Tag: Pays-Bas

  • Libéralisation : La mort du facteur

    Bpost suivra-t-il bientôt l’exemple néerlandais ?

    TNT Post est la plus grande entreprise postale des Pays-Bas et compte quelques 75.000 travailleurs, dont 12.500 facteurs à plein temps. TNT Post est le successeur de ce qui était autrefois le service public postal, maintenant filiale de la société TNT qui comprend TNT Express (transport), TNT Fashion Group (mode) et TNT Business Solutions (consultants). La voie de l’avenir ?

    Par Christophe

    Les travailleurs de TNT Post ont lancé une grève nationale le 16 novembre dernier pour protester contre la proposition de la direction de remplacer tous les facteurs par des distributeurs de poste, meilleurs marché. La direction veut du personnel à mi-temps (12 heures par semaine) qui travaille pour des bas salaires (environ 8 euros de l’heure). Cerise sur le gâteau, les facteurs doivent en plus travailler avec leur propre bicyclette… de tels ‘‘Mc Facteurs ™’’, il y en a déjà 13.000 aux Pays-Bas, chiffre que la direction veut pousser jusqu’à 35.000, au détriment de 11.000 emplois à plein temps, dont 3.100 licenciements directs. Après le succès de la grève du 16 novembre dernier et les 10.000 manifestants dans les rues de La Haye, les travailleurs veulent poursuivre leurs actions.

    TNT reçoit même des millions d’euros de subsides européens pour se débarrasser des travailleurs à temps plein et les remplacer par des contrats précaires. En 2009, TNT a ainsi reçu 4,1 millions d’euros du Fonds Social Européen pour recruter et former des travailleurs à mitemps. L’entreprise a également obtenu 5,5 millions d’euros pour la formation des postiers qu’elle veut licencier ! Ce type de mesures ne sont pas inconnues chez Bpost, cela n’est en fait que la résultante de la politique de libéralisation du marché du courrier. Les conditions de travail et de salaire sont attaquées dans tous les pays afin d’être suffisamment ‘‘compétitives’’. Pour le personnel et pour la prestation de services, cela signifie concrètement une spirale vers le bas.

    Aux Pays-Bas, la libéralisation de la poste a conduit tout droit à une situation où trois entreprises postales se disputent le terrain à coups de bas tarifs. Mais les restructurations successives minent la qualité de la distribution du courrier et la pression au travail est bien trop élevée. Des quartiers passent ainsi parfois plusieurs jours sans la moindre distribution tandis que l’arrivée de nombreux contrats précaires augmente la pression sur tout le personnel. Finalement, le résultat de la politique de libéralisation, c’est la fin du facteur et du service postal !


    Bpost quasiment prêt à la libéralisation…

    La direction estime que Bpost est presque prêt pour la libéralisation. Les bénéfices ont augmenté pour atteindre les 240 millions d’euros en 2009, et le résultat de 2010 sera encore meilleur : résultats obtenus au détriment du personnel et des services.

    Des dizaines de bureaux de poste ont été fermés, il ne reste aujourd’hui que 29.600 des 40.000 travailleurs de 2003 et le patron Johnny Thijs veut encore réduire le personnel ! Chaque année, 2.000 travailleurs quittent l’entreprise (plus de la moitié des travailleurs a plus de 45 ans), mais le patron ne veut en remplacer que la moitié et donc liquider 1.000 postes chaque année ! D’après Thijs, cela doit réduire ‘‘les frais du personnel’’. Pas question, par contre, de mettre en question son salaire personnel de 1 million d’euros en 2009. En 1994, le topmanager de La Poste gagnait six fois l’équivalent du salaire moyen d’un facteur. En 2009, ce chiffre était monté à 45 fois. Ça aussi, c’est la réalité des libéralisations !

  • AIP: Aucun accord plutôt qu’un accord vide de contenu !

    A la mi-novembre ont débuté les négociations pour un nouvel Accord Interprofessionnel (AIP) pour 2011- 2012. Ceux qui pensaient que se serait au tour des travailleurs de se faire cajoler après les banques peuvent l’oublier. Les patrons, comme d’habitude, ne voient pas d’espace pour accorder des augmentations salariales et le gouvernement n’a, dit on, pas de sous pour financer un accord. Pendant ce temps se multiplient les provocations patronales dans des entreprises qui se moquent de la législation sociale. Dans ces conditions, accepter un accord sans contenu peut dépasser les bornes, même pour nos dirigeants syndicaux modérés.

    Par Eric Byl

    Les patrons n’ont toutefois pas de raison de se plaindre. L’année passée, les salaires (hors bonus) des tops managers en Belgique ont augmenté de 1,9% alors que ceux de leurs collègues chez nos trois partenaires commerciaux privilégiés (Allemagne, France, Pays-Bas) étaient gelés. Si nous tenons également compte de leurs bonus, leur augmentation a même grimpé à 6%, bien plus que chez nos voisins. Les managers du secteur public ne sont pas en reste. Les trois patrons des chemins de fer se sont accordé une augmentation salariale moyenne de 6,4%. Le patron de La Poste Johnny Thys a même reçu 10% de plus et gagne maintenant plus d’un million d’euros. Un postier auxiliaire à 8,43 euro de l’heure devrait travailler presque 70 années pour atteindre ce salaire annuel. Les tops managers des grandes entreprises cotées dans le Bel 20 ont obtenu l’an dernier une augmentation moyenne de 23,5%, ils gagnent maintenant 2,27 millions d’euros par an. Là aussi, la règle qui prévaut est que les plus riches ont la plus grande avidité. Il ne faut pas chercher la raison bien loin : les entreprises du Bel 20 font à nouveau de bonnes affaires. Pendant la première moitié de 2010, ils ont réalisé un profit global de 10,3 milliards d’euros, le double de la même période en 2009.

    Ce n’est cependant pas ce dont parle le rapport technique du Conseil Central de l’Economie (CCE) ‘‘sur les marges maximales disponibles pour le développement des coûts salariaux’’. Ce rapport s’attarde surtout sur le fait que, au cours de la période précédente de 2009- 2011, le coût salarial a évolué 0,5% plus rapidement que chez nos trois partenaires commerciaux privilégiés. Depuis 2000, la différence serait déjà de 3,9%, le fameux handicap salarial, une anomalie dont les patrons revendiquent l’abolition sans délai. Puisque le coût salarial dans nos pays voisins grimpera de 5% en 2011-2012, cela donnerait donc une marge maximale de 4,5% en Belgique. Après avoir déduit l’indexation attendue, prévue à 3 ,9%, il ne reste que 0,6%, à étaler sur deux ans. En plus, les patrons ont remarqué que le CCE s’était même trompé de 1,1% lors de son rapport précédent. En bref : nous pouvons déjà nous estimer heureux si nous ne devons pas reverser une partie de notre salaire !

    La CSC appelle à la prudence concernant ces données. Puisque les comptes nationaux ‘‘ne tiennent pas compte des 3.788 millions d’euros de subventions des coûts salariaux en 2010 par voie fiscale (2.220 millions), par l’activation des allocations (339 millions) et par les titres services (1.229 million). Si on tient compte de tout cela, le handicap salarial de 3,9% est réduit à 1,0% en 2010.’’ Si nous tenons également compte des diminutions de contributions patronales (4.868 millions d’euros en 2009), le handicap salarial devient rapidement un bonus salarial. Ainsi, le professeur d’économie Paul De Grauwe (de l’université de Louvain) s’énerve à la vue de tant d’avidité patronale. ‘‘Les statistiques européennes montrent que tous les pays de la zone euro ont vu s’affaiblir leur position de concurrence mutuelle depuis 2000.’’ Il déclare encore : ‘‘de l’autre côté de la balance se trouve seulement l’Allemagne, qui mène depuis des années une politique de modération forte. Des onze pays à la base de l’euro, sept font pire que la Belgique.’’

    De Grauwe ne trouve d’ailleurs pas que la Belgique doive suivre l’exemple allemand : ‘‘si tout le monde fait ça, nous finirons tous avec des salaires plus bas et avec moins de consommation.’’ Au contraire, ‘‘ finalement il va y avoir, en Allemagne aussi, un contrecoup.’’ Les patrons savent bien que leurs revendications sont inacceptables. C’est pour ça qu’ils remettent à chaque fois en question l’adaptation au bien-être des allocations, un ‘‘acquis’’ du sommet ministériel d’Ostende, il y a quelques années, tout comme l’allongement des prépensions. Ainsi, ils espèrent forcer les syndicats à accepter un accord, même s’il n’y a rien dedans. Mais il n’est pas certain qu’ils réussissent cette fois-ci. La FGTB a finalement remis en avant l’augmentation des salaires minimums bruts et les deux syndicats revendiquent des négociations libres sur l’augmentation des salaires bruts. Il est peu probable que le patronat accepte.

    L’agression patronale est d’ailleurs vue par quelques patrons comme un sauf-conduit pour remettre en question n’importe quoi. L’attaque brutale de Brink’s sur le statut employé de leur personnel et sa condamnation devant la justice illustre une fois encore que l’approche des organisations patronales créé l’espace pour un retour aux méthodes du 19e siècle, ce qu’ils n’approuvent évidemment pas officiellement. Voilà qui promet pour la discussion concernant le statut unique ouvrier-employé.

    A la base, on n’attend pas un accord sans contenu où les concessions faites aux travailleurs sont remises en cause à tout bout-de-champ. Les prépensions peuvent aussi être réglées par un soi-disant mini-accord et la liaison au bienêtre des allocations est une enveloppe spécifique que les patrons ne doivent pas toucher. S’il n’y a pas d’accord sur la norme salariale pour le 15 décembre, le gouvernement pourra en imposer un. On fait le pari qu’ils seront moins généreux avec les travailleurs qu’avec les banques il y a un an ?

  • Wilders aux Pays-Bas, Tea Party aux USA : Comment expliquer le succès de la droite folle ?

    Pour parvenir à une majorité, le nouveau gouvernement des Pays-Bas, minoritaire, a du faire appel au soutien extérieur du populiste de droite Geert Wilders. Cela lui offre une certaine légitimité sans qu’il ne se brûle complètement au pouvoir. On retrouve un discours populiste similaire au Tea Party aux USA: un mélange de racisme, d’aversion envers les musulmans et de rhétorique prétendant défendre l’homme de la rue.

    Article tiré de l’édition de novembre de Lutte Socialiste

    LA POLITIQUE DE TOLÉRANCE AUX PAYS-BAS

    Le soutien du PVV (parti pour la liberté) de Wilders a été nécessaire pour constituer un gouvernement qui allie libéraux (VVD) et chrétiens-démocrates (CDA). Même si le soutien du PVV est un soutien de tolérance, de l’extérieur du gouvernement, le cabinet Rutte (du nom du premier ministre, VVD) est parfois appelé le‘‘cabinet Wilders’’. Ce gouvernement a l’intention d’opérer des coupes budgétaires à hauteur de 18 milliards d’euros, ce qui signifie une hémorragie dans les budgets des services publics, de l’enseignement, des soins de santé,… Uniquement dans la sécurité sociale, 4 milliards d’euros doivent disparaître. Le PVV essaie d’affirmer sa ‘‘rhétorique sociale’’ en adoucissant les côtés les plus durs des assainissements, les attaques contre les allocations de chômage et la législation sur les licenciements ont ainsi été quelque peu affaiblies. Le PVV veut éviter toute confrontation dure et à grande échelle avec les travailleurs.

    L’accord gouvernemental offre aussi un espace à la propagande raciste de Wilders, dans laquelle marchent le VVD et le CDA. Cette propagande raciste est en même temps utile pour détourner l’attention de la politique d’austérité. Aux Pays-Bas aussi, le plus grand atout de la droite est la faiblesse de la gauche et du mouvement ouvrier. Le programme de la droite n’est pas vraiment novateur, ce n’est qu’une compilation de mesures d’austérité (du néolibéralisme réchauffé) et d’incitations à la division (du racisme) pour éviter d’avoir à faire à une résistance unifiée.

    C’est loin d’être neuf mais, faute de riposte à gauche, c’est une rhétorique dominante. Voilà ce qui a transformé les dernières élections en une course vers les assainissements les plus durs. La droite est capable de gagner cette course sans efforts tandis que la ‘‘droite folle’’ se construit sur base de l’aversion grandissante envers les politiciens traditionnels.

    LE TEA PARTY AMÉRICAIN

    Tout comme Geert Wilders, le Tea Party américain peut compter sur une grande ouverture médiatique. La chaîne Fox joue avec enthousiasme le jeu du Tea Party. Sarah Palin & Co défendent une vision républicaine et conservatrice de la société, avec une couche de racisme et d’aversion envers les politiciens traditionnels. Le Tea Party est un abîme de contradictions. Si leur soutien augmente, c’est loin d’être le cas des mesures asociales que ces conservateurs défendent.

    Il ne faut pas considérer le soutien grandissant pour le Tea Party comme l’expression d’une droitisation de la population. Une polarisation est à l’oeuvre, et les idées socialistes ont un soutien de plus en plus large (un sondage Gallup a démontré que 30% des américains étaient positifs envers l’idée de ‘socialisme’ et même 43% des jeunes).

    Le Tea Party parvient à capitaliser la rage ressentie contre l’establishment, notamment après le sauvetage des banques. Cette récupération se produit avec le soutien d’une partie de l’establishment, comme dans le monde médiatique où on accorde une attention extrême au sujet.

    La politique pro-capitaliste des Démocrates est tout aussi responsable de la crise que celle des Républicains. Eux-mêmes partisans d’une politique de droite, les Démocrates ne représentent pas une alternative contre le message de la droite folle du Tea Party.

    RIPOSTE DE GAUCHE CONTRE LA DROITE FOLLE

    Certaines parties de l’establishment jouent sur l’autorité minée des partis traditionnels en accordant un soutien à des forces de droite populistes, moins stables et plus incertaines. Cela constitue en quelque sorte une soupape de pression pour laisser échapper la vapeur de la colère des électeurs sans menacer fondamentalement la politique au service du capital.

    Une majorité croissante des travailleurs et des jeunes en a plus que marre du chômage massif, des bas salaires et de l’avenir incertain. Si une direction était donnée à cette rage, il serait possible de construire une nouvelle force politique apte à détruire les chimères de la droite. Mais cette riposte ne proviendra pas des forces soi-disant de gauche qui suivent la logique néolibérale. Le mouvement ouvrier doit se remettre au devant de la scène politique, ce qui n’est possible qu’avec un ferme programme de gauche et un soutien large et actif.

  • Le capitalisme sur le sentier de la guerre des monnaies

    Prendre du speed ou d’autres stimulants au cours d’une soirée peut rendre infatigable et libéré de freins physiques ou moraux. Le crédit, pour le capitalisme, c’est l’équivalant du speed de notre fêtard : cela suscite l’euphorie, mais cela rend inévitablement le corps dépendant, l’épuisera et le démolira, pour finalement conduire à une dépression profonde. De la même façon, tant qu’il y a suffisamment de doses, les toxicomanes sont des amis inséparables. Par contre, en cas de manque, ils deviennent d’impitoyables concurrents.

    Par Eric Byl

    Concernant le crédit, les dealers sont les autorités. Pour sauver les spéculateurs, elles ont fait des emprunts massifs. C’est pour les amortir que les français devront économiser 1.700 € par personne durant les prochaines années, entre autres en travaillant plus longtemps. En Angleterre, il s’agit de 1.600 €, de 1.100 € en Allemagne et de 1.400 euros aux Pays-Bas. En Belgique, les politiciens ne savent pas encore trop comment, mais il s’agira de 2.200 à 2.500 € par habitant d’ici fin 2013. Ce n’est visiblement toujours pas très clair pour la N-VA. Le ministre flamand Bourgeois (N-VA) a ainsi déclaré à la radio qu’il sera difficile de trouver 22 à 25 milliard d’€… en une année (au lieu de 4).

    Pendant le grand crash des années ’30, qui a conduit à la deuxième guerre mondiale, chaque pays a essayé de protéger son marché face aux concurrents étrangers. C’est ce qu’on appelle le ‘‘protectionnisme’’. Dès le début de la crise immobilière déjà, des économistes avaient averti de surtout éviter cette erreur.

    Mais la crise immobilière refuse de passer et, de plus, elle a entrainé une crise bancaire dont le sauvetage a provoqué une crise des Etats. On deviendrait même désespéré de constater, à la fin du processus, que de rusés banquiers ont instrumentalisé la situation pour exproprier à tort des milliers de familles.

    Celui qui voit mourir son enfant intoxiqué est capable de tout, y compris de ce qu’on ne l’imaginait pas capable de faire. Pour les politiciens capitalistes, ce n’est pas différent. Tous essayent de diminuer les déficits en stimulant les exportations dans l’espoir de récupérer une partie du marché des autres pays. Au début, cela se faisait de façon cachée, en diminuant les taux d’intérêts où en créant de l’argent, le “quantitative easing” (voir notre dossier à ce sujet). Ils affaiblissent ainsi leur propre monnaie en comparaison des concurrents extérieurs, qui eux réagissent par des mesures similaires annulant cet effet.

    Dans son introduction au “Capital” de Marx, Friedrich Engels avait décrit une dépression comme une longue période de stagnation économique accompagnée d’un chômage structurel où chaque mesure provoque un effet contraire à son objectif. Le ‘‘Quantitative easing’’ a permis à de rusés spéculateurs d’emprunter des dollars à un taux de 0,25% pour acheter des obligations brésiliennes rapportant 5% de rendement. On appelle cela du Carry trade. Cela provoque des bulles au Brésil, mais aussi en Thaïlande par exemple, ces deux pays essayent de contrarier cet effet en introduisant une taxe supplémentaire sur les obligations achetées par des “investisseurs” étrangers.

    La création d’argent aux Etats- Unis provoque inévitablement le même réflexe en Chine, et au Japon, et en Corée du Sud, et… Cela menace de faire encore plus exploser les dettes publiques. Aux USA, les démocrates et les républicains, au congrès et au sénat, ont déjà menacé d’introduire des taxes supplémentaires sur les produits chinois au cas où la Chine refuserait de revaloriser sa monnaie (on songe à une augmentation de 20 à 40%). La Chine ne veut et ne peut pas appliquer cela.

    La possibilité que cette guerre des monnaies conduise à une guerre commerciale réelle et, finalement, à un crash encore plus profond que celui que nous venons de vivre semble inévitable. Cela s’explique par le fait que le système capitaliste n’est plus capable de gérer les forces productives qu’il a suscitées. Seule une économie démocratiquement planifiée est apte à utiliser ses capacités harmonieusement, en fonction de tous.

  • Nous avons besoin d’une réponse politique à la logique d’austérité

    «Encore heureux que vous êtes encore là.» Cela, nos militants ont pu l’entendre plus d’une fois ces dernières semaines lors de nos campagnes pour activement mobiliser pour la manifestation syndicale du 29 septembre, pour les marches locales de jeunes pour l’emploi ou encore pour la proposition du PSL/LSP de lancer une campagne anti-guerre à l’occasion du sommet européen des ministres de la Défense à Gand. Mais marquer son soutien était parfois une manière d’exprimer un désespoir face à la menace de la crise et à la faiblesse de la gauche non traditionnelle.

    Par Bart Vandersteene

    Le Parlement reflète-t-il nos angoisses?

    Qui va soutenir les revendications des travailleurs du non-marchand pour plus de personnel, de meilleurs salaires et des conditions de travail plus humaines ? Qui va représenter au Parlement la revendication de la suppression de la Déduction des Intérêts Notionnels ? Qui va soutenir les travailleurs du secteur privé qui seront aux prises avec les extrémistes du patronat fin de cette année (lors des négociations sur l’AIP) et qui ne veulent pas payer pour la crise ? Les nuancent actuellement présentes au Parlement portent sur ceux qui veulent une austérité sévère et ceux qui veulent une austérité un peu moins dure. Mais aucune loi de la nature ne précise que c’est seulement à ça que doit ressembler le paysage politique.

    Malheureusement, les dirigeants syndicaux actuels défendent le statu quo politique. Dans l’hebdomadaire flamand de la FGTB, De Nieuwe Werker, le président national de la FGTB Rudy De Leeuw a répondu concernant l’avenir: «Je fais confiance à tout égard au président du SP.a et aux gens de Groen! Et d’autre part, j’admire la patience d’ange du préformateur [Elio Di Rupo].»

    Il est naïf, très certainement de la bouche d’un dirigeant syndical national, de croire que le PS, le SP.a ou les verts vont rompre avec la logique d’austérité qui veut nous faire payer la crise pour épargner les profits qui sont “intouchables”. Plus de vingt ans de participation gouvernementale des sociaux-démocrates ont rendu ce point plus que clair. Mais cette déclaration n’est peut-être pas si naïve. Les directions syndicales sont pieds et poings liés aux partis traditionnels et c’est pour cela qu’ils adoptent une position aussi peu combative quand “leur” partenaire fait partie du gouvernement, même si ce gouvernement mène une politique directement à l’opposé des revendications syndicales.

    Pour un nouveau parti des travailleurs!

    Beaucoup de militants de base sont fatigués de cette attitude. Partout en Europe, dans les années ’90 et 2000, l’absence d’une voix politique pour les travailleurs a ouvert la voie à l’extrême-droite et à différentes variantes du populisme de droite. C’est également ce à quoi nous avons assisté en Flandre. Mais dans différents pays européens, de nouvelles forces de gauche ont émergé. Dans ce processus, l’implication de parties combatives des syndicats est cruciale pour lancer une nouvelle initiative politique de gauche, comme avec le lancement en Allemagne du WASG qui a conduit à la fondation de Die Linke.

    Les premières expériences avec ces partis, comme le SP aux Pays-Bas, Syriza en Grèce ou encore le Bloc de Gauche au Portugal, illustrent qu’il est important de ne pas entrer dans la logique d’une politique d’assainissement. Dans le contexte actuel, une participation au pouvoir signifie accepter la logique capitaliste et ainsi galvauder des forces politiques soigneusement construites. D’autre part, les nouvelles formations doivent accorder une grande attention pour susciter l’implication politique de nombreuses personnes actuellement inorganisées, mais qui veulent lutter. En Belgique aussi, cet espace est présent. Les forces politiques existantes ont la tâche de pousser à la création d’un tel parti, mais la véritable clé se trouve parmi les militants syndicaux et d’autres activistes qui doivent constituer la force motrice de la nouvelle formation. C’est pour défendre cette nécessité que le PSL/LSP s’était engagé aux dernières élections dans le Front des Gauches, un cartel de six organisations de la gauche radicale (PC, PSL/LSP, LCR, CAP et Vélorution) qui poursuit aujourd’hui sa réflexion sur la création d’une nouvelle formation de gauche en Belgique.

    Dans la recherche d’une alternative politique face à la crise actuelle, les expériences staliniennes du passé ne constituent clairement plus de pôle d’attraction. C’est également pour cette raison que la liberté de débat démocratique et le droit d’avoir des idées propres et des courants distincts à l’intérieur de la nouvelle formation est une condition essentielle pour qu’un tel nouveau parti des travailleurs se développe.

    Suite à la manifestation européenne du 29 septembre à Bruxelles, nous répétons notre appel à la FGTB/ABVV et à la CSC/ACV de rompre leurs liens avec le PS/SP.a et avec le CDH/CD&V ou Ecolo. L’énergie nécessaire à la création d’un nouveau parti large des travailleurs sera alors dégagée dans ce pays.

  • Le sport : Une fête pour les actionnaires

    La Coupe du Monde de football en Afrique du sud nous a fait vibrer à certains moments et les supporters guettent déjà la prochaine coupe. Il est même probable que, dans quelques années, la fête du foot arrive jusqu’en Belgique et aux Pays-Bas. Jusque-là, que de bonnes nouvelles pour les amateurs. Mais la Fédération Internationale de Football Association, la FIFA, veut surtout faire du foot une fête pour elle-même et les actionnaires. En Afrique du Sud, un profit colossal atteignant 1,5 milliard d’euros a ainsi été engrangé.

    Les gouvernements belges et néerlandais ont tous deux accepté les conditions de la FIFA, même si certaines sont légalement inapplicables (on s’arrangera toujours bien…). Entre autres, la FIFA revendique une exonération d’impôt et de la TVA : ‘‘Les individus employés par la FIFA ou par une de ses filiales, indépendamment du fait qu’en Belgique ils sont, ou ne sont pas, considérés comme contribuables, ne vont pas devoir payer d’impôts individuels.’’

    Alors que nous devons payer une TVA de 21% sur l’énergie, les pontes de la FIFA ne devront payer aucune taxe, ni au restaurant, ni à l’hôtel. Les caisses de la collectivité ne sont bonnes qu’à construire de nouveaux stades et à investir dans l’infrastructure nécessaire, pas question qu’elles se renflouent avec l’évènement. La FIFA exige aussi une bande spéciale sur les autoroutes au cas où les Rois du foot se trouveraient dans un embouteillage…

    La FIFA revendique que dans un rayon de deux kilomètres autour des stades il ne puisse y avoir que la publicité des sponsors officiels et que seules les boissons des sponsors soient servies dans les cafés des alentours. Tout et tout le monde doit s’incliner pour que le chiffre des bénéfices de 1,5 milliard d’euros puisse être dépassé.

    La marchandisation touche tous les sports. Contador a gagné le Tour de France et a reçu un chèque de 450.000 euros à partager avec ses coéquipiers tandis que le propriétaire du Tour (ASO) a gagné des millions en sponsoring, droits d’émission et primes de participation des villes… Entre 2004 et 2008, ASO a payé 136 millions d’euros de dividendes à ses actionnaires !

    Pour l’élite dirigeante, ces sports sont une manière de faire d’énormes profits et de détourner notre attention de tous les problèmes. Selon nous, le sport doit être un événement populaire, contrôlé par les supporters et la collectivité et non par les rois de la FIFA et leurs patrons des multinationales.

  • Fichez la paix à nos aînés, du travail pour les jeunes – Pas touche à nos (pré)pensions!

    Partout en Europe, le débat fait rage concernant l’augmentation de l’âge d’accès à la retraite. Dans notre pays, cette attaque n’est pas encore à l’ordre du jour, mais tous les partis traditionnels suivent la logique de s’en prendre aux fins de carrière, à l’exemple des Pays-Bas où la retraite est maintenant fixée à 67 ans. En clair, une nouvelle attaque se prépare contre les prépensions.

    Par Geert Cool

    Avant les élections, la plupart des partis flamands prônaient la condition d’une carrière de 45 ans pour accéder à une pension complète, mais les autres, voulaient quand même s’en prendre à la prépension. Personne n’explique comment les nombreux jeunes actuellement au chômage faute de trouver un emploi vont faire pour avoir une telle carrière. Peut-être en travaillant jusqu’à tomber raide mort ? L’augmentation de la productivité et de la flexibilité rend déjà bien compliqué de tenir le coup 40 ans. Pour messieurs dames les politiciens, les chefs d’entreprises et les topmanagers, c’est peut-être encore faisable, mais qu’ils essayent un peu de suivre le rythme d’un travailleur durant 40 ans !

    Les soi-disant ‘socialistes’ du PS et du SP.a suivent également cette logique. D’ailleurs la précédente attaque sur les fins de carrière en 2005, le Pacte des générations, est arrivé à l’initiative du SP.a, avec la complicité active du PS également présent au gouvernement. Maintenant aussi, ces gens-là se préparent à opérer une nouvelle réforme. Du côté du SP.a, on parle de donner jusqu’à 200 euros de plus par mois à ceux qui travailleraient plus longtemps. Dans le contexte de crise actuel, ça signifie surtout que ceux qui ne travailleront pas jusqu’à 65 ans devront se contenter d’une retraite de misère. Du côté du PS, c’est Daerden qui a été le plus clair. Pour lui, le Pacte des Générations n’a pas été assez loin, ses résultats sont ‘‘décevants’’ parce que le salaire des travailleurs âgés est selon lui trop élevé! Les pistes de réflexion qu’il a défendues dans son Livre Vert des pensions au moment où il était encore ministre fédéral en charge des pensions sont de s’en prendre au système des prépensions, d’accorder des diminutions fiscales ou des subsides pour l’engagement de travailleurs âgés, de prendre en charge par l’Etat une partie des salaires des plus de 50 ans,…

    A Bruxelles, le taux de chômage chez les jeunes dépasse les 30% et en Wallonie, une étude de l’économiste et président du CPAS de Namur Philippe Defeyt parle de 40% pour 2011. Toutes les perspectives économiques parlent d’une future hausse du chômage, même avec un rétablissement économique limité. Dans ce cadre, il est totalement illogique que nos aînés travaillent plus longtemps, il n’y a déjà pas assez d’emploi pour les jeunes.

    Le système de prépension doit être conservé et lié à une augmentation de la retraite légale afin que les retraités ne tombent pas dans la pauvreté. Certains parlent plutôt de renforcer les pensions en faisant appel à des fonds de pensions qui placent des cotisations en Bourse, mais c’est ce système qui a maintenant pour conséquence aux Pays-Bas que jusqu’à 200.000 retraités vont recevoir moins d’argent à cause des troubles financiers. Nous ne pouvons accorder aucune confiance envers les fonds privés. De plus, une privatisation des retraites via les assurances groupe, etc. augmenterait les inégalités alors que selon l’Union Européenne, 23% des retraités belges sont déjà sous le seuil de pauvreté.

    Nous devons défendre nos pensions, nos prépensions et exiger une retraite légale d’au moins 1.250 euros nets par mois. Ce combat, nous devons le livrer ensemble, personnes âgées et jeunes, retraités et travailleurs.


    15 septembre : Manifestation en front commun syndical à Bruxelles pour la défense des fins de carrière, à 10h30 à Schumann

  • Jeunes en lutte pour l’emploi – Faites votre choix : le chômage ou un job de misère

    Dans les pages de Lutte Socialiste ous ur ce site, nous avons déjà abordé la problématique du chômage des jeunes dans de nombreux articles, notamment avec le chiffre alarmant d’un jeune de moins de 25 ans sur trois au chômage en 2011 ou encore avec la perspective de 800.000 chômeurs en Belgique pour la même année.

    Par Nicolas Croes

    A NOUS DE PAYER NOS EMPLOIS PRÉCAIRES

    Pour les politiciens traditionnels, tout n’est qu’une question de volonté et de formation du sans-emploi… ainsi que d’incitants à l’employeur bien entendu. Johan Vande Lanotte, ancien président du SP.a (le PS flamand), insiste sur l’expérience. Quand on reste au niveau du principe, là, comme ça, ça peut paraître sympa. Qui pourrait dire qu’on n’a pas besoin d’expérience? Sauf que, concrètement, c’est vraiment, mais alors vraiment loin d’être sympa. Son idée, c’est de transformer la période de stage d’attente (1) en une ‘‘période d’expérience au travail’’.

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    PARLER, OK, MAIS AUSSI AGIR !

    NOUS – POUR DES MARCHES DES JEUNES POUR L’EMPLOI !

    Le PSL participe à des comités ‘‘Jeunes en lutte pour l’emploi’’ avec les jeunes FGTB de différentes villes et d’autres organisations comme la Jeunesse Ouvrière Chrétienne pour organiser des manifestations locales sur le thème de l’emploi des jeunes.

    Pour nous, il s’agit clairement d’aider à construire un rapport de forces en faveur des travailleurs et des jeunes. N’hésitez pas et participez avec nous : pour avoir un avenir, il nous faudra lutter! Contactez nous! (02/345.61.81)

    EUX – MAQUILLAGE CONTRE CHÔMAGE

    Deux communes du nord des Pays-Bas ont mis en place un plan destiné à relooker les chômeuses pour les aider à trouver un mari riche qui les dispenserait de devoir toucher les allocations de chômage! Difficile de trouver plus absurde comme méthode de lutte contre le chômage. On doit aussi dénoncer le caractère extrêmement sexiste de cette mesure qui considère que les femmes ne sont pas beaucoup plus que de jolis objets à vendre.

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    Derrière les mots, la ‘‘période d’expérience au travail’’ consiste à forcer un jeune à accepter un stage en entreprise, qu’il ne peut refuser, tout comme il serait obligé d’accepter une offre d’emploi dans cette entreprise après le stage. En guise de ‘‘salaire’’ le jeune recevrait une allocation d’attente considérée comme subside à l’emploi. Expliqué plus brutalement, il s’agit d’aller puiser dans les caisses de la collectivité (c’est-à-dire notre argent, celui de nos impôts) pour que des patrons puissent bénéficier de travailleurs quasigratuits, forcés d’accepter n’importe quelle condition.

    Ça ne reste qu’une proposition en l’air nous direz-vous. Mais Joëlle Milquet, la ministre de l’emploi du précédent gouvernement, a suivi exactement la même logique avec l’application de son plan win-win (2) : payer des salaires de misère avec l’argent des caisses de l’Etat.

    Les diminutions de charges et autres cadeaux aux entreprises ont permis de donner plus d’argent aux patrons tout en laissant ces derniers libres de presser un travailleur comme un citron pour le jeter ensuite quand il n’y a plus assez de ‘‘subside à l’emploi”” pour le soutenir. Cette somme gigantesque, plusieurs milliards d’euros par an, aurait pu être consacrée au développement des services publics, en engageant des travailleurs avec de bons statuts. Il y aurait ainsi moins de chômage, et plus de service à la population. Pas mal hein ? Attendez, parce qu’il y a moyen d’aller encore plus loin.

    UN CHOIX DE SOCIÉTÉ

    Partout en Europe, les gouvernements regardent les pensions le couteau entre les dents. On parle partout d’élever l’âge d’accès à la retraite. En France, on estime que le projet du gouvernement Sarkozy de repousser l’âge de départ à la retraite représente l’équivalent d’un million d’emplois de jeunes… En Espagne, le gouvernement (dirigé par l’équivalent local du PS) aimerait bien faire pareil, dans un pays où 40% des moins de 25 ans sont au chômage !

    Toujours selon Philippe Defeyt, ‘‘le chômage n’a jamais été aussi élevé, il augmente de manière tendancielle, depuis 30 ans, il touche aujourd’hui, quasiment 15% de la population active (…) comment peut-on vivre dans une société, quand de manière aussi structurelle et durable, il n’y a pas assez d’emplois pour tout le monde ? Il est peut-être temps de voir s’il n’est pas possible de s’organiser autrement, sur le plan économique et sur le plan social.”

    Pour le PSL, la solution est simple : partager le temps de travail disponible en fonction des forces disponibles. Aujourd’hui, chaque avancée technologique met plus de gens à la rue, alors que cela devrait permettre d’avoir plus de temps à consacrer pour soi et pour la société. Concrètement, le PSL revendique les 32 heures de travail par semaine, avec embauches compensatoires et sans perte de salaire. L’argent existe! Vous vous souvenez des banques qui ont été sauvées à coups de milliards par la collectivité ? Et bien les quatre banques belges ont réalisé ensemble un bénéfice de 1 milliard d’euros uniquement au cours du premier trimestre 2010. Si le secteur financier était placé sous contrôle démocratique des travailleurs et non pas sous celui de requins capitalistes, ces moyens n’iraient pas finir dans les poches de parasites actionnaires et spéculateurs, mais seraient investis pour les besoins de la société.

    On est loin d’entendre de telles choses de la bouche des partis traditionnels, et c’est normal. Pour le PS, le MR, Ecolo ou le CDH, ce sont les patrons qui créent la richesse. Pour nous, ce sont les travailleurs : le patron a besoin des travailleurs, les travailleurs n’ont pas besoin de patron.

    C’est pourquoi nous luttons contre le capitalisme, pour une société où les richesses extraordinaires dont dispose notre monde seraient consacrées à la satisfaction des besoins de chacun dans le respect de notre environnement. C’est ce que nous appelons une société socialiste démocratique.


    1. Stage d’attente : période comprise entre la demande d’allocations de chômage et le premier versement, généralement de 9 mois
    2. Plan win-win : mesure entrée en vigueur le premier janvier et faisant bénéficier les patrons de diminutions de taxes énormes pour un jeune de moins de 26 ans. Dans certains cas, les patrons n’ont même plus rien à payer à l’Etat.
  • Un tsunami d’austérité déferle sur l’Europe

    Malgré l’opération de sauvetage financier de la Grèce, ses obligations d’Etat sont toujours considérées comme de la pure camelote par les agences de notation. Maintenant, il semble bien que ce soit au tour de l’Espagne et du Portugal et, ailleurs encore en Europe, la machine d’austérité est mise en marche. Ainsi, en Grande-Bretagne, le nouveau gouvernement conservateurs / libéraux-démocrates veut assainir 7 milliards d’euros en un an. En Allemagne, Angela Merkel veut assainir 80 milliards d’euros d’ici 2014. Ce tsunami d’austérité touche presque tous les pays européens, son arrivée chez nous n’est qu’une question de temps.

    Article basé sur une analyse de Robert Bechert, du CIO

    LA CRISE N’EST PAS FINIE

    L’Union Européenne et l’euro ont reçu de bonnes claques et les réunions de crise sont devenues la norme. Les contradictions internes à l’Union Européenne se sont également exprimées avec des tensions personnelles entre différents dirigeants européens, Sarkozy menaçant même un moment de quitter la zone euro. Beaucoup a été tenté pour éviter la faillite de la Grèce et relever l’euro mais, pour la première fois depuis son instauration en 1999, une discussion s’est ouvertement développée concernant la possibilité d’expulser des pays de la zone euro.

    Les classes dirigeantes n’ont pas seulement eu peur qu’une faillite grecque conduise à une nouvelle chute économique, elles craignaient également que d’autres pays soient ‘‘infectés’’ par les protestations ouvrières en Grèce. Une révolte en Grèce ou dans un autre pays pourrait initier une vague de protestations, et cette peur est à la base de la campagne de propagande internationale destinée à faire passer les Grecs pour des ‘‘paresseux’’ ainsi que des tentatives de monter les travailleurs des différents pays les uns contre les autres.

    Cette crainte des classes dirigeantes est justifiée. La crise commencée en 2007 est loin d’être terminée. La situation économique reste incertaine, même si certains pays ont connu une faible croissance. Les capitalistes n’ont aucune confiance en une relance et, si relance il y a, elle sera de toute façon limitée et sans création d’emplois. Le fait que la croissance économique d’avant la crise ait été stimulée par le crédit a pour conséquence que les dettes restent un élément important. Les grandes dettes des Etats instaurent une pression sur les gouvernements pour assainir les dépenses mais ces opérations d’austérité peuvent conduire à une nouvelle récession.

    SONGES EUROPÉENS ET MENSONGES

    Le secteur financier reste instable, ce qui renforce la position de faiblesse de l’euro envers le dollar. Ceci dit, tous les pays européens ne sont pas mécontents avec un euro faible qui stimule les exportations. Le paquet de sauvetage pour la Grèce était destiné à sauver l’euro, mais le Financial Times a de suite fait remarquer: ‘‘La crise de la zone euro se développe tellement vite que l’opération de sauvetage pourrait vite être dépassée (par les évènements, ndlr).’’

    Le “rêve européen” est sapé par la crise ainsi que par les tensions entre les différentes bourgeoisies nationales et leurs représentants politiques. Lors de l’introduction de l’euro il y a dix ans, nous avions déjà dit qu’une complète unification européenne était impossible sur base capitaliste. L’intégration européenne à laquelle nous avons assisté était exceptionnelle mais, en même temps, le capitalisme est essentiellement resté basé sur les Etats nationaux, avec des bourgeoisies nationales défendant leurs intérêts propres. Dans un contexte où tout se passait bien sur le plan économique, les classes capitalistes nationales pouvaient coopérer. Toutefois, la crise survenue, seuls comptent les intérêts nationaux.

    Si la crise dévoile les faiblesses de l’euro, elle n’est pas destinée à n’avoir d’effets qu’au niveau des marchés financiers. Les travailleurs sont directement menacés. Il nous faut comprendre cette crise et lui apporter une réponse. Les sommets de l’Union Européenne ne sont bons qu’à conclure de grands accords et à annoncer de grandes mesures, mais ces gesticulations cachent fort mal les contradictions internes à l’Union. La succession rapide d’annonces et de mesures sans grands effets illustre justement que ces gens-là n’ont aucune véritable solution.

    QUELLE RÉPONSE ?

    Les finances publiques gémissent dans presque tous les pays européens sous l’impact des opérations de sauvetage massives à destination des banques, de la baisse des revenus de l’impôt et des mesures destinées à adoucir les conséquences de la crise. En conséquence, le niveau de vie des travailleurs et les services publics sont sous pression. En Roumanie, par exemple, il est proposé une baisse de 25% des salaires en plus d’une baisse de 15% des pensions, qui sont déjà pitoyables. Cette vague d’austérité entraîne l’instabilité ou l’impopularité de nombreux gouvernements européens.

    Les travailleurs doivent résister contre chaque tentative de nous faire payer la crise. Jusqu’à présent, la Grèce a montré la voie avec des protestations de masse contre les assainissements du gouvernement social-démocrate. Au Portugal et en Espagne également, de grandes manifestations et des actions de grève se développent, là encore contre des assainissements budgétaires portés par des gouvernements soi-disant socialistes. En Allemagne, 45.000 personnes ont récemment défilé à Stuttgart et Berlin.

    Fait remarquable, beaucoup de ces actions ont été le résultat d’une grande pression de la base, sans initiative des dirigeants syndicaux nationaux. Dans la plupart des cas, les directions syndicales semblent ne vouloir que des actions symboliques, au lieu de préparer une lutte sérieuse pour défendre nos intérêts. Des mobilisations et des manifestations peuvent illustrer la force du mouvement ouvrier, mais elles peuvent aussi être utilisées pour faire baisser la pression et ainsi freiner le développement d’un mouvement combatif.

    Ces hésitations existent parce que beaucoup de dirigeants syndicaux sont eux-mêmes rentrés dans la logique de ce système ou ne voient pas d’alternative à opposer au capitalisme. Pire, dans de nombreux cas, les dirigeants syndicaux essaient même de coopérer avec les gouvernements pour appliquer les assainissements, comme c’est le cas en Irlande mais aussi aux Pays-Bas, où la direction syndicale a accepté une augmentation de l’âge d’accès à la pension jusqu’à 67 ans.

    RÉPONDRE À LA CONFUSION PAR UNE CLARTÉ SOCIALISTE

    Ce manque de mots d’ordres clairs ou de plan d’action est une expression partielle de l’affaiblissement de la conscience socialiste et de la disparition de certaines traditions du mouvement ouvrier suite à la chute du stalinisme en 1989. Même là où se développent de nouvelles formations de gauche (Die Linke en Allemagne ou le NPA en France), l’anticapitalisme n’est pas traduit en une vision claire concernant la manière de lutter contre le capitalisme pour le remplacer par une alternative socialiste. Cette confusion est très claire à la FGTB wallonne qui mène campagne sous le slogan ‘‘Le capitalisme nuit gravement à la santé’’, sans se détacher clairement du PS.

    Les défis pour le mouvement ouvrier sont gigantesques. Les attaques antisociales se combinent aux dangers du nationalisme et de la politique de diviser- pour-mieux-régner, ce qui peut avoir un certain impact sur la conscience des masses. Cela a sans doute été le cas avec la campagne massive des médias allemands contre les Grecs qui avaient besoin de ‘‘notre argent’’ parce qu’ils étaient ‘‘trop paresseux’’ pour travailler eux-mêmes. La politique de diviser- pour-mieux-régner s’exprime aussi dans des campagnes destinées à monter les travailleurs du secteur privé contre ceux du public ou encore les travailleurs autochtones contre les travailleurs immigrés. Tout est fait pour éviter que ne se développe une compréhension générale de la crise comme conséquence du système capitaliste.

    Nous devons nous opposer à la dictature et au chaos du marché, mais en même temps plaider pour une transformation socialiste de la société. Le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) défend la nécessité d’un plan d’action européen et a été, avec d’autres, à la base d’un appel de députés européens de la Gauche Unitaire Européenne pour une semaine européenne d’action de protestation et de solidarité fin juin. Nous devons lutter ensemble et avancer des revendications telles que la nationalisation des secteurs clés de l’économie sous contrôle et gestion démocratique des travailleurs afin d’aboutir à une planification socialiste de la production dans une fédération européenne socialiste démocratique.

  • Pensions impayables? Mensonge! La baisse du nombre de naissances n’égale pas l’augmentation de la productivité

    Le démantèlement de notre système de pensions est inscrit dans l’agenda politique depuis longtemps déjà. Politiciens, médias et représentants du patronat nous ont enfoncé dans le crâne que nos pensions sont impayables. A nous de nous sentir coupables. Le gouvernement nous sort maintenant son ‘‘livre vert’’ de la conférence sur les pensions, composée de représentants du patronat, des syndicats, du gouvernement et de l’administration. Quelques questions prévisibles sont ensuite envoyées de ce livre vers les partenaires sociaux, qui doivent formuler des propositions dans un ‘‘livre blanc’’. Ce dernier peut être publié à tout moment dès septembre. Voilà la base sur laquelle le gouvernement va composer son menu de réformes.

    Par Eric Byl

    Personne ne niera qu’une réforme du système de pension s’impose. En octobre 2007, Le Soir écrivait déjà que l’allocation moyenne de pensions après impôts ne représentait plus que 64,4% du salaire moyen en Belgique. En Grèce et aux Pays-Bas, elle dépasse les 100%. Si, en moyenne, un pensionné luxembourgeois reçoit 664.240 euros durant tout le temps que couvre sa pension, le pensionné belge ne peut compter que sur 179.056 euros (moins qu’en Grèce, où le niveau de vie est en moyenne beaucoup moins élevé). En conséquence, un quart des plus de 65 ans vit sous le seuil de la pauvreté en Belgique contre… moins d’une personne sur 20 aux Pays-Bas! En finir avec la pauvreté des seniors ne coûterait pourtant que 900 millions d’euros, aux dires du professeur Jos Berghmans (université de Louvain). Mais ce n’est pas de cette façon que le Livre Vert aborde les choses.

    La pierre angulaire de l’argumentation favorable à l’assainissement de notre système de pensions est l’augmentation du nombre d’inactifs face à la population active. En 2000, pour chaque personne de plus de 65 ans, quatre personnes étaient actives et elles ne seraient plus que deux en 2060. Cette histoire à dormir debout a déjà été réfutée des dizaines de fois, notamment par Gilbert De Swert dans son livre 50 mensonges sur les pensions. En plein baby-boom, en 1964, le nombre de naissances a atteint son sommet (168.000 naissances) pour toucher son niveau le plus bas en 2002 avec 115.000 naissances. C’est une baisse de pas moins de 31%(1), mais durant la même période, la productivité a augmenté de 215%(2)! Le Livre Vert estime que les dépenses totales pour les pensions représentaient 31 milliards d’euros en 2008, soit 8,96% du PIB de l’époque(3). D’ici 2014, ces dépenses passeraient à 36 milliards d’euros, à 46 milliards d’ici 2030 et à 50 milliards d’ici 2060. Cette croissance des dépenses, présentée comme une explosion, est en réalité loin d’être catastrophique. Selon le Bureau du Plan, d’ici 2014, le PIB belge aura augmenté jusqu’à 407 milliards d’euros(4). Les 36 milliards d’euros de dépenses pour les pensions représenteraient donc 8,84% du PIB, proportionnellement moins qu’en 2008, donc.

    Il est impossible d’estimer le PIB de 2030, ne parlons même pas de celui de 2060. Mais nous savons tout de même que nous avons été plus productifs de 36% pour chaque heure en 1965 par rapport à 1950 et 111% plus productifs en 1980 par rapport à 1965. Admettons que le capitalisme s’est depuis lors essoufflé. Mais nous avons quand même été plus productifs de 36% pour chaque heure en 1995 en comparaison de 1980 et, au beau milieu de l’année de crise de 2009, nous étions encore 15% plus productifs qu’en 1995(5). Le prix de cette performance se calcule notamment en infarctus et maladies liées au stress. Même si les quinze prochaines années restent aussi ‘mauvaises’, les 10 milliards d’euros supplémentaires que coûteraient nos pensions d’ici 2030 ne représenteraient vraiment rien, tout comme les 4 autres milliards pour 2060.

    Mais peut-être que les politiciens, les patrons et leurs médias sont d’accord avec nous pour qualifier le capitalisme de système archaïque offrant peu de possibilités de croissance et pour dire que la tendance à la baisse de l’augmentation de la productivité initiée au milieu des années ’70 va se poursuivre?

    De ce constat, le PSL tire la conclusion que le chaos capitaliste devrait être remplacé par un système socialiste basé sur la planification rationnelle et la démocratie des travailleurs. A l’opposé, les politiciens, patrons et médias actuels tentent de réanimer le capitalisme, ce système archaïque. C’est ce qui explique leur politique de cadeaux aux patrons qui puise dans les caisses de la sécurité sociale pour accorder des subventions salariales et des diminutions de charges au patronat.


    Notes:

    1. SPF économie: Structure de la population selon âge et sexe : pyramide d’âge
    2. The Conference Board Total Economy Database.
    3. PIB – Produit Intérieur Brut – la valeur totale de marchandises et de services produits en une année.
    4. Bureau Fédéral du Plan, prévisions économiques 2009-2014.
    5. The Conference Board Total Economy Database.
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