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  • [INTERVIEW] Élections générales en Irlande sur fond de colère anti-austéritaire

    political_revolutionL’Irlande se rend aux urnes pour des élections générales le 26 février. Le Socialist Party, parti-frère irlandais du PSL, y a participé dans le cadre d’un front plus large dénommé l’Anti-austérity Alliance (AAA) et espérait bien voir nos camarades Paul Murphy et Ruth Coppinger être réélus. Joe Higgins (actuellement député du Socialist Party) nous en parle.

    Joe Higgins : ‘‘Le programme d’austérité de ces huit dernières années a intensifié les inégalités dans la société irlandaise. Cela reflète très bien ce qui s’est également produit à l’échelle internationale, comme en a témoigné le récent rapport de l’ONG Oxfam selon lequel, pour la première fois de l’Histoire, les 1 % les plus riches détiennent plus de richesses que le reste de l’humanité, les 99 %.
    L’élection de Jeremy Corbyn à la tête du parti travailliste en Grande-Bretagne et l’énorme soutien dont jouit le candidat ‘‘socialiste’’ aux primaires démocrates Bernie Sanders aux Etats-Unis sont des illustrations de l’opposition croissante et de l’énorme colère contre cette société inégalitaire. Cela se voit aussi en Irlande.

    Depuis la crise économique, il y a eu une relative reprise économique, mais nombreux sont les travailleurs qui n’en ressentent tout simplement pas les effets, la politique d’austérité continue à lourdement peser sur leurs épaules. À la suite de la crise financière, par exemple, de nouveaux emplois ont été créés, mais avec une forte tendance à être peu qualifiés, mal payés, précaires et ainsi de suite, comme des contrats ‘‘zéro heure’’ (où l’employeur ne mentionne aucune indication d’horaire ou de durée minimum de travail, NDT).

    Nous connaissons également une terrible crise du logement, un véritable enjeu dans ces élections. Les services de santé sont eux aussi en crise profonde, les hôpitaux sont débordés en raison d’un manque de ressources et des effets cumulés des diverses opérations de réduction des dépenses.

    Ce que nous essayons de faire ressortir dans le débat politique, c’est que les partis de l’establishment capitaliste, et également le Sinn Fein, limitent leur approche économique à ce qu’ils appellent ‘‘l’espace fiscal’’. Ils veulent instaurer une batterie d’impôts supplémentaires en imaginant que l’économie se développera sans problème au cours des cinq prochaines années. Cette discussion est devenue véritablement obsessionnelle chez eux. Ils essayent ainsi de détourner l’attention de l’immense richesse concentrée dans les mains d’une infime élite et des gros bénéfices engrangés par les grandes entreprises. L’Irlande est réellement un paradis fiscal.

    Les moyens existent pour stimuler les conditions de vie de la population. Être capable d’utiliser ces ressources nécessite d’imposer une taxation progressive et de nationaliser le secteur bancaire. Nous avons également besoin d’investissements publics à grande échelle afin de construire de nouvelles maisons, par exemple.

    Ces revendications-clés dépendent du développement d’une alternative politique. Nous appelons à une ‘‘révolution politique’’ qui mette de côté les partis de l’establishment pour construire une nouvelle force qui puisse représenter les intérêts de la classe des travailleurs.’’


    L’Anti-Austerity Alliance & People Before Profit

    L’Anti-Austerity Alliance et People Before Profit disposaient de 4 députés dans l’ancien parlement et il est bien possible qu’ils en disposent de 7 après le 26 février. Ils pourraient ainsi constituer un groupe parlementaire officiel. AAA-PBP ont déposé 31 candidats.

    Le député Paul Murphy a été élu lors d’élections intermédiaires dans le district de Dublin South West. Il a notamment utilisé sa position élue pour être porte-voix de la résistance à la nouvelle taxe sur l’eau. Avant cela, Paul a été député européen en remplacement de Joe Higgins lorsque ce dernier a été élu au Parlement irlandais. Le 9 avril prochain, il sera en Belgique en tant qu’orateur pour notre journée ‘‘Socialisme 2016’’ à l’occasion d’un atelier sur la gauche européenne et le ‘‘plan B’’ de Varoufakis ainsi que pour le meeting de clôture.


     

    Joe Higgins n’est plus candidat

    joe_greeceLes lecteurs réguliers de Lutte Socialiste et de socialisme.be connaissent la réputation politique de Joe Higgins. Il fut, des années durant, la figure publique de notre parti-frère irlandais. Député de 1997 à 2007 et à nouveau à partir de 2011, après deux années passées au parlement européen, Joe ne s’est pas présenté cette fois-ci. Il est maintenant âgé de 66 ans et veut passer le flambeau à de plus jeunes militants, comme la députée Ruth Coppinger, issue comme lui de Dublin West. Joe continuera bien entendu à jouer un rôle politique important. Nous tenons à le remercier Joe pour ses années de dévouement et pour la manière dont il a toujours utilisé sa position publique à destination du renforcement de la lutte des travailleurs et des opprimés.

    Le dernier exploit parlementaire de Joe Higgins fut de participer à une enquête parlementaire consacrée à la crise financière. Il avait notamment interrogé Patrick Honohan, l’ancien gouverneur de la Banque centrale irlandaise, en ces termes : ‘‘Est-il vrai que la bulle immobilière a été gonflée par la recherche extrême de profits par les banques, les promoteurs et les actionnaires ? Que c’est ainsi que fonctionnent les marchés financiers capitalistes? Que cette idéologie est partagée par le gouvernement, par la majorité parlementaire ainsi que par la plupart des médias et des organismes de règlementation, dont les membres sont généralement recrutés dans le secteur financier? Et que l’idée prédominante est de ‘‘ne pas séparer le lion de sa proie’’ ?’’ A la grande surprise des journalistes, Honohan a bien dû admettre ‘‘Oui, c’est vrai’’.

    Joe a rejeté le rapport final de l’enquête et a présenté un rapport alternatif de 146 pages disponible en ligne à: http://antiausterityalliance.ie/wp-content/uploads/2016/01/banking-inquiry.pdf

  • [DOSSIER] Nouveaux mouvements, vieux dilemmes: réforme ou révolution ?

    SYRIZA-photoL’élection du gouvernement Syriza en février 2015 a été saluée par un soutien enthousiaste de la part de la classe des travailleurs en Grèce et dans toute l’Europe, qui s’est transformé en une amère déception après sa capitulation devant la Troïka en juillet dernier. Mais les inégalités et la politique d’austérité continuent à radicaliser des millions de personnes, ce qui fait germer de nouveaux mouvements de gauche. Paul Murphy (Socialist Party, section-sœur du PSL en Irlande et député de l’Anti Austerity Alliance) aborde dans ce dossier les importantes leçons à tirer de l’expérience grecque pour en finir avec le règne des 1%.


     

    « Selon moi, l’atmosphère est un peu similaire à celle d’après 1968 en Europe. Je sens, peut-être pas une ambiance révolutionnaire, mais quelque chose comme une impatience généralisée. Quand l’impatience n’est plus un sentiment individuel mais un aspect social, c’est l’introduction de la révolution. » [1]

    Ces paroles de Donald Tusk, le président du Conseil Européen, sont révélatrices. Elles démontrent la peur croissante des classes capitalistes en Europe. La domination en apparence incontestée du néo-libéralisme depuis la chute du stalinisme est maintenant vigoureusement contestée dans un certain nombre de pays capitalistes avancés. La profonde crise actuelle du capitalisme, qui a commencé fin 2007, se solde politiquement par des virages à gauche dans les points de vue et la conscience ainsi que dans le développement de nouvelles formations de gauche.

    La révolte dans les urnes

    La crise a créé des problèmes politiques significatifs pour la classe capitaliste, en particulier dans la périphérie de l’Europe, là où elle est la plus brutale. La crise est si profonde et si longue que, dans la plupart des pays, les deux faces de la pièce politique ont été au pouvoir. Elles ont appliqué des politiques essentiellement identiques basées sur une profonde austérité, ce qui a fait s’effondrer, en particulier, le soutien des partis anciennement sociaux-démocrates, qui maintenaient encore une base électorale plus ouvrière.

    La chute des partis traditionnels en-dessous de 50% des voix dans 3 pays en est une illustration frappante – en Grèce, où la Nouvelle Démocratie et le PASOK ont obtenu 34% à eux deux aux dernières élections ; en Espagne, où le PP et le PSOE ont obtenu un score combiné de 49% aux élections européennes de l’an dernier et en Irlande où, aux dernières européennes, le Fianna Fail, le Fine Gael et le parti Travailliste ont aussi récolté moins de la moitié des suffrages. Récemment, aux élections législatives du Portugal, alors que le Parti Social-Démocrate et le Parti Socialiste ont encore réalisé le score de 70,9%, cela représente tout de même une baisse de 7,6% et les voix combinées de la gauche radicale sont passées de 5,4% à 18,5%. Les classes capitalistes en Europe font de plus en plus l’expérience de leur propre crise de représentation politique et elles éprouvent des difficultés à trouver des instruments politiques stables pour assurer leur règne.

    La crise et les mouvements contre l’austérité qui se sont développés en particulier dans la périphérie de l’Europe ont aussi accéléré le procédé de création de nouvelles formations de gauche avec des bases de soutien significatives. Ce phénomène n’est bien entendu pas nouveau. Il a émergé depuis le virage à droite dramatique des prétendus sociaux-démocrates, aux environs de l’effondrement de l’URSS et du stalinisme. C’est un processus qui progresse en vagues et qui a vu la montée (et souvent la chute) entre autres de Rifondazione Communista en Italie, du Scottish Socialist Party en Écosse, de Die Linke en Allemagne, du Bloco de Esquerda au Portugal, de l’alliance Rouge Verte au Danemark et de Syriza en Grèce.

    La nature prolongée de la crise a donné un élan à ces mouvements. Cela a été le plus visiblement démontré par la propulsion de Syriza au pouvoir en Grèce, début 2015. En parallèle, il y a eu la montée en flèche de Podemos en 2014. La victoire de Jeremy Corbyn aux élections pour la direction du Parti Travailliste en Grande Bretagne et la performance de Bernie Sanders aux primaires Démocrates aux Etats-Unis sont aussi des expressions de ce processus.

    Un aspect frappant de cette vague de nouveaux mouvements politiques est la manière extrêmement diverse dont le même phénomène s’exprime dans différents pays. A ce stade, comme de l’eau ruisselant entre des berges préexistantes, les mouvements orientés vers une représentation politique de la classe des travailleurs s’écoulent dans des canaux déjà en partie créés par différents paysages politiques nationaux et traditions de la classe des travailleurs.

    C’est ainsi qu’en Grèce, l’élan s’est développé derrière Syriza, une alliance autour d’un noyau de tendance euro-communiste. De 4,7% aux élections européennes de 2009, la formation est grimpée à 36,3% en janvier 2015 et est entrée au gouvernement. En Espagne, où Izquierda Unida (Gauche Unie, rassemblée autour du Parti Communiste) était, surtout dans certaines régions, identifiée aux à l’establishment politique, elle n’a pas bénéficié du même processus. Au lieu de cela, avec l’explosion du mouvement social des Indignados, il s’est exprimé dans une nouvelle force, Podemos, fortement construite autour de la personnalité de Pablo Iglesias.

    Corbyn et Sanders piochent dans la montée de la radicalisation

    L’effet Corbyn en Angleterre et au Pays de Galles est le plus intéressant de tous. Le Parti Travailliste y avait profondément viré à droite sous la direction de Tony Blair et avait été vidé de toute implication réelle des masses de travailleurs et de pauvres. Ce parti avait franchi le Rubicon pour devenir un parti tout à fait capitaliste, même s’il conservait de son passé certaines caractéristiques, comme un lien formel avec les syndicats et un petit nombre de parlementaires se réclamant du socialisme, comme Jeremy Corbyn.

    En raison d’un système électoral particulier, aucun parti de gauche ou travailliste important n’a émergé en Angleterre et au Pays de Galles pour devenir le lieu de rassemblement de ceux qui cherchent une alternative à l’austérité. C’est pourquoi, quand Jeremy Corbyn a présenté sa candidature, initialement considérée comme sans espoir, et qu’il a commencé à défendre une politique fondée sur des principes de gauche anti-austerité, sa campagne a reçu une énorme réponse de la part des jeunes et de la classe des travailleurs. Elle est devenue un flambeau et a su développer un incroyable élan, avec plus de 100.000 nouvelles personnes inscrites comme sympathisants officiels du Parti Travailliste et 60.000 nouvelles adhésions officielles au parti depuis le début de la campagne.

    Pendant ce temps, aux USA, un élan sans précédent s’est développé autour de Bernie Sanders, dans le cadre de primaires destinées à décider du prochain candidat aux élections présidentielles au sein d’une organisation qui n’a jamais été un parti ouvrier. Le Parti Démocrate a toujours consciemment agi pour rassembler autour de lui les mouvements sociaux ainsi que les syndicalistes en les détournant ainsi du besoin urgent de lutter de la base et de construire un parti qui représente la classe des travailleurs. Cependant, Sanders, en se présentant comme socialiste démocrate auto-proclamé (en citant les pays scandinaves comme modèle) a, à l’instar de Jeremy Corbyn, su trouver un écho auprès de millions de travailleurs et de jeunes en-dehors de l’appareil du Parti Démocrate. Ses rassemblements ont attiré les plus grandes foules de ces élections présidentielles (souvent plus de 10.000 personnes et près de 30.000 à Los Angeles). Dans les sondages, il a considérablement réduit l’écart avec Hilary Clinton et les sondages en ligne ont montré qu’il a remporté les débats télévisés des primaires démocrates.

    Il sera extrêmement difficile à Sanders de remporter la nomination et, malheureusement, il a indiqué qu’il soutiendrait Hillary Clinton en cas de défaite, jouant donc précisément une fois encore un rôle de rassemblement des progressistes derrière le Parti Démocrate. Cependant, sa présence dans le débat, la discussion autour de ses idées et le nombre de personnes qui se sont joints à sa campagne peuvent marquer une étape importante dans les développement de la conscience de classe aux USA et dans la construction d’un parti de gauche de masse.

    Le réformisme aujourd’hui

    Ces développements sont énormément positifs. Ils représentent un pas qualitatif en avant vers la création de partis de masse de la classe des travailleurs qui peuvent constituer des instruments très importants pour la résistance des travailleurs contre les attaques austéritaires, en donnant un élan à la lutte de masse par la base. Ils peuvent aussi être le terreau pour le développement de forces socialistes révolutionnaires de masse, à la suite de l’expérience des luttes qui sera acquise par les masses et des discussions politiques.

    Les idées exprimées par les dirigeants de ces mouvements sont toutefois également dignes de critiques. Fondamentalement, toutes ces figures représentent et reflètent différentes variantes du réformisme. Le réformisme est la notion selon laquelle le capitalisme peut être graduellement démantelé pour, au final, qu’un société socialiste soit créée sans moment de rupture décisive – ou révolution – avec l’organisation capitaliste actuelle de la société.

    Le réformisme échoue à reconnaître que la classe capitaliste constitue la classe dominante au sein de la société. C’est le cas en premier lieu par sa propriété et son contrôle des ressources économiques cruciales de la société, mais aussi en étant liée par un millier de ficelles à l’appareil d’État, c’est à dire le judiciaire, les « corps d’hommes armés » dans l’armée et la police et le gouvernement permanent qui existe sous la forme des échelons les plus élevés de la fonction publique.

    L’Histoire du mouvement ouvrier a démontré que si la classe dominante sent que son pouvoir, sa richesse, et ses privilèges sont menacés, alors elle n’hésitera pas à recourir au sabotage économique ou même aux coups d’État militaires, comme cela s’est produit au Chili en septembre 1973 quand le gouvernement élu de Salvador Allende a été renversé. Aujourd’hui, en Europe, les gouvernements de gauche potentiels ne vont pas seulement devoir faire face à cette menace de la part de leur classe capitaliste autochtone mais également de la part des institutions pro-capitalistes de l’Union Européenne.

    Alors que, dans toute l’Europe, les partis réformistes de masse stables étaient une caractéristique du paysage politique de l’ère de croissance économique qui a suivi la deuxième guerre mondiale, c’est une autre histoire aujourd’hui. Étant donné la nature de la crise, et, en fait, la nature de l’UE et de l’euro-zone, les limites du réformisme sont bien plus rapidement atteintes. Le capitalisme ne dispose plus des réserves de “graisse sociale” qu’il avait dans la période d’après guerre et qui permettaient aux gouvernements social-démocrates de beaucoup de pays européens d’instaurer des réformes considérables dans l’intérêt de la classe ouvrière tout en restant au sein du système capitaliste. Il n’y a pas non plus de croissance importante des prix matières premières, comme ceux qui ont permis à Hugo Chavez et à son gouvernement d’augmenter le niveau de vie des masses au Venezuela sans pour autant mettre fin au contrôle de l’économie par les oligarques.

    Au lieu de cela, si n’importe lequel des nouveaux mouvements de gauche prend le pouvoir aujourd’hui, alors la question de la confrontation ou de la capitulation se posera très rapidement. Ce n’est pas une question simplement théorique comme nous l’a illustré les récents événements survenus en Grèce sous le gouvernement dirigé par Syriza. Il faut étudier l’expérience de Syriza au pouvoir car c’était un laboratoire de l’application d’une stratégie réformiste particulière en Europe au stade actuel. Cette expérience continuera d’être un point de référence pour les travailleurs et les militants de gauche dans toute l’Europe dans leur tentative de développer une stratégie capable de réussir à en finir avec l’austérité et le règne des 1%.

    Syriza au pouvoir

    Le 25 janvier 2015, pour la première fois depuis la chute du stalinisme, un gouvernement dirigé par la gauche a été élu en Europe. Des ondes de choc de panique se sont propagées dans tout l’establishment politique Européen et la classe capitaliste. 239 jours plus tard, le même gouvernement a été ré-élu, avec une abstention record, mais cette fois, il a été bien accueilli par les journaux et les dirigeants politiques européens. Entre ces deux élections ont pris place de véritables montagnes russes d’événements politiques qui ont comporté les héroïques 61% du Oxi (Non) des masses grecques face au chantage de l’austérité ou de la sortie de l’euro lors du référendum de juillet 2015 mais aussi la capitulation de la direction de Syriza à la terreur de la Troïka.

    L’expérience de Syriza livre d’importantes leçons pour tous les mouvements qui luttent pour un changement socialiste. Ces leçons ont coûté très cher, à la classe ouvrière et aux pauvres de Grèce en particulier. Pourtant, on a assiste dans toute la gauche européenne et mondiale à des tentatives d’amoindrir ces leçons tout en enjolivant les erreurs de la direction de Syriza. Cette approche se retrouvent parmi ceux qui partagent largement une orientation stratégique similaire à celle de la direction de Syriza.

    Léo Panitch, co-éditeur du journal de gauche Socialist Register, a été à la pointe de cette défense. Il a écrit, peu de temps après l’acceptation du Mémorandum d’austérité de 13 milliards d’euros par Syriza : «Nous espérons que Syriza pourra rester unie en tant que nouvelle formation politique socialiste la plus efficace dans la gauche européenne qui a émergé ces dernières décennies. Le rôle d’une gauche responsable est de soutenir cela, tout en continuant à montrer les faiblesses du parti en termes de manque de capacité à construire sur les réseaux de solidarité. (…) Étant donné notre propre faiblesse en cette matière, une patience et une modestie considérables sont requises de la part de gauche internationale alors que nous regardons se dérouler ce drame.” [2]

    L’essence de cette idée est que l’on ne peut critiquer les autres forces de la gauche à travers le monde avant d’avoir atteint leur niveau d’influence dans la société. C’est une approche profondément anti-internationaliste et qui se situe dans la droite ligne de celle des partis communistes stalinisés dans les années 1920 et ensuite.

    Si cette approche était acceptée, la gauche internationale entière serait simplement condamnée à répéter, l’une après l’autre, les erreurs des autres. Il est tout à fait approprié de tenter d’analyser et de critiquer l’approche stratégique des autres à gauche dans différents pays, tout en maintenant bien sûr l’humilité et le sens des proportions nécessaires.

    Un échec de « l’européanisme de gauche »

    Ce qui s’est produit en Grèce – un gouvernement de gauche qui trahit son mandat et son programme – représente une défaite pour les travailleurs de toute l’Europe. Les politiciens et les médias de droite du continent ont immédiatement sauté sur l’occasion de renforcer le mur “TINA” (pour “There is no alternative”, il n’y a pas d’alternative, slogan cher à Margaret Thatcher) qui avait vacillé avec l’élection de Syriza.

    Mais s’il s’agit d’une défaite pour la gauche dans son entièreté, il est important de reconnaître que ce n’est pas la conséquence de la faillite des idées de la gauche dans leur ensemble. Il faut plutôt y voir l’échec dramatique du réformisme, et en particulier de sa version dominante en Europe, connue comme «l’Européanisme de gauche».

    La stratégie de l’européanisme de gauche applique l’approche graduelle du réformisme à l’Union Européenne. Il adopte le point de vue que l’UE pourrait, par les victoires de la gauche dans les différents pays, être transformée en un projet plus social. C’est une conception qui sous-estime complètement la haine de classe et la cruauté de la Troïka et de Merkel.

    Plus important encore, il comprend mal le caractère réel de l’UE, qui a été si brutalement démasqué par la crise et la réaction de ses institutions dirigeantes. La construction européenne est structurellement néo-libérale, le néo-libéralisme est dans son ADN, il est inscrit dans le traité de Maastricht, dans le  pacte de stabilité et de croissance , dans le Six Pack et le Two Pack (deux «paquets législatifs» européens de 2012 et 2013 respectivement). Le néo-libéralisme constitue l’essence-même du fonctionnement de l’euro et de la Banque Centrale Européenne.

    L’Union Européenne est aussi fondamentalement non-démocratique. Le pouvoir repose dans les mains d’institutions non-élues et qui ne répondent de rien, comme la Commission Européenne et la Banque Centrale Européenne. Les règles ont été écrites de telle façon que tout gouvernement de gauche qui transgresserait les règles de l’austérité se trouverait condamné et perdrait son droit de vote sur des questions importantes. Ce n’est que la position légale formelle – la position réelle est encore plus anti-démocratique. La BCE a auparavant mené deux coups d’État silencieux, en Grèce et en Espagne. Elle en a dans les faits mené un nouveau contre le peuple grec, mais cette fois avec la complicité de Tsipras, en utilisant sa capacité à créer la panique bancaire pour pousser à la capitulation.

    Des relations de plus en plus impérialistes se développent au sein de l’UE entre les classes capitalistes dominantes du centre, en particulier la classe capitaliste allemande, et les États périphériques. Cela se voit notamment dans la servitude dans laquelle la Grèce se trouve maintenant de facto vis-à-vis de sa dette publique.

    En raison de cette conception stratégique de l’européanisme de gauche adoptée par les dirigeants de Syriza et leurs conseillers politiques, ils sous-estiment considérablement leur ennemi. Concrètement, ils pensent que, par peur de la contagion économique, les créanciers pourraient accorder d’importantes concessions. Ils ont lié Syriza à une stratégie visant à rester dans l’euro à tout prix. Ainsi, quand ils se sont retrouvés le révolver sur la tempe avec la menace d’être vraiment exclus de la zone euro, ils ont senti qu’ils n’avaient d’autre option que de battre en retraite.

    Xekinima, la section grecque du Comité pour une Internationale Ouvrière, a averti que le principal danger pour la classe capitaliste européenne n’était pas la contagion économique, mais la contagion politique. Cela s’est confirmé. Les élites capitalistes européennes sont partantes pour prendre le risque d’une contagion économique de façon soit à renverser Syriza, soit à l’humilier pour dissuader les autres et que cela leur serve de leçon.

    L’expérience de Syriza est une justification par la négative des éléments-clé d’une approche révolutionnaire. Elle souligne le besoin, pour un gouvernement de gauche, de rompre avec les règles de la zone euro, de l’UE et du capitalisme ; la nécessité d’une stratégie de confrontation, plutôt que de compromis, avec l’UE ; la nécessité de préparer la rupture avec la zone euro, au lieu de faire tout son possible pour rester dedans ; tout cela au sein d’un programme socialiste basé sur la mobilisation par en-bas pour s’attaquer au pouvoir de la classe dominante locale, pour lutter en faveur de l’annulation de la dette, pour instaurer un contrôle des capitaux et pour établir la propriété publique des banques et des autres secteurs-clé de l’économie sous contrôle démocratique des travailleurs. Cela illustre une approche internationaliste de lutte capable de faire une brèche dans l’Europe vers le développement d’une confédération d’États socialistes démocratiques comme étape vers une Europe socialiste.

    Réaction face à la défaite de Syriza

    La capitulation et la défaite de Syriza ont provoqué un important débat parmi la gauche européenne. La réponse de Podemos en Espagne a malheureusement été un tournant de son programme plus à droite, Pablo Iglesias continuant à défendre la capitulation de Syriza comme étant «réaliste».

    Ce virage peut assez bien cadrer dans le discours délibérément ambigu qui façonne le projet de Podemos depuis ses débuts. Il est basé sur les travaux du post-marxiste Ernesto Laclau et de la notion qu’au lieu de construire un mouvement de classe, on peut construire une majorité sociale en utilisant des «signifiants vides» – comme la notion de « ceux d’en bas » – contre la caste politique. Dans les mains de certains membres de Podemos, cela est utilisé pour défendre que ce qui est construit n’est ni de gauche ni de droite, ce qui abouti à un manque de clarté politique. La réaction de la direction de Podémos à la capitulation de Syriza a été une des raisons de la chute de Podemos dans les sondages de 30% à environ 15%.

    D’un autre côté, il y a aussi un déplacement à gauche, vers des positions plus critiques envers l’UE et l’euro-zone, sans rompre fondamentalement avec la logique du réformisme. Le tournant à gauche et la position plus euro-critique de la direction du Bloc de Gauche au Portugal est un exemple de cette tendance et a contribué à doubler leur score aux élections générales. Un autre exemple est la scission de Syriza, Unité Populaire, menée par Panagiotis Lafazanis, qui, avec 2,9% des voix seulement, a manqué de peu d’avoir des représentants élus au parlement grec.

    Ces développements au niveau national se reflètent aussi dans les débats au sein de la gauche européenne. Une lettre ouverte intitulée « Plan B pour l’Europe » a été lancée par Jean-Luc Mélenchon, dirigeant du Front de Gauche en France. Elle a été co-signée par Oskar Lafontaine, personnalité dirigeante de Die Linke, l’ancien ministre des finances grec Yanis Varoufakis, et Zoé Konstantopoulou, l’ancienne présidente du parlement grec, et a depuis été signée par trois parlementaires de l’Anti-Austerity Alliance en Irlande. Elle exprime la conclusion tirée par une partie de la gauche européenne que rester dans le carcan de l’euro à tout prix signifie renoncer à la possibilité de remettre en question la domination du néo-libéralisme.

    «Face à ce chantage, nous avons besoin de notre propre plan B pour dissuader le plan B des forces les plus réactionnaires et anti-démocratiques de l’Europe. Pour renforcer notre position face à leur engagement brutal pour des politiques qui sacrifient la majorité au profit des intérêts d’une infime minorité. Mais aussi pour réaffirmer le principe simple que l’Europe n’est rien d’autre que les Européens et que les monnaies sont des outils pour soutenir une prospérité partagée, et non des instruments de torture ou des armes pour assassiner la démocratie. Si l’euro ne peut pas être démocratisé, s’ils persistent à l’utiliser pour étrangler les peuples, nous nous lèverons, nous les regarderons dans les yeux et nous leur dirons : « Essayez un peu, pour voir ! Vos menaces ne nous effraient pas. Nous trouverons un moyen d’assurer aux Européens un système monétaire qui fonctionne avec eux, et non à leurs dépens». [3]

    Ce sont des développements importants. Ils représentent un défi à la domination de l’européanisme de gauche au sein de la gauche européenne, avec plus d’espace pour critiquer cette approche et indiquer un tournant à gauche. Cependant, ils ont toujours des limites considérables. Cela ne représente pas fondamentalement une rupture avec le réformisme.

    Les erreurs de la gauche de Syriza

    De nouveau, il est utile de revenir à l’expérience de Syriza et en particulier de la gauche de Syriza pour voir ce réformisme euro-critique plus à gauche en action. A un niveau formel, la Plate-forme de Gauche, qui est devenue Unité Populaire, avait un programme qui reproduisait beaucoup d’aspects du programme de Xekinima en Grèce. Il appelait ainsi à la préparation de la sortie de l’euro, à l’annulation de la dette de la Grèce, à la propriété publique des banques et à un programme de reconstruction de l’économie en accentuant l’investissement public. Mais l’appel pour un changement socialiste de société était le grand absent.

    La perspective d’une personnalité dirigeante de ce groupe, Costas, Lapavitsas, telle qu’exprimée dans le livre qu’il a co-écrit avec Heiner Flassbeck et publié juste avant la venue de Syriza au pouvoir, s’est totalement confirmée : « Il y a, ainsi, une sorte de « triade impossible » à laquelle ferait face un gouvernement de gauche dans la périphérie. Il est impossible d’avoir à la fois les trois choses suivantes : premièrement, obtenir une vraie restructuration de la dette ; deuxièmement, abandonner l’austérité ; et troisièmement, continuer à opérer dans le cadre institutionnel et politique de l’UE et en particulier de l’Union Économique et Monétaire (…) Ce serait une folie pour un gouvernement de gauche d’imaginer que l’UE blufferait sur les questions de la dette et de l’austérité (…) Si un gouvernement de gauche tente de jouer le bluff, il échouerait très rapidement. »[4]

    Malgré cette perspective, ils n’étaient pas du tout prêts à la rapidité et à l’échelle de la trahison de la direction de Syriza. L’approche de la Plate-forme de gauche envers la direction de Syriza est un miroir de l’approche de celle-ci envers l’UE. Tandis que Tsipras a échoué à préparer Syriza à la nature du conflit avec les institutions de l’UE et du besoin de rompre avec l’euro, Lafazanis n’a pas réussi à préparer la Plate-forme de Gauche à la probable capitulation de Tsipras, à un conflit avec lui et à une rupture avec Syriza.

    Une des conséquences est qu’au premier vote sur les mesures d’austérité, la plupart des parlementaires de la Plate-forme de Gauche ont voté pour ou se sont abstenus – ce qui a semé la confusion. Ils ont persisté dans leur rhétorique d’unité de parti avec Syriza après qu’il soit devenu clair que Tsipras était déterminé à chasser la gauche du parti et à reconstruire Syriza comme un parti d’austérité.

    Pourquoi ces erreurs ont-elles été commises ? Comme avec Tsipras, ce n’est pas une question de faiblesses ou d’échecs individuels. C’est une question politique. Cela est notamment lié aux méthodes d’organisation de la Plate-forme de Gauche. Celle-ci ne fonctionnait pas comme devrait le faire une organisation révolutionnaire, avec un cadre formé qui discute démocratiquement des perspectives, du programme et de la stratégie. Au contraire, elle reproduisait la culture du cercle dirigeant qui existait chez Syriza. Elle était aussi trop prise au piège dans Syriza et dans le parlement, ne faisant pas assez attention à ce qui prenait place au dehors.

    Mais cette structure organisationnelle est aussi connectée à sa politique parce que beaucoup de ses stratèges-clé étaient aussi issus d’une tradition essentiellement euro-communiste de gauche. L’euro-communisme est une tendance qui est devenue dominante dans les partis communistes européens dans les années ’70 et ’80, en partie en réaction aux horreurs du stalinisme mais aussi pour s’adapter aux pressions capitalistes dans leurs propres pays. Cela a fait que des partis comme les PC en France et en Italie sont devenus concrètement des partis ouvertement réformistes.

    Il nous faut des politiques socialistes

    Dans la Plate-forme de Gauche et dans la gauche en Europe en général, l’idée que le moment est aux «gouvernements anti-austérité» en opposition au changement socialiste est très répandue. Cependant, même un «gouvernement anti-austerité» préparé à sortir de l’euro devrait toujours faire face au même dilemme entre confrontation et capitulation. Comme Rosa Luxemburg l’expliquait en 1898 dans «Réforme ou Révolution», ces deux choix ne sont pas deux voies différentes vers un même point, ils aboutissent à deux endroits différents.

    Les forces de l’UE n’arrêteraient pas leurs attaques tout simplement parce qu’un pays est sorti de l’euro. La classe dominante locale intensifierait probablement ses attaques, ce qui s’est vu par exemple en Grèce avec les rumeurs d’une possibilité de coup d’État si le pays sortait de la zone euro. Un gouvernement qui serait conséquent dans son anti-austérité devrait inévitablement appliquer des mesures de type socialiste pour défendre l’économie et les s99% contre les attaques des 1% nationaux et mondiaux.

    L’absence de reconnaissance que la lutte pour rompre avec l’austérité requiert un mouvement pour un changement socialiste n’est pas seulement une omission théorique. Cela a permis de mettre l’Unité Populaire au pied du mur, d’en faire un simplement un parti anti-euro dans la campagne électorale. Dans son analyse post-électorale, l’Union Populaire a reconnu que défendre la rupture avec l’UE était «difficile à expliquer de manière convaincante au milieu d’une campagne électorale (…) en ayant toutes les forces systémiques contre nous», ce qui a été un facteur considérable dans leur échec à franchir le seuil électoral des 3% pour entrer au parlement.

    Alors que les Grecs étaient prêts à voter Non, malgré les avertissements terribles sur la possibilité de quitter l’euro, la perspective de revenir à la drachme n’a pas mis la majorité en confiance. Lier la rupture avec l’euro à un changement socialiste fondamental serait nécessaire pour montrer comment un tel changement pourrait être géré – y compris en plaçant cela dans le contexte de la lutte pour un changement révolutionnaire dans toute l’Europe.

    Alors que les institutions européennes espéraient que la défaite de Syriza ferait reculer la gauche pour longtemps, la profondeur de la crise capitaliste est telle qu’ils n’ont pas obtenu l’effet escompté. Au lieu de cela, les développements politiques en direction des nouvelles forces de gauche continuent et s’accélèrent. Après une période de défaites et de revers, le test des idées dominantes au sein de ces forces sur l’expérience des événements est une partie inévitable de la clarification et du développement de forces révolutionnaires de masse.

    [1] Financial Times, July 16, 2015
    [2] http://www.socialistproject.ca/bullet/1140.php
    [3] http://www.counterpunch.org/2015/09/14/breaking-with-austerity-europe/
    [4] Heiner Flassbeck and Costas Lapavistas, Against the Troika: Crisis and Austerity in the Eurozone, Verso (London, 2015)

  • Irlande : Manifestation contre la répression politique

    jobstownprotest

    Aux dires des médias dominants, plus de 2000 personnes ont manifesté samedi dernier à Dublin contre la persécution de militants opposés à la nouvelle taxe qui vise à en finir avec la gratuité de l’eau en Irlande, une nouvelle mesure antisociale qui cristallise la colère contre la politique d’austérité. La résistance est grande, 57% des personnes concernées n’ont toujours pas payé leur première facture en signe de protestation. L’establishment capitaliste tente de faire taire l’opposition, notamment en poursuivant en justice plus de 27 activistes du quartier dublinois de Jobstown. Parmi eux figure le député Paul Murphy, élue de l’Anti Austerity Alliance (AAA), un front dans lequel est activement impliqué le Socialist Party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Irlande et parti-frère du PSL). Voici ci-dessous le discours qu’il a donné lors de la manifestation de ce samedi.

  • L'establishment irlandais à l'offensive contre la contestation – nous ne l'acceptons pas!

    jobstown1Hier midi, une dizaine de membres du PSL / LSP se sont rendus à l’ambassade irlandaise à Bruxelles afin d’y protester contre les poursuites judiciaires qui frappent 27 activistes irlandais, parmi lesquels le député Paul Murphy ainsi que des conseillers municipaux, suite à un action opposée à la nouvelle taxe sur l’eau. Une lettre de protestation a été remise à l’ambassade.

    Il y a quelques mois, une action spontanée avait eu lieu dans le quartier de Jobstown, au Sud-Ouest de Dublin, après qu’il ait été connu que la vice-première ministre Joan Burton (parti travailliste) se rendait dans le quartier. Elle a été bloquée dans sa voiture deux heures durant. Cette dernière a ensuite déposé plainte pour «privation de liberté». La police a pris cette plainte au sérieux et des militants ont été arrêtés chez eux, au petit matin, alors qu’ils étaient encore dans leur lit pour être interrogés. Maintenant, ils sont même poursuivis en justice. Nous ne sommes pas dupes, il s’agit très clairement d’une manière de criminaliser l’opposition à l’austérité. L’opération en cours est une véritable opération de police politique visant à atteindre l’opposition.

    La nouvelle taxe sur l’eau vise à en finir avec la gratuité de l’eau dans le pays. Cette mesure antisociale est particulièrement haïe dans le pays, elle a cristallisé toute la colère ressentie contre la politique d’austérité brutale imposée à la population des années durant. Une campagne de non-paiement massive a été lancée et, aujourd’hui, 57% de la population n’a toujours pas payé la première facture. Le gouvernement se trouve dans les cordes, et recours à la répression pour tenter de garder le contrôle de la situation.

    Demain, une manifestation prendra place à Dublin pour en finir avec la répression politique et pour exiger la relaxe des “27 de Jobstown”. Le PSL soutient bien entendu cette mobilisation.

    Tanja Niemeier, membre du PSL et ancienne collaboratrice de Paul Murphy alors qu’il était député européen, a déclaré : Nous nous montrons solidaires des 27 de Jobstown. Ces 27 activistes sont innocents. Le succès de la campagne de non-paiement menace la taxe sur l’eau et pourrait même faire chuter le gouvernement. Voilà les véritables raisons qui se cachent derrière cette persécution. Le gouvernement irlandais est confronté à un mouvement de masse qu’il ne contrôle pas. La population en a assez de l’austérité et a choisi de s’organiser pour lutter. La poursuite des 27 militants est politiquement inspirée, c’est une tentative agressive de criminaliser et d’intimider le mouvement. Nous exigeons le retrait des poursuites et dénonçons les visées politiques de la police.”

    Voici ci-dessous une vidéo et quelques photos.

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  • Irlande: Paul Murphy et 22 militants poursuivis pour une manifestation pacifique

    Le député, membre du Socialist Party et de l’Anti Austerity Alliance (AAA), est accusé de séquestration pour avoir protesté contre le taxe sur l’eau.

    Par des correspondants du Socialist Party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en république irlandaise et parti-frère du PSL)

    paulmedia-300x219Le soir du mercredi 12 août différents médias nationaux ont rapporté que des accusations formelles allaient être portées contre 23 habitants du quartier populaire de Jobstown, à Dublin, dont le député Paul Murphy et les conseillers municipaux Kieran Mahon et Mick Murphy, tous membres de l’Anti Austerity Alliance (AAA) et du Socialist Party. L’information a été divulguée à la presse avant même que les accusés n’aient été prévenus, probablement à la suite de fuites de la Gardai (la police irlandaise).
    Ces accusations sont liées à une action de protestation qui a pris place dans cette communauté en novembre 2014 (interview de Paul sur ce sujet, après les premières arrestations) au cours de laquelle un sit-in avait bloqué pour deux heures la vice-Première ministre, Joan Burton (Parti Travailliste). Les accusations comprennent des allégations de troubles violents, de dommages criminels et de séquestration! Ces accusations sont extrêmement graves, la charge de séquestration pouvant potentiellement être passible d’une peine de vie. Le dossier devra passer en procès face à un jury et non à juge. La date de la tenue de ce procès n’est pas encore claire, ce sera après les élections générales, mais il s’agira sans aucun doute d’un des procès politiques les plus importants de ces dernières décennies en Irlande.

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    Une loi pour les riches, une autre pour le reste…

    L’Anti Austerity Alliance condamne ces derniers développements très clairement politiquement motivés. Ils surviennent à un moment où les sondages d’opinions sont sombres pour l’équipe gouvernementale et où ses projets concernant l’imposition d’une nouvelle taxe sur l’eau se portent au plus mal. Le gouvernement irlandais a échoué au test Eurostat (qui devait prouver à l’agence de statistique européenne que la moitié des revenus liés à l’eau étaient issus des usagers, l’échec de ce test signifiant que les fonds alloués à l’entretien doivent être inclus dans la dette nationale, NDT) et le taux de non-paiement de la taxe sur l’eau est massif : 57% de la population n’a toujours pas payé la première facture !

    En février, 40 personnes de Jobstown ont été arrêtées en deux semaines lors de raids menés à l’aube par des forces policières en nombre excessif. Ces actions non conventionnelles visaient manifestement à terroriser le quartier pour s’être livré à une protestation efficace contre la «ministre de la protection sociale» (dirigeante du Parti travailliste, largement considérée comme coupable des attaques contre les couches les plus pauvres de la société; plus particulièrement contre les bénéficiaires de l’aide sociale et les parents isolés). Il s’agissait également d’envoyer un avertissement à la classe des travailleurs pour qu’elle ne suive pas l’exemple de Jobstown.

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    Action de protestation contre les accusations qui pèsent sur les “23 de Jobstown”

    Cette fuite d’informations vagues dans les médias est également destinée à distiller la peur, tout en contredisant la justification officielle qui avait été donnée aux perquisitions, selon motif fallacieux que les suspects étaient susceptibles de prendre la fuite.

    L’action de protestation à laquelle ces accusations se réfèrent a constitué l’un des événements les plus marquants du mouvement de masse contre la taxe sur l’eau qui s’est développé cette dernière année. Cette action avait impliqué 700 personnes du quartier, qui avaient convergé vers une école visitée par la ministre dès que la nouvelle de sa présence avait été connue le jour-même. Le rejet de la taxe sur l’eau s’est ajouté à la colère compréhensible existant dans ce quartier complètement abandonné par la classe politique depuis de nombreuses années et trahi par le Parti travailliste qui y disposait traditionnellement d’une bonne base de soutien.

    Ces événements de même que la réaction violente de l’establishment reflètent la polarisation croissante qui prend place dans la société irlandaise entre les personnes les plus touchées par les ravages de l’austérité et ceux qui en profitent. Cela démontre encore à quel point le Parti travailliste est devenu pourri. La perspective d’un procès comprenant la vice-Première ministre Joan Burton en tant que témoin clé contre des victimes de ses politiques d’austérité sauvages au cours d’un procès qui s’en prendra au droit fondamental de mener des actions de protestation renforcera encore la haine ressentie contre le Parti travailliste.

    Au côté de la communauté de Jobstown, L’Anti Austerity Alliance mènera vigoureusement campagne pour l’abandon de toutes les accusations portées contre les manifestants. Il s’agira d’un des thèmes majeurs que portera l’Anti Austerity Alliance durant les élections, avec la lutte contre l’austérité et la taxe sur l’eau. Si les choses iront effectivement jusqu’au procès, nous assurerons que le thème de l’austérité soit bien présent et que le droit de mener des actions soit défendu.

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    6 des “23 de Jobstown”. Banderole “Joan Burton et les travaillistes contre Jobstown et toutes les communautés ouvrières en lutte contre l’austérité”.

     

  • [VIDEO] Paul Murphy au camp de nos camarades grecs

    Durant le camp d'été de Youth Against Racism in Europe (YRE) et de Xekinima (section grecque du Comité pour une Internationale Ouvrière) en Grèce, un meeting a été consacré à la lutte anti-austéritaire en Europe. L'un des orateurs était Paul Murphy, parlementaire irlandais également membre du CIO.

  • Le parlementaire irlandais Paul Murphy s'exprime sur la tragédie grecque de ces derniers jours

    Samedi dernier, nos camarades du Socialist Party ont tenu un meeting à Belfast concernant la Grèce. Paul Murphy, élu au Parlement d'Irlande du Sud.

  • Irlande : Condamnation du chantage de la Troïka contre la Grèce au Parlement

    A l'image du gouvernement Michel, le gouvernement irlandais a rejoint le camp de la Troïka. Au Parlement irlandais, notre camarade Paul Murphy (Socialist Party, section irlandaise du Comité pour une Internationale Ouvrière) a pris la parole pour dénoncer cette attitude du gouvernement qui a "poignardé le peuple grec dans la poitrine et le peuple irlandais dans le dos." Solidarité internationale avec les travailleurs et les jeunes grecs! Non à l'Europée capitaliste, pour une Europe socialiste!

    "Depuis tout ce temps, l'approche de l'establishment européen a été de parvenir à un des deux buts suivants: soit faire chuter le gouvernement grec et le remplacer par un autre plus docile, soit l'humilier et donner le message qu'il ne peut y avoir d'alternative, soit le renforcement du dogme thatchérien pour stopper tout autre force dans la périphérie ou ailleurs en Europe de défier le dogme néolibéral."

  • Arrestation d’activistes en Irlande : Interview de Paul Murphy

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    Plus d’une vingtaine d’activistes anti-austérité ont été arrêté une journée durant en Irlande, à partir du lundi 9 février dernier (voir nos articles à ce sujet). Parmi eux se trouvaient plusieurs mineurs d’âge, ainsi que le député Paul Murphy. Jeudi dernier, plus de 1.000 personnes se sont réunies face au ministère de la Justice pour protester contre ces arrestations éminemment politiques. Dans cette interview, réalisée pour le site socialistworld.net, le député de l’Anti-Austerity Alliance (AAA) et du Socialist Party (section irlandaise du Comité pour une Internationale Ouvrière et parti-frère du PSL) Paul Murphy nous parle de cette vague d’arrestations qui a frappé le milieu des opposants à la taxe sur l’eau.

    Plusieurs activistes ont été arrêtés dans le cadre de leur implication dans la campagne contre la nouvelle taxe sur l’eau qui vise à mettre fin à la gratuité de l’eau dans le pays. Pourquoi ne vous a-t-on pas simplement envoyé une citation à comparaître ?

    Vous pouvez tous nous arrêter, nous ne reculerons pas!
    Vous pouvez tous nous arrêter, nous ne reculerons pas!

    La procédure normale est effectivement de contacter les témoins ou les suspects et de convenir d’un rendez-vous pour un interrogatoire. C’est en tout cas ce traitement qui a été appliqué aux politiciens corrompus et aux banquiers interrogés ces dernières années au cours des enquêtes liées à l’effondrement du système bancaire. Comparer les traitements réservés aux super-riches et aux activistes contre la taxe sur l’eau est extrêmement révélateur des véritables priorités de la classe dirigeante et de la nature de l’Etat. Récemment encore, il a été révélé que des milliards d’euros sont cachés en dépôt dans des comptes bancaires secrets suisses détenus par des citoyens irlandais, à la banque HSBC. Les autorités irlandaises ont décidé de ne pas poursuivre ces fraudeurs alors que les grands moyens ont été utilisés pour charger les manifestants opposés à la taxe sur l’eau.

    Environ 100 agents de police ont arrêté une vingtaine de personnes pour avoir participé à une manifestation qui a bloqué la voiture de la vice-première ministre quelques heures, parmi lesquels trois élus de l’Anti-Austerity Alliance (AAA) et des militants locaux. La police est intervenue au domicile des militants, avant 7 heures du matin, les sortant de leurs lits pour les arrêter en face de leurs familles. Il s’agit clairement d’un acte politique destiné à criminaliser les manifestants et à décourager les gens de participer aux actions de protestation dans la période à venir. On a pu lire dans les médias que la police a l’intention de poursuivre les arrestations un certain temps. Parmi les personnes arrêtées, on trouve des adolescents de 14, 15 et 16 ans qui se préparaient à se rendre à l’école quand la police a débarqué chez eux. Cela instaure un climat de peur dans les quartiers où vivent ceux qui ont participé à la manifestation.

    Quelles sont les accusations retenues contre eux ?

    Les manifestants ont été arrêtés sous l’accusation de ‘‘séquestration’’. Il s’agit d’une accusation très grave qui revient quasiment au même qu’un enlèvement. La peine encourue peut atteindre les 15 ans de réclusion. S’ils s’appuient sur cela, ils n’iront nulle part. Mais ils peuvent encore faire appel à d’autres accusations comme infraction à l’ordre public.

    Quel est le contexte politique derrière ces arrestations ?

    Rassemblement de solidarité avec les militants arrêtés.
    Rassemblement de solidarité avec les militants arrêtés.

    Cette répression n’est pas arrivée par accident. La nouvelle taxe sur l’eau a conduit à une véritable explosion sociale ces derniers mois. En octobre, 100.000 personnes ont manifesté dans les rues de Dublin contre la taxe et d’autres manifestations de masse ont suivi en novembre et décembre. De très nombreux groupes locaux se sont organisés pour développer la campagne contre la taxe.

    En avril, les premières factures doivent parvenir aux ménages. Nous les invitons à boycotter ces factures, à refuser de les payer. Un boycott de masse instaurerait une sérieuse pression sur le gouvernement. L’enjeu est sérieux, et le gouvernement le sait. Voilà la raison derrière ces arrestations : tenter d’endommager le mouvement.

    Le Premier ministre irlandais, Enda Kenny, a déclaré que les actions de protestations concernent bien plus que la taxe sur l’eau. C’est au moins une chose sur laquelle nous pouvons être d’accord avec lui. Depuis 6 ans, une austérité des plus vicieuses a frappé le pays, imposée par les gouvernements irlandais successifs et par la Troïka. Les conditions de vie des travailleurs ont gravement été érodées. Les services publics ont été dévastés, les écoles et les hôpitaux sont en crise profonde. Le nombre de sans-abris atteint des records. Les plus vulnérables ont été les plus durement touchés, des milliers de personnes ont été plongées dans la pauvreté. La jeunesse a été poussée à émigrer à la recherche d’un meilleur avenir à un point inédit depuis la Grande Famine qui a touché le pays au milieu du 19ème siècle. Une gigantesque colère a ainsi été construite et la taxe sur l’eau, sans mauvais jeu de mot, a été la goutte qui a fait déborder le vase.

    Ce mouvement est une menace majeure pour l’establishment politique pro-austérité. Le gouvernement tombera très certainement si cette taxe peut être vaincue. Il est crucial de complètement changer la situation pour rendre extrêmement difficile à tout autre gouvernement de poursuivre l’application des politiques d’austérité. La chute du gouvernement actuel constituera un atout majeur pour l’avenir en ayant donné confiance dans la résistance active contre l’austérité et dans la lutte pour un autre type de société, où les besoins de la population seraient prioritaires.

    L’Irlande peut-elle rejoindre la Grèce et l’Espagne dans la lutte contre l’austérité ?

    La presse internationale se fait l’écho de la fable selon laquelle l’Irlande serait la ‘‘succes story’’ de la Troïka. C’est ce que veulent nous faire croire la Commission européenne, le gouvernement irlandais et les gouvernements austéritaires européens. Ce n’est tout simplement pas le cas. L’économie irlandaise se trouve dans une situation très précaire et la dette connait un record. Le remboursement de la dette publique et des intérêts paralyse l’économie : 8 milliards d’euros y sont consacrés chaque année.

    Parfois, on peut même entendre dans la presse internationale que les Irlandais se sont pliés de bonne grâce à la ‘‘médecine dure’’ de la Troïka. Encore une fois, c’est un mensonge. L’opposition à l’austérité a été massive mais, malheureusement, un mouvement de masse n’a jamais pris corps, en grande partie à cause du rôle de frein joué par les dirigeants syndicaux.

    L’élection du gouvernement Syriza en Grèce et la croissance de la gauche dans les sondages en Espagne a donné un véritable coup de fouet au mouvement contre la taxe sur l’eau et contre l’austérité en Irlande. Toute cette idée selon laquelle il n’y aurait pas d’alternative à l’austérité a reçu une claque sévère.

    Cela a ouvert un large débat au sein du mouvement contre la taxe sur l’eau au sujet de ce qui est possible à réaliser en termes d’alternative. Il est essentiel d’assurer que – à l’instar de ce qui s’est produit en Grèce et en Espagne – ce mouvement se traduise également politiquement. L’Anti Austerity Alliance veut relever ce défi politique en réunissant activistes locaux et militants syndicaux. Nous avons également appelé à ce que les divers groupes anti-taxe qui se sont développés à travers le pays considèrent également de présenter des candidats aux élections. Si cela se produit, l’opportunité d’une percée électorale importante serait réelle et cela représenterait un grand pas en avant dans la construction d’une voix politique pour la classe des travailleurs dans les années à venir.

  • La police irlandaise utilisée contre les protestations anti-austérité, mais la résistance se développe

    paularrested-300x160Ce lundi, le député irlandais Paul Murphy (élu de l’Anti Austerity Alliance et membre du Socialist party, le parti-frère irlandais du PSL) a été arrêté de même que deux conseillers municipaux et un autre activiste (voir notre article à ce sujet). Le lendemain, quatre nouvelles arrestations d’activistes ont à nouveau eu lieu. Ce fut pareil le mercredi et le jeudi, des mineurs ont même vu la police débarquer chez eux pour les emmener au poste.

    A chaque fois, les militants arrêtés ont été libérés après une journée en cellule. La police est utilisée dans l’objectif clair de tenter de briser la résistance de masse qui se développe depuis plusieurs mois contre la Taxe sur l’eau ou au moins pour essayer de miner le soutien au mouvement. Une instrumentalisation aussi ouvertement politique de la police est remarquable.

    La répression ne s’arrête pas là. Lorsque, de retour au Parlement, Paul Murphy a voulu interpeller le Premier ministre irlandais au sujet de cette action policière, il a été immédiatement réprimandé par le président du Parlement, qui a même exigé que l’on coupe le micro de Paul. Ce sont là des tentatives désespérées de mettre fin à une résistance anti-austérité tout à fait légitime. Mais le soutien aux militants arrêtés se développe. L’acteur Russell Brand a notamment publié une vidéo dans laquelle il proteste contre l’arrestation de Paul et appelle à soutenir la campagne de boycott de masse de cette taxe qui représente une nouvelle charge de plusieurs centaines d’euros par an pour chaque ménage.

    La presse francophone a également fait écho à cet événement. Nous avons déjà parlé sur ce site de l’article du Monde (En Irlande, l’Alliance anti-austérité rêve de marcher dans les pas de Syriza et Podemos), mais il y a également eu des articles sur le site de l’Humanité (Paul Murphy arrêté), d’Europe1 (Irlande : AAA, ce parti anti-austérité sur les traces de Syriza) et du site lepetitjournal.com (POLITIQUE – Paul Murphy arrêté hier matin par la Garda).

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