté des horaires plus lourds, une perte de salaire, plus de flexibilité, et même un relais des équipes le week-end pour faire gagner à la direction le conflit interne sur les futurs modèles et la production. Pour ‘‘sauvegarder’’ les postes à Ellesmere Port près de Liverpool, Unite a même insisté pour qu’en échange de réductions de salaires, la direction promette de ne plus produire le modèle Astra dans plus d’une usine, alors que la production était encore en cours dans deux autres.
Certains délégués syndicaux d’Ellesmere Port étaient véritablement convaincus qu’il n’existait pas d’alternative à ces concessions. Mais le rôle des représentants syndicaux devrait être d’expliquer clairement la situation et de préparer les travailleurs à de futures batailles. Mais à la place, ils ont causé un effet démoralisateur et démobilisant en faisant de ces concessions une stratégie pour ‘‘sauver’’ l’emploi. En pratique, une couche de dirigeants d’Unite a accepté cette prétendue ‘‘perte inévitable’’ d’emplois et d’usines dans le cadre de la crise capitaliste de la production automobile en Europe.
En juin 2012, le syndicat IG Metall a accepté de ne pas accorder l’augmentation de 4,3% à laquelle les travailleurs d’Opel avaient droit selon leur contrat. Cela faisait partie du “Deutschland-Plan” (plan pour l’Allemagne) visant à augmenter la compétitivité de l’entreprise face à d’autres entreprises appartenant à General Motors. Ce plan comprenait déjà la fermeture de l’usine de Bochum en 2016. La production de l’Astra, le modèle le plus important pour Opel, sera délocalisé hors d’Allemagne.
Cependant, la stratégie des concessions ne paie pas. Le ‘‘vainqueur’’ principal (à long terme, il s’agit de toute façon des patrons) semble ne pas être Ellesmere Port, mais bien l’usine polonaise de General Motors à Gliwice. L’année dernière, Ellesmere Port a vu sa production baisser. Les travailleurs ont été contraints à une semaine de 4 jours et la production a cessé durant une semaine.
Le soutien des dirigeants des comités d’entreprise de Rüsselsheim près de Francfort contre l’usine de Bochum a entraîné l’arrêt de la production de l’Astra et n’a été compensé que par le transfert de la production du modèle Zafira de Bochum à Rüsselsheim. Leur propre avenir est incertain.
Dans ce jeu du patronat, tous les travailleurs sont perdants, seul leur degré de souffrance change. Les décisions de la direction ont déjà été approuvées de facto par les comités d’entreprise et les syndicats européens.
Une stratégie pour sauver l’emploi
Le directeur des comités d’entreprise d’Opel en Allemagne, Wolfgang Schäfer-Klug, a défendu le “Deutschland-Plan’’ et toutes ses concessions pour ‘‘défendre’’ les emplois en Allemagne, tout en critiquant de manière hypocrite le syndicat britannique pour ses concessions.
Le dirigeant d’IG Metall a même indiqué que les traditions combatives de Bochum ont mené à la fermeture de l’usine. Dans une interview, il a déclaré que ‘‘le radicalisme excessif peut au final remettre le futur d’un site en question.’’ Les patrons de General Motors ont peut-être bien choisi de punir Bochum à cause de son passé rebelle. L’entreprise pense d’ailleurs cesser sa production en Corée du Sud à cause de la force des syndicats et de l’effet des récentes grèves là-bas. Cependant, sans la résistance combative des travailleurs de Bochum, l’usine aurait déjà fermé il y a longtemps ! Il est du devoir des syndicats et des dirigeants comme Wolfgang Schäfer-Klug de défendre ses traditions, pas de les jeter à la poubelle.
Malgré son argumentaire contre le “Deutschland-Plan’’ et ses encouragements aux travailleurs de Bochum pour qu’ils votent contre, le dirigeant du comité d’entreprise de Bochum, Rainer Einenkel, n’a proposé aucune alternative de lutte. Au contraire, il a appelé à la ‘‘prudence’’, sans faire quoi que ce soit d’autre. Sa stratégie semble être d’espérer renégocier les termes du contrat avec General Motors. Il les appelle à ne pas endommager davantage l’image d’Opel en fermant l’usine de la Ruhr. Il a aussi symboliquement attaqué Opel en justice pour que l’usine ne soit pas fermée.
Pour une semaine de 30 heures chez General Motors sans perte de salaire!
Nous avons besoin d’une réelle stratégie pour mettre fin aux plans de la direction et défendre tous les emplois et toutes les usines. Le premier pas, c’est de mobiliser et de contre-attaquer immédiatement. Il faut décréter la grève.
IG Metall en Allemagne, Unite en Grande-Bretagne, et d’autres syndicats ont le pouvoir d’organiser la résistance. Il faut pousser leur direction vers l’avant. Cependant, les travailleurs de Bochum ne peuvent pas attendre le réveil ou le remplacement de la direction. Il faut un mouvement de la base, qui démarrerait avec une grève et l’envoi de délégués dans d’autres usines pour ouvrir le débat sur la manière de défendre les emplois et les usines. Cela pourrait trouver un écho favorable dans la région de la Ruhr.
Un tel mouvement a besoin d’une solution pour gagner. A Bochum, les travailleurs peuvent lier leur lutte pour la défense de tous les emplois à la demande du gouvernement fédéral et de l’Etat régional de Rhénanie-Du-Nord-Westphalie de nationaliser l’usine et d’en arrêter le déclin. Sous le contrôle des travailleurs, une stratégie peut être développée afin d’utiliser l’usine et sa main d’œuvre qualifiée pour produire des bien socialement nécessaires, et pas seulement des voitures.
Comme General Motors ne désire pas continuer à faire tourner ses usines sans licenciements ou attaques sur les droits des travailleurs, elles devraient être nationalisées sous le contrôle des travailleurs. Un plan d’urgence de production pourrait être décidé pour utiliser les ressources de ces travailleurs talentueux et celles des usines. Là où c’est nécessaire, on pourrait remplacer la production de voitures par la production d’autres biens socialement nécessaires. Ces usines ne seraient alors plus sources de chômage, mais d’apprentissage et d’emplois pour les jeunes.
General Motors a annoncé de nouveaux profits tout en attaquant les emplois et les conditions de travail des travailleurs. Que General Motors rendent ses comptes publics, et pas que eux d’Opel et Vauxhall ! Que les travailleurs sachent où sont allés les gigantesques profits, les baisses d’impôts et les subsides !
Pour répandre la lutte, il faut aussi une stratégie pour mettre fin à la politique de division. L’argument principal de la direction, et aussi malheureusement celui des syndicats de droite, c’est la crise de surproduction qui touche l’industrie automobile. C’est la base de la stratégie visant à diviser les travailleurs des différentes usines. En ce moment, les travailleurs de Rüsselsheim, Ellesmere Port ou Gliwice espèrent bénéficier d’une certaine manière de la fermeture de Bochum.
Un premier pas pour mettre fin à cet argument serait une campagne immédiate pour la réduction des heures de travail : pour une semaine de 30 heures sans perte de salaire dans les usines de General Motors (Opel, Vauxhell) en Europe et ailleurs. Cela donnerait un exemple aux travailleurs de l’automobile d’autres entreprises, qui les pousserait à ne pas accepter la surproduction comme un problème, mais à partager la charge de travail et à faire payer les patrons.
Encore une fois, cela serait bien plus efficace si les directions syndicales faisaient leur travail… Mais sans avoir à les attendre, des visites de délégations de la base dans d’autres usines pourraient élargir le mouvement de protestation. Les militants syndicaux devraient faire campagne pour exiger la fin de la division des travailleurs au sein des syndicats, et défendre les emplois, les conditions de travail et les salaires.
Cela aidera aussi les travailleurs de Bochum, qui se sentent abandonnés par les collègues des autres usines à cause de la politique des syndicats. Cela mettrait fin à l’isolement et créerait un mouvement de lutte généralisé capable de mobiliser l’énergie nécessaire pour une riposte efficace.
Il faut une direction combative pour organiser cette lutte unifiée. Cela créerait la base pour mobiliser les travailleurs pour sauvegarder toutes les usines. Les syndicats doivent être transformés en outils combatifs, basés sur la démocratie interne. Ils doivent nouer des liens étroits entre les travailleurs partout en Europe et dans le monde. Un mouvement militant des travailleurs et des syndicats est essentiel afin de lutter pour ces changements, développer de nouveaux liens entre les représentants des travailleurs de différentes usines et de différents pays pour faire tomber les barrières et unir la résistance.
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Homophobie en Russie : INTERVIEW d’Igor, militant russe pour les droits des LGBT
A l’occasion des championnats Olympiques d’Athlétisme qui se sont déroulés en août dernier, une certaine attention médiatique a été accordée à la violence et aux lois homophobes en Russie. Nous en avons parlé avec notre camarade Igor, membre de la section russe du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) et militant très impliqué dans la défense des droits des LGBT (Lesbiennes-Gays-Bisexuels-Transgenres).
‘‘La campagne homophobe qui prend actuellement place en Russie a commencé il y a deux ans, juste avant les élections parlementaires de 2011. Le parti de Poutine, Russie Unie, sentait qu’il perdait du soutien électoral et a donc décidé d’instrumentaliser les préjugés homophobes pour diviser la population, s’attirer l’adhésion des couches les plus conservatrices de la société (en combinaison avec d’autres thèmes pour la ‘‘sauvegarde de la famille’’ et contre le droit à l’avortement) et dévier l’attention des importants problèmes sociaux et politiques du pays. Dans d’autres pays, c’est la carte du nationalisme qui est jouée à cette fin mais, dans un pays comme la Russie qui comprend une multitude de groupes ethniques et de minorités nationales, utiliser aussi ouvertement le nationalisme est périlleux.
‘‘Au début, la plupart des activistes ont pensé que cette campagne allait prendre fin une fois les élections terminées, nous avions prévenu que cela dépendrait avant tout de la manière dont la crise politique, sociale et économique allait se poursuivre en Russie. Un mouvement de masse a suivi ces élections, dans le cadre des protestations de masse qui ont surgi à travers le monde à la suite du processus révolutionnaire en Afrique du Nord et au Moyen-Orient cette année-là (c’était aussi l’année du mouvement Occupy aux USA, des Indignés en Espagne,…). Le régime a donc décidé de poursuivre et d’intensifier cette campagne. Nous ne pensons pas que la société russe est plus homophobe ou conservatrice qu’une autre, la situation qui s’est développée est une conséquence directe de la politique d’Etat.
‘‘Ce processus n’est toutefois pas linéaire. Les militants LGBT ont riposté avec leur propre campagne et, grâce à cela, le niveau des discussions sur ce sujet a considérablement évolué en deux ans. Jamais auparavant ce thème n’avait été débattu à cette échelle en Russie. Au côté d’actions spécifiques, les activistes LGBT ont commencé à participé de manière organisée aux manifestations de masse sur d’autres problèmes sociaux (particulièrement à Moscou, sous l’influence de l’activité des militants du CIO), avec leurs slogans propres et leurs drapeaux arc-en-ciel. Si une certaine hostilité a pu être présente au début, nous avons vu par la suite des manifestants défendre les LGBT contre les attaques physiques de l’extrême-droite dans les cortèges, et les délégations LGBT sont très vite devenues les plus dynamiques dans les actions de protestation, en solidarité avec l’oppression d’autres groupes dans la société.
‘‘En tant que socialistes révolutionnaires, nous considérons qu’il est de notre devoir de veiller à élever le niveau de conscience politique des militants LGBT tout en essayant de lier cette lutte spécifique à d’autres afin de parvenir à un combat mené en commun en défense de tous nos droits démocratiques et pour briser les préjugés néfastes entretenus par le régime. Cela est crucial pour stopper le rouleau compresseur de la politique antisociale.
‘‘Concernant les prochains Jeux Olympiques d’hiver de Sotchi, je pense qu’un boycott ne nous aidera pas à lutter contre l’homophobie. Nous nous opposons aux Jeux Olympiques pour des raisons différentes, parce que cela est synonyme de corruption, de gaspillage d’argent public et de destruction de l’environnement. Il sera plus efficace d’organiser des actions de protestation et de solidarité durant la tenue des Jeux, avec des athlètes bien sûr, mais aussi avec les fans. Après des années de silence et de mépris, nous devons utiliser toutes les occasions de parler et de renforcer la lutte pour l’égalité.’’
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Tunisie : Grandes manœuvres au sommet, profonde méfiance parmi les masses
L’alliance du Front populaire avec ‘‘Nidaa Tounes’’ provoque du remous dans la gauche
Dans la foulée de l’assassinat politique du dirigeant de gauche nassérien Mohamed Brahmi, le 25 Juillet, une cascade de protestations a traversé tous les coins de la Tunisie. Une grève générale massive a secoué le pays le vendredi 26, et un ‘sit-in’ permanent a eu lieu depuis en face de l’édifice de l’Assemblée Nationale Constituante, à la place du Bardo à Tunis, rejoint par la suite par de nombreux manifestants venus des régions de l’intérieur pour marcher sur la capitale, déterminés à en découdre avec le pouvoir en place.
Serge Jordan, Comité pour une Internationale Ouvrière
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- Achever le processus révolutionnaire : après la chute de Ben Ali, la chute du capitalisme ! (6 mai 2013)
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Le 6 août, la plus grande manifestation anti-gouvernementale depuis le meurtre de Brahmi a pris place, les estimations les plus sérieuses faisant état de plus de 450.000 manifestants. Le mouvement ‘Tamarrod’ (‘Rébellion’) affirme avoir recueilli plus de 1,7 million de signatures (à peu près 10% de la population) en faveur de la destitution du gouvernement de la ‘Troika’, dirigé par les islamistes d’Ennahda. Et dans les régions pauvres de l’intérieur du pays, les mobilisations ont été accompagnées par le développement de diverses structures de pouvoir révolutionnaires locales : dans certaines régions, les manifestants ont occupé les gouvernorats et mis en place des comités autogérés, en défi direct au gouvernement d’Ennahda.
Laïcs contre islamistes ?
Contrairement à ce qui a été clamé par de nombreux commentateurs dans les médias, les principaux acteurs de la bataille en cours ne sont pas simplement des ‘islamistes’ contre des ‘laïques’. Présenter les choses de cette manière tend à nourrir le jeu de pouvoir au sein de l’élite, une élite qui a tout intérêt à essayer d’obscurcir les questions de classe sous-jacentes.
Bien sûr, il serait faux de nier la colère de masse liée à la bigoterie religieuse de la clique au pouvoir, ainsi que les attaques et menaces perpétrées au nom de l’islam politique. L’encouragement du fondamentalisme religieux et les frontières poreuses entre Ennahda et certains groupes salafistes violents a sans aucun doute nourri la colère du peuple tunisien contre le régime actuel. Alors que chaque jour qui passe apporte son lot d’histoires d’attaques aux frontières, de menaces à la bombe ou de tentatives d’assassinats, la situation sécuritaire du pays et la menace de la violence terroriste sont devenus une préoccupation importante pour la population.
Les récentes déclarations gouvernementales caractérisant officiellement le mouvement salafiste extrémiste « Ansar al-Sharia » comme une «organisation terroriste» doivent être comprises dans ce contexte: il s’agit d’une tentative des dirigeants d’Ennahda d’écarter leurs propres responsabilités en affichant une certaine dose de pragmatisme politique envers la rue et le mouvement d’opposition, dans un geste désespéré pour tenter de restaurer leur crédibilité, quitte à s’aliéner certains de leurs alliés potentiels et une partie de leur propre base ultraconservatrice.
Les socialistes s’opposent sans ménagement à la tendance croissante au fondamentalisme religieux, utilisé comme un instrument d’oppression par le pouvoir en place, qui représente une grave menace pour la liberté d’expression et les droits démocratiques, en particulier en ce qui concerne ses effets corrosifs sur les femmes.
La manifestation en défense des droits des femmes appelée par le syndicat UGTT le 13 août a été ralliée par une foule nombreuse de dizaines de milliers de personnes, réclamant la chute du gouvernement. Cela indique que de nombreux manifestants intègrent très justement la lutte pour défendre les droits des femmes dans une lutte plus large contre le gouvernement actuel.
Mais si ces questions ont incontestablement joué un rôle important, le cœur de la lutte en cours remonte directement aux aspirations initiales de la révolution de 2010-2011, qui n’ont tout simplement pas été satisfaites.
Une enquête menée au début de 2011 indiquait que 78% des jeunes Tunisiens pensaient à ce moment-là que la situation économique s’améliorerait au cours des prochaines années, ce qui est bien loin de la réalité actuelle. Pour une grande partie de la population en effet, les difficultés croissantes de la vie quotidienne, la hausse constante des prix des denrées alimentaires, la terrible absence d’emplois pour les jeunes, l’état catastrophique des infrastructures publiques, les bas salaires et les conditions de travail épouvantables dans les usines, la marginalisation continue des régions de l’Ouest et du Sud, toutes les questions sociales au sens large fournissent le ‘carburant’ de la rage actuelle contre le gouvernement.
Dans la ville de Menzel Bourguiba, au Nord de Tunis, 4000 travailleurs ont été récemment licenciés du jour au lendemain sans préavis, après la fermeture totale de leur usine de chaussures. C’est à ce genre de préoccupations que la clique au pouvoir a été absolument incapable de répondre tout au long de son mandat.
Les enjeux ici portent sur qui détient le pouvoir économique dans la société, et au service de quels intérêts de classe le gouvernement travaille. En ce sens, tout gouvernement fonctionnant dans le cadre du système capitaliste, centré sur la maximalisation du profit pour les grosses entreprises (qu’il s’agisse d’un gouvernement avec Ennahda, avec des partis laïques, d’un ‘cabinet de technocrates’, d’un ‘gouvernement d’élections’, de ‘compétences’, d’unité nationale’ ou de n’importe quelle autre formule de ce genre) ne livrera rien d’autre que sensiblement la même politique, voire pire encore, pour la masse de la population.
Le caractère supposément ‘laïque’ du régime de Ben Ali, par exemple, ne l’a nullement empêché de détruire la vie des gens, d’écraser toute opposition à son règne, de briser le niveau de vie des travailleurs, et d’être finalement renversé par un mouvement révolutionnaire sans précédent.
Est-ce que ‘les ennemis de nos ennemis’ sont nos amis ?
Bien qu’ayant initialement subi des coups sévères par la révolution, les anciens vestiges du régime, les milieux et réseaux de l’ex-RCD, ainsi que les familles bourgeoises qui ont rempli leurs poches pendant les années Ben Ali, n’ont pas ‘disparu’. Ils sont toujours représentés à l’intérieur de l’appareil d’Etat, dans de nombreux secteurs de l’économie, dans les médias, dans de nombreux partis politiques, organisations et associations, ils ont aussi des connections, entre autres, au sein du régime algérien, et des liens avec les puissances impérialistes.
L’héritage politique le plus évident de l’ancien régime est le parti ‘Nidaa Tounes’ (=‘Appel pour la Tunisie’), épine dorsale de la coalition ‘Union pour la Tunisie’. Nidaa Tounes, dirigé par le dinosaure politique de 87 ans Beji Caïed Essebsi (une figure de premier plan pendant la dictature de Habib Bourguiba, qui dirigea le pays de 1957 à 1987) est essentiellement un refuge politique de vieille garde de la dictature: éléments liés à la bureaucratie qui constituait le tronc de l’ancien parti au pouvoir, groupes d’ intérêts avec des connections à l’intérieur de l’‘Etat profond’, riches capitalistes dont les intérêts commerciaux sont en conflit avec la stratégie d’Ennahdha, couplés avec toutes sortes de nostalgiques et parasites de l’ancien régime qui abusaient de leurs positions à travers le vaste système de népotisme.
Cependant, c’est précisément avec ce parti et avec ses partenaires politiques, tous farouchement défenseurs du ‘marché’, que les dirigeants de la gauche tunisienne ont décidé de conclure un accord politique, comme si l’élan populaire contre Ennahda, qui avait atteint un point de quasi-ébullition dans les dernières semaines, rendait soudainement ces forces plus acceptables ou ‘amies’ de la révolution populaire.
En effet, après l’assassinat de Mohamed Brahmi, une alliance politique a été mise en place par la direction de la coalition de gauche du ‘Front populaire’ avec la coalition ’Union pour la Tunisie’, ainsi qu’avec d’autres forces de droite (y compris avec la principale fédération des patrons, l’UTICA). Cet accord a donné naissance à la création du ‘Front de Salut National’, dont l’objectif commun proclamé est de faire campagne pour la formation d’un gouvernement de ‘salut national’, dirigé par une soi-disant ‘personnalité nationale indépendante’.
Cette alliance a jeté un seau d’eau froide sur les désirs révolutionnaires de beaucoup de militants, à la base du Front populaire ainsi que parmi de nombreux jeunes et de travailleurs tunisiens. Cet accord ne fut pas une réelle surprise pour le CIO. Nous avions mis en garde depuis longtemps, dans notre analyse du caractère et de l’évolution de l’orientation du Front populaire au cours des derniers mois, contre la stratégie erronée, poursuivie par ses dirigeants, de la ‘révolution par étapes’: en gros, l’idée qu’il faut d’abord consolider la ‘démocratie’ et la réalisation d’un ‘État civil’, tout en reportant les tâches de la révolution socialiste à un avenir indiscernable.
Ce récent accord est le point culminant d’une telle approche erronée. S’unir contre l’ennemi islamiste commun, perçu comme une menace pour la démocratie, est devenue la ligne de justification pour la conclusion d’accords avec une force politique complètement réactionnaire, armée d’un programme néolibéral qui ne diffère en rien de fondamental de celui de ses opposants islamistes. Cet accord subordonne de facto les intérêts de la classe ouvrière et des pauvres, qui constituent la majorité des forces militantes du Front populaire, à des forces motivées par un programme résolument pro-capitaliste et pro-impérialiste.
Arguer du fait qu’un accord de cette nature est ‘nécessaire’ pour le mouvement afin d’être ‘suffisamment fort’ si l’on veut faire tomber le gouvernement actuel, comme certains l’ont prétendu, ne tient pas la route.
Le magnifique mouvement qui avait débuté après la mort de Brahmi a connu depuis une chute significative, la vague de grèves s’est en partie épuisée, et la composition de classe des manifestations de rue a également changé, ayant été partiellement reprise en charge par des forces pro-bourgeoises, déguisés pour l’occasion par les chefs de la gauche comme étant du côté du peuple. Une certaine nostalgie pour le régime de Bourguiba a également refait surface, avec une couche de manifestants essentiellement issus de la classe moyenne, encouragés par Nidaa Tounes et d’autres forces similaires, affichant des portraits de l’ancien autocrate dans les rues.
Cela ne signifie pas pour autant que le mouvement est ‘mort’. La situation reste extrêmement volatile, et la colère qui existe parmi de larges couches de la population tunisienne contre l’état général du pays, sur les plans à la fois social et politique, pourrait rapidement resurgir au travers de nouvelles explosions de masse.
Mais incontestablement, l’alliance entre la gauche et Nidaa Tounes & cie a eu pour effet immédiat d’affaiblir le mouvement de masse et la confiance des travailleurs et des jeunes dans ce pour quoi ils se battaient et sont sortis dans la rue au départ.
La campagne ‘Erhal’ (‘Dégage’) a été lancée par le Front de Salut National il y a deux semaines, dans le but de faire dégager les gouverneurs, administrateurs et dirigeants d’institutions publiques nommés par le gouvernement d’Ennahdha. Essebsi est sorti publiquement à la fin du mois d’août contre cette campagne, en disant qu’il ‘plaçait son soutien dans le concept de l’Etat’.
Cela montre encore une fois que Essebsi et ses forces poursuivent un agenda aux antipodes du mouvement révolutionnaire, en utilisant leur position pour tenter de briser la dynamique du mouvement, qui avait pourtant vu plusieurs exemples de structures de double pouvoir émerger dans diverses localités, et des gouverneurs et chefs locaux d’Ennahda chassés par la population.
Le côté ironique de l’histoire est que récemment, il a été révélé que des négociations secrètes avaient eu lieu à Paris entre Rached Ghannouchi, dirigeant d’Ennahda, et Essebsi lui-même, dans une tentative de trouver un accord commun entre les deux partis. Selon toute vraisemblance, ils ont été poussés dans le dos par les pays impérialistes, afin de désamorcer la crise actuelle et éviter une impasse politique prolongée qui pourrait exacerber les tensions et potentiellement donner lieu à de nouveaux soulèvements révolutionnaires.
Les centaines de milliers de jeunes, de travailleurs et de pauvres qui ont inondé les rues pour manifester leur colère contre le pouvoir en place durant le courant du mois dernier se rendent compte que toute cette énergie pourrait arriver à un accord pourri entre les deux principales forces de la contre-révolution, et tout cela avec l’accord tacite des dirigeants des principaux partis de gauche.
Turbulences à gauche
A nos yeux, c’est seulement autour des revendications de la classe ouvrière et des opprimés, ceux et celles qui ont fait la révolution et partagent un intérêt commun à la poursuite et à la victoire de celle-ci, qu’une alternative politique viable peut être construite, capable de répondre aux préoccupations profondes de la majorité.
C’est pour cette raison que beaucoup de militants, syndicalistes, chômeurs et autres sympathisants de la gauche radicale avaient accueilli avec enthousiasme les objectifs initiaux de la mise en place du Front Populaire: rassembler tous ceux et toutes celles qui ressentent la nécessité d’un pôle d’attraction révolutionnaire indépendant, explicitement distinctif, dans ses objectifs, à la fois d’Ennahda et des diverses forces néolibérales ou/et liées a l’ancien régime qui se trouvent dans l’opposition.
Pour les mêmes raisons, l’adoption, par les dirigeants du Front populaire, du ‘Front de Salut National’ rencontre maintenant de vives critiques et un remous croissant dans les rangs du Front Populaire et dans la quasi-totalité des partis qui le constituent. Un état de semi- révolte est en gestation dans certains de ces partis. Selon un militant de l’aile jeune du ‘Parti des Travailleurs’ (ex- PCOT), cité dans un article publié sur le site nawaat.org, ‘‘Au sein de notre parti, le gros de la jeunesse est contre cette alliance.’’ Dans le même article, un membre du syndicat étudiant UGET, et sympathisant du Front Populaire, fait également valoir qu’il est contre cette alliance ‘‘avec des libéraux, qui ont un projet à l’opposé du nôtre et qui sont dirigés par des personnes ayant eu des postes importants sous Bourguiba et Ben Ali.’’ Un autre partisan du Front Populaire explique: ‘‘Cette alliance est une faute sur le plan stratégique et une trahison des principes de la gauche. Nidaa Tounes est un parti de droite sur les plans économique et social, tout comme Ennahda, et c’est un lieu de recyclage pour des anciens du RCD.’’
La LGO, le parti dans lequel les partisans du CIO ont été actifs depuis un certain temps, n’a pas été immunisée par ces développements. Une partie de la direction de la LGO s’est alignée sur l’orientation suivie par les principaux dirigeants du Front Populaire, laissant tomber leur revendication précédente pour un ‘‘gouvernement ouvrier et populaire autour de l’UGTT’’, et se cadrant au contraire dans la revendication de ‘‘gouvernement de salut national’’ préconisée par la direction du Front Populaire.
Le 3 août, la LGO a produit une déclaration, reproduite sans la moindre critique en anglais sur le site ‘International Viewpoint’ (le site international du Secrétariat International de la Quatrième Internationale) arguant que ‘‘Pour faire face aux conditions économiques et sociales actuelles, il faut combattre les facteurs de l’hémorragie financière de l’Etat et augmenter ses ressources, afin de permettre au gouvernement de salut de mettre en œuvre son programme en se basant essentiellement sur nos propres capacités nationales ( … ).’’ De manière incroyable, le texte va jusqu’à demander à ‘‘soumettre les cadres de l’Etat et ses rouages à un plan d’austérité strict’’ et exiger ‘‘une contribution de solidarité volontaire des salarié-es d’un jour de travail pendant six mois’’ !
Dès le premier jour des manifestations anti-gouvernementales après l’assassinat de Brahmi, le groupe de supporters du CIO a été le premier à sortir avec des tracts contestant cette orientation, refusant tout accord politique avec des forces qui défendent le capitalisme, exigeant une grève générale ouverte, et plaidant pour structurer la lutte dans tout le pays au travers de comités d’action de masse démocratiquement élus, afin de jeter les bases d’un ‘‘gouvernement révolutionnaire des travailleurs, des jeunes, des chômeurs et des pauvres, soutenu par l’UGTT et les militants du Front Populaire , l’Union des Chômeurs Diplômés (UDC) et les mouvements sociaux.’’
En collaboration avec d’autres, les partisans du CIO en Tunisie sont désormais engagés dans un processus de recomposition de la gauche, en vue de fonder une nouvelle plateforme d’opposition, ouverte à tous, qui puisse organiser les militants du Front Populaire dissidents, et les travailleurs et les jeunes au sens large, autour d’un programme en adéquation avec les véritables aspirations de la majorité des Tunisiens.
Le mouvement de masse a un besoin urgent de construire sa propre organisation politique indépendante. Cela ne peut être fait, à nos yeux, qu’en rejetant résolument toute transaction avec des forces de classe étrangères telles que la coalition autour de Nidaa Tounes. Agir en conformité avec ces forces ne peut que conduire à la défaite ; l’appel aux sacrifices au nom du bien commun, voilés sous la bannière du «salut national » ou de toute autre façade similaire, servira en réalité à ouvrir la voie à de nouvelles attaques sauvages sur les droits et les conditions de vie des travailleurs et des masses pauvres en Tunisie, et de faire reculer la révolution pour les bénéfices de la classe capitaliste.
Tout indique qu’un ‘‘automne chaud’’ de grèves et de protestations sociales se profile en Tunisie. Si les batailles entre clans politiques au sommet peuvent, dans certaines circonstances, prendre le dessus sur les luttes sociales, et les dissimuler dans une certaine mesure, ces dernières ne peuvent être supprimées pour autant. Les couches de la classe ouvrière qui sont sorties pour réclamer la chute du gouvernement sont pleines d’amertume, et reviendront inévitablement sur la scène pour réclamer leur du, et cela quelque soit le visage du nouveau gouvernement qui suivra la chute, quasi inévitable, de celui d’Ennahda.
La gauche doit se préparer à donner une direction effective à ces couches qui vont entrer en lutte dans les prochaines semaines et les prochains mois, et leur fournir une stratégie claire sur la façon dont elles peuvent enfin obtenir un gouvernement qui leur est propre et qui puisse représenter pleinement leurs intérêts. Le cas échéant, d’autres forces réactionnaires vont s’engouffrer dans le vide politique, et se voir offrir la possibilité de se présenter comme étant les meilleurs défenseurs soit de la foi, soit de «l’intérêt national», faisant usage d’une rhétorique sans contenu de classe afin de détourner les objectifs initiaux de la révolution et d’imposer leur agenda contre-révolutionnaire.
Les événements qui se déroulent en Égypte doivent servir d’avertissement: l’explosion révolutionnaire sans précédent du 30 Juin dernier contre le règne des Frères Musulmans a été détournée par les militaires, du fait que le mouvement ouvrier ne disposait pas de sa propre expression politique. L’ex-président de la Fédération égyptienne des syndicats indépendants (EFITU), Kamal Abou Eita, a accepté un poste de ministre du Travail et de l’Immigration dans le nouveau gouvernement post-Morsi. Une fois nommé à son poste, il a proclamé: ‘‘Les travailleurs, qui étaient champions de la grève sous l’ancien régime, doivent maintenant devenir champions de la production’’! Les erreurs de certains dans la gauche égyptienne à avoir offert une caution à la prise du pouvoir par l’armée ont été utilisées pour désarmer politiquement les travailleurs et pour attaquer leurs luttes, tandis que les vestiges de l’‘‘Etat profond’’ de l’ère Mubarak, certaines figures-clés de l’ancien régime, les services de sécurité intérieure et les réseaux de patronage de l’ex-parti au pouvoir le NPD font clairement un retour en force sur la scène.
Direction et programme
Ni Ennahda et ses partenaires au sein de la Troïka, ni ‘l’Union pour la Tunisie’, ni aucune des variations islamistes du type salafiste ou djihadiste, n’ont un programme sérieux de transformation économique à offrir aux masses. Tous utilisent différentes cartes idéologiques afin de sanctifier une société fondée sur des privilèges matériels considérables attribués à une poignée de gens, tandis que la majorité de la population doit accepter une spirale incessante vers le bas.
La gauche marxiste doit offrir un chemin visant à couper court aux divisions ‘‘religieux / non-religieux’’, à travers la construction d’une lutte commune de tous les travailleurs et les pauvres visant à renverser le capitalisme. Une telle lutte doit intégrer la défense de droits politiques égaux pour tous, y compris le droit de chacun et de chacune à pratiquer sa religion, ou de n’en pratiquer aucune, sans ingérence de l’État.
Les deux grèves générales de masse anti-gouvernementales qui ont déjà eu lieu en Tunisie cette année , parmi beaucoup d’autres exemples, ont démontré qu’il existe une volonté incontestable parmi la classe ouvrière, la jeunesse et les pauvres, de se battre pour un véritable changement révolutionnaire, et, pour commencer, de faire tomber le gouvernement actuel– à condition qu’il existe une direction digne de ce nom pour animer leur lutte. Mais c’est bien là que le bât blesse.
Comme un article de l’agence de presse ‘Reuters’ le mentionnait récemment, en faisant des références aux événements en Egypte ‘‘L’Union générale tunisienne du travail (UGTT ) n’a ni chars, ni ambitions militaires, mais elle peut se targuer d’une armée d’un million de membres qui éclipse les partis politiques, maintenant à couteaux tirés à Tunis.’’
Pourtant, l’image assez révélatrice de manifestants tunisiens scandant « le peuple veut la chute de l’Assemblée nationale constituante », tandis que l’UGTT plaidait officiellement pour son maintien, a mis en évidence le contraste évident entre les «solutions» offertes par la direction nationale de l’UGTT et le sentiment qui règne parmi les masses.
Plutôt que de jouer le rôle embarrassant de conciliateurs entre le parti au pouvoir et l’opposition, et de réanimer sans cesse les tentatives futiles au ‘dialogue national’, rôle que les principaux leaders de l’UGTT ont joué allégrement dans le cours des dernières semaines, ces mêmes dirigeants auraient pu utiliser -et pourraient toujours utiliser- la force massive et influente de leur syndicat pour paralyser le pays du jour au lendemain et balayer d’un revers de la main le gouvernement et l’Assemblée Constituante. C’est ce que les partisans du CIO en Tunisie n’ont eu cesse de mettre en avant.
Un tel geste audacieux, déployant la pleine puissance du mouvement ouvrier organisé, couplée avec la mise en place de comités d’action élus démocratiquement et structurés dans tout le pays, pourrait servir de base pour contester et renverser le pouvoir en place et le remplacer par une Assemblée Constituante révolutionnaire, véritable Parlement des masses opprimées, basée sur la puissance et l’organisation du mouvement révolutionnaire dans tous les recoins de la Tunisie: dans les rues, dans les usines et les lieux de travail, dans les écoles et les universités, dans les quartiers, etc
Un gouvernement révolutionnaire des travailleurs, des jeunes et des pauvres pourraient couronner ce processus, et entamer ainsi la transformation de la société selon les désirs de la majorité de la population, en nationalisant les secteurs-clés de l’économie, afin d’élaborer une planification rationnellement organisée de la production pour répondre aux besoins sociaux de tout un chacun.
A cet effet, la reconstruction d’un front unique, sur la base d’une perspective de classe indépendante, armée d’un véritable programme socialiste et internationaliste, est à notre avis la seule voie vers la victoire révolutionnaire.
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Ecole d'été du CIO : Construire des partis révolutionnaires pour un réel changement, pour le socialisme démocratique
Toute une semaine durant, sous la chaleur de juillet, près de 400 marxistes issus de 33 pays se sont réunis pour livrer des analyses et rapports de la situation en Afrique du Sud, au Brésil, aux Etats-Unis, en Grèce, en Tunisie,… afin de mieux appréhender l’image complexe d’un monde entré dans une période de révolution et de contre-révolution. La faillite du capitalisme a conduit, dans certains pays, à des mouvements de masse parmi les plus grands de l’Histoire. Le fait est cependant que cela ne s’est pas accompagné d’un retour des idées socialistes à la même échelle.
Par Els Deschoemacker
Dire que le mouvement des travailleurs, au niveau mondial, n’était pas préparé à faire face à la crise la plus profonde du système capitalisme depuis les années ‘30 est un euphémisme. Après la chute du stalinisme et suite à deux décennies de pensée unique néolibérale, l’audience pour les analyses et les idées basées sur le marxisme a été considérablement réduite. La lutte pour une société socialiste démocratique a été largement considérée comme étant devenue inadéquate au monde moderne et rejetée par les partis de gauche et les syndicats, qui se sont concentrés sur ce qui était réalisable au sein du capitalisme.
Cela a laissé des traces. La crise a donné lieu à des mouvements de masse d’une échelle sans précédent et à une atmosphère anticapitaliste généralisée, sans que cela n’ait été accompagné d’une perspective claire quant à l’alternative à opposer au système actuel et à la force indépendante de la classe des travailleurs. Cela a entraîné beaucoup de confusion, de paralysie et de défaites, qui peuvent temporairement faire reculer le processus révolutionnaire.
En Egypte, par exemple, le mouvement de masse connaît actuellement une phase très importante, mais dramatique. L’absence de toute réponse indépendante du mouvement des travailleurs dans l’opposition à Morsi a ouvert la voie au coup d’Etat militaire, dont l’objectif essentiel et de faire dévier la révolution. Le processus est actuellement en grand danger, avec le risque de le voir dévier dans une violence sectaire.
En Grèce, en dépit des nombreuses grèves générales et de la grande volonté de lutter, le désarroi est profond face à l’application ininterrompue des diktats du marché. Dans d’autres pays la profonde colère qui émerge dans la société a donné lieu à un soutien à diverses forces populistes ou à un sentiment antiparti.
Toutes ces évolutions constituent une école importe pour les masses, inévitable face au recul idéologique de ces dernières décennies. Ces mouvements donnent toutefois un aperçu de l’immense potentiel de la force qui est celle de la classe ouvrière, mais illustrent que, seules, les protestations de masse ont leurs limites.
Mais la conscience des masses peut effectuer de grands bonds en avant, comme on peut le constater avec l’ouverture grandissante pour les idées socialistes aux USA, sans que la classe des travailleurs n’y soit encore largement entrée en mouvement.
En Afrique du Sud, le massacre de Marikana, l’an dernier (34 grévistes avaient été abattus par la police) a conduit à une nette rupture entre le mouvement ouvrier et le parti au pouvoir, l’ANC. Le développement rapide d’un nouveau parti large de gauche (le WASP), sous la direction de notre section dans le pays, montre quel écho peut recevoir l’appel pour la construction de nouveaux partis de masse pour les travailleurs. Les sentiments antipartis peuvent rapidement disparaître, pour autant qu’une alternative combative soit présente, un parti de lutte dont les mots et les actes prennent la défense des travailleurs et de leurs familles.
En Grèce, l’austérité n’est pas rejetée, elle est vomie. Tous les sondages mettent en avant une majorité en faveur de mesures socialistes comme le refus de rembourser la dette ou la nationalisation des banques et des autres secteurs-clés de l’économie. Faut-il rester à l’intérieur de l’UE à tout prix ? La réponse est un NON massif. Faut-il une grève générale à durée indéterminée ? La réponse est un OUI écrasant !
Ces exemples illustrent qu’une conscience révolutionnaire peut se développer et qu’un grand potentiel révolutionnaire est présent dans la situation objective actuelle. Le principal obstacle auquel nous faisons face est l’absence d’une direction largement reconnue s’appuyant sur ce potentiel pour le concrétiser en un mouvement pour un changement de société. En Grèce toujours, le principal parti de la gauche radicale, Syriza, semble évoluer dans la direction opposée.
Ce type d’erreur peut temporairement ralentir le développement d’une conscience socialiste, ou conduire à des pertes importantes, mais ne détruira en aucun cas le potentiel révolutionnaire – tout au plus ces erreurs rendent le processus révolutionnaire plus lent. Nous avons face à nous une véritable lutte contre la montre pour construire des partis révolutionnaires capables de généraliser l’expérience de la lutte de classe et de proposer une stratégie pour une transformation socialiste de la société. Participez-y vous aussi et rejoignez le PSL !
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La crise économique débarque en Asie du Sud
Rapport de l’école d’été du CIO
Jusqu’à récemment, les économies “émergentes” des BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine, Afrique du Sud) croissaient encore à un rythme soutenu. La Chine semblait particulièrement défier les lois de la gravité économique ou plutôt, les lois de la crise, typiques de toute économie capitaliste. On a entendu toute une série de gens nous dire que ces pays pourraient maintenir l’économie à flot et sauver le monde de la crise qui continue à ravages l’Europe et les États-Unis. L’effondrement tragique du taux de croissance au Brésil (qui est passé de 7,5 % en 2010 à… 0,9 % en 2012), et la révolte de masse des travailleurs et des jeunes de ce pays, ont mis un terme à cette illusion.
Clare Doyle, Comité pour une Internationale Ouvrière
Le ralentissement actuel en Chine, dont l’économie “surboostée” lui avait permis de ravir au Japon sa place de deuxième PIB mondial (après les États-Unis), est maintenant source de gros ennuis pour la clique dirigeante en Chine et partout dans le monde. La Chine est très fortement impliquée dans de grands projets de capitalisation dans toute une série de pays, pour des raisons économiques aussi bien que stratégiques ; mais la baisse de ses exportations a déjà un effet sur les économies des pays dans lesquels la Chine a délocalisé certaines opérations industrielles de base et à partir desquels elle tire les matières premières qui alimentent son industrie.
L’Inde – qui est la troisième plus grande économie d’Asie, et qui ne s’est que récemment ouverte au marché mondial – a vu son taux de croissance chuter, de 10,5 % en 2010 à 3,2 % en 2012. La croissance de l’économie de la Malaisie, qui est extrêmement dépendante du commerce avec la Chine, a ralenti pour n’atteindre que 4,1 % cette année. La plupart des pays asiatiques ont au départ bénéficié de la baisse des investissements productifs (càd, profitables) qui s’est produite ailleurs dans le monde. D’énormes quantités de capitaux “dormants”, qui ne généraient que peu ou aucun intérêt dans les banques des pays pratiquant l’assouplissement quantitatif (l’impression d’argent), se sont déversées sur l’Asie en tant qu’“investissements” spéculatifs.
Le Financial Times commentait ainsi que les marchés obligataires en monnaies locales « ont beaucoup prospéré du fait que l’effondrement financier mondial de 2008 a libéré une masse d’argent facile […] qui a quitté les États-Unis et l’Europe. Que se passe-t-il lorsque les taux d’intérêts commencent à monter, surtout aux États-Unis ? Combien de cet argent va se retourner et prendre ses jambes à son coup ? ». Près de 50 % des bons d’État de l’Indonésie appartiennent à des étrangers ; c’est le cas aussi de 40 % des bons d’État de la Malaisie et des Philippines.
Allons-nous maintenant assister à une nouvelle “crise asiatique”, aussi grave, voire plus grave encore, que celle de 1997-98 ? Les gouvernements d’Asie du Sud et du Sud-Est (ces deux régions, qui s’étendent de l’Afghanistan à l’Indonésie, représentant ensemble 33 % de la population mondiale) parviendront-ils à éviter la tempête à venir ?
Un précédent historique
Au cours de la “crise asiatique” de 1997-99, on a vu plonger les devises de pays comme la Thaïlande, tandis que des centaines de milliers d’emplois passaient à la moulinette. Les soulèvements révolutionnaires contre la politique d’austérité imposée par le FMI ont notamment, en Indonésie, renversé le dictateur honni, Suharto. En Malaisie, un mouvement de masse qui réclamait des réformes démocratiques a menacé le long règne du Front national (BN), dominé par l’Organisation nationale des Malais unis (UMNO). À la fin 1997, la Corée du Sud a connu de nouvelles grèves générales contre les attaques néolibérales, semblables à celles qui se sont produites encore récemment.
La fois passée, le FMI avait envoyé des prêts massifs à tous ces pays en proie à la crise afin d’éviter un effondrement social et une révolution. Dans le cas de la Corée du Sud, le montant des prêts s’élevait à 57 milliards de dollars. Aucun de ces mouvements de résistance n’a pu former une voix et une ligne politique capable d’accomplir les processus révolutionnaires qui avaient vu le jour. En Indonésie, certains groupes de gauche ont entretenu des illusions dans le caractère “démocratique de Megawati Sukarnoputri, qui, une fois au pouvoir, a joué son rôle de gérante du grand capital national et international, en alliance avec les généraux de l’ancien régime. En Malaisie, Anwar Ibrahim, le très populaire dirigeant du mouvement “Reformasi”, était un ancien membre du gouvernement UMNO avec Mahathir Mohammed. En tant qu’économiste néolibéral éduqué aux États-Unis, il ne voulait pas (et ne veut toujours pas) d’un mouvement qui pourrait aller jusqu’au bout et organiser la fin du capitalisme.
Le CIO avait appelé au soutien total à ces mouvements pour les droits démocratiques et pour la liberté, et avait cherché à s’y impliquer autant que possible, mais tout en expliquant – suivant en cela le concept de la “révolution permanente” tel qu’imaginé par Trotsky – la nécessité de débarrasser ces pays néocoloniaux de la domination du capitalisme multinational aussi bien que national. Il fallait y mener une politique socialiste claire, basée sur la compréhension du rôle de la classe des travailleurs qui seule, avec le soutien des pauvres des villes et des campagnes, peut établir une véritable démocratie et transformer les vies de l’écrasante majorité de la population dans cette région.
Tandis que le vent froid de la récession mondiale a maintenant atteint les pays asiatiques, de pareils mouvements tout aussi tumultueux pourraient voir le jour. Étant donné le fait que les économies des divers pays du monde sont encore plus interconnectées aujourd’hui qu’alors, l’Inde et le Pakistan, qui avaient évité le pire de la crise de 1997-98, pourraient à présent se retrouver complètement submergés. Le FMI ne va certainement pas pouvoir intervenir de manière aussi importante qu’il l’a fait à l’époque pour sauver les gouvernements des soulèvements révolutionnaires. Les premières explosions de colère et de désespoir pourraient s’élargir pour aboutir sur un mouvement généralisé au sein duquel l’ensemble des travailleurs et des jeunes pauvres se mettraient à chercher des solutions révolutionnaires. En ce moment, aucun pays asiatique ne peut prétendre avoir un gouvernement stable, confiant et viable.
L’Inde
L’Inde est caractérisée par « l’économie de marché économique avec la moins bonne performance de l’année » (The Guardian, 7 aout), vu le fait que sa croissance s’est arrêtée au second trimestre. « Les investisseurs craignent une répétition de la crise qui avait frappé l’Inde en 1991 ».
Misère de masse et privations sont deux termes synonymes en Inde : « Quatre-cent millions d’Indiens n’ont pas l’électricité … La moitié des Indiens défèquent à l’air libre … Les taux d’immunité pour la plupart des maladies sont inférieures à ceux d’Afrique subsaharienne … Un enfant indien a deux fois plus de chances de souffrir de la faim qu’un enfant africain (ils sont 43 % à en souffrir en Inde) … Le budget de la santé publique s’élève à à peine 39 $ par personne et par an, alors qu’il est de 203 $ par personne par an en Chine, et de 483 $ au Brésil » (The Economist, 29 juin 2013)
La majorité des femmes indiennes subissent une souffrance et des difficultés sans nom. Le viol collectif et le meurtre d’une étudiante à New Delhi en décembre dernier a provoqué un large mouvement de protestation en Inde comme à l’échelle internationale. Il est possible que des mesures soient introduites afin de tenter de sévir contre les criminels sexuels, mais il faut se rendre compte que la violence contre les femmes bénéficie du soutien de nombreuses vieilles pratiques et croyances. Les catastrophes naturelles sont aggravées par la destruction irresponsable de l’environnement, comme on l’a vu avec les glissements de terrain meurtriers dans l’Uttarakhand (petit État de l’Himalaya, frontalier du Népal et du Tibet (sous domination chinoise), 10 millions d’habitants) en juin de cette année. L’état des services de secours d’urgence est lamentable, ce qui cause encore plus de morts et de souffrances.
Le gouffre qui s’étend entre la masse de la population indienne, forte de près de 1,3 milliards de gens, et la minuscule poignée de super-riches, s’élargit de plus en plus. Quelques individus issus de riches dynasties familiales ont amassé de vastes fortunes. Selon le magazine Forbes, Mukesh Ambani, patron de Reliance Industries et le 22ème homme le plus riche du monde, possède une fortune de 20 milliards de dollars (10 000 milliards de francs CFA, voir ici les photos de son yacht qui a couté 10 milliards de francs) ; le magnat de l’acier Lakshmi Mittal pèserait quant à lui 16 milliards de dollars (8000 milliards de francs). Une nouvelle classe moyenne s’est développée dans certaines villes, et fournit un certain marché pour les voitures et les produits de semi-luxe.
« Pour les riches, le seul problème est leur tour de taille », comment The Economist (06/07/13). « Transportés partout par leurs chauffeurs, dispensés de toute corvée quotidienne par leur armée de serviteurs, ils sont devenus une race à part, corpulente, qui se distingue clairement de leurs compatriotes maigrelets ». (Cela nous rappelle les vieilles caricatures du gras capitaliste, alors qu’au même moment, aujourd’hui aux États-Unis, ce sont les travailleurs qui sont obèses, vu la manière dont on les gave de nourriture bon marché mais d’origine indéterminée).
L’écrasante majorité de la population indienne continue à mener tant bien que mal une existence sordide avec un revenu de misère constamment érodé par l’inflation galopante. Les couches moyennes, qui ont pu bénéficier d’un certain développement de l’économie, voient déjà leurs espoirs brisés par le ralentissement de l’économie.
Le gouvernement de Delhi dirigé par le parti du Congrès est ravagé par l’indécision et la corruption. Des régions entières du pays échappent au contrôle du gouvernement, où les forces de guérilla naxalites (maoïstes) se sont rendues populaires en chassant les propriétaires terriens rapaces et les multinationales. Alors que des élections sont prévues en 2014, le premier ministre Manmohan Singh vacille entre la pression de l’extérieur, qui veut le forcer à mettre en place des “réformes” néolibérales, et la pression d’en-bas.
Il y a maintenant même la possibilité de voir revenir au pouvoir le parti nationaliste de droite largement discrédité, le BJP (Bharatiya Janata Party, Parti du peuple indien), dirigé par Narendra Modi. Modi est toujours détesté par des millions de gens qui le surnomment le “boucher du Gujarat” (État frontalier du Pakistan, 60 millions d’habitants) pour y avoir été responsable du meurtre de plus de 2000 musulmans en 2002. Dans de nombreux États, son parti se vautre dans la corruption. Mais comme le disait le Financial Times : « Si l’impression d’un vide étatique donnée par le Congrès continue comme ça, de plus en plus de gens seront tentés de prendre des risques avec lui » (10/06/13)
Et cela, dans un pays qui a connu en février la plus grande grève générale de l’histoire de l’humanité – plus de cent millions de travailleurs étaient partis en grève pendant deux jours. Les grévistes réclamaient entre autres la fin de la cherté de la vie et un salaire décent pour tous. (Le roupie indien a chuté de 15 % rien qu’entre mai et juillet, ce qui a fortement nuit aux revenus déjà faibles).
Les partis “communistes” de masse, jouissent toujours d’un certain soutien parmi les travailleurs et même parmi les paysans. Cependant, le “Parti communiste indien (marxiste)” a perdu énormément de plumes depuis qu’il a perdu le pouvoir au Bengale occidental (province de Calcutta/Kolkata, à la frontière avec le Bangladesh ; 100 millions d’habitants), où il régnait depuis des décennies. Il a souffert électoralement à cause des attaques brutales menées par lui sur le niveau de vie des travailleurs et des paysans, sacrifiés sur l’autel du capitalisme indien comme étranger. Il sera difficile – bien que pas impossible, en l’absence de tout autre parti des travailleurs de masse – pour le PCI(M) de regagner un soutien là ou ailleurs, tant qu’il adhère à la doctrine stalinienne traitre des “deux stades” – selon laquelle il faut d’abord installer le capitalisme avant de commencer toute lutte pour le socialisme.
Le Pakistan
La crise quasi permanente qui constitue la vie quotidienne au Pakistan illustre bien le besoin urgent pour les travailleurs de s’en prendre directement au féodalisme et au capitalisme en même temps. La vie personnelle tout comme la vie politique est oppressée par les coupures de courant, les attentats terroristes, l’effondrement des services publics et la paralysie du gouvernement.
Le Parti du peuple pakistanais (PPP), autrefois si puissant, est entré dans une période de déclin qui sera peut-être terminale. La seule raison pour laquelle son gouvernement corrompu et inapte, sous la direction de M. Zadari dit “20 %” (une amélioration depuis son titre précédent de “M. 10 %”), est parvenu à arriver jusqu’au bout de son mandat, est l’inertie affichée par toutes les autres forces. L’armée, qui contrôle en coulisses des pans entiers de l’économie et de la société, n’est pas intervenue non plus pour reprendre le pouvoir direct. Cela ne veut pas dire qu’elle ne le fera pas à nouveau dans le futur, vu le développement de la crise politique et sociale.
Le PPP, dans lequel tant de travailleurs et de jeunes avaient placés tous leurs espoirs au début des années ’80, a maintenant perdu la plupart de son autorité. Le gouvernement de Nawaz Sharif est confronté à des problèmes impossibles à résoudre : un État en faillite, une économie en crise, le terrorisme islamiste de droite, et de puissantes forces centrifuges qui menacent de faire éclater le pays.
L’économie pakistanaise est dangereusement instable et fragile. Le nouveau prêt du FMI, d’une valeur de 5,3 milliards de dollars, est lié à l’exigence d’une “discipline financière”, càd, aucun subside pour les pauvres. La priorité est la réforme du secteur du transport de l’électricité, pour remédier aux coupures de courant qui causent maintenant chaque année à l’économie nationale des pertes estimées à 2 % du PIB.
Il est fort improbable que le nouveau gouvernement puisse y faire quoi que ce soit. Les deux-tiers de l’électorat vivent dans les zones rurales, où des propriétaires féodaux ont encore pour ainsi dire droit de vie ou de mort sur des millions de paysans. Ce sont aussi eux qui décident du résultat des élections. La lutte héroïque de Malala Yousafzai (une adolescente de 16 ans, déjà victime de plusieurs tentatives d’assassinat dont une balle dans la tête pour son blog anti-talibans) contre les talibans qui voulaient empêcher les filles de s’inscrire à l’école, leur a par la même occasion permis de redorer un peu leur blason (Yousafzai est le nom d’une grande famille noble pachtoune, une ethnie qui vit à la fois au Pakistan et en Afghanistan). Mais la lutte contre les féodaux et contre les autorités, qui ne peuvent assurer une éducation complète et gratuite des garçons et des filles à la ville et à la campagne, est loin d’être terminée.
Néocolonialisme et gouvernements faibles
Dans la plupart des sociétés asiatiques, beaucoup de droits démocratiques de base n’ont jamais été établis. Les classes capitalistes émergentes n’ont pas été assez fortes pour accomplir une réforme agraire en profondeur ni pour chasser les restes du féodalisme. En Chine, il a fallu l’État prolétarien déformé de Mao Zedong pour accomplir cette tâche. Ce qui avait été accompli au cours des siècles précédents par les classes bourgeoisies lors de leurs révolutions en Angleterre, en France et ailleurs, reste toujours inachevé dans la plupart des pays asiatiques.
Tout comme sur les autres continents, la plupart des nations asiatiques ont été créées artificiellement par des lignes tracées sur des cartes après (ou avant) des années de pillage et de destructions meurtrières. Des nations entières ont été réduits au statut de “minorité ethnique” en Birmanie, en Thaïlande, au Sri Lanka. Seuls des partis des travailleurs à la tête de gouvernements socialistes seront à même de résoudre les questions des droits des minorités nationales et d’entamer la tâche de bâtir des confédérations mutuellement coopératives de nations, à l’échelle sous-régionale.
Cela fait des décennies que le règne direct exercé par l’impérialisme a pris fin partout en Asie. Cette domination a été remplacée par des puissances régionales telles que la Chine et l’Inde, qui luttent pour des “concessions” avantageuses sur le plan stratégique ou économique, comme on le voit au Sri Lanka, en Birmanie, et ailleurs.
Des multinationales géantes fouillent la région à la recherche de marchés, de main d’œuvre bon marché et de maximalisation des profits. Dans la plupart des pays les plus pauvres du monde, le marché des graines, des engrais, des détergents, de la vente, etc. est dominé par des monopoles multinationaux. Unilever effectue ainsi 57 % de ses ventes sur les “marchés émergents”, Colgate 53 % et Procter & Gamble 40 % (Financial Times 29/07/13).
Une campagne contre l’invasion du marché de la distribution indienne par Walmart organisée par le PCI(M) a obtenu une semi-victoire. Il reste à voir si la mise en échec de Walmart sera définitive. Les “communistes” du PCI(M) ont juré de rester vigilants, mais même des campagnes de masse ne peuvent obtenir que des victoires temporaires tant que les forces du “libre marché” capitaliste déterminent l’économie.
Les géants du textile et de la chaussure que sont Primark, Gap, Reebok et Adidas tirent d’énormes profits du travail asiatique. Le Bangladesh reçoit 20 milliards de dollars par an de ses exportations de textiles fabriqués par des travailleurs payés 38 $ par mois (20 000 francs CFA). La fureur suscitée par les conditions de travail dans des entreprises telles que le complexe Rana Plaza à Dhaka (la capitalie), qui s’est effondré cette année en tuant 1300 travailleurs, s’est exprimé dans les rues par des manifestations de masse et par des grèves.
À l’échelle internationale, on verse des larmes de crocodile, puis on parvient à des accords entre les revendeurs, les organisations patronales, les ONG et les fédérations internationales de syndicat comme IndustriALL. Même des organisations modérées comme “War on Want” (Guerre à la pauvreté, une ONG britannique) se plaignent du fait que de tels accords ne mènent jamais à rien et ne permettent jamais de garantir un salaire décent, une réduction des heures de travail ou de meilleures conditions de vie pour les millions de travailleurs de l’industrie textile partout en Asie du Sud et du Sud-Est. Ces accords ne permettent pas non plus l’émergence de véritables organisations de travailleurs combatives.
Certains des géants les plus connus de l’industrie automobile possèdent aussi des usines en Asie. Ils forcent leurs travailleurs à accepter des salaires et des conditions qui ne seraient pas tolérées dans aucune autre région du monde. Mais en même temps, ils ont créé une nouvelle génération de jeunes combattants de classe qui ont organisé des grèves très importantes, comme celle de Maruti, près de Delhi (Maruti est une société industrielle appartenant à Suzuki ; les travailleurs demandaient le triplement de leur salaire et des logements ; le directeur des ressources humaines est décédé dans un incendie au cours de cette grève ; l’usine a été fermée pendant presque un an ; le conflit est toujours en cours).
Les magnats “locaux” tels que les Tata, les Mittal, les Ambani, etc. se sont tellement enrichis depuis l’“indépendance” de leur pays, sur le dos de millions de travailleurs frappés par la pauvreté, dans leur pays comme en-dehors que leurs entreprises d’acier, d’automobiles et de mines parcourent à présent le monde entier, dans leur éternelle quête de profits.
Démocratie ?
Un simple regard sur n’importe quel pays d’Asie du Sud nous confirmera l’immense, l’infranchissable “déficit démocratique”, comme les commentateurs bourgeois le disent. Au Royaume-Uni, il y a eu tout un débat afin de savoir si la réunion des chefs de gouvernement du Commonwealth pouvait ou non avoir lieu comme prévu au Sri Lanka cette année (ce qui laisserait le Sri Lanka présider l’organisation du Commonwealth pendant les deux prochaines années !). La presse à cette occasion signalait le fait que le seul élément de démocratie présent au Sri Lanka est l’organisation d’élections. Le Sri Lanka serait le pays le plus dangereux au monde pour les journalistes, selon l’ONG “Reporters sans frontières”. L’armée continue à saisir et à “lotir” les terres des Tamouls dans le nord du pays, tandis que son ministre de la Défense, Gotabaya Rajapakse (frère du président Mahinda Rajapakse, du ministre de l’Économie Basil Rajapakse et du président de l’Assemblée nationale Chamal Rajapakse), aime à déclarer que « Les droits de l’homme ne sont pas pour nous ».
La guerre civile au Sri Lanka a été noyée dans le sang de dizaines de milliers de Tamouls par la dictature népotiste chauviniste cingalaise de Mahinda Rajapakse. Mais aucune des grandes puissances qui luttent pour l’opportunité de faire des investissements très profitables et pour l’influence politique au Sri Lanka – notamment la Chine et l’Inde – n’est embarrassée par le manque de droits démocratiques dans le pays.
Cette année en juin, nous avons vu la première grève générale dans le pays, bien que partielle, depuis des années ; c’est là un signal d’avertissement au régime apparemment tout puissant. Un gouvernement confiant dans son avenir n’aurait pas besoin de se reposer si fortement sur l’usage de l’armée, sur la censure de la presse ou sur la traque des opposants et des éléments minoritaires.
Même dans “la plus grande démocratie du monde” – l’Inde – les votes lors des élections sont achetés et vendus. Toutes sortes de “cadeaux électoraux” – télévisions, ordinateurs, téléphones portables, etc. – sont distribués par les partis d’opposition comme du pouvoir lors des élections nationales ou régionales. De véritable fiefs de la taille de pays entiers sont détenus par des Ministres-en-chef et par leurs amis. La promesse d’éliminer l’immonde système des castes, reprises en chœur par tant de dirigeants politiques, reste irréalisée, et les minorités ethniques voient leurs terres les plus précieuses se faire arracher par des gouvernements ou des cartels qui œuvrent main dans la main (sauf là où des mouvements de masse déterminés sont parvenus à bloquer leurs projets).
Le “second monde”
La Malaisie, pays d’Asie du Sud-Est, parfois considérée comme faisant partie du “second” plutôt que du “tiers” monde, comprend trois principaux groupes raciaux (Malais, Chinois, Indiens). Le gouvernement du Barisan Nasional (Front national), qui se base sur la majorité malaise, prétend avoir à nouveau gagné les élections en mai, bien qu’il ne détienne maintenant plus la majorité des deux tiers qui lui permettait d’effectuer des modifications constitutionnelles.
Les électeurs “chinois” (càd, d’ethnie “chinoise”, et non pas de nationalité chinoise), qui constituent un quart du total des Malaisiens, se sont écartés du BN pour protester contre la continuation de sa politique pro-malais. La majorité des électeurs “indiens” malaisiens ont en général voté pour l’opposition de la Pakatan Rakyat (Alliance du peuple).
Au cours du mois qui a précédé les élections nationales, on a tout d’un coup vu tomber un “déluge” d’allocations sociales pour les familles pauvres, d’un montant total de 2,6 milliards de dollars. D’autres cadeaux ont été faits pour l’ensemble des électeurs. Malgré cela, l’alliance au pouvoir, dirigée par le BN, a sans nul doute été vaincue ; mais elle a affirmé sa victoire, malgré les très nombreux rapports de fraude électorale partout dans le pays. (Même le contrat pour l’encre nécessaire au vote a été donné à une entreprise qui appartient à un membre de l’alliance au pouvoir !)
Des jeunes radicalisés et en colère sont immédiatement descendus dans les rues pour déclarer le gouvernement illégitime ; certains de leurs dirigeants ont été arrêtés. Le dirigeant de l’opposition – ce même Anwar Ibrahim qui avait dirigé le mouvement “Reformasi” en 1997 – a condamné la fraude électorale et a exigé une enquête par les tribunaux. Mais il n’a à aucun moment demandé à ce que le gouvernement laisse le pouvoir et à manifester pour cela. Petit à petit, le mouvement des jeunes s’est essoufflé puis a disparu.
Il faut une nouvelle force politique en Malaisie, comme partout ailleurs dans la région, afin de canaliser la colère des jeunes et des travailleurs en une lutte pour une alternative socialiste. Le CIO en Malaisie, dans son journal “Solidarité ouvrière” présente une longue liste de revendications démocratiques liées à d’autres portant sur les salaires, le logement, les emplois pour les jeunes, la nationalisation des banques et des grandes entreprises sous contrôle et gestion démocratique par les travailleurs. Ce journal est vendu aux manifestations, sur les marchés de nuit, devant les entreprises – que ce soit des banques ou des usines – et dans les quartiers ouvriers.
Quel avenir
Lorsque les économies asiatiques seront soumises à la pleine force de la tempête économique qui approche, tous les partis politiques de la région seront soumis à l’épreuve. Ceux qui prétendent représenter les travailleurs, mais ne sont pas prêts à mener une lutte jusqu’au bout et sans compromis contre la domination du capitalisme et de l’impérialisme, perdront leur soutien. Ces vieux partis seront rejetés au cœur de la lutte de classes. Le développement d’une nouvelle force prolétarienne, basée sur un programme de classe combatif, est la tâche principale des socialistes en Inde, au Pakistan, en Malaisie, au Sri Lanka et dans toute la sous-région.
Des évènements terribles se préparent pour l’Asie du Sud et du Sud-Est ; c’est en particulier le cas pour les pays plus petits comme la Birmanie, le Népal, le Vietnam ou le Cambodge. Toutes les vieilles “certitudes” seront remises en question, et c’est au CIO que reviendra l’immense responsabilité de développer la capacité de lutte de la classe des travailleurs à travers toute la sous-région.
Comme Trotsky l’a écrit dans le programme fondateur de la Quatrième Internationale, rédigé il y a 75 ans : « Bons sont les méthodes et moyens qui élèvent la conscience de classe des ouvriers, leur confiance dans leurs propres forces, leurs dispositions à l’abnégation dans la lutte » (Programme de transition). Les quelques-uns qui comprennent aujourd’hui la nécessité d’un programme complet afin d’effectuer une transformation socialiste en profondeur de la société ont pris l’habitude de « nager contre le courant ». Mais la vague de soulèvements de masse en Asie et ailleurs dans le monde, contre le capitalisme sous toutes ses formes, les porteront « à la tête du flux révolutionnaire », comme l’écrivait encore Trotsky.
Que ce soit le régime chancelant de Yudyohono en Indonésie, l’alliance instable au Pakistan, le gouvernement mou de Singh en Inde, le pouvoir illégitime de Najib Raziv en Malaisie ou la dictature de verre au Sri Lanka, aucune de ces cliques corrompues ne donne la moindre apparence de stabilité pour la sous-région. Loin de là. Les tempêtes qui pointent à l’horizon les verront remplacés non par un ni deux, mais par toute une série de gouvernements de crise, jusqu’à ce qu’un parti armé d’un programme socialiste révolutionnaire parvienne à saisir les rênes du pouvoir et à inspirer une vague révolutionnaire à travers toute l’Asie et au reste du monde.