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  • Le 14 octobre, votez PTB! Vous voulez rejoindre la lutte ? Rejoignez le PSL!

    Il y aura des candidats du PSL à Saint Gilles (Gauches Communes) et à Keerbergen (Consequent Links). Ailleurs, nous appelons à voter pour le PTB.

    Peter Mertens au 1er mai à Anvers. (Photo : Liesbeth)

    Dans le numéro précédent de Lutte Socialiste (mai 2018), nous faisions état de la discussion à venir entre le PTB et le PSL sur les élections communales. La résistance sociale à l’échelle locale pourrait connaître une importante impulsion si, le 14 octobre prochain, une alternative de gauche cohérente obtenait un bon résultat. Cela renforcerait la confiance pour lutter sur le plan local, mais aussi sur le plan régional et fédéral. Car le néolibéralisme a aussi infecté la politique communale. Le coût du logement grimpe en flèche, les infrastructures sont déficientes, qu’il s’agisse de routes, d’écoles, de crèches ou de transports publics, tandis que les services à la population se font plus chers et que les listes d’attente s’allongent.

    Par Bart Vandersteene, porte-parole national du PSL, éditorial de l’édition de juin de Lutte Socialiste 

    Les partis traditionnels participent à la politique de transfert des ressources communales vers les promoteurs et spéculateurs immobiliers aux dépens de la politique sociale et des services publics. Il existe une large marge de manœuvre pour une alternative de gauche, surtout si elle est combinée à des campagnes militantes et au regroupement des différents partis de gauche cohérents. Le PSL a proposé son aide au PTB pour contribuer au meilleur résultat possible le 14 octobre. Malheureusement, nos arguments sont tombés dans l’oreille d’un sourd.

    Le PTB refuse la collaboration

    La réunion avec Benjamin Pestieau, membre de la direction nationale du PTB, a finalement eu lieu le vendredi 27 avril, soit onze mois après l’envoi à la direction du PTB de notre proposition de rencontre et après dix mails de rappel. Même les plus optimistes des camarades du PSL savaient que le PTB ne débordait pas d’enthousiasme pour s’assoir à une même table et travailler côte-à-côte. Mais nous avons estimé qu’il était important que la discussion ait lieu, ne serait-ce que pour mieux connaître l’analyse et le raisonnement politique du PTB.

    Voici ce que le PTB a clairement indiqué lors de la rencontre qui a finalement eu lieu :

    • le PTB ne vise pas, pour le moment, d’obtenir le plus d’élus possible aux élections communales
    • il ne s’intéresse aux résultats que dans les endroits qu’il considère comme prioritaires ;
    • la résistance sociale se heurte à un manque de dynamisme de la base ainsi qu’à une faible conscience socialiste ;
    • une rupture radicale avec la logique capitaliste n’est donc pas possible à court ou moyen terme ;
    • le PTB développe donc un plan d’implantation à long terme ;
    • il n’existe pas une confiance suffisante entre nos deux partis pour collaborer.

    Une confiance doit s’établir avant que la PTB n’envisage la possibilité éventuelle d’avoir des candidats PSL sur les listes du PTB. Benjamin Pestieau a cependant dû concéder que des membres du PTB estiment qu’une telle collaboration est possible. Les militants de base du PTB disent à leurs dirigeants que, sur le terrain, sur les lieux de travail, dans les secteurs ou les sections syndicales,… bref en de nombreux endroits, la coopération est excellente avec les militants du PSL. Ce n’est pas une coïncidence : les militants combatifs savent qu’ils sont toujours plus forts s’ils travaillent ensemble dans le respect des uns et des autres. Nous avons l’impression que la direction du PTB refuse de coopérer avec nous aux élections en raison de calculs politiques alors qu’elle devrait être guidée par le désir de construire la résistance, le mouvement social et une gauche conséquente autant que possible.

    Afin d’obtenir le meilleur résultat possible, le PTB – de loin le plus grand acteur – devrait prendre la responsabilité de rassembler la gauche au sens large dans une campagne dynamique, rebelle et ambitieuse. Nous comprenons que le PTB souhaite conserver le contrôle sur son propre développement électoral, mais cela ne signifie pas pour autant que d’autres forces de gauche soient incapables de livrer une contribution substantielle et énergique à leur campagne. A notre avis, une approche semblable à celle de Jean-Luc Mélenchon, qui fait tout ce qu’il peut pour développer le front le plus inclusif possible dans la lutte (voir en page 12), renforcerait la force de la résistance, tant sur le plan social qu’électoral. Loin d’affaiblir la position de Mélenchon, cela la consolide.

    Aucun autre intérêt que ceux de la classe ouvrière

    Lors de son congrès de 2008, le PTB a annoncé qu’il tournait la page du dogmatisme et du sectarisme : le parti se concentrerait sur des réponses concrètes aux problèmes concrets. Le PTB s’est doté d’un nouvel emballage à destination du grand public et a développé ses ambitions électorales, qui pilotent de plus en plus son programme. Selon ses propres dires, le PTB s’est ouvert. Mais ses anciennes méthodes, responsables d’une image négative auprès de nombreux militants de gauche et de la population, n’ont pas disparu.

    Quelles étaient ces méthodes ? Il s’agissait notamment du refus de reconnaître l’existence de toute une série de courants au sein du mouvement ouvrier, d’avoir une attitude brutale envers les autres courants et de l’idée que son propre parti (le PTB) s’élèvait au-dessus de la classe ouvrière. Le PTB avait adopté cette approche du ‘‘socialisme réellement existant’’ comme on l’appelait alors (le stalinisme et ses variantes maoïstes). Cette approche contraste fortement avec celle de Karl Marx et Friedrich Engels dans le Manifeste du Parti communiste. Le deuxième chapitre de ce manifeste commence par la question de la façon dont les communistes voient les travailleurs. Le deuxième chapitre de ce manifeste commence par la façon dont les communistes considèrent les travailleurs. ‘‘Les communistes ne forment pas un parti distinct opposé aux autres partis ouvriers. Ils n’ont point d’intérêts qui les séparent de l’ensemble du prolétariat.’’

    Dans le contexte actuel, une victoire électorale du PTB représenterait un pas en avant important pour l’ensemble des travailleurs. Le travail mené par Raoul Hedebouw et Marco Van Hees au Parlement fédéral tire le débat politique vers le haut et vers la gauche, ce qui renforce à son tour, d’une manière générale, la confiance pour participer activement aux luttes sociales. Nous appelons donc à voter pour le PTB.

    Ce n’est que dans la commune bruxelloise de Saint-Gilles et à Keerbergen que des membres du PSL participeront à des listes d’unité de gauche radicale. Cela nous donne l’occasion de défendre un programme qui répond aux besoins concrets de la population en liaison avec des actions sur le terrain, sans mettre pour autant en danger l’élection de candidats du PTB.

    Nous sommes enthousiastes quant à la possible percée électorale du PTB, mais il aurait été préférable que le PTB ait suivi l’approche de Marx et Engels et ait accompli tous les efforts pour que la gauche conséquente obtienne le meilleur résultat possible.

  • Le grand vol des pensions

    Comment les capitalistes volent-ils nos salaires différés

    Le spécialiste des pensions du PTB, Kim De Witte, a publié en néerlandais ‘‘De Grote Pensioenroof’’ (le grand vol de nos pensions), un livre qui défend, preuves à l’appui, que nos pensions sont tout à fait payables et nous arme de nombreuses données chiffrées. L’instrument est utile pour sensibiliser nos collègues quant à l’impact des attaques contre nos pensions et les mobiliser pour la manifestation du 16 mai et ensuite.

    Par un militant de la CGSP-Cheminots

    Dans sa préface, Jonas Geirnaert souligne que la prospérité n’a jamais été aussi grande. Cela rend absurde l’argument selon lequel nos pensions seraient impayables. Le problème, c’est la répartition inéquitable de la richesse. Il enterre cette idée fausse qu’il est inévitable de devoir travailler plus longtemps. Il conclut en défendant une approche qui repose sur les besoins et non les profits.

    Kim De Witte affirme qu’il existe une ligne rouge entre néolibéralisme et humanisme. Curieusement, il ne parle pas de la ligne de démarcation entre travail et capital, ce qui peut aussi expliquer pourquoi il n’est pas fait mention de la classe ouvrière ou du socialisme. Il préconise toutefois l’organisation du travail en fonction des besoins et l’utilisation des gains de productivité pour réduire le temps de travail. Mais cela n’est pas contextualisé dans la lutte de la classe ouvrière contre le capital.

    Kim De Witte a raison de dénoncer le manque de débat sérieux concernant les pensions. Aucun des partis ne s’est présenté aux élections en défendant l’augmentation de l’âge de la pension. Le relèvement de l’âge de la pension va de pair avec une attaque contre la retraite anticipée. Dorénavant, cela ne sera possible qu’à partir de 63 ans et après 42 ans de carrière. Cela exclut de facto les trois quarts des femmes et le quart des hommes, en partie en raison du travail à temps partiel. Pour ceux qui travaillent moins de 104 jours par an, seule la moitié d’une année compte dans le calcul de la durée de leur carrière.

    Allemagne et Autriche

    En Allemagne, la pension légale est en chute libre depuis les gouvernements rouge-vert de Schröder (1998-2005). Avant cela, elle le montant s’élevait à 70% du revenu moyen, et on s’attend à ce qu’il ne soit plus question que de 4% d’ici 2020. Les gens sont poussés vers le deuxième pilier subventionné (les fonds de pension) et le troisième pilier (les formes personnelles d’épargne-pension). Kim De Witte souligne les liens étroits entre le monde politique et le secteur des assurances. Maschmeyer, le patron d’AWD, par exemple, a financé la campagne électorale de Schröder.

    Les caisses de retraite représentent un marché d’un milliard d’euros. Il existe maintenant 16 millions de plans de retraite individuels facultatifs privés (Riester Rente). Entre 2002 et 2016, le gouvernement a subventionné ce projet à hauteur de 34,8 milliards d’euros et, d’ici 2020, ce montant passera à 50 milliards d’euros. Le système public de Sécurité sociale est pillé, et l’épargne-pension ne compense pas cette perte. Les fonds de pension ont également un problème de rentabilité pour les épargnants : le rendement garanti est passé de 4% à 1,75%. Ce faible rendement s’explique en partie en raison des coûts élevés pour les assureurs, qui représentent jusqu’à la moitié des cotisations. C’est presque mieux de mettre son argent dans un bas de laine…

    Pour les retraités ordinaires, la situation est souvent désastreuse : le minimum vital ne se monte qu’à 787 euros par mois. Près d’un quart d’entre eux travaillent dans des secteurs à bas salaires, ce qui se traduit également par des retraites médiocres. La forte tendance à l’individualisation et à la privatisation des retraites allemandes ne fait qu’exacerber les problèmes.

    L’exemple allemand contraste fortement avec l’autrichien. Il y existe toujours une forte pension légale. En moyenne, un Autrichien touche une pension de 1.820 euros, contre 1.050 euros pour un Allemand. Pour les femmes, cela représente 1.220 et 590 euros.

    En 2003, le gouvernement Schüssel des démocrates-chrétiens et de l’extrême droite voulait abolir la retraite anticipée, réduire la pension légale de 38% et pousser les gens vers les assurances privées. Cela a conduit à une résistance massive. Une journée d’action réunissant 300.000 participants (assemblées générales dans les entreprises, blocage des rues, manifestations locales, etc.) a été suivie d’une manifestation nationale et d’une grève générale avec 1 million de participants, la plus importante depuis la Seconde Guerre mondiale. Le mouvement de masse a stoppé l’essentiel de l’attaque. L’extrême droite a ensuite été électoralement punie : le FPÖ de Jörg Haider s’est scindé en deux et, en 2006, il n’atteignait que 4,1%.

    Des revendications offensives

    Kim De Witte développe quelques revendications offensives : redescendre l’âge de la retraite à 65 ans, la retraite anticipée à 60 ans après 35 ans de carrière, la retraite anticipée à 58 ans pour les professions lourdes ou pour les carrières de 40 ans, une pension minimale équivalente à 75% du salaire moyen, une pension minimale de 1.500 euros (après 40 ans de carrière) et maximale de 3.000 euros,… De Witte plaide en faveur d’une réduction du temps de travail et de l’inclusion complète des (anciennes) périodes équivalentes.

    Pour financer tout cela, il propose également d’arrêter et d’inverser partiellement la réduction des cotisations patronales de 16 milliards d’euros par an. À ce stade, De Witte est très prudent, mais il serait logique de subventionner entièrement l’emploi par le biais des services publics et des secteurs clés de l’économie nationalisée.

    Comment assurer cela ? Kim De Witte fait référence à l’opposition en Autriche en 2003 et à celle des syndicats polonais contre le relèvement de l’âge de la retraite. Il faut se battre, c’est évident. Toutefois, il n’est pas fait mention de la nécessité d’un plan d’action similaire à celui de 2014 en Belgique. Il aurait pu aborder cette question cruciale plus en détail. Le livre se termine par une belle citation du poète belge Willem Elsschot : ‘‘il n’y a pas de tigre qui puisse résister aux fourmis’’. Les fourmis ont effectivement la force du nombre, mais ce n’est rien sans organisation.

    Il s’agit d’un travail bien réalisé qui montre que les pensions sont abordables et qui sape l’argumentaire qui vise à nous faire travailler plus longtemps.

    Malheureusement, les attaques contre les pensions des fonctionnaires statutaires ne sont traitées que très brièvement. Les systèmes de bonus préférentiels et leur impact sur l’âge et le montant de la retraite ne sont pas mentionnés. La principale limite du livre est qu’il n’aborde pas la nécessité d’une rupture avec le capitalisme. Dans ce système, les pensions viables ne seront jamais payables, car, après tout, cela entre en conflit avec les profits des capitalistes. Même des pas prudents vers plus de réalisations, comme en Autriche, où le démantèlement des retraites a été encore plus ralenti, sont inacceptables dans la logique du profit.

  • Riposter à la commercialisation néolibérale de nos villes par une forte alternative de gauche!

    Ces six dernières années, l’étau du néolibéralisme s’est resserré sur les villes et les communes. La logique politique dominante ne considère pas le développement des villes comme étant l’affaire de la communauté. Les communes sont sur le marché pour attirer les investisseurs. Pendant ce temps, des économies sont réalisées dans les services publics, les listes d’attente s’allongent pour les logements sociaux et les taxes augmentent pour la population en général.

    Par Bart Vandersteene, article tiré de l’édition de mai de Lutte Socialiste

    Cette évolution mondiale de la vente de nos villes aux investisseurs n’est pas sans entrainer de résistance. L’État espagnol a connu des campagnes de masse contre les conséquences de cette politique. À Berlin, à la mi-avril, 25.000 personnes ont manifesté contre la hausse des loyers. Six mois avant la tenue des élections locales en Belgique, la question se pose de savoir comment nous pouvons renforcer la résistance avec la plus forte opposition de gauche possible.

    Ces élections auront lieu sept mois avant les législatives et auront donc une dimension nationale supplémentaire. Ce sera une répétition générale des élections fédérales, régionales et européennes de mai 2019. Les partis établis utiliseront tout dans la lutte pour garder leur électorat. Ils s’accordent en général tous sur une chose : la ville en tant que lieu de vie, de travail et de détente n’est pas l’affaire des autorités, mais des barons de l’immobilier, des spéculateurs, des riches et créatifs entrepreneurs, des promoteurs et des agences de marketing. Et tout leur est servi sur un plateau d’argent. D’où le nombre croissant de scandales concernant des accords réalisés en coulisse, la corruption et l’influence de leurs amis entrepreneurs sur les prises de décision.

    Ces liens étroits avec leurs amis managers poussent les politiciens établis à s’estimer mal récompensés. Ils occupent des postes au sein de conseils d’administration, tant privés que publics, et il leur semble tout à fait normal que les fonds publics soient utilisés pour augmenter leurs salaires personnels. Leur surprise face à l’indignation générale qui suit chaque nouveau scandale montre à quel point ils sont aliénés de la grande majorité de la population.

    Pour la gauche conséquente, rémunérer ses représentants politiques au salaire moyen d’un travailleur est une position de principe. Ce n’est que de cette manière que le programme peut prendre le pas sur les carrières et que les élus peuvent ressentir l’impact de leur politique.

    Le développement urbain a un coûteux prix social

    Jusqu’à la fin du 20e siècle, la plupart des grandes villes n’étaient pas des endroits agréables à vivre. C’était un choix conscient des forces politiques dominantes de l’époque. De grands groupes de travailleurs vivant ensemble en ville conduisaient à des mouvements socialistes et anticléricaux plus forts. Le Parti catholique et la bourgeoisie, qui se servait de la religion pour contrôler les ouvriers, voulaient délibérément maintenir les gens dans les campagnes, sous le clocher des églises. Dans les villes, les problèmes sociaux se sont accumulés et le caractère industriel ancien a été maintenu. Ce n’étaient pas immédiatement des endroits où construire des lofts de luxe. Les jeunes familles qui en avaient les moyens sont parties.

    La régénération urbaine a suivi : d’abord, les fonds de la collectivité ont été utilisés pour rendre les centres urbains attractifs – avec des coupes budgétaires, des privatisations et la réduction des services à la population – et ensuite, les promoteurs ont eu carte blanche.

    Vingt ans plus tard, au XXIe siècle, l’exode urbain est d’une autre nature. De nombreuses villes deviennent inabordables pour les jeunes familles, en particulier en Flandre et à Bruxelles. Les nouveaux projets offrent des appartements qui coûtent facilement 300.000 euros ou des maisons qui commencent à 400.000 euros. Au cours des 25 dernières années, les villes ont été le théâtre d’énormes déplacements sociaux : les plus pauvres sont chassés ou doivent mettre la moitié de leur modeste revenu sur table pour vivre dans de mauvaises conditions.

    Le prix moyen des maisons en Belgique a quadruplé au cours des 25 dernières années alors que la valeur que nous produisons en moyenne (le PIB par habitant) n’a fait que doubler. Les jeunes familles doivent puiser dans l’épargne des générations précédentes ou s’endetter lourdement pour vivre à un niveau convenable.

    Aucune amélioration n’est en vue. Les caisses sont vides pour le logement social ou l’investissement public. Dans les villes néolibérales, le gouvernement n’agit qu’en tant que régulateur de l’économie de marché, l’accent étant mis sur la maximisation des profits des investisseurs et des grands propriétaires.

    Finis les beaux discours des partis établis sur le logement abordable, l’environnement, les crèches et les écoles dans les quartiers,… Les partis établis font partie de toutes les coalitions possibles. Ils ont tous eu l’occasion de démontrer que leur politique est différente. Mais ils poursuivent tous la même politique avec seulement des différences marginales.

    Les caisses sont vides, pas d’investissements

    Depuis 1988, les villes et les communes sont le seul niveau de gouvernance où un budget équilibré doit être présenté chaque année. Une autre règle a récemment été ajoutée : les investissements à long terme doivent également disposer d’un financement précis inscrit dans un budget pluriannuel. La camisole de force financière s’est resserrée. Cela rend impossible tout plan d’investissement ambitieux en vertu de la loi.

    La libéralisation du marché de l’énergie a également fait perdre environ 200 millions d’euros par an aux communes, et notre facture énergétique n’en est pas devenue moins chère. Le holding communal, durement touché par la crise bancaire, a été dissout. Les communes ont perdu leurs dividendes annuels (52 millions d’euros en 2008). Le coût des pensions des fonctionnaires locaux statutaires est supporté par les communes, qui sont presque littéralement obligées de recruter moins de fonctionnaires statutaires, voire plus du tout.

    Le financement régional des communes a également été réduit. Certaines dotations n’ont plus été indexées. En Flandre, l’impact de la réduction des taxes pour les entreprises sur les revenus des communes a été compensé, mais cette compensation de 200 millions d’euros est menacée de disparition. Le taxshift du gouvernement fédéral – une baisse des taux d’imposition sur les revenus élevés – a un impact direct sur le financement des villes et des communes, car une partie de leurs revenus repose sur l’impôt sur le revenu des habitants.

    Les villes et les communes sont responsables de 40 % des investissements publics : écoles, crèches, maisons de quartier, infrastructures routières et cyclables, politique de la jeunesse, centres culturels et sportifs, etc. Bref, toutes les commodités de base de notre vie quotidienne. L’argent est toutefois épuisé et des économies sont donc réalisées sur le personnel et les services. Les investissements se font attendre, les services existants deviennent plus chers et des taxes et redevances de toutes sortes ont été introduites pour la population.

    Une camisole de force financière a été érigée pour les autorités locales, à l’image de l’attitude de l’Union européenne sur les États membres. Pour que les intérêts de la population soient prioritaires, une administration locale doit briser la loi. Il nous faut une ville rebelle ou un front de communes rebelles, où les représentants élus agissent en tant que représentants d’un mouvement de rébellion.

    Renforcer la gauche conséquente

    En 2014, pour la première fois, le PTB a obtenu deux élus fédéraux. Il a ainsi donné une voix au Parlement à l’opposition massive au gouvernement de droite en 2014-2015 et lui a permis de peser plus fortement sur le débat public. En Wallonie, en particulier, le PTB a pu être la voix de gauche par excellence. Depuis un an et demi, il est grimpé à 15% ou plus dans les sondages en Wallonie, de 7,5% à 12% à Bruxelles et autour du seuil électoral de 5% en Flandre. C’est susceptible d’entrainer une percée majeure et des élus dans toutes les grandes villes.

    En première instance, l’approche de la politique du PSL n’est pas électorale. Les changements majeurs dans la société ont toujours résulté de mouvements de masse et de luttes sociales. Mais, bien sûr, ils ne sont pas sans rapport avec la lutte politique. Le succès dans le domaine politique peut donner la confiance nécessaire pour s’engager dans la lutte sociale.

    Au cours des vingt dernières années, nous avons toujours abordé les élections en essayant de voir comment combler le vide à gauche. Nous avons participé ou soutenu des listes qui avaient le potentiel d’y contribuer, comme le Comité pour une Autre Politique en 2007, ROOD ! en Flandre en 2012, la liste PC-PSL-LCR-PH à Bruxelles en 2009, le Front des Gauches en 2010 et Gauches Communes en 2012 et en 2014 à Bruxelles. Parfois, nous avons déposé notre propre liste, non pas dans l’espoir de réaliser une percée électorale, mais pour être un facteur dans le débat politique. Lors des élections de 2014, nous nous sommes présenté à Bruxelles uniquement et avons appelé à voter en faveur du PTB partout ailleurs ainis qu’à rejoindre le PSL. Chaque voix pouvait contribuer à sa percée électorale.

    À cet égard, fin mai 2017, nous avons contacté le PTB pour discuter de la façon dont les membres et les sections du PSL pourraient contribuer à l’obtention du meilleur résultat possible pour les listes du PTB aux élections locales. Nous pourrions renforcer une telle campagne en déposant nos propres candidats sur les listes du PTB là où notre travail et notre implantation peuvent offrir une réelle valeur ajoutée. Malheureusement, nous avons dû attendre 11 mois avant de pouvoir prendre rendez-vous : une réunion est prévue pour début mai.

    Entre-temps, nous ne sommes pas restés à attendre. Nous nous sommes préparés à deux scénarios. Soit une discussion constructive est possible et un accord est conclu pour déposer des candidats du PSL sur les listes du PTB là où nous pensons conjointement que les sections du PSL peuvent contribuer aux campagnes et aux résultats les plus forts possible. Soit nous préparons notre propre campagne dans laquelle nous appellerons dans la plupart des villes et communes à voter pour le PTB, en participant également aux élections à Saint-Gilles et à Keerbergen, avec des listes de gauche pour lesquelles nous travaillons avec d’autres.

    Pour une gauche forte avec un programme et une stratégie efficaces

    L’insatisfaction est grande à l’égard de la direction que prend notre société. L’appel à une alternative est clairement perceptible, il suffit de penser aux scores spectaculaires et aux campagnes de Bernie Sanders, Jeremy Corbyn ou Jean-Luc Mélenchon. Depuis l’expérience de Syriza en Grèce, il est également clair que la discussion sur le programme avec lequel nous voulons réaliser une alternative n’est pas une question secondaire.

    Par conséquent, les différences entre le PSL et le PTB sur ce programme ne sont pas un détail dans la marge. C’est pourquoi nous continuons à bâtir notre propre organisation, avec nos propres sections, nos membres, nos tracts et nos campagnes.

    Pour la grande majorité de la population, les différences entre les deux partis sont très minces. Et dans le domaine électoral, en ce qui nous concerne, ces différences ne sont en effet pas un argument suffisant pour ne pas parvenir à une coopération.

  • Avec un programme progressiste combattif, la gauche peut faire une percée en Flandre

    Le PTB le 1 mai à Anvers. Photo : Liesbeth

    La campagne pour les élections communales a démarré. Le PTB espère obtenir une nouvelle percée électorale et nous espérons que nous pourrons nous joindre à eux. Tout comme lors des dernières élections, le PTB organise une grande enquête pour estimer quels sont les thèmes locaux les plus importants pour ses électeurs potentiels. C’est sur cette base que sera établi le programme électoral de 2018. Il est positif que le PTB veuille de cette manière impliquer des couches plus larges de la population et créer une certaine participation démocratique. Les enjeux sont grands. Nous souhaitons exprimer ici quelques remarques critiques.

    Par Jarmo (Anvers)

    Construire un programme au travers de la mobilisation

    Une enquête peut être utile mais, pour donner une ouverture plus large à des revendications offensives, nous soulignons l’importance des actions et des mouvements sociaux. C’est grâce à cela que la conscience et la clarté autour de revendications spécifiques peuvent être développées et qu’un soutien actif plus large peut être construit. Les marxistes sont présents là où le changement peut réellement être imposé : dans la rue, dans les mouvements sociaux. S’ils sont élus, ils deviennent les porte-parole de ceux-ci et ils défendent leurs revendications au conseil communal. Un programme socialiste de gauche devrait, dès lors, être construit au travers de la lutte.

    Il ressort directement du ‘‘grand questionnaire’’ du PTB que tout est élaboré pour respecter le cadre des compétences du conseil communal et le carcan financier dans lequel les administrations locales se trouvent. Mais pour réellement répondre aux besoins sociaux de la ville, il faudra aller plus loin. Un programme socialiste pour les élections communales doit, selon nous, partir de tous les besoins sociaux sur le plan de l’emploi, de la pauvreté, de la précarisation et du logement et des propositions nécessaires pour s’attaquer au manque de moyens.

    Car des moyens, il y en a. Même dans une ville comme Anvers : les diamantaires fraudeurs et les patrons du port sont assis sur des montagnes d’argent qui doivent être mobilisées d’urgence pour la collectivité. Sans lutte et sans mobilisation, par exemple, en collaboration avec d’autres ‘‘villes rebelles’’, cela ne marchera pas. Des initiatives et campagnes audacieuses peuvent constituer un point de départ.

    Des propositions intéressantes

    Le ‘‘Grand questionnaire’’ que le PTB mène à Anvers (les questions diffèrent de ville en ville) ne manque pas de propositions intéressantes. Nous accueillons positivement l’idée de transports en commun décents et gratuits : cette revendication est nécessaire en complément des propositions autour de la couverture du ring.

    Il y a aussi l’idée de démarrer un projet pilote d’une semaine de travail de 30 heures dans les services communaux. Nous ne pouvons évidemment pas être opposés à cette revendication, mais nous nous demandons tout de même pourquoi parler d’un ‘‘projet pilote’’ au moment où même plusieurs commentateurs de l’establishment se prononcent en faveur d’une répartition plus équitable du travail. Une semaine de 30 heures généralisée sans perte de salaire et avec embauche compensatoire dans les services publics pourrait exercer une pression sur d’autres secteurs pour rendre la charge de travail plus humaine chez eux aussi.

    Mais également des limites…

    Malheureusement, le projet pilote d’une semaine de 30 heures est le seul point sur le travail dans le questionnaire. Dans le contexte actuel où le chômage des jeunes est de 25% dans plusieurs quartiers d’Anvers, c’est particulièrement limité. Il faut tout faire pour offrir une perspective d’avenir à ces jeunes. Cela implique de défendre un programme massif de création d’emplois. Les possibilités ne manquent pas à cet égard.

    Ailleurs dans l’enquête, le PTB parle, par exemple, d’éducateurs de rue sur toutes les places. Il y a aussi une proposition pour développer l’aide aux devoirs à l’école et dans le quartier. Le parti néglige de dire de quel type d’emplois il s’agirait : un véritable emploi ou du volontariat ? Il faut impérativement stipuler qu’il s’agirait de véritables emplois avec de bonnes conditions de travail.

    Pourquoi, par exemple, ne pas revendiquer que, dans le cadre d’un plan d’investissements massifs dans l’enseignement communal, il y aurait engagement de plus de personnel d’accompagnement pour non seulement garantir l’accompagnement mais aussi pour alléger la charge de travail du personnel existant.
    L’enquête prône une ‘‘ville sans profiteurs’’ : pour y parvenir, le PTB veut, entre autres, une ‘‘diminution des salaires les plus élevés des CEO dans les entreprises communales’’. A nouveau : personne ne peut être contre ce type de revendication. Mais elle est tout de même limitée. Nous trouvons bizarre de décrire des services publics comme ‘‘entreprises communales’’ et des cadres comme “CEO” : ne serait-ce pas aller loin dans la logique qui considère les services publics avant tout comme des entreprises lucratives ? Un plan massif d’investissements dans les services publics avec un projet de mobilisation y afférent dans les rues et dans les quartiers pour s’opposer à cela répondrait à beaucoup de besoins et pourrait être une rampe de lancement vers un gouvernement de gauche qui casse avec la politique d’austérité.

    Au final, les mesures proposées dans cette enquête sont légères. Mais une nouvelle percée électorale du PTB serait positive pour toute la gauche et pour les travailleurs. C’est pourquoi le PSL veut participer comme force constructive de soutien à la réalisation de cette percée et, en même temps, se battre pour une rupture anticapitaliste socialiste.

  • Des majorités progressistes en 2019 ?

    Le 1er juillet dernier, un sondage commandé par le MR à l’institut Dedicated Research accordait près de 25% des intentions de vote au PTB en Wallonie. Un coup de tonnerre politique. Et à situation inédite, développements inédits. Peu après, le secrétaire général de l’interrégionale wallonne de la FGTB, Thierry Bodson, déclarait sur les ondes de la Première : ‘‘Si en 2019, il y a possibilité d’une alliance à gauche (Ecolo, PTB, PS), il faut essayer de mettre en place une telle coalition. En politique, il y a des moments qui peuvent ne pas se représenter.’’

    Par Nicolas Croes, rédacteur en chef de Lutte Socialiste

    En septembre, la FGTB a également entamé une série de rencontres en prévision des congrès qui auront lieu en mai 2018 afin de mettre à jour diverses revendications. Et, surprise, le PS n’est plus la seule formation à être consultée. Des discussions sont aussi prévues avec Ecolo et le PTB. En janvier, un nouveau cycle de rencontres devrait avoir lieu avec cette fois-ci pour thème spécifique ce projet d’une alliance gauche-verte en 2019.

    De la crainte à l’audace

    Beaucoup de gens auront certainement réagi en se disant que ces 3 partis ne peuvent pas laisser passer une telle opportunité de mettre un terme aux politiques d’austérité. Mais l’enthousiasme ne règne guère dans les états-majors des partis concernés. Au PS, le silence est assourdissant. Chez Ecolo, la coprésidente Zakia Khattabi s’est réfugiée derrière le ‘‘choix des électeurs’’ de 2019, non sans une certaine condescendance. Et au PTB ? Le président du parti, Peter Mertens, a expliqué dans les pages de La Libre : ‘‘Nous ne participerons pas au pouvoir régional et fédéral en 2019’’? tout d’abord parce qu’il n’existe pas de ‘‘volonté de mettre en place un gouvernement qui voudrait la confrontation totale avec les institutions européennes’’, mais aussi pour éviter de ‘‘casser notre parti en plaçant tous les cadres dans des cabinets ministériels’’(1).

    De telles réactions risquent d’être incompréhensibles aux yeux de toutes les victimes de la barbarie néolibérale. Les risques pointés par Peter Mertens existent cependant bel et bien. Le PTB a beau avoir un appareil de parti impressionnant et un noyau dur de militants loyaux préparés à faire de grands sacrifices, tout cela est-il suffisamment solide pour prendre à bras le corps les défis à venir ?

    Jean-Luc Mélenchon a probablement dû se poser des questions similaires avant de lancer la dynamique de La France Insoumise. Très rapidement, il a toutefois pu construire un large mouvement politique en offrant un espace à toutes les personnes désireuses de lutter contre l’austérité : syndicalistes, écologistes, féministes, membres d’ONG,… Cette approche – ouverte et sans exclusives à gauche – a donné naissance à une dynamique toujours en construction (pensons aux 150.000 personnes réunies à Paris le 23 septembre) qui a indéniablement permis de rapidement créer une spectaculaire force politique. Elle a su attirer à elle un réservoir de talents jusque-là dispersés dans la société. Le paysage politique français en a radicalement été chamboulé.

    Avec une telle approche, l’appel de la FGTB pourrait être saisi comme moyen de construire dès aujourd’hui un front de résistance sociale qui serait également en mesure d’entraîner des syndicalistes de la CSC. La mobilisation de la rue aiderait à clarifier largement qui veut sérieusement mettre fin à la dictature des marchés et qui ne s’intéresse qu’aux belles phrases de campagne électorale. Mais, surtout, l’expérience ainsi acquise permettrait de développer un large cadre de militants expérimentés pour prendre sur leurs épaules le poids du développement d’une alternative politique anti-austérité démocratique et combative. Un mélange entre lâcher-prise et tenir bon.

    C’est grâce à cette force politique qu’il sera possible d’imposer des conditions favorables aux intérêts des travailleurs. Face à la perspective de nouveaux gouvernements de droites dures, nous comprenons bien l’enthousiasme que des ‘‘coalitions progressistes’’ pourra susciter. Mais n’entretenons aucune illusion : tout dépendra du contenu concret de leur politique. Et donc du rapport de force du mouvement social.

    (1) La Libre Belgique, 23 et 24 septembre 2017.

  • L’establishment pris de panique et bousculé par les nouvelles formations de gauche

    Mélenchon, lors de la marche de La France Insoumise du 23 septembre, à laquelle ont participé 150.000 personnes. Photo : Gauche Révolutionnaire

    Le 23 septembre, ce sont 150.000 personnes qui ont répondu à l’appel de la France Insoumise (LFI) pour défiler à Paris contre le ‘‘coup d’Etat social’’ de Macron ! Tandis que ce dernier voyait sa cote de popularité continuer de chuter, LFI arrivait largement en tête des formations citées comme première force d’opposition au gouvernement. ‘‘Je crois en la démocratie, mais la démocratie, ce n’est pas la rue’’, a réagi Macron, visiblement très agacé. A Paris, face à la gigantesque foule, Mélenchon lui a répondu : ‘‘C’est la rue qui a abattu les rois, les nazis, le plan Juppé et le CPE… (…) La bataille n’est pas finie, elle commence.’’

    Par Nicolas Croes

    La révolte dans les urnes

    En France et ailleurs, le paysage politique traditionnel fait face à un séisme inédit. Depuis le début de la crise, les partis traditionnels ont appliqué une politique fondamentalement identique: l’austérité. Electoralement, le prix à payer fut très lourd, tout particulièrement pour les partis sociaux-démocrates. Leur argument du ‘‘moindre mal’’ était usé jusqu’à la corde. Pour les différentes classes capitalistes nationales, aux profondes difficultés économiques s’ajoutait la crise de leurs instruments politiques privilégiés. Longtemps exception à la règle, même le PS d’Elio Di Rupo est maintenant touché.

    Pour l’establishment capitaliste, le pire était encore à venir : le processus de développement de nouvelles formations et courants de gauche a été accéléré. Le phénomène n’était pas neuf, mais le caractère durable de la crise a offert un soutien particulièrement large à des formations telles que SYRIZA et Podemos. SYRIZA est arrivé au pouvoir début 2015. Dans l’Etat espagnol, Podemos et les listes de confluence de gauche prenaient leur envol. Au Royaume-Uni, la direction du Parti travailliste a échappé à l’aile droite du parti. Leurs multiples manœuvres n’ont pas réussi à contenir l’arrivée massive et enthousiaste des centaines de milliers de jeunes et de travailleurs qui ont porté le vétéran de la gauche du parti Jeremy Corbyn à sa tête. De l’autre côté de l’Atlantique, Bernie Sanders a chamboulé les primaires Démocrates face à la candidate par excellence du monde de Wall Street, Hillary Clinton.

    Comment parvenir au changement

    Les formations et figures de gauche qui ont su exprimer audacieusement l’envie de changements radicaux ont pu compter sur un large écho. Après des décennies où la pensée unique néolibérale a pesé telle une chape de plomb, l’arrivée d’un programme même limité de réformes progressistes a semblé révolutionnaire aux yeux de beaucoup de personnes, même si le programme de ces nouvelles formations ne dépasse généralement pas le cadre de simples ajustements au système capitaliste. L’idée la plus en vogue est encore que le capitalisme pourrait être graduellement démantelé pour donner naissance à une société égalitaire, sans grandes précisions sur ce que pourrait bien être une telle société.

    De nos jours, c’est encore la classe capitaliste qui constitue la classe dominante. Cette classe sociale possède et contrôle les ressources économiques cruciales de la société (finance, grandes entreprises,…) et est liée à l’appareil d’Etat (justice, forces armées, échelons élevés de la fonction publique,…) par un millier de ficelles. L’Histoire a déjà démontré à maintes reprises que si la classe dominante sent que son pouvoir, sa richesse, et ses privilèges sont menacés, alors elle n’hésitera pas à recourir au sabotage économique ou même aux coups d’État militaires, comme cela s’est produit au Chili en septembre 1973.

    De plus, en cette période de crise de longue durée, les limites du réformisme sont bien plus rapidement atteintes que dans la période exceptionnelle d’après-guerre où existait également la pression de l’URSS. L’expérience de SYRIZA démontre que, aujourd’hui, la confrontation ou la capitulation avec le système capitaliste et ses institutions se posera très rapidement. Pour les créanciers et la classe capitaliste, il faut à tout prix éviter le risque de contagion politique qui pourrait naître d’une rupture avec la politique d’austérité. La plus importante était d’humilier SYRIZA et de décourager de nouvelles initiatives de gauche. Là où un certain espace de réformes progressistes a pu exister, comme au Venezuela, la fin des prix élevés du pétrole a rapidement entrainé la fin de diverses conquêtes sociales tandis que le pays s’enfonçait dans la crise politique et sociale. Au Venezuela, l’échec ne provient pas du socialisme, mais justement de l’absence de rupture socialiste avec le pouvoir du capital.

    Construire le mouvement

    Ces nouvelles formations de gauche représentent de véritables pas en avant pour débattre du programme, de la stratégie et des tactiques nécessaires à la prise du pouvoir par les travailleurs et la jeunesse. L’expérience de Syriza souligne l’intérêt fondamental d’adopter une approche révolutionnaire, c’est-à-dire de rompre avec les règles de la zone euro, de l’UE et du capitalisme. Ce dont nous avons besoin, c’est d’une stratégie de confrontation reposant sur le refus du paiement de la dette publique, sur l’instauration d’un contrôle des capitaux, sur la propriété publique des banques et des autres secteurs-clé de l’économie sous contrôle démocratique des travailleurs, sur l’élaboration démocratique d’une planification de l’économie collectivisée pour répondre aux urgences sociales et écologiques laissées par le capitalisme.

    Afin de contrôler effectivement les leviers de l’économie, la collectivité doit les posséder. On ne contrôle pas ce que l’on ne possède pas. Il en va de même pour le mouvement social lui-même. Le meilleur moyen d’assurer que ce programme soit appliqué, c’est qu’il soit porté par la base. Pour cela, il faut construire un instrument politique: un parti de masse des travailleurs capable de réunir toute l’énergie du mouvement afin d’en faire une véritable force reposant sur le nombre. Il faut bien entendu donner une direction à cette force, et c’est là tout l’intérêt d’un programme. Pour le PSL, arracher de véritables changements signifie de viser à une transformation socialiste de la société. Chaque pas en avant est positif en soi, mais il doit toujours être conforme à cet objectif.

    #JoinTheWave : construire une campagne de gauche large et inclusive en Belgique ?

    En 2014, la gauche radicale est arrivée au parlement pour la première fois depuis les années ’80. Depuis lors, Les élus du PTB ont donné plus d’échos à un débat qui, jusque-là, était essentiellement limité aux lieux de travail et aux milieux militants. Aujourd’hui, les sondages laissent présager une percée bien plus importante.

    Avec son appel #JoinTheWave (rejoins la vague), le PTB vise à construire une large campagne autour du parti en disant que voter ne suffit pas, qu’il faut aussi s’organiser. Au-delà de la répartition de tâches pratiques auprès des bénévoles pour les campagnes électorales, l’appel #JoinTheWave pourrait opter pour une approche large et inclusive reposant sur l’action. Les campagnes de gauche qui ont connu les plus grands succès électoraux sont celles qui ont su susciter l’enthousiasme et la participation massive dans l’action. Dans l’Etat espagnol, Podemos a bénéficié du mouvement des Indignés. Aux Etats-Unis, il y a eu le mouvement Occupy avant Sanders. Ou encore les meetings et manifestations de masse autour de Corbyn en Angleterre et de Mélenchon en France.

    Cela pourrait ainsi ouvrir la voie à l’engagement actif de dizaines de milliers de personnes impliquées dans les mouvements syndicaux, de jeunesse, féministes, écologistes, antiracistes, pacifistes,… autour du PTB. Et comment mieux lancer une telle campagne que par le moyen d’une large mobilisation vers des débats publics dans toutes les villes, ouverts à toute personne désireuse de rejoindre ‘‘the wave’’, à titre individuel ou avec son parti, sa délégation syndicale, son association,… ? La création de ‘‘groupes d’appui’’ pourrait y être proposée, à l’instar de ceux de la France Insoumise. Ces groupes pourraient donner de l’élan aux campagnes électorales, mais aussi aux mobilisations sociales, comme c’est le cas des groupes d’appui de la France Insoumise.

    Si le PTB confirme les résultats des sondages en octobre 2018, la question de majorités progressistes au niveau local peut être rapidement posée. Cela exige que ces majorités locales précisent qu’elles ont l’ambition d’appliquer une politique fondamentalement différente. L’introduction immédiate pour tous les employés communaux d’une semaine de 30 heures de travail sans perte de salaire avec embauches compensatoires, le remplacement des contrats précaires par des statuts de fonctionnaire ou au moins des contrats à durée indéterminée, un programme massif d’investissements publics pour davantage de logements sociaux de qualité et énergétiquement neutres et, entretemps, assurer l’accueil pour tous les sans-abris ou ceux qui vivent dans la pauvreté, etc.

    Le PTB et les majorités progressistes entreront en collision avec la camisole financière dans laquelle les gouvernements régionaux et le fédéral maintiennent les communes. Dans les années 80’, le conseil municipal de Liverpool, en Angleterre, a trouvé la parade pour lancer son vaste programme d’investissements publics. Il a construit un front de résistance d’une vingtaine de municipalités de gauche. Et, via des grèves et des manifestations de masse, il a forcé le gouvernement Thatcher à céder un refinancement de la ville.

    Une initiative inclusive basée sur l’action peut permettre une préparation politique via des discussions ouvertes et démocratiques, mais aussi la défense et la popularisation d’un programme qui rend possible de parvenir à la victoire. Des propositions et mesures concrètes sont indispensables, mais un projet pour ce qu’il conviendra de faire si l’establishment essaie de nous étouffer l’est également ; un projet qui ne peut être que celui du véritable socialisme démocratique car les marges pour changer la politique n’existent pas sous le capitalisme.

  • Le PTB face à de grands défis : Transformer de bons sondages en véritables changements.

    Une percée historique du PTB

    Cette huitième édition de Manifiesta sera marquée par l’enthousiasme que suscitent les récents sondages favorables au PTB. Ces derniers mois, la résistance sociale contre le gouvernement de droite semblait bloquée. Un élan de gauche s’est développé sur le terrain politique. Que signifiera cette percée historique ? Les élections communales verraient l’arrivée de centaines d’élus. L’année suivante, le PTB obtiendrait potentiellement beaucoup de parlementaires supplémentaires. Ceux-ci feront entendre la voix des personnes ordinaires, non seulement dans les parlements mais également en dehors. Cela poussera fortement vers la gauche l’ensemble des débats.

    Cela place le PTB devant des défis considérables. C’est vrai, ce serait une erreur de faire n’importe quoi pour des succès superficiels. Mais laisser passer le moment en serait une autre. Il faut au contraire de l’initiative pour le saisir au maximum, non seulement électoralement mais aussi afin de dynamiser la résistance contre la casse sociale. La grève du 10 octobre qui ripostera aux provocations de Michel dans les entreprises et dans la rue pourrait ainsi être accompagnée d’une force de contre-attaque sur les plateaux et dans la presse.

    Les partis traditionnels sont frappés d’un discrédit croissant. Le PS a finalement rejoint le processus de crise profonde de la social-démocratie en Europe. Le récent virage à gauche du PS – par crainte de devenir ‘obsolète’ à l’instar de son confrère social-démocrate grec – n’a ni le caractère, ni la crédibilité du mouvement autour de Jeremy Corbyn en Angleterre. D’une part, Di Rupo a lui-même dirigé un gouvernement d’austérité. Il existe d’autre part une alternative électorale à gauche avec le PTB et ses élus qui touchent l’équivalent du salaire moyen d’un travailleur.

    S’inspirer des dynamiques Sanders, Corbyn, Podemos & Mélenchon

    Le PTB a lancé l’appel #JoinTheWave. Les campagnes de gauche qui ont connu les plus grands succès électoraux sont celles qui ont su susciter l’enthousiasme et la participation massive, en reposant sur des campagnes larges et inclusives basées sur l’action. Dans l’Etat espagnol, Podemos a bénéficié du mouvement des Indignés. Aux Etats-Unis, il y a eu le mouvement Occupy avant Sanders. Ou encore les meetings et manifestations de masse autour de Corbyn en Angleterre et de Mélenchon en France.

    Podemos a réussi à remporter ses premières mairies avec des listes de confluence de gauche. Celles-ci rassemblaient différents partis de gauche mais aussi des activistes des mouvements sociaux à l’instar de l’actuelle maire de Barcelone, Ada Colau, ancienne porte-parole de la PAH (Plate-forme des Victimes du Crédit Hypothécaire). La dynamique de la France Insoumise a atteint le demi-million d’adhérent et compte des centaines de groupes d’appui locaux où chaque personne soutenant la candidature de Mélenchon a pu s’impliquer.

    Peter Mertens appelle à ne pas seulement voter PTB mais aussi à s’organiser. Au-delà de la répartition de tâches pratiques auprès des bénévoles pour les campagnes électorales, l’appel #JoinTheWave pourrait opter pour cette approche large et inclusive basée sur l’action.

    Cela pourrait permettre un engagement actif de dizaines de milliers de personnes impliquées dans les mouvements syndicaux, de jeunesse, féministes, écologistes, antiracistes, pacifistes,… autour du PTB. Le lancement d’une telle campagne pourrait débuter par une large mobilisation vers des débats publics dans toutes les villes, ouverts à toute personne désireuse de rejoindre ‘‘the wave’’, à titre individuel ou avec son parti, sa délégation syndicale, son association,… La création de groupes d’appui pourrait y être proposée, à l’instar de ceux de la France Insoumise qui ont largement contribué au succès des meetings de masse de Paris, Marseille, Toulouse et Lille.

    Ces groupes d’appui se construiraient tout d’abord via les campagnes électorales, qui sont en ligne de mire, mais ne se cantonneraient pas qu’à cet aspect. Benoit Lutgen a repositionné le CDH dans la perspective d’un deuxième gouvernement de droite dure après 2019. Les nouvelles attaques comprises dans l’accord d’été du fédéral ont démontré qu’un gouvernement thatchérien ne cessera son offensive que si nous l’arrêtons nous-mêmes. Cela exigerait de transformer l’essai des succès électoraux en large mouvement de résistance, à l’image de la France Insoumise. A côté de son travail parlementaire, ses groupes d’appui portent aujourd’hui l’appel pour la manifestation du 23 septembre contre le ‘‘coup d’Etat social’’ de Macron. Une initiative audacieuse tombée à point nommé pour renforcer la grève nationale de la CGT du 12 septembre et celle du 21 septembre.

    Briser la camisole de force financière des autorités

    Il est vrai que le PTB n’est pas encore en mesure de ‘‘former un gouvernement qui entrera en collision avec les principes actuels de concurrence et de déséquilibre’’ et qui ‘‘à cette fin demandera le soutien actif de la population’’, comme l’a écrit Peter Mertens. Mais si le PTB confirme les résultats des sondages en octobre 2018, la question de majorités progressistes au niveau local peut être rapidement posée.

    Cela exige que ces majorités locales précisent qu’elles ont l’ambition d’appliquer une politique fondamentalement différente. L’introduction immédiate pour tous les employés communaux d’une semaine de 30 heures de travail sans perte de salaire avec embauches compensatoires, le remplacement des contrats précaires par des statuts de fonctionnaire ou, au moins, des contrats à durée indéterminée, un programme massif d’investissements publics pour davantage de logements sociaux, de qualité et énergétiquement neutres et, entretemps, assurer l’accueil pour tous les sans-abris ou ceux qui vivent dans la pauvreté, etc.
    Il y a un énorme contraste entre ce qu’a pu réaliser la mairie de gauche à Barcelone et les majorités précédentes, surtout pour les plus fragilisés par l’impact de la crise : accès garantit aux cantines scolaires, aides aux familles monoparentales, diminution des coûts des crèches, nouveaux logements sociaux. Mais pour la PAH, c’est insuffisant : il est nécessaire de construire 120.000 logements sociaux. Le plan contre la pauvreté énergétique a été boycotté par les fournisseurs privé et la création d’une entreprise publique d’énergie se heurte à la loi de libre concurrence. Ada Colau se heurte aux limites budgétaires et légales pour appliquer l’ensemble de son programme.

    Le PTB et les majorités progressistes entreront en collision avec la camisole financière dans laquelle les gouvernements régionaux et le fédéral maintiennent les communes. Dans les années 80’, le conseil municipal de Liverpool, en Angleterre, a trouvé la parade pour lancer son vaste programme d’investissements publics. Il a construit un front de résistance d’une vingtaine de municipalités de gauche. Et, via des grèves et des manifestations de masse, il a forcé le gouvernement Thatcher à céder un refinancement de la ville.

    Une initiative inclusive basée sur l’action peut permettre une préparation politique via des discussions ouvertes et démocratiques, mais aussi la défense et la popularisation d’un programme qui rend possible de parvenir à la victoire. Des propositions et mesures concrètes sont indispensables, mais également un projet pour ce qu’il conviendra de faire si l’establishment essaie de nous étouffer ; un projet qui ne peut être que celui du véritable socialisme démocratique car les marges pour changer la politique n’existent pas sous le capitalisme.

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  • Vers une recomposition du paysage politique en 2019

    Photo de Liesbeth

    Les résultats du sondage Dedicated Research, réalisé du 23 au 27 juin, ont été accueillis avec enthousiasme par de nombreux travailleurs et jeunes, y compris au camp d’été d’EGA et du PSL début juillet. Selon ce sondage, le PTB deviendrait le plus grand parti de Wallonie, progresserait fortement à Bruxelles et franchirait le seuil électoral en Flandre. Le PTB/PVDA deviendrait le plus grand groupe au Parlement fédéral avec 26 sièges, à pied d’égalité avec la N-VA. Cette recomposition du paysage politique pourra enflammer le parlement, orienter les débats politiques dans une direction différente et faire entendre la voix du mouvement des travailleurs bien au-delà du parlement.

    Par Eric Byl, édito de l’édition de septembre de Lutte Socialiste

    Ce n’était pas l’intention du MR quand il a commandé ce sondage. Il voulait mesurer l’impact électoral des scandales autour de Publifin et Samusocial, en espérant qu’il serait particulièrement mauvais pour le PS. C’est le cas, il plonge à 16%, la moitié de son résultat déjà médiocre de 2014. Mais ce n’est ni le MR (-2,6%) ni le CDH (-4,2%), dans les scandales jusqu’au cou, qui en bénéficient. Ecolo (+ 3,1%) et Défi vont de l’avant, mais c’est surtout le PTB et ses parlementaires au salaire d’un travailleur qui confirme et renforce la percée observée dans les sondages antérieurs.

    La fin de la stabilité

    Nous voyons ici encore que la conscience est habituellement en retard sur la réalité, qui ne progresse pas de manière linéaire mais par chocs, que l’histoire n’est pas le produit de l’évolution mais de la révolution en d’autres termes. L’époque où il était possible de masquer les contradictions de classe sur base de la croissance d’après-guerre est déjà loin. À cette époque, le parti interclassiste CVP pouvait encore se présenter comme l’architecte de la reconstruction, mais c’est devenu intenable au début des crises économiques en 1974-75 et cela explique les divisions politiques en Flandre. A la même période, la social-démocratie revendiquait la paternité de l’État-providence.

    Pendant longtemps, le PS semblait immunisé à la crise internationale de la social-démocratie. Il pouvait compter sur un réservoir de travailleurs combatifs qui étaient envoyés vers le PS par les dirigeants syndicaux et, en même temps, se profiler dans les gouvernements de coalition comme une opposition interne à la majorité flamande de droite. Il n’a pas été puni pour le clientélisme et l’enrichissement personnel, jusqu’à ce que Di Rupo dirige un gouvernement austéritaire et que le PTB, avec ses premiers élus, fournisse une alternative électorale à gauche.

    Ce sondage gêne également l’illusion développée par les dirigeants syndicaux selon laquelle le gouvernement Michel I serait presque automatiquement électoralement punis en 2019, après quoi la situation se ‘‘normaliserait’’ avec un gouvernement de centre-gauche. Au lieu de s’appuyer sur la force du mouvement des travailleurs, ils ont placé tous leurs espoirs dans leurs partenaires politiques traditionnels. Mais la N-VA prospère justement sur les frustrations créées par sa casse sociale. La repousser exige une force qui repose sur le mouvement unifié des travailleurs. Avec sa percée électorale, le PTB peut jouer un rôle important dans les deux régions du pays.

    Que Lutgen attendait son moment pour envoyer le cdH vers la droite, ce n’était pas vraiment une surprise. Le PS lui a offert cette opportunité sur un plateau d’argent. Avec la formation d’une majorité alternative de centre-droit en Wallonie, la reconduction du centre-droite au niveau fédéral est également plus palpable. C’est en soi une petite révolution que Michel ne doit pas à ses propres forces, mais à la faiblesse de l’opposition politique et sociale.

    Percée du PTB

    Mais, avec la progression du PTB, cette révolution est immédiatement éclipsée par une plus grande encore. Michel peut s’imaginer être premier ministre, peut prétendre que lui et son gouvernement ont créé des emplois et peut parler d’un printemps économique, tout cela est très fragile. La grande majorité de la population ne remarque rien, ou si peu, et croit que le gouvernement sert les riches et les classes moyennes supérieures. Le gouvernement a reporté l’équilibre budgétaire, mais il nous fera encore subir des économies considérables et une ‘‘réforme fiscale’’ favorable aux entreprises. Si à cela s’ajoute une nouvelle crise financière internationale, le ralentissement de la croissance européenne et, par conséquent, la baisse des exportations, ou encore une augmentation des taux d’intérêt sur la dette publique, cela causera des problèmes et le PTB pourrait encore accroitre son score électoral.

    Que le PTB mette en garde contre des attentes excessives est compréhensible. Mais une chance telle que celle-ci se présente rarement et si le PTB ne fait aucun effort pour la maximiser, l’élan peut passer. Les formules les plus réussies à l’étranger sont celles qui ont reposé sur des actions concrètes : Podemos en Espagne avec les Indignados, Sanders avec Occupy, Corbyn et Mélenchon avec des manifestations et meetings de masse. Ils ont généralement dû lutter contre la résistance des dirigeants syndicaux conservateurs qui ont soutenu Clinton, le PSOE espagnol et les adversaire de droite de Corbyn. Ce ne sera pas différent en Belgique.

    Chacun d’entre eux a opté, non pas sans opposition, pour une approche inclusive. La France Insoumise de Mélenchon a mis en place des groupes de soutien dans tout le pays, Podemos a participé à des listes de convergence de gauche aux élections locales, etc. Une approche tout aussi axée sur l’action et inclusive aidera le PTB à maximiser le potentiel présent. Le PSL a d’ailleurs soumis par écrit une proposition au PTB pour voir comment nous pouvons y aider, y compris en offrant des candidats au PTB pour les élections communales de 2018.

    Vers des majorités progressistes ?

    Il est vrai que le PTB n’est pas encore en mesure de ‘‘former un gouvernement qui entrera en collision avec les principes actuels de concurrence et de déséquilibre’’ et qui ‘‘à cette fin demandera le soutien actif de la population’’, comme l’écrit Peter Mertens. Mais si le PTB confirme les résultats des sondages en octobre 2018, la question de majorités progressistes au niveau local peut être rapidement posée. Elles pourraient servir de levier en faveur de l’idée d’un gouvernement majoritaire de gauche, un gouvernement des travailleurs, d’abord au niveau régional.

    Cela exige que ces majorités locales précisent qu’elles ont l’ambition d’appliquer une politique fondamentalement différente. L’introduction immédiate d’une semaine de 30 heures sans perte de salaire pour tous les employés communaux avec embauches compensatoires, le remplacement des contrats précaires par des statuts de fonctionnaire ou au moins des contrats à durée indéterminée, un programme massif d’investissements publics pour plus de logements sociaux, de qualité et énergétiquement neutres, et entre-temps assurer l’accueil pour tous les sans-abris ou ceux qui vivent dans la pauvreté, etc. Cela et bien d’autres mesures concrètes pourraient poser les bases d’une mobilisation massive de la population.

    Le PTB et les majorités progressistes entreront en collision avec la crise financière dans laquelle les gouvernements régionaux et le fédéral maintiennent les communes. La mobilisation et l’organisation autour d’une lutte pour exiger plus de moyens seront nécessaires, ainsi qu’une préparation politique via des discussions ouvertes et démocratiques, mais aussi la défense et la popularisation d’un programme qui rend possible de parvenir à la victoire. Des propositions et mesures concrètes sont indispensables, mais également un projet pour ce qu’il conviendra de faire si l’establishment essaie de se nous étouffer, un projet qui ne peut être que celui du véritable socialisme démocratique car sinon ‘‘les marges pour changer la politique’’ n’existe pas.

  • Crise politique francophone: aux travailleurs de faire entendre leur voix

    Lorsque, le 19 juin dernier, le président du cdH Benoît Lutgen a retiré sa confiance aux gouvernements bruxellois, wallon et de la fédération Wallonie-Bruxelles (ex-Communauté française), il a justifié son geste en dénonçant les écœurants scandales à répétition qui ont frappé le PS. L’hypocrisie avait de suite sauté aux yeux (le parti ‘‘humaniste’’ ayant lui aussi été mouillé), elle fut encore illustrée à la mi-août, quand le site Cumuleo dévoila que pas moins de six des sept ministres du nouveau gouvernement wallon MR-cdH avaient ‘‘oublié’’ de déclarer certains de leurs mandats, fonctions ou professions…

    Que la collaboration avec le PS dérangeait Lutgen, issu de l’aile droite du cdH, ce n’était un secret pour personne. Ajoutez à cela les sirènes d’une participation éventuelle à une potentielle reconduction du gouvernement Michel au fédéral après 2019 et la chute du parti dans les sondages et vous aurez les principales données derrière le coup de poker de Lutgen. Sauf que, à la fin du mois d’août, il apparaissait prématuré d’avoir annoncé des majorités alternatives à tous les niveaux. Un accord se faisait toujours attendre à la région bruxelloise et à la Fédération WB et les sondages laissaient penser que Lutgen & Co passaient essentiellement pour d’opportunistes aventuriers fauteur de trouble.

    Panique généralisée

    Pas de quoi pavoiser au PS pour autant. Les sondages se suivent et confirment la chute de l’ancien géant, jusqu’à le reléguer en Wallonie en troisième position avec 16% derrière le MR et… le PTB. La colère gronde et a été illustrée par un sondage iVOX réalisé pour Sudpresse, dévoilé le 24 août. Ainsi, pour 2019 : ‘‘(…) c’est à des alliances de gauche que les électeurs PS appellent massivement, en ce compris avec… le PTB. (…) 57,5 % soutiennent une alliance avec Ecolo et 44 % avec le PTB. Toute union avec le MR est massivement rejetée. Mais une réconciliation avec le cdH l’est tout autant.’’

    Peu avant, Elio Di Rupo avait fait la une de la presse en essayant de se parer d’habits de gauche avec la sortie de son livre Nouvelles conquêtes mais le sondage susmentionné était sans appel : un tiers des électeurs du PS ne lui font tout simplement plus confiance, la moitié d’entre eux déclare vouloir modifier son vote s’il se maintient à la tête du parti et 35% assurent qu’ils ne voteront tout simplement plus pour le PS… L’avantage de ces propositions est toutefois qu’elles aideront à populariser certaines revendications essentielles pour répondre à la situation dramatique dans laquelle se trouve une certaine couche de la population.

    Le petit frère du fédéral

    L’Union Wallonne des entreprises (UEW), l’Union des classes moyennes (UCM) et la Confédération de la construction wallonne (CCW) n’ont pas masqué leur joie. Olivier Chastel leur a fait écho en expliquant ‘‘Notre priorité absolue c’est l’emploi’’, sur base de la promotion des flexi-jobs (lisez : précaires), du travail de nuit et autres e-commerce. Il n’a pas fallu longtemps pour que transparaissent dans les médias des appels à ‘‘modérer la taxation des entreprises’’, à limiter les dépenses des communes, ainsi qu’à instaurer un service minimum dans les transports en commun.

    Parmi la base syndicale et auprès d’une large couche de la population, l’inquiétude prévaut face à ce gouvernement régional qui promet les mêmes recettes indigestes qu’au fédéral. Elle doit devenir résistance. Dans celle-ci, le PTB pourrait jouer un rôle moteur. D’énormes possibilités s’ouvrent pour les travailleurs et la jeunesse pour autant qu’ils soient réunis et organisés autour d’une alternative politique combative large, ouverte et démocratique. Celle-ci devra activement mobiliser dans les quartiers, sur les lieux de travail et ailleurs afin de renforcer les syndicalistes les plus audacieux et désireux de ne laisser aucun répit aux partisans de l’austérité, d’où que viennent ces derniers. Le PSL soutiendra toute initiative allant dans cette direction.

  • Le PTB, futur moteur de mouvements de masse ?

    Peter Mertens, président du PTB

    Même s’il ne s’agit encore que de sondages, le PTB/PvdA se trouve à l’aube d’une percée électorale historique. Un nouveau vent de gauche conséquente souffle enfin sur la Belgique. A l’échelle internationale, ce vent nouveau prend de l’ampleur depuis la grande récession de 2008, le détricotage de nos conquêtes sociales par les partis traditionnels ainsi que l’incapacité du capitalisme à promettre autre chose que des crises économiques, sociales, environnementales et humanitaires.

    Par Ben (Charleroi), article tiré de l’édition d’été de Lutte Socialiste

    Avec une approche large et ouverte, et sur base d’un programme réformiste de gauche radicale peut-être parmi les plus aboutis du moment, le mouvement qu’est la France Insoumise s’est rapidement construit un soutien, atteignant les 540.000 adhérents en un peu plus d’un an. Le Labour britannique, suite à l’élection de Jeremy Corbyn à sa direction sur base d’un programme anti-austérité, a été complètement transformé dans sa composition sociale. De moins de 200.000 membres en 2015, il est passé à 800.000 membres aujourd’hui de par l’afflux massif de gens ordinaires, principalement issus de la jeunesse, qui ont vu une opportunité de se débarrasser des blairistes (les partisans de Tony Blair) et de lutter pour un programme de gauche véritable. A l’échelle de la Belgique, une progression comparable équivaudrait à rassembler 90.000 personnes. Dans le contexte politique favorable au renouveau politique de gauche, il est tout à fait possible de construire une telle organisation/mouvement de masse voire d’aller beaucoup plus loin quand on sait l’implantation populaire qu’ont les syndicats dans notre pays.

    Le PTB pourrait jouer ce rôle moteur de reconstruction de la gauche politique. Mais pour atteindre un décuplement des forces militantes de gauche véritable, une dynamique plus ouverte sera nécessaire, faite de campagnes ciblées mais aussi de débats larges et publics sur le programme, les stratégies et les tactiques. De tels débats pourraient préparer les électeurs, électeurs potentiels, sympathisants et la population en général à la question de la prise du pouvoir, à comment y parvenir, à la riposte de l’establishment à laquelle il faut s’attendre et à la façon dont nous aurons à répliquer. Pour devenir massive, une telle dynamique nécessite peut-être de lâcher prise, de perdre un peu de contrôle au profit d’initiatives spontanées.

    En France, nous avons activement contribué à la campagne de la France Insoumise. Au Royaume-Uni, nous avons défendu le programme de gauche de Jeremy Corbyn. Nous avons fait de même dans de nombreux pays où s’est levé un nouveau vent de gauche, comme aux Etats-Unis avec Bernie Sanders. Nous comptons faire de même en Belgique avec le PTB. De nouvelles victoires pour le PTB seraient des victoires pour l’ensemble de la gauche en Belgique.

    Mais tout en soutenant ces dynamiques, nous continuerons d’avertir des dangers d’un programme qui laisse la gestion et le contrôle des secteurs clés de l’économie au secteur privé et à la logique de concurrence. L’histoire ancienne comme récente des gouvernements réformistes de gauche a systématiquement montré que ceux-ci sont très vite placés devant le choix de plier face aux attaques de la classe capitaliste ou d’adopter des mesures de plus en plus considérables. S’y préparer n’est pas un luxe, mais une nécessité.

    Le seul chemin permettant de s’assurer que l’économie ne fait pas face à une grève du capital, à de la spéculation boursière et monétaire, ou même à d’autres actes encore plus directs de sabotage et de déstabilisation économiques, ce serait qu’un gouvernement socialiste reprenne sous propriété collective les principaux moyens de production, de distribution et d’échange. Rien qu’en débutant avec l’ensemble des plus grandes entreprises du pays et en établissant un monopole sur le commerce extérieur, un gouvernement socialiste pourrait commencer à organiser l’économie de manière planifiée sous le contrôle et la gestion démocratique des travailleurs.

    Nos tâches immédiates

    Bien sûr, un gouvernement des travailleurs n’est pas encore d’actualité en Belgique, il reste encore du chemin à parcourir. Ce chemin ne sera pas linéaire, les hauts et les bas, ainsi que les divers scénarios possibles dépendront de nombreux facteurs, comme par exemple le PS, qui bien qu’en pleine crise ne s’avoue pas encore vaincu. Cela dépendra aussi de l’attitude des syndicats et de l’ampleur de la pression de leur base pour couper les liens avec les partis traditionnels.

    Mais cela dépendra beaucoup de l’attitude du PTB lui-même. C’est une nouvelle période qui s’ouvre avec d’énormes possibilités pour les classes populaires et le PTB sera mis sous pression pour participer au pouvoir. Si la pire erreur serait de vouloir collaborer avec des partis qui appliquent l’austérité, il ne faudrait pas non plus que le PTB soit jugé responsable de l’instauration de coalitions de droite après les prochaines élections, qu’elles soient communales ou régionales.

    Une bonne partie de l’immense potentiel dont dispose le PTB et l’ensemble de la gauche politique, syndicale et associative dépendra de la manière dont le PTB acceptera d’être le moteur d’un mouvement de classe large, ouvert et démocratique – une sorte de front unique regroupant les membres du PTB et des non-membres autour d’objectifs communs – ou s’il préférera garder son attitude de contrôle strict qui risque de jouer un rôle de frein. Tout dépendra aussi de l’approche politique du PTB. Le parti s’efforcera-t-il essentiellement de devenir acceptable face aux partenaires de coalition à venir ou alors décidera-t-il de défendre avec audace une alternative combative reposant sur les intérêts de la majorité de la population en expliquant clairement que cette alternative s’appelle le socialisme ?

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