Tag: PTB

  • « Basta » contre les prix de l’énergie, le manque de moyens dans la santé et la guerre

    Avec 10 000 participant.e.s, la manifestation « Basta » organisée par le PTB hier fut un succès. Le PTB s’est mobilisé pour cette manifestation avec des slogans sur la baisse de la TVA sur l’énergie, la fin des brevets sur les vaccins et plus de ressources pour les soins de santé. Dans notre tract appelant à participer à cette manifestation, nous avons développé notre point de vue et nos propositions sur ces questions. Par exemple, nous insistons sur la nécessité de prendre en main l’ensemble du secteur de l’énergie et de ne pas s’arrêter à la revendication d’une réduction permanente et totale de la TVA sur l’énergie. Voir : https://fr.socialisme.be/59931/pour-une-rupture-anticapitaliste-radicale-venez-renforcer-la-marche-basta

    La guerre en Ukraine a fait l’objet de nombreuses discussions lors de la manifestation, tout comme dans la société. Le PTB a été critiqué dans les médias traditionnels sur ce point et, ces derniers jours, il a semblé ne pas insister sur la nécessité de construire un mouvement internationaliste anti-guerre comme alternative au conflit. Cependant, parmi les personnes présentes à la manifestation, les arguments en faveur d’un tel mouvement anti-guerre ont été rapidement repris. Nous avons également distribué un tract à nos stands avec notre point de vue : https://fr.socialisme.be/60035/non-a-la-guerre-en-ukraine-construisons-un-mouvement-de-masse-anti-guerre-et-anti-imperialiste

    Comme nous l’avons noté dans notre tract : “La manifestation du 27 février est une initiative importante. Mais il ne faut pas s’arrêter à cette manifestation. Une véritable lutte doit être construite autour des revendications de ce tract, par les syndicats, les partis de la gauche cohérente et les nombreux jeunes militant.e.s qui sont descendus dans la rue ces dernières années contre toutes les formes possibles de discrimination, le sexisme, le racisme, la LGBTQIA+-phobie,… et dans le contexte de la crise climatique. Ensemble, tout cela constitue la force sociale qui peut transformer la colère et la frustration de la société dans le changement social qui s’impose. Loin du capitalisme, pour un monde socialiste.”

    “D’autres actions et campagnes sont nécessaires autour de tous les revendications et thèmes abordés dans la marche Basta. Ce devrait être le point de départ d’un plan d’action global visant à construire un contre-pouvoir social capable d’imposer le changement. Nous avons besoin de plus que des manifestations ponctuelles. Des comités de lutte locaux pourraient être mis en place pour réunir les militant.e.s et les mobiliser pour la prochaine action. Des conférences locales et régionales de militant.e.s pourraient être organisées avec des syndicalistes, des activistes de gauche, des travailleur.euse.s, des jeunes en colère contre le changement climatique, des féministes et toutes celles et ceux qui défendent une société différente dans un puissant mouvement social.”

    Nous avons pu constater une grande ouverture à la discussion. Sur nos stands et avec nos militant.e.s dans la manifestation, nous avons vendu 122 exemplaires du mensuel Lutte Socialiste. Nous avons réalisé une douzaine d’abonnements et collecté 120 euros de soutien avec des badges.

    Reportage-photos de Walter et Liesbeth
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  • Pour une rupture anticapitaliste radicale : venez renforcer la marche « Basta » !

    La ‘Grande Colère’ organisée par le PTB en mars 2020.
    • Investissements massifs dans les soins de santé et le social

    • Nationalisation du secteur de l’énergie

    • Stop au gel des salaires

    • Levée des brevets

    Au cours de cette crise sanitaire historique, les 10 personnes les plus riches au monde ont doublé leur fortune : de 700 à 1.500 milliards de dollars. Oxfam a calculé qu’au cours de la même période, le revenu moyen de 99 % de la population mondiale a diminué. Impardonnable. Nos soins de santé et tous les services sociaux et publics craquent sous les coupes budgétaires et le manque de moyens. Mais les plus riches accumulent des quantités astronomiques de richesses.

    Tract du PSL/LSP – Tract en version PDF

    Le dimanche 27 février, le PTB appelle à manifester à Bruxelles sous le slogan « Basta ! Protégeons les gens, pas les puissants ». Nous saluons cette initiative. Il était temps que le PTB assume ce rôle et organise une manifestation pour qu’une critique explicite de gauche se fasse entendre non seulement au parlement mais aussi dans la rue. La gravité de la crise pour la classe des travailleur.euse.s exige la construction d’un large mouvement de lutte. La marche « Basta ! » peut y contribuer.

    Nous contribuerons à faire de cette action un succès et nous espérons que d’autres, y compris les syndicats, feront de même. Le défi est trop grand pour ne pas le relever ensemble.

    Les brevets assassins doivent disparaître ! Big pharma, la science, l’énergie et la santé aux mains du public

    Plus d’un an après la percée scientifique des vaccins contre le corona, seule la moitié de la population mondiale y a accès. Dans les pays à faible revenu, ce chiffre n’est que de 9,5 %. Pourtant, dans le monde néocolonial, il existe au moins 125 sites de production capables de produire ces vaccins. Ils sont inutilisés. Big Pharma veut le jackpot : produire tous les vaccins et en tirer le profit maximal.

    De nombreuses personnes estiment que la politique sanitaire ne tient pas debout et est bourrée de contradictions et d’absurdités. Ce bricolage conduit à des décès inutiles, à la division et au désespoir. Ce que cela a surtout démontré, c’est que le capitalisme est incapable d’élaborer un plan coordonné à l’échelle internationale pour lutter contre cette pandémie.

    Comme pour la gestion de la crise climatique, la coopération et la solidarité internationales sont cruciales. Il aurait aussi fallu mobiliser des ressources massives pour affronter cette crise. Nous n’avons rien eu de tout ça. À la place, nous avons eu le nationalisme vaccinal, la concurrence géopolitique, la crise dans les soins de santé et la protection des profits des grands capitalistes.

    Il est impossible de créer une île isolée du Covid-19, c’est désormais évident. Pendant que les gros actionnaires de Big Pharma amassent des fortunes hallucinantes, la pandémie continue ses ravages. Il faut mettre un terme à ces pratiques criminelles. Tant que les moyens de production resteront aux mains de particuliers, les besoins de la majorité des habitants de cette planète seront subordonnés aux profits de quelques-uns.

    La recherche et la production pharmaceutiques doivent être placées dans des mains de la collectivité, sous un contrôle et une gestion démocratiques exercés par la majorité de la population. Nous pourrions ainsi libérer la science des conséquences de la course frénétique aux profits qui l’emprisonne. C’est la principale raison de la méfiance croissante d’une partie de la population envers elle.

    La vie de plus en plus chère et nos salaires ne suivent pas

    La baisse des salaires et de notre pouvoir d’achat met en difficulté de nombreuses familles. La hausse des prix de l’énergie entraînera de plus un énorme transfert de moyens de la population vers les super-riches. Au même moment, les investissements massifs dans la transition énergétique font toujours défaut. On ne peut rien attendre de mieux des acteurs privés qui dominent le marché.

    La crise énergétique affecte le pouvoir d’achat de toutes et tous, mais elle frappe plus durement les plus socialement vulnérables. Les tragédies humaines s’accumulent. Ramener la TVA sur l’énergie à 6 % est une mesure de crise importante pour endiguer l’hémorragie. Il faut aller beaucoup plus loin pour faire baisser efficacement les prix. Les prix de l’énergie augmentent en raison de la logique à court terme dictée par les profits du privé et, par conséquent, de l’incapacité à planifier à plus long terme. Les tensions géopolitiques croissantes (Ukraine…) poussent également les prix à la hausse.

    Raoul Hedebouw remarque à juste titre : « Nous n’avons pas besoin de changer de fournisseur d’énergie, nous devons changer l’ensemble du système. » Même un éditorialiste de De Standaard du lundi 17 janvier affirme que le gouvernement devrait examiner « ce que le gouvernement peut reprendre du marché ». La revendication d’un secteur de l’énergie en mains publiques, telle que défendue par Raoul dans son discours du Nouvel An, devrait être une des revendications centrales de Basta ! Ce n’est que sous un contrôle et une gestion démocratiques qu’il serait possible de réaliser une transition énergétique planifiée tout en maîtrisant les prix. Cette bataille commence au niveau national, mais en fin de compte, elle doit être menée au niveau international.

    En action jusqu’à la fin du gel des salaires !

    Le PTB exige à juste titre la fin du gel des salaires. Il fait valoir que c’est la classe ouvrière qui fait fonctionner ce pays, et non les actionnaires. Pourtant, ces derniers s’approprient une part toujours plus grande du gâteau. Il faut que ça cesse.

    Il nous faut le rétablissement de l’indice complet, des négociations salariales libres et un salaire minimum de 14 euros de l’heure (ce devrait déjà être 15 euros). Les syndicats ont lancé une pétition signée par 25.000 personnes en une semaine. Ils prévoient également des actions et des manifestations dans le courant de l’année. Seul un véritable plan d’action crescendo, avec grève(s) générale(s) si nécessaire, peut construire le rapport de force qu’exige l’abandon de la loi sur la norme salariale. Des comités de mobilisation peuvent être mis en place sur les lieux de travail. Ils pourraient également collaborer avec les syndicats et les associations de consommateur.trice.s pour surveiller les prix et mesurer l’augmentation réelle du coût de la vie pour les travailleur.euse.s.

    Le 8 mars : une journée de lutte

    Le 8 mars, la Campagne ROSA (Résistance contre l’Oppression, le Sexisme et l’Austérité) organise des actions dans tout le pays. Cette année, elles se concentreront sur la lutte contre les violences de genre et en faveur d’investissements publics massifs dans les soins et le social. Rejoignez ces actions et contactez la Campagne ROSA pour agir ensemble contre la violence de genre, la culture du viol et la position économique plus vulnérable des femmes.

    La crise sanitaire a illustré toute l’importance de disposer d’un système de soins de santé solide, doté d’un personnel suffisant et rémunéré à hauteur de ses sacrifices. Nous avons besoin de beaucoup plus de moyens publics pour la prévention, l’élimination des listes d’attente, le logement social, l’Aide à la jeunesse, le conseil psychosocial, les soins aux personnes âgées, etc. L’éducation et la garde d’enfants ont besoin d’urgence de plus de ressources pour le personnel et les infrastructures. Les travailleur.euse.s des professions essentielles méritent d’être mieux payés et de voir leur charge de travail allégée. Une montagne de besoins sociaux nous fait face. Et les moyens existent. Nous n’y avons tout simplement pas accès ! La classe travailleuse doit prendre le contrôle des richesses qu’elle produit afin de pouvoir les satisfaire ses besoins.

    Un véritable parti de gauche ne doit pas se limiter à critiquer ce qui va mal. Nous devons également proposer une alternative. On attend bien plus qu’un diagnostic d’un médecin, même si un diagnostic correct est extrêmement important. On attend également un remède. Le diagnostic que nous partageons avec le PTB est que le capitalisme est un système en faillite.

    Le PSL relie le combat pour nos revendications immédiates à la lutte pour une transformation socialiste de la société. Aucune conquête sociale n’est sûre sous le capitalisme. Les bons arguments ou la bonne volonté ne convaincront pas les capitalistes. L’expérience grecque du gouvernement Syriza, entre autres, nous l’a montré. Tenter de réformer un système totalement antisocial, inefficace, destructeur et mortel n’est pas un remède. Le seul remède durable est de construire un système différent, un monde socialiste où la nature et l’être humain ne seront pas exploités au profit d’une infime élite.

    La marche Basta ne doit pas être une conclusion

    La manifestation du 27 février est une initiative importante. Mais il ne faut pas s’arrêter à cette manifestation. Une véritable lutte doit être construite autour des revendications de ce tract, par les syndicats, les partis de la gauche cohérente et les nombreux jeunes militant.e.s qui sont descendus dans la rue ces dernières années contre toutes les formes possibles de discrimination, le sexisme, le racisme, la LGBTQIA+-phobie,… et dans le contexte de la crise climatique. Ensemble, tout cela constitue la force sociale qui peut transformer la colère et la frustration de la société dans le changement social qui s’impose. Loin du capitalisme, pour un monde socialiste.

    D’autres actions et campagnes sont nécessaires autour de tous les revendications et thèmes abordés dans la marche Basta. Ce devrait être le point de départ d’un plan d’action global visant à construire un contre-pouvoir social capable d’imposer le changement. Nous avons besoin de plus que des manifestations ponctuelles. Des comités de lutte locaux pourraient être mis en place pour réunir les militant.e.s et les mobiliser pour la prochaine action. Des conférences locales et régionales de militant.e.s pourraient être organisées avec des syndicalistes, des activistes de gauche, des travailleur.euse.s, des jeunes en colère contre le changement climatique, des féministes et toutes celles et ceux qui défendent une société différente dans un puissant mouvement social.

    Rejoignez le PSL/LSP – Rejoignez le mouvement mondial ASI

    Lutter activement pour une transformation socialiste de la société, c’est ce que défend le PSL/LSP, section belge d’Alternative socialiste internationale (ASI). Participez à ce combat pour rendre possible un avenir socialiste !

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  • Nouveau président du PTB, même question : comment atteindre le socialisme ?

    Peter Mertens et Raoul Hedebouw lors d’une manifestation syndicale cette année. (Photo : Liesbeth)

    Ce début décembre, Raoul Hedebouw devient le nouveau président du PTB. Il succède à Peter Mertens, qui avait repris le flambeau de Ludo Martens en 2008 et avait incarné la rupture avec « l’ancien PTB », une rupture nécessaire à la survie du parti. La réforme fut fructueuse : le parti est passé de 2.300 membres à l’époque à 24.000 aujourd’hui. Les succès électoraux – objectifs autour desquels s’est construite la réforme du parti – n’ont pas manqué. En 2018, le PTB a remporté 169 élus locaux et 43 députés un an plus tard. Tout cela exprime l’aspiration croissante en faveur d’une critique de gauche de la politique dominante ainsi que la recherche d’une alternative à la société capitaliste en crise permanente.

    Par Bart Vandersteene, édito de l’édition de décembre-janvier de Lutte Socialiste

    La présence du PTB dans les enceintes parlementaires donne plus d’échos aux préoccupations des travailleuses et des travailleurs. Nous nous en réjouissons, tout en continuant à vouloir débattre des tactiques et de la stratégie nécessaires pour effectivement rompre avec le capitalisme. C’est à ce titre que nous nous inquiétons de voir les considérations électorales du PTB prendre le pas sur le développement des luttes sociales. Les changements annoncés à la tête du parti n’annoncent pas un nouveau cap.

    Même les revendications minimales se heurtent aux limites du système

    Cela fait un moment que les grandes campagnes du PTB se cantonnent à quelques propositions minimales : la baisse de la TVA sur l’énergie à 6 %, la taxe des millionnaires, une banque publique, la pension à 65 ans,… Cela résonne agréablement chez pas mal de monde et ce seraient sans conteste des pas en avant. Après 40 ans de contre-réformes de droite, ces revendications semblent souvent radicales.
    Cependant, même ces revendications se heurtent immédiatement à la maximalisation du profit inhérente au capitalisme. Arracher des conquêtes sociales exige des luttes sociales menées avec acharnement par la base, pour construire un rapport de force que les capitalistes ne peuvent contourner.

    La lutte des classes est le moteur du changement social. Les positions parlementaires doivent avant tout servir à son développement. Chaque victoire obtenue sous le capitalisme (salaires, conditions de travail, sécurité sociale,…) est toujours sous la pression de la concurrence brutale entre entreprises et de leur besoin d’optimiser les profits. La lutte des classes est permanente et omniprésente et il en ira de même tant qu’existeront ces deux classes sociales fondamentalement opposées.

    D’une part la classe capitaliste qui possède les banques, les entreprises, la technologie, les terrains et les bâtiments. C’est la classe sociale qui bénéficie de l’organisation actuelle de la société. D’autre part, la grande majorité de la population, c’est-à-dire la classe des travailleuses et travailleurs, celle et ceux qui dépendent de la vente de leur force de travail pour leur subsistance. Cette majorité sociale a tout intérêt à ce que la société repose sur la coopération et la solidarité plutôt que sur la compétition et la rivalité. Cette majorité sociale a intérêt à ce que les problèmes tels que le climat, la sécurité alimentaire, la misère et la santé soient abordés de manière globale et solidaire, à ce qu’il y ait une sécurité sociale partout dans le monde de même qu’un enseignement et des services publics gratuits et de qualité, à la disparition des discriminations et de l’exploitation. Entre cette société solidaire et la propriété privée des moyens de production, il faut choisir. C’est l’un ou l’autre.

    Convaincre, par l’agitation et la lutte sociale, l’audience la plus large possible de l’idée que le capitalisme est incompatible avec une politique sociale est la tâche fondamentale de toutes celles et ceux qui défendent le socialisme. Le PTB ne remplit pas cette mission. Il ne lie pas ses revendications minimales à la remise en cause de la propriété privée des moyens de production, pierre angulaire de la société capitaliste.

    Ce faisant, le PTB s’aligne sur la tendance dominante au sein de la gauche actuelle : l’adaptation au système. La chute des dictatures staliniennes il y a 30 ans pèse encore lourdement sur les esprits. L’idée qu’une alternative au capitalisme soit possible a semblé être une illusion naïve aux yeux de plusieurs générations. Le tourbillon idéologique du néolibéralisme et de l’individualisme a exercé une pression terrible sur les organisations de gauche et sur leurs programmes. De nombreux partis que le PTB prend comme point de référence en Europe ont relégué à l’arrière-plan la défense du socialisme pour ne plus parler que de corrections sociales du système capitaliste. Le PTB évolue aussi dans cette direction.

    Comment le PTB nouveau a-t-il vu le jour ?

    Au début de ce siècle, Peter Mertens s’est imposé comme chef de file de la jeune garde qui a mené une révolution interne en mettant un terme au stalinisme très ouvert du parti. Raoul Hedebouw est alors devenu le porte-parole jovial qui a traduit ce virage en passant d’une rhétorique stalinienne à l’ancienne à un style direct parfois simpliste, mais électoralement porteur. Dans les années 1990, Mertens et Hedebouw étaient des pionniers du mouvement de jeunesse du PTB qui s’appelait alors le MML (Mouvement Marxiste-Léniniste). De nombreux cadres centraux de la direction actuelle du parti ont reçu leur formation politique stalinienne « à l’ancienne » au cours de cette période.
    Mais au tournant du siècle, ce modèle stalinien est devenu complètement obsolète. Cela a plongé le PTB dans une crise existentielle.

    Parallèlement, l’espace pour une alternative politique à la social-démocratie et aux « verts » s’est élargi car ces derniers avaient de plus en plus ouvertement embrassé la logique néolibérale. Le PTB ne parvenait pas à occuper cet espace. À l’époque, nous défendions la nécessité de construire un nouveau parti large et combatif de la classe ouvrière auquel pourraient appartenir tous les opposants aux politiques néolibérales. Nous avons fait valoir que le PSL (qui s’appelait encore du côté francophone le Mouvement pour une Alternative Socialiste, MAS) ferait tout son possible pour soutenir un tel parti tout en continuant à construire sa propre organisation marxiste.

    Plusieurs tentatives pour combler le vide à gauche ont existé. En 2006, le Comité voor een Andere Politiek (CAP) a été fondé, avec, entre autres, l’ancien parlementaire du SP Jef Sleeckx. Il y avait alors Une Autre Gauche (UAG) à Bruxelles et en Wallonie. En 2011, SP.a-Rood s’est détaché du SP.a et a constitué le groupe Rood ! Nous avons participé à diverses collaborations comme le Front des Gauches et Gauches Communes, ou encore à l’appel de 2012 de la FGTB de Charleroi et Sud-Hainaut. Aucune de ces initiatives n’avait la bonne approche et la bonne composition pour aboutir à un nouveau parti. Néanmoins, le PSL a fait tout ce qu’il pouvait pour renforcer ces initiatives. Au final, le PTB est parvenu à remplir l’espace laissé vacant, étape par étape. Il est toutefois malheureusement resté résolument hostile au soutien du PSL à ce processus.

    Cela ne nous empêchera pas, lors des prochaines élections, d’appeler certainement à voter pour le PTB, car il s’agit aujourd’hui de la meilleure option pour renforcer la voix de la classe ouvrière dans le débat politique et de soutenir ainsi la lutte de classe. Nous examinerons attentivement les conclusions du congrès du PTB le 5 décembre. Non pas parce que nous sommes critiques pour le plaisir de critiquer, mais parce que le débat sur la voie pour réaliser une transformation de société est essentiel pour les militants et les syndicalistes combatifs. Dans ce cadre, nous lions inextricablement chaque conquête sociale de la classe ouvrière à la nécessité d’une lutte déterminée et internationale pour une transformation socialiste de la société.

  • Critique du livre ”Ils nous ont oubliés” de Peter Mertens

    Plaçons la classe ouvrière au centre, y compris dans le combat pour un changement de société !

    Sept mois de crise sanitaire ont démontré que ce sont les travailleurs qui font tourner le monde. Cela conduit à une plus grande conscience de classe. Le livre de Peter Mertens aborde cette question. Il part de la vie et du travail des héros, de la classe ouvrière. C’est, de plus, une mise en accusation de la classe capitaliste qui souhaite que cette conscience collective de la classe ouvrière soit oubliée le plus vite possible.

    Par Michael (Gand)

    Un rappel essentiel

    Les travailleurs ont dû tout faire mais, pourtant, leurs intérêts étaient loin d’être centraux dans les mesures sanitaires. Nous avons constaté une contradiction criminelle entre les mesures de confinement individuelles et les intérêts économiques. Peter Mertens dénonce à juste titre le ”deux poids, deux mesures”. “Les règles s’appliquent à tous, sauf lorsqu’il s’agit de fabriquer des boîtes de vitesses. Ça c’est permis !”, écrit-il dans son avant-propos. Tout est secondaire face aux profits.

    Le livre nous rappelle que ce sont les travailleurs eux-mêmes et leurs syndicats qui ont provoqué l’arrêt d’une partie de la production non essentielle ou qui ont fait respecter les mesures de sécurité. “Plus le syndicat est fort sur ses pattes, plus le lieu de travail est sûr”, résume Mertens.

    Il aurait aller un peu plus loin : les initiatives viennent actuellement presque toujours de la base, alors que la direction semble absente. Dans la saga des masques, par exemple, les directions syndicales auraient pu faire campagne pour exiger que des lignes de production soient réorientées et des stocks saisis pour protéger les travailleuses et les travailleurs. Lorsque le collectif militant “La Santé en Lutte” a pris l’initiative de sortir la lutte sociale du confinement, les dirigeants syndicaux auraient pu en faire un exemple national.

    Le rôle de la classe ouvrière a été clairement démontré dans cette crise sanitaire. Les responsables politiques et les médias aimeraient que cela soit oublié au plus vite. Après tout, cela représente un danger pour leur politique. Des années de mesures d’austérité fanatiques et désastreuses ont aggravées les conséquences de la crise. Ces dernières années, les patrons ont mené avec succès une lutte de classe pour défendre leurs intérêts matériels : leurs profits. Si leur adversaire – notre classe ouvrière – commence à s’en rendre compte, ils ont un problème.

    Des investissements publics massifs sont nécessaires. Comment les arracher ?

    La nécessité d’investissements publics massifs devient de plus en plus évidente. Plusieurs gouvernements capitalistes s’en rendent compte et proposent des plans de relance. En général, ces plans visent directement les intérêts des grandes entreprises, même s’il y a parfois quelques mesurettes en faveur du pouvoir d’achat. Les marxistes partent d’une logique différente : de ce qui est nécessaire pour la majorité de la population.

    Dans son livre, Peter Mertens présente son plan Prométhée, un plan que quatre consortiums publics européens mettraient en place pour investir dans l’énergie, les soins de santé, les transports et le développement numérique. Il s’agirait de consortiums publics destinés à développer l’activité économique et l’emploi sur la base d’investissements publics qui auraient, en outre, lieu au niveau européen. La manière dont cela serait mis en œuvre est toutefois beaucoup moins claire. Peter Mertens pense-t-il que l’on peut convaincre l’establishment avec de bons arguments ? Ou que les nouvelles formations de gauche en Europe seront soudainement si fortes qu’elles pourront l’imposer et même répondre à l’inévitable chantage des grandes entreprises ? Nous en doutons : malheureusement, de nombreuses nouvelles formations de gauche en Europe se mettront rapidement à genoux dès qu’elles rencontreront une opposition. Nous l’avons constaté avec Syriza en Grèce ou avec Jeremy Corbyn en Grande-Bretagne.

    Néanmoins, un plaidoyer en faveur d’un vaste plan d’investissements publics est très utile. Mertens fait référence au Green New Deal d’Alexandria Ocasio-Cortez aux États-Unis, un plan ambitieux qui suscite un grand enthousiasme. En même temps, il est clair que l’application de ces mesures nécessite une lutte acharnée et qu’elles sont contraires aux intérêts des grandes entreprises. Tant que les secteurs clés de l’économie seront détenus et gérés par le secteur privé sur base de la logique de profit et de concurrence, il y aura une résistance farouche de la part des grandes entreprises. D’une part, les grandes multinationales de l’énergie n’accepteront pas la concurrence d’un consortium énergétique public. D’autre part, pour survivre, une entreprise d’énergie publique dans un marché dominé par des multinationales devrait suivre les règles de ces dernières.

    Pour le financement du plan Prométhée, Peter Mertens se penche sur une taxe des millionnaires, mais au niveau européen. Un tel impôt sur les actifs serait plus que bienvenu, mais il nécessite la levée du secret bancaire, l’élaboration d’un registre d’actifs et la possibilité d’exproprier pour éviter le sabotage.

    Pourquoi ne pas mettre la capacité de production développée par la classe ouvrière sous le contrôle et la gestion de cette même classe et de la communauté ? Il serait alors possible de planifier démocratiquement la production en fonction des besoins en tenant compte de l’environnement.

    Apprivoiser le capitalisme ?

    Placer les secteurs clés de l’économie dans les mains du public et développer une économie planifiée signifie de rompre avec le capitalisme. À l’heure où le capitalisme démontre si clairement l’étendue de sa faillite, la gauche doit ouvertement et audacieusement défendre une transformation socialiste de la société.

    Il est illusoire de penser que le capitalisme peut être dompté, même si les défenseurs clairvoyants de ce système se rendent compte qu’il est parfois nécessaire de permettre au gouvernement de jouer un rôle plus important et de réduire un peu les inégalités. Leur objectif n’est pas de se concentrer sur les besoins des masses, mais de défendre le capitalisme et de le protéger de la révolution.

    C’est la position de l’économiste libéral Paul De Grauwe, qui a beaucoup fait l’éloge du livre de Peter Mertens et qui était l’un des intervenants lors de la présentation du livre. Dans le quotidien flamand De Morgen, il s’est exprimé ainsi : “Si vous laissez simplement le capitalisme à lui-même, sans un gouvernement qui intervient fortement, l’inégalité continuera à s’accroître. (…) Sans gouvernement pour soutenir ce système, le capitalisme peut imploser”. De Grauwe était autrefois un défenseur du néolibéralisme, mais il se rend bien compte que la logique néolibérale met aujourd’hui en danger le capitalisme. Par ailleurs, De Grauwe fait souvent référence aux taux d’imposition élevés sur les gros actifs aux États-Unis dans les années 1950 et 1960, une période de croissance économique exceptionnelle dans un contexte de guerre froide et d’un mouvement ouvrier bien organisé.

    Les références au New Deal de Roosevelt et aux taux d’imposition des années 1950 et 1960 sont souvent faites pour montrer qu’une politique différente est possible et réalisable. A une époque de conscience de classe accrue, il est cependant problématique de ne pas regarder ce contexte de lutte des classes. C’est pour éviter un plus grand développement de la lutte ouvrière que Roosevelt a réalisé d’avantage de concessions sociales dans son deuxième New Deal. Mais même cela n’a finalement pas suffi pour stopper la crise. Ce n’est arrivé qu’avec la guerre.

    La classe ouvrière peut arracher le changement

    Dans “Ils nous ont oubliés”, Peter Mertens souligne le rôle central de la classe ouvrière dans la lutte contre le coronavirus et dans la production des richesses. C’est cette même classe ouvrière qui est essentielle pour parvenir au changement social.

    Selon Peter Mertens, un “tremblement de l’esprit” est nécessaire. Ce faisant, il semble créer l’illusion qu’il suffit de faire de bonnes propositions, d’en convaincre les gens et que, sur la base de ce soutien, les capitalistes devront l’accepter. N’est-ce pas là une sous-estimation de notre adversaire ? Les bonnes idées ne suffisent pas lorsque l’autre camp mène avec succès la lutte des classes.

    Tout au long de l’histoire, il a été démontré que les conquêtes sociales ont toujours été obtenues par la lutte des classes. La seule force capable de contrer la résistance profondément enracinée du grand capital est un mouvement de masse reposant sur la force sociale et économique de la classe ouvrière. Un tel mouvement et une telle lutte commencent au niveau national, mais s’étendent rapidement sur la scène internationale, surtout aujourd’hui. C’est important et c’est nécessaire ; après tout, une société socialiste est condamnée en restant isolée à un pays. La solidarité internationale dans la lutte pour le changement social est essentielle.

  • Des milliers de personnes à la Grande Colère du PTB

    Hier, le PTB avait organisé une “Grande Colère”, une manifestation autour de revendications telles qu’une pension minimale de 1500 euros net, la réduction du nombre de ministres et la diminution de moitié des salaires des politiciens. Le PSL était présent pour discuter de la manière dont nous pouvons organiser la colère face à la crise politique et au manque de mesures sociales afin de mettre en œuvre efficacement une politique réellement différente. Nos militants ont vendu environ 80 exemplaires de notre mensuel “Lutte Socialiste”, qui comprenait notamment cet article : “PTB : De la Grande Colère à la lutte pour un gouvernement de la taxe des millionnaires ?”

    Reportage-photos de Liesbeth:

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  • PTB : De la Grande Colère à la lutte pour un gouvernement de la taxe des millionnaires ?

    Jos D’Haese, président du groupe du PTB au parlement flamand.

    Le 1er mars, le PTB a organisé sa Grande Colère, une marche pour une autre politique à Bruxelles en réponse à la crise politique actuelle. Le parti n’a pas chômé depuis le scrutin et a démontré qu’il n’est pas une formation comme les autres au Parlement.

    Par Boris (Bruxelles), article tiré de l’édition de mars de Lutte Socialiste

    Tous comme le PSL, le PTB est implanté en Flandre, en Wallonie et à Bruxelles, à l’image des luttes du mouvement ouvrier, quoi ont toujours dû aller au-delà des barrières linguistiques pour arracher de sérieuses victoires. Les élus du PTB gagnent l’équivalent du salaire moyen d’un travailleur alors que les politiciens traditionnels vivent dans une tour d’ivoire. Dans les enceintes parlementaires, ils ont fait entendre la voix des travailleurs. On leur doit le ‘‘Fonds blouses blanches’’ pour lequel une majorité parlementaire alternative a été trouvée sous la pression des mobilisations des blouses blanches et de La Santé en Lutte. Le PTB a lancé une pétition en faveur de la pension minimum de 1.500 euros net pour laquelle il a déjà récolté 170.000 signatures. Avec la Grande Colère, le PTB entend mobiliser ses forces pour peser dans le débat actuel autour de la formation d’un gouvernement fédéral. Aucun parti traditionnel n’a été aussi actif.

    La Grande Colère

    Le PTB affirme que le message social des élections est ignoré. Il a raison. Les partis de droite qui ont perdu les élections cherchent à en falsifier le résultat autour de l’idée de la soi-disant existence de ‘‘deux démocraties’’ avec une Flandre à droite et une Wallonie à gauche pour réclamer une nouvelle réforme de l’État et continuer d’appliquer une politique de droite. La réalité, c’est que la politique de casse sociale de la coalition suédoise a été sanctionnée.

    Dans son appel à manifester, le PTB explique la crise actuelle par le fait que la Belgique ‘‘est prise en tenaille par des politiciens qui jouent des petits jeux politiques, d’une part, et par des séparatistes qui veulent scinder le pays, d’autre part.’’ Il entend mobiliser la colère contre les politiciens autour de trois revendications : la pension minimum à 1.500€ net, la réduction de moitié des salaires des députés et la refédéralisation des compétences en matière de mobilité, de climat et de pauvreté.

    Cette approche et ces revendications très modestes semblent indiquer une volonté de partiellement reproduire la manifestation ‘‘Shame’’ qui avait rassemblé 45.000 personnes à Bruxelles le 23 janvier 2011 après 223 jours de crise de formation du gouvernement. Cette manifestation exprimait le mécontentement grandissant contre la crise politique et réclamait un gouvernement. Tout en désapprouvant le concept de l’appel, le PSL était intervenu dans la manifestation sur le thème :“Un gouvernement pour s’attaquer aux banques et aux spéculateurs, pas aux travailleurs et à leur famille.’’

    A l’époque de la crise de 2010-2011, le PTB n’avait pas encore réalisé sa percée électorale et aucune réponse n’émanait du mouvement ouvrier organisé. Aujourd’hui, l’atmosphère sociale est encore marquée par les grèves des jeunes pour le climat tandis que les travailleurs sont passés à l’action dans la santé, dans les prisons et à la SNCB. En Flandre, la résistance au gouvernement de droite a été enclenchée par le secteur culturel et le secteur social. Une lutte de longue haleine contre les bas salaires continue de se développer parmi le personnel des pouvoirs locaux à Bruxelles, dans le secteur des titres-services et à l’Université de Gand, où la campagne de sensibilisation de la FGTB ‘‘Fight for 14 euros’’ est concrétisée par l’action du personnel.

    A cela s’ajoute la manifestation syndicale FGTB du 28 janvier en défense de la sécurité sociale qui fut un premier succès pour préparer le mouvement ouvrier aux attaques à venir. Le président de la FGTB Robert Vertenueil a déclaré qu’un gouvernement doit reposer sur le pouvoir d’achat, le social et le climat autour d’une défense d’une sécurité sociale forte, d’une pension de minimum 1.500€ net, d’un retour de l’âge de la pension à 65 ans, d’un salaire minimum de 14€/h, d’allocations sociales au-dessus du seuil de pauvreté et d’un plan d’investissements d’urgence pour le social et le climat.

    Lutter pour un gouvernement de la taxe des millionnaires

    Après quatre décennies de politiques néolibérales, les partis traditionnels sont en crise et le centre de gravité des calculs politiques s’est progressivement déplacé vers les Régions. Tous ces partis traditionnels s’accordent à dire qu’il faudra une nouvelle cure d’austérité pour réduire le déficit public qui s’élèvera à 12,4 milliards fin 2020. La tâche sera ardue sans toucher à la sécurité sociale.

    Les partisans d’un gouvernement autour de la NVA et du PS veulent démanteler la sécurité sociale en régionalisant des pans entiers de celle-ci par une nouvelle réforme de l’Etat tandis que les partisans d’un gouvernement sans la NVA préfèrent l’option d’un démantèlement fédéral. A l’instar de la FGTB, la Marche Mondiale des Femmes (MMF) a bien compris l’enjeu du moment en plaçant la journée du 8 mars sous le signe de la défense de la sécurité sociale. Avec sa Grande Colère, le PTB semble être passé à côté du sujet.

    De la refédéralisation des compétences ne découle pas automatiquement une politique de gauche. L’idée est d’ailleurs partagée par bon nombre de libéraux. Les revendications de la Grande Colère ne sont pas à la hauteur de l’enjeu. Durant sa campagne électorale, le PTB avait revendiqué un plan radical d’investissements publics de 10 milliards d’euros par an pour faire face aux pénuries sociales et au défi climatique. Tout comme la FGTB, il a défendu l’instauration d’un salaire minimum de 14€/h mais aussi des propositions comme la semaine de travail de 30h et la taxe des millionnaires. Pourquoi ne pas avoir poursuivi sur cette lancée et chercher à transformer le soutien passif à ses idées en un début de résistance active le 1er mars ? Si nous voulons sérieusement qu’un gouvernement de la taxe des millionnaires voie le jour, nous devons sans relâche chercher à construire un rapport qui nous soit favorable.

    Mais un gouvernement de la taxe des millionnaires subira le chantage, l’obstruction et le sabotage (fuite des capitaux, etc.) de la part de la classe capitaliste. Un gouvernement des travailleurs devra donc recourir à l’arme de la nationalisation pour véritablement changer notre quotidien.

  • Passer de la contestation à la victoire par une lutte offensive

    L’austérité permanente affecte la majorité de la population de plusieurs manières: pénuries dans les soins de santé, manque de logements abordables, services publics insuffisants, infrastructures défaillantes, pensions de misère, salaires en retard sur le coût de la vie, charge de travail insoutenable,… Ce qui entraîne des actions de protestation chez les chauffeurs de bus de De Lijn, dans le secteur culturel flamand, parmi le personnel soignant à Bruxelles (surtout) et à Liège et dans les services publics locaux bruxellois. La question cruciale est de savoir comment transformer cette colère en victoire. Entrer en lutte de manière organisée est essentiel, mais cela ne suffit pas en soi. Nous devons également nous appuyer sur un programme de changement social qui s’affine et s’améliore au degré des enseignements de la lutte et qui peut gagner à lui une couche croissante de la société. Nous devons combiner un meilleur rapport de force sur le terrain et les lieux de travail avec la traduction politique des revendications du mouvement des travailleurs, des éléments qui se renforcent mutuellement.

    Par Geert Cool

    Le PTB veille à faire entendre notre voix au Parlement

    L’arrivée de 43 membres du PTB dans les divers parlements lors des élections du 26 mai fut un grand pas en avant pour faire entendre la voix du monde du travail. Chose effrayante pour de nombreux politiciens. Sur quelle planète vit donc Kris Peeters (ancien ministre CD&V et maintenant eurodéputé), qui a fait part au quotidien Het Laatste Nieuws du choc qu’a été pour lui un voyage à Londres sans chauffeur, ni personne pour lui arranger son déjeuner et devant lui-même chercher l’emplacement de son hôtel sur Google Maps ? (1) Quel contraste avec les députés du PTB qui ne conservent que l’équivalent du salaire moyen d’un travailleur. Quand les élus du PTB parlent de pénurie dans les soins de santé ou sur le rail, ils et elles parlent de situations concrètes connues, contrairement aux politiciens bourgeois déconnectés de la vie quotidienne de la population.

    Avec son amendement sur un fonds d’urgence de 67 millions d’euros par mois pour le secteur de la santé, le PTB a marqué des points à la Chambre. Le fait qu’il n’y ait pas de gouvernement fédéral signifie que les chiffres du budget de l’année dernière seront utilisés pour gouverner, c’est le système des ‘‘douzièmes provisoires’’ qui fournissent un douzième du budget annuel de 2018 pour chaque mois. Un gouvernement en affaires courantes qui ne dispose pas d’une majorité n’est évidemment pas en position de force. Cela ouvre un espace pour des initiatives telles que l’amendement déposé victorieusement par le PTB. Cela exercera également une pression sur les autres partis qui se sont prononcés en faveur d’une augmentation des ressources consacrées aux soins de santé pendant la campagne électorale. Le PTB a fait à juste titre référence à la vague de colère des blouses blanches dans les rues, ce qui a accru la pression.

    Rompre avec le carcan budgétaire

    La principale critique de la droite était que ces moyens supplémentaires creusent le déficit du budget. En d’autres termes, on manque d’argent. La droite ‘‘oublie’’ de parler des milliards d’euros qui disparaissent chaque années en cadeaux fiscaux pour les grandes entreprises. Sur Radio 1, on a demandé à Peter Mertens (président du PTB) si des propositions similaires étaient prévues pour d’autres secteurs en difficulté. L’occasion était excellente de parler des déficits sociaux dans la société. Malheureusement, la réponse de Peter Mertens respectait les restrictions budgétaires. ‘‘Non, c’est pour un secteur qui en a grand besoin. (…) Nous n’allons pas faire ça tout de suite.’’ Et 67 millions sur un douzième provisoire de 16 milliards d’euros, c’est une somme limitée : ‘‘Ne paniquez pas.’’ (2) Ces ressources supplémentaires pour les soins de santé représentent une rupture avec la tendance de ces dernières années. Mais la question de savoir comment nous allons faire respecter les revendications du mouvement des blouses blanches et des autres secteurs en difficulté reste entière. Comment se préparer pour le prochain gouvernement fédéral qui, s’il reste enfermé dans la camisole de force budgétaire, proposera de nouvelles économies sur les soins de santé et la sécurité sociale ? Et qu’en est-il de l’austérité régionale, déjà très concrètes en Flandre et à Bruxelles et inévitables à en Wallonie et en Fédération Wallonie-Bruxelles lors des prochains contrôles budgétaires ?

    Rompre avec le carcan budgétaire est indispensable, il faut s’y préparer. La meilleure manière d’y parvenir, c’est par une mobilisation qui veille à impliquer le plus grand nombre possible de travailleurs. Au cours des négociations gouvernementales en Wallonie, le PTB aurait été en meilleure position s’il avait organisé des réunions régionales, des débats publics et des actions autour des revendications centrales défendues par la FGTB. Cela aurait pu montrer clairement que l’incapacité à parvenir à des gouvernements de gauche ne venait pas d’un refus principiel de participer au pouvoir, mais d’un refus du PS et d’Ecolo de briser le carcan budgétaire.

    Imposer le changement par la lutte de masse

    Nous ne pourrons pas faire l’économie de la construction d’un bon rapport de forces. Des victoires telles que ce fonds d’urgence de 67 millions d’euros pour les soins de santé renforcent la confiance. Les pétitions, les actions ludiques, les brochures,… peuvent jouer un rôle dans la popularisation de nos revendications et la construction d’actions plus décisives, telles que les grèves qui défient directement le pouvoir économique parce qu’elles touchent les profits(3). Toutes les grandes conquêtes sociales proviennent de luttes de masse: la journée des 8 heures, le suffrage universel, les congés payés, la sécurité sociale,… n’ont pas été acquises grâce à de bonnes initiatives parlementaires, mais par des mouvements de masse qui ont menacé le capitalisme.

    Les grands changements proviennent d’un mouvement de masse de la classe des travailleurs capable de paralyser la vie économique. Le mouvement de la jeunesse pour le climat a adopté l’idée des grèves. Le British Collins Dictionary a déclaré que la ‘‘grève du climat’’ était le ‘‘mot de l’année’’ (4) Les mouvements de masse sont à l’ordre du jour à travers le monde et ils ont un effet de contagion. Nous ne construisons pas un rapport de force en nous concentrant uniquement sur une minorité active, mais en impliquant des couches plus larges de la population.

    Un programme de changement de société

    Les conquêtes sociales furent possibles dans la période de croissance d’après-guerre, où la paix sociale était achetée par des concessions à la classe ouvrière. Ce n’est plus possible dans le contexte actuel de crise et de nouvelle récession imminente. Attendre l’arrivée d’un gouvernement fédéral pour défendre nos revendications par des actions syndicales est une tactique qui ne tient pas compte de la fin du modèle de concertation. Le renforcement de la présence du PTB au Parlement peut être utilisé pour stimuler et organiser la résistance dans la rue. Il est illusoire de penser que des mesures parfaitement légitimes telles qu’une pension minimale de 1.500 euros par mois seront facilement obtenues et que c’est une simple question de volonté politique. Nous devrons nous battre sur le terrain. Le PTB dit : ‘‘Pour nous battre au parlement sur la pension à 1,500 euros, nous avons besoin de votre soutien’’ . La présence du PTB au parlement est une donnée importante. Mais le centre de gravité du changement est dans la rue et dans les entreprises . Dans le passé, le Parti Ouvrier Belge (POB) et le Parti Socialiste Belge (PSB), les ancêtres des actuels PS et SP.a, estimaient que tous les changements se produiraient grâce au Parlement. La lutte pour le suffrage universel a été desservie par cette approche où les grèves ne visaient qu’à relâcher un peu de pression avant de chercher un compromis parlementaire. Lorsque les mineurs sont partis en grève au début des années ’30, la social-démocratie a tenté de contrôler le mouvement en présentant à plusieurs reprises un projet de loi pour la nationalisation du secteur. Cela ne fut pas suffisant pour empêcher le mouvement de grève de 1932. Même des propositions et des actions très progressistes peuvent être contre-productives si elles ne visent pas à organiser et à renforcer la lutte sur le terrain, à partir de la base.

    Cela peut se faire en liant un programme de transformation socialiste de la société à chaque revendication concrète et à chaque mesure directe. Comme l’a souligné Rosa Luxembourg dans sa critique du POB : ‘‘Même si une situation politique particulière peut amener temporairement le parti ouvrier de chaque pays à se mobiliser davantage pour certains objectifs de son programme que pour d´autres, c´est bien la totalité de notre programme qui reste le fondement permanent de notre combat politique’’ (5). Si nos propositions soulignent toujours la nécessité d’une transformation socialiste, ce n’est pas par routine. C’est la réflexion du constat objectif que la consolidation des conquêtes sociales et l’obtention de nouveaux acquis fondamentaux entrent en conflit avec le capitalisme. Tout au long de la lutte pour des réformes, ce à quoi nous participons avec enthousiasme, nous entendons renforcer le soutien en faveur d’une rupture anticapitaliste. Par exemple, nous soulignons depuis des années qu’un plan massif d’investissements publics dans les services publics et les infrastructures nécessite de rompre avec le carcan budgétaire.

    Tous les économistes soulignent la menace d’une nouvelle récession. Les porte-parole du capitalisme eux-mêmes disent que leur système est dans l’impasse. Le mouvement des travailleurs et la gauche ont traversé une période difficile de triomphalisme néolibéral ces 30 dernières années. Mais cette période touche à sa fin. Ce triomphalisme est aujourd’hui absent des discours des porte-paroles du capitalisme. Il est temps pour nous de passer d’une position défensive à une lutte offensive pour une transformation socialiste de la société.

    NOTES

    1. Het Laatste Nieuws 27 oktober 2019
    2. Radio 1, De Ochtend 19 oktober 2019. Te bekijken op https://www.youtube.com/watch?v=hBDO72qqpS8
    3. Etude du Washington Post https://www.washingtonpost.com/politics/2019/10/24/we-checked-years-protests-countries-heres-what-we-learned-about-working-class-democracy/
    4. https://www.theguardian.com/books/2019/nov/07/climate-strike-named-2019-word-of-the-year-by-collins-dictionary
    5. “Rosa Luxemburg et les socialistes Belges”, Anne Vannesse, Ed. Cimarron, 2018

  • Pas de gouvernement de gauche en Wallonie. La faute au PTB ?

    Dans son interview du 6 août à la radio publique, le secrétaire général de la FGTB Wallonne Thierry Bodson a chargé le PTB et le CDH pour le retour aux affaires du MR dans les négociations wallonnes : ils ‘‘ont pensé à eux d’abord et pas aux gens d’abord’’. Le PTB porterait la responsabilité de l’échec de la formation d’un gouvernement de gauche en Wallonie comme le souhaitait la FGTB. Le PTB défend que l’absence de politique de rupture l’empêchait de participer. Thierry Bodson répond que le PTB aurait privilégié des calculs politiciens pour les prochaines élections au lieu de répondre aux demandes des jeunes, des travailleurs et des Gilets Jaunes qui ont manifesté. Cette idée rencontre un certain écho auprès de nombreux électeurs de gauche. Beaucoup d’autres estiment au contraire que le PTB a eu le courage de ne pas renoncer à son programme une fois aux portes du pouvoir.

    Par Boris (Bruxelles)

    La note remise au PS en Wallonie, ‘‘les lignes rouges du PTB’’, allait dans la bonne direction avec l’exigence de rompre avec les carcans austéritaires, le refus des partenariats publics-privés (PPP), la gratuité des TEC, la création de 40.000 logements sociaux, l’arrêt des exclusions du chômage, un pôle public de l’énergie et des investissements dans les services publics. Selon le PTB, les discussions avec le PS n’ont été qu’une mauvaise pièce de théâtre pour que le PS parvienne à justifier un futur accord avec le MR auprès de ses électeurs. Elio Di Rupo dément et y a répondu dans sa lettre envoyée à tous les membres du PS : ‘‘fin des partenariats publics-privés, davantage de logements publics, gratuité des TEC en Wallonie, (…), création d’un pôle public de production et de fourniture d’énergie, (…). Nous avons souligné ces convergences et la possibilité de former un noyau de propositions fortes constituant le cœur d’un futur accord de gouvernement. Les représentants du PTB n’ont rien voulu entendre.’’ Le PS est évidemment peu crédible à ce sujet après sa participation à toutes les politiques néolibérales passées. Aucune de ces propositions n’a d’ailleurs été reprise dans la note ‘‘coquelicot’’ commune avec ECOLO, une note où les services publics ‘‘ne sont pas cités une seule fois dans le texte’’ selon Thierry Bodson.

    Mais au lieu de quelques heures de discussions en coulisse, le PTB n’aurait-il pas mieux fait de prendre le temps, via des assemblées dans toutes les villes, d’impliquer le plus grand nombre possible de syndicalistes, de militants et d’électeurs dans un large débat public autour du programme et de la manière avec laquelle un gouvernement de gauche peut le réaliser ? Même en cas d’échec des négociations, cela aurait permis de préparer au mieux les mobilisations sociales à venir.

    La participation de syndicalistes au débat aurait même pu enrichir la note du PTB en y ajoutant, pour la fonction publique, les revendications d’un salaire minimum de 14€/h et la semaine de travail de 32h sans perte de salaire avec embauches compensatoires. Ces revendications figurent également dans le programme électoral du PS. Ne valait-il pas mieux en faire des conditions strictes pour un soutien de l’extérieur en faveur d’un gouvernement coquelicot tout en clarifiant que les élus PTB ne voteraient aucun budget d’austérité ?

    C’est vrai, nous ne devons pas nous bercer d’illusions sur les possibilités qu’un gouvernement minoritaire PS-ECOLO représente un véritable changement pour la vie des gens. Mais, si le PS avait accepté cette proposition, cela aurait pu aider à créer de l’enthousiasme pour développer la campagne de la FGTB ‘‘Fight for 14€’’ et la lutte pour remporter ce combat. Si au contraire le PS l’avait refusée, il aurait alors été évident aux yeux de tous que ce dernier choisissait délibérément de balancer par la fenêtre ses promesses électorales en matière de pouvoir d’achat une fois le scrutin passé.

    Le PTB a raison : un plan radical d’investissements publics répondant aux besoins sociaux nécessite de rompre les carcans budgétaires imposés par la Commission européenne et par le gouvernement fédéral. Beaucoup de gens ont été surpris que le PTB rompe les discussions pour un accord de gouvernement wallon sur cette question. Cela s’explique par le manque de préparation durant la campagne. Cette revendication figurait bien dans le programme du PTB, mais enfouie vers la fin de ses 252 pages et diluée parmi 840 autres revendications. Dans les tracts, la sortie des traités d’austérité européens était plutôt présentée comme un élément qui serait défendu par un député PTB dans l’enceinte du Parlement européen. Cela n’a d’ailleurs pas été mentionné par Raoul Hedebouw lorsqu’il énumérait les points de rupture du parti pour entrer en coalition avec le PS et ECOLO lors de ses meetings électoraux. Pendant les élections, seul le PSL a popularisé l’idée de briser les carcans budgétaires volontairement imposés autour de notre appel à voter en faveur du PTB.

    Le PTB émet aujourd’hui l’idée qu’un gouvernement de gauche en Wallonie ne saurait rompre avec ce carcan budgétaire s’il est soumis à un gouvernement de droite au Fédéral. Face à ce défi, un gouvernement de gauche en Wallonie devra prendre des initiatives audacieuses en vue de mobiliser le mouvement des travailleurs pour construire un rapport de force favorable tout en développant des liens solides avec le mouvement ouvrier en Flandre et à Bruxelles. Une telle approche préparerait le terrain pour un ‘‘gouvernement de la taxe des millionnaires’’ en Belgique, à condition de s’appuyer sur un programme de mesures socialistes.

  • Un gouvernement de gauche, oui, mais pour une véritable politique de rupture !

    Retour sur les tentatives de formation de coalitions comprenant le PTB

    Malgré l’appel de la FGTB wallonne pour coalition PS-PTB-ECOLO autour de ses revendications, il n’a fallu que quelques jours pour que les discussions soient rompues. Pourtant, après près de 5 ans de coalition de droite “thatchérienne” NVA-MR-CD&V-OpenVLD au Fédéral et près de 2 ans de MR-CDH en Wallonie, l’atmosphère est à la volonté de stopper la casse sociale.

    Par Stéphane Delcros

    A moins d’un véritable gouvernement de gauche, la politique socio-économique des futurs gouvernements est déjà connue. Des études de prévision de l’augmentation des dettes publiques sont sorties en juin : la dette de la région Bruxelles-Capitale augmenterait de 4 milliards d’euros à 8 dans 5 ans ; celle de la Fédération Wallonie-Bruxelles (FWB), de 8 milliards à 12 dans 5 ans. En FWB, cela signifiera notamment de nouvelles coupes budgétaires sévères dans l’enseignement, la culture, le sport,…

    Un programme pour répondre aux besoins

    Les notes du PTB pour les discussions avec les autres partis vont dans la bonne direction : création de logements sociaux, gratuité des TEC et de la STIB pour tous, refus des partenariats public-privé (PPP), diminution par deux des salaires des députés et ministres, un pôle public de production d’énergie verte,…

    En Wallonie et FWB, parmi les mesures phares il y a aussi la baisse du nombre d’élèves par classe et le remplacement de tous les fonctionnaires qui partent. Le PTB se base sur les besoins dans la société en réclamant un plan massif d’investissements pour créer 40.000 logements sociaux, environ le nombre de familles sur listes d’attente. Il est dommage que la même logique ne soit pas suivie à Bruxelles, où le PTB revendique la création de 13.000 logements publics (dont 10.000 sociaux) et une politique contraignante d’encadrement des loyers alors que 44.000 familles sont sur liste d’attente. C’est insuffisant. La gauche doit partir des besoins et non des possibilités budgétaires volontairement limitées.

    A Bruxelles par contre, et contrairement à la note wallonne, on trouve des revendications portées par la CGSP-ALR pour les travailleurs des administrations locales et régionales : augmentation de tous les barèmes de 10%, réduction collective du temps de travail sans perte de salaire et avec embauches compensatoires, et hausse du salaire minimum à 14€ bruts de l’heure, en commençant par le secteur des titres-services. Dans ce secteur, les travailleurs bossent dans de très mauvaises conditions, mais il est dommage que le PTB semble se limiter à celui-ci et veuille financer la hausse de salaire en grande partie sur fonds publics.

    Briser les carcans budgétaires

    Depuis les élections, le PTB met très justement en avant la nécessité de briser les carcans budgétaires et de vouloir prendre la tête d’une fronde européenne contre l’austérité. Tous les médias se sont vus forcés d’en parler, le thème est devenu un débat parmi la population. Imaginons ce qui aurait été possible si le PTB avait déjà eu cette approche autour des élections communales d’octobre et avant les élections du 26 mai, où il n’était question que de “sortir des traités européens” !

    Avec le PSL, nous avions proposé au PTB de participer au débat, de renforcer sa campagne, et éventuellement d’être présents sur ses listes. Si le PTB avait accepté un renfort de notre part, nous aurions pu y avancer ce point que nous défendions déjà avec Gauches Communes avant les élections communales à Saint-Gilles.

    La gauche qui a accès à une audience médiatique large et dispose de députés aurait dû se saisir de cet appel pour préparer ce qui en découle. Une telle attitude impliquerait la mise sur pieds d’un gouvernement de désobéissance, qui entrerait en confrontation avec les intérêts capitalistes et ferait face à une riposte patronale immédiate. Rester silencieux à ce sujet durant la campagne signifiait de ne pas préparer la population à ce qui devait être fait et aux conséquences inévitables que cela entrainera.

    Le fait que le PTB n’ait pas préparé ses militants et la population sur ces questions peut paraitre anecdotique. Mais, puisque les programmes des partis de gauche sont très semblables aux yeux de beaucoup, cela a entretenu l’illusion qu’il devrait être facile de former un gouvernement. C’est dans ce contexte qu’il faut comprendre l’écho des critiques à l’encontre du PTB qui refuserait de prendre ses responsabilités après à peine quelques heures de discussion. La déception et le mécontentement sont grands chez nombre de travailleurs qui aspirent à dégager la droite pour un changement concret en faveur de la majorité de la population.

    Ces discussions et négociations, d’ailleurs, devraient être menées publiquement par la gauche. Il faut en finir avec les négociations secrètes et créer un débat public impliquant militants et électeurs de gauche, syndicalistes, féministes, activistes pour le climat, antiracistes, associations actives sur le terrain,… Un débat ouvert permettrait de déterminer collectivement si un accord est possible ou non, via des meetings et des mobilisations. Cela impliquerait un maximum de gens dans le rapport de force nécessaire à construire après les négociations : pour s’opposer à la politique menée en cas de désaccord et pour soutenir la politique gouvernementale face à la riposte capitaliste en cas d’accord.

    Une “coalition progressiste” aurait-elle été possible ?

    Ces 3 dernières décennies, le PS a participé à des gouvernements néolibéraux. Même s’il a mené une campagne basée sur un programme davantage à gauche cette année-ci, il n’est pas prêt à appliquer une politique de rupture. Ses appels à la formation de “gouvernements les plus progressistes possibles” ne prévoyaient pas l’implication du PTB aux côté du PS et d’ECOLO, mais bien de DéFI à Bruxelles et probablement du CDH en Wallonie et FWB. Avec le retrait du CDH de toute future coalition, le PS a ouvert les discussions avec le PTB, pour montrer que le MR ne serait que la toute dernière option.

    Le PTB n’a pas confiance dans le PS et il a raison. Le PS a l’habitude de ranger son programme en poche une fois élu. Mais si la campagne du PTB avait abordé le type de programme qu’une coalition de gauche doit appliquer en clarifiant notamment la nécessité de briser les carcans budgétaires, il aurait été plus facile de démasquer le PS, de le forcer à aller davantage à gauche, ou de le pousser à refuser une collaboration avec le PTB.

    Sans cela, beaucoup estiment quand même qu’une entente était possible. Dans ce contexte, en tirant la prise, le PTB a offert au PS l’occasion de passer pour celui qui fait tout pour parvenir à un accord, contrairement au PTB. Sur base d’une campagne offensive préparant les esprits, et si PS et ECOLO avaient accepté un accord, nous aurions pu utiliser cette “coalition progressiste” pour construire un rapport de force dans la société pour lutter contre l’austérité, ce qui aurait rendu très difficile au PS et à ECOLO de manœuvrer pour éviter de devoir appliquer la politique qui s’impose.

    Le PTB pourrait-il soutenir un gouvernement minoritaire “à la portugaise” ou “coquelicot” ?

    Le PTB refuse cette option : “l’option portugaise revient à signer un chèque en blanc”. Evidemment, tout soutien extérieur à un gouvernement minoritaire doit être conditionné à des avancées significatives pour les travailleurs.

    Selon nous, un gouvernement minoritaire PS-ECOLO ne défendrait pas un vrai changement. Mais cela donnerait l’occasion de faire des propositions pour clarifier dans quel sens doit aller sa politique. Un tel gouvernement serait obligé d’aller puiser un soutien quelque part : à gauche, au PTB, ou à droite, au CDH voire au MR. Pourquoi ne pas avoir fait des revendications syndicales présentes dans le programme du PS (salaire minimum de 14€/h et semaine de 4 jours) des conditions strictes posées à un soutien extérieur pour la Région et la FWB ? Et relayer les négociations par des meetings publics ouverts à tous et des assemblées du personnel sur les lieux de travail concernés ? De cette manière, les syndicats auraient directement leur mot à dire et pourraient contribuer à l’instauration de ces mesures.

    Si le PS accepte de respecter ses propres promesses électorales, alors les travailleurs obtiendraient une avancée sociale significative. Le PTB démontrerait ce qu’il est capable de réaliser. Mais si le PS refuse, il serait démasqué aux yeux de tous. Mais dans ce cas, les meetings et assemblées du personnel auront eu le mérite d’ancrer la campagne “fight for 14 €” dans de nombreux lieux de travail afin de construire un rapport de force pour obtenir des victoires. Des victoires qui provoqueraient un énorme enthousiasme et poseraient les bases d’une lutte pour obtenir bien plus, et pas seulement en Wallonie.

    Construire un rapport de force pour obtenir les moyens

    Briser les carcans budgétaires imposés est nécessaire pour pouvoir financer les revendications syndicales, mais aussi un plan radical d’investissements publics massif pour rendre gratuit, densifier et élever la qualité du réseau public de transports en commun, ainsi que pour l’enseignement, l’accueil de la petite enfance et des personnes âgées, la santé et les services de soins et d’aide, la construction de logements sociaux,… La droite dira qu’on veut “endetter les générations futures”. C’est pour cela qu’il faut combiner une telle politique à une lutte d’ampleur pour exiger les moyens. Les richesses existent largement. Mais pouvoir les arracher exige de construire un rapport de force dans la société. C’est la base pour s’amer de mesures socialistes capables de profiler un nouveau système, une société socialiste démocratique débarrassée de l’avidité capitaliste.

  • Succès électoral du PTB : 43 députés pour assister la riposte des travailleurs

    En 2014, le PTB envoyait les premiers élus de gauche radicale aux parlements régionaux de Bruxelles et de Wallonie ainsi qu’à la Chambre, une première depuis 30 ans. 5 ans plus tard, le PTB/PVDA est parvenu à s’attirer le soutien de 584.621 électeurs, avec à la clé 43 représentants : 12 députés à la Chambre (parmi lesquels 3 élus en Flandre), 4 sénateurs, 10 députés régionaux bruxellois francophones plus 1 néerlandophone, 1 sénateur coopté, 4 députés régionaux flamands, 10 députés régionaux wallons et un député européen ! Jamais la gauche radicale n’a bénéficié d’une telle situation pour défendre un programme de rupture anticapitaliste en Belgique.

    Par Nicolas Croes,, article tiré de l’édition de juin de Lutte Socialiste

    La percée du PTB était déjà remarquable en 2014. Aujourd’hui, elle donne le tournis. Raoul Hedebouw, surtout, et ses camarades avaient déjà assuré que la voix de la rue se fasse entendre aux Parlements et résonne plus fortement dans le débat public. Les interventions de Raoul à la Chambre sont régulièrement devenues virales sur le net et ont aidé à donner confiance à une résistance sociale qui faisait face à son l’équipe gouvernementale ennemie la plus déterminée depuis les années Martens-Gol.

    Le PTB disposait déjà de milliers de membres, et d’autres milliers vont naturellement le rejoindre à la suite de ses résultats électoraux. Nombre d’entre eux ont été poussés à franchir ce cap par envie d’être réellement impliqué sur le terrain pour assister la lutte sociale, mais aussi lui offrir une perspective positive. Qui n’a d’ailleurs jamais rencontré un militant enthousiaste du PTB avec une pétition en main ? Celle sur les pensions dans les mobilisations syndicales ou celle en faveur des transports publics gratuits dans le mouvement pour le climat par exemple. Ces initiatives ont rencontré un beau succès, chaque sondage a d’ailleurs systématiquement illustré qu’une majorité de la population était déjà convaincue.

    Jusqu’à présent, tous les efforts et le travail acharné des militants du PTB visait à obtenir davantage d’élus. Maintenant que c’est chose faite, ne nous limitons pas à défendre nos revendications au Parlement ! Ces élus doivent renforcer la lutte de terrain pour concrétiser ces revendications en faisant des propositions pour organiser la lutte, en prenant des initiatives pour construire un rapport de force et en anticipant les prochaines étapes de la lutte de classe.

    Prenons par exemple la pétition de la FGTB pour un salaire minimum de 14 euros de l’heure. C’est certain, cette revendication nécessite d’être popularisée. Mais imaginons de plus ce qui serait possible si le PTB assurait d’en faire un thème de discussion dans les innombrables lieux de travail et délégations syndicales où le parti est présent afin de mener la bataille sur le terrain avec les collègues et d’obtenir ainsi des victoires en entreprises ? Il ne fait aucun doute que l’autorité du PTB gagnerait parmi les travailleurs et leur entourage, encore plus certainement qu’avec des pétitions à signer.

    Une attitude pareille permettrait aussi d’assurer qu’un maximum de délégations deviennent des bastions de résistance capables de s’opposer aux directions syndicales quand ces dernières prennent peur de poursuivre la lutte. De nombreux travailleurs gardent encore au en travers de la gorge la manière dont on nous a renvoyé chez nous alors que le plan d’action de 2014 avait remporté un large succès dans tout le pays. Le PTB doit réfléchir à la manière dont son poids politique peut servir à assister les militants syndicaux combatifs qui se sentent parfois abandonnés par leurs structures syndicales, tout particulièrement en Flandre.

    Cette approche aurait déjà un impact certain avec les milliers de membres dont dispose le PTB. Mais avec 43 députés… alors les patrons n’auraient qu’à bien se tenir ! Évidemment, se lancer à corps perdu dans la bataille exige d’élaborer une stratégie solide, d’être capable de s’adapter à la réaction inévitable du camp d’en face avec des virages tactiques appropriés. Cela nécessite de dépasser la construction patiente d’une assise électorale. Mais la crise du capitalisme ne nous laisse pas d’autre choix. Et comme le disait Bertolt Brecht, que le président du PTB citait dans son discours le soir des élections, ‘‘Celui qui se bat peut perdre. Celui qui ne se bat pas a déjà perdu’’.

    Autour des élections du 26 mai et du PTB :

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