Tag: De Standaard

  • Une Autre Politique dans la presse

    Au mois d’août, plusieurs journaux et magazines ont écrit des articles au sujet du Comité pour Une Autre Politique. Plusieurs commentateurs ont été assez positifs et ont expliqué qu’il y a un espace pour un parti à gauche de la sociale-démocratie et des écolos. Presque tous les journaux néerlandophones ont publié des articles sur l’initiative et quelques journaux francophones (Le Soir, La Libre) y ont même consacré des brèves.

    Karel Mortier

    Le 1er août, De Standaard, le principal quotidien flamand "de qualité", publiait un article sous le titre "Un nouveau parti des travailleurs à l’automne". Le lendemain, le journal anciennement de gauche De Morgen titrait : "Un nouveau parti des travailleurs en chantier". Dans ces articles, les raisons de la création d’une nouvelle formation apparaissaient clairement, mais les journalistes consacraient aussi beaucoup d’attention à la présence des partis de l’extrême-gauche dans l’initiative. Les journalistes ne semblent pas avoir compris qu”Une Autre Politique’ n’est pas un rassemblement de toutes les formations de la gauche radicale mais la construction d’une formation portée par des couches plus larges dans laquelle la gauche radicale organisée peut jouer un rôle. Le PTB s’est senti obligé de réagir avec un communiqué de presse pour annoncer qu’il ne participe pas à cette initiative.

    Le Vlaams Belang a publié deux articles sur l’initiative ‘Une Autre Politique’. Il a osé écrire qu’ "Il y a déjà depuis des années un parti nettement social qui défend le bien-être social de tous les Flamands : le Vlaams Belang". Freddy Van Gaever sera content d’entendre cela… (voir en page 10). Le VB prétend que ses électeurs n’attendent pas "quelques communistes recyclés".

    L’initiative de Sleeckx a reçu des commentaires assez positifs dans De Standaard et dans le quotidien populaire Het Laatste Nieuws. Bart Brinckman a écrit dans De Standaard: "Il y a des arguments pour une formation politique à gauche du SP.a et Groen, qui essaie de reprendre des votes du Vlaams Belang. Au Pays-Bas il existe un tel parti. […] En Flandre, tous les partis, sauf le Vlaams Belang, font partie de l’establishment. Une nouvelle initiative peut alors être un concurrent pour l’extrême-droite." Dans Het Laatste Nieuws Jan Segers a écrit un commentaire assez positif sur ce qu’il appele le Parti des Petits Gens.

    Les politiciens ont été moins enthousiastes. Geert Lambert, président de Spirit (petit parti nationaliste ‘de gauche’ associé au SP.a) a dit que Sleeckx arrive avec "un vieux discours" alors que, selon lui, la classe des travailleurs n’existe plus. Son collègue Bart De Wever, président de la N-VA (un autre petit parti nationaliste ‘de droite’, associé au CD&V) a même publié une tribune libre dans De Morgen avec quelques "avis pour les fondateurs d’un nouveau parti des travailleurs". Bien que son texte consiste surtout en remarques cyniques ou erronées, De Wever a dû avouer qu’il y a un espace pour une initiative à la gauche du SP.a puisque ce parti ne s’oriente plus vers les travailleurs: "Les moins forts dans la société y sont encore un sujet de discussion, mais de préférence en leur absence. La gauche caviar est la norme, le bourgeois bohéme est la forme."

    Caroline Gennez, vice-présidente du SP.a, a elle aussi réagi, en affirmant que son parti "a pris ses responsabilités" dans la discussion autour du Pacte des Générations. Elle a ajouté qu’il y a suffisamment de possibilités de discussions dans le SP.a même, en faisant référence à SP.a-Rood (un petit courant qui tente d’organiser une aile gauche dans le SP.a). Les écologistes de Groen n’excluent pas une collaboration avec une nouvelle formation mais disent attendre de connaître son programme. Groen rappelle qu’il s’est opposé au Pacte des Générations… mais il reste bien sûr silencieux sur la politique du gouvernement fédéral auquel les Verts ont participé eux-mêmes entre 1999 et 2003.

    L’attention portée par la presse – à l’heure actuelle, surtout la presse flamande – confirme bien qu’il y a un espace pour une nouvelle formation à gauche de la social-démocratie et des écolos.

  • 80.000 manifestants après la mort de Joe Van Holsbeeck. Une manifestation de solidarité impressionnante

    Ce dimanche 23 avril, une manifestation à travers les rues de Bruxelles a rassemblé 80.000 personnes, expression de la solidarité envers la famille et les amis de Joe Van Holsbeeck tout autant que de la condamnation unanime de cette violence inutile. Quelques membres du MAS/LSP étaient présents dans le même élan de solidarité. De cette Marche Silencieuse pouvait se faire entendre un puissant cri appelant à une société plus sûre, plus sociale, plus solidaire.

    Si la thématique de la sécurité était bien sûre évoquée par toutes les personnes avec qui nos militants ont engagé une conversation, très peu mettaient en avant la nécessité de renforcer la présence policière. Plutôt que de répression, c’était la nécessité de plus de prévention qui était fortement présente dans les discussions, notamment par l’intermédiaire de notre enseignement. Quant aux causes de cet acte, c’est la frustration de l’absence de moyens face à une société qui ne cherche qu’à promouvoir la possession matérielle qui était unanimement évoquée.

    Le souvenir de la Marche Blanche en 1996 vient de suite à l’esprit. La Marche Blanche était bien sûre plus grande, surtout grâce aux mobilisations qui la précédèrent, mais il s’agissait là également d’une expression spontanée et justifiée d’un sentiment de mécontentement vis-à-vis de la sécurité en général au sein de notre société.

    Bien des parents présents à ces manifestations étaient inquiets de notre futur, mais aussi et surtout de celui de nos enfants. C’est un fait que la société d’aujourd’hui devient de plus en plus dure et incertaine. L’insécurité s’installe dans tous les aspects de la vie des travailleurs et de leurs familles, que cela soit par rapport à l’emploi, au revenu, au logement, à la santé, aux pensions, à l’intégrité physique,…

    Une violence inutile

    La médiatisation de ce meurtre a donné l’opportunité à presque tous les politiciens traditionnels de donner leur avis sur les faits, tout en niant la « récupération politique ». Ils étaient cependant bien tous présents dans la presse, en s’abstenant bien entendu de faire une seule remarque critique sur la politique de ces 20 dernières années.

    Beaucoup de discussions ont eu lieu sur la violence inutile et la nécessité de l’endiguer, mais jamais il n’y a eu d’explication sur la raison pour laquelle un tel phénomène peut se développer. Une société incapable de donner un sens utile à la vie doit en payer le prix.

    Un courrier de lecteur dans le journal flamand « De Standaard » disait : « Il y a 50 ans, quand j’étais encore enfant, il n’y avait pas d’insécurité objective ou subjective. Mais il y avait partout des gardiens. Dans les parcs il a y avait des gardiens. Dans les gares, des contrôleurs de tickets et de voies. Dans les trams et les bus des chauffeurs et des contrôleurs de tickets. Dans les grands bâtiments publics des concierges, même dans les ascenseurs il y avait du personnel… Maintenant on paie des gens pour être sans emploi à la maison, et toutes ces tâches n’existent plus. Ces gens se trouvent exclus et ils ne participent pas à la vie sociale. Est-ce mieux ? »

    Ce courrier de lecteur exprime les changements survenus dans la société ces 20 dernières années. Les services publics ont été « rationalisés », occasionnant à la fois la suppression de dizaines de milliers d’emplois et la diminution de services publics. Il n’est que trop facile d’évoquer la responsabilité parentale lorsqu’on constate qu’au même moment des crèches sont fermées, ou rendues moins accessibles, qu’il y a des assainissements dans l’enseignement, et que de nombreux parents sont forcés de s’adapter à des horaires de plus en plus flexibles pour des salaires de plus en plus bas. En Belgique, 15% de la population est sous le seuil officiel de pauvreté, ce qui est trop facilement expliqué par la responsabilité individuelle de ces pauvres. Cela n’explique en rien pourquoi ce chiffre a doublé depuis 7 ans.

    De véritables socialistes sont pour une sécurité sociale forte, ce qui implique bien plus que des allocations et des assurances. Cela implique aussi le fait d’avoir une place dans la société, de vivre dans un milieu sain et sûr, de travailler et de vivre dans une situation stable,… Ces éléments de sécurité ont fondu comme neige au soleil durant les 20 années précédentes.

    Sécurité pour tous

    La seule réponse des politiciens traditionnels face à l’inégalité croissante est plus d’inégalité et de répression. La résistance contre cette inégalité est de plus présentée comme « conservatrice ». En France, lors du mouvement contre le CPE et la précarité, des jeunes et des générations plus âgées se sont mobilisées contre l’insécurité de l’emploi pour la jeunesse. Une rédactrice de « De Standaard », Mia Doornaart, a osé décrire ce mouvement comme « un réflexe conservateur ». Elle disait également que « Les étudiants d’aujourd’hui vont connaître moins de sécurité, mais plus de défis. »

    De véritables socialistes veulent lutter pour plus de sécurité pour tous. Dans la société actuelle, seules comptent la compétition et la maximalisation des profits. Dans ce processus, des couches sans cesses plus larges de la population se retrouvent misent de côté, ce qui mène à une société plus dure. Mais pour la classe dirigeante, cela n’est aucunement un problème. Augmenter la répression n’aboutira pas à une solution.

    La lutte contre la violence inutile est la lutte pour un bon avenir pour tous. Un futur dans lequel un MP3 ne sera pas une raison pour tuer. Pour cela, on ne peut pas accorder sa confiance aux politiciens traditionnels qui ont déjà démontré l’étendue de leur incapacité.

    Il faut rompre avec la logique du système actuel et de ses représentants politiques.

  • Libéralisation des marchés: Ce sont les actionnaires qui y gagnent, pas nous!

    Et vous, vous vous en sortez ? Depuis la libéralisation du secteur télécom, nous avons le choix entre 26 opérateurs et 65 tarifs. Pour fournir l’énergie, nous disposons de 6 fournisseurs privés différents, en plus de 9 intercommunales mixtes et de deux sociétés de contrôle. Depuis le 1er janvier, nous avons la possibilité de passer par plusieurs sociétés privées pour un envoi postal de plus de 50 grammes. Le transport ferroviaire de marchandises a déjà été libéralisé et le transport de voyageurs s’y prépare aussi.

    Eric Byl

    Tout cela serait, paraît-il, avantageux pour “le consommateur”, c’est-à-dire vous, moi et nos familles. Mais, pour sortir de cette jungle des fournisseurs et des tarifs, le consommateur devra être quelqu’un de super-informé, ayant beaucoup de temps libre, capable de déchiffrer les contrats jusque dans les petites lettres et disposant d’une connexion au réseau internet. Combien de personnes répondent à ces critères ? Sur le « marché de l’électricité », seuls 12% des usagers ont changé de fournisseur (De Morgen, 14.01.2006). Et une personne sur deux a déjà constaté des problèmes, allant de factures vagues ou erronées à un mauvais service après-vente en passant par l’absence de factures intermédiaires (De Standaard, 13.01.2006).

    Profits nets 2005

    • Suez: 2,08 millards d’€, 48% de plus qu’en 2004
    • Electrabel et Distrigas: 1,28 millard d’€, 79% de plus qu’en 2004
    • Nuon: 1,14 millard d’€, 18% de plus qu’en 2004 Les actionnaires de Nuon ont reçu 322 million d’€ en dividendes, contre 119 million d’€ en 2004
    • La moitié des utilisateurs ont connu des problèmes après avoir changé de fournisseur d’énergie: facture en retard, double facturage, …
    • Pannes électriques avec 5 cm de neige tombée!
    • 22.000 « compteurs de budget » en 2005 contre 11.600 entre 2002 et 2004
    • 10.800 emplois perdus à Belgacom en 10 ans

    En Flandre, où la libéralisation du secteur de l’énergie s’est appliquée plus tôt, le parti «socialiste» (SP.a) commence à réaliser qu’il y a un problème et constate que “souvent les défavorisés sont victimes de leur ignorance… Souvent ils ne savent même pas qu’ils sont libres de chercher un fournisseur d’énergie bon marché”. (De Standaard, 25.05.2005). Présenté de cette manière, il semblerait que c’est parce que nous sommes des crétins que nous payons trop ! Les fournisseurs ne montrent pas plus de respect : l’année passée, 36.000 foyers ont vu leur électricité coupée par leur fournisseur et n’ont plus droit qu’à la fourniture minimum des distributeurs, soit 7,5% de plus que l’année précédente. En 2004, 2.250 foyers ont subi une coupure totale. Les chiffres pour 2005 ne paraîtront qu’au milieu de 2006, mais on sait déjà que ce nombre à fortement augmenté. Une nouvelle expression est née en Flandre : les « energiearmen », les “pauvres à cause de l’énergie”.

    Mais il y a aussi des « riches à cause de l’énergie ». En 2005, le profit net de Belgacom a été de 959 million d’€, dont 500 millions ont été versés aux actionnaires. Bellens, le patron de Belgacom, reçoit chaque jour un salaire comparable au salaire mensuel de 6 membres du personnel. Et, ici aussi, ce sont d’autres consommateurs – ceux qui travaillent ou qui ont travaillé dans les sociétés actuellement libéralisés – qui ont fait les frais de la fête : entre 1996 et juin 2005, le personnel de Belgacom à diminué de 24.309 à 13.569 travailleurs, ce qui a coûté aux contribuables 250 millions d’€ en allocations et en pertes de rentrées.

    Ce n’est pas mieux ailleurs. A La Poste travaillent actuellement 35.000 postiers, 9.000 de moins qu’il y a 10 ans. Chez Electrabel, le personnel a manifesté pendant Batibouw contre le non-respect de la garantie d’emploi pourtant inscrite depuis 40 ans dans les conventions collectives. Rien d’étonnant alors qu’en terme de services, la libéralisation soit une affaire foireuse, au point qu’à l’occasion des nombreuses pannes d’électricité qui se sont produites au cours de cet hiver, Freddy Willockx, le bourgmestre de St. Niklaas, a pu déclarer : “Je me demande si je vis en Amérique Latine ou en Europe Occidentale”.

    Ces derniers jours, on commence à discuter ouvertement, au gouvernement et dans la presse, de l’échec de la libéralisation du marché d’électricité. Pas à cause de ses conséquences antisociales (il ne faut pas rêver !), mais parce qu’Electrabel renforcera encore son monopole de fait si la fusion entre sa société-mère Suez et Gaz de France a lieu. Vande Lanotte, président du SP.a, affirme avoir la solution: “Il faut refaire la libéralisation du marché d’énergie”. Non merci, Monsieur, on a déjà donné. Ce que nous voulons, c’est un vrai service public accessible à tous, de bonne qualité et à prix raisonnable. Mais, pour cela, il faudrait oser tailler dans les profits de tous ceux qui se sont enrichis grâce à la libéralisation.

  • Des cadeaux aux patrons, des économies sur notre dos. Une nouvelle offensive contre notre niveau de vie

    Vu l’instabilité du gouvernement violet actuel, il est probable que des élections anticipées vont avoir lieu. Les grands partis s’apprêtent déjà à continuer la politique antisociale des dernières années. Tandis que les patrons reçoivent d’énormes cadeaux, les travailleurs et leurs familles font les frais de la politique néolibérale.

    Geert Cool

    En 2006, le gouvernement devra probablement économiser 4,6 milliards d’euros pour atteindre l’équilibre budgétaire. Tous les partis traditionnels partent de l’idée que cela devra aller de pair avec ‘des mesures pénibles’; les seuls points de divergence portent sur le rythme auquel il faudra introduire ces mesures.

    Allocations familiales menacées

    Le gouvernement en a déjà évoqué plusieurs. Tout le monde y passe. On a ainsi lancé l’idée de couper dans les soins de santé, les salaires ou les allocations familiales. Lorsque cette dernière proposition a été attribuée au VLD, ce parti s’est empressé de prendre ses distances avec cette attaque en règle contre les droits de nos enfants. Il s’est avéré depuis lors que cette proposition était bel et bien à l’ordre du jour.

    La proposition de réduire les allocations familiales pour le premier et le troisième enfant ne figurait d’après le VLD que parmi un "éventail de mesures envisageables". Même si l’on ne retient pas l’idée de s’en prendre aux allocations familiales, on peut être sûr que d’autres pans de la sécurité sociale sont dans la ligne de mire.

    Salaires menacés

    La possibilité d’un saut d’index est maintenue. Cela signifie que les salaires ‘sautent’ un tour d’adaptation automatique à l’index, et donc à la hausse du coût de la vie. En réalité, il ne s’agit rien moins que d’une baisse de salaire. L’Union des Classes moyennes et son pendant flamand l’UNIZO vont encore plus loin en revendiquant la suppression pure et simple de l’index. L’organisation patronale exige en outre la limitation des allocations de chômage dans le temps, une réduction de l’allocation de credit-temps et d’amputer la pension de ceux qui partent trop tôt en prépension.

    Mais bien des cadeaux au patronat…

    Les partis traditionnels prétendent vouloir réformer notre "modèle social" sans tabous… hormis celui de la préservation des profits du patronat. Ainsi, le VLD veut consacrer 250 millions d’euros en 2006 à une nouvelle baisse de charge sur le travail en équipe. C’est déjà décidé d’avance comme l’a révélé une interview du manager en chef de Volvo Cars à Gand parue dans De Standaard, où il déclare que la baisse de charges a déjà été intégrée dans le budget 2006 de l’entreprise: "ils s’y sont engagés". Volvo s’est réjoui et a annoncé dans la foulée la suppression de 150 emplois à Gand.

    Les partis traditionnels ont beau s’adonner à des jeux politiciens pour s’impressionner mutuellement à l’approche d’élections anticipées, ils sont au moins d’accord sur un point: les années à venir seront dures pour les travailleurs, les chômeurs et leurs familles tandis que les patrons ont l’assurance d’engranger des cadeaux supplémentaires.

  • Pas touche à nos prépensions!

    Les syndicats ne doivent pas négocier le recul, mais organiser la résistance

    Les points de vue sur les prépensions sont tellement éloignées que les premières négociations prévues pour le 10 mars n’ont pas pu commencer. Le patronat utilise le vieillissement et le faible taux d’activité pour réclamer, entre autres, l’abolition de la prépension. Les syndicats disent, à juste titre, que le faible taux d’activité ne peut être résolu que par plus d’emplois et que les travailleurs ne peuvent pas être forcés de travailler plus longtemps alors qu’il y a plus de 600.000 chômeurs. Le gouvernement veut démanteler les prépensions, mais a peur des mouvements de masse éventuels.

    Anja Deschoemacker

    Le président de la CSC Luc Cortebeeck a déjà averti le gouvernement que ce genre d’attaque allait mener à «des actions dures», voire à une grève générale (De Standaard, 10/03/05). Les syndicats ont des propositions alternatives, par exemple l’augmentation du nombre d’emplois, surtout chez les jeunes, comme une manière de maintenir la sécurité sociale. Qui, à part le patronat, pourrait s’y opposer ? A côté de cela, les syndicats veulent lier le débat sur la fin de carrière à un financement alternatif de la sécurité sociale à travers une Cotisation Sociale Généralisée (CSG, une cotisation qui ne frappe pas seulement les revenus du travail).

    Et là, on va dans une direction dangereuse. La nécessité d’un financement alternatif de la sécurité sociale provient du fait que, dans le passé, le système a été démantelé en diminuant les cotisations soi-disant patronales. Le système actuel nécessite une procédure de concertation avec les syndicats pour changer les règles, mais rien n’empêchera un gouvernement de droite de modifier unilatéralement le taux de la CSG. A première vue, négocier un financement alternatif peut sembler une bonne solution, mais cela peut entraîner la fin de la sécurité sociale telle qu’on la connaît aujourd’hui, ce qui sera tout bénéfice pour le gouvernement et le patronat.

    La sécurité sociale est un acquis des luttes. Depuis la chute du Mur, ce système subit une pression croissante. Mais une large majorité de la population est attachée à la sécurité sociale et est disposée à lutter contre toute attaque.

    Les syndicats doivent mobiliser cette volonté d’action et le grand soutien dans l’opinion publique pour refuser toute mesure de démantèlement et faire respecter par le patronat les vieux accords, acquis et droits dans le cadre de la sécurité sociale. Ce ne sont pas les travailleurs qui souhaitent donner moins à la sécurité sociale, mais bien les patrons. Ils cherchent en fait à diminuer nos salaires !

    Ni augmentation du temps de travail, ni allongement de la carrière, mais abolition de tous les statuts précaires ! Imposons au patronat des boulots fixes et à temps plein ! Non à la libéralisation de La Poste et des chemins de fer, oui à des créations d’emplois dans les services publics présents et à venir ! Non aux boulots «soft», qui plus est mal payés, pour les travailleurs âgés (comme pour les femmes aujourd’hui), oui à la diminution du temps de travail pour tout le monde, sans perte de salaire et avec embauches compensatoires. Non à l’hyperflexibilité épuisante qui réserve les emplois bien payés (mais éreintants) aux hommes jeunes et en bonne condition !

  • La jeunesse d’aujourd’hui doit lutter pour son avenir

    UNE PRISON POUR LES JEUNES criminels à Everberg, ainsi qu’une autre prévue pour bientôt. Une procédure accélérée pour envoyer les jeunes délinquants vers un tribunal pour adultes…. voilà un petit aperçu des quelques réformes prévues pour le droit de la jeunesse. L’une et l’autre ont été annoncées par la ministre de la Justice Laurette Onkelinx au super conseil des ministres consacré «à la sécurité et à la justice». Les propositions d’Onkelinx se heurtent fortement à la résistance sur le terrain. Pour l’opposition de droite (N-VA, CD&V) et le Vlaams Blok ces propositions ne vont pas encore assez loin.

    Emiel Nachtegael

    De la protection à la répression

    Ces réformes reflètent la faillite de la politique de protection de la jeunesse. Malgré les précieux efforts de nos chers ministres, la situation sociale vécue par beaucoup de familles va de mal en pis. La seule réponse du gouvernement est un combat contre les symptomes. Ainsi, dans la même optique, celui-ci propose d’imposer un stage de rééducation pour les parents. D’autre part, le gouvernement va investir davantage dans ce qu’il appelle «les peines alternatives». Mais ce genre de mesures n’est rien d’autre qu’un coup d’épée dans l’eau. Dans une interview avec De Standaard, Heleen Martens, présidente de l’Union flamande des Magistrats de la Jeunesse, affirme que «pour les jeunes qui n’ont plus de base solide chez eux ou qui sont en décrochage avec la société, ces mesures sont insuffisantes». Les plans annoncés n’offrent pourtant aucune perspective et passent complètement à côté de la réalité vécue par la majorité des jeunes d’aujourd’hui.

    Les jeunes: premières victimes de la crise

    Qu’en est-il des promesses du gouvernement pour s’attaquer au chômage chez les jeunes? De belles paroles, rien de plus. Les chiffres du chômage chez les jeunes montent en flèche depuis quelques années. En décembre 2003, environ 1 jeune sur 5 était sans emploi. Cela signifie exactement 75.801 jeunes, ou une augmentation de 4501 par rapport à décembre 2002 (+13% en Flandre, +8% en Wallonie et +9% à Bruxelles).

    Des 140.000 jeunes qui arrivent chaque année en Belgique sur le marché de l’emploi, au moins 1 sur 3 reste sans emploi pendant un an (chiffres du début 2003)! Dans plusieurs villes wallonnes, plus de 30% des jeunes sortant des études aboutissent au chômage. A Charleroi, jusqu’à 43% des filles sont dans ce cas!

    En face, le gouvernement Verhofstadt/ Onkelinx met en place des emplois-bidon (comme le plan Activa, troisième plan Rosetta d’Onkelinx), accompagnés de réductions de charges pour les entreprises. Les emplois proposés aux jeunes sont de plus en plus flexibles et sous-payés.

    En 2003, 19.000 jeunes entre 18 et 25 ans dépendaient du CPAS. Ce chiffre s’est vu multiplié par 4 depuis 1990! 40% des jeunes sont atteints par le stress. Un enfant de 11ans (!) sur 5 manque de confiance en lui. Cette situation, sans perspective pour l’avenir, mène inévitablement à des actes de désespoir.

    Nicole Caluwé, vice-présidente de l’Union Flamande des Magistrats de la Jeunesse, écrit dans De Standaard: «Les actes de criminalité de rue sont majoritairement commis par des jeunes entre 14 et 25 ans. Ensuite ils se calment, essayent d’entretenir une relation, d’avoir des enfants, de fonder une famille, mais ils échouent à nouveau. Car les années passées dans des institutions ou en prison ne leur ont rien appris. Ils sont coulés par la société. Ils deviennent des abonnés du CPAS, atteints par les drogues ou la boisson et touchant le fond financièrement. Plus tard, on les retrouve au tribunal de la jeunesse car ils ont été incapables d’élever leurs enfants.»

    Nous pouvons également constater la répression qui sévit contre la jeunesse à la lumière d’une autre mesure controversée du super conseil des ministres: plus de policiers dans les rues. Concrètement: 2.500 (peut-être 4.000) futurs agents «sur le terrain» d’ici 2007. La Belgique dispose déjà maintenant de plus de 316 agents pour 10.000 habitants, c’est-à-dire plus qu’en Allemagne, aux Pays-Bas ou au Royaume-Uni.

    Pas d’avenir?

    Le gouvernement renforce donc l’appareil de répression au lieu de s’en prendre aux problèmes sociaux, bien souvent à la base de la criminalité et de la violence: la pauvreté galopante, les chiffres alarmants du chômage, le sousfinancement de l’enseignement, les mauvaises conditions de travail, etc.

    Il est temps de lutter tous ensemble pour un avenir meilleur pour les jeunes. C’est pourquoi nous appelons les organisations de jeunes, et plus particulièrement les organisations syndicales, à participer avec nous à une nouvelle marche des jeunes pour l’emploi et contre le racisme!

  • Elections européennes. Une occasion pour faire connaître nos idées et nous renforcer

    Le LSP/MAS doit récolter 10.000 signatures pour déposer des listes aux élections européennes du 13 juin prochain: 5.000 pour la liste francophone et 5.000 pour la liste néerlandophone. A la mi-mars nous avions aucompteur 4.956 signatures du côté francophone et 4.260 du côté néerlandophone. L’objectif de notre participation à la campagne politique électorale n’est pas électoraliste. Nous voulons avant tout faire connaître nos idées, discuter avec le maximum de gens, faire de nouveaux contacts. Nous nous sommes fixés comme objectif de mettre sur pied deux nouvelles sections en Wallonie et une au Limbourg.

    Eric Byl

    La campagne a démarré en trombe du côté francophone. Les sections de Schaerbeek, St-Gilles, Liège et Mons ont démarré en force en collectant des signatures de parrainage sur les bureaux de pointage des chômeurs. Il faut dire que la forte augmentation du chômage et les nouvelles mesures cyniques de Vandenbroucke contre les chômeurs nous facilitent la tâche. Notre journal est bien accueilli et certains se portent volontaires pour nous aider dans la campagne.

    Nous avons de nouvelles adhésions entre autres à Verviers, à Mons et à Tubize. Nous sommes en discussion avec d’autres camarades notamment à Huy et à Charleroi. Notre objectif de mettre sur pied deux nouvelles sections commence à prendre corps à Verviers et à Tubize, alors que nous ne sommes qu’au début de la campagne. La décision de mener campagne à Charleroi nous a amené des sympathisants. Nous allons de-voir peutêtre revoir nos objectifs en Wallonie en nous attelant dès maintenant à la mise sur pied d’une section à Charleroi.

    Le logement est un de nos axes importants de notre campagne. La hausse des loyers pèse lourd sur le budget de nombreuses familles. C’est une cause importante de l’extension de la pauvreté. Nous revendiquons plus de logements sociaux et la garantie de ne pas devoir consacrer plus de 20% de son budget pour le loyer. C’est une nécessité objective pour gagner la bataille contre la pauvreté. Ni les partis traditionnels, ni l’extrême-droite n’y sont disposés. Pour mettre en pratique cette revendication il faut oser s’opposer à la logique capitaliste du profit.

    Un autre enjeu est de vaincre le relatif désintérêt pour les élections, en particulier pour les élec-tions européennes. Bien que le campagne ait bien démarré en Flandre – et que nous ayons en-registré de nouvelles adhésions à Gand, Louvain, Anvers, Malines, Ostende et Turnhout et fait des contacts à Genk – on rencontre plus d’apolitisme que précédemment. Les réactions à la manifestation de Blokbuster contre le NSV à Anvers et les progrès que nous enregistrons dans le travail syndical indiquent un changement dans la situation.

    Avec 14 nouvelles adhésions et les dizaines de contacts avec qui nous discutons en ce moment, nous sommes en mesure d’atteindre l’objectif que nous nous sommes fixés de gagner une centaine de nouveaux membres d’ici la fin juin. Il y a cinq ans, nous avions lancé (nous nous appelions encore à l’époque, Militant) l’appel pour une Alliance de gauche de tous ce qui se trouvait à gauche de la social-démocratie et des verts. Notre proposition a été poliment boycottée. Maintenant que nous avons plus de poids, nous espérons être mieux entendus.

    Participer à une campagne électorale coûte beaucoup d’argent. En 2003 les partis traditionnels ont dépensé chacun entre 850.000 et 985.000 euros. Il faut ajouter à ces montants les dépenses individuelles des candidats. La campagne d’Hugo Coveliers (VLD) a coûté à elle seule 75.000 euros! Le PTB a quant à lui dépensé 50.000 euros. Le MAS/LSP a dépensé de son côté 5.000 euros. Selon De Standaard le cartel SP.a/Spirit a dépensé le moins de tous les partis traditionnels par nombre de voix re-cueillie: 1,22 euro par voix. Pour le Vlaams Blok cela représente 1,27 euro par voix et 3,04 euros par voix pour le N-VA. Selon le même mode de calcul cela fait 3,12 euros par voix pour le PTB et 0,60 euro par voix pour le MAS/LSP.

    Pour cette campagne électorale nous avons déterminé un budget de 8.000 euros pour l’ensemble du pays. Mais nous n’avons pas encore ces 8.000 euros. Nous lançons un appel à tous nos militants, nos sympathisants, nos abonnés et nos lecteurs occasionnels de nous soutenir en versant un soutien au compte 001-22603393-78 avec la mention «Campagne élections».

  • Elargissement de l’Union européenne. L’Europe du bradage social est en route

    Elargissement de l’Union européenne

    LE 1ER MAI, l’Union européenne accueillera 9 nouveaux pays membres d’Europe centrale, plus Chypre. L’Union européenne comptera alors 25 pays membres. A quoi peuvent s’attendre les travailleurs et les jeunes?

    Peter Delsing

    La majorité de la population n’arrive pas à suivre les affaires courantes européennes. 8 habitants de l’Union européenne sur dix déclarent être peu ou mal informés de l’élargissement de l’Europe. 84% se disent «presque pas» ou «pas du tout» concernés. En Belgique, seul 49% de la population se considère en faveur de l’élargissement.

    Les entreprises qui ont délocalisé, partiellement ou totalement, vers l’Europe de l’Est au cours de ces dernières années sont nombreuses. Le revenu moyen par habitant des 10 pays candidats à l’entrée dans l’Union européenne est égal à 35% du revenu moyen des états membres actuels. Par exemple en Pologne (38 millions d’habitants) le salaire moyen mensuel s’élève à 460 euros. Le niveau de vie s’est effondré lors de la restauration du capitalisme et le démantèlement de l’économie planifiée. Même si cette économie planifiée était gérée de façon inefficace par une structure étatique monolithique (un seul parti au pouvoir) bureaucratique.

    Les capitalistes occidentaux considèrent l’Europe de l’Est comme un nouvel Eldorado: avec une maind’oeuvre bon marché et hautement qualifiée. De plus les 80 millions d’habitants des 10 pays qui vont entrer dans l’Union européenne représentent 80 millions de consommateurs potentiels. Mais il est peu probable que les profits réels seront à la mesure des espérances des capitalistes. Après le 1er Mai, la valeur de la production totale (Produit intérieur brut de l’Union européenne) n’augmentera que de 5% malgré une croissance de la population estimée à 20%.

    La bourgeoisie se servira du niveau de vie bas en Europe de l’Est pour miner le niveau de vie des travailleurs d’Europe occi-dentale. Voila sans doute un des objectifs principaux de l’élargissement: disloquer les acquis de l’ensemble des travailleurs.

    De Standaard (17 février) proposait récemment une baisse des salaires afin d’éviter que les entreprises ne délocalisent: «Étant donné qu’une baisse de salaires sera difficile à faire avaler, il est souhaitable que les pays occidentaux revoient leur système d’allocations de chômage afin de rendre plus flexibles les travailleurs non-qualifiés» (17 février). Autrement dit: réduire les allocations de chômage, pour s’attaquer ensuite aux salaires. La riposte à opposer est la lutte intransigeante pour la défense de l’emploi et des conditions de vie de part et d’autre des frontières européennes actuelles. Cette lutte est une tâche des syndicats combatifs et des partis ouvriers en Europe.

    Les autorités des pays membres actuels vont recourir à un système de quotas et de permis de travail pour réguler le nombre de travailleurs de l’Est qui viendront vendre leur force de travail en Europe occiden-tale. Elles utiliseront cette main-d’oeuvre de réserve pour faire pression ici sur les salaires et faire accepter de mauvaise conditions de travail. Comme au temps où les autorités belges ont fait appel aux immigrés ita-liens pour descendre au fond de la mine.

    Un sondage récent révèle que 70% de la population des pays candidats à l’entrée dans l’Union européenne pense qu’il est plus facile de trouver un em-ploi ici que là-bas. En revanche seuls 30% croient que leur propre niveau de vie s’améliora après l’entrée de leur pays dans l’Union européenne.

    D’autre part le Danemark et la Grande-Bretagne veulent restreindre le droit à la sécurité sociale pour les nouveaux venus. La division entre les travailleurs est un piège mortel qui risque d’affaiblir la résistance aux patrons et de désigner de nouveaux boucs émissaires en faisant l’impasse sur les véritables coupables: les capitalistes et les gouvernements.

    Exigeons les mêmes droits pour tous les travailleurs! Qu’ils soient originaire du Nord, du Sud, de l’Est ou de l’Ouest! Tous doivent avoir le droit de s’organiser dans les syndicats. Le travail clandestin, sans contrat, sans barème, sans protection sociale doit être active-ment combattu! C’est la seule possibilité pour lutter tous ensemble contre les patrons pour les salaires et les droits sociaux. Les travailleurs ont tout à perdre s’ils se laissent diviser.

    Une Union européenne élargie sera une construction instable. L’euphorie s’est dissipée. Une nouvelle période de lutte de classes mettra l’Europe du capital à l’épreuve. Déjà la Pologne, la Tchéquie et la Hongrie, principaux candidats à l’élargissement, ont ralenti la politique d’austérité par crainte d’une riposte sociale impétueuse.

    La bourgeoisie caresse l’espoir d’un effondrement de la Pologne sur le scénario argentin. Le soutien au parti social-démocrate SLD est passé de 41% aux 2001 à 13% au-jourd’hui dans les sondages. Le taux de chômage s’élève à 20%. La corruption est omniprésente. Le déficit budgétaire de 2004 risque de frôler les 6% du PIB, alors qu’on exige un déficit de maximum 3% pour introduire l’euro.

    Après une série de mobilisations sociales (syndicats, retraités) un important volet de mesures d’austérité (notamment une réforme des retraites) a été repoussé à plus tard. Le gouvernement polonais a dû céder aux revendications des mineurs et des cheminots en lutte. D’ici 2007 le gouvernement polonais veut introduire une série de mesure d’austérité équivalant à 6,8 milliards d’euros. La croissance de ces dernières années n’a pas bénéficié à la majorité de la population. En Hongrie, le déficit budgétaire en janvier était estimé à 5,6% du PIB, ce qui a provoqué à la démission du ministre des Finances.

    Rejoignez le MAS pour construire une alternative anticapitaliste et internationaliste. Non à la division entre les travailleurs pour mieux les exploiter! Luttons tous ensemble pour nos droits sociaux et nos salaires! Unissonsnous pour socialiser les profits exorbitants accumulés par les grandes entreprises! Luttons pour une fédération des états socialistes en Europe!

  • NON à la marchandisation de l’enseignement!

    Les suggestions des économistes de l’UCL d’éléver le minerval à 4000 ou 6000 euros à rembouser après les études, la réforme annoncée des diplômes selon le modèle anglo-saxon (“ Bachelor-Master “), la création des pôles d’excellence et d’autres mesures prévues par ou liées au fameux Processus de Bologne, inquiètent nombre d’acteurs dans le débat sur l’avenir de notre éducation (aussi en général). Les conséquences des réformes de l’enseignement supérieur sont de plus en plus visibles partout en Europe et elles dévoilent la véritable nature de ce traité européen : la sélection plus poussée et le démantèlement des acquis sociaux et politiques dans l’éducation supérieure.

    Emiel Nachtegael

    Pour comprendre les enjeux de la Déclaration de Bologne, il est nécessaire de comprendre le rôle de l’éducation en général dans la société. A travers l’Histoire, l’organisation du système éducatif est déterminée par l’organisation de l’économie (la division du travail), et en particulier par la façon d’organiser la production. Si dans la société féodale le métier de paysan était transmis de père en fils, l’enseignement étant confiné dans les monastères et axé sur l’étude de la bible et la copie à la main des textes antiques sans valeur productive quelconque, l’ascension de la bourgeoisie marchande et de la société citadine marque un changement. L’économie devenant plus complexe, avec plus de spécialisation du travail, un enseignement en comptabilité, droit, etc. s’impose pour une élite dans la société.

    C’était dans la période de transition de la société médiévale vers la société capitaliste que le système éducatif, modèle de notre éducation actuelle, est né. L’éducation générale réservée aux enfants bourgeois et nobles et une éducation plus professionnelle pour les enfants du peuple, l’objectif de l’éducation était de sélectionner l’élite et d’apprendre la discipline au peuple. Selon les demandes du marché, le système éducatif est censé fournir la main-d’oeuvre qualifiée exigée dans des moments d’expansion de l’industrie et des services (la massification des universités après la Seconde Guerre Mondiale etc.).

    Sous pression du mouvement ouvrier, un degré de démocratisation a été acquis, comme la scolarité obligatoire après la Première Guerre Mondiale et l’Enseignement Secondaire Libre, les droits démocratiques des étudiants dans les universités (droit d’afficher, etc.) après mai 68. Mais les principes fondamentaux de notre éducation demeurent les mêmes : sélection (frais d’inscription ; sur les diplômes : réussi-distinction-grande distinction ; quant au choix de la filière : latin-pas de latin), discipline (ne certainement pas critiquer le professeur ou le cours) et passage de l’idéologie bourgeoise (cours d’Histoire, etc.), prestation (examens, tests, numerus clausus, etc.), la concurrence (chaque élève pour soi, certains ne sont pas «faits pour étudier» , etc.)…

    Selon une enquête dans De Standaard (20 février 2003), « la Belgique, mais surtout la Flandre, excelle au niveau des prestations des élèves dans le monde… l’autre face du médaillon, c’est que les jeunes n’aiment pas aller à l’école, ils jugent les cours ennuyeux. Notre enseignement est encore (trop) axé sur la connaissance, sur la reproduction, sur les notes et (trop) peu sur la personnalité totale de l’élève. En outre, le clivage entre les meilleurs élèves et les autres est souvent trop grand.» Là, on touche au coeur du débat. Le quotidien regrette que l’éducation n’ait comme objectifs, ceux qui ont toujours été les objectifs de l’éducation dans une société de classe. L’épanouissement total des capacités de l’individu ne sera jamais atteint sous le capitalisme, ce n’est pas dans ses intérêts, ça ne l’a jamais été. La division du travail capitaliste entre travail manuel et intellectuel s’exprime dans l’organisation de l’enseignement secondaire: humanités, écoles techniques, écoles professionnelles. De plus, comme chaque acquis qui ne plaît pas au capitalisme, il est passible de passer à la trappe.

    Après la crise structurelle du capitalisme après 1974, la demande d’une main d’oeuvre qualifiée issue des universités diminue. C’est dans ce contexte que les réformes de l’éducation se déroulent. Elles traduisent les lois du marché capitaliste.

    Depuis les années 80, on est confronté aux programmes d’austérité dans l’éducation et des attaques contre les acquis démocratiques (comme la Déclaration de Bologne).

    Cette Déclaration de Bologne, nouveauté tant voulue par la Table Ronde de Grands Industriels Européens, vise, en grandes lignes, la création d’un Espace Educatif Européen, capable de concurrencer avec les ecoles très élitistes américaines et brittaniques comme Harvard et Princeton où les frais d’inscription s’élèvent à pas moins de 30.000 euros!

    Le but final est d’en arriver à un classement des pôles d’excellence avec une spécialisation très poussée : des unifs de premier rang, de second rang, de poubelle. Telle université vous offre le programme de “Master en Droits, Economie, Solvay, etc.”, telle autre vous offre le journalisme, les sciences humaines etc. (en Flandre, les universités viennent d’annoncer la suppression des filières Langues Romanes et Langues Germaniques ; avec un an supplémentaire (3 +2) pour les sciences, 3+1 pour les autres).

    En Communauté Française, le décret Bologne sera présenté au parlement avant le 15 décembre (pour empêcher une mobilisation étudiante avant les examens ?). Après avoir conclu un accord avec les recteurs, le 8 novembre, la ministre de l’enseignement du gouvernement de la Communauté française, Françoise Dupuis, elle, a déposé son “décret Bologne” le 26 novembre (à l’extérieur des recteurs, les étudiants, les syndicats et les Ecoles Supérieures, ont été écartés des négociations ; ça commence bien !). Il prévoit la disparition des licences et la mise-en-place d’un système baccalauréats (premier cycle) et maîtrises (deuxième cycle :3+1). La maîtrise spécialisée (3+2) et la maîtrise complémentaire (3+3) s’y ajoutent. Il n’existe aucune raison pédagogique qui justifie le rallongement du temps d’étude. Mais il ne faut pas être intélligent pour comprendre que beaucoup d’étudiants salariés ou issus de milieux modestes auront du mal à payer un ou deux ans d’étude de plus, même si l’on suppose que les frais d’inscription resteront les mêmes. Aux Pays-Bas les minervals s’élèvent entre 5000 et 7000 euros et en Angleterre Blair vient de proposer un minerval de 3000 livres (4500 euros) par an (!) à rembouser après les études. Les ministres ont encore beau nous assurer qu’ils ne veulent pas de ça, si les autres pays signataires de la Déclaration de Bologne le font, on voit difficilement comment ils ne vont pas suivre leur exemple, ce serait ne pas respecter l’esprit du texte, justement.

    Il faudra encore attendre les programmes des unifs pour 2004-5, mais il est dorénavant clair qu’ entre une maîtrise 3+1, une maîtrise 3+2 et une maîtrise 3+3, quel diplôme vaudra le plus sur le marché de travail. La déclaration de Bologne prépare la voie vers la transformation de notre éducation supérieure selon le modèle anglo-saxon et la privatisation de l’éducation supérieure en tant que service public. Il n’est pas impossible de lutter contre Bologne, comme le montrent les étudiants allemands et français en grève (voire brèves).

    Dans le passé, des luttes contre des plans d’austérité ou des réformes plus en profondeur de l’éducation supérieure ont été stoppés après des mobilisations massives des étudiants et du personnel (France, 1986 ; Espagne, 1987). Il sera, comme lors de ces luttes, nécessaire de lancer l’appel à un mouvement social plus large, et en particulier envers les syndicats, de lier la lutte pour un enseignement supérieur gratuit, populaire et démocratique à la lutte pour le maintien de tous les services publics et contre la politique anti-sociale du gouvernement en général. Entretemps, il est important de lier la lutte à la lutte pour une société socialiste avec une planification démocratique de l’économie.

    Une telle société posera le rôle de l’éducation de façon très différente, car elle bouleverse la production qui sera non orientée vers les poches d’une minorité infime, mais vers la satisfaction des besoins de l’humanité.

    Un programme éducatif socialiste peut alors viser l’épanouissement total et polytechnique de chaque individu qui pourra être un travailleur réflechissant et agissant lui-même sur des affaires de production et de la gestion de l’état. Et les générations d’élèves suivantes s’étonneraient des lycées et des unifs capitalistes et pourront dire comme Lénine : la vieille école était une école où on bûche, elle forçait les gens à se familiariser avec un tas de connaissances inutiles et superflues, qui embrumait le cerveau et qui transformait la jeune génération en un rassemblement de bureaucrates. Rejoins EGA pour préparer la lutte pour un enseignement libre et démocratique et pour une société socialiste !

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