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  • SNCB. La scission comme prélude à la libéralisation

    Les dernières semaines ont vu les problèmes persistants à la SNCB attirer de nouveau l’attention des médias. Cette fois ce sont les divergences entre les trois administrateurs-délégués à propos du plan d’entreprise 2006-2007 qui sont apparues au grand jour.

    Un correspondant

    Scission de la SNCB

    Depuis le 1er janvier 2005, la SNCB est scindée en trois entreprises distinctes: l’entreprise de transport SNCB, le gestionnaire d’infrastructure Infrabel et un holding avec des compétences opérationnelles comme la politique de personnel, les affaires juridiques, les finances et la coordination.

    Le holding est également le propriétaire de toutes les gares et de tous les parkings. A la tête du holding se trouve Jannie Haeck, l’ancien chef de cabinet de Johan Vande Lanotte. Infrabel est dirigée par Luc Lallemand qui, en tant qu’ancien collaborateur du cabinet de Michel Daerden, fut co-responsable de la disparition de la RTM (la Malle Douvre-Ostende). A la tête de la SNCB on trouve Marc Descheemaeker, ancien PDG dans une multinationale de nettoyage danoise ISS.

    Il n’y a pas de rapport hiérarchique entre les trois entreprises. L’année passée a été émaillée de conflits à répétition entre les trois directions qui voulaient sauvegarder leurs propres intérêts. Entretemps, c’est le personnel qui paie la note.

    Productivité accrue

    Les économies et les hausses de productivité consécutives au plan d’entreprise 2004-2005 sont dues à des coupes drastiques dans le personnel. Depuis 2004 les effectifs ont été réduits de 42.000 à 38.000. En 2005 il y a eu à peine 300 recrutements. Mais le trafic ferroviaire continue d’augmenter chaque année. Entre 1997 et 2004 le nombre de passagers a crû de 24%. La productivité des cheminots n’a jamais été aussi élevée.

    Le nouveau plan d’entreprise gèle les effectifs à 38.000. Pour y arriver, 2500 recrutements sont prévus pour les deux années à venir. La question est de savoir si cette promesse sera tenue.

    Privatisations

    Les dernières années ont vu de plus en plus de tâches passer en sous-traitance. A côté de cela, il y a la concurrence accrue des filiales, des sociétés privées dans lesquelles la SNCB participe et qui reprennent un tas de tâches, ce qui signifie en pratique la privatisation des services.

    C’est ainsi que la commercialisation du réseau en fibre de verre de la SNCB a récemment été transférée à la filiale Syntigo. Cette entreprise fournit des services et du matériel informatique aux entreprises du groupe SNCB et aux chemins de fer néerlandais. En outre, Infrabel conclut des contrats privé-public pour la pose et l’entretien de nouvelles voies ferrées, comme le désenclavement de l’aéroport de Zaventem.

    Enfin, les trois entreprises publiques veulent avoir atteint l’équilibre financier d’ici 2008. D’après le directeur financier, cela doit se faire par une hausse encore plus importante de la productivité et un accroissement des recettes.

    La situation chez B-Cargo, la filiale de la SNCB qui est chargée du transport des marchandises, illustre bien ce que cela signifie en réalité. Il y a quatre ans, B-Cargo représentait 8000 équivalents temps plein. En décembre de l’année passée il y en avait encore 5500 et la direction s’est fixé un objectif de 4500. Les volumes de marchandises ne diminuent évidemment pas, que du contraire. La formule magique est la multifonctionnalité. Le travail de quatre ou cinq salariés est maintenant réalisé par un ou deux salariés, avec ce que cela implique en termes de pression du travail et de risques pour la sécurité.

    Libéralisation du trafic ferroviaire

    La concurrence accrue qui va de pair avec la libéralisation du trafic ferroviaire en Europe est utilisée comme prétexte pour augmenter encore plus la pression. Il y a ainsi le projet d’imposer aux conducteurs de train des prestations de onze heures avec une interruption de deux heures maximum qui ne seraient pas considérées comme des heures de service.

    En septembre le Parlement européen a voté la libéralisation du trafic international des voyageurs d’ici 2008 et de tout le trafic des voyageurs d’ici 2012. La libéralisation du transport international des marchandises est déjà un fait et, le 1 janvier, 2007 ce sera le tour du transport national de marchandises. A côté de B-Cargo il y a déjà six entreprises qui sont actives en Belgique ou sur le point de l’être. On y trouve notamment la SNCF et Rail4chem, une filiale de BASF.

    Entretemps, le mécontentement et la volonté d’action croissent de jour en jour parmi les cheminots. Ils ne se laissent pas tromper par la bisbrouille au sommet et par les vagues promesses. Le personnel a ainsi arrêté le travail le 20 février à Charleroi. La grève portait sur le manque de personnel, et sur l’impossibilité pour les conducteurs de prendre leurs jours de congé et sur les formations.

  • Le MAS organise avec succès une journée de discussion sur les droits des femmes

    Le samedi 11 mars, dans le cadre de la journée internationale des femmes, le MAS/LSP a organisé une journée nationale de formation sur les droits des femmes. Ce fut une réussite avec une présence de 85-90 personnes de tout le pays. Les discussions étaient trés interessantes et les gens présents ont pu bénéficier d’une argumentation solide pour se consolider autour de ce thème.

    Marijke Decamps

    Les attaques néoliberales sur la position des femmes

    La premiére discussion était surtout concentrée sur la situation actuelle, après les attaques du gouvernement avec le pacte des générations et offrait un réponse ferme à l’idée dominante comme quoi la situation des femmes s’est à ce point améliorée qu’il n’existe plus de problèmes à ce niveau.

    Au contraire, les femmes, et surtout les femmes et filles issues de la population ouvrière, n’ont pas vraiment de bonnes perspectives devant elles. Il y a le probléme du sexisme et de la violence envers les femmes, mais tout cela est lié à la position socio-économique faible des femmes. Aujourd ‘hui les femmes prennent encore la plupart des tâches ménagères sur leurs épaules, la garderie des enfants, etc. En d’autres termes, la double tâche est toujours une réalité. Cette position plus faible est aussi refléctée dans les salaires et les conditions de travail des femmes.

    Les femmes gagnent toujours environ un quart de moins que ce que les hommes gagnent, travaillent davantage à temps partiel et cela surtout pour combiner un boulot avec un ménage et des enfants ; elles sont dès lors doublement victimes des attaques du gouvernement sur les prépensions. Les femmes sont aussi touchées plus fortement par le chômage de longue durée. Depuis plus de 25 ans, la réponse des différents gouvernements à la crise est de donner des cadeaux aux grandes entreprises sous formes de réduction de taxes et en menant une politique de destruction néo-libérale. Soi-disant pour stimuler la création d’emplois. Les seul jobs qui fleurissent sont les chèques-services et autres statuts flexibles, qui ne sont pas rémunérés suffisamment pour équilibrer son budget ou avoir un vie décente.

    Aujourd’hui, la pauvreté en Belgique est en train de grimper, et un grand nombre des victimes sont des femmes. La meilleure manière pour les femmes d’échapper à la pauvreté en Belgique est bien souvent de trouver un partenaire… De la discussion, l’idée qui ressortait trés clairement est que la politique dominante n’offre aucune solution et que cette politique rend les problèmes spécifiques auxquels les femmes sont confrontées encore plus aigus.

    Dans la discussion, il y eut également des interventions des travailleuses du non-marchand et de la poste. Une camarade irlandaise a aussi parlé d’une lutte victorieuse contre le lincenciement d’une jeune militante syndicale, Joanne Delanay. La discussion fut finalement conclue par une camarade qui travaille à la SNCB.

    Groupes de travail

    Par la suite, nous avons eu le temps de discuter dans des groupes de travail plus restreints. Il y avait une discussion sur comment combattre le sexime et la violence dans les quartiers chauds. Beaucoup de femmes n’osent plus sortir, ou sortent seulement en groupe, et les victimes de viols n’osent bien souvent rien dire à ce sujet, notamment parce qu’elles ont l’idée que leur cas sera classé sans suite (ce qui est une triste réalité). La solution n’est pas d’avoir plus de police ou de caméras dans les rues, mais bien une augmentation du contrôle social, combiné avec une campagne active là-dessus, naturellement liée au programme socialiste qui signifie dans la pratique une amélioration fondamentale pour les femmes.

    Un autre groupe de travail s’est tenu sur la situation au Pakistan et sur la campagne contre la violence envers les femmes que notre organisation soeur au Pakistan est en train de mener. Dans une situation si difficile, où le pays est dirigé par le dictateur Musharraf qui n’est rien d’autre qu’une marionnette des Etas-Unis, mener la lutte pour les droits des femmes et refuser la violence signifie aller complètement à contre-courant. Notre appel à la fin de la journée pour la solidarité financière avec nos camarades pakistanais a été un grand succès.

    La discussion dans le troisième groupe de travail était orientée sur la violence conjugale, introduite par Sinead Daly de notre organisation soeur en Ecosse, et récemment réélue dans la direction nationale du SSP. La violence domestique est un problème énorme ; nous ne pouvons faire la différence qu’en mettant en avant un programme de logement sociaux, de réduction du temps de travail, de crèches gratuites pour donner la possibilité matérielle aux femmes et aux enfants d’échapper aux relations entachées par de tesl abus.

    Meeting de clôture

    Pour finir la journée, l’accent fut mis sur la nécessité d’impliquer et de développer les femmes activement dans le mouvement ouvrier et le parti révolutionnaire-en solidarité avec les hommes de la classe ouvrière, qui sont un allié objectif dans la lutte pour les droits des femmes-, la situation sur le plan mondial et la nécessité de construire une internationale socialiste.

    Le capitalisme essaie sans cesse de casser chaque acquis de la classe ouvrière, et spécifiquement ceux des femmes. La seule maniè d’en finir avec toute cette saloperie capitaliste réside dans la construction d’une societé où les moyens seront difusés en fonction des besoins de la majorité de la population, et non en fonction des profits d’une petite minorité.

    Utiliser la richesse produite dans ce but offrira la possibilité de créer des services publics qui prennent en main le travail ménager, de garantir des crèches décentes et gratuites, d’éliminer la différence salariale entre hommes et femmes, et de garantir une vie décente pour tous et toutes !

  • Avec ou sans papiers, nous sommes tous des travailleurs

    10.000 personnes ont participé le samedi 25 février à la manifestation de soutien des sans-papiers à Bruxelles et, parmi elles, il y avait une forte proportion de sans-papiers. Pour l’Union de Défense des Sans-Papiers et tous ceux qui soutiennent ce combat, c’est donc un grand succès. Mais, pour parvenir à une régularisation de tous les sans-papiers et obtenir la suppression des centres fermés, le chemin à parcourir reste encore long. Car cet objectif va à l’encontre de toute la politique menée en Belgique et en Europe depuis plus de trente ans.

    Xavier Dupret

    Depuis le choc pétrolier de 1974, les frontières de la Belgique et des autres pays européens sont, en effet, officiellement fermées aux migrations de nature économique. Cependant, loin de se tarir, les flux migratoires se sont, au contraire, intensifiés. Le démantèlement des politiques sociales en Europe de l’Est et en Afrique en est la principale raison. Les grandes institutions financières internationales (FMI et Banque Mondiale) ont imposé à l’ensemble de ces pays toute une série de plans d’assainissement des finances publiques, qui ont durement touché l’emploi, la santé, l’enseignement,… avec pour conséquence logique une détérioration des conditions de vie des populations.

    Une nouvelle couche de travailleurs clandestins s’est ainsi constituée dans les pays capitalistes avancés. Les «sans-papiers» sont en réalité des ouvriers fragilisés par les orientations restrictives des politiques migratoires. Ils travaillent souvent dans le bâtiment, la plonge des restaurants et autres métiers pénibles dans des secteurs connus pour leur recours au travail au noir. Les sans-papiers partagent donc – en plus dur encore – le sort de la masse des travailleurs précaires de chez nous, contrairement à ce qu’affirment patrons et racistes qui essaient de les faire passer pour des parasites et des concurrents des travailleurs belges.

    Au total, la multiplication des travailleurs sans-papiers apparaît comme un des éléments de la grande stratégie de précarisation du monde du travail qui, à des degrés divers, nous touche tous. Depuis la fin des années 80, c’est à. un mouvement de régression géénralisée que nous assistons. Une partie des précaires d’hier (femmes, jeunes, immigrés) devient les exclus d’aujourd’hui. Et ceux qui pouvaient espérer occuper un emploi fixe doivent le plus souvent se contenter d’un emploi flexible. Voilà le résultat de 20 ans de politique néolibérale.

    Dans ces conditions, comment le mouvement des sans-papiers peut-il continuer à avancer ? Nous pensons qu’une stratégie axée sur le lobbying auprès des partis représentés au parlement risque d’épuiser le mouvement parce que les partis traditionnels ne veulent pas réellement modifier la situation actuelle.

    Le combat le plus important est, en dépit des difficultés, d’ancrer la lutte des sans-papiers à l’intérieur du mouvement ouvrier belge, parce que celui-ci est le meilleur allié dans la construction d’un rapport de forces avec le gouvernement. Cette lutte n’est pas que syndicale. Elle est aussi politique.

    La lutte des sans-papiers doit être incluse dans la construction d’une nouvelle force de gauche défendant résolument les intérêts de tous les travailleurs, qu’ils soient belges, immigrés ou sans-papiers.

  • France. Etudiants en lutte: l’avenir des jeunes plus que jamais menacé

    Rapport d’un participant

    La France est secouée par les mobilisations étudiantes et lycéennes contre la « loi sur l’égalité des chances »… d’être exploité. AJB, membre d’Etudiants de Gauche Actifs (EGA/ALS) et du Mouvement pour une Alternative Socialiste (MAS/LSP), est parti en France, conscient que ces luttes sont dirigées contre un ennemi commun à tous, par-delà les frontières : le néo-libéralisme et le capitalisme qui l’a engendré.

    Propos recueillis par Nicolas Croes

  • Paris: des centaines de milliers de manifestants contre le CPE
  • France. Contrat Promotion Esclave!
  • Pour une grève tous ensemble, jeunes et travailleurs. Retrait du CPE
  • Tracts, déclarations,… de la Gauche révolutionnaire
  • Peux-tu nous expliquer ce qu’est cette loi sur l’égalité des chances ?

    Il s’agit d’une attaque sans précédent, orientée contre les jeunes, mais qui concerne l’ensemble des travailleurs. Ce projet de loi est constitué de trois parties: la possibilité d’aller en apprentissage dès 14 ans, celle d’effectuer du travail de nuit dès 15 ans, et la dernière partie est le fameux Contrat Première Embauche (CPE). Selon le CPE, tout jeune pourra, jusqu’à 26 ans, être licencié sans justification durant les deux premières années qui suivent son embauche. En cas de licenciement, après trois mois d’attente, il pourra de nouveau être engagé aux mêmes conditions… De quoi apprendre à accepter n’importe quoi sous la menace constante de se retrouver sans emploi à tout moment !

    Cela a évidemment mené à des actions de protestation…

    Oui, qui ont atteint une ampleur qui n’est pas sans rappeler mai 68. Je suis arrivé à Paris ce mardi 7 mars au matin, juste à temps pour participer aux manifestations contre le CPE qui se sont déroulées partout en France et qui ont fait battre le pavé à plus d’un million de personnes à travers l’hexagone, dont 150.000 à Paris.

    Dans une ambiance peu commune on imagine.

    Il est assez difficile de se représenter ce que cela peut être quand on vient de Belgique. La grande majorité des manifestants étaient des jeunes, étudiants ou lycéens, et la combativité était très grande, même si elle variait selon les facultés. Certaines revendiquaient le retrait de la totalité du projet de loi, d’autres uniquement le retrait du CPE, au cri de «C comme chômage, P comme précarité, E comme exploitation : retrait du PCE, retrait du CPE !». J’étais déjà venu pour les mobilisations du 7 février qui avaient réuni 45.000 jeunes à Paris, et plus ou moins 400.000 dans toute la France, et ce en plein congé scolaire, ce qui rendaient impossibles les descentes d’information dans les écoles. La fac’ de Rennes était déjà occupée à ce moment.

    Qu’en est-il aujourd’hui ?

    Ce vendredi 10 mars, 42 facultés étaient occupées, sur les 80 que compte le pays. Plus de la moitié donc, et une faculté non occupée n’est pas une faculté non mobilisée!

    Que s’est-il passé après la manif’ ?

    Nous nous sommes réunis à la faculté de Jussieux. Enfin, il a tout de même fallu passer au-dessus des grilles que les vigiles avaient placées… Nous étions à peu près 200 étudiants et une cinquantaine de lycéens. Etaient présents également quelques jeunes travailleurs précaires. La majeure partie de ces jeunes les plus motivés étaient syndiqués à l’UNEF (Union Nationale des Etudiants Français) ou au syndicat SUD et organisés dans des organisations politiques comme la Confédération Nationale du Travail (CNT), la Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR), la Jeunesse Communiste (JC) ou encore Lutte Ouvrière (LO). Ils composaient environ 75% de l’assemblée. J’espérais retrouver des camarades de la Gauche Révolutionnaire (organisation-sœur du MAS en France), mais, dans la capitale, ils étaient principalement à Paris 8.

    A cette réunion, il a été décidé de faire des descentes dans les autres facultés le lendemain pour en bloquer un maximum. A chaque fois, les blocages ont été votés à une bonne majorité.

    Et ensuite?

    Le jeudi matin, je suis allé à une des facultés les plus mobilisées, celle de Nanterre, qui était occupée. Tout y était bloqué, y compris la fac’ de droit (ce qui n’était plus arrivé depuis au moins une quinzaine d’années). Là, j’ai rencontré l’UNI…

    L’UNI ? Qu’est-ce c’est ?

    Il n’y a pas que les organisations de gauche qui sont présentes dans les facultés, les partisans de la chasse aux pauvres du gouvernement sont aussi présents. En fait, l’UNI est un mouvement de jeunes de droite, proche de Sarkozy, qui comprend une aile d’extrême-droite. Mais bon, quand on entend Sarko dire qu’il voulait nettoyer les banlieues au Karcher, on comprend qu’une proximité puisse exister entre ses partisans et ceux de Le Pen. Mardi, ils étaient une vingtaine à avoir fait le tour des blocages en chantant la Marseillaise en faisant le salut nazi. A cela, les grévistes répondaient « Nanterre, Précaires, on est tous solidaires ! » et en chantant l’Internationale.

    Ils ont réussi à rentrer à l’intérieur d’un bâtiment occupé, aidés par une dizaine de vigiles (en tout, ils ne devaient pas être plus d’une vingtaine). Une centaine d’étudiants en droit qui voulaient avoir cours en ont profité pour rentrer aussi. Finalement, ils ont été repoussés après une lutte entre grévistes et membres de l’UNI.

    Ceux-ci en sont restés là ?

    Non. Ils ont réussi à regrouper un millier de d’étudiants, venus à l’appel de « contre le blocage », et ils ont participé à l’Assemblée Générale de la faculté. En fait, si beaucoup de jeunes sont contre le CPE et la « loi pour l’égalité des chances », beaucoup s’opposent également aux blocages. Et là, dans les discussions, la situation a été complètement retournée. Des étudiants grévistes et moi-même sommes intervenus dans l’AG contre l’UNI et les étudiants qui voulaient reprendre les cours, et le blocage a été de nouveau voté!

    Qu’as tu mis en avant ?

    L’importance d’avoir une vision globale du problème. Que la loi sur l’égalité des chances est une suite logique des attaques libérales contres les travailleurs, les jeunes et les étrangers. Que les attaques contre le travail ont commencé par des attaques contre les retraites en Allemagne, en France et, comme on le sait, il y a quelques semaines en Belgique. Le gouvernement français élu de manière quasi-illégitime (Le Pen – Chirac au second tour) ne cesse d’attaquer de manière frontale tous les acquis sociaux. On se rappelle aussi la manière dont ils ont réprimé successivement le mouvement lycéen, le mouvement étudiant contre le système « LMD », le mouvement des intermittents du spectacle, les émeutes dans les banlieues,… Aujourd’hui la réponse que le gouvernement amène passe encore par la répression policière. J’ai terminé mon intervention sur l’obligation d’ouvrir la lutte aux jeunes de banlieues qui seront les premières victimes du CPE mais aussi aux travailleurs sans attendre l’appel des bureaucraties syndicales qui se font assez discrètes dans la hantise de revoir un nouveau mai 68 ou des grèves massives comme celle de 1995.

    Comment les différentes facultés sont-elles coordonnées ?

    La coordination d’Ile-de-France, c’est à dire de Paris et de sa région, se réunit tout les deux jours. Les différentes facultés se réunissent tous les jours en Assemblées Générales, auxquelles tous peuvent participer. C’est là que sont à chaque fois élus les étudiants qui iront à la prochaine réunion de la coordination d’Ile-de-France: 7 représentants par faculté occupée, et 3 par faculté mobilisée, mais non-occupée. S’ils fonctionnent comme ça, c’est pour éviter que les facultés de droite ne bloquent tout. Et au niveau national, cela fonctionne comme ça aussi, mais les réunions sont hebdomadaires.

    A l’intérieur des fac’, des commissions ont été mises sur pied: actions, interprofessionnelle (pour aller à la rencontre des associations et des travailleurs à l’extérieur de la faculté), sécurité, mobilisation, enseignants et travailleurs (orientée vers les travailleurs de la faculté), et enfin lycéenne. Dans plusieurs facultés, des motions de soutien ont été votées par les travailleurs en solidarité avec les étudiants, et beaucoup de lycées sont bloqués et occupés également. A titre d’exemple, une école professionnelle près de Nanterre est venue donner un coup de main pour bloquer la fac’. Le niveau de conscience politique des lycéens à Paris est très élevé. J’ai pu à de nombreuses reprises le remarquer, par les discussions politiques avec ceux-ci mais aussi en écoutant les interventions dans les assemblées générales. Les AG se tiennent dans des décors surréalistes avec comme slogans sur les murs : « Arrêtez d’étudier l’histoire, faites-la », « Une seule solution, la révolution » ou une des phrases mythique du Che « Hasta la victoria siempre » (Jusqu’à la victoire, toujours).

    Des actions sont donc prévues conjointement ?

    Tout à fait, et c’est tant mieux parce que c’est vraiment nécessaire. Isolés, séparés, les étudiants ne peuvent rien. Par exemple, le jeudi après-midi, il a été décidé de faire des diffusions de tracts dans un maximum de gares de la capitale afin d’expliquer la problématique du CPE et les positions des étudiants et aussi de mettre sur pied des manifestations « sauvages » – c’est à dire non annoncées – pour le vendredi.

    C’est ainsi que 2.000 étudiants ont déboulé sur les Champs-Elysées, pour la première fois depuis mai 68! La manifestation s’avançait, au rythme de l’Internationale et de slogans comme « Etudiants, salariés, même combat ! » ou encore, « Le pouvoir est dans la rue », « Tout est a nous, rien n’est à eux… ». Nous sommes restés deux heures Place de l’Etoile, en face de l’Arc de Triomphe, qui est un grand symbole. Il y a eu là-bas quelques heurts avec la police, mais les étudiants sont partis d’eux-mêmes pour bloquer les Champs-Elysées durant quatre heures, juste avant d’aller à la Sorbonne. En fait, la Sorbonne était occupée depuis la veille au soir par 150 étudiants et un bon millier d’autres manifestaient à l’extérieur, juste séparés de leurs camarades par les CRS. Or, pendant ce temps, les autres facultés étaient toujours occupées et il y avait mille tâches à faire. Les chiffres de manifestants ne sont donc pas révélateurs du nombre d’étudiants impliqués dans ces mobilisations. Des barricades ont été élevées au Boulevard Saint-Michel et au Quartier Latin, hauts lieux des évènements de mai ‘68, dans les chants et les slogans comme le traditionnel « CRS : SS » ou encore « Police partout, justice nulle part », « La police est en colère, le pinard il est trop cher », « On veut étudier, pour pas finir policier »,…

    Et vendredi, la Sorbonne tenait toujours bon…

    Oh oui. Nous étions 1500-2000 à protester à l’extérieur, tout en lançant de la nourriture aux occupants qui n’avaient rien mangé depuis la veille. Un groupe est rentré par derrière, un autre, dont je faisais partie, a réussi à rentrer par les toits. A l’intérieur, nous nous sommes retrouvés à environ 500. Il y avait des discussions politiques, des pièces de théâtre sur Mai 68’, sur la Commune de Paris (dont nous allons fêter le 135e anniversaire le 18 mars), de la musique,… Les flics, de l’extérieur, essayaient de voir où étaient les étudiants pour lancer des lacrymogènes à cet endroit.

    Mais finalement, le samedi, vers 4h du matin, les CRS ont chargé le bâtiment et évacué la fac’. La grande majorité des occupants a pu s’enfuir, grâce aux manifestants de l’extérieur qui ont tout fait pour aider leurs camarades de lutte. Mais il y a tout de même eu 27 arrestations. Une manifestation le lendemain a été organisée aux cris de « Libérez nos camarades ». Deux heures plus tard, tous les camarades ont été libérés.

    Et c’est ce jour là que je suis rentré en Belgique, crevé, courbaturé, mais avec un moral qui résistera à bien des coups durs avant de retomber !

    Et les actions continuent !

    Les actions continuent, et continueront encore. Dominique de Villepin, le premier ministre, vient encore de dire maintenant (dimanche 12 mars) qu’il était hors de question de retirer le projet de loi. Qu’attendre d’autre de la part d’hommes pour qui seuls comptent les profits des patrons? La « loi sur l’égalité des chances » n’est qu’un gigantesque cadeau pour eux, ils sont les seuls bénéficiaires de ce retour en arrière. Le MEDEF (la fédération patronale) appuie évidement le premier ministre tout en affirmant que le Contrat Première Embauche et le Contrat Nouvelle Embauche n’étaient pas suffisants et qu’il fallait élargir les facilités de licenciements qu’offrent ceux-ci à tous les types de contrats !

    Tout ce que tu dis est très intéressant. D’autant plus que l’on a entendu un autre son de cloche ici.

    Oui, le rôle des médias dans toute cette histoire est on ne peut plus honteux. Ils ne disent pas la vérité, où alors ils la déforment à l’avantage des partisans du projet de loi. Contrairement à ce qui a été dit, rien n’a été cassé à la Sorbonne, sauf le local des réactionnaires de l’UNI, qui a été saccagé. Des papiers ont même été collés aux murs pour ne rien abîmer tout en écrivant partout slogans, réflexions et revendications. De même, il a été dit que les étudiants avaient brûlé des livres inestimables, alors que s’il y a bien eu un feu dans la cour, seules les publications de l’UNI et des syllabi périmés ont été jetés au feu. Un autre exemple est l’histoire de cette fille handicapée (Paris 10 Nanterre), qui voulait passer le blocage au-dessus de plusieurs escaliers, et qui est tombée en se cassant le bras par accident. Directement, le gouvernement, relayé par la presse sans que personne ne cherche à savoir ce qui s’était passé, a déclaré que les étudiants jetaient des gens dans les escaliers!

    Une dernière chose importante, il a été constamment répété que la Sorbonne était occupée par des intermittents du spectacle, des travailleurs précaires, bref, tout sauf des étudiants. Je n’ai rencontré que trois participants à l’occupation qui n’étaient pas étudiants. Il y avait des étudiants d’autres facultés, c’est vrai, mais la majorité était de la Sorbonne.

  • La Centrale Générale du Limbourg proteste contre la scission de la FGTB-Métal

    La menace de scission de la centrale métallurgique de la FGTB n’est pas sans importance pour les militants et les membres. Divisés, nous sommes plus faibles que tous unis. Face à la scission entre une centrale néerlandophone et une centrale francophone, le Comité Exécutif de la CG du Limbourg proteste lui aussi. Dans une motion remarquable, la CG met en garde contre la division et la scission. "Notre pouvoir est aussi grand que notre unité et que notre nombre", déclare la CG à juste titre. Nous publions cette déclaration.

    "Nous avons suivi avec beaucoup d’intérêt l’évolution dans les mois passés au sein de la centrale des métallurgistes de la FGTB. Aujourd’hui il s’avère qu’une scission est éminente. A un tel moment historique il faut savoir qu’une telle scission pourrait avoir des conséquences extrêmes pour la FGTB et pour le monde du travail belge.

    "Les statuts de la FGTB ne permettent pas une scission: il ne peut y avoir qu’une seule centrale fédérale par secteur. Cette structure est non seulement nécessaire, elle est aussi importante pour conserver l’unité entre les travailleurs belges. Notre pouvoir est aussi grand que notre unité et que notre nombre. Même si la CMB a inventé une formulation statutaire qui évite le mot ‘scission’, il s’agit bien d’une ‘scission réelle’.

    "Il est clair qu’en Belgique il y a des réalités régionales différentes sur le plan économique. Ces différences existent aussi au niveau régional flamand et wallon. Si les différences entre la CMB-Flamande et la CMB Wallonne, se situent à un niveau politique et philosophique, elles ne peuvent différer que dans le cadre des objectifs de la FGTB. Ces différences ne peuvent que mener à une discussion enrichissante, jamais à une scission. Ceci n’est pas un plaidoyer pour la grisaille. Il doit y avoir des réactions différentes pour des problèmes différents. Cet exercice difficile se fait d’ailleurs depuis plus de 100 ans au sein de la FGTB.

    "Tous ceux qui approuvent la scission doivent se rendre compte qu’elle peut être le début de la fin de l’unité de la FGTB, de la sécurité sociale belge, du statut favorable des travailleurs belges. Ceux qui approuvent la scission prennent une lourde responsabilité. Le fait d’être pour ou contre une certaine personne, est dans ce cas-ci d’un intérêt secondaire.

    "Nous devons nous réunir au plan européen et mondial si nous voulons faire front aux conséquences de la globalisation de l’économie. Le Pacte des générations va bientôt avoir ses conséquences pour tous les travailleurs Belges.

    "Nous lançons un appel aux instances de la CMB, aux délégués, aux militants et aux secrétaires pour rechercher une solution qui ne mène pas à la scission. Nous lançons également un appel à la FGTB pour qu’elle intervienne activement pour garantir notre unité."

  • Grève au sein du personnel précaire de la société BlueComm

    Nous sommes des travailleurs précaires – étudiants, chômeurs,… -, engagés en Belgique francophone par la société suisse BlueComm pour faire remplir des questionnaires dans le cadre d’une enquête sur « l’esprit d’entreprise » parmi les jeunes Wallons et Bruxellois de la tranche d’âge 15-24 ans.

    Nous représentons la majorité des employés de cette société en Belgique. Face à des conditions de travail et de rémunération particulièrement mauvaises et à des pratiques qui nous semblent ne pas respecter nos droits élémentaires, nous avons décidé de nous mettre en grève, avec les revendications suivantes.

    1) Les responsables de la société Bluecomm ont explicitement incité les travailleurs à prester au noir : aucune information sur les contrats n’était disponible aux séances de briefing organisées au moment du recrutement, on nous a incité à travailler au noir pour plus de facilité, verbalement d’abord, puis par incitants salariaux. Ceux qui désirent être déclarés ne recevrons pas les 12 ? prévus par questionnaire, mais 7,70 ? net. Les autres gardent 12 ?. Après des demandes répétées, aucun d’entre nous n’a pu obtenir de contrat de travail. Nous disposons des preuves (courriels et enregistrement vocal) de ce que nous avançons.

    Nous exigeons des contrats de travail en bonne et due forme.

    2) Nous sommes payés de façon forfaitaire et non pas à l’heure de travail. Nous avons droit à 12 ? (brut) par questionnaire rempli, alors que, tout compris, le temps estimé pour en remplir un est en moyenne de 2 à 3 heures. Nos frais de téléphone et de déplacement nécessaires pour trouver les personnes à interroger (l’enquête est conduite selon la méthode dite « des quotas », ce qui implique l’obligation pour les enquêteurs de trouver des profils précis) ne sont pas remboursés, sauf les timbres pour renvoyer les questionnaires remplis à BlueComm et les boissons (« non alcoolisées ») qu’on aurait dû offrir… Nous recevons donc un salaire qui tourne autour de maximum 4 ? de l’heure (sans prendre en compte les coûts non quantifiables).

    Nous exigeons une rétribution forfaitaire nette de 25 ? par questionnaire et le remboursement complet des frais.

    3) La société BlueComm se réserve dans l’état actuel des choses le droit d’invalider unilatéralement les questionnaires que nous remplissons. Nous ne sommes pas payés pour les questionnaire invalidés.

    Nous exigeons une modification de la procédure de validation des questionnaires.

    Nous transmettrons à BlueComm les questionnaires remplis (que nous avons pour le moment décidé de conserver à titre de moyen de protection, dérisoire sans doute, mais qu’importe) quand ces trois conditions seront rencontrées.

    Par ailleurs, nous constatons que la société BlueComm et ses pratiques indéfendables ne sont que les sous-traitants d’un organisme belge ayant pignon sur rue : la fondation Free, elle-même composée du gratin économique belge (Compagnie Nationale à Portefeuille s.a., Electrabel, Fortis Banque s.a., GlaxoSmithkline Biologicals s.a., Lhoist s.a., Groupe Siemens Belgique/Luxembourg s.a., Sonaca s.a.). Ceci appelle, nous semble-t-il, une réaction vis-à-vis de BlueComm de la part de ces différentes structures si elles ne veulent pas être assimilées aux pratiques de leur sous-traitant.

    Si nos revendications ne sont pas satisfaites avant mercredi, nous organiserons des actions de protestation dans l’espace public pour dénoncer les pratiques dont nous sommes victimes (nous donnons d’ores et déjà rendez-vous à la presse devant la bourse jeudi à 13h30). Nous avons décidé de donner à notre mouvement le nom de Flexblues et nous avons ouvert le site web http://flexblues.be/ sur lequel vous trouverez d’ici peu des informations complémentaires.

    Signé : le collectif Flexblues

    Site : http://flexblues.be/

  • C’est aux multinationales qu’il faut s’en prendre, pas à leurs victimes!

    Depuis les régularisations de 2000, le nombre d’étrangers en séjour illégal a de nouveau augmenté. Cette réalité est due à la misère croissante dans les pays néocoloniaux, organisée par les pouvoirs des pays capitalistes occidentaux avec la complicité des dirigeants locaux. La solidarité avec les sans-papiers est nécessaire : le sort des travailleurs belges et celui des illégaux sont indissolublement liés.

    Olivier, EGA-ULB

    Jeunes et travailleurs quittent les pays du monde néo-colonial pour fuir la misère et la guerre. Sur place, les gouvernements locaux, à la botte des puissances impérialistes, mènent une politique de pillage des richesses de ces pays. Les seuls bénéficiaires de ces pratiques sont les patrons des multinationales qui augmentent ainsi spectaculairement leurs profits. En Belgique, moins de 4% des demandeurs d’asile recevront des papiers. Peu d’alternatives sont laissées à ceux qui, par nécessité, quittent leur pays pour venir chercher un avenir meilleur en Europe.

    Certains subissent des conditions de détention désastreuses dans les centres fermés tandis que beaucoup sont obligés de se tourner vers le travail au noir, illégal, mal payé et sans aucune protection sociale. Cette situation bénéficie surtout au patronat qui se constitue ainsi un réservoir de main d’œuvre bon marché. Mais les sans-papiers ne sont pas les seuls à subir les conséquences de cette politique. Celle-ci permet aussi de faire pression sur les salaires et les conditions de travail de l’ensemble des travailleurs.

    Face à l’afflux de réfugiés en Europe et en Belgique, les partis traditionnels n’offrent aucune solution. De la politique répressive permanente à l’organisation de la précarité, le gouvernement met en oeuvre une politique entièrement dévouée aux intérêts du patronat. Ces mesures n’amènent qu’à un repli identitaire et communautaire des minorités.

    Face à cette stratégie consciente du patronat et du gouvernement, il importe que les travailleurs de toutes origines ne se laissent pas diviser mais, au contraire, resserrent leur rang pour contrer ces attaques contre leurs conditions de vie. Ces dernières années, plusieurs groupes de sans-papiers ont lutté pour leur régularisation. On se souvient des Afghans qui ont mené une grève de la faim de plusieures semaines à l’église Sainte-Croix d’Ixelles, ou encore des Iraniens qui ont occupé les locaux de l’ULB et de l’UCL en 2003. Aujourd’hui, 70 sans-papiers occupent l’église Saint-Boniface, et différentes manifestations sont organisées à travers le pays (Vottem, Morlanwelz, Anvers,…). Mais ni les luttes isolées, ni les pressions sur les partis traditionnels (qui ne défendent que les intérêts du patronat) n’offrent de perspectives au mouvement. Des régularisations ont déjà eu lieu dans des contextes particuliers, lorsque ça arrange nos dirigeants, ou sous pression de mouvements larges. Une lutte massive des travailleurs contre la politique néolibérale – et son volet « immigration » – est nécessaire. L’union de tous les sans-papiers et travailleurs belges est un élément décisif pour la lutte.

    L’UDEP, premier véritable mouvement qui organise des sans-papiers, essaie de faire le lien entre les luttes et tente de construire cette unité entre travailleurs belges et sans-papiers. C’est un pas en avant pour le mouvement. L’ « immigration clandestine » – qui tire ses sources de l’impérialisme –, le travail au noir, le racisme… est une conséquence du capitalisme. Seule une société socialiste, qui rompt avec la logique de marché et qui se base sur les besoins et les capacités de chacun, peut apporter des solutions aux travailleurs et jeunes sur tous les continents.

  • L’EMANCIPATION DES FEMMES ENTRAVEE PAR 25 ANS DE NEOLIBERALISME

    LE 11 MARS: LSP/MAS organise une journée de formation et de discussions à l’occasion de la journée internationale des femmes

    LE PACTE DES GÉNÉRATIONS a rendu la situation des femmes, du point de vue de leur droit à une retraite décente, encore plus difficile qu’elle ne l’était déjà auparavant. A l’heure actuelle, un très grand nombre de femmes pensionnées font parties des couches les plus pauvres de la société. Des politiciens, comme Bruno Tobback, le ministre des pensions, affi rment que cette situation est dûe aux choix “malheureux” que font les femmes. Elles sont censées être “informées” sur les conséquences de ces choix.

    Une campagne d’information ne changera rien au fait que, dans pas mal de secteurs où sont employées surtout des femmes, on offre UNIQUEMENT du travail à temps partiel. Et ça ne changera rien non plus au fait que du travail à temps plein avec à des enfants à charge donne un salaire rarement suffi sant quand il faut payer la crèche (quand on peut en trouver une). Sur un marché du travail où la fl exibilité ne cesse d’augmenter, il est presque impossible de combiner un travail à temps plein avec un ménage et des enfants. Si 43% des femmes travaillent à temps partiel (contre 7% des hommes), ce n’est certainement pas par “choix”!

    L’émancipation des femmes n’a pas de sens si elles ne peuvent choisir qu’entre pauvreté ou dépendance à l’égard d’un partenaire: 80% des mères isolées vivent dans la pauvreté. Bien que les femmes aient la possibilité de travailler à temps partiel, le coût de la vie, lui, reste inchangé.

    L’émancipation des femmes n’est possible que dans leur totale indépendance. Cela ne peut se faire que par une lutte commune des travailleurs, femmes et hommes, contre l’abolition de la sécurité sociale (obtenue par une lutte qui a demandé beaucoup de sacrifi ces à nos parents et nos grands-parents et pour laquelle certains sont morts) et plus généralement, pour des salaires et des conditions de travail décentes pour tous.

    Aujourd’hui, nous devons lutter pour la construction d’une opposition combattive au sein des syndicats et utiliser ces organes comme des instruments de lutte! Pour une scission de la FGTB et de la CSC avec les partis traditionnels qui mènent une politique d’attaques néo-libérales! Pour un nouveau parti ouvrier représentant les travailleurs et défendant leurs droits, sans tenir compte de leur origine nationale, de leur sexe ou de leur préférence sexuelle!

    C’est ce que veut réaliser le LSP/MAS, c’est ce que veut sa commission “Femmes” qui regroupe les femmes membres du LSP/MAS pour mener la discussion sur les stratégies et les programmes à élaborer pour résoudre les problèmes auxquels les femmes sont confrontées.

    C’est la raison pour laquelle nous organisons ce jour de formation et de discussion. Après la discussion principale sur les effets de la politique de droite sur les droits et les acquis des femmes, nous proposons aussi des groupes de discussion sur les sujets suivants:

    L’histoire du mouvement des femmes en Belgique | La violence conjugale: quelles en sont les causes et comment la combattre? (avec une oratrice de la Campagne Ecossaise “Campaign against Domestic Violence”) | Comment lutter contre le sexisme et la violence dans les quartiers animés? | La position de la femme au Pakistan/Cachemire – un rapport de notre travail au Pakistan et au Cachemire et notamment notre campagne contre la violence envers les femmes au Pakistan et la campagne pour la reconstruction après le tremblement de terre au Cachemire | Nous clôturerons la journée avec un dernier meeting pour présenter notre travail femme (en Belgique et dans le monde).

    Tu en as ras le bol des bas salaires et des mauvaises conditions de travail? Tu veux lutter pour une vie décente et un avenir pour toi et tes enfants? Tu en as assez de la violence et des intimidations? Tu ne veux pas rester les bras croisés et attendre les conséquences des attaques de la politique antisociale? Alors, viens à notre journée femmes du 11 mars à l’ULB. Tu y rencontreras des femmes et des hommes déterminés à organiser la lutte.

    INFO PRATIQUE

    Le meeting commence à 14h. (et dure jusque 20h.) au bâtiment H de l’ULB, sur le Campus du Solboch, Avenue Franklin D. Roosevelt 50, B-1050 Bruxelles

    Entrée: 5 euro pour les salariés; 3 euro pour les écoliers, les étudiants et les allocataires sociaux

    Sandwiches et boissons prévus

    Une crèche est organisée dans le bâtiment, mais veuillez vous inscrire à l’avance (femmes@lsp-mas.be ou 0472/41.62.78 pour plus d’infos)

    > Tract en version PDF

  • Le néolibéralisme bloque l’émancipation des femmes

    Indépendamment du continent où elles se trouvent, ce sont les femmes qui sont le plus violemment touchées par les attaques néolibérales que subit la classe ouvrière. Licenciements massifs, précarité dans le monde du travail, bas salaires, attaques sur l’Etat-Providence, sur les droits à la pension, sur les facilités pour les crêches,… ne vont pas seulement mener à une augmentation de la misère et de la souffrance des femmes, mais vont très probablement aussi mener à une radicalisation politique plus développée des femmes et parmi elles de celles issues de la classe ouvrière.

    Dagmar Walgraeve

    11 mars: Débats et discussions à l’occasion de la Journée Internationale des Femmes

    Le MAS/LSP organisera ce samedi 11 mars une journée de débats et discussions en rapport avec la Journée Internationale des Femmes (du 8 mars).

    Il y aura entre autres au programme:

    Discussion plénière: L’émancipation des femmes après 20 années d’attaques néo-libérales. Comment le système actuel sappe-t’il l’émancipation des femmes?

    Ateliers:

    > L’histoire du mouvement féministe et des femmes dans le mouvement ouvrier

    > La violence au sein de la famille: quelle réponse pouvons-nous apporter? Avec un rapport de la Campaign Against Domestic Violence (CADV)

    > Prostitution: la légalisation est-elle une solution? Qu’elle est le point de vue des socialistes?

    Meeting: La place des femmes dans la lutte!

    Avec, notamment, Sinead Daly, membre de la direction du Scottich Socialist Party, formation large à l’intérieur de laquelle notre organisation-soeur (International Socialists) est investie en Ecosse. Sinead est active déjà depuis de longues année dans les campagnes contre les violences familiales (CADV) et d’autres campagnes pour le droit des femmes.

    La journée de débats et discussions aura lieu à Bruxelles (ULB). Elle commencera à 13h00 et se terminera à 20h00. Informez-nous à l’avance si vous avez de jeunes enfants; une garderie est prévue.

    Informations pratiques :

    Cette journée débutera à 13h00 (jusque 20h00) et se déroulera dans le bâtiment H de l’Université Libre de Bruxelles (ULB), Campus du Solbosch, Avenue Franklin D. Roosevelt 50, 1050 Bruxelles.

    PAF :5 € pour les travailleurs, 3 € pour les étudiants et les chômeurs

    Des boissons et des swandich’s seront disponibles sur place.

    Une garderie est prévue. Si vous venez avec de jeunes enfants, merci de nous prévenir.

    Plus d’infos ? -> contactez le MAS-LSP par téléphone au 02/345.61.81 ou par e-mail à info@socialisme.be

    N’hésitez pas à visiter notre page femme: www.lsp-mas.be/mas/femmes

    Féminisation du travail?

    Ces derniers décennies, partout dans le monde, le nombre de femmes sur le marché du travail a augmenté. En soi, cela semble positif, mais le terme de “féminisation du travail” est néanmoins trompeur. Ce phénomène n’a pas mené à l’amélioration générale du statut économique, politique et social des femmes à travers le monde.

    Par l’élargissement des zones de libre échange, les gouvernements, surtout d’Asie et d’Amérique Latine, mènent une politique agressive pour attirer les investissements occidentaux. Il est assez remarquable que 90% des 27 millions de travailleurs de ces zones sont de jeunes femmes gagnant 50% à 80% de moins que les hommes.

    Les employeurs de ces pays partent de l’idée que ces travailleuses vont accepter plus facilement de mauvaises conditions de travail et vont démontrer des sentiments “responsables” (la moitié de ces femmes sont mères célibataires).

    Ces idées patriarcales selon lesquelles les femmes sont plus serviles, ont moins tendance à s’organiser et sont plus facilement licenciée sur base de mariages et de grosesses sont utilisées par le capitalisme.

    La tendance à la “féminisation du travail” n’est donc pas du tout une donnée positive, mais est plutôt la conséquence d’une recherche effrénée de profits pour les entreprises et des forces de travail à bon marchés et flexibles. Les conditions de travail pour beaucoup de femmes dans le monde néocolonial sont pénibles, leurs emplois sont très mal payés, précaires et sans sécurité.

    Seulement 38% des femmes indépendantes économiquement

    Dans les pays occidentaux beaucoup d’emplois occupés par les femmes sont toujours un reflet du travail que celles-ci effectuent à la maison. 85% de toutes les travailleuses belges travaillent comme infirmières, femmes de ménage, cuisinières, coiffeuses, …

    Et dans des pays où le principe du salaire égal est devenu loi, les femmes gagnent souvent moins que les hommes pour le même travail. En Grande-Bretagne c’est en moyenne 19% de moins, et la situation en Belgique est plus déplorable encore. Au sein de l’UE, près de 80% des emplois à temps partiel sont occupés par les femmes. Souvent, ces boulots sont sous-payés et il y a une grande insécurité de travail. Le système du temps partiel (et donc des salaires “partiels”) fait qu’aux Pays Bas, par exemple, seulement 38% des femmes qui travaillent sont économiquement indépendantes.

    Les femmes optent souvent pour le temps partiel par nécessité: 29% pour s’occuper des enfants et 25% pour d’autres raisons familiales. Cela démontre qu’il y a toujours un manque de crêches abordables. 20% des femmes travaillent à temps partiel faute de n’avoir pu trouver d’emploi à temps plein.

    Dans les supermarchés notamment, le temps plein n’existe quasiment pas. Lors de l’introduction du temps partiel, il était encore possible de percevoir une allocation supplémentaire si on continuait à chercher un emploi à temps plein.

    Mais très rapidement, cette allocation a été abolie, elle n’a existé que pour promouvoir le temps partiel dans un premier temps. Avec l’article 143/80, les chômeuse de longue durée mais cohabitantes ont perdu leurs allocations. En 1991, 91,6% de ces suspensions concernaient des femmes!

    Double journée de travail

    Encore maintenant, le revenu des femmes est régulièrement vu comme “complémentaire” à celui de leur partenaire. Et ce sont toujours les femmes qui font la plus grande partie du ménage, même si les deux partenaires travaillent à temps plein. Cette double journée de travail fait que les femmes ont, toujours aujourd’hui, bien moins de temps libre que les hommes. Cette différence est relativement limitée chez les couples sans enfants, mais à cause du travail à l’extérieur et des opinions répandues le ménage, le temps libre des femmes tombe fortement (les femmes ont en moyenne 4 heures de temps libre en moins que les hommes).

    Le temps libre des pères tombe en moyenne de 50,1 heure à 31,6 heures par semaine, alors que les mères passent de 46,6 heures à 22,5 heures par semaine. Ces statistiques viennent de Grande-Bretagne, mais les études effectuées en Belgique vont dans la même direction.

    Les mères célibataires, 73% des parents isolés, sont souvent dans l’incapacité de tenir le coup financièrement et de combiner le travail avec la prise en charge de leur famille. 60% des minimexés en Belgique sont des mères célibataires.

    Le Pacte des Générations

    Le nombre minimum d’années de carrière pour être prépensionné a pour conséquence que les femmes sont les plus touchées et les premières victimes du Pacte des Générations.

    2/3 des temps partiel sont occupés par les femmes et ce sont 38% des femmes actives qui travaillent à temps partiel contre 5% des hommes. Proportionellement, celles-ci devront travailler plus d’années avant d’avoir accès à une pension complète. Le temps partiel est souvent le seul recours pour les femmes qui ont à choisir entre une vie de famille et une carrière. Cela devient limpide si on regarde l’âge auquel les femmes travaillent le plus à temps partiel. Entre 20 et 29 ans, il s’agit de 24%. A l’âge où la plupart des femmes commencent à avoir leurs enfants, entre 30 et 40 ans, ce chiffre grimpe jusqu’à 41%, et les années suivantes jusqu’à 45%. Les hommes, durant toutes ces périodes, restent à 4% de travailleurs à temps partiel, pour monter à 12% entre 60 et 64 ans. Pour ces derniers, s’il y a abandon du travail à temps plein, c’est pour vivre plus calmement et pour avoir plus de temps libre. Les mêmes éléments reviennent dans les chiffres sur le crédittemps et l’âge auquel hommes et femmes le prennent.

    Les travailleurs qui vont en pension à ce moment (entre 60 et 65 ans) peuvent en moyenne prouver une carrière de 37 ans à l’âge de 58 ans, 35 ans de travail et deux années assimilables. Les travailleuses qui vont en pension à ce moment (entre 60 et 64 ans), elles, peuvent en moyenne prouver une carrière de 34 ans à l’âge de 58 ans, 26 ans de travail et 8 ans sont des périodes assimilées. Comme 38% des femmes auront eu une carrière à temps partiel, 30% des femmes avec une carrière de plus de 30 ans n’arriveront pas à avoir une pension minimum (pour avoir droit à une pension minimum, il faut avoir travaillé durant 30 années à temps plein), alors qu’il ne s’agit “que” de 8,5% chez les hommes.

    Selons certains calculs, le Pacte des Générations fera que 71% des femmes n’auront plus accès à la prépension parce qu’elles n’auront pas eu de carrière complète de 38 ans.

    1 femme sur 5 confrontée à la violence conjuguale

    Les attaques néolibérales sur nos acquis sociaux mènent à plus de problèmes et de stress au sein des familles, ce qui peut s’exprimer de façon violente.

    Les journeaux ont fait état l’an dernier d’une trentaine de drames familiaux, mais ce n’est là que le sommet de l’iceberg. La violence à l’encontre des femmes est en progression. La violence entre partnenaires est en Europe la cause principale de mort et d’invalidité pour les femmes entre 16 et 44 ans, plus que le cancer ou les accidents de la route. Dans les 15 états-membres de l’UE (avant l’élargissement), chaque année, plus de 600 femmes sont tuées à cause de cette violence, et c’est une femme sur cinq en Belgique qui est confrontées aux coups d’un conjoint.

    Tous les jours, en Flandre, 14 femmes prennent la décision difficile de chercher de l’aide en allant auprès d’un refuge, et la moitié est refusée faute de places. Et s’il subsiste encore de la place, souvent il n’en reste plus pour les enfants. Ces femmes sont donc devant la décision déchirante de laisser leurs enfants chez un partenaire violent ou de retourner à la maison avec eux. Mais pour beaucoup, revenir en arrière est impossible, 11% des femmes qui finalement trouvent une place dans un refuge ont erré pendant un certain temps. Une place dans ces refuges coûte 17 euros par jour (12 pour les enfants). Auparavant, on a déjà mentionné que seule une partie des travailleurs est indépendante financièrement (38% aux Pays-Bas). Cette dépendance financière rend plus difficile encore de quiter un partenaire violent.

    Il a fallu attendre 1998 pour que la violence entre partenaires soit reconnue comme crime, mais cette loi reste lettre morte. Alors qu’il y a 21 plaintes par jour pour coups et blessures entre (ex-)partenaires, 9 plaintes sur 10 sont classées sans suite. Il faut avoir assez d’accueil gratuit pour les victimes, mais les coupables doivent aussi être aidés. Les mettre dans le prison n’est pas une solution.

    Pour lutter contre la violence au sein de la famille, il faut s’en prendre avant tout aux causes sociales. L’ultra-flexibilité engendre beaucoup plus de stress, et cela ne s’exprime pas seulement dans la croissance des dépressions ou l’utilisation grandissante de somnifères… Dans le logement également, des mesures structurelles sont nécessaires car les loyer hors de prix sont aussi une difficulté pour quitter son partenaire. Un accès rapide à une habitation sociale pour les femmes qui veulent échapper a une situation violente ne peut être garanti que si le nombre de logements sociaux augmente fondamentalement des 6% actuellement jusqu’à 40 ou 50% du marché du logement. C’est uniquement en améliorant les conditions de vie et de travail de tous que l’on peut améliorer les relations sociales.

    Les problèmes structurels avec lesquels les femmes sont confrontées aujourd’hui sont inhérents à la structure économique du système capitaliste où le profit se trouve toujours en premier lieu. La lutte des femmes n’est pas une lutte distincte mais doit rejoindre la lutte des travailleurs, des jeunes, des refugiés, des pauvres,… partout dans le monde pour un système dans lequel seront prioritaires les besoins de toute la population mondiale et non plus les profits de quelques uns.

    NOTRE AVIS

    > Halte à la superflexibilité et à la pression croissante au travail. Pour la semaine de 32 heures sans perte de salaire et avec des embauches compensatoires

    > Un véritable emploi pour tous. Pas de statuts précaires, chèques services,…

    > Des services publics de qualité qui assurent le plus possible de tâches ménagèrent

    > Halte au démantèlement des (pré-)pensions

    > Des logements sociaux de qualité

    > Des crêches gratuites et de qualité

  • Le monde comme ils le veulent.

    Jean-Claude Paye, sociologue, a écrit et publié en 2004 aux éditions la dispute* le résultats de ses recherches et de ses analyses des changements intervenus dans le droit et la procédure pénale ces dix dernières années dans le monde, et plus particulièrement en Occident.

    François Barzin

    Ce que cet auteur annonce dans son livre est l’avènement d’une dictature mondiale, emmenée par les Etats-Unis sous couvert de lutte contre le terrorisme. L’auteur y décrit la recomposition progressive des Etats nationaux autour d’appareils policiers auxquels les divers gouvernements donnent de plus en plus de pouvoir et de prérogatives. Ces recompositions faites à l’heure de la lutte contre le terrorisme, s’intégreraient plus largement dans une structure impériale dont les Etats-Unis auraient l’exclusivité de la direction politique.

    Si la perpective d’une superpuissance américaine doit être légèrement revue à la baisse, au vu de ses échecs en Irak et en Afghanistan, les lois liberticides inspirées et recommandées par les Etats -Unis aux pays européens n’en sont pas moins devenues une réalité.

    Le danger actuel de cette évolution, continuation d’une justice de classe, est la constitutionnalisation de cette justice de classe. Auparavant, la subjectivité de la justice reposait sur un rapport de force instauré dans le cadre d’un Etat de droit et d’une démocratie. Aujourd’hui ce qui nous est promis est l’impossibilité de modifier ces rapports de force, et donc la subjectivité politique et judiciaire, au nom de la lutte contre le terrorisme. Vouloir influencer le fonctionnement des institutions démocratiques pourra être considéré comme terroriste en soi, alors que cela est bien sûr l’enjeu même de la vie démocratique. Le droit à la défense devient impossible puisque c’est aux accusés de prouver qu’ils sont innocents sur base d’intentions qui leurs sont attribuées, leurs faits et gestes témoignant contre eux et non pas pour eux. Il n’y a pas de partie tierce, telles des victimes réelles d’un véritable attentat par exemple, mais seulement des accusés et un Etat juge et partie, inconcilablement opposés dans la défense de leurs intérêts respectifs.

    Il ne peut plus y avoir de liberté individuelle dès lors que l’Etat peut-traîner quiconque en justice sur base de ses intentions politiques.

    Qu’en est-il donc de ces lois, décisions – cadre, accords et négociations passés entre pays de l’Union, entre l’Union européenne et les Etats-Unis ? Quelle est la philosophie, la méthode et les objectifs avoués de ces lois ou de ces accords ?

    Une inversion du sens de la procédure pénale

    De manière générale la tendance est à la subordination du pouvoir judiciaire à celui de la police – et plus l’inverse comme précédemment – au renforcement du parquet sur le juge d’instruction, à la régression du droit de la défense devant des enquêtes policières secrètes et proactives sur lesquelles elle n’a plus aucun contrôle, les forces de police devenant généralement intouchables judiciairement, leur méthode de production de la preuve n’étant plus elle-même soumise à l’examen contraignant du pouvoir judiciaire. Cette redéfinition des pouvoirs respectifs de la police et de la justice va de pair avec la redéfinition des infractions incriminées et des personnes ou des groupes visés : les critères définissant une action terroriste ou une action criminelle sont élargies par des définitions purement subjectives ou spéculatives comme dit plus haut, telle la volonté d’intimider ou l’intimidation des populations, ou parties de celles-ci, la volonté d’influencer le fonctionnement d’autorités publiques, la « capture » d’infrastructures publiques ou privées, la simple intention de commettre un acte dit terroriste… A remarquer la notion de capture d’infrastructures publiques ou privées qui vise directement les organisations syndicales et altermondialistes dont ces « captures » sont les principaux moyens d’actions. Il faut savoir également que le conseil de l’Europe a instauré les accords Shengen 2 qui visent explicitement à l’échange d’informations sur des activistes politiques qui se rendent à des sommets internationaux pour permettre leur arrestations et leur emprisonnement éventuel dans tous les pays de l’Union.

    La simple appartenance à une organisation terroriste, c’est à dire politique ou syndicale notamment, ou la participation à ses activités, même légales, en connaissance ou en méconnaissance de cause peut valoir à quiconque d’être assimilé à un terroriste. D’une inculpation ou d’une suspicion à partir d’éléments objectifs, l’on va vers une inculpation à partir d’une interprétation subjective et politique du droit de chacun.

    Comme on peut le constater, le caractère vague des incriminations et leur caractère foncièrement subjectif permet de s’attaquer à n’importe qui et à n’importe quoi dès lors qu’il gène le pouvoir en place, les activistes politiques et syndicaux étant visés de façon privilégiée. Le traitement des insoumis renommés terroristes peut aller jusqu’aux gels des avoirs ou de toute les sources de revenus, sans parler de la suspension des droits civiques, des peines de prisons, amendes et autres … Les gardes à vue sont doublées, généralement, ce qui augmente les possibilités de pression de la part de la police, pour arracher des aveux, par exemple.

    La collaboration automatique

    Pour rendre effective ces différentes dispositions légales visant la répression du « terrorisme », les différentes autorités publiques des pays européens ont conclu des accords de collaborations automatiques et obligatoires entre leurs appareils policiers et judiciaires respectifs. Ainsi en est-il du Mandat d’Arrêt Européen. Ce contrat de collaboration impose l’extradition automatique de n’importe quel individu accusé de terrorisme par tout Etat requis par un autre Etat. Ce qui paraît être un gage d’efficacité contre le crime organisé, est en fait une remise en cause du droit d’asile. Le Mandat d’Arrêt Européen est basé sur le principe de reconnaissance mutuelle des législations pénales de chaque Etat par tout les autres, chacun étant supposé démocratique et respectueux des droits et libertés fondamentales de leurs concitoyens. Les problèmes à l’extradition entre Etats Membre ne se posant donc pas. Mais la France du massacre de Charonne n’était-elle pas démocratique, pas moins que la Belgique des tueries du Brabant wallon, ou que l’Italie anticommuniste et maffieuse de Berlusconi ? Que nous réserve l’avenir ? Peut-être verrons nous en France éclore les fleurs nauséabondes du Front national ?

    Mais de toute façon, en Europe, la révision générale à la baisse des critères qui donnent droit à être accusé de terrorisme, est susceptible de remettre en cause le droit d’asile de beaucoup de personnes et d’organisations militantes dans un avenir plus ou moins proche.

    L’hégémonie coulée dans le droit

    L’élaboration de toute ces lois, ainsi que la philosophie sécuritaire sont impulsées par les Etats -Unis, qui ont été les premiers à remettre en cause le régime du droit international fondé sur le respect mutuel de la souveraineté de chaque Etat, mais aussi sur le principe du respect des droits humains, dont celui du droit à la défense et à la représentation juridique. Le refus de donner aux prisonniers de Guantanamo le statut juridique de prisonniers de guerre permet à la première puissance mondiale de les détenir de façon indéfinie sans inculpation et surtout dans le secret, sans droit à la défense, sans la publicité et l’objectivité des débats. La sécurité de ces personnes ne peut être assurée par aucun moyen, sinon de loin, par le biais de la pression internationale, comme au temps de Pinochet, quand amnesty international faisait campagne pour la libération des prisonniers politiques. Cette action du gouvernement américain vis à vis des « combattants illégaux » par la procédure d’exception aboutit à la suspension du droit international – de fait – par les Etats-Unis.

    Malgré leurs hypocrites critiques de l’unilatéralisme américain, les pays européens, Conseil de l’Europe en tête, se sont empressés de répondre aux exigences antiterroristes des Etats-Unis, puisque ensuite la rhétorique sécuritaire a justifié la mise sous surveillance politique de leur propres populations.

    Ainsi, le Conseil de l’Europe concluait des accords autorisant l’extradition quasi automatique vers les Etats-Unis de tout citoyen européen suspecté de terrorisme dans un même temps qu’il travaillait au mandat d’arrêt européen et autres dispositions liberticides, dans des conditions politiques tout à fait répugnantes et suspectes (Certaines décisions cadre trop clairement liberticides ont été prises au Conseil de l’Europe en annexe de négociations portant sur le droit de la pêche par exemple, ni vu, ni connu).

    Dans le même ordre d’idées, les Etats-Unis ont imposés à L’Europe l’échange des informations personnelles sur les passagers ayant réservés auprès de compagnies aériennes pour les Etats-Unis, ceux-ci pouvant à leur guise déterminer qui peut ou non entrer sur leur territoire ( L’ Europe a par après pris les même dispositions pour son propre compte par rapport aux réservations transeuropéennes).

    A ce stade nous devons avoir conscience que le Patriot act s’applique aussi à nous, comme à tous les citoyens de la planête et dès lors que nous posons le pied sur le sol américain, nous pouvons être détenu de façon indéfinie et sans inculpation. Dans ces conditions, comment imaginer une rencontre altermondialiste aux Etats-Unis, comme à Seattle en 1998 ? Les ébauches d’une démocratie planétaire, les citoyens américains, européens, les démocrates des pays du Tiers monde et l’ensemble des populations sont véritablement devenus les otages du reflux réactionnaire américain.

    Il faut quand même préciser que si tout le monde peut être enlevé, extradé et emprisonné indéfiniment par les autorités américaines, a contrario, aucun citoyen américain ne peut-être traduit devant un tribunal international pour crime de guerre ou pour crime contre l’humanité, ce qui concernerait pas mal de monde dans les services de renseignements et dans les administrations américaines

    La suspension du droit et du principe de légalité lui-même iront en s’aggravant, laissant de plus en plus de monde dans une anomie juridique autorisant tous les arbitraires. Le droit, comme ensemble hiérarchisé de garanties constitutionnelles, fait aujourd’hui de la procédure d’exception l’acte constituant d’un nouveau type de régime politique, celui ou le pouvoir politique décide directement de la norme à appliquer, de comment l’appliquer, et à qui l’appliquer. Pourtant l’égalité de tous devant la loi, suppose la reconnaissance de l’objectivité des actes incriminés, la constitution de parties tierces et le droit à la défense dans le temps long et posé de la procédure judiciaire. Il faut d’ailleurs dénoncer ici les appels à la rentabilité des parquets par Madame Onckelinks, qui est une façon insupportable d’instrumentaliser le pouvoir judiciaire à des fins politiques, électoralistes.

    Toute organisation politique progressiste devrait se mobiliser contre toutes ces régressions, car c’est véritablement l’exercice de nos droits constitutionnels qui est menacé. Si nous jouons le rôle des victimes indolentes, il se pourrait bien que le crocodile vienne nous manger.


    * La fin de l’Etat de droit, Lutte antiterroriste, de l’état d’exception à la dictature, Jean-Claude Paye, éd. La Dispute, 2004.

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