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Tag: Paul Murphy
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Une attaque contre l’un d’entre nous est une attaque contre nous tous

Action de protestation à l’ambassade irlandaise, 23 avril 2017. Photo : Socialisme.be Parler de la répression d’Etat fait tout d’abord penser à des pays tels que la Turquie ou le Maroc, des régimes autoritaires qui persécutent quotidiennement leurs opposants. Mais la tendance des élites dirigeantes à renforcer leurs outils de répression pour faire face à la contestation sociale est bien plus générale. En France, la ‘‘Loi travail’’ avait poussé des centaines de milliers de personnes dans les rues à plusieurs reprises en 2016. La répression avait été féroce et, aujourd’hui, les procès de militants se succèdent tandis que les manifestations contre les violences policières s’enchaînent, notamment autour du cas du jeune Théo qui révélait sur BFMTV, début février : ‘‘Je l’ai vu prendre sa matraque : il me l’a enfoncée dans les fesses, volontairement’’.
Par Nicolas Croes
En Belgique, à l’occasion de la journée internationale contre les violences policières (le 15 mars), la Coordination des sans-papiers et la campagne ‘‘Stop Répression’’ s’étaient associées pour dénoncer la répression policière et le racisme d’État lors d’une manifestation. Le texte de plateforme dénonçait à juste titre la manière dont de nouvelles mesures sécuritaires adoptées par le gouvernement Michel sont utilisées pour criminaliser les sans-papiers et réprimer le mouvement pour leur régularisation.
Ainsi, le 19 septembre dernier, l’évacuation du collectif la Voix des Sans Papiers à Molenbeek s’est déroulée avec des dispositifs policiers sans précédent, avec hélicoptère et armes lourdes, pour déloger quatorze personnes désarmées! La campagne posait très justement la question suivante : ‘‘Avec cette instrumentalisation de la notion de terrorisme, qui nous dit que demain un syndicaliste ne pourra pas être également condamné pour incitation au terrorisme parce qu’il s’oppose aux réformes injustes du gouvernement??’’ A ce titre, le procès contre les manifestants de Jobstown en Irlande peut constituer un dangereux précédent.Jobstown not guilty
L’Irlande a récemment connu une lutte titanesque contre une taxe visant à en finir avec la gratuité de l’eau dans le pays. Comme l’expliquait le quotidien français Le Monde (10 février 2015) : « Alors que les premières factures doivent tomber en avril et coûteront plusieurs centaines d’euros par an aux ménages, les campagnes appelant au non-paiement sous le mot d’ordre ‘‘No way, we won’t pay’’ (‘‘pas question, on ne paiera pas’’), essaiment à travers le pays. Du jamais vu depuis l’indépendance en 1922. Pas même au plus fort de la crise financière. Car l’eau cristallise tout le reste. Coupes dans les dépenses publiques, baisse des salaires, augmentation des impôts : la rigueur budgétaire – dont le pays est officiellement sorti en octobre – a demandé trop d’efforts aux Irlandais. Le taux de chômage a certes baissé, mais avoisine toujours les 10,7 %. Et, alors que le gouvernement les serine avec la reprise économique, une grande partie des 4,5 millions d’habitants n’en ressent toujours pas les effets’’. ‘‘Les 99 % de gens ordinaires voient qu’on fabrique une reprise pour les 1 % de riches aux dépends du reste de la population qu’on continue à saigner’’, tance Paul Murphy. Le député a encore sa carte au Parti socialiste (trotskiste), qu’il a intégré à l’âge de 18 ans.’’
L’article avait été publié au lendemain de l’arrestation excessivement musclée de Paul Murphy et de divers activistes opposés à la taxe sur l’eau le 9 février qui avaient participé à un sit-in devant la voiture de la vice Première Ministre, en 2014, dans la localité de Jobstown (près de Dublin). Avec leur détention provisoire, l’establishment irlandais visait à criminaliser le mouvement social et à affaiblir la résistance à la taxe sur l’eau. Depuis lors, les autorités ont été forcées de reculer et la loi a été suspendue. Mais l’establishment tient à sa revanche et ces activistes sont aujourd’hui inculpés de ‘‘séquestration’’ !
L’un d’entre eux, âgé de 15 ans au moment des faits, a d’ailleurs été condamné à l’automne dernier. Les 18 autres, tous adultes, ont leur procès le 24 avril prochain. Ils sont menacés de longues années d’emprisonnement. Parmi eux, se trouve Paul Murphy, député irlandais de l’Alliance Anti-Austérité (AAA, devenue depuis lors Solidarity) et du Socialist Party, tout comme Mick Murphy et Kieran Mahon, conseillers municipaux de Solidarity.
Le message est clair. C’est une tentative d’intimidation de toutes celles et tous ceux qui veulent résister à ses politiques et lutter pour une autre société : ‘‘courbez l’échine ou vous risquez la prison’’. S’il advenait qu’ils soient condamnés, ça serait un véritable recul des droits démocratiques à manifester en Irlande. Un pas supplémentaire pour faire taire le mouvement ouvrier et social et essayer de le briser. Mais ce serait aussi un précédent alarmant pour les luttes sociales à travers l’Europe.
Une campagne de soutien, d’abord en Irlande, mais aussi au niveau international, s’est organisée autour de #JobstownNotGuilty (Jobstown non-coupable), rejointe depuis lors par Jean-Luc Mélenchon (candidat de la France Insoumise aux élections présidentielles), Angela Davis (militante des droits de l’homme, professeur de philosophie et militante communiste américaine), Noam Chomsky (linguiste et intellectuel anticapitaliste), Yanis Varoufakis (ancien ministre grec des Finances),…
En Belgique, elle a été rejointe par Eric Toussaint (CADTM), Peter Mertens (président du PTB), Michel Genet (Directeur Politique d’ECOLO), Zoé Genot (députée régionale ECOLO, Présidente de groupe au parlement régional bruxellois), Muriel Gerkens (députée fédérale ECOLO), Rudy Janssens (Secrétaire fédéral CGSP Bruxelles), Silvio Marra (ancien délégué FGTB des Forges de Clabecq),…
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Irlande. L’Etat veut museler la campagne Jobstown Not Guilty

Les accusés de Jobstown sont apparus bâillonnés à l’Assemblée pour la justice. Photo: Jobstown Not Guilty L’Assemblée pour la justice défie les tentatives visant à réduire l’opposition anti-austérité au silence
Le 29 mars dernier, un nouvel événement dramatique a vu le jour dans le cadre de l’offensive autoritaire de l’État irlandais.
Par Danny Byrne, Comité pour une Internationale Ouvrière
Cette offensive vise à criminaliser l’opposition et les actions de protestation, tout particulièrement l’emblématique manifestation de Jobstown contre la taxe sur l’eau et l’austérité qui a retardé la voiture de la vice-première ministre Joan Burton durant une courte période au cours d’une visite du quartier ouvrier de Jobstown, à Dublin, en 2014. Pour avoir participé à cette manifestation, 18 personnes – parmi lesquelles le député de Solidarity (anciennement Anti-Austerity Alliance) et membre du Socialist Party (section irlandaise du Comité pour une Internationale Ouvrière) Paul Murphy et d’autres membres du Socialist Party – font face à des accusations forgées de toutes pièces pour «false imprisonment» (détention arbitraire ou séquestration). Le procès devrait débuter le 24 avril et, en cas de condamnation, les accusés sont passibles d’une peine de prison à vie.
C’est en réponse à cet outrage que la campagne «Jobstown Not Guilty» (Jobstown Non Coupable) a été créée, afin d’exiger l’abandon des charges et de mener une campagne publique pour défendre la vérité au sujet de ce qui est arrivé lors de cette manifestation de Jobstown, en défendant l’innocence des accusés.
La campagne a mobilisé une large solidarité en distribuant quantité de tracts expliquant la vérité sur cette affaire et en mobilisant pour un rassemblement – une «assemblée pour la justice» – à Dublin le 1er avril. Les personnes issues de la classe ouvrière ont été indignées par cette attaque flagrante contre le droit de mener des actions de protestation et contre la lutte historique contre la taxe sur l’eau et l’austérité. Le soutien dont bénéficie la campagne est très large.
Les autorités saisies de peur
Cette campagne et la menace d’une entrée en action de la classe ouvrière et de sa radicalisation représentent un cauchemar pour l’establishment. Les autorités avaient espéré trainer les accusés de Jobstown devant les tribunaux et ensuite les envoyer en prison rapidement, en faisant le moins de bruit possible. A mesure que la campagne gagnait en élan et en écho, des centaines d’affiches annonçant la «l’Assemblée pour la justice» déployées à travers le centre-ville de Dublin, les autorités ont été saisies de peur, elles voulaient désespérément faire taire ceux qu’ils visent à envoyer injustement en prison.
Le 29 mars, le «directoire des poursuites pénales» (DPP) a convoqué les accusés au tribunal sous les 24 heures pour leur signifier que la campagne Jobstown Not Guilty violait l’intégrité de la cour. Il a cherché à étendre les conditions de mise en liberté des accusés en leur interdisant de participer à la campagne, d’assister à des événements de protestation et même de se prononcer sur l’affaire en public ou sur les médias sociaux ! L’idée est bien entendu d’interdire aux accusés de sensibiliser le public au sujet de cette attaque historique contre le droit de protester.
Le DPP a demandé que les accusés soient contraints de respecter ces restrictions faute de quoi ils seraient immédiatement emprisonnés. Cela leur signifierait de passer sous les verrous toute la période qui nous sépare du procès et pendant le procès lui-même, qui devrait s’étaler sur au moins six semaines. Présenter aux accusés un tel ultimatum, et un préavis de 24 heures, était clairement une tentative de les forcer à se soumettre.
Ces derniers ont toutefois fait preuve d’une remarquable détermination, en indiquant clairement qu’ils estimaient totalement inacceptables ces conditions draconiennes, qu’ils les refusaient et qu’ils étaient prêts à aller en prison pour défendre leur droit de proclamer leur innocence face à ces accusations inventées de toutes pièces.
Il s’agissait d’une tentative d’en finir avec la campagne Jobstown Not Guilty, de briser la dynamique autour de l’Assemblée pour la justice et de miner l’efficacité de la campagne d’information. Mais les choses se sont toutefois retournées contre l’establishment de toutes les façons possibles.
Le député Paul Murphy a déclaré le 30 mars, avant la tenue de l’Assemblée pour la Justice : ‘‘Nous avons réagi à cette dernière attaque contre le droit de protester comme nous le faisons toujours : en exerçant ce droit. En conséquence de cela, le DPP a abandonné sa demande d’extension des conditions de mise en liberté sous caution. Au lieu de cela, nous avons pris l’engagement limité que si nous allions assister à l’Assemblée pour la justice et y prendre la parole, nous ne mentionnerons pas le procès. D’autres auraient à parler de notre campagne. Dès que cette assemblée sera terminée, nous serons libres d’à nouveau mentionner le procès, tant que nous n’interférons pas avec l’administration de la justice, ce qui n’a jamais été notre intention. Nous continuerons notre implication active dans la campagne d’information Jobstown Not Guilty.’’
Cela signifie que l’Etat ayant eu un aperçu de l’indignation de masse suscitée dans les 48 heures par cette demande du DPP, a préféré – temporairement au moins – éviter d’imposer ces nouvelles conditions draconiennes de caution. Tout cela illustre de manière plus limpide que jamais la nature antidémocratique de cette affaire.
L’Assemblée pour la Justice
Le 1er avril, plus de 700 personnes se sont réunies dans le très emblématique local syndical ‘‘Liberty Hall’’ de Dublin. Ce fut une brillante démonstration de force, un défi militant envoyé vers les couloirs du pouvoir.L’événement a été ouvert par l’arrivée des accusés, alignés et portant des baillons, qu’ils ont ensuite déchiré et jeté à terre sous les applaudissements. L’événement a été électrique, une effusion massive de colère, de solidarité et de détermination, avec une solide participation ouvrière. Des figures de renom des médias, de la culture et du sport ont rejoint à la tribune des syndicalistes, des militants du droit au logement et des socialistes.
Paddy Hill, des fameux «6 de Birmingham» et Paul Murphy se sont distingués par leurs contributions lors de ce meeting de 3 heures constamment ponctué d’ovations. Paddy Hill a fait 16 ans de prison après avoir été condamné à perpétuité avec 5 autres Nord-Irlandais pour des attentats commis dans des pubs de Birmingham en 1975. Il s’agissait d’une affaire montée de toutes pièces par les autorités britanniques et leurs condamnations ont été annulées en 1991.
L’après-midi a réuni différents courants de résistance ainsi que différentes communautés et luttes ouvrières conscients de la pertinence et de l’importance de cette lutte historique.
Quelque chose de pourri dans l’Etat ?
L’establishment est embourbé dans la crise, son autorité et sa crédibilité sont gravement compromises. Les forces de police sont tout particulièrement au centre de celle-ci. Ces derniers mois, les actualités n’ont pas manqué d’histoires consacrées à la corruption et au népotisme qui sévit au sommet de la police, la commissaire en chef Noreen O Sullivan étant spécialement en ligne de mire.
Mais l’éléphant dans le magasin de porcelaine, celui qui se trouve au centre de toutes ces crises, c’est l’affaire Jobstown. La même commissaire de la Garda (la police irlandaise) a été directement impliqué dans ce cas et a mis en place une équipe de 4 Gardai qui ont travaillé durant des mois pour tenter de criminaliser la protestation de Jobstown. Une opération d’espionnage a été lancée – l’opération Mizen, sous la direction du mari de la commissaire! – pour essayer de salir Paul Murphy et d’autres personnes impliquées dans la protestation de Jobstown et le mouvement plus large contre la taxe sur l’eau… Des millions d’euros puisés dans l’argent des contribuables ont été gaspillés pour s’en prendre à 18 activistes.
La hiérarchie de la Garda a ensuite divulgué que les manifestants allaient être accusés de détention arbitraire avant même que l’accusation n’ait été faite aux activistes.
Les accusés de Jobstown sont les victimes d’une sombre machine d’État qui perd le peu de respect et de légitimité dont elle dispose encore parmi la classe ouvrière et la jeunesse. À l’Assemblée pour la justice, Paul Murphy a défendu l’approche du Socialist Party selon qui une force de police alternative véritablement démocratique est un besoin de plus en plus pressant. La campagne Jobstown Not Guilty veut exposer la véritable nature de l’appareil répressif de l’État irlandais aux yeux de milliers de travailleurs et de jeunes réveillés par la lutte.
Une nouvelle phase de conflits sociaux
L’offensive de l’État sur le droit de protester et de s’organiser se produit au moment où les luttes sociales reprennent de plus belle. Une nouvelle phase de conflit social et de grèves s’ouvre en Irlande. Le 31 mars, le jour où les accusés de Jobstown contestaient au tribunal l’avis du DPP, le pays a connu une grève générale des transports, les travailleurs des chemins de fer et des autobus entrant ensemble en action en solidarité avec les grévistes de la société de bus Eireann, en grève depuis plus de dix jours maintenant. Les luttes ouvrières connaissent un renouveau, les travailleurs du secteur des transports ayant rejoint ceux de la vente au détail, de l’enseignement et d’autres encore qui sont entrés en lutte avec des méthodes de plus en plus combatives.
Si l’establishment parvient à ses fins avec ce procès, ce qui signifie qu’une protestation pacifique pourrait être considérée comme une détention arbitraire, de telles actions pourraient faire face à de pareilles accusations. Le droit de faire un piquet de grève ou même de manifester dans un centre-ville en retardant le trafic est menacé.
Une délégation de grévistes des transports en commun s’est d’ailleurs rendue en uniforme de son piquet de grève à l’Assemblée pour la Justice et a été accueillie avec certainement une des plus grandes acclamations de l’événement. L’un des principaux activistes syndicaux du conflit s’est adressé à la foule présente, de même que Jimmy Kelly, dirigeant du syndicat UNITE.
Une lutte décisive
Nous ne sommes encore qu’au début de ce combat qui peut être déterminant pour la suite de la lutte de classe en Irlande. Le Socialist Party, qui est membre de Solidarity – The Left Alternative (anciennement Anti Austerity Alliance) est au centre d’événements très significatifs qui peuvent constituer un tournant pour le développement d’une nouvelle gauche socialiste combative de masse. Notre vision socialiste du changement révolutionnaire a été le fil rouge d’une grande de l’événement de samedi, elle peut gagner l’oreille de beaucoup plus de gens dans les mois à venir.
Nous luttons pour réunir les luttes et les revendications de Jobstown Not Guilty, du mouvement féministe de masse pour le droits à l’avortement (toujours interdit en Irlande) et de la marée montante des luttes ouvrières en un mouvement politique visant à remplacer l’establishment décadent et la classe dirigeante irlandaise corrompue et arriérée par une réelle démocratie socialiste.
La classe ouvrière et la jeunesse, en Irlande et au-delà, devraient rendre hommage à Jobstown ; une petite communauté ouvrière courageuse, militante et déterminée. Cette communauté se tient aux côtés des accusés et lance un défi à la répression et à l’intimidation des autorités. Cela mérite l’attention et la solidarité des travailleurs, des syndicalistes, des jeunes et des socialistes à travers le monde.
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[INTERVIEW] Paul Murphy: “Le droit de protester est en danger en Irlande!”
Irlande : des activistes menacés de plusieurs années de prison
Il y a 2 ans, une manifestation spontanée a pris place à Jobstown – un quartier ouvrier de la banlieue de Dublin – à l’occasion de la visite de la Vice-Première ministre d’alors, Joan Burton (Labour Party, sociaux-démocrates). Durant la manifestation, sa voiture a été encerclée par les manifestants et elle a été retardée d’environs 2 heures. Suite à cette action, des charges ont été retenues à l’encontre de 18 ‘‘meneurs’’ pour séquestration, avec parmi eux Paul Murphy, le député de l’Anti-Austerity Alliance (Alliance Anti-Austérité) et membre du Socialist Party.
Merci de discuter avec nous, Paul. Tout d’abord, pourrais-tu nous expliquer pourquoi la présence de la Vice-Première ministre dans ce quartier a provoqué une telle réaction? Est-ce uniquement suite à la taxe sur l’eau ?
Paul : ‘‘Le Premier ministre a dit au sujet du mouvement contre la taxe sur l’eau que ce ‘‘n’est pas juste à propos de l’eau’’. C’est l’une des rares choses sur lesquelles nous pouvons nous mettre d’accord avec lui. Les raisons de ce mouvement contre les charges sur l’eau étaient terriblement profondes, dues au fait qu’elles arrivaient après des années d’austérité. La population a dû faire face à des pertes d’emplois, des jeunes se sont retrouvés forcés d’émigrer, les salaires ont été coupés et les services publics dévastés. Des centaines de milliers de personnes ont été plongées dans la pauvreté.
‘‘Le quartier où se tenait cette manifestation avait été particulièrement touché par les politiques d’austérité du gouvernement. Pour donner un exemple, la manifestation a eu lieu sur le parking d’une banque alimentaire.
‘‘Joan Burton était aussi ministre de la Protection sociale et elle a initié une guerre contre les personnes nécessitant une aide sociale, comme les parents isolés. Elle est aussi la dirigeante du Labour Party, qui s’était toujours dépeint comme un défenseur des travailleurs. C’est sur cette base que le Labour Party a reçu un soutien électoral massif à Jobstown. Le sentiment de trahison par ce parti est dès lors ressenti de manière très aiguë.’’
Quelles seraient les conséquences d’une condamnation des militants inculpés, notamment pour le mouvement contre l’austérité ?
‘‘Une accusation de séquestration, c’est très sérieux, c’est pratiquement du kidnapping. À la demande du procureur d’État, l’affaire a été portée devant une juridiction supérieure, ce qui signifie qu’en cas de condamnation, la peine encourue peut aller jusqu’à l’emprisonnement à vie. Il ne fait aucun doute quant au fait que si quelqu’un est condamné, il devra faire face à plusieurs années de prison !
‘‘Un jeune homme de 17 ans a, lui, déjà été condamné par la justice pour mineur. Le juge a expliqué qu’il est coupable parce qu’il s’est assis devant d’une voiture, qu’il avait encouragé d’autres à faire de même, qu’il a participé à une ‘‘marche lente’’, qu’il s’était momentanément tenu sur le chemin de Joan Burton en demandant à lui parler et qu’il a utilisé un mégaphone pour scander des slogans. Ce verdict est la preuve de l’élargissement dramatique de la définition de ‘‘séquestration’’ qui peut inclure de nombreuses formes de manifestations, c’est une attaque majeure contre le droit de manifester.
‘‘En plus de ça, si je devais être envoyé en prison pour plus de 6 mois, je serais exclu du parlement et je ne pourrais pas me présenter aux prochaines. C’est une attaque directe contre les droits démocratiques de ceux qui ont voté pour l’Anti Austerity Alliance.’’
Quand le gouvernement est tombé il y a deux ans, le Labour a subi une défaite électorale écrasante ; l’avenir de la taxe sur l’eau est incertain… Pourquoi est-il aussi important de chercher à faire condamner les manifestants ?
‘‘Le mouvement contre la taxe sur l’eau a réellement fait trembler l’establishment politique. Pour la première fois depuis l’éclatement de la crise économique de 2008, la classe ouvrière s’est soulevée et s’est organisée contre une mesure d’austérité majeure du gouvernement et elle a gagné.
‘‘Bien que les taxes n’aient pas été à 100% abolies, elles ont été suspendues et ce sera très difficile pour eux de les réintroduire. Suite à cela, les travailleurs ont été massivement boostés par le mouvement. Cela se voit dans une certaine mesure avec les grèves victorieuses menées dans les services de bus et de trams à Dublin. Les infirmières, les profs et les vendeurs sont également en train de mener des actions de grève en ce moment.
‘‘De plus en plus, la ligne officielle d’une reprise économique rentre en confrontation avec la réalité des gens qui se prennent toujours de plein fouet l’austérité avec des emplois plus précaires et des salaires bas. L’establishment capitaliste sait qu’il devra probablement faire face à plus de mouvements et de grèves. Du coup, il espère utiliser les procès de Jobstown pour envoyer un signal clair aux travailleurs: si vous manifestez, si vous faites grève, vous pouvez être criminalisés.’’
Comment les activistes sont-ils en train de construire une campagne contre ces attaques ? Comment peut-on construire la solidarité ?
‘‘Malgré les énormes tentatives de la part des médias de l’establishment et de la droite, il y a une opposition massive à l’idée que les gens soient poursuivis pour avoir participé à une manifestation. Nous devons aller à l’offensive et construire une campagne d’opposition active. Les inculpés et soutiens ont construit le groupe “Jobstown Not guilty” (Jobstown Non-Coupable) pour construire une telle campagne. Nous allons activement à la rencontre des gens pour exposer les faits autour de cette manifestation et discuter de la portée des attaques auxquelles nous faisons face. Nous recevons beaucoup de soutien. Beaucoup de sections des syndicats, de fédérations étudiantes et de communautés locales ont exprimé leur soutien à la campagne.
‘‘Nous avons également eu beaucoup de signes de solidarité internationale de syndicalistes, de représentants élus et de personnalités connues, dont beaucoup de Belgique. De tels signes de solidarité sont un élan majeur pour la campagne. J’encourage les gens à aller voir leur délégation syndicale et leurs organisations pour faire passer des motions et envoyer des messages de solidarité.’’
Si le mouvement contre la répression est victorieux et que les charges tombent, quel en serait l’impact ?‘‘Le gouvernement est dans une crise profonde suite à la révélation que des supérieurs de la police ont été impliqués dans une campagne de diffamation contre des policiers de rangs inférieurs ayant exposé la corruption existante. Cela a été jusqu’à répandre de fausses rumeurs d’abus sur des enfants. Il est probable que le Premier ministre soit poussé à la démission suite à ce scandale. Il y a un dégoût énorme et un questionnement envers l’establishment. Si nous gagnons sur Jobstown, cela soulèvera des questions sur qui sont exactement ceux qui ont décidé de mener les poursuites et leurs motivations politiques. Le rôle de la police, mais aussi des médias serait également questionné et exposé et cela affaiblira encore plus le gouvernement.’’
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Répression politique contre les activiste en Irlande: "une recette du totalitarisme"
Un manifestant de Jobstown reconnu coupable – Il faut résister contre les attaques sur nos droits démocratiques de base
Par une décision révoltante, un étudiant de 17 ans qui avait pris part à la manifestation de novembre 2014 contre la taxe visant à en finir avec la gratuité de l’eau en Irlande a été reconnu coupable d’avoir injustement “séquestré” la Première ministre d’alors et dirigeante du parti travailliste Joan Burton.
Matt Waine, Conseiller municipal de l’Anti Austerity Alliance (Alliance Anti Austérité (AAA)) et membre du Socialist Party
En novembre 2014, une action spontanée a eu lieu contre la taxe sur l’eau à Jobstown (Dublin) quand il a été révélé que Joan Burton avait l’intention de venir prendre la parole dans une école. Elle s’est retrouvée bloquée quelques heures dans sa voiture alors que des activistes locaux du mouvement contre la taxe sur l’eau protestaient à l’extérieur. L’un d’entre eux était notre camarade le député Paul Murphy (Socialist Party, Anti Austerity Alliance) et parmi la petite foule se trouvait également un activiste âgé de 15 ans au moment des faits. Peu de temps après, une vingtaine de militant contre cette taxe ont subi une descente de police chez eux et ont été brièvement arrêté. Vendredi dernier commençait le procès du plus jeune arrêté.
Presque 100 personnes s’étaient donc réunies vendredi dernier, très tôt, devant le tribunal de la jeunesse en espérant que, sur base des fort maigres preuves, le juge n’ait d’autre choix que de rejeter l’affaire. Les «preuves» dont il est question pour l’accusation de “séquestration” étaient les suivantes. 1) L’accusé aurait dit dans un mégaphone sur une scène « Joanie dans votre tour d’ivoire – faites face au pouvoir du peuple» 2) Il aurait déambulé sur les lieux du blocage. 3) Il s’est assis et a encouragé d’autres à s’asseoir eux aussi tout en agitant les bras. 5) Il a filmé Joan Burton en lui disant «parle-nous Joan».
Le juge a reconnu le manifestant coupable mais a fait passer une “décharge conditionnelle”, ce qui signifie qu’il n’y aura pas de peine tant que l’étudiant se comporte bien pendant 9 mois. Cette décision est révoltante et devrait être annulée.
Mais le précédent a été établi. Il est maintenant clair pour tout le monde que l’establishment se prépare aux procès de l’année prochaine, où le membre du parlement irlandais de l’AAA Paul Murphy et 17 autres feront face à des charges similaires. Ils préparent le terrain pour l’emprisonnement des manifestants. S’ils sont jugés coupables, il est probable que certains – si pas tous – risqueront l’emprisonnement. Si Paul Murphy est condamné à plus de six mois de prison, il sera démis de ses fonctions de parlementaire et perdra par la même occasion le siège qu’il a gagné au Parlement en tant que membre de l’Anti Austerity Alliance grâce à une vague de colère contre la taxe sur l’eau.
Tout ceci touche aussi la question de la criminalisation du mouvement contre l’austérité et la taxe sur l’eau. L’establishment politique souffre d’avoir dû reculer sur un point clé de son agenda d’austérité, la taxe sur l’eau. Il veut faire passer un message : voilà ce qui arrive quand on sort du rang. Cela vient aussi de leur peur grandissante face à une gauche qui attire l’attention de centaines de milliers de travailleurs et de jeunes dégoûtés et en colère en conséquence de sa brutale politique d’austérité. L’establishment capitaliste essaye maintenant de dépeindre comme des casseurs ceux qui, comme l’AAA et le Socialist Party, se sont soulevés et ont organisé un mouvement d’opposition de masse. Comme l’a déclaré l’avocat au procès, c’est une «recette du totalitarisme.»
Protestations contre la condamnation

Les députés de l’Anti Austerity Alliance – People Before Profit défendent le droit de mener des actions de protestation. Tout à gauche : Paul Murphy. La gravité de cette attaque ne peut être sous-estimée. Cette décision représente aussi une leçon importante pour les travailleurs et les syndicats. Ce dernier mois, le nombre de luttes industrielles et de grèves a sérieusement augmenté chez les conducteurs de bus et de trams ou encore chez les enseignants et à la police. Le gouvernement est sur la défensive. C’est le retour de flamme de leurs déclarations sur la reprise économique: les travailleurs exigent maintenant leur part de cette celle-ci. Les tribunaux et l’Etat recourront-ils à de telles actions en justice contre les grévistes ? Les travailleurs tenant des piquets de grève devant leurs sociétés vont-ils être jugés à tort coupables d’avoir séquestré leurs patrons ? Il faut répondre à cette attaque contre nos droits démocratiques de base par une sérieuse résistance.
« Jobstown not guilty » a appelé à la tenue d’une journée de protestation à travers l’Irlande et à l’échelle internationale pour ce samedi 29 octobre en solidarité avec le jeune étudiant et les dix-huit autres manifestants dont le procès commencera l’année prochaine ainsi que pour revendiquer la fin de cette agression contre notre droit démocratique de manifester.
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Un activiste mineur d'âge au tribunal en Irlande – Action de protestation à l'ambassade
Cet après-midi, des membres du PSL et d’autres activistes de gauche qui travaillent au Parlement européen ont mené ensemble une action de solidarité devant l’ambassade irlandaise à Bruxelles. Cette action visait à protester contre la condamnation potentielle d’un manifestant, mineur d’âge à l’époque des faits, poursuivi pour avoir participé à des manifestations contre la très détestée taxe sur l’eau qui a cristallisé la colère contre l’austérité dans le pays.
Rapport et photos de Liesbeth
Rafraîchissons-nous la mémoire. Ces actions ont eu lieu en Irlande en novembre 2014. Cette taxe sur l’eau est venue s’ajouter aux impôts traditionnels que les Irlandais paient déjà, notamment pour leur eau. En novembre 2014, la vice-Première ministre Joan Burton (parti travailliste) visite Jobstown, un quartier du Sud-Ouest de Dublin. Son passage ne pas inaperçu et elle se retrouve bloquée par des centaines de militants. Sa voiture s’est retrouvée immobilisée deux heures durant.
Des militants de gauche tels que le député européen Paul Murphy (Socialist Party, devenu depuis lors député du Parlement irlandais sous la bannière de l’Anti Austerity Alliance) étaient notamment présents et ils ont été visés par la répression au moment-même et par la suite. Un mineur d’âge était aussi présent, c’est son procès qui commence aujourd’hui. L’ancienne vice-Première ministre a donc été appelée à la barre pour témoigner contre un activiste mineur.
Notre action de solidarité vise à dénoncer ces faits. Dans la lettre de protestation que nous avons remise à l’ambassade, nous précisons que tout le monde a le droit de protester et que nous nous opposons tant à l’austérité qu’à la violence policière exercée contre les manifestants.
Au même moment, d’autres actions similaires ont pris place dans d’autres pays.
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École d'été du CIO. Exemples historiques du potentiel de la lutte de masse
Mais atteindre la victoire nécessite une organisation et des tactiques adéquates
L’école d’été annuelle de notre internationale, le Comité pour une Internationale Ouvrière, (organisée par les Étudiants de Gauche Actifs / Actief Linkse Studenten) comprend à chacune de ses éditions un meeting central qui aide à souligner quelques lignes centrales dans la foule des thèmes abordés au cours de ces 6 jours de discussion. Cette année, beaucoup d’attention a été accordée à l’instabilité mondiale mais aussi à quelques événements historiques d’importances. Cette année est en effet le centenaire des «Pâques Sanglantes», le soulèvement de Dublin de 1916. Mais nous fêtons également les 80 ans des développements révolutionnaires survenus en Espagne mais aussi en France en 1936. Avec ce meeting, le CIO tenait à souligner l’importance pour les travailleurs de disposer d’une politique indépendante des partis bourgeois. Notre camarade Geert Cool nous livre un rapport de cette discussion.
80 ans après la révolution espagnole
La première oratrice était Viki, une camarade de notre section espagnole. Elle est revenue sur quelques grandes lignes de la situation révolutionnaire qu’a connue l’Espagne dans les années 1930, les années 1936 et 1937 en constituant le point culminant. En 1931, les anti-monarchistes avaient remporté les élections et obtenu l’abdication du roi. Mais le gouvernement républicain n’a pas répondu aux attentes concernant la réforme agraire et de meilleures conditions de vie. Cela a conduit à une lutte radicale, avec notamment la Commune Asturienne et des mouvements de grève qui ont secoué toute l’Espagne. En 1936, les élections apportent le Front populaire au pouvoir. Les masses n’attendent pas les décisions d’en haut pour obtenir des changements, les travailleurs et les pauvres s’y mettent eux-mêmes. C’est ainsi que des ouvriers se sont mis à occuper les usines. Quand il est devenu clair que le Front populaire refusait d’armer les ouvriers et les paysans pauvres contre la menace fasciste, ils se sont armés eux-mêmes.
Le Front populaire était une initiative unitaire initiée par le sommet du Parti communiste, des sociaux-démocrates et de diverses forces libérales. Dans le cas de l’Espagne, ces dernières ne représentaient pas les «éléments progressistes» de la bourgeoisie, mais plutôt l’ombre de la bourgeoisie. Cette unité fut rendu possible par le tournant opéré par l’Internationale communiste stalinisée (la IIIe Internationale) qui avait mis fin à son cours ultra-gauche qui lui faisait s’opposer à tous les autres, y compris à la base de masse des partis sociaux-démocrates, pour adopter une approche contraire. Il fallait désormais rechercher l’unité avec les dirigeants non seulement de la social-démocratie, mais aussi avec toutes sortes de forces libérales. Selon le parti Communiste stalinisé, il s’agissait de la première phase de la lutte : tout d’abord vaincre le fascisme. Une deuxième phase de la lutte mettrait à l’ordre du jour la combat pour le socialisme. Cela a dans les faits signifié que le Front Populaire s’est retourné contre les aspirations révolutionnaires de la base de la société.
La soulèvement de Franco et des fascistes contre les masses révolutionnaires a finalement pu l’emporter, mais il a fallu des années. Sans la lutte héroïque des travailleurs et leur soutien international, Franco aurait probablement immédiatement pris le pouvoir. Les travailleurs ont développé leurs propres milices et même organisé leurs propres soins de santé. Barcelone a été reprise en 24 heures par ces milices agissant comme une véritable armée de libération sociale, ce qui a conduit à une situation de double pouvoir. La classe ouvrière avait le potentiel d’étendre et de consolider cette prise de pouvoir, mais elle s’est heurtée aux autorités du Front Populaire qui voulaient rester dans les limites du capitalisme. À cette fin, le gouvernement a brisé les milices ouvrières et a repris le contrôle de certains endroits stratégiques contre les travailleurs. A ce titre, la conquête sanglante de la centrale téléphonique de Barcelone en mai 1937 a constitué un point tournant. La centrale était gérée par les travailleurs, sous une forte influence du syndicat anarchiste CNT.
La situation est évidemment différente aujourd’hui. Mais nous devons tirer la leçon que les alliances et coalitions avec des partis capitalistes sont utilisés pour défendre les intérêts de la bourgeoisie et non pas ceux de la classe ouvrière. Des coalitions de forces de gauche avec des partis austéritaires pour au final appliquer elles-mêmes des économies budgétaires sont désastreuses pour les conditions de vie de la majorité de la population, et elles ne peuvent pas stopper l’extrême droite, au contraire. Mais il ressort de l’expérience espagnole de 1936 que la classe ouvrière dispose d’une puissance tout bonnement phénoménale. Pour peu qu’elle soit organisée et qu’elle développe sa propre alternative sur cette base, rien ne peut lui résister. Cela vaut toujours à l’époque actuelle.
100 ans après les «Pâques Sanglantes»
Le deuxième orateur était Paul Murphy, membre du Parlement irlandais et l’un des principaux dirigeants de la campagne contre la taxe sur l’eau. Des commentateurs de presse irlandais l’ont appelé le «Boris Johnson irlandais» à cause de son opposition à l’Europe du capital. La comparaison est bien entendu parfaitement erronée : il y a peu de choses en commun entre un populiste réactionnaire de Londres et un défenseur intransigeant des intérêts de la classe ouvrière.
Le soulèvement irlandais de Pâques 1916 était une révolte contre l’impérialisme britannique. Mais selon le dirigeant socialiste James Connolly, il pouvait également mettre le feu à la mèche d’une révolte européenne contre la guerre pour renverser la classe dirigeante brutale. La justesse de cette perspective ne deviendra apparente qu’un an plus tard, lorsque la Révolution russe a conduit à une vague révolutionnaire dans toute l’Europe. En Irlande aussi le soutien fut énorme pour la Révolution russe, avec des réunions de masse, des occupations d’usines et une période révolutionnaire qui allait durer jusqu’en 1923.
Malheureusement, le soulèvement de Pâques de 1916 était prématuré et la base sur laquelle il reposait trop limitée pour obtenir une victoire. Ses différents dirigeants ont été exécutés, parmi lesquels James Connolly. La classe ouvrière s’est donc retrouvée sans direction lors de la période révolutionnaire qui a suivi 1917. Connolly et ses associés étaient particulièrement impatients. Ils n’ont pas adopté de position politiquement indépendante de la classe ouvrière, mais ont au contraire soutenu une déclaration nationaliste bourgeoise. Connolly, qui était président du plus grand syndicat, n’a pas appelé à la grève générale parce qu’il savait qu’il serait isolé. Sa réaction peut se comprendre en raison du désespoir et de la désillusion consécutive à la trahison de la direction de la Deuxième Internationale qui avait décidé de rejoindre la barbarie de la guerre mondiale au lieu de s’y opposer.
Cela confirme par la négative tout l’intérêt pour un parti révolutionnaire de disposer d’une direction collective ainsi que la nécessité de l’internationalisme révolutionnaire. Au sein de la Deuxième Internationale, Connolly se tenait aux côtés de Lénine & Co mais, après 1914, il n’a plus eu aucun lien avec ses alliés dans d’autres pays. Il appartenait toutefois à cette petite minorité de dirigeants de gauche qui ne se sont pas compromis dans la trahison et se sont opposés à la guerre, à l’instar d’autres dirigeants tels que Lénine, Trotsky, Luxembourg, Liebknecht et l’Ecossais John MacLean. Connolly s’était précédemment prononcé contre l’adhésion de socialistes à des gouvernements capitalistes. Lors du congrès de la IIe Internationale de 1900, une discussion avait éclaté au sujet de la participation des sociaux-démocrates français au gouvernement de 1898. Pour Kautsky, il s’agissait d’une question de tactique et non de principe. Connolly lui a répondu que les masses révolutionnaires ne devait pas accepter de «fonctions gouvernementales qu’ils n’avaient pas obtenues sur base de leurs propres forces.»
Cette indépendance de la classe ouvrière est une question fondamentale pour la victoire des mouvements sociaux. C’est ce que nous avons encore pu constater dans le combat contre la taxe qui visait à en finir avec la gratuité de l’eau en Irlande. Tandis que d’autres ont recherché à conclure une unité par le sommet en essayant d’attirer des parties de l’establishment, nous avons défendu des méthodes radicales reposant sur la base en appelant à une campagne de non-paiement de la taxe dirigée par des activistes locaux. Avec actuellement 73% de la population ayant refusé de payer la dernière facture, il est clair que cet appel et l’organisation du boycott de masse a été d’une grande importance. La suspension de la taxe d’eau (survenue après la tenue des dernières élections anticipées) est une défaite majeure pour le gouvernement et une source de confiance pour la classe ouvrière. Cela instaure l’idée que des victoires sont possibles. Cela sera utile autour d’autres thèmes, comme au sujet du droit à l’avortement, toujours illégal en Irlande.
Une commentateur bourgeois a écrit dans un journal à diffusion nationale qu’une «petite clique de trotskystes clique qui défend ouvertement le renversement du système politique réussit à déterminer l’agenda politique.» Pour la classe dirigeante, notre position est en effet effrayante. D’où la répression que subissent les militants qui s’opposent à la taxe sur l’eau. En avril prochain se déroulera un procès contre les activistes de Jobstown. Ces militants, parmi lesquels Paul Murphy lui-même et deux conseillers locaux de l’Anti-Austerity Alliance, sont accusés de «séquestration» par l’ancienne vice-Premier ministre Joan Burton dont la voiture a été bloquée pendant deux heures à cause d’une manifestation spontanée. Les arrestations, survenues un mois après notre victoire lors d’une élection parlementaire intérimaire, étaient une manière pour l’establishment d’envoyer un signal clair : «n’allez pas plus loin!» Le procès d’avril prochain prévoit des peines allant jusqu’à l’emprisonnement à vie ! Nous mènerons campagne avec acharnement, tant en Irlande qu’au niveau international, contre cette répression politique. Comme Connolly l’avait fait remarquer : «Nous devons mettre en garde la classe dirigeante: vous pouvez nous emprisonner ou nous assassiner. Mais à partir de prison ou du cimetière, nous continuerons à construire la force par laquelle vous serez assommés. »
80 ans après la grève générale de 1936 en France
En 1936, la France a été agitée, dans une période de révolution et de contre-révolution, comme l’a noté Leila, de la Gauche Révolutionnaire. France avait été plus tardivement affecté par la crise mais elle a connu une explosion du nombre de chômeurs. Jusqu’à un million de Français sont devenus sans emploi. Cela a conduit à de grandes marches de chômeurs.
En février 1934, des milices fascistes ont tenté de prendre le pouvoir avec des groupes de droite. Ils ont marché sur le parlement. La journée fut marquée par des émeutes et des morts. Les contre-révolutionnaires ont éveillé le mouvement ouvrier et un mouvement antifasciste s’est développé. L’appel à une réponse forte contre la menace fasciste a été utilisé pour constituer un Front Populaire entre les dirigeants sociaux-démocrates et ceux du Parti communiste avec le Parti radical, un parti bourgeois.
Le Front Populaire n’a pas cherché à renforcer la lutte révolutionnaire pour un autre système, l’objectif était de sauver le système capitaliste et l’Etat bourgeois. Pourtant, de nombreux travailleurs se sont sentis encouragés par le Front Populaire et par le gouvernement du Front Populaire. Plus d’actions contre les patrons ont eu lieu. En mai 1936, un grand mouvement de grève a commencé au Havre après le licenciement de deux travailleurs. Ce mouvement de grève a été caractérisé par des actions de masse, y compris à l’initiative de travailleurs peu rémunérés. Les serveurs des cafés se sont par exemples mis en grève.
Le Premier ministre Léon Blum a reconnu que des concessions étaient nécessaires, d’autant plus que l’on craignait que la grève devienne un véritable mouvement révolutionnaire sur lequel les directions syndicales n’auraient plus de prise. L’élite dirigeante a pris peur parce qu’elle a pu voir de ses yeux la puissance du mouvement ouvrier. Les directions des partis communiste et sociaux-démocrates ont cherché à entraver la poursuite du mouvement à partir de leurs positions au gouvernement. Le Parti communiste a défendu que la révolution n’était pas à l’ordre du jour parce qu’il fallait tout d’abord combattre le fascisme.
La menace de la révolution a conduit à des concessions importantes telles que les congés payés, la semaine de travail des 40 heures et la reconnaissance des droits syndicaux. Le mouvement fut également une source d’inspiration pour d’autres mouvements, y compris le mouvement de grève générale révolutionnaire en Belgique en mai-juin 1936. Bien plus était possible à obtenir à partir du mouvement de grèves de 1936, mais il aurait alors fallu une direction révolutionnaire capable de mener le combat pour arracher le pouvoir des mains de l’élite capitaliste.
Apprendre des leçons du passé pour vaincre à l’avenir !
Le meeting a été clôturé par Peter Taaffe, du Secrétariat international du Comité pour une Internationale Ouvrière. Il a souligné l’importance d’étudier les mouvements du passé à tous les niveaux de notre organisation afin de renforcer le cadre de nos partis afin d’être en mesure de gagner la bataille. Dans une période turbulente telle qu’aujourd’hui, comme l’a encore illustré le coup d’Etat manqué en Turquie, d’autres développements sociaux importants ne sont pas inimaginables.
Aujourd’hui, la conscience, y compris parmi l’avant-garde du mouvement ouvrier, a considérablement reculé par rapport aux années 1930. A ce moment-là, l’idée de former une coalition avec des partis bourgeois était immédiatement assimilée à une trahison. La situation est différente aujourd’hui. Beaucoup peuvent considérer qu’une telle coalition serait un pas en avant, un moyen d’instaurer des politiques progressistes au moins partiellement. Nous avons besoin de regarder ces expériences historiques dans leur contexte, mais aussi d’en tirer les leçons pour aujourd’hui.
En France et en Espagne, nous avons vu en 1936 que les graines de la révolution étaient présentes. Trotsky avait fait remarqué qu’en Espagne il n’y avait pas eu une, mais au moins dix opportunités révolutionnaires. Ce potentiel n’a pas été exploité, à cause de la tactique du Front Populaire et d’autres facteurs. Selon Trotsky, le Front Populaire a agit comme un briseur de grève pour stopper la radicalisation du mouvement. Le caractère inachevé des révolutions de 1936 a fait dévier l’Histoire. Le massacre de la seconde guerre mondiale aurait pu être évité en cas de victoire de la révolution en France et en Espagne.
Une des principales raisons de ce caractère inachevé a été l’imposition d’un Front Populaire par en haut. La prise du pouvoir par les nazis en Allemagne fut un choc pour le mouvement ouvrier et a conduit à une aspiration unitaire. Trotsky a réitéré son appel au front unique: marcher séparément, frapper ensemble. En d’autres termes : unité d’action, tout en maintenant ses propres programmes et propositions. Au lieu de cela, le Parti communiste a préconisé une caricature d’unité, y compris avec les radicaux français envers lesquels les masses n’avaient à juste titre aucune confiance.
Les mouvements de 1936 ont été stimulés par le choc de l’arrivée au pouvoir du régime nazi en Allemagne, mais aussi par le contexte économique. Ainsi, les salaires des travailleurs français avaient diminué de 30% entre 1931 et 1936. En 1936, les partis du Front populaire recueillaient 5,5 millions de voix contre 4,5 millions pour la droite. Les radicaux avaient perdu un demi-million de voix, tandis que le Parti communiste avait doublé son résultat.
Le mouvement de masse en France était énorme: 500.000 personnes avaient participé à un rassemblement pour commémorer la Commune de Paris. Le mouvement de grève de mai et juin a impliqué 3 millions de travailleurs, soit bien plus que le nombre de syndiqués. Le Premier ministre Léon Blum s’est retrouvé dans une position difficile. Il a fait remarqué qu’il craignait être dans la même position que Kerenski en Russie et que la situation conduirait à l’arrivée d’un Lénine français.
Ce mouvement a eu un impact international, jusqu’en Allemagne. Tout d’abord, la presse allemande a parlé du «chaos» des grèves françaises. Mais quand les travailleurs ont commencé à prendre confiance et à se sentir enthousiasmés, toutes les nouvelles venues de France ont été censurées. Un mois plus tard à peine, la question du pouvoir était posée en Espagne. Une victoire dans ces deux pays aurait pu poser les bases d’une fédération socialiste, ce qui aurait eu un impact dans toute l’Europe et au-delà.
Il était alors possible aux travailleurs de prendre le pouvoir de manière relativement pacifique. Si cela n’a pas été le cas, cela est dû à l’attitude de la direction du mouvement ouvrier. Le Parti communiste a fait remarquer qu’il «fallait savoir finir une grève», slogan qui sera répété par le PCF en 1968. Pourtant, des concessions importantes ont été arrachées, même si celles-ci ont été rapidement minées par l’inflation. En 1938, la social-démocratie a disparu du gouvernement.
Les dirigeants du mouvement ouvrier ont à peine tiré les leçons de ces évènements. Au Chili, en 1973, les mêmes erreurs ont été répétées avec des conséquences sanglantes. Il est nécessaire d’être intransigeant en termes de coalitions et de refus d’appliquer la politique bourgeoise. Les coalitions avec les partis bourgeois sont similaires à la relation qu’un cavalier entretient avec son cheval, mais c’est la bourgeoisie qui est en selle et tient les rênes en mains. Mais il faut bien entendu toujours expliquer cette attitude de façon tactique. Il suffit de penser à la façon dont Lénine avait articulé ses slogans contre le gouvernement provisoire en Russie après février 1917: «A bas les 10 ministres capitalistes», plutôt que «A bas le gouvernement provisoire.»
Dans la nouvelle période d’instabilité mondiale et de recherche d’alternatives qui nous fait face, le mouvement ouvrier a d’énormes défis à relever. Fort de l’expérience du passé récent et un peu plus lointain, nous pouvons relever ces défis et développer dans ce cadre des tactiques combatives ainsi qu’un programme avec lequel nous pouvons vaincre.
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[DOSSIER] L'Union Européenne: un projet antisocial dès ses origines
Le modèle social européen «est déjà mort», comme l’a un jour déclaré Mario Draghi, le président de la Banque Centrale Européenne. La réalité de la crise économique, l’empressement avec laquelle le monde politico-économique s’en est servi pour aller vers toujours plus de néo-libéralisme ont piétiné l’illusion de la soi-disant «Europe sociale» promue par tous les sociaux-démocrates de la communauté européenne. Certains pourtant, y compris dans les rangs de ceux qui la critiquent, persistent à défendre le retour à une Europe meilleure et plus sociale.Le texte qui suit est issu de la brochure de PAUL MURPHY «TSCG, un traité qui rime avec austérité» écrite dans le cadre du référendum irlandais de 2012 consacré au Traité de Stabilité, de Coopération et de Gouvernance (TSCG), le pacte budgétaire européen. Paul Murphy était à l’époque député européen du Socialist Party (section irlandaise du Comité pour une Internationale Ouvrière). Il est aujourd’hui député au parlement irlandais.
Il s’agit encore d’une idée fausse. L’Union Européenne n’a pas été transformée, «l’Europe de l’Austérité» n’a pas pris la place de «l’Europe Sociale». La crise économique lui a au contraire permis d’apparaître sous son vrai jour maintenant que le capitalisme et ses représentants montrent leurs dents. Les divers textes législatifs ont, les uns à la suite des autres, façonné une Europe conçue dans l’intérêt du capital et non dans celui des travailleurs.
L’Union Européenne, que ce soit dans ces formes anciennes ou actuelles, n’a jamais eu vocation à être sociale. Il s’agit depuis toujours d’un club pour les capitalistes qu’elle représente et grâce auquel ils peuvent mieux apparaître sur le marché mondial. Sa création ne participe pas d’un processus élaboré à la base avec l’implication des travailleurs et à leur bénéfice. Comme l’a observé le révolutionnaire Léon Trotsky dès 1923 : «les forces de production capitalistes ont dépassé le cadre des Etats nationaux européens». A l’époque déjà, les classes capitalistes étaient à la recherche de plus grands marchés et souhaitaient obtenir un plus grand pouvoir politique.
La construction européenne eut pour premier déclencheur la fondation de la Communauté Européenne du Charbon et de l’Acier en 1951. Les capitalistes français, soutenus en cela par l’impérialisme US, entendaient contenir la domination allemande dans l’Europe d’après-guerre. Pour y parvenir, ils enfermèrent ce pays dans un projet de développement à l’Ouest du continent. On redoutait également la force du mouvement ouvrier, alors une menace pour le capitalisme en Europe. On espérait protéger le capitalisme de la révolution par la stabilité qu’apporterait le développement économique.
A mesure que le projet européen avançait, deux processus émergèrent pour satisfaire les besoins des classes capitalistes en Europe.
1. Par la construction d’un marché commun, dans lequel la libre circulation du capital et de la main d’oeuvre en Europe rendrait possible une pression à la baisse sur les salaires et les droits des travailleurs, tandis qu’elle s’emploierait à étendre le libéralisme.
2. Par une action commune sur la scène internationale en mutualisant les ressources fut-ce en sacrifiant une certaine souveraineté. Cette stratégie comporte deux volets: le premier consiste à accroître leur pouvoir pour mieux exploiter les peuples et les ressources dans les pays les moins développés, grâce à la possibilité de négocier en tant que bloc; les accords sur le libre échange en sont un bon exemple. Quant au second, il s’agit de concurrencer une Amérique sur le déclin tandis que la Chine commence à émerger. On retrouve cette préoccupation dans l’ensemble des documents rédigés par l’élite politique européenne au cours des dix années écoulées. Que cela soit dans ces formes anciennes ou actuelles l’Union Européenne n’a jamais eu de vocation sociale.
Conflits entre capitalistes européens
On observe des tensions entre ces deux objectifs clé, tout comme des conflits entre différentes formes de capitalisme. Du côté britannique, le lien spécifique avec l’impérialisme américain conduit à privilégier le premier aspect ; en France au contraire on insiste sur l’intégration politique et l’indépendance de l’Europe pour ne plus subir la main mise américaine. Cela eut pour conséquence l’opposition du président de Gaulle à l’entrée de la Grande Bretagne dans le Marché Commun en 1963 et, si elle y est parvenue ultérieurement, elle n’a jamais montré beaucoup d’enthousiasme dans sa participation (rappelons que ce texte a été écrit avant le vote du Brexit, NDLR).
Les tensions à ce propos ont toujours été de mise parmi les différents capitalistes d’Europe. On parle généralement pour cela d’une opposition entre l’approche «fédéraliste» et l’autre, «intergouvernementale». L’Allemagne pousse le plus souvent vers une Europe «fédérale» dans laquelle les principaux pouvoirs seraient attribués à la Commission Européenne et dans une moindre mesure au Parlement. A l’inverse les gouvernements français ont toujours insisté sur la nature intergouvernementale du projet. Ils cherchent ainsi à donner le pouvoir au Conseil Européen dans lequel chaque état membre est représenté. Ces différences illustrent tant la confiance du capitalisme français dans sa capacité à mieux négocier dans un cadre intergouvernemental que l’ambition allemande d’étendre sa domination à l’Est, d’où son besoin croissant en institutions fédérales.
On a vu les traités se succéder, chacun dépassant son prédécesseur pour rendre l’Europe encore plus néo-libérale. Le Traité de Maastricht et ses «Critères de Convergences» suivi du Pacte de Croissance et de Stabilité affichent la volonté de graver ce modèle dans le marbre, d’accélérer dans toute l’Europe les attaques contre les travailleurs par la réduction des dépenses publiques. Ce phénomène, tout comme le processus d’intégration politique et militaire prit de l’ampleur à Nice et à Lisbonne.
Malgré l’idée suggérée puis abandonnée d’une conscription européenne par les partisans du OUI à Lisbonne II, les establishments politiques doivent disposer d’une force militaire pour consolider leur pouvoir. Le président français Sarkozy a souligné ce concept sous-jacent en déclarant: «L’Europe ne peut à la fois être un nain en matière de défense et un géant économique.» Quant à Javier Solana, ancien Haut Représentant de l’UE, il a déclaré alors qu’il nommait un chef de l’Agence de Défense Européenne: «L’Europe a plus que jamais besoin de mettre son potentiel militaire à la hauteur de ses aspirations. Il nous faut aussi mieux répondre aux défis auxquels sont confrontés nos industries de l’armement. Cette Agence peut changer beaucoup de choses.»
Retardé par une large opposition des opinions publiques aux différents traités, ce processus s’est cependant poursuivi, celui de Lisbonne permettant d’établir des alliances militaires internes au sein même de l’Union,
Une Europe sociale?
Les aspects plus «sociaux» de l’Europe capitaliste comme les «Etats providence» et les droits des travailleurs, sont des réalisations d’après-guerre; non pas de généreux cadeaux offerts par le système économique, mais au contraire le fruit de luttes menées par un mouvement ouvrier relativement fort. Y compris dans les occasions où la transposition de la législation européenne au cadre national irlandais a par exemple permis d’améliorer la condition des salariés et des femmes, on doit y voir le résultat de luttes menées tant sur en Irlande que dans l’ensemble de l’Europe, et non un don octroyé par le système. De façon générale cependant, l’Union Européenne et ses leaders ont préféré travailler à leur réduction et à leur sape plutôt qu’à leur sauvegarde.
Ces vingt dernières années, les partis dits «sociaux-démocrates», comme le Parti Travailliste, le Parti Socialiste en France et le SPD en Allemagne ont connu une profonde mutation. Malgré une direction acquise au capitalisme, ils possédaient autrefois une base ouvrière ; ce n’est plus le cas aujourd’hui. Toutefois, si les directions ne se sont jamais réclamées d’une authentique transformation socialiste, ces partis offrirent jadis une réelle alternative à l’orthodoxie capitaliste.
Sous l’effet combiné de graves défaites ouvrières dans les années ‘80, comme la grève des mineurs britanniques, et de la chute du stalinisme, ces appareils se trouvèrent désorientés et effectuèrent un virage à droite significatif. Une fois perdu le lien avec la classe ouvrière, ils devinrent ouvertement des partis capitalistes. Les sociaux-démocrates ont mené des politiques néo-libérales dans toute l’Europe, minant les précédentes conquêtes que l’on pouvait dans une certaine mesure porter à leur crédit.
L’intégration européenne et la montée de ce que l’on appelle couramment le néo-libéralisme se sont déroulées simultanément. Le néolibéralisme a été porté par des économistes comme Milton Friedman et des chefs politiques comme Margaret Thatcher et Ronald Reagan. Dans les grandes lignes, l’idée est de prôner une intervention réduite de l’Etat, la privatisation des services publics, la réduction des dépenses sociales, tout ceci accompagné d’une politique monétaire donnant priorité au contrôle de l’inflation sur la lutte contre le chômage.
Pendant la crise des années ’70, ce courant de pensée devint majoritaire dans le camp capitaliste, tant dans les milieux universitaires que politiques. David Harvey en explique les causes dans son livre Une Brève Histoire du Néo-Libéralisme: «la baisse des profits a amené la classe capitaliste à augmenter le taux d’exploitation des travailleurs et à diminuer la part des salaires dans la répartition des richesses; il a également fallu ouvrir de nouveaux marchés, privatiser la santé et l’éducation.» (David Harvey, « Brève Histoire du Néo-Libéralisme », Oxford Press, 2005.)
Le lancement de l’euro
La création du Mécanisme de Maintien des Taux de Change en 1979, puis le lancement de l’euro comme monnaie commune en 1999 constituent d’autres étapes vers la construction de ce club pour capitalistes. De leur point de vue, ce processus servait un double objectif tant à l’intérieur qu’à l’extérieur.
A l’intérieur il devait mener à une plus grande intégration du le marché commun, par la baisse du coût des transactions et une meilleure rétribution du capital. Le néo-libéralisme se forgea une autre arme : il créa la Banque Centrale Européenne, qu’il voulut indépendante et donc libre de tout contrôle démocratique. On lui donna un rôle encore bien plus limité que celui de la Réserve Fédérale : en effet sa seule fonction consiste à limiter l’inflation, sans chercher à parvenir au plein emploi. Combler un déficit de compétitivité par la dévaluation étant devenu impossible, la pression sur les salaires et les conditions de travail se fit plus forte.
Autre idée, créer une nouvelle monnaie de réserve pouvant rivaliser avec le dollar sur les marchés internationaux; elle contribua à établir la primauté du capital financier et fit de l’Allemagne un élément clé dans ce système international.
Aujourd’hui encore, le processus d’intégration reste truffé de contradictions, traversé par les conflits entre les différents capitalistes d’Europe, car le capitalisme européen continue d’opérer au niveau national ; il repose sur des grandes entreprises implantées dans des états-nations particuliers, généralement celui où elles sont nées et qui représente leurs intérêts.
On a sans doute assisté à une «européanisation» du capital au moyen de fusions transfrontalières ; certaines entreprises ont d’ailleurs accru leur activité dans un pays différent du leur.
Concrètement, cette tendance s’est traduite par la création de lobbies agissant au niveau de l’Union telle La Table Ronde des Industriels, même si dans leur majorité les grosses entreprises restent liées à un Etat en particulier.
Ces contradictions sont devenues un facteur prépondérant dans la crise économique ; l’absence d’union politique et fiscale d’une part, la divergence plutôt que la convergence économique de l’autre ont contribué à les exacerber. Sous l’effet de la crise, on a vu apparaître – en plus de l’opposition capital/travail – des conflits à l’intérieur même de la classe capitaliste dont les intérêts ne sont pas homogènes.
Et la démocratie?
La démocratie n’est jamais été l’apanage du projet européen, conçu par les élites politiques et économiques, auquel les peuples n’ont jamais été associés. A son stade actuel, il rappelle beaucoup les propos de Friedrich von Hayek: à une époque, ce théoricien du néo-libéralisme défendit ardemment la perspective de l’intégration ; il y voyait un effet un moyen de réduire la capacité d’intervention des Etats dans l’économie.
Comme l’a expliqué Peter Gowan : « Pour Hayek, les problèmes de l’Europe prennent leur source dans la montée de la souveraineté populaire et dans le possible contrôle démocratique de l’économie. Il perçoit de façon brillante comment les lois contenues dans ce traité international permettent de transgresser celles en vigueur dans les parlements nationaux classiques ; il en est de même pour leurs choix politiques. Qu’un traité puisse statuer sur des questions propres à chaque Etat permet donc d’empêcher ceux-ci de les élaborer démocratiquement, d’où ce zèle exercé depuis les années ‘80 pour l’établir. L’Europe selon Hayek se doit donc d’agir en force négative, en obstacle au contrôle démocratique des économies nationales.» (Peter Gowan, L’Etat de l’Union, le Contexte International, Euromemo Annual Workshop, 2005)
Cela reste vrai à l’heure actuelle. Karel De Gucht, alors ministre belge de la politique étrangère et ensuite commissaire européen a ainsi expliqué le lien entre le Traité de Lisbonne et la Constitution que les peuples français et néerlandais ont rejetée : «Le Traité Constitutionnel avait pour but d’être lisible à l’inverse de celui-ci […] La Constitution visait à être claire alors que ce traité se doit d’être obscur. Pari gagné.» (Flanders Info, 23 juin 2007.)
Il s’agit d’adopter une approche technocratique de la politique et de l’économie. Des discussions importantes relatives à notre vie quotidienne se tiennent au niveau de l’Union Européenne ; leur sens est cependant occulté par un langage technocratique. Ainsi, les peuples peuvent difficilement les suivre, encore moins s’y opposer et le pouvoir de décision leur échappe.
Les Institutions Européennes
L’Europe dispose d’une architecture institutionnelle profondément anti-démocratique, y compris selon les critères du parlementarisme bourgeois, car elle constitue un moyen terme entre ses principaux protagonistes, certains partisans du fédéralisme, d’autres d’une structure intergouvernementale. De fait, seuls les membres de la Commission et du Conseil, instances non élues, y détiennent un réel pouvoir.
Les membres de la Commission Européenne sont nommés par différents gouvernements de l’Union. Son rôle consiste à élaborer des politiques conformes aux intérêts du capital en Europe et son seul pouvoir se résume à proposer des lois ; vient ensuite le Conseil Européen qui réunit les chefs de gouvernement et les ministres des différents Etats.
Le soi-disant Parlement Européen n’en possède que le nom, dépourvu de son droit le plus élémentaire, celui de proposer des lois et de demander des comptes à l’exécutif. Perry Anderson a très bien résumé son rôle : «C’est une machine à produire une mise en scène gouvernementale bien plus que des lois ; elle donne à voir une façade symbolique assez semblable, dirais-je, à la monarchie britannique.» (Perry Anderson, Ce Nouveau Vieux Monde, p 23, Verso 2009.)
Grâce à cette façade on crée une illusion de démocratie ; on peut par exemple citer le droit d’ «Initiative Citoyenne» qui assure aux auteurs d’une pétition qu’elle recevra «toute l’attention» de la Commission Européenne à une condition : avoir recueilli un million de signataires.
Que les adeptes du Traité de Lisbonne aient bruyamment annoncé un pouvoir accru au Parlement ne les a guère empêchés de l’ignorer et l’Europe actuelle fonctionne encore moins démocratiquement qu’à sa création.
Le projet européen n’a même jamais été social-démocrate ; il est depuis toujours inspiré par les pouvoirs capitalistes à l’intérieur de l’Union, dont le «masque social» est tombé avec la crise. Une chose apparait désormais clairement : l’Europe capitaliste n’offre aucune perspective à la classe ouvrière ; il faudra donc en construire une autre.
Le capitalisme et les politiques néo-libérales ont mené l’Europe à une grave crise : l’UE doit faire face à la stagnation économique, alors que les Etats à sa périphérie connaissent un sérieux déclin. Les salariés en font les frais: le chômage a explosé depuis l’arrivée de l’euro -17 millions de chômeurs dans la zone euro et 25 dans l’ensemble de l’Union. Le niveau de vie, les services publics sont menacés et les solutions préconisées par le traité ne font qu’aggraver les choses.
Voici l’Europe à la croisée des chemins. Si elle continue dans cette voie, elle est condamnée à une grave dépression économique, à un effondrement qui suscitera à la fois l’instabilité et une crise massive, une pauvreté jamais connue depuis des décennies. Cela annonce également plus d’oppression pour les peuples car la dictature des marchés et de la finance se maintiendra au détriment des droits démocratiques.
Une solution radicale s’impose, allant à contre-courant du traité, un changement révolutionnaire pour rompre avec l’actuelle Union Européenne capitaliste. Il faut dépasser une société et une économie façonnées conformément aux intérêts des banquiers, des grosses entreprises et des plus riches ; pour ce faire il faut mettre en place des gouvernements au service des travailleurs d’Europe, déterminés à accomplir des changements socialistes et ainsi donner priorité aux besoins des peuples sur les profits d’une minorité.
Un combat commun à tous les travailleurs d’Europe
La nécessité de se battre contre les politiques d’austérité qui détruisent la vie des gens s’impose dans toute l’Union. Ce sont les institutions européennes comme la Commission et la Banque Centrale qui ont elles-mêmes lancé cet assaut si bien coordonné contre le niveau de vie, aidées en cela par les gouvernements allemand et français.
Le mouvement ouvrier européen est d’abord confronté à une tâche à moyen terme : coordonner et unifier les luttes contre l’austérité. Cela permettrait également d’enrayer la montée des nationalismes qui visent à le diviser. Les errements des directions syndicales européennes, organisant au mieux une journée de protestation sans réel caractère en freinent la progression ; la mobilisation n’est donc pas à la hauteur de l’enjeu. Il revient à la base de lancer un appel massif à l’unité d’action et à la coordination des luttes.
Ces deux dernières années (2010 et 2011, NDLR), le Socialist Party (section irlandaise du Comité pour une Internationale Ouvrière) a pris des initiatives en ce sens, relayées par des parlementaires de la fraction Gauche Unie Européenne au Parlement européen: l’une d’entre elles fut l’organisation d’une manifestation en Grèce qui rassembla plusieurs milliers de participants et au cours de laquelle Joe Higgins (à l’époque député irlandais du Socialist Party) prit la parole. Le dernier appel date de l’an dernier (2011), signé par 11 euro-députés ainsi que moi-même; en voici un extrait :
«Nous demandons solennellement aux syndicats européens de tout mettre en oeuvre pour faire du 21 juin une grande journée de protestation et de grèves contre l’austérité. Pour ce faire des actions solidaires exprimant une opposition claire à l’establishment européen devraient se tenir dans toute l’Union pendant les semaines à venir. Nous appellerons à un rassemblement des partis politiques, des syndicats et des associations auxquelles nous sommes affiliés.
Dans tous les pays le niveau de vie est menacé. Les travailleurs, la jeunesse, les chômeurs, les exclus et les retraités doivent d’urgence organiser la réplique unitaire. Cette première étape devra déboucher sur d’autres actions de même ampleur, y compris dans les entreprises, afin d’aboutir à une journée de grève générale dans toute l’Europe.»
Cet objectif demeure essentiel. Une journée européenne de grève générale contre l’austérité montrerait la capacité des travailleurs à se mobiliser et sèmerait la peur chez tous les capitalistes de l’Union. Ce sera le point de départ pour une action dans l’ensemble des pays du PIIGS; le mouvement ouvrier doit désormais s’organiser à ce niveau.(PIGS (littéralement, « porcs » en anglais) est un acronyme1 utilisé pour la première fois en 2008 par quelques journalistes britanniques et américains, spécialisés en finances ou en économie, pour désigner quatre pays de l’Union européenne : Portugal, Irlande, Grèce et Espagne (« Spain », en anglais) Parfois, l’Italie est incluse dans le lot, ce qui donne PIIGS)
Pour des gouvernements ouvriers
Appeler à une «Europe sociale» mythique ne suffit pas pour défier la logique de l’austérité et de la crise économique dont les travailleurs subissent les conséquences ; il faut aussi proposer une politique alternative. Pour tous ceux qui dans le monde pensent comme nous, au Comité pour une Internationale Ouvrière, cela signifie une rupture radicale avec le système capitaliste qui conditionne l’organisation sociale à la recherche du profit.
Nous nous battons au contraire pour un gouvernement des travailleurs qui briserait cette logique, leur donnerait le pouvoir au lieu de l’abandonner aux représentants du grand capital et mettrait en oeuvre des politiques socialistes planifiées démocratiquement ; nous satisferions ainsi les besoins du peuple et non du capital.
Détailler ici ce que serait une politique 100% socialiste serait trop long. Nous nous contenterons de mettre en avant quelques grands axes de référence pour plusieurs pays d’Europe.
D’où viendraient les ressources ?
Quoiqu’en dise la propagande, l’Europe ne manque pas de richesses. En Irlande comme ailleurs, la crise a profité aux riches. Un rapport publié par Merrill Lynch en 2011 montre que le «Club des riches» d’Europe possède plus de 7.5 trilliards d’euros, soit deux fois le PIB de l’Allemagne, la plus grande puissance économique européenne. Malgré la crise les énormes profits réalisés par les grandes entreprises continuent d’augmenter ; dans la zone euro elles ont enregistré jusqu’à 3.6 trilliards de bénéfices en 2010. Une taxation des excédents à au moins 50%, un impôt sur les richesses, les gros revenus et les bénéfices des grandes entreprises, permettrait de socialiser cet argent et de l’employer au bien-être de tous plutôt qu’à l’enrichissement de quelques-uns. Les entreprises qui refuseraient d’investir leurs énormes profits dans la création d’emplois seraient nationalisées et placées sous contrôle public démocratique ; elles serviraient ainsi la société dans son ensemble.
Refusons de payer les dettes
Des niveaux de dettes insupportables paralysent l’économie des pays à la périphérie de l’Europe. L’Irlande devra rembourser 7 milliards d’intérêts en 2011 et ce chiffre dépassera les 9 milliards dans les années à venir. Faire supporter cela aux peuples est une injustice. L’intérêt des salariés doit l’emporter sur ceux qui des obligataires. Pour toucher des compensations ils devraient prouver que leur argent ainsi investi est indispensable au paiement des retraites des travailleurs ayant placé leurs économies dans des fonds de pension ou à la garantie de leur épargne. Aux riches d’assumer eux-mêmes les conséquences de leur crise.
Aidons les peuples, pas les banques.
La crise économique a montré l’immense pouvoir du secteur financier que banquiers et spéculateurs emploient actuellement à mener des politiques de droite. Les travailleurs du monde entier s’exposent à la colère des marchés s’ils refusent des baisses de salaires ou des coupes dans les services publics. Nationaliser les secteurs clés de la finance permettrait d’inverser la tendance ; l’argent profiterait alors à la collectivité par des prêts bon marché attribués aux patrons de petites entreprises ou exploitations agricoles ; les prêts immobiliers et leurs mensualités seraient recalculés en fonction de la valeur de l’habitation. Les banques centrales passeraient sous contrôle démocratique de sorte à servir les intérêts des travailleurs et non plus ceux du capital.
De ce fait la puissance et la richesse du secteur financier seraient employés à libérer les peuples du poids de la dette, plutôt qu’à soutenir les banques, les actionnaires et les riches obligataires.
De l’investissement public pour créer des emplois
En Irlande comme ailleurs, l’effondrement de l’investissement privé explique en grande partie cette profonde crise économique. En Europe, sa chute en termes d’apport en capital brut a atteint 565 milliards, la perte totale atteignant 611 milliards, ceci malgré les 2 trilliards de réserves injectés dans la trésorerie des principales entreprises. Nous assistons donc à une baisse de l’investissement et à une explosion de la richesse associées à un chômage tel qu’un investissement public massif s’impose pour y remédier. Lors de sa proposition de pré-budget en 2011, l’Alliance de la Gauche Unie a mis l’accent sur un pan d’investissement public qui créerait 150 000 emplois : cela inclurait un programme de collecte des eaux de pluie, la remise en état et l’isolation de bâtiments publics, la démolition de tous les logements sociaux désormais inadaptés et leur remplacement par des constructions conformes aux normes du développement durable. La demande pour de tels programmes s’étend à toute l’Europe. Si de plus celle-ci devenait socialiste, on pourrait élaborer un vaste programme d’investissement public dans l’infrastructure pan-européenne.
En lieu et place de la crise capitaliste, la planification démocratique
Cette crise économique, cause de souffrances pour des milliards d’entre nous n’est autre que celle du capitalisme. Ce système s’appuie à la fois sur la possession de capitaux privés et de scandaleuses quantités de richesses : il doit disparaitre. Une Europe des Travailleurs nationaliserait les secteurs clés de l’économie qui deviendraient propriété des salariés ; ils seraient gérés démocratiquement selon une planification rationnelle pour satisfaire les besoins des peuples.
Ce que nous proposons n’a rien à voir avec la caricature de planification socialiste en vigueur sous le stalinisme où elle s’exerçait de manière bureaucratique sous une dictature. Bien au contraire, le contexte serait celui d’une authentique démocratie ; chaque citoyen prendrait part aux décisions relatives au fonctionnement de la société, de l’économie au lieu de s’en remettre à une main invisible uniquement vouée à augmenter les profits des grosses entreprises. Dans une telle société socialiste, les représentants élus seraient révocables, rendraient compte à leurs mandataires et recevraient un salaire équivalent au leur.
Une planification socialiste coordonnée et démocratique permettrait de consacrer les ressources de l’Europe à l’industrie, au développement et à la recherche sur tout le continent qui a subi une désindustrialisation au cours des précédentes décennies. Cette tendance s’inverserait dans un plan respectueux du développement durable ; on investirait dans la transition des carburants fossiles vers les énergies renouvelables et leur usage efficient. Cela apporterait une croissance tant économique qu’écologique, à l’inverse des bulles immobilières financées par le crédit comme ce fut le cas en Irlande et en Espagne.
NON à l’Europe des Patrons OUI à une Confédération Européenne Démocratique et Socialiste
Une Europe démocratique et socialiste ne naîtra pas des cendres de l’Europe capitaliste. Les travailleurs devront arracher le pouvoir à ceux qui aujourd’hui le détiennent.
L’impact mondial des révolutions en Afrique du Nord et au Moyen Orient, l’occupation grandissante des places publiques montrent la puissance de l’exemple, alors que les idées et le désir d’action se propagent à la rapidité de l’éclair. Qu’un seul pays d’Europe devienne socialiste et l’impact révolutionnaire sur les autres serait immédiat. Qu’en Grèce ou au Portugal les travailleurs prennent le pouvoir dynamiserait ceux des autres pays de l’Union.
L’avènement du socialisme dans certains pays nécessiterait un débat: faudrait-il limiter l’expérience à ces pays ou fonder une confédération d’états socialistes européens? Il ne s’agirait pas seulement de « réformer » l’Europe capitaliste, mais d’en construire une autre, complètement différente dans son organisation, fondée sur les principes de solidarité et d’égalité.
A l’opposé de ce que nous connaissons dans l’actuelle Union, où les peuples sont le plus possible maintenus éloignés des décisions, une société socialiste déplacerait le pouvoir au niveau local, comme le lieu de travail ou de résidence. Des représentants élus démocratiquement, révocables prendraient des décisions au plan européen. On utiliserait l’investissement public et la planification économique pour aider au développement des pays aux économies les plus faibles et assurer l’égalité entre les différents états.
Pour mener à bien ce combat, il nous faut non seulement refuser le Traité d’Austérité, mais aussi construire dans toute l’Europe des partis qui se consacreront à élaborer ces changements révolutionnaires. Le Socialist Party ainsi que d’autres partis frères au « Comité pour une Internationale Ouvrière » (www.socialist-world.net) est pleinement engagé dans cette tâche essentielle. De même, nous nous attachons à reconstruire le mouvement ouvrier : nous voulons pour cela que les syndicats deviennent des outils démocratiques servant les luttes des travailleurs ; nous travaillons également à la construction de nouveaux partis politiques de masse représentant la classe ouvrière. Ici en Irlande, le lancement et la création de l’Alliance de la Gauche Unie constitue une large part de ce processus.
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[VIDEO] Irlande: Meeting réussi de l'AAA-PBP
Vous trouverez ci-dessous la vidéo des prises de parole des députés Paul Murphy et Ruth Coppinger (membres de l’Anti Austerity Alliance et du Socialist Party) lors d’un meeting organisé par l’Anti-Austerity Alliance/People Before Profit, à Dublin tout juste après qu’une manifestation de masse de dizaines de milliers de personnes ait à nouveau protesté contre la nouvelle taxe sur l’eau. Les élections générales se dérouleront demain.








