Your cart is currently empty!
Tag: Mélenchon
-
France : Aucune voix pour Le Pen, mais Macron n’est pas la solution

Photo : Adrien Quatennens Pour défendre notre pouvoir d’achat, il faut une lutte de masse dans la rue
Dans un contexte de crise du capitalisme, amplifiée par la gestion désastreuse de la pandémie et la guerre impérialiste en Ukraine, le 2e tour de l’élection présidentielle opposera donc Emmanuel Macron à Marine Le Pen. Simple répétition des élections de 2017 ? En surface uniquement. Entre l’effondrement vertigineux des partis pivots de la 5e République (PS et LR), l’excellent résultat de la gauche de rupture passée à un cheveu du second tour et la manière dont les thématiques sociales se sont imposées contre la volonté des médias et partis dominants, ce 10 avril 2022 fut historique.
Par Nicolas Croes
Diviser pour mieux régner au service des riches
Ce résultat est l’expression de l’échec de la stratégie « Macron barrage contre l’extrême droite ». Le bilan des cinq ans de projet « Start Up Nation » est sans appel : la poursuite enthousiaste de la politique de transfert de richesses de la collectivité vers les ultra-riches par la précarisation des conditions de vie et de travail de la majorité de la population, la casse du service public par la privatisation et les restrictions budgétaires ou encore une politique fiscale symbolisée par la suppression de l’impôt sur la fortune.
Cette politique profondément antisociale a été accompagnée par une terreur policière accrue contre les gilets jaunes et les autres mouvements sociaux. On se souvient par exemple du visage ensanglanté de cette infirmière à la suite d’une journée de manifestation du personnel soignant après le premier confinement. Le cocktail n’aurait pas été complet sans éléments de division, par le biais notamment du racisme d’Etat par le biais notamment du « plan séparatisme » qui visait explicitement les musulmans. Il y eut encore ce débat télévisé consternant de février 2021 entre Gérald Darmanin et Marine Le Pen où le Ministre de l’Intérieur avait accusé la présidente du Rassemblement national de « mollesse » au sujet de l’islam… A cela est venue s’ajouter la gestion brutale et autoritaire de la pandémie. L’agressivité vis-à-vis des non-vaccinés a servi de paravent pour masquer les pénuries du secteur des soins. « J’ai très envie d’emmerder les non-vaccinés. C’est ça la stratégie » avait ainsi publiquement déclaré Macron.
Faute de riposte sociale conséquente, notamment de la part des organisations syndicales, cette division a pu s’installer et se nourrir du cynisme, de la frustration et du manque de perspectives pour de larges couches de la société. Et c’est là-dessus que Macron comptait : parvenir à une situation ou le chantage électoral face à l’extrême droite pouvait arriver au secours de son manque d’assise réelle dans la société. C’est grâce à Macron que Marine Le Pen apparaît plus forte aujourd’hui.
Une France qui s’extrême droitise ?
Parmi les éditorialistes, la question n’est quasiment même plus posée, elle est devenue une affirmation qui se passe d’argumentation. Pourtant, même dans une campagne qui a commencé autour des thèmes favoris de la droite, c’est le pouvoir d’achat qui s’est finalement imposé avec force comme LE sujet majeur. Tout le monde a été obligé de se prononcer sur le sujet.
Ensuite, le grand vainqueur, c’est avant tout l’abstention et le dégoût de toute la politique. Il s’agit du pire taux depuis les élections de 2002 qui avaient vu Jean-Marie Le Pen passer au second tour pour affronter Jacques Chirac (26%, soit 4% de plus qu’en 2017). Le phénomène est tout particulièrement présent parmi la jeunesse, dont les perspectives d’avenir s’assombrissent constamment, ainsi que dans les quartiers populaires, où la présence des autorités publiques n’existe quasiment plus que par la répression d’Etat.
De nombreux témoignages d’abstentionnistes expriment le sentiment que la campagne électorale était sans prise réelle sur la réalité. L’immigration et le sécuritaire ont dominé l’essentiel de la course au détriment des thèmes sociaux et notamment du pouvoir d’achat, malgré tout devenu omniprésent dans la dernière ligne droite. Le pouvoir d’achat était d’ailleurs le thème quasi exclusif de la campagne de Marine Le Pen (autour notamment d’une TVA à 0% sur les produits alimentaires). Celle-ci a laissé à Zemmour le soin de mener une campagne extrêmement raciste et c’est finalement beaucoup plus Valérie Pécresse, la candidate LR, qui a tenté de le suivre sur cette lancée, pour foncer droit dans le mur. Plusieurs figures de proue LR avaient rejoint Macron ou Zemmour durant la campagne, l’électorat a fini par faire de même.
Alors oui, l’extrême droite est en progression. Avec 23%, le Rassemblement National / FN réalise son meilleur score. Avec Zemmour et Dupont Aignan, 32% des votants se sont orientés vers l’extrême droite réactionnaire. Mais il y a également eu 25,5% pour une « gauche de rupture » non gouvernementale (France Insoumise, PCF, LO, NPA) : le meilleur score pour la gauche radicale depuis 1969.
Macron : une victoire en trompe l’œil
Le véritable enseignement de ce premier tour, c’est l’effondrement des partis de gouvernement et de gestion du capitalisme. Ensemble, LREM (le parti de Macron), LR (la droite historique), le PS et EELV (Europe Ecologie Les Verts) réalisent 39%. C’est la première fois que ce groupe de formation passe sous le seuil des 50%. Les 2 partis pivots de la Ve République, la droite officielle (Les Républicains aujourd’hui, 4,8%) et le PS (1,8%) se sont mangés de violentes claques électorales historiques et finissent à moins de 5% des votes exprimés (et donc sans remboursement intégral des frais de campagne).
2017 avait déjà représenté une cuisante défaite pour le PS à la suite du mandat de François Hollande ; mais le candidat de la droite officielle, François Fillon, avait tout de même recueilli 19% des voix. Aujourd’hui, Valérie Pécresse qui, hier encore, affirmait « Ma valeur c’est le travail, pas l’assistanat » s’est vue forcée de faire appel aux dons pour renflouer ses caisses de campagne pour éponger un déficit de 7 millions d’euros… Quant au PS, qui avait remporté toutes les élections de 2008 à 2012, des municipales aux présidentielles, il n’a même pas réussi à convaincre 2% des votants. Il ne reste à ces deux partis que leur ancrage local, mais pour combien de tempes ? Macron, de son côté, a toujours cherché à en avoir un sans jamais y parvenir.
Macron avait déjà bâti sa victoire de 2017 sur les cendres du PS et de LR, ce qui avait permis à la classe dominante de continuer sa politique, même sous un nouveau visage. Ce 10 avril, il a recueilli 4% de plus qu’au premier tour de 2017, un score finalement excessivement faible au vu de l’effondrement du PS et de LR. Le vote en faveur de Macron est un concentré de tout le vote pour l’idéologie dominante. Et c’est peu. La classe dominante s’est prise une claque monumentale.
La surprise Mélenchon
On donnait 8% au candidat insoumis au début de la campagne et encore seulement 14% fin mars. Finalement, Jean Luc Mélenchon n’a manqué le second tour que de peu en recueillant 22% des votes. Dans les derniers moments de campagne, il a su rallier des abstentionnistes (les sondages laissaient présager un taux d’abstention de 30%) et représenter un certain « vote utile » de la gauche. Mais il s’agit tout de même d’un vote en faveur d’une gauche de rupture, ce qui est très significatif. Mélenchon est le premier candidat des jeunes, au point où des commentateurs ont parlé d’une « génération abstention » qui côtoie une « génération Mélenchon ». Ses résultats ont quasiment augmenté partout dans les grandes villes, mais de petits reculs existent dans des petites villes et des régions rurales, précisément là où Marine Le Pen avait concentré sa campagne.
Avec une manifestation suivie d’un meeting qui a réuni 100.000 personnes à Paris ou encore 35.000 à Marseille, Mélenchon a mené une fois de plus une campagne qui n’a été égalée par personne (et de loin) en terme d’affluence et de mobilisation. Ces événements avaient rassemblé encore plus en 2017, mais c’était un reflet de la lutte des classes, cette campagne se situant alors dans le sillage de la puissante mobilisation sociale contre la Loi El Khomri en 2016 qui avait pesé sur la dynamique et le contenu de campagne de Mélenchon.
Comme nous l’avons développé dans notre appel, la candidature de Mélenchon avait le potentiel d’être saisie comme levier pour stimuler la lutte pour un changement de société. Mais plusieurs erreurs ont été commises selon nous. Le slogan principal de campagne – « un autre monde est possible » – était finalement très faible au vu des enjeux et de la colère qui existent aujourd’hui après 5 années de macronisme tout en faisant référence à un mouvement social (l’altermondialisme) dont la force date d’il y a plus de 20 ans. Chercher à souligner les liens avec le mouvement ouvrier organisé et ses revendications auraient été plus judicieux.
Pendant les premiers mois de campagne, alors que l’attention médiatique était tournée vers le racisme et la candidature de Zemmour, Mélenchon a opposé la rhétorique anti-migration à la notion de « créolisation » (exprimant une société où la mixité des cultures et origines permet de créer une plus grande richesse collective). Cette approche est la bienvenue mais elle reste insuffisante, surtout alors que des réponses socio-économiques ne manquaient pas dans le programme de campagne du candidat pour répondre aux inquiétudes sociales que cherche à instrumentaliser l’extrême droite (nous vous invitons à (re)lire notre appel de vote à ce sujet).
Ce programme, bien que ne manquant pas de points forts, reste réformiste, sans demande de nationalisation de secteurs-clés de l’économie, en se limitant à la création de pôles publics qui devraient être en concurrence avec le marché et soumis à ses diktats. L’aspiration à une 6e République synthétise cette recherche illusoire d’une république sociale en respectant les étroites limites du système capitaliste, tout particulièrement en période de crises multiples du capitalisme se renforçant les unes les autres.
D’autre part, un aspect essentiel a manqué durant toute la campagne et manque toujours aujourd’hui : celui de la préparation pour les combats à venir. En cas de victoire de Mélenchon, les marchés et la classe capitalistes n’auraient pas manqué de réagir en organisant la fuite des capitaux et des lockouts patronaux et en faisant tout pour faire plier Mélenchon comme jadis Mitterrand (voir notre article à ce sujet) et Syriza en Grèce plus récemment. Quelle riposte cela aurait-il exigé ? Et avec quelle préparation pour les travailleuses et travailleurs ? Ces éléments cruciaux sont restés sans réponse.
Ces faiblesses, liées au manque de démocratie et de structuration à la base au sein de La France Insoumise, aux positionnements internationaux parfois douteux de Mélenchon et à la participation à des coalitions locales menées par des maires EELV voire PS (ces organisations politiques étant à juste titre considérées comme faisant partie du problème et pas de la solution), ont certainement joué un rôle dans le fait que Mélenchon ne passe pas au 2e tour. Mais cette campagne allait indéniablement dans la bonne direction et a participé au processus de repolitisation de couches larges de la société en popularisant si pas un programme anticapitaliste et socialiste, au moins des éléments de ruptures qui peuvent permettre de faire le lien avec la nécessaire transformation socialiste de la société.
Préparons le 3e tour social
Au vu du peu qu’il a fallu pour que le second tour oppose Macron à un candidat d’une gauche de rupture, on peut comprendre la colère qui s’exprime contre les candidatures du PCF, de LO et du NPA. Au lieu de considérer ce qui était possible pour une campagne de gauche et ce qu’un passage au second tour aurait signifié – et cela aurait été une véritable bombe dans le paysage politique tout en gonflant considérablement la confiance des travailleuses et travailleurs – ces partis se sont laissés prendre au piège du pessimisme et ont mené des campagnes « pour exister ».
Il faut prendre garde à l’arithmétique post-électorale. Beaucoup d’électeurs du PCF (qui réalise le 2e pire score de son histoire) du NPA ou de LO (qui réalisent les pires scores de formations se réclamant du trotskisme depuis 1969) n’auraient pas voté pour Mélenchon. Mais même un appel de vote et un désistement dans la dernière ligne droite de la campagne aurait mobilisé non seulement une partie de leurs électeurs mais aussi davantage d’abstentionnistes. Une nouvelle occasion a été ratée – pourtant l’expérience de 2017 était là – il faut maintenant veiller à ne pas rater la suite.
Ces élections expriment surtout la faillite totale de la 5e république, dont les élections présidentielles avaient été imaginées pour être un facteur de stabilisation politique, mais dont le contrôle échappe à la classe dominante. Après la débâcle de Pécresse, LR entre en crise existentielle et va de plus en plus s’écarteler entre Macron et Le Pen. Pareil pour le PS, et certains vont maintenant ouvertement lorgner avec opportunisme vers Mélenchon, à l’exemple de Ségolène Royal. En Grèce aussi, quand Syriza avait supplanté le Pasok, nombre de carriéristes sociaux-démocrates avaient frappé aux portes de la formation de gauche et avaient accéléré le processus de transformation de ce Syriza en parti soumis aux marchés. La meilleure manière de repousser ces opportunistes, c’est d’accentuer l’implication de la France Insoumise dans les luttes de la rue et de renforcer considérablement l’organisation démocratique de la FI autour de ses groupes de base.
Dans la situation actuelle de crise, de militarisation et de tensions internationales, une chose est certaine : il y aura encore plus d’attaques antisociales et contre des boucs émissaires et plus de répression. Macron a déjà amplement démontré quelle était sa gestion des affaires d’Etat en temps normal et en temps de crise. C’est d’ailleurs pour cela que tant de gens considèrent voter malgré tout pour l’extrême droite de Marine Le Pen, parfois en estimant à tort que le parti s’est adouci concernant son racisme et que son vernis social n’est pas qu’un attrape-voix. Son projet politique reste clairement d’extrême droite et repose sur l’admiration des régimes « forts » dirigés par des autocrates et visant à appliquer une politique sévèrement raciste et antisociale, mais aussi anti-femmes et anti-LGBTQIA+. Macron et Le Pen partagent un même projet – la protection des intérêts capitalistes – mais avec des accents différents.
Sans diminuer l’importance des élections, nous devons nous rpapeler que la politique, c’est bien plus que cela. Toutes les avancées sociales qui ont été obtenues jusqu’ici ont été l’œuvre de la mobilisation de masse dans les entreprises, les écoles et la rue, pas du parlement. C’est là que se construit le véritable rapport de forces. Les deux candidats présents au second tour vont essayer de réduire l’impact de la rue sur la politique, et donc d’accroitre la répression tout en limitant les libertés démocratiques et les droits syndicaux. Non comprenons celles et ceux qui seraient tentés de voter Macron contre Le Pen, mais Macron est au cœur du problème et ne fait pas partie de la solution, même à la marge. C’est précisément la logique du « moindre mal » qui nous a conduits dans cette situation.
Il est notamment temps de faire des grandes assises de la lutte sociale – que nous entendons comme de grandes assemblées ouvertes et démocratiques liées à l’élaboration d’un plan d’action et de revendications – pour préparer le 3e tour social, pour barrer la route à Le Pen et à toutes les politiques réactionnaires dans la rue et préparer la résistance sociale contre la politique du nouveau quinquennat. Mélenchon et la France Insoumise peuvent et doivent jouer un rôle en réunissant toutes les organisations sociales, syndicales et politiques (y compris de la gauche radicale) pour préparer un plan de lutte offensif autour de revendications sociales. C’est aussi la meilleure manière de démasquer les mensonges du Rassemblement national.
Cette lutte permettrait en outre de poser les bases de la création d’un parti de masse des travailleurs et de la jeunesse, une gauche de combat capable d’accueillir et d’intégrer démocratiquement toutes celles et tous qui veulent lutter contre le capitalisme et ses conséquences. Il serait ainsi possible d’avancer vers un tout autre type de société et de système économique : une société débarrassée de l’exploitation et de la loi du profit, une société socialiste démocratique.
-
France. Répression, perquisitions à la Fi… Macron de plus en plus autoritaire

Rassemblement devant le siège de la France insoumise mardi 16 octobre, juste après l’annonce des perquisitions La justice à plusieurs vitesses, les perquisitions ciblées ou les assignations à résidence ne sont pas des méthodes nouvelles du pouvoir politique en France. Mais Macron en fait un usage assez systématique. Ce fut le cas pendant les mobilisations étudiantes contre Parcoursup l’an dernier qui ont abouti mercredi 17 octobre à la condamnation à 6 mois de prison ferme pour un étudiant mobilisé. C’est le cas aussi avec le harcèlement que subit Cédric Herrou qui en est à sa 10ème garde-à-vue/arrestation, sans compter les procès menés contre les militants syndicalistes postiers du 92, les cheminots grévistes du printemps dernier, etc… La répression des militants syndicalistes, des lanceurs d’alerte, des militants soutenant les migrants s’est amplifiée sous Sarkozy puis Valls et Hollande. C’est dans ce sens qu’il faut comprendre la perquisition à grande échelle qu’a subi la France insoumise mardi 16 octobre.
Article de la Gauche Révolutionnaire (CIO-France)
Pourquoi cette opération de perquisitions à la France insoumise ?
Le droit de perquisitionner Mélenchon, les locaux de la FI, du PG et les domiciles d’anciens assistants parlementaires a été donné vendredi dernier dans le cadre de la recherche d’éléments permettant d’ouvrir une enquête judiciaire contre Mélenchon sur l’embauche de ses assistants au Parlement européen et dans le même temps sur les comptes de campagne présidentielle. Il n’y a pour le moment aucune instruction judiciaire.
Le procureur de la république qui était sur les lieux a été envoyé par Macron. Il a fait le choix de perquisitionner avec près de 100 flics mobilisés simultanément mardi matin, jour de l’annonce officielle du gouvernement Philippe II et des débats à l’assemblée. Et le procureur a fait donner l’ordre de bloquer les responsables de la FI qui voulaient entrer dans leurs locaux et assister à la perquisition. Hasard ? Nous ne croyons pas ! L’affaire des assistants parlementaires remonte pourtant à 2012, alors même que la France insoumise n’existait pas. Quant aux comptes de campagne, ils ont déjà été validés officiellement.
Aujourd’hui l’ensemble des fichiers de la FI, ceux des membres des groupes d’action, les débats sur les plateformes… sont dans les mains du procureur. Une aubaine pour compléter les informations des renseignements territoriaux et mieux cerner le mouvement et l’ambiance.
Cette justice n’en est pas une !
Elle est à la solde du pouvoir. Le traitement de l’affaire Mélenchon est dès le départ hypermédiatisée et surjouée par le pouvoir. Pour rappel, le président Lorgerot de la cour des comptes a émis publiquement des doutes sur les comptes de campagne de la candidature Mélenchon, alors même que les comptes avaient été validés par cette même commission. Puis il s’est vu offrir une prime pour ses bons et loyaux services par le gouvernement lui-même (57% d’augmentation de salaire) ! Macron et LREM craignent une défaite aux prochaines élections et vont chercher à affaiblir les forces qui s’opposent à eux.
Ce n’est pas à Macron et à ses sbires de décider si a été commise une infraction. Il faut une commission indépendante du pouvoir. C’est la seule apte à enquêter sur l’ensemble des comptes de campagne et sur l’utilisation des fonds parlementaires, y compris ceux de Macron et du RN.
L’affaire Benalla avait soulevé le voile cet été sur un système d’hommes de mains à la solde des présidents, système qui a toujours dû exister mais que Macron a poussé plus loin en voulant avoir sa police privée.
Le caractère autoritaire du régime de Macron se renforce. Lui et son gouvernement sortent affaiblis d’un an et demi de pouvoir. La base des électeurs qui ont voté pour Macron s’effrite rapidement depuis quelques mois et la colère parmi les retraités, les travailleurs et les jeunes ne cesse pas de progresser. Nous le disions dès 2017, son élection est davantage la réussite d’un aventurier soutenu par des amis riches qu’un mouvement politique qui reposerait sur une base sociale large et solide. Au pouvoir, il y a une bande de ministres arrivistes, lobbyistes des multinationales d’AREVA ou de Danone et des députés En Marche issus du monde des affaires qui jour après jour montrent leur suffisance et leur débilité.
Pour les affronter, il faut exposer leurs stratagèmes mais surtout démonter le fond de leur politique qui s’en prend à la majorité des jeunes, des travailleurs, aux syndicalistes, aux migrants… Ce qu’ils craignent le plus aujourd’hui c’est une nouvelle force capable de mobiliser et de traduire sur le terrain politique la colère accumulée. Une nouveau parti assez large, combatif et massif permettrait de donner confiance dans la lutte et dans les revendications pour de meilleurs salaires, un emploi stable, un logement décent, pour le droit d’étudier ou encore le droit de se réfugier en France… C’est ce qu’attendent toute une partie des jeunes et des travailleurs qui regardent avec sympathie les idées de la FI et les luttes actuelles.
-
Le 14 octobre, votez PTB! Vous voulez rejoindre la lutte ? Rejoignez le PSL!
Il y aura des candidats du PSL à Saint Gilles (Gauches Communes) et à Keerbergen (Consequent Links). Ailleurs, nous appelons à voter pour le PTB.

Peter Mertens au 1er mai à Anvers. (Photo : Liesbeth) Dans le numéro précédent de Lutte Socialiste (mai 2018), nous faisions état de la discussion à venir entre le PTB et le PSL sur les élections communales. La résistance sociale à l’échelle locale pourrait connaître une importante impulsion si, le 14 octobre prochain, une alternative de gauche cohérente obtenait un bon résultat. Cela renforcerait la confiance pour lutter sur le plan local, mais aussi sur le plan régional et fédéral. Car le néolibéralisme a aussi infecté la politique communale. Le coût du logement grimpe en flèche, les infrastructures sont déficientes, qu’il s’agisse de routes, d’écoles, de crèches ou de transports publics, tandis que les services à la population se font plus chers et que les listes d’attente s’allongent.
Par Bart Vandersteene, porte-parole national du PSL, éditorial de l’édition de juin de Lutte Socialiste
Les partis traditionnels participent à la politique de transfert des ressources communales vers les promoteurs et spéculateurs immobiliers aux dépens de la politique sociale et des services publics. Il existe une large marge de manœuvre pour une alternative de gauche, surtout si elle est combinée à des campagnes militantes et au regroupement des différents partis de gauche cohérents. Le PSL a proposé son aide au PTB pour contribuer au meilleur résultat possible le 14 octobre. Malheureusement, nos arguments sont tombés dans l’oreille d’un sourd.
Le PTB refuse la collaboration
La réunion avec Benjamin Pestieau, membre de la direction nationale du PTB, a finalement eu lieu le vendredi 27 avril, soit onze mois après l’envoi à la direction du PTB de notre proposition de rencontre et après dix mails de rappel. Même les plus optimistes des camarades du PSL savaient que le PTB ne débordait pas d’enthousiasme pour s’assoir à une même table et travailler côte-à-côte. Mais nous avons estimé qu’il était important que la discussion ait lieu, ne serait-ce que pour mieux connaître l’analyse et le raisonnement politique du PTB.
Voici ce que le PTB a clairement indiqué lors de la rencontre qui a finalement eu lieu :
- le PTB ne vise pas, pour le moment, d’obtenir le plus d’élus possible aux élections communales
- il ne s’intéresse aux résultats que dans les endroits qu’il considère comme prioritaires ;
- la résistance sociale se heurte à un manque de dynamisme de la base ainsi qu’à une faible conscience socialiste ;
- une rupture radicale avec la logique capitaliste n’est donc pas possible à court ou moyen terme ;
- le PTB développe donc un plan d’implantation à long terme ;
- il n’existe pas une confiance suffisante entre nos deux partis pour collaborer.
Une confiance doit s’établir avant que la PTB n’envisage la possibilité éventuelle d’avoir des candidats PSL sur les listes du PTB. Benjamin Pestieau a cependant dû concéder que des membres du PTB estiment qu’une telle collaboration est possible. Les militants de base du PTB disent à leurs dirigeants que, sur le terrain, sur les lieux de travail, dans les secteurs ou les sections syndicales,… bref en de nombreux endroits, la coopération est excellente avec les militants du PSL. Ce n’est pas une coïncidence : les militants combatifs savent qu’ils sont toujours plus forts s’ils travaillent ensemble dans le respect des uns et des autres. Nous avons l’impression que la direction du PTB refuse de coopérer avec nous aux élections en raison de calculs politiques alors qu’elle devrait être guidée par le désir de construire la résistance, le mouvement social et une gauche conséquente autant que possible.
Afin d’obtenir le meilleur résultat possible, le PTB – de loin le plus grand acteur – devrait prendre la responsabilité de rassembler la gauche au sens large dans une campagne dynamique, rebelle et ambitieuse. Nous comprenons que le PTB souhaite conserver le contrôle sur son propre développement électoral, mais cela ne signifie pas pour autant que d’autres forces de gauche soient incapables de livrer une contribution substantielle et énergique à leur campagne. A notre avis, une approche semblable à celle de Jean-Luc Mélenchon, qui fait tout ce qu’il peut pour développer le front le plus inclusif possible dans la lutte (voir en page 12), renforcerait la force de la résistance, tant sur le plan social qu’électoral. Loin d’affaiblir la position de Mélenchon, cela la consolide.
Aucun autre intérêt que ceux de la classe ouvrière
Lors de son congrès de 2008, le PTB a annoncé qu’il tournait la page du dogmatisme et du sectarisme : le parti se concentrerait sur des réponses concrètes aux problèmes concrets. Le PTB s’est doté d’un nouvel emballage à destination du grand public et a développé ses ambitions électorales, qui pilotent de plus en plus son programme. Selon ses propres dires, le PTB s’est ouvert. Mais ses anciennes méthodes, responsables d’une image négative auprès de nombreux militants de gauche et de la population, n’ont pas disparu.
Quelles étaient ces méthodes ? Il s’agissait notamment du refus de reconnaître l’existence de toute une série de courants au sein du mouvement ouvrier, d’avoir une attitude brutale envers les autres courants et de l’idée que son propre parti (le PTB) s’élèvait au-dessus de la classe ouvrière. Le PTB avait adopté cette approche du ‘‘socialisme réellement existant’’ comme on l’appelait alors (le stalinisme et ses variantes maoïstes). Cette approche contraste fortement avec celle de Karl Marx et Friedrich Engels dans le Manifeste du Parti communiste. Le deuxième chapitre de ce manifeste commence par la question de la façon dont les communistes voient les travailleurs. Le deuxième chapitre de ce manifeste commence par la façon dont les communistes considèrent les travailleurs. ‘‘Les communistes ne forment pas un parti distinct opposé aux autres partis ouvriers. Ils n’ont point d’intérêts qui les séparent de l’ensemble du prolétariat.’’
Dans le contexte actuel, une victoire électorale du PTB représenterait un pas en avant important pour l’ensemble des travailleurs. Le travail mené par Raoul Hedebouw et Marco Van Hees au Parlement fédéral tire le débat politique vers le haut et vers la gauche, ce qui renforce à son tour, d’une manière générale, la confiance pour participer activement aux luttes sociales. Nous appelons donc à voter pour le PTB.
Ce n’est que dans la commune bruxelloise de Saint-Gilles et à Keerbergen que des membres du PSL participeront à des listes d’unité de gauche radicale. Cela nous donne l’occasion de défendre un programme qui répond aux besoins concrets de la population en liaison avec des actions sur le terrain, sans mettre pour autant en danger l’élection de candidats du PTB.
Nous sommes enthousiastes quant à la possible percée électorale du PTB, mais il aurait été préférable que le PTB ait suivi l’approche de Marx et Engels et ait accompli tous les efforts pour que la gauche conséquente obtienne le meilleur résultat possible.
-
France. Convergence des luttes contre Macron

Manifestation à Marseille, avril 2018. Photo : Els Le mois dernier, cela faisait un an qu’Emmanuel Macron avait accédé à la présidence. En un an, son gouvernement a mis les bouchées doubles pour réaliser un programme qui ressemble furieusement à une liste de souhaits du Medef, l’organisation patronale française. Pour reprendre les termes de Blazac, c’est ‘‘l’apothéose du coffre-fort’’.
Par Nicolas Croes, article tiré de l’édition de juin de Lutte Socialiste
L’exemple de la lutte des cheminots
Selon une enquête du Cevipof (Centre de recherches politiques de Sciences Po) menée du 25 avril au 2 mai 2018, 55 % des sondés estiment qu’Emmanuel Macron et son gouvernement sont trop autoritaires, 76 % d’entre eux trouvent que leur politique ne profite qu’aux plus riches.
Sur le terrain de la lutte sociale, les manifestations et grèves n’ont pas manqué. C’est d’ailleurs pour tenter d’essouffler et de disperser la résistance que Macron a voulu implémenter ses mesures à un rythme aussi haletant.
En s’en prenant aux cheminots, l’offensive antisociale a atteint un nouveau stade qui vise à briser les reins d’un secteur particulièrement organisé et combatif de la classe ouvrière française. L’idée est qu’une défaite des cheminots puisse être utilisée pour démoraliser le reste des travailleurs et de la jeunesse, à l’image de ce que Margareth Thatcher avait fait dans les années ’80 au Royaume-Uni avec les mineurs.
Les cheminots ont réagi avec une grève portant sur trois mois (deux jours par semaine) depuis le début du mois d’avril jusqu’à la fin du mois de juin. Elle avait été préparée à l’aide un journal gratuit tiré à 500.000 exemplaires pour provoquer la rencontre entre militants syndicaux et usagers. Laurent Brun, Secrétaire général de la CGT Cheminots, a souligné l’importance de cette initiative pour ‘‘recréer le lien cheminots-usagers et remettre les cheminots en mouvement, les pousser à militer de nouveau’’(1). La caisse de solidarité des cheminots s’est remplie, dépassant les 700.000 euros, tandis qu’une caisse de solidarité lancée par des artistes et des intellectuels a dépassé la barre du million d’euros.
Concernant les revendications à défendre contre le projet du gouvernement, Laurent Brun explique : ‘‘On s’est adressé à nos cheminots : ‘‘Vous allez élaborer vos plans d’urgence locaux, vous allez écrire, vous, ce qui faut pour que votre service tourne et que vous travailliez dans de bonnes conditions.’’ Ensuite, on a transformé ça en plan d’urgence national.’’ Fin mai, après deux mois de lutte, le taux de grévistes était le même qu’au début du mouvement.
A côté de cela, des grèves ont également éclaté dans certains hôpitaux et des bureaux de poste, les étudiants sont entrés en lutte avec des blocages et des occupations d’universités,… La situation politique est très instable et risquée pour le gouvernement, mais il pouvait toujours tabler sur la dispersion de la résistance.
Une ‘‘marée populaire’’
A l’automne déjà, Jean-Luc Mélenchon et la France Insoumise avaient lancé un appel pour rassembler les forces syndicales et les partis de gauche lors d’une manifestation pour ‘‘déferler à un million sur les champs Elysées’’. Malheureusement, cet appel pour construire un front commun contre Macron n’avait pas été repris.
Les choses ont considérablement évolué depuis lors. En avril, François Ruffin (France Insoumise), Benoît Hamon (Génération-s), Pierre Laurent (PCF) et Olivier Besancenot (NPA) avaient affiché ensemble leur solidarité avec la lutte des cheminots. Le 14 avril, à Marseille, une manifestation a réuni quelques dizaines de milliers de personnes à l’initiative de la section départementale locale de la CGT au côté de la France Insoumise, présente en grand nombre. Il y a aussi eu ‘‘La Fête à Macron’’ le 5 mai.
Ensuite est arrivée la date du 26 mai, une mobilisation visant à faire déferler sur le pays une ‘‘marée populaire’’. L’initiative provient de la France insoumise, rejointe par la CGT – qui a ainsi rompu avec une tradition syndicale de distance vis-à-vis des partis politiques – les syndicats Solidaires, FSU, UNEF, SAF, Syndicat de la magistrature ; des associations et mouvements comme ATTAC, Droit au logement, Collectif pour les droits des femmes, etc. ; et les partis à la gauche du PS. Du jamais-vu !
Mélenchon a expliqué “Je milite pour une forme d’unité populaire qui décloisonne le syndicalisme, la politique et le monde associatif”, en appelant notamment à la constitution de ‘‘comités du 26 mai’’ pour mobiliser dans un secteur ou une entreprise.
Cette approche tranche singulièrement avec l’essentiel des formations de gauche en Europe qui ont plutôt tendance à diviser artificiellement le ‘‘syndical’’ et le ‘‘politique’’ et à rester cantonnées aux élections. Cette attitude est un bon pas en avant pour que la France Insoumise devienne un véritable outil politique de résistance sociale, un vrai parti de masse des travailleurs qui doit encore se structurer pour être réellement démocratique afin d’appliquer un programme de rupture anticapitaliste.
La convergence inclusive syndicale, politique et associative qui a vu le jour ce 26 mai est un événement d’une grande importance et une leçon cruciale pour la lutte anti-austérité dans les autres pays.
La prochaine étape doit être réfléchie, le mieux étant l’élaboration d’un plan d’action vers une grève nationale interprofessionnelle et une grève générale reconductible pour totalement bloquer l’économie.
-
Meeting “Gauches Communes”: les forces de gauche face à l’austérité

Le mercredi 20 juin à 19h, à la Pianofabriek, rue du Fort n°35, à Saint-Gilles (Bruxelles)
Avant l’été, Gauches Communes vous invite le 20 juin à son meeting public : “Les nouvelles forces de gauche face aux carcans austéritaires”.
Le 20 juin nous somme heureux d’accueillir Sabine Rubin, députée La France Insoumise, aux côtés d’Anja Deschoemacker et de Marisa Cabal (organisatrice de la campagne Rosa (Résistance contre l’Oppression, le Sexisme et l’Austérité) à Bruxelles).
Politiques néolibérales, coupes budgétaires dans les service publics, austérité … partout les capitalistes et leurs politiciens tentent de faire payer les crises aux jeunes et aux travailleurs. Inévitablement, les luttes prennent place et, à différentes échelles, de nouvelles formations de gauche voient le jour.
Comment briser les carcans austéritaires et ainsi mener une politique qui fait réellement face aux besoins de la population ?
-
Compte-rendu de la grande journée d’action contre Macron en France samedi dernier
Les Etudiants de gauche Actifs et le Parti Socialiste de Lutte ont participé à paris à la Marée Humaine contre Macron
Le président français Macron est au pouvoir depuis environ un an. Son élection a été le résultat d’un concours spécial de circonstances telles que l’énorme discrédit des partis politiques traditionnels et le fait que beaucoup de gens voulaient absolument stopper Le Pen au second tour. Macron se rend compte qu’il s’agit d’une occasion unique. Il veut l’utiliser pour mettre un terme à un certain nombre de conquêtes historiques du mouvement ouvrier français. Il se heurte à une résistance obstinée, y compris de la part des cheminots, qui font grève deux jours par semaine depuis deux mois. Mais Macron ne cédera pas à la légère.Par Eric et Sander
Au même moment, les universités ont été occupées par des étudiants qui protestent contre la manière dont Macron et son gouvernement des riches veulent s’en prendre à la démocratisation de l’éducation. Pendant la journée, la police tente d’évacuer les campus, la nuit, ce sont les gangs néo-fascistes qui prennent en charge le sale boulot de la police. La colère est générale, la grève s’est étendue à divers secteurs.
Cela a pris un certain temps mais, en fin de compte, le principal opposant politique de Macron, La France Insoumise (LFI) de Mélenchon, a réussi à forger un large front dans ce qui a été appelé une ‘‘marée humaine’’. Mélenchon a également appelé à la mise en place de comités de mobilisation avant le 26 mai. Il s’agit d’un premier pas vers la poursuite de la lutte de manière constructive et organisée. Les Etudiants de Gauche Actifs et le Parti Socialiste de Lutte ont exprimé leur solidarité lors de la grande manifestation du 26 mai à Paris, mais il y a également eu des manifestations dans plusieurs autres villes françaises.
LFI, CGT, PCF, Action, la ZAD et divers partis de la gauche radicales, associations et syndicats ont soutenu l’appel vers la Marée Humaine pour qu’une vague de protestation soit entendue dans tout le pays. Le taux de participation a été important, 280 000 personnes à travers la France et l’atmosphère était combative. Le slogan “Macron un an, ça suffit !’’ était l’expression parfaite de la colère contre la poursuite et l’intensification des politiques néolibérales de ses prédécesseurs. Pourtant, ce n’est pas devenu la surprise que certains avaient espéré et, bien que combatif, l’événement comprenait aussi des éléments de résignation clairement perceptibles parmi les manifestants.
Plusieurs participants nous ont expliqué que la division de la gauche est un frein sérieux sur le mouvement. Beaucoup convenaient avec nous que le fait que Lutte Ouvrière (LO), le Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) et Hamon (PS) ont eu tort de ne pas retirer leurs candidatures en faveur de Mélenchon avant le premier tour des élections présidentielles du printemps dernier. Deux semaines avant le jour des élections, il était déjà très clair que leurs candidats ne figureraient pas au deuxième tour. Ils auraient parfaitement pu expliquer qu’ils avaient une excellente campagne derrière eux, mais n’avaient aucune chance eux-mêmes et qu’en dépit de divergences, ils retiraient leurs candidatures en faveur de Mélenchon. Cela aurait non seulement placé la gauche dans une bien meilleure position pour le deuxième tour, mais cela aurait également simplifié l’unité dans la lutte actuelle.
La plupart des manifestants ont convenu avec nous que l’appel de Mélenchon pour la mise en place de comités de mobilisation pour le 26 mai était une excellente initiative. Lorsque nous leur avons demandé combien de leurs collègues et/ou voisins étaient venus, la réponse était malheureusement généralement décevante. Il n’y avait pas non plus de véritables délégations des campus occupés ou des écoles secondaires. En bref, ce n’est pas parce que les gens sont généralement d’accord avec un appel qu’ils comprennent comment le mettre en pratique sur le terrain. Ce sont de vieilles traditions qui ont dans une large mesure été perdues. Aussi importants que les médias sociaux aient pu être pour la campagne électorale de Mélenchon et le lancement de La France Insoumise, ils ne suffisent pas pour restaurer ces traditions. Pour cela il faut un débat démocratique et une structure d’organisation. Mélenchon et La France Insoumise doivent s’attaquer d’urgence à ce problème.
Les dirigeants des syndicats, le carburant de la protestation, espèrent que Macron “descendra de son piédestal pour écouter le peuple”. Cependant, c’est une illusion d’imaginer que Macron va écouter et peut être reculer grâce au dialogue social. Interrogé sur la volonté de la CGT de le dégager par la grève, Martinez a malheureusement répondu par la négative. Chez FO, le secrétaire général a été démis de ses fonctions et remplacé en raison de son manque de combativité. Nous ne pouvons et ne devons pas compter sur la bonne volonté d’un gouvernement et d’un président de cette sorte. En Belgique, nous avons connu une situation similaire en 2014, et le premier plan d’action des syndicats a fait vaciller le gouvernement. Il y a même eu des discussions sur un gouvernement en affaire courantes pour calmer les choses. L’absence d’un nouveau plan d’action au début de l’année 2015, à commencer par une grève générale de 48 heures, a donné au gouvernement l’occasion de se restaurer. Le mouvement a été forcé de se mettre sur la défensive et nous en ressentons encore les conséquences aujourd’hui.
C’est pour cette raison que notre organisation-sœur française, la Gauche Révolutionnaire, a défendu la préparation d’une journée nationale de grève en juin lors des manifestations du 26 mai. Si les syndicats et LFI ne renversent pas Macron et son gouvernement, le même scénario qu’en Belgique menace. C’est une chose de faire tomber le gouvernement, mais que mettre à la place ? Cela nous ramène à la division de la gauche. Lors de la manifestation à Paris, elle a même eu une expression physique : le PCF, le Parti Ouvrier Indépendant Démocratique (POID), le NPA et LO avaient chacun leur propre délégation, ce que nous pouvons très bien comprendre, mais ce qui est beaucoup plus difficile pour nous est le fait que les services d’ordre de chaque délégation fermaient hermétiquement leurs blocs pour l’extérieur, seuls LFI et le NPA avaient une attitude plus ouverte. Non seulement cela entrave le dialogue et l’échange d’expériences entre participants, mais cela peut aussi indiquer que les dirigeants de ces partis veulent contrôler tout débat par en haut.
Au contraire, un programme devrait être discuté et élaboré à partir de la base du mouvement, du bas vers le haut. Toutes les forces, partis de gauche, associations et syndicats devraient être réunis autour de ce programme, qui poserait les bases d’un gouvernement des travailleurs qui ne se concentrerait plus sur la soif de profits d’une petite élite, mais utiliserait les moyens existants pour répondre aux besoins de la grande majorité. Pour l’instant, cela semble être un rêve inaccessible à la plupart des manifestants. Nous avons néanmoins estimé qu’il était important de mettre cette idée en action maintenant, car nous sommes convaincus qu’à mesure que la lutte de classe devient plus ouvertement aigüe, de plus en plus de travailleurs et de jeunes adopteront cette idée. Et dès qu’une idée est soutenue par des couches plus larges de la société, elle devient une force sociale.
-
[FILM] L’Insoumis

Que vous soyez fan de Jean-Luc Mélenchon ou si, à l’opposé, vous ne pouvez pas voir en peinture ce personnage, courez vite voir le film de Gilles Perret, L’Insoumis. Courez car le film n’a pas une vocation commerciale et ne restera sans doute pas très longtemps à l’affiche. L’intérêt fondamental est le déroulé de la campagne électorale de Jean-Luc Mélenchon pour les élections présidentielles françaises d’avril 2017.
Au fil de la campagne on assiste à la croissance d’une immense vague d’espoir de changement suscité par la candidature du représentant de la France Insoumise. Au fil des meetings, les foules qui attendent dehors, faute d ‘avoir pu trouver de place à l’intérieur de salles bondées, se font de plus en plus en plus grosses. Témoignage s’il en est de la popularité de la campagne qui a ranimé l’espoir non seulement chez pas mal de déçus de l’ère Hollande mais aussi auprès de nombreux jeunes.
Les vacheries et nombreux croc-en-jambe des journalistes destinés à faire trébucher le candidat témoignent de l’inquiétude des milieux dirigeants alors que successivement les candidatures potentielles de Sarkozy, Juppé, Hollande, Valls tombent à l’eau.
Le réalisateur, Gilles Perret, qui a filmé la campagne caméra à l’épaule, a précédemment réalisé La Sociale (2016) sur la naissance de la sécurité sociale en France, et Les Jours Heureux (2013) sur le Conseil national de la Résistance.
L’Insoumis est actuellement au programme des salles suivantes : Aventure, Vendôme (Bruxelles), Churchill (Liège), Quai 10 (Charleroi), Cameo (Namur).
=> Rubrique de ce site consacrée à la France Insoumise et à Jean Luc Mélenchon
-
Vague de contestation sociale en France. Macron restera-t-il en place ?

Manifestation du 14 avril à Marseille. Photos : Els Deschoemacker. Elu sur les ruines des partis traditionnels en France, Macron et son parti La république en marche (LREM) ont vaincu Marine Le Pen et le FN au 2ième tour des élections présidentielles françaises de l’année passée. Moins d’un an plus tard, un tsunami de protestations déferle sur le pays. Le parallèle saute aux yeux avec la Belgique quelques mois après l’arrivée au pouvoir du gouvernement de droite. Les questions posées au mouvement social sont identiques : comment les jeunes et les travailleurs peuvent-ils l’emporter contre une force qui prétend vouloir préserver le dialogue social avec les syndicats mais qui, en pratique, le vide de tout contenu. « La démocratie, ce n’est pas la rue », est le maître-mot de Macron. Où encore avons-nous déjà entendu ça ?
Interview de Rachel Mahé, membre de la Gauche Révolutionnaire (section française du CIO), candidate de la France Insoumise aux législatives de 2017 à Montélimar. Propos recueillis par Els Deschoemacker.
Près d’un an après son arrivée au pouvoir, quel bilan tirer du ‘‘changement’’ de Macron ?Aujourd’hui, personne ne croit plus à la propagande de sa campagne électorale qui voulait répondre au rejet des partis politiques traditionnels et de leurs politiques. L’état de conscience qui domine actuellement, c’est que la politique de Macron est la même que celle de ses prédécesseurs, une politique qui ne sert que les intérêts des plus riches.
Et c’est même pire que ça. Macron va encore plus loin dans la destruction des conquêtes de la classe ouvrière. La deuxième Loi travail repose sur la casse complète des contrats à durée indéterminée. Elle facilite les licenciements pour prétexte économique, même si les entreprises réalisent toujours des bénéfices ! Elle comprend aussi une attaque contre la représentation syndicale qui vise à réduire le nombre d’élus des syndicats dans les négociations. Les patrons d’entreprises peuvent maintenant directement régner par référendums entreprise par entreprise, ce qui est bien pratique pour contourner les syndicats et diviser la classe ouvrière.
Une autre attaque du gouvernement est la baisse des pensions pour toute une partie des retraités. Il y a encore la suppression de 120.000 postes de fonctionnaires dans la santé, l’éducation,… Alors que parallèlement, le parlement ne s’est pas gêné pour voter une augmentation des indemnités (salaires) parlementaires ! L’impôt sur les grandes fortunes a également été revu pour faire épargner 3 milliards d’euros aux plus riches ! Ce n’est pas difficile de voir dans quel camp Macron se place !
Encore un autre aspect important de sa présidence est la constitutionnalisation de l’état d’urgence, qui représente un impressionnant recul pour nos droits. Cela signifie plus de possibilités pour surveiller la population et réprimer la contestation sociale. On voit concrètement aujourd’hui que le gouvernement n’hésite pas à recourir à une violente répression contre le blocage des universités ou contre la ZAD de Notre-Dame des Landes car c’est la seule solution qu’il a pour tenter d’étouffer les contestations.
Cette politique n’est pas tout simplement acceptée, une impressionnante vague de protestations a recouvert la France !
Oui. En fait, la contestation a commencé peu de temps après sa prise de pouvoir, d’abord contre sa Loi travail. Mais il est vrai qu’aujourd’hui les luttes sont très nombreuses et la colère généralisée. Les secteurs publics, comme la SNCF, la santé, l’éducation… connaissent une mobilisation importante. Les conditions de travail actuelles sont déjà insupportables et le gouvernement continue d’attaquer. Il veut notamment supprimer 120 000 postes dans la fonction publique (les annonces de fermeture de classe, de suppression de postes de professeur commencent à tomber). Et à côté de ça, on observe aussi beaucoup de grèves dans le privé, pour de meilleures conditions de travail et pour des augmentations salariales.
Début 2018, c’est le secteur public qui a relancé un mouvement national, avec la grève du 22 mars où se sont retrouvés les cheminots, l’éducation (jeunes et professeurs), la fonction territoriale, la santé, l’énergie… Cela a nourri la mobilisation de la jeunesse et des étudiants contre les lois réformant le Bac et instaurant la sélection à l’université. Aujourd’hui, nous sommes encore dans une phase où de nouvelles universités sont bloquées chaque semaine et où le nombre d’étudiants présents en assemblée général augmente chaque fois.
Ce qui domine le tableau aujourd’hui, c’est la lutte des cheminots qui, comme celle des étudiants, s’inscrit dans la durée. Les cheminots voient leur statut attaqué et s’opposent à la privatisation du rail. Ils ont lancé une grève perlée, jusqu’à la fin du mois de juin et certains sont localement en grève reconductible depuis le 03 avril. D’autres secteurs ont commencé à rejoindre les cheminots certains jours de grève, comme les étudiants, les travailleurs de l’énergie et ceux d’Air-France.Peux-tu un peu plus nous parler de l’objectif de leur plan d’action et du rôle des syndicats ?
Les syndicats subissent une pression énorme pour entrer en action et ils sont pour le moment le moteur des protestations. Mais les directions ne sont pas tout à fait prêtes à aller jusqu’à mettre en danger le gouvernement. Comme Philippe Martinez (le secrétaire général de la CGT) l’a expliqué dans une interview au journal Le Monde, il appelle Macron à ‘‘redescendre de son piédestal’’, c’est-à-dire à écouter les gens pour reculer ou abandonner ses projets. C’est totalement illusoire ! Le problème, c’est que les syndicats refusent d’aborder la dimension politique inclue dans la bataille qui se déroule.
L’opposition politique a donc un grand rôle à jouer, surtout la France Insoumise. Mélenchon est devenu le plus grand challengeur politique de Macron.
C’est vrai. Au cours de la campagne électorale déjà, Mélenchon a incarné celui qui ramenait le débat sur les questions sociales et il a averti quelque part de ce que serait une présidence Macron. Sa campagne était très pédagogique, dénonçant le fonctionnement du capitalisme et la nécessité de rompre avec ces politiques. Il est parvenu à mobiliser des milliers de jeunes et de travailleurs lors de ses meetings et cela représente un potentiel énorme pour construire une opposition politique à Macron.
Quel a été son rôle depuis lors ?
A l’automne déjà, Mélenchon a lancé un appel pour rassembler les forces syndicales et les partis de gauches derrière une manifestation pour ‘‘déferler à un million sur les champs Elysées’’. Mais malheureusement cet appel n’a pas été repris. Pourtant, selon nous, il s’agissait d’un bon pas en avant pour construire un front commun contre Macron. Cette question reste pertinente, elle est même cruciale. C’est bien lui qui porte la question de l’alternative politique à opposer au gouvernement mais la France insoumise, en l’état actuel, n’est pas perçue pour autant comme un outil dont les jeunes et les travailleurs en lutte pourraient s’emparer.
La grande manifestation à Marseille le 14 avril fut la première à être capable de réunir officiellement les forces syndicales, politiques et associatives en lutte contre Macron. C’est la CGT départementale qui était à l’initiative de cet appel et qui a d’une certaine manière, reprit l’idée de Mélenchon. C’est sur cette voie que nous devons continuer. Quelques dizaines de milliers de personnes étaient présentes. Dans le cortège, l’état d’esprit qui dominait était que l’unité est nécessaire et que, pour gagner, il faut être forts, solides et nombreux. Cette manifestation a rassemblé la CGT, des cheminots, des postiers, des dockers, le syndicat Sud et quelques professeurs, des jeunes (peu nombreux malheureusement), des collectifs de défense des migrants et des partis politique de gauche dont la France Insoumise, qui a fermé la marche en grand nombre.
Quel rôle joue la Gauche Révolutionnaire dans la FI et quels sont nos mots d’ordres pour le mouvement ?
Nous continuons à construire les groupes d’action de la FI et débattons à l’intérieur du rôle que les insoumis doivent jouer dans la lutte contre la politique de Macron. Pour que la FI continue d’attirer et devienne un véritable outil politique pour défendre notre camp, la structuration du mouvement est nécessaire, vers un vrai parti de masse des travailleurs qui soit réellement démocratique.
Et dans le mouvement lui-même, nous soutenons bien évidemment tous les secteurs en lutte et leurs revendications propres mais nous insistons sur l’importance de parvenir à une convergence car elle seule pourra arrêter le rouleau compresseur que conduit Macron. Il est crucial que nous parvenions à un rassemblement autour de revendications globales telles que l’abrogation des lois travail et de réforme dans l’éducation, l’augmentation du smic, la réduction de la semaine à 32h… Nous posons la question de l’élaboration d’un véritable plan qui permette à chaque secteur de se mobiliser et de tous se retrouver pour une grève nationale interprofessionnelle. Il faudrait pouvoir aller vers une grève générale de 24h, voire d’une grève reconductible pour bloquer totalement l’économie.
Beaucoup de références sont faites vers un nouveau mai ’68. Est-ce possible ?
Tout juste 50 ans après Mai 68, nous connaissons une large contestation et une remise en cause profonde du système. La situation est différente de 1968 sous bien des égards mais l’histoire doit nous inspirer et nous donner confiance en notre capacité à défier le pouvoir. D’un autre côté, il est crucial aussi de tirer les leçons des limites qui ont empêché que n’éclate une véritable révolution socialiste car c’est bien là notre objectif. Construisons dès à présent une force politique déterminée à prendre le pouvoir et à changer de système !
Manifestation du 14 avril à Marseille. Photos : Els Deschoemacker.
-
L’establishment pris de panique et bousculé par les nouvelles formations de gauche

Mélenchon, lors de la marche de La France Insoumise du 23 septembre, à laquelle ont participé 150.000 personnes. Photo : Gauche Révolutionnaire Le 23 septembre, ce sont 150.000 personnes qui ont répondu à l’appel de la France Insoumise (LFI) pour défiler à Paris contre le ‘‘coup d’Etat social’’ de Macron ! Tandis que ce dernier voyait sa cote de popularité continuer de chuter, LFI arrivait largement en tête des formations citées comme première force d’opposition au gouvernement. ‘‘Je crois en la démocratie, mais la démocratie, ce n’est pas la rue’’, a réagi Macron, visiblement très agacé. A Paris, face à la gigantesque foule, Mélenchon lui a répondu : ‘‘C’est la rue qui a abattu les rois, les nazis, le plan Juppé et le CPE… (…) La bataille n’est pas finie, elle commence.’’
Par Nicolas Croes
La révolte dans les urnes
En France et ailleurs, le paysage politique traditionnel fait face à un séisme inédit. Depuis le début de la crise, les partis traditionnels ont appliqué une politique fondamentalement identique: l’austérité. Electoralement, le prix à payer fut très lourd, tout particulièrement pour les partis sociaux-démocrates. Leur argument du ‘‘moindre mal’’ était usé jusqu’à la corde. Pour les différentes classes capitalistes nationales, aux profondes difficultés économiques s’ajoutait la crise de leurs instruments politiques privilégiés. Longtemps exception à la règle, même le PS d’Elio Di Rupo est maintenant touché.
Pour l’establishment capitaliste, le pire était encore à venir : le processus de développement de nouvelles formations et courants de gauche a été accéléré. Le phénomène n’était pas neuf, mais le caractère durable de la crise a offert un soutien particulièrement large à des formations telles que SYRIZA et Podemos. SYRIZA est arrivé au pouvoir début 2015. Dans l’Etat espagnol, Podemos et les listes de confluence de gauche prenaient leur envol. Au Royaume-Uni, la direction du Parti travailliste a échappé à l’aile droite du parti. Leurs multiples manœuvres n’ont pas réussi à contenir l’arrivée massive et enthousiaste des centaines de milliers de jeunes et de travailleurs qui ont porté le vétéran de la gauche du parti Jeremy Corbyn à sa tête. De l’autre côté de l’Atlantique, Bernie Sanders a chamboulé les primaires Démocrates face à la candidate par excellence du monde de Wall Street, Hillary Clinton.
Comment parvenir au changement
Les formations et figures de gauche qui ont su exprimer audacieusement l’envie de changements radicaux ont pu compter sur un large écho. Après des décennies où la pensée unique néolibérale a pesé telle une chape de plomb, l’arrivée d’un programme même limité de réformes progressistes a semblé révolutionnaire aux yeux de beaucoup de personnes, même si le programme de ces nouvelles formations ne dépasse généralement pas le cadre de simples ajustements au système capitaliste. L’idée la plus en vogue est encore que le capitalisme pourrait être graduellement démantelé pour donner naissance à une société égalitaire, sans grandes précisions sur ce que pourrait bien être une telle société.
De nos jours, c’est encore la classe capitaliste qui constitue la classe dominante. Cette classe sociale possède et contrôle les ressources économiques cruciales de la société (finance, grandes entreprises,…) et est liée à l’appareil d’Etat (justice, forces armées, échelons élevés de la fonction publique,…) par un millier de ficelles. L’Histoire a déjà démontré à maintes reprises que si la classe dominante sent que son pouvoir, sa richesse, et ses privilèges sont menacés, alors elle n’hésitera pas à recourir au sabotage économique ou même aux coups d’État militaires, comme cela s’est produit au Chili en septembre 1973.
De plus, en cette période de crise de longue durée, les limites du réformisme sont bien plus rapidement atteintes que dans la période exceptionnelle d’après-guerre où existait également la pression de l’URSS. L’expérience de SYRIZA démontre que, aujourd’hui, la confrontation ou la capitulation avec le système capitaliste et ses institutions se posera très rapidement. Pour les créanciers et la classe capitaliste, il faut à tout prix éviter le risque de contagion politique qui pourrait naître d’une rupture avec la politique d’austérité. La plus importante était d’humilier SYRIZA et de décourager de nouvelles initiatives de gauche. Là où un certain espace de réformes progressistes a pu exister, comme au Venezuela, la fin des prix élevés du pétrole a rapidement entrainé la fin de diverses conquêtes sociales tandis que le pays s’enfonçait dans la crise politique et sociale. Au Venezuela, l’échec ne provient pas du socialisme, mais justement de l’absence de rupture socialiste avec le pouvoir du capital.
Construire le mouvement
Ces nouvelles formations de gauche représentent de véritables pas en avant pour débattre du programme, de la stratégie et des tactiques nécessaires à la prise du pouvoir par les travailleurs et la jeunesse. L’expérience de Syriza souligne l’intérêt fondamental d’adopter une approche révolutionnaire, c’est-à-dire de rompre avec les règles de la zone euro, de l’UE et du capitalisme. Ce dont nous avons besoin, c’est d’une stratégie de confrontation reposant sur le refus du paiement de la dette publique, sur l’instauration d’un contrôle des capitaux, sur la propriété publique des banques et des autres secteurs-clé de l’économie sous contrôle démocratique des travailleurs, sur l’élaboration démocratique d’une planification de l’économie collectivisée pour répondre aux urgences sociales et écologiques laissées par le capitalisme.
Afin de contrôler effectivement les leviers de l’économie, la collectivité doit les posséder. On ne contrôle pas ce que l’on ne possède pas. Il en va de même pour le mouvement social lui-même. Le meilleur moyen d’assurer que ce programme soit appliqué, c’est qu’il soit porté par la base. Pour cela, il faut construire un instrument politique: un parti de masse des travailleurs capable de réunir toute l’énergie du mouvement afin d’en faire une véritable force reposant sur le nombre. Il faut bien entendu donner une direction à cette force, et c’est là tout l’intérêt d’un programme. Pour le PSL, arracher de véritables changements signifie de viser à une transformation socialiste de la société. Chaque pas en avant est positif en soi, mais il doit toujours être conforme à cet objectif.
#JoinTheWave : construire une campagne de gauche large et inclusive en Belgique ?
En 2014, la gauche radicale est arrivée au parlement pour la première fois depuis les années ’80. Depuis lors, Les élus du PTB ont donné plus d’échos à un débat qui, jusque-là, était essentiellement limité aux lieux de travail et aux milieux militants. Aujourd’hui, les sondages laissent présager une percée bien plus importante.
Avec son appel #JoinTheWave (rejoins la vague), le PTB vise à construire une large campagne autour du parti en disant que voter ne suffit pas, qu’il faut aussi s’organiser. Au-delà de la répartition de tâches pratiques auprès des bénévoles pour les campagnes électorales, l’appel #JoinTheWave pourrait opter pour une approche large et inclusive reposant sur l’action. Les campagnes de gauche qui ont connu les plus grands succès électoraux sont celles qui ont su susciter l’enthousiasme et la participation massive dans l’action. Dans l’Etat espagnol, Podemos a bénéficié du mouvement des Indignés. Aux Etats-Unis, il y a eu le mouvement Occupy avant Sanders. Ou encore les meetings et manifestations de masse autour de Corbyn en Angleterre et de Mélenchon en France.
Cela pourrait ainsi ouvrir la voie à l’engagement actif de dizaines de milliers de personnes impliquées dans les mouvements syndicaux, de jeunesse, féministes, écologistes, antiracistes, pacifistes,… autour du PTB. Et comment mieux lancer une telle campagne que par le moyen d’une large mobilisation vers des débats publics dans toutes les villes, ouverts à toute personne désireuse de rejoindre ‘‘the wave’’, à titre individuel ou avec son parti, sa délégation syndicale, son association,… ? La création de ‘‘groupes d’appui’’ pourrait y être proposée, à l’instar de ceux de la France Insoumise. Ces groupes pourraient donner de l’élan aux campagnes électorales, mais aussi aux mobilisations sociales, comme c’est le cas des groupes d’appui de la France Insoumise.
Si le PTB confirme les résultats des sondages en octobre 2018, la question de majorités progressistes au niveau local peut être rapidement posée. Cela exige que ces majorités locales précisent qu’elles ont l’ambition d’appliquer une politique fondamentalement différente. L’introduction immédiate pour tous les employés communaux d’une semaine de 30 heures de travail sans perte de salaire avec embauches compensatoires, le remplacement des contrats précaires par des statuts de fonctionnaire ou au moins des contrats à durée indéterminée, un programme massif d’investissements publics pour davantage de logements sociaux de qualité et énergétiquement neutres et, entretemps, assurer l’accueil pour tous les sans-abris ou ceux qui vivent dans la pauvreté, etc.
Le PTB et les majorités progressistes entreront en collision avec la camisole financière dans laquelle les gouvernements régionaux et le fédéral maintiennent les communes. Dans les années 80’, le conseil municipal de Liverpool, en Angleterre, a trouvé la parade pour lancer son vaste programme d’investissements publics. Il a construit un front de résistance d’une vingtaine de municipalités de gauche. Et, via des grèves et des manifestations de masse, il a forcé le gouvernement Thatcher à céder un refinancement de la ville.
Une initiative inclusive basée sur l’action peut permettre une préparation politique via des discussions ouvertes et démocratiques, mais aussi la défense et la popularisation d’un programme qui rend possible de parvenir à la victoire. Des propositions et mesures concrètes sont indispensables, mais un projet pour ce qu’il conviendra de faire si l’establishment essaie de nous étouffer l’est également ; un projet qui ne peut être que celui du véritable socialisme démocratique car les marges pour changer la politique n’existent pas sous le capitalisme.
-
France. Mobilisation générale contre les ordonnances Macron!

Le 23 septembre, La France Insoumise a réuni 150.000 personnes pour sa “marche contre le coup d’Etat social” de Macron ! Photo : Gauche Révolutionnaire (CIO-France) Cet été, Macron et son gouvernement sont partis en croisade contre les travailleurs. La méthode est brutale, le timing serré. Mais le mouvement ouvrier se soulève contre la loi travail XXL.
Par Nicolas M (Bruxelles)
Au beau milieu d’une crise politique majeure qui a vu la recomposition du paysage politique français, Macron est apparu comme le candidat miracle de l’establishment capitaliste. Durant la campagne, il s’est fait une place de champion du ‘‘consensus mou’’ et des phrases creuses. Mais il portait bel et bien un projet : celui du patronat et des grandes entreprises françaises. Sa ministre du Travail, Muriel Pénicaud, fut d’ailleurs directrice générale adjointe chez Dassault, DRH chez Danone ou encore patronne de Business France… Le gouvernement de La République En Marche (LREM) s’apparente à un club de spécialistes du boursicotage et d’habitués des grandes messes du Medef (la fédération patronale française) avec à leur tête un président qui fut jadis employé de la banque d’affaires Rothschild.
Une arme de destruction massive des conditions de travail
Avec la ‘‘Réforme pour le renforcement du dialogue social’’, la nouvelle ‘‘Loi Travail’’, les grands patrons français accèdent à un puissant arsenal pour baisser les coûts de production sur le dos des salariés en augmentant la précarité et la flexibilité du marché du travail. Il parait que ‘‘la confiance est un élément indispensable si l’on veut relancer notre économie’’. Au cours du premier semestre de 2017 uniquement, les bénéfices du CAC40 (les principales entreprises françaises) ont atteint un nouveau record : 51 milliards €. Il s’agit de 11 milliards de plus qu’en 2016 sur la même période ! Elle s’arrête où leur soif de confiance ?
Pour le gouvernement, soutenir la confiance des patrons, cela passe par la quasi-disparition de l’impôt sur la fortune et d’autres mesures similaires. Les plus riches reçoivent ainsi un cadeau de trois milliards d’euros ! Quant à la nouvelle réforme du code du travail, elle vise à (encore plus) faciliter les licenciements collectifs et individuels ainsi qu’à limiter les indemnités de licenciement. La ‘‘hiérarchie des normes’’ est également renversée, c’est-à-dire que les accords nationaux, interprofessionnels et de branches passeraient à l’arrière-plan au profit de négociations au sein même des entreprises. Ce serait la victoire du ‘‘diviser pour mieux régner’’ et la voie serait ouverte vers des négociations individuelles, travailleur par travailleur face au parton. Plus aucun tabou ne semble subsister. Le contrat de travail pourrait être modifié à tout moment et pas seulement concernant la durée du travail, mais aussi au sujet du salaire, de la santé au travail, de la ‘‘mobilité’’, de la durée de la période d’essai,…
Le retour du spectre d’un mouvement de masse
En juin dernier, un plan de mobilisation a vu le jour. Une journée de grève fut annoncée pour le 12 septembre. Cette journée fut une réussite, des dizaines de milliers de grévistes et un demi-million de manifestants à travers le pays. Un appel à une grève reconductible dans les transports routiers pour le 25 septembre s’est rajouté à l’agenda, ainsi qu’une nouvelle journée de grève nationale pour le 21 septembre. Tous les syndicats n’ont pas rejoint ces dates de mobilisation mais l’ensemble d’entre eux ont appelé les fonctionnaires à la grève le 10 octobre.
Ce plan d’action est un bon point de départ pour renverser la dynamique. Ce serait une erreur pour les syndicats de se laisser enfermer dans les consultations avec le gouvernement. Construire un rapport de force dans la rue et dans les entreprises est une tâche cruciale, avec des journées de grèves couplées à une large campagne d’assemblées générales.
Le blocage de l’activité économique par la grève était largement présent dans les témoignages des délégués interviewés les 12 et 21 septembre. C’est le moyen idéal de stopper l’avalanche de sales coups du gouvernement, sur le modèle de la lutte contre le CPE (Contrat première embauche, 2006) ou contre les réformes des pensions (en 1995, 2003 et 2010).
La France insoumise : du parlement à la rue
La France Insoumise (LFI) a ajouté une journée de mobilisation avec la manifestion massive du 23 septembre à Paris, un bon outil supplémentaire pour construire la résistance. Après sa percée électorale (19,6% à la présidentielle et un groupe parlementaire de 17 députés aux législatives), LFI a explicitement appelé à participer aux actions syndicales. Durant toute la campagne, la formation de Jean Luc Mélenchon a illustré sa capacité à mobiliser massivement la jeunesse et les travailleurs au travers de meetings de masses et dans la rue (le 18 mars à Paris).
Diverses nouvelles formations de gauche en Europe ont par le passé plutôt eu tendance à diviser artificiellement le ‘‘syndical’’ et le ‘‘politique’’ et à rester cantonnés à l’arène électorale. La LFI semble adopter une approche différente, et selon nous, c’est tant mieux. Pour se battre, le mouvement des travailleurs a besoin d’utiliser ses deux poings de la manière la plus coordonnée possible. L’expérience concrète de la lutte et l’implication dans les mobilisations sociales et syndicales est aussi une merveilleuse école de la lutte pour les nouvelles couches qui sont entrées dans la politique avec la campagne de Mélenchon.
Bien que comportant encore certaines faiblesses à nos yeux, le programme de LFI figure parmi les programmes anti-austérité les plus aboutis en Europe. Nombre de ses revendications rejoignent celles des syndicats, cela peut constituer une alternative politique face au programme des Macron & Co (réduction du temps de travail sans perte de salaire et avec embauches compensatoires, le Contrat à durée indéterminée comme norme pour les contrats de travail, la revalorisation de toutes les allocations sociales,…).
Selon nous, la gauche radicale doit s’impliquer dans les actions syndicales et s’investir dans LFI – c’est-à-dire vers là où la classe des travailleurs et la jeunesse s’oriente, se rassemble et s’organise actuellement – pour aider à tirer les meilleures leçons de la lutte afin de poser les prochains pas du mouvement.
Notre organisation-sœur française, la Gauche Révolutionnaire, défend la nécessité d’un nouveau parti de masse des travailleurs. Un parti dont les membres sont ceux qui organisent les piquets devant leur entreprise, bloquent leurs universités et leur lycée et défendent autour d’eux une alternative anti austérité armés d’un programme offensif. Un tel parti – au fonctionnement démocratique – serait un levier pour largement populariser une analyse collective de la crise du système capitaliste et la nécessité de le renverser. Ce serait également un puissant forum pour discuter de l’alternative à opposer au système capitaliste, une alternative socialiste.
