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  • Une « autre campagne » …

    Les partis traditionnels peuvent compter sur des sommes confortables provenant de nos impôts pour porter leurs campagnes (56 millions d’euros en 2006). Les dotations parlementaires leurs permettent de consacrer des millions d’euros aux dépliants colorés et aux grandes affiches de leurs leaders. Ces mêmes dirigeants ont l’opportunité d’encombrer toutes sortes de programmes de télévision. Le CAP, lui, veut non seulement une autre politique, mais aussi une autre campagne.

    Les militants au coeur de la campagne

    Le CAP n’a fait appel à aucune agence publicitaire pour concevoir son programme électoral et son affiche. Ce sont les militants eux-mêmes qui ont discuté et décidé de tous les aspects de la campagne, entre autres lors des conférences nationales du 3 février et du 14 avril. La conférence du 14 avril s’est déroulée dans un enthousiasme énorme. Elle a adopté les thèmes centraux de la campagne et le tract électoral national. Certains candidats se sont aussi présentés et un vote a eu lieu au sujet des listes. La présentation des candidats n’a pas été pour rien dans le caractère particulièrement vif et enthousiaste de la réunion.

    Il a été particulièrement rafraîchissant sous le soleil de cette journée d’entendre des travailleurs, des jeunes, des retraités… expliquer eux-mêmes pourquoi une autre politique est nécessaire. Nous ne pouvons pas laisser la politique aux politiciens des partis établis. La politique s’occupe de notre vie, pourquoi devrait-on, nous, ne pas nous en mêler ? C’est uniquement de cette manière que nos revendications trouveront une expression politique.

    Un potentiel énorme

    Contrairement aux partis traditionnels, le CAP a conquis le droit de pouvoir se présenter aux élections en étant présent sur le terrain pour collecter les deux fois 5.000 signatures nécessaires et non en demandant des signatures de parlementaires. Ce fut un énorme effort, mais un effort motivant car il nous a permis de tester la réponse des gens face à l’initiative et cette réponse a été plus que positive. Jef Sleeckx souligne déjà depuis quelques mois que l’espace pour une alternative existe. Nos moyens limités feront bien entendu que nous ne pourrons pas entièrement exploiter ce potentiel, mais il est déjà important d’identifier celui-ci et de tâcher de saisir les opportunités qui se présentent.

    Le soutien large dont bénéficie le CAP a permis de voir l’arrivée de plusieurs personnalités ayant une longue tradition au sein du mouvement ouvrier ou ayant l’expérience d’une implication dans d’autres domaines. Dans la province du Limbourg, l’ancien bourgmestre SP.a de Houthalen-Helchteren, Jules D’Oultremont tirera la liste pour la Chambre. Tiny Mast, la maman de Kim et Ken – deux enfants disparus dans la même période que Julie et Mélissa – qui était très active dans le mouvement Blanc, se trouve sur la liste du Sénat du côté néerlandophone.

    Mais les listes du CAP comprennent surtout beaucoup de travailleurs dont la plupart ont une expérience syndicale appréciable : des travailleurs de Volkswagen, de Ford, du secteur non-marchand, des différents secteurs des transports en commun, de l’enseignement, de La Poste,…

    Les médias ont choisi leur camp…

    Le CAP ne peut pas compter sur beaucoup d’intérêt de la part des médias. En Flandre, une émission populaire consacrée aux élections (« Doe-de-Stemtest », « Faites le test électoral », à la VRT), a refusé que le CAP participe. Les excuses de la VRT ont changé au fur et à mesure qu’elles se heurtaient au bon sens… Et ne parlons même pas du côté francophone! Les critiques du « pauvre » Didier Reynders sur le manque d’objectivité de la RTBF (qui ne manque pourtant pas de lui accorder la parole bien plus qu’il ne le mérite) ressemblent à autant de caprices d’un enfant beaucoup trop gâté face à la situation que rencontrent les « petites » listes.

    Nous ne pouvons pas compter sur les médias et les dons des riches pour faire connaître le CAP à grande échelle. Mais comme Jef Sleeckx le faisait remarquer à la conférence du 14 avril, le CAP dispose d’une arme importante : l’enthousiasme de ses partisans.

    Et après les élections ?

    Le Comité une Autre Politique (CAP) est un développement bienvenu dans la paysage politique belge. Le MAS/LSP soutient pleinement le CAP et sa campagne. L’initiative est encore jeune et instable et son développement ultérieur n’est pas garanti. Cela dépendra de la manière dont le gigantesque potentiel qui est devant nous sera utilisé.

    La campagne électorale peut clarifier un certain nombre de choses pour le CAP : la nécessité d’aller vers l’extérieur, d’élaborer les thèmes centraux, d’avoir un engagement actif. Tout cela est nécessaire pour aller plus loin et, notamment, aborder plus en profondeur le programme par la suite. Sur base de cette campagne électorale, le CAP sera renforcé pour qu’après les élections – espérons-le – on puisse bâtir alors une alternative politique et poser les premiers jalons vers un véritable nouveau parti des travailleurs.

  • MAS/LSP et CAP: les deux sont nécessaires et possibles!

    Si le Comité pour une Autre Politique (CAP) participe aux élections du 10 juin, cette date marquera peut-être le point de départ pour un nouveau parti de gauche combatif traduisant le mécontentement dans la population face à la politique néolibérale.

    Eric Byl

    Le MAS/LSP s’est engagé dans le CAP depuis le début. En général, parmi les membres du CAP, l’appréciation de notre travail est très positive. En revanche, dans les milieux de la gauche radicale et intellectuelle, la méfiance est importante. Si les répercussions en sont limitées, elles peuvent néanmoins générer une méfiance nuisible à la construction du CAP. C’est pourquoi nous tenons à éclaircir les choses dans cet article.

    Au sein du CAP, il est clair que les militants de LSP/MAS accomplissent énormément de travail. S’il faut louer, installer ou ranger une salle, imprimer un tract, tenir un bar, organiser des interventions de rue,… ce sont souvent les militants du MAS/LSP qui s’en chargent. Ils jouent aussi un rôle important dans la récolte des signatures, l’écriture du programme, l’organisation des sections locales,… Et cela ne passe pas inaperçu. En général, l’appréciation est positive, surtout parmi les travailleurs et leurs familles. Nous remarquons une croissance forte de la vente de notre mensuel, un intérêt grandissant pour nos propositions et un recrutement visible de nouveaux membres, dont beaucoup de jeunes, mais aussi de plus en plus de syndicalistes.

    Ce n’est pas le fruit du hasard. Depuis que la social-démocratie et les syndicats ont largement abandonné le militantisme pour des campagnes publicitaires et des actions symboliques, le savoir-faire militant se fait rare à gauche. Or, un nouveau parti ne se construit pas du néant. Soit comme Duchatelet (Vivant) ou Dedecker (fraîchement viré du VLD), on dispose de moyens financiers considérables, soit il faut s’appuyer sur la force conjuguée d’une série de petites contributions. Mais, pour cela, il faut des militants. Une grande partie de l’énergie du MAS/LSP et des indépendants au sein du CAP vise à réunir une couche large de militants au sein du CAP qui seront la chair d’un tel parti.

    Cela signifie-t-il que le MAS/LSP souhaite se dissoudre au sein du CAP comme certains l’affirment ? Ou bien que le MAS/LSP veut faire du CAP un simple MAS/LSP+ comme d’autres le prétendent ? Ni l’un ni l’autre.

    Depuis ‘95 déjà, le MAS/LSP défend l’idée d’un nouveau parti des travailleurs qui regroupe tous les courants qui s’opposent au néolibéralisme. Nous pensons que c’est une condition nécessaire afin de faire participer des couches plus larges aux luttes. Pour une personne qui rejoint directement le MAS/LSP, il y en a 9 qui ne sont pas prêtes à choisir un courant de gauche spécifique mais qui sont ouvertes à rejoindre une formation plus large. C’est avec eux que nous voulons traverser une période d’expérience commune. Certains en tireront des conclusions révolutionnaires, d’autres choisiront des options plus accessibles. Mais, quoi qu’il en soit, on accomplira toujours plus tous ensemble que tous divisés!

    En bref : le MAS/LSP ne se dissoudra pas au sein du CAP ou ne cherchera pas non plus à faire du CAP un parti « semi-révolutionnaire » (un ‘MAS+’). Pour nous, il faut un parti large (CAP) afin de pouvoir mener les luttes de façon plus énergique et, en même temps, un parti révolutionnaire (MAS/LSP) qui défende loyalement son programme et qui – pourquoi pas ? – sur base de la pratique, convainque le CAP ou une partie importante du CAP de son programme révolutionnaire.

    Une telle attitude est la logique même pour la plupart des travailleurs. Au sein de la gauche radicale, une autre logique est en vigueur : celui qui a du succès est automatiquement sectaire et celui qui n’en a pas est un monsieur sympathique. Ceci explique leurs attaques contre le CAP qui ne serait, selon eux, qu’un simple prolongement du MAS/LSP. Nos critiques ne se rendent pas compte qu’ils réduisent ainsi tous les indépendants au sein du CAP à une série de sots qui se laissent manipuler par le MAS/LSP.

    Nous ne revendiquons pas les places principales sur les listes du CAP mais nous sommes prêts à aider loyalement à compléter ces listes si nécéssaire. Nous invitons nos critiques à collaborer de la même manière à la construction du CAP et nous restons ouverts, après les élections, à les accueillir si les résultats les font changer d’avis.

  • Ouvrir le parlement au monde du travail ? Et pourquoi pas aussi à ses revendications ?

    Les partis traditionnels ne savent plus quoi faire pour combler le fossé entre le monde politique et la population. La dernière intitiative en date vient du SP.a. Lors de son dernier congrès idéologique, le président Vande Lanotte a proposé de ramener au Parlement des représentants du monde du travail.

    Bart Van der Biest, délégué SETCa dans le secteur non marchand

    Le dernier député à avoir connu l’usine était Gaston Onkelinx, père de Laurette. La ministre de la Justice ne rate pas une occasion de rappeler cette hérédité pour souligner ses racines ouvrières. Cela n’empêche pas qu’elle doive son ascension politique à son intransigeance face à la grande grève des enseignants de 1996 contre les milliers de licenciements décidés par celle qui était alors Ministre de l’Enseignement …

    Le président du PS, Elio di Rupo, est le fils d’un mineur italien. Il est pourtant l’initiateur de la privatisation de Belgacom et de La Poste à l’époque où il était ministre des entreprises publiques. Il est aujourd’hui le maître d’oeuvre du très néolibéral Plan Marshall pour la Wallonie.

    Après 18 années de PS et SP.a au gouvernement, le taux de pauvreté a atteint 15% de la population tandis que les grandes entreprises font des bénéfices record.

    Bon nombre de travailleurs n’ont jamais vu autre chose en eux que les partis de l’austérité. Beaucoup de militants FGTB en ont marre que la direction de la FGTB et le PS leur bassinent les oreilles sur le thème du « moindre mal ». Avec le PS au pouvoir, le mal n’est pas si moindre qu’avec un gouvernement « encore plus à droite ». Dans les dossiers essentiels, la base de la FGTB et le PS n’étaient pas du même côté de la barricade : la Constitution européenne (un mode d’emploi de la politique néolibérale), l’AIP 2005-2006, le Pacte de Solidarité entre les générations, Volkswagen, …

    Ce n’est pas un hasard si tant de militants syndicaux sont aujourd’hui en quête de quelque chose de neuf et de différent. Le lancement du Comité pour une Autre Politique a donné une expression politique à cette quête. La seule existence du CAP est déjà un motif d’inquiétude pour la social-démocratie et les Verts. Les partis soi-disant de gauche essaient de nous convaincre avec de vagues promesses. Les travailleurs n’ont pas besoin de promesses en l’air, mais bien d’une formation politique qui défende leurs intérêts d’une façon conséquente.

    Le MAS/LSP veut construire avec d’autres dans le CAP un rapport de force en soutenant activement des actions et des luttes dans les entreprises, les quartiers, les écoles,… C’est cela qui fera du CAP un pôle d’attraction : son potentiel d’évoluer en parti des travailleurs avec une implication active de couches plus larges. Ce sera sans doute une oeuvre de longue haleine, mais qui reposera sur des bases plus solides que les promesses en l’air des partis traditionnels.

  • Manifestation anti-guerre à Bruxelles

    Quelques milliers de manifestants se sont rendus à Bruxelles ce dimanche 18 mars pour protester contre la guerre en Irak. Cette manifestation se déroulait dans le cadre d’un week-end d’actions internationales pour commémorer le quatrième anniversaire de l’invasion de l’Irak (le 20 mars 2003). Des dizaines de milliers de personnes ont ainsi défilé à Madrid, plus de 50.000 personnes ont battu les pavés de Washington, quelques dizaines de milliers à Los Angeles, plusieurs milliers à Istanbul et au moins un millier à Athènes ou au Canada sans perler du Danemark, de Prague, de Séoul, du Chili,…

    Le MAS/LSP était présent avec une délégation de jeunes de Résistance Internationale et une intervention au sein de la manifestation. Nous avons ainsi participé à la récolte de listes de parrainage pour que le Comité pour une Autre Politique (CAP) puisse participer aux élections fédérales du 10 juin tout en récoltant du soutien financier et en vendant notre mensuel, l’Alternative Socialiste.

    Cela ne se fit pas sans un certain succès puisque nous avons pu récolté 517 euros de soutien et diffusés 134 exemplaires de notre mensuel.


    Reportage photo

    Jonas Van Vossole

  • Le CAP sera présent aux élections

    Au moins 95% des 250 participants à la deuxième conférence du Comité pour une Autre Politique ont éliminé les derniers doutes existant sur la participation de l’initiative aux élections. Aux élections fédérales de juin, il y aura des listes « CAP » en Flandre, en Wallonie et à Bruxelles.

    Eric Byl

    Un premier pas le 28 octobre

    Le caractère de la conférence du 3 février était différent de celui de la conférence de fondation du 28 octobre. Le but de cette dernière avait été de tester la réponse que pouvait recevoir un appel pour une nouvelle formation ploitique large devant offrir une voix à ceux qui sont aujourd’hui réduits au silence.

    La mobilisation était en quelque sorte plus importante que les décisions. Le MAS/LSP avait à ce titre livré une belle contribution en mobilisant presque 300 personnes – membres, sympathisants, collègues, amis,… – sur un total de 650 participants.

    Le 28 octobre, il fallait commencer par installer la confiance entre des personnes et des groupes ayant parfois des origines et des perspectives assez différentes, balayer les préjugés et poser les bases de la coopération. Les différences politiques n’ont pas réellement été discutées en profondeur lors de cette réunion. Résultat : des groupes de travail où le but n’était pas toujours clair – et où la clarification des idées a parfois dû céder la place à des développements académiques longs et inutiles -, des réunions plénières où beaucoup de temps a été consacré à des contributions allant dans toutes les directions (y compris parfois dans des directions bizarres) et ensuite un sentiment de déficit démocratique.

    La conférence du 28 octobre a tenté de réconcilier deux orientations opposées: un “regroupement de la gauche radicale” et la création d’une “nouvelle formation large” qui réponde à l’absence d’une représentation politique des travailleurs, de leurs familles et des autres opprimés. Beaucoup sont restés sur leur faim avec des sentiments partagés après cette conférence.

    Le MAS/LSP a tiré de cette conférence un bilan critique sans perdre de vue qu’il s’agissait d’une étape insuffisante, mais sans doute nécessaire, que le mouvement devait dépasser.

    La conférence du 3 février avait une autre tâche. L’accent n’a pas été mis sur la mobilisation, mais sur la discussion du contenu du programme électoral et, évidemment, sur la façon dont le CAP allait participer aux élections.

    Plus de clarté après VW

    Ce progrès n’a été possible que parce que beaucoup de choses ont été clarifiées depuis la conférence du 28 octobre,. La grève chez VW, la manière dont cette lutte s’est développée et l’intervention du CAP dans le comité de soutien ont illustré en pratique que le défi de la période à venir n’est pas de “regrouper” la petite gauche radicale, mais au contraire de remplir le vide laissé par l’absence d’une formation politique assez large, ouverte et crédible.

    Les événements de VW ont été presque un laboratoire pour toute la société : l’emploi, les conditions de travail, la sécurité sociale, l’utilisation des moyens publics, la fiscalité, l’environnement, la pauvreté,… toutes ces questions y ont été posées.

    Ce conflit a illustré la confrontation directe entre la vieille politique traditionnelle de cadeaux aux patrons, d’assainissements et de plans de démantèlement social et une autre politique orientée vers le maintien de l’emploi, des conditions de travail et de salaire. A VW, cela s’est exprimé clairement dans un conflit entre, d’un côté, le patron, le gouvernement et malheureusement une grande partie des dirigeants syndicaux et, de l’autre, la majorité des travailleurs soutenus par une partie des délégués syndicaux, surtout de la FGTB.

    Le CAP a clairement choisi son camp et coopère avec les “rebelles” pour élaborer une stratégie combative et intervenir de manière active dans la lutte.

    Relations avec Une Autre Gauche

    Nous sommes arrivés à une fin (provisoire ?) des chamailleries avec le groupe francophone Une Autre Gauche (UAG). La différence d’orientation entre UAG et le CAP a été visible lors du conflit à VW, dont UAG a largement sous-estimé l’importance. Pour eux, la grève de VW n’était qu’une occasion parmi d’autres de mettre à l’agenda le “regroupement politique de la gauche”.

    UAG a décidé à sa dernière assemblée générale de mettre en veilleuse les relations avec le CAP, officiellement parce que le MAS/LSP avait décidé “sans autorisation” (dans ces termes-là !) de mettre sur pied des noyaux du CAP en Wallonie. En fait, UAG exige du CAP un fonctionnement bureaucratique et antidémocratique similaire au sien. Rien d’étonnant donc à ce qu’UAG ne réussisse pas à impliquer dans son “regroupement de la gauche” les seules formations de la gauche radicale ayant une implication dans les entreprises et les quartiers, c’est-à-dire le PTB/PvdA et le MAS/LSP. UAG s’est déclarée opposée à une participation électorale et n’envisage éventuellement de présenter une liste pour la Chambre que dans le Hainaut (mais même cela nous semble improbable).

    La conférence du 3 février a enregistré une présence significative du CAP francophone. À Liège, dans le Hainaut ou en Brabant wallon, les sections actives du CAP s’élargissent rapidement. Il manque encore des figures publiques comme Jef Sleekx, Lode Van Outrive et Georges Debunne, mais le potentiel pour une nouvelle formation y est au moins aussi grand qu’en Flandre.

  • Les partis traditionnels se mettent en ordre de bataille pour faire encore un peu plus de la même politique

    La campagne pour les élections fédérales de cette année est désormais lancée. Les préparatifs des partis traditionnels vont de pair avec une série de propositions antisociales, le tout nappé d’une sauce communautaire. Le Premier ministre Verhofstadt (VLD) a pondu un “nouveau” Manifeste du Citoyen. Son possible successeur Yves Leterme (CD&V) y est allé d’une petite phrase sur la nécessité d’une politique d’austérité pure et dure comme aux Pays-Bas.

    Geert Cool

    Le Manifeste du Citoyen de Verhofstadt est moins innovateur que son auteur voudrait nous le faire croire. Verhofstadt y propose de calculer davantage le temps de travail plutôt en termes d’heures de carrière. Des horaires individuels permettent d’augmenter la flexibilité, bien entendu parce que les travailleurs demanderaient « des horaires de travail souples », et aussi de remettre en cause l’âge de la pension.

    Sauce hollandaise…

    Pour les chômeurs, Verhofstadt a repris une idée de son collègue de parti Rik Daems. Il s’agit d’imposer aux chômeurs des “emplois de proximité” à temps partiel en échange de leur allocation de chômage. Les fossoyeurs néolibéraux du service public ne précisent évidemment pas que cela se fera au détriment d’emplois qui étaient auparavant prestés par du personnel statutaire.

    Le candidat le plus souvent cité à la succession de Verhofstadt, Yves Leterme (CD&V), est politiquement proche des propositions de Verhofstadt. Leterme se prononce aussi pour accentuer… la même politique. Au début du mois de décembre, lors d’un déjeuner-débat avec de petits entrepreneurs à Gand, il a dit qu’il voulait mener une politique similaire à celle de son homologue hollandais Balkenende: une politique néolibérale pure et dure avec de graves atteintes à la sécurité sociale et aux salaires. Balkenende et son parti chrétien-démocrate sont même allés aux élections avec la « promesse » d’allonger la durée du travail hebdomadaire de 38 heures à 40 heures sans augmentation de salaire.

    Leterme ne semble pas se soucier de la résistance que vont susciter de telles atteintes aux conditions de travail et de salaire ainsi qu’aux droits des chômeurs. « Mieux vaut une adaptation en profondeur que laisser les choses suivre leur cours » (…) Même si ça doit susciter quelques remous en septembre et octobre. »

    De son côté, Frank Vandenbroucke (SP.a), ministre de l’enseignement flamand et promoteur de la chasse aux chômeurs, trouve lui aussi qu’il faut régionaliser l’emploi. Cela aboutira immanquablement à des différences dans les conditions d’accès au chômage, les critères d’ “emploi convenable”,…

    Tout cela doit remplir d’aise Karel Van Eetvelt, porte-parole de l’Union des Classes Moyennes flamandes (UNIZO) qui s’indigne qu’ “actuellement seuls 10% des milliers de chômeurs qui n’ont pas suffisamment cherché d’emploi ont été sanctionnés. Il y a obstruction au niveau national.”

    Régionaliser l’emploi servira donc à exclure plus de chômeurs en Flandre d’abord, en Wallonie ensuite.

    … et goût de l’effort

    Un autre candidat Premier ministre, c’est Elio Di Rupo. Il a surtout insisté sur le fait qu’il était peut-être temps qu’un francophone devienne Premier ministre. Malgré toutes les chamailleries et les problèmes internes, il ne ménage pas ses efforts pour former un front de tous les partis francophones.

    Le profil très flamand du CD&V lui facilite la tâche à tel point que la présidente du CDH Joëlle Milquet a déclaré : « sur le plan institutionnel, le CD&V n’est absolument pas notre parti frère, (…) les partis francophones sont ma famille politique. » En même temps, elle propose un “contrat collectif” qui obligerait chaque chômeur inscrit à suivre une formation.

    Le ministre wallon de l’emploi et de l’économie, Jean-Claude Marcourt, lui emboîte le pas avec son nouveau contrat de gestion pour le FOREm. Il y prône une « culture de l’effort » et une individualisation accrue de l’accompagnement des chômeurs, un doux euphémisme qui dissimule une pression accrue à accepter n’importe quel emploi.

    L’une et l’autre présentent leurs propositions, qui augmentent la concurrence entre salariés sur le marché du travail sans créer d’emplois, comme des alternatives aux revendications flamandes de régionalisation accrue de la politique de l’emploi. Di Rupo était satisfait du Manifeste du Citoyen de Verhofstadt parce qu’il y évitait toute surenchère communautaire. Verhofstadt y parle d’emploi, d’économie et du climat. « Nous sommes donc sur la même longueur d’onde », a déclaré di Rupo.

    Que Verhofstadt se succède à lui-même ou qu’il soit remplacé par Leterme ou di Rupo, il est déjà certains que les prochaines années seront encore marquées du sceau de la politique néolibérale qui consiste à économiser sur le dos des travailleurs et de leurs familles pour augmenter les profits des entreprises.

    Tests de popularité

    Vu que les partis traditionnels convergent sur l’essentiel, ils vont de nouveau mettre l’accent sur la forme. Les publicistes dominaient déjà la campagne pour les élections communales. Patrick Janssens a donné l’exemple. Le publiciste Noël Slangen lui a emboîté le pas en rejoignant le bureau du VLD. Mais les autres partis n’accordent pas moins d’importance à la perception.

    Michel Daerden (PS) a accédé à la renommée mondiale avec sa fameuse interview où il n’était manifestement pas en possession de tous ses moyens. Il a suffit de cette prestation comique à la télévision pour faire grimper en flèche la cote de popularité de Daerden. D’après un sondage de La Libre Belgique, il est maintenant le sixième politicien le plus populaire du côté francophone. Daerden s’appuie maintenant là-dessus pour revendiquer la tête de liste à Liège.

    C’est ainsi qu’on fait de la politique actuellement. L’image prime tout sans qu’elle ait besoin de la politique pour être façonnée. La popularité ne repose pas sur une politique, mais sur une image.

    Besoin d’une autre politique

    Face aux partis traditionnels et à l’extrême droite, nous avons besoin d’une autre politique. D’une politique qui rompe avec le néoliberalisme et qui soit du côté des travailleurs et de leurs familles. Après le mouvement contre le Pacte des Générations, c’est la conclusion qu’a tirée un groupe de militants syndicaux et politiques, de travailleurs, … Le Comité pour une Autre Politique (CAP) a été créé sur cette base.

    Le CAP présentera ses propres listes aux élections. Des pourparlers avec le PTB sur la possibilité d’un cartel dans la province d’Anvers ont buté sur la condition du PTB que Jef Sleeckx y soit lui-même candidat malgré ses 70 ans. Le PTB n’était intéressé que par le nom de Sleeckx. Nous pensons pourtant qu’on a besoin d’une autre politique qui parte de la base.

    Quand Jef Sleeckx a dit dans une interview qu’il y avait eu des discussions avec des militants de Groen !, certains médias ont aussitôt annoncé que le CAP négociait avec Groen !. Il n’y a pas de discussions prévues avec Groen !. La motion qui a été votée le 28 octobre dit clairement que le CAP ne collaborera pas avec des forces politiques qui participent ou ont participé à la politique néolibérale ou qui ont approuvé la Constitution européenne. Dans un cas comme dans l’autre, Groen ! peut se sentir visé à juste titre selon nous. Cela n’empêche pas que beaucoup de membres de Groen ! montrent de l’intérêt pour le projet du CAP.

    Ce type de réaction médiatique fait partie intégrante de la politique actuelle : beaucoup d’attention aux personnalités et aux petits jeux politiciens à visée électoraliste. Il ne manque plus que les demandes de participation à toutes sortes de programmes de divertissement à la télévision.

    Le CAP rompt avec cette politique avec un programme et une campagne où la solidarité occupe la place centrale. Solidarité avec toutes les victimes du système néolibéral: les ouvriers de VW qui doivent travailler plus dur ou pour moins cher, les usagers des bureaux de poste qui vont disparaître, les chômeurs qui se font radier, les travailleurs déjà financièrement exsangues à cause des prix élevés du logement et qui doivent payer plus cher leur électricité suite à la libéralisation,…

    Le MAS/LSP apportera sa pierre à la campagne électorale. Nous voulons nous atteler avec le CAP à la construction d’un large réseau de solidarité qui puisse renforcer la résistance à la politique néolibérale. Nous livrons en pages 6 et 7 des interviews sur l’état des lieux de la campagne du CAP : le programme, la campagne électorale, la construction d’une organisation nationale, …

  • En Wallonie et à Bruxelles aussi… Le CAP passe au sud

    Né en Flandre il y a un an, le CAP s’est aussi développé ces dernières semaines à Bruxelles et dans plusieurs villes de Wallonie. Nous en avons parlé par Jean Peltier.

    Une liste du CAP aux élections en juin. Une grande première ?

    Oui et non. Oui parce que c’est évidemment la première fois que le CAP présentera des listes et que celles-ci seront présentes partout dans le pays. Non, parce que, ces dernières années, il y a eu, du côté francophone, au moins deux autres expériences de liste unitaire qui se voulaient une alternative au PS et à Ecolo. En 1993, les grèves menées par la FGTB contre le Plan Global (un programme d’austérité imposé par le gouvernement Dehaene-Di Rupo) avaient déjà provoqué une grosse tension entre la gauche de la FGTB wallonne et le PS. En réaction, un nouveau mouvement s’était formé à l’initiative du PC, du POS, de syndicalistes FGTB, de féministes,… sous le nom de Gauches Unies. Mais il n’a guère tenu qu’un an.

    En 1999, Roberto d’Orazio, dirigeant de la lutte des Forges de Clabecq, a présenté une liste Debout aux élections européennes, qui regroupait surtout des syndicalistes et des militants des divers partis de la gauche radicale (PTB, POS, MAS, PC). Cette liste a réussi une belle percée (2%) et avait une ouverture plus grande vers les milieux populaires mais n’a pas eu de suite non plus.

    Le CAP semble néanmoins moins avancé au sud du pays qu’en Flandre…

    Oui, pour des raisons qui tiennent tant à la société qu’à l’histoire propre du CAP. En Wallonie et à Bruxelles, l’attitude du PS pendant la lutte contre le Pacte des Générations a ouvert de nouvelles brèches dans les rapports entre ce parti et de larges couches de syndicalistes FGTB. Mais l’évolution du PS vers la droite a été moins rapide et moins profonde que celle du SP.a, le fossé entre le parti et le syndicat est moins ouvert chez nous qu’en Flandre, le PS garde des liens – et un contrôle ! – plus forts avec l’appareil de la FGTB que le SP.a. De plus, malgré ses revers, Ecolo a mieux tenu le coup électoralement que Groen !. Et l’échec des partis traditionnels à lutter contre l’extrême-droite est plus criant en Flandre qu’en Wallonie,… L’espace pour construire une alternative à gauche du PS et des Verts est donc moins dégagé du côté francophone que du côté flamand. Mais si les premiers pas seront plus difficiles à faire, il est clair que la base sociale et les traditions de lutte – au sein des syndicats et de la population – sont plus grands au sud et que cela jouera par la suite.

    Le CAP a aussi démarré plus tard du côté francophone..

    Au début de 2006, une autre initiative – intitulée Une Autre Gauche – a été lancée du côté francophone parallèlement au CAP. Dans un premier temps, le MAS a pris part à cette initiative. Mais il est rapidement devenu clair pour nous que cette initiative avait une autre orientation que celle du CAP. Dans les faits, UAG ne vise pas comme le CAP à se tourner vers des couches larges pour redonner une voix aux travailleurs et à leurs familles mais elle reste tournée vers les petits « milieux » de la gauche radicale et des associations et, de plus, uniquement au niveau francophone . Nous en avons déduit après quelques mois qu’UAG était une impasse. Le MAS a donc pris ses responsabilités et a commencé à construire le CAP également en Wallonie et à Bruxelles, ce qui correspondait d’ailleurs à l’objectif de départ de Sleeckx, Van Outrive et Debunne qui souhaitaient dès le départ que se développe un mouvement national. En trois mois, des dizaines de personnes, non membres du MAS, ont déjà adhéré au CAP et ce n’est qu’un début…

  • “Il faut aussi une autre campagne électorale”

    Le CAP se prépare pour les élections du 10 juin. Les médias flamands ont semé pas mal de confusion à propos de cette participation électorale. Raison suffisante pour faire le point avec Bart Vandersteene qui est actif au sein de l’équipe de campagne du CAP et qui est en même temps membre du Bureau exécutif du MAS/LSP.

    Les médias ont parlé d’une collaboration avec le PTB qui a tourné court et de discussions avec les écologistes flamands de Groen !. Qu’en est-il finalement ?

    Lors de la conférence du 28 octobre, il a été dit expressément que le CAP examinerait les possibilités de collaborer avec d’autres forces dans la résistance à la politique néolibérale.

    Du fait qu’à gauche, la conscience politique est en pleine croissance, certains milieux syndicaux ont fait part de leur intérêt d’avoir une discussion avec le CAP comme avec le PTB. Nous y avons évidemment donné suite mais il est vite apparu que le PTB n’était intéressé que par la figure de Jef Sleeckx et son potentiel électoral. Le CAP en soi n’intéressait pas le PTB qui a réduit à néant toute possibilité de cartel lorsqu’il est apparu que Jef Sleeckx ne serait pas candidat.

    Le PTB a diffusé un communiqué de presse à ce sujet qui a été à l’origine d’une série d’articles dans plusieurs journaux et magazines flamands. Plusieurs articles ont fait part de l’intention du CAP de parler avec Groen !. Or, il n’en était rien , même s’il y avait eu quelques discussions individuelles avec des militants verts qui se sentaient interpelés par le projet du CAP.

    Toujours est-il que la nouvelle a incité Vera Dua, présidente de Groen ! à prendre contact avec Jef Sleeckx et le CAP. Elle a proposé qu’il y ait une « bande rouge » de candidats du CAP qui occuperaient les mêmes places sur toutes les listes de Groen !

    Il se peut qu’au sein du CAP, les avis soient partagés sur cette proposition mais, pour le MAS/LSP, il est clair que ce ne serait pas un pas en avant. Collaborer avec un parti traditionnel qui n’a jamais renié sa participation à une politique néolibérale ou son soutien à la Constitution européenne reviendrait selon nous à enterrer le projet du CAP.

    Le CAP est justement né du constat de la nécessité d’une nouvelle formation politique qui opte pour une autre politique et qui, par exemple, refuse de convoiter des postes dans une optique purement électoraliste.

    Comment le CAP peut-il aller aux élections dans les meilleures conditions ?

    Lors des assemblées provinciales en décembre, il y avait partout un grand enthousiasme pour aller aux élections avec des listes CAP. La présence d’un maximum de listes provinciales à la Chambre à côté des listes pour le Sénat constituerait un signal fort. Le MAS/LSP plaidera dans ce sens lors des assemblées nationales et locales du CAP.

    Les élections constituent un moment privilégié où un public plus large s’intéresse à la politique, ce qui offre des possibilités de mieux populariser l’idée qu’on a besoin d’une autre politique.

    Qu’est-il possible d’obtenir avec cette participation électorale ?

    D’entrée de jeu, il convient de préciser que la campagne électorale ne peut pas être une campagne traditionnelle. Lorsque Jef Sleeckx dit qu’il faut une autre politique, on peut en dire autant de la campagne électorale.

    Le MAS/LSP est pour une campagne qui parte d’actions concrètes : des actions locales contre la fermeture de bureaux de poste, des campagnes sur le logement ou des actions autour du changement climatique. Il ne s’agit là que de quelques points d’action parmi d’autres mais le CAP peut, à travers ces actions, rendre plus clair que sa politique est effectivement différente de celle des partis traditionnels.

    Le CAP doit, selon nous, orienter sa campagne de façon à organiser dans des groupes locaux cette couche plus large qui s’insurge contre le néolibéralisme. A partir de ça, le projet d’un nouveau parti pourra démarrer après les élections.

    Le CAP n’espère pas avoir des élus le 10 juin ?

    Non, ça ne sera probablement pas encore le cas. Nous demanderons évidemment à un maximum de gens de voter pour le CAP. Mais nous devons être réalistes et constater que nous avons encore trop de carences en termes d’implantation, de moyens financiers et de renommée pour pouvoir franchir dès à présent le seuil – complètement anti-démocratique – des 5%.

    Ce n’est pas un problème en soi, ça nous donne plus de temps pour construire une alternative politique. Cela rend aussi d’autant plus clair que nous ne sommes pas en quête de postes ou de mandats grassement payés. Les actions que le CAP mènera pendant la campagne électorale donneront le ton des actions qui suivront dans les années à venir.

  • Des primes de départ jusqu’à 144.000 euro. VW: la direction achète la lutte, mais la pilule reste amère

    Plus de 1.200 travailleurs de VW ont décidé de quitter “volontairement” l’entreprise en échange d’une prime de départ exceptionnelle. Ainsi, le chant du cygne de VW à Forest, une des rares icônes restante du syndicalisme de combat, semble avoir commencé. Apparemment, les 1.500 primes de départ que VW veut bien accepter seront facilement dépassés les jours prochains. La hauteur des primes est due aux traditions de lutte au sein de l’entreprise.

    Eric Byl

    Mais il est regrettable d’avoir misé si tôt sur des primes de départ avant qu’il n’y ait de clarté sur l’avenir de l’entreprise et sans que le sort des nombreux emplois perdus chez les sous-traitants ne soit réglé. Voici une analyse critique et quelques suggestions pour l’avenir.

    Une réaction compréhensible

    La réaction de beaucoup de travailleurs n’est pas une surprise. Ces dernières années, les conditions de travail à VW sont devenues intenables et, de plus, l’avenir de l’entreprise reste incertain. Les larmes de crocodiles des dirigeants nationaux des syndicats n’ont pas été de nature à convaincre les travailleurs qu’ils allaient se battre de façon conséquente pour chaque emplois. Ne parlons même pas d’une mobilisation de l’ensemble de la classe ouvrière Belge…

    Le fait que l’assemblée du personnel du 22 novembre s’est terminée en renvoyant tout le monde chez eux avec le message qu’ils seraient informés par les médias était déjà un mauvais signe. L’absence totale de mots d’ordre à la fin de la manifestation de solidarité internationale du 2 décembre a confirmé le soupçon que la lutte pour chaque emplois était exclue avec de tels dirigeants. Qui peut reprocher dans ces conditions aux travailleurs de choisir la moindre douleur? Quelques dizaines de travailleurs nous ont expliqué pourquoi ils ont finalement signé.

    Bruno: “Cela fait 18 ans que je travaille à VW, la prime s’elève dans mon cas à environ 100.000 € brut. Même si après les taxes il n’en restera que 50.000 €, je devrais encore épargner pendant 20 ans 250 € chaque mois pour y arriver. Je considère comme exclu que VW puisse tenir encore 20 ans ici.” Son collègue, qui à 26 années de travail à VW déclare: “Je suis au maximum, je plains ceux qui vont rester, car ils vont souffrir.” Au café Le Cox, en face de l’usine, ceux qui n’ont pas (encore) signé font figure d’exception. Les travailleurs ont fait la part des choses, et ils savent compter, “ici vous voyez beaucoup d’argent”, nous raconte l’un d’entre-eux en souriant pendant qu’il regarde autour de lui “6 millions de franc belges, 4 millions, 3 millions, encore une fois 3 millions, 2 millions, et moi 4 millions”. L’ironie ne nous a pas échappé.

    Fermeture où scénario bien élaboré ?

    Ceci confirme ce que Jacques Guilmot nous avait raconté dans le bus de solidarité du Comité pour une Autre Politique (CAP) garé au picket. Jacques est un de ces délégués exemplaires qui jadis ont essayé de construire le caractère combatif de VW à Forest. Il avait abandonné son mandat syndical et retravaillait de nouveau à la chaîne ces dernières années, “afin de renforcer le contact avec la base”. Il le faisait parce qu’il “savait que des choses allaient se passer et que les délégués puisent leurs forces des travailleurs mêmes”. A VW, il y a environs 60 permanents syndicaux, le résultat d’accords dans l’industrie automobile, avec comme effet néfaste qu’un fossé s’est creusé entre beaucoup de délégués et la base.

    Jacques nous a raconté que selon lui VW n’avait pas du tout l’intention de fermer le site, mais de transformer l’usine à Forest “en modèle en termes d’assainissements sur les salaires et les conditions de travail”. C’est justement ce qui est sur table: allongement du temps de travail et au moins 20% d’économies sur les coûts salariaux. En attendant la possibilité d’attribuer la production de l’Audi A1 qui n’est encore qu’au stade de la table à desssin, trois scénarios sont mis en avant: plus de Polos, une partie des Golfs ou encore des Audi A3. La décision qui concernera les 3.000 travailleurs restants ne serait que pour plus tard dans la semaine. Selon nous, il aurait été mieux de faire dépendre l’accord sur les primes de départs de garanties sur les salaires et les conditions de travail des 3.000 qui restent, entre autres.

    Des temps difficiles

    Ce ne seront d’ailleurs pas que les 3.000 travailleurs qui resteront qui auront à souffrir. On estime que d’une prime de départ de 144.000 €, il n’en reste après taxation que 57.600 € (*). Agoria et les organisations patronales belges sont furieux. Ils n’osent pas imaginer que d’autres délégations syndicales et travailleurs puisse prendre ces montants comme référence. A Renault Vilvorde, en 1997, la prime pour un travailleur ayant 20 années d’ancienneté n’était que de 25.000 € brut (**), autant que VW est prêt à payer pour des intérimaires qui partent volontairement! A Imbev, plus tôt cette année, la prime, de nouveau pour un travailleur avec 20 années d’ancienneté, était de 42.100 € brut. Certains travailleurs de VW espèrent que le gouvernement va partiellement décharger les primes. Ce n’est pas totalement exclus, mais maintenant que la délégation a ouvert les portes et que beaucoup de travailleurs en ont profité pour partir, les relations de forces nécessaires pour arracher cela sont minées.

    Le gouvernement aurait déjà fait des concessions sur le Pacte des Générations pour les plus de cinquante ans : ils pourraient partir en prépension à condition d’avoir tout fait durant 6 mois pour retrouver un boulot. Nous sommes curieux de savoir comment on pourra juger cela d’ici 6 mois. De toute façon, beaucoup de ceux qui partent doivent s’attendre à des temps difficiles. Qui retrouve un boulot devra accepter une réduction de salaire, probablement beaucoup plus que 250 € par mois. A VW, on est habitué à une force syndicale importante, ce qui sera généralement inexistant chez le nouvel employeur. Au cas où ils ne trouvent pas d’autre emploi, la prime sera vite dilapidée et quand ils seront interrogés par le service de chômage et devront subir les humiliations qui y sont fréquentes, beaucoup d’entre eux regretteront qu’aucune lutte pour la préservation de chaque emploi n’ait été menée.

    Les travailleurs des sous-traitants au placard

    Chez les travailleurs des sous-traitants, la frustration n’a fait que monter après le départ de beaucoup de travailleurs de VW. Certains d’entre eux travaillent depuis 20 ans au site de Forest. Leurs patrons ne seront jamais prêts à payer de telles primes de départ. Il parait que VW aurait prévu une enveloppe pour eux, mais il faut encore en négocier le contenu et les relations de forces pour cela sont minées. Durant tout le conflit, nous avons été frappés par l’habitude de la délégation de se réunir généralement à huis clos au lieu d’impliquer au maximum les travailleurs, comme lors de la lutte à Clabecq ou dans d’autres conflits. Encore pire, les délégations des travailleurs des sous-traitants n’ont pas pu participer à ces réunions et démeuraient donc en général dans l’incertitude sur les derniers développements. Maintenant que les travailleurs de VW sont partis, ils perdent leur plus puissant allié. En ce sens, il aurait été préférable que les délégations de VW attendent qu’une solution pour toutes les catégories de travailleurs, y compris ceux des sous-traitants, soit trouvée avant de lâcher les primes de départ.

    Aucun choix

    Beaucoup de travailleurs nous disent qu’ils ne pouvaient tirer qu’une conclusion après l’assemblée du personnel: “game over”. Le MAS est pourtant convaincu que ce n’était pas le seul scénartio possible. Avant l’été déjà, nous avions distribué un tract à VW sur la possibilité d’une restructuration et la nécessité de se préparer puisque “la faiblesse mène à l’agression patronale”. La délégation de VW, par contre, confirmait sa confiance dans la parole donnée par la direction. Nous pensons qu’une campagne de sensibilisation aurait été préférable. Lorsque la direction de l’entreprise chimique anversoise Lanxess, une scission de Bayer comprenant un bon millier de travailleurs, a annoncé le 17 octobre la scisson de l’entreprise en 3 unités, les délégations syndicales ont commencé une campagne d’information. Des calicots ont été placés dans l’entreprise, les délégations ont distribués à 5 reprises des tracts, ils ont pris la parole et organisés des grèves éclairs. Resultat: un bon mois plus tard, le 4 décembre, la direction à annulé son projet. Cela ne signifie pas qu’une telle stratégie aurait aussi à VW et mené à des résultats spectaculaires, mais du moins les travailleurs auraient été mieux préparés.

    Il est évidemment difficile de faire revenir en arrière une multinationale comme VW sur son plan industriel. Il est même exclu de réaliser cela sur base de la force seule des travailleurs de VW. Mais les travailleurs de VW ont une tradition de solidarité avec d’autres entreprises. Ce sont eux qui, en ’96, ont contribué au mouvement autour de l’affaire Dutroux en marchant vers le palais de justice. Cela n’est pas encore oublié et le sentiment de solidarité avec les travailleurs de VW était fort étendu. Une grève de solidarité de 24 heures dans tous les secteurs ou au moins des interruptions de travail aurait été acceuillie avec enthousiasme dans toute grande entreprise en Belgique. Il y avait un potentiel pour moboiliser toute la classe ouvrière et toute l’opinion publique et faire de VW-Forest un pôle d’attraction international qui aurait pu changer le rapport de force plus largement qu’à l’entreprise seule. VW-Forest avait le potentiel de signifier pour le mouvement ouvrier ce que la grève des mineurs en Grande-Bretagne en ’85 signifiait pour le patronat européen: le début d’une offensive contre l’agression du patronat européen.

    Il faut rompre les liens avec la social-démocratie et les sociaux-chrétiens

    Nous n’y sommes pas arrivé et ne pouvons le reprocher aux délégations syndicales de Forest. Nous ne savons pas ce qui a été discuté entre les délégations de Forest et les instances nationales. Ces dernières sont pieds et poings liés à la social-démocratie et aux sociaux-chrétiens qui sont, avec les libéraux, les principaux exécuteurs du néo-libéralisme. Pour forcer une multinationale comme VW à faire des concessions, il faut lui mettre l’épée dans les reins, non pas en exigeant la réstitution des subsides donnés, car la direction le compenserait au dépends des travailleurs VW à l’étranger et les monterait en même temps contre les travailleurs belges – ce qui reduirait la force de tous les travailleurs- mais si nécessaire par la nationalisation de l’usine et la reconversion de la production vers une production écologiquement justifiée.

    Nous ne voyons pas comment un Vande Lanotte, un Vandenbroucke ou un Di Rupo et une Onckelinkx pourraient y être poussés. Cela nécessite un nouveau parti, véritablement du côté des travailleurs. Le MAS y travaille, en collaboration avec Jef Sleeckx entre autres, au sein du Comité pour une Autre Politique.

    Préparer le match retour

    La direction de VW a réussi son coup. 2.800 des 5.800 emplois sont supprimés et les travailleurs restants perdront beaucoup de leurs salaires et de leurs conditions de travail. Les travailleurs ont marqués un but avec des primes de départ sans précédent, probablement calculées à l’avance par la direction. Le match est à 2 contre 1. Mais il faudra encore jouer beaucoup de parties et nous ne pouvons pas nous démoraliser. Il faut tirer les leçons de la lutte précédente et préparer celles à venir. Les travailleurs de VW ont une tradition de lutte, gardons-la pour ceux qui travailleront encore demain à VW et introduisons surtout avec quelques milliers des anciens travailleurs de VW cette tradition chez les futurs employeurs. Construisons ensemble dans le Comité pour une Autre Politique une force politique tout à fait indépendante du patronat et renforçons le MAS pour que, pas à pas, entreprise après entreprise, nous puissions construire une force qui dévoile la stratégie des patrons et qui soit capable d’y répondre.


    (*) selon le cotidien “Het Volk” du 10/12/2006 “Voir d’abord ce qui en reste”

    (**) un ancien de Renault qui travaille aujourd’hui à la STIB nous raconte qu’après taxes, il lui restait 300.000 frb de cette prime.

  • Le CAP participera aux élections fédérales

    Après le succès du 28/10

    Les élections aux Pays-Bas ont démontré, s’il en était encore besoin, qu’il y a un espace pour un parti à la gauche de la social-démocratie et des Verts (voir page 3). Nombre de ceux qui voulaient donner de la voix contre la politique néolibérale ont donné leur voix au Socialistische Partij qui traduisait le mieux politiquement leur résistance contre cette politique. Le Comité pour une Autre Politique (CAP) a pour but de créer un parti qui jouerait un rôle analogue en Belgique.

    Bart Vandersteene

    Comment avancer ?

    La Conférence pour une Autre Politique du 28 octobre était un test important. La question centrale était celle de savoir si l’appel à une nouvelle initiative politique lancé par Jef Sleeckx, Lode Van Outrive et Georges Debunne trouverait un écho suffisant. L’affluence de 650 personnes (voir ‘Alternative Socialiste’ de novembre) et les nombreuses réactions positives reçues depuis lors démontrent que les temps sont mûrs pour un nouveau parti des travailleurs.

    Lors de la réunion d’évaluation du 6 novembre, les participants ont émis un bilan critique positif et ont décidé de poursuivre le travail sous la forme concrète d’une campagne électorale nationale.

    Certains ont émis des doutes sur la faisabilité d’une vraie participation électorale, mais tout le monde est d’accord sur le fait que les élections de l’année prochaine sont, sur le plan politique, un rendez-vous à ne pas manquer. Cette campagne doit mettre l’idée d’un nouveau parti à l’ordre du jour.

    Le CAP n’a pour l’instant qu’une structure limitée, peu de moyens et un programme inachevé. Il ne faut donc pas s’attendre à des scores électoraux spectaculaires qui franchiraient le seuil électoral des 5%. Mais la campagne électorale est le moyen par excellence de construire le CAP au niveau national, de mettre sur pied des groupes locaux, d’interpeller un large public et d’élargir fortement la base de l’initiative.

    Nombre de gens verront dans les élections de 2007 l’occasion de régler les comptes avec la coalition violette. Mais qu’y a-t-il comme alternative à ce gouvernement ? Pour qui doivent voter les gens qui réalisent que la rhétorique du PS et du SP.a ne sert qu’à masquer un cours résolument néo-libéral ? Pour qui doivent voter les travailleurs de VW, d’Agfa Gevaert et des nombreuses autres entreprises en « restructuration » afin d’exprimer leur mécontentement face à la politique menée actuellement ?

    Ces questions doivent figurer à l’agenda lors des prochaines élections. Le CAP est l’expression du potentiel politique que la lutte contre le Pacte des Générations a libéré. La non participation aux élections serait une importante occasion manquée.

    Oeuvrer pas à pas à la construction d’une nouvelle formation politique

    Un nouveau parti ne peut pas tomber du ciel. Il se développe dans les luttes sociales et pas dans les salles de réunion sombres et enfumées où se complaît une partie de la gauche.

    Depuis le 28 octobre, le CAP a tenté à plusieurs reprises de se concerter avec Une Autre Gauche (UAG), l’initiative francophone avec laquelle il a coorganisé la journée du 28/10, pour déterminer les prochaines étapes.

    Le secrétariat d’UAG a fait lanterner le CAP pendant un mois sous prétexte que seule l’assemblée générale d’UAG le 25 novembre pourrait prendre des décisions et qu’il ne pouvait conclure le moindre accord avant ça. Cette assemblée d’UAG a révélé les profondes divergences d’opinion entre le CAP et UAG et montré que les deux initiatives prenaient des chemins de plus en plus séparés : là où le CAP veut poursuivre un processus de construction graduelle par en bas et à travers les interventions dans la lutte, UAG préfère parachever ses structures, son programme, sa charte, … avant d’aller vers l’extérieur.

    Le CAP préfère oeuvrer systématiquement à la construction d’une nouvelle organisation sur base de campagnes concrètes plutôt que de mettre la charrue avant les boeufs en appelant à rejoindre une nouvelle organisation politique qui n’existe pas encore dans les faits.

    Les militants du MAS/LSP sont d’accord avec cette méthode et s’engagent pleinement à faire du CAP un instrument pour la classe des travailleurs.

    Prochaine étape : le 3 février

    Le 6 novembre, une équipe de campagne nationale a reçu mandat d’organiser une nouvelle réunion nationale le 3 février. Les participants y approuveront le programme électoral, choisiront le nom de la liste et donneront le coup d’envoi de la campagne électorale. D’ici là, des assemblées générales provinciales devront discuter s’il y a une assise suffisante pour présenter des listes aux élections législatives dans leur région.

    2007 s’annonce comme une année chargée sur les plans politique et social. Une longue crise du néolibéralisme et de ses institutions et partis s’ouvre devant nous. Le CAP a le potentiel de lancer un nouveau parti pour les travailleurs et leurs familles. Le MAS/LSP fera de son implication dans le CAP une priorité – sans négliger pour autant la construction de sa propre organisation – afin de saisir cette occasion historique.

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