Tag: Grève générale 2014

  • Plan d’action syndical : pour quoi faire et comment assurer son succès ?

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    Vous en avez entendu parler, un plan d’action a été lancé par les directions syndicales : manifestation nationale le 6 novembre, grèves tournantes les lundis 24 novembre, 1er et 8 décembre et, enfin, grève générale nationale le 15 décembre. Et si ça ne suffit pas, on parle déjà de la possibilité que les grèves tournantes reprennent à partir du lundi 5 janvier. Cela fait très longtemps qu’un tel plan n’avait pas été lancé, l’ampleur des attaques du patronat et du nouveau gouvernement de droite nécessitait une réponse du même niveau. Seul un mouvement de masse pourra stopper les attaques et permettre à une alternative de se construire.

    Par Ben (Charleroi), article tiré de l’édition de novembre de Lutte Socialiste

    Construire l’unité parmi les travailleurs pour gagner face au patronat !

    On entend parfois certains militants dire que ce qu’il faut, c’est ‘‘faire chier les gens’’. Soyons clair, si le but est de construire un mouvement de masse capable de renverser le gouvernement mais aussi de construire une alternative à l’austérité, il faut savoir distinguer de quels gens on parle. Ce qu’il faut faire, c’est polariser le débat, clarifier que le patronat et les travailleurs n’ont pas d’intérêts communs et stimuler le conflit de classe en cours en identifiant clairement l’ennemi. Une fois l’ennemi identifié, il ne faut pas seulement ‘‘le faire chier’’ mais le confronter systématiquement avec pour but de changer le rapport de force en notre faveur. Il faut désarmer la classe dominante en utilisant notre arme la plus puissante : notre nombre.

    Pour cela, il faut organiser les masses. Et la minorité consciente a un grand rôle à jouer pour démasquer les injustices. La tâche peut sembler difficile car il est vrai qu’après des décennies de recul et de défaites, il est compréhensible que beaucoup de travailleurs n’aient plus confiance dans la possibilité d’entrer dans une confrontation victorieuse contre le patronat et le gouvernement. C’est pourquoi les plus conscients doivent montrer l’exemple, prendre des initiatives combatives, celles-ci pouvant inspirer des couches plus larges et redonner confiance dans la lutte. L’objectif doit être de gagner le cœur des masses et de leur montrer que leur frustration provient de l’austérité qu’elles subissent ainsi que du système capitaliste lui-même. Nous devons montrer que des alternatives sont possibles mais qu’elles ne peuvent être concrétisées qu’à travers des luttes de masse.

    Comment préparer les manifs et les grèves ?

    Les dates du plan d’action sont connues, d’autres se rajouteront peut-être, la campagne d’information et de mobilisation est donc lancée. Les distributions de tracts, les stands en rue, les discussions avec les amis et les voisins, les débats sur les réseaux sociaux, les actions de sensibilisation en rue, etc. seront nécessaires car nous ne pouvons pas compter sur les médias traditionnels pour nous informer correctement. Ils sont gagnés aux idées néolibérales et à l’austérité. A nous de défendre le point de vue des travailleurs, des jeunes et des victimes de l’austérité !

    Pour que ce plan devienne une réussite, il faut que les travailleurs et les jeunes se l’approprient. Nous devons le discuter sur les lieux de travail, en assemblées, et chacun doit pouvoir s’exprimer. Là où des étudiants ou des lycéens ont la possibilité de le faire, ils devraient également organiser des assemblées pour rejoindre le mouvement. Pour que ces assemblées soient des réussites, il faudrait que les militants combatifs les préparent convenablement. Les raisons et objectifs du plan d’action doivent être discutés autant que possible et le plan devrait être voté démocratiquement. Celui qui aura voté concernant ce plan d’action respectera mieux sa légitimité, même s’il a voté contre. Celui qui perd le vote pourra encore faire usage de son droit individuel de faire grève mais sans entraver la majorité qui voudra se rendre au travail. Cela nous permettra mieux d’évaluer ensuite la grève et de motiver les collègues pour la prochaine occasion.

    Dans les assemblées, nous devrions aussi discuter de la manière dont le plan va se concrétiser et du rôle que chacun peut et devrait y jouer. Afin de faciliter la mobilisation et pour éviter les divisions entre les différents syndicats mais aussi afin d’inclure dans la lutte les non-syndiqués, un comité de grève pourrait être élu par l’assemblée. Dans la plupart des cas, cette équipe serait certainement composée des délégués en front commun, renforcée par quelques collègues dynamiques, permettant ainsi d’intégrer tous ceux qui veulent prendre part à l’organisation pratique de la grève.

    Une présence massive au piquet de grève pour discuter entre collègues !

    Faire grève, ce n’est pas laisser deux délégués devant l’entreprise afin que tout le monde reste chez soi. Le piquet de grève n’a pas pour seul but de fermer l’entreprise, c’est aussi et surtout un outil pour reconstruire la confiance des travailleurs dans leur propre force.

    Participer à un piquet, c’est avoir l’occasion de discuter avec ses collègues sans la pression habituelle qu’on subit sur son lieu de travail, ça permet de construire la solidarité, d’apprendre à se connaître un peu plus, mais surtout de mener des discussions politiques que l’on n’a pas l’habitude de pouvoir mener durant les journées de travail. Un bon piquet est un piquet où on stimule le débat, où on discute stratégies, objectifs, alternatives, etc. Et il n’est pas rare qu’un bon piquet de grève permette non seulement de faire comprendre que les intérêts du patron et des travailleurs ne sont pas compatibles mais aussi que ce sont les travailleurs qui sont indispensables au fonctionnement de l’entreprise, pas les patrons.

    Plus la participation au piquet est massive, plus facile ce sera de convaincre les collègues indécis d’au moins venir discuter au piquet. Il est même possible que certains qui étaient tentés d’essayer d’aller travailler le jour de la grève changent d’avis en voyant une masse de leurs collègues devant l’entreprise. Et puis c’est quand même pour lutter contre l’austérité qu’on fait grève et qu’on accepte de perdre une partie de notre salaire, pas pour aller faire nos courses pour Saint-Nicolas ou pour Noël.

    Organiser le piquet.

    Évidemment, il ne suffit pas de décréter qu’on veut une présence massive au piquet pour que ce soit le cas. La présence au piquet, c’est une tradition qui doit se construire et ça nécessite une préparation concrète de chaque piquet. On ne peut pas rester toute une journée debout dans le froid à ne rien faire, et encore moins sous la pluie. Prévoir de quoi s’abriter, de quoi se réchauffer, de quoi manger, ça participe aussi à la réussite d’un piquet. Organiser des activités également, des débats, des projections de film de lutte, envoyer des équipes en solidarité aux piquets où il y a moins de gens, etc.

    Et pourquoi ne pas organiser une assemblée générale de bilan de la grève en fin de journée afin de voir comment on peut améliorer l’organisation de la prochaine ? Cela peut d’ailleurs être fait en commun avec tous les grévistes des entreprises voisines, du zoning,…

    Comment réagir face au service minimum ? La grève pour obtenir le service maximum !

    A chaque grève, la question du service minimum revient et c’est d’autant plus le cas avec la volonté du gouvernement de l’imposer à la SNCB.

    Soyons clairs: défendre le service minimum revient à s’attaquer au droit de grève, à vider la grève de son sens et de son utilité. Le service minimum affaiblit les travailleurs dans leur lutte contre le patronat. D’ailleurs, dans de nombreux secteurs, avec les coupes budgétaires et la dégradation des conditions de travail, c’est service minimum toute l’année. En fait, les rares moments où les travailleurs font grève dans ces secteurs, c’est pour revendiquer un service maximum, à travers des refinancements, des améliorations de conditions de travail, etc. Un malade qui doit patienter 2 heures aux urgences ou un navetteur dont le train n’a pas été nettoyé parce que la SNCB veut faire des économies pourrait en témoigner. Toute l’année, des trains sont supprimés ou en retard, et c’est entre autre pour éviter que ça empire que les travailleurs partent en action !

    C’est pourquoi, qu’importe le secteur, les travailleurs ne doivent pas accepter que le gouvernement et le patronat imposent un service minimum. Dans les rares secteurs où un risque d’accident existe, c’est le comité de grève lui-même qui s’arrange pour éviter les problèmes, cela fait partie de l’organisation de la grève.

    Sommes nous trop radicaux ?

    Le patronat et ses médias vont nous accuser d’être des radicaux, de vouloir nous substituer au gouvernement, d’être violents, etc. Mais la violence, elle vient du patronat et du gouvernement, elle vient de l’austérité qu’on doit subir, de la dégradation de nos conditions de travail et de vie. Cette violence, la majorité de la population doit la subir tous les jours en silence.

    Alors soyons clair, quand un système permet aux patronat, aux actionnaires et aux banques de s’enrichir sur le dos de la majorité des travailleurs, des jeunes et des plus pauvres, il est temps que ce système change, il est temps que les travailleurs prennent les choses en mains pour eux-mêmes et qu’enfin il reprennent une juste part de la richesse qu’ils produisent.

     

  • Le plus grand rassemblement syndical en 28 ans … noyé dans des articles sur les émeutes

     

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    Photo : MediActivista

    La manifestation du 6 novembre dernier a constitué la plus grande mobilisation syndicale depuis pas moins de 28 ans. C’est extrêmement significatif de la préparation pour les grèves régionales des 24 novembre, 1er décembre et 8 décembre ainsi que pour la grève générale nationale du 15 décembre. On ne pouvait imaginer meilleur moyen de convaincre les centaines de milliers de sceptiques de rejoindre le mouvement. Mais une semaine plus tard, dans les médias, cela ne semble plus être qu’un fait divers. L’essentiel de l’attention a été accordée aux troubles qui ont suivi la manifestation. Qui donc peut bien avoir intérêt à ce que cela se produise de la sorte? Est-ce une coïncidence si des provocateurs issus de la police et des militants d’extrême droite ont été signalés parmi les émeutiers?

    Le premier ministre officieux, Bart De Wever, a été prompt à déclarer dès jeudi dernier qu’une telle chose ne se produira pas à Anvers, là où il est bourgmestre, et que la police serait préparée à intervenir pour la manifestation du 24 novembre. Les médias ont ainsi immédiatement eu le prétexte pour poursuivre leur couverture des émeutes de la manière dont nous l’avons vu les jours après.

    De Wever ne savait visiblement pas qu’il y avait grève le 24 novembre et pas manifestation. Lors d’une grève, le travail est stoppé et il y a des piquets de grève aux entreprises. Toute personne qui a vu de près un conflit social devrait le savoir. De Wever n’en savait-il rien? A-t-il délibérément participé à la campagne de criminalisation de la contestation sociale? Était-ce par ignorance ou par provocation délibérée qu’il a parlé d’une manifestation à Anvers?

    Le secrétaire régional de la FGTB d’Anvers, Dirk Schoeters, a confirmé ce lundi sur Radio 1 : « Le front commun syndical ne prévoit aucune manifestation, nous l’avons communiqué à la police la semaine dernière déjà. » La FGTB Horval a noté à juste titre : « Il semble logique que De Wever informe les gens, mais il leur fait peur. Peur qu’Anvers soit une ville assiégée. Provoquer la violence pour répondre par la violence. C’est ce qu’a fait Thatcher en Angleterre.”

    L’objectif poursuivi est on ne peut plus clair : tenter de peser sur le large soutien dont dispose la résistance anti-austérité en assimilant toute résistance active à la violence, aux émeutes et autres afin de criminaliser la contestation. Avec ses déclarations dans les médias, De Wever ne fait que jeter de l’huile sur le feu. Est-ce pour préparer le terrain à la répression des piquets de grève ? Au moment du mouvement de grève contre le gel des salaires en janvier 2012, alors que De Wever n’était pas bourgmestre, ce dernier avait expliqué que la police aurait dû être déployée afin de maintenir l’activité du port. Il a depuis lors été élu et se retrouve aujourd’hui à la tête du conseil communal et de la police. Afin de parvenir à limiter le droit de grève, il se sert d’une image créée de toutes pièces et qui ne correspond en rien à la réalité : l’image selon laquelle une grève est synonyme de violence.

    Cette campagne médiatique de dénigrement a aussi été utilisée afin d’empêcher tout rapprochement entre le mouvement social au sens large et la police, elle-même sujette d’attaques portant sur les pensions. N’oublions pas que la première grande manifestation avant le rassemblement syndical du 23 septembre était une manifestation de la police. Peut-être De Wever pourra-t-il louer quelques provocateurs le 24 novembre pour mettre en pratique ses messages apocalyptiques? Cela ne devrait pas être difficile à trouver parmi les têtes brûlées que l’on trouve dans son parti.

    Que cela soit clair : les troubles causés par une petite minorité à la fin de la manifestation du 6 novembre étaient bien évidemment contre-productifs. Il est certain que des provocateurs y ont été impliqués. Que pensent d’ailleurs les agents de police du fait que leur sécurité ait été compromise par des provocateurs issus de leurs propres rangs? Des rapports font également état d’infiltration de la manifestation par des néonazis (il y a notamment des photos de néonazis faisant connaissance avec les canons à eau). Un travailleur d’origine chilienne présent à la manifestation a douloureusement rencontré cette clique en voulant savoir ce qui se passait. Il a été sauvagement frappé au visage par l’un des émeutiers avec le commentaire suivant : « fous le camp, sale arabe »!

    Ce ne serait pas la première fois que des provocateurs de la police déclenchent des troubles violents dans le but de criminaliser le mouvement et de saper son soutien public. Dans le mouvement anti-globalisation, c’est ce que nous avions déjà vu en 2001 à Göteborg et plus particulièrement à Gênes sous la direction de Berlusconi. Un jeune manifestant y est décédé. A Anvers, lors d’une manifestation organisée par la campagne antifasciste flamande du PSL et des Etudiants de Gauche Actifs, Blokbuster, des policiers en civil avaient revêtu des chasubles rouges de Blokbuster pour ensuite tenter de se mêler à la manifestation. Seul le fonctionnement efficace de notre service d’ordre a permis, en les faisant sortir, d’éviter qu’ils ne jouent un rôle néfaste en incitant de jeunes manifestants à la violence.

    Il a unilatéralement été question de pointer du doigt les dockers d’Anvers après la manifestation, même s’il est vrai que certains auront pensé qu’il s’agissait de la meilleure manière de défendre leur statut. Tout comme les travailleurs des chemins de fer, de Bpost et d’innombrables autres, les dockers font face à la libéralisation. Ces dernières années, à la place de réunir tous ces secteurs dans la lutte, les syndicats les ont laissés isolés chacun dans leur secteur. Dans ces circonstances, il semble impossible de pouvoir tenir tête à une directive européenne. Si les dockers ont jusqu’ici pu éviter la libéralisation du travail portuaire, ce n’est pas parce qu’ils ont gentiment été trouver les institutions européennes à Strasbourg. Certains ont décidé de donner quelques claques. Mais nous pensons que la crainte de l’establishment pour tout conflit social prolongé durant lequel les ports auraient été longtemps fermés a été bien plus décisive que les violences elles-mêmes.

    Les services de police connaissent eux aussi fort bien ce contexte. Ils savaient donc exactement où envoyer leurs agents provocateurs pour obtenir le meilleur effet. Selon les dockers, quelques jeunes immigrés ont également été impliqués dans les troubles. Nous n’en savons rien, mais cela pourrait bien être le cas, ils ont une longue expérience de contrôles arbitraires et d’autres formes de harcèlement policier. En voyant l’opportunité de prendre leur revanche, au côté de dockers flamands, il ne fait aucun doute que certains l’auront saisie. Éviter que différents groupes ne restent isolés et se laissent aller à des tactiques désespérées nécessite une stratégie syndicale commune afin d’unifier la lutte contre la libéralisation de tous les secteurs. Une stratégie destinée à vaincre avec efficacité.

    Chaque faiblesse du camp des travailleurs sera exagérée jusqu’à l’absurde et pleinement exploitée par le gouvernement de droite dure qui se rend bien compte qu’il est sous pression. Les sévères attaques contre nos conditions de vie et toutes nos conquêtes sociales doivent être combattues. La manifestation phénoménale du 6 novembre, avec la participation de peut-être 150.000 manifestants, a constitué la plus grande mobilisation syndicale depuis 1986. Le gouvernement tentera systématiquement de briser cette unité. Nous ne pouvons pas nous laisser attraper dans ce piège.

    Comme nous l’avons déjà écrit pour ce site et notre journal, Lutte Socialiste : « Cette épreuve de force peut être remportée, ce gouvernement peut chuter. Mais cela exigera des efforts conscients et déterminés pour aller vers l’unité la plus grande possible dans l’action. Ce besoin d’unité est perçu de manière instinctive, mais peut aussi se retrouver sous pression. L’unité entre étudiants et travailleurs dans secondaire et le supérieur en Flandre peut et doit être organisé sur les écoles via des assemblées générales afin de discuter ensemble de l’application du plan d’action jusque dans ses moindres détails. Il en va de même plus globalement, jusqu’à la moindre entreprise. Il faut convoquer des assemblées du personnel, en front commun, tous ensemble ; ouvriers et employés ; verts, rouges et bleus. Mais il faut aussi des assemblées générales au niveau de chaque ville pour réunir les délégués des assemblées d’écoles et d’entreprises afin de continuer à forger cette unité. » Des assemblées du personnel seraient utiles pour assurer la participation de tout le monde et repousser chaque tentative de semer la discorde et / ou la confusion et le doute.

    La lutte pour renverser le gouvernement Michel ne sera pas évidente. Il ne se laissera pas faire comme ça. Le 6 novembre n’était à ce titre que le début d’un plan d’action ambitieux. Tirons-en les leçons pour les étapes suivantes. Le mouvement syndical doit par exemple comprendre son propre service d’ordre lors des manifestations et grèves pour extraire les éléments réactionnaires et discuter avec les manifestants pour les convaincre de ne pas céder aux provocations de ceux qui ont tout intérêt à ce qu’une manifestation dégénère. Ce n’est que de cette façon que nous pourrons veiller à ce que les journées de grève régionales nous conduisent peut-être vers la plus grande grève générale de l’histoire de Belgique!

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  • Contre les Thatcher belges : quelle alternative?

    PSNVA
    Photo : Maxime Deroeux

    La déclaration gouvernementale avait à peine été rendue publique que les syndicats déposaient un plan d’action ambitieux allant crescendo jusqu’à une grève générale de 24h le 15 décembre prochain. Peu de temps après, les cheminots sont partis en action, puis le siège du MR a reçu la visite de militants de la FGTB de Namur qui ont coloré sa façade.

    Par Nicolas Croes

    Très logiquement, la tension n’a cessé de monter suite aux continuelles provocations du gouvernement Michel. Les réactions n’ont pas manqué non plus de la part de l’opposition politique. Peut-on pour autant dire que tous les ennemis du gouvernement fédéral sont nos amis ?

    ‘‘Des mesures d’une brutalité sans précédent’’

    C’est ce que veut dénoncer le PS, notamment avec sa campagne ‘‘injuste.be’’, lancée à coups de demi-pages dans les quotidiens et de vidéos contre le gouvernement ‘‘MR-N-VA’’ : ‘‘Le gouvernement MR N-VA coupe dans votre portefeuille. Moins 400 euros par an par personne. Ils suppriment l’indexation de votre salaire.’’ On imagine bien à quel point le PS est à l’aise pour parler des précédents, lui qui a collaboré aux 25 dernières années de recul social organisées par les autorités fédérales (dont la modération salariale et diverses manipulations de l’index…) et qui est encore au pouvoir en Wallonie et à Bruxelles.

    Reste que le Boulevard de l’Empereur (siège du PS) a su élaboré élaborer une stratégie d’opposition qui pourrait presque parvenir à faire oublier les 22 milliards d’économie du gouvernement Di Rupo ! C’est comme si le PS n’avait jamais voté des mesures telles que l’exclusion des allocations d’insertion, qui frappera des dizaines de milliers de chômeurs dès le 1er janvier prochain ! Ainsi, Laurette Onkelinx a lancé la charge en séance plénière de la Chambre : le projet du gouvernement ‘‘frappera de plein fouet tous les travailleurs de ce pays.’’ Elle continuera par la suite dans la presse : ‘‘les ruptures de justice sociale, elles s’annoncent très graves ! Nous devons les dénoncer !’’

    Mais, de temps en temps, la belle mécanique connaît un couac… Lors d’une conférence de presse, Di Rupo a trouvé utile de préciser que 70% des mesures prévues par le gouvernement Michel ont en fait été décidées… par le précédent gouvernement, sous sa direction ! Pauvre Laurette qui voit ainsi dévoilée l’hypocrisie de ses efforts. Finalement, est-il question d’autre chose que du remplacement de ‘‘ruptures de justice sociale (…) très graves’’ par des ruptures de justice sociale graves, et non plus très graves ? Le débat n’est pas neuf, on nous a sorti à toutes les sauces le discours sur l’austérité qui se transforme soudainement en rigueur une fois le PS impliqué.

    C’est un fait, la chute du gouvernement Michel ne dérangerait pas le PS, loin de là. Il soutient d’ailleurs – en parole – la manifestation du 6 novembre à Bruxelles. Mais ce n’est que pour profiter de l’aubaine pour préparer son retour au sein d’une nouvelle coalition gouvernementale. C’est avec cet objectif en tête qu’il ne parle que du gouvernement ‘‘MR-NVA’’ pour épargner le CD&V, son partenaire traditionnel. Mais l’ingrat président de ce même parti, Wouter Beke, a tout de même rappelé que, sous Onkelinx, le budget des soins de santé n’avait connu qu’une croissance de 0,9% en 2013, alors que le gouvernement actuel propose 1,5%…

    Certes, Di Rupo et Michel ne sont pas des gouvernements identiques. L’actuelle coalition fédérale veut aller plus loin et plus vite dans l’application de l’austérité, elle souhaite ouvertement et durablement changer les relations de forces entre travail et capital. De son côté, le PS préfère suivre une voie moins tumultueuse mais à la destination identique : faire payer la crise à la collectivité et assister le transfert des richesses vers les poches du privé.

    A Charleroi, les membres du personnel communal en lutte contre la menace de plusieurs centaines de licenciements dans les services communaux ont entendu de la bouche même de Paul Magnette que les économies sont ‘‘indispensables’’. Les enseignants francophones qui ont suivi les arrêts de travail des 22 et 23 octobre dernier sont eux aussi bien conscients qu’il faut refuser de choisir entre ‘‘l’austérité’’ et la ‘‘rigueur’’ : nous devons faire dégager l’austérité sous toutes ses formes !

    Jean-Marc Nollet (ECOLO) a eu raison de dire : ‘‘Il y a une filiation sur le plan socio-économique entre le gouvernement Michel et celui de Di Rupo.’’ Il aurait juste pu aller jusqu’au bout de sa logique et rajouter qu’il en va de même entre l’actuel gouvernement wallon (sans ECOLO) et le précédent (avec ECOLO) qui a notamment voté en faveur du désastreux Traité d’austérité européen, le TSCG…

    Un “plan Cactus” ?

    La réaction de De Wever a été claire : ‘‘Dois-je vraiment honorer les cris d’Onkelinx d’une réponse ? (…) Je préfère aller boire un café jusqu’à ce qu’elle s’arrête.’’ Et de fait, jouer l’opposition à la Chambre, dans la presse et sur Facebook, ce n’est pas ça qui va stopper l’avalanche d’austérité.

    Sur ce point, le PTB a été bien plus conséquent : la première mobilisation anti-austérité à avoir suivi la déclaration gouvernementale fut son œuvre. Pas moins de 7.000 personnes ont participé à sa ‘‘Protest Parade’’ le 19 octobre dernier. Nous déplorons cependant l’interdiction faite à toute personne porteuse d’un signe distinctif d’une autre organisation ou d’un autre parti politique (drapeau, pancarte, journal,…) de participer au cortège ailleurs qu’en toute fin de manifestation, derrière un imposant service d’ordre qui en a choqué plus d’un.

    Cette mobilisation visait en fait essentiellement à mettre en avant le Plan Cactus du PTB, ce cactus incarnant ‘‘l’alternative que nous voulons avancer, un aiguillon pour un renouveau social, écologique et démocratique’’, aux dires de Raoul Hedebouw, député fédéral du PTB. Nous espérons quand même que l’organisation de la Protest Parade n’est pas illustrative de ce que signifie ce ‘‘renouveau démocratique’’…

    Pour le reste, ce plan prévoit d’obtenir 22 milliards d’euros de recettes à travers une taxe des millionnaires, une juste imposition des entreprises, une lutte ferme contre la fraude fiscale, une taxe sur la spéculation, etc. afin de financer l’augmentation des pensions, la construction d’écoles, la création de logements sociaux, une réduction des médicaments… Très honnêtement, entendre une voix divergente, qui ne se plie pas au dogme de l’absence d’alternative à l’austérité, ce n’est déjà pas si mal. Et ce plan rappelle à juste titre qu’il y a eu 12.000 millionnaires de plus en Belgique l’an dernier ou encore que la fortune privée des 20 millionnaires les plus riches de Belgique s’élève à 500 milliards d’euros. Effectivement, c’est loin d’être la crise pour tout le monde.

    Mais le ‘‘Plan Cactus’’ – tout en dénonçant le capitalisme en tant que système notamment au travers d’une citation de Naomi Klein – ne propose au final qu’un aménagement de ce système basé sur une taxation plus équitable, sans remettre fondamentalement en cause la faillite totale d’une économie basée sur la propriété privée des moyens de production.

    Une taxe sur la spéculation, cela signifie-t-il de l’accepter ? Pourquoi donc consacrer 4,5 milliards d’euros au remboursement de la dette publique comme le prévoit le PTB dans son Plan Cactus alors que le parti se disait favorable à la remise en cause du paiement de la dette aux spéculateurs avant les élections? Comment faire face à l’inévitable fuite des capitaux qui fera suite à un changement de régime fiscal sans nationaliser sous contrôle démocratique la totalité du secteur financier ?

    Il nous faut une autre société !

    Face au gouffre de la crise économique capitaliste, le Plan Cactus va dans la bonne direction. Mais à avoir peur de sauter suffisamment loin, on ne peut hélas pas éviter de sombrer à son tour dans le précipice. Le PSL veut participer à ce débat sur le programme alternatif à défendre, en défendant énergiquement la reprise en main publique et démocratique des secteurs-clés de l’économie tels que la finance, la sidérurgie, la grande distribution, etc.

    Ce n’est qu’ainsi que nous pourrons disposer des moyens qui nous permettront non pas seulement de limer les aspérités les plus dures d’un système basé sur l’exploitation, mais de construire une société alternative basée sur la solidarité et le développement de l’Humanité. Défendre cette alternative, la voie vers une société socialiste démocratique, est peut-être plus compliqué que d’en rester à l’air du temps, mais c’est la seule manière de préparer le mouvement social aux réels enjeux qui nous font face.

  • Les Thatcher belges en action… Attaquer le droit de grève pour museler toute opposition

    piquet_carrefourIl ne fait aucun doute que le nouveau gouvernement de droite compte peu de partisans dans les rangs syndicaux. Tout l’accord gouvernemental n’est qu’une succession d’attaques et de provocations contre le mouvement de travailleurs et ses conquêtes sociales. Le gouvernement sabre violemment dans les salaires, les pensions et les services publics et ne semble guère se préoccuper de la contestation que cela provoquera.

    Par Tim (Bruxelles)

    La concertation à la poubelle

    Lorsque l’on a demandé à la présidente de l’Open-VLD, Gwendolyn Rutten, si le gouvernement était prêt à négocier avec les syndicats concernant les attaques prévues par le gouvernement, elle a répondu que l’orientation des réformes n’était pas discutable. “Nous sommes, en effet, élus par des gens qui ne lancent pas de pierres et qui n’organisent pas de grève sauvage”. C’est en ces termes qu’elle a rejeté la concertation avec les syndicats. Cette arrogance est aujourd’hui largement présente dans les sphères de droite : comme l’opposition syndicale en est encore à ses débuts, plusieurs réactionnaires se risquent à l’ouvrir plus qu’à l’accoutumée. Pour l’instant.

    Mais la bourgeoisie a en tête les paroles du leader syndical irlandais James Larkin: “Les grands de ce monde n’ont l’air grands que parce que nous sommes à genoux. Levons-nous !” C’est pourquoi il désire éviter de voir le mouvement ouvrier se dresser et s’opposer à ses mesures. C’est la raison pour laquelle les attaques contre les droits syndicaux sont si nombreuses dans l’accord gouvernemental.

    Déni du droit de protester

    Le gouvernement veut instaurer un “service minimum” Chez Belgocontrol, dans les prisons et à la SNCB. Ces trois secteurs sont ciblés parce que qu’ils ont été à la pointe du combat contre l’austérité et les mauvaises conditions de travail dans leur secteur. Les prisons souffrent de manque d’effectif et de cellules surpeuplées. Dans les aéroports et à la SNCB, surtout, il y a de moins en moins de personnel pour de plus en plus de voyageurs. On économise lourdement sur le matériel roulant et l’entretien, avec pour résultat que notre réseau ferroviaire est de moins en moins sûr et ponctuel.

    L’instauration d’un service minimum engendre de nombreuses questions. Comment l’appliquer ? En étendant les dispositions de la SNCB pour les dimanches aux jours ouvrables alors qu’il y a trois fois plus de voyageurs que le week-end ? Quels trains ne rouleront pas ? Un tel service minimum ne peut être appliqué qu’en interdisant tout droit de grève à la majorité du personnel. Economiser dans les services publics et interdire les protestations que cela entraine : voilà l’idée qui se cache derrière ce service minimum.

    Une main tendue toute symbolique

    De plus, le gouvernement fait clairement comprendre qu’il n’est pas prêt à respecter la tradition de la concertation sociale. Dans l’accord de gouvernement, il est écrit que pour les grandes attaques contre les acquis de la classe ouvrière, il veut écouter “l’avis des partenaires sociaux”. Kris Peeters considère que c’est une main tendue. Mais cet “avis” est purement symbolique : les syndicats ne seront impliqués dans les discussions que s’ils sont d’accord avec les réformes asociales qui sont, en fait, indiscutables.

    Le gouvernement montre ainsi qu’il veut aller à la confrontation directe. La tactique des gouvernements précédents de détricotage social progressif, via une concertation organisée avec les syndicats, est remplacée par des provocations et des agressions contre les syndicats. La stratégie syndicale devra s’y adapter: seul un mouvement large et bien organisé peut stopper cette politique.

    Les militants du PSL contribueront à la construction d’un large mouvement de protestation pour faire chuter ce gouvernement, mais surtout pour mettre fin à toute la politique d’austérité !

  • Les femmes, en première ligne des victimes de l’austérité

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    Nous avons pu lire partout le menu des horreurs que nous a concocté notre cher gouvernement de droite dure ainsi que celui des entités fédérées. Les travailleurs vont trinquer, et n’oublions pas que les femmes représentent la majorité de ceux-ci ! Au menu, de l’austérité en entrée, en plat principal… et au dessert ! Et toute analyse quelque peu approfondie de la crise démontre à quel point celle-ci touche particulièrement les populations fragilisées dans la société, et donc malheureusement les femmes.

    Par Mandy (Liège)

    Précarisation, pertes d’emplois et de revenus

    A tous les niveaux de pouvoir, on assiste au démantèlement de l’emploi dans la fonction publique avec la réduction du nombre de fonctionnaire notamment par leur non-remplacement. On parle même de pouvoir faire appel à des intérimaires/contractuel(le)s, c’est-à-dire des contrats précaires, pour des ‘‘besoins spécifiques’’. Or, une importante partie des travailleurs de la fonction publique sont des femmes (69,2% en Europe). Ces femmes qui pouvaient jusqu’alors disposer de salaires féminins supérieurs à ceux du privé, avec de meilleures conditions de travail permettant souvent de concilier plus aisément vie privée et vie professionnelle, se retrouvent avec une précarisation de leur situation.

    Au niveau de la région wallonne, la réduction de 1,5% de la valeur des points APE (Aide à la promotion de l’emploi pour le secteur non marchand) va avoir d’importantes incidences dans le secteur socio-culturel, où les femmes sont également plus représentées.

    Au niveau de la région bruxelloise, la volonté exprimée est ‘‘d’assurer la pérennité des titres-services’’ et leur viabilité budgétaire. En d’autres termes : institutionnaliser la précarité de l’emploi des femmes sachant que la majorité des travailleurs occupés par ces titres-services sont féminins. Une étude de l’ONEM concernant l’exclusion des chômeurs de longue durée selon sexe démontre que les femmes sont massivement poussées vers les emplois précaires (10 % des chômeuses de longue durée qui sortent du chômage se dirigent vers le régime des titres-services contre à 0,4 % pour les hommes).

    Travail en dents de scie, pensions rabotées

    La retraite est déjà depuis longtemps un facteur d’inégalité hommes-femmes. L’écart de pension entre femmes et hommes s’élève en moyenne à 23 % et grimpe à 33 % parmi les indépendants. Un tiers des pensionnés et plus de la moitié des pensionnées (60 %) doivent vivre avec moins de 1 000 euros par mois ! Le marché du travail est structurellement inégalitaire, les femmes touchant généralement une rémunération inférieure à celles des hommes (l’inégalité salariale reste importante: les employées gagnent en moyenne 25 % de moins que les employés et les ouvrières 17 % de moins que les ouvriers). Les femmes sont également plus concernées par des carrières professionnelles rarement linéaires, avec des emplois à temps partiels et irréguliers, souvent marquées par des arrêts de travail pour raisons familiales.

    Le gouvernement fédéral veut notamment augmenter l’âge de la retraite de 62 ans à 66 ans en 2025 et à 67 ans en 2030 avec également un allongement des durées de cotisations nécessaires pour toucher une pension complète (41 ans de carrière en 2017 et 42 ans en 2019). Mais trois quarts des travailleuses (contre un quart des travailleurs) n’atteignent pas une carrière de 42 ans !

    Au cœur de la destruction sociale

    Les budgets de protection sociale subissent des restrictions draconiennes : diminution des allocations de chômage, des allocations sociales, des aides aux familles, des allocations de maternité,… Comme les femmes sont plus dépendantes des allocations sociales que les hommes (puisqu’elles assument encore essentiellement le rôle de principale responsable de la famille et sont souvent financièrement précaires), elles sont plus fortement touchées. Les groupes les plus vulnérables sont les mères célibataires.

    Les allocations familiales ne correspondent déjà pas aux besoins de l’enfant, mais 176 millions d’économie vont quand même être réalisées en Flandre en n’indexant pas les allocations familiales deux ans durant. Pour une famille de 3 enfants, cela représentera facilement une perte de 220 euros. Le nouveau gouvernement flamand veut également simplifier le système des allocations familiales en instaurant un même montant d’allocation pour chaque enfant : dès 2017, les 150.000 familles flamandes avec 3 enfants perdraient annuellement plus de 500 euros !

    Concernant le chômage, les femmes sont loin d’être épargnées. Sur les 32.000 chômeurs qui seront virés au 1er janvier, en Wallonie, 64% seront des femmes. L’analyse de la FGTB wallonne éclaire encore mieux cette catastrophe puisqu’ environ 25% de tous les futurs exclus sont en réalité des femmes ayant une famille à charge (une famille sur trois est monoparentale et plus de 80% de ces familles sont portées par des femmes). Plusieurs milliers de femmes seules avec enfants vont donc se retrouver obligées de recourir à l’aide sociale via le CPAS.
    N’oublions pas la réforme du chômage qui supprime l’allocation de garantie de revenus pour les temps partiels concernant les personnes sous statut de cohabitant : 4 travailleurs à temps partiel sur 5 sont des femmes.

    Contrairement aux idées reçues, il s’agit rarement d’un choix idéologique, les contingences matérielles sont fondamentales. Si on doit diminuer le temps de travail d’un parent pour s’occuper des enfants, c’est souvent celui de la femme, dont le salaire est généralement moindre. Ajoutons à cela, que l’âge maximum d’accès aux allocations de chômage sera de 25 ans, au lieu de 30 ans, ce qui va exclure de nombreux universitaires mais également ceux qui travaillent ou ont travaillé à temps partiel et qui n’ouvriront pas leur droit au chômage sur base du travail dans un contexte de flexibilisation croissante de l’emploi (temps partiel, CDD, intérims, titre service, etc.). Selon la FGTB, une majorité écrasante de femmes n’accèdent jamais au chômage sur base du travail.

    L’offensive est également généralisée contre les services publics : soins de santé, éducation, transports en commun,… Tout y passe avec des budgets réduits et/ou des frais accrus pour les usagers. Cela affecte triplement les femmes.

    D’abord parce qu’elles sont les premières usagères de ces services. Leur participation au marché du travail dépend de services à l’enfance accessibles, elles ont plus recours aux services de santé pour elles-mêmes (cf. soins gynécologiques, grossesse,…) ou pour leurs proches, elles utilisent plus les transports publics, etc. Ensuite, elles représentent la majorité des travailleurs dans l’éducation en tant que professeur dans les écoles maternelles, primaires et secondaires, en tant qu’accueillante extrascolaire, en tant qu’assistantes sociales mais aussi infirmières,… Ces coupes budgétaires visent directement leurs conditions de travail. Et finalement, ce sont elles qui compensent le plus largement dès qu’un service n’est plus rendu par la collectivité.

    Concernant les soins de santé 355 millions d’euros d’économie vont être réalisées pour l’année 2015, notamment avec une réforme du ticket modérateur, qui passera de 8,23 à 12 euros pour certaines spécialisations dont la gynécologie, une spécialisation fort loin d’être un luxe. Les femmes ayant accouché devront aussi quitter la maternité un demi-jour plus tôt. Le prix que le patient paie de sa poche chez le médecin spécialiste va augmenter de plus de 45%, même les bénéficiaires de l’intervention majorée (qui gagnent moins de 1.400 euros par mois) devront payer plus cher.

    La Wallonie a également décidé de reporter certains investissements dont ceux qui concernent les crèches, les maisons de repos,… et qui dit investissements bloqués, dit les jobs qui vont avec aussi ! La Flandre, d’ailleurs, a prévu une hausse des tarifs pour l’accueil des enfants. Ainsi, conduire un enfant à la crèche coûtera 65 euros de plus par mois (780 euros par an). De même, les services publics dans les villes, les communes et les provinces de Flandre vont subir des économies drastiques.

    Les tâches de soins et d’éducation délaissées par la fonction publique vont échoir sur les femmes via une augmentation de leur travail gratuit et invisible dans la famille. Des services collectifs de qualité, en nombre suffisant et abordables financièrement, constituent des leviers incontournables de l’égalité des sexes, de l’autonomie financière des femmes et, à terme, de leur émancipation. Les politiques d’austérité, pénalisant le droit à l’emploi rémunéré des femmes, les obligent à regagner la sphère privée pour y rendosser leur rôle dit ‘‘traditionnel’’ de mère et/ou d’épouse au foyer. Comme la perte de services publics est synonyme d’augmentation du travail domestique et de soins des femmes, certaines d’entre elles n’ont pas d’autre choix que de soit diminuer leur temps de travail et dès lors, de basculer dans l’emploi à temps partiel, soit de renoncer à exercer un emploi rémunéré.

    Pour l’émancipation des femmes

    L’ensemble des données fournies ici atteste bien de l’antinomie profonde opposant politiques austéritaires et émancipation des femmes. Ce dont les femmes ont besoin, c’est ce dont l’entièreté de la classe des travailleurs a besoin : de bons salaires, de bonnes conditions de travail, des services publics de qualité qui prendront aussi en charge les tâches ménagères.

    Les inégalités font partie intégrante du code génétique du capitalisme et, pour s’en débarrasser, c’est le capitalisme qu’il faut éliminer pour le remplacer par une société juste et égalitaire, une société socialiste démocratique.

  • Les Thatcher belges à l’action… Démantèlement et liquidation du secteur public

    Photo : Isabelle Marchal
    Photo : Isabelle Marchal. manifestation du 6 novembre 2014.

    L’accord de gouvernement Michel est une déclaration de guerre totale contre l’ensemble du secteur public. Le gouvernement passe au démantèlement complet des services publics et des équipements collectifs et lance une attaque frontale contre le statut et les droits des fonctionnaires. Il joue la carte d’une société individualiste et dure dans laquelle la majorité de la population aura à l’avenir à payer plus pour moins de services publics.

    Par Tim (Bruxelles)

    Les sommes que le gouvernement veut épargner sur les dépenses publiques sont hallucinantes : 8 milliards d’euros dont 2,3 milliards sur les institutions publiques et les fonctionnaires et 5,1 milliards d’euros sur la sécurité sociale. Une telle austérité est impossible à appliquer sans fondamentalement toucher à la qualité du service public.

    Sur une mauvaise voie

    La SNCB à elle seule va devoir supporter une bonne partie de cet effort : sur toute la législature, il s’agit de 2,1 milliards d’euros d’économies. Il faudra économiser à une vitesse de croisière : 663 millions d’euros par an, soit un tiers de toute la dotation publique à la société.

    La confusion que le gouvernement a initialement semée en ne précisant pas l’ampleur exacte des économies a eu pour effet que les cheminots ont déjà mené des actions spontanées et finalement, bloqué un train spécial transportant la ministre de la mobilité Gallant pour lui offrir une calculette. Malheureusement, c’est le pire scénario qui est devenu réalité : une économie d’un tiers de la dotation publique ne représente rien d’autre que le démantèlement complet de la SNCB comme service public.

    Aujourd’hui déjà, le matériel désuet et mal entretenu a son impact sur la ponctualité de notre transport ferroviaire. Le personnel a aussi bien du mal à prendre ses jours de congé ou de récupération pour pouvoir se reposer entre deux équipes de plus en plus stressantes. De quoi aura l’air notre réseau ferroviaire après toutes ces économies ? L’intention est claire : préparer la SNCB pour une privatisation complète. Ce n’est pas par hasard que le passage de l’accord gouvernemental sur les chemins de fer se termine explicitement par cette proposition.

    Risque d’effondrement de la cathédrale de la sécurité sociale

    Même les 5 milliards d’économie sur la sécurité sociale préparent un scénario identique : en abaissant les cotisations patronales à la sécurité sociale à 25%, le gouvernement assure que nos pensions et allocations ne puissent plus être payées à l’avenir.

    Le système de sécurité sociale belge est une cathédrale internationalement reconnue : le gouvernement est conscient du fait que la casse directe d’un tel système n’est pas acceptable pour beaucoup. Sa tactique consiste donc à en éliminer les contreforts en espérant que la cathédrale s’effondre de l’intérieur à terme.

    Rien que dans les soins de santé, 2,6 milliards d’euros seront économisés malgré les frais croissants pour les dépenses médicales, la norme de croissance dans le secteur de la santé est limitée à 1,5%, sous le précédent gouvernement, elle était encore de 4,7% (même si elle fut moindre dans les faits). En même temps, le gouvernement ne fait pas de mystère sur ceux qui recevront les coups : les patients paieront plus pour les soins, les prestataires de soins auront d’encore pires conditions de travail avec aussi une flexibilisation supplémentaire des heures de travail pour le personnel soignant par l’obligation de services de garde.

    Mais l’attaque est aussi lancée contre le statut des autres fonctionnaires : pensions et conditions de travail sont démolies et le travail intérimaire est fortement élargi dans les services de l’Etat. Si nous laissons libre cours à ce gouvernement, dans 5 ans, il ne restera plus que des cendres de nos services publics.

    Défendons les services publics !

    Résister est une nécessité absolue. Dans une société qui devient toujours plus dure, les services publics sont nécessaires pour offrir un niveau de vie acceptable à chacun, même aux plus faibles. Nous vivons dans un monde qui n’a jamais été si contrasté : jamais autant de richesses n’ont été produites qu’aujourd’hui mais elles n’ont aussi jamais été injustement réparties. Tandis que la majorité de la population subit des mesures d’austérité et des attaques asociales gigantesques, les super riches restent hors d’atteinte.

    Combattons ce gouvernement des riches : battons-nous contre l’austérité et pour une société socialiste où les richesses seront collectivement gérées et disponibles pour être investies dans les besoins de l’ensemble de la population mondiale !

  • Les attaques nous concernent tous, une lutte unitaire est nécessaire pour faire chuter ce gouvernement !

    anvers‘‘C’est maintenant qu’il faut y aller, après ce sera trop tard !’’ Ce sont les mots d’un étudiant du secondaire, prononcés lors de l’assemblée générale bondée qui a pris place après la grève des écoles à Gand ce 22 octobre.

    Par Els Deschoemacker

    Il a poursuivi en disant qu’il fallait lier les actions des étudiants du secondaire et du supérieur au plan d’action national des syndicats. Il n’a pas été jusque-là, mais le ton employé impliquait clairement que si nous avions à notre disposition un front uni des travailleurs et des étudiants, nous serions un millier de fois plus forts pour remporter la victoire. Même son de cloche lors des assemblées syndicales de masse organisées avant de préparer les actions de grève. ‘‘Tous les syndicats en front commun contre ce gouvernement’’, résumait à Anvers le président de la FGTB, Rudy De Leeuw.

    Ces deux anecdotes expriment un sentiment d’urgence vis-à-vis de l’action mais aussi la compréhension du caractère antisocial des mesures des autorités ainsi que du potentiel d’un bon plan d’action syndical national pour envoyer valser ce gouvernement.

    Avant même que le gouvernement ne soit formé, les étudiants de Gand étaient déjà descendus dans la rue contre l’austérité dans l’enseignement. Pareil pour la police. Le secteur de la culture s’est organisé, avec entre autres la campagne “Hart boven Hard” en Flandre contre les importantes réductions de subventions. Ces dernières semaines, le sentiment d’urgence était aussi très grand parmi les cheminots, qui ont décidé de ne pas attendre le plan d’action national avant de partir en action.

    Une telle pression est inédite depuis les années ‘80. La grève générale du 15 décembre ne sera pas la première depuis lors. Une des plus grandes grèves générales de l’histoire de notre pays a eu lieu contre le Plan Global, en 1993. Le Pacte des générations a connu deux grèves générales en 2005 et le gouvernement Di Rupo en a affronté une en 2012. Toutes ces grèves ont eu leur effet. Elles ont toutes permis d’adoucir les attaques, qui auraient pu être bien pires. Mais aucune d’entre elles n’a véritablement repoussé l’attaque, encore moins conduit à la chute du gouvernement. L’argument ultime de la direction syndicale pour empêcher l’éruption de la grève politique et pour, au final, faire cesser le mouvement avec une décision prise au sommet était que ces gouvernements étaient les plus à gauche possibles et que leur chute allait entrainer l’arrivée d’une coalition encore plus à droite.

    Aujourd’hui, cet argument ne prend pas ! Nous avons face à nous le gouvernement le plus à droite depuis les années ‘80, et nous allons le sentir. Le caractère antisocial de ce gouvernement est très bien perçu, et même la direction syndicale a cette fois ouvert grand la porte à une dynamique capable de mener à la construction d’un véritable rapport de forces entre les syndicats et le gouvernement.

    Cette épreuve de force peut être remportée, ce gouvernement peut chuter.

    Mais cela exigera des efforts conscients et déterminés pour aller vers l’unité la plus grande possible dans l’action. Ce besoin d’unité est perçu de manière instinctive, mais peut aussi se retrouver sous pression. L’unité entre étudiants et travailleurs dans secondaire et le supérieur en Flandre peut et doit être organisé sur les écoles via des assemblées générales afin de discuter ensemble de l’application du plan d’action jusque dans ses moindres détails. Il en va de même plus globalement, jusqu’à la moindre entreprise. Il faut convoquer des assemblées du personnel, en front commun, tous ensemble ; ouvriers et employés ; verts, rouges et bleus. Mais il faut aussi des assemblées générales au niveau de chaque ville pour réunir les délégués des assemblées d’écoles et d’entreprises afin de continuer à forger cette unité.

    Ce gouvernement va tout faire pour briser la solidarité en essayant de conclure des compromis avec tel ou tel groupe pris séparément. Les médias flamands fulminent aujourd’hui contre les cheminots wallons entrés en lutte, avec pour seul but de faire passer ces militants pour des sauvages. A toutes ces tentatives de rompre le front uni doivent faire face une propagande efficace, des actions audacieuses et des slogans rassembleurs et qui sonnent juste. La visite de solidarité de syndicalistes anversois aux assemblées syndicales et aux actions à Liège ont été un bon exemple de la manière de procéder, cela contribue à renforcer la conscience des militants.

    Ce gouvernement peut chuter, mais cela exige une solidarité d’acier et l’unité la plus forte de la part de l’ensemble de la classe des travailleurs belges : jeunes et vieux, francophones et néerlandophones, d’origine belge ou immigrée, hommes et femmes : tous ensemble contre ce gouvernement antisocial !

  • En plus du plan d’action, le mouvement des travailleurs a besoin de sa propre alternative!

    Photo : Mediactivista

    “Pas de Thatcher en Belgique” a lancé le PSL alors que la formation du gouvernement était encore en cours. Nous avons lancé un avertissement quant au caractère du gouvernement qui nous attendait. Maintenant, il est là. S’il parvient à ses fins, le mouvement des travailleurs sera brisé et la voie sera libre vers des salaires, des allocations et des conditions de travail dignes du 19ème siècle. Les syndicats ripostent avec un plan d’action impressionnant. Pour arracher quelques concessions? Pour rappeler Di Rupo au pouvoir? Ce serait décevant. Le gouvernement Michel et toute la politique d’austérité doivent s’en aller. Mais cela exige une alternative propre au mouvement des travailleurs.

    Par Eric Byl, éditorial de l’édition de novembre de Lutte Socialiste

    Les medias des patrons et les politiciens l’ont eux aussi bien compris. “Pourquoi n’entendons-nous jamais de la part de tous ceux qui protestent à haute voix la défense d’une alternative réaliste aux économies et autres mesures du gouvernement qui ne détruit pas d’emplois?”, se demande De Tijd. Il n’y pas d’alternative, répète De Wever. Nous voilà de retour à Thatcher et son fameux ‘TINA’ : there is no alternative.

    Evidemment, c’est hypocrite. Même l’OCDE et le FMI avertissent qu’une politique budgétaire trop stricte pourrait étrangler l’économie. Selon Bart De Wever, la création d’emploi dépend de la croissance économique et donc certainement pas de lui ni de sa politique. Beke (CD&V) et Dewael (Open-VLD) eux non plus ne veulent pas garantir de création d’emplois. Ils expliquent:“Nous vivons dans une économie de marché, pas dans une économie planifiée”. De cette manière, ils indiquent de façon implicite qu’une économie planifiée peut garantir des emplois. Le PSL est bien d’accord sur ce point, mais à condition que cette économie planifiée soit gérée de façon démocratique.

    Nous serions alors capables d’accroître les richesses de la société en investissant dans l’enseignement au lieu d’y opérer des économies. Nous pourrions mettre les connaissances scientifiques et techniques à la disposition de tous au lieu de les protéger des concurrents sur le marché à l’aide de brevets. Nous pourrions partager le travail disponible avec une réduction collective du temps de travail et en augmentant les salaires et les allocations sans que le profit ne soit accaparé pour être planqué dans des paradis fiscaux. C’est quand-même évident, non ? Mais cela exige un gouvernement qui défend les intérêts des travailleurs avec autant d’énergie que les gouvernements actuels en mettent pour défendre ceux des patrons. Seul un gouvernement des travailleurs en est capable.

    Mais entretemps, nous produisons selon les lois du marché et, là, une autre logique est d’application : celle de la défense du profit des capitalistes individuels, que cela soit sous forme de dividendes, d’intérêts ou de plus-value. Et là, tous les ‘De Wever’ de ce monde ont un point pour eux : si nous travaillons gratuitement et si la collectivité offre les cadeaux fiscaux nécessaires, alors les patrons ne menaceront pas de délocaliser. Beaucoup de travailleurs le savent très bien et puisque la social-démocratie et les verts ne remettent pas en question le marché et disent même que les coûts salariaux sont trop élevés, leurs alternatives ne sont pas crédibles. Le fait que Di Rupo explique que 70% des mesures du gouvernement Michel avaient déjà été mises en avant par son gouvernement ne fait que confirmer cet élément.

    Le plan cactus du PTB est beaucoup plus ambitieux en investissements dans les logements publics, le transport public, l’enseignement, les pensions ou les soins de santé. Le PTB ne défend pas la diminution des coûts salariaux, mais bien l’augmentation des salaires et des allocations, ce qu’il veut financer par des taxes sur les riches, des économies d’échelles, des appels d’offre dans le secteur pharmaceutique et sur les appareils médicaux, une chasse à la fraude fiscale, etc. Dans le secteur financier il plaide pour une taxe bancaire et pour une banque publique à côté du secteur privé. Le principal investissement du plan cactus est toutefois le payement accéléré de la dette publique, probablement dans l’espoir de créer une certaine marge budgétaire.

    Le PTB a fait un calcul correct sur papier. Mais il y a vingt ans, il ne trouvait pas que c’était nécessaire. Il scandait alors “ faites payer la crise aux riches” et “prenons l’argent où il est, chez les banques, chez les holdings”. C’étaient de bons slogans, mais même là se pose la question de savoir quoi faire lorsque les capitalistes s’en vont. Pourquoi ne pas défendre la nationalisation sous contrôle des travailleurs et de la collectivité des secteurs clés de l’économie et de toutes les entreprises qui agitent la menace de délocaliser ? Un gouvernement des travailleurs qui veut offrir une alternative crédible ne pourra pas éluder cette question. Il devra être aussi audacieux dans l’intérêt du monde du travail que le gouvernement actuel l’est dans l’intérêt de celui du capital.

  • [PHOTOS] Manifestation syndicale massive à Bruxelles contre Michel 1er et l’austérité (2)

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    Les médias ont parlé de 100.000 personnes pour cette manifestation du 6 novembre, mais c’est à n’en pas douter une sous-estimation. Les directions syndicales parlent de 120.000 participants, mais peut-être il y avait-il beaucoup plus de monde. Cette mobilisation impressionnante fut une expression de la résistance de masse contre un gouvernement profondément détesté.

    Les dizaines de milliers de manifestants étaient venus de tout le pays. Parfois, il a fallu laisser trois trains partir avant de pouvoir monter dans un autre, tous simplement en raison de l’affluence massive. Certains trains sont directement partis vers Bruxelles-Midi puisque la gare du Nord était bondée.

    Ce 6 novembre, nous avons vu quelle était la force de notre nombre.

    Reportage-photos d’Isabelle Marchal

  • [PHOTOS] Délégation jeunes lors de la manifestation du 6 novembre

    Un groupe de jeunes francophones et néerlandophones était réunis dans le cortège massif de l’impressionnante manifestation de ce 6 novembre. Parmi ce bloc se trouvaient des membres des Jeunes-FGTB, des JOC, des Etudiants de gauche Actifs, des JAC,… mais aussi des élève du secondaire de Flandre qui avaient décidé de rejoindre la manifestation syndicale lors d’une assemblée générale tenue dans le cadre de leur grève écolière le 22 octobre. Ce gouvernement des riches affirme que nous devons accepter l’austérité au nom de la sauvegarde de l’avenir des jeunes, mais les diverses organisations de jeunesse ont tenu à répondre de manière très limpide. Par la suite, une partie de ce bloc, parmi lesquels des militants des Etudiants de Gauche Actifs (EGA), ont occupé quelques temps les locaux de la Fédération des Entreprises Belges (FEB).

    => Rapport de la manifestation

    => Reportages-photos

    Reportage-photos de la délégation jeunes, par SooRa (Gand)

    Quelques photos du bloc de jeunes par Emily (Namur)

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