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Tag: PTB
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Chaque étincelle peut mener à une nouvelle explosion
Le plan d’action a beau être annulé, la colère est toujours présenteDurant l’été, les directions syndicales ont petit à petit mis de côté la grève du 7 octobre pour le deuxième anniversaire du gouvernement fédéral. C’est le président de la CGSLB, Mario Coppens, qui fut le plus clair: ‘‘sauf si le gouvernement annonce soudainement des mesures imbuvables, je ne vois que peu de raisons de faire grève’’.
Par Geert Cool
A-t-il eu vent de cette carte blanche parue en Flandre d’une infirmière dénonçant le personnel insuffisant pour offrir des soins dignes à nos aînés en maisons de repos ? De ces cuisiniers qui se plaignent d’y devoir préparer trois repas par jour avec trois euros seulement ? De ces facteurs tellement à bout de souffle, sous le poids de la flexibilité accrue des plans géoroutes, que l’on songe à engager des réfugiés pour distribuer le courrier ? En réalité, le travail n’est pas ‘faisable’, pour reprendre le terme de Kris Peeters. Avant l’été, l’indignation et la colère se sont exprimées par les actions spontanées des agents pénitentiaires et des cheminots, notamment. Mêmes les magistrats se plaignent du manque de moyens.
Après l’été, la rhétorique du ‘jobs, jobs, jobs’ a douloureusement été discréditée avec l’annonce de licenciements collectifs chez Caterpillar, Axa, P&V assurances, Douwe Egberts,… Pour les travailleurs, les mesures imbuvables sont légion.
Ici et là, on peut entendre qu’il est préférable de se tenir prêt pour de pires mesures, car tout le monde partirait alors spontanément en action. Mais sans avant-garde donnant directement le ton en construisant la résistance avec un plan d’action, on risque de rester coincé dans cette stratégie de l’attente. Entretemps, nos conditions de vie et de travail continueraient à en voir de belles. L’absence d’actions de notre part renforcera l’arrogance du gouvernement et des patrons. La faiblesse entraine l’agression.Avec ce gouvernement de droite dure, les employeurs sont confortablement installés dans un fauteuil tandis que les attaques antisociales se succèdent devant leurs yeux: augmentation de l’âge de la pension, saut d’index, augmentation de la TVA, prolongations de la semaine de travail,… Les dirigeants syndicaux qui entretiennent encore l’illusion de pouvoir modérer ce gouvernement thatchérien ou de pouvoir sérieusement négocier avec lui se trompent quant à son caractère. Essayer d’arrondir les angles, cela ne fonctionnera pas.
Attendre les prochaines élections n’est pas non plus une bonne stratégie. Nous avons pu le constater en Grande-Bretagne après l’arrivée du gouvernement Conservateurs-Libéraux-Démocrates en 2010. Quand les actions syndicales ont été stoppées après 2011, la droite a pu dominer le débat public, en conséquence de quoi David Cameron a été réélu en 2015. Le gouvernement conservateur britannique a réussi à diminuer les salaires de 10 % et à bâillonner encore plus les droits syndicaux.
Si la direction n’organise pas d’actions, ou insuffisamment sérieusement, le mécontentement ne disparaitra pas, il se transformera parfois en frustration, d’autres fois en actions spontanées qui vont déborder la direction syndicale. Chaque étincelle peut conduire à une explosion. Ce qui manque surtout en ce moment, c’est une direction de combat avec un programme de rupture anti-austérité.
Chaque syndicaliste combatif et socialiste a un rôle important à jouer: organiser la lutte, impliquer des collègues, donner une orientation avec des suggestions sur le programme et les méthodes, évaluer collectivement,… bref, construire le rapport de force avec lequel nous pouvons faire dégager le gouvernement de droite, et toute sa politique d’austérité.
Un espace grandissant à gauche: le PTB à 15% dans les sondages
Le plan d’action de fin 2014 l’a démontré: avec des actions unifiées et bien organisées, nous pouvons faire vaciller le gouvernement. Construisons sur cette expérience. Commençons avec ce groupe d’avant-garde dans le mouvement des travailleurs, qui a grandi. Saisissons chaque ouverture pour impliquer un maximum de collègues. Le potentiel pour des actions reste grand, le mécontentement augmente et mènera à des nouvelles explosions.
Sur le plan politique, l’espace grandit également pour la gauche conséquente. Qui n’a pas été impressionné par le récent sondage dans lequel le PTB est à 14,6% et devient le 3e parti de Wallonie, devant Ecolo et le cdH ? A Bruxelles, le résultat est également bon et le seuil électoral est dépassé en Flandre. Selon cette enquête, les deux élus du PTB à la chambre seraient 10 aux prochaines élections. Le PSL se réjouit de cette progression.
Imaginez ce que 10 députés fédéraux et leurs multiples collègues au niveau régional pourraient signifier pour le mouvement syndical. Nos inquiétudes et nos revendications seraient autrement relayées au parlement. Cela forcerait ce dernier à ne pas tout simplement les ignorer. Les médias ne pourraient pas faire autrement que de tenir notre voix en compte.
Ce serait l’occasion non seulement de dénoncer les inégalités, mais aussi de populariser le changement social et le socialisme. Des initiatives audacieuses – non seulement axées sur les élections, mais aussi et surtout sur les luttes sociales – placeraient résolument nos points de vue et nos propositions au centre de l’agenda politique.
Les échéances électorales sont importantes, mais ce sont les mouvements sociaux, dans la rue, qui ont permis au mouvement des travailleurs d’imposer des réalisations concrètes. Voilà comment ont été obtenus la sécurité sociale ou le droit de grève. Une position forte sur le plan électoral peut renforcer le combat de la rue en le popularisant et en lui donnant une plate-forme plus large pour diffuser ses mots d’ordre.
Mais une assise électorale plus importante, c’est encore insuffisant pour délivrer un changement politique. Des forces de gauche autrement plus majeures que le PTB n’y sont malheureusement pas arrivées. Il suffit de penser à SYRIZA en Grèce, qui a capitulé et qui applique maintenant la politique d’austérité de la troïka. Ou à Bernie Sanders, qui a voulu éviter de poursuivre sa révolution politique et a essayé de la dévier vers un soutien à Clinton, la candidate par excellence de l’establishment. Ils ne manquaient pas de bonnes intentions, au contraire d’un programme cohérent ainsi que d’une méthode pour assurer un rapport de forces visant à rompre avec la politique d’austérité.
Nous espérons que le PTB en tirera aussi des leçons et qu’il ne tombera pas dans les mêmes pièges. Il nous semble ainsi très dangereux de participer à des coalitions, même sur le plan local des conseils communaux, avec la ‘‘gauche’’ de l’establishment. L’appel tactique pour un cartel avec le SP.a et Groen à Anvers – en sachant peut-être que ces deux partis allaient refuser – indique que le PTB est prêt à aller très loin pour participer à des coalitions. Les revendications et le programme que divulgue maintenant le PTB est adapté à ce qui est acceptable pour ces potentiels partenaires de coalition. Avec le temps, cela pourrait nuire à la résistance contre la pression de l’establishment pour rentrer dans la logique du système.
Le PSL est partisan de la construction d’un large parti de lutte de gauche qui offrirait plus que le ‘‘votez pour moi la prochaine fois’’. La gauche radicale dans son entièreté, et le PTB en premier lieu, doit y jouer un rôle. L’existence d’un large parti de lutte dans laquelle tous ceux qui veulent combattre l’austérité trouveraient leur place et qui disposerait d’un programme ambitieux en rupture totale avec la logique du capitalisme est la meilleure garantie pour arracher un véritable changement. Vous voulez renforcer cette idée et soutenir notre programme? Rejoignez le PSL.
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‘‘Le PTB et le PSL. Différences et points de rencontre possibles dans la construction d’une alternative politique’’
Nous publions un livre d’Eric Byl concernant le PTB et le PSL, leurs histoires, leurs différences et les possibilités de collaboration. Eric a écrit ce texte fin 2013 pour entamer le débat au sein du PSL au sujet de la croissance électorale du PTB. Ce texte est resté un moment en plan, mais il est maintenant terminé avec une préface d’actualisation. Déjà publié en néerlandais, il sera disponible en français dans le courant du mois de janvier.Pourquoi ce livre? Partout en Europe et aux États-Unis, nous observons la progression de forces de gauche et les opportunités qui se présentent à elles. En Grèce, Syriza est même arrivé au pouvoir avec la promesse de rompre avec les politiques d’austérité. Ces promesses n’ont pas été tenues, ce qui a entrainé une grande déception, mais la possibilité parvenir à un réel changement a en même temps été révélée. Il n’y a aucune raison de supposer que le développement d’une puissante force de gauche en Belgique ne soit pas possible. En tant que plus grand parti de gauche, le PTB est le mieux placé pour jouer un rôle dans ce domaine. Les premiers jalons électoraux ont été posés avec deux représentants élus à la Chambre, six parlementaires régionaux et 52 élus locaux dans les communes. Il s’agit d’un développement important pour tous les militants de gauche, pour tous ceux qui désirent une alternative à la politique d’austérité. Nous jugeons par conséquent nécessaire d’approfondir la question du développement du PTB.
Pour comprendre d’où provient le PTB et comment le PSL se positionne par rapport à celui-ci, il est nécessaire de faire une analyse de nos racines et de nos développements différents, lesquels expliquent les divergences de vues importantes qui existent entre ces deux formations. Examiner ce que sont ces dernières et ce qui se trouve à leur base constitue une condition préalable pour entamer une discussion sérieuse à ce sujet.
Le livre revient sur la grève des étudiants du secondaire de 1966, sur le mouvement Leuven Vlaams et sur les occupations d’usines qui ont eu lieu au début des années 1970. Il revient également sur certaines positions politiques, non seulement du PTB mais aussi du PCB, de la LCR et du Vonk concernant divers événements comme la Guerre du Golfe, l’intervention de l’OTAN en Yougoslavie, la lutte contre le racisme, les événements survenus parmi les Jongsocialisten,…
Nous saluons les progrès du PTB, les idées de gauche sont ainsi remises à l’agenda politique et cela favorise la discussion sur les alternatives à opposer au capitalisme. Le PTB peut également jouer un rôle important dans le processus de reconstruction d’une traduction politique large des revendications du mouvement des travailleurs. Les positions politiques du PTB ont cependant leurs limites, notamment concernant l’attitude complaisante à l’égard d’une coopération et d’une coalition avec la gauche officielle (la social-démocratie) et avec les verts. Cela revient à représenter le flanc gauche des partis de l’austérité alors que, parallèlement, le PTB a une attitude très fermée à l’égard des autres forces à la gauche de ces partis.
Le PSL a fait des propositions constructives pour coopérer avec le PTB là où c’était possible, sans beaucoup de résultats jusqu’à présent. Lors des élections de 2014, toute coopération a été rejetée avec nous et, depuis lors, le rassemblement plus large du côté francophone repris sous le nom de ‘‘Gauche d’Ouverture’’ a été liquidé. Nous comprenons que le PTB veuille consolider sa propre avancée et ne veuille pas mener des discussions interminables au sein de la gauche. Mais, au sein du mouvement des travailleurs, il y a des idées et des courants différents qui ne peuvent pas simplement être balayés du revers de la main.
Des premiers enseignements de l’expérience des nouvelles forces de gauche, comme Syriza, ressort également l’importance d’adopter un programme politique visant à rompre avec le capitalisme. Il ne suffit pas de faire des propositions d’améliorations et de changements qui profitent à la majorité de la population, nous devons aussi examiner comment réaliser ces propositions. Cela nécessite une rupture avec l’ensemble du système. En déconnectant l’alternative socialiste de la lutte de tous les jours, celle-ci s’en trouve affaiblie et l’alternative socialiste devient également plus abstraite. C’est la critique principale que nous portons sur l’approche du PTB.
Nos critiques du PTB ne servent pas à ‘‘marquer des points’’, mais à justement éviter que le PTB ne suive le même chemin que d’autres formations de gauche et ne gaspille les opportunités qui se présentent en participant au pouvoir. Comme le livre le conclut: ‘‘Nous invitons le PTB à ne pas chercher des alliés sur son aile droite. Il n’y a pas plus à y gagner qu’un baiser de Judas pour le PTB et que de se brûler les ailes en participant au pouvoir. Les alliés se trouvent à gauche. Parmi ceux qui sont, lors des luttes, du même côté des barricades. Ils sont plus petits et plus francs, mais ils se situent, contrairement à l’aile droite, du côté des travailleurs et des opprimés et militent, chacun à leur manière, pour des changements réels de la société, dans notre cas, pour une société socialiste.’’
Le livre ‘‘Le PTB et le PSL. Différences et points de rencontre possibles dans la construction d’une alternative politique ” par Eric Byl revient à 12 euros (frais d’envoi compris). Pour le commander, effectuez un virement sur le compte BE 48 0013 9075 9627 de ’Socialist Press’ avec en communication ‘‘livre PTB’’. Le livre sera disponible en français dans le courant du mois de janvier.
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L’establishment essaye de criminaliser le mouvement syndical
Avec 100.000 personnes, la manifestation du 7 octobre fut un succès. Pareil pour la grève lancée par la FGTB Liège-Huy-Waremme et la FGTB-Verviers le 19 octobre. Tout comme l’attention médiatique s’était concentrée sur les troubles en marge de la manifestation des 150.000 du 6 novembre 2014, le blocage spontané de l’autoroute E40 a reçu les qualificatifs ‘‘d’apocalypse’’ (Sudpresse) ou encore de ‘‘délinquance en vareuse rouge’’ (La Libre).Par Fabian et Nico, article tiré de l’édition de novembre de Lutte Socialiste
La criminalisation du mouvement social est une pratique bien rodée pour discréditer la lutte. Ceux qui viennent manifester pour la première fois sont souvent marqués par la brutalité policière. Les manières de faire dégénérer une manifestation ne manquent pas en instrumentalisant la frustration de certains militants, si nécessaire avec l’aide de provocateurs. Il suffit de penser aux arrestations du 7 octobre, notamment commises par des agents portant foulards et autres insignes syndicaux.
Avec la grève du 19 octobre à Liège, il était clair à l’avance que le moindre prétexte soit utilisé pour taper sur l’ensemble du mouvement des travailleurs et insister sur la division du front commun. Le blocage de l’autoroute E40 a ainsi été utilisé pour criminaliser les grévistes. Et les choses ont encore empiré lorsque l’on a appris le décès d’une patiente au CHC (Centre Hospitalier Chrétien) d’Hermalle. Le CHC a porté plainte contre X pour homicide involontaire, se basant sur le fait que le chirurgien qui devait l’opérer avait été bloqué un moment par le barrage. Qu’il n’y ait eu qu’un seul médecin disponible, cela montre la gravité des pénuries dans les soins de santé. Et cela clarifie aussi que la médecine par prestation entrave la collaboration entre les divers hôpitaux et les médecins spécialistes. Evidemment, ce n’est pas ce qui est retenu à droite. Le député libéral David Clarinval a même reproché aux élus du PTB d’avoir du sang sur leurs mains!
Le syndicat des employés de la FGTB, le SETCa, a tenu à préciser divers points dans une lettre envoyée à ses affiliés. Premièrement, le CHC est justement le commanditaire d’un chantier où, tôt le matin du 19 octobre, les grévistes avaient découvert des travailleurs indiens exploités et vivant dans des containers. Les médias ont été quasiment muets sur ce point pourtant des plus scandaleux et l’attention a ensuite été déviée sur le blocage, à quelques centaines de mètres de là. La lettre rappelle aussi que ‘‘les coupes drastiques dans le financement des soins de santé de ces dernières années (…) poussent les différents acteurs à faire des économies constantes dans un univers de plus en plus concurrentiel. Combien de décès dus à ce sous-financement et à ses économies décidées par le politique ?’’ L’hôpital avait aussi refusé d’établir un service minimum, considérant qu’il ne subirait aucune perturbation, du fait que la CSC n’était pas en grève.
Ensuite, le CHC a reconnu dans la presse ne pas prétendre qu’il y a eu un lien de cause à effet entre le blocage et la mort de la patiente mais qu’il voulait ‘‘ouvrir un débat sur les limites du droit de grève’’. Donc après avoir porté des accusations très graves envers les militants syndicaux, le CHC dévoile sa véritable intention… à savoir limiter le droit de grève. On peut difficilement être plus clair.
Quelques jours plus tard, la députée N-VA Zuhal Demir a déclaré en ‘‘avoir soupé des syndicats’’ et a saisi l’occasion pour demander de ‘‘repréciser le droit de grève dans la loi’’ et… de soumettre les syndicats à ‘‘la responsabilité juridique’’! Cette revendication n’était défendue que par l’extrême droite par le passé, avec l’idée de briser les syndicats en les rendant juridiquement responsables des actes de chacun de leurs affiliés et en les obligeants à dévoiler leurs comptes et plus précisément les montants de leurs caisses de grève. Philippe Godfroid, président de l’Union des classes moyennes (UCM) a abondé dans le même sens.
Ce blocage spontané s’explique car ‘‘les travailleurs sont exaspérés parce qu’ils ne sont pas entendus, ni par le gouvernement ni par le patronat’’, a déclaré Marc Goblet, le secrétaire général de la FGTB. C’est vrai. Mais bon nombre sont aussi exaspérés par le temps qui a été perdu après la grève générale nationale du 15 décembre. Nous avions l’occasion de faire chuter ce gouvernement des riches et l’occasion a été gâchée. Encore aujourd’hui, rien de précis n’émerge quant à la stratégie syndicale suivie pour balayer l’austérité. Si la colère justifiée des travailleurs ne peut s’exprimer dans un plan d’action sérieux et crescendo, avec des objectifs clairs, jusqu’à la chute du gouvernement, alors celle-ci s’exprimera autrement. A partir de maintenant, il ne faut pas faiblir face à l’offensive de la droite sur l’opinion publique, mais au contraire serrer les rangs et riposter de manière organisée et sérieuse.
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Quelles idées pour changer la société ?
Le livre ‘’La taxe des millionnaires et sept autres idées brillantes pour changer la société’’ développe la position du PTB concernant une série d’importants points de programme. Il s’agit d’un livre très bien écrit qui expose plusieurs revendications de manière très accessible. On n’y trouve cependant aucune proposition en termes de changement fondamental de société.Par Geert Cool, article tiré de l’édition d’été de Lutte Socialiste
Des revendications telles que la semaine des 30 heures, l’impôt sur la fortune pour les super-riches, plus de logements sociaux,… sont très importantes. Mais ces exigences se heurtent aux limites du système actuel.
Les auteurs de cet ouvrage collectif font beaucoup d’efforts pour tenter de prouver que leurs revendications sont acceptables – pas seulement pour la majorité de la population, mais aussi au sein du système capitaliste. Le socialisme n’est d’ailleurs pas une des huit ‘‘idées brillantes’’ dont il est question. Cette idée n’est de fait mentionnée nulle part dans l’ouvrage, excepté dans un passage sur le grand nombre de logements sociaux à Vienne, pour en dire carrément : ‘‘On ne peut pas dire que Vienne soit un ilot socialiste au milieu d’un Europe néolibérale.’’ (p. 67). Ces dernières années, nos conquêtes sociales ont été pilonnées. Est-ce parce qu’on manquait de bonnes idées de réformes ? Certainement pas. Mais dans le contexte de la crise du capitalisme, il n’est guère facile d’obtenir des réformes, même limitées.
Avoir de bonnes idées bien argumentées ne suffit pas. C’est ce qu’a d’ailleurs découvert le nouveau gouvernement grec. L’establishment capitaliste n’a eu que faire de ses bons arguments pour rompre avec l’austérité. N’est-il pas lui-même en train de mener une lutte de classe dans l’intérêt des super-riches ? Dans cette guerre sociale menée par la classe dirigeante, répondre par de ‘‘bons arguments’’ est insuffisant. Il est crucial d’aborder le thème de la manière dont nous pouvons obtenir la satisfaction de nos revendications et, par conséquent, d’en finir avec le système capitaliste. Ce livre ne fait nullement état de l’importance des mouvements et de la lutte. Les auteurs vont même jusqu’à suggérer que de nombreuses réformes peuvent être obtenues uniquement en élisant les bonnes personnes.
Le livre se limite à un ‘‘programme minimum’’, à des revendications destinées à améliorer la vie de tous les jours. Pour les marxistes, aucune distinction ne doit être faite entre le programme de revendications minimum et le programme de transformation de la société. Il faut un programme transitoire capable d’ériger un pont entre les besoins logiques et immédiats de la majorité de la population et la nécessité de renverser le capitalisme, ce sans quoi aucune véritable revendication ne peut être garantie à long terme. Des concessions limitées peuvent être arrachées sous le capitalisme grâce à la pression des luttes, mais elles seront sans cesse remises en question, ce qu’illustre parfaitement cette période d’attaques brutales contre nos conditions de vie. Le ‘‘capitalisme social’’, ça n’existe pas.
La revendication d’une ‘‘taxe des millionnaires’’ (une taxe sur la fortune des super-riches) a gagné en popularité en conséquence de l’indignation éprouvée au regard du fossé grandissant entre riches et pauvres. Mais une taxe sur la fortune ne pourrait-elle pas conduire à une fuite des capitaux? Peter Mertens et Marco Van Hees répondent que cela serait sans véritables conséquences, renvoyant à l’exemple de la France (p. 29). Pourtant, le PTB veut récupérer deux fois plus d’argent avec sa taxe des millionnaires que l’impôt sur la fortune n’en a ramené en France et ce dans un pays à l’économie cinq fois plus petite. L’application d’une taxe des millionnaires requiert la levée du secret bancaire, la création d’un cadastre des fortunes et de permettre à l’État d’effectuer des expropriations. La fuite des capitaux pourrait être bloquée par un monopole étatique sur le commerce extérieur et sur les capitaux sous contrôle démocratique des travailleurs.
La revendication de la semaine des 30 heures s’impose elle aussi vu la hausse de la productivité et l’arrivée de nouvelles technologies. La semaine des 40 heures n’est non seulement plus nécessaire, mais aussi de moins en moins tenable pour de plus en plus de gens. Aujourd’hui, nous travaillons en moyenne 31 heures par semaine. Mais nous payons nous-mêmes les frais de cette baisse du travail par de moins bons salaires et des contrats flexibles et à temps partiel. Le progrès technologique n’est pas mis au service de la société, mais sert uniquement à accroitre les profits. Cela permet une baisse du temps de travail ; mais cela nous mène surtout à plus de chômage. Les auteurs citent Oscar Wilde, qui disait ‘‘Tout le monde tirerait avantage de machines intelligentes qui seraient la «propriété de tous»’’ (p. 51). De tout le livre, il s’agit là de la seule suggestion de modifier les rapports de propriété au sein de la société. Nous sommes entièrement d’accord avec la nécessité d’un changement de société afin de pouvoir diminuer le temps de travail sans perte de salaire et avec baisse des cadences de manière à ce que cela profite à tout le monde.
Les autres revendications exposées dans l’ouvrage ne sont pas développées jusqu’à la nécessité d’un changement de société. Par rapport à l’enseignement, on parle d’une école plus large, plus centrée sur les jeunes, mais sans faire mention du financement public de l’enseignement. Pour les soins de santé, on demande la gratuité totale, sans aborder la nécessité d’un service de santé national comprenant la nationalisation du secteur pharmaceutique, notamment pour réduire le prix des médicaments. On dit qu’il faut plus de logements sociaux, mais on ne demande pas une loi pour plafonner le montant des loyers à un certain pourcentage du revenu. L’appel à la constitution d’entreprises d’électricité publiques constitue un pas en avant pour le PTB concernant l’énergie, le parti ne se limite plus à demander une baisse de la TVA à 6 %. Il est suggéré qu’il serait peut-être plus utile de développer des entreprises d’électricité étatiques, mais le livre reste très superficiel à ce niveau. Pourtant, la (re)nationalisation totale du secteur de l’énergie représenterait un pas important en avant. Il est fait mention d’un ‘‘plan de transports durables’’, mais cela n’est pas lié à la question d’un transport en commun gratuit. Il faut un plan massif d’investissement public dans l’enseignement, dans les soins de santé, dans l’énergie et dans les logements sociaux – ce qui irait carrément à l’encontre des intérêts des 1 % les plus riches qui détiennent le pouvoir actuellement.
Le chapitre sur le racisme se limite malheureusement à inspecter le respect des lois. Cela suffiraitil à supprimer le terreau sur lequel se développe le racisme ? Cela mettrait vraiment un terme à la discrimination dans l’enseignement et sur le marché de l’emploi ? Une interdiction légale de la discrimination serait quelque chose de positif, mais on ne peut pas s’en prendre au racisme sans un programme qui apporte à tout un chacun un bon travail, un bon logement, une place à l’école, etc.
Concernant la démocratie, le PTB perdure dans sa proposition d’organisation de référendums contraignants. Sous ce système capitaliste, une grande partie de notre vie est sacrifiée face aux intérêts des grandes entreprises, ce qu’il est impossible de supprimer sans faire passer les secteursclés de l’économie sous contrôle et gestion publics. Nous ne pouvons contrôler ce qui ne nous appartient pas. On ne peut décemment parler de ‘‘démocratie’’ sans considérer la question de sa place dans le cadre du système capitaliste. Le chapitre sur la démocratie ne parle à aucun moment de la nécessité de construire un mouvement de masse pour lutter contre la politique antisociale, avec participation démocratique de la base et structuration de la lutte. C’est pourtant essentiel afin de pouvoir accroitre le rapport de forces qui nous permettrait de concrétiser dans l’action cet appel au changement, en vue d’en finir avec le capitalisme et de passer à la transformation socialiste de la société. L’organisation et la participation démocratique à la lutte constituerait en même temps une base pour une société plus démocratique, dans laquelle nous aurions réellement notre mot à dire.
Il est utile d’avoir de bonnes idées, mais nous devons aller plus loin et indiquer comment nous pouvons les concrétiser par la construction de mouvements de masse et comment, à partir de là, nous pouvons obtenir un véritable changement de société. Cette autre société à laquelle nous aspirons, est celle du socialisme démocratique.
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1 mai 2015 : Une illustration du manque de clarté sur l'alternative au gouvernement des riches
Un an après les élections qui avaient vu triompher la N-VA et six mois après l’entrée en fonction de ce gouvernement des riches et du début de la lutte engagée contre lui, le SP.a s’est concentré sur lui-même et sur les élections pour la présidence du parti. Les appels en demi-teinte pour poursuivre la résistance, comme celui lancé par Freya Vanden Bossche à Gand, ignoraient de façon très commode la question cruciale de la perte de l’élan donné par la grève générale nationale du 15 décembre et du rôle qu’y a joué la social-démocratie. Dans de nombreuses villes, la présence syndicale a été plus limitée que les années précédentes.Mais celui qui en tire des conclusions pessimistes se trompe. Ce 1er mai doit être considéré dans le cadre du merveilleux mouvement anti-austérité de l’automne dernier. Nous avons dû passer à travers le déluge de propagande et de menaces des patrons, de leurs politiciens et de leurs médias. Notre mouvement de résistance sociale a réussi à s’attirer non seulement le mouvement des travailleurs mais aussi la jeunesse, le secteur culturel et même certains petits indépendants. Tout cela n’a été possible que grâce aux traditions de lutte du mouvement des travailleurs, traditions qui constituent par ailleurs également l’essence même du 1er mai. Nous avons bénéficié d’un bon plan d’action pour engager le combat et construire un vaste mouvement de solidarité.
Ce qui manquait, c’était une alternative politique claire à ce gouvernement. Oui, nous sommes contre le saut d’index, contre le relèvement de l’âge de la pension ou encore contre les nombreuses économies réalisées au détriment de nos conditions de vie. Mais que mettre en place par la suite? Voir le retour d’un gouvernement Di Rupo, à l’image de ce gouvernement qui a limité dans le temps les allocations de chômage dites d’insertion et a attaqué les prépensions?
Cette absence d’alternative a très bien été illustrée par le presque ex-président Bruno Tobback qui a cyniquement déclaré placer ses espoirs dans rien d’autre que le vice-premier ministre Kris Peeters (CD&V). Nous n’avons pas très bien compris ce que cet ancien dirigeant de la fédération patronale flamande UNIZO avait à faire avec le mouvement des travailleurs… Le prochain président du SP.a, John Crombez, a plaidé pour un taxshift où l’imposition des grandes fortunes servirait à financer des réduction des charges sur le travail de l’ordre de 10%. Visiblement, taxer les grandes fortunes pour répondre aux nombreux besoins sociaux (plus de logements sociaux, augmentation des allocations sociales, renforcement des services publics,…) n’est pas une proposition attrayante pour le SP.a. Ce n’est pas surprenant.
Tout comme pour le SP.a, le 1er mai a été l’occasion pour le PS de se préoccuper de lui-même. A Liège, Jean-Claude Marcourt a fait valoir que le parti devrait se regrouper et, à Charleroi, Paul Magnette a dit qu’il fallait un «long et difficile combat» notamment pour «nous interroger sur ce que l’on a peut-être fait de moins bien». Il ne faut toutefois pas y voir le début d’une critique de la logique néolibérale adoptée par le PS… Cette social-démocratie n’est décidément pas l’alternative que nous attendons.
Lors des différentes célébrations du 1er mai, le PTB était particulièrement présent et a lancé sa campagne de printemps en faveur des 30 heures de travail par semaine. Le PTB reprend enfin la revendication de la réduction collective du temps de travail en réponse au chômage et afin de réduire la charge de travail. Quelques temps plus tôt, c’est le mouvement Femma (équivalent néerlandophone de Vie Féminine) qui avait défendu la réduction collective du temps de travail. Avec cette proposition d’une semaine de 30 heures, le PTB veut accentuer qu’il fait une proposition positive. Malheureusement, on ne trouve pas du côté du PTB d’évaluation de la lutte de ces six derniers mois contre le gouvernement des riches. Le PTB semble avoir peur de donner la moindre critique aux directions syndicales, même si une partie de cette direction est marquée par le manque d’alternative si manifeste que représente la social-démocratie. Le résultat fut que ce 1er mai n’a pas été l’occasion de revenir sur l’une des plus grandes grèves de ces dernières décennies. Si la journée de lutte du 1er mai n’ouvre pas la possibilité d’évaluer notre résistance sociale, quand pouvons nous le faire ?
Avec le PSL, nous avons insisté ce 1er mai sur la manière dont le mouvement de résistance sociale avait fait vacillé le gouvernement à l’automne dernier. Mais il a su se maintenir au pouvoir. Après la grève générale du 15 décembre, nous avons gaspillé un moment particulier. Cela ne signifie toutefois pas que la colère contre l’austérité a disparu. Les provocations du gouvernement se poursuivent et l’austérité devient sans cesse plus concrète et tangible. Nous connaîtrons de nouvelles vagues de résistance. Afin d’en faire un succès, il est essentiel d’évaluer la première vague de protestation sociale et de tenter de répondre à notre plus grande faiblesse, l’absence d’une alternative politique aux partis de droite.
Nos militants sont intervenus partout dans le pays et ont vendu 603 exemplaires de notre journal, Lutte Socialiste, soit 120 de plus que l’an dernier. Nous avons pu vendre 148 exemplaires à Liège, 122 à Bruxelles, 87 à Gand, 60 à Bruges et 55 à Alost. De jeunes militants ont vendu pour plus de 300 € de badges à Gand. A Anvers, nous avons formé une délégation comprenant des militants d’origine tamoule qui, avec le soutien actif de la FGTB Horval, tentent de construire l’implantation syndicale parmi les travailleurs les plus opprimés, un travail de pionnier qui cadre parfaitement dans la tradition du 1er mai. Ces prochaines semaines, nous prévoyons d’organiser des réunions ouvertes dans différentes villes afin de tirer l’évaluation des six mois du gouvernement et de l’opposition sociale. Discutez en avec nous afin d’être ensemble plus forts pour les batailles qui nous attendent!
Évaluons ensemble la lutte contre ce gouvernement des riches!
Assemblée ouverte PSL-Bruxelles : 20 mai – 19h – Pianofabriek, 35 rue du Fort, 1060 Saint-Gilles
Quelques photos du premier mai
Liège
Anvers (photos de Liesbeth)
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Contre les Thatcher belges : quelle alternative?

Photo : Maxime Deroeux La déclaration gouvernementale avait à peine été rendue publique que les syndicats déposaient un plan d’action ambitieux allant crescendo jusqu’à une grève générale de 24h le 15 décembre prochain. Peu de temps après, les cheminots sont partis en action, puis le siège du MR a reçu la visite de militants de la FGTB de Namur qui ont coloré sa façade.
Par Nicolas Croes
Très logiquement, la tension n’a cessé de monter suite aux continuelles provocations du gouvernement Michel. Les réactions n’ont pas manqué non plus de la part de l’opposition politique. Peut-on pour autant dire que tous les ennemis du gouvernement fédéral sont nos amis ?
‘‘Des mesures d’une brutalité sans précédent’’
C’est ce que veut dénoncer le PS, notamment avec sa campagne ‘‘injuste.be’’, lancée à coups de demi-pages dans les quotidiens et de vidéos contre le gouvernement ‘‘MR-N-VA’’ : ‘‘Le gouvernement MR N-VA coupe dans votre portefeuille. Moins 400 euros par an par personne. Ils suppriment l’indexation de votre salaire.’’ On imagine bien à quel point le PS est à l’aise pour parler des précédents, lui qui a collaboré aux 25 dernières années de recul social organisées par les autorités fédérales (dont la modération salariale et diverses manipulations de l’index…) et qui est encore au pouvoir en Wallonie et à Bruxelles.
Reste que le Boulevard de l’Empereur (siège du PS) a su élaboré élaborer une stratégie d’opposition qui pourrait presque parvenir à faire oublier les 22 milliards d’économie du gouvernement Di Rupo ! C’est comme si le PS n’avait jamais voté des mesures telles que l’exclusion des allocations d’insertion, qui frappera des dizaines de milliers de chômeurs dès le 1er janvier prochain ! Ainsi, Laurette Onkelinx a lancé la charge en séance plénière de la Chambre : le projet du gouvernement ‘‘frappera de plein fouet tous les travailleurs de ce pays.’’ Elle continuera par la suite dans la presse : ‘‘les ruptures de justice sociale, elles s’annoncent très graves ! Nous devons les dénoncer !’’
Mais, de temps en temps, la belle mécanique connaît un couac… Lors d’une conférence de presse, Di Rupo a trouvé utile de préciser que 70% des mesures prévues par le gouvernement Michel ont en fait été décidées… par le précédent gouvernement, sous sa direction ! Pauvre Laurette qui voit ainsi dévoilée l’hypocrisie de ses efforts. Finalement, est-il question d’autre chose que du remplacement de ‘‘ruptures de justice sociale (…) très graves’’ par des ruptures de justice sociale graves, et non plus très graves ? Le débat n’est pas neuf, on nous a sorti à toutes les sauces le discours sur l’austérité qui se transforme soudainement en rigueur une fois le PS impliqué.
C’est un fait, la chute du gouvernement Michel ne dérangerait pas le PS, loin de là. Il soutient d’ailleurs – en parole – la manifestation du 6 novembre à Bruxelles. Mais ce n’est que pour profiter de l’aubaine pour préparer son retour au sein d’une nouvelle coalition gouvernementale. C’est avec cet objectif en tête qu’il ne parle que du gouvernement ‘‘MR-NVA’’ pour épargner le CD&V, son partenaire traditionnel. Mais l’ingrat président de ce même parti, Wouter Beke, a tout de même rappelé que, sous Onkelinx, le budget des soins de santé n’avait connu qu’une croissance de 0,9% en 2013, alors que le gouvernement actuel propose 1,5%…
Certes, Di Rupo et Michel ne sont pas des gouvernements identiques. L’actuelle coalition fédérale veut aller plus loin et plus vite dans l’application de l’austérité, elle souhaite ouvertement et durablement changer les relations de forces entre travail et capital. De son côté, le PS préfère suivre une voie moins tumultueuse mais à la destination identique : faire payer la crise à la collectivité et assister le transfert des richesses vers les poches du privé.
A Charleroi, les membres du personnel communal en lutte contre la menace de plusieurs centaines de licenciements dans les services communaux ont entendu de la bouche même de Paul Magnette que les économies sont ‘‘indispensables’’. Les enseignants francophones qui ont suivi les arrêts de travail des 22 et 23 octobre dernier sont eux aussi bien conscients qu’il faut refuser de choisir entre ‘‘l’austérité’’ et la ‘‘rigueur’’ : nous devons faire dégager l’austérité sous toutes ses formes !
Jean-Marc Nollet (ECOLO) a eu raison de dire : ‘‘Il y a une filiation sur le plan socio-économique entre le gouvernement Michel et celui de Di Rupo.’’ Il aurait juste pu aller jusqu’au bout de sa logique et rajouter qu’il en va de même entre l’actuel gouvernement wallon (sans ECOLO) et le précédent (avec ECOLO) qui a notamment voté en faveur du désastreux Traité d’austérité européen, le TSCG…
Un “plan Cactus” ?
La réaction de De Wever a été claire : ‘‘Dois-je vraiment honorer les cris d’Onkelinx d’une réponse ? (…) Je préfère aller boire un café jusqu’à ce qu’elle s’arrête.’’ Et de fait, jouer l’opposition à la Chambre, dans la presse et sur Facebook, ce n’est pas ça qui va stopper l’avalanche d’austérité.
Sur ce point, le PTB a été bien plus conséquent : la première mobilisation anti-austérité à avoir suivi la déclaration gouvernementale fut son œuvre. Pas moins de 7.000 personnes ont participé à sa ‘‘Protest Parade’’ le 19 octobre dernier. Nous déplorons cependant l’interdiction faite à toute personne porteuse d’un signe distinctif d’une autre organisation ou d’un autre parti politique (drapeau, pancarte, journal,…) de participer au cortège ailleurs qu’en toute fin de manifestation, derrière un imposant service d’ordre qui en a choqué plus d’un.
Cette mobilisation visait en fait essentiellement à mettre en avant le Plan Cactus du PTB, ce cactus incarnant ‘‘l’alternative que nous voulons avancer, un aiguillon pour un renouveau social, écologique et démocratique’’, aux dires de Raoul Hedebouw, député fédéral du PTB. Nous espérons quand même que l’organisation de la Protest Parade n’est pas illustrative de ce que signifie ce ‘‘renouveau démocratique’’…
Pour le reste, ce plan prévoit d’obtenir 22 milliards d’euros de recettes à travers une taxe des millionnaires, une juste imposition des entreprises, une lutte ferme contre la fraude fiscale, une taxe sur la spéculation, etc. afin de financer l’augmentation des pensions, la construction d’écoles, la création de logements sociaux, une réduction des médicaments… Très honnêtement, entendre une voix divergente, qui ne se plie pas au dogme de l’absence d’alternative à l’austérité, ce n’est déjà pas si mal. Et ce plan rappelle à juste titre qu’il y a eu 12.000 millionnaires de plus en Belgique l’an dernier ou encore que la fortune privée des 20 millionnaires les plus riches de Belgique s’élève à 500 milliards d’euros. Effectivement, c’est loin d’être la crise pour tout le monde.
Mais le ‘‘Plan Cactus’’ – tout en dénonçant le capitalisme en tant que système notamment au travers d’une citation de Naomi Klein – ne propose au final qu’un aménagement de ce système basé sur une taxation plus équitable, sans remettre fondamentalement en cause la faillite totale d’une économie basée sur la propriété privée des moyens de production.
Une taxe sur la spéculation, cela signifie-t-il de l’accepter ? Pourquoi donc consacrer 4,5 milliards d’euros au remboursement de la dette publique comme le prévoit le PTB dans son Plan Cactus alors que le parti se disait favorable à la remise en cause du paiement de la dette aux spéculateurs avant les élections? Comment faire face à l’inévitable fuite des capitaux qui fera suite à un changement de régime fiscal sans nationaliser sous contrôle démocratique la totalité du secteur financier ?
Il nous faut une autre société !
Face au gouffre de la crise économique capitaliste, le Plan Cactus va dans la bonne direction. Mais à avoir peur de sauter suffisamment loin, on ne peut hélas pas éviter de sombrer à son tour dans le précipice. Le PSL veut participer à ce débat sur le programme alternatif à défendre, en défendant énergiquement la reprise en main publique et démocratique des secteurs-clés de l’économie tels que la finance, la sidérurgie, la grande distribution, etc.
Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons disposer des moyens qui nous permettront non pas seulement de limer les aspérités les plus dures d’un système basé sur l’exploitation, mais de construire une société alternative basée sur la solidarité et le développement de l’Humanité. Défendre cette alternative, la voie vers une société socialiste démocratique, est peut-être plus compliqué que d’en rester à l’air du temps, mais c’est la seule manière de préparer le mouvement social aux réels enjeux qui nous font face.
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En plus du plan d’action, le mouvement des travailleurs a besoin de sa propre alternative!
“Pas de Thatcher en Belgique” a lancé le PSL alors que la formation du gouvernement était encore en cours. Nous avons lancé un avertissement quant au caractère du gouvernement qui nous attendait. Maintenant, il est là. S’il parvient à ses fins, le mouvement des travailleurs sera brisé et la voie sera libre vers des salaires, des allocations et des conditions de travail dignes du 19ème siècle. Les syndicats ripostent avec un plan d’action impressionnant. Pour arracher quelques concessions? Pour rappeler Di Rupo au pouvoir? Ce serait décevant. Le gouvernement Michel et toute la politique d’austérité doivent s’en aller. Mais cela exige une alternative propre au mouvement des travailleurs.
Par Eric Byl, éditorial de l’édition de novembre de Lutte Socialiste
Les medias des patrons et les politiciens l’ont eux aussi bien compris. “Pourquoi n’entendons-nous jamais de la part de tous ceux qui protestent à haute voix la défense d’une alternative réaliste aux économies et autres mesures du gouvernement qui ne détruit pas d’emplois?”, se demande De Tijd. Il n’y pas d’alternative, répète De Wever. Nous voilà de retour à Thatcher et son fameux ‘TINA’ : there is no alternative.
Evidemment, c’est hypocrite. Même l’OCDE et le FMI avertissent qu’une politique budgétaire trop stricte pourrait étrangler l’économie. Selon Bart De Wever, la création d’emploi dépend de la croissance économique et donc certainement pas de lui ni de sa politique. Beke (CD&V) et Dewael (Open-VLD) eux non plus ne veulent pas garantir de création d’emplois. Ils expliquent:“Nous vivons dans une économie de marché, pas dans une économie planifiée”. De cette manière, ils indiquent de façon implicite qu’une économie planifiée peut garantir des emplois. Le PSL est bien d’accord sur ce point, mais à condition que cette économie planifiée soit gérée de façon démocratique.
Nous serions alors capables d’accroître les richesses de la société en investissant dans l’enseignement au lieu d’y opérer des économies. Nous pourrions mettre les connaissances scientifiques et techniques à la disposition de tous au lieu de les protéger des concurrents sur le marché à l’aide de brevets. Nous pourrions partager le travail disponible avec une réduction collective du temps de travail et en augmentant les salaires et les allocations sans que le profit ne soit accaparé pour être planqué dans des paradis fiscaux. C’est quand-même évident, non ? Mais cela exige un gouvernement qui défend les intérêts des travailleurs avec autant d’énergie que les gouvernements actuels en mettent pour défendre ceux des patrons. Seul un gouvernement des travailleurs en est capable.
Mais entretemps, nous produisons selon les lois du marché et, là, une autre logique est d’application : celle de la défense du profit des capitalistes individuels, que cela soit sous forme de dividendes, d’intérêts ou de plus-value. Et là, tous les ‘De Wever’ de ce monde ont un point pour eux : si nous travaillons gratuitement et si la collectivité offre les cadeaux fiscaux nécessaires, alors les patrons ne menaceront pas de délocaliser. Beaucoup de travailleurs le savent très bien et puisque la social-démocratie et les verts ne remettent pas en question le marché et disent même que les coûts salariaux sont trop élevés, leurs alternatives ne sont pas crédibles. Le fait que Di Rupo explique que 70% des mesures du gouvernement Michel avaient déjà été mises en avant par son gouvernement ne fait que confirmer cet élément.
Le plan cactus du PTB est beaucoup plus ambitieux en investissements dans les logements publics, le transport public, l’enseignement, les pensions ou les soins de santé. Le PTB ne défend pas la diminution des coûts salariaux, mais bien l’augmentation des salaires et des allocations, ce qu’il veut financer par des taxes sur les riches, des économies d’échelles, des appels d’offre dans le secteur pharmaceutique et sur les appareils médicaux, une chasse à la fraude fiscale, etc. Dans le secteur financier il plaide pour une taxe bancaire et pour une banque publique à côté du secteur privé. Le principal investissement du plan cactus est toutefois le payement accéléré de la dette publique, probablement dans l’espoir de créer une certaine marge budgétaire.
Le PTB a fait un calcul correct sur papier. Mais il y a vingt ans, il ne trouvait pas que c’était nécessaire. Il scandait alors “ faites payer la crise aux riches” et “prenons l’argent où il est, chez les banques, chez les holdings”. C’étaient de bons slogans, mais même là se pose la question de savoir quoi faire lorsque les capitalistes s’en vont. Pourquoi ne pas défendre la nationalisation sous contrôle des travailleurs et de la collectivité des secteurs clés de l’économie et de toutes les entreprises qui agitent la menace de délocaliser ? Un gouvernement des travailleurs qui veut offrir une alternative crédible ne pourra pas éluder cette question. Il devra être aussi audacieux dans l’intérêt du monde du travail que le gouvernement actuel l’est dans l’intérêt de celui du capital.
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Le PTB a tenu sa Protest Parade à Bruxelles
Sous un soleil digne de la fin de l’été, des milliers de personnes se sont rendues à Bruxelles dans le cadre de la Protest Parade, les organisateurs du PTB parlant de 7000 participants. Cette manifestation a clairement illustré que la gauche existe toujours bel et bien, de même que la recherche d’alternatives face aux plans d’austérité drastiques du gouvernement de droite dure.
Le plan d’action des syndicats allant crescendo jusqu’à la grève générale du 15 décembre prochain a posé le défi de construire un mouvement de masse pour faire chuter le gouvernement Michel. Mais nous ne voulons pas seulement faire tomber Michel 1er, c’est toute la politique d’austérité qui doit être balayée. L’arrivée au pouvoir d’une nouvelle tripartite appliquant une politique similaire après la chute de ce gouvernement ne représenterait aucunement une alternative. De nombreuses attaques – comme la suppression progressive de la retraite anticipée ou la remise en cause de l’index – s’appuient sur des politiques menées par le gouvernement précédent. Wouter Beke (CD&V) a déclaré que l’actuel accord gouvernemental aurait tout autant pu être conclu avec les socialistes. C’est surtout le rythme des attaques qui est aujourd’hui différent.
Mais Wauter Beke a raison, un gouvernement Di Rupo 2 ne serait pas une alternative. Nous avons besoin d’un nouveau parti de masse des travailleurs pour rompre avec la politique d’austérité, un parti dans lequel le large éventail d’opinions présent dans le mouvement des travailleurs trouverait sa place. Dans ce cadre, avec sa position de première force de gauche radicale possédant également un poids électoral et plusieurs députés, le PTB est naturellement dans la meilleure position pour jouer un rôle important. Mais devant l’offensive de la droite, nous allons avoir besoin de toutes nos forces. Un piquet de grève est plus fort si tout le monde est présent, dans le respect des sensibilités de chacun au-delà des frontières syndicales ou de statut (ouvrier, employé, intérimaire, travailleur d’un sous-traitant, stagiaire,…). Cela s’applique également à la représentation politique du mouvement des travailleurs. Pour arriver à la constitution d’une alternative large, l’ouverture et le respect des spécificités de chacun sont cruciaux.
Une telle ouverture n’était pas présente à la Protest Parade. Nous avons vu tout le contraire avec une manifestation uniformisée où chaque drapeau, pancarte,… appartenant à d’autres organisations était renvoyé manu militari à la fin de la manifestation. Que les autres forces de gauche, tant les partis que les associations, se retrouvent comme convenu à la fin du cortège, cela ne représentait aucun problème et cela n’a, du reste, été contesté par personne. Mais le simple fait d’aller dire bonjour à des collègues présents ailleurs dans le défilé avec un drapeau ou une pancarte était interdit, ce qui constitue une forme extrême d’imposition du silence pour tout type de discussion. Nous avions visiblement mal compris l’invitation de Raoul Hedebouw, porte-parole du PTB et élu fédéral, faite envers tout le « peuple de gauche ».
Du côté francophone, lorsque le PTB avait annoncé une ouverture sous la forme de Gauche d’Ouverture, cela avait à juste titre été salué par la FGTB de Charleroi & Sud Hainaut comme un pas en direction de l’appel lancé par cette régionale le 1er mai 2012 pour réunir sur une base anticapitaliste toutes les forces politiques à la gauche du PS et d’Ecolo. Si la FGTB de Charleroi & Sud Hainaut avait décidé de mettre davantage l’accent sur cet appel en prenant part à la Protest Parade ou si d’autre sections et délégations combatives avaient décidé d’y participer, se seraient-elles vues confinées à la fin du cortège? Ou alors ces délégations auraient-elles eu à se diviser entre ceux qui voulaient manifester au sein du cortège et ceux qui voulaient manifester avec les drapeaux, les pancartes et les tracts d’autres organisations, derrière la ligne du service d’ordre ?
Pour stopper l’offensive de la droite, la tripartite n’offre aucune alternative, comme nous l’avons dit. Nous sommes à l’aube d’un mouvement de résistance qui a, face à lui, de grands défis. Les Thatchers belges veulent s’en prendre drastiquement à notre niveau de vie et changer le rapport de forces en faveur du capital. Notre camp, celui du mouvement des travailleurs, doit riposter avec toute sa force. La devise de «l’unité dans la diversité», la base de la solidarité, ne peut que nous renforcer.
Les militants du PSL seront présents dans la lutte contre ce gouvernement des riches, côte à côte avec leurs collègues, leurs amis, leurs connaissances,… et ce au-delà des divergences politiques. Il nous faudra de grands efforts pour faire chuter ce gouvernement, et cela nous conduira évidemment à débattre de la manière de traduire le plus efficacement possible le plan d’action syndical sur notre lieu de travail, des prochaines étapes à construire si le gouvernement reste sourd à nos revendications lors de la grève du 15 décembre, de ce qui devrait remplacer le gouvernement Michel,…
Mener et stimuler ce débat, à la fois au travail et dans les actions ou encore parmi les militants, fait partie intégrante de la préparation des prochaines étapes de notre lutte. Le PSL pense à ce titre pouvoir y offrir un apport constructif.
Nous avons envoyé une proposition de déclaration à diverses organisations qui nous avaient dit être favorables à une réaction commune.
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Réaction d’Eric Byl
Certains lecteurs commençaient à être impatients face au silence de « socialisme.be » vis-à-vis des événements que nous commentons ci-dessus et des allégations exprimées par le PTB sur son site à l’encontre du PSL. Nous avons délibérément reporté la publication d’une réponse. Nous ne voulions pas réagir à chaud et préférions laisser les événements retomber quelque peu. Dans le feu de la polémique, on peut en effet avoir tendance à réagir sans considération pour le contexte politique. On peut aussi, comme l’auteur d’un article sur le site du PTB, écrire des choses qui ne sont pas conformes à la vérité et même carrément contradictoires. C’est ainsi que Max Van Cauwenberghe, apparemment l’un des responsables du service d’ordre du PTB, a écrit que les militants du PSL auraient jeté des pétards au service d’ordre du PTB. Ceux qui étaient sur place savent très bien qu’il n’y avait pas de pétards. Il affirme également qu’un membre féminin du service d’ordre a été frappé, a eu des côtes froissées et au moins deux semaines d’incapacité de travail. C’est une lourde accusation. De la part du PTB, qui dispose de suffisamment d’avocats et de médecins, on peut se demander comment cela se fait qu’ils n’ont pas immédiatement publiquement identifié le responsable. L’explication est simple : ce que Max décrit n’est jamais arrivé. Si Max avait un peu réfléchi avant d’écrire ou avait au moins relu une fois son article, il n’aurait pas tout d’abord parlé de façon désobligeante d’une cinquantaine de membres du PSL pour ensuite parler de « de nombreux membres » du PSL qui ont tenté de forcer leur présence aux premiers rangs. Laisser tout d’abord les choses retomber avant d’écrire est vraiment très utile et peut vous aider à éviter d’inutiles malentendus.
Ce que le service d’ordre du PTB a osé dans le cortège de la Protest Parade n’a plus été vu depuis les années ‘80. J’ai moi-même eu Jan Hasaers du PTB au téléphone la soirée précédent la manifestation. Sa proposition que le bloc anticapitaliste se retrouve derrière le PTB lors du rassemblement me semblait chose évidente. Je n’avais pas compris que cela signifiait pour lui et pour le PTB qu’il était interdit à des individus ou à des amis d’aller voir le reste de la manifestation en portant des drapeaux ou des pancartes du PSL pour y saluer un collègue ou aller à la recherche d’une connaissance. Toute personne qui avait un drapeau du PSL, d’EGA ou de Blokbuster, qui portait une pancarte du PSL ou qui avait quelques journaux à vendre était, dans le cortège du PTB, manu militari interpelé et renvoyé derrière les lignes du service d’ordre. Ce n’est pas ce que j’avais compris au téléphone, au contraire, Jan avait même explicitement confirmé qu’il n’y avait aucun problème pour nos ventes de journaux. Le PSL a au moins eu droit à un appel téléphonique, même s’il n’était pas possible de comprendre les intentions réelles du PTB. D’autres n’ont pas du tout été contactés, mais ont tout de même été interpelés sans ménagement pour être renvoyés à l’arrière. C’est au moins arrivé à un anarchiste avec son drapeau rouge et noir. En dépit des affirmations de Max, la LCR s’est aussi plainte que ceux qui voulaient diffuser son tract ont été renvoyés à l’arrière. Le PTB affirme que le PSL ne s’en est pas tenu aux accords convenus entre Jan Hasaers et moi-même au téléphone, mon sentiment était que cette discussion était beaucoup plus fraternelle et ouverte que les actes du service d’ordre du PTB. Cette manifestation fut un succès, mais l’absence totale de drapeaux, pancartes, journaux ou tracts d’autres organisations de gauche nous fait froid dans le dos. Nous espérons que ce n’est pas là le renouveau démocratique que le PTB dit vouloir.
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Photos de la Protest Parade
Par PPICSPar Loïc
Par Liesbeth
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Avec l’arrivée de 8 parlementaires de gauche radicale, la pensée unique politicienne a été brisée
Raoul Hedebouw, porte-parole du PTB et nouvel élu fédéral.Le résultat final a beau être sous ce que certain sondage avaient prédit, les 8 élus du PTB-GO constituent une véritable percée. Le parti a triplé voire quadruplé ses résultats aux précédentes élections fédérales et régionales. Qu’il n’y ait pas d’élu en Flandre n’y change rien, le PVDA+ double son résultat. Cela offre d’énormes possibilités mais entraîne aussi de grandes responsabilités quant à la manière d’organiser, de structurer et de diriger la résistance face à l’avalanche de casse sociale qui nous arrive dessus.
Par Eric Byl, membre du Bureau Exécutif du PSL/LSP
Raoul Hedebouw et Marco Van Hees ne sauront où donner de la tête au parlement fédéral. Les directives européennes d’austérité et de libéralisation et les traités comme le traité transatlantique qui vise à garantir la ‘‘libre’’ concurrence à n’importe quelles conditions ne seront désormais plus poussées en douce. La résistance des syndicats, des ONG ou encore des associations d’agriculteurs pourra désormais trouver écho au parlement et, par cette voie, dans les médias de masse.
Au parlement, ils vont être bien étonnés si, lors de la prochaine fermeture d’entreprise, des élus ne plient pas purement et simplement l’échine devant la ‘‘conformité aux lois économiques’’. Ils ne pourront plus simplement éclater de rire à la publication des bénéfices engrangés dans le privé ces dernières années, des cadeaux fiscaux, des subsides salariaux et autres baisses de charges. Et si la discussion ne se limite plus à la négociation du recul social mais aborde aussi l’appropriation collective des moyens de production sous contrôle public en tant qu’alternative, le parlement sera profondément ébranlé.
L’étonnement sera encore plus grand si Raoul, Marco et leurs 6 collègues aux Parlements wallon et bruxellois seront également aux portes des usines et aux piquets. Ils n’ont pas seulement été élus par les membres du PTB, mais aussi par de nombreux syndicalistes, activistes, jeunes et travailleurs. Leur message à ces piquets ne doit, par conséquent, pas se limiter à “Bravo! Et votez pour nous la prochaine fois”. Des manifestations qui plient face aux forces de l’ordre ou des slogans radicaux qui ne s’accompagnent pas d’un plan d’actions ne suffiront pas non plus. La question sera de savoir comment contribuer à réunir toutes les forces militantes présentes dans l’entreprise, dans les entreprises apparentées et les quartiers avoisinants avec l’objectif de construire un rapport de forces et d’arracher des victoires.
La percée d’une formation à gauche de la social-démocratie et des verts était annoncée depuis quelques années. Cela explique les multiples appels du PSL à l’unité à gauche. Il y a un an, le PSL avait ainsi adressé une lettre ouverte à tous les partis et groupes de gauche pour discuter de listes communes sous le nom ‘‘PTB-unité ou quelque chose de semblable’’. Quelques mois auparavant, au comité d’initiative pour l’appel de la FGTB Charleroi-Sud-Hainaut, nous avions proposé de déposer une liste unitaire autour du PTB dans le Hainaut en tant que projet-pilote. Nous estimons que le résultat du PTB-GO confirme que c’était une évaluation correcte de la situation.
Cela vaut aussi pour la Flandre. Au niveau provincial, le PvdA+ manque le seuil électoral de justesse à Anvers, mais Peter Mertens y obtient pas moins de 26.000 voix de préférence. Dans la ville, avec ses 9%, le parti dépasse le CD&V, l’Open VLD ou encore le Vlaams Belang ! A Gand, le PvdA+ rate de peu les 5%. Cela s’inscrit dans la ligne des 9% que le PTB-GO obtient à Charleroi et des 11,5% à Liège. Le parti réalise maintenant une percée également dans les grandes villes. Les sondages indiquaient qu’ils pouvaient encore faire plus. L’illusion d’un vote utile pour damner le pion à la NV-A et le revirement subit des partis traditionnels vers des thèmes sociaux à la fin de la campagne ont peut-être détourné quelques électeurs potentiels in extremis.
Il y a quelques années, Samson du PvdA néerlandais et Hollande du PS français sont aussi parvenus à tromper les électeurs avec une rhétorique quelque peu de gauche. Le PvdA+/PTB-GO a-t-il sous-estimé cette possibilité ? Est-ce pour cela que notre proposition de rassembler ‘‘toutes’’ les forces militantes en Wallonie et à Bruxelles n’a été que partiellement reprise ? Pour le PSL et Gauches Communes, la Gauche d’Ouverture est restée fort hermétique. Le PTB-GO a même rejeté une proposition d’apparentement de liste déposée par VEGA et Gauches Communes à Bruxelles. En Flandre non plus, il n’y avait pas de place pour le LSP au PvdA+.
Nous ne savons pas si cela aurait fait beaucoup de différence. VEGA à Liège et Gauches Communes à Saint-Gilles, qui avaient tous deux plus de 3,5% aux dernières communales, sont retombés à 2,1% et 1,1%. Ils n’ont pas seulement perdu des ‘‘votes utiles’’ contre la NV-A, mais aussi en faveur d’un premier élu PTB-GO. D’autres petites listes de gauche ont été complètement refoulées. A Saint-Gilles, en 2006, la liste PTB et celle du PSL avaient obtenu ensemble 2%. En 2012, les listes qui les reprenaient recueillaient 7,5% et, cette fois, plus de 9%. C’est beaucoup plus que dans les autres cantons électoraux de Bruxelles. Nous pensons que cela est notamment dû à la présence systématique de Gauches Communes dans cette commune, même si beaucoup d’électeurs ont cette fois donné tactiquement leur préférence au PTB-GO.
Quelle que soit l’exacte composition du gouvernement fédéral et des gouvernements régionaux, il est clair que les prochaines années, une avalanche de casse sociale à tous les niveaux déferlera sur nous. S’y opposer voire en inverser la tendance exigera un front de résistance, composé des mouvements sociaux, des syndicalistes de gauches, de la gauche radicale, des activistes de quartier, etc. Un tel appel provenant du PSL aurait peu d’écoute mais s’il émane d’un parti comptant 8 parlementaires et plus de 50 élus locaux, cela aura une beaucoup plus grande portée, surtout si plusieurs centrales ou régionales syndicales s’y joignent et cela pourrait poser la base pour un mouvement d’opposition réel d’en bas.
Pour finir, nous souhaitons ajouter que nous devons lutter pour le maintien de chaque acquis et pour chaque nouvelle conquête sociale. Reporter cela au lendemain de l’instauration du socialisme serait totalement irresponsable. Le PSL n’attend donc pas du PTB qu’il fasse exclusivement de la propagande pour le socialisme jour après jour au parlement. Mais réclamer des logements décents et abordables, un enseignement de qualité, des crèches en suffisance, de l’emploi stable pour tous à des salaires décents, une mobilité saine et accessible, des soins de qualité pour les malades, pour les personnes dont les capacités physiques et mentales sont réduites ou pour les personnes âgées, une solution aux catastrophes écologiques qui arrivent à toute vitesse,… exigera systématiquement, dans le contexte économique actuel, une épreuve de forces avec un système où la production est exclusivement orientée vers le profit.
Chaque solution réelle à ces besoins démontrera l’impossibilité du capitalisme à y répondre et la nécessité d’ériger une autre société. Ceux qui estiment que les ressources naturelles, la connaissance sociale et les grands moyens de production n’appartiennent pas à une poignée de capitalistes mais à la collectivité et qu’une planification démocratique est plus rationnelle que la ‘‘main invisible’’ du marché doivent saisir chaque opportunité de populariser la nécessité d’une société socialiste démocratique de manière réfléchie. Nous pensons que c’est une erreur de censurer cette idée dans le cadre de la campagne électorale ou, comme l’a fait la LCR, de réduire cela à “des réformes structurelles anticapitalistes réelles”. Au parlement, il sera encore plus difficile de défendre cette société socialiste démocratique comme unique alternative sérieuse. Nous estimons cependant que l’énorme fossé entre la richesse que nous produisons tous et les nombreux besoins insatisfaits en offrira plus d’une fois la possibilité. Espérons que le PTB saisisse cette opportunité.


