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Tag: Pays-Bas
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Le néo-libéralisme mis en cause. Union européenne: une claque magistrale!
La victoire du NON au référendum sur la constitution européenne, le 29 mai dernier en France, est une claque magistrale infligée par les travailleurs et les jeunes aux institutions capitalistes de l’Union européenne. Le taux de participation élevé (70%), les 56% de NON à la constitution sont sans appel. L’Europe capitaliste est K.O. debout ! Chirac et la classe politique et médiatique peuvent aller se rhabiller : ils ont mal mesuré le ressentiment des classes défavorisées envers les institutions européennes. Depuis des années, celles-ci incarnent, pour une masse croissante de travailleurs et de jeunes, les privatisations, la casse des services publics, les coupes dans les budgets sociaux, la compétition forcée avec les pays à bas salaire,…
Peter Delsing
Le NON aux Pays-Bas (63%), le 1er juin, a été le clou du cercueil. En quelques semaines, une atmosphère de crise a gagné les bourgeoisies européennes. L’eu(ro)phorie est bien loin !
Le NON comme expression des contradictions de classes
En France et aux Pays-Bas, l’extrême droite et les nationalistes ont fait campagne pour le NON : le néo-fasciste Le Pen et le conservateur de droite De Villiers en France, le populiste de droite Geert Wilders aux Pays-Bas. Mais le NON était principalement l’expression d’un rejet de l’Europe capitaliste par les victimes de la crise. En France, les mobilisations de masse contre l’abolition de la semaine de 35 heures, contre la baisse du pouvoir d’achat et contre les privatisations ont pesé lourd dans le camp du NON. L’opposition à la Constitution est devenue une question sociale : la politique antisociale de Chirac et des autres gouvernements fait partie intégrante de la politique néo-libérale imposée par l’Union européenne. Dans les grandes villes ouvrières comme Marseille, Nice ou Lille, le NON l’a emporté haut la main. Dans les villes plus nanties, avec une forte concentration petite-bourgeoise, comme Paris, Lyon, Strasbourg, le OUI l’a emporté. Dans les quartiers populaires d’Amsterdam (Amsterdam-Nord : 73%, Volewijck et Buiksloterham ; tous deux 79%) le NON l’a emporté sans bavures.
Il est révélateur que même les commentateurs bourgeois ont été contraints de reconnaître qu’on avait voté contre la politique ‘libérale’. Les résultats de ces référendums ont confirmé l’analyse du MAS: depuis des années nous avons répété qu’une révolte de masse allait se lever contre la politique antisociale actuelle. Les mobilisations de la jeunesse annonçaient une radicalisation plus large chez les travailleurs. Quand nous avons organisé en 2001, à Gand, avec Résistance internationale, une grève et une manifestation de 2.500 lycéens et d’étudiants contre le sommet européen, certains commentateurs ont jugé qu’il s’agissait de protestations "marginales". Ils ont eu tort.
La crise capitaliste met à mal l’Union européenne
Toute tentative d’organiser un second referendum en France et aux Pays-Bas a fait long feu ; Cela ôterait toute crédibilité aux institutions capitalistes européennes, avec le risque de provoquer des mobilisations de rue. Ce serait une stupidité pour la bourgeoisie. La Grande-Bretagne, la Pologne et la Tchéquie ont décidé de reporter leur référendum. La victoire du NON en France et aux Pays-Bas a radicalisé les travailleurs. Ceux qui expliquent que le NON est l’expression d’un nationalisme étroit, n’ont rien compris: c’est au contraire l’expression d’une prise de conscience sociale internationale.
L’Europe ne peut être unifiée sur base de différents états-nations. Plus la crise économique s’approfondira, plus la pression au sein de chaque bourgeoisie pour trouver une issue individuelle pèsera. En Italie, pays officiellement en récession, la Ligue du Nord – pourtant au gouvernement – a préconisé l’abandon de l’euro et le retour à la lire! L’idée derrière cela est d’améliorer la position concurrentielle des exportations italiennes en dévaluant la lire. Ceci (évidemment) au détriment des autres états concurrents européens. Une crise économique profonde, et surtout le spectre de la lutte de classes qui pourra faire chuter des gouvernements, ne manquera pas de pousser à terme l’Union européenne hors jeu.
Les failles dans la construction européenne capitaliste se multiplient : la constitution est mise au frigo pour longtemps ; l’élargissement de l’Union (à la Turquie, à de nouveaux pays de l’Est) est remise aux calendes grecques ; le sommet de Bruxelles (en juin) a capoté sur le budget européen. Il s’agit de la crise la plus grave de la tentative d’unification capitaliste européenne. Il n’existe plus de noyau "convaincu" de pays forts qui rallient derrière eux les pays indécis, comme dans la deuxième partie des années 90, à l’époque d’une conjoncture économique meilleure. Les intérêts capitalistes nationaux regagnent du terrain. C’est la conséquence de l’aggravation de la crise du capitalisme.
Les dirigeants capitalistes n’ont rien appris: il est temps de les mettre dehors
En France, le nouveau premier ministre De Villepin veut inverser le cours en annonçant… de nouvelles mesures d’austérité. Il veut, par exemple, faciliter les licenciements dans les PME ("pour qu’elles embauchent plus vite") et organiser la chasse aux chômeurs.
Les syndicats doivent riposter à ces nouvelles attaques et défendre réellement les travailleurs. On ne pourra construire un rapport de forces qu’à travers la lutte. Le MAS veut participer à cette riposte. La création d’un nouveau parti des travailleurs à caractère de masse est un élément clé de cette riposte. Nous pensons que ces partis devront adopter un programme de transformation socialiste de l’Europe. Car seule une fédération des états socialistes d’Europe pourra mener une véritable politique sociale.
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UE. Instrument des banques et des multinationales
L’UE est utilisé pour obtenir sur le plan européen une accélération des mesures néo-libérales. Mais au moment d’une crise économique l’UE est mis sous pression.
La Constitution dans ses propres mots
L’UE défend un projet libéral, dans lequel l’intérêt central est la libre concurrence et non pas les services à la population. “L’Union offre à ces citoyens (…) un marché interne dans lequel la concurrence est libre et authentique.” (article I-3)
Malgré toutes les déclarations affirmant que la Constitution et la directive Bolkestein n’ont rien voir l’une avec l’autre, on lit dans la Constitution: “Par une loi-cadre européene, des mesures vont être prises afin de réaliser la libéralisation des services.” (article II-147)
L’UE veut un élargissement des moyens pour la défence, avec une unification plus large en tête, un premier pas vers une armée européenne. “Les états-membres s’engagent d’améliorer graduellement leurs compétences militaires.” (article II-41).
Dans la Constitution Européenne, un texte très large, il y a encore un tas d’exemples de ce projet néolibéral défendu par l’UE. Les soi-disant mesures “sociales”, auquelles se réfèrent souvent les socio-démocrates, ne sont, au contraire, pas plus élaborées que quelques généralités vagues et vides.
A la fin de l’année passée, il était déjà clair que l’économie entrait en difficultés dans beaucoup de pays européens. Cela a été confirmé par les résultats européens du premier trimestre de 2005, où deux pays avaient une croissance négative (l’Italie -1,6% et les Pays-Bas –0,6%) et d’autres pays, comme la Belgique, avaient une croissance zéro. A cause de celà, il devient très difficile de suivre les règles européennes, comme par exemple celles sur le déficit budgétaire qui ne peut pas dépasser 3% du produit intérieur brut (PIB).
De plus, il y a un mécontentement croissant contre l’UE. Les grands thèmes des dirigeants européens – le marché unique, l’euro et l’élargissement – n’ont en rien réalisé les aspirations de progrès. Au contraire, ils ont encore amplifiés la crise économique du fait que les différents gouvernements ne pouvaient plus prendre des mesure pour stimuler l’économie nationale. Comme dévaluer la monnaie pour stimuler l’exportation, par exemple.
On en est déjà au point que le ministre italien Roberto Maroni a déclaré que l’Italie ferait peut-être mieux de revenir à la Lire: “Cela fait déjà trois années que l’euro a démontré qu’il n’est pas le moyen adéquat contre la stagnation de la croissance, la perte de la force de concurrence et la crise de l’emploi.”
Directive Bolkestein: attaque libérale sur nos droits!
Le but de cette directive est de liquider des soi-disant obstacles pour le commerce des service en Europe. En réalité, c’est une proposition extrémiste qui permet que les règles les plus basses sur le plan social, de la sécurité et de l’environnents deviennent la norme. La directive proposée rendra possible qu’une entreprise de contruction basée en Pologne fasse travailler des ouvriers de construction en Belgique aux salaires et conditions de travail polonais. Idem pour les bureaux d’intérim, des services de nettoyage, des services par des autorités locales, mème notre enseignement et nos soins de santé sont en danger.
Des gouvernement ne seront plus capable d’imposer certains tarifs minimaux ou maximaux pour des médicaments ou d’imposer des normes minimales pour le cadre de personnel dans les hopitaux et les maisons de repos. Le marché sera toujours plus envahissant et imposera sa dictature du profit dans des secteurs aussi vitalement importants que les soins de santé.
Stratégie de Lisbonne
Quand la nouvelle Commission Européene sous la direction de Barrosso fut mis sur pied, elle annonça immédiatement que les “reformes économique” seraient la tâche la plus importante. Ça n’est donc pas étonnant que la composition de la Commission Européenne est surtout orientée vers la défence du libre marché et des libéralisations. Cela fit applaudir (entre autre) le journal économique britannique Financial Times.
La politique européenne actuelle est basée sur “la stratégie de Lisbonne”. En 2000, au sommet européen de Lisbonne, un plan de privatisations et de dérégulations massives a été proposé. L’économie des Etats-Unies y était utilisé comme modèle. Pour cela, on comptait aussi sur les nouveaux états-membres en Europe Centrale et de l’Est. La fédération patronale européenne Unice déclarait: “L’élargissement est une opportunité en or pour augmenter la compétititvité.” L’UE à 25 va “rendre prioritaire la compétivité des entreprises” disait Barrosso quand il faisait la sélection pour sa commission. L’élargissement est certainement un argument important pour les entreprises qui revendiquent des salaires plus bas et une semaine de travail plus long.
Aujourd’hui la seule chose qui tient ensemble l’Union Européenne est la volonté collective des capitalistes en Europe de liquider la sécurité sociale et de faire une offensive sur les travailleurs et leurs familles. Mais de l’autre coté il y a aussi la pression inévitable des interêts nationaux des politiciens et des capitalistes.
Tous les éléments de la crise actuelle – le pacte de stabilité, la constitution, le budget,… – peuvent mener à un Europe avec deux ou trois différents camps et des niveaux différents d’intégration.
Blair a déjà annoncé qu’il ne va pas y avoir de referendum en Grande-Bretagne. La Tchèquie veut suivre cet exemple. Il est probable que le processus de ratification va être arrêté, suivi par une période de “réflexion”. Une crise économique va renforcer la crise politique de l’UE et peut même mettre à l’agenda d’un certain nombre d’états-membre la remise en cause de l’adhésion.
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NON à l’Europe des privatisations, de la flexibilité, des bas salaires,…
Constitution Européenne
L’élite politique et économique a subi, malgré l’énorme campagne médiatique, une lourde défaite avec le référendum sur la Constitution Européenne en France et aux Pays-Bas. Cette défaite est venue de la résistance des travailleurs et des jeunes.
Geert Cool
Le vote contre l’Union Européenne (UE) était un vote contre la politique néo-libérale des différents gouvernements européens. L’UE s’est faite, les dernières années, une mauvaise réputation . Le Pacte de Maastricht, mis en place début des années 90, nous a également valu un strict plan d’austérité. Le lancement de l’euro a conduit, dans beaucoup de pays, à une augmentation des prix. La discussion au sujet des attaques sur les salaires et les conditions des travailleurs ont été habituellement couplés à l’Europe et à la nécessité d’une libre concurrence. Les libéralisations et les privatisations sont “mise en place par l’Europe”.
La méfiance et la résistance envers la politique actuelle sont en croissance. Ce n’est pas une « réaction mesquine de personnes qui réagissent de manière conservatrice contre un grand pas en avant de l’Eu-rope ». C’est un rejet des attaques incessantes des gouvernements et du patronat dans tous les pays européens. Partout est inscrit à l’agenda la mise en place de diminutions réelles de salaire, de diminutions du coût du travail, d’élargissement de la flexibilité, de limitations des allocations de pensions, de suppressions d’allocations de chômage,…
Ce que l’UE veut obtenir apparaît, entre-autre, par la pression exercée pour la libéralisation complète du secteur public. La directive dite « Bolkenstein », que certains ont rebaptisé en « Directive Frankenstein », a comme orientation d’ouvrir complètement le secteur public au marché. Avec une telle directive, il sera possible qu’une entreprise dans un pays à bas salaires emploie des travailleurs dans un autre pays de l’UE aux conditions de travail et de salaire les plus mauvaises possibles. C’est une attaque directe sur les salaires et sur la sécurité sociale. Cela est formalisé au travers de la Constitution Européenne (article II-147), ce qui n’est pas surprenant dans une UE qui veut devenir la zone économique la plus concurrentielle au niveau mondial.
Le vote « Non », aussi bien en France qu’aux Pays-Bas, est un rejet de cette politique. Cela cause une crise pour l’establishment européen. Tant les dirigeants poli-tiques que le patronat y ont vu le renforcement de la confiance en soi des travailleurs pour entrer en résistance contre la politique actuelle. Un rejet de la Constitution Européenne ne va pas stopper la politique néo-libérale. Avec les futurs développement de la crise économique, la bourgeoisie veut assurer ses gains en toute sécurité en arrachant l’argent des travailleurs, des bénéficiaires d’allocations, des pensionnés,…Que cette politique soit repoussée en France comme aux Pays-Bas montre que la bourgeoisie ne pourra pas mener ses plans sans résistance.
L’Europe en pratique
En avril un entrepreneur français connu a proposé à neuf de ses licenciés de déménager pour travailler dans une entreprise en Rou-manie pour 110 euro bruts par mois. « Un salaire de 110 euro n’est peut-être pas beaucoup en France, en Roumanie c’est assez », déclarait l’employeur. Les bas salaires et les mauvaises conditions de travail en Europe orientale sont utilisés pour faire des économies sur notre dos.
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France et Pays-Bas.
France et Pays-Bas
En France et aux Pays-Bas, ils ont voté respectivement à 55 % et 61 % contre la Constitution Européenne. C’était surtout un vote d’opposition des travailleurs et des jeunes. Alors que tout l’establishment politique appelait à voter pour la Constitution.
Qui a voté contre?
66 % des français qui gagnent moins de 1.500 euros par mois ont voté contre. Parmi ceux qui gagnent plus de 3.000 euros, il y avait une majorité de votes pour.
Dans 18 des 25 régions françaises, la différence est claire. Ce sont les régions où les travailleurs sont traditionnellement les plus forts : Nord, Haute Normandie, Languedoc-Roussillon et les départements du sud de la France. Dans le Pas-de-Calais il y a eu 69,5% contre. Dans les banlieues des grandes villes, le camp du « Non » a récolté plus de 70%.
Le camp du « Non » récolte en outre une majorité parmi les travailleurs à temps partiel, surtout chez les jeunes. Les 18-29 ans ont voté contre à 62 %. Ce n’est pas une coïncidence. Avec la réforme de l’enseignement, il est devenu clair que la « marchandisation » signifie: moins de moyens et prévu surtout pour un enseignement élitaire. Cela va conduire à adapter l’enseignement aux besoins du monde des entreprises, également par l’introduction des accords de Bologne pour l’enseignement supérieur. C’est notament pour ces raisons-là qu’il y a eu des grandes manifestations et grèves lycéennes en France ces derniers mois.
79 % des travailleurs manuels, 71 % des chômeurs, 64 % des salariés du secteur public et 56 % de ceux du secteur privé ont voté contre en France. C’est donc clairement un vote des travailleurs (et aussi des agriculteurs).
On constate un phénomène similaire aux Pays-Bas. Il y a de grandes différences à Amsterdam. Dans les parties les plus riches le résultat est de 50-50. Dans le centre il y a 52 % pour et en périphérie même de 56 à 64 %. Dans les quartiers les plus pauvres il y a un vote pour le Non sans appel: 73% dans le Nord et 71% dans les Sud-Ouest. Dans les quartiers populaires de Volewijk et Buiksloterham il y a eu 79% de Non. 68% des néerlandais qui ont des bas revenus ont voté contre.
Celui qui prétend qu’il n’y a plus d’opposition de classes, ou qu’elles ne ressortent plus, va avoir du mal pour expliquer la composition des votes pour le Non.
Les médias essayent de faire passer le résultat des deux référendums comme une victoire de l’extrême-droite. Néanmoins la victoire du vote d’opposition n’est pas une victoire pour le FN de Jean-Marie Lepen en France ou de Geert Wilders aux Pays-Bas. Malgré qu’il soit omniprésent dans les média, Wilders recule en arrière-plan dans les sondage d’opinion aux Pays-Bas. Dans les sondages français, portant sur les raisons pour lesquelles les gens ont voté contre l’UE, il semble que le thème de l’éventuelle entrée de la Turquie dans l’UE a joué un rôle limité. 18 % des gens qui ont voté « Non » disent que cela les a influencé. Selon les sondages, début 2005, il y avait encore 65 % de soutien pour la constitution en France. En février, ce pourcentage a commencé à diminuer après une série de mobilisations et de grèves contre les plans d’austérité visant la suppression des 35 heures.
La discussion sur la constitution atteignait un autre niveaux lorsque la CGT ( la deuxième plus grande fédération syndicale) a décidé -contre la volonté des dirigeants nationaux- d’appeler à voter « Non ». L’opposition à la constitution devenait alors un thème social, s’intégrant dans la lutte contre la politique néo-libérale, cristallisée sous la forme des mobilisations contre le gouvernement Raffarin (500.000 participants pour la défense des 35 heures le 5 février et plus d’un million le 10 mars). La confiance dans la politique traditionnelle et dans le patronat a atteint son point le plus bas. Moins de 21 % des travailleurs ont confiance dans leurs patrons. La popularité du président Chirac est tombée à 40 %, le chiffre le plus bas en 8 ans. En même temps, le plus grand parti d’opposition, le PS, connait une crise qui divise ses rangs entre le « camp du OUI » et le « camp du NON ».
Aux Pays-Bas, la popularité de la coalition gouvernementale CDA (chrétiens-démocrates), VVD (libéraux) et D66 (libéraux de « gauche ») est tombée à 19 %. De plus, le pays connaît une crise économique incessante et fait partie des trois pays qui ont la plus rapide croissance de chômage dans l’UE. Le parti d’opposition PVDA (social-démocrate) et Groen-Links (vert-gauche) ont appelé à voté pour la constitution européenne. Les partisans pouvaient par conséquent compter sur le soutien de 85 % des parlementaires, ce qui est le même pourcentage de parlementaires que ceux qui en Belgique ont approuvé la constitution au parlement fédéral.
Fin 2004, les travailleurs hollandais avaient déjà montré qu’ils n’acceptent pas sans lutte les énormes mesure austérités du gouvernement Balkenende. Le 2 octobre, 300.000 personnes ont défilé dans les rues pour protester contre la politique du gouvernement. C’était la plus grande manifestation aux Pays-Bas depuis 15 ans. Le camp du « Non » néerlandais s’est trouvé renforcé par le « Non » français. La forte augmentation du nombre de votes pour le « Non » après le résultat en France était une expression de la solidarité internationale. Après le « Non » français et néerlandais, il y a d’ailleurs une tendance similaire au G-D du Luxembourg où le camp du « Non » dans les sondages est en augmentation de 23 % à 45 % (au 9 juin). Les campagnes autour de la Constitution Européenne ont comme conséquences un renforcement de la solidarité entre les travailleurs et les jeunes des différents pays et leur résistance contre le projet européen des grandes entreprises et des riches.
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Trop de familles heurtées par l’endettement
Economie capitaliste: vers une nouvelle crise?
En 2004, 51.100 nouvelles maisons ont été construites en Belgique, record inégalé depuis 1994. Depuis la crise économique de 2001 aux USA, les pays développés essaient de stimuler la croissance en rendant l’emprunt plus accessible : les taux d’intérêt sont aujourd’hui historiquement bas.
Peter Delsing
Construire une maison n’est sans doute pas à la portée de tous. Pour des familles ouvrières où un partenaire ne travaille pas, ou pour ceux qui habitent seuls, c’est irréalisable. Des chiffres de l’ONEm pour 2004 montrent que 17% de la population active est complètement ou partiellement touchée par le chômage. Avec 1,17 millions de personnes, c’est un record. Pour ces familles, construire une maison est pratiquement exclu.
Les familles dans lesquelles les deux partenaires travaillent, lorsqu’elles n’appartiennent pas à une catégorie aisée, craignent de ne plus pouvoir continuer à rembourser leurs emprunt si l’un des deux venait à perdre son emploi. Vu l’instabilité actuelle du capitalisme ce n’est pas une crainte irréelle.
L’emprunt bon marché ne durera pas
Le gouvernement a mentionné une plus grande consommation pour expliquer la croissance de 2,7% en 2004. Bien que supérieure aux pays voisins, cette croissance ne suffisait déjà pas à faire baisser le chômage, et elle sera encore moindre cette année. On peut s’imaginer les drames qui vont naître du nombre grandissant des pertes d’emplois…
La croissance de la consommation allait de paire avec l’amnistie fiscale pour l’argent noir placé à l’étranger. De toute manière, emprunter à bon marché ou acheter à crédit ne peut pas se poursuivre éternellement. Le nombre de mauvais payeurs pour des lignes de crédits est passé en Belgique de 99.530 jusqu’à 190.226 entre 1997 et 2003. Aux Etats-Unis, le taux d’intérêt a déjà commencé à croître, afin surtout de ne plus élargir la bulle des dettes et les prix des maisons. Or, 85% de tous les emprunts effectués l’an passé dans notre pays peuvent être adaptés chaque année sur base des changements de taux d’intérêt. Quand le taux d’intérêt augmente, beaucoup de familles subissent une gifle financière.
Economie mondiale instable
Nous connaissons actuellement la relance économique la plus faible depuis la seconde guerre mondiale. Beaucoup de pays ont eu une croissance insuffisante pour maintenir l’emploi. En général, l’exploitation aggravée des travailleurs a élargi le fossé entre riches et pauvres. Depuis la crise de 2001, les entreprises américaines ont augmenté la productivité moyenne par travailleur grâce à l’introduction de nouvelles technologies et de nouvelles techniques de management. Durant les 3 derniers mois de 2004, la croissance de la productivité a ralenti, ce qui démontre que ces avantages pour les patrons commencent à être épuisés.
Un autre élément est l’endettement. Après le 11 septembre, Bush a emprunté chaque année pour mener ses guerres en Irak et en Afghanistan. L’industrie de guerre a été bien servie, au détriment des projets sociaux dans lesquels Bush épargne pour limiter le déficit.
Le taux d’intérêt peu élevé a stimulé les dettes. Pour chaque dollar de nouvelle croissance entre le début de 2001 et la fin de 2003 aux USA, 3,14 dollars de nouvelles dettes ont été faites par les familles, les entreprises et le gouvernement. Pour la première fois dans l’histoire, les dettes aux Etats-Unis représentent plus du double de la production annuelle (PIB). Ceci a contribué au rôle des Etats-Unis comme "marché de la dernière chance". Cela a aussi provoqué un flux de dollars vers d’autres pays, avec pour effet que la demande de dollars a diminué et donc également sa valeur.
En Asie, les banques centrales ont massivement acheté des dollars ces dernières années, sous forme d’obligations d’états, afin de faire baisser leur monnaie avec le dollar et ainsi garder leur position d’exportation. S’il y avait une correction du dollar vers le bas, ils pouvaient se diriger vers d’autres monnaies. Une nouvelle forte baisse du dollar secouerait la stabilité internationale financière. L’exportation des pays de l’Europe, avec un euro encore plus cher, serait étouffée. Cela pousserait les pays de la zone euro dans une crise profonde.
Il y a aussi les prix du pétrole qui grimpent et qui, fin mars, s’approchaient des 60 dollars par baril. Le "contrôle" de l’Irak, sensé entraîner les prix du pétrole vers le bas, est un rêve qui pour Bush est devenu cauchemar. Le prix du pétrole plus élevé mine la rentabilité des entreprises et stimule une augmentation générale des prix.
Encore des pertes d’emplois
En Europe, la croissance ne suffit pas à créer des emplois. L’Allemagne, les Pays-Bas et l’Italie ont connu lors du dernier trimestre 2004 une contraction de l’économie, en comparaison avec le trimestre précédent. La moitié de la production dans la zone euro va donc dans la direction d’une récession. En Allemagne le chômage est au niveau le plus élevé depuis les années ’30 : 5,2 millions de sans emplois. La crainte d’une lutte de classe plus intense chez les politiciens bourgeois, entre autre en France et en Allemagne, les pousse à enfreindre les règles budgétaires de la zone euro (le Pacte de Stabilité).
On ne peut prédire le rythme d’une crise économique. Avec une croissance ralentie ou une récession, les pertes d’emplois vont continuer. Les capitalistes et leurs partisans ont fait leurs temps, il est désormais urgent que le mouvement ouvrier et les jeunes forment leurs instruments syndicaux et politiques pour défendre leurs intérêts dans la très instable période à venir.
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19 mars: manifestation de masse réussie à Bruxelles
Ce 19 mars, Bruxelles a accueilli une masse de manifestants. Trois manifestations se sont rassemblées en une énorme manif avec 80.000 participants provenant de toute l’Europe. La manifestation montrait la force de la mobilisation européenne, la radicalisation et la volonté d’action croissantes à la base, mais aussi le manque d’un instrument politique, ce qui permit aux partis traditionnels d’être présents.
Nikei De Pooter
La Marche des Jeunes était à la tête de la manifestation. Là se trouvaient à peu près 2000 jeunes. Notre délégation comprenait à peu près 300 travailleurs et jeunes, avec également la présence de camarades des Pays-Bas, de France, d’Allemagne et de Grande-Bretagne. Ce n’était pas une coïncidence si les plus grandes délégations à la Marche des Jeunes étaient les délégations politiques radicales. Les Jeunes FGTB et CSC étaient présents avec des camions de carnaval et avec une musique assourdissante, mais ils n’ont pas réussi à faire marcher plus de quelques dizaines de jeunes dans leurs délégations.
Nous avions discuté avec eux dans le courant de la campagne sur le type de Marche qu’il fallait. Selon eux, les jeunes ne s’intéres-sent pas à une marche combative, mais plutôt à une sorte de love-parade. Cela s’exprimait aussi dans le logo infantile des Power rangers sur l’affiche de mobilisation. Ils ont tenté d’éviter que la Marche des Jeunes ne se profile comme radicale. Leur argument était qu’une marche « trop radicale » ferait peur aux jeunes et qu’un programme vague et large permettait à une grande variété d’organisation de participer.
Cette stratégie allait tellement loin que les différents partis gouvernementaux n’étaient pas seulement sur l’affiche, mais participaient réellement à la Marche. Le CD&V en donnant un tonneau de bière gratuit sur un bar mobile, le N-VA en buvant le tonneau. Animo, les jeunes du SP.A, ont réussi à faire porter leur banderole par le « ministre de la chasse aux chômeurs » Frank Vandenbroucke. Notre délégation disait bienvenue à tous ces types avec le slogan « néoliberalen = dikke asocialen ! » (néo-libéraux = gros asociaux)
Le MAS a mis la Marche des Jeunes sur l’agenda. Nous avons mené une campagne pendant des mois. Pour nous, l’important n’était pas seulement la manif elle-même, mais aussi la construction d’une relation de force à la base. Ces derniers mois, nous avons augmenté notre présence aux bureaux de pointage et y avons obtenu un soutien grandissant, bien que souvent passif. Nous avons utilisé l’occasion de construire une présence plus large dans les entreprises. Dans ce travail il était important de présenter un programme d’unification des mouvements de lutte et de proposer une initiative concrète. Ce fut chose faite avec la Marche des Jeunes.
Pour nous, la campagne était réussie. Nous avons formé une délégation combative, vendu plus de 500 exemplaires de notre journal et 100 exemplaires des journaux d’autres sections du CIO (notre internationale) et nous avons récolté 400 euros de fonds de lutte. La Marche des Jeunes est peut-être venue trop tôt ; la volonté de transformer le mécontentement large mais passif contre le chômage croissant, la flexibilité, le travail interim,… en une opposition active est toujours limitée. Mais après la manifestation contre l’accord interprofessionnel en décembre et les actions dans divers secteurs (le non-marchand, Splintex, le secteur d’alimentation,…) la Marche des Jeunes et la manifestation de la CES (Confédération Européenne des Syndicats) venait à un excellent moment. Puisque pour nous cette Marche n’a jamais été vue comme une fin en soi, mais comme une occasion de mettre à l’agenda la nécessité de construire une opposition de gauche dans les syndicats et la nécessité d’un instrument politique. Leen Pontezeele des Jeunes CSC a déclaré dans les médias que pour elle cette Marche des Jeunes n’était qu’un premier. Nous sommes ravis de ce point de vue et faisons appel à tous pour faire une évaluation ensemble, pour ensuite retourner sur le terrain et commencer à construire une nouvelle Marche des Jeunes !
CGT et FNV: délégations combatives
La CES manifestait contre la directive-Bolkestein (sur la libéralisation des services) et il y avait aussi la manif du FSE (Forum Social Européen). Dans la manif de la CES, les délégations de la CGT (France) et du FNV (Pays-Bas) se sont fait remarquer. La CGT avait à peu près 30.000 membres présents dans sa délégation, et celle du FNV comprenait aussi des milliers de travailleurs. La CGT se profilait contre la constitution européenne, sur laquelle un referendum est organisé en France. La mobilisation contre la constitution européenne montre une rage et une combativité crois-sante contre la politique néo-libérale de l’Europe. Ce n’est pas une coïncidence si les délégations de la CGT et du FNV étaient les plus grandes. Dans les deux pays, il y a un processus de radicalisation qui se développe contre les attaques antisociales du gouvernement et du patronat.
La délégation du FSE était plus limitée. Quelques milliers de membres des différents “mouvements sociaux” manifestaient. Il est pour eux d’une importance cruciale de se retrouver dans la classe ouvrière.
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Egalité homme-femme? La lutte des femmes en Belgique est-elle révolue?
L’égalité entre hommes et femmes est men-tionnée explicitement dans la Constitution belge. Un tas d’exemples illustrent pourtant que cette égalité sur papier est loin de correspondre à la réalité.
Tina De Greef
Aujourd’hui, les femmes gagnent en moyenne 70% du salaire des hommes. Même lorsqu’elles remplissent une fonction complètement équivalente, il subsiste encore un décalage salarial qui oscille entre 5% et 7%. Cette inégalité de revenu commence déjà à l’école secondaire, ce que démontre une enquête anversoise parmi les jeunes de moins de 25 ans. Les filles ont moins d’argent de poche que les garçons parce que les petits boulots des garçons rapportent plus que ceux des filles. Chez les médecins généralistes, le salaire diminue au fur et à mesure que la profession se féminise. D’où l’appel à plus de généralistes masculins.
Le slogan ‘A travail égal, salaire égal’, que le mouvement féministe mettait déjà en avant lorsque ça n’allait pas encore de soi, est donc toujours d’actualité comme on peut le voir en pratique. Malheureusement, la discrimination n’existe pas seulement au niveau des salaires. La discrimination sévit encore dans bien d’autres domaines.
Seul un nombre très restreint de femmes gravissent les échelons supérieurs des entreprises et de l’administration. Par exemple, si les femmes constituent 81% du personnel de l’enseignement maternel et primaire, il n’y a que 57% de directrices d’école. Qui plus est, les femmes exercent les emplois les plus précaires avec les horaires les plus flexibles.
Le taux de chômage est également plus élevé chez les femmes que chez les hommes. En outre, 41% des femmes travaillaient à temps partiel en 2003 contre 6,4% des hommes. Il s’agit surtout de femmes qui préféreraient travailler à temps plein, mais qui ne trouvent pas de contrat à durée indéterminée. D’autres femmes se retrouvent avec des contrats à durée déterminée parce qu’elles doivent s’occuper des tâches ménagères et des enfants (il y a trop peu de crèches et elles coûtent cher).
Vu que les hommes gagnent en moyenne plus que les femmes, pour les raisons mentionnées ci-dessus, il paraît ‘évident’ que les femmes s’occupent des tâches ménagères non-rémunérées. En outre, les préjugés sur la division sexuelle des tâches ont la vie dure. Les femmes consacrent ainsi 8 heures de plus par semaine à préparer les repas et à faire les courses (en plus de leur travail). En revanche, les hommes ont deux heures de temps libre en plus que les femmes pendant le week-end. Les femmes sont donc toujours astreintes à la double tâche.
La violence conjugale (dont les hommes sont les auteurs et les femmes les victimes dans la grande majorité des cas) est de plus en plus banalisée en Belgique. Le classement sans suite par le parquet d’Anvers de la plainte contre Rob Verreycken, parlementaire du Blok, qui avait frappé son ex-épouse en public, nous en fournit encore un triste exemple. Une femme sur sept est pourtant victime de violences conjugales graves en Belgique. Sur leur lieu de travail également, les femmes sont encore trop souvent confrontées à différentes formes de harcèlement sexuel.
Sur le plan international
Dans les économies occidentales comme l’Allemagne et les Pays-Bas – où la prostitution est légalisée – les excès du système capitaliste refont surface. Les deux pays sont actuellement confrontés à un taux de chômage élevé qui découle de la crise économique. Les chômeuses (jusque 55 ans) sont obligées d’accepter n’importe quelle offre d’emploi, même dans l’industrie du sexe, sous peine de perdre leur allocation. Une enseignante allemande en technologie de l’information, âgée de 25 ans, a été récemment exclue du chômage pour avoir refusé d’aller travailler dans un bordel!
Dans le reste de l’Union européenne également, les femmes sont surreprésentées dans les emplois à temps partiel: 80% des emplois à temps partiel sont exercés par des femmes. Aux Pays-Bas, le pourcentage des femmes travaillant à temps partiel s’élève à 70%. Mais seules 38% d’entre elles sont réellement indépendantes sur le plan financier.
Lorsqu’on va ailleurs dans le monde, la situation devient encore plus déplorable. Chaque jour apporte son lot de lapidations ou d’exécutions publiques de femmes iraniennes accusées d’adultère. Dans certaines parties du monde, les femmes subissent des mutilations sexuelles comme l’excision. Aux Etats-Unis, les femmes qui décident d’avorter font l’objet d’une campagne de stigmatisation de la part de l’Administration Bush.
70% des pauvres dans le monde sont des femmes. Les femmes prestent plus d’heures que les hommes (dans presque tous les pays): elles consacrent partout au moins la moitié de leur temps de travail à du travail non-rémunéré. Les femmes font les deux tiers de tout le travail disponible dans le monde, mais elles ne possèdent qu’un dixième de la totalité du revenu mondial.
Deux tiers des 880 millions d’analphabètes adultes sont des femmes. Dans le monde entier, les femmes ne représentent que 13,4% des parlementaires et il y a des pays où les femmes n’ont encore aucun droit politique.
33% des femmes sont victimes de violences sexuelles au cours de leur vie. Cela les rend davantage exposées au risque de contamination du SIDA.
50 millions de femmes dans le monde sont victimes des trafiquants d’êtres humains qui exploitent sans vergogne la vulnérabilité des femmes qui tentent de fuir une situation insupportable. Ce n’est pas pour rien que l’industrie du sexe est plus rentable que l’industrie d’armement!
Une femme meurt chaque minute de complications post-natales. 99% de ces femmes vivent dans un pays à bas revenu ou à revenu moyen.
8 mars: journée internationale des femmes
Le 8 mars, on célèbre la Journée internationale des femmes. Le 8 mars 1907, les couturières new-yorkaises sont descendues dans la rue pour revendiquer un salaire égal est une journée de travail de 10 heures. La manifestation a été dispersée par la police. Le 8 mars 1908, ces mêmes femmes sont re-descendues dans la rue pour revendiquer cette fois l’abolition du travail des enfants et le droit de vote pour les femmes. En 1910, le 8 mars a été proclamé Journée internationale des femmes. Depuis 1978, ce jour est officiellement reconnu par les Nations-Unies comme un jour férié.
En Belgique, le Conseil national des Femmes (mis sur pied le 30 janvier 1905) fête ses cent ans. Il est né il y a un siècle de la fusion de trois organisations (Ligue du Droit des Femmes, Société belge pour l’Amélioration du Sort de la Femme et l’Union des Femmes belges contre l’Alcoolisme). Et ce à l’initiative de Marie Popelin qui, après avoir décroché son doctorat en droit en 1888, s’est vu interdire de s’inscrire au Barreau en raison de son sexe (cette interdiction n’avait pourtant aucune base légale).
Elle représente en fait un féminisme libéral et bourgeois qui prétend que la femme n’est pas émotionnellement inférieure à l’homme et qu’elle pourra mieux accomplir ses tâches menagères si elle a la possibilité de s’épanouir en dehors de la maison. Popelin n’aspirait qu’à l’égalité juridique. Au début du 20ème siècle, lors de la première vague féministe, il y avait aussi d’autres courants féministes. Selon le féminisme chrétien, la tâche première de la femme était de prendre soin de sa famille. Le féminisme socialiste était divisé entre partisanes et opposantes au droit au travail pour les femmes.
Lors de la seconde vague féministe des années 70 et 80, des féministes radicales ont lutté contre l’inégalité des salaires, des conditions de travail, etc. Elles ont mis ce qui apparaissait comme des problèmes individuels, tels que la violence conjugale (qui découle de l’organisation de la société), sous un éclairage politique et collectif autour du slogan “ce qui est individuel est politique”. Elles défendaient aussi le mot d’ordre ‘A travail égal, salaire égal’, qui est toujours d’actualité.
Les partis bourgeois et les médias – qui découvrent maintenant le problème de l’inégalité de revenu – ne vont pas au-delà du féminisme bourgeois. Ils ne proposent aucune solution réelle aux problèmes des femmes, car ils ne sortent pas du cadre du système capitaliste. Dans ce système, seuls les profits comptent et tant que le trafic des femmes demeure rentable, tant que les tâches ménagères sont accomplies gratuitement par les mères de famille et tant que les gens sont exploités, le système d’oppression continuera et aucun changement ne se produira. Si Malcolm X disait : “Il n’y a pas de capitalisme sans racisme”, il en va de même pour le sexisme.
On a brossé ci-dessus le tableau des inégalités qui règnent encore. C’est la base du sexisme. Afin de mettre fin à l’oppression de la femme, une réorganisation de la société s’impose. Des salaires décents, des crèches gratuites et des services collectifs permettraient d’affranchir les femmes de leur double tâche journalière. Luttez avec nous pour les revendications de la Marche des Jeunes pour l’Emploi, dans laquelle nous luttons tous ensemble pour une société où tout le monde, tant les hommes que les femmes, aura un emploi décent à des conditions de travail décentes, c’est-à-dire une société socialiste!
Pour en savoir plus:
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“A travail égal, salaire égal!” La grève des femmes de la FN de Herstal
1966 (16 février – 8 mai)
Le 16 février 1966 éclatait une grève qui allait devenir historique : celle de 3.000 ouvrières de la Fabrique Nationale d’Armes de Guerre (FN) de Herstal. Cette grève est devenue historique pour deux grandes raisons :
1. Les grèves de femmes sont rares : celle de la FN fut la plus importante, car elle a duré 12 semaines, elle fut massivement suivie du début à la fin, elle s’est concrétisée dans un slogan (“A travail égal, salaire égal !”) pouvant être repris par toutes les femmes travailleuses et elle s’est terminée par une victoire (même si celle-ci ne fut que partielle)
2. Elle a eu lieu à un moment charnière : 5 ans après la grande grève de l’hiver 60-61 contre la Loi unique (1 million de travailleurs au moment le plus fort de la grève) et 2 ans avant Mai ’68 qui a permis la relance d’un nouveau mouvement féministe dans la jeunesse. La grève de la FN a donc été marquée par la combativité issue de 60-61 et elle a servi de référence pour les toutes les femmes qui voulaient défendre et étendre leurs droits dans les années qui suivirent.Jean Peltier
Quarante ans après, certaines idées fausses se sont parfois développées quant à cette grève, notamment l’idée que ce fut la première grève des femmes en Belgique et que cette lutte s’était heurtée à l’opposition des ouvriers.
La revendication “A travail égal, salaire égal !” et le mouvement ouvrier
Pendant la première phase de développement du capitalisme industriel en Belgique (1800-1870), les femmes et les enfants sont massivement intégrés à la production dans des emplois non qualifiés, surexploités et sans droits. Vers 1860, les femmes représentent 35% de la main-d’oeuvre, non qualifiée et surexploitée: le salaire d’une ouvrière représente en moyenne la moitié du salaire d’un manoeuvre masculin adulte. En 1900, après que la bourgeoisie ait décidé de “reconstruire” la famille ouvrière, les femmes représentent encore 26% de la main-d’oeuvre.
Durant tout le 19e siècle, la grande majorité des hommes – les bourgeois mais aussi les prolétaires – ont une vision profondément sexiste, marquée par la religion : les femmes sont inférieures aux hommes, leur faiblesse est naturelle, leur place est à la maison pour s’occuper de l’entretien de la famille et des enfants.
La création en 1885 du Parti Ouvrier Belge (l’ancêtre du PS) représente un grand pas en avant : la Charte de Quaregnon affirme que “le parti ouvrier est le représentant non seulement de la classe ouvrière mais de tous les opprimés sans distinction de nationalité, de culte, de race ou de sexe”. Le POB lutte donc pour l’égalité civique et le suffrage universel pour tous. Néanmoins, la position dominante au sein du parti reste que la place naturelle de la femme est au foyer pour s’occuper du ménage et des enfants. Mais comme on est encore loin de cette situation idéale (!) et que les femmes doivent travailler, il est juste que, à travail égal, elles touchent un salaire égal. L’objectif central reste pourtant que le salaire de l’homme devienne suffisant pour pouvoir se passer du travail de la femme et lui permettre de retourner à la maison.
Après la 1ère guerre mondiale, le travail des femmes se développe en tant qu’employées dans les bureaux des usines et dans les administrations. L’agitation sociale grandit, les travailleurs obtiennent la journée des 8 heures et des hausses de salaires. Les femmes participent aux mouvements de grève et les premières grèves de femmes ont même lieu, notamment celles des ouvrières polisseuses sur métal de Liège et Herstal en 1920, des vendeuses de grands magasins en 1920 aussi et, en 1922, celles des ouvrières du textile à Verviers (qui dure 5 mois!).
Le mouvement syndical (qui reste totalement dominé par les hommes) revendique “A travail égal, salaire égal” mais ne fait que très peu d’efforts pour imposer cette revendication dans la réalité. La patronat finit par accepter – en théorie – cette idée mais il la contourne dans la pratique, en imposant des petites différences entre les postes et les opérations de travail entre hommes et femmes qui font qu’il n’y a presque jamais de travail égal… et donc pas de salaire égal !
Après la 2e guerre mondiale, les nouvelles institutions internationales comme l’O.N.U. et l’Organisation Internationale du Travail (O.I.T.) inscrivent dans leurs principes l’idée “A travail égal, salaire égal”. En 1957, le Traité de Rome, qui crée le Marché Commun (l’ancêtre de l’Union européenne) entre six pays dont la Belgique, reprend lui aussi le principe “A travail égal, salaire égal” dans son article 119. Bien entendu, ce principe n’est mis en oeuvre nulle part, mais l’application de l’article 119 deviendra la revendication centrale des ouvrières en grève de la FN.
Pour le patronat belge, la revendication de l’égalité salariale entre hommes et femmes est un “luxe impossible”. Les arguments pour justifier cela sont déjà les mêmes que ceux qu’on entend à tout moment aujourd’hui : la concurrence internationale est trop forte, la mise en oeuvre du Marché Commun empêche de faire des “folies”. Pour le patronat, le salaire féminin reste un appoint et les femmes au travail sont trop instables et trop souvent absentes (maladies, accouchements, soins des enfants) pour qu’on puisse les considérer de la même manière que les hommes.
Les femmes jouent un rôle actif dans tous les grands mouvements de grève en Belgique – en 1936, en 1950 lors de l’Affaire Royale et en 1960-61 – mais elles restent marginales dans le mouvement syndical (tant à la FGTB qu’à la CSC) tout comme dans le Parti Socialiste Belge.
La F.N. de Herstal
La F.N. est un fleuron de l’industrie liégeoise depuis 1886. Elle a une production variée : les armes surtout mais aussi les motos et même, pendant un temps, les autos. En 1966, elle emploie 13.000 travailleurs. C’est une entreprise florissante qui peut donc se permettre de payer des salaires élevés. Les femmes sont 3.900 à la F.N., soit 30% de l’ensemble des travailleurs. Il y a 350 employées pour 3.500 ouvrières.
A la F.N., les ouvrières occupent le bas de l’échelle à tous les points de vue :
– elles sont engagées comme manoeuvres spécialisées (le grade le plus bas) : elles font le gros oeuvre sur les pièces avant de les apporter aux ouvriers qualifiés (des hommes) qui font la finition.
– elles n’ont pas suivi d’études préparatoires et apprennent donc leur métier dans l’usine;
– leur travail se fait dans des conditions dégueulasses que montre très bien le documentaire TV (huile, bruit, manque d’hygiène, absence de vêtements de protection,…);
– elles sont appelées les “femmes-machines” (elles ne sont que le simple prolongement de la machine qui leur dicte le rythme du travail).
– L’encadrement est totalement masculin, du grand patron au régleur des machines en passant par les ingénieurs et les contremaîtres.
– Les femmes n’ont aucun espoir de promotion : la F.N. organise des formations qui sont officiellement ouvertes à tous, hommes et femmes, mais réservées à ceux qui ont ont suivi à l’école des cours techniques de mécanique (ce qu’aucune femme n’a fait !).
– Les inégalités salariales sont criantes : l’ouvrier le moins qualifié qui entre à la F.N. est payé directement en classe 4 et peut régulièrement progresser; par contre, les femmes se répartissent dans les classes 1 à 3 et ne peuvent espérer monter plus haut puisqu’elles ne suivent pas les formations internes à la F.N. !
– enfin, dans la vie syndicale de l’entreprise, les femmes restent sous-représentées : si elles représentent 30% de la main-d’oeuvre, il n’y a que 6,5% de déléguées à la FGTB et 9% à la CSC.Chronologie de la grève des femmes de la F.N.
8 nov. 65 : Début des discussions au niveau national pour l’établissement d’une nouvelle convention qui doit réduire les différences salariales entre hommes et femmes dans le secteur du métal. Le patronat fait traîner les négociations. A la FN, la direction refuse toute négociation dans l’entreprise tant qu’un accord national n’est pas signé.
Janvier 66 : Nombreuses réunions syndicales dans l’entreprise sur le thème “A travail égal, salaire égal”. Le mécontentement augmente.
9 février : Débrayage spontané des femmes. Après avoir tenu une assemblée où les délégations syndicales promettent de faire pression sur la direction de l’usine, elles acceptent de reprendre le travail.
16 février : Après une assemblée syndicale où les délégations annoncent que la direction ne veut pas bouger, les femmes partent spontanément en grève contre l’avis des délégués. Les hommes manoeuvres (les moins bien payés) touchant 32 francs l’heure et les femmes 25 francs, elles réclament 5 francs/heure d’augmentation. Les femmes présentes à l’assemblée font le tour de l’usine pour lancer le mouvement. 3.000 ouvrières partent en grève.
17 février : 1ère assemblée générale de la grève. 3.000 femmes partent en cortège de l’usine, jusqu’à la salle de réunion. Les permanents syndicaux demandent la suspension de la grève mais les femmes refusent. 1.000 ouvriers sont déjà en chômage.
18 février : Un accord national est signé : il ne garantit que 1 franc/heure d’augmentation.
19 février : La direction de la FN refuse d’aller plus loin que l’accord national.
21 février : 2e assemblée générale. Les directions syndicales commencent à reprendre le mouvement en main. Ils reconnaissent la grève et dénoncent la présence d’éléments indésirables qui n’ont rien à voir avec la F.N. en visant les militants extérieurs à l’usine du Parti Communiste de Belgique (le PC officiel, pro-soviétique), du Parti Communiste Wallon (une scission du PCB, pro-chinoise) et du Parti Wallon des Travailleurs (scission de gauche du PSB dans lequel militent les trotskistes). Des ouvrières des ACEC à Herstal et de Schreder à Ans partent en grève en solidarité. Après l’AG, les ouvrières les plus combatives et les plus méfiantes vis-à-vis de l’appareil syndical, appuyées par le PCW, constituent un Comité d’Action pour élargir la grève et appeler à la solidarité. 28 février :
3e assemblée générale : les directions syndicales affermissent leur contrôle sur la grève. Elles font voter la création d’un Comité de Grève de 24 femmes (18 FGTB et 6 CSC), moins pour diriger la grève (ce sont les permanents qui conservent l’essentiel des contacts avec la direction de la FN et les instances syndicales nationales) que pour éliminer les influences plus à gauche, comme le Comité d’Action. 3.000 ouvriers sont en chômage. Les premiers versements de solidarité avec la grève arrivent.
Début mars: Une pétition de solidarité des hommes avec les ouvrières en grève circulent. La majorité de travailleurs de l’entreprise – encore au travail ou en chômage – signe cette pétition. Les syndicats et les mouvements féminins (liés au PSB, au PC et au Mouvement Ouvrier Chrétien) popularisent la grève. Le conciliateur social fait une proposition d’augmentation de 3 francs/heure en plusieurs étapes.
3 mars : 4e assemblée générale : 2.500 ouvrières rejettent les propositions du conciliateur et votent la prolongation de la grève. Le Comité de grève est chargé de gérer la solidarité financière venant de l’extérieur et est tenu au courant de l’évolution des négociations par les syndicats. Son nombre de membres est porté à 29 et il intègre des membres du Comité d’Action dont l’influence va diminuer peu à peu.
9 mars : 5e assemblée générale : la direction ne bougeant pas, la grève est prolongée. A la tribune se suivent interventions de solidarité de mouvements féminins et de délégations d’entreprises et lecture des premiers messages de l’étranger.
Mars : Les difficultés financières grandissent mais la solidarité s’organise de mieux en mieux. Les commerçants offrent des produits, les délégations et les centrales syndicales organisent des collectes un peu partout, les quotidiens de gauche lancent des souscriptions de soutien, des dons arrivent de syndicats d’autres pays européens. Le Comité de Grève se réunit tous les jours pour organiser la remise d’argent et de colis aux ouvrières en grève et aux chômeurs en difficulté. Les ouvrières des ACEC-Herstal partent elles aussi en grève. Dans une autre usine de la région où les ouvrières sont parties en grève, la direction accorde une augmentation salariale substantielle aux femmes.
21 mars : 6e assemblée générale : la direction de la FN refuse toujours de négocier des augmentations supérieures à l’accord national. La grève est prolongée. Le nombre d’ouvriers au chômage atteint 4.000 et des secteurs entiers de l’usine sont à l’arrêt. A l’assemblée, une représentante de la CGT française reçoit une ovation extraordinaire et 2.500 ouvrières chantent La Marseillaise. Le journal télévisé de la RTB évoque la grève pour la première fois (après cinq semaines de grève !).
24 mars : Une délégation des Comités d’Action des femmes de la FN et des ACEC-Herstal se rend aux ACEC-Charleroi pour appeler les ouvrières à partir en grève (des assemblées d’ouvrières des ACEC-Charleroi réclament une grève depuis des semaines mais elles sont bloquées par les permanents syndicaux); plusieurs centaines d’ouvrières des ACEC débraient et se rendent dans les sièges syndicaux pour engueuler les permanents.
28 mars : 7e assemblée générale : les dirigeants syndicaux liégeois dénoncent à la tribune les tentatives de la direction pour briser la grève par des informations mensongères dans la presse… et condamnent publiquement la descente du Comité d’Action à Charleroi. Pour faire baisser la tension, les syndicats annoncent une manifestation à Herstal le 7 avril. La grève continue aux ACEC-Herstal et chez Schreder à Ans. A Charleroi, les dirigeants syndicaux imposent un nouveau délai avant un départ en grève.
Fin mars : Intense activité dans les séances parlementaires et dans les couloirs du parlement autour de la grève de la FN et des revendications d’égalité salariale hommes-femmes. Mais rien n’avance.
7 avril : Après 51 jours de grève, une manifestation se déroule à Herstal en présence de responsables syndicaux liégeois et de quelques parlementaires de gauche. Les cas de misère se multiplient (il est fréquent que plusieurs personnes de la même famille travaillent à la FN) tandis que la solidarité continue à s’amplifier.
12 avril : Malgré l’opposition de l’appareil syndical, les ouvrières des ACEC-Charleroi partent en grève. Un Comité d’Action des ouvrières des ACEC-Charleroi se forme à l’initiative du PCW.
15 avril : 8e assemblée générale : des négociations reprennent avec la direction mais rien n’avance. La grève est donc une nouvelle fois prolongée.
19 et 23 avril : La grève se termine aux ACEC, d’abord à Charleroi puis à Herstal, sur des augmentations salariales de 2 francs pour les femmes et des engagements de révision des classifications.
25 avril : 5.000 personnes manifestent à Liège sur le slogan “A travail égal, salaire égal” : les femmes de la FN forment le gros de la manifestation mais il y aussi des délégations d’entreprises de tout le pays ainsi que des délégations des Pays-Bas et de France.
Fin avril : 9e assemblée générale : les propositions patronales, considérées comme insuffisantes, sont rejetées. Près de 5.000 ouvriers sont en chômage technique.
4 mai : Syndicats et direction tombent d’accord sur un accord : 2 francs/heure à la reprise du travail et 0,75 franc au 1er janvier 1967.
5 mai : 10e assemblée générale : la bureaucratie syndicale jette tout son poids dans la balance pour faire voter l’acceptation de l’accord devant une assemblée convoquée à la hâte et moins nombreuse que d’habitude. L’accord est finalement accepté au scrutin secret par 1.320 oui et 205 non. Beaucoup de femmes acceptent cet accord du bout des lèvres parce qu’elles sont épuisées financièrement mais elles trouvent son contenu insatisfaisant.
Après la grève : Même si la rentrée est douloureuse et que beaucoup d’ouvrières sont déçues, la combativité des femmes permettra par la suite d’obtenir de nouvelles augmentations salariales à la FN, plus importantes pour les femmes que pour les hommes. Une nouvelle grève de trois semaines en 1974 permettra l’ouverture aux femmes d’une soixantaine de fonctions qui leur étaient fermées jusque là et de nettes améliorations en matière d’hygiène et de conditions de travail.
Traits marquants et leçons de la grève des femmes de la F.N.
1. Dès le départ, le mouvement a été massif et uni; c’était tellement évident pour tout le monde qu’il n’y a jamais eu besoin de faire un piquet de grève pour faire respecter la grève pendant les douze semaines !
2. Dans sa première phase, le mouvement a aussi été spontané et radical. Les appareils syndicaux ont été débordés et placés devant le fait accompli de la grève. Des militant(e)s d’extrême-gauche (PCB, PCW, PWT) ont joué un rôle important dans le déclenchement de la grève et dans l’impulsion de la solidarité. Dès le premier jour, un Comité d’Action a regroupé les militantes les plus radicales pour ne pas laisser les appareils syndicaux enterrer un mouvement qu’ils ne souhaitent pas.
3. Débordée par le déclenchement de la grève, la bureaucratie syndicale a montré une grande intelligence tactique. Elle a reconnu la grève au bout de quelques jours (elle ne pouvait pas faire autrement!) et elle a entrepris de la récupérer en créant un Comité de Grève officiel pour réduire l’audience du Comité d’Action.
4. Les hommes ont été fortement aux côtés des femmes dès le début de la grève (la pétition de soutien aux femmes a été massivement signée et aucun homme n’a fait le jaune en acceptant de faire le travail des femmes !). Et ils sont restés solidaires même quand la moitié d’entre eux ont été réduits au chômage technique. Le sexisme n’a pas disparu mais il a reculé fortement devant le courage et la détermination des ouvrières grévistes.
5. La solidarité de classe a été énorme : collectes réalisées par les délégations syndicales d’entreprises, dons des centrales syndicales, collectes réalisées par les partis de gauche (des secteurs du PSB, le PCB, le PCW, le PWT) et par des mouvements féminins liés aux syndicats et aux partis de gauche,… La solidarité est même venue de commerçants et de professions libérales d’Herstal et de la région, preuve que la classe ouvrière peut polariser autour d’elle des couches populaires plus larges quand elle lutte de manière décidée. Enfin, il y a eu une solidarité importante à l’étranger (France, Pays-Bas, Allemagne, Italie) venant des mêmes mouvements (syndicaux, politiques et féminins) qu’en Belgique.
6. Sous la pression de la combativité des femmes et malgré leur faible représentation dans les syndicats (à la FN et ailleurs), la grève a été organisée d’une manière partiellement démocratique. Les points positifs principaux ont été : des assemblées hebdomadaires où la poursuite de la grève était chaque fois discutée et mise au vote, les interventions de solidarité de délégations d’entreprises, de centrales syndicats, de mouvements féminins, l’élection d’un comité de Grève,… Mais cette organisation a rencontré des limites dues au contrôle réel exercée par la bureaucratie syndicale : les A.G. ont été dirigées par les permanents (de l’entreprise et de la régionale), les négociations nationales et avec la direction sont restées le privilège des dirigeants syndicaux, le Comité de Grève n’a pas dirigé celle-ci mais a été essentiellement cantonné à la gestion de tous les problèmes sociaux (une tâche essentielle mais limitée),…
7. L’extension du mouvement n’a pas été facilitée par les appareils syndicaux. Le meilleur moyen de faire pression sur le gouvernement et le patronat était d’élargir le mouvement né à la FN et suivi par les ACEC et Schreder par un appel à la grève dans d’autres entreprises à forte proportion de femmes. Les bureaucraties syndicales de Liège n’ont pas suivi cette orientation. Pire encore, l’appareil des métallos FGTB de Charleroi (soumis au PSB) a tout fait pour empêcher la grève aux ACEC-Charleroi (et la casser une fois qu’elle a eu démarré). Les ouvrières de la FN se sont donc trouvées très seules dans un conflit qui n’aurait sans doute duré douze semaines si les syndicats avaient élargi rapidement le mouvement.
8. Les deux manifestations sont venues très tard : celle de Herstal après 7 semaines et celle de Liège après 10 semaines ! Et encore, les syndicats n’ont organisé la manif de Herstal que parce que les femmes les plus combatives essayaient d’étendre le mouvement par elles-mêmes (en envoyant des délégations à Charleroi) et qu’il fallait détourner l’énergie des ouvrières vers quelque chose de moins dangereux pour la bureaucratie. De plus, les syndicats n’ont pas essayé de mobiliser massivement pour ces deux manifs (5.000 personnes à Liège pour une manifestation de solidarité avec une grève qui dure depuis dix semaines, c’est très peu).
9. Les mouvements féminins ont joué un rôle positif en élargissant la solidarité et en menant une campagne idéologique bienvenue contre les idées réactionnaires telles que “la place de la femme est au foyer et pas en usine” ou “le salaire de la femme n’est qu’un salaire d’appoint” encore bien vivantes chez les hommes (et même chez une partie des femmes !) à l’époque. Mais, étroitement liés au PSB et aux syndicats, ces mouvements féminins n’ont pas pu, ni voulu remettre en cause la direction exercée par les bureaucraties syndicales.
10. Les “petits” partis de la gauche radicale (quelques centaines de membres tant au PCW qu’au PWT, c’est plus de membres et surtout plus de travailleurs membres qu’au PTB et au MAS aujourd’hui !) ont joué un rôle actif et positif pour développer la solidarité mais aussi l’initiative autonome des femmes. Mais le sectarisme stalinien du PCW l’a souvent isolé dans l’action.
11. La combativité des femmes de la FN a été extraordinaire et la solidarité a montré qu’un large courant dans la classe ouvrière se reconnaissait en elles et était prêt à les soutenir. Ce qui a manqué pour que leur combat se termine par une victoire éclatante plutôt que par une demie-victoire, c’est, comme souvent, l’existence d’un courant syndical combatif solidement organisé et d’un parti révolutionnaire implanté dans les entreprises qui auraient pu les aider à contrer le réformisme et le contrôle pesant de la bureaucratie syndicale et du PS sur le mouvement ouvrier.
Pour en savoir plus :
– “La grève des femmes de la FN en 1966” un livre de Marie-Thérèse COENEN paru en 1991 aux éditions Pol-His du CRISP (il est toujours disponible en librairie)
– “La première grève féminine d’Europe. les leçons de la grève de la FN”, article paru dans le numéro d’octobre 1966 de “Lutte de Classe”, la revue de la section belge de la Quatrième Internationale (voir Francine pour plus de renseignements)