Tag: Seattle

  • USA : victoire pour les 15$ à Seattle !

    La lutte paie !

    Seattle est la première grande ville à adopter un salaire minimum de 15 $ de l’heure. 100.000 travailleurs vont ainsi pouvoir sortir de la pauvreté et des millions de personnes à travers le pays et au-delà vont être inspirées par cette lutte et cette victoire !

    Par Socialist Alternative

    Le 29 mai, le comité du conseil municipal en charge du dossier du salaire minimum a donc pris la décision d’élever le salaire minimum à Seattle de façon à ce qu’il soit le plus élevé du pays . Ce n’est toutefois pas encore une loi, ce ne sera le cas que lorsque le conseil municipal entier aura pu voter sur cette question, le lundi 2 juin.

    Selon la proposition de loi, à partir du premier avril 2015, tous les travailleurs des grandes entreprises comme McDonald’s, Starbucks, Macy’s et Target verront leurs salaires immédiatement augmentés jusqu’à 11 $ de l’heure. D’ici 2025, tous les travailleurs gagneront un minimum de 18 $ de l’heure. Selon diverses estimations, les entreprises de Seattle devront payer 3 milliards $ de plus sous forme de salaire au cours des dix prochaines années ! Voilà qui démontre que ‘‘la lutte paie’’, que les gens de la rue peuvent s’en prendre aux plus grandes corporations du monde et l’emporter pour autant qu’ils s’organisent et ripostent.

    Une véritable socialiste élue au Conseil municipal

    Le mouvement des travailleurs des fast foods, inspiré par le mouvement Occupy, a poussé la revendication des 15 $ de l’heure sur le devant de l’actualité dans tout le pays. Ensuite, la pression s’est accrue à Seattle lorsque le mouvement des travailleurs a réussi à gagner un vote sur les 15 $ en novembre dernier à SeaTac, une petite ville proche de Seattle. Mais c’est l’élection de la candidate de Socialist Alternative, Kshama Sawant, fin de l’année dernière qui a été décisive pour créer un véritable moment politique qui n’a su être brisé. Sawant avait fait campagne sur base d’un programme où figurait en bonne place la revendication des 15$ de l’heure, et cela a ouvert un large débat à travers toute la ville. Elle fut élue avec près de 100.000 voix en novembre 2013.

    ‘‘Sawant a démontré qu’être socialiste n’est plus un problème dans la gestion de la fonction publique. Plus important encore, la campagne des 15 $ de l’heure a nourri un modèle de démocratie par la base qui défie le processus politique contrôlé par les entreprises. Les observateurs s’attendent à ce que le projet de loi passe fin mai 2015. Si c’est le cas, la victoire – bien qu’imparfaite – validera l’approche de Socialist Alternative, gonflera ses rangs et ouvrira plus d’espace pour une politique socialiste aux Etats-Unis’’ Arun Gupta, Al Jazeera America, “Learning from a Socialist in Seattle,” May 21, 2014

    Il était important de gagner les élections, mais il l’était tout autant de voir comment Sawant et son parti, Socialist Alternative, allaient utiliser ce siège au Conseil municipal comme plate-forme pour les mobilisations sociales. Contrairement aux politiciens typiques de l’establishment, Sawant a utilisé sa position et l’attention des médias pour construire un puissant mouvement. Peu de temps après son élection, Kshama Sawant et Socialist Alternative ont lancé une campagne – 15 NOW – pour instaurer la pression la plus élevée autour de la revendication du salaire minimum de 15 $ de l’heure. 15 NOW a développé 11 groupes d’action de base dans divers quartiers de la ville afin de mobiliser, d’aider à faire descendre les habitants dans les rues et d’intervenir dans les forums publics. Avec ces groupes d’action de base et la tenue de conférences démocratiques, 15 NOW a donné la possibilité aux activistes d’avoir réellement en leurs mains propres la lutte pour les 15 $ de l’heure.

    Grâce à sa position publique, Kshama Sawant a été en mesure de contrer la propagande des médias dominants acquis aux grandes entreprises et de dénoncer les tentatives du monde des affaires de noyer le thème des 15 $ et de se cacher derrière l’impact que cette mesure aurait pour les petites entreprises et les petits commerces. Socialist Alternative a su démontrer comment un élu pouvait être utilisé afin de construire un mouvement et pour le renforcer. Socialist Alternative, la campagne 15 NOW et le mouvement syndical ont instauré une pression suffisante de la base pour forcer les grandes entreprises à concéder les 15 $ minimum de l’heure. Il s’agit d’une une réalisation historique aux Etats-Unis.

    Il nous faut un parti indépendant pour représenter les travailleurs et les jeunes

    Le mouvement des travailleurs et les défenseurs des idées du socialisme ont mis sur la table la revendication des 15 $. Le Parti Démocrate a quant à lui invité les grandes entreprises à cette table en cherchant à édulcorer cette exigence.

    Au départ, tous les politiciens du Parti Démocrate se sont opposés aux 15 $. Mais au vu du développement d’un gigantesque soutien public, les deux principaux Démocrates en lice pour le poste de maire se sont prononcés en faveur des 15 $ en septembre 2013. Après avoir remporté l’élection en novembre, le maire Ed Murray a déclaré qu’il soutenait les 15 $, mais qu’il voulait le faire de manière à ce que cela ‘‘fonctionne pour les entreprises aussi’’.

    Murray a ainsi mis en place un comité consultatif de dirigeants patronaux et syndicaux (mais surtout patronaux) pour négocier un compromis. L’establishment politique et patronal a bien dû reconnaitre qu’il était impossible de stopper les 15 $, mais il a cherché à utiliser le processus de négociation pour insérer un certain nombre de mesures favorables aux entreprises, comme d’appliquer l’augmentation sur une longue période de plusieurs années. Le monde des affaires s’est battu jusqu’au dernier jour pour diluer plus encore le projet de loi.

    Lors du vote du 29 mai en comité, une majorité des membres du conseil du Parti Démocrate a proposé de repousser la date d’application de la loi jusqu’à avril 2015 et d’inclure un sous-salaire minimum pour les adolescents ainsi qu’un ‘‘salaire de formation.’’ La campagne 15 NOW et Socialist Alternative appellent les syndicats, les activistes et chaque partisan des 15 $ à venir assister ce lundi 2 juin à la séance du Conseil municipal de Seattle, où le projet de loi sera finalisé, afin de se battre pour l’élimination des échappatoires pro-patronat ajoutés le 29 mai, y compris le délai de mise en œuvre et le ‘‘salaire de formation’’.

    Tout cela a illustré que même si le Parti Démocrate recourt à une rhétorique plus progressiste que les Républicains, ces deux partis sont fondamentalement soumis à la défense des intérêts des grandes entreprises. Alors qu’une seule élue socialiste authentique au conseil municipal de Seattle a été en mesure de construire un mouvement pour gagner les 15 $ en moins d’un an, les politiciens du Parti Démocrate n’ont pas ménagé leurs efforts pour assurer que le salaire minimum de 15 $ de l’heure soient le plus favorable possible aux patrons. Au niveau national, les Démocrates ne sont pas parvenus à organiser sérieusement la lutte pour un salaire minimum de 10,10 $ de l’heure, ils ne se servent de cette question que comme gadget électoral pour les élections de 2014.

    C’est pourquoi Socialist Alternative soutient, à l’instar de ce que nous avons fait durant la campagne électorale de Kshama, que les travailleurs ont besoin de leur propre alternative politique contre les partis Démocrates et Républicains. Compte tenu de l’énorme aliénation éprouvée face au Congrès, de la grande méfiance à l’égard des politiciens et de la nécessité de défendre les travailleurs et leurs familles, il existe une occasion unique de construire un nouveau parti large des travailleurs.

    Le travail de Kshama Sawant et de Socialist Alternative a démontré qu’il est possible de faire entendre une voix politique indépendante pour contester les deux partis du big-business. La victoire de Kshama et de Socialist Alternative peut se propager à travers le pays.

    Une stratégie combattive pour le mouvement des travailleurs

    Seattle a réussi à gagner le salaire minimum le plus élevé des États-Unis, mais le monde du capital est parvenu à affaiblir les 15 $ de diverses façons. Le délai pour que cette revendication soit pleinement d’application est déraisonnable, de 3 à 10 ans en fonction de la taille de l’entreprise, et il existe aussi une pénalité pour les pourboires et une déduction pour les soins de santé pour les 10 premières années. Ce n’était pas inévitable. Au cours des 6 derniers mois, Socialist Alternative s’est énergiquement engagé dans un débat au sein du mouvement syndical sur la meilleure stratégie à adopter. Nous exhortons les syndicalistes, les activistes et les dirigeants syndicaux à examiner l’expérience de cette lutte, à en discuter avec nous et à en tirer les leçons nécessaires pour l’avenir.

    À notre avis, la stratégie de ceux qui dirigent les principaux syndicats n’a pas été axée sur le renforcement du mouvement de la base, mais plutôt orientée vers le processus de négociation du maire avec les entreprises. Ils considéraient cette approche comme nécessaire en conséquence de leur manque de confiance envers la capacité du mouvement des travailleurs de pouvoir l’emporter dans le cadre d’un affrontement direct et ouvert avec les grandes entreprises.

    Après les décennies de recul des luttes que nous avons connues, cette faible confiance en les capacités de la classe ouvrière est compréhensible. Le débat autour des 15 $ a cependant été une énorme occasion d’essayer de mobiliser de nouvelles couches de travailleurs dans un mouvement de lutte, ce qui aurait instauré davantage de pression tout en permettant à une nouvelle génération d’acquérir l’expérience de l’organisation et d’en tirer les leçons politiques. Cela aurait été une manière de commencer à reconstruire le mouvement des travailleurs sur des bases combattives.

    C’est dans ce contexte que nous avons défendu de déposer un référendum pour les 15 $. Si les grands syndicats avaient soutenu cette menace, les entreprises auraient pu être forcées à faire des concessions plus grandes encore. La collecte des 100.000 signatures pour déposer ce référendum aurait été l’occasion de toucher de larges couches de la population et de les insérer dans l’organisation de la lutte tout en répondant aux arguments anti-travailleurs des entreprises et des médias (concernant le délai d’application, le salaire de formation, la question des pourboires,…).

    Les syndicats américains ont d’énormes ressources et disposent d’un grand poids politique. Ils ont des millions de dollars et des millions de membres qui pourraient être mobilisés derrière une campagne audacieuse pour augmenter le salaire minimum.

    Les grèves dans les fast foods ont joué un rôle crucial en attirant l’attention sur la question des salaires de misère, mais le mouvement pourrait être beaucoup plus fort si les syndicats en finissaient une bonne fois pour toutes avec leur dépendance à l’égard du Parti Démocrate et s’ils mobilisaient toute la force des travailleurs à travers la construction d’un mouvement de masse démocratiquement dirigé.

    Au cours des trois dernières décennies, la stratégie des syndicats a été de tenter de cajoler les grandes entreprises en espérant obtenir des concessions seulement. Cela n’a fait qu’accroitre la soif du monde des entreprises. Il est temps d’abandonner cet effort futile.

    Et nous devons nous rappeler qu’aucune réforme n’est garantie sous le capitalisme. Les grandes entreprises pourraient contester ce qui a été gagné à Seattle par un référendum ou d’autres moyens. Notre mouvement doit être prêt à se mobiliser et à défendre ce que nous avons gagné.

    Rejoignez la lutte pour le socialisme !

    “A la fin,” a écrit Arun Ivatury et Rebecca Smith pour CNN.com, “la percée réalisée à Seattle démontre (…) que lorsque les travailleurs sont bien organisés et qu’il existe un large soutien pour de meilleurs salaires, même les entreprises qui résistent à cette idée sont forcées de payer plus.” (15 mai 2014)

    Socialist Alternative soutient chaque réforme possible qui peut être obtenue sous le système capitaliste. La lutte pour les 15 $ a démontré que lorsque nous sommes organisés, nous pouvons vaincre.

    Mais cette lutte a aussi démontré que tant que nous restons à l’intérieur du cadre du capitalisme, les grandes entreprises vont se battre bec et ongles pour défendre leur pouvoir et leurs profits. La lutte pour de meilleurs salaires, pour un enseignement gratuit et de qualité, pour des soins de santé accessibles à tous, pour des logements abordables, pour la défense de l’environnement, et la justice sociale en général doit être une lutte pour une transformation socialiste de la société, basée sur une véritable égalité et sur la satisfaction des besoins de l’Humanité.

  • USA : Organisation de la lutte pour un salaire minimum de 15 $

    Ce 15 février s’est déroulée à Seattle une rencontre de militants en lutte pour la hausse du salaire minimum jusqu’à 15 $ de l’heure. Le but de cette réunion était de poursuivre la construction du mouvement en mettant davantage l’accent sur ??la mobilisation et l’implication du plus grand nombre possible dans ce combat, notamment par le renforcement des comités locaux. Une journée d’action le 15 mars prochain a été annoncée et un grand rassemblement avec le soutien des syndicats sera organisé pour le le 1er mai. Les médias locaux ont repris le discours de Kshama Sawant lors de cette réunion organisée par la campagne 15NOW.

  • ‘‘10 objectifs d’un programme anticapitaliste d’urgence’’

    Nouvelle brochure  de la FGTB Charleroi & Sud Hainaut

    800×600

    Après les “8 questions en relation avec l’appel du premier mai 2012 de la FGTB Charleroi Sud-Hainaut”, cette régionale édite une nouvelle brochure à 15.000 exemplaires. ERIC BYL la passe en revue dans ce dossier. Il vous est possible de commander des exemplaires de cette brochure soit au PSL (info@socialisme.be) ou directement à la régionale de la FGTB de Charleroi & Sud-Hainaut (fgtbcharleroi@fgtb.be).

    Rompre avec les “amis” politiques

    Normal
    0

    21

    false
    false
    false

    NL-BE
    X-NONE
    X-NONE

    MicrosoftInternetExplorer4

    /* Style Definitions */
    table.MsoNormalTable
    {mso-style-name:”Table Normal”;
    mso-tstyle-rowband-size:0;
    mso-tstyle-colband-size:0;
    mso-style-noshow:yes;
    mso-style-priority:99;
    mso-style-parent:””;
    mso-padding-alt:0cm 5.4pt 0cm 5.4pt;
    mso-para-margin:0cm;
    mso-para-margin-bottom:.0001pt;
    mso-pagination:widow-orphan;
    font-size:10.0pt;
    font-family:”Times New Roman”,”serif”;}
    La brochure précédente remettait en question la politique syndicale de ces dernières années, celle qui veillait – et veille toujours – à éviter toute confrontation directe avec les patrons en assurant une compréhension réciproque quitte à ‘‘huiler’’ la concertation sociale via l’aide de l’Etat et/ou de notre sécurité sociale. Pour ce faire, il est fait appel aux ‘‘amis’’ politiques qui essaient de négocier des compromis ‘‘honorables’’ avec les politiciens des patrons. Les mobilisations interprofessionnelles ne servent dès lors plus à imposer un rapport de forces plus favorable dans l’opposition entre travail et capital, mais juste à appuyer ces ‘‘amis’’ politiques. Il en résulte que les appareils syndicaux sont de plus en plus profondément intégrés au système qui, pourtant, recherche les conditions les plus avantageuses pour le capitalisme, paix sociale incluse.

    Cela peut livrer des résultats en période de croissance économique et avec des syndicats forts, même si ce n’est que de manière limitée. Mais quand la crise vient rogner les marges disponibles, cette politique d’intégration et de soutien aux amis politiques n’est plus seulement insuffisante, elle devient carrément contre-productive. La FGTB Charleroi-Sud Hainaut est la première à plaider aussi ouvertement pour une autre attitude, plus combative, pour la construction d’un réel rapport de forces et pour la rupture avec les politiciens prétendument ‘‘amis’’. Cela reflète une tendance qui vit dans d’autres régionales et centrales et cela depuis la colère ressentie face au Pacte des générations de 2005 déjà. Dans la CGSP-ALRS (Administrations Locales et Régionales) de Bruxelles, au sein de la centrale des employés de la CSC, à la Centrale Générale d’Anvers,… couvent de semblables frustrations par rapport aux partenaires politiques. Pour l’instant, la régionale de Charleroi-Sud Hainaut est encore seule, mais ce n’est qu’une question de temps avant qu’il en soit autrement. Du côté patronal, certains ont d’ailleurs déjà unilatéralement fait sauter la politique de compromis. Mais la rupture de la digue sous les coups des attaques patronales est encore à venir… Ce sera le cas après les élections de mai 2014.

    Une prise de position offensive est nécessaire

    Les objectifs des patrons sont connus de tous. Ils sont déjà à l’offensive depuis le début des années ’80. Afin d’être compétitifs dans un capitalisme globalisé, ils réclament plus de flexibilité, un secteur à bas salaires, que l’on travaille plus longtemps et des allocations sociales plus faibles et limitées dans le temps pour accroître la concurrence entre travailleurs sur le marché du travail. Ils exigent de disposer de tout ce qui est rentable à coups de libéralisations et de privatisations. Tout ce qui ne génère pas suffisamment de bénéfices doit d’abord être assaini, puis vendu ou fermé. La voilà la stratégie de survie du patronat. Elle ne laisse pas beaucoup d’espace au compromis. Il ne peut, en effet, assurer sa survie qu’au détriment des travailleurs. Les politiciens, même les partenaires des appareils syndicaux, jouent des coudes pour prouver qu’ils sont la meilleure garantie de l’application de cette politique. Dans ces circonstances, une politique syndicale défensive est catastrophique. Du point de vue du mouvement ouvrier, les compromis sont de moins en moins ‘‘honorables’’ et de plus en plus ‘‘pourris’’.

    La seule stratégie de survie capable de sauver le mouvement ouvrier dans ces circonstances est une stratégie offensive. Le point de départ ne doit pas être ‘‘comment pouvons-nous aider les patrons à être plus compétitifs face à leurs concurrents étrangers ?’’ mais au contraire ‘‘qu’est-ce qui est nécessaire pour assurer une existence humaine à tous, travailleurs compris ?’’ La régionale FGTB essaie d’y répondre en 10 chapitres. Nous n’avons pas la place de publier ici ce programme anticapitaliste d’urgence dans son intégralité, mais le lecteur peut en commander un exemplaire soit au PSL (info@socialisme.be) ou directement à la régionale (fgtbcharleroi@fgtb.be). Elle n’est pour l’instant disponible qu’en français.

    Revendications centrales

    Nous souhaitons dans ce dossier relever les revendications les plus importantes, ne serait-ce que pour susciter l’envie d’en savoir plus. Au chapitre concernant le chômage massif, la régionale plaide, entre autres, pour la restauration en tant que norme du contrat à durée déterminée, pour la transformation des contractuels en statutaires dans la fonction publique et pour une réduction collective du temps de travail à 32 heures par semaine sans perte de salaire, avec embauches compensatoires et baisse des cadences de travail. La régionale souligne subtilement que cette diminution du temps de travail est déjà d’application maintenant – la durée de travail moyenne est en effet actuellement de 31 heures par semaine – mais sur base du travail à temps partiel involontaire et surtout via du salaire partiel. Entre ’53 et ’73, la durée du temps de travail avait également diminué, de 20%, en compensation de l’augmentation de productivité. Mais cela s’était alors fait sans perte de salaire.

    Dans le chapitre “redistribuer les richesses”, la régionale revendique l’abrogation de la norme salariale et le rétablissement complet de l’index. Elle plaide pour la gratuité des nécessités de base telles que l’enseignement, l’accueil des enfants, l’eau, l’électricité et la mobilité, jusqu’à un plafond de consommation socialement déterminé, avec une tarification progressive au-delà. Elle propose de renationaliser les secteurs qui ont été privatisés comme l’énergie, les transports, la poste, la téléphonie, mais alors sous le contrôle des travailleurs et des usagers. Elle veut un refinancement massif du secteur public via une réforme fiscale d’ampleur.

    La régionale se prononce contre une scission communautaire de la sécurité sociale, pour la suppression des “baisses de charges sociales” aux employeurs – qui sont en fait les salaires indirects des travailleurs -, pour l’individualisation des droits à la sécu et la suppression de l’activation des sans-emploi, ainsi que de la dégressivité des allocations de chômage. Au sujet du financement de son programme, la régionale souhaite la levée du secret bancaire, la suppression des intérêts notionnels et du précompte libératoire, un cadastre des patrimoines, une taxation des plus-values (sur la vente des placements) et les moyens techniques et humains nécessaires à la lutte contre la fraude fiscale. Elle veut toutefois surtout mettre toutes les institutions financières sous le strict contrôle de la société, par la socialisation des banques et leur fusion en un grand pôle bancaire public, sans indemnité ni rachat, sauf pour les petits actionnaires.

    La régionale revendique l’annulation de la dette publique. Elle refuse les diktats de l’Union européenne et veut soutenir les peuples grec, espagnol et portugais dans leur lutte contre ceux-ci. Les traités européens doivent être abolis. Une assemblée constituante doit être élue pour fonder une autre Europe, sur base de démocratie, de justice sociale, de solidarité, d’ouverture et d’écologie. Elle veut une action syndicale européenne plutôt que du lobbying.
    En matière d’environnement, elle revendique la suppression des productions inutiles et nuisibles avec reconversion sous contrôle des travailleurs afin de maintenir les acquis de ces derniers. Elle revendique aussi la création d’un service public de l’énergie, d’une entreprise publique d’isolation et de rénovation des logements, des transports en commun gratuits et de qualité et un plan public européen pour une politique énergétique efficace, 100 % renouvelable et décentralisée. Elle veut l’annulation de la dette des pays du tiers-monde, la suppression des droits de brevets dans le secteur pharmaceutique et des technologies vertes et une aide des pays développés les plus riches aux pays du Sud, pour qu’ils puissent s’adapter aux changements climatiques.

    La FGTB de Charleroi-Sud Hainaut déclare que le chômage de masse et la répartition inégale des richesses en Occident, ainsi que le réchauffement climatique et les catastrophes humanitaires dans le tiers-monde ne sont pas des phénomènes naturels qui nous tombent dessus par hasard. Il s’agit du résultat des caractéristiques qui fondent la société capitaliste : la soif de profit, la concurrence et le “libre” marché. ‘‘Il est illusoire de penser qu’on peut réformer le capitalisme pour qu’il devienne un ‘‘bon’’ capitalisme de relance. Il faut donc être clair : il faut une stratégie pour sortir du capitalisme et le remplacer par un autre système qui satisfait les besoins de la population et préserve notre planète”, telle est la conclusion de la brochure de la régionale.

    Le PSL est d’accord avec cette conclusion anticapitaliste. Nous préférions la formulation “[supprimer le système capitaliste et] le remplacer par un système socialiste et démocratique” de la brochure précédente en comparaison du ‘‘remplacer par un autre système qui…’’ Cela pourrait en effet être considéré comme un indice du fait que cet “autre système” reste encore à être complètement inventé, comme si l’Histoire ne nous avait rien appris à ce sujet. C’est inexact. Nous pouvons discuter du nom, mais seul un système dans lequel la production est essentiellement gérée collectivement et dans lequel une large majorité – la classe ouvrière, ceux qui produisent réellement les richesses – prend le pouvoir économique et politique entre ses mains peut remplacer le capitalisme. C’est ce que nous appelons le socialisme. De plus, l’expérience du stalinisme nous a appris que des directives bureaucratiques issues du sommet ne pourront jamais remplacer la planification démocratique par la base et que le socialisme démocratique commence bien entendu quelque part, mais qu’il ne peut être consolidé qu’à l’échelle internationale.

    La catastrophe économique, sociale et écologique vers laquelle fonce la société montre de quelle urgence nous parlons. Ce n’est pas pour rien que la régionale FGTB appelle son programme un ‘‘programme d’urgence’’. Quelles que soient l’insistance et la pression que la classe ouvrière et les mouvements sociaux exercent, aucun gouvernement capitaliste ne sera jamais prêt à appliquer ce programme d’urgence. La régionale essaie d’y répondre avec son appel à rassembler toutes les forces anticapitalistes à la gauche du PS et d’Écolo comme moyen de redonner espoir aux travailleurs. Le PSL soutient cet appel. Cela peut constituer un premier pas pour, à terme, populariser à nouveau l’idée d’un gouvernement qui veuille bien exécuter un tel programme, un gouvernement par et pour les travailleurs.

    Comment passer d’une position défensive à l’offensive ? L’exemple de Seattle

    Il semble impossible d’aller à l’encontre de l’offensive néolibérale. Ceux qui ne sont pas prêts à entrer dans la logique de la concurrence débridée passent pour des ringards, pour de dangereux utopistes, des populistes, etc. Mais, suivant cette même logique, nos enfants travailleraient toujours dans les mines dès 6 ans, le suffrage serait toujours censitaire, la durée de travail moyenne de 12 à 14 heures par jour et nous n’aurions pas de congé payé. A cette époque aussi, les patrons menaçaient de fermeture et de délocalisation. Pourtant, nos prédécesseurs ont pu inverser la tendance. Ils y sont parvenus parce qu’ils se sont mobilisés autour de quelques points centraux qu’ils ont lié à la vision d’une autre société, une société socialiste. C’est la crainte de cette société alternative qui a, alors, obligé les capitalistes à accorder de grandes concessions.

    Aujourd’hui, il se passe quelque chose de semblable dans l’antre de la bête, aux Etats-Unis, à Seattle, une ville plus grande qu’Anvers, le berceau de multinationales telles que Boeing, Microsoft et Apple. Les syndicats, avec les héritiers du mouvement Occupy et la membre du conseil communal Kshama Sawant (première élue véritablement socialiste et marxiste depuis des générations, voir en page 11) mènent la lutte pour le doublement du salaire minimum jusqu’à 15$ de l’heure. Cette campagne ne connaîtrait pas autant de succès si elle n’était combinée à une critique plus générale et à une vision alternative, démocratique et socialiste de la société. Beaucoup des partisans des 15$ de l’heure sont, en effet, bien conscients du fait que les patrons reprendront si possible de la main gauche ce qu’ils auront cédé de la main droite. Mais lorsque Boeing a menacé de délocaliser son implantation, Kshama a riposté à cette terreur patronale en menaçant – en pleine assemblée générale des travailleurs – de reprendre les installations et la connaissance des travailleurs avec la collectivité. Cette approche socialiste resterait toutefois lettre morte si elle n’était pas liée à la mobilisation autour d’un ou plusieurs points centraux. Depuis lors, presque chacun des 9 élus, y compris le maire, a dû se prononcer pour un salaire minimum de 15$/heure. Sawant, Occupy et le mouvement ouvrier sont parvenus à renverser le discours sur les baisses de charge et l’austérité ! Si Seattle obtient les 15$/heure, cela deviendra un point litigieux dans l’ensemble des Etats-Unis.

    Le Plan du travail et les Congrès de la FGTB de ’54 et de ’56

    A l’occasion de notre dossier consacré à la précédente brochure de la FGTB Charleroi-Sud Hainaut (dans l’édition de novembre 2013 de Lutte Socialiste), nous avions mis en avant la façon dont l’offensive patronale lors de la crise de ’29 avait conduit à une grève des mineurs de plusieurs mois, qui, en 1932, dans le Borinage, étaient en fait devenus les maîtres de la situation. Là non plus, il n’y avait pas de place pour le compromis.

    Le POB (Parti Ouvrier Belge, ancêtre du PS) et sa commission syndicale ont dû effectuer un virage à gauche. Le jour de Noël 1933, le POB a sorti son Plan du Travail, une alternative à la crise capitaliste. Le Plan prévoyait, entre autres, la nationalisation des secteurs du crédit, des matières premières et de l’énergie, la socialisation de la grande industrie monopolistique et enfin que la production soit soumise au Plan pour orienter l’économie vers le bien-être général plutôt que vers la chasse au profit. Ce n’était pas un plan socialiste, pas même anticapitaliste, mais un plaidoyer pour beaucoup plus de contrôle public. Ce Plan a été abandonné par le POB lorsque De Man et Spaak sont entrés dans le gouvernement Van Zeeland. L’initiative a toutefois indéniablement contribué à la grande grève générale de 1936 grâce à laquelle un million et demi de travailleurs ont imposé l’obtention de 6 jours de congé payés, une augmentation salariale de 8%, un salaire minimum et la semaine des 40 heures dans plusieurs secteurs.

    L’économie belge s’est relativement bien sortie de la seconde guerre mondiale. Directement après la libération, l’industrie tournait à plein régime. Mais cet avantage s’est vite transformé en inconvénient. Les patrons belges ont empoché les dividendes mais ont évité d’investir et de moderniser la production. Cinq ans après la guerre, les mines allemandes et britanniques étaient à nouveau opérationnelles et plus productives. La croissance stagnait, les entreprises capotaient et le chômage augmentait fortement. Sous l’impulsion d’André Renard, une commission FGTB travaillait à un rapport depuis ’51, “Situation économique et perspectives d’avenir”, qui a été adopté en 1954 lors d’un congrès extraordinaire. En ’56, il a été complété, de nouveau lors d’un congrès extraordinaire, par un rapport “Holdings et démocratie économique”. Les holdings financiers tiennent l’économie sous leur domination et empêchent le progrès, concluait-on. Comme dans le Plan du Travail, la FGTB voulait y remédier par une intervention publique poussée via des réformes structurelles. Les mines de charbon, le gaz et l’électricité devaient être nationalisés. Les institutions de crédit publiques comme privées devaient passer sous contrôle public. On plaidait pour une politique d’expansion afin de maintenir la demande à niveau, de sorte que l’augmentation de la production trouve des débouchés et que le plein emploi soit garanti à chaque moment. Mais il ne s’agissait à nouveau pas d’un programme anticapitaliste voire socialiste.

    Le sommet de la FGTB ne l’a d’ailleurs pas pris au sérieux. En 1954 encore, la FGTB et la CSC avaient conclu un pacte avec les patrons afin de garantir la position concurrentielle de l’économie belge, renouvelée en 1959. Mais à la base, le programme de la FGTB était considéré comme un programme de réformes structurelles anticapitalistes. La nécessité d’un tel programme a, chaque fois, été confirmée par deux semaines de grève. Une première dans le bâtiment et, ensuite, une autre dans le métal en 1957. En 1959, la grève des mineurs a suivi et, en janvier 1960, la FGTB a appelé à une grève de 24 heures pour des réformes économiques structurelles et obligatoires. Avec l’opération ‘‘Vérité’’ du PSB, de la FGTB et des mutualités socialistes, cela a contribué à lancer la Grève du Siècle en ‘60 -‘61. Bien que celle-ci n’ait pu empêcher l’imposition de la Loi Unique, elle a retenti pendant longtemps et a modéré pendant deux décennies l’offensive du patronat.

    Il est prématuré de supposer que le programme anticapitaliste d’urgence de la régionale FGTB Charleroi-Sud Hainaut aura un tel impact. Ce n’est, cependant, pas un hasard si les experts mandatés par le Forum Economique Mondial présentent l’inégalité croissante comme la plus grande menace pour le système au cours de la période à venir.

    Ce programme d’urgence est un excellent instrument pour préparer des syndicalistes combatifs à ce tournant.

    Le baromètre socio-économique de la FGTB illustre la pertinence d’un programme anticapitaliste d’urgence

    Chaque année, la FGTB compile les principales données économiques dans un document qui donne une bonne vue d’ensemble et se lit facilement, son ‘‘baromètre socio-économique’’. Il ressort de celui de 2014, aussi selon l’avant-propos de la Secrétaire Générale Anne Demelenne et du Président Rudy De Leeuw, “que les politiques d’austérité menées ont saigné les populations. Il faut maintenant essayer le changement”, concluent-ils. Mais qu’est-ce que cela signifie ?

    Le coût salarial par unité de produit dans l’industrie belge est plus faible qu’en France et en Allemagne. L’Etat belge consacre proportionnellement moins à la sécurité sociale que la France et l’Allemagne. Voici ce qui ressort du baromètre de 2013. Celui de 2014 nous apprend que le risque de pauvreté dans notre pays est plus élevé que dans tous les pays voisins. Il est de 38 % pour les familles monoparentales tout comme pour les chômeurs. De plus en plus de nos compatriotes reportent des soins médicaux pour raisons économiques et le nombre de mauvais payeurs atteint de records. La Belgique est pourtant un pays riche mais tandis que 20% des Belges les plus riches détiennent 61,2% de tout le patrimoine, les 20% plus pauvres n’en détiennent que 0,2%!

    Le changement dont le baromètre FGTB parle ne répond malheureusement pas au diagnostic, comme si on donnait une aspirine à un cancéreux. Dans la traduction de ses remèdes à la presse, le sommet de la FGTB plaide pour “travailler sur” le relèvement du taux de remplacement des pensions légales à 75% du salaire moyen sur la carrière complète, mais elle n’est concrète que pour la suppression des avantages fiscaux pour le 3ème pilier, l’épargne-pension. Cela rapporterait 700 millions. Entre-temps, 2,7 millions de personnes ont déjà été poussées vers l’épargne-pension. Cela concerne donc non seulement 20% des plus riches mais aussi beaucoup de salariés. Une bonne occasion pour la droite d’encore diviser le mouvement ouvrier. Et ce, tandis qu’il y a de nombreuses autres mesures qui rapporteraient beaucoup plus et ne concernent qu’une couche supérieure. Et juste après, nous apprenons que la Commission européenne incite le gouvernement belge à supprimer l’avantage fiscal sur l’épargne-pension ! Nous sommes quand même en droit d’attendre bien mieux de la part de la FGTB.

     Brochure au format PDF

  • Que signifie le socialisme pour Kshama Sawant?

    Sur cette vidéo, sous-titrée en français, notre camarade Kshama Sawant revient sur la signification du terme de socialisme après avoir été élue au conseil de Seattle.

  • Réaction de Kshama Sawant sur le discours de “l’état de l’Union” du président Obama

    Kshama Sawant, membre de Socialist Alternative et élue socialiste à Seattle, a réagi au discours sur “l’état de l’Union” du président Obama. Voici ci-dessous la vidéo de cette réaction qui a également été publiéee sur le site d’Occupy Wall Street en tant que riposte officielle face à la prise de parole présidentielle.

  • Que représente l’expérience de Seattle pour les travailleurs de Belgique et d’ailleurs ?

    Un débat public enthousiasmant tenu à Saint-Gilles

    Pour débuter l’année, les sections bruxelloises du PSL-LSP ont organisé un meeting public autour des politiques d’austérité et de l’augmentation de la pauvreté qui en découle. Trois orateurs ont introduit le sujet, avec notamment Bart Vandersteene, porte parole du PSL-LSP qui a participé à la campagne de Socialist Alternative (parti-frère du PSL aux USA) à Seattle, une campagne qui a permis l’élection au conseil de ville de notre camarade Kshama Sawant. Une cinquantaine de personnes étaient présentes pour cet évènement qui s’est tenu au Pianofabriek, dans la commune de Saint-Gilles.

    Par Nico M. (Bruxelles), photos par MediActivista

    Nous avions également invité Giorgos Karatsioubanis, de la coalition de gauche radicale grecque Syriza. Ce dernier est intervenu au sujet des conséquences désastreuses des politiques imposées par la Troïka en Grèce et appliquées docilement par le gouvernement grec. Il est notamment revenu sur différents aspects de la crise humanitaire que vivent les jeunes et les travailleurs grecs.

    Notre troisième oratrice, Anja Deschoemacker, porte-parole de Gauches Communes, est revenue quant à elle sur la situation belge. Les politiciens traditionnels et la classe dominante tentent de nous faire croire que la Belgique s’en sort bien et semble être épargnée. C’est sans compter sur les mesures d’austérité imposées par Di Rupo Ier et celles que nous pouvons voir venir après les élections de mai 2014 ! Statut unique, réforme des allocations de chômage, pénuries dans le logement ou dans l’enseignement, transferts de compétences sans les budgets nécessaires, etc. la liste des attaques est longue pour un pays qui ‘‘s ‘en sort’’. Pour la classe dirigeante et ses partis traditionnels, l’après élections 2014 sera saisi pour pousser plus en avant les mesures d’assainissements et pour encore plus faire payer les jeunes et les travailleurs.

    Les interventions de Bart ont illustré sur base de l’expérience de Seattle comment la gauche peut engranger des résultats significatifs dans un tel climat, notamment sur base d’une alternative claire et de la mobilisation et l’enthousiasme de centaines de jeunes et de travailleurs. La situation aux USA s’est nettement dégradée depuis 2008, le peu de crédit dont disposait encore cette idée du ‘‘rêve américain’’ a volé en éclat. L’effet des quelques sursauts de croissance a unilatéralement été favorable aux 1% les plus riches alors que pas moins de 5% des Américains se sont vus saisir leur maison au cours de cette période. Dans cette situation et sur la lancée de mouvement tels qu’Occupy, le sentiment s’est développé à travers le pays que le big business peut compter sur les deux grands partis mais que les travailleurs ne disposent par contre d’aucun prolongement politique. A travers tout le pays – mais internationalement également – la campagne et la victoire de Kshama Sawant à Seattle onbt largement été discuté. Il s’agit de la première élue réellement socialiste depuis des décennies ! La revendication phare de l’imposition d’un salaire minimum de 15$ de l’heure a été le symbole d’un programme partant des besoins des travailleurs et de leurs familles et défendant résolument un autre projet de société, un projet de société socialiste. Kshama a également fait face aux menaces de délocalisation de l’entreprise Boeing que les outils de travail et les travailleurs qualifiés doivent rester sur place et continuer à fonctionner. L’expropriation de l’outil et sa collectivisation s’impose comme mesure à prendre.

    Le débat de ce lundi a permis de discuter de ces expériences et de mettre en avant qu’une alternative est possible, et surtout nécessaire. Il est plus que temps aujourd’hui d’aller à l’offensive sur le terrain politique avec notre propre alternative ainsi que nos revendications et de coupler cela à la mobilisation des travailleurs contre les trahisons des partis traditionnels, dont les promesses de campagnes ne font que précéder des mesures d’austérité sauvages.

    L’exemple de Socialist Alternative à Seattle illustre qu’un programme radical, anticapitaliste, socialiste et démocratique ne constitue pas un frein pour engranger des victoires électorales.

    L’appel de la FGTB de Charleroi doit permettre de discuter de l’émergence d’une initiative politique par et pour les travailleurs. Même si cela n’a pas permis l’émergence d’une telle initiative pour les élections de mai 2014, le débat doit se poursuivre.

  • Kshama Sawant prête serment en tant qu’élue marxiste à Seattle

    La prestation de serment de Kshama Sawant, élue de Socialist Alternative à Seattle, a pu compter sur une large présence : des centaines de personnes étaient venues ce lundi célébrer sa victoire électorale. En plus des 800 personnes qui ont pu prendre place dans la salle de cérémonie, des centaines d’autres ont dû suivre la session du dehors… De nombreux médias locaux et nationaux ont couvert l’événement. Et dans son discours d’investiture, Kshama Sawant a immédiatement donné le ton…

    Prise de parole de Kshama Sawant

    Chers frères et soeurs,

    Merci pour votre présence aujourd’hui.

    Cette ville a fait la fortune des super-riches et des grandes entreprises qui dominent le paysage de Seattle. Parallèlement, les conditions de vie des travailleurs, des chômeurs et des pauvres sont de jour en jour devenues plus difficile. Les coûts du logement, de l’enseignement et des soins de santé sont montés en flèches jusqu’à devenir inaccessibles.

    Cette situation n’est pas spécifique à Seattle. Honteusement, concernant ce domaine, le pays le plus riche de l’histoire humaine comprend cinquante millions de personnes – une sur six – vivant dans la pauvreté. Partout dans le monde, des milliards de personnes n’ont pas accès à l’eau potable ainsi qu’aux infrastructures sanitaires de base et des enfants meurent chaque jour de malnutrition.

    Telle est la réalité du capitalisme international. C’est le produit du gigantesque casino de la spéculation créé par les bandits de grand chemin de Wall Street. Dans ce système, le marché est Dieu et tout est sacrifié sur l’autel du profit. Le capitalisme a échoué pour les 99%.

    Malgré les récentes discussions portant sur la croissance économique, la reprise n’a été favorable qu’aux plus riches, les 1%, tandis que le reste d’entre nous tombent loin derrière.

    Dans notre pays, les politiciens Démocrates et Républicains servent en premier lieu les intérêts des grandes entreprises. Un Congrès complètement dysfonctionnel ne parvient à se mettre d’accord que sur une chose – l’augmentation régulière des leurs salaires déjà pléthoriques – tout en permettant en même temps que le salaire minimum fédéral stagne et diminue sans cesse à cause de l’inflation. Nous avons devant nous ce spectacle obscène de dirigeants d’entreprises qui gagnent en moyenne sept mille dollars de l’heure, tandis que les travailleurs les moins bien payés sont qualifiés de présomptueux lorsqu’ils revendiquent tout juste quinze dollars de l’heure.

    Pour commencer à changer tout cela, nous avons besoin de mouvements de masse organisés des travailleurs et des jeunes, en s’appuyant sur leur propre force indépendante. C’est ainsi que nous avons gagné le droit de nous syndiquer, obtenu les droits civiques ou encore les droits des LGBT.

    Encore une fois, tout au long de la longueur et de la largeur de ce pays, les travailleurs se mobilisent pour une vie décente et digne pour eux-mêmes et leurs enfants. Regardez le mouvement des travailleurs des fast food, les campagnes des travailleurs de Walmart et l’activisme héroïque pour stopper la construction du pipeline Keystone XL!

    Ici, dans la proche ville de SeaTac, nous venons d’assister à la formidable campagne victorieuse pour obtenir l’imposition d’un salaire minimum de quinze dollars de l’heure. Dans le même temps, dans le comté de Lorain, en Ohio, vingt-quatre candidats se sont présentés, non pas comme Démocrates ou Républicains, mais comme ”Independant Labor” (indépendants du monde du travail) et ont été élus aux conseils communaux.

    Je ferai de mon mieux pour représenter les démunis et les exclus, les pauvres et les opprimés – en luttant pour un salaire minimum de 15 $ de l’heure, pour des logements abordables, pour taxer les super-riches et pour une expansion massive du transport en commun et de l’enseignement. Mais ma voix ne sera entendue par ceux qui sont au pouvoir que si les travailleurs eux-mêmes crient leurs revendications sur les toits et s’organisent en masse.

    Mes collègues de Socialist Alternative et moi-même nous tiendrons au coude-à-coude avec tous ceux qui veulent se battre pour un monde meilleur. Mais les travailleurs ont besoin d’un nouveau parti politique, d’une organisation de masse de la classe ouvrière, dirigée par eux-mêmes et ne devant rendre de compte qu’à eux-mêmes. Un parti qui luttera et mènera campagne pour leurs intérêts en défendant avec hardeur des alternatives contre ce système en crise.

    Ici, à Seattle, les politologues se demandent à mon sujet : fera-t-elle des compromis ? Peut-elle travailler avec d’autres ? Bien entendu, j’aurai à rencontrer et à discuter avec des représentants de l’establishment. Mais quand je le ferai, je mettrai sur table les besoins et les aspirations de la classe ouvrière, peu importe qui sera assis en face de moi. Et permettez-moi de clarifier une chose : il n’y aura pas de tractation secrète avec des entreprises ou leurs serviteurs politiques. Il n’y aura pas d’arrangement pourri qui desservirait ceux que je représente.

    Je porte l’insigne du socialiste avec honneur. Je remercie les presque cent mille électeurs qui ont voté pour moi et les centaines d’entre vous qui ont travaillé sans relâche dans cette campagne, je vous remercie. Continuons.

    L’élection d’une socialiste au Conseil d’une grande ville dans le coeur du capitalisme mondial a fait des vagues dans le monde entier. Nous le savons pour avoir reçu des messages de soutien d’Europe, d’Amérique latine, d’Afrique et d’Asie. Ceux qui luttent pour un changement nous ont dit qu’ils ont été inspirés par notre victoire.

    Je fais appel à tous ceux qui sont prêts à résister à l’agenda des grandes entreprises – que ce soit à Seattle ou à l’échelle nationale – pour s’organiser. Joignez-vous à nous dans la construction d’un mouvement de masse pour la justice économique et sociale, pour un changement démocratique et socialiste, de sorte que les ressources de la société puissent être exploitées, non pas pour satisfaire la cupidité d’une petite minorité, mais pour le bénéfice de tous les peuples. Solidarité.


    Vidéos

    La totalité de la cérémonie d’investiture du conseil de Seattle est disponible en vidéo sur le lien suivant. Kshama Sawant intervient à partir de 29 minutes et 20 secondes.

    Les médias locaux et nationaux ont accordé une grande attention aux événements de Seattle et à cette cérémonie : Video et article de King 5, vidéo d’Al Jazeera.

    “Democracy Now” a également réalisé cette interview.

  • Succès retentissant pour une socialiste révolutionnaire à Seattle

    Kshama Sawant est élue avec 95.000 voix (50,6%) ! Le socialisme contre-attaque aux USA

    10 jours avant la tenue des élections locales, on pouvait lire dans le quotidien Seattle Times: “Nous pouvons déjà désigner les vainqueurs. Ce sont les socialistes. (…) Il est remarquable de constater qu’au cours de la campagne politique à Seattle de cette année, quasiment la totalité de son [Sawant] agenda a dû être repris même par les deux candidats-maires.” A ce moment-là, la majeure partie des commentateurs considéraient encore que Kshama Sawant ne remporterait pas le siège. Une fois devenu clair qu’elle avait pu réunir 95.000 voix, la presse locale n’a plus été seule à faire part de son étonnement, les médias nationaux et même internationaux se sont emparés du sujet de ce spectaculaire saut en avant.

    Par Bart Vandersteene

    Une éruption de mécontentement

    [box type=”shadow” align=”alignright” width=”100″]

    La politique locale aux USA

    A Seattle, il n’y a pour toute la ville que 9 sièges au conseil de ville. Lors de la précédente législature, tous étaient du Parti Démocrate. Cette année, quatre de ces sièges étaient remis en jeu. Chaque habitant avait à choisir entre deux candidats pour chaque siège (après la tenue d’un premier tour en août).

    Extrait d’un article du quotidien britannique The Guardian

    ‘‘Son élection montre qu’elle n’a pas eu peur de se profiler comme une socialiste, mais aussi que les électeurs n’ont pas craint de l’élire en tant que telle. Ce n’est pas seulement la preuve que le socialisme est devenu populaire, les gens ont conclu qu’ils étaient peut-être depuis longtemps des socialistes pour ne le réaliser que maintenant. (…) L’espoir aujourd’hui n’est pas seulement que Sawant constitue un nouveau souffle progressiste pour Seattle, mais qu’elle en inspire d’autres, elle démontre que si l’on endosse pleinement l’étiquette du socialisme, cela peut être considéré comme un compliment.’’

    [/box]

    La société américaine traverse actuellement une période de profonds changements. Pour une grande partie de la population, le fameux ‘‘rêve américain’’ gît brisé à leurs pieds. La crise a exposé au grand jour toutes les faiblesses du capitalisme et a ouvert un nouveau chapitre dans l’histoire du pays. Le soutien pour le parlement n’est plus que de 9%, contre 45% dix ans passés. Un sondage a aussi récemment dévoilé que 60% des Américains veulent voir un troisième parti émerger pour rompre la domination du système bipartite. A la base de ces chiffres se trouve l’énorme fossé entre riches et pauvres qui va grandissant, mais aussi l’incapacité d’instaurer un système de soin de santé décent pour tous, la spectaculaire augmentation de l’endettement des étudiants, les salaires de famine (qui touchent 12% de la masse salariée…), ces millions de personnes qui ont perdu leur maison,…. La liste des raisons pour lesquelles les gens se détournent de ce système est sans fin.

    Construire une voix de gauche et socialiste

    Le premier mouvement à avoir exprimé cette colère fut le Tea Party, de droite et conservateur. Leur campagne hystérique contre Obama et toute leur rhétorique affirmant qu’il voulait répartir les richesses et instaurer le socialisme a toutefois suscité un grand intérêt pour les idées du socialisme.

    Le président américain est pourtant loin d’être socialiste. Obama a luimême récemment précisé à ce sujet lors d’une rencontre patronale organisée par le Wall Street Journal : ‘‘Les gens disent parfois que je suis un socialiste. Mais non, allez voir ce qu’est un véritable socialiste. Vous aurez alors une idée de ce que c’est d’en être un. Je parle ici de diminution des taxes pour les entreprises. Ma réforme des soins de santé était basée sur le principe du libre marché. Et la dernière fois que j’ai regardé la Bourse, elle se portait très bien.”

    L’espoir de l’arrivée d’un changement était grand au moment de son élection et de sa réélection. Aujourd’hui, c’est la déception qui domine. En paroles, Obama a su donner une certaine expression à l’aspiration pour un changement. Mais dans les actes, il a révélé sa véritable nature, celle d’un ardent défenseur des intérêts de l’élite économique. Cela a ouvert un espace à la gauche des Démocrates. Socialist Alternative, notre organisation-soeur américaine, a été parmi les premiers à percevoir ce potentiel. Notre victoire électorale est un bon exemple de ce qui s’offre à la gauche pour les années à venir. Si cette opportunité n’est pas saisie, le danger est réel que les forces électorales conservatrices et réactionnaires puissent être en mesure d’en profiter.

    Construire le soutien aux idées du socialisme

    La victoire de Seattle est une indication de la direction dans laquelle se dirige la société américaine. Des idées qui jusqu’à tout récemment encore étaient rejetées comme bien trop folles gagnent aujourd’hui en audience.

    Juste après l’annonce de sa victoire, Kshama Sawant a pu prendre la parole lors d’une grande assemblée des travailleurs de Boeing. Pour la énième fois, cette entreprise a menacé de délocaliser sa production, un chantage qui lui a rapporté un nouveau cadeau fiscal historique de l’État de Washington : 8,7 milliards de dollars. Mais leur soif de profit est inapaisable. Les managers ont, par-dessus le marché, réclamé une révision extrêmement drastique des pensions des travailleurs ! Pour ces derniers, la coupe était pleine et ils ont voté à une large majorité contre cette proposition, même sous la menace de la délocalisation brandie par Boeing.

    Kshama Sawant a stupéfait les travailleurs par son langage radical et très inspirant. ‘‘La seule réponse à donner quand la direction de Boeing menace de partir, c’est de dire que les machines restent ici. Les travailleurs qualifiés et expérimentés aussi sont ici, nous continuerons à travailler, nous n’avons aucunement besoin de managers. Ce ne sont pas eux qui font tourner l’usine, ce sont les travailleurs. Ils peuvent partir, nous reprendrons l’entreprise sous propriété publique.’’

    Les forces socialistes ont dû nager à contre-courant très longtemps aux États- Unis, plus encore que dans le reste du monde. Cette percée des socialistes révolutionnaires est une source d’inspiration pour tous ceux et toutes celles qui se battent pour un autre monde, un monde socialiste.

  • [INTERVIEW] USA : Victoire éclatante pour une socialiste révolutionnaire à Seattle!

    Des “conséquences fracassantes” aux Etats-Unis et internationalement

    Le soir du 15 novembre 2013 restera une date marquant une étape historique dans la construction d’un nouveau mouvement socialiste aux États-Unis, la plus grande puissance capitaliste au monde. Kshama Sawant, candidate de Socialist Alternative (les partisans du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) aux USA) a été capable de remporter un siège au conseil de Seattle après que son adversaire ait concédé avoir perdu. C’est la première fois depuis de nombreuses décennies qu’un socialiste révolutionnaire remporte une élection aux Etats-Unis en battant le parti Démocrate, un parti qui prétend être favorable aux travailleurs. Le décompte des voix se poursuit toujours et confirme l’avance croissante de Kshama Sawant dans cette ville. En date du 18 novembre, Kshama avait reçu le suffrage de 93.168 personnes.

    Sarah Wrack, Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles)

    Pourquoi avez-vous, avec Socialist Alternative, decide de vous presenter à ces élections ?

    L’an dernier, nous avions déjà mené campagne pour la Chambre des représentants de l’Etat de Washington, j’étais alors candidate contre le président de la Chambre, Frank Chopp, probablement le parlementaire le plus puissant de l’Etat (Lire notre article Socialist Alternative remporte un score historique contre le Président de la Chambre des Représentants de l’Etat de Washington).

    Derrière notre décision de mener cette campagne électorale, il y a notre analyse politique des conditions qui ont émergé suite au mouvement Occupy. Ce mouvement a été très actif puis, vers fin 2011 – début 2012, il a commencé à bifurquer vers des campagnes telles que Occupy Homes au Minnesota (contre les expulsions et les saisies immobilières) et ainsi de suite. Mais dans la plupart des cas, le mouvement commençait à perdre son souffle. Le sujet le plus important à ce moment était la réélection de Barak Obama et le fait que, pour ceux qui se considèrent comme des progressistes, la priorité était d’obtenir cette réélection parce qu’il était impensable de voir le Républicain Mitt Romney arriver à la Maison Blanche.

    Bien entendu, Socialist Alternative est d’accord pour dire que l’aile droite ne doit pas disposer d’une telle opportunité, mais nous avons également fait remarquer que les Démocrates ne constituent en rien une alternative et que dans l’ensemble, la classe des travailleurs n’a pas bénéficié de la politique des deux partis du Big Business, qui sont dans les faits deux ailes d’un même grand parti pro-capitaliste.

    En fait, l’administration Obama est en elle-même un bon exemple de la manière dont les Américains progressistes placent leurs espoirs dans les Démocrates années après années pour ensuite devoir faire face à toute une série de trahisons. Toutes les promesses concernant les soins de santé, les détentions à Guantanamo Bay, la fin de l’occupation de l’Afghanistan et les attaques de drones,… n’ont pas été tenues. Les attaques de drones ont augmenté, la présidence d’Obama a été marquée par le plus grand nombre d’expulsions de sans-papiers et, en tant que professeur, je peux vous garantir que l’assaut contre l’enseignement public et contre les syndicats d’enseignants a été plus aigu sous Obama.

    La question qui se posait à Socialist Alternative était de voir comment pouvoir poursuivre les discussions politiques et d’approfondir la clarification portant sur la nécessité de rompre avec les deux partis de Wall Street et de rompre également avec le système capitaliste lui-même. Lancer notre propre campagne et illustrer par la pratique ce qu’une campagne populaire véritablement indépendante pouvait être nous a semblé constituer une stratégie efficace.

    Nous avons mené campagne en refusant l’argent des grandes entreprises et sans chercher le soutien de l’establishment du parti Démocrate.

    L’an dernier, nous avons obtenu 29% des voix, un score tout à fait remarquable : plus de 20.000 personnes avaient voté pour nous. Et nous nous sommes battus pour notre droit d’avoir ‘‘Socialist Alternative Party’’ sur le bulletin de vote (et non tout simplement le nom du candidat), tout comme nous avons cette année aussi mené ouvertement campagne sous le nom de Socialist Alternative.

    Comment la campagne a-t-elle été organisée?

    Les premières personnes impliquées ont été les membres de Socialist Alternative. Notre objectif principal au début était de développer la plate-forme de la campagne. Le thème fut discuté et débattu dans toutes les sections locales de Socialist Alternative. Nous avons particulièrement souligné trois points, dont la revendication d’un salaire minimum de 15 $ de l’heure, ce que nous avions déjà défendu l’an dernier. Cette année, puisque nous étions impliqués dans une campagne menée à travers toute la ville, notre revendication d’un salaire minimum a été discutée dans toute la ville de Seattle. Le second point concernait le droit de disposer d’un logement abordable et d’un contrôle des loyers. Le troisième était l’instauration d’une taxe sur les millionnaires pour financer le transport en commun et l’enseignement.

    Notre campagne était placée sous le slogan : ‘‘make Seattle affordable for all’’ (rendre Seattle abordable pour tous), car Seattle est une ville très riche mais profondément inégalitaire. Y vivre est inabordable pour la grande majorité des gens, et en particulier dans les rangs des travailleurs à bas salaire.

    Dès le début, il était clair que ces revendications attiraient l’attention enthousiaste de la classe des travailleurs à Seattle, ce qui nous a aidé à développer notre réseau de volontaires. De nombreuses personnes se sont senties galvanisées à l’idée d’une campagne électorale tellement différente du business-as-usual des politiciens pro-capitalistes.

    Le fait que nous nous sommes engagés, en cas de victoire, à ne garder que le salaire moyen d’un travailleur a particulièrement suscité l’intérêt. Un membre du conseil de Seattle (qui en comprend 9) gagne 120.000 dollars par an, un salaire très élevé qui n’est devancé qu’au conseil de Los Angeles. La plupart des gens ne savaient pas qu’il en était ainsi et nous avons bénéficié d’un large écho en affirmant que nous ne garderions que le salaire moyen d’un travailleur, en consacrant le reste à la construction des mouvements pour la justice sociale.

    C’est donc à travers la politique à la base de la campagne que nous avons été capables de construire une grande base de bénévoles. Plusieurs membres de Socialist Alternative ont travaillé à temps plein pour les organiser. Nous avions un bureau de campagne où étaient organisées des réunions de travail quotidiennement, en collaboration avec la direction locale de Socialist Alternative.

    Nous avons de cette manière pu être en mesure de prêter attention à tout ce qui se passait dans la ville et de profiter de toutes les opportunités pour parler de la campagne, pour la faire connaître et disposer d’espaces dans les médias, chose véritablement nécessaire puisque nous étions en lutte contre un puissant Démocrate implanté au conseil depuis 16 ans déjà. Nous avons été capables de faire fortement ressortir les conséquences néfastes de sa politique mais aussi de celle de l’administration de Seattle en général et de montrer à quel point ces politiciens sont totalement en dehors de la réalité quotidienne des travailleurs. Grâce à tous ces efforts, nous avons pu construire une base de plus de 350 bénévoles, une grande source d’énergie pour la campagne.

    Dans la dernière ligne droite, ce qui a beaucoup aidé la campagne, ce fut l’organisation d’une centaine d’actions le week-end précédant le jour du scrutin. Des partisans de Socialist Alternative se sont placés avec des affiches à tous les carrefours majeurs de la ville, plusieurs bannières ont été déployées au-dessus des autoroutes autour de la revendication d’un salaire minimum.

    Cela nous a vraiment aidé pour convaincre les gens d’aller voter. La politique de la ville est tellement hors de la réalité des travailleurs et de leurs familles qu’il est normal que nombre parmi eux ne fassent pas attention à la campagne électorale, qu’ils trouvent ennuyeuse. Ils considèrent les membres du conseil comme de riches blancs issus de la classe supérieure, qui ne sont pas au courant de ce qui se passe sur le terrain et ne s’en soucient pas. Le défi auquel nous avons dû faire face ne consistait donc pas seulement à influencer des électeurs, mais aussi à pousser les habituels abstentionnistes à aller voter pour cette fois.

    Nous avons également désiré approfondir le dialogue avec les gens. Nous sommes marxistes, nous ne pensons pas que l’arène électorale est la plus favorable pour la construction des mouvements sociaux. Nous avons voulu montrer un exemple de la manière dont cela pouvait être fait, avec une implication active dans la campagne. Je pense que c’était là notre plus grand défi, et que nous nous en sommes plutôt bien sortis.

    Mais nous ne pouvons pas tout simplement parler de notre campagne. Nous devons aussi mentionner qu’elle a été menée au même moment que la lutte des travailleurs des fast food. A Seattle tout particulièrement, ces travailleurs en lutte étaient très confiants en leurs possibilités, et nous nous sommes montrés solidaires de leur combat. Un scrutin portant sur l’instauration d’un salaire de 15 $ de l’heure a aussi été lancé à Seatac, une ville voisine de Seattle où se trouve l’aéroport international. Le thème était très précisément la question du salaire des travailleurs des aéroports. Tout cela a contribué à l’élan de la campagne.

    Comment les gens ont-ils réagi au fait que vous vous êtes présentés ouvertement comme socialistes ?

    Pour la plupart des gens, ce qui est surtout ressorti, c’est que nous luttions pour un salaire minimum de 15 $ de l’heure.

    Ce qui est vraiment attiré l’attention, c’était l’audace dont nous avons fait preuve sur cette question, contrairement à ce qui se fait généralement. Pas mal de gens qui approuvaient notre campagne et avaient l’expérience des partis bourgeois nous disaient : ‘‘vous devez baisser le ton, ne critiquez pas tellement l’administration.’’ On m’a même souvent demandé: ‘‘pourquoi devez-vous toujours commencer chaque discours en disant: ‘‘Je suis un membre de Socialist Alternative’’?’’

    Ils voulaient me dissocier de Socialist Alternative parce que la politique électorale américaine est normalement centrée sur des personnes et des personnalités, pas sur des organisations collectives ou l’effort collectif. Mais nous avons complètement rejeté cela. Nous avons été plus audacieux et avons été implacables en présentant notre politique et affirmant clairement que chaque personne qui aimait cette campagne et son aspect combatif devait savoir que cela avait directement à voir avec le fait que nous sommes des socialistes révolutionnaires.

    Beaucoup de gens ne se souciait du reste pas tellement de l’étiquette, ils se souciaient du fond de la campagne. Mais pour une certaine couche, cela était important. Certains disaient ‘‘Eh bien si c’est ça une campagne socialiste, et que je suis d’accord avec tout, alors peut-être bien que je suis moi-même un socialiste, peut-être que j’ai besoin d’entrer en discussion avec Socialist Alternative.’’ Des personnes ont rejoint notre organisation, où sont en discussion à cette fin, parce qu’ils ont approuvé ce que nous avons dit et que leur confiance a été renforcée par notre ardeur à nous battre pour la victoire.

    Quels sont vos projets maintenant ?

    Tout d’abord aujourd’hui [le 17 Novembre] nous avons un grand meeting pour réunir tous ceux qui ont participé à la campagne et pour célébrer notre victoire. Mais il sera également question de donner une idée de la voie à suivre pour l’avenir : que doit-il maintenant se passer ?

    Nous ne voulons pas limiter à parler de la campagne et de ce que nous allons faire au conseil de Seattle, nous voulons aussi aborder la signification de cette victoire. Quelle est la signification de la victoire d’un socialiste révolutionnaire au conseil d’une grande ville américaine ? En de nombreux points, il s’agit d’un bouleversement pour la gauche en général, en particulier aux Etats-Unis mais aussi au niveau international. Si cela a été possible, qu’est ce qu’on peut faire d’autre ?

    La raison pour laquelle nous obtenons l’attention des médias nationaux et internationaux n’est pas que nous avons gagné un siège au Conseil de Ville. Normalement, tout le monde s’en fiche. Ce qui est frappant, c’est qu’une personne ouvertement socialiste remporte un siège, que la campagne n’a pas bénéficié de l’argent des grandes entreprises et qu’elle n’a pas reposé sur l’appareil du parti Démocrate pour l’emporter. Nous avons besoin que la gauche tire parti de ces enseignements et se rende compte qu’il existe une ouverture pour construire des mouvements et construire une alternative anticapitaliste viable qui luttera pour les travailleurs, contre les deux partis de Wall Street.

    Au Conseil, notre première priorité sera de pousser l’application d’un salaire minimum de 15 $ de l’heure. Nous allons rédiger une ordonnance à cette fin à destination du Conseil. Mais nous n’avons aucune illusion sur le fait que cela sera facile. Les grandes entreprises vont résister bec et ongles parce que Seattle est une ville importante, et qu’il leur faut éviter tout précédent. Cela pourrait avoir un effet domino sur d’autres villes. Nous devons donc continuer à soutenir la construction d’une mobilisation de masse autour de cette revendication.

    Une des choses à laquelle nous allons maintenant œuvrer est l’organisation d’un meeting de masse, notre objectif est de réunir 10.000 personnes mais nous verrons comment ça se passe, début d’année prochaine, en soutien à cette revendication des 15 $ de l’heure.

    J’ai vu beaucoup de commentaires disant qu’il y a quelque chose d’unique à Seattle. Bien sûr, il y a toujours des choses différentes d’une situation à l’autre, mais je pense qu’il est important pour la gauche de partout réaliser que, compte tenu de la crise du capitalisme (et en particulier en Europe au vu de la politique d’austérité qui y a été appliquée), il est absolument certain que de grandes possibilités existent. Si cela peut se produire dans l’antre de la bête, il n’y a aucune raison que cela ne puisse pas être fait ailleurs. Mais ce n’est pas automatique, et c’est pourquoi nous devons consciemment construire nos forces.

  • USA : des centaines de personnes présentes au meeting célébrant la victoire de Socialist Alternative à Seattle

    Un rassemblement qui donne le ton pour les luttes à venir et les occasions historiques qui se présentent pour la gauche socialiste

    Plus de 300 personnes ont assisté au meeting tenu à Seattle pour célébrer la première socialiste révolutionnaire élue au conseil de Seattle depuis des décennies. Kshama Sawant y a notamment appelé à la nationalisation sous contrôle démocratique de Boeing, le plus grand employeur privé de la région qui menace actuellement de déplacer ses activités hors de l’Etat, un appel qui a reçu des applaudissements enthousiastes de la salle. Sawant a ainsi déclaré : ”Les machines sont ici, les travailleurs sont ici. Plaçons la production toute entière sous propriété publique démocratique et orientons l’activité vers la production de transports en commun.”

0
    0
    Your Cart
    Your cart is emptyReturn to Shop