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  • La percée électorale du PTB place ce parti face à d’énormes défis

    Si des élections devaient avoir lieu aujourd’hui, le PTB serait le deuxième parti en Wallonie, tout juste derrière le MR mais devant les sociaux-démocrates du PS. A Bruxelles, le parti deviendrait la troisième force avec une large avance sur Ecolo, Défi (l’ex-FDF) et les chrétiens-démocrates du CDH. En Flandre, le PTB franchirait le seuil électoral et obtiendrait trois sièges. Au total, le parti aurait donc pas moins de 16 sièges.

    Par Eric Byl, article tiré de l’édition de mai de Lutte Socialiste

    Le spectre de la pasokisation doit empêcher quelques pontes du parti de dormir… Avec des résultats comparables aux élections régionales, le PTB obtiendrait pas mal de parlementaires supplémentaires. Cela signifie des centaines d’assistants pour les parlementaires et la fraction au Parlement ainsi qu’un afflux financier phénoménal pour le parti qui permettra sans doute de disposer de dizaines de permanents en plus. Aux élections communales, cela signifierait l’arrivée de centaines d’élus. Ce ne sont évidemment que des sondages, mais tout indique que le PTB réalise une percée historique.

    La social-démocratie ne doit s’en prendre qu’à elle-même

    Ce développement n’est pas dû au hasard. Il s’agit d’une tendance internationale. L’autrefois si puissant PASOK grec est complètement débordé par Syriza. En Espagne, Podemos a dépassé le PSOE social-démocrate. Au Portugal, le bloc de gauche et le parti communiste talonnent la social-démocratie. Aux Pays-Bas, le social-démocrate PvdA a été rayé de la carte aux récentes élections et se retrouve loin derrière le Socialistische Partij, plus radical. En Allemagne, le SPD doit compter avec Die Linke sur son flanc gauche. Le Labour britannique a bien connu une résurgence avec l’élection de Jeremy Corbyn à sa présidence, mais il doit subir plus d’attaques de la part de l’aile droite du Labour que des Tories. En France, Mélenchon ne fut qu’à un pas du second tour des élections présidentielles et le candidat officiel du PS est tombé sous les 7%.

    La social-démocratie ne doit s’en prendre qu’à elle-même. Des dizaines d’années de politiques de casse néolibérale, le fait de regarder l’électorat traditionnel de haut, d’attirer des parvenus qui ne visent que des carrières rapides, de se débarrasser de l’idéologie socialiste, d’être impliqué dans de nombreuses affaires, avec des dirigeants de parti qui gagnent un tas d’argent,… Tout ça a finalement sapé le mouvement. Ces mêmes dirigeants peuvent prétendre que les programmes de Corbyn, Mélenchon ou du PTB nous conduisent droit à l’abîme économique, la grande majorité des gens n’a cure de cet argument. Sont-ils à ce point éloignés du monde qu’ils n’ont même pas conscience que beaucoup d’entre nous sont déjà dans l’abîme, bien loin de la petite vie luxueuse à laquelle ces élus estiment avoir droit ?

    Percée du PTB

    Le PTB s’enorgueillit d’envoyer au parlement des représentants qui vivent du salaire d’un simple ouvrier. On les voit sur des piquets de grève, aux actions pacifistes, aux manifestations et actions de quartier. Le PTB est et veut rester un parti populaire. Au lieu de négliger ses sections, il essaie de les construire et d’être présent sur le terrain. Il sensibilise, mobilise et organise, ce que la social-démocratie a hélas abandonné depuis des années déjà. Au lieu de sortir des mesures incompréhensibles qui sont toujours tellement pondérées qu’elles se retournent contre les gens, le PTB propose des mesures concrètes liées à l’action sociale, à ses maisons médicales et à sa fraction parlementaire qui fait entendre la voix du commun des mortels au Parlement et dans les débats politiques.

    Au lieu de reprocher aux gens d’être de droite, de suivre les nationalistes et les partis qui prônent l’ordre et la loi, le PTB met l’accent sur la solidarité. Il veut impliquer son élu à Liège, parfait bilingue, pour s’opposer à la droite en Flandre, de la même façon que la social-démocratie a jadis fait élire des Flamands en Wallonie ! Les prédécesseurs du PSL ont été actifs pendant des années au SP et y ont représenté son aile marxiste. La base nous considérait comme des militants très actifs et idéologiquement aguerris, la direction comme des infiltrés qu’il fallait éjecter. Mais qui sont les vrais infiltrés ? Ceux qui ont utilisé le mouvement pour s’enrichir !

    Aujourd’hui encore, le PSL sera aux côtés du mouvement des travailleurs pour renforcer ce qu’il considère être un instrument pour défendre ses droits. Nous voulons oeuvrer à ce que ces sondages en faveur du PTB deviennent réalité, de préférence de manière encore plus éclatante, lors des élections communales de 2018 et des élections régionales, nationales et européennes de 2019. Mais, tout comme à l’époque du SP, nous continuerons à avertir, même de l’extérieur, des pièges à éviter et des faiblesses à surmonter tout en construisant notre propre courant. Les gens ne votent pas pour le PTB juste pour quelques mesures concrètes. Ils le font parce qu’ils veulent rompre avec la politique néolibérale de casse sociale qui creuse tellement le fossé entre pauvres et riches que cela en devient insupportable. C’est impossible sans une confrontation avec l’ensemble du système capitaliste.

    Rompre avec le capitalisme

    Les marges pour mener une autre politique se restreignent de plus en plus aujourd’hui. N’importe quelle majorité, qu’elle soit locale, régionale ou nationale, qui voudrait mettre fin à la casse sociale se trouvera face à un mur d’opposition de la part des patrons et de l’establishment. Ils mettront l’économie financièrement à sec, comme ils l’ont fait en Grèce avec Tsipras. Tsipras avait pris des ‘‘mesures concrètes’’ telles que le relèvement des salaires minimum, le rétablissement du treizième mois pour les pensionnés, l’arrêt des licenciements de fonctionnaires et de la privatisation de l’entreprise énergétique. Mais pour s’opposer à l’establishment, des ‘‘mesures concrètes’’ ne suffisaient pas. Cela exigeait des interventions socialistes comme la nationalisation du secteur financier et des secteurs clé de l’économie, un monopole sur le commerce extérieur et un appel au mouvement ouvrier international pour soutenir le gouvernement de gauche par la mobilisation. Aujourd’hui, Tsipras applique un quatrième mémorandum austéritaire encore plus féroce que les précédents.

    Le PTB veut sensibiliser, mobiliser et organiser, mais le mouvement ouvrier grec était mobilisé, sensibilisé et organisé, surtout dans la période précédant le référendum sur le troisième mémorandum. Les syndicats mobilisent aussi mais, trop souvent, ils baissent encore le ton à la première confrontation sérieuse. Celui qui veut affronter le système capitaliste doit aller plus loin : en préparant dès maintenant les électeurs, les électeurs potentiels et les sympathisants en discutant ouvertement et démocratiquement avec eux de la stratégie, des tactiques et du programme nécessaires. Les opposants l’entendront aussi, mais cela ne pèse pas face à l’énorme avantage de puiser ses forces dans la réelle participation consciente de milliers de militants capable de convaincre et de mobiliser d’autres personnes dans les syndicats,es groupes d’action, les entreprises, les quartiers, les universités et les écoles.

  • Le PS semble finalement rejoindre l’agonie de la social-démocratie européenne

    Partout en Europe, les partis historiques de la social-démocratie font triste mine. L’argument du prétendu ‘‘moindre mal’’ est usé jusqu’à la corde, peu de gens se laissent encore convaincre, surtout depuis le début de la crise économique actuelle. Le spectre d’une ‘‘pasokisation’’ hante les partis sociaux-démocrates, en référence au Pasok, le parti ‘‘socialiste’’ grec passé de 43,92 % aux élections de 2009 à 4,68 % à celles de 2015…

    Par Ben (Charleroi), édito du numéro de mai de Lutte Socialiste

    En France, le PS a perdu plus de 40.000 membres durant le quinquennat de François Hollande, une hémorragie qui représente un quart de ses membres. Le magazine Marianne n’hésite pas à dire aujourd’hui que cette campagne présidentielle marque la fin du PS(1). On pourrait encore parler de l’Italie, de l’Irlande, de l’Espagne,… Contrairement à son homologue flamand, le PS francophone semblait jusqu’ici faire figure d’exception à la règle. En dépit de sa participation au pouvoir (ininterrompue au fédéral entre 1987 et 2014), ce dernier parvenait encore à ne pas paraître trop ridicule lorsqu’il brandissait l’image d’un parti de gauche opposé à la droite flamande. Mais, au siège du PS Boulevard de l’Empereur, les derniers sondages ont dû glacer le sang.

    Tant va la cruche à l’eau, qu’à la fin elle se casse

    Rien d’étonnant à cela. Déjà du temps où la social-démocratie faisait rêver les masses, ce n’est que sous la pression de ces dernières qu’elle promettait, et réalisait même parfois, une redistribution relative des richesses. La social-démocratie s’est construite dès ses origines en organisant la classe des travailleurs pour tirer parti de sa force – ce qui nécessite un discours radical – tout en oeuvrant à limiter l’impact de cette puissance potentiellement fatale pour le système social en place.(2) Pour reprendre la caractérisation de Lénine, il s’agissait de partis ouvriers à leur base, mais bourgeois à leur direction.

    En Belgique, au sortir de la grande grève générale de l’hiver 60-61, le PS a obtenu 47,1% des voix à la chambre en Wallonie. Une fois élu, il trahira son programme, une expérience amère qui a ouvert la voie à la frustration, à la colère et aux sanctions électorales. Aux élections de 1965, un quart de l’électorat du PS avait déserté. S’accrochant au pouvoir dans des coalitions de plus en plus improbable, le PS a continué à oeuvrer à sa chute jusqu’à la crise des années ‘70 et son rejet dans l’opposition en 1981.

    Quand la social-démocratie revient au pouvoir en 1987, les 43,9% des suffrages obtenus en Wallonie expriment essentiellement le rejet de la droite, ce n’est plus du tout un vote d’adhésion. Depuis lors, tout a reposé sur cette logique de ‘‘moindre mal’’. Suite aux désillusions, aux départs ou aux exclusions de ses éléments les plus combatifs, progressivement :‘‘Voilà le sommet livré à luimême, menacé par les tendances conservatrices et par l’inertie bureaucratique qu’aucune poussée populaire n’équilibre plus. L’organisation reste en place, mais la révolte s’est tue, privant le mouvement d’une dynamique encombrante et précieuse’’.(3)

    Combien sont-ils à avoir résolument tournés le dos au parti après les attaques contre les pensions de 2005 (le Pacte des Générations), à l’image de Fréderic Gillot, devenu depuis député wallon du PTB ? Et après l’instauration de la ‘‘chasse aux chômeurs’’ ? Le manque d’alternative crédible a longtemps permis de freiner la chute du PS. Faute de mieux, et en dépit de son dégoût, l’électorat restait présent.

    Le vent de la lutte des classes souffle à nouveau

    L’arrivée du PTB au parlement a révélé la fragilité de l’électorat du PS. Depuis, au PS, c’est la panique. La direction du parti a bien tenté de se repositionner à gauche. Di Rupo a déclaré que son ‘‘coeur saigne’’ à l’idée de ces dizaines de milliers de chômeurs exclus de leurs allocations. Magnette a saisi l’occasion du CETA pour tenter de donner une image de résistant au PS. C’était trop peu et trop tard. Et puis est arrivé le scandale à tiroirs Publifin-Nethys…

    En mars dernier, un sondage RTBF / La Libre / Dedicated présentait le PTB en deuxième place en Wallonie (20,5 %), dépassant de peu le PS (20,3 %). Autre élément, le PS a perdu la moitié de ses membres depuis les années ’70. Sa crédibilité est en chute libre. Le spectre de la pasokisation doit empêcher quelques pontes du parti de dormir… L’immense espace politique qui existe à gauche va continuer de grandir. Ce qui présente de nombreux et passionnants nouveaux défis très concret pour le PTB et tous les opposants de l’austérité et du néolibéralisme. Comment éviter de tomber dans les mêmes travers que Syriza en Grèce ? Comment répondre au piège de la collaboration avec les partis de l’austérité ? Comment transformer un soutien électoral passif en mobilisation sociale active ? Comment construire cette dynamique en Flandre également ? Autant de questions sur lesquelles le PSL est prêt à contribuer de façon constructive.

    (1) Marianne N°1046-1047 du 14 au 24 avril 2017
    (2) Jean Faniel dans son article intitulé ‘‘le Parti Socialiste est-il populaire ?’’, Revue Politique numéro 62, Décembre 2009.
    (3) M. Liebman, les socialistes Belges 1914-1918, Bruxelles, La Revue nouvelle/FJJ/EVO, 1986, pp 66-67 cité par Jean Faniel

  • Liège. Rassemblement antifasciste contre le FN

    En dépit de la sérieuse averse qui s’est abattue sur la Cité Ardente quelque temps avant le début du rassemblement, une bonne soixantaine de personne étaient présentes ce mercredi place de la République française. Elles entendaient exprimer leur rejet du racisme, du sexisme et de l’homophobie suite aux résultats du premier tour des élections présidentielles françaises qui ont vu Marine Le Pen accéder au second tour.

    Une fois la pluie arrêtée, Clément a d’abord pris la parole pour les Etudiants de Gauche Actifs (EGA) et Céline pour la campagne ROSA (Résistance contre l’Oppression, le Sexisme et l’Austérité), à l’initiative de cet appel à manifester. Par la suite, Norine a pris la parole pour COMAC, l’organisation de jeunesse du PTB, présente en nombre, de même que François Ferrara, conseiller CPAS du PTB à Liège.

    Les divers orateurs ont par ailleurs également souligné les très bons résultats obtenus par la campagne de Jean-Luc Mélenchon et de la France Insoumise, une campagne qui a illustré le potentiel dont dispose une gauche conséquente et audacieuse.

    Liège. Rassemblement antifasciste contre le FN

  • Êtes-vous, vous aussi, pollué par le néo-libéralisme? Réponse au Vif/L’Express

    Ce jeudi 30 mars, Le Vif/L’Express a sorti le grand jeu. Le magazine avait déjà l’habitude de flirter avec l’islamophobie. Avec la montée du PTB comme potentiel deuxième parti en Wallonie (1), le Vif laissera les musulmans tranquilles pour une semaine. La nouvelle cible : « l’extrême gauche ».

    Par Julien (Bruxelles)

    Avec son dossier « Êtes-vous, vous aussi, pollué par l’extrême gauche ? », Le Vif se montre encore une fois prêt à jouer avec le nauséabond. Le premier article part du constat, selon lui « inimaginable et […] indigeste » que le PTB dépasserait le PS en Wallonie en intention de vote. Mais tout n’est pas perdu ! La journaliste, Laurence Van Ruymbeke, nous a concocté un petit « test » pour évaluer votre « niveau d’adhésion » aux idées d’extrême gauche. Le questionnaire, élaboré avec Pascal Delwit, professeur à l’ULB et attaquant régulier de tout ce qui se trouve sur sa gauche. Les deux auteurs n’en sont pas à leur coup d’essai : la première, Van Ruymbeke comparait, en juin dernier, Hedebouw à une sorte de « De Wever wallon » (2) et le deuxième, Delwit, a publié début 2014 le livre « PTB – Nouvelle gauche, vieille recette », une critique de droite du PTB.

    En tout, quatre intellectuels ont travaillé à ce test, pour quel résultat ? Et bien force est de constater que ça va vite pour faire partie de la gauche radicale. Vous êtes favorable à la fin de la guerre en Syrie, à l’égalité salariale, aux droits pour les minorités sexuelles, au droit à l’avortement ou à des services sociaux de qualité ? Cela signifie que vous êtes pollué par les idées d’extrême gauche.

    Alors que le test fait au moins sourire par son ridicule, le reste du dossier attaque plus frontalement le PTB et, plus largement, tous les partis qui s’opposent à l’austérité et au capitalisme. Le deuxième article, une interview de Delwit, se termine sur le constat que les nouvelles forces de gauche radicale ont connu un essor là où la sociale démocratie est arrivée au pouvoir comme en Grèce ou en Espagne. Pour être exact, c’est plutôt le type de politique menée par la sociale démocratie qui l’a enterrée, et pas qu’en Espagne ou en Grèce. En France, Hamon se situe maintenant derrière Mélenchon dans les sondages. La croissance du Front National, c’est au gouvernement Hollande-Valls (et Sarkozy-Fillon avant lui) qu’on la doit. En Belgique, l’affaire Publifin nous rappelle à quel point le PS est empêtré dans les magouilles, mais cela ne fait que se rajouter à la politique néolibérale appliquée avec enthousiasme par le parti.

    Enfin, le dossier nous livre aussi une « enquête » sur “qui gouverne vraiment” au PTB et sur un tour d’horizon des succès de différents partis de gauche en Europe. Les attaques de ce type vont augmenter en fréquence et en intensité contre n’importe quel parti véritablement à gauche, en particulier à l’approche des élections. Dans un précédent article “Le retour du danger rouge. La droite à l’offensive contre le PTB”, nous expliquions : “Nous avons des divergences avec le PTB, sur son programme, sa stratégie politique ainsi que beaucoup de question sur son fonctionnement interne. Nous aimerions des discussions franches et honnête, et débats de fond sur ces questions avec le PTB et ses membres. Ainsi qu’avec tout parti, association ou militant individuel qui veux combattre l’austérité et se lancer dans la bataille pour changer de société. Mais tout en étant lucide sur les divergences qui existent au sein de la gauche, face aux critiques de la droite, il faut faire front. Les attaques sont dirigées contre tous ceux qui remettent le système actuel en question.”

    Les grands groupes médiatiques ont dans leurs viseurs tous ceux qui remettent en cause la société, qu’ils soient réformistes ou révolutionnaires. La faute n’en revient pas aux journalistes mais aux actionnaires qui sont, au final, ceux qui décident des articles à mettre en avant ou non. Pour une presse indépendante, n’hésitez pas à soutenir notre journal en plaçant un message de vœu de mai !

    Notes

    (1) https://www.rtbf.be/info/belgique/detail_barometre-rtbf-le-ps-s-effondre-le-ptb-triomphe?id=9563198
    (2) http://www.levif.be/actualite/belgique/hedebouw-le-de-wever-wallon/article-normal-513461.html

  • Le PS sous pression des scandales et d’une opposition de gauche

    Peter Mertens au Premier mai à Anvers. Photo: Liesbeth.

    Aux dires d’un sondage RTBF, si des élections avaient lieu demain, le PS connaîtrait son pire résultat : 20,3% en Wallonie et 20,1% à Bruxelles. L’érosion de la confiance dont bénéficiait le PS en tant que défendeur des intérêts des travailleurs ne date pas d’hier. Mais les récents scandales autour de Publifin-Nethys ont finalement été la goutte faisant déborder le vase de la méfiance. C’est le PTB qui en profite le plus, il passerait devant le PS selon ce même sondage et deviendrait la deuxième force politique wallonne avec 20,5%. A Bruxelles, le PTB/PVDA grimperait jusqu’à 14,1%.

    Par Bart Vandersteene

    En Europe,le PS belge a longtemps été l’exception qui confirme la règle. Alors que tous les partis sociaux-démocrates étaient punis pour leur participation aux politiques d’austérité et en dépit de ses 26 ans de participation au gouvernement fédéral de manière ininterrompue (1988-2014), le PS préservait peu ou prou sa position électorale. Cette exception était essentiellement l’expression du manque de véritable alternative. Depuis 2014, le PTB dispose de deux élus au parlement fédéral et le PS est confronté à une opposition de gauche dynamique. Aujourd’hui, la fragilité du soutien électoral du PS éclate au grand jour.

    Le scandaleux enrichissement personnel qui touche des politiciens du PS, du MR et du CDH a ébranlé le monde politique francophone. Les scandales se sont succédé les uns après les autres alors qu’en Wallonie, seules 6 personnes sur 10 de la population active ont un emploi. Le risque de pauvreté comporte des similitudes avec les pays d’Europe de l’Est. Ce n’est pas étonnant que les électeurs punissent les socialistes autoproclamé au vu d’un tel contexte, alors que certains cumulent des mandats et des postes pour gagner jusqu’à près d’un million par an, comme c’était le cas de Stéphane Moreau (PS).

    En Flandre, le PTB progresse également et obtient 5,5%. Il dépasserait donc le seuil électoral et aurait trois élus. La N-VA resterait le plus grand parti et se stabiliserait autour des 28%, soit le double du deuxième parti flamand, le CD&V (14,1%). Quatre partis obtiendraient ensuite entre 10% et 14%: Open VLD, SP.a, Vlaams Belang et Groen. Les luttes sociales de fin 2014 et de 2015 qui avaient un temps dominé le débat politique avaient mis les partis gouvernementaux sur la défensive. La fin de cette période de conflit social a laissé le champ libre principalement à la N-VA et au Vlaams Belang, qui ont dévié l’attention publique vers les questions de sécurité, du terrorisme, des migrants, des réfugiés,… Malgré tout, il reste du potentiel en Flandre pour une gauche d’opposition conséquente.

    Début mars, Bart De Wever a parlé de son espoir de voir ‘‘une situation où un tandem PS/PTB domine la politique francophone, pour provoquer une percée communautaire.’’ La N-VA justifierait alors son modèle confédéral en soutenant qu’il existe deux réalités différentes dans ce pays. Mais pour la population ordinaire, il y a beaucoup plus de similitudes que de différences. Dans toutes les régions du pays, l’austérité fait mal et le soutien aux partis traditionnels est miné à la suite d’années de politique antisociales et de scandales. La nécessité d’une alternative de gauche se fait partout sentir.

    Une réforme confédérale où l’entièreté du modèle social serait régionalisée constitue un scénario dangereux pour la classe ouvrière flamande, bruxelloise et wallonne. A Bruxelles et en Wallonie, les régions les plus pauvres, la logique néolibérale signifierait une réduction supplémentaire des conditions de travail et des salaires pour attirer les investissements. En Flandre, la droite essayerait de forcer le passage en profitant de la mise sur le côté des syndicalistes francophones plus combatifs. Une poursuite de la régionalisation ne serait qu’au profit de l’élite capitaliste qui accentuerait la concurrence interne à la Belgique pour amplifier la spirale vers le bas des conditions de travail et de salaire.

    Dans ce contexte, le développement d’une opposition de gauche en Flandre est une tâche urgente. Pour y parvenir, adopter une démarche inclusive ne serait pas un luxe, avec une alliance de toutes les forces à la gauche de la social-démocratie et des Verts, tout en respectant les spécificités de chacun. Le PSL est prêt à apporter une contribution constructive dans ce cadre.

  • Le retour du danger rouge. La droite à l’offensive contre le PTB

    Peter Mertens le 1er mai à Anvers. Photo : Liesbeth

    Les attaques médiatico-politiques se sont multipliées contre le PTB ces derniers mois. Principalement de la part du MR, de la N-VA et du quotidien économique et financier L’Echo mais avec les applaudissements de la plupart des partis et médias traditionnels.

    Par Ben (Charleroi), article tiré de l’édition de février de Lutte Socialiste

    Un cordon sanitaire contre le PTB ?

    Mi-novembre, l’hebdomadaire Le Vif titrait ‘‘après le Brexit et Trump, Marine Le Pen, puis le PTB ?’’ Peu de temps après, Denis Ducarme (MR), inquiété par l’éventualité d’un rapprochement entre PS, Ecolo et PTB, appelait à discuter d’un cordon sanitaire contre le PTB, taxé d’extrémiste et de populiste. Soyons clair, pour le MR, les seuls partis démocratiques sont ceux qui acceptent la logique néolibérale et l’austérité sans broncher.

    Dans le débat dominical(1) qui a suivi, Philippe Goffin (MR) s’est ridiculisé en tentant de défendre péniblement la position de son parti. Demandant au représentant du PTB s’il se revendiquait encore du stalinisme, Germain Mugemangango (du PTB) a rapidement pu répondre en disant que non. L’élu MR a ensuite essayé de se rattraper en demandant plus généralement si le PTB se réclamait du marxisme, la réponse étant positive. L’attaque devenant alors si grossière qu’elle a déclenché des réactions de soutien au marxisme et PTB dans la période qui a suivi(2). Pour l’anecdote, on retiendra l’absence de réponse de Goffin vis-à-vis des crimes du néolibéralisme dans le monde, comme par exemple sous la dictature de Pinochet au Chili.

    En digne représentant du MR, Goffin expliqua que lorsque le PTB clame qu’il faut ‘‘faire payer les riches’’, selon lui, le PTB ‘‘stigmatise une population’’. Puis, ‘‘la vie en société, ce n’est pas ça, la vie en société, c’est créer une cohésion où chacun peut s’épanouir’’. Venant du Parti qui provoque tout le contraire en menant les pires attaques sur les conditions de vie et de travail de la majorité de la population depuis la seconde guerre mondiale, c’est osé !

    Du côté néerlandophone, l’argument du stalinisme a été ressorti à plusieurs reprises, pour s’engouffrer dans la brèche ouverte par le PTB lui-même qui, tout en se distanciant aujourd’hui du stalinisme, ne fait aucune analyse publique de ce qui a coincé en Union soviétique. Celui qui ne s’engage pas dans la bataille de l’Histoire est bien mal armé pour celles de l’avenir.

    Le PTB et ses maisons médicales

    Fin décembre, c’est L’Echo qui rentrait dans la bataille vis-à-vis du PTB en publiant un dossier à charge sur les maisons médicales et ‘‘la face cachée du PTB’’. On y accuse les maisons médicales de refus de soin à des patients qui se présentent sur d’autres listes électorales. Il y a pourtant de sérieuses raisons de douter de ces accusations en l’air, sans informations plus précise. Comme le fait remarquer Hugues le Paige(3), le timing de ces accusations était une pathétique tentative de détourner l’attention des véritables affaires, comme le Kazakhgate ou Publifin.

    La critique s’est d’ailleurs beaucoup plus focalisée sur le fait que les maisons médicales seraient des lieux de discussions politiques. Au pays des piliers(4) qui regroupent syndicats, mutuelles et partis, on peut dire que c’est l’hôpital qui se fout de la charité. Sans même parler de l’action commune, rappelons que même les libéraux ont leur propre pilier, avec la mutualité libérale et le syndicat CGSLB. On se souviendra d’ailleurs de la manière dont l’ancienne ministre galant a joué sur le syndicat libéral pour trouver du soutien à la SNCB en l’imposant comme syndicat représentatif tout en faisant perdre ce statut au SIC et au SACT.

    Les maisons médicales proposent des activités politiques ? On a envie de répondre ‘‘et alors ?’’ ou même ‘‘tant mieux !’’ car, avec les attaques sans précédent sur les soins de santé, et en particulier sur l’existence même des maisons médicales, mener des discussions politiques se justifie pleinement. Si le travail des maisons médicales joue certainement un rôle positif dans le travail d’implantation du PTB, sa croissance fulgurante dans les sondages du côté francophone est surtout due au discrédit grandissant vis-à-vis des partis traditionnels et à la posture d’alternative politique que représente le PTB dans une situation objective où la colère et la volonté de changement augmente.

    Des attaques restées sans réponse

    Les attaques de forme et différentes critiques superficielle vis-à-vis du PTB prouvent la peur grandissante des partis et média traditionnels face aux changements profond qui parcourent la base de la société. Il existe bel et bien un espace pour la construction d’une nouvelle force de gauche en Belgique. Les attaques de la droite ne répondent jamais aux questions et préoccupations qui y conduisent.

    Nous avons des divergences avec le PTB, sur son programme, sa stratégie politique ainsi que beaucoup de question sur son fonctionnement interne. Nous aimerions des discussions franches et honnête, et débats de fond sur ces questions avec le PTB et ses membres. Ainsi qu’avec tout parti, association ou militant individuel qui veux combattre l’austérité et se lancer dans la bataille pour changer de société. Mais tout en étant lucide sur les divergences qui existent au sein de la gauche, face aux critiques de la droite, il faut faire front. Les attaques sont dirigées contre tous ceux qui remettent le système actuel en question.

    NOTES

    (1) Débat RTBF du dimanche 4 Décembre 2016 : Faut-il élargir le cordon sanitaire au PTB ?
    (2) Comme par exemple le café serré de Thomas Gunzig du mercredi 7 Décembre sur la première.
    (3) Voir blog de politique du 9 Janvier 2017: http://blogs.politique.eu.org/Haro-sur-le-PTB-ce-n-est-qu-un
    (4) Définition du CRISP : Ensemble d’organisations qui ont une idéologie commune et qui veillent à son influence dans l’organisation de la société.

  • Le gros mot, c’est ‘‘capitalisme’’, pas ‘‘socialisme’’

    Il y a une trentaine d’années que le capitalisme a remporté son combat historique contre le bloc soviétique. Depuis lors, en dépit du fait qu’il n’ait pas véritablement été contesté, ce système est parvenu tout seul à saper structurellement les bases de son soutien populaire. S’il se tient encore debout aujourd’hui, c’est en raison de l’absence d’un adversaire crédible, d’une alternative largement enracinée et soutenue. Les inégalités atteignent des proportions hallucinantes. L’état du monde devient chaque jour plus instable. Ceux qui hier vivaient leur vie dans l’insouciance sont aujourd’hui saisi d’angoisse devant un avenir menacé par les guerres, le terrorisme, la pauvreté croissante, les dictatures, les catastrophes climatiques,…

    Par Bart Vandersteene

    Ce système en crise doit être protégé des critiques, c’est une question de survie. Et pour certains, la meilleure défense, c’est encore l’attaque. C’est ce qui explique les déclarations au vitriol des politiciens et idéologues libéraux contre le PTB. Son soutien est l’expression de la recherche d’une alternative de gauche et il est positif que le PTB fasse connaitre les idées de gauche auprès d’une plus vaste audience. Mais pour parvenir à atteindre son objectif – la réalisation d’une société socialiste selon ses textes de congrès – il lui faudra clarifier la manière dont il compte s’y prendre.

    Dans les pages du quotidien flamand De Morgen, le président du PTB Peter Mertens a réagi aux critiques récurrentes concernant le passé stalinien du parti en préconisant de laisser aux historiens le soin de faire le bilan du XXe siècle. En réagissant ainsi, il désarme son parti et ses membres face aux attaques de la droite. Toute personne engagée dans la lutte pour une société socialiste se demandera pourquoi les choses ont si mal tourné en Russie soviétique et ce que cela implique aujourd’hui vis-à-vis de la lutte pour le socialisme. En laissant cette question sans réponse, les membres du PTB se retrouvent sans aucun argument lorsqu’on leur demande – pour la énième fois – pourquoi ils se disent communistes, s’ils défendent Staline ou non, s’ils se réclament du marxisme, si le stalinisme ne démontre pas que le socialisme est une utopie,…

    Le PTB préfère éviter ce débat complexe. La tactique peut sembler intelligente à court terme mais, dans la pratique, l’absence d’objection est surtout une belle aubaine pour la propagande antisocialiste de droite.

    Dans la communication du PTB destinée au grand public, ses tracts ou lors de débats télévisés, pas un mot n’est dit sur le capitalisme ou le socialisme. Le nouveau livre de Peter Mertens ‘‘Graailand’’ (qui pourrait être traduit par ‘‘un pays de rapaces’’, uniquement disponible en néerlandais) comprend de nombreux arguments intéressants contre le néolibéralisme, comme c’était déjà le cas avec de précédents ouvrages. Beaucoup de lecteurs pourront par eux-mêmes parvenir à la conclusion qu’il y a un fil rouge dans cette critique, à savoir la logique du système capitaliste, mais les choses ne sont pas dites de manière aussi explicite. Concernant le socialisme, la manière dont il pourrait fonctionner, les défis à relever, la manière d’instaurer un tel système, etc., on ne trouve rien.

    Ce n’est pas un hasard si les mesures ou ‘‘bonnes idées’’ proposées par le PTB ne sont pas encore appliquées aujourd’hui. Seule une approche révolutionnaire est de nature à faire face à la guerre de classe que déchainerait sur nous la classe dirigeante si un gouvernement adoptait de telles mesures. Comme ce fut le cas en Grèce, elle essayerait par tous les moyens de nous mettre à genoux. À moins que le mouvement n’ose riposter en retirant le pouvoir des mains de l’élite capitaliste. Sa force ne provient pas de son nombre, mais du contrôle qu’elle exerce sur les secteurs-clés de l’économie, la machine de propagande des médias et le système judiciaire.

    Une société socialiste serait à l’opposé du capitalisme. Les secteurs-clés de l’économie seraient sous propriété collective et non pas sous la propriété privée d’une petite élite de super-riches. La concurrence effrénée céderait place à la solidarité et à l’entraide. Grâce aux progrès technologiques, nous travaillerions moins pour une même richesse. Grâce à un contrôle démocratique sur ces richesses et à leur répartition, il n’y aurait plus de super-riches. Sans les motivations liées à la voracité économique, il n’y aurait plus aucune raison de mener des guerres et des occupations impérialistes.

    Peu de gens refuseraient de vivre dans un tel monde dès maintenant, mais beaucoup doutent que cela soit toutefois possible. Ces appréhensions proviennent dans une large mesure de la propagande idéologique de droite selon laquelle la nature humaine ne reposerait pas sur la solidarité mais sur la compétitivité. Cette propagande s’appuie essentiellement sur l’échec des tentatives de construire un monde socialiste au XXe siècle.

    Ces questions méritent d’être étudiées. Ce n’est qu’ainsi qu’il nous sera possible d’à nouveau mettre en avant le socialisme en tant qu’alternative crédible.

  • Qui sont les grands gagnants de l’accord en RDC ?

    À la suite de la crise du troisième mandat présidentiel en République démocratique du Congo (RDC), un accord politique global et inclusif a finalement été signé sous l’égide de la Conférence épiscopale congolaise le 31 décembre 2016. Il a entre autres pour résultat la (re)nomination de 21 ministres proches de Tshisekedi, de 19 ministres issus du reste de l’opposition et, enfin, de 25 ministres du camp présidentiel. Il y a donc beaucoup de gagnants, mais au détriment du peuple congolais.

    Par Alain (Namur)

    L’anti-impérialisme en débat

    Pour une partie des militants ayant entamé l’épreuve de force, ce premier résultat est une première victoire. Cela peut se comprendre car dans ce cadre, Joseph Kabila s’est engagé à ne pas modifier la constitution et donc à ne pas se représenter aux présidentielles et à ne pas organiser de référendum. Cette victoire a été acquise au prix de la lutte de ces dernières années contre la modification de la constitution. À partir du 19 décembre 2016, les villes ont été militarisées ; on a recensé une centaine de morts et 500 personnes ont été arrêtées. Il est également apparu clairement que Joseph Kabila a perdu le soutien de l’Union européenne et des USA. Il lui restait, dès lors, une marge de manœuvre fort limitée pour pouvoir briguer un troisième mandat. Néanmoins, de nombreux éléments peuvent encore déstabiliser l’équilibre précaire obtenu par cet accord. La lutte des classes n’a pas dit son dernier mot et, pour reprendre la formule de Rosa Luxembourg, « L’ordre ne règne pas encore au Congo ».

    Beaucoup a été écrit ces derniers temps sur la situation en RDC. Cependant, nous devons faire part de notre étonnement concernant la lecture de cette crise faite par le camarade du PTB Tony Busselen. Dans un article publié en 3 parties sur le site INTAL, Tony analyse les tenants et aboutissants de l’accord. Nous sommes bien entendu d’accord avec lui lorsqu’il défend la légitime souveraineté du Congo. Nous estimons cependant au PSL qu’il existe une différence de signification sociale dans cette revendication de souveraineté quand elle émane de la classe des travailleurs congolaise et quand la classe politique congolaise la formule et l’envisage.

    Sur l’origine de la crise actuelle

    Pour Tony, l’origine de la crise actuelle « se trouve dans le timing des prochaines élections. En effet selon la constitution, lundi 19 décembre un nouveau Président aurait dû prêter serment, un président élu lors d’élections qui auraient dû avoir lieu en novembre. Or cela n’a pas été possible. »

    L’origine de la crise est multifactorielle. Dans un précédent article, nous développions le contexte de crise actuelle et son ralentissement économique qui n’est pas étranger à la vague de mécontentement dans le pays. Mais il ne faut pas escamoter les faits : le problème du timing des élections a été entièrement façonné par le clan présidentiel. Le ‘glissement’ a rendu l’organisation des élections à la date prévue impossible, afin de mettre l’opposition politique et le peuple devant le fait accompli. Il est clair que l’organisation d’élections dans un pays tel que le Congo comporte d’énormes difficultés. Mais Joseph Kabila a mis plus de temps et d’énergie à faire fructifier ses gains et à faire taire ses opposants qu’à garantir le droit de la population à choisir ses représentants.

    L’accord global et inclusif : un pas en avant ?

    Si l’on considère le fait que Kabila ne soit pas en mesure de se représenter en 2017 à cause de la pression émise par la rue, l’accord est un pas en avant. Cela signifie que la lutte peut déboucher sur un changement. Toutefois, il faudrait encore discuter de quelle couche sociale va mettre en œuvre ce changement et dans quel intérêt. Cet élément est central pour obtenir un changement qui améliore effectivement les conditions de vie des jeunes, des travailleurs et des paysans.

    Tony ne considère pas cette approche. Pour lui « En comparaison avec des accords précédents signés à Lusaka, Sun City ou Adis Abeba, un accord qui sort de ces négociations-ci, serait un accord conclut entre Congolais sans la présence autour des tables de négociations de diplomates et experts extérieures. Ce serait un pas en avant dans le long chemin vers une souveraineté et indépendance réelle… Mais même si un accord est signé, ce dernier connaitra au moins un obstacle et une menace : l’obstacle consiste dans la colère des jeunes congolais ; la menace consiste dans les ingérences des puissances occidentales qui ne sont pas intéressées dans l’unité des Congolais et qui sont surtout décidés d’en finir avec Kabila et la majorité présidentielle le plus vite que possible. »

    Tony reconnait qu’après plus de 15 ans de gouvernement Joseph Kabila, le chemin vers la souveraineté et l’indépendance est encore long. Cela ne justifie-t-il pas en soi la colère des jeunes Congolais ? De plus, comme Tony l’a lui-même – et à juste titre – dénoncé, l’ingérence des puissances occidentales est bien réelle. Mais cela reste vrai même si l’accord a été signé à une table composée exclusivement de Congolais, ces derniers étant en partie mis sous pression par des pouvoirs étrangers. Des membres du clan de Kabila (des politiciens et des membres de son appareil de sécurité) ont vu leurs biens confisqués aux USA et en Europe. Le rassemblement autour de Tshisekedi a été discuté à Genval et Didier Reynders l’a rencontré… L’accord en lui même a été rédigé sous l’égide de l’Église congolaise qui dépend du Vatican. Et Joseph Kabila lui-même a été reçu en audience par le pape alors qu’il devait rencontrer des représentants de l’ONU. On le voit donc clairement, l’accord n’a pas été déterminé par la situation et les intérêts du peuple congolais. Il a été discuté dans de nombreuses officines étrangères avant d’être imposé au peuple congolais.

    Joseph Kabila, héritier de la tradition lumumbiste ?

    Joseph Kabila est présenté par Tony comme l’héritier du courant Lumumbiste : « Kabila avait basé sa présidence depuis 2006 sur une large alliance de cent partis. Cette « Majorité présidentielle » se réunissait sur un principe : l’appui à la personne de Kabila comme président. Kabila lui-même est l’héritier d’un courant de gauche. Cette gauche qui s’inspire de Patrice Lumumba, une des principales figures de l’indépendance. Mais il n’a pas réussi à donner une base politique commune à sa majorité présidentielle ».

    Joseph Kabila a succédé à son père. Même si ce dernier avait énormément de limites et de faiblesses il avait suscité des espoirs à travers sa lutte contre Mobutu et avait obtenu une indépendance, certes limitée, face à l’impérialisme. Une chose est certaine, c’est que Kabila fils n’a pas du tout fait vivre l’héritage politique du lumumbisme ou d’une quelconque tradition de gauche au Congo.

    En effet, sa pratique politique prédatrice s’inspire plus du mobutisme que du lumumbisme. Une enquête du journaliste Richard Miniter parue en 2014 dans le Huffingtonpost a révélé que la fortune du clan Kabila s’élève à 15 milliards de dollars (Joseph Kabila: un dictateur qui vaut 15 milliards de dollars). Dernièrement, le magazine Bloomberg a réalisé une enquête sur le contrôle qu’a Kabila sur l’économie congolaise. Via sa femme, ses frères et ses sœurs, il possède pas moins de 70 sociétés actives dans tous les secteurs économiques clés du Congo. Une seule de ces sociétés lui aurait rapporté pas moins de 350 millions de dollars en 4 ans (With His Family’s Fortune at Stake, President Kabila Digs In). Cet argent engrangé est planqué dans des paradis fiscaux du monde entier. Est-ce à cela que Tony fait référence lorsqu’il parle de « solutions africaines pour des problèmes africains » ? Nous pensons au contraire que Kabila n’a pas suivi l’héritage de son père, qu’importent les limites de ce dernier. Au contraire, Joseph Kabila n’a jamais cherché à construire le moindre rapport de force face à la bourgeoisie nationale, ni face à la bourgeoisie internationale. C’est pourtant un rapport de force basé sur la mobilisation des travailleurs, des jeunes et des paysans pauvres que l’on attend d’un dirigeant de gauche.

    Le campisme

    La situation au Congo est bien évidemment complexe. Elle est traversée par une lutte des classes entre le prolétariat et la bourgeoisie congolaise dont les diverses fractions entretiennent des liens avec des acteurs régionaux d’une part et internationaux d’autre part. Ainsi, Kabila a le soutien de l’Angola et du Zimbabwe et a remis au beau fixe ses relations avec le Rwanda et l’Ouganda. Par contre, alors qu’au début de son mandat, il avait le soutien de l’Union européenne et des USA, ces deux blocs misent aujourd’hui plutôt sur l’alternance avec une figure comme Katumbi.

    Ces dernières années, le volume d’échange avec la Chine a augmenté jusqu’à devenir l’un des premiers partenaires commerciaux de la RDC. Cela est en partie dû à la division internationale du travail. La Chine est devenue le premier importateur de matières premières au monde. Il est de ce fait normal que tous les pays dont l’économie est basée sur l’exportation de matière première voient leur volume d’échange avec la Chine augmenter. Cela donne-t-il un caractère plus progressiste à la croissance économique dans les pays exportateurs ? Nous ne le pensons pas. Si les revenus liés à l’exportation ne permettent pas de construire des infrastructures, d’améliorer les services publics, de réduire la pauvreté et la faim, de développer une industrie qui permette une réelle souveraineté, alors le commerce avec la Chine n’a pas en lui-même un caractère progressiste. Ceci est d’autant plus vrai que la Chine n’a pas d’espace d’expression démocratique et qu’il n’y a donc aucune organisation capable d’exiger du pouvoir chinois des relations commerciales avec le Congo qui puisse aussi bénéficier aux Congolais.

    Un scénario à la soudanaise ?

    Dans l’émission de la Première Le Forum du 20 décembre consacré à la crise en RDC, la journaliste Colette Breackman, du journal Le Soir, employait cette formule : « le Congo est trop vaste pour être dirigé uniquement par quelqu’un de populaire auprès des Congolais ». Bob Kabamba, académicien et politicien ECOLO invité pour l’émission, ne l’a pas contredit. C’est également le cas du journaliste de La Première qui n’a pas cillé mot. Le général Janssens commandant de la force publique en 1960 ne pensait pas autrement… Cette formule peut être comprise de plusieurs manières et à différents niveaux.

    D’un point de vue économique, elle reflète le fait que l’impérialisme occidental veut garder la main sur cette région stratégique. Au-delà des métaux précieux, des soupçons de trafics d’uranium ont peut-être accéléré l’affaiblissement de l’image de bon gestionnaire de Kabila. D’un point de vue, politique, avoir au cœur de l’Afrique un pouvoir qui reflète les aspirations des masses n’était clairement pas acceptable pour l’impérialisme.

    Pour beaucoup de Congolais de la diaspora, cette formule sera aussi comprise comme l’expression d’un plan plus vaste visant à redessiner l’Afrique Centrale en de plus petits États avec une séparation d’une partie de l’est du Congo. L’Est deviendrait des Etats tampons qui stabiliseraient les États voisins, le Rwanda et l’Ouganda. Ce plan semblait gagner une partie de l’establishment démocrate sous Bill Clinton et a aussi semblé convaincre le président français Nicolas Sarkozy (Sarkozy veut dépecer la RDC). Mais ce plan bute sur un obstacle de taille : la volonté et l’opiniâtreté des Congolais. Cela entraine néanmoins tout un tas de conflits fonciers qui ajoutent à l’instabilité de la région.

    Il est clair que sur une base capitaliste, il sera impossible de trouver une solution aux partages des richesses et aux questions de pressions démographiques.

    Une année qui s’annonce difficile

    En vertu de l’accord du 31 décembre 2016, les élections devront se tenir cette année. Cela entraine énormément de défis. L’organisation de ces élections couterait environ 1,5 milliard de dollars, alors que les dépenses annuelles avoisinent les 5 milliards de dollars. De plus, avec l’instabilité dans l’est du pays, il n’est pas sûr que les élections puissent se préparer de manière sereine sur tout le territoire. En outre, la croissance attendue pour 2017 n’est que de 2,9% à cause de la baisse de la demande chinoise, alors que la moyenne de ces 5 dernières années tourne aux alentours de 7,7%. Le taux d’accroissement de la population étant de 3%, 2017 sera très probablement une année de récession économique si l’on considère le PIB/habitant. Cela reflète encore une fois que la RDC n’a pas une dynamique de croissance économique propre. La récession va mettre de l’huile sur le feu de la contestation sociale. (En 2017, la RD Congo s’attend à une nouvelle année de croissance molle)

    Comme nous l’avions dit et développé dans notre dernier article au sujet de la RDC, l’émergence d’organisations indépendantes des travailleurs, des jeunes et des paysans reste nécessaire pour que l’énergie déployée par les masses puisse aboutir à une amélioration de leurs niveaux de vie. Après Lumumba, chaque dirigeant politique une fois arrivé au pouvoir n’a fait que représenter les intérêts d’une des diverses fractions de la bourgeoisie. La politique qu’ils ont donc menée a eu un impact désastreux sur les conditions de vie des masses.

    Une organisation indépendante, issue des masses, qui veut défendre leurs intérêts devra reprendre le meilleur des traditions des luttes. C’est via les actions collectives de masse – assemblées générales, manifestations, grèves, occupations … – que l’énergie peut le mieux se dégager. La jeunesse congolaise, et africaine en général, est en ébullition. Il faut que ce dynamisme puisse se transmettre et s’organiser au sein du monde du travail et des masses paysannes qui ont une place déterminante dans les secteurs clés de l’économie, afin d’arracher l’expropriation et la nationalisation de ces derniers sous contrôle et gestion démocratiques dans le cadre d’une économique démocratiquement planifiée. Le capitalisme est un système international ; le phénomène d’accaparement de terre en est une illustration. La lutte doit se faire sur le terrain national en lien avec les organisations qui défendent les mêmes intérêts au niveau international.

  • Le CETA est signé, intensifions la lutte contre la dictature des multinationales!

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    L’accord économique et commercial global (Comprehensive Economic and Trade Agreement, CETA) entre le Canada d’une part et l’Union européenne et ses 28 États membres a été signé ce 30 octobre 2016 par le premier ministre canadien Justin Trudeau et le président du Conseil européen Donald Tusk. La conclusion de cet accord a été temporairement bloquée par le refus du gouvernement wallon qui semblait faire sienne l’opposition du monde syndical et associatif. Ce dernier a finalement plié face aux pressions tout en justifiant cette capitulation par de prétendues garanties notamment concernant les mécanismes de résolution de conflits entre Etats et entreprises privées.

    Avec sa résistance au CETA, le PS a voulu se positionner à nouveau en tant qu’opposition de gauche. Dans plusieurs articles, Magnette était comparé à Tsipras en raison de son discours musclé tout en craquant finalement sous l’intense pression exercée sur le gouvernement wallon. Pour beaucoup de gens, Magnette sera considéré comme ‘‘celui qui a quand-même essayé et qui a attiré l’attention publique sur l’accord’’, particulièrement là où la mobilisation citoyenne contre le TTIP et le CETA était plus faible, comme en Flandre. Formellement, rien n’a changé dans le CETA mais, de manière plus informelle, cela a réduit la marge de manœuvre pour ce type de traités. Parmi la couche plus consciente et combattive de la population, cela a surtout démontré les limites de cette opposition.

    Ce cas a une fois de plus illustré que faire reposer sa stratégie sur les négociations avec les institutions européennes est insuffisant. Il nous faut une stratégie de confrontation et de rupture avec l’Union européenne de l’austérité basée sur la mobilisation des masses et la solidarité européenne ainsi que sur un programme qui vise à aller jusqu’au bout pour défier le règne des multinationales.

    Le débat à l’occasion du CETA est un nouvel exemple des problèmes que rencontrent les grandes puissances pour conclure de nouveaux accords commerciaux mais aussi de la manière avec laquelle les politiciens peuvent réagir sous pression d’une opinion publique qui se radicalise et s’oppose de plus en plus à la mondialisation capitaliste et aux traités commerciaux tels que le TTIP et le CETA, qui visent à poursuivre l’érosion de la démocratie politique et économique. A partir de maintenant, chaque traité de commerce sera probablement suivi avec plus d’attentions qu’auparavant, même si l’establishment européen fera tout pour tuer un tel débat dans l’œuf en assurant que de tels traités ne se décident plus qu’au niveau européen, sans que les parlements régionaux ou nationaux ne puissent se prononcer. Réussir à faire cela dépendra de la force du contre-mouvement social.

    Il est impossible de comprendre la récente posture du gouvernement wallon et du PS en général sans la placer dans le contexte de luttes sociales de ces deux dernières années en Belgique, depuis l’arrivée au gouvernement fédéral de l’équipe de Charles Michel (MR). Un récent sondage réalisé par un des principaux journaux francophones (Le Soir) a encore dévoilé qu’à la question « Pour sortir de la crise, faut-il changer de système ? », 90,9 % des Belges francophones ont répondu “oui”. Il s’agit d’une claire illustration de l’atmosphère qui se développe actuellement et sur laquelle le PS a tenté de surfer, alarmé par sa perte de soutien continue dans les sondages d’opinion.

    ceta02Il n’y a que dans la presse que le “non” au CETA était isolé. Le refus des accords de libre-échange va croissant et est notamment illustré par le fait que les collectivités territoriales (villes, communes,…) ayant pris position contre le CETA ou le TTIP (accord de libre-échange devant être conclu entre l’Union européenne et les Etats-Unis) représentent l’équivalent de 75 millions de personnes ! Au delà de ça, on peut aussi parler des 32.000 personnes qui ont manifesté en Allemagne en septembre dernier, des sondages qui soutiennent que l’opinion est majoritairement défavorable aux traités de libre échange en Allemagne et en France, de la pétition internationale qui a réuni 3 millions de signature contre le TTIP et le CETA,…

    Il faut retirer le pouvoir des mains des multinationales et des actionnaires. De plus en plus de gens en sont convaincus. Mais nous ne pourrons donner corps à cette aspiration qu’en collectivisant les secteurs-clés de l’économie (finance, énergie, sidérurgie,…) dans le cadre d’une économie démocratiquement planifiée afin de satisfaire les besoins de la population dans le respect de l’environnement. Le chemin vers cet objectif est encore long et la lutte ne sera pas aisée, mais il s’agit de la seule manière de sortir de la crise économique et écologique dans laquelle nous a empêtrés la logique du ‘‘libre marché’’.

    => Virage à gauche au PS: réaction de panique face au PTB ou quelque chose d’autre?

  • Virage à gauche au PS: réaction de panique face au PTB ou quelque chose d’autre?

    ps-ppics

    Les gouvernements de Bruxelles et de Wallonie bloquent le traité de libre-échange Union européenne – Canada (le CETA), qui n’est encore qu’une pâle copie du Traité Transatlantique (TTIP, UE-USA) bien plus controversé. Le PS remet sur table la diminution du temps de travail et la démocratie économique, des revendications traditionnelles du mouvement ouvrier bannies des décennies durant et reléguées aux programmes de la gauche radicale. S’agit-il simplement d’une réaction de panique face à la percée du PTB dans les sondages ou s’agit-il d’autre chose ?

    Par Eric Byl, article tiré de l’édition de novembre de Lutte Socialiste. Photo : PPICS

    Le programme de Noël (1945) du Parti social-chrétien (PSC, Christelijke Volkspartij, CVP, en néerlandais), abordant la reconstruction d’après-guerre, avait pour titre “qui sera l’architecte ?” Le PSC s’est ainsi présenté comme ‘‘leader de la nation’’. A l’instar de nombreux autres partis traditionnels en Europe, il n’a pu le faire que grâce à l’énorme augmentation des richesses consacrées à acheter la paix sociale dans la période d’après-guerre. Cela résultait de la pression combinée de la force du mouvement ouvrier et de l’existence d’un système alternatif sous la forme des caricatures staliniennes du socialisme à l’Est. À partir de la crise, début années ‘70, il est devenu bien clair que tout cela était exceptionnel et non la règle. Un chômage de masse structurel a fait son apparition et les détenteurs de capitaux exigeaient que leurs profits soient préservés aux dépens des salaires, des conditions de travail et des dépenses sociales.

    Tous les partis traditionnels s’y sont pliés, partis populaires et social-démocratie inclus, jusqu’au Parti Communiste en Italie, même au prix de balancer idéologie et programme par-dessus bord. Cela a sapé leur autorité et a conduit, notamment en Flandre, à une fracture politique. Mais la politique d’austérité a seulement conduit à une nouvelle période de Grande Récession (2008-2009). Il est devenu sans cesse plus clair que les politiciens traditionnels n’offrent de solutions ni pour la crise climatique, ni pour l’afflux de réfugiés, ni pour les conflits militaires, ni pour la relance du commerce mondial, ni pour la pauvreté, la mobilité, la question nationale, l’emploi, le vieillissement de la population, etc.

    C’est pourquoi de plus en plus de gens sortent des sentiers battus de la politique traditionnelle. Ce sont d’abord les populistes de droite et d’extrême droite qui ont pu en tirer profit. De par leur fortune personnelle ou à l’aide de sponsors richissimes, ils disposent des moyens de détourner la colère vers les ‘‘chômeurs-profiteurs’’, les ‘‘réfugiés économiques’’, les ‘‘paresseux du Sud’’, etc. Le phénomène est important et dangereux, mais surtout basé sur ceux qui cherchent une solution individuelle et qui ne regarde pas les forces sociales. Mais ce qui est beaucoup plus important, c’est qu’il y a aussi des groupes sociaux qui tournent le dos à la politique traditionnelle. Cela explique la croissance des nouvelles formations de gauche qui représentent une réelle menace pour la domination capitaliste puisque leur présence stimule l’action sociale et fait renaitre l’espoir. Pensons à Syriza en Grèce, malheureusement jusqu’à la capitulation de sa direction, à Podemos en Espagne, à Die Linke en Allemagne, au Socialistische Partij aux Pays-Bas, à l’Anti Austerity Alliance – People Before Profit en Irlande, etc. Le phénomène fait tache d’huile. Les sondages montrent que le PTB-Pvda peut revendiquer sa place dans cette liste, surtout en Wallonie (16%) et à Bruxelles (11%).

    Le PS s’inquiète, c’est certain. L’introduction d’une semaine de quatre jours au salaire d’une semaine de cinq jours pour le personnel communal de Saint-Josse et pour certains fonctionnaires wallons ayant plus de 60 ans sert à démontrer que les déclarations du PS sur la diminution du temps de travail s’accompagnent d’actes. Evidemment, le PS ne va pas étendre cela à tous les travailleurs des services publics ni l’imposer au privé. Que cela ne retienne pas les syndicats, dans tous les secteurs, de saisir cette revendication comme outil de lutte central contre le chômage. Sa proposition pour le ‘‘double pouvoir’’ (pour des entreprises de ‘‘codécisions’’) dans les entreprises (le conseil d’administration devrait partager son droit de décision avec un conseil des travailleurs) est une manière d’éviter de parler de socialisme. Le danger que cela conduise à la collaboration de classe ou à la cogestion comme en Allemagne est réel. Mais des délégations combatives peuvent aussi saisir l’idée pour contester le pouvoir des actionnaires et la transformer en véritable droit de véto pour les travailleurs. Dans ce cas, les actionnaires s’enfuiraient bien vite. La nationalisation sans indemnisation sous contrôle de la communauté et des travailleurs serait alors la seule issue. Si le PS était vraiment sérieux, pourquoi ne pas commencer avec Caterpillar ?

    Mais il y a autre chose. En Grèce, le PASOK a été balayé du paysage électoral. Aux Pays-Bas, le PvdA a chuté de 38 sièges à 10. Le PSOE espagnol a été dépassé par Podemos. En France, François Hollande fait face à une crise profonde. La tendance à gauche s’exprime dans toutes sortes de nouvelles formations. Depuis peu, cette tendance est devenue si forte que Bernie Sanders a été capable d’enclencher une ‘‘révolution politique’’ avec les primaires du Parti démocrate. Au Royaume-Uni, cette tendance s’est traduite avec Jeremy Corbyn aux primaires du Parti travailliste. Face au précipice, certains dirigeants de la social-démocratie se repentent, partiellement en raison du fait que, soudainement, les commentateurs bourgeois plaident eux aussi pour une politique d’investissements publics.

    Aux Pays-Bas, une figure d’arrière-garde s’est soudainement proposée comme candidat de gauche pour être tête de liste du PvdA. En Espagne l’aile de droite du PSOE organise un coup d’Etat contre le dirigeant du parti, Pedro Sanchez, en représailles de son refus d’accepter un gouvernement minoritaire du PP. En Belgique francophone, le sommet du PS a lui-même changé de cap. Alors que Jeremy Corbyn est devenu l’expression d’un mouvement par en bas, leur tournant s’assimile plutôt à une tentative de survie désespérée par en haut.

    Contrairement à Sanders ou Corbyn, les dirigeants du PS n’ont pas une réputation de fermeté, de crédibilité et d’intégrité. L’incertitude règne donc quant à la mesure jusqu’où ils sont prêts à aller. Mais il est indiscutable que la crise de la social-démocratie entre dans une nouvelle phase. Le PSL continuera à soutenir chaque pas en avant pour le mouvement ouvrier, même de très petits pas. Mais sans entretenir de vaines illusions. La meilleure garantie contre la déception de promesses non-tenues, c’est de construire le mouvement d’en bas et d’exiger de participer à chaque niveau. Sur ce plan-là, il y a encore beaucoup de travail à faire, surtout au PS, mais aussi dans les syndicats et au PTB.

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