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Tag: Italie
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MANIFS MASSIVES CONTRE LE G8 EN ECOSSE
En juillet, nous avons participé avec le MAS aux manifestations contre le sommet du G8. Nous avons diffusé nos idées et discuté avec beaucoup de manifestants sur l’alternative que nous proposons au système actuel. Par notre participation, nous avons démontré ainsi que nous ne sommes pas du tout d’accord avec le régime capitaliste qui dirige notre société aujourd’hui.
Annemarijn Juffermans.
Cette année la réunion du G8 a eu lieu en Ecosse. Le G8 se réunit annuellement. Ils comprend les dirigeants des 7 pays industrialisés les plus riches plus la Russie ; ces pays sont les Etats-Unis, le Royaume Uni, la France, l’Allemagne, l’Italie, le Japon et le Canada. Le G8 a surgi pour offrir une “solution” aux problèmes économiques actuels. Souvent, l’Afrique est un point important de leur ordre du jour, mais toutes les solutions trouvées sont vouées à l’échec. Ce sont des capitalistes qui donnent une réponse assez simpliste aux problèmes que connaît l’Afrique. Ainsi, on prétend que l’Afrique est confrontée à la pauvreté et à la guerre parce que ces pays sont conduits par des mauvais gouvernements. En réalité, ces crises ont été favorisées par les longues années d’exploitation par l’occident.
Nous sommes allés manifester pour proclamer notre alternative socialiste. Les autres alternatives ne sont pas capables de résoudre les problèmes contemporains. Le sommet du G8 montre clairement qu’il est grand temps pour un nouveau régime.
En Ecosse, nous avons organisé un camp de jeunes, auquel beaucoup de nos membres et contacts ont participé. De cette façon, nous pouvions lier les actions que nous avons menées à la théorie marxiste.
Manifs Massives
Ils y avaient différentes manifestations. La première manif était à Edinbourgh. Elle comptait environ 250.000 personnes. Les organisateurs avaient appelé à une manifestation en blanc. Le but était clairement de maintenir le niveau politique le plus bas possible. Notre délégation d’environ 250 personnes était habillée entièrement en rouge et était la plus combative. Nous avons ensuite organisé un meeting auquel beaucoup de personnes ont assisté.
Répression
Il y avait encore quelques manifestations plus petites, comme une devant un centre d’accueil pour des demandeurs d’asile et une autre devant une centrale nucléaire, auxquelles nous avons aussi participé. La dernière manif était à Gleneagles. C’est là où la réunion du G8 avait lieu. La police n’était pas très favorable à cette manif et beaucoup de mesures avaient été prises. On a mis du temps pour former notre délégation. Après un temps d’attente assez court, nous avons commencé la manif, mais après une demi heure elle était stoppée. On nous a dit qu’il y avait des affrontements avec la police au début de la manif. Après, les médias s’étendaient sur ces violences, même si elles n’étaient que très minimes.
Le rôle des anarchistes
Nous voulons ajouter encore un petit commentaire sur les anarchistes présents en Ecosse. Ils étaient venus avec l’idée de bien se faire entendre. Il l’ont fait de façon bizarre, en se séparant du reste des manifestants. Ils ont formé par exemple un ‘bloc noir’. Ils ont été directement par écartés par la police.
Ils ont ensuite été vers l’affrontement avec la police. Bien sûr, les médias trouvent cela fantastique parce que c’est plus sensationnel qu’une manif tranquille. Nous trouvons que c’est stupide qu’ils se concentrent uniquement sur cela, parce que cela a un impact négatif sue l’ensemble de la manif.
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Allemagne. Le WASG et le nouveau parti des travailleurs
Avec son programme de contre-réformes, intitulé Agenda 2010, quand le chancelier Gerhardt Schröder (SPD) débuta sa deuxième législature, il entra dans l’histoire comme le plus grand pillard d’acquis sociaux depuis la 2e Guerre Mondiale. Durant les six années du gouvernement rouge-vert, tout est passé à la trappe: les malades, les travailleurs, les chômeurs,… tout, sauf les entrepreneurs. La mobilisation de masse fut la réponse faite au gouvernement. Aujourd’hui, l’Allemagne a atteint de nouveaux records: il y a maintenant 5 millions de chômeurs. A première vue, le gouvernement semble avoir réalisé ses objectifs, avec le soutien bénévole de l’opposition de droite. Mais les années de résistance ont laissé leurs traces et, avec l’apparition du WASG (Wahlalternative – Arbeit und soziale Gerechtigkeit; Alternative électorale – Emploi et Justice Sociale), le mouvement social a trouvé son expression politique, qui dit vouloir rompre avec la politique antisociale.
Jan Croe
C’est dans les luttes et manifestations contre l’Agenda 2010 en novembre 2003 (100 000 manifestants) et en avril 2004 (500 000 manifestants) que le WASG a vu le jour. Des dirigeants syndicaux de ver.di (syndicat des fonctionnaires) et de IG-Metall ont conclu que les possibilités pour que le gouvernement rouge-vert change de cap et adopte une politique sociale étaient devenues tout simplement irréalistes. Tandis que la direction de la DGB (la coupole syndicale allemande) tente toujours à l’heure actuelle de maintenir les liens avec la social-démocratie, le SPD, les syndicalistes à l’origine du WASG revendiquent la fin de ces bavardages.
L’attraction envers le mouvement fut importante. Trois mois déjà après sa mise-sur-pied, la création d’une septantaine de groupes régionaux était planifiée dans toute l’Allemagne. Quand la nouvelle formation s’est présentée pour la première fois aux élections, en Rhénanie du Nord, elle a obtenu un résultat honorable: 2,2 pc. Dans ces mêmes élections, le SPD de Schröder a subit une défaite historique après 39 ans au gouvernement: la dernière coalition rouge-verte dans un gouvernement local fut renvoyée dans l’opposition. Cette situation devenait intenable pour Schröder et les social-démocrates qui se sont vu contraints de prévoir des élections fédérales anticipées en septembre.
A ce sujet, au sein du WASG, des discussions et des luttes sont en cours sur l’attitude à adopter. Le résultat de ces discussions sera essentiel pour le futur développement de cette nouvelle formation.
Le Keynesianisme comme alternative?
Quand le programme du WASG fut adopté lors d’une journée de rencontre nationale au début du mois de mai de cette année-ci, le coeur de millions de gens s’est mis à battre plus fort. Le programme public visait à la création de centaines de milliers d’emplois, à l’extension des services publics, à des augmentations de salaire, à plus de charges pour les entrepreneurs; à l’introduction d’un salaire minimum, ou encore la réduction du temps de travail, le droit à la grève politique et générale,… Avec ce programme le WASG formulait les revendications correctes et nécessaires face à l’offensive du capital.
Selon le programme du WASG le problème principal du développement économique est la faiblesse du marché intérieur. En mettant en avant que la démocratisation de l’économie stimulerait le pouvoir d’achat des masses, le WASG, en avançant ces idées, crée l’illusion que la crise structurelle du capitalisme peut être surmontée au sein du capitalisme même. Tant que les secteurs clefs de l’économie ne sont pas dans la propriété collective et sous le contrôle démocratique de la population, les conditions de salaire et de travail ne seront jamais certaines.
Si la question de la propriété privée des moyens de production reste sans réponse, le WASG ne sera pas capable dans le futur de présenter au mouvement des solutions adéquates aux problèmes tels que les menaces de délocalisation. Cette faiblesse programmatique trouve son représentant au sein du WASG avec le Keynesien (c-à-d partisant d’une intervention de l’état bourgeois dans l’économie pour résoudre tous les problèmes) notoire Oskar Lafontaine.
Lafontaine
Depuis l’ère de Schröder, Oskar Lafontaine est connu comme une personne éminente à gauche, et très certainement depuis sa démission du SPD quand ce parti s’est clairement orienté vers l’application de l’Agenda 2010. Il est vu comme un sérieux adversaire au chancelier en place. En plus, le SPD a parcouru divers virages à droite, dus, entre autre au changement de la composition sociale des membres. Mais Lafontaine est aussi l’auteur de la disparition de milliers d’emplois dans l’industrie de l’acier en tant que premier ministre et en tant que ministre des finances à travers le programme „Payer des allocations de chômage uniquement aux nécessiteux“.
Il a bien mis en scène son retrait de la social-démocratie. Grâce à cela, il a fait en sorte que toute l’attention soit orientée vers lui et la nouvelle formation. Cela a donné au WASG une dynamique énorme, ce qui s’est exprimé tant dans les résultats électoraux que dans la croissance des adhésions. Selon la direction nationale du WASG, le nombre de membres a crû de 4000 à 6000 ces trois derniers mois, et cette tendance continue. Mais l’adhésion de Lafontaine à la nouvelle formation renforce surtout l’ailé modérée autour de Klaus Ernst et le reste de la direction du WASG.
Quand Lafontaine a proposé sa candidature au WASG, il a mis une condition: le WASG devrait s’allier avec le PDS selon l’exemple de la coalition olivier (coalition des post-communistes, verts et autres forces à gauche, qui dans différents gouvernements locaux ont collaborés aux coupes d’austérité) en Italie.
Le WASG et le Linkspartei/PDS
Le PDS est l’ancien parti stalinien, dirigé par Gregor Gysi. Depuis la chute du mur de Berlin, les virages à droite continuels constituent l’histoire de ce parti. Repositionné à droite, et incapable de tirer les leçons de leur passé stalinien, ce parti a participé à deux gouvernements locaux en Allemagne de l’Est avec le SPD, unis dans une politique de régression sociale et de privatisation.
Le WASG est né en opposition à la politique du PDS. Malgré cela, la direction du WASG s’est déclarée d’accord avec la candidature commune entre le WASG et le PDS. Ainsi, dans les élections fédérales du 18 septembre, les membres du WASG vont se présenter sur les listes du Linkspartei (Parti de Gauche), le nouveau nom du PDS. La justification des deux directions du parti est l’idée de „mettre sur pied un nouveau projet de gauche“ dans les deux années à venir. De plus, cette alliance risque d’écraser le WASG, relativement faible face à l’appareil du PDS (60 000 membres). Cela doit être évité, car il est important que le WASG maintienne son propre profil indépendant, combatif et que le WASG mène sa propre campagne électorale distincte.
Le programme électoral du nouveau Linkspartei, élaboré par les deux directions du parti, contient différentes concessions du WASG au PDS. La proposition du PDS d’améliorer le programme Arbeitslosengeld II (le programme de réforme sur les allocations pour les chômeurs) et les statuts des Ein-Euro-Jobs (les jobs à un euro) peut encore être combattue par la direction du WASG. Le WASG rétorquait en effet qu’il fallait se battre pour la supression de Hartz IV (un autre programme de contre-réformes) et les Ein-Euro-Jobs. Mais d’autres parties du programme, dans lesquelles le PDS revendique la création des secteurs d’emplois à bas salaires demeurent incontestés par la direction nationale du WASG. En faisant cela, elle va à l’encontre des principes fondamentaux du WASG, qui refuse de manière conséquente les emplois sous-payé. D’autres points du programme aussi divergent du manifeste électoral et signifient un virage à droite prononcé.
Dangers et occasions
Selon les sondages, jusque 25 pc des électrices et électeurs envisagent de voter pour le Linkspartei. Si ces pronostics se vérifient, cela signifiera qu’il deviendra d’un coup la troisième force politique au Bundestag. Mais la question qui se présente pour nous, c’est de savoir ce que ce parti fera avec ce potentiel pour être à la hauteur des attentes des travailleurs.
La revendication portée par le WASG d’une redistribution de haut en bas est une déclaration de guerre aux grands propriétaires des banques et des grandes entreprises qui ne veulent que des profits toujours plus grands. Afin de pouvoir appliquer cela, il est nécessaire de construire un rapport de force. Si le patronat veut s’attaquer à nos conditions de salaire et de travail, nous devons pouvoir toucher à leurs profits. Cela ne peut pas être le résultat d’une résistance parlementaire, mais de la résistance socio-économique à travers l’arme de la grève dans les entreprises. C’est pourquoi le WASG doit s’orienter vers les lieux de travail et intervenir dans les luttes des travailleurs. Les revendications – qui créent des attentes – ne peuvent être remplies que si le WASG base et organise sa lutte pour les réformes sur la résistance extraparlementaire.
Les marxistes au sein du Linkspartei
Le SAV (la section soeur du MAS en Allemagne) milite pour la construction d’un nouveau parti des travailleurs. Si nos camarades mettent en avant qu’un tel parti doit adopter un programme clairement socialiste, cette revendication n’encombre pas le chemin vers une collaboration constructive et solidaire. Par conséquent, le SAV a soutenu la création et la construction du WASG dès le début. Pour que le potentiel soit pleinement exploité, la nouvelle formation devrait s’ouvrir à tous les militants et offrir des structures larges et pluralistes. Vu que la présence les différentes forces politiques au sein du WASG enrichissent les expériences et les traditions, des questions sur la théorie et la pratique doivent être ouvertement débattues.
Cela comprend donc aussi les questions sur le Keynésianisme ou le Socialisme. Evitant la discussion en profondeur, une future décision du comité national du WASG devrait prévoir l’incompatibilité d’être socialiste et membre du WASG. C’est un exemple du fonctionnement de haut en bas, preuve d’un manque de démocratie dans le WASG. L’entrée de Lafontaine et du PDS a renforcé la position de la droite au sein du WASG. Cependant, une pression de la base pour un virage à gauche ne peut être exclue. C’est pourqoui nos camarades au sein du Linkspartei défendent une orientation voulant organiser ces millions d’électeurs interessés par l’initiative. Afin d’avoir une base active pour réaliser cela, nous mettons en avant la création de sections jeunes. Ainsi, nous pensons renforcer le potentiel qui existe pour les marxistes dans de tels groupes larges.
Le succès du WASG et du Linkspartei, en tant que projet pour la construction d’une alternative aux partis du démantèlement social, de la destruction d’emplois et des privatisations n’est pas garanti. Le manque d’enthousiasme et d’initiative de la direction se voit notamment par les difficultés faites à nos camarades, mais il faut continuer la lutte pour des structures démocratiques.
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Le néo-libéralisme mis en cause. Union européenne: une claque magistrale!
La victoire du NON au référendum sur la constitution européenne, le 29 mai dernier en France, est une claque magistrale infligée par les travailleurs et les jeunes aux institutions capitalistes de l’Union européenne. Le taux de participation élevé (70%), les 56% de NON à la constitution sont sans appel. L’Europe capitaliste est K.O. debout ! Chirac et la classe politique et médiatique peuvent aller se rhabiller : ils ont mal mesuré le ressentiment des classes défavorisées envers les institutions européennes. Depuis des années, celles-ci incarnent, pour une masse croissante de travailleurs et de jeunes, les privatisations, la casse des services publics, les coupes dans les budgets sociaux, la compétition forcée avec les pays à bas salaire,…
Peter Delsing
Le NON aux Pays-Bas (63%), le 1er juin, a été le clou du cercueil. En quelques semaines, une atmosphère de crise a gagné les bourgeoisies européennes. L’eu(ro)phorie est bien loin !
Le NON comme expression des contradictions de classes
En France et aux Pays-Bas, l’extrême droite et les nationalistes ont fait campagne pour le NON : le néo-fasciste Le Pen et le conservateur de droite De Villiers en France, le populiste de droite Geert Wilders aux Pays-Bas. Mais le NON était principalement l’expression d’un rejet de l’Europe capitaliste par les victimes de la crise. En France, les mobilisations de masse contre l’abolition de la semaine de 35 heures, contre la baisse du pouvoir d’achat et contre les privatisations ont pesé lourd dans le camp du NON. L’opposition à la Constitution est devenue une question sociale : la politique antisociale de Chirac et des autres gouvernements fait partie intégrante de la politique néo-libérale imposée par l’Union européenne. Dans les grandes villes ouvrières comme Marseille, Nice ou Lille, le NON l’a emporté haut la main. Dans les villes plus nanties, avec une forte concentration petite-bourgeoise, comme Paris, Lyon, Strasbourg, le OUI l’a emporté. Dans les quartiers populaires d’Amsterdam (Amsterdam-Nord : 73%, Volewijck et Buiksloterham ; tous deux 79%) le NON l’a emporté sans bavures.
Il est révélateur que même les commentateurs bourgeois ont été contraints de reconnaître qu’on avait voté contre la politique ‘libérale’. Les résultats de ces référendums ont confirmé l’analyse du MAS: depuis des années nous avons répété qu’une révolte de masse allait se lever contre la politique antisociale actuelle. Les mobilisations de la jeunesse annonçaient une radicalisation plus large chez les travailleurs. Quand nous avons organisé en 2001, à Gand, avec Résistance internationale, une grève et une manifestation de 2.500 lycéens et d’étudiants contre le sommet européen, certains commentateurs ont jugé qu’il s’agissait de protestations "marginales". Ils ont eu tort.
La crise capitaliste met à mal l’Union européenne
Toute tentative d’organiser un second referendum en France et aux Pays-Bas a fait long feu ; Cela ôterait toute crédibilité aux institutions capitalistes européennes, avec le risque de provoquer des mobilisations de rue. Ce serait une stupidité pour la bourgeoisie. La Grande-Bretagne, la Pologne et la Tchéquie ont décidé de reporter leur référendum. La victoire du NON en France et aux Pays-Bas a radicalisé les travailleurs. Ceux qui expliquent que le NON est l’expression d’un nationalisme étroit, n’ont rien compris: c’est au contraire l’expression d’une prise de conscience sociale internationale.
L’Europe ne peut être unifiée sur base de différents états-nations. Plus la crise économique s’approfondira, plus la pression au sein de chaque bourgeoisie pour trouver une issue individuelle pèsera. En Italie, pays officiellement en récession, la Ligue du Nord – pourtant au gouvernement – a préconisé l’abandon de l’euro et le retour à la lire! L’idée derrière cela est d’améliorer la position concurrentielle des exportations italiennes en dévaluant la lire. Ceci (évidemment) au détriment des autres états concurrents européens. Une crise économique profonde, et surtout le spectre de la lutte de classes qui pourra faire chuter des gouvernements, ne manquera pas de pousser à terme l’Union européenne hors jeu.
Les failles dans la construction européenne capitaliste se multiplient : la constitution est mise au frigo pour longtemps ; l’élargissement de l’Union (à la Turquie, à de nouveaux pays de l’Est) est remise aux calendes grecques ; le sommet de Bruxelles (en juin) a capoté sur le budget européen. Il s’agit de la crise la plus grave de la tentative d’unification capitaliste européenne. Il n’existe plus de noyau "convaincu" de pays forts qui rallient derrière eux les pays indécis, comme dans la deuxième partie des années 90, à l’époque d’une conjoncture économique meilleure. Les intérêts capitalistes nationaux regagnent du terrain. C’est la conséquence de l’aggravation de la crise du capitalisme.
Les dirigeants capitalistes n’ont rien appris: il est temps de les mettre dehors
En France, le nouveau premier ministre De Villepin veut inverser le cours en annonçant… de nouvelles mesures d’austérité. Il veut, par exemple, faciliter les licenciements dans les PME ("pour qu’elles embauchent plus vite") et organiser la chasse aux chômeurs.
Les syndicats doivent riposter à ces nouvelles attaques et défendre réellement les travailleurs. On ne pourra construire un rapport de forces qu’à travers la lutte. Le MAS veut participer à cette riposte. La création d’un nouveau parti des travailleurs à caractère de masse est un élément clé de cette riposte. Nous pensons que ces partis devront adopter un programme de transformation socialiste de l’Europe. Car seule une fédération des états socialistes d’Europe pourra mener une véritable politique sociale.
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60 ans après la Seconde Guerre mondiale
On commémore ces temps-ci le 60ème anniversaire de la fin la Seconde Guerre mondiale. Les médias nous ont abreuvés d’articles et de témoignages historiques sur ce qui fut la plus grande boucherie à ce jour de l’histoire humaine (60 millions de morts). Un dossier de plus? Non, car les commémorations occultent trop souvent les tenants et aboutissants de cette guerre qui a changé pour près d’un demi-siècle les rapports de force au niveau mondial.
Thierry Pierret
La Première Guerre mondiale avait été une guerre de repartage du monde entre puissances impérialistes. Pendant des décennies, il y avait une course de vitesse entre les différentes puissances européennes pour s’emparer des différents pays d’Afrique et d’Asie. La Grande-Bretagne et la France étaient sorties gagnantes de cette course de vitesse, l’Allemagne devant se contenter des “miettes” du monde colonial.
C’est la volonté de l’Allemagne d’imposer un repartage du monde à son avantage qui a plongé le monde dans la “Grande Guerre” en 1914. Les principaux partis sociaux-démocrates s’étaient rangés derrière le drapeau de leur propre impérialisme. C’est la Révolution russe qui a mis fin à la Grande Guerre sur le front de l’est avec l’armistice de Brest-Litovsk. Quelques mois plus tard, la révolution en Allemagne mettait fin aux hostilités sur le front occidental. Malheureusement, la révolution en Allemagne n’a pas abouti à la prise du pouvoir par les travailleurs comme en Russie. Le Parti social-démocrate (SPD) y était autrement plus puissant que les mencheviques en Russie et le jeune Parti communiste allemand (KPD) a commis des erreurs tactiques. La défaite de la révolution en Allemagne, mais aussi en Italie, en Hongrie, en Slovaquie,… ouvre désormais la voie à une période de contre-révolution en Europe qui sera le prélude à une nouvelle conflagration mondiale.
La montée du fascisme
La petite-bourgeoisie était prise en tenaille entre le mouvement ouvrier d’une part, la grande industrie et les banques d’autre part. La faillite les guette et, avec elle, la nécessité de vendre leur force de travail pour vivre. Ils aspirent au retour à l’ordre, c’est-à-dire à la situation qui prévalait avant l’industrialisation, à savoir une société de petits producteurs. Les fascistes les séduisent avec leurs diatribes contre “le capital financier” et contre le communisme. La crise économique des années trente verra les secteurs décisifs de la bourgeoisie soutenir le fascisme pour rétablir ses profits en écrasant le mouvement ouvrier et en forçant l’ouverture des marchés extérieurs aux produits allemands.
Il est donc faux de prétendre que la mégalomanie de Hitler et de Mussolini serait la cause de la Seconde Guerre mondiale. En fait, le programme des partis fascistes correspondait aux nécessités du capitalisme en période de crise aigüe. La seule façon pour la bourgeoisie des pays vaincus (Allemagne) ou mal desservis par la victoire (Italie) de restaurer sa position, c’était d’imposer un nouveau partage du monde par la guerre. Or seuls les partis fascistes étaient déterminés à le faire là où les partis bourgeois classiques étaient soucieux de préserver les équilibres internationaux. Il y a donc un lien entre le fascisme et la guerre dans la mesure où ce sont deux conséquences parallèles de la crise du capitalisme en décomposition.
Capitulation du mouvement ouvrier
La victoire du fascisme n’était pas inéluctable. En Allemagne, les partis ouvriers et leurs milices – SPD et KPD – étaient plus puissants que le Parti nazi. Mais le SPD refusait l’affrontement sous prétexte de respecter la légalité là où les nazis n’en avaient cure. Plutôt que d’organiser les travailleurs, il préférait s’en remettre au Président Hindenburg comme “garant de la démocratie”.
Quant au KPD, il suivait la ligne de Moscou qui professait la théorie absurde selon laquelle la social-démocratie et le nazisme étaient des frères jumeaux (théorie du social-fascisme). Le KPD a même organisé des activités en commun avec les nazis! Cette attitude des dirigeants des deux grands partis ouvriers allemands a complètement désorienté les travailleurs allemands face aux nazis. En 1933, Hitler prenait le pouvoir sans coup férir avec la bénédiction de Hindenburg…
Le Pacte germano-soviétique
L’arrivée au pouvoir de Hitler – dont Staline était pourtant largement responsable – a semé la panique à Moscou. Pour assurer sa défense, l’URSS va désormais privilégier une stratégie d’entente avec la France et la Grande-Bretagne. Pour ce faire, il ne fallait rien faire qui puisse effrayer les bourgeoisies française et britannique. Par conséquent, les partis communistes occidentaux devaient adopter un profil bas et privilégier des alliances non seulement avec la social-démocratie, mais aussi avec la “bourgeoisie progressiste”.
Cette stratégie débouchera sur la formation de gouvernements de front populaire en France et en Espagne en 1936. Pour maintenir coûte que coûte ce front de collaboration de classe, le PC n’hésitera pas à casser la grève générale en France et à liquider la révolution en Espagne. Mais en 1938, Paris et Londres repoussent l’offre de Staline d’agir de concert pour contrer les visées de Hitler sur la Tchécoslovaquie.
Staline change alors son fusil d’épaule et signe le Pacte germano-soviétique en 1939. Il croit ainsi assurer ses arrières. Bien plus qu’un pacte de non-agression, le Pacte germano-soviétique comportait un protocole secret qui organisait le dépeçage de l’Europe de l’est entre l’Allemagne et l’URSS. Alors que les bolcheviques avaient rendu publics tous les traités secrets en 1917, Staline renouait avec les pires méthodes des puissances impérialistes.
Une nouvelle guerre de repartage
La Seconde Guerre mondiale fut, en Europe de l’Ouest, en Afrique et en Asie, une nouvelle guerre de repartage du monde. L’Allemagne, qui avait été privée de toutes ses colonies en 1918, voulait prendre sa revanche. L’Italie, mal desservie par sa victoire en 1918, avait annexé l’Albanie et envahi l’Ethiopie en 1935. Mais l’Ethiopie était le seul pays africain qui restait à coloniser. L’Italie ne pouvait plus étendre son empire colonial qu’en empiétant sur les colonies françaises et britanniques. Il ne faut pas chercher ailleurs les raisons de son entrée en guerre aux côtés de l’Allemagne en 1940. En Asie, le Japon, après avoir annexé la Corée et la Mandchourie, s’était lancé à la conquête de la Chine toute entière. Il lorgnait sur les colonies françaises, britanniques et hollandaises en Asie. Mais les Etats-Unis s’opposaient aux prétentions impériales de Tokyo en Asie et lui ont coupé son approvisionnement en pétrole.
D’où l’attaque sur Pearl-Harbour en décembre 1941 pour avoir les mains libres dans le Pacifique. Pearl-Harbour a fourni le prétexte rêvé au Président Roosevelt pour engager les Etats-Unis dans la guerre, puisque le Japon était un allié de l’Allemagne et de l’Italie. La guerre est désormais mondiale. Elle oppose les puissances impérialistes établies (Etats-Unis, France, Grande-Bretagne) aux forces de l’Axe (Allemagne, Italie, Japon), c’est-à-dire l’axe des mal servis du partage colonial. Mais entre-temps, il y a eu l’offensive allemande contre l’URSS en juin 1941. Cette nouvelle donne va non seulement changer le cours de la guerre, mais aussi en changer partiellement la nature.
La victoire soviétique
Staline avait cru gagner un répit de 10 ans en signant le Pacte germano-soviétique. Il en avait également profité pour ramener la frontière occidentale de l’URSS à celle d’avant 1914 (annexion de l’est de la Pologne, des pays baltes, de la Bessarabie). En revanche, l’invasion de la Finlande se solda par un fiasco. Staline, dans sa lutte acharnée contre l’opposition de gauche, avait liquidé tous les officiers qui avaient été formés par Trotsky. Privée de ses meilleurs officiers, l’Armée rouge s’est révélée incapable de venir à bout de l’armée finlandaise. Hitler en a conclu que l’Armée rouge n’était qu’un tigre de papier et qu’elle s’effondrerait sous les coups de la Werhmacht. Or les nazis, dans leur entreprise de destruction systématique du mouvement ouvrier organisé, ne pouvaient pas tolérer l’existence de l’état ouvrier – tout bureaucratisé qu’il fût – soviétique. Le 22 juin 1941, la Werhmacht envahissait l’URSS à la stupéfaction de Staline qui croyait dur comme fer au Pacte. Les premières semaines de l’offensive ont semblé donner raison à Hitler.
L’Armée rouge, mal préparée, privée d’officiers compétents, s’effondrait sous les coups de butoir de la Wehrmacht, perdant des centaines de milliers de prisonniers et de tués en quelques jours. Mais Hitler avait sousestimé la capacité de résistance et d’auto-organisation de la population russe.
Surtout, Hitler avait sousestimé le potentiel d’une économie planifiée même bureaucratiquement. Jamais un pays relativement arriéré comme l’URSS n’aurait pu fournir un tel effort de guerre dans les conditions d’une économie de marché. L’Armée rouge a pu stopper l’offensive hitlérienne avant de partir à la contre-offensive.
L’URSS payera sa victoire de quelque 27 millions de morts. Les pertes sont d’autant plus lourdes que le régime nazi se déchaîne contre les “sous-hommes” (Juifs, Slaves, Tsiganes). Si l’antisémitisme du régime avait d’abord eu pour but de désigner un bouc-émissaire pratique aux souffrances de la population, il acquiert dès lors une dynamique propre qui conduira à la Solution finale.
Mais cette pulsion mortifère exprime surtout l’impuissance des nazis à retourner la situation en leur faveur. A partir de ce moment, la guerre change de nature. On assiste à une course de vitesse entre l’Armée rouge et les anglo-américains. Ceux-ci ne se décident à ouvrir un nouveau front (débarquement de juin 1944) que pour endiguer l’avance soviétique. Après la capitulation allemande, cette course se poursuivra en extrême-orient où les Etats-Unis n’hésiteront pas à utiliser l’arme atomique pour contraindre le Japon à capituler sans délai et éviter une partition du Japon comme en Allemagne et en Corée.
La révolution met fin à la guerre
Les dirigeants américains et britanniques envisagent même de faire une paix séparée avec l’Allemagne pour repousser l’Armée rouge. Mais les nazis s’obstinent à vouloir mener la guerre sur les deux fronts et le putsch contre Hitler échoue. Surtout, les travailleurs n’auraient pas toléré la prolongation de la guerre et sa transformation en guerre est-ouest. En Italie, en France, en Yougoslavie, en Grèce, les partisans communistes libèrent la majorité du territoire. Ils sont une force avec laquelle les alliés doivent compter. La prise du pouvoir par les communistes était possible dans plusieurs pays, y compris à l’ouest. Mais Staline le leur a interdit et a ordonné aux partisans de rendre leurs armes en échange d’assurances de la part des Alliés. On peut dire que le stalinisme a joué le même rôle contre-révolutionnaire en 1945 que la social-démocratie en 1918. Dans les pays occupés par l’Armée rouge, nombre de communistes actifs dans la résistance sont liquidés car jugés peu fiables. Alors que c’est la révolution (ou la menace de révolution) qui a empêché les Alliés de continuer la guerre contre l’URSS, Staline a cru pouvoir opter pour la coexistence pacifique avec l’impérialisme (accords de Yalta). Mais Staline ne recueillera pas davantage les fruits de sa “modération” que dans les années trente. En 1949, les puissances impérialistes créent l’OTAN pour endiguer l’URSS et le monde bascule dans la guerre froide. Pendant près d’un demi-siècle, la violence de l’impérialisme sera contenue par l’existence du bloc de l’est. Mais les tares du stalinisme ont fini par avoir raison des états ouvriers bureaucratisés. La chute de l’URSS ouvre la porte à une nouvelle ère de tensions interimpérialistes.
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UE. Instrument des banques et des multinationales
L’UE est utilisé pour obtenir sur le plan européen une accélération des mesures néo-libérales. Mais au moment d’une crise économique l’UE est mis sous pression.
La Constitution dans ses propres mots
L’UE défend un projet libéral, dans lequel l’intérêt central est la libre concurrence et non pas les services à la population. “L’Union offre à ces citoyens (…) un marché interne dans lequel la concurrence est libre et authentique.” (article I-3)
Malgré toutes les déclarations affirmant que la Constitution et la directive Bolkestein n’ont rien voir l’une avec l’autre, on lit dans la Constitution: “Par une loi-cadre européene, des mesures vont être prises afin de réaliser la libéralisation des services.” (article II-147)
L’UE veut un élargissement des moyens pour la défence, avec une unification plus large en tête, un premier pas vers une armée européenne. “Les états-membres s’engagent d’améliorer graduellement leurs compétences militaires.” (article II-41).
Dans la Constitution Européenne, un texte très large, il y a encore un tas d’exemples de ce projet néolibéral défendu par l’UE. Les soi-disant mesures “sociales”, auquelles se réfèrent souvent les socio-démocrates, ne sont, au contraire, pas plus élaborées que quelques généralités vagues et vides.
A la fin de l’année passée, il était déjà clair que l’économie entrait en difficultés dans beaucoup de pays européens. Cela a été confirmé par les résultats européens du premier trimestre de 2005, où deux pays avaient une croissance négative (l’Italie -1,6% et les Pays-Bas –0,6%) et d’autres pays, comme la Belgique, avaient une croissance zéro. A cause de celà, il devient très difficile de suivre les règles européennes, comme par exemple celles sur le déficit budgétaire qui ne peut pas dépasser 3% du produit intérieur brut (PIB).
De plus, il y a un mécontentement croissant contre l’UE. Les grands thèmes des dirigeants européens – le marché unique, l’euro et l’élargissement – n’ont en rien réalisé les aspirations de progrès. Au contraire, ils ont encore amplifiés la crise économique du fait que les différents gouvernements ne pouvaient plus prendre des mesure pour stimuler l’économie nationale. Comme dévaluer la monnaie pour stimuler l’exportation, par exemple.
On en est déjà au point que le ministre italien Roberto Maroni a déclaré que l’Italie ferait peut-être mieux de revenir à la Lire: “Cela fait déjà trois années que l’euro a démontré qu’il n’est pas le moyen adéquat contre la stagnation de la croissance, la perte de la force de concurrence et la crise de l’emploi.”
Directive Bolkestein: attaque libérale sur nos droits!
Le but de cette directive est de liquider des soi-disant obstacles pour le commerce des service en Europe. En réalité, c’est une proposition extrémiste qui permet que les règles les plus basses sur le plan social, de la sécurité et de l’environnents deviennent la norme. La directive proposée rendra possible qu’une entreprise de contruction basée en Pologne fasse travailler des ouvriers de construction en Belgique aux salaires et conditions de travail polonais. Idem pour les bureaux d’intérim, des services de nettoyage, des services par des autorités locales, mème notre enseignement et nos soins de santé sont en danger.
Des gouvernement ne seront plus capable d’imposer certains tarifs minimaux ou maximaux pour des médicaments ou d’imposer des normes minimales pour le cadre de personnel dans les hopitaux et les maisons de repos. Le marché sera toujours plus envahissant et imposera sa dictature du profit dans des secteurs aussi vitalement importants que les soins de santé.
Stratégie de Lisbonne
Quand la nouvelle Commission Européene sous la direction de Barrosso fut mis sur pied, elle annonça immédiatement que les “reformes économique” seraient la tâche la plus importante. Ça n’est donc pas étonnant que la composition de la Commission Européenne est surtout orientée vers la défence du libre marché et des libéralisations. Cela fit applaudir (entre autre) le journal économique britannique Financial Times.
La politique européenne actuelle est basée sur “la stratégie de Lisbonne”. En 2000, au sommet européen de Lisbonne, un plan de privatisations et de dérégulations massives a été proposé. L’économie des Etats-Unies y était utilisé comme modèle. Pour cela, on comptait aussi sur les nouveaux états-membres en Europe Centrale et de l’Est. La fédération patronale européenne Unice déclarait: “L’élargissement est une opportunité en or pour augmenter la compétititvité.” L’UE à 25 va “rendre prioritaire la compétivité des entreprises” disait Barrosso quand il faisait la sélection pour sa commission. L’élargissement est certainement un argument important pour les entreprises qui revendiquent des salaires plus bas et une semaine de travail plus long.
Aujourd’hui la seule chose qui tient ensemble l’Union Européenne est la volonté collective des capitalistes en Europe de liquider la sécurité sociale et de faire une offensive sur les travailleurs et leurs familles. Mais de l’autre coté il y a aussi la pression inévitable des interêts nationaux des politiciens et des capitalistes.
Tous les éléments de la crise actuelle – le pacte de stabilité, la constitution, le budget,… – peuvent mener à un Europe avec deux ou trois différents camps et des niveaux différents d’intégration.
Blair a déjà annoncé qu’il ne va pas y avoir de referendum en Grande-Bretagne. La Tchèquie veut suivre cet exemple. Il est probable que le processus de ratification va être arrêté, suivi par une période de “réflexion”. Une crise économique va renforcer la crise politique de l’UE et peut même mettre à l’agenda d’un certain nombre d’états-membre la remise en cause de l’adhésion.
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ATTAQUES CONTRE LES pensions en europe
Attaques contre les pensions en Europe
La lutte contre les pensions est menée avec hargne par les patrons et les gouvernements à l’échelle internationale. Les raisons sont les mêmes dans tous les pays. Les gouvernements de l’Union européenne qui n’ont pas de déficit budgétaire peuvent être comptés sur les doigts de la main. Avec une population qui vieillit et une croissance économique extrêmement faible, les dirigeants craignent que la croissance des dépenses pour les pensions ne gonflent les dettes déjà immenses. De leur côté, les patrons espèrent augmenter leurs profits par des allocations de pensions plus basses. Par un système plus privatisé, ils veulent libérer de l’argent pour placer en bourse. L’argent ne doit pas stagner dans les coffres des gouvernements mais doit servir à faire du profit par la spéculation.
Peter Delsing
L’attaque généralisée contre les pensions est surtout due au changement du rapport de force entre les travailleurs et les patrons après la chute du stalinisme. L’offensive néo-libérale s’est accélérée ces 15 dernières années. Les patrons s’imaginent qu’ils peuvent abolir tous nos droits pour se remplir les poches. Beaucoup d’exemples montrent cependant que le thème des pensions est très sensible. Ce sujet peut provoquer des mouvements de masse dans la classe ouvrière. En Autriche, les attaques sur les pensions ont déclenché, en mai 2003, la plus grande grève générale depuis un demi siècle et ce après des décennies de luttes isolées et sporadiques.
Italie
En 1994, le premier gouvernement Berlusconi a échoué dans sa tentative de démanteler les pensions. Une grève et des manifestations de masse avaient suffit pour que la Ligue du Nord, partenaire dans la coalition, fasse tomber le gouvernement. Sa base ne pouvait pas avaler la réforme. Le mouvement contre Berlusconi avait ainsi porté au pouvoir la coalition de l’Olivier, qui se revendique de la gauche. Mais le gouvernement Dini a aussi introduit une réforme des pensions : pour les jeunes travailleurs, les pensions ne seraient plus comptées sur base du salaire – plus élevé – des dernières années de carrière, mais sur base des contributions pendant toute la carrière. Les travailleurs qui cotisaient depuis plus longtemps restaient, eux, dans l’ancien système. Le pire, c’est que cette stratégie de division a été soutenue par les trois grandes fédérations syndicales.
De leur côté, les patrons ne voulaient pas du plan de Dini. Ils trouvaient que celui-ci n’allait pas assez loin. La politique antisociale de la coalition de l’Olivier a donné l’opportunité à Berlusconi de revenir au pouvoir. Confronté à des dépenses pour les pensions de près de 15% du PIB et à des dettes toujours plus importantes, Berlusconi a présenté un nouveau plan d’austérité en septembre 2003. Celui-ci prévoyait de faire cotiser les travailleurs italiens pendant 40 ans pour une pension complète, au lieu de 35 ans précédemment, et ce dès 2008. L’âge moyen de la pension, 57 ans, devait systématiquement augmenter à 65 pour les hommes et 60 pour les femmes. A terme, Berlusconi comptait économiser 12,5 milliards d’euros par an, soit 1% du PIB (dès 2012). C’est donc une pure mesure d’austérité. Le président du syndicat CGIL, Epifani, menaçait déjà à l’époque d’organiser une grève générale. Le jour suivant l’annonce du projet, de nombreuses grèves spontanées éclataient de toute part dans la péninsule.
Le 24 octobre 2003, les trois grands syndicats – CGIL, CISL et UIL – organisaient une grève générale de 4 heures, à laquelle 10 millions de travailleurs ont participé. Plus de 100 manifestations ont été organisées. Bizarrement, le dirigeant de la CGIL Epifani déclarait qu’il ne s’agissait pas d’une « grève politique ». Il disait également que la chute du gouvernement Berlusconi en 1994 était la conséquence de la position de la Ligue du Nord et non pas des manifestations contre la réforme des pensions. Cette position souligne le manque d’alternative politique de la part des dirigeants syndicaux. A Rome, le dirigeant du parti d’opposition le plus important, la Gauche Démocratique (ex-communiste), a pris la parole lors de cette manifestation.
Malheureusement, Bertinotti, dirigeant du grand parti de gauche Refondation Communiste, a essayé de s’appuyer sur les partis discrédités de la coalition de l’Olivier. Alors qu’il fallait garder une attitude totalement indépendante de l’ex-«aile gauche» de la politique bourgeoise. Refondation Communiste ne pouvait et ne peut pas regagner la confiance des travailleurs de cette façon.
Le samedi 6 décembre 2003, à Rome, les syndicats organisaient une manifestation de 1,5 million de participants contre les plans de réforme des pensions de Berlusconi sous le slogan «Défendez votre avenir!». «Les contre-réformes ne passeront pas!», disait Angeletti, dirigeant de l’UIL. Le 26 mars 2004, une deuxième grève générale autour des pensions était organisée. De nouveau, plus d’un million de travailleurs étaient dans la rue. Mais aucun plan d’action réel n’était mis en avant pour chasser définitivement Berlusconi. Cela a permis au gouvernement de faire voter par le parlement les propositions de réforme pendant l’été 2004. Réaction de la direction syndicale: protestation verbale.
France
En France, les attaques contre les pensions ont également suscité des manifestations de masse. Le 13 mai 2003, une grève de la fonction publique, soutenue par quelques secteurs privés, a rassemblé près de 2 millions de manifestants dans 115 villes. Le mouvement contre la réforme des pensions de Raffarin montrait son potentiel à unifier les différentes luttes. Raffarin voulait allonger la durée de cotisation des travailleurs de la fonction publique de 37,5 ans à 40 ans pour une pension complète vers 2008 et à 42 ans vers 2020. Le 19 mai 2003, 700.000 travailleurs sont de nouveau descendus dans la rue.
Les syndicats CFDT et CGC ont néanmoins signé un accord avec le gouvernement de droite, lui permettant ainsi de poursuivre dans la même voie. Cela a provoqué des remous à la base et dans certaines directions régionales à la CFDT. La question de la démocratie interne a été posée et certains ont demandé la démission du président du syndicat. Deux autres syndicats – CGT et FO – ont organisé une nouvelle manifestation, le 25 mai à Paris, contre la réforme des retraites. A nouveau 1,5 million de personnes étaient dans la rue. Dans un sondage publié dans Le Parisien, 65% des sondés déclaraient soutenir ces manifestations.
L’appel pour une grève générale était toujours plus fort. Thibault, dirigeant de la CGT, craignait toutefois de perdre le contrôle de la base. Il s’est prononcé contre une grève générale parce que «ça affaiblirait la CGT pour des années». Le dirigeant du syndicat Force Ouvrière de l’époque, Marc Blondel, se prononçait dans un premier temps contre une grève générale – parce que ce serait «insurrectionnel» et cela poserait la question d’une «alternative politique». Ensuite il a été gagné à cette idée, mais « n’a pas voulu casser le front syndical»… C’est pourtant une grève générale de la fonction publique, en 1995, qui a torpillé le projet de réforme des retraites du gouvernement Juppé et qui a même mené plus tard à la chute du gouvernement. Les dirigeants syndicaux ne voulaient pas faire ce pas. Le 24 juillet 2003, la loi sur les pensions était voté par l’assemblée nationale.
Leçons des mobilisations
Les mobilisations contre la réforme des pensions peuvent mener à une lutte de masse de différents secteurs. Ces mobilisations ont la sympathie de la masse des travailleurs et peuvent – comme en France et en Italie – faire tomber des gouvernements. Les dirigeants réformistes sont un frein au mouvement. À la base,des comités de grève devraient être élus pour pouvoir décider de façon démocratique des objectifs de la grève. Ils devraient se rassembler régionalement et nationalement dans différents secteurs avec une force la plus efficace possible. Et cela pour démocratiser les syndicats et empêcher la trahison par la direction. Sur le plan politique il faut rompre avec les partis « progressistes » qui mènent une politique néo-libérale. La question d’un nouveau parti des travailleurs comme instrument politique de la lutte et la nécessité d’un gouvernement des travailleurs, appuyé sur les masses, deviennent alors des questions clés pour résoudre la situation.
La rôle d’une gauche syndicale combative est fondamentale. En Grande-Bretagne nos camarades ont joué un rôle important dans différents syndicats pour mettre en avant l’idée d’une grève générale contre les plans de pensions de Blair. C’était par exemple le cas dans le PCS, le syndicat des fonctionnaires où plusieurs membres du SP ont été élus au bureau exécutif. Confronté à la menace d’une grève des services publics juste avant les élections parlementaires en mai, Blair a fait marche arrière, du moins temporairement. «Une défaite importante», selon les porte-paroles du capital. Nous devons nous organiser nous aussi en Belgique pour pouvoir répondre aux attaques des patrons et du gouvernement.
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Bas les pattes des prépensions!
Là où certains verraient un bien, les patrons font mine de vouloir prévenir une catastrophe. L’Union européenne martèle en effet depuis des années que les taux d’emploi en Europe sont trop faibles par rapport à ceux des principaux pays concurrents. Résultat : partout, l’âge de départ à la retraite, le montant de la pension, les durées de cotisation,…sont modifiés systématiquement au détriment des salariés. Mais si les taux d’emploi sont trop faibles, pourquoi ne pas engager les dizaines de milliers de jeunes qui aboutissent au chômage chaque année?
Cédric Gérôme
En Belgique aussi, cela fait maintenant plus d’un an que gouvernement, patrons et médias balaient idéologiquement le terrain pour s’atteler au rallongement de l’âge de la retraite et au tronçonnage de nos prépensions. Sur le ton d’un alarmisme démesuré, tous se rejoignent pour affirmer que « si on veut que le système de pensions et celui des soins de santé restent viables, il faut augmenter le taux d’emploi des actifs sous peine d’être obligé de relever les cotisations sociales à un niveau intenable » (La Libre Belgique, 09/04/2005). Comme s’il ne s’agissait que d’un problème technique, sans conséquences pour l’ensemble de la société.
Le phénomène du « papy-boom » sert dans ce débat d’argument massue, et prétend donner à ces affirmations un caractère incontestable. Cependant, même si le vieillissement de la population est réel, on occulte sciemment le fait qu’en Belgique comme ailleurs, la productivité a considérablement augmenté elle aussi; par conséquent, non seulement il y a suffisamment d’argent pour payer les pensions, mais il y en a même plus qu’avant. Le tout est d’aller le chercher là où il se trouve : dans les poches des grands patrons et des actionnaires. Electrabel affiche un bénéfice net de près d’un milliard d’euros. Fortis est en tête du classement avec un bénéfice de 3,358 milliards d’euros. Tandis que les profits des entreprises ont explosé au cours de ces dernières années, les travailleurs ont vu leur part du gâteau fondre comme neige au soleil. Et c’est de nouveau à eux que l’on demande de « faire des sacrifices »… Pas étonnant qu’en Grèce, en Autriche, en France et en Italie, la réforme des pensions ait provoqué des mouvements de masse, y compris des grèves générales. Solide leçon pour le gouvernement belge qui, après les nombreuses grèves et mouvements de lutte de ces derniers mois, marche sur des œufs. L’objectif du gouvernement et du patronat est d’augmenter de cinq ans l’âge effectif de la sortie de carrière, ainsi que de porter un premier coup de sabre aux prépensions. Mais la manière d’appliquer cette nouvelle offensive sur les acquis des travailleurs ne fait pas l’unanimité au sein du gouvernement. Voilà pourquoi le débat sur les fins de carrière est de nouveau reporté, pour la conférence de printemps qui aura lieu en mai. Certains n’hésitent pas à faire preuve d’une démagogie sans borne pour faire avaler la pilule aux travailleurs.
C’est le cas de cet économiste de l’UCL, Sergio Perelman, qui affirme que « Si on remet les vieux sur le marché du travail, il y aura un effet bénéfique pour toute l’économie et donc sur l’emploi des jeunes». Effets bénéfiques? Un rapport publié par l’Organisation internationale du travail (OIT) révèle que le nombre de travailleurs morts dans l’exercice de leur métier dépasse, par an, les deux millions.
Plutôt que de retarder l’âge de la retraite, il faut faciliter l’emploi de tous durant la vie active et permettre aux plus âgés de couler leurs vieux jours dignement. Mais pour cela, il faut changer de politique. Notamment en partageant le travail entre tous, avec maintien du salaire. Il faut stopper l’attaque contre les pensions et les prépensions. Aux côtés de syndicats combatifs, il faut un parti doté d’un vrai programme socialiste. C’est ce que nous construisons avec le MAS-LSP. Rejoignez-nous dans ce combat!
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Trop de familles heurtées par l’endettement
Economie capitaliste: vers une nouvelle crise?
En 2004, 51.100 nouvelles maisons ont été construites en Belgique, record inégalé depuis 1994. Depuis la crise économique de 2001 aux USA, les pays développés essaient de stimuler la croissance en rendant l’emprunt plus accessible : les taux d’intérêt sont aujourd’hui historiquement bas.
Peter Delsing
Construire une maison n’est sans doute pas à la portée de tous. Pour des familles ouvrières où un partenaire ne travaille pas, ou pour ceux qui habitent seuls, c’est irréalisable. Des chiffres de l’ONEm pour 2004 montrent que 17% de la population active est complètement ou partiellement touchée par le chômage. Avec 1,17 millions de personnes, c’est un record. Pour ces familles, construire une maison est pratiquement exclu.
Les familles dans lesquelles les deux partenaires travaillent, lorsqu’elles n’appartiennent pas à une catégorie aisée, craignent de ne plus pouvoir continuer à rembourser leurs emprunt si l’un des deux venait à perdre son emploi. Vu l’instabilité actuelle du capitalisme ce n’est pas une crainte irréelle.
L’emprunt bon marché ne durera pas
Le gouvernement a mentionné une plus grande consommation pour expliquer la croissance de 2,7% en 2004. Bien que supérieure aux pays voisins, cette croissance ne suffisait déjà pas à faire baisser le chômage, et elle sera encore moindre cette année. On peut s’imaginer les drames qui vont naître du nombre grandissant des pertes d’emplois…
La croissance de la consommation allait de paire avec l’amnistie fiscale pour l’argent noir placé à l’étranger. De toute manière, emprunter à bon marché ou acheter à crédit ne peut pas se poursuivre éternellement. Le nombre de mauvais payeurs pour des lignes de crédits est passé en Belgique de 99.530 jusqu’à 190.226 entre 1997 et 2003. Aux Etats-Unis, le taux d’intérêt a déjà commencé à croître, afin surtout de ne plus élargir la bulle des dettes et les prix des maisons. Or, 85% de tous les emprunts effectués l’an passé dans notre pays peuvent être adaptés chaque année sur base des changements de taux d’intérêt. Quand le taux d’intérêt augmente, beaucoup de familles subissent une gifle financière.
Economie mondiale instable
Nous connaissons actuellement la relance économique la plus faible depuis la seconde guerre mondiale. Beaucoup de pays ont eu une croissance insuffisante pour maintenir l’emploi. En général, l’exploitation aggravée des travailleurs a élargi le fossé entre riches et pauvres. Depuis la crise de 2001, les entreprises américaines ont augmenté la productivité moyenne par travailleur grâce à l’introduction de nouvelles technologies et de nouvelles techniques de management. Durant les 3 derniers mois de 2004, la croissance de la productivité a ralenti, ce qui démontre que ces avantages pour les patrons commencent à être épuisés.
Un autre élément est l’endettement. Après le 11 septembre, Bush a emprunté chaque année pour mener ses guerres en Irak et en Afghanistan. L’industrie de guerre a été bien servie, au détriment des projets sociaux dans lesquels Bush épargne pour limiter le déficit.
Le taux d’intérêt peu élevé a stimulé les dettes. Pour chaque dollar de nouvelle croissance entre le début de 2001 et la fin de 2003 aux USA, 3,14 dollars de nouvelles dettes ont été faites par les familles, les entreprises et le gouvernement. Pour la première fois dans l’histoire, les dettes aux Etats-Unis représentent plus du double de la production annuelle (PIB). Ceci a contribué au rôle des Etats-Unis comme "marché de la dernière chance". Cela a aussi provoqué un flux de dollars vers d’autres pays, avec pour effet que la demande de dollars a diminué et donc également sa valeur.
En Asie, les banques centrales ont massivement acheté des dollars ces dernières années, sous forme d’obligations d’états, afin de faire baisser leur monnaie avec le dollar et ainsi garder leur position d’exportation. S’il y avait une correction du dollar vers le bas, ils pouvaient se diriger vers d’autres monnaies. Une nouvelle forte baisse du dollar secouerait la stabilité internationale financière. L’exportation des pays de l’Europe, avec un euro encore plus cher, serait étouffée. Cela pousserait les pays de la zone euro dans une crise profonde.
Il y a aussi les prix du pétrole qui grimpent et qui, fin mars, s’approchaient des 60 dollars par baril. Le "contrôle" de l’Irak, sensé entraîner les prix du pétrole vers le bas, est un rêve qui pour Bush est devenu cauchemar. Le prix du pétrole plus élevé mine la rentabilité des entreprises et stimule une augmentation générale des prix.
Encore des pertes d’emplois
En Europe, la croissance ne suffit pas à créer des emplois. L’Allemagne, les Pays-Bas et l’Italie ont connu lors du dernier trimestre 2004 une contraction de l’économie, en comparaison avec le trimestre précédent. La moitié de la production dans la zone euro va donc dans la direction d’une récession. En Allemagne le chômage est au niveau le plus élevé depuis les années ’30 : 5,2 millions de sans emplois. La crainte d’une lutte de classe plus intense chez les politiciens bourgeois, entre autre en France et en Allemagne, les pousse à enfreindre les règles budgétaires de la zone euro (le Pacte de Stabilité).
On ne peut prédire le rythme d’une crise économique. Avec une croissance ralentie ou une récession, les pertes d’emplois vont continuer. Les capitalistes et leurs partisans ont fait leurs temps, il est désormais urgent que le mouvement ouvrier et les jeunes forment leurs instruments syndicaux et politiques pour défendre leurs intérêts dans la très instable période à venir.
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“A travail égal, salaire égal!” La grève des femmes de la FN de Herstal
1966 (16 février – 8 mai)
Le 16 février 1966 éclatait une grève qui allait devenir historique : celle de 3.000 ouvrières de la Fabrique Nationale d’Armes de Guerre (FN) de Herstal. Cette grève est devenue historique pour deux grandes raisons :
1. Les grèves de femmes sont rares : celle de la FN fut la plus importante, car elle a duré 12 semaines, elle fut massivement suivie du début à la fin, elle s’est concrétisée dans un slogan (“A travail égal, salaire égal !”) pouvant être repris par toutes les femmes travailleuses et elle s’est terminée par une victoire (même si celle-ci ne fut que partielle)
2. Elle a eu lieu à un moment charnière : 5 ans après la grande grève de l’hiver 60-61 contre la Loi unique (1 million de travailleurs au moment le plus fort de la grève) et 2 ans avant Mai ’68 qui a permis la relance d’un nouveau mouvement féministe dans la jeunesse. La grève de la FN a donc été marquée par la combativité issue de 60-61 et elle a servi de référence pour les toutes les femmes qui voulaient défendre et étendre leurs droits dans les années qui suivirent.Jean Peltier
Quarante ans après, certaines idées fausses se sont parfois développées quant à cette grève, notamment l’idée que ce fut la première grève des femmes en Belgique et que cette lutte s’était heurtée à l’opposition des ouvriers.
La revendication “A travail égal, salaire égal !” et le mouvement ouvrier
Pendant la première phase de développement du capitalisme industriel en Belgique (1800-1870), les femmes et les enfants sont massivement intégrés à la production dans des emplois non qualifiés, surexploités et sans droits. Vers 1860, les femmes représentent 35% de la main-d’oeuvre, non qualifiée et surexploitée: le salaire d’une ouvrière représente en moyenne la moitié du salaire d’un manoeuvre masculin adulte. En 1900, après que la bourgeoisie ait décidé de “reconstruire” la famille ouvrière, les femmes représentent encore 26% de la main-d’oeuvre.
Durant tout le 19e siècle, la grande majorité des hommes – les bourgeois mais aussi les prolétaires – ont une vision profondément sexiste, marquée par la religion : les femmes sont inférieures aux hommes, leur faiblesse est naturelle, leur place est à la maison pour s’occuper de l’entretien de la famille et des enfants.
La création en 1885 du Parti Ouvrier Belge (l’ancêtre du PS) représente un grand pas en avant : la Charte de Quaregnon affirme que “le parti ouvrier est le représentant non seulement de la classe ouvrière mais de tous les opprimés sans distinction de nationalité, de culte, de race ou de sexe”. Le POB lutte donc pour l’égalité civique et le suffrage universel pour tous. Néanmoins, la position dominante au sein du parti reste que la place naturelle de la femme est au foyer pour s’occuper du ménage et des enfants. Mais comme on est encore loin de cette situation idéale (!) et que les femmes doivent travailler, il est juste que, à travail égal, elles touchent un salaire égal. L’objectif central reste pourtant que le salaire de l’homme devienne suffisant pour pouvoir se passer du travail de la femme et lui permettre de retourner à la maison.
Après la 1ère guerre mondiale, le travail des femmes se développe en tant qu’employées dans les bureaux des usines et dans les administrations. L’agitation sociale grandit, les travailleurs obtiennent la journée des 8 heures et des hausses de salaires. Les femmes participent aux mouvements de grève et les premières grèves de femmes ont même lieu, notamment celles des ouvrières polisseuses sur métal de Liège et Herstal en 1920, des vendeuses de grands magasins en 1920 aussi et, en 1922, celles des ouvrières du textile à Verviers (qui dure 5 mois!).
Le mouvement syndical (qui reste totalement dominé par les hommes) revendique “A travail égal, salaire égal” mais ne fait que très peu d’efforts pour imposer cette revendication dans la réalité. La patronat finit par accepter – en théorie – cette idée mais il la contourne dans la pratique, en imposant des petites différences entre les postes et les opérations de travail entre hommes et femmes qui font qu’il n’y a presque jamais de travail égal… et donc pas de salaire égal !
Après la 2e guerre mondiale, les nouvelles institutions internationales comme l’O.N.U. et l’Organisation Internationale du Travail (O.I.T.) inscrivent dans leurs principes l’idée “A travail égal, salaire égal”. En 1957, le Traité de Rome, qui crée le Marché Commun (l’ancêtre de l’Union européenne) entre six pays dont la Belgique, reprend lui aussi le principe “A travail égal, salaire égal” dans son article 119. Bien entendu, ce principe n’est mis en oeuvre nulle part, mais l’application de l’article 119 deviendra la revendication centrale des ouvrières en grève de la FN.
Pour le patronat belge, la revendication de l’égalité salariale entre hommes et femmes est un “luxe impossible”. Les arguments pour justifier cela sont déjà les mêmes que ceux qu’on entend à tout moment aujourd’hui : la concurrence internationale est trop forte, la mise en oeuvre du Marché Commun empêche de faire des “folies”. Pour le patronat, le salaire féminin reste un appoint et les femmes au travail sont trop instables et trop souvent absentes (maladies, accouchements, soins des enfants) pour qu’on puisse les considérer de la même manière que les hommes.
Les femmes jouent un rôle actif dans tous les grands mouvements de grève en Belgique – en 1936, en 1950 lors de l’Affaire Royale et en 1960-61 – mais elles restent marginales dans le mouvement syndical (tant à la FGTB qu’à la CSC) tout comme dans le Parti Socialiste Belge.
La F.N. de Herstal
La F.N. est un fleuron de l’industrie liégeoise depuis 1886. Elle a une production variée : les armes surtout mais aussi les motos et même, pendant un temps, les autos. En 1966, elle emploie 13.000 travailleurs. C’est une entreprise florissante qui peut donc se permettre de payer des salaires élevés. Les femmes sont 3.900 à la F.N., soit 30% de l’ensemble des travailleurs. Il y a 350 employées pour 3.500 ouvrières.
A la F.N., les ouvrières occupent le bas de l’échelle à tous les points de vue :
– elles sont engagées comme manoeuvres spécialisées (le grade le plus bas) : elles font le gros oeuvre sur les pièces avant de les apporter aux ouvriers qualifiés (des hommes) qui font la finition.
– elles n’ont pas suivi d’études préparatoires et apprennent donc leur métier dans l’usine;
– leur travail se fait dans des conditions dégueulasses que montre très bien le documentaire TV (huile, bruit, manque d’hygiène, absence de vêtements de protection,…);
– elles sont appelées les “femmes-machines” (elles ne sont que le simple prolongement de la machine qui leur dicte le rythme du travail).
– L’encadrement est totalement masculin, du grand patron au régleur des machines en passant par les ingénieurs et les contremaîtres.
– Les femmes n’ont aucun espoir de promotion : la F.N. organise des formations qui sont officiellement ouvertes à tous, hommes et femmes, mais réservées à ceux qui ont ont suivi à l’école des cours techniques de mécanique (ce qu’aucune femme n’a fait !).
– Les inégalités salariales sont criantes : l’ouvrier le moins qualifié qui entre à la F.N. est payé directement en classe 4 et peut régulièrement progresser; par contre, les femmes se répartissent dans les classes 1 à 3 et ne peuvent espérer monter plus haut puisqu’elles ne suivent pas les formations internes à la F.N. !
– enfin, dans la vie syndicale de l’entreprise, les femmes restent sous-représentées : si elles représentent 30% de la main-d’oeuvre, il n’y a que 6,5% de déléguées à la FGTB et 9% à la CSC.Chronologie de la grève des femmes de la F.N.
8 nov. 65 : Début des discussions au niveau national pour l’établissement d’une nouvelle convention qui doit réduire les différences salariales entre hommes et femmes dans le secteur du métal. Le patronat fait traîner les négociations. A la FN, la direction refuse toute négociation dans l’entreprise tant qu’un accord national n’est pas signé.
Janvier 66 : Nombreuses réunions syndicales dans l’entreprise sur le thème “A travail égal, salaire égal”. Le mécontentement augmente.
9 février : Débrayage spontané des femmes. Après avoir tenu une assemblée où les délégations syndicales promettent de faire pression sur la direction de l’usine, elles acceptent de reprendre le travail.
16 février : Après une assemblée syndicale où les délégations annoncent que la direction ne veut pas bouger, les femmes partent spontanément en grève contre l’avis des délégués. Les hommes manoeuvres (les moins bien payés) touchant 32 francs l’heure et les femmes 25 francs, elles réclament 5 francs/heure d’augmentation. Les femmes présentes à l’assemblée font le tour de l’usine pour lancer le mouvement. 3.000 ouvrières partent en grève.
17 février : 1ère assemblée générale de la grève. 3.000 femmes partent en cortège de l’usine, jusqu’à la salle de réunion. Les permanents syndicaux demandent la suspension de la grève mais les femmes refusent. 1.000 ouvriers sont déjà en chômage.
18 février : Un accord national est signé : il ne garantit que 1 franc/heure d’augmentation.
19 février : La direction de la FN refuse d’aller plus loin que l’accord national.
21 février : 2e assemblée générale. Les directions syndicales commencent à reprendre le mouvement en main. Ils reconnaissent la grève et dénoncent la présence d’éléments indésirables qui n’ont rien à voir avec la F.N. en visant les militants extérieurs à l’usine du Parti Communiste de Belgique (le PC officiel, pro-soviétique), du Parti Communiste Wallon (une scission du PCB, pro-chinoise) et du Parti Wallon des Travailleurs (scission de gauche du PSB dans lequel militent les trotskistes). Des ouvrières des ACEC à Herstal et de Schreder à Ans partent en grève en solidarité. Après l’AG, les ouvrières les plus combatives et les plus méfiantes vis-à-vis de l’appareil syndical, appuyées par le PCW, constituent un Comité d’Action pour élargir la grève et appeler à la solidarité. 28 février :
3e assemblée générale : les directions syndicales affermissent leur contrôle sur la grève. Elles font voter la création d’un Comité de Grève de 24 femmes (18 FGTB et 6 CSC), moins pour diriger la grève (ce sont les permanents qui conservent l’essentiel des contacts avec la direction de la FN et les instances syndicales nationales) que pour éliminer les influences plus à gauche, comme le Comité d’Action. 3.000 ouvriers sont en chômage. Les premiers versements de solidarité avec la grève arrivent.
Début mars: Une pétition de solidarité des hommes avec les ouvrières en grève circulent. La majorité de travailleurs de l’entreprise – encore au travail ou en chômage – signe cette pétition. Les syndicats et les mouvements féminins (liés au PSB, au PC et au Mouvement Ouvrier Chrétien) popularisent la grève. Le conciliateur social fait une proposition d’augmentation de 3 francs/heure en plusieurs étapes.
3 mars : 4e assemblée générale : 2.500 ouvrières rejettent les propositions du conciliateur et votent la prolongation de la grève. Le Comité de grève est chargé de gérer la solidarité financière venant de l’extérieur et est tenu au courant de l’évolution des négociations par les syndicats. Son nombre de membres est porté à 29 et il intègre des membres du Comité d’Action dont l’influence va diminuer peu à peu.
9 mars : 5e assemblée générale : la direction ne bougeant pas, la grève est prolongée. A la tribune se suivent interventions de solidarité de mouvements féminins et de délégations d’entreprises et lecture des premiers messages de l’étranger.
Mars : Les difficultés financières grandissent mais la solidarité s’organise de mieux en mieux. Les commerçants offrent des produits, les délégations et les centrales syndicales organisent des collectes un peu partout, les quotidiens de gauche lancent des souscriptions de soutien, des dons arrivent de syndicats d’autres pays européens. Le Comité de Grève se réunit tous les jours pour organiser la remise d’argent et de colis aux ouvrières en grève et aux chômeurs en difficulté. Les ouvrières des ACEC-Herstal partent elles aussi en grève. Dans une autre usine de la région où les ouvrières sont parties en grève, la direction accorde une augmentation salariale substantielle aux femmes.
21 mars : 6e assemblée générale : la direction de la FN refuse toujours de négocier des augmentations supérieures à l’accord national. La grève est prolongée. Le nombre d’ouvriers au chômage atteint 4.000 et des secteurs entiers de l’usine sont à l’arrêt. A l’assemblée, une représentante de la CGT française reçoit une ovation extraordinaire et 2.500 ouvrières chantent La Marseillaise. Le journal télévisé de la RTB évoque la grève pour la première fois (après cinq semaines de grève !).
24 mars : Une délégation des Comités d’Action des femmes de la FN et des ACEC-Herstal se rend aux ACEC-Charleroi pour appeler les ouvrières à partir en grève (des assemblées d’ouvrières des ACEC-Charleroi réclament une grève depuis des semaines mais elles sont bloquées par les permanents syndicaux); plusieurs centaines d’ouvrières des ACEC débraient et se rendent dans les sièges syndicaux pour engueuler les permanents.
28 mars : 7e assemblée générale : les dirigeants syndicaux liégeois dénoncent à la tribune les tentatives de la direction pour briser la grève par des informations mensongères dans la presse… et condamnent publiquement la descente du Comité d’Action à Charleroi. Pour faire baisser la tension, les syndicats annoncent une manifestation à Herstal le 7 avril. La grève continue aux ACEC-Herstal et chez Schreder à Ans. A Charleroi, les dirigeants syndicaux imposent un nouveau délai avant un départ en grève.
Fin mars : Intense activité dans les séances parlementaires et dans les couloirs du parlement autour de la grève de la FN et des revendications d’égalité salariale hommes-femmes. Mais rien n’avance.
7 avril : Après 51 jours de grève, une manifestation se déroule à Herstal en présence de responsables syndicaux liégeois et de quelques parlementaires de gauche. Les cas de misère se multiplient (il est fréquent que plusieurs personnes de la même famille travaillent à la FN) tandis que la solidarité continue à s’amplifier.
12 avril : Malgré l’opposition de l’appareil syndical, les ouvrières des ACEC-Charleroi partent en grève. Un Comité d’Action des ouvrières des ACEC-Charleroi se forme à l’initiative du PCW.
15 avril : 8e assemblée générale : des négociations reprennent avec la direction mais rien n’avance. La grève est donc une nouvelle fois prolongée.
19 et 23 avril : La grève se termine aux ACEC, d’abord à Charleroi puis à Herstal, sur des augmentations salariales de 2 francs pour les femmes et des engagements de révision des classifications.
25 avril : 5.000 personnes manifestent à Liège sur le slogan “A travail égal, salaire égal” : les femmes de la FN forment le gros de la manifestation mais il y aussi des délégations d’entreprises de tout le pays ainsi que des délégations des Pays-Bas et de France.
Fin avril : 9e assemblée générale : les propositions patronales, considérées comme insuffisantes, sont rejetées. Près de 5.000 ouvriers sont en chômage technique.
4 mai : Syndicats et direction tombent d’accord sur un accord : 2 francs/heure à la reprise du travail et 0,75 franc au 1er janvier 1967.
5 mai : 10e assemblée générale : la bureaucratie syndicale jette tout son poids dans la balance pour faire voter l’acceptation de l’accord devant une assemblée convoquée à la hâte et moins nombreuse que d’habitude. L’accord est finalement accepté au scrutin secret par 1.320 oui et 205 non. Beaucoup de femmes acceptent cet accord du bout des lèvres parce qu’elles sont épuisées financièrement mais elles trouvent son contenu insatisfaisant.
Après la grève : Même si la rentrée est douloureuse et que beaucoup d’ouvrières sont déçues, la combativité des femmes permettra par la suite d’obtenir de nouvelles augmentations salariales à la FN, plus importantes pour les femmes que pour les hommes. Une nouvelle grève de trois semaines en 1974 permettra l’ouverture aux femmes d’une soixantaine de fonctions qui leur étaient fermées jusque là et de nettes améliorations en matière d’hygiène et de conditions de travail.
Traits marquants et leçons de la grève des femmes de la F.N.
1. Dès le départ, le mouvement a été massif et uni; c’était tellement évident pour tout le monde qu’il n’y a jamais eu besoin de faire un piquet de grève pour faire respecter la grève pendant les douze semaines !
2. Dans sa première phase, le mouvement a aussi été spontané et radical. Les appareils syndicaux ont été débordés et placés devant le fait accompli de la grève. Des militant(e)s d’extrême-gauche (PCB, PCW, PWT) ont joué un rôle important dans le déclenchement de la grève et dans l’impulsion de la solidarité. Dès le premier jour, un Comité d’Action a regroupé les militantes les plus radicales pour ne pas laisser les appareils syndicaux enterrer un mouvement qu’ils ne souhaitent pas.
3. Débordée par le déclenchement de la grève, la bureaucratie syndicale a montré une grande intelligence tactique. Elle a reconnu la grève au bout de quelques jours (elle ne pouvait pas faire autrement!) et elle a entrepris de la récupérer en créant un Comité de Grève officiel pour réduire l’audience du Comité d’Action.
4. Les hommes ont été fortement aux côtés des femmes dès le début de la grève (la pétition de soutien aux femmes a été massivement signée et aucun homme n’a fait le jaune en acceptant de faire le travail des femmes !). Et ils sont restés solidaires même quand la moitié d’entre eux ont été réduits au chômage technique. Le sexisme n’a pas disparu mais il a reculé fortement devant le courage et la détermination des ouvrières grévistes.
5. La solidarité de classe a été énorme : collectes réalisées par les délégations syndicales d’entreprises, dons des centrales syndicales, collectes réalisées par les partis de gauche (des secteurs du PSB, le PCB, le PCW, le PWT) et par des mouvements féminins liés aux syndicats et aux partis de gauche,… La solidarité est même venue de commerçants et de professions libérales d’Herstal et de la région, preuve que la classe ouvrière peut polariser autour d’elle des couches populaires plus larges quand elle lutte de manière décidée. Enfin, il y a eu une solidarité importante à l’étranger (France, Pays-Bas, Allemagne, Italie) venant des mêmes mouvements (syndicaux, politiques et féminins) qu’en Belgique.
6. Sous la pression de la combativité des femmes et malgré leur faible représentation dans les syndicats (à la FN et ailleurs), la grève a été organisée d’une manière partiellement démocratique. Les points positifs principaux ont été : des assemblées hebdomadaires où la poursuite de la grève était chaque fois discutée et mise au vote, les interventions de solidarité de délégations d’entreprises, de centrales syndicats, de mouvements féminins, l’élection d’un comité de Grève,… Mais cette organisation a rencontré des limites dues au contrôle réel exercée par la bureaucratie syndicale : les A.G. ont été dirigées par les permanents (de l’entreprise et de la régionale), les négociations nationales et avec la direction sont restées le privilège des dirigeants syndicaux, le Comité de Grève n’a pas dirigé celle-ci mais a été essentiellement cantonné à la gestion de tous les problèmes sociaux (une tâche essentielle mais limitée),…
7. L’extension du mouvement n’a pas été facilitée par les appareils syndicaux. Le meilleur moyen de faire pression sur le gouvernement et le patronat était d’élargir le mouvement né à la FN et suivi par les ACEC et Schreder par un appel à la grève dans d’autres entreprises à forte proportion de femmes. Les bureaucraties syndicales de Liège n’ont pas suivi cette orientation. Pire encore, l’appareil des métallos FGTB de Charleroi (soumis au PSB) a tout fait pour empêcher la grève aux ACEC-Charleroi (et la casser une fois qu’elle a eu démarré). Les ouvrières de la FN se sont donc trouvées très seules dans un conflit qui n’aurait sans doute duré douze semaines si les syndicats avaient élargi rapidement le mouvement.
8. Les deux manifestations sont venues très tard : celle de Herstal après 7 semaines et celle de Liège après 10 semaines ! Et encore, les syndicats n’ont organisé la manif de Herstal que parce que les femmes les plus combatives essayaient d’étendre le mouvement par elles-mêmes (en envoyant des délégations à Charleroi) et qu’il fallait détourner l’énergie des ouvrières vers quelque chose de moins dangereux pour la bureaucratie. De plus, les syndicats n’ont pas essayé de mobiliser massivement pour ces deux manifs (5.000 personnes à Liège pour une manifestation de solidarité avec une grève qui dure depuis dix semaines, c’est très peu).
9. Les mouvements féminins ont joué un rôle positif en élargissant la solidarité et en menant une campagne idéologique bienvenue contre les idées réactionnaires telles que “la place de la femme est au foyer et pas en usine” ou “le salaire de la femme n’est qu’un salaire d’appoint” encore bien vivantes chez les hommes (et même chez une partie des femmes !) à l’époque. Mais, étroitement liés au PSB et aux syndicats, ces mouvements féminins n’ont pas pu, ni voulu remettre en cause la direction exercée par les bureaucraties syndicales.
10. Les “petits” partis de la gauche radicale (quelques centaines de membres tant au PCW qu’au PWT, c’est plus de membres et surtout plus de travailleurs membres qu’au PTB et au MAS aujourd’hui !) ont joué un rôle actif et positif pour développer la solidarité mais aussi l’initiative autonome des femmes. Mais le sectarisme stalinien du PCW l’a souvent isolé dans l’action.
11. La combativité des femmes de la FN a été extraordinaire et la solidarité a montré qu’un large courant dans la classe ouvrière se reconnaissait en elles et était prêt à les soutenir. Ce qui a manqué pour que leur combat se termine par une victoire éclatante plutôt que par une demie-victoire, c’est, comme souvent, l’existence d’un courant syndical combatif solidement organisé et d’un parti révolutionnaire implanté dans les entreprises qui auraient pu les aider à contrer le réformisme et le contrôle pesant de la bureaucratie syndicale et du PS sur le mouvement ouvrier.
Pour en savoir plus :
– “La grève des femmes de la FN en 1966” un livre de Marie-Thérèse COENEN paru en 1991 aux éditions Pol-His du CRISP (il est toujours disponible en librairie)
– “La première grève féminine d’Europe. les leçons de la grève de la FN”, article paru dans le numéro d’octobre 1966 de “Lutte de Classe”, la revue de la section belge de la Quatrième Internationale (voir Francine pour plus de renseignements) -
Contre le Vlaams Belang! Pour une alternative socialiste!
LA QUESTION d’une stratégie efficace contre le Vlaams Belang revient dans toutes les discussions. Faut-il donner raison au cynisme de la presse traditionnelle? Est-ce qu’on a vraiment tout essayé en vain? Selon nous: non. L’élaboration d’une stratégie est une question sérieuse où il faut tenir compte à la fois du score électoral du Vlaams Belang et du noyau dur fasciste qui dirige ce parti.
Geert Cool
Pour lutter contre un parti qui progresse à partir du mécontentement d’une partie de la population envers la politique antisociale de l’establishment, on ne peut pas s’en remettre à cet establishment. Crier victoire après une décision de justice ou après des déclarations de politiciens sur la dotation des partis ne mène à rien. Nous devons convaincre les électeurs du Blok que ce parti n’a pas de solutions à leurs problèmes. Edulcorer notre discours pour gagner des partisans dans l’establishment n’a non seulement aucun sens, mais est contreproductif.
Bien au contraire, nous devons construire une force qui s’oppose au système, non seulement en paroles, mais qui est aussi prête à l’affronter lors de campagnes concrètes.
Nous devons tirer les leçons des défaites de l’extrême-droite en Europe. L’Italie en 1994, la France en 1995, récemment l’Autriche – où l’extrême-droite a subi des – défaites électorales après les protestations de masse contre la politique néolibérale.
En Italie, à la fin 1994, des centaines de milliers de travailleurs ont manifesté contre les plans de retraite du premier gouvernement Berlusconi. Le mouvement fondait son espoir sur la gauche politique pour mettre fin à la politique antisociale. La base sociale du gouvernement de droite (auquel participaient aussi l’Alliance Nationale “postfasciste” et la Ligue du Nord) était totalement sapée et le gouvernement est tombé. Berlusconi et Cie ne sont revenus au pouvoir qu’après quelques années. En fin de compte, cela n’a été possible que grâce à la politique tout aussi néolibérale de la coalition de “l’Olivier” de centre-gauche.
En Autriche, le FPÖ a perdu le soutien de la population après la grève quasi générale de l’an dernier. Alors qu’après sa première participation au gouvernement, le FPÖ avait même vu son score augmenter. Ce qui contredit l’idée que la participation au pouvoir leur coûterait de toute façon des voix.
Ces exemples montrent qu’une stratégie antifasciste doit reposer sur la résistance active contre la politique antisociale. La croissance de la pauvreté, mais aussi la crainte des gens relativement plus aisés de voir chuter leur niveau de vie, mènent à un sentiment d’insécurité sociale et font douter de l’avenir. Tant que la résistance à tout cela ne parvient pas à s’exprimer activement dans des mobilisations et à s’organiser dans une formation politique ouvrière, elle continuera à s’exprimer passivement par un vote de protestation pour le Vlaams Belang.
Nous appelons tous les jeunes et les travailleurs qui veulent combattre l’extrême-droite à commencer la lutte dans les quartiers, les écoles, les entreprises, les universités,… C’est là qu’on doit construire la résistance active à la politique actuelle. Une bonne façon de le faire, c’est de participer à la campagne pour la Marche des Jeunes pour l’Emploi du 19 mars.