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  • Venezuela : Comment les choses ont-elles pu mal tourner ?

    Quand Chavez est arrivé au pouvoir au Venezuela en 1998, le pays était un symbole du renouveau des luttes contre le néolibéralisme. Ce fut aussi le premier pays ou l’idée du socialisme a été remise à l’ordre du jour. Mais aujourd’hui, 20 ans plus tard, le pays est plongé dans la crise. Environ 10% de la population a fui le régime tandis que l’inflation est vertigineuse et que les médicaments et la nourriture manquent. La droite, qui en règle générale n’a que faire du sort des pauvres, se frotte les mains : ‘‘Vous voulez le socialisme ? Allez au Venezuela !’’

    Des débuts prometteurs

    L’arrivée de Chavez au pouvoir constitua un développement positif important pour les masses vénézuéliennes. Entre 1998 et 2009, la pauvreté a diminué de 43%, le taux de mortalité infantile a baissé de 35% et l’espérance de vie moyenne a augmenté de presque 2 ans. La consommation d’aliments par personne a augmenté de 25%. Des efforts considérables ont été accomplis pour augmenter le nombre de personnes ayant accès à l’eau ou à l’énergie. Le chômage a diminué : de 11% en 1998, il passa à 16,8% en 2003 à cause du lock-out patronal, mais diminua jusqu’à 7,5% en 2009 en grande partie grâce à la création d’emplois dans le secteur public. Un million de personnes ont pu sortir de l’analphabétisme et des millions ont pu voir un médecin pour la première fois de leur vie.

    A ses débuts, Chavez ne parlait que de ‘‘capitalisme à visage humain’’. Pour la classe dominante et l’impérialisme américain, c’était déjà de trop. La perspective d’un changement pouvant faire tâche d’huile leur était insupportable. Les tentatives de déstabilisation du nouveau régime n’ont pas manqué, parmi lesquelles la tentative de coup d’État de 2002 et le ‘‘lock-out’’ patronal de 2002-2003. Les actes de sabotage économique n’ont pas manqué pour créer des pénuries tandis que la propagande médiatique tournait à plein régime contre le nouveau gouvernement.

    Une seule chose a mis en échec toutes ces manœuvres : la réaction spontanée des masses populaires. Cela a non seulement vaincu toutes ces tentatives de contre-révolution, mais cela a aussi donné un nouveau souffle au processus révolutionnaire. Poussé par les masses, Chavez a commencé à ouvertement parler de la nécessité de construire le ‘‘socialisme du 21ème siècle’’ (pour la première fois début 2005). Il a par la suite également lancé le Parti Socialiste Unifié du Venezuela (créé en 2006).

    La force des masses vénézuélienne et la grande augmentation du niveau de conscience de classe dans la société a tellement mis à mal le patronat vénézuélien et ses laquais politiques que beaucoup ont cru qu’ils avaient disparu à jamais. Mais le capitalisme n’ayant pas été vaincu, la menace de la contre-révolution était toujours présente.

    Le retour de la droite

    Si la droite est revenue sur l’échiquier politique et est même parvenue à gagner la sympathie de travailleurs dans les quartiers et les entreprises, c’est en raison des faiblesses et des erreurs de la gauche chaviste. La faute la plus grave étant de vouloir à tout prix faire des compromis et des alliances avec la bourgeoisie qui gardait en mains les rênes du pouvoir économique.

    Dans les faits, le ‘‘socialisme vénézuélien’’, c’est le capitalisme avec une politique d’accroissement de l’intervention étatique. En gros, on a assisté à des créations massives d’emplois dans le secteur public ainsi qu’à l’instauration de réformes sociales véritables sans véritable plan de transformation socialiste de la société. Même les ‘‘nationalisations’’ opérées par le gouvernement étaient plutôt des partenariats public-privé tandis que les ‘‘expropriations’’ n’étaient que rachats d’entreprises par l’État (à un prix souvent supérieur à la valeur réelle de l’entreprise).

    Faute de contrôle démocratique des travailleurs et des usagers sur le secteur public, l’extension du secteur étatique a vu l’essor d’une bureaucratie attachée à ses privilèges. Durant des années, celle-ci a cherché à empêcher la droite de revenir au pouvoir (la bureaucratie vivant sur le dos du mouvement chaviste) mais, de l’autre côté, elle repoussait toute forme de contrôle démocratique sur l’État ou la production, car cela menaçait sa position parasitaire. De plus en plus, la répression a frappé toutes formes de lutte ou de critique.

    Le pays dispose des plus importantes réserves de pétrole au monde. Les exportations pétrolières de la compagnie d’État PDVSA assurent 95% des exportations et 50% du PIB. Mais, la baisse du prix du pétrole a fait chuter les revenus de l’État et exploser le taux d’inflation. Les Vénézuéliens doivent faire la queue pour obtenir la plupart des produits de base de consommation (sucre, huile, médicaments, papier toilette…) et l’État doit pratiquer le rationnement. Le gel des prix a engendré un important marché noir. A cela s’ajoute encore les sanctions économiques des États-Unis.

    Ces derniers mois, le régime a appliqué de très dures coupes budgétaires et salariales et a licencié des milliers de travailleurs des entreprises publiques. Mais la victoire des forces réactionnaires de droite ne résoudra aucun problème des travailleurs. Bien au contraire ! Le putschiste Guaidó est tel un loup vêtu d’une peau d’agneau. Son programme est de permettre aux patrons de prendre leur revanche.
    Cette crise n’est pas celle du socialisme, c’est celle d’un modèle capitaliste instable où une caste de bureaucrates civils et militaires corrompus ont tout fait pour éviter que le processus révolutionnaire aille jusqu’au bout : jusqu’à l’instauration d’une économie démocratiquement planifiée où les secteurs stratégiques de l’économie sont retirés des mains du patronat pour servir la population.

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    [Socialisme 2019] “Venezuela : l’échec du réformisme, pas du socialisme”, atelier de discussion ce samedi 30 mars, de 13h30 à 15h30, lors du week-end Socialisme 2019.

  • Venezuela : Pour une mobilisation massive des travailleurs pour construire un vrai socialisme et mettre fin à la bureaucratie corrompue !

    Le nouveau leader de la droite et de l’extrême droite vénézuélienne, Juan Guaidó (récemment élu président de l’Assemblée nationale contre-révolutionnaire) s’est proclamé président. Il a appelé ses partisans à descendre dans la rue pour renverser le gouvernement de Nicolás Maduro. Immédiatement, les gouvernements les plus réactionnaires d’Amérique latine et du monde entier, avec à leur tête Jair Bolsonaro d’extrême droite (Brésil) et Donald Trump (USA), ont reconnu Guaidó comme “seul président légitime” du Venezuela.

    Déclaration du Comité exécutif d’Izquierda Revolucionaria (section du Comité pour une Internationale Ouvrière au Venezuela)

    Un coup d’état planifié par l’impérialisme et la droite vénézuélienne et internationale

    En lançant toutes sortes de menaces, le secrétaire d’État américain (et ancien directeur de la CIA) Mike Pompeo a exigé que le gouvernement Maduro démissionne immédiatement. “Toutes les options sont sur la table”, a déclaré Trump. Le leader vénézuélien d’ultra-droite a également annoncé à la télévision que “nous sommes très proches du moment pour lequel nous nous sommes battus pendant des années” et a dit à Maduro de démissionner “s’il veut sauver sa vie”. Les gouvernements latino-américains qui se distinguent par leurs politiques réactionnaires et antisociales de même que leur servilité à l’égard de Washington soutiennent avec enthousiasme le coup d’État tout en prétendant cyniquement défendre “la démocratie”.

    Il suffit de voir qui dirige cette “Sainte Alliance” pour comprendre ce qui est en jeu : le président colombien Duque (lié à Urribe et ses narcos-paramilitaires), le président équatorien Moreno (le Judas de la gauche équatorienne), le président Macri (responsable des coupes d’austérité brutales qui ont provoqué le peuple argentin à se soulever et à se battre) ou le président hondurien Juan Orlando Hernández (organisateur d’une fraude électorale avec le soutien de la Maison Blanche l’an dernier et responsable de la répression et du meurtre de dizaines de manifestants). Comme on peut s’y attendre, de l’autre côté de l’Atlantique, la droite et l’extrême droite européennes applaudissent avec enthousiasme, en Espagne avec Pablo Casado du PP, Albert Rivera (Cuidadanos) et les éléments fascistes de Vox en première ligne.

    Guaidó et la droite vénézuélienne tentent de profiter du désespoir et de l’indignation du peuple vénézuélien face à l’effondrement économique et social que connaît le pays. Le PIB et le niveau de vie ont chuté de 50% au cours des quatre dernières années et la situation n’a fait qu’empirer avec des hausses de prix atteignant 1000 % depuis le début de cette année.

    Au moment où nous écrivons ces lignes, des dizaines de milliers de personnes dans différentes parties du Venezuela ont répondu à l’appel de Guaidó de ne pas quitter les rues jusqu’à ce que Maduro démissionne ou que l’armée le fasse tomber, copiant ainsi le scénario du coup d’Etat de droite raté contre Chavez en avril 2002. D’autre part, les partisans du gouvernement qui s’étaient rassemblés sur la Plaza O’Leary de Caracas et d’autres points centraux des grandes villes ont été appelés par Diosdado Cabello, chef du Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV), à se rendre au Palais Miraflores, comme en 2002, et à s’y tenir pour défendre Maduro et lui-même contre une éventuelle attaque de l’opposition.

    Les pactes conclus par le gouvernement avec les capitalistes ont ouvert la voie à la réaction

    La principale différence entre ce coup d’État et celui perpétré contre Chávez en 2002 est que la droite vénézuélienne parasitaire, corrompue et réactionnaire parvient à mobiliser non seulement les jeunes universitaires, les professions libérales et les petits propriétaires appartenant aux classes moyennes, comme ce fut le cas lors du violent « guarimba » qui fit plus de 100 morts entre mars et juillet 2017. Cette fois-ci, un nombre important de jeunes, de chômeurs et même de travailleurs désespérés par la situation économique et la hausse brutale des prix, manifestent à partir des quartiers pauvres à l’appel de la droite et de l’extrême droite.

    Depuis le mois d’août 2018, lorsque le gouvernement de Maduro a appliqué le Plan de réactivation économique et a dévalué le bolivar en établissant une nouvelle monnaie, le bolivar souverain (60 BS équivalent à 1 dollar), l’hyperinflation – qui était déjà hors de contrôle avant cela – a atteint des niveaux catastrophiques. Avant le début de cette dernière crise, le dollar s’échangeait contre 3.000 bolivars souverains ! Certains analystes prévoient une inflation à six ou sept chiffres pour cette année.

    Une simple consultation dans une clinique privée, ce à quoi sont obligés non seulement les couches intermédiaires mais aussi de nombreux travailleurs en raison de l’effondrement du service public de soins de santé, a grimpé en quelques jours de 2.000 à 15.000 BS. La compagnie nationale de téléphonie mobile Movilnet a relevé ses tarifs les plus bas de 169 à 1 300 Bs ! Tout en acceptant ces augmentations, voire en les appliquant aux services et produits qui dépendent des entreprises publiques, la seule réponse des autorités a été une “triomphaliste” nouvelle augmentation salariale de 400% (de 4.500 BS à 18.000 Bs par mois). Cela vaut à peine à 6 dollars, ce qui est tout à fait insuffisant pour faire face à la hausse des prix des produits de base.

    Les augmentations de salaire promises (que l’hyperinflation mange avant qu’elle ne puissent être appliquées), le ton triomphaliste et même méprisant de la direction du PSUV et de sa bureaucratie contre ceux qui protestent, le recours à la répression contre de nombreux travailleurs qui ont organisé des grèves défensives ces derniers mois et le fait que la plupart des bureaucrates vit avec toutes sortes de privilèges et conditions matérielles semblables à ceux de la classe capitaliste, n’ont fait que renforcer la colère des gens. Sur cette base objective, la droite a repris l’initiative et lancé ce nouvel assaut pour le pouvoir.

    Mais la victoire des forces réactionnaires de droite ne résoudra aucun problème des travailleurs. Bien au contraire ! L’objectif des impérialistes qui tirent les ficelles derrière Guaidó est de forcer des officiers supérieurs de l’armée à intervenir pour renverser Maduro et donner le pouvoir à la droite. Pendant des années, Maduro a essayé de s’accrocher au gouvernement en accordant de plus en plus de concessions, de pouvoir économique et de poids dans le gouvernement au haut commandement militaire. Cela a contribué à l’augmentation de la corruption et provoqué des troubles parmi les travailleurs et la population. Cela ne garantira toutefois pas la loyauté des Forces armées nationales bolivariennes (FANB).

    Lors de sa précédente offensive pour prendre le pouvoir en 2017, la droite vénézuélienne avait déjà réussi à ouvrir une brèche dans l’appareil d’État avec le soutien du procureur général Luisa Ortega Díaz et la démission de certains hauts responsables militaires. Ensuite, un facteur clé pour les dirigeants militaires était que la stratégie d’opposition de droite ne permettait pas à cette dernière d’obtenir les mobilisations de masse qu’elle espérait, elle ne parvenait pas à élargir son action de la classe moyenne urbaine à la classe ouvrière et aux quartiers pauvres. De plus, les actions terroristes des gangs fascistes avaient convaincu des centaines de milliers de travailleurs, très insatisfaits des politiques du gouvernement, de donner une dernière chance au PSUV et à son Assemblée nationale constituante (ANC). Mais aujourd’hui, la situation a subi une transformation qualitative.

    La bureaucratie du PSUV ne défend pas le socialisme

    Les médias de la classe dirigeante et la réaction internationale mondiale présentent les événements au Venezuela comme étant la preuve de l’échec du socialisme. Au Venezuela même, avec l’aide des dirigeants bureaucratiques du PSUV – qui qualifie cette catastrophe et leur politique de pactes avec les hommes d’affaires de “transition vers le socialisme” -, la droite utilise l’effondrement économique pour semer la confusion parmi les masses, saper leur moral et discréditer l’idée du socialisme, le contrôle des travailleurs et, en général, tout ce qui sent la gauche et la révolution.

    En fait, le programme appliqué par Maduro et les dirigeants du PSUV est à des années-lumière du socialisme et de ce que des millions de personnes attendaient en 2013. Cette année-là, les masses avaient voté en faveur du maintenir des plans sociaux et des réformes menées par Chávez qui avait essayé de répondre aux aspirations de la classe ouvrière et des couches les plus opprimées du peuple.

    Depuis lors, Maduro et ses collaborateurs, également inspirés par le gouvernement chinois et toute une légion de “compagnons de route” staliniens, ont tenté de convaincre la classe dirigeante vénézuélienne et internationale qu’ils pouvaient gérer la pire crise de l’histoire du capitalisme vénézuélien avec moins de bouleversements sociaux que la droite.

    Au cours de ces derniers mois, ils ont approuvé de très dures coupes budgétaires et salariales de même que le licenciement de milliers de travailleurs des entreprises publiques en essayant de couvrir le tout d’un “mysticisme révolutionnaire” impuissant. Grâce à ces politiques, ils n’ont réussi qu’à éroder en un temps record le soutien social massif dont bénéficiait le PSUV. Aujourd’hui, la même bourgeoisie et les mêmes hommes d’affaires qui ont bénéficié de l’aide gouvernementale et signé des accords avec le régime manœuvrent avec l’impérialisme pour reprendre le contrôle direct du gouvernement et du pouvoir étatique. Cette crise résulte du modèle bureaucratique “socialiste” d’une caste de fonctionnaires, de militaires et de politiciens démoralisés et corrompus qui se sont élevés au-dessus des conditions de vie des gens et qui se battent pour maintenir leurs privilèges. Leurs actions ont sapé les conquêtes de la révolution bolivarienne et permis à la réaction de progresser.

    Pour l’organisation de comités d’action dans chaque quartier et chaque usine ! Pour un front unique de la gauche afin de vaincre le coup d’Etat et mettre fin tant au capitalisme qu’à la bureaucratie !

    Guaidó est tel un loup vêtu d’une peau d’agneau. Il parle d’un « gouvernement pour tous » et de « réconciliation ». Mais si ce réactionnaire de droite et les forces qui le soutiennent arrivent au pouvoir, ce sera synonyme de cauchemar pour des millions de travailleurs et de paysans qui souffrent déjà de la crise sociale et économique. Leur agenda politique et économique ne peut être appliqué qu’au travers de licenciements encore plus massifs, en réduisant brutalement les dépenses sociales et en réprimant les syndicats, les mouvements sociaux et les militants de gauche, à une échelle encore plus brutale et sanglante que dans les pays de leurs sponsors – Duque, Bolsonaro et Macri.

    La première tâche de la classe ouvrière et du peuple politiquement conscient et combatif du Venezuela est d’organiser la résistance contre le coup d’Etat. Nous devons commencer par dénoncer les véritables objectifs de Guaidó, de la droite et de l’impérialisme.
    Nous devons organiser des réunions dans chaque entreprise et sur chaque lieu de travail pour discuter de nos besoins et de nos revendications ainsi que de la manière dont les projets politiques et économiques de la droite représentent un danger mortel.
    Il est urgent de créer des comités d’action pour la défense des droits des travailleurs et du peuple dans chaque centre de travail et dans chaque quartier, en défendant un programme de classe véritablement socialiste, qui propose l’expropriation des grands monopoles privés et bancaires pour mettre fin à l’hyperinflation et à la corruption, pour l’abolition des privilèges de la bureaucratie et pour transférer le pouvoir réel aux mains de la classe ouvrière et des personnes opprimées. Nous devons organiser des mobilisations de masse et l’autodéfense légitime du peuple contre la violence de la droite.

    L’expérience de ces dernières années montre que nous ne pouvons avoir la moindre confiance dans le gouvernement Maduro, la bureaucratie ou les officiers supérieurs de l’armée si nous voulons empêcher la victoire de la réaction. Ce sont les politiques de Maduro, sa bureaucratie et sa corruption qui ont ouvert la voie à la droite et au coup d’État.

    La seule façon d’éviter un résultat tragique pour la classe ouvrière et le peuple vénézuélien est construire un front unique de la gauche, complètement indépendant de ceux qui ont causé ce désastre, et de lutter ouvertement pour la conquête du pouvoir afin d’établir une administration démocratique des travailleurs et des exploités, basée sur la démocratie directe dans tous les aspects de la vie sociale et économique, pour développer une planification économique par l’expropriation des capitalistes et la gestion et le contrôle démocratique des travailleurs, afin de créer des emplois et d’augmenter la production et les conquêtes sociales précédemment acquises.

    Il n’y a pas de temps à perdre. Une résistance massive doit être menée contre le coup d’Etat de la réaction et de l’impérialisme avec une mobilisation massive de la base, en défendant un programme socialiste et internationaliste révolutionnaire. Les peuples et la classe ouvrière du monde entier, à commencer par ceux d’Amérique latine, ont le devoir de rejeter le bain de sang que prépare le coup d’État de la droite et de ses mentors internationaux. Seuls les travailleurs peuvent sauver le peuple !

  • 20 ans après l’accession au pouvoir d’Hugo Chavez

    Le 6 décembre 1998, Hugo Chávez est sorti victorieux de l’élection présidentielle vénézuélienne. Les espoirs étaient gigantesques parmi les masses, à la hauteur des craintes de l’impérialisme américain et des capitalistes du Venezuela. Quand, en 2002, un coup d’Etat a tenté de renverser le gouvernement, il a fallu moins de 24 heures aux masses pour balayer les forces de la réaction.

    Ce pays, qui compte les réserves pétrolières les plus importantes au monde, aurait pu tracer une autre voie si un programme socialiste audacieux avait été mis en œuvre par Hugo Chavez ; cela aurait reçu un soutien massif enthousiaste dans le pays et à travers le continent. Hélas, Chavez est resté prisonnier de ses illusions sur une troisième voie entre une rupture anticapitaliste claire et la dictature des marchés.

    Bolsonaro, Trump, et les capitalistes à travers le monde utilisent aujourd’hui la crise au Venezuela pour attaquer la gauche. L’échec des gouvernements Chavistes à rompre avec le capitalisme a entraîné une catastrophe sociale qui est maintenant utilisée par les politiciens capitalistes et les gouvernements du monde entier pour discréditer le «socialisme».

    Le désastre actuel au Venezuela est un avertissement de ce qui pourrait arriver en Europe ou ailleurs si des forces de gauche arrivent au pouvoir sans prendre ensuite des mesures de type socialiste (telles que la nationalisation des secteurs-clés de l’économie sous contrôle et gestion des travailleurs).

  • Venezuela : Maduro survit à une tentative d’assassinat. Comment vaincre la réaction et l’impérialisme ?

    Dans l’après-midi du samedi 4 août, diverses explosions sur l’avenue Bolivar à Caracas ont interrompu le discours du Président Nicolas Maduro lors d’un défilé commémorant le 81e anniversaire de la Garde nationale vénézuélienne. Les explosions ont conduit à des scènes de panique et à l’évacuation immédiate de Maduro, de sa femme et des chefs militaires. Cette nuit-là, le ministre de l’Information, Jorge Rodriguez, a annoncé qu’il y avait eu une attaque terroriste menée par des drones chargés d’explosifs C4. Il a déclaré que 7 soldats avaient été blessés et que plusieurs personnes avaient été arrêtées, l’attaque étant attribuée à des sections de la droite et de l’extrême droite.

    Déclaration d’Izquierda Revolucionaria (section vénézuélienne du Comité pour une Internationale Ouvrière)

    Plus tard, la journaliste de l’opposition Patricia Poleo a confirmé cette version des événements, publiant une déclaration d’un groupe qui se qualifie de “soldats de Franela” revendiquant la responsabilité de l’attaque. Le groupe en question rassemble des partisans d’Oscar Perez, un officier lié à l’extrême droite et décédé lors d’une fusillade avec la Garde nationale le 15 janvier dernier. Il était l’auteur de l’attaque terroriste menée contre la Cour suprême en juin 2017. La déclaration en question disait que cette attaque faisait partie de l’opération “Phoenix” dont l’objectif était de tuer Maduro et de renverser le gouvernement vénézuélien. Le lendemain, Maduro a accusé le président sortant de Colombie, Juan Manuel Santos, qui a récemment appelé au renversement du gouvernement vénézuélien, d’être responsable.

    Le caractère violent et putschiste de la droite vénézuélienne.

    Le caractère violent et terroriste de la droite au Venezuela n’est une nouvelle pour personne. Les médias capitalistes, les gouvernements de droite du monde entier et de nombreuses sections de la social-démocratie présentent ces éléments comme de simples “forces d’opposition luttant pour la démocratie”. La réalité est que ces forces ont habituellement recours à la violence et au terrorisme : depuis le coup d’Etat fasciste de 2002 où elles ont tenté de tuer Hugo Chavez (démocratiquement élu par le peuple vénézuélien) et d’arrêter ses partisans, jusqu’aux “guarimbas”, des actions fascistes et terroristes stimulées par des leaders de l’”opposition” comme Leopoldo Lopez ou Henrique Capriles Radonski.

    Le dernier épisode “guarimba” a causé plus de 100 morts entre mars et juillet 2017 et il y a même eu des cas de lynchage et de personnes brûlées vives pour s’être déclarées Chavistas. Ces méthodes terroristes sont l’une des raisons de la défaite de l’offensive de l’opposition et de la tentative de la MUD (Table de l’unité démocratique) de prendre le pouvoir.

    Leur objectif est de semer la peur, de paralyser le pays et d’entraver les élections à l’Assemblée nationale constituante (ANC) a provoqué la mobilisation des masses qui, une fois de plus, a contrarié les plans de la droite et de leurs mentors : l’impérialisme américain et les gouvernements réactionnaires de Colombie, du Brésil et de l’Argentine.

    Un an après les élections de l’ANC : de la mobilisation et l’espoir à la frustration et au désenchantement.

    L’attaque du 4 août a eu lieu exactement un an après la victoire du gouvernement aux élections de l’ANC. Lors de ces élections, des millions de pauvres se sont mobilisés pour vaincre la stratégie de coup d’Etat de la droite, mais des millions d’électeurs et de militants chavistas ont également utilisés ces élections pour exprimer leur mécontentement à l’égard des politiques capitalistes menées par le gouvernement Maduro, en organisant et en soutenant des candidats critiques et en exigeant un virage à gauche.

    Depuis lors, la réponse de Maduro, de l’appareil d’Etat et de la bureaucratie du PSUV (le parti au pouvoir) a été de diviser, d’isoler et de réprimer tous les mouvements critiques de gauche tout en confirmant sa politique d’accords avec des couches du capitalisme vénézuélien, en suivant les avis de ses conseillers internationaux (en particulier le gouvernement chinois qui finance une grande partie de la dette du Venezuela). Leur objectif n’est pas de défendre ou d’approfondir la révolution mais de stabiliser le capitalisme vénézuélien avec eux-mêmes à sa tête et de démanteler dans la pratique les mesures les plus à gauche adoptées par Chavez sous la pression des masses.

    Dans la pratique, Maduro a effectué un virage évident vers la droite. Ses politiques économiques ont conduit à des hausses constantes des prix et à des réductions de salaires et des droits des travailleurs. Il a accordé des montagnes d’argent et d’”aide” aux nouveaux capitalistes nés dans les rangs de la bureaucratie en raison de son contrôle sur l’Etat ainsi qu’aux sections de la bourgeoisie traditionnelle qui ont passé un accord avec le gouvernement. Ce dernier a permis à des multinationales de Chine, d’Iran et de Russie – des “amis” – de réaliser des profits juteux grâce à des entreprises mixtes et à des accords commerciaux pour exploiter nos ressources naturelles.

    Alors qu’une partie des capitalistes et de l’impérialisme américain est toujours favorable à un effondrement économique qui leur permettrait de reconstruire leur base sociale et de faire tomber Maduro pour constituer un gouvernement similaire à celui du Brésil, de l’Argentine ou de la Colombie, une autre partie est favorable à conclure un accord, au moins temporairement, avec le gouvernement. Ces capitalistes aimeraient que Maduro lui-même ou des secteurs de l’Etat-major militaire ou de la bureaucratie dirigent une transition qui en finisse avec les acquis du processus révolutionnaire à l’aide d’un discours “chaviste”.

    Ce glissement vers la droite s’inscrit dans le contexte d’une situation où la grande majorité de la classe ouvrière et des pauvres lutte pour survivre avec leur famille. La baisse cumulée du PIB au cours de ces 3 dernières années est supérieure à 40% selon certains – une situation qui n’est comparable qu’à l’impact d’une guerre ! L’inflation annuelle est d’environ 46.000% selon le FMI, qui prévoit qu’elle pourrait atteindre le chiffre incroyable de 1.000.000% ! Il est difficile de connaître les dimensions réelles de la situation, car la Banque du Venezuela a cessé de publier des informations.

    Renforcement des tendances bonapartistes et bureaucratiques au sein du gouvernement

    Les tentatives des sections critiques du mouvement chaviste et du mouvement ouvrier visant à lutter contre cette situation ont jusqu’ici été éparses et limitées étant donné les difficultés que l’effondrement économique engendre pour l’organisation et la participation des masses. La démoralisation et le scepticisme générés parmi de larges secteurs de la population, en raison de ce virage à droite en l’absence d’une organisation unie et indépendante de la classe ouvrière disposant d’un programme clair et décisif unissant les revendications populaires et l’opposition de gauche à la bureaucratie, représentent également une grave difficulté.

    Outre les politiques économiques susmentionnées, le contrôle bureaucratique a été renforcé sur les organisations de masse construites pendant la période de croissance révolutionnaire, comme la Fédération syndicale CSBT et le PSUV. Le PSUV est de plus en plus une machine bureaucratique dans laquelle toute dissidence est écrasée.

    Le PSUV agit comme un appendice de l’appareil d’Etat, à la manière des partis communistes des anciens Etats staliniens (URSS, etc.), à la différence que le Venezuela n’est pas un Etat ouvrier déformé reposant sur une économie planifiée mais un Etat capitaliste basé sur des relations capitalistes de production et dépendant du marché mondial à un degré extrême (à cause du facteur pétrolier).

    Cette évolution – qui consiste à ne pas mener une révolution jusqu’au bout pour en faire une véritable révolution socialiste reposant sur la démocratie ouvrière – n’est pas quelque chose de neuf dans l’histoire. Quelque chose de semblable s’est produit au Nicaragua sous les Sandinistes, aux conséquences connues. Maduro et ses collaborateurs ont un modèle à suivre : la Chine, qui est un promoteur clair du capitalisme d’Etat basé sur un régime autoritaire bonapartiste ayant rompu tout lien avec les traditions révolutionnaires.

    Comme dans tout régime bonapartiste, ils essaient de contenir les divisions internes dans certaines limites. Ceux qui sont allées trop loin dans leurs pratiques de corruption ou qui ont exigé un virage plus abrupt vers la droite ont été purgés de peur de provoquer une explosion sociale. En dépit des pompeuses déclarations de Maduro sur le socialisme et la révolution, sa politique consiste à utiliser l’appareil de l’État et celui du parti, en combinaison de mesures clientélistes et d’une répression sélective contre les voix critiques, afin de gérer le capitalisme et de rester au pouvoir.

    L’une des conséquences possibles de l’attentat terroriste du 4 août est qu’il puisse servir à la bureaucratie pour justifier l’intensification des mesures bonapartistes et autoritaires ainsi que le renforcement de la tendance à la criminalisation des protestations sociales et des critiques de gauche sur le régime.

    Le capitalisme est une voie sans issue

    Après avoir subi des défaites humiliantes aux élections régionales et locales d’octobre et de décembre 2017, la MUD n’a pas été en mesure de se présenter en commun lors des élections présidentielles de mai dernier. Craignant une nouvelle catastrophe, la majorité des partis composant la MUD a décidé de ne pas se présenter. La MUD a finalement été dissoute et la nouvelle stratégie d’une partie de l’opposition contre-révolutionnaire est de profiter de la terrible situation économique et du mécontentement social pour lancer un “Front élargi” (FA). Ces dernier essayent de laisser derrière eux (au moins publiquement) l’appareil discrédité des partis traditionnels de droite et de présenter le FA comme un rassemblement de mouvements sociaux. Pour l’instant, ce fut sans succès et leur base reste passive et démoralisée.

    Lors des élections présidentielles, Maduro a été réélu avec un taux d’abstention de plus de 50% et le soutien de moins de 30% de l’électorat. L’impérialisme et ses marionnettes vénézuéliennes ont refusé de reconnaître les résultats, mais leurs appels à protester en rue n’ont rien donné. La bureaucratie a essayé de dépeindre ce résultat comme une grande victoire, mais il est aisé de voir au travers de cette rhétorique. L’abstention record et l’atmosphère d’apathie durant la campagne reflétaient l’effondrement de leur autorité, surtout si l’on compare cela à l’enthousiasme provoqué par les victoires électorales de Chavez, la première victoire de Maduro en 2013 et même avec la mobilisation pour les élections de l’ANC il y a un an à peine.

    Le mécontentement populaire pourrait devenir encore plus vif à la suite des nouvelles mesures annoncées par le gouvernement. Divers dirigeants de la politique économique ont émis des déclarations appelant à la fin du contrôle des changes ce qui, au lieu de contrôler l’inflation comme ils l’affirment, pourrait l’aggraver. La question fondamentale reste celles de l’effondrement de l’économie productive, de la grève des investissements et du pillage des richesses pétrolières par les capitalistes et la bureaucratie. Avec ou sans contrôle des changes, il sera très difficile aux masses d’échapper à la misère et à la pénurie généralisée.

    Luttons pour une politique socialiste, anticapitaliste et antibureaucratique. Tout le pouvoir aux travailleurs et aux pauvres !

    Ce serait une erreur de considérer la situation au Venezuela comme distincte des processus politiques et économiques en développement dans toute l’Amérique latine et à travers le monde. Dans le contexte actuel, l’espace pour une contre-révolution stable au Venezuela (qu’elle soit menée par la droite ou par la bureaucratie elle-même) n’est pas similaire à celui qui a pu exister dans d’autres moments historiques. La lutte de classe devient plus aigüe sur tout le continent : pensons aux mobilisations de masse au Brésil et en Argentine, à la victoire historique de Lopez Obrador au Mexique, à la croissance de la gauche en Colombie et au mouvement insurrectionnel au Nicaragua.

    La campagne lancée par la bureaucratie du PSUV pour dénigrer le soulèvement de masse au Nicaragua, en le comparant aux “guarimbas” du Venezuela est symptomatique. La réalité est que c’est la classe ouvrière et la base populaire des Sandinistes qui se mobilise, développe des organes d’auto-organisation et lutte contre la répression sauvage et les politiques capitalistes du gouvernement bourgeois bonapartiste de Daniel Ortega. Le Nicaragua est un exemple de ce qui se passe lorsqu’une direction issue d’un mouvement révolutionnaire se rend dans le camp de la classe capitaliste et applique des mesures antisociales contre la classe ouvrière et les pauvres.

    Le capitalisme vénézuélien faible et parasitaire ne peut pas garantir une vie digne aux masses. La classe dirigeante internationale présente la paralysie de l’économie vénézuélienne comme le résultat du “socialisme”. La réalité est toute autre : la révolution bolivarienne n’a pas été achevée. Chavez a mis en œuvre des réformes progressistes qui ont permis d’élever le niveau de vie. Mais les mesures nécessaires pour mettre fin au capitalisme n’ont jamais été adoptées. Ni l’expropriation des banques, des propriétés foncières ou des grandes entreprises, ni la destruction de l’Etat capitaliste avec sa bureaucratie, ses lois et ses institutions. Un Etat réellement dirigé par les travailleurs et les pauvres n’a jamais été constitué.

    La seule alternative, aujourd’hui plus que jamais, c’est un programme véritablement socialiste qui retire une fois pour toutes le pouvoir économique et politique des mains des capitalistes et des bureaucrates et le place entre celles des travailleurs et des pauvres.

    Rejoignez Izquierda Revolucionaria et luttez pour un tel programme !

    1. Contrôle direct des travailleurs dans toutes les entreprises publiques et privées pour lutter en faveur du gel des prix, pour le contrôle de la production alimentaire locale et la satisfaction de tous les besoins du peuple contre le sabotage capitaliste et bureaucratique.

    2. Augmentations salariales supérieures à l’inflation. Discussion et application des conventions collectives salariales. Incorporation de tous les travailleurs sous-traitants dans les contrats à durée indéterminée. Réintégration de tous les combattants de classe révolutionnaire licenciés par les patrons et les bureaucrates. Indemnité de chômage pour tous les chômeurs.

    3. Expropriation et nationalisation de toutes les entreprises fermées et sous-utilisées de même que des terres avec embauche immédiate de travailleurs, d’agriculteurs et d’étudiants pour y travailler en développant le contrôle démocratique des travailleurs. Nationalisation sous contrôle démocratique de toutes les entreprises qui sabotent l’économie.

    4. Création d’une société d’État ayant le monopole du commerce extérieur. Instauration du contrôle démocratique ouvrier pour lutter contre la spéculation, l’inflation et la corruption et garantir la pleine autosuffisance alimentaire.

    5. Nationalisation des banques, des terres et de l’industrie sous contrôle ouvrier, afin de planifier démocratiquement l’ensemble de l’économie dans l’intérêt du peuple afin de satisfaire les besoins sociaux.

    6. Création d’un système de santé publique gratuit et universel qui garantisse des soins de qualité. Expropriation des cliniques privées pour les placer sous contrôle démocratique afin de garantir des soins de santé à tous, sans discrimination.

    7. Création d’une entreprise publique de construction pour construire des infrastructures, des maisons, des universités, etc., gérées sous contrôle démocratique et s’engager dans un plan de construction de 500.000 logements par an et mettre fin au déficit de logements en 3 ans.

    8. Non-paiement de la dette extérieure ! Les impérialistes nous soumettent à la misère par le biais de sanctions pour payer leur accumulation massive de richesses avec notre misère.

    9. Création d’un Etat socialiste reposant sur des conseils d’ouvriers, d’agriculteurs et d’étudiants, au niveau local, régional et national. Tous les représentants doivent être élus et rééligibles à tout moment par les assemblées de leur secteur. Les représentants devraient se représenter devant leur base au moins tous les 6 mois et ne pas gagner plus que le salaire moyen d’un travailleur qualifié, pour mettre fin à la bureaucratie corrompue.

    Ni capitalistes ni bureaucrates ! Tout le pouvoir aux travailleurs et aux pauvres !

  • Le Venezuela après les élections présidentielles

    Ni les capitalistes ni la bureaucratie ne peuvent résoudre la crise !

    Construire une gauche révolutionnaire qui défend les intérêts des travailleurs et du peuple

    Le 20 mai, des élections présidentielles ont eu lieu au Venezuela. D’après les résultats finaux rendus publics par le CNE (le Conseil National Électoral, NdT.), Nicolás Maduro a remporté ces élections avec 6.203.612 voix, suivi des 1.920.597 voix recueillies par Henri Falcón (ancien gouverneur de l’Etat de Lara pour le PSUV – le Parti socialiste unifié du Venezuela créé en 2007, NdT. -, il a rejoint l’opposition en 2010), et les 988.761 voix pour l’homme d’affaires et chef évangélique Javier Bertucci. Le taux de participation fut de 46,04%.

    Déclaration d’Izquierda Revolucionaria (section du Comité pour une Internationale Ouvrière au Venezuela)

    Le cynisme des impérialistes

    Immédiatement, les impérialistes américains et européens ainsi que les gouvernements latino-américains de droite ont lancé une campagne hystérique dénonçant ces résultats comme « non valables ». Quel cynisme ! Des éléments tels que Donald Trump, qui lui méprise les droits démocratiques des Noirs, des femmes, des immigrés, des jeunes et des travailleurs et qui préside les Etats-Unis en ayant obtenu 3 millions de voix de moins que son adversaire, se présentent comme des « champions de la démocratie » ! Ou à l’instar de Michel Temer, devenu président du Brésil grâce au coup d’Etat institutionnel de l’impeachment (procédure de destitution de Dilma Rousseff, NdT.). Que dire des bourgeoisies européennes qui, à travers les « gouvernements de l’ombre » que personne n’élit, comme la troïka, et des gouvernements nationaux de plus en plus corrompus et discrédités, attaquent les droits démocratiques et sociaux ? Un bon exemple de la démagogie de cette campagne se retrouve dans les déclarations du président espagnol et leader du PP, Mariano Rajoy, qui a dénoncé de but en blanc « le manque de normes démocratiques au Venezuela ». Venant du leader d’un parti déclaré par les tribunaux comme « organisation criminelle » ! L’homme qui emprisonne aujourd’hui des musiciens, des dirigeants politiques et des activistes sociaux pour leurs idées et qui, le 1er octobre 2017, a envoyé 10.000 policiers réprimer des millions de personnes en Catalogne, faisant plus de 1000 blessés, afin de les empêcher d’exercer leur droit de vote !

    Cette campagne médiatique pathétique reflète les problèmes actuels auxquels font face les impérialistes américains et européens – ainsi que les bourgeoisies latino-américaines – pour réussir à ce que leurs marionnettes de la MUD (« Table de l’unité démocratique », NdT., coalition des partis de droite et d’extrême droite) accèdent au gouvernement au Venezuela. Elle montre aussi que, si ces derniers y arrivaient, ils appliqueraient la même répression et les mêmes attaques qu’au Brésil, en Argentine ou au Honduras.

    La MUD est sorti très divisée et affaiblie de son échec à boycotter l’Assemblée Nationale Constituante (ANC) et à prendre le pouvoir violemment en juillet 2017. Les gouvernements impérialistes et les médias à leur service traduisent l’abstention élevée dans les élections présidentielles vénézuéliennes (53,96%) comme un soutien à la MUD. Ceci est destiné à encourager leurs partisans puisque toutes les élections depuis lors ainsi que les mobilisations qu’ils ont organisées ont subi échec après échec, y compris leur manifestation du 17 mai contre la présidentielle du 20 mai. Ils espèrent que cette campagne médiatique, conjuguée à l’effondrement économique et au mécontentement croissant à l’égard de la politique du gouvernement Maduro, permettra de ramener leurs partisans dans la rue.

    Bien que la manipulation et les mensonges des impérialistes et de la MUD soient évidents, la forte abstention du 20 mai démontre une chose : face au soutien massif que le gouvernement de Chávez a reçu (grâce aux mesures progressistes et aux réformes sociales qu’il a appliquées pour répondre aux besoins des masses), le gouvernement bureaucratique de Maduro, avec sa politique de gestion du capitalisme, s’alliant avec les factions de la bourgeoisie vénézuélienne, les impérialistes chinois et russes, et en attaquant la gauche révolutionnaire, provoque une grande déception et un profond malaise.

    Sur le terrain idéologique, la crise brutale que vit le Venezuela (inflation galopante, pénurie, paralysie de la production) est utilisée par la bourgeoisie du monde entier pour parler « d’échec du socialisme » et ainsi discréditer tout mouvement de masse qui remet en question les ajustements et les privatisations capitalistes. Cependant, la réalité est telle qu’au Venezuela le socialisme n’a pas échoué, puisqu’il n’a tout simplement jamais existé. Les réformes et les mesures sociales appliquées par Chávez lui ont apporté un soutien massif. Cependant, Chávez n’est resté qu’à mi-chemin et n’a jamais pris les mesures nécessaires pour évoluer jusqu’au socialisme. En effet, l’expropriation des banques et des grandes entreprises sous la direction des travailleurs n’a jamais été entreprise. L’Etat bourgeois n’a pas non plus été démantelé et un Etat révolutionnaire dirigé par les travailleurs et le peuple n’a pas émergé.

    Le maintien des entreprises entre les mains des capitalistes et le contrôle de l’État par la bureaucratie sont autant d’éléments qui ont amené à ce que même les mesures améliorant initialement les conditions de vie de la population ont disparu ou perdu de leur efficacité. Ces éléments avaient déjà commencé à provoquer une perte de soutien électoral lors des dernières années de Chávez. Après sa mort et le virage brutal à droite que représente le madurisme, nous assistons à un effondrement total de l’économie ainsi que du moral des masses.

    Une campagne sans alternatives pour les travailleurs et le peuple

    Après une campagne institutionnelle vide, pleine de promesses et de slogans clientélistes, dans laquelle aucun candidat n’a proposé une alternative répondant aux besoins et aux intérêts de la classe ouvrière et du peuple, ou encore des mesures concrètes pour sortir le pays de la crise économique et sociale que nous vivons, les candidats de l’opposition Henry Falcón (qui a soulevé l’idée de la dollarisation des salaires) et Javier Bertucci, qui lui se base sur une image religieuse avec des propositions peu claires, ont certes recueilli le vote d’une partie de la population insatisfaite mais ils ont surtout été reçus avec méfiance par la grande majorité de celle-ci.

    Reflétant tout ce que nous avons évoqué ci-dessus à propos de son virage à droite, le gouvernement de Nicolás Maduro a organisé une fin de campagne sur l’Avenue Bolívar à Caracas qui fut le miroir de l’effondrement de son autorité politique devant les masses. Au menu de celle-ci, faible fréquentation et ambiance musicale de boîte de nuit qui ne s’est pas arrêtée un seul instant… même pas pour écouter la prise de parole du candidat. Cela illustre la façon dont la direction maduriste a abandonné non seulement toute référence concrète et sérieuse au socialisme, mais aussi l’héritage chaviste, notamment en clôturant l’événement sans l’hymne national habituel et la diffusion de la voix de Chávez. Maduro a terminé son discours en rappelant pour la énième fois la nécessité d’un « gouvernement de réconciliation et d’unité nationale ». Pour les dirigeants du PSUV, cela signifie maintenir et approfondir l’alliance qu’ils entretiennent déjà dans la pratique avec les branches patronales.

    Les résultats des élections parlent d’eux-mêmes d’une manière très concrète. Les rues et les quartiers du pays se sont exprimés par un incomparable silence et une façon inhabituelle de transmettre leur protestation contre les politiques incohérentes que le gouvernement a promues.

    Comme mentionné ci-dessus, cette abstention n’exprime pas une hausse du soutien du peuple à l’opposition la plus extrême sur la droite qui a donc décidé de ne pas se présenter à ces élections. De larges segments des bases sociales de l’opposition, formés par la classe moyenne et certaines branches populaires démoralisées, ont tiré des conclusions très critiques envers leurs dirigeants après les guarimbas (manifestations violentes organisées par des bandes fascistes qui sont venues lyncher et brûler les gens soupçonnés d’être chavistes, de gauche ou tout simplement en désaccord avec eux). Ils les voient comme des traîtres qui ont utilisé la lutte pour leurs intérêts économiques. Parmi les nombreuses personnes qui ont voté pour l’opposition dans les législatives de 2015 dans le but d’exprimer leur mécontentement envers le PSUV, ces méthodes ont également suscité le rejet et les craintes quant à la façon dont ils gouverneraient et vis-à-vis des méthodes utilisées par la MUD pour stabiliser le système capitaliste au Venezuela. En plus de tous ces facteurs, provoquent également un profond rejet la faiblesse dont souffre la bourgeoisie en conséquence de la crise du système capitaliste dans le monde entier, la mise en œuvre des politiques néolibérales, les coupes sociales ainsi que les privatisations et l’austérité imposées par l’impérialisme américain et du FMI.

    Augmentation du mécontentement social

    Sur 10 électeurs potentiels, seulement 3 ont voté pour Maduro. Comparer ces résultats avec les élections présidentielles précédentes comme en 2013, où le gouvernement a obtenu 7.587.579 voix, démontre une perte, en cinq ans, d’au moins deux millions de voix. Comme si nous comparons avec l’année 2012, lorsque Chávez a obtenu 8.191.131 voix. Ce 20 mai, Maduro a obtenu 2.367.404 votes de moins. De plus, l’écrasante majorité de ceux qui le soutenaient ne l’ont pas fait avec enthousiasme ou confiance mais plutôt avec l’idée d’opter pour le moindre mal (comme ce fut le cas lors des élections remportées en 2013 contre Capriles et, bien sûr, dans les victoires de Chávez).

    Lors des élections à l’Assemblée Nationale Constituante, en juillet 2017, il y avait une participation de 8.089.320 personnes, seulement des militants chavistes. Si on la compare avec ces deux dernières élections des gouverneurs et présidentielles, cela montre que l’espoir du peuple a de nouveau chuté, avec un recul drastique, et renforce l’expression du rejet des politiques gouvernementales, comme on l’a clairement vu dans les élections l’Assemblée Nationale de l’année 2015.

    Jusqu’ici, Maduro et son gouvernement ont manœuvré en s’appuyant sur l’incapacité des dirigeants de la MUD à capitaliser sur le mécontentement social et sur la gestion des politiques clientélistes dont le seul objectif est de pérenniser le contrôle de l’Etat par la bureaucratie, isoler la gauche critique et négocier leur continuité au pouvoir avec les factions de l’impérialisme et de la bourgeoisie.

    Il est pathétique de voir les dirigeants du PSUV affichés victorieux avec 68% de soutien électoral, chiffre qui traduit simplement la différence obtenue dans les votes contre les candidats de l’opposition. Ce faisant, ils dissimulent la réalité en arrière-plan : la participation de 46,02% des électeurs. Cela montre que nous n’avons pas été en mesure d’atteindre les objectifs fixés de 10 millions de voix, une victoire décisive qui aurait démontré à l’impérialisme le soutien populaire. Ils n’ont même pas réussi à obtenir au moins 50%, ou que les militant votent majoritairement pour le nouveau parti qu’a formé la bureaucratie afin de laver son visage : « Somos Venezuela » (« Nous sommes le Venezuela », NdT.). Tout cela provoque un certain tracas dissimulé par la direction du gouvernement, qui a célébré la victoire dans une ambiance de soutien totalement pyrrhique.

    Cette situation grave que connaît le Venezuela est un grand danger pour la classe ouvrière et le peuple, car les puissances économiques étrangères et la bourgeoisie nationale sont bien conscientes que les sanctions économiques imposées ont produit des effets néfastes et que les exacerber pourraient provoquer le chaos social.

    Le programme du PSUV : faux discours socialiste pour stabiliser le capitalisme

    Quelques heures avant l’annonce des résultats du CNE, Falcón et Bertucci ont refusé de reconnaître le résultat et ont déjà appelé, en tant que MUD, à augmenter les sanctions internationales et la pression dans la rue dans le cadre d’une nouvelle offensive. Ni la droite la plus extrême ni celle « conciliante » ne semblent vouloir accepter les résultats du 20 mai. Du moins pour le moment.

    Pour sa part, Nicolás Maduro, dans son discours lors de la soirée électorale, réaffirmait les actions politiques de la campagne, manifestant pour laisser derrière lui l’image et les idées de Chávez, en maintenant l’appel permanent à une large réconciliation de tous les secteurs et surtout les chefs d’entreprise et la droite. Il a également continué à jurer de mettre fin à la guerre économique et a pratiquement appelé le peuple à être patient puisque les résultats ne seront pas visibles immédiatement.

    Le gouvernement de Maduro montre de plus en plus clairement qu’il cherche la stabilisation d’un modèle capitaliste basé sur un secteur étatique fort contrôlé par la bureaucratie elle-même (et en particulier par les hauts gradés de l’armée, dont le poids dans le gouvernement et la prise de décision n’a fait qu’augmenter). Parallèlement, il tente de consolider un régime politique qui, face à l’érosion croissante de son soutien populaire, recourt de plus en plus à des mesures bonapartistes, y compris la persécution et l’attaque contre les factions critiques du chavisme, dont la gauche révolutionnaire.

    Les résultats du gouvernement sont pour l’instant maintenus par des actions clientélistes manipulatrices (bonus d’aide, CLAP – sacs de nourriture vendus par l’Etat à des prix plus bas, etc.) et l’utilisation de produits importés, avec lesquels ils ont l’intention de maintenir une base sociale de soutien. Mais ces politiques clientélistes et bureaucratiques ne suffisent pas à contenir le désastre économique ni l’augmentation de la déception et du mécontentement parmi les masses.

    Un autre facteur qui a aidé le gouvernement est l’absence d’alternative de masse de gauche clairement différenciée de la bureaucratie du PSUV et munie d’un programme, d’un discours et d’une action clairement anti-bureaucratique et anticapitaliste. Le malaise vis-à-vis de Maduro et de la bureaucratie du PSUV a été exprimé à travers l’émergence de voix et mouvements critiques au sein du chavisme. Lors des élections à l’ANC et aux municipales, de nombreuses candidatures critiques sont apparues. Certaines de ces factions (comme celles qui ont soutenu l’ancien ministre du Commerce et de l’Alimentation et candidat alternatif au PSUV pour le bureau du maire de Caracas, Eduardo Samán, ainsi que d’autres) essaient de se regrouper et s’expriment à travers des figures telles que celle de Patria Rebelde et d’autres. Mais l’expérience de l’année dernière montre qu’il est nécessaire de dénoncer de manière déterminée les politiques de la bureaucratie et aussi d’énoncer clairement la nécessité de construire une alternative révolutionnaire basée sur les secteurs les plus combatifs et conscients de la classe ouvrière et de la jeunesse, sous contrôle et direction des travailleurs eux-mêmes et doté d’un plan d’action qui permette de toucher l’ensemble du peuple.

    L’extrême droite et l’impérialisme n’arrêteront pas l’offensive

    La droite cherche à rééditer la mobilisation de sa base à travers l’organisation du soi-disant « Front large ». Ils attaquent dans certaines régions et font appel à la « société civile » comme force motrice des manifestations, diminuant le rôle joué par les partis politiques discrédités de la MUD et ajoutant toutes sortes de forces. Nous avons même vu l’appel lancé aux candidats perdants. Ce ne sera pas facile mais il ne sera pas non plus impossible pour l’opposition de retrouver sa capacité à mobiliser dans la rue. La politique néfaste du gouvernement crée des conditions en faveur d’une telle possibilité.

    Le « Front large » est en train de mener un processus d’auto-réflexion en développant des congrès nationaux dans les secteurs de la jeunesse, des femmes et des travailleurs. Tout cela combiné avec l’activisme social pour que l’organisation s’identifie à la société. La vérité est qu’ils sont exhortés à répondre et à présenter une proposition qui sert à déguiser leurs véritables objectifs, à convaincre leurs bases sociales, et qui leur permette d’atteindre même les secteurs mécontents qui les regardent aujourd’hui avec le mépris.

    Il est évident que les actions du « Front large » seront combinées avec une intervention étrangère qui se poursuivra par d’autres moyens, comme l’ignorance des élections en fut une illustration. Bien sûr, les agressions économiques, les pressions politiques et les attaques médiatiques vont croître. Il n’y aura pas de paix avec la misère. Nous pouvons voir cela dans les pressions et les actions que les multinationales ont entamées contre les ressources énergétiques et minières du pays ces dernières semaines. La compagnie pétrolière américaine ConocoPhillips entreprend la prise d’actifs de PDVSA (la compagnie pétrolière appartenant à l’État vénézuélien, NdT.) dans les Caraïbes. PDVSA est également la cible d’une nouvelle poursuite à New York se chiffrant à plus de 25 millions de dollars faisant suite au défaut présumé de dettes envers l’entrepreneur en énergie canadien SNC-Lavalin. Une autre entreprise canadienne, la minière Rusoro, a également intenté une poursuite devant les tribunaux de Calgary et Houston pour tenter de collecter 1.340 millions de dollars pour l’expropriation de ses mines d’or au Venezuela. Les détenteurs de la dette se sont également ajoutés aux pressions. Le gouvernement garde un profond silence, il semble négocier.

    L’objectif est l’étouffement économique de l’État vénézuélien, qui affectera sans aucun doute la population, exacerbera les difficultés du gouvernement à obtenir des devises étrangères, générant plus de crises pour l’achat et l’importation de produits, de nourriture, de médicaments, les pièces de rechange pour soutenir les entreprises publiques, les services et les besoins de la population.

    Pour la construction d’Izquierda Revolucionaria. Luttons contre les capitalistes et contre la bureaucratie : tout pouvoir politique et économique doit passer entre les mains des travailleurs et du peuple !

    La classe ouvrière et le peuple vénézuélien subissent la pire agression capitaliste et bureaucratique qu’ils aient jamais connue. Le gouvernement est déjà incapable de contrôler le coût élevé de la nourriture, la pénurie, ou de garantir la livraison des sacs CLAP, des faillites bancaires dues à l’absence de tickets, ou des cas comme ce qui s’est passé à la Banque du Venezuela (appartenant à l’Etat), qui a gardé les employés de l’administration publique en gelant et paralysant leurs salaires. La banque électronique perd même son efficacité puisque l’internet et les lignes téléphoniques présentent constamment des pannes, soi-disant dues à des « vols de câbles ». A cela s’ajoutent les défauts du système électrique. Les travailleurs de CANTV (une des premières entreprises de service téléphonique au Venezuela, NdT.) et de Corpoelec (société vénézuélienne complètement intégrée au pouvoir d’État, NdT.) signalent tous deux des problèmes de maintien et de démissions du personnel, des pertes de transport dues à la détérioration et à d’autres calamités infinies qui nous font penser que nous avons fait un pas de 60 ans en arrière. Cet effondrement économique s’étend à la compagnie PDVSA elle-même qui, malgré l’augmentation des prix du pétrole, a de plus en plus de mal à augmenter sa production en raison de la détérioration des machines et des installations résultant du désinvestissement, du vol et de la mise à sac par la bureaucratie elle-même.

    La situation est grave et l’augmentation des manifestations peut mener à une révolte populaire qui, si elle se déroulait sans une direction révolutionnaire consciente, pourrait faire tomber le pouvoir entre les mains de l’extrême-droite ou des officiers de l’armée qui, même s’ils utilisaient de prime abord un discours bolivarien, ne feraient qu’accélérer et intensifier ces tendances capitalistes, répressives et bureaucratiques qui ont déjà cours.

    La tâche la plus importante et immédiate pour tous les révolutionnaires, ouvriers et militants populaires et activistes sociaux est de construire une alternative qui unifie les secteurs les plus à gauche de la jeunesse et de la classe ouvrière, du chavisme critique et de la gauche, pour débattre d’un programme et d’un plan d’urgence. Ce plan doit défendre les intérêts et les revendications de la classe ouvrière à la fois contre la politique capitaliste de la droite liée à l’impérialisme américain et contre la bureaucratie qui tente de consolider un modèle bonapartiste et capitaliste entre les régimes capitalistes et impérialistes à l’instar de la Chine et la Russie.

    En travaillant au sein d’Izquierda Revolucionaria, nous estimons que nous devons nous battre pour réaliser la passation de l’entièreté du pouvoir politique et économique entre les mains des travailleurs et du peuple afin de mettre fin à cette crise, dans le cadre d’une proposition de programme comme suit :

    1. Gestion directe par les travailleurs eux-mêmes de la production dans toutes les entreprises publiques et privées, afin de lutter pour parvenir au gel des prix, à la souveraineté alimentaire, et pour satisfaire tous les besoins du peuple contre le sabotage des capitalistes et la corruption de la bureaucratie ;

    2. Augmentation des salaires au-dessus de l’inflation. Discussion et application des conventions collectives. Incorporation de tous les salariés externalisés à la masse salariale fixe, en commençant par exemple dans les institutions de l’Etat (enseignants, employés, travailleurs, etc.). Réintégration immédiate de tous les militants ouvriers révolutionnaires licenciés par les employeurs et les bureaucrates. L’assurance chômage pour les chômeurs ;

    3. Confiscation et nationalisation des entreprises fermées et sous-utilisées, de domaines vacants, avec convocation de travailleurs, de paysans et d’étudiants pour leur prise et occupation immédiates, développant l’autogestion libre et démocratique de toutes les entreprises qui sabotent l’économie ou attaquent les travailleurs ainsi que le processus révolutionnaire ;

    4. Création d’une entreprise publique nationale qui assume le monopole du commerce extérieur (achat direct de matières premières et besoins des entreprises). Administration sous le contrôle des travailleurs, des agriculteurs, des étudiants et des communautés pour lutter contre la spéculation, l’inflation, la corruption et garantir la pleine souveraineté alimentaire ;

    5. Nationalisation sous le contrôle immédiat des travailleurs de la banque, de la terre et de l’industrie pour planifier démocratiquement l’ensemble de l’économie au profit du peuple pauvre et pour satisfaire les besoins sociaux ;

    6. Création d’un système national de santé publique, universel et gratuit, garantissant des soins de qualité. Confiscation des cliniques privées, pour les mettre sous le contrôle des ouvriers, des étudiants et des communes organisées pour assurer le service à tous les travailleurs vénézuéliens et les pauvres sans aucune distinction ;

    7. Création d’une Société Nationale pour la Construction d’Infrastructures, de Logements, d’Universités, etc., dirigée sous le contrôle des ouvriers, des étudiants et des communes, qui entreprenne un plan annuel de création de 500.000 logements qui permette de terminer en trois ans le déficit de logements ainsi que toutes les villes universitaires.

    8. Plus de paiements de la dette extérieure ! Les impérialistes nous imposent, à travers leurs grandes banques et organisations financières, des sanctions qui soumettent le peuple à payer de sa misère leur accumulation de richesse ;

    9. Création d’un État socialiste dirigé par les conseils ouvriers, les conseils paysans, les conseils étudiants, la structure locale, régionale et nationale avec des porte-parole à chaque niveau de la structure d’éligibilité et leur révocabilité à tout moment par des assemblées de travailleurs ou la communauté de leur secteur, qui doivent répondre aux populations de leur gestion administrative tous les six mois, et qui auront un salaire au plus égal à celui d’un ouvrier qualifié, pour en finir une fois pour toutes avec une bureaucratie corrompue.

    Pour la construction d’une alternative authentique pour les travailleurs et le peuple qui se battent pour ce programme ! Rejoignez Izquierda Revolucionaria, section du Comité pour une Internationale des Travailleurs (CIO/CWI) au Venezuela !

    Ni bureaucratie, ni bourgeoisie !

    Tout le pouvoir à la classe ouvrière !

  • Venezuela: il faut un vrai programme socialiste pour stopper la contre révolution

    Depuis la mort de Hugo Chavez en 2013, la révolution vénézuélienne vit ses pires moments de recul social : une inflation autour de 700 % (voire 3000 % pour les produits alimentaires), une claire érosion de nombreuses réformes et conquêtes sociales gagnées dans les années précédentes, ainsi que le licenciement de milliers de travailleurs. Depuis 2012, la valeur des exportations s’est réduite de façon spectaculaire, en raison de la chute des prix du pétrole. La pauvreté, qui s’était fortement réduite sous Chavez, est en train de croître de manière exponentielle, menant à un accroissement de violences urbaines, à l’insécurité…

    Par Diana et Pedro, Gacuhe Révolutionnaire (CIO-France)

    La droite vénézuélienne (unie au sein de la MUD – Mesa de la Unidad « Democratica »), utilise cette situation de manière opportuniste et hypocrite. Les parasites bourgeois de la MUD ne peuvent offrir aucune alternative aux travailleurs et à la population, leur programme représente le même cauchemar que Temer au Brésil et Macri en Argentine.

    Politique antisociale du régime

    Pourtant, la victoire de la droite contre-révolutionnaire au Venezuela est aujourd’hui une réelle possibilité. La raison fondamentale est que le gouvernement Maduro n’applique pas de mesures socialistes, mais fait plutôt tout le contraire. Une partie de la politique du PSUV (parti au pouvoir) consiste à chercher des  accords avec des secteurs de la bourgeoisie et les convaincre de sa capacité à bien gérer le capitalisme. Il fait une concession après l’autre aux capitalistes nationaux comme internationaux et met en place une austérité dure contre la base sociale qui a soutenu le processus révolutionnaire pendant des années. Le gouvernement de Maduro a donc priorisé le paiement de la dette publique, même si cela signifiait la réduction des importations de nourriture. Elles ont diminué de 76 %. Le revenu par habitant a baissé de 34 %.

    Les entreprises mixtes public-privé existent, les privatisations s’accélèrent, et les bureaucrates des ministères agissent selon les désirs du patronat, provoquant une sérieuse vulnérabilité dans la classe ouvrière. Encore début septembre, l’Assemblée Nationale Constituante (ANC) a annoncé des mesures d’approfondissement de l’économie mixte, en espérant attirer des capitalistes mais sous tutelle de la bureaucratie d’État. En même temps, en espérant garder un soutien social et maintenir la paix, l’ANC a aussi annoncé des augmentations de salaire et la constitution de conseils locaux pour le contrôle de la production et de la distribution.

    Un programme pour dégager la bureaucratie

    Pour empêcher l’étranglement de l’économie, il faut prendre des mesures socialistes comme la nationalisation de la banque et des grandes entreprises – qui continuent de faire des bénéfices spectaculaires dus à la spéculation – et décréter un monopole d’État sur les exportations et importations. Mais pour que cela marche, il faut le contrôle et la gestion directe et démocratique des travailleurs, pas de bureaucrates et d’entrepreneurs comme aujourd’hui.

    Aux élections du 30 juillet pour l’ANC, des centaines de milliers de militants de gauche (principalement chavistes) se sont mobilisés contre la droite mais en exprimant en même temps des critiques envers gouvernement et la bureaucratie. Pendant la campagne, 54 000 pré-candidats se sont présentés comme alternative à ceux proposés par la direction du PSUV. Même si quelques uns ont réussi à se présenter, la plupart ont été exclus par des magouilles.

    Les méthodes inacceptables de la bureaucratie, comme les menaces contre les travailleurs pour s’assurer leur vote, favorisent la droite. La seule façon d’éviter que celle-ci reprenne l’offensive c’est l’unité des courants de gauche, y compris chavistes, autour d’un programme socialiste anti-bureaucratique, pour mobiliser massivement les travailleurs et le peuple, pour en finir avec les capitalistes et la bureaucratie, mais aussi avec la pauvreté, les inégalités et la corruption. Cela renouvellerait la confiance des opprimés au Venezuela tout comme la solidarité internationale avec leur révolution face à l’impérialisme et la droite.

     

  • Venezuela. L’assemblée constituante et les tâches des révolutionnaires.

    Le 1 mai, le président Nicolas Maduro a annoncé la convocation d’une assemblée constituante, « pour atteindre la paix nécessaire à la république (…) pour défaire le coup d’état fasciste (…) afin que ce soit le peuple, avec sa souveraineté, qui impose la paix, l’harmonie et un réel dialogue national. »

    Par Izquierda Revolucionaria et Socialismo Revolucionario (CIO-Venezuela)

    Cette déclaration arrive dans le contexte d’une très grave crise économique et sociale, avec une inflation autour de 700% (voire 3000% dans le cas des produits alimentaires) et une claire érosion de nombreuses réformes et conquêtes sociales gagnées dans les années précédentes, ainsi que le licenciement de milliers de travailleurs. La pauvreté, qui s’était fortement réduite sous Chavez, est en train de croître de manière spectaculaire, menant à un accroissement de violences urbaines, à l’insécurité, à la marginalisation, etc.

    La droite Vénézuélienne (unie au sein de la MUD – Mesa de la Unidad « Democratica »), utilise cette situation de manière opportuniste et hypocrite, essayant de capitaliser sur celle-ci. Ces parasites bourgeois de la MUD ne peuvent offrir aucune alternative aux travailleurs et à la population, leur programme représente le même cauchemar que Temer au Brésil et Macri en Argentine.

    Pourtant, le triomphe de la droite contre-révolutionnaire au Venezuela est aujourd’hui une réelle possibilité. La raison fondamentale pour cela est que le gouvernement Maduro n’applique pas de mesures socialistes, mais fait plutôt tout le contraire. Il fait une concession après l’autre aux capitalistes nationaux comme internationaux et met en place une austérité dure contre la propre base sociale qui a soutenu le processus révolutionnaire pendant des années.

    La classe des travailleurs et des pauvres a fait tout ce qui était en son pouvoir pour faire une révolution socialiste basée sur une démocratie des travailleurs et défaire les contre-révolutionnaires. Mais le gouvernement – même s’il continue de parler de socialisme et de révolution – applique des politiques capitalistes qui ne servent qu’à démoraliser et démobiliser les masses.

    La stratégie de la contre-révolution et les contradictions de l’état.

    La bourgeoisie internationale et la MUD ont réagi à la convocation de l’assemblée constituante avec des cris d’horreurs. Avec leur cynisme habituel, les mêmes personnes qui ont organisé le coup d’état en 2002, emprisonné Chavez (démocratiquement élu par la population), dissous le parlement et suspendu la constitution (ratifiée par 87% de la population lors d’un référendum), parlent maintenant de « coup d’état » et de « dictature », pleurant des larmes de crocodile à propos de « la menace sur les libertés » au Venezuela.

    La virulence de la MUD et des impérialistes dans leur rejet de l’assemblée constituante n’est pas innocent. Leur objectif est de faire tomber Maduro aussi vite que possible, arriver dans le palais présidentiel et appliquer des plans de privatisations sauvage et des attaques sur les travailleurs et les pauvres en démantelant toutes les mesures progressistes appliquée sous Chavez. Se conformant aux demandes de leurs suzerains, le FMI et les multinationales impérialistes.

    Le parlement actuel (assemblée nationale), élue en décembre 2015 et dominée par la MUD est un des principaux instruments pour exécuter leurs plans. Accepter l’assemblée constituante signifie renoncer à cet instrument fondamental. Cela pourrait donner du temps et de l’espace au gouvernement Maduro pour manœuvrer, et cela pourrait aussi avoir comme conséquence de démoraliser la base sociale de la droite contre-révolutionnaire, comme cela s’était déjà produit avec la tactique qu’elle avait adoptée sous pression de la maison blanche après octobre 2016. L’impérialisme, après l’échec de la grève générale de 12h appelée par la MUD, avait alors conclu que la MUD manquait de la force nécessaire pour prendre d’assaut le palais présidentiel avec succès. Par conséquent, leurs leaders ont été forcé de reporter leurs plans et de tenter des négociations avec le gouvernement. Le résultat a été la démoralisation d’une partie des sympathisants de la MUD durant plusieurs mois.

    La décision du tribunal suprême de justice (TSJ), le 30 mars passé, d’assumer les fonctions de l’assemblée nationale a provoqué un nouveau virage dans la situation. Cette mesure a ouvert des divisions au sein du gouvernement et au sommet de l’état, ce qui a conduit Maduro à rectifier les déclarations du TSJ. La droite, encouragée par ces divisions, s’est jetée à nouveau dans les rues et a organisé de nombreuses manifestations, particulièrement au début. Cependant, pour le moment, elle fait toujours face au même problème que 8 mois plus tôt. Malgré le déclin économique, et malgré le mécontentement grandissant à propos de beaucoup des mesures économiques et politiques que le gouvernement a passée durant l’année et qui ont miné son soutien, les dirigeant de la MUD ne sont toujours pas capable de construire une véritable connexion avec les masses (particulièrement avec les plus pauvres). Son origine sociale, les intérêts de classe de la MUD et ses liens étroit avec les capitalistes et les impérialistes lui rend la tâche difficile, jusqu’à présent, de construire un niveau de pression suffisant dans les rue pour entraîner une rupture complète au sein de la direction de l’état et de l’armée.

    Les appels lancés par la MUD à mener des arrêts de travail ces derniers jours n’ont pas reçu de soutien, dans aucun des secteurs significatifs de la classe des travailleurs. D’ailleurs, l’attitude du patronat n’était, elle non plus, pas très enthousiaste. Beaucoup de patrons sont sceptique sur le fait que des arrêts de travail puissent réellement forcer un changement de gouvernement. Ils ont également peur que la participation à ces arrêts de travail puisse mettre en danger l’assistance et les dollars qu’ils reçoivent du gouvernement, en particulier depuis qu’il n’applique actuellement plus de mesures contre eux.

    Beaucoup des mesures de Chavez que le patronat a attaquée – comme les expropriations, les appels au contrôle ouvrier et à la mobilisation – ont été abandonnée par le gouvernement et une part significative des mesures demandées par le patronat depuis des années commencent à être implémentée par Maduro. Ceci inclus l’augmentation des prix, la flexibilité des contrôles, des limites à la participation des travailleurs, un frein aux attentes des secteurs de la gauche qui veulent créer un syndicat révolutionnaire et lutter pour le contrôle ouvrier, le paiement régulier de la dette publique, et l’alliance avec le patronat national et étranger pour lancer des « entreprises mixtes » et des « zones économiques spéciales », etc.

    Avec leurs possibilités limitées d’augmenter le niveau de manifestation de rue, ou de réussir à organiser des arrêts de travail, la majorité des dirigeants de la MUD et certains secteurs de l’impérialisme se sont lancé ces dernières semaines dans une tactique de renforcement des actions musclée des bandes fascistes, avec une presse internationale les présentant comme des jeunes indignés défendant la démocratie. Ces bandes organisent des attaques sur les bâtiments publics et des affrontements armés avec la garde nationale et ont jusqu’à présent déjà causé 45 morts. Ils veulent susciter l’idée dans l’opinion publique qu’il existe une situation de confrontation civile au Venezuela qui requiert une intervention forte de la part d’organismes impérialistes internationaux (comme l’ONU, l’OEA, etc.). Ils espèrent qu’une pression et des sanctions diplomatiques puissent provoquer un changement dans la relation de force interne au haut commandement militaire, ce à quoi ils ne sont toujours pas parvenus jusqu’à maintenant.

    Pour l’instant, le soutien des dirigeants militaires en faveur de la constitution d’une assemblée constituante semble unanime, du moins si l’on se base sur leurs déclarations publiques. L’une des premières déclarations de soutien et la plus explicite fut celle du ministre de la défense et chef des armée, Vladimir Padrino. Cependant, la situation est très volatile et pourrait changer rapidement dans un sens comme dans l’autre, comme nous l’avons vu après la tentative avortée du tribunal suprême de justice d’assumer les fonctions de l’assemblée nationale. Il est clair qu’il existe des divisions et des scissions au sein de l’appareil d’état. Le procureur général, Luisa Ortega Diaz, qui s’était opposée à la décision du tribunal a déclaré que la « constitution de 1999 ne peut pas être améliorée », a critiqué la constitution d’une assemblée constituante et a même justifié les actions de certains secteurs de manifestant de l’opposition, rejetant parfois la responsabilité des violences sur le gouvernement.

    Pour le moment, ces divisions au sein de l’appareil d’état n’ont pas empêché le décret convoquant une assemblée constituante d’être signé et publié. Mais il n’est pas exclu qu’a un moment donné, la pression de la MUD et des impérialistes puisse stimuler de nouvelles divisions ou provoque une crise ouverte dans le gouvernement et la direction de l’état.

    Si le gouvernement appliquait des politiques véritablement socialistes, permettant à la classe des travailleurs et des pauvres d’être à l’initiative et de prendre le pouvoir dans leurs propres mains, mettant fin à la corruption et au sabotage des capitalistes et de la bureaucratie d’état, il serait assez facile de défaire les plans de la contre-révolution et de sauver la révolution bolivarienne de la défaite et de la dégénérescence bureaucratique. Mais malheureusement, les politiques appliquées jusqu’à présent vont dans le sens opposé.

    Combattre la contre-révolution avec des mesures socialistes, pas capitalistes.

    A la suite de la défaite électorale de décembre 2015, des milliers de militants chaviste, travailleurs et/ou issus des milieux populaire ont demandé, à travers des assemblées spontanées, un tournant vers la gauche et le développement du pouvoir ouvrier et populaire. Non seulement pour combattre l’assemblée nationale dirigée par la MUD, mais aussi pour mettre fin à la cinquième colonne bureaucratique qui parle de chavisme, socialisme et révolution mais démantèle les acquis de la révolution.

    Le gouvernement a formé un “parlement communal” et un “congrès de la patrie”. Les deux ont été présenté comme des initiatives pour stimuler le pouvoir et la participation des militants de base. Le contraire s’est produit. Le parlement communal a été interrompu et n’a jamais été utilisé pour menacer la droite. Son développement dans le sens que les activistes espéraient et proposait n’a pas été autorisé. En ce qui concerne le « congrès de la patrie », il est devenu un grand rassemblement dans lequel le « pouvoir populaire » et la question de la « direction de la révolution par la classe des travailleurs » ont été abordé sans fin, mais pas une seule mesure concrète n’a été prises pour permettre l’un ou l’autre.

    Quand des secteurs critique parmi les militants de base ont essayé de faire entendre leur voix, ou de faire des propositions, ils ont été qualifiés de « radicaux », « d’ultragauches », de « lanceur de pierre » ou pire, d’« escualidos » (les assimilant à la droite). Alors que la rhétorique officielle parle de la « direction des entreprises par la classe des travailleurs », des milliers de travailleurs révolutionnaires sont exclus du RABSA (le réseau d’approvisionnement Bicentenario), l’emploi se réduit dans de nombreuses entreprises publiques et les élections au syndicat SUTISS (représentant SIDOR, la deuxième plus grande entreprise du pays) ont été entravée de peur que les secteurs de gauche, critique vis-à-vis des politiques du gouvernement, puissent gagner. La même chose s’est produite avec les élections syndicale à la Fédération Unie des travailleurs du Pétrole (FUTPV).

    Ces mesures s’ajoutent à des politiques économiques comme des hausses de prix et des réductions de salaires, y compris en cassant avec les normes salariales établies par Chavez. Le gouvernement s’est également montré tolérant avec les entreprises qui refusent de reconnaitre les syndicats.

    D’autres expressions de ce tournant vers la droite ont été le paiement régulier de la dette aux banquiers tout en réduisant les fonds pour l’importation de nourriture pour les pauvres, l’ouverture de la ceinture pétrolière de l’Orénoque aux entreprises mixtes et la création d’un consortium (COMINPEG) sous le contrôle de l’état-major de l’armée qui a le pouvoir de conclure des accords avec des entreprises privée pour l’exploitation des ressources minérale. L’« acte minier », ouvre également 12% du territoire vénézuélien à l’exploitation des ressources minérale du pays par les multinationales, y compris des entreprises comme Gold Reserve, expulsée du Venezuela par Chavez. Et plus récemment, nous avons assisté à l’ « expo Potencia », où des millions de dollars ont été remis au patronat et où beaucoup de leurs exigences ont été satisfaites.

    Cette recherche d’accords avec la bourgeoisie va même jusqu’à la tentative d’obtenir la reconnaissance de l’impérialisme US, ou au moins d’une partie de celui-ci. Récemment, le site d’Aporrea a publié des preuves que la chaîne de station-service CITGO (détenue par la compagnie pétrolière d’état Vénézuélienne PDVSA) a fait un don de 500 000 $ à la campagne électorale de Donald Trump – supposément dans le but d’améliorer le traitement du Venezuela par le nouveau président Américain. A ce jour, les dirigeants gouvernementaux interrogé n’ont pas contesté cette information.

    Toutes ces politiques, contraire à ce que les militants révolutionnaires ont espéré, ne sont pas des déviations accidentelles. Dans la pratique, l’objectif de construire le socialisme sous la direction des travailleurs et de la population a été complètement abandonné et remplacé par une tentative de construire un modèle de capitalisme d’état, en association avec l’impérialisme russe et chinois (qui sont présenté comme des amis de la population vénézuélienne) ainsi qu’avec des sections de la classe dominante latino-américaine.

    L’assemblée constituante représente-elle un tournant à gauche ?

    La convocation d’une Assemblée constituante signifie-elle une modification de ces politiques ? Parmi certaines sections de base du PSUV et du mouvement Bolivarien, même chez une partie de ceux qui ont été critique du gouvernement, il y a un certain espoir que cela pourrait être le cas. D’autres couches d’activistes et de militants révolutionnaires restent très critique sur la mesure, voire déclarent ouvertement qu’ils n’ont aucune confiance dans celle-ci.

    Maduro et d’autres dirigeants du PSUV ont parlé d’une assemblée constituante de la classe des travailleurs et du peuple. Maduro déclara qu’il « appelle à une assemblée de citoyens, pas des partis ou des élites, une assemblée de travailleurs, des communes, de paysans, de féministes, de jeunes, d’étudiants, d’indigènes, mais surtout d’une assemblée clairement issue de la classe des travailleurs… ».

    Selon des déclarations qui ont suivi, au moins 250 membres de l’assemblée seront élus par secteur et corporation. Ils ont parlé de représentants des missions, des travailleurs, des pensionnés, des conseils communaux, etc. bien que les aspects concrets ne soit toujours pas clair concernant les secteurs et combien de délégué pour chacun. Paradoxalement, certaines critiques provenant de l’extrême droite de la révolution bolivarienne coïncident avec celles des plus fanatiques groupie du gouvernement, qui ont comparé l’assemblée constituante à de la démocratie directe soviétique. Mais, est-ce que cela a vraiment quelque chose à voir avec les soviets – les organes élus et révocable démocratiquement qui ont permis à la classe ouvrière et à la paysannerie de prendre le pouvoir en Russie et de construire un état socialiste révolutionnaire il y a 100 ans ?

    Si tel était le cas, il s’agirait évidemment d’un énorme pas en avant. Cependant, malheureusement, la réponse est négative. L’assemblée constituante proposée n’a rien à voir avec des organes de pouvoir populaire en développement. La démocratie ouvrière sous la forme de soviet – c’est-à-dire des conseils d’ouvriers, de paysans et de soldat qui sont établis comme organes révolutionnaires du pouvoir en transition vers le socialisme et forment l’épine dorsale d’un état ouvrier – peux seulement être le produit d’une action forte et indépendante depuis la base de la société, par les travailleurs eux-mêmes. Cela ne peut jamais s’accomplir par des mesures imposées d’en haut, particulièrement par un gouvernement qui en même temps, cherche des accords avec la classe dominante.

    Le développement du pouvoir de la classe des travailleurs implique la nécessaire destruction de l’état bourgeois et de ses privilèges, lois et instruments de répression (ministères, mairies, armée et police séparée de et non contrôlée par la population, etc) et son remplacement par le pouvoir de la classe des travailleurs, contrôlant démocratiquement le nouvel état socialiste en transition, à travers des conseils de délégués élus et révocable démocratiquement, sujet au contrôle permanent de ceux qui les ont élus. Aucun représentant élu ou fonctionnaire public ne devrait toucher plus que le salaire d’un travailleur qualifié. Cela doit aller de pair avec l’expropriation des principales sources de productions de richesse (usines, terres et banques) qui peuvent être gérée démocratiquement au sein d’une économie planifiée afin de résoudre les besoins de la population.

    La convocation d’une assemblée constituante par le gouvernement n’est pas une mesure socialiste. Elle n’a rien de commun avec les objectifs ci-dessus. Elle n’est pas combinée avec un plan pour mettre les usines, la terre et les banques sous le contrôle et la gestion démocratique directe par les travailleurs et les pauvres. Au contraire, l’objectif de cette nouvelle assemblée constituante et des autres mesures du gouvernement est de renforcer l’appareil d’état, toujours bourgeois, et les accords mentionnés plus haut avec les différents secteurs de la classe capitaliste nationale et internationale. Ceci doit être rejeté par tous ceux qui se battent pour mettre fin au capitalisme et faire du socialisme une réalité.

    Dans les 9 objectifs de l’assemblée constituante cité par Maduro, le socialisme n’est même pas mentionné, mais remplacé par la promesse d’un soi-disant « modèle économique post-pétrole ». Il en va de même pour le pouvoir populaire, le contrôle ouvrier et les appel à se mobiliser contre la bureaucratie. Ce qui est mentionné est l’appel à une alliance avec les patrons pour construire un « Venezuela pour tous ». En fait, jusqu’à présent, le gouvernement a eu plus de rencontres avec les représentants patronaux pour discuter la nouvelle proposition, qu’avec n’importe quel autre secteur.

    Organiser les travailleurs et les pauvres pour faire une révolution dans la révolution et se débarrasser des capitalistes et des bureaucrates.

    Un des arguments des défenseurs de l’assemblée constituante est que, étant donné l’offensive des contre-révolutionnaires et la pression internationale, « rien d’autre ne peut être fait ». Mais est-ce correct ? Non ! Nous pouvons et nous devons faire quelque chose d’autre. Nous pouvons et nous devons faire ce que les militants de base ont demandé depuis longtemps, ce que même Chavez a soutenu peu avant sa mort : donner un coup de barre à gauche et faire une révolution dans la révolution en prenant le pouvoir des mains de ceux qui l’exerce aujourd’hui et entrainent l’économie à la catastrophe, les capitalistes et les bureaucrates, et en le mettant dans les mains de la classe des travailleurs et des pauvres. Une chose que seul les travailleurs et les opprimés peuvent porter. Comment ? En établissant une assemblée révolutionnaire de délégués élus et révocables, dans les entreprises, dans les campagnes et les casernes, et adopter un programme socialiste afin de combattre les capitalistes et la bureaucratie « bolivarienne ». Ils se réclament du socialisme mais partagent des intérêt commerciaux de plusieurs millions de dollars avec les capitalistes, contribuent délibérément à la mise en danger des acquis de la révolution et contrôlent une part considérable de l’appareil d’état.

    Si les élections pour l’assemblée constituante prennent place, ce qui semble le plus probable pour le moment, et qu’elles servent uniquement à peindre les dirigeants qui ont agi contre le pouvoir de la classe des travailleurs en « représentant du peuple », alors aucun des problèmes qui ont causé la situation actuelle de démoralisation parmi les masses et d’avancée de la contre-révolution ne seront résolu. Ceux qui utilisent la rhétorique socialiste et l’image de Chavez pour se propulser au pouvoir et accumuler des privilèges alors que la population subit l’inflation et les pénuries, ne peuvent pas continuer à diriger.

    Il n’y a qu’un seul moyen d’éviter une victoire de la contre-révolution bourgeoise, représentant les plans de la MUD et de l’impérialisme, ainsi que la dégénérescence bureaucratique dans le gouvernement qui liquide les acquis révolutionnaires et renforce finalement le pouvoir du capitalisme. Les travailleurs et les pauvres, qui ont porté et fait avancer la révolution dans le passé et l’on défendue contre les attaques de l’impérialisme et de la contre-révolution, doivent se mobiliser et s’organiser de manière indépendante afin de lutter pour leurs propres droits et revendications et défendre les conquêtes révolutionnaires aujourd’hui menacée.

    Le 1 mai, diverses organisations à la base du chavisme, mais critique des politiques gouvernementale, ont discuté de la formation d’un front unique et appelé les secteurs critiques du PSUV qui sont opposé aux alliances avec la bourgeoisie, à lutter ensemble pour une politique révolutionnaire. C’est le chemin à suivre. Les gens ne peuvent compter que sur eux-mêmes pour se sauver. Seule une unité de la jeunesse, des paysans, des travailleurs et des soldats révolutionnaires dans le cadre d’une lutte pour un programme anticapitaliste, socialiste, internationaliste et antibureaucratique, afin de mettre tout le pouvoir politique et économique dans les mains de la classe des travailleurs, peut éviter une tragique défaite de la révolution vénézuélienne.

  • Coup dur au Venezuela, la coalition de droite gagne les élections

    Venezuela's acting President Nicolas Maduro attends a ceremony at the Teresa Carreno theater in Caracas March 13, 2013. Venezuelan acting President Nicolas Maduro said on Wednesday that "far right" figures in the United States were plotting to kill opposition leader Henrique Capriles. REUTERS/Carlos Garcia Rawlins (VENEZUELA - Tags: POLITICS ELECTIONS)

    Une nouvelle étape du renforcement du processus contre-révolutionnaire qui a pris place au Venezuela vient d’être franchie lors des élections parlementaires qui ont eu lieu ce dimanche 6 décembre 2015.

    Par ben (Charleroi)

    La coalition de droite (MUD) y a gagné une large majorité de députés. C’est un grand recul pour le PSUV, parti du président Maduro ainsi que pour l’héritage de la «révolution Bolivarienne» d’Hugo Chavez. La coalition de droite obtient 7,7 millions de votes en sa faveur, c’est a dire 2 millions de plus qu’en 2010, ce qui est également le nombre de votes qu’elle gagne en plus que le PSUV lors des élections de ce dimanche. La droite passe de 65 députés en 2010 à 112 lors de ces élections-ci tandis que le PSUV perd sa majorité de 95 élus en 2010 et tombe à seulement 55 aujourd’hui. Le président Maduro peut donc s’attendre à des tentatives de destitution de la part de la droite dans les prochains mois.

    C’est la première défaite électorale majeure depuis 1998 et la victoire d’Hugo Chavez à l’élection présidentielle. Déjà en 2010, malgré le fait que le PSUV a recueilli plus d’élus, la droite (MUD) avait récolté quelques centaines de milliers de votes en plus que le PSUV. Et plus récemment, nous nous rappelons que lors de l’élection présidentielle de 2013 qui faisaient suite au décès de Chavez, Maduro n’avait été élu qu’avec 1% de plus que le candidat de la droite. Pour ceux qui étaient attentifs au développement qui prenait place au Venezuela, les résultats de ces élections ne sont donc pas une surprise. Notre organisation a d’ailleurs systématiquement averti de ce risque depuis de nombreuses années et nous renvoyons le lecteur aux différents textes écrit par le passé sur cette question. Voici d’ailleurs le lien vers un article écrit lors des élections parlementaires de 2010.

    Depuis plusieurs années, on a assisté à la «nicaraguanisation» du Vénézuela, en référence à la contre-révolution rampante qui avait mis fin à la révolution sandiniste au Nicaragua. En effet, après la période d’euphorie révolutionnaire entre 2003 et 2006, on a vu une période de renforcement progressif de la contre-révolution sur le terrain électoral. Les mesures nécessaires pour pousser la révolution en avant et pour rompre avec le capitalisme n’ont pas été prises. Cet échec de la révolution à avancer en rompant avec avec le capitalisme est à la base de l’épuisement et de la démoralisation des masses et c’est ce qui a permis cette victoire de la contre-révolution sur le terrain électoral.

    Le Venezuela a été fortement impacté par la chute vertigineuse des prix du pétrole alors que les Pétrodollars était vitaux pour maintenir les programmes de sécurité sociale. A cela, s’ajoute les conséquences du sabotage économique perpétré par la classe capitaliste, mais aussi la corruption et la bureaucratisation rampantes. Le gouvernement n’a pas publié de chiffre pour le PIB depuis décembre 2014. Cependant, le FMI parle d’un rétrécissement du PIB d’au moins 10%. 30% des réserves d’or du gouvernement ont été utilisées pour payer des remboursement de dettes ainsi que des importations. Bien que ce soit le Brésil et le Chili qui sont le plus touchés, le ralentissement de l’économie chinoise a des effets important sur l’économie du continent entier, y compris du Venezuela. Une inflation énorme ainsi que les pénuries chroniques de biens basiques ont heurté de plein fouet le niveau de vie des travailleurs et de la classe moyenne. La situation sociale et économique est devenue catastrophique.

    Cela fait très longtemps que Maduro justifie la situation par le sabotage économique des capitalistes, mais il n’a pris aucune mesure pour reprendre en main l’économie et introduire un plan de production discuté démocratiquement.
    La classe des travailleurs doit maintenant se regrouper autour d’un programme de revendications pour résister à l’austérité et aux attaques contre les droits démocratiques que la classe capitaliste ne va pas manquer de mener dans la prochaine période.

  • [DOSSIER] Nouveau tournant en Amérique latine – La fin de la vague de gauche?

    castro_obamaLa poignée de main historique entre Barack Obama et Raúl Castro, les troubles au Venezuela, le recul sur toute une série de réformes en Bolivie ainsi que la crise au Brésil sont autant de symboles du nouveau tournant en vigueur en Amérique latine. Les nombreux espoirs en termes de réformes radicales au Venezuela, en Bolivie et en Équateur ont laissé place à la désillusion.

    Résumé d’un dossier de Tony Saunois

    La fin de la croissance économique

    Hugo Chávez au Venezuela, Evo Morales en Bolivie,… avaient promis une transition vers le socialisme, mais ces discours n’ont pas été concrétisés par des mesures de véritable rupture anticapitalistes, raison pour laquelle leurs réformes sont à présent menacées. Dans les pays au gouvernement de centre-gauche comme le Brésil, la corruption est toujours aussi endémique, provoquant des crises politiques en sus des problèmes économiques.

    Pendant plus de dix ans, le continent a connu une croissance économique rapide qui a encouragé les gouvernements de centre-gauche à mettre en place une série de réformes. Mais même après cette période de croissance, des millions de personnes restent dans la pauvreté. Pétrole, gaz, cuivre, soja et autres matières premières présentes en quantité en Amérique latine ont trouvé d’importants débouchés sur le marché chinois, raison derrière cette croissance. Mais le ralentissement de l’économie chinoise se fait à présent ressentir sur les exportations de matières premières, avec également un impact sur leurs prix.

    La dépendance de l’Amérique latine vis-à-vis des exportations de matières premières a conduit à une rapide désindustrialisation. Les matières premières comptent aujourd’hui pour 60 % des exportations brésiliennes. Au Venezuela, le pétrole constitue 96 % des exportations.

    Conséquences politiques

    La crise a frappé alors que des gouvernements de gauche ou de centre-gauche existent dans plusieurs pays du continent. D’où une grande confusion. Certains parlent d’un virage à droite de la région et il est certain que le mécontentement a ouvert une brèche qu’instrumentalisent diverses forces de droite traditionnelle afin de se construire un plus grand soutien. Il s’agit cependant bien plus de l’expression de l’absence d’une véritable alternative socialiste.

    Le Brésil a connu une vague de grèves ce début de l’année (fonctionnaires, enseignants, ouvriers de l’automobile, métallurgistes,…). Dans l’État du Paraná, la fonction publique est partie en grève à durée indéterminée, contraignant le gouvernement régional à annuler ses plans d’austérité. Les ouvriers de Volkswagen et de General Motors ont obtenu des victoires partielles contre des licenciements.

    Les immenses scandales de corruption au Brésil (qui impliquent également des cadres du Parti des travailleurs de l’actuelle présidente Dilma Rousseff) ont fait exploser la méfiance envers tout le système politique. La droite joue sur ces évènements et exige la démission de Rousseff. Le PT a répondu en tentant de mobiliser sa propre base, mais beaucoup de militants ne sont plus prêts à s’impliquer. Heureusement, il y a également eu des actions revendiquant des réformes sociales, qui critiquaient tant le gouvernement que la droite. La marche du 15 avril à São Paulo a ainsi réuni 30.000 personnes à l’initiative du Parti pour le socialisme et la liberté (PSoL) et du Mouvement des travailleurs sans toit (MTST), soutenue par le syndicat de lutte CSP-Conlutas (Centrale syndicale et populaire) et même (après hésitations) par le syndicat officiel, la Centrale unique des travailleurs (CUT). Cette marche a été suivie d’autres dans le pays. La direction syndicale subit en ce moment une forte pression de la base qui exige une grève générale nationale de 24 heures.

    C’est l’Argentine qui illustre le mieux le fait que la gauche véritable peut se renforcer dans le cadre de la lutte contre la politique d’un gouvernement de centre-gauche qui refuse de rompre avec la logique du capitalisme. La croissance électorale du Front de gauche des travailleurs (FIT), une alliance de différents partis trotskistes, contredit cette idée d’un virage à droite du contenu. Le succès de cette alliance dépendra à présent de sa capacité à se consolider après son succès initial et à attirer des syndicalistes pour construire un nouveau parti large des travailleurs.

    Le régime du Venezuela sous pression

    La catastrophe économique au Venezuela a été approfondie par la chute du prix du pétrole. L’économie vénézuélienne va reculer de 5 % cette année (la récession était de -4 % l’an dernier). Un tiers des denrées de base (viandes, médicaments, vêtements) ne sont plus disponibles nulle part. Dans la rue, des gens annoncent vouloir échanger du papier toilette contre du savon, etc. Le Venezuela connait actuellement un des plus forts taux d’inflation au monde : environ 70 %.

    Cela sape le soutien au gouvernement. Ces problèmes résultent de la spéculation et des efforts des capitalistes pour déstabiliser le pays mais aussi de l’approche bureaucratique suivie par le régime chaviste. Les réformes de Chávez sont remises en question. Le système des soins de santé est en crise : sur 45.000 lits dans les hôpitaux publics, seuls 16.000 peuvent être utilisés en ce moment, faute de moyens. Le soutien au président Maduro est tombé à 30 % dans les sondages. C’est le résultat de l’impasse d’avoir voulu réformer le pays tout en restant dans les limites du capitalisme, sans véritable nationalisation de l’économie sous contrôle et gestion démocratiques de la population. La voie a donc été ouverte pour la déception, ce sur quoi compte la droite.

    La fin de l’embargo sur Cuba

    L’impérialisme américain a complètement revu sa politique à l’égard de Cuba. Début 2015, Obama et Raúl Castro ont annoncé un accord historique. Obama a reconnu : ‘‘On ne peut pas faire la même chose encore et encore pendant 50 ans en espérant obtenir un résultat différent.’’ Les classes dirigeantes européennes et canadienne, ainsi que la majorité des capitalistes latino-américains, ont choisi une autre approche, à présent également suivie par Obama.

    Depuis la révolution cubaine de 1959, l’impérialisme américain a maintenu un strict embargo contre Cuba et a fait différentes tentatives d’y mettre à bas le régime stalinien afin de restaurer le capitalisme, jusqu’à monter une intervention militaire en 1961. Malgré les graves conséquences de l’embargo américain sur l’économie cubaine, les États-Unis n’ont rien obtenu. La révolution cubaine continue en effet à jouir d’un large soutien parmi la population. Les États-Unis ont donc à présent opté pour une autre politique, avec le même objectif. Comme Léon Trotsky le disait à propos de l’ex-Union soviétique, la menace de la restauration capitaliste peut aussi revêtir le masque de ‘‘marchandises bon marché dans le train de l’impérialisme’’ en inondant le pays de marchandises et d’investissements.

    La situation révolutionnaire au Venezuela, en Bolivie et en Équateur au début de ce siècle n’a malheureusement pas été utilisée pour s’orienter vers une fédération libre d’États socialistes latino-américains. Les régimes réformistes de Morales, de Chávez et de Rafael Correa ont accompli d’importantes réformes populaires, mais sont restés dans le cadre du capitalisme. Parallèlement, le régime cubain progresse dans la voie d’une restauration capitaliste, dont la tête de pont a été établie dans le secteur touristique, avec des mesures telles que la hausse de l’âge de la pension, la création de zones de libre-échange au port de la baie de Mariel,… Si l’assouplissement des restrictions aux voyages à l’étranger doit être applaudi, les autres mesures menacent les conquêtes de la révolution.

    La transition vers une complète restauration du capitalisme ne va pas s’effectuer en ligne droite. Certaines factions au sein du régime ne voient pas cette restauration d’un bon œil. Ainsi, Mariela Castro, la fille du président Raúl, déclarait en janvier que : ‘‘La population cubaine ne veut pas d’un retour au capitalisme.’’ Les secteurs stratégiques de l’économie n’ont pas encore été privatisés ni vendus à des capitalistes étrangers. L’arrivée de Mastercard et de Netflix est à noter, mais cela reste essentiellement symbolique.

    La crise et la résistance

    Pour les socialistes et pour la classe des travailleurs, chaque pas vers restauration du capitalisme est un pas en arrière. Ce processus sera au final utilisé par la classe dirigeante, surtout en Amérique latine, pour discréditer l’idée selon laquelle le socialisme est une alternative au capitalisme, sans toutefois avoir un effet comparable à l’offensive idéologique antisocialiste qui a suivi la chute des anciens régimes staliniens en Europe de l’Est et dans l’Union soviétique vers 1989-1991.

    La fin de l’embargo pourrait donner à Cuba la possibilité de commercer sur le marché mondial. Sans une véritable démocratie des travailleurs, cela risque d’accélérer le développement de la restauration capitaliste. Eviter ce danger exige d’instaurer le monopole d’État sur le commerce extérieur, sous contrôle démocratique de la classe des travailleurs. Dans le contexte d’une nouvelle crise internationale du capitalisme, il est possible que les mesures visant à la restauration capitaliste restent limitées, que Cuba reste coincé dans une situation hybride.

    Les conquêtes de la révolution concernant les soins de santé ou l’enseignement seront sans doute maintenus, même si ces secteurs connaissent des pénuries en raison de l’insuffisance des investissements. Certaines couches de la population ont peur de la disparition de ces conquêtes et craignent que leur pays ne se retrouve relégué au rang de simple république bananière. Il faut lutter contre la restauration capitaliste mais aussi pour la démocratie des travailleurs et l’économie démocratiquement planifiée.

    L’Amérique latine a besoin d’une alternative socialiste de masse. Il faut pour cela reconnaitre le caractère limité des réformes, même radicales, et des méthodes bureaucratiques suivies au Venezuela, en Bolivie et en Équateur. Ces pays restent prisonniers du capitalisme. Le fait que la droite parvienne à mobiliser de manière populiste et opportuniste au Brésil, au Venezuela et dans d’autres pays démontre l’urgence d’un mouvement socialiste fort. La classe des travailleurs et les socialistes révolutionnaires doivent utiliser cette nouvelle période de crises et de luttes pour construire une alternative socialiste combative.

  • Venezuela : Lancement du “Conseil populaire révolutionnaire” à Caracas

    La situation au Venezuela

    Le “Consejo Popular Revolucionario” (CPR, Conseil populaire révolutionnaire) est une nouvelle coalition autonome révolutionnaire regroupant environ 30 organisations révolutionnaires, des mouvements sociaux, des collectifs et des groupes militants, qui a été fondé en réaction à la situation critique qui est en train de se développer aujourd’hui au Venezuela. Jamais n’a été aussi claire jusqu’à présent la nécessité de construire une organisation révolutionnaire non seulement pour triompher de la nouvelle offensive de droite, mais également pour défendre les acquis du “Processus bolivarien” (mouvement d’émancipation nationale lancé par feu le président Chávez dans les années ‘2000) et pour les faire progresser vers le socialisme révolutionnaire. Lors du congrès de lancement de cette organisation, à laquelle plus de 100 personnes étaient présentes, de nombreux militants ont parlé du caractère critique de la situation, qui nous force à prendre des mesures décisives et courageuses dans le cadre de cette crise.

    Jusqu’à présent, 28 personnes ont été officiellement tuées au cours des manifestations qui se sont répandues dans le pays depuis le mois dernier. Dans certaines régions comme Táchira, Zulia et Merida, on voit l’infiltration de groupes paramilitaires de droite envoyés par le gouvernement colombien de M. Uribe ainsi que de rebelles pro-impérialistes, avec la militarisation partielle de ces régions par les FANB, Forces armées nationales bolivariennes ; cela confère donc à la situation un air de début de guerre civile.

    Les militants qui ont pris la parole lors de l’assemblée nous ont décrit la situation dans les villes de la région de Táchira qui sont maintenant tombées entre les mains des rebelles. Les rebelles exigent de leur payer des prix exorbitants pour avoir accès au gaz, à l’eau ou à la nourriture, tous ces produits de base étant devenus extrêmement rares. Dans de nombreuses zones, les rebelles ont élevés des barrages ; les transports ne passent plus, c’est la vie de tous les jours qui est paralysée. Selon nos camarades, les rues sont vides à partir de 5 heures du soir car les habitants ont peur de sortir de chez eux.

    C’est la même situation dans le Merida, où la peur règne depuis la mort d’une étudiante chilienne, Giselle Rubilar. Elle faisait partie d’un groupe d’habitants qui ont tenté de dégager un barrage tenu par des étudiants de droite, et c’est là qu’elle a été tuée, abattue par balles. Dans la région de Carabobo, trois personnes ont été abattues le 12 mars lors de manifestations d’étudiants de droite, qui voulaient ainsi “commémorer” un mois depuis le début de leur mouvement anti-chaviste. À Caracas, deux personnes ont été abattues par un sniper lors d’une bagarre entre le syndicat des taxi-motos et des manifestants de droite dans un quartier riche. Tout cela rappelle ce qui s’est passé avant le coup d’État de 2002. À ce moment-là, on voyait des rebelles exécuter des gens au hasard dans les rues, dans le but de créer un climat de terreur et d’instabilité partout dans le pays.

    Les risques d’un accroissement des violences est bien réel ; la droite exerce une réelle pression, soutenue par l’impérialisme américain, qui vise à renverser le gouvernement Maduro et le “chavisme”. Tous les révolutionnaires du Venezuela en sont bien conscients. Ce renversement pourrait adopter diverses formes – nous n’allons sans doute pas connaitre la même situation qu’en 2002, qui était un coup d’État avec le soutien d’une partie de l’armée. Face à la spirale de la violence, la crise économique qui continue, où on voit un plan conscient de la part d’une partie de l’extrême-droite de saboter le pays, et où la droite modérée s’avère capable d’attirer à elle une partie de la classe ouvrière et des pauvres, on pourrait voir un accord de “transition” et la convocation de nouvelles élections.

    Le gouvernement n’a jusqu’ici pas fait grand-chose pour éviter cela. Le gouvernement s’est contenté d’appeler à la paix, à la réconciliation et à la négociation, tout en appellent les travailleurs et les pauvres à se mobiliser pour contrer la droite. Lors des dernières semaines, tout en critiquant et en rejetant les offres de “médiation” de la part de l’impérialisme – ce qui est correct –, et en réagissant vertement aux attaques scandaleuses et hypocrites de la part du gouvernement Obama, le gouvernement Maduro a en même temps continué à inviter les dirigeants de la droite à venir au palais présidentiel discuter avec lui ; il a même dit que si les dirigeants étudiants de droite venaient, il les embrasserait ! Il dit également qu’il ne les laissera pas vaincre sa “révolution chrétienne-humaniste”.

    Une telle “transition” ne peut signifier que la défaite de la gauche révolutionnaire et des travailleurs et des pauvres, sur le plan national comme international. Notre coalition, le CPR, défend les acquis des 15 dernières années et l’héritage de Chávez, mais nous disons qu’il faudra bien plus que des discussions et des négociations pour vaincre la droite – notre tâche urgente est en réalité de construire une organisation et d’aller vers le socialisme révolutionnaire.

    Les organisations et les individus qui participent au CPR ne sont pas les seuls dans le pays qui ressentent le besoin d’action ; il faut prendre des mesures pour unifier ces forces. Nous, Socialismo Revolucionario, section vénézuélienne du CIO, appelons l’ensemble des organisations de gauche et révolutionnaires, ainsi que tous les représentants élus de gauche et les syndicats du monde entier, à envoyer des messages de solidarité afin d’exprimer votre soutien au CPR et à la lutte contre la nouvelle offensive de droite.

    Vous pouvez écrire en anglais ou espagnol à l’adresse socialismo.rev.venezuela@gmail.com.

    Les partisans de notre initiative au niveau international doivent aussi être avertis du fait que l’administration Obama parle de “sanctions” contre notre pays, et qu’il faudra sans doute organiser des actions devant les ambassades pour protester contre les attaques de l’impérialisme, afin de défendre les acquis du Processus bolivarien et de soutenir les mouvements révolutionnaires dans ce pays qui luttent pour le socialisme.

    La première assemblée du CPR a voté la déclaration suivante :

    1) Nous considérons que les récents évènements dans notre pays ont pour but de créer les conditions d’un conflit au Venezuela et mettent ainsi en danger l’État vénézuélien ainsi que les forces armées et l’intégrité de notre nation.

    2) Le point de départ de ce conflit a été l’invasion de forces paramillitaires venues de Colombie, soutenues par le gouvernement Obama et par l’ex-président de Colombie M. Uribe, alliés à l’aile droite réactionnaire au sein de l’alliance vénézuélienne “Mesa de Unidad” (Table de l’unité), c’est-à-dire les partis Primera Justicia et Voluntad Popular – toutes ces forces contrôlant à présent la région de Táchira. Ces forces tentent à présent d’envahir les régions de Merida et de Zulia puis de poursuivre vers l’Est en direction de Caracas afin d’y semer le chaos sous la forme de barrages et de pénuries de nourriture et de biens de nécessité. Leur action a pour but de créer un climat favorisant le renversement (sous la forme d’un coup ou d’une “transition”) du gouvernement Maduro et du chavisme, ce qui, dans le contexte actuel, pourrait nous mener à la guerre civile.

    3) Vu cette menace, nous devons unir l’ensemble des forces populaires, progressistes, patriotiques et révolutionnaires avec pour objectif la restauration de notre intégrité territoriale nationale, via des Comités intégrés de défense populaire dans chaque région, dans chaque ville, dans chaque quartier, dans chaque zone industrielle, sur chaque usine, entreprise, marché, école ou université.

    4) Nous appelons l’ensemble des forces progressistes et révolutionnaires à se réunir et à s’organiser en conseils populaires afin d’organiser des Comités de défense dont les deux objectifs doivent être : le contrôle de la production et de la distribution de nourriture par les citoyens eux-mêmes, ainsi que le contrôle par les citoyens des services publics (santé, transport, gaz, eau, électricité, enseignement).

    5) Nous voulons un dialogue avec l’ensemble de la population, y compris parmi les classes moyennes, qui est opposée à abandonner la souveraineté du Venezuela aux forces impérialistes sous la houlette de Uribe ou par un éventuel gouvernement de droite qui serait soutenu par ces éléments.

    6) Nous appelons à une action révolutionnaire nationale de masse afin de libérer les régions de Merida, Zulia, Táchira du contrôle des rebelles de droite par la mise en place de Comités de défense. Ce mouvement doit être entamé par des manifestations et actions dans chaque ville, grande ou petite, à compter du dimanche 13 avril et qui culmineront avec une assemblée populaire de masse à San Cristobal, chef-lieu de la région de Táchira, le samedi 19 avril.

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