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Tag: Irlande
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[DOSSIER] Comment le OUI a-t-il remporté le référendum irlandais sur l’avortement ?

Le référendum sur la suppression de l’interdiction constitutionnelle de l’avortement (le 8e Amendement) qui s’est tenu le 25 mai dernier a abouti à une éclatante victoire pour le camp du OUI. 66,4 % des participants au référendum se sont prononcés en faveur de son abolition contre 33,6 % dans le camp opposé, alors que le taux de participation était de plus de 64 %, soit le taux le plus élevé jamais enregistré pour un référendum en Irlande. Ce résultat est quasiment l’exact opposé de celui de 1983 qui a imposé l’interdiction de l’avortement. Mais, cette fois, près d’un million de personnes de plus y ont participé. Le gouvernement a déclaré avoir l’intention de légiférer pour permettre l’avortement jusqu’à 12 semaines sans conditions, conformément aux propositions de l’Assemblée citoyenne (mise en place en 2016 pour débattre de l’IVG, NDT). Cela ne peut être interprété que comme un puissant vote pro-choix.Les politiciens de l’establishment et les médias essaient désespérément de réécrire la véritable histoire de la lutte radicale qui a donné naissance à ce changement. Ce qu’ils redoutent par-dessus tout, c’est que la population en tire confiance et réalise qu’elle est capable d’organiser par elle-même de puissantes luttes de masse sur toutes les questions clés de société et même d’entrer en confrontation ouverte avec l’ensemble du système capitaliste lui-même, un système qui repose sur le principe de l’inégalité.

Ruth Coppinger prend la parole à un rassemblement au lendemain de la tenue du référendum. “Nous sommes rentrés dans l’Histoire!” Ruth Coppinger – membre du Socialist Party et députée de Solidarity (un mouvement plus large auquel participe le Socialist Party et qui dispose actuellement de trois élus au Parlement irlandais : Ruth Coppinger, Paul Murphy et Mick Barry) – a été consciemment exclue des médias nationaux durant la durée de la campagne alors qu’elle est une des figures clés du mouvement. Cet article, écrit par des membres du Socialist Party, tente de remettre les pendules à l’heure. Au côté d’autres activistes, le Socialist Party a joué un rôle vital dans la campagne nationale de ROSA (for Reproductive rights, against Oppression, Sexism & Austerity) dont l’impact a été considérable. Le Socialist Party et ROSA ont également fait partie du groupe Together4Yes.
Document du Socialist Party (section irlandaise du Comité pour Internationale Ouvrière)
35 ans après le précédent référendum sur la question, l’envie de se débarrasser du 8e amendement à la Constitution était largement partagée. On trouvait peu de contrastes entre les villes et les campagnes, car les attitudes avaient également changé dans les petites villes et les zones rurales. Une seule circonscription a voté NON alors qu’en 1983, toutes avaient dit OUI à l’interdiction, sauf une. Même dans la province de Connaught/Ulster, traditionnellement la plus conservatrice, la question a été nettement tranchée avec 59% en faveur du OUI et 41% pour le NON.
Le OUI a été particulièrement représenté dans les zones urbaines. Dans la plupart des villes, le OUI se situait aux alentours des 70 %. 9 des 10 circonscriptions les plus favorables au OUI étaient à Dublin, l’autre étant celle de Wicklow, à 74,26 %. Le pourcentage global de OUI à Dublin était de 75,5 %. Dans le quartier dublinois de Stoneybatter, composé de communautés ouvrières ainsi que d’une nouvelle population plus jeune qui s’installe dans la région, le vote a été de 92% en faveur du OUI.
Le OUI a été très marqué dans la classe moyenne et la classe ouvrière. Les chiffres indiquent qu’il est plus élevé dans le premier cas, bien qu’au cours de la campagne, il était évident que le sentiment sur la question était plus fort parmi la classe ouvrière, dont les femmes ont été au cœur de la révolte.
Les jeunes femmes au coeur de la lutte
65% des hommes et 70% des femmes qui ont voté l’ont fait en faveur du OUI. Dans l’ensemble, 87 % des participants de moins de 25 ans ont voté OUI et 90 % des jeunes femmes ! Au cours de ces dernières années, ce sont les jeunes femmes qui ont constitué la force motrice de ce mouvement et tout particulièrement durant la dernière phase, celle de la campagne référendaire elle-même (le référendum s’est tenu le 25 mai 2018 et avait été annoncé en janvier de la même année, les modalités ayant été définies en mars, NDT).
En comparaison des dernières élections générales de 2016, le nombre de jeunes femmes qui ont participé au vote a massivement augmenté de 94%. Les jeunes transgenres et les élèves du secondaire étaient également au premier plan et le journal dublinois Gay Community News (GCN) a estimé que 91 % des membres de la communauté LGBTQI+ qui ont voté l’ont fait en faveur du OUI.

La campagne ROSA a mené une intense campagne, autour de manifestations, d’action, d’affichages, mais aussi de stands de sensibilisation tenus en rue. Ce changement est le fruit d’intenses années d’efforts et la campagne formelle elle-même a été longue, étalée sur deux mois, à partir de la fin du mois de mars, lorsque le gouvernement a officiellement signé l’arrêté fixant les modalités du référendum.
Dès le lancement de la campagne, le camp du NON s’est fait remarquer par des affiches misogynes dégoûtantes avec des photos de fœtus et des titres qui criaient ‘‘Permis de tuer ? Votez non’’, ‘‘Ne choisissez pas la mort – Votez non’’, ‘‘En Angleterre, 1 bébé sur 5 est avorté – Votez non’’, ‘‘Si tuer un enfant à naître au bout de six mois vous dérange, alors votez non’’.
Mais, le 25 mai, les électeurs ont rejeté sans la moindre équivoque possible la campagne extrêmement bien financée du NON (qui disposait notamment de ressources et de publicités liés à la droite religieuse américaine). Ce référendum a fait des vagues partout à travers le monde entier.
Le média en ligne américain Vox a déclaré : ‘‘Le sentiment favorable à l’abrogation était particulièrement élevé parmi la jeunesse et les électeurs urbains, suggérant qu’une nouvelle majorité de gauche et laïque avait supplanté les générations plus âgées catholiques plus conservatrices’’.
De profonds changements
Ce résultat reflète les changements survenus en Irlande au cours de ces dernières décennies. En fait, l’amendement de 1983 à la Constitution était dans un sens un coup politique de la part de la droite cléricale et des politiciens conservateurs avec le soutien de l’Église. Ils craignaient que l’Irlande change ses attitudes sociales et se sont donc précipités pour obtenir une interdiction de l’avortement avant qu’il ne soit trop tard.
Le monde, et avec lui la société irlandaise, a énormément changé depuis lors. Mais la société officielle irlandaise et l’establishment politique ont refusé de refléter ce changement par des modifications significatives de la Constitution et de la législation. L’ampleur du changement qui a été imposé à l’establishment politique est indiquée par le fait qu’il y a tout juste cinq ans, la Loi sur la protection de la vie durant la grossesse est entrée en vigueur et que cette loi prévoyait que toute personne qui pratiquait un avortement pouvait être emprisonnée pendant 14 ans !
Après 1983, l’existence du 8e amendement et la domination de la politique par les partis conservateurs (y compris lorsque les travaillistes sont devenus membres de l’establishment dans les années 1990) ont fait en sorte que beaucoup de personnes ont eu le sentiment de devoir, à contrecœur, accepter cette ‘‘solution irlandaise hypocrite à un problème irlandais’’, c’est-à-dire que l’avortement ne serait pas autorisé en Irlande dans un avenir proche au motif que les gens pourraient se rendre en Grande-Bretagne pour y pratiquer l’avortement.
Mais, en 1992, il y a eu le “cas X”, dans laquelle une mineure violée a d’abord été empêchée de se rendre en Grande-Bretagne pour un avortement, mais y a ensuite été autorisée, après que la Cour suprême décide que le 8e amendement autorisait l’avortement lorsqu’il y avait menace pour la vie de la mère. Toutefois, l’interdiction est restée fondamentalement intacte.
Les jeunes femmes qui ont grandi dans les années 90 et 2000, à l’époque du ‘‘Tigre celtique’’ (terme qui désigne l’Irlande pendant la période de forte croissance économique entre les années 1990 et 2001-2002, en référence aux ‘‘Tigres asiatiques’’ des années ‘80 et ‘90), ne l’entendaient cependant pas de cette oreille. De plus en plus de voix se sont élevées en faveur de l’émancipation des femmes et d’un État laïque moderne, ce qui signifiait le droit de décider sur son corps et le droit à l’avortement. Depuis lors, les jeunes femmes ont été une dynamique clé pour faire avancer la société irlandaise.
Savita – le premier point tournant

Affiche de la campagne ROSA : “Savita compte. les femmes comptent.” Le tragique décès de Savita Halappanavar en octobre 2012 à l’hôpital universitaire de Galway a constitué un moment extrêmement important. Savita a été trouvée éprouvant des douleurs intenses en train de faire une fausse couche. Elle a demandé qu’un avortement soit pratiqué, mais celui-ci lui a été refusé. La décision prise dans l’affaire X précise que l’avortement ne peut être autorisé que lorsqu’il y a “un risque réel et substantiel” pour la vie d’une femme.
En plus de dire que la santé d’une femme n’a pas d’importance, cette position juridique signifie que dans le temps nécessaire pour juger ou décider qu’il y a bien un “risque réel et substantiel” pour la vie, les conditions de santé peuvent empirer et il peut donc être trop tard. En fin de compte, la décision dans l’affaire X n’offrait aucune garantie aux femmes, et Savita n’aurait été sauvée que si on lui avait permis de recourir à l’avortement lorsqu’elle en avait fait la demande.
La mort de Savita a suscité une énorme colère et des dizaines de milliers de jeunes, en particulier des jeunes femmes, se sont mobilisés pour exiger des changements. La position généralement partagée par nombre de militants de longue date et éminents du mouvement pro-choix et pour le droit à l’avortement à l’époque était d’exiger que la décision prise dans le “cas X” soit légiférée, pour aider à formaliser et clarifier ce qui était permis dans le 8ème amendement.
Le Socialist Party, en particulier par l’intermédiaire de Ruth Coppinger, alors conseillère municipale, a adopté une position totalement différente en affirmant que l’abrogation immédiate du 8e amendement était nécessaire pour donner rapidement lieu à une législation prévoyant le droit à l’avortement. Ces idées ont reçu une réponse très forte de la part des jeunes femmes mobilisées par la mort de Savita.
En réponse à la mort de Savita et à la crise politique qu’elle a créée, le gouvernement Fine Gael – parti travailliste a adopté la loi sur la protection de la vie pendant la grossesse mentionnée ci-dessus, qui n’a fait que mettre dans la législation la décision limitée de 1992. C’était tout à fait insuffisant. Les mobilisations de la jeunesse, et des jeunes femmes en particulier, contre les terribles mauvais traitements et l’injustice dont Savita a souffert ont changé la dynamique. C’était le début du mouvement vers l’abrogation qui a culminé avec le vote en faveur du OUI le 25 mai dernier.
Accroître la pression politique
En 2014, il devenait de plus en plus accepté dans le mouvement que le 8e amendement devait être abrogé immédiatement. Ce sentiment a considérablement été renforcé lorsque Ruth Coppinger a remporté l’élection partielle dans la circonscription de Dublin-Ouest en mai 2014 et est entrée au Dáil (le parlement), rejoignant ainsi Joe Higgins. Elle a été rejointe par deux autres députés, Paul Murphy qui a remporté une élection partielle historique en octobre 2014 et Mick Barry, élu en 2015. Ruth Coppinger, au nom de l’Anti Austerity Alliance (AAA, précurseur de Solidarity) et du Socialist Party a présenté divers projets de loi concernant l’avortement, l’abrogation de l’interdiction et des cas d’anomalies fœtales mortelles. Cela a instauré de nouvelles pressions sur le gouvernement. Sa réponse a été de mettre en place une Assemblée citoyenne chargée d’élaborer des propositions concernant l’avortement.
Le gouvernement espérait que cette Assemblée ne présente que des propositions permettant l’avortement dans des circonstances exceptionnelles. L’Assemblée étant constituée d’une centaine de personnes ordinaires de la population, le gouvernement entendait donc mettre ensuite l’accent sur la composition de l’Assemblée pour dire que l’ampleur du changement accepté plus largement dans la société ne dépassait pas ce cadre.
L’Assemblée a toutefois représenté les changements qui étaient déjà à l’œuvre dans la société irlandaise. Ses recommandations étaient vigoureusement pro-choix. Parmi celles-ci : l’autorisation de pratiquer des avortements sur demande jusqu’à 12 semaines et pour des raisons socio-économiques jusqu’à 22 semaines. Ces recommandations devaient être envoyées à une commission (parlementaire) qui, à son tour, devait envoyer un rapport au gouvernement.

Pas de recul face aux propositions de l’Assemblée des Citoyens
Sachant que ce serait un champ de bataille où, comme l’a dit un journaliste, le travail de la commission ‘‘serait essentiellement de diluer les propositions au point qu’elles ne soient pas politiquement toxiques’’, Ruth Coppinger, en tant que membre de la commission représentant Solidarity et le Socialist Party, s’est attelée à la tâche d’accroître la pression pour accepter la proposition des 12 semaines sur demande. Si l’on pouvait faire pression sur la commission pour qu’elle l’accepte, cela permettrait de prendre en charge 92 % des grossesses en situation de crise affectant les gens du Sud (l’avortement étant encore illégal en Irlande du Nord).
La commission parlementaire s’est réunie à l’automne dernier et a publié son rapport final juste avant Noël. Grâce à la pression incessante émanant du mouvement des jeunes femmes, qui avait reçu une attention toute particulière de la part de Ruth Coppinger, la commission a soutenu la proposition de l’Assemblée citoyenne pour permettre l’avortement à la demande jusqu’à 12 semaines.
De son côté, le gouvernement a déclaré qu’il publierait les grandes lignes de la législation 12 semaines avant la tenue d’un référendum visant à abroger l’interdiction, de sorte qu’il n’y aurait pas de confusion quant à ce qui serait mis en œuvre en cas d’abrogation.
Les pilules abortives – le deuxième point tournant
L’establishment politique se trouvait face à un sérieux dilemme. Il était clair que maintenir le statu quo n’était plus tenable, mais ils étaient très hésitants quant à la marche à suivre. Le 8ème Amendement continuait à créer des injustices flagrantes et parfois même des crises politiques qui menaçaient les gouvernements et la base des partis. Il était nécessaire de se défaire de cette source d’instabilité.
Mais, parallèlement, l’establishment ne désirait pas endosser la responsabilité de la mise en œuvre du droit à l’avortement. Son approche était généralement très timide en redoutant de saper sa base de soutien. Permettre un droit limité à l’avortement dans un contexte de changement d’attitude sur le sujet allait toutefois vraisemblablement créer des situations et des crises plus inacceptables encore. En fin de compte, ce sont les pilules abortives qui ont pris la décision pour la commission.
Depuis 2014, le mouvement féministe socialiste ROSA, initié par le Socialist Party, s’est engagé dans une série d’actions extrêmement médiatisées qui ont créé une prise de conscience au sujet des pilules abortives, illégales en Irlande mais entièrement sûres et pouvant être auto-administrées.
ROSA a notamment organisé un ‘‘train des pilules abortives’’ et des bus qui ont parcouru le pays (en référence au ‘‘train de la contraception’’ de 1971, quand un groupe de féministes s’était rendu à Belfast y acheter des préservatifs pour les ramener en république irlandaise et défier l’Etat de les arrêter, NDT). Au moment où la commission parlementaire était en pleines délibérations, des études ont montré que, quotidiennement, 10 Irlandaises se rendaient chaque jour à l’étranger pour y bénéficier d’un avortement tandis que 5 prenaient des pilules abortives en Irlande. Cela signifiait concrètement que l’avortement était devenu une réalité en Irlande plus que jamais auparavant. Il était même probable que l’utilisation des pilules abortives allait encore connaitre une augmentation. Les actions de ROSA ont été essentielles pour que l’utilisation des pilules abortives soit mieux connue.
Une situation changée
Lors de la présentation du rapport de l’Assemblée citoyenne, le juge Laffoy a identifié les pilules abortives comme un facteur clé émergeant. Devant la commission, des preuves ont été présentées qui soulignent l’utilisation accrue des pilules et, entre autres, l’obstétricien consultant Peter Boylan a déclaré qu’à la suite du développement de l’usage des pilules abortives, le ‘‘génie est sorti de la bouteille’’.
La commission aurait pu proposer une forme limitée d’avortement, moins de 12 semaines, mais avec l’utilisation croissante des pilules abortives, une telle loi aurait immédiatement été inapplicable et dépassée. Ces pilules abortives faisaient de l’avortement jusqu’à 12 semaines un fait établi en Irlande. Il était évident que la majorité des membres de la commission estimaient pouvoir ramer en toute sécurité derrière cette proposition.
Il s’agissait d’une énorme percée, car cela signifiait que le contexte politique du référendum était une politique pro-choix en attente. Si le référendum pouvait être gagné, l’Irlande serait dans les mois à venir pro-choix. Cela a finalement été le cas, ce qui représente une énorme transformation par rapport à il y a quelques années. C’est probablement le plus grand coup porté en faveur des droits des femmes dans l’histoire de l’État irlandais et cela a d’énormes implications pour l’avenir.
Le camp du NON et sa campagne toxique
Au début de la campagne officielle, le sentiment en faveur de l’abrogation était clairement dominant, mais la campagne du Non est passée à l’offensive et a eu un impact. Elle a déterminé quel était l’agenda de la discussion et a mis l’accent sur les délais et l’avortement “à la demande” jusqu’à 12 semaines. Cela a suscité des questions et des doutes et le soutien en faveur du OUI a été réduit à néant. Mais par la suite, la campagne du NON a été si offensante qu’elle a déclenché une riposte active des femmes. La campagne du NON reposait essentiellement sur la diffusion de soupçons envers les intentions des femmes pour les présenter comme des meurtrières.
Certains défendaient l’idée que la campagne large en faveur du OUI ne devait pas atteindre le niveau du NON. Toutefois, dans le cadre d’une campagne, il faut tenir compte des problèmes réels qui s’installent et qui font l’objet de discussions. La campagne officielle Together4Yes (T4Yes) a poursuivi son approche mais, sur le terrain, les militants, tant à l’intérieur de T4Y que dans d’autres campagnes, sont allés plus loin pour répondre aux arguments du NON, en se concentrant particulièrement sur la réalité de l’avortement en Irlande et sur les raisons pour lesquelles les gens recourent à l’avortement.
Un sondage à la sortie des urnes réalisé par la chaîne de télévision publique irlandaise RTÉ a indiqué que les témoignages de femmes dans les médias et l’expérience vécue par des proches ont constitué le facteur d’influence le plus déterminant pour 77 % des participants au vote. Cela a clairement démontré que l’idée selon laquelle il fallait une approche prudente en termes d’argumentation était fausse. Toute l’idée de l’existence supposée d’une ‘‘Irlande du centre’’ n’était qu’une pure construction. Les gens réagissent positivement quand une argumentation solide reposant sur l’expérience concrète vécue par d’autres leur est présentée. Cela a encore été illustré par le sondage RTE qui relevait que le droit de choisir était le principal facteur d’influence dans une liste d’options à 62 %, bien au-dessus d’une anomalie fœtale fatale, citée par 39 % des sondés.
10 jours qui ébranlèrent le mondeA moins de deux semaines de la fin de la campagne survint un important changement. Le 14 mai, un débat télévisé, durant l’émission The Claire Byrne Live show, a été suivi par 650.000 personnes. Bien qu’il ait été estimé que le camp du NON avait peut-être mieux saisi cette opportunité, nombreux parmi ceux qui ont regardé l’émission ont été profondément choqués par l’approche de certains des militants du NON. L’émission a été l’objet d’un nombre incroyable de 1.277 plaintes, parmi lesquelles 92 % consacrées à sa partialité en défaveur du OUI. Cet événement de même que l’approche de plus en plus brutale des militants du NON dans la campagne ont freiné leur dynamique.
Quelques jours plus tard, ROSA a accroché son dernier lot d’affiches. L’une d’entre elles qui comportait une grande photo de Savita avec le simple message ‘‘Savita Matters – Women Matter – Vote Yes’’ (Savita compte, les femmes comptent) a été affichée dans tous les principaux centres-villes et à travers toute la ville de Dublin. Ces affiches ont agi eu l’effet d’une sorte de délivrance, une ‘‘riposte’’ que beaucoup attendaient depuis longtemps déjà. Elles ont rappelé aux gens la réalité de ce que signifiait le 8e Amendement ; mais elles ont aussi aidé à donner confiance à beaucoup d’autres pour qu’ils deviennent actifs dans la campagne, soit en militant autour de l’une des initiatives, soit à titre individuel en défendant le OUI jusqu’au jour du scrutin.
‘‘Dans les derniers jours de la campagne référendaire sur le Huitième Amendement, des dizaines de petites affiches sont apparues autour de Dublin. L’image était celle de Savita Halappanavar, reconnaissable instantanément grâce à ses cheveux épais et foncés, son large sourire, ses yeux souriants et le point Bindi sur le front. Le message contenait un mot : Oui. Elles étaient frappantes par leur simplicité et leur franchise.’’ Harry McGee, Irish Times, 26 mai.
D’innombrables conversations
Les anecdotes relatant la manière dont de jeunes femmes se sont battues pour le OUI avec leurs proches au cours de la dernière semaine de campagne sont légion. Il était clair qu’un élan imparable en faveur du OUI se profilait sous l’impulsion des jeunes femmes.
La campagne du NON a semé des doutes parmi certaines couches, mais elle n’a pas pu renverser la vapeur et s’opposer au changement de conscience qui s’était développé au fil des années sur cette question. D’autre part, les messages misogynes et agressifs du NON ont créé une vague de réaction qui les a finalement noyés le jour du scrutin.
Les membres du Socialist Party ont été très actifs, avec d’autres, dans les campagnes de ROSA et de Solidarity, ainsi que dans la vaste campagne Together4Yes. ROSA et Solidarity ont déployé une activité intense dans les collectivités locales, mais surtout dans les centres-villes. Au Parlement et dans leurs circonscriptions, Paul Murphy (Dublin Sud-Ouest) et Mick Barry (Cork North Central) ont tous deux joué un rôle de premier plan dans la campagne du OUI. Dans ces deux circonscriptions, la victoire du OUI fut impressionnante.

Lancement de la campagne au Liberty Hall. La campagne de ROSA a commencé le 14 avril avec un rassemblement national de 500 personnes au Liberty Hall, à Dublin, durant lequel de nombreux orateurs du Socialist Party et du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) ont pu prendre la parole. ROSA a organisé des actions sur une base quotidienne de même que des manifestations jusqu’aux aéroports de Cork et Dublin, auxquelles 350 personnes ont assisté. Ces marches retraçaient les pas des milliers et milliers de femmes forcées d’aller avorter à l’étranger au cours de ces 35 dernières années. Le jour du décompte des votes, 250 personnes ont assisté à un rassemblement de ROSA au Projects Arts Centre à Dublin et des centaines de personnes sont devenues membres de ROSA.
L’impact de ROSA
Le point culminant de l’activité de ROSA durant la campagne fut l’apparition de 15.000 affiches mise en place par des activistes de ROSA et de Solidarity. Celles-ci ont eu un très grand impact et se sont distinguées par leur contenu sans équivoque à tel point qu’elles ont figuré sur la quasi-totalité de la couverture médiatique internationale du référendum.
La classe des travailleurs, les femmes et les jeunes femmes en particulier ont été les moteurs de ce changement historique de même que d’autres récents bouleversements sociaux, de la lutte contre la taxe sur l’eau (water charge) au référendum sur le mariage égalitaire. Et maintenant cette nouvelle percée historique. La jeune génération, souvent dénigrée par certains sous le terme de ‘‘snowflakes’’ (flocons de neige), s’est retrouvée à la tête d’un mouvement qui a non seulement forcé un establishment politique très réticent à agir mais a également vaincu l’Église catholique. Toute la question est aujourd’hui de savoir quand, et non pas si, cette jeunesse se retrouvera à l’avant-plan d’autres combats qui les feront entrer en conflit ouvert avec le système capitaliste lui-même.
Qu’en dissent-ils ?
Pour finir, voici quelques-uns des nombreux commentaires qui ont été envoyés à des membres du Socialist Party ou qui sont apparus dans des forums publics concernant les activités dans lesquelles nous avons été impliqués ainsi qu’au sujet du rôle joué par Ruth Coppinger.
- ‘‘Merci beaucoup Rosa pour tous vos efforts et votre influence héroïques, inspirants et constants’’.
- ‘‘J’espère que vous réalisez tout ce que vous avez fait pour les femmes d’Irlande ! Profitez du week-end et offrez-vous quelque chose de spécial ! Je suis si heureuse, reconnaissante et optimiste pour l’avenir.’’
- ‘‘Chère Ruth, je dois admettre que vous entrerez dans l’histoire comme la voix la plus forte, cohérente et logique de #Repeal… Nous pouvons probablement compter sur les doigts d’une main les thèmes politiques sur lesquelles vous et moi sommes d’accord. L’abrogation en était certainement une. En tant que défenseur inébranlable et passionné de l’abrogation, vous avez rendu un grand service au pays, aux professionnels de la santé ainsi qu’aux femmes”.
- ‘‘Salut, salut. Je voudrais juste vous féliciter pour votre fantastique campagne d’affichage autour de la ville de Dublin pour le vote en faveur du OUI. C’est à mon avis la plus réfléchie de toutes les campagnes d’affichage. Quand le OUI l’emportera la semaine prochaine, il aura une énorme dette de gratitude envers vous.’’

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#RepealedThe8th Irlande. Une victoire historique pour le progrès social !

Déclaration des députés irlandais de Solidarity et membres du Socialist Party Ruth Coppinger, Paul Murphy et Mick Barry.Le référendum irlandais du 25 mai a livré un résultat sans appel : une large majorité a voté en faveur de la levée de l’interdiction constitutionnelle de l’avortement, comme le prévoit le 8e amendement à la Constitution. Après une campagne féroce, dans laquelle les opposants au droit à l’avortement se sont tournés vers le mensonge et l’intimidation, l’emprise de l’establishment conservateur et religieux sur la population irlandaise s’est avérée plus limitée que prévu. Dans la campagne du Oui, les activistes de la campagne féministe socialiste ROSA, de Solidarity (l’alliance électorale plus large à laquelle participe le Socialist Party) et des parlementaires comme Ruth Coppinger ont joué un rôle majeur. Voici la réaction immédiate des trois députés de Solidarity (Ruth Coppinger, Paul Murphy et Mick Barry).
La claire et splendide victoire du ‘‘oui’’ dans ce référendum représente un tremblement de terre politique et un tournant pour l’Irlande. C’est une grande victoire, en particulier pour les femmes d’Irlande, qui se sont débarrassées de l’oppression du 8e amendement après 35 ans. Aucun retard ne peut désormais être justifié. Rien n’empêche le Dail (parlement) d’adopter rapidement une loi pour donner effet aux propositions du Comité de l’Oireachtas (la commission parlementaire). Plus personne ne doit souffrir.
Cet événement fait partie d’une révolte mondiale féministe et LGBTQI contre une discrimination de longue date. Cette victoire est un énorme coup de pouce pour tous ceux qui luttent contre l’oppression et pour l’égalité réelle à travers le monde. C’est tout particulièrement le cas pour les femmes d’Amérique latine, qui meurent littéralement faute de disposer du droit à l’avortement, qui voient leur lutte renforcée par ce résultat.
Mettre fin à l’hypocrisie
C’est aussi une victoire livrée principalement par la jeunesse, une génération souvent dénigrée comme étant la “génération snowflakes” (terme péjoratif qui vise à catégoriser les jeunes comme étant plus facilement offensés que par le passé, NDT). Ce sont eux qui ont dit qu’il y en avait assez et qui ont fait de cette question un thème crucial, en particulier après la mort tragique et inutile de Savita Halappanavar (décédée en 2013 des suites de complication de sa grossesse et à qui un avortement avait été refusé, NDT). Ce sont les jeunes femmes qui ont refusé d’accepter l’hypocrisie de la “solution irlandaise à un problème irlandais” et ont exigé et organisé ce changement contre un establishment politique pétrifié et réticent.
Il faut aussi dire haut et fort qu’une fois de plus, comme ce fut le cas avec le mouvement contre la taxe sur l’eau et le référendum sur le mariage égalitaire, la classe ouvrière a véritablement été la ‘‘fondation sûre’’, comme le disait James Connolly, de cet énorme changement social. En raison de l’expérience vécue, le sens de la solidarité est inné dans la classe ouvrière. C’est la force qui fait avancer les choses dans ce pays, comme on l’a vu pendant la campagne et comme le démontre l’ampleur des votes dans les communautés ouvrières.
Un mouvement de base
Une vaste campagne officielle du ‘‘Oui’’ a eu lieu, puis un mouvement populaire indépendant s’est développé au cours des dernières années, des derniers mois et des dernières semaines. C’est ce mouvement qui a fait la différence décisive, notamment en répondant à l’alarmisme et aux mensonges scandaleux du camp du ‘‘non’’.
Cette victoire a également été encadrée dans une large mesure au cours des dernières années par ceux qui ont été les plus ardents partisans du droit au choix, les anticapitalistes socialistes et les activistes de gauche. Jusqu’à tout récemment, le groupe parlementaire Solidarity – People Before Profit était la seule entité politique du parlement à lutter en faveur du droit à l’avortement, avec une position clairement pro-choix.
Il existe une grande différence entre ceux qui ont voté ‘‘non’’ et les organisateurs de la campagne du ‘‘non’’. La campagne ‘‘du non’’ a donné un aperçu effrayant du type d’Irlande dans laquelle la droite religieuse voudrait que nous vivions tous. Sombrant dans la misogynie, la campagne du ‘‘non’’ a diffamé femmes et les a dépeintes comme des tueuses égoïstes et des meurtrières. Ils ont blâmé les femmes du début à la fin, c’est totalement inacceptable.
Les idées rétrogrades ont été rejetées
Nombreuses ont été celles qui se sont senties plus vulnérables et moins en sécurité au fur et à mesure que leur rhétorique s’intensifiait. Mais leurs idées rétrogrades ont clairement été rejetées lors de ce référendum. Le fait que la majorité des représentants publics du parti Fianna Fáil a participé à cette campagne ne doit pas et ne sera pas oublié par la population.
Ce référendum a des implications pour l’Irlande du Nord, où les femmes et les jeunes n’accepteront pas d’être laissés pour compte. Les militants de la campagne du Socialist party ROSA y lancent une campagne majeure pour revendiquer le droit à l’avortement, en commençant par un Bus4Choice qui voyagera dans tout le Nord la semaine prochaine avec des pilules abortives.
Ce vote retentissant doit conduire à l’adoption rapide de la législation et au développement des services de santé nécessaires pour permettre d’avorter jusqu’à 12 semaines sur demande et pour raisons de santé. Le projet de loi de Solidarity sur l’éducation sexuelle doit être adopté. La contraception gratuite doit maintenant être fournie dans les services de santé et promue dans la société.
Pour que cela se produise, l’establishment politique doit être maintenu sous pression par le mouvement populaire. Rappelez-vous que nous avons dû attendre plus de cinq ans après la mort de Savita avant d’avoir enfin un référendum ! Cela ne doit pas se reproduire.
Les jeunes ont été la dynamique clé de voûte de cette victoire contre l’oppression et pour le contrôle de leur propre corps. Il ne s’agit pas de savoir si, mais quand, ils agiront contre un système éducatif de plus en plus oppressif ; sur le fait qu’ils ne peuvent obtenir d’emplois avec un salaire et des conditions décentes ; qu’ils n’ont pas les moyens de louer ou d’acheter un logement décent.
Construire une gauche socialiste
Le premier ministre Leo Varadkar pourrait bénéficier de ce résultat, ayant sauté à la dernière minute du bon côté de l’Histoire. Mais lui, le Fine Gael et les autres partis qui défendent et mettent en œuvre des politiques capitalistes seront confrontés à la force du séisme de la jeunesse qui arrive parce qu’ils n’ont pas de solutions à offrir face à ces questions brûlantes. Ils ne peuvent pas satisfaire le désir profond de justice et d’égalité qui pousse de manière décisive les jeunes générations vers la gauche et les idées socialistes dans de nombreux pays comme l’Amérique, la Grande-Bretagne et l’Espagne et, après le vote d’hier, en Irlande aussi.
En tant que députés de Solidarity et membres de longue date du Socialist Party, nous disposons d’une longue expérience sur ces questions et sur la lutte pour le droit de choisir. Nous sommes fiers d’avoir fait partie de la campagne Time4Choice de ROSA qui a donné une réelle longueur d’avance au camp du ‘‘oui’’ et a facilité le développement du mouvement populaire. Ce mouvement et ROSA ne vont pas disparaître et vont viser à devenir une force féministe socialiste majeure en lutte pour une transformation radicale de ce pays.
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Irlande. Un grand enthousiasme parmi la jeunesse pour en finir avec le passé répressif

Le référendum historique visant à abroger le huitième amendement à la constitution irlandaise, qui équivaut à une interdiction quasi totale de l’avortement, a lieu ce 25 mai. Les citoyens irlandais voteront ” oui ” pour un avenir progressiste où le droit de choisir est enfin reconnu par la loi irlandaise, ou ” non ” pour une société encore dans l’ombre dans l’Église catholique répressive et misogyne.
Par Keishia Taylor, Socialist Party (section irlandaise du Comité pour une Internationale Ouvrière) et ROSA – Dublin.
Le mouvement féministe très militant et jeune qui lutte pour l’abrogation rompt avec la répression du passé. À chaque fois, l’establishment politique s’est opposé au droit à l’avortement et au mouvement pro-choix.
Le gouvernement a tout fait pour tenter d’éviter l’organisation d’un référendum. Ensuite, ils ont tenté de diluer les revendications pro-choix pour n’autoriser l’avortement que dans les “cas difficiles” comme les anomalies fœtales graves et une grossesse résultant d’un viol.
ROSA – Mouvement socialiste féministe( campagne sœur de la campagne ROSA en Belgique) a joué un rôle extrêmement important en défendant une position pro-choix sans compromis. Au sein de ROSA militent des membres du Socialist Party, y compris la députée Ruth Coppinger, figure importante du mouvement pro-choix.
ROSA a mis en évidence la question de l’utilisation des pilules abortives, prouvant que l’avortement a lieu tous les jours, malgré l’interdiction. Mais il ne se réalise pas avec un avec un encadrement médical sûr. Cela a poussé le référendum sur la problématique du droit de choisir.
L’énergie et l’enthousiasme de la jeunesse pour un vote en faveur du OUI correspondent à l’état d’esprit dominant, en particulier à Dublin. Les jeunes, les femmes, les LGBTQI+ et les travailleurs sont très favorables à l’abrogation.
Cependant, les anti-choix les plus arriérés sentant que leur contrôle des femmes leur échappe font preuve d’une grande agressivité. Les derniers sondages suggèrent une victoire du camp des pro-choix face à l’interdiction de l’avortement sexiste, mais nous ne pouvons pas nous reposer sur nos lauriers et nous ferons campagne jusqu’à la fermeture des bureaux de vote.
Gagner le droit à l’avortement serait une énorme victoire. Elle porterait un coup dur à l’Église conservatrice et répressive et à l’establishment capitaliste et constituerait un pas en avant important vers une séparation complète entre l’Église et l’État.
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Trop c’est trop ! Il faut affronter cette culture misogyne mondiale !

L’article 40.3.3 de la Constitution irlandaise (le 8e amendement) garantit le droit à la vie de l’enfant à naître, ce qui interdit le droit à l’avortement à moins que la vie de la mère ne soit gravement menacée. C’est la loi la plus stricte d’Europe. 35 ans après que ce changement de constitution a été co-écrit par un archevêque et ensuite envoyé au Pape pour approbation, la lutte pour libérer l’Irlande de son oppression catholique est en cours.
Par Laura Feeney
Un référendum historique
Un référendum a été convoqué pour le 25 mai afin d’abroger ce 8e amendement, mais il aura fallu une longue lutte pour que le sujet soit discuté au Parlement. C’est la pression de la rue qui en est responsable, en grande partie organisée par l’organisation socialiste-féministe ROSA. En Irlande, la campagne ROSA (for Reproductive rights, against Oppression, Sexism & Austerity) a été créée après le décès de Savita Halappanavar, morte à la suite de complications liées à sa grossesse et à l’incapacité du médecin à l’opérer en raison du 8e amendement.
En réponse à ce flot continu d’injustices horribles, une Assemblée citoyenne a voté en faveur de l’abrogation du 8e amendement et pour un accès non restrictif à l’avortement jusqu’à 12 semaines. Ces recommandations étaient beaucoup plus radicales que celles des politiciens traditionnels. Une commission parlementaire a été mise sur pied tandis que les actions de ROSA et de la députée Ruth Coppinger (élue de Solidarity et membre du Socialist Party) ont souligné quelle était l’utilisation de pilules abortives illégales en Irlande. Cela a eu un impact significatif. Il est évident que l’avortement est déjà pratiqué en Irlande, sa légalisation en rendrait la pratique plus sûre. Les tensions sont vives avant la tenue du référendum qui survient dans un contexte où d’autres développements majeurs sont en cours sur le terrain de la lutte contre le sexisme et de radicalisation, particulièrement parmi les jeunes Irlandaises.
‘We stand with her’
En Irlande du Nord, un procès très médiatisé impliquant une jeune femme de dix-neuf ans face à des joueurs de rugby professionnels a récemment attiré l’attention sur le combat à mener plus largement contre l’oppression sexiste. Ce procès était des plus pénibles pour les victimes d’agressions sexuelles. La jeune femme a été interrogée beaucoup plus longuement que les accusés, le jury a fait circuler ses sous-vêtements et une ancienne députée a déclaré qu’une fille de la classe moyenne ne se serait jamais retrouvée dans une telle situation. Lorsque le verdict a été annoncé, non coupable, la colère fut générale. Des rassemblements ont immédiatement eu lieu avec le hashtag #IBelieveHer (je la crois). Deux jours plus tard, des milliers de personnes ont défilé dans les rues de Dublin et devant le palais de justice de Belfast. Une pétition en ligne réclamant la tenue d’une enquête sur le comportement des joueurs a recueilli 65.000 signatures. L’Irish Rugby Union et l’Ulster Rugby ont dû annoncer que les contrats des deux joueurs, Paddy Jackson et Stuart Olding, étaient révoqués. 30.000 euros ont été récoltés pour le Dublin Rape Crisis Centre dans les deux jours qui ont suivi l’annonce du verdict.
Les actions ont été absolument monumentales sur l’ensemble de l’île. Elles s’inscrivent dans un sentiment global. En Pologne, les femmes sont également choquées par l’éthique catholique réactionnaire et se battent pour changer leur loi archaïque sur l’avortement. Lors de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes, une ‘‘grève féministe’’ a été déclenchée en Espagne et pas moins de 5,3 millions de personnes sont descendues dans la rue pour lutter contre les abus sexuels et l’écart salarial ! En Irlande, durant les manifestations, de nombreuses pancartes reprenaient une citation de la militante Angela Davis : “Je n’accepte plus les choses que je ne peux pas changer. Je change les choses que je ne peux pas accepter.’’ ‘‘Trop, c’est trop !’’ est devenu un cri de ralliement. Ces femmes ne recherchent pas des réformes ou des solutions rapides et bâclées.
‘‘Je ne vais pas me rendre à la police. Je ne vais pas affronter l’Ulster Rugby.’’ C’est le message effrayant que la jeune victime a envoyé à son amie au lendemain de son agression. Les femmes savent que le système n’est pas à leurs côtés, mais contre elles. Ces hommes puissants n’allaient jamais être réprimandés dans une culture qui considère tout cela comme du ‘‘discours de vestiaire’’. Nous devons lutter contre ce système d’exploitation qui protège les plus puissants plutôt que les plus vulnérables. La ‘‘culture machiste’’ est ancrée à tous les niveaux de la société capitaliste : y compris les forces de police, les tribunaux et l’État. Nous savons que ces institutions ne sont pas là pour la démocratie ou l’égalité, ce sont des outils pour réprimer la révolte de la classe ouvrière. Les mesures qui ont été prises en réponse à cette situation devraient déclencher un feu dans le ventre de chacun. Le changement est imminent et nous n’attendrons plus. Trop, c’est trop.
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Manifestations massives en Irlande contre le ‘‘victim blaming’’ dans une affaire de viol

Ce jeudi 29 mars, des manifestations spontanées d’indignation ont éclaté dans toute l’Irlande, tant au nord qu’au sud, en raison de la décision d’un juge de Belfast d’acquitter des joueurs de rugby dans une affaire de viol. La victime a par contre été blâmée tout au long du procès. Femmes et hommes sont descendus par milliers dans les rues avec le hashtag #IBelieveHer (je la crois). En Irlande, la campagne féministe socialiste ROSA (for Reproductive rights, against Oppression, Sexism & Austerity) est en première ligne de ces protestations.

Vue du cortège de la manifestation de Dublin. Différentes études indiquent que 26 % des Irlandaises sont victimes de violence sexuelle ou physique de la part de leur partenaire ou non, tandis que 31 % sont victimes de violence psychologique, y compris de violence économique. Seules 21 % des femmes victimes de violence le signalent à la police. Moins d’un tiers d’entre elles considèrent que la police a pris l’affaire au sérieux.
En ce moment, les droits des femmes font l’objet d’une plus grande attention dans la société irlandaise, ce à quoi contribue l’organisation prochaine d’un référendum pour l’abolition de l’interdiction constitutionnelle de l’avortement. La campagne féministe socialiste ROSA a joué un rôle de premier plan dans le mouvement de masse qui a conduit à l’organisation de ce référendum et défend l’importance de l’abolition de l’interdiction de l’avortement.
Tout cela a assuré que ce verdict dans une affaire de viol très médiatisée entraîne immédiatement une vague d’indignation et d’actions. Des joueurs de rugby étaient accusés d’avoir violé une jeune femme lors d’une fête. Celle-ci a affirmé qu’elle avait bien accepté d’être embrassée par l’un d’eux, mais qu’elle n’avait donné aucun consentement pour aller plus loin. Les avocats des joueurs de rugby ont fait tout ce qu’ils ont pu pour faire reporter la responsabilité sur la jeune victime. Les vêtements qu’elle portait ont ainsi été présentés comme ‘‘preuves’’ de consentement ! Le procès a pris la forme d’une condamnation de la victime. Comme dans 94 % de toutes les affaires de viol en Irlande, les accusés n’ont pas été condamnés.
A Dublin, notre camarade Ruth Coppinger (députée de Solidarity et membre du Socialist Party, notre parti-frère irlandais) a pris la parole au Parlement concernant cette affaire.
Directement après, elle s’est rendue participer aux actions de protestations dans la rue. Voici une vidéo de l’une de ses prises de parole :
Laura Fitzgerald, de la campagne ROSA – Irlande a également pu prendre la parole :
Des actions ont eu lieu dans toute l’île. D’autres actions sont encore prévues ce week-end. En Belgique, la campagne ROSA (Résistance contre l’Oppression, le Sexisme et l’Austérité) est solidaire de ces manifestations. #WeStandWithHer!
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Mon corps, mon choix ! La lutte en Irlande à un stade crucial

Cet automne sera d’une grande importance pour le droit à l’avortement en Irlande, qui y est toujours interdit par le 8ème amendement de la Constitution. L’abrogation de cette loi anti-avortement est exigé sous le slogan ‘Repeal the 8th’ (‘Abroger le 8ème’). Ces dernières années, le soutien pour celui-ci a considérablement augmenté, tout particulièrement parmi les jeunes et les femmes. Il existe aujourd’hui une nouvelle génération qui défend avec confiance le droit de décider de son propre corps.
Le gouvernement a mis en place une ‘Assemblée des Citoyens’ de 100 personnes ordinaires, en espérant mettre la question de côté. Mais de cette Assemblée sont sorties des recommandations progressistes qui ont accru la pression pour réellement organiser un référendum sur le droit à l’avortement. Les politiciens conservateurs feront tout pour l’empêcher. La pression doit donc rester élevée.
La campagne ROSA en Irlande (‘for Reproductive rights, against Oppression, Sexism & Austerity’) et les parlementaires de ‘Solidarity’ (dont fait partie le Socialist Party, section-sœur du PSL en Irlande), parmi lesquels Ruth Coppinger, jouent un rôle majeur dans ce domaine. Ils mobilisent pour la grande ‘March for Choice’ (‘Marche pour le choix’) du 30 septembre (juste après la production de ce journal). La pression publique est telle que la commission parlementaire qui traite les recommandations de l’Assemblée des Citoyens ne parvient pas à s’en sortir avec ses manœuvres. Avec Ruth Coppinger au sein de la commission parlementaire, la pression publique est fortement relayée en son sein.
Ruth Coppinger sera présente à Bruxelles le 21 octobre prochain à l’occasion du week-end ‘Socialisme 2017’ (informations pratiques et programme de l’événement). Nous lui avons demandé une réaction :
‘‘L’Assemblée des citoyens a été créée par le parlement l’an dernier dans une tentative désespérée de casser la dynamique croissante en faveur de l’abrogation du 8ème amendement. L’establishment s’attendait à des conclusions conservatrices, mais cette Assemblée a refusé de s’y conformer ! Forcer les gens ordinaires à prendre des décisions controversées est clairement une entreprise risquée.
‘‘Après avoir récolté informations et arguments, l’Assemblée a finalement conclu que le Dáil (le Parlement irlandais) devait absolument agir, que le 8ème amendement devait être abrogé et droit à l’avortement introduit pour des raisons de santé, socio-économiques ou liées à une anomalie fœtale fatale pour la mère et/ou l’enfant dans les premières 22 semaines et ‘‘sans restriction quant à la raison’’ dans les premières 12 semaines.
‘‘Le premier forum public sur le droit à l’avortement a formulé des recommandations radicales. Mais le Parlement est ultra-conservateur. Un seul groupe du Dáil, ‘Solidarity-People Before Profit’, plus une poignée de parlementaires appuient ces propositions.
‘‘En tant qu’activiste socialiste et pro-choix au sein du comité parlementaire, au nom de Solidarity et People Before Profit, je défendrai l’abrogation complète du 8ème amendement et pour qu’il n’y ait rien concernant le corps des femmes dans la Constitution. J’exigerai la reconnaissance juridique du droit à l’avortement.
‘‘Solidarity a défendu l’idée d’un référendum qui proposerait les recommandations de l’Assemblée des Citoyens. Ce serait bien mieux que de laisser la décision à une commission parlementaire non représentative.
‘‘Il y a quelques temps, l’establishment irlandais avait jugé nécessaire de soumettre le mariage homosexuel à un référendum car il n’osait pas lui-même prendre de décision. Les liens sont étroits entre l’establishment et l’Eglise catholique. On ne peut donc pas leur faire confiance pour proposer des mesures sociales qui, dans d’autres États de l’Union européenne, semblent pourtant évidentes, comme la séparation de l’Eglise et de l’État, l’instauration d’une éducation sexuelle sans culpabilisation ou jugement, une contraception gratuite ou à prix abordable et, bien sûr, le droit à l’avortement. Un mouvement social très fort et très actif va devoir arracher tout cela.
‘‘Cinq ans après la mort de Savita Halappanavar [une jeune femme décédée suite à une fausse couche après qu’un avortement lui ait été refusé, NDLR], il est incroyable nous ne puissions toujours pas avoir de loi permettant l’avortement.
‘‘Tous les partis et les parlementaires indépendants doivent maintenant être défiés sur cette position. Certains élus des partis traditionnels considèrent encore les femmes comme le ‘‘sexe faible’’. D’autres se taisent. Nous ne devons pas leur permettre de maintenir leurs positions médiévales. Mais même les partis favorables à l’abrogation du 8ème amendement, comme le Parti travailliste et les Verts, soutiennent une série de conditions avant d’avoir droit à l’avortement. Cela signifie qu’ils vont moins loin que la vielle loi britannique qui a 50 ans. Le Sinn Féin, tout en soutenant l’abrogation, ne soutient l’avortement que s’il y a une ‘‘grave menace’’ pour la santé mentale de la femme. Il s’agit de la possibilité déjà existante d’avortement pour éviter le suicide. Mais récemment encore, une victime de viol aux tendances suicidaires désireuse d’avorter s’est vue refuser ce droit ! L’approche du Sinn Fein doit changer : si ce n’est pas maintenant, quand alors ?
‘‘On dit parfois que nous vivons des moments historiques. Aujourd’hui, l’occasion existe certainement de gagner un changement social historique en Irlande : l’abrogation de cet odieux 8ème amendement qui nous a été infligé par l’Eglise catholique et des politiciens opportunistes. Ce à quoi ressemblera la législation sur l’avortement pourra aussi être déterminé par la force du mouvement. Nous devons faire tout notre possible pour faire défendre les progrès historiques des femmes, des femmes enceintes et de toute cette génération.’’
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Jobstown Not Guilty : le jury se prononce en faveur des accusés !

Pour l’establishment politique irlandais, la défaite est écrasante. Le jury du procès de 6 des activistes anti-austérité de Jobstown (voir notre article : Le plus grand procès politique en Irlande depuis des décennies) a déclarés ces derniers non coupables des charges de “séquestration” (false imprisonment) de l’ancienne vice-première ministre, Joan Burton (Labour), lors d’une manifestation spontanée contre la taxe sur l’eau et l’austérité dans le quartier ouvrier de Jobstown, à Tallaght, dans le sud-ouest de Dublin.
Parmi les accusés se trouvait le député Paul Murphy, élu de Solidarity et membre du Socialist Party, parti-frère du PSL en république irlandaise, ainsi que Kieran Mahon et Mick Murphy, conseillers municipaux de Solidarity et membres du Socialist Party. Pour l’establishment, ce procès avait une importance toute particulière car il visait à freiner l’essors actuel de la gauche, très certainement après que la taxe sur l’eau ait été suspendue suite au mouvement de contestation massif qui a agité tout le pays.
Face à cette attaque contre le droit démocratique de protester, une campagne internationale de solidarité avait été lancée, rejointe notamment par Jean Luc Mélenchon, Yanis Varoufakis ou encore Angela Davis. En Belgique également, plusieurs figures du monde syndical et politique (notamment le président du PTB Peter Mertens ou encore la députée fédérale ECOLO Muriel Gerkens). Avec des membres de la fraction GUE (gauche unitaire européenne) du Parlement européen, nous avons également mené une action face à l’ambassade irlandaise à Bruxelles.
Ce verdict est d’une grande importance pour le mouvement des travailleurs en Irlande. Ci-dessous, vous pouvez voir une vidée de Paul Murphy à la sortie du tribunal et une autre du député Mick Barry (Solidarity et Socialist Party) qui a annoncé le verdict au Parlement.
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Une attaque contre l’un d’entre nous est une attaque contre nous tous

Action de protestation à l’ambassade irlandaise, 23 avril 2017. Photo : Socialisme.be Parler de la répression d’Etat fait tout d’abord penser à des pays tels que la Turquie ou le Maroc, des régimes autoritaires qui persécutent quotidiennement leurs opposants. Mais la tendance des élites dirigeantes à renforcer leurs outils de répression pour faire face à la contestation sociale est bien plus générale. En France, la ‘‘Loi travail’’ avait poussé des centaines de milliers de personnes dans les rues à plusieurs reprises en 2016. La répression avait été féroce et, aujourd’hui, les procès de militants se succèdent tandis que les manifestations contre les violences policières s’enchaînent, notamment autour du cas du jeune Théo qui révélait sur BFMTV, début février : ‘‘Je l’ai vu prendre sa matraque : il me l’a enfoncée dans les fesses, volontairement’’.
Par Nicolas Croes
En Belgique, à l’occasion de la journée internationale contre les violences policières (le 15 mars), la Coordination des sans-papiers et la campagne ‘‘Stop Répression’’ s’étaient associées pour dénoncer la répression policière et le racisme d’État lors d’une manifestation. Le texte de plateforme dénonçait à juste titre la manière dont de nouvelles mesures sécuritaires adoptées par le gouvernement Michel sont utilisées pour criminaliser les sans-papiers et réprimer le mouvement pour leur régularisation.
Ainsi, le 19 septembre dernier, l’évacuation du collectif la Voix des Sans Papiers à Molenbeek s’est déroulée avec des dispositifs policiers sans précédent, avec hélicoptère et armes lourdes, pour déloger quatorze personnes désarmées! La campagne posait très justement la question suivante : ‘‘Avec cette instrumentalisation de la notion de terrorisme, qui nous dit que demain un syndicaliste ne pourra pas être également condamné pour incitation au terrorisme parce qu’il s’oppose aux réformes injustes du gouvernement??’’ A ce titre, le procès contre les manifestants de Jobstown en Irlande peut constituer un dangereux précédent.Jobstown not guilty
L’Irlande a récemment connu une lutte titanesque contre une taxe visant à en finir avec la gratuité de l’eau dans le pays. Comme l’expliquait le quotidien français Le Monde (10 février 2015) : « Alors que les premières factures doivent tomber en avril et coûteront plusieurs centaines d’euros par an aux ménages, les campagnes appelant au non-paiement sous le mot d’ordre ‘‘No way, we won’t pay’’ (‘‘pas question, on ne paiera pas’’), essaiment à travers le pays. Du jamais vu depuis l’indépendance en 1922. Pas même au plus fort de la crise financière. Car l’eau cristallise tout le reste. Coupes dans les dépenses publiques, baisse des salaires, augmentation des impôts : la rigueur budgétaire – dont le pays est officiellement sorti en octobre – a demandé trop d’efforts aux Irlandais. Le taux de chômage a certes baissé, mais avoisine toujours les 10,7 %. Et, alors que le gouvernement les serine avec la reprise économique, une grande partie des 4,5 millions d’habitants n’en ressent toujours pas les effets’’. ‘‘Les 99 % de gens ordinaires voient qu’on fabrique une reprise pour les 1 % de riches aux dépends du reste de la population qu’on continue à saigner’’, tance Paul Murphy. Le député a encore sa carte au Parti socialiste (trotskiste), qu’il a intégré à l’âge de 18 ans.’’
L’article avait été publié au lendemain de l’arrestation excessivement musclée de Paul Murphy et de divers activistes opposés à la taxe sur l’eau le 9 février qui avaient participé à un sit-in devant la voiture de la vice Première Ministre, en 2014, dans la localité de Jobstown (près de Dublin). Avec leur détention provisoire, l’establishment irlandais visait à criminaliser le mouvement social et à affaiblir la résistance à la taxe sur l’eau. Depuis lors, les autorités ont été forcées de reculer et la loi a été suspendue. Mais l’establishment tient à sa revanche et ces activistes sont aujourd’hui inculpés de ‘‘séquestration’’ !
L’un d’entre eux, âgé de 15 ans au moment des faits, a d’ailleurs été condamné à l’automne dernier. Les 18 autres, tous adultes, ont leur procès le 24 avril prochain. Ils sont menacés de longues années d’emprisonnement. Parmi eux, se trouve Paul Murphy, député irlandais de l’Alliance Anti-Austérité (AAA, devenue depuis lors Solidarity) et du Socialist Party, tout comme Mick Murphy et Kieran Mahon, conseillers municipaux de Solidarity.
Le message est clair. C’est une tentative d’intimidation de toutes celles et tous ceux qui veulent résister à ses politiques et lutter pour une autre société : ‘‘courbez l’échine ou vous risquez la prison’’. S’il advenait qu’ils soient condamnés, ça serait un véritable recul des droits démocratiques à manifester en Irlande. Un pas supplémentaire pour faire taire le mouvement ouvrier et social et essayer de le briser. Mais ce serait aussi un précédent alarmant pour les luttes sociales à travers l’Europe.
Une campagne de soutien, d’abord en Irlande, mais aussi au niveau international, s’est organisée autour de #JobstownNotGuilty (Jobstown non-coupable), rejointe depuis lors par Jean-Luc Mélenchon (candidat de la France Insoumise aux élections présidentielles), Angela Davis (militante des droits de l’homme, professeur de philosophie et militante communiste américaine), Noam Chomsky (linguiste et intellectuel anticapitaliste), Yanis Varoufakis (ancien ministre grec des Finances),…
En Belgique, elle a été rejointe par Eric Toussaint (CADTM), Peter Mertens (président du PTB), Michel Genet (Directeur Politique d’ECOLO), Zoé Genot (députée régionale ECOLO, Présidente de groupe au parlement régional bruxellois), Muriel Gerkens (députée fédérale ECOLO), Rudy Janssens (Secrétaire fédéral CGSP Bruxelles), Silvio Marra (ancien délégué FGTB des Forges de Clabecq),…
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Irlande. L’Etat veut museler la campagne Jobstown Not Guilty

Les accusés de Jobstown sont apparus bâillonnés à l’Assemblée pour la justice. Photo: Jobstown Not Guilty L’Assemblée pour la justice défie les tentatives visant à réduire l’opposition anti-austérité au silence
Le 29 mars dernier, un nouvel événement dramatique a vu le jour dans le cadre de l’offensive autoritaire de l’État irlandais.
Par Danny Byrne, Comité pour une Internationale Ouvrière
Cette offensive vise à criminaliser l’opposition et les actions de protestation, tout particulièrement l’emblématique manifestation de Jobstown contre la taxe sur l’eau et l’austérité qui a retardé la voiture de la vice-première ministre Joan Burton durant une courte période au cours d’une visite du quartier ouvrier de Jobstown, à Dublin, en 2014. Pour avoir participé à cette manifestation, 18 personnes – parmi lesquelles le député de Solidarity (anciennement Anti-Austerity Alliance) et membre du Socialist Party (section irlandaise du Comité pour une Internationale Ouvrière) Paul Murphy et d’autres membres du Socialist Party – font face à des accusations forgées de toutes pièces pour «false imprisonment» (détention arbitraire ou séquestration). Le procès devrait débuter le 24 avril et, en cas de condamnation, les accusés sont passibles d’une peine de prison à vie.
C’est en réponse à cet outrage que la campagne «Jobstown Not Guilty» (Jobstown Non Coupable) a été créée, afin d’exiger l’abandon des charges et de mener une campagne publique pour défendre la vérité au sujet de ce qui est arrivé lors de cette manifestation de Jobstown, en défendant l’innocence des accusés.
La campagne a mobilisé une large solidarité en distribuant quantité de tracts expliquant la vérité sur cette affaire et en mobilisant pour un rassemblement – une «assemblée pour la justice» – à Dublin le 1er avril. Les personnes issues de la classe ouvrière ont été indignées par cette attaque flagrante contre le droit de mener des actions de protestation et contre la lutte historique contre la taxe sur l’eau et l’austérité. Le soutien dont bénéficie la campagne est très large.
Les autorités saisies de peur
Cette campagne et la menace d’une entrée en action de la classe ouvrière et de sa radicalisation représentent un cauchemar pour l’establishment. Les autorités avaient espéré trainer les accusés de Jobstown devant les tribunaux et ensuite les envoyer en prison rapidement, en faisant le moins de bruit possible. A mesure que la campagne gagnait en élan et en écho, des centaines d’affiches annonçant la «l’Assemblée pour la justice» déployées à travers le centre-ville de Dublin, les autorités ont été saisies de peur, elles voulaient désespérément faire taire ceux qu’ils visent à envoyer injustement en prison.
Le 29 mars, le «directoire des poursuites pénales» (DPP) a convoqué les accusés au tribunal sous les 24 heures pour leur signifier que la campagne Jobstown Not Guilty violait l’intégrité de la cour. Il a cherché à étendre les conditions de mise en liberté des accusés en leur interdisant de participer à la campagne, d’assister à des événements de protestation et même de se prononcer sur l’affaire en public ou sur les médias sociaux ! L’idée est bien entendu d’interdire aux accusés de sensibiliser le public au sujet de cette attaque historique contre le droit de protester.
Le DPP a demandé que les accusés soient contraints de respecter ces restrictions faute de quoi ils seraient immédiatement emprisonnés. Cela leur signifierait de passer sous les verrous toute la période qui nous sépare du procès et pendant le procès lui-même, qui devrait s’étaler sur au moins six semaines. Présenter aux accusés un tel ultimatum, et un préavis de 24 heures, était clairement une tentative de les forcer à se soumettre.
Ces derniers ont toutefois fait preuve d’une remarquable détermination, en indiquant clairement qu’ils estimaient totalement inacceptables ces conditions draconiennes, qu’ils les refusaient et qu’ils étaient prêts à aller en prison pour défendre leur droit de proclamer leur innocence face à ces accusations inventées de toutes pièces.
Il s’agissait d’une tentative d’en finir avec la campagne Jobstown Not Guilty, de briser la dynamique autour de l’Assemblée pour la justice et de miner l’efficacité de la campagne d’information. Mais les choses se sont toutefois retournées contre l’establishment de toutes les façons possibles.
Le député Paul Murphy a déclaré le 30 mars, avant la tenue de l’Assemblée pour la Justice : ‘‘Nous avons réagi à cette dernière attaque contre le droit de protester comme nous le faisons toujours : en exerçant ce droit. En conséquence de cela, le DPP a abandonné sa demande d’extension des conditions de mise en liberté sous caution. Au lieu de cela, nous avons pris l’engagement limité que si nous allions assister à l’Assemblée pour la justice et y prendre la parole, nous ne mentionnerons pas le procès. D’autres auraient à parler de notre campagne. Dès que cette assemblée sera terminée, nous serons libres d’à nouveau mentionner le procès, tant que nous n’interférons pas avec l’administration de la justice, ce qui n’a jamais été notre intention. Nous continuerons notre implication active dans la campagne d’information Jobstown Not Guilty.’’
Cela signifie que l’Etat ayant eu un aperçu de l’indignation de masse suscitée dans les 48 heures par cette demande du DPP, a préféré – temporairement au moins – éviter d’imposer ces nouvelles conditions draconiennes de caution. Tout cela illustre de manière plus limpide que jamais la nature antidémocratique de cette affaire.
L’Assemblée pour la Justice
Le 1er avril, plus de 700 personnes se sont réunies dans le très emblématique local syndical ‘‘Liberty Hall’’ de Dublin. Ce fut une brillante démonstration de force, un défi militant envoyé vers les couloirs du pouvoir.L’événement a été ouvert par l’arrivée des accusés, alignés et portant des baillons, qu’ils ont ensuite déchiré et jeté à terre sous les applaudissements. L’événement a été électrique, une effusion massive de colère, de solidarité et de détermination, avec une solide participation ouvrière. Des figures de renom des médias, de la culture et du sport ont rejoint à la tribune des syndicalistes, des militants du droit au logement et des socialistes.
Paddy Hill, des fameux «6 de Birmingham» et Paul Murphy se sont distingués par leurs contributions lors de ce meeting de 3 heures constamment ponctué d’ovations. Paddy Hill a fait 16 ans de prison après avoir été condamné à perpétuité avec 5 autres Nord-Irlandais pour des attentats commis dans des pubs de Birmingham en 1975. Il s’agissait d’une affaire montée de toutes pièces par les autorités britanniques et leurs condamnations ont été annulées en 1991.
L’après-midi a réuni différents courants de résistance ainsi que différentes communautés et luttes ouvrières conscients de la pertinence et de l’importance de cette lutte historique.
Quelque chose de pourri dans l’Etat ?
L’establishment est embourbé dans la crise, son autorité et sa crédibilité sont gravement compromises. Les forces de police sont tout particulièrement au centre de celle-ci. Ces derniers mois, les actualités n’ont pas manqué d’histoires consacrées à la corruption et au népotisme qui sévit au sommet de la police, la commissaire en chef Noreen O Sullivan étant spécialement en ligne de mire.
Mais l’éléphant dans le magasin de porcelaine, celui qui se trouve au centre de toutes ces crises, c’est l’affaire Jobstown. La même commissaire de la Garda (la police irlandaise) a été directement impliqué dans ce cas et a mis en place une équipe de 4 Gardai qui ont travaillé durant des mois pour tenter de criminaliser la protestation de Jobstown. Une opération d’espionnage a été lancée – l’opération Mizen, sous la direction du mari de la commissaire! – pour essayer de salir Paul Murphy et d’autres personnes impliquées dans la protestation de Jobstown et le mouvement plus large contre la taxe sur l’eau… Des millions d’euros puisés dans l’argent des contribuables ont été gaspillés pour s’en prendre à 18 activistes.
La hiérarchie de la Garda a ensuite divulgué que les manifestants allaient être accusés de détention arbitraire avant même que l’accusation n’ait été faite aux activistes.
Les accusés de Jobstown sont les victimes d’une sombre machine d’État qui perd le peu de respect et de légitimité dont elle dispose encore parmi la classe ouvrière et la jeunesse. À l’Assemblée pour la justice, Paul Murphy a défendu l’approche du Socialist Party selon qui une force de police alternative véritablement démocratique est un besoin de plus en plus pressant. La campagne Jobstown Not Guilty veut exposer la véritable nature de l’appareil répressif de l’État irlandais aux yeux de milliers de travailleurs et de jeunes réveillés par la lutte.
Une nouvelle phase de conflits sociaux
L’offensive de l’État sur le droit de protester et de s’organiser se produit au moment où les luttes sociales reprennent de plus belle. Une nouvelle phase de conflit social et de grèves s’ouvre en Irlande. Le 31 mars, le jour où les accusés de Jobstown contestaient au tribunal l’avis du DPP, le pays a connu une grève générale des transports, les travailleurs des chemins de fer et des autobus entrant ensemble en action en solidarité avec les grévistes de la société de bus Eireann, en grève depuis plus de dix jours maintenant. Les luttes ouvrières connaissent un renouveau, les travailleurs du secteur des transports ayant rejoint ceux de la vente au détail, de l’enseignement et d’autres encore qui sont entrés en lutte avec des méthodes de plus en plus combatives.
Si l’establishment parvient à ses fins avec ce procès, ce qui signifie qu’une protestation pacifique pourrait être considérée comme une détention arbitraire, de telles actions pourraient faire face à de pareilles accusations. Le droit de faire un piquet de grève ou même de manifester dans un centre-ville en retardant le trafic est menacé.
Une délégation de grévistes des transports en commun s’est d’ailleurs rendue en uniforme de son piquet de grève à l’Assemblée pour la Justice et a été accueillie avec certainement une des plus grandes acclamations de l’événement. L’un des principaux activistes syndicaux du conflit s’est adressé à la foule présente, de même que Jimmy Kelly, dirigeant du syndicat UNITE.
Une lutte décisive
Nous ne sommes encore qu’au début de ce combat qui peut être déterminant pour la suite de la lutte de classe en Irlande. Le Socialist Party, qui est membre de Solidarity – The Left Alternative (anciennement Anti Austerity Alliance) est au centre d’événements très significatifs qui peuvent constituer un tournant pour le développement d’une nouvelle gauche socialiste combative de masse. Notre vision socialiste du changement révolutionnaire a été le fil rouge d’une grande de l’événement de samedi, elle peut gagner l’oreille de beaucoup plus de gens dans les mois à venir.
Nous luttons pour réunir les luttes et les revendications de Jobstown Not Guilty, du mouvement féministe de masse pour le droits à l’avortement (toujours interdit en Irlande) et de la marée montante des luttes ouvrières en un mouvement politique visant à remplacer l’establishment décadent et la classe dirigeante irlandaise corrompue et arriérée par une réelle démocratie socialiste.
La classe ouvrière et la jeunesse, en Irlande et au-delà, devraient rendre hommage à Jobstown ; une petite communauté ouvrière courageuse, militante et déterminée. Cette communauté se tient aux côtés des accusés et lance un défi à la répression et à l’intimidation des autorités. Cela mérite l’attention et la solidarité des travailleurs, des syndicalistes, des jeunes et des socialistes à travers le monde.
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[INTERVIEW] Paul Murphy: “Le droit de protester est en danger en Irlande!”
Irlande : des activistes menacés de plusieurs années de prison
Il y a 2 ans, une manifestation spontanée a pris place à Jobstown – un quartier ouvrier de la banlieue de Dublin – à l’occasion de la visite de la Vice-Première ministre d’alors, Joan Burton (Labour Party, sociaux-démocrates). Durant la manifestation, sa voiture a été encerclée par les manifestants et elle a été retardée d’environs 2 heures. Suite à cette action, des charges ont été retenues à l’encontre de 18 ‘‘meneurs’’ pour séquestration, avec parmi eux Paul Murphy, le député de l’Anti-Austerity Alliance (Alliance Anti-Austérité) et membre du Socialist Party.
Merci de discuter avec nous, Paul. Tout d’abord, pourrais-tu nous expliquer pourquoi la présence de la Vice-Première ministre dans ce quartier a provoqué une telle réaction? Est-ce uniquement suite à la taxe sur l’eau ?
Paul : ‘‘Le Premier ministre a dit au sujet du mouvement contre la taxe sur l’eau que ce ‘‘n’est pas juste à propos de l’eau’’. C’est l’une des rares choses sur lesquelles nous pouvons nous mettre d’accord avec lui. Les raisons de ce mouvement contre les charges sur l’eau étaient terriblement profondes, dues au fait qu’elles arrivaient après des années d’austérité. La population a dû faire face à des pertes d’emplois, des jeunes se sont retrouvés forcés d’émigrer, les salaires ont été coupés et les services publics dévastés. Des centaines de milliers de personnes ont été plongées dans la pauvreté.
‘‘Le quartier où se tenait cette manifestation avait été particulièrement touché par les politiques d’austérité du gouvernement. Pour donner un exemple, la manifestation a eu lieu sur le parking d’une banque alimentaire.
‘‘Joan Burton était aussi ministre de la Protection sociale et elle a initié une guerre contre les personnes nécessitant une aide sociale, comme les parents isolés. Elle est aussi la dirigeante du Labour Party, qui s’était toujours dépeint comme un défenseur des travailleurs. C’est sur cette base que le Labour Party a reçu un soutien électoral massif à Jobstown. Le sentiment de trahison par ce parti est dès lors ressenti de manière très aiguë.’’
Quelles seraient les conséquences d’une condamnation des militants inculpés, notamment pour le mouvement contre l’austérité ?
‘‘Une accusation de séquestration, c’est très sérieux, c’est pratiquement du kidnapping. À la demande du procureur d’État, l’affaire a été portée devant une juridiction supérieure, ce qui signifie qu’en cas de condamnation, la peine encourue peut aller jusqu’à l’emprisonnement à vie. Il ne fait aucun doute quant au fait que si quelqu’un est condamné, il devra faire face à plusieurs années de prison !
‘‘Un jeune homme de 17 ans a, lui, déjà été condamné par la justice pour mineur. Le juge a expliqué qu’il est coupable parce qu’il s’est assis devant d’une voiture, qu’il avait encouragé d’autres à faire de même, qu’il a participé à une ‘‘marche lente’’, qu’il s’était momentanément tenu sur le chemin de Joan Burton en demandant à lui parler et qu’il a utilisé un mégaphone pour scander des slogans. Ce verdict est la preuve de l’élargissement dramatique de la définition de ‘‘séquestration’’ qui peut inclure de nombreuses formes de manifestations, c’est une attaque majeure contre le droit de manifester.
‘‘En plus de ça, si je devais être envoyé en prison pour plus de 6 mois, je serais exclu du parlement et je ne pourrais pas me présenter aux prochaines. C’est une attaque directe contre les droits démocratiques de ceux qui ont voté pour l’Anti Austerity Alliance.’’
Quand le gouvernement est tombé il y a deux ans, le Labour a subi une défaite électorale écrasante ; l’avenir de la taxe sur l’eau est incertain… Pourquoi est-il aussi important de chercher à faire condamner les manifestants ?
‘‘Le mouvement contre la taxe sur l’eau a réellement fait trembler l’establishment politique. Pour la première fois depuis l’éclatement de la crise économique de 2008, la classe ouvrière s’est soulevée et s’est organisée contre une mesure d’austérité majeure du gouvernement et elle a gagné.
‘‘Bien que les taxes n’aient pas été à 100% abolies, elles ont été suspendues et ce sera très difficile pour eux de les réintroduire. Suite à cela, les travailleurs ont été massivement boostés par le mouvement. Cela se voit dans une certaine mesure avec les grèves victorieuses menées dans les services de bus et de trams à Dublin. Les infirmières, les profs et les vendeurs sont également en train de mener des actions de grève en ce moment.
‘‘De plus en plus, la ligne officielle d’une reprise économique rentre en confrontation avec la réalité des gens qui se prennent toujours de plein fouet l’austérité avec des emplois plus précaires et des salaires bas. L’establishment capitaliste sait qu’il devra probablement faire face à plus de mouvements et de grèves. Du coup, il espère utiliser les procès de Jobstown pour envoyer un signal clair aux travailleurs: si vous manifestez, si vous faites grève, vous pouvez être criminalisés.’’
Comment les activistes sont-ils en train de construire une campagne contre ces attaques ? Comment peut-on construire la solidarité ?
‘‘Malgré les énormes tentatives de la part des médias de l’establishment et de la droite, il y a une opposition massive à l’idée que les gens soient poursuivis pour avoir participé à une manifestation. Nous devons aller à l’offensive et construire une campagne d’opposition active. Les inculpés et soutiens ont construit le groupe “Jobstown Not guilty” (Jobstown Non-Coupable) pour construire une telle campagne. Nous allons activement à la rencontre des gens pour exposer les faits autour de cette manifestation et discuter de la portée des attaques auxquelles nous faisons face. Nous recevons beaucoup de soutien. Beaucoup de sections des syndicats, de fédérations étudiantes et de communautés locales ont exprimé leur soutien à la campagne.
‘‘Nous avons également eu beaucoup de signes de solidarité internationale de syndicalistes, de représentants élus et de personnalités connues, dont beaucoup de Belgique. De tels signes de solidarité sont un élan majeur pour la campagne. J’encourage les gens à aller voir leur délégation syndicale et leurs organisations pour faire passer des motions et envoyer des messages de solidarité.’’
Si le mouvement contre la répression est victorieux et que les charges tombent, quel en serait l’impact ?‘‘Le gouvernement est dans une crise profonde suite à la révélation que des supérieurs de la police ont été impliqués dans une campagne de diffamation contre des policiers de rangs inférieurs ayant exposé la corruption existante. Cela a été jusqu’à répandre de fausses rumeurs d’abus sur des enfants. Il est probable que le Premier ministre soit poussé à la démission suite à ce scandale. Il y a un dégoût énorme et un questionnement envers l’establishment. Si nous gagnons sur Jobstown, cela soulèvera des questions sur qui sont exactement ceux qui ont décidé de mener les poursuites et leurs motivations politiques. Le rôle de la police, mais aussi des médias serait également questionné et exposé et cela affaiblira encore plus le gouvernement.’’
