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  • Quelles sont les origines du 1° mai ? – Par Rosa Luxemburg

    Rosa Luxembourg (1871-1919) est une révolutionnaire marxiste cofondatrice de la Ligue spartakiste, puis du Parti communiste d’Allemagne. Elle fut assassinée à Berlin en janvier 1919 pendant la révolution allemande, lors de la répression de la révolte spartakiste.

    L’heureuse idée d’utiliser la célébration d’une journée de repos prolétarienne comme un moyen d’obtenir la journée de travail de 8 heures [1], est née tout d’abord en Australie. Les travailleurs y décidèrent en 1856 d’organiser une journée d’arrêt total du travail, avec des réunions et des distractions, afin de manifester pour la journée de 8 heures. La date de cette manifestation devait être le 21 avril. Au début, les travailleurs australiens avaient prévu cela uniquement pour l’année 1856. Mais cette première manifestation eut une telle répercussion sur les masses prolétariennes d’Australie, les stimulant et les amenant à de nouvelles campagnes, qu’il fut décidé de renouveler cette manifestation tous les ans.

    De fait, qu’est-ce qui pourrait donner aux travailleurs plus de courage et plus de confiance dans leurs propres forces qu’un blocage du travail massif qu’ils ont décidé eux-mêmes ? Qu’est-ce qui pourrait donner plus de courage aux esclaves éternels des usines et des ateliers que le rassemblement de leurs propres troupes ? Donc, l’idée d’une fête prolétarienne fût rapidement acceptée et, d’Australie, commença à se répandre à d’autres pays jusqu’à conquérir l’ensemble du prolétariat du monde.

    Les premiers à suivre l’exemple des australiens furent les états-uniens. En 1886 ils décidèrent que le 1° mai serait une journée universelle d’arrêt du travail. Ce jour-là, 200.000 d’entre eux quittèrent leur travail et revendiquèrent la journée de 8 heures. Plus tard, la police et le harcèlement légal empêchèrent pendant des années les travailleurs de renouveler des manifestations de cette ampleur. Cependant, en 1888 ils renouvelèrent leur décision en prévoyant que la prochaine manifestation serait le 1° mai 1890.

    Entre temps, le mouvement ouvrier en Europe s’était renforcé et animé. La plus forte expression de ce mouvement intervint au Congrès de l’Internationale Ouvrière en 1889 [2]. A ce Congrès, constitué de 400 délégués, il fût décidé que la journée de 8 heures devait être la première revendication. Sur ce, le délégué des syndicats français, le travailleur Lavigne [3] de Bordeaux, proposa que cette revendication s’exprime dans tous les pays par un arrêt de travail universel. Le délégué des travailleurs américains attira l’attention sur la décision de ses camarades de faire grève le 1° mai 1890, et le Congrès arrêta pour cette date la fête prolétarienne universelle.

    A cette occasion, comme trente ans plus tôt en Australie, les travailleurs pensaient véritablement à une seule manifestation. Le Congrès décida que les travailleurs de tous les pays manifesteraient ensemble pour la journée de 8 heures le 1° mai 1890. Personne ne parla de la répétition de la journée sans travail pour les années suivantes. Naturellement, personne ne pouvait prévoir le succès brillant que cette idée allait remporter et la vitesse à laquelle elle serait adoptée par les classes laborieuses. Cependant, ce fût suffisant de manifester le 1° mai une seule fois pour que tout le monde comprenne que le 1° mai devait être une institution annuelle et pérenne.

    Le 1° mai revendiquait l’instauration de la journée de 8 heures. Mais même après que ce but fût atteint, le 1° mai ne fût pas abandonné. Aussi longtemps que la lutte des travailleurs contre la bourgeoisie et les classes dominantes continuera, aussi longtemps que toutes les revendications ne seront pas satisfaites, le 1° mai sera l’expression annuelle de ces revendications. Et, quand des jours meilleurs se lèveront, quand la classe ouvrière du monde aura gagné sa délivrance, alors aussi l’humanité fêtera probablement le 1° mai, en l’honneur des luttes acharnées et des nombreuses souffrances du passé.

    Notes :
    [1] L’usage était alors une journée de travail d’au moins 10 à 12 heures par jour.
    [2] Il s’agit du premier congrès de la II° internationale.
    [3] Raymond Lavigne (1851- ?), militant politique et syndicaliste.

  • Bruxelles. Manifestation “1er Mai Jour de Lutte!”

    APPEL pour un premier mai de lutte ! Mobilisons-nous !

    Ce 1er mai 2018, renversons le rapport de force, manifestons dans l’unité la plus large pour défendre nos acquis, nos droits et libertés mais surtout pour en conquérir de nouveaux !

    Premiers signataires de l’appel : CGSP ALR Bruxelles / CGSP IRB Bruxelles / CGSP Enseignement Recherche de l’ULB / Jeunes FGTB / CGSP Saint-Gilles / CGSP Brugmann / CGSP Enseignement Jette / JOC Bruxelles / Gauche anticapitaliste / Révolution-Vonk / PSL-LSP / LCT / EGA-ALS / AGIR POUR LA PAIX / Parti Communiste Bruxelles / Coordination sans-papiers Bruxelles / Equipe syndicale du Centre d’Action Laïque.

    Les deux derniers siècles ont été de longues périodes de lutte continue pour l’interdiction du travail des enfants, pour une réduction du temps de travail, pour des conditions de travail décentes, bref pour une vie digne d’être vécue. C’est dans ce contexte que le 1er mai 1886, les travailleurs américains se levaient pour réclamer la journée de huit heures et plus de justice sociale.

    Aujourd’hui, après 40 ans d’offensive néolibérale, le grand patronat et ses représentants politiques s’acharnent avec toujours plus de vigueur pour anéantir nos acquis sociaux obtenus par les longues luttes du mouvement ouvrier. Leur stratégie de maximalisation des profits, visant à détruire notre sécurité sociale et à privatiser nos services publics, est un désastre pour le monde du travail et notre environnement. Les richesses produites par les travailleurs sont ainsi accaparées par les 1% les plus riches avec comme principale conséquence une explosion des inégalités.

    En effet, alors que nous vivons dans un pays riche, 1 famille sur 5 à Bruxelles vit sous le seuil de pauvreté et le nombre de sans-abris n’a jamais été aussi élevé ; les conditions de travail se dégradent et les salaires diminuent ; les travailleurs sans emploi et les malades sont pris pour cibles ; les travailleurs sans-papiers et les migrants sont criminalisés et pour certains refoulés hors de nos frontières ; les femmes font toujours l’objet de discriminations et de harcèlement ; la précarisation généralisée et institutionalisée n’offre ainsi aucune perspective aux plus jeunes.

    Ce 1er mai 2018, renversons le rapport de force, manifestons dans l’unité la plus large pour défendre nos acquis, nos droits et libertés mais surtout pour en conquérir de nouveaux !

    • Face au chômage massif, réduction collective du temps de travail sans perte de salaire et avec embauches compensatoires !
    • De l’argent il y en a, augmentation des salaires !
    • Des pensions légales dignes pour tous : une pension de 1500€ minimum !
    • Avec ou sans papiers, nous sommes tous des travailleurs : régularisation !
    • Stop au sexisme et au racisme : unité dans la lutte !
    • Défense des Services publics, le patrimoine de ceux qui n’en ont pas : refinancement et renationalisation !
    • Si l’environnement était une banque, il serait déjà sauvé ! Investissements massifs pour une véritable transition écologique !
    • Stop à la criminalisation des mouvements sociaux !

    AGENDA :

    • Réunion unitaire organisation manifestation du Premier Mai 2018 : Lundi 19 Mars 2018 à 17h30 Rue du Congrès 17-19 1000 Bruxelles
    • Projection du film « Howard Zinn, Une histoire populaire américaine » : Lundi 16 Avril 2018 à 18h Rue du Congrès 17-19 1000 Bruxelles
    • RDV 1er MAI à 13H00 à la Place Poelaert (Palais de Justice) à Bruxelles pour une manifestation combative ! Nous rejoindrons ensuite, tous ensemble, les activités prévues Place Rouppe !

    Pour sous-signer l’appel à la manifestation unitaire du 1er Mai : Envoyez un email sur premiermaidelutte@gmail.com

  • Contre les inégalités, luttons pour le socialisme !

    Depuis 2016, le pourcent le plus riche de l’Humanité possède autant que les 99% restant. En Belgique, les 20 familles les plus riches possèdent ensemble 86 milliards d’euros. Ce montant est 82 fois plus élevé que les coupes budgétaires de la ministre Maggie De Block dans la sécurité sociale et les soins de santé combinées. C’est 86 fois le budget pour l’asile et la migration en 2016. 1500 fois le montant des nouvelles mesures d’austérité sur les pensions. Et ainsi de suite. Voilà des chiffres qui font tourner la tête, qui mettent en colère, mais qui font aussi parfois hausser les épaules. Un parti peut-il y changer quelque chose après tout ?

    Par Michael Bouchez, article tiré de l’édition de mai de Lutte Socialiste

    La politique d’austérité que nous subissons depuis des années n’est rien d’autre qu’un transfert d’argent des pauvres vers les hyper-riches. A travers le globe, la logique néolibérale a démoli ou privatisé les services publics afin de garantir les profits de l’infime élite capitaliste. On nous vole le peu que nous avons tandis que les milliardaires dorment tranquilles. Les inégalités empirent quotidiennement: 32,5% de tous ceux qui vivent du salaire d’intégration sont des jeunes entre 18 et 24 ans. En 2014, il ne s’agissait que de 10,7%. Nous nous épuisons à la tâche, recevons moins de pension, les jeunes tombent dans la pauvreté et le gouvernement prétend que les fonctionnaires, les chômeurs, les malades ou les réfugiés sont des profiteurs.

    Partout, en Europe et ailleurs, la classe des travailleurs réagit à cette misère en tournant le dos aux partis traditionnels et en recherchant des alternatives. C’est ce que l’on a observé en Grèce, avec Brexit, le déclin du parti travailliste néerlandais ou encore à la présidentielle française où les candidats des deux formations politiques traditionnelles (PS et Les Républicains) n’ont pas survécu au premier tour.

    Le danger est que les populistes de droite essayent d’instrumentaliser les ruines créées par la politique de démantèlement social. Or, là où se présentent des candidats de gauche qui défendent une redistribution radicale des richesses et proposent des investissements massifs dans les services publics, ils génèrent un enthousiasme énorme. C’est le cas de Mélenchon en France, de Corbyn au Royaume-Uni ou de Sanders aux Etats-Unis.

    Aux Etats-Unis, des activistes et des socialistes ont fait de ce 1er mai une journée de lutte contre Donald Trump. L’initiative était importante pour coupler la lutte contre le populisme de droite à celle contre la politique effrénée au profit de la classe des milliardaires. Cela a aussi permis de renouer avec la tradition des grèves du 1er mai, une démarche essentielle car, face au carnage austéritaire d’une part et à la droite populiste de l’autre, la seule réponse qui existe, c’est la lutte. C’est grâce à des combats acharnés et à la défense d’un programme socialiste, avec le 1er mai comme journée de lutte récurrente, que les mouvements de masse du XXe siècle ont repoussé l’inégalité et ont arraché l’instauration d’un rythme de travail plus digne.

    La chute des dictatures staliniennes du bloc de l’Est a initié une période de triomphalisme néolibéral. Mais le capitalisme est incapable d’empêcher l’arrivée de nouvelles crises. Refaisons du 1er mai, Fête internationale des travailleurs, une journée de lutte contre les inégalités croissantes et en faveur d’une autre société. Il nous faut une société au service de la majorité, capable d’en finir avec la misère sociale, la guerre et la destruction écologique. Opposons aux inégalités, aux discriminations et à l’exploitation capitalistes les mots-clefs du mouvement ouvrier socialiste: la lutte, la solidarité et le socialisme.

    ————–

    La campagne de Mélenchon illustre le potentiel

    La France Insoumise : plus 400.000 membres, 70.000 participants au meeting de Marseille, 70.000 à Toulouse, 20.000 à Lille, 130.000 à Paris. Après le drame de Syriza en Grèce, de nouvelles opportunités se présentent pour une gauche conséquente

  • Quelles sont les origines du 1° mai ? – Par Rosa Luxemburg

    Rosa Luxembourg (1871-1919) est une révolutionnaire marxiste cofondatrice de la Ligue spartakiste, puis du Parti communiste d’Allemagne. Elle fut assassinée à Berlin en janvier 1919 pendant la révolution allemande, lors de la répression de la révolte spartakiste. [/caption]

    L’heureuse idée d’utiliser la célébration d’une journée de repos prolétarienne comme un moyen d’obtenir la journée de travail de 8 heures [1], est née tout d’abord en Australie. Les travailleurs y décidèrent en 1856 d’organiser une journée d’arrêt total du travail, avec des réunions et des distractions, afin de manifester pour la journée de 8 heures. La date de cette manifestation devait être le 21 avril. Au début, les travailleurs australiens avaient prévu cela uniquement pour l’année 1856. Mais cette première manifestation eut une telle répercussion sur les masses prolétariennes d’Australie, les stimulant et les amenant à de nouvelles campagnes, qu’il fut décidé de renouveler cette manifestation tous les ans.

    De fait, qu’est-ce qui pourrait donner aux travailleurs plus de courage et plus de confiance dans leurs propres forces qu’un blocage du travail massif qu’ils ont décidé eux-mêmes ? Qu’est-ce qui pourrait donner plus de courage aux esclaves éternels des usines et des ateliers que le rassemblement de leurs propres troupes ? Donc, l’idée d’une fête prolétarienne fût rapidement acceptée et, d’Australie, commença à se répandre à d’autres pays jusqu’à conquérir l’ensemble du prolétariat du monde.

    Les premiers à suivre l’exemple des australiens furent les états-uniens. En 1886 ils décidèrent que le 1° mai serait une journée universelle d’arrêt du travail. Ce jour-là, 200.000 d’entre eux quittèrent leur travail et revendiquèrent la journée de 8 heures. Plus tard, la police et le harcèlement légal empêchèrent pendant des années les travailleurs de renouveler des manifestations de cette ampleur. Cependant, en 1888 ils renouvelèrent leur décision en prévoyant que la prochaine manifestation serait le 1° mai 1890.

    Entre temps, le mouvement ouvrier en Europe s’était renforcé et animé. La plus forte expression de ce mouvement intervint au Congrès de l’Internationale Ouvrière en 1889 [2]. A ce Congrès, constitué de 400 délégués, il fût décidé que la journée de 8 heures devait être la première revendication. Sur ce, le délégué des syndicats français, le travailleur Lavigne [3] de Bordeaux, proposa que cette revendication s’exprime dans tous les pays par un arrêt de travail universel. Le délégué des travailleurs américains attira l’attention sur la décision de ses camarades de faire grève le 1° mai 1890, et le Congrès arrêta pour cette date la fête prolétarienne universelle.

    A cette occasion, comme trente ans plus tôt en Australie, les travailleurs pensaient véritablement à une seule manifestation. Le Congrès décida que les travailleurs de tous les pays manifesteraient ensemble pour la journée de 8 heures le 1° mai 1890. Personne ne parla de la répétition de la journée sans travail pour les années suivantes. Naturellement, personne ne pouvait prévoir le succès brillant que cette idée allait remporter et la vitesse à laquelle elle serait adoptée par les classes laborieuses. Cependant, ce fût suffisant de manifester le 1° mai une seule fois pour que tout le monde comprenne que le 1° mai devait être une institution annuelle et pérenne.

    Le 1° mai revendiquait l’instauration de la journée de 8 heures. Mais même après que ce but fût atteint, le 1° mai ne fût pas abandonné. Aussi longtemps que la lutte des travailleurs contre la bourgeoisie et les classes dominantes continuera, aussi longtemps que toutes les revendications ne seront pas satisfaites, le 1° mai sera l’expression annuelle de ces revendications. Et, quand des jours meilleurs se lèveront, quand la classe ouvrière du monde aura gagné sa délivrance, alors aussi l’humanité fêtera probablement le 1° mai, en l’honneur des luttes acharnées et des nombreuses souffrances du passé.

    Notes :
    [1] L’usage était alors une journée de travail d’au moins 10 à 12 heures par jour.
    [2] Il s’agit du premier congrès de la II° internationale.
    [3] Raymond Lavigne (1851- ?), militant politique et syndicaliste.

  • USA : Ce 1er mai, l’opposition à Trump sera à nouveau dans la rue

    Depuis l’investiture de Trump, des millions de personnes sont entrée en lutte. Mais le milliardaire a sans relâche mis en œuvre son programme raciste, sexiste et anti-classe ouvrière. Ses dernières propositions en matière de budget et de sécurité sociale remettent en cause les politiques de protection de l’environnement et de sécurité sociale de même que l’avenir des écoles publiques, tout en offrant des allègements fiscaux aux grandes entreprises et aux américains les plus aisés.

    Par Kshama Sawant, conseillère socialiste élue à Seattle, membre de Socialist Alternative (qui regroupe les partisans du CIO aux USA)

    Trump peut être battu, mais il s’agit d’une question de rapport de force. La marge de manœuvre de l’administration Trump dépendra de l’ampleur et du caractère militant du mouvement social, mais aussi de son efficacité à s’opposer à lui. Au cours de l’histoire, nombreux sont les gouvernements de droite qui ont été forcés de changer de cap ou qui ont tout simplement été renversés suite à la révolte de gens ordinaires.

    Il est indispensable que les manifestations soient plus que purement symboliques. Nous devons utiliser le véritable pouvoir que détiennent les travailleurs, à travers la désobéissance civile et la grève. Une grève de grande ampleur aura un impact sur les profits de l’establishment, dont de larges segments sont derrière Trump. Une telle grève les obligera à s’écarter de lui.
    La Journée internationale des travailleurs

    Le Premier mai est historiquement une journée de mobilisation massive dans le monde entier et aussi de manifestations pour les droits des migrants aux Etats-Unis. Il est plus important que jamais de retourner aux sources du Premier mai et de lancer un été de résistance.

    Les attaques brutales de Trump contre les immigrés ont été son occupation principale durant ses deux premiers mois à la Maison Blanche, provoquant immédiatement des manifestations et des grèves le 16 février qui, grâce à une organisation rapide, ont réuni des milliers de travailleurs immigrés dans les grandes villes du pays.

    Les manifestations de masse dans les aéroports nationaux en riposte au décret anti-immigration lui ont porté un premier coup humiliant, sans oublier que certains groupes de la classe dominante lui ont tourné le dos, gagnés par une inquiétude grandissante face au chaos résultant de la désobéissance civile massive.

    Les travailleurs immigrés à travers le pays se sont préparés pour ce Premier mai qui va probablement être la plus grande journée de mobilisations depuis que des centaines de milliers de personnes ont fait grève en 2006 lors de la ‘‘Journée sans immigrés’’.

    Des grèves prévues en Californie

    Les développements les plus importants viennent de Californie, où 340.000 travailleurs préparent des actions de grève menées par une coalition qui réunit le syndicat ‘SEIU United Service Workers West’ (USWW) et des centres de travailleurs immigrés.

    ‘‘Le président attaque notre communauté’’, a déclaré Tomas Mejia, membre du bureau exécutif de l’USWW. ‘‘Les immigrés ont aidé à façonner ce pays, nous avons contribué à sa beauté, mais le président nous attaque comme des criminels.’’ Une ‘‘caravane contre la peur’’ a également été organisée par la coalition pour voyager à travers l’Etat afin de construire l’action du Premier mai.

    Le président du syndicat ‘United Teachers Los Angeles’, Alex Caputo-Pearl, a appelé à fermer toutes les écoles le Premier mai. Dans la région de la baie de San Francisco, ‘le San Francisco Labor Council’ a fait, le 7 mars dernier, une déclaration soutenant les actions de solidarité des travailleurs le Premier mai et demandant ‘‘qu’il n’y ait de représailles contre aucun travailleur – syndiqué ou non – qui choisisse d’exercer ses droits civiques’’.

    Etat de Washington

    La journée du Premier mai à également gagné en dynamisme dans l’Etat de Washington. Dans le comté qui comprend la ville de Seattle, le ‘county labor council’ a voté une résolution demandant à ses syndicats affiliés ‘‘de prendre en considération toutes formes d’action le Premier mai – comme faire grève, manifester, prendre une journée de congé maladie, faire une pause de midi plus longue, organiser des manifestations ou n’importe quelle autre forme d’organisation collective’’.

    Les organisateurs à travers le pays ont souligné l’importance de travailler avec flexibilité afin d’éviter au mieux les représailles envers les travailleurs pendant la construction de ces actions les plus grandes et les plus puissantes possibles pour le Premier mai.

    Beaucoup d’autres syndicats ont également voté des résolutions pour le Premier mai, dont notamment le syndicat ‘‘WFSE Local 304’’ représentant les travailleurs des collèges communautaires de Seattle et le syndicat ‘‘IBEW Local 46’’ représentant les électriciens.

    En tant que membre du Conseil de la ville de Seattle, j’ai fait appel au maire, Ed Murray, pour qu’il autorise tous les travailleurs de la ville à prendre congé le Premier mai (la réglementation de Washington autorise déjà à tous les fonctionnaires à prendre deux jours de congé chaque année pour des raisons de convictions ou religieuses).

    Le développement le plus marquant à Seattle a été celui de ‘‘l’Association de l’Education de Seattle’’ (SEA). 5.000 professeurs ont voté pour fermer les écoles publiques de la ville pour le Premier mai, en réponse au sous-financement des écoles dans l’Etat de Washington. L’éducatrice Kit McCormick, membre du SEA, a expliqué ‘‘qu’ils n’ont cessé d’écrire aux parlementaires et d’aller à Olympia (la capitale de l’Etat). Il est temps d’accélérer le pas’’.

    ‘‘On a marre’’, disait Justin Vinson, membre de Socialist Alternative et du SEA. ‘‘Les éducateurs se sont battus pour défendre nos écoles et maintenant nous avons Trump et Betsy DeVos qui mettent l’accent sur des coupes budgétaires majeures dans l’éducation. Mais il y a également un enjeu très important, avec cette administration qui s’en prend à nos sœurs et nos frères immigrés, femmes, musulmans et LGBTQ. ‘An injury to one is an injury to all’.

    Il ne s’agit pas seulement de Trump

    Dans l’Etat d’Illinois, l’organisation-sœur du SEA, le syndicat des professeurs de Chicago (CTU), entrera en action le Premier Mai en riposte aux coupures budgétaires considérables dans l’éducation publique. Il n’y aura pas grève, mais d’autres actions seront organisées. D’autres syndicats à travers le pays tels que ‘‘l’Association des infirmières du Minnesota’’ a également décidé d’entrer en action le Premier mai.

    Il est encore trop tôt pour dire à quel point cette dynamique de grève va continuer à s’amplifier, mais la nécessité de riposter contre Trump est claire et elle représente un danger pour lui.

    Nous devons être conscients que notre mouvement ne va pas continuellement croître de manière linéaire et qu’il y aura également des reculs. Trump ne sera pas vaincu un jour. Nous devons avoir pour objectif de mettre en place des actions les plus larges et puissantes possibles ce Premier mai afin que notre lutte passe à une étape supérieure.

    Pour aller plus loin, nous devons mobiliser des couches plus larges de travailleurs et de jeunes pour résister à Trump et à la classe des milliardaires. Nous pouvons le faire en luttant pour des changements positifs qui peuvent faire une réelle différence dans le quotidien des gens. Avec les soins de santé attaqués, nous devons non seulement nous défendre contre l’offensive des Républicains, mais aussi lutter avec force pour l’assurance-maladie pour tous. Avec les travailleurs et les droits syndicaux attaqués, nous devons non seulement nous opposer aux lois antisociales aussi exiger un salaire minimum fédéral de 15$ de l’heure.

    Il ne s’agit pas uniquement d’un président ou d’un parti politique. La victoire de Trump repose sur la colère des travailleurs et d’américains de la couche moyenne trahis durant des décennies par les politiques brutales et néolibérales aussi bien du parti Démocrate que Républicain. Il est nécessaire de créer un nouveau parti politique qui défendra les politiques socialistes et sera indépendante de l’argent et du pouvoir des grandes entreprises.

    Car notre combat n’est pas seulement contre Trump, c’est aussi contre le système défaillant du capitalisme qui est un terrain fertile pour la dangereuse montée du populisme et les attaques vicieuses sur les travailleurs.

    Le Premier mai, nous allons contre-attaquer.

  • ‘‘Le 1er mai, prochaine journée d’action et nouvelle étape de la résistance contre Trump’’

    Jess Spear lors de la journée de lancement de la campagne ROSA le 12 mars à Bruxelles. Photo : Mario

    Le mouvement contre Trump est aujourd’hui le fer de lance de la résistance contre le populisme de droite. Jess Spear, l’une des porte-paroles de la ‘Marche des femmes’ à Seattle, nous parle ici de l’état des lieux de ce combat et du rôle que peut jouer le 1er mai, journée internationale des travailleurs.

    Propos recueillis par Koerian (Gand)

    Peux-tu nous parler de l’énorme mouvement social en développement aux USA ?

    ‘‘La plupart des gens se doutaient bien que des manifestations éclateraient dans tout le pays au lendemain de l’élection de Trump (le 9 novembre). Socialist Alternative (organisation-sœur du PSL aux USA, NDLR) fut l’une des premières organisations à appeler à manifester, à dire « je m’oppose à sa politique et en particulier à la diabolisation des migrants et des musulmans ainsi qu’à son sexisme et ses commentaires racistes ». Les mobilisations ont été essentiellement constituées de jeunes, avec énormément d’étudiants du secondaire, des jeunes qui n’avaient pas voté mais qui estimaient que sa politique aurait un impact sur leur avenir. La plupart des jeunes sont très progressistes, en faveur des droits des femmes et des personnes LGBTQI, en faveur de la diversité en général. Ils veulent se battre contre la guerre, contre la pauvreté et les inégalités, ils veulent un autre monde.

    ‘‘La prochaine étape, allait se situer de toute évidence le jour de son investiture (le 20 janvier), moment crucial pour exprimer son opposition. Le 20 janvier, nous avons vu de grandes manifestations, dont certaines organisées par nos propres forces, mais ce n’était encore rien face aux Marches des femmes du lendemain, en particulier celle de Washington. Ces mobilisations furent les plus grandes de l’histoire américaine. « Il y eut une grande diversité dans la participation, avec de nombreuses communautés représentées, ainsi que beaucoup de personnes âgées, particulièrement des femmes. Certaines d’entre elles avaient participé aux mouvements féministes des années ’60 et ’70. Choquées que quelqu’un d’aussi misogyne devienne président, elles voulaient être présentes pour défendre les acquis obtenus par le passé.

    ‘‘Une grande partie de la communauté latino-américaine est aussi sortie dans les rues. En Californie, les communautés latinos, les migrants ont manifesté durant plusieurs jours. Elles se retrouvent en première ligne avec toutes les déclarations de Trump sur la communauté mexicaine, sur les déportations de millions de migrants, sur la construction d’un mur à la frontière. Pour bon nombre de communautés, il est évident que nous devons unir nos forces, non seulement pour défendre nos conquêtes passées, mais aussi pour nous battre en faveur de quelque chose d’autre, de très différent.’’

    Que trouvait-on comme opinions politiques dans ces mobilisations ?

    ‘‘Il existe un large éventail d’idées concernant la manière de lutter contre Trump. Il y a ceux qui veulent voter pour le Parti démocrate. Ceux qui veulent seulement s’opposer à Trump. Il y a également la gauche radicale et socialiste, comme Socialist Alternative, qui a, dès le premier jour, voulu organiser la résistance contre sa présidence , organiser des manifestations, des actions de désobéissance civile et des grèves, afin de l’empêcher de faire passer quoi que ce soit. Je pense que la majorité des gens en sont encore au stade de se dire qu’il suffira de voter contre lui la prochaine fois. Mais cette majorité se restreint au fil du temps. Un sentiment d’urgence se développe et de plus en plus de monde aspire à des actions plus directes.

    ‘‘Socialist Alternative appelle le mouvement à élaborer un programme, non seulement de résistance, mais aussi de revendications qui clarifie ce pour quoi nous nous battons vraiment. Grâce à cela, il sera possible d’attirer dans l’action des couches plus larges de la société, ceux qui ont du mal à joindre les deux bouts, du mal à trouver un logement décent, qui sont préoccupés par leurs soins de santé. Nous nous battons aussi pour un salaire minimum de 15 dollars de l’heure, pour un système universel de soins de santé, pour un enseignement gratuit (y compris universitaire), contre l’incarcération de masse et la brutalité policière.

    ‘‘Si l’on regarde la lutte contre l’administration Nixon dans les années ‘70, les gens combattaient non seulement le président et ses politiques, mais ils réclamaient aussi le droit à l’avortement, le financement des communautés noires,… Une vaste gamme de questions faisait l’objet d’âpres combats, comme la protection de l’environnement. Des choses ont pu être gagnées car lorsque le pouvoir est confronté à un mouvement avec un important rapport de force, il se voit forcé de faire des concessions pour éviter que celui ci ne s’élargisse davantage. Nous cherchons nos sources d’inspiration dans l’Histoire. À bien des égards, nous devons rappeler cette Histoire aux gens. Beaucoup estiment que leur seul pouvoir est de voter, ils oublient que les mouvements de masse sont extrêmement efficaces.’’

    Socialist Alternative avait appelé à 100 jours d’action, jusqu’au 1er mai. Comment avez-vous tenté d’orienter le mouvement vers cette date ?

    ‘‘Certains syndicats ont voté pour faire grève le 1er mai, alors qu’il n’existe pas de tradition de manifester ce jour-là, et encore moins de faire grève ( ce qui bien triste pour une date qui puisant ses origines dans le mouvement ouvrier américain). Nous n’avons jamais connu de grève générale aux États-Unis, les discussions sont donc limitées.

    ‘‘Les gens recherchent surtout des moments qui peuvent servir de journées d’actions, une échéance jusqu’à laquelle construire le mouvement. Au cours des premières semaines, les actions se succédaient jour après jour. C’était très fatigant et pas très efficace. Les gens comprennent rapidement qu’il leur est impossible de continuer indéfiniment ainsi. De là découle l’importance d’organiser de plus grands rendez-vous.

    ‘‘Le 8 mars était une grande journée d’action, avec un appel à la grève des femmes. Mais trop peu de choses avaient été faites pour préparer la grève et persuader les travailleuses d’y participer. Il a manqué des discussions collectives sur les lieux de travail visant à expliquer pourquoi stopper le travail et descendre dans la rue. Ce fut néanmoins une occasion importante de discuter de l’arme que représente la grève et de sa signification.

    ‘‘Nous pouvons tirer parti de cette expérience à l’occasion du 1er mai. Les syndicats auront un rôle clé à jouer pour convaincre les travailleurs à se préparer à une grève et à en élaborer le programme. Jusqu’ici, les syndicats ont joué un rôle très mitigé, la plupart ont une direction très conservatrice qui a oublié depuis longtemps comment organiser une lutte. Mais les développements positifs ne manquent pas. La pression de la base peut inciter les syndicats à aller plus loin.

    ‘‘Au cours de cette dernière décennie, les actions du 1er mai ont principalement été le fait des migrants. Nombre d’entre eux viennent de pays où il existe des traditions autour du premier mai et de la solidarité internationale. Depuis 2006, les migrants organisent chaque année des manifestations pour la Fête des travailleurs. Nous nous attendons à une large participation de leur part, pour ces raisons et parce qu’ils sont spécialement visés par l’administration Trump. Cela pourra avoir un impact sur le reste du mouvement.

    ‘‘Notre tâche est d’enraciner le 1er mai comme journée de lutte, autour de laquelle coopérer, autour de laquelle il est possible de faire grève. Si ce n’est pas possible de faire grève, parce qu’aucun rapport de force n’existe sur le lieu de travail, nous appelons à organiser d’autres actions de solidarité, sur le temps de midi par exemple.’’

    Que pouvons-nous faire d’ici ?

    ‘‘Chaque groupe issu de la classe des travailleurs qui combat sa propre élite est une consolidation de la lutte globale. Toute action de solidarité à travers le monde contre Trump, toutes les actions de solidarité le jour de la marche des femmes montrent à la classe ouvrière américaine et aux jeunes en particulier que le problème de Trump a un impact bien au-delà des USA.

    ‘‘Ce qu’il fait est observé à la loupe par Marine Le Pen et d’autres dirigeants populistes ou d’extrême droite. C’est important que vous luttiez contre ça aussi et que les gens comprennent que ce combat est international. Que l’espace qui s’agrandit pour le populisme de droite existe en raison de la faiblesse de la gauche. Au plus vous luttez contre cela en Belgique, au plus il sera difficile qu’un tel processus se propage. Chaque manifestation que vous organisez contre la droite, en reliant cela à Trump et au ‘‘trumpism’’, favorise la conscientisation sur le fait que nous luttons tous contre la même chose.

    ‘‘Tout le monde veut de bons emplois et de bons salaires, de bons soins de santé, un enseignement gratuit et un meilleur avenir. Nous pouvons obtenir tout cela par la lutte collective. Chaque chose qui va dans cette direction est très, très utile. Certainement aujourd’hui, où le monde n’a jamais été aussi connecté.’’

  • La journée des huit heures fêtera-elle son centième anniversaire ?

    8hoursday_banner_1856Il y a bientôt 95 ans, le 14 Juin 1921, le mouvement ouvrier organisé obtenait l’inscription dans la loi belge de la journée des huit heures. Il a fallu attendre 1970 pour arracher la limitation de la semaine de travail à 40 heures. La revendication de la réduction du temps de travail fut de tout temps chevillée au mouvement des travailleurs.

    Par Clément (Liège)

    Aujourd’hui, alors que le chômage atteint des proportions astronomiques, le gouvernement Michel poursuit son œuvre thatchérienne, ‘‘innove’’ et ‘‘modernise’’ le droit du travail en tentant d’imposer via sa ‘‘loi Peeters’’ l’augmentation de la durée quotidienne du travail à 9 heures et de la durée hebdomadaire à 45 heures. L’histoire des luttes des travailleurs est riche d’expériences qui doivent nous permettre de riposter et de défendre une alternative qui réponde aux besoins de notre classe sociale.

    Une tradition bien ancrée

    Aux débuts du capitalisme industriel en Belgique, les ouvriers étaient totalement à la merci de leur patron : la loi Le Chapelier empêchait toute coalition ouvrière ou encore action de grève, et si celle-ci fut révisée en 1866, il restait toujours de sérieuses entraves à l’exercice du droit de grève, qui n’avait de droit que le nom. La journée moyenne de travail était alors de plus de 12 heures de travail effectif.

    A cette époque, la limitation de la durée journalière de travail était déjà un enjeu majeur : l’Association Internationale des Travailleurs mena des campagnes d’agitation et d’action sur la durée du travail dès sa création en 1864. En 1889, c’est le POB (Parti Ouvrier Belge, ancêtre du PS et du SP.a) qui se fait le porte-voix des travailleurs et réclame la journée des ‘‘3-8’’ (8 heures de travail, 8 heures de loisirs, 8 heures de sommeil) tout en mettant au point un argumentaire dont le but est de défendre au mieux la revendication et de convaincre les collègues sceptiques qui craignent des baisses de salaire.

    À l’aube du XXe siècle, de premières victoires partielles sont acquises au niveau local dans des industries spécialisées : chez les typographes bruxellois en 1900, chez les diamantaires anversois en 1904 et chez les cotonniers gantois en 1905. Suite à ces victoires, les actions – tout en restant limitées tant par leur nombre que par leur ampleur – se multiplient et s’étendent à de nouveaux secteurs. En 1909 intervient la première limitation du temps de travail au niveau sectoriel : la journée de travail des mineurs sera ramenée à 9h.

    Le tournant de la grande guerre

    On entend parfois dire que l’inscription dans la loi de la journée de travail de huit heures est, à l’instar du suffrage universel, une sorte de ‘‘cadeau’’ octroyé par la bourgeoisie pour les efforts consentis par les travailleurs durant la guerre. Rien ne saurait être plus faux.

    Au sortir de la première guerre mondiale, un élan de contestation se développe chez les travailleurs, qui ont payé le prix fort durant la grande guerre. En Russie, la révolution d’Octobre 1917 a mis à bas la vieille dictature tsariste pour instaurer le premier état ouvrier. Cet évènement fondamental eut un effet galvanisant sur les luttes des travailleurs à travers le monde. Une poussée révolutionnaire traverse alors l’Europe provoquant grèves et soulèvements. La classe dominante tremble.

    En Belgique, le nombre de syndiqués augmente de manière fulgurante et passe de 252.177 en 1914 à 844.241 en 1920. De janvier à juin 1919, les grèves revendiquant les 8 heures se succèdent à un rythme effréné à travers toute la Belgique ; elles durent plusieurs jours voire semaines, et finissent bien souvent par des victoires. C’est d’ailleurs à cette époque que l’on assiste à l’une des premières grèves des transports en communs : en janvier, 5000 travailleurs des tramways bruxellois entrent en grève à plusieurs reprises et interrompent totalement le trafic des trams en région bruxelloise, ce qui frappera fortement l’opinion publique.

    Le résultat de ces actions est sans appel : une enquête menée dans le cadre de la Conférence Internationale du Travail de 1919 démontre que dans la grande majorité des secteurs économiques, les huit heures ont été totalement ou partiellement introduites suite aux actions des travailleurs. Concrètement, la loi de 1921 n’instaurait pas les huit heures : elle consacrait et généralisait une victoire que les travailleurs avaient arrachée au patronat par une lutte farouche dans laquelle il fut bien peu question de concertation ou d’accommodation.

    Au même moment où les 3-8 étaient conquises, l’industrie connaissait une augmentation de sa productivité suite à des gains technologiques, mais surtout grâce aux procédés de rationalisation du travail (généralisation du taylorisme, etc.) qui furent un moyen pour la classe capitaliste de récupérer le manque à gagner consécutif à la diminution du temps de travail. Cette augmentation de la productivité se traduisit par une augmentation parallèle du chômage, lequel fut dramatiquement aggravé par les effets de la crise de 1929. Pour le résorber et diminuer la concurrence entre ouvriers, la revendication d’une limitation de la durée hebdomadaire du temps de travail fut mise en avant et défendue, notamment durant les grèves de 1936 qui entrainèrent la conquête de multiples droits sociaux.

    Face aux innovations du gouvernement, quelle réduction du temps de travail défendre ?

    dutempspournous
    Depuis quelques mois, différentes organisations de gauche liégeoises se réunissent autour de la revendication de la réduction collective du temps de travail avec de nombreuses réunions et déjà deux journées publiques de réflexion, le 14 novembre et le 21 février dernier. Une plateforme a vu le jour et est officiellement lancée ce 1er mai. L’initiative regroupe les Jeunes-FGTB, les Acteurs des Temps Présents, le Centre Poly Culturel Résistance, Latitude Jeunes, Comac, Ecolo-J, les MJS et les Etudiants de Gauche Actifs.

    Aujourd’hui, la Belgique connaît de nouveau une période de réduction du temps de travail. La différence avec le début du 20e siècle est que cette réduction n’est pas choisie, mais bien subie. En 2014 le taux de chômage dans la population active (20-64 ans) était de 8,4% et le taux d’emplois d’à peine 67,3%(1). Même pour ceux qui ont la chance d’avoir un travail, les temps partiels et autres flexi-job se généralisent: en 2015, 465.000 travailleurs travaillent à 4/5 temps et 435.000 à mi-temps.(2) Jan Denys, spécialiste des ressources humaines chez Randstad ne s’y trompe pas lorsqu’il déclare ‘‘le travail à quatre cinquièmes devient en quelque sorte le nouveau temps plein.’’

    Malgré ce constat accablant le gouvernement, par sa loi Peeters, veut nous ramener près de 100 ans en arrière. Il n’hésite pas à affirmer qu’il innove et agit dans l’intérêt des travailleurs : grâce à l’annualisation de travail, le travailleur ne pourrait-il pas choisir des périodes de travail intensif, et des périodes à un rythme plus calme ? En 1865 aussi, le ‘‘libre choix’’ des travailleurs justifiait leur exploitation brutale : payés à l’heure, ils avaient toute latitude de travailler aussi tard et aussi tôt qu’ils le souhaitaient. Cependant, leurs salaires de misère ne leur offraient que le choix entre une journée de travail insuffisante pour subvenir à leurs besoins et celui d’un travail excessif.(3) Dans la société de classe, le libre choix du travailleur ne peut être que la soumission aux diktats du patron. Etendre ou flexibiliser la journée de travail ne peut qu’aggraver le problème du chômage, renforcer la concurrence entre les travailleurs, faire pression sur les salaires et les conditions de travail et ainsi renforcer l’exploitation et l’aliénation.

    Pour répondre au chômage et aux provocations du gouvernement, il est vital que le mouvement des travailleurs remette en avant son alternative de classe : la réduction collective du temps de travail. Les gains productifs doivent être utilisés pour alléger le poids qui pèse sur les épaules des travailleurs en répartissant le travail disponible, et pour que celui-ci devienne enfin un droit. Parce que nous ne pouvons tolérer – comme c’est le cas aujourd’hui – qu’une diminution du temps de travail mette en péril la capacité des travailleurs à répondre à leurs besoins, nous défendons l’échelle mobile des salaires avec un revenu minimum garanti.

    Il est certain que le patronat se battra bec et ongle pour empêcher que de telles mesures n’aboutissent. Au début du XXe siècle, seule la création d’un rapport de force conséquent, la ténacité des organisation des travailleurs et leur intransigeance sur leurs revendication ont permis d’imposer des changements fondamentaux. Même après la victoire des huit heures, la bourgeoisie tenta de récupérer ses gains en augmentant les cadences et en accentuant la pression sur les travailleurs. Pour empêcher une telle situation, et comme nous ne pouvons contrôler que ce que nous possédons nous défendons également la revendication du contrôle des secteurs clefs de l’économie par les travailleurs.

    La revendication de l’échelle mobile des heures de travail et des salaires ainsi que la nationalisation sous contrôle ouvrier des secteurs clés de l’économie sont les premiers pas à poser vers une société où l’économie serait au service des besoin de l’immense majorité de la population, où le travail serait synonyme d’émancipation plutôt que d’exploitation et où les travailleurs seraient maitres de leur destin en tant que classe plutôt qu’oppressés et aliénés par les désidératas d’une infime minorité de la population. Tel est ce que nous entendons par socialisme démocratique.

    Notes:

    1. Chiffre Eurostat: http://www.emploi.belgique.be/moduleDefault.aspx?id=21166#AutoAncher0
    2. http://www.rtbf.be/info/economie/detail_emploi-le-nombre-de-quatre-cinquiemes-a-plus-que-double-en-15-ans?id=9263443
    3. A ce titre voir : Topographie médicale de la Belgique du docteur Meynne

  • Le 1er mai redeviendra-t-il un jour de lutte pour la journée des 8 heures?

    temps_enfants_02Les mesures du vice-Premier ministre Kris Peeters donnent cette année un goût très amer au 1er mai. Le 1er mai est devenu la journée de lutte pour les huit heures en 1890 : huit heures de travail, huit heures de repos et huit heures de sommeil. Ce fut une revendication centrale du mouvement ouvrier des dizaines d’années durant. Cela devait rendre le travail soutenable. Kris Peeters et le gouvernement Michel considèrent les choses autrement. Ils ouvrent la porte à la journée de 9 heures et à la semaine de 45 heures, sans sursalaire.

    Par Eric Byl, édito de l’édition de mai de Lutte Socialiste

    Le premier “statut d’ouvriers” date de 1349, après la grande épidémie de peste. Pour s’assurer d’avoir suffisamment de personnes au travail, des salaires décents et des limites à la journée de travail ont été fixés légalement. Cela a ensuite pris des siècles aux exploiteurs pour faire machine arrière et ramener la journée de travail à 12 heures. Avec l’arrivée des machines à partir de 1770, le temps de travail a dû suivre “cette évolution” pour passer à 14 voire 16 heures par jour, y compris pour les enfants. À l’époque déjà, des problèmes étaient “pointés”. Voici comment on défendait le travail des enfants en 1848: “travailler sous le regard de leurs parents leur permet de ne pas prendre de mauvaises habitudes de paresse et de ne pas devenir des voyous.”

    L’introduction de la journée de 10 heures en Angleterre, le 1er mai 1848, était une première grande victoire. Mais ce sont les ouvriers de bâtiment de Sydney et Melbourne en Australie qui, le 21 avril 1856, ont les premiers imposés la journée des 8 heures avec une marche sur le parlement. Cette avancée fut possible grâce à la découverte d’or, une économie en plein essor et un afflux d’ouvriers qualifiés venant de Grande-Bretagne et bénéficiant de l’expérience de lutte du mouvement chartiste. Aux États-Unis, le 1er mai 1886, quelque 340.000 ouvriers sont partis en grève pour la journée des 8 heures. Elle a été introduite à certains endroits, mais, à d’autres, les dirigeants du mouvement ont été poursuivis. Ainsi, à Chicago, 8 ouvriers ont été condamnés dont 4 pendus. Malgré cela, quelques années plus tard, la fédération syndicale américaine a décidé de reprendre l’action pour la journée des 8 heures.

    Cette revendication fut centrale lors du Congrès de Paris de l’Internationale Ouvrière, en 1889. Lorsque le délégué des ouvriers américains a souligné la décision de faire grève le 1er mai 1890, le Congrès a repris cette date. Mais ce n’est que quand les capitalistes ont commencé à craindre pour leur survie – entre la Révolution russe d’octobre 1917 et les républiques des conseils de Bavière, de Hongrie et de Slovaquie en 1919 – que 15 pays ont instauré la journée des huit heures. En Belgique, la loi des huit heures a été votée en juin 1921. Il a encore fallu attendre jusque 1928 avant qu’elles ne soient appliquées largement. En 1964, la semaine des 45 heures a été introduite, celle des 40 heures en 1970 et celle des 38 heures en 2003.

    Kris Peeters remet tout cela en question. Par l’extension légale continuelle des heures supplémentaires, il était déjà possible de contourner la journée des 8 heures et la semaine de 38 heures, mais uniquement après concertation sociale et moyennant une compensation salariale ou un repos compensatoire. En comptabilisant le temps de travail sur base annuelle, le patron ne doit désormais plus tenir compte des négociations collectives. Il peut, quand ça lui chante, “demander” individuellement à un travailleur de prester jusqu’à 9 heures par jour et 45 heures par semaine, sans sursalaire du moment que le temps de travail ne dépasse pas, sur base annuelle, la moyenne de 38 heures par semaine. S’il y a moins de commandes et que le travail devient un peu plus supportable, il peut aussi nous renvoyer chez nous, même si cela ne nous convient pas. Et même si c’était sur base volontaire, avec les milliers de chômeurs qui cherchent un job, il faut déjà oser dire non.

    Pensez-vous que le gouvernement s’en tiendra là ? Selon Kris Peeters, ce n’est qu’un exercice et le vrai travail (de sape) doit encore commencer. Tant que le capitalisme existera, aucun acquis social ne sera définitif. Il est temps de nous réapproprier les traditions de nos prédécesseurs et de faire à nouveau du 1er mai une journée internationale de lutte.

  • L’alternative du socialisme contre des années d’austérité

    PremierMAI_generiqueComme toutes les personnes âgées de la quarantaine, j’ai grandi à un moment où il se disait que la Belgique disposait du meilleur système de sécurité sociale au monde. Des soins de santé accessibles et de haute qualité, l’indexation automatique des salaires, des conventions interprofessionnelles qui permettaient aux secteurs les plus forts de faire progresser les secteurs plus faibles, des allocations de chômage illimitées dans le temps, un complément du salaire de temps partiel grâce à une allocation de chômage à temps partiel, le soutien aux étudiants démunis par un système de bourses d’étude leur ouvrant l’accès aux études supérieures,… Même s’il était quelque peu exagéré d’affirmer qu’il était ‘‘le meilleur au monde’’, il faut toute de même bien se demander ce qui nous en reste aujourd’hui.

    Par Anja Deschoemacker

    Rien de tout cela n’a jamais été offert en cadeau. L’instauration du système de sécurité sociale après la Seconde Guerre mondiale fut le résultat de la pression causée par la lutte parfois tumultueuse qui a abouti à de véritables confrontations (la Question Royale en 1950, la grande grève de l’hiver 60-61) et par l’action syndicale continuelle qui a, entre autres, forcé les patrons à relever le montant de leurs contributions ‘‘patronales’’ à la sécurité sociale et à payer des salaires décents. Vu la situation de quasi plein emploi, les patrons ne pouvaient alors guère faire autrement que de satisfaire (partiellement) les revendications des travailleurs. Leurs profits continuaient à s’accroître grâce à la hausse de la productivité. Là non plus, nous n’avons rien reçu gratuitement.

    À partir de la fin des années ‘70, nous sommes cependant entrés dans une période où la sécurité sociale, les services publics, les conditions de travail, etc. ont commencé à être attaqués. Année après année, gouvernement après gouvernement, nos conquêtes sociales se sont vues rabotées.

    Aujourd’hui, pour bénéficier de soins de santé, les patients payent en Belgique beaucoup plus de leur propre poche que dans les pays voisins. De plus en plus de gens préfèrent reporter à plus tard une visite chez le médecin. Le principe de l’indexation des salaires et des allocations a été miné, notamment par l’introduction de ‘‘l’index santé’’ (qui a retiré du panier fixant la hausse des prix des biens tels que le tabac, l’alcool, l’essence et le diesel). Les négociations salariales nationales ont été tellement remodelées que les secteurs plus puissants sont maintenant aspirés vers le bas par les secteurs plus faibles. L’allocation de chômage ne permet de vivre que difficilement, les chômeurs cohabitants ont pour ainsi dire perdu tous leurs droits, y compris le droit à une allocation chômage à temps partiel pour ceux qui trouvent un emploi temporaire. Dans l’enseignement, les frais pris en charge par les parents ne font qu’augmenter, tandis qu’on ne voit plus le moindre investissement dans l’infrastructure ou dans le personnel.

    Mais pour les patrons et les politiciens qui servent les intérêts de ces derniers, ce n’est jamais assez. Aujourd’hui, la N-VA est à l’avant-garde de l’élaboration d’un programme d’appauvrissement massif au profit de l’enrichissement d’une petite minorité. Avec ces politiciens-là, il devient de suite plus facile aux autres partis d’avoir l’air ‘‘plus social’’. Mais sans leur politique de casse sociale systématique, jamais un parti petit-bourgeois radical tel que la N-VA n’aurait pu s’implanter de manière aussi spectaculaire. Mes parents et grands-parents votaient pour la social-démocratie, le parti qui garantissait la pension pour tous. Quand les pensionnés regardent aujourd’hui le montant de leur pension, eux aussi trouvent sans doute que les sociaux-démocrates sont responsables de ce qu’ils voient, mais sans la moindre pensée positive…

    La social-démocratie a pu devenir un facteur stable de la société durant la longue période de croissance économique d’après-guerre. Grâce à la résistance des travailleurs et à la pression qui en découlait, elle a pu arracher certaines réformes et devenir championne du niveau de vie croissant des travailleurs. En Flandre, elle a dû partager cette position avec l’aile ouvrière de la démocratie chrétienne, pas en Wallonie. Mais depuis la fin des années ‘70, on a vu arriver une période de dépression économique, et nous sommes passés du réformisme au contre-réformisme. Aujourd’hui, un gouvernement dirigé par le PS ne représente pas la moindre alternative à la brutalité de la N-VA, à moins que le but soit simplement d’étaler la casse sociale dans le temps pour qu’elle soit plus douce.

    Ce 1er mai, l’appel émis par la FGTB de Charleroi Sud-Hainaut en 2012 restera d’actualité: nous devons construire une nouvelle force politique qui représente les intérêts des travailleurs avec autant d’acharnement que les partis établis défendent les intérêts des riches. Nous devons à nouveau définir un programme de lutte qui pose la question de la répartition des richesses que nous créons : vers les 1 % de super-riches ou vers les 99 % de la population ?

    En Belgique, la classe des travailleurs est-elle objectivement assez puissante pour gagner cette lutte ? Cela a été démontré par la magnifique riposte syndicale du premier plan d’action contre Michel Ier fin de l’an dernier. Il faut à présent un nouveau plan d’action avec une participation aussi active que possible de la part de l’ensemble des travailleurs, via des discussions démocratiques dans les entreprises et dans les syndicats eux-mêmes, pour que la classe des travailleurs dans toute sa masse soit apte à tirer les leçons du mouvement. À ce moment-là, nous n’aurons plus besoin de poser la question de ce qui reste de nos conquêtes sociales, nous pourrons directement nous intéresser à la manière dont nous pourrons les restaurer et à la manière dont nous pourrons atteindre l’objectif de garantir un niveau de vie décent pour tout un chacun !

  • Le premier mai à travers le monde

    Le 1er mai est une journée internationale de lutte et de solidarité. Seul le mouvement des travailleurs est en mesure d'organiser une telle mobilisation internationale. 125 ans après la première célébration du 1er mai, la lutte internationale ainsi que le message de solidarité et de socialisme qu'il porte restent particulièrement d'actualité. Voici une série de photos et de brefs rapports de diverses interventions de nos organisations-sœurs (qui sont tout comme le PSL membres du Comité pour une Internationale Ouvrière) à travers le monde.

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    Nigeria
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    A Lagos, au Nigeria, les membres du Democratic Socialist Movement ont mené campagne avec des stands d’information, leur nouveau journal et des tracts du Socialist Party Nigeria, le front électroal auquel participe le DSM.

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    Pakistan
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    Manifestation à Hyderabad, dans la province de Sindh, au Pakistan. Plus de photos des interventions dans la province de Sindh se trouvent ici.

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    Malaisiemaleisie
    A Kuala Lumpur, nos militants ont vendu 200 exemplaires de leur journal et 64 du magazine théorique de Sosialis Alternatif.

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    Turquieturkije
    turkijemagazineEn Turquie, notre tout jeune groupe de camarades a lui aussi mené campagne. Ce premier mai a été l’occasion de lancer le premier numéro d’un nouveau magazine marxiste, en turc. Un pdf de ce magazine est disponible auprès de la rédaction de socialisme.be.

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    Brésil
    brazilie rio
    A Rio de Janeiro, Brésil, nos camarades ont particulièrement mené campagne contre la violence raciste.
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    Allemagne
    duitsland dortmund
    Nos camarades allemands ont participé à des dizaines d’activités dans tout le pays. Cette photo a été prise à Dortmund.

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    Espagne
    spanje barcelona
    A Barcelone, l’intervention de nos camarades a été renforcée par un membre du PSL.
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    Portugal
    portugal
    Lisbonne, Portugal.

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    Suède
    zweden
    A Göteborg, nos camarades ont vendu 456 exemplaires de leur hebdomadaire “Offensiv” et ont réalisé 37 abonnements. Trois nouveaux membres ont rejoint Rättvisepartiet Socialisterna ce jour-là.

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    Hong Kong

    hongkongune action a pris place à Hong Kong avec environ 3.000 participants, parmi lesquels une équipe de Socialist Action, qui a aussi participé à une action de migrants indonésiens.

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    Taïwan

    taiwan15.000 manifestants ont participé au cortège du premier mai à Taïpei. Là aussi, le Comité pour une Internationale Ouvrière était présent.

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