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Tag: Syriza
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Grèce. Le temps presse pour SYRIZA
Les travailleurs et les pauvres n’ont pas à subir de nouvelles mesures d’austérité calamiteuses
Un «Grexit» se profile-t-il à l’horizon? Récemment, la Grèce a semblé faire un pas de plus en direction du défaut de paiement de sa dette publique et sur la voie de sa sortie de la zone euro. Athènes tente depuis un bon moment de parvenir à un accord avec l’Union européenne, la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international (la Troïka, dorénavant appelée «Institutions») pour avoir accès à plus de 7 milliards d’euros de renflouement. La Grèce étant en manque d’argent, elle a besoin d’obtenir de nouveaux fonds d’ici la fin du mois de juin pour éviter un défaut de paiement. Mais ses créanciers ont mis des conditions véritablement draconiennes pour tout accord (qui signifient d’instaurer de nouvelles mesures d’austérité), ce que le gouvernement de gauche Syriza a, jusqu’ici, refusé d’accepter.Article de Niall Mulholland, publié le 10 juin dernier à partir de l’hebdomadaire The Socialist n°859, publication de nos camarades du Socialist Party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et au Pays de Galles)
La Troïka a exigé d’opérer des coupes dans le budget des retraites, de réaliser de nouvelles privatisations, une ‘réforme’ du marché du travail, une augmentation de la TVA et d’autres attaques contre une sécurité sociale déjà aux abois. Les contre-propositions émises par le Premier ministre grec, Alex Tsipras, ont été catégoriquement rejetées par la Troïka. L’attitude hautaine et néocoloniale de cette dernière a provoqué le gouvernement grec à déclarer qu’il ne n’allait pas verser les 300 millions d’euros qu’il devait rembourser pour le 4 juin. Au lieu de cette date, la Grèce verserait ce montant ainsi que d’autres dus au FMI plus tard dans le mois.
D’intenses tensions
Illustrant les tensions qui existent entre la Troïka et le gouvernement grec, le président de la Commission européenne, Jean-Claude Juncker, a lancé une attaque verbale furieuse contre Tsipras au début du sommet du G7 qui s’est tenu en Allemagne. Tsipras est mis sous une pression immense de la part des élites dirigeantes et des ‘marchés’ internationaux pour conclure un accord avec la Troïka alors qu’il fait parallèlement face à la colère de l’opposition à toute nouvelle mesure d’austérité qui vit parmi la classe des travailleurs grecque et chez l’aile gauche de SYRIZA.
Aujourd’hui, un tiers des Grecs vit déjà officiellement sous le seuil de pauvreté (la réalité est plus proche des 50%) et le ménage grec moyen a perdu 40% de ses revenus depuis 2010.
Tsipras et la Troïka se disputent concernant la taille que devrait avoir l’excédent budgétaire des autorités grecques. Mais en tenant compte du paiement des intérêts, la dette publique est tout simplement impayable. Le montant de celle-ci équivaut à 175% du revenu national (PIB).
Une croissance? Quelle croissance?
Pourtant, les idéologues néolibéraux égarés dans les institutions de l’Union européenne insistent sur le fait que l’économie grecque peut croître de près de 3,5% en moyenne pour chacune des cinq prochaines années, ce qui réussirait à faire revenir la dette à 120% du PIB. Il serait alors possible, selon leur théorie fantaisiste, que la Grèce se tourne à nouveau vers les marchés financiers pour emprunter de l’argent, en dépit d’une économie une nouvelle fois ravagée par de nouvelles coupes budgétaires imposées par la Troïka.
Le journaliste de la BBC Robert Peston estime de son côté que, même sur base des prévisions de croissance absurdes de la Troïka, il faudrait cinquante années d’austérité pour que la dette publique grecque retombe à des niveaux «soutenables». Même le FMI, réalisant à quel point cette position est absurde, aurait fait pression dans le passé pour une radiation partielle de la dette de la Grèce.
Mais cela a fortement été contesté par les puissances de la zone euro, par l’Allemagne en particulier, qui craignent qu’un allégement de la dette entraîne d’autres pays endettés – comme le Portugal, l’Espagne et l’Irlande – à exiger un traitement similaire.
Lors du sommet du G7, le président américain Barack Obama a appelé à un «compromis» entre l’UE et la Grèce, mais en précisant qu’Athènes aurait à faire «des choix politiques difficiles». Washington craint que la sortie de la Grèce de la zone euro ait des répercussions néfastes sur une économie mondiale anémique.
La Maison Blanche (mais aussi l’Allemagne et d’autres puissances européennes) craint également que le régime de Poutine saisisse l’occasion pour accorder une aide financière à la Grèce et user de son influence sur des membres de l’OTAN pour gêner les puissances occidentales.
‘Grexit’
Un «Grexit» est une possibilité réelle, que cela soit par «accident» ou volontairement. Sous l’immense pression de la classe des travailleurs grecque, qui souffre depuis longtemps de l’impact des politiques antisociales, le gouvernement Syriza pourrait décider de refuser les nouveaux diktats de la Troïka et se retrouver ainsi jeté hors de la zone euro.
Anticipant cette possibilité, l’agence de notation Moody a annoncé une perte de 5 milliards d’euros des dépôts des banques grecques en mai. Elle s’attend à ce que la ruée sur les banques conduise à des contrôles de capitaux.
Un Grexit mettrait un terme à l’austérité imposée de l’extérieur et permettrait au gouvernement grec de dévaluer sa monnaie et de radier une grande partie de sa dette. Exporter reviendrait ainsi meilleur marché, c’est vrai, mais les importations coûteraient par contre plus cher, ce qui aurait un effet négatif sur l’épargne et les conditions de vie de la population ordinaire. En restant au sein des limites du système capitaliste, un Grexit ne résoudrait aucun des problèmes fondamentaux auxquels sont confrontées l’économie et la société grecques.
En dépit du fait que les puissances de la zone euro estiment être mieux préparées à l’éventualité d’un Grexit par rapport à il y a quelques années, elles restent inquiètes quant aux conséquences politiques possibles : «l’intégration européenne» et l’orthodoxie austéritaire seraient confrontées à de graves revers.
A moins que Tsipras ne se plie complètement aux exigences de la Troïka, avec des conséquences désastreuses pour SYRIZA, il est encore possible que la Grèce et la Troïka parviennent à la conclusion d’un nouvel accord «truqué» impliquant la révision à la baisse des exigences antisociales des créanciers et le versement de nouveaux fonds à Athènes pour faire face aux remboursements de la dette, avec même la possibilité d’un «oubli » d’une certaine partie de la dette.
Aucun trucage!
Tsipras a menacé de soumettre ce genre d’accord à un référendum ou à convoquer de nouvelles élections. Mais pour les travailleurs et les pauvres, il ne peut y avoir le moindre trucage à propos de l’effet désastreux de toute nouvelle mesure d’austérité. Au sein de ce système capitaliste en pleine faillite, la grande majorité de la population grecque devra faire face à des difficultés sans fin, que cela soit au sein ou en dehors de la zone euro.
Xekinima (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Grèce et section-sœur du PSL) appelle SYRIZA à être cohérent avec ses promesses électorales anti-austéritaires et à rompre avec l’austérité en adoptant un programme de type socialiste.
Cette approche inclut de refuser de rembourser la dette publique; d’instaurer un contrôle sur les flux de capitaux ainsi que le monopole d’Etat sur le commerce extérieur; de nationaliser les banques et les secteurs fondamentaux de l’économie sous contrôle et gestion démocratiques des travailleurs; de créer de l’emploi pour tous avec de bons salaires; d’instaurer un accès gratuit à des soins de santé de qualité, à l’enseignement et de renforcer considérablement la sécurité sociale. Une planification de l’économie basée sur la satisfaction des besoins de la population et non sur la soif de profits des capitalistes – une réorganisation socialiste de la société – mettrait un terme aux crises économiques, à la pauvreté, au chômage et à l’émigration forcée.
Pour y parvenir, il est essentiel de renforcer une ligne de politiques d’indépendance de classe à l’intérieur et à l’extérieur de SYRIZA. Cela signifie concrètement la création d’assemblées populaires et de comités d’action impliquant la base des travailleurs sur les lieux de travail et dans les quartiers.
La participation active de la classe des travailleurs et des jeunes dans la lutte contre la Troïka pour une alternative socialiste est essentielle. Cela ferait appel à l’imagination des travailleurs et des jeunes à travers l’Europe pour combattre l’austérité et lutter pour une Europe socialiste démocratique.
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MEETING Syriza, Podemos et perspectives de luttes en Belgique
Quelles sont les perspectives de luttes sociales en Europe et en Belgique ? Comment renforcer la solidarité européenne et internationale pour les soutenir ?« En janvier 2015, un évènement d’une portée politique historique s’est déroulé en Europe. En portant au pouvoir un parti qui refuse le discours néolibéral, le mouvement ouvrier grec a ébranlé la classe dominante grecque et européenne. »
MEETING en présence d’orateurs de SYRIZA, mais aussi d’orateurs belges comme JEAN-FRANÇOIS TAMELLINI (secrétaire fédéral de la FGTB) et BART VANDERSTEENE (porte-parole national du PSL).
Ce samedi 30 mai, 15h, à La Maison Des Huit Heures à Charleroi, 23 Place Charles II.
La crise économique qui a éclaté en 2008 a déclenché une vague de politique d’austérité. Après avoir sauvé le système bancaire mondial à coup de milliers de milliards, les gouvernants ont présenté la note à la population. Celle-ci n’est pas restée sans réaction. De par le monde des vagues de femmes et d’hommes se sont levé-e-s : révolutions en Afrique du Nord et au Moyen Orient, luttes des étudiants aux Chili et au Québec, luttes aux USA, combat autour de la question salariale à Seattle, luttes des enseignants et dans les transports au Brésil, mais aussi à Shanghai, en Afrique du Sud, au Burkina Faso, au Sénégal,…
L’Europe n’est pas restée à l’écart de ce processus. En Europe du Sud, les luttes énormes de la classe ouvrière ont conduit à l’émergence de partis politiques à gauche des partis traditionnels. En Belgique, le plan d’action syndical de l’automne 2014 a démontré le potentiel du mouvement des travailleurs.
Venez en débattre avec nous le 30 MAI à 15H à la « Maison des 8h » à CHARLEROI.
Entrée à PRIX LIBRE. -
Après la Grèce, les regards se portent vers l’Espagne
L’imposition des politiques d’austérité a entraîné des millions des Grecs et d’Espagnols à sortir dans la rue pour protester contre la diminution des salaires, les coupes budgétaires et les privatisations. En Espagne, les manifestations ont abouti à des mouvements de masse contre l’austérité à l’instar de celui des Indignés et des marches de la dignité. L’apparition de Podemos a donné une expression politique à ces mouvements et, depuis son irruption aux élections européennes, a changé la donne politique espagnole. La nouvelle vague d’élections offre des opportunités aux forces de gauche alternatives: élections en Andalousie en mars, aux parlements des communautés autonomes et aux conseils municipaux en mai, en Catalogne en septembre et générales en novembre.Par Marisa (Bruxelles), article tiré de l’édition d’avril de Lutte Socialiste
Crise des partis traditionnels et opportunités pour la gauche
Selon les premiers sondages de 2015, Podemos se situerait autour des 27% pour les prochaines élections générales, ce qui en ferait la première force politique du pays. Le Parti Populaire (PP, droite) actuellement au pouvoir diminuerait de 44,6% (élections générales de 2011) à 20%. Les sociaux-démocrates du PSOE, en pleine chute eux aussi, se retrouveraient autour des 18%. Cela confirme la crise politique dans laquelle sont plongés les instruments politiques de la classe dominante, la bourgeoisie. L’autorité du ‘‘régime de transition’’, né autour de l’année 1978 après la mort du dictateur Franco, est aujourd’hui discréditée : le système bipartite espagnol construit autour des faux rivaux du Parti Populaire et du PSOE, la monarchie, la Constitution et le système des communautés autonomes sont en crise. Le discrédit est encore plus accentué par les multiples cas de corruption inhérents à ce système capitaliste pourri où les inégalités ne cessent d’augmenter (1). On assiste parallèlement à la montée dans les sondages de la formation populiste de droite Ciudadanos, dont la rhétorique repose sur un renouvellement démocratique et la lutte anti-corruption, ce qui sert à masquer leur programme de destruction de la sécurité sociale.
Pour les élections municipales, les initiatives de convergence des forces alternatives de gauche anti-austérité peuvent devenir les exemples de ce qu’il est possible de réaliser à l’avenir au niveau de l’État. Même si les initiatives sont assez variées et connaissent différents stades de développement, elles ouvrent la possibilité de réaliser des majorités de gauche dans certaines municipalités. A Barcelone par exemple, l’initiative a été impulsée par Guanyem (“Gagnons”), une plateforme de militants et d’activistes des mouvements sociaux sur base d’un accord entre plusieurs formations: Podemos, ICV-Esquerra Unida (alliance entre écologistes de gauche et la formation ‘‘Gauche Unie’’ en Catalogne), Equo (autres écologistes de gauche) et Procés Constituent. Des listes unitaires, généralement sous le sigle de ‘‘Ganemos’’, auxquelles participent notamment Podemos, Izquierda Unida (‘‘Gauche Unie’’) et Equo, se sont aussi constituées à Córdoba, Zaragoza, Palma de Mallorca, Burgos, Bilbao, etc. Dans d’autres villes, pareille alliance a été plus difficile à concrétiser, comme à Madrid où Izquierda Unida n’a pas intégré l’initiative et à Seville où Podemos présente sa propre initiative séparée.
La ‘‘casta’’ et le ‘‘peuple’’
Podemos a illustré que la possibilité de vaincre est bien réelle. Son succès a quelque chose à voir avec la vision défaitiste des directions syndicales et de la direction d’Izquierda Unida, formation qui participe même à certaines majorités avec la social-démocratie. Une victoire de Podemos, après celle de Syriza en Grèce, livrerait une grande occasion de briser l’austérité au niveau européen. Mais tant en Grèce qu’en Espagne, la question qui se pose n’est pas seulement de gagner mais aussi de comment gagner, avec quel programme et quelle stratégie. Le discours de Podemos surfe sur un certain sentiment anti-parti présent dans les mouvements de masse. Pablo Iglesias et d’autres dirigeants de l’initiative proclament que Podemos n’a pas un profil idéologique, que la formation n’est ‘‘ni de gauche ni de droite’’. Ils soulignent l’existence de ‘‘la casta’’, une caste corrompue de patrons et de politiciens capitalistes. Ils disent que ‘‘Podemos est le peuple’’ parce qu’il reflète sa volonté et parce que c’est la base qui se prononce concernant les décisions internes.
Podemos représente bien la volonté d’une majorité des gens de punir les politiciens vendus et d’en finir avec l’austérité. Le peuple avec lequel les activistes des mouvements sociaux s’identifient est la partie du peuple qui subit l’impact de la crise (les travailleurs avec ou sans emplois, les jeunes, les pensionnés,…) et pas la partie qui en bénéficie (les capitalistes). Le phénomène de Podemos est l’expression d’un mouvement de classe sceptique vis-à-vis des partis et des syndicats, qui s’organise à l’extérieur des organisations traditionnelles des travailleurs. Cette ambiguïté et ce manque de clarté de Podemos par rapport à la classe sociale qu’il représente peut devenir un élément décisif entre la poursuite d’une ligne de rupture avec le capitalisme ou un ‘‘capitalisme à visage plus humain’’.
Après un processus de formalisation de sa structure, une “assemblée citoyenne” (en ligne) s’est consolidée comme organe où les adhérents à Podemos peuvent choisir leur direction et se prononcer sur des décisions importantes. Le pouvoir réel de décision réside néanmoins au sein du noyau central de la direction, autour de Pablo Iglesias (secrétaire général) et de son équipe. Toute l’attention médiatique s’est concentrée sur lui ces derniers mois. Les ‘‘cercles’’, ou assemblées démocratiques locales, auraient pu servir de piliers fondamentaux à Podemos dans les quartiers et les lieux de travail. Cela aurait constitué une occasion précieuse d’impliquer activement les travailleurs à tous les niveaux de la formation. Par contre, les cercles limitent leur activité à voter pour des candidats et à lancer des idées pour le programme. Cette culture politique perpétue la vision de représentant faisant de la politique au nom du peuple.
Un programme pour s’adapter au contexte ou pour le changer ?
La Grèce illustre jusqu’où la classe dominante peut aller pour faire pression afin d’éliminer les points de programme les plus radicaux. Un processus similaire est à l’œuvre en Espagne avec Podemos. En 2014, Podemos est sorti des élections européennes avec un programme intégrant les revendications de divers mouvements sociaux. Mais dans le dernier document de discussion sur le programme économique, certains points du programme de base sont tombés ou ont été modérés. L’âge de la pension est ainsi passé de 60 à 65 ans, le droit à un revenu de base pour tous est devenu un plan d’urgence pour les familles et les personnes en exclusion, la position adoptée vis-à-vis de la dette publique est passée d’un audit citoyen destiné à délimiter la partie illégitime de la dette à ne pas rembourser à une restructuration de la dette coordonnée avec l’establishment et à une révision des conditions de payement, etc.
L’argument en faveur de ces concessions programmatiques est qu’il faut être plus réaliste face au contexte actuel. Il est vrai qu’un programme doit tenir compte du contexte et des ressources disponibles. Le contexte actuel est celui de la crise capitaliste, de l’austérité, du remboursement de la dette et des diktats de la Troika. Ce contexte ne laisse aucune marge pour appliquer un programme basé sur les besoins de la majorité, il faut donc le changer afin de rendre possible les politiques nécessaires. Continuer à rembourser la dette signifie que l’argent dépensé ne sera pas investi dans la création d’emplois et dans le développement des conditions matérielles permettant une vie digne. Refuser de nationaliser les banques et les secteurs stratégiques de l’économie sous contrôle démocratique signifie que l’économie reste aux mains du marché et non au service de la population.
Mariano Rajoy, le chef du gouvernement espagnol, a fortement réagi contre Alexis Tsipras durant les réunions de l’Euro-groupe dans le but de discréditer les revendications anti-austéritaires grecques, car il voit en Syriza ce que Podemos pourrait devenir en Espagne. La peur de la classe dominante face à cette contagion anti-austéritaire à d’autres pays d’Europe est énorme. La victoire de Syriza en Grèce a été précédée par de nombreuses années de néolibéralisme et par plus de 30 grèves générales. En février, des dizaines de milliers de personnes ont manifesté pour soutenir le gouvernement Syriza et exiger une attitude ferme face à l’Euro-groupe.Grâce à la pression et à la mobilisation de la base, les politiques de rupture peuvent gagner le soutien large de la majorité. Le plan électoral n’est qu’une expression de la lutte des classes. Ne cédons pas à la pression pour limiter nos mouvements. Plus de 100.000 personnes ont participé à la ‘‘marche pour le changement’’ le 31 janvier dernier à Madrid à l’appel de Podemos. Son message était que : ‘‘Le changement qui semblait impossible auparavant est aujourd’hui de plus en plus proche. Il faut expulser la caste et récupérer les institutions pour le bien-être des gens ordinaires.’’ Une nouvelle vague de lutte intense en Espagne pourrait pousser Podemos vers la gauche et créer de nouvelles opportunités pour la résistance en Europe contre l’austérité. Socialismo Revolucionario (section espagnole du Comité pour une Internationale Ouvrière et organisation-sœur du PSL) défend un programme de transformation socialiste de la société et souligne le besoin de la mobilisation et de l’organisation des travailleurs, avec leurs propres outils politiques basés sur la démocratie ouvrière.
(1) L’Espagne est le pays de l’OCDE où les inégalités ont le plus augmenté depuis le debut de la crise http://www.huffingtonpost.es/2014/03/18/espana-ocde-desigualdades_n_4984228.html
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Syriza recule sous les menaces de la Troïka
Le 20 février, les négociateurs grecs ont accepté une extension de quatre mois du programme de renflouement actuel avec ses créanciers (la Troïka – l’UE, le FMI et la Banque centrale européenne).La délégation grecque aurait été soumise à un chantage pur et simple de la part de l’Eurogroupe (les ministres des Finances de la zone Euro). Le gouvernement grec de Syriza a été prévenu qu’ils seraient forcés de mettre en œuvre des contrôles de capitaux dans les jours qui viennent s’ils n’étaient pas d’accord.Les éléments clés de cet accord sont que la Grèce accepte le cadre du « mémorandum » (l’accord d’austérité) pour les quatre mois à venir ; la Grèce n’obtiendra le renflouement suivant que si elle est évaluée « positivement » par la Troïka ; la Grèce doit rembourser toute la dette à échéance stricte ; la Grèce est contrainte d’utiliser la plus grande partie de l’argent rassemblé par le programme d’austérité pour rembourser la dette sans qu’elle ne puisse engager « d’actions unilatérales ».
Il est clair que l’accord représente un grand recul de la part du gouvernement grec.
Cet accord sur quatre mois peut avoir empêché dans l’immédiat la sortie du PAYS de l’euro, mais avec un très lourd prix à payer. Bien que le premier ministre Tsipras essaie de donner le change, Athènes a fait de grandes concessions, et a reculé sur des revendications comme la dépréciation du montant de l’énorme dette de la Grèce.
Syriza prétend avoir obtenu « le meilleur » des mauvais accords dans un contexte de pressions concernant le refinancement des banques grecques et de retraits chaotiques des fonds dans ces mêmes banques par les Grecs. « Nous avons gagné du temps », a revendiqué Syriza. Mais du temps pour quoi ? On a vu que l’accord conduit Athènes à proposer des réformes acceptables pour ses créanciers. Les propositions de Syriza doivent être validées par l’Eurogroupe et la Troïka, avec la DATE butoir d’avril. Si Syriza n’acceptait pas ces diktats, la Grèce n’obtiendrait pas les nouveaux prêts nécessaires pour ne pas être en défaut de paiement de la dette de 320 milliards d’euros.
Tout est-il perdu ?
Cela signifie-t-il que « tout est perdu » ? Ceci dépend de l’état d’esprit des travailleurs et de la population grecque. Les mouvements ouvrier et social se battront pour que leur victoire électorale se traduise sur le plan industriel, tandis que la Troïka essayera de contenir Syriza dans le cadre capitaliste de l’Union européenne. Le gouvernement sera durement coincé entre ces deux pressions. La façon dont cette lutte va se terminer est imprévisible car c’est une bataille entre forces vives.
Syriza devrait dire la vérité aux Grecs. Si le gouvernement a fait des concessions pour gagner du temps pour permettre la mise en œuvre d’un plan stratégique pour défaire l’austérité, alors la population comprendra et rejoindra la bataille. Mais en refusant de faire cela, le gouvernement grec montrera tristement que le chemin qu’il prend est celui de la collaboration de classe avec l’Union Européenne et la classe dirigeante locale, en acceptant leur calendrier.
Syriza ne met pas en avant un programme socialiste général. Ses dirigeants promettent de rester dans la zone Euro capitaliste, quoi qu’il en soit. Ce qui veut dire emprisonner les travailleurs grecs dans la camisole de force du capitalisme de l’Union européenne des patrons et accepter la logique « du marché unique » et le diktat de la Troïka.
Le ministre des Finances grec Varoufakis a affirmé que l’accord permet à la Grèce de modifier son objectif fiscal cette année, ce qui pourrait amener un excédent inférieur, et qu’il y a « une ambiguïté créative » au sujet des excédents que la Grèce devrait produire au-delà de 2015. Le gouvernement grec a dit que ceci lui permettra d’effectuer certaines politiques humanitaires. Il est vrai que quelques milliard d’euros pourraient atténuer les pressions épouvantables sur ceux et celles qui sont les plus durement touchés parmi de la population grecque. Ceci peut être vu comme un certain progrès par les travailleurs, pour le moment, du moins comparé au morne bilan du dernier gouvernement.
Les enjeux ne pourraient être plus hauts
Mais ça ne sera pas suffisant pour financer une série de réformes pour la classe ouvrière et d’indispensables investissements publics massifs. Les principales parties du «Programme de Thessalonique» de Syriza, qui lui-même était un recul par rapport aux programmes précédents de Syriza, seront reportées, peut-être indéfiniment. Il est bien loin de réparer les dégâts de la perte de 25 % du PIB de ces cinq dernières années. Et si le gouvernement Syriza est d’accord avec des conditions générales draconiennes exigées par le capitalisme allemand alors les travailleurs grecs le verront, tôt ou tard, comme un retournement et une capitulation de la part de Syriza.
Déjà des dirigeants de Syriza vacillent publiquement sur certains engagements politiques comme le rétablissement de la télévision publique ERT. Alors qu’il avait affirmé qu’il n’effectuerait aucune nouvelle privatisation, Syriza a discuté la possibilité que des sociétés privées participent au « développement » d’infrastructures.
Il y a encore un soutien public énorme pour un programme anti-austérité radical. Plus de 100 000 personnes se sont retrouvées dans le centre d’Athènes le 15 février, pour soutenir la position initiale de Syriza dans la négociation. L’état d’esprit était combatif. Les fascistes d’Aube dorée et le nationalisme réactionnaire ont été repoussés à l’arrière-plan dans la situation politique grâce à cette nouvelle ambiance anti-troïka et anti-impérialiste. 70% des électeurs d’Aube dorée ont dit avoir été d’accord avec la position du gouvernement Syriza. Cela montre le soutien actif énorme dont pourrait bénéficier une lutte large contre la Troïka, clairement contre les coupes et pour un programme socialiste, qui inclut le reniement de la dette, pour en finir avec toute l’austérité, pour le contrôle des capitaux, un monopole de l’Etat sur le commerce extérieur, et la propriété publique démocratique des grandes entreprises et des banques, pour répondre aux besoins de la majorité et non d’une poignée – et un appel internationaliste de classe en direction des travailleurs du reste de l’Europe.
Même si Syriza s’en tient avec défiance à son Programme de Thessalonique, les travailleurs et les plus pauvres en Grèce se mobiliseraient avec enthousiasme pour soutenir sa mise en œuvre, avec le soutien actif des travailleurs à travers l’Europe, défiant leurs propres gouvernements mettant en œuvre les coupes budgétaires.
Si le gauche échoue à montrer une porte de sortie et si les classes moyennes et de grands pans de la classe ouvrière tombent dans la frustration et la démoralisation, ceci rouvrira la voie à Nouvelle Démocratie et à d’autres partis pro-austérité et offrira même une nouvelle opportunité de croissance à Aube dorée. Les enjeux ne pourraient pas être plus hauts pour la classe ouvrière grecque et européenne.
Cet article est composé d’extraits d’une interview avec Nicos Anastasiades qui sera publié dans l’édition de mars 2015 de Socialism Today (le magazine mensuel du Socialist Party en Angleterre et au Pays de Galles)
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Le gouvernement Syriza défie l'austérité européenne
Trois semaines après les élections du 25 janvier, 81,3% des Grecs donnaient une appréciation positive ou très positive de l’activité du nouveau gouvernement. À la mi-février, un sondage réalisé par la chaine Alpha TV estimait que SYRIZA pouvait compter sur 45% des voix (contre 36% le 25 janvier). Ces chiffres sont aussi impressionnants qu’inaccessibles aux autres gouvernements, même en rêve. Le contraste entre le gouvernement SYRIZA et les autres est saisissant, il ne peut que susciter l’intérêt et l’enthousiasme. Au lendemain des élections déjà, une vaste opération était lancée pour forcer le gouvernement grec à finir sur les genoux. Toute possibilité de compromis a rapidement été éliminée, les seules options sur la table étaient de se soumettre à la Troïka (Banque centrale européenne, Union européenne, Fonds monétaire international) ou d’emprunter une voie alternative, celle du socialisme.Dossier de Bart Vandersteene
Qu’un gouvernement populaire instaure une alternative à l’austérité représente certainement le pire cauchemar de l’establishment capitaliste européen. Pour ce dernier, le gouvernement SYRIZA doit échouer. Dans cet objectif, tous les moyens possibles et imaginables seront utilisés. La Grèce a besoin de ressources pour son secteur financier toujours malade et afin de refinancer sa dette souveraine. Les ministres des finances européens, la BCE et le FMI tiennent leur couteau sous la gorge du gouvernement grec. Ce qu’ils réclament n’est rien de moins qu’une capitulation totale. Ils ne veulent pas seulement des concessions, ils exigent que les dictats de la Troïka qui figurent dans les deux memoranda (qui regroupent les conditions nécessaires à l’obtention de ‘‘l’aide’’ européenne par la Grèce) soient scrupuleusement respectés par le nouveau gouvernement. Cela signifie plus de privatisations et plus de coupes budgétaires dans les services publics et la sécurité sociale, très exactement les recettes qui ont plongé la Grèce dans un drame social aussi profond.
‘‘La folie, c’est se comporter de la même manière et s’attendre à un résultat différent’’, selon la définition d’Albert Einstein. Pour de nombreux commentateurs, la politique européenne de ces dernières années peut donc être qualifiée de furieusement cinglée. ‘‘Ma préférence serait accordée à la cessation complète des politiques qui ont échoué ces cinq dernières années’’(1) a écrit l’économiste Münchau dans le Financial Times. Les dirigeants européens sont-ils fous ou représentent-ils avant tout un système absurde? La première éventualité nécessite de choisir des politiciens moins déséquilibrés. La seconde représente à première vue un cas plus difficile, car il contraint à élaborer une stratégie destinée à balancer le capitalisme dans les poubelles de l’Histoire.
Un gouvernement SYRIZA en conséquence des luttes
Ce gouvernement et ses pratiques ne tombent pas du ciel. Ils sont nés de la plus profonde crise qui ait affecté un pays d’Europe occidentale depuis les années ’30 et de l’héroïque résistance de la population contre les programmes d’austérité dramatiques imposés par l’establishment politique et économique grec et européen.
Pendant longtemps, les travailleurs et les jeunes ont placé leurs espoirs dans le parti social-démocrate le plus à gauche en Europe, le PASOK. Entre 1981 et 2009, ce parti de masse a systématiquement su s’attirer entre 38 et 48% des voix. Alors qu’en 2009, il récoltait encore 43,9%, six ans plus tard, seuls 4,7% des électeurs lui accordaient toujours leur confiance… Quand il a été clair que le PASOK défendait les intérêts des 1% les plus riches comme jamais à ce point auparavant, la sanction fut terrible. Les masses ont alors scruté l’horizon à la recherche d’une alternative. Si SYRIZA a su se faire remarquer, ce fut grâce à son attitude ferme et cohérente à l’égard de l’austérité. Le parti de gauche radicale a traduit sa volonté dans l’idée simple que la Grèce avait besoin de politiciens osant dire NON aux dictats de la Troïka et qu’un gouvernement de gauche serait en mesure de représenter les aspirations des Grecs ordinaires. En défendant ce message, SYRIZA est passé de 4,6% en 2009 à 16,8% en mai 2012, puis à 26,9% en juin 2012, à 36,3% en janvier 2015 et, selon les sondages, à 45% environ aujourd’hui.
Ce gouvernement bénéficie également, du moins provisoirement, du soutien d’une couche de Grecs qui n’ont pas voté SYRIZA mais qui estiment que le parti fait tout pour tenir ses promesses électorales.
C’est très différent de ce que les Grecs et nous-mêmes avons vécus… Ces engagements sont d’ailleurs impressionnants :
– Il a promis de rompre avec la tradition de cupidité : les ministres voyagent en classe économique, ont revendu la couteuse flotte de véhicule des ministères et ont retiré les barrières Nadar qui encerclaient le parlement pour signifier que cette assemblée-ci n’avait pas à craindre la colère de la population.
– Les grands symboles de lutte ont été récompensés. Les 600 femmes de ménage du ministère des Finances licenciées par le gouvernement précédent ont été réintégrées. Les autorités ont, de plus, expliqués que leur travail devait être plus valorisé, tandis que des ‘‘experts’’ financiers très couteux ont, quant à eux, été renvoyés.
– Après des mois de résistance populaire, le nouveau gouvernement a promis d’enterrer le projet très polluant d’exploitation de mines d’or de la région de Chalkidiki par une multinationale canadienne.
– Les personnes en retard pour rembourser leur prêt hypothécaire ne pourront plus être expulsées de leur maison et l’électricité ne peut plus être coupée.
– Les travailleurs de la chaine radiotélévisée publique ERT, qui se sont battus durant des mois, sortent victorieux du conflit. L’ERT va à nouveau émettre et sera gérée par les structures que les travailleurs ont eux-mêmes construites durant le conflit.
– Le salaire minimum a été restauré à 751 € par mois (les gouvernements précédents l’avaient diminué à 500€). Cela agit bien entendu comme pression à la hausse pour tous les autres salaires.
– Les enfants d’immigrés nés en Grèce recevront la nationalité grecque.
– Des fonctionnaires licenciés peuvent réintégrer leur emploi.Épreuve de force avec l’UE
La date d’expiration du précédent Mémorandum arrivait en vue, le 28 février. Des négociations entre la Grèce et l’Union européenne ont donc eu lieu.
Le nouveau ministre grec des Finances Yanis Varoufakis n’a pas vraiment pu compter sur des alliés lors des réunions avec les ministres des Finances européens. La Belgique, par la voix du ministre Van Overtveldt (N-VA), a rejoint la ligue des inflexibles pour qui il était hors de question de quitter la table sans une reddition grecque. L’Allemagne, la Finlande, les Pays-Bas et l’Autriche figuraient aussi dans ce groupe, au côté des pays baltes, de la Slovaquie et, plus étonnant, du Portugal, de l’Espagne, de l’Irlande,… Ces trois derniers pays se sont exprimés de manière particulièrement féroce contre tout compromis avec la Grèce. Pour ces gouvernements, qui ont eux aussi été sous la coupe de la Troïka, une victoire de la Grèce pour mettre fin à l’austérité serait dramatique. Une telle situation leur rendrait impossible de continuer à se cacher derrière l’adage selon lequel ‘‘il n’y a pas d’alternative’’ précisément au moment où des formations anti-austérité se développent dans leurs pays respectifs, avec Podemos en Espagne et l’Alliance Anti-Austérité en Irlande.
Toute la question était de savoir dans quelle mesure ils parviendraient à forcer SYRIZA à faire des concessions. Depuis les élections de 2012, SYRIZA a déjà mis beaucoup d’eau dans son vin, il y avait donc suffisamment de raisons de croire que sa direction serait sensible à la pression et ouverte aux négociations. La menace de mettre à sec le gouvernement grec et les banques mais aussi l’absence de plan ‘‘B’’ pour SYRIZA a déjà conduit à pas mal de concessions.
La Grèce a obtenu une prolongation de quatre mois de son programme de soutien. Mais en retour, son gouvernement a promis ‘‘de ne pas revenir sur les mesures des gouvernements précédents et de ne pas introduire de changements unilatéraux aux politiques et réformes structurelles qui auraient un impact négatif sur les objectifs budgétaires, la reprise économique et la stabilité financière, tels que déterminé par les ‘institutions’ [nouveau nom de la Troïka, ce terme étant trop compromis en Grèce]”.
Le gouvernement de SYRIZA s’est de la sorte acheté un certain répit, mais il reste pieds et poings liés à un accord lui interdisant de réaliser une seule de ses nombreuses promesses électorales fondamentales. La Troïka continue de détenir tout le pouvoir entre ses mains.Un affrontement sur les défaillances de l’austérité européenne
Les 18 autres ministres des Finances de la zone euro avaient pour objectif de maintenir la Grèce dans le carcan de l’austérité.
Mais l’autorité de cette politique est mise sous pression, car elle se traduit par une période prolongée de très faible croissance, ce qui nécessite, à son tour, encore plus d’austérité. Il est frappant de voir comment les plus grands défenseurs du capitalisme mettent ainsi en garde les dirigeants politiques et économiques contre les conséquences de leurs actes. The Economist les a avertis que si Angela Merkel ‘‘continue à contrecarrer tous les efforts qui peuvent conduire à relancer l’économie et à éliminer la déflation, l’Europe sera condamnée à une décennie perdue qui sera encore plus débilitante que celle du Japon dans les années ‘90.’’ The Economist craint que cela ne provoque ‘‘une réaction populiste plus menaçante à travers l’Europe. Cela pourrait menacer la survie de l’euro et l’Allemagne en serait le plus grand perdant.’’(2)
Même au récent Forum Économique Mondial de Davos, les discussions ont porté sur le thème ‘‘Comment sauver le capitalisme des capitalistes’’. Le ministre grec des Finances Varoufakis appartient à la catégorie d’économistes désireux de prioritairement sauver la croissance du capitalisme en repoussant les recettes néolibérales désastreuses. Un de ses collègues économistes travaillant pour le journal radicalement pro-capitaliste Financial Times lui a parlé en ces termes : ‘‘Mon conseil à Yanis Varoufakis serait d’ignorer les regards irrités et les menaces voilées et de tenir bon. Il est issu du premier gouvernement de la zone euro disposant d’un mandat démocratique pour se révolter contre un régime totalement dysfonctionnel qui a prouvé qu’il était économiquement inefficace et politiquement intenable. Si la zone euro veut survivre dans le système actuel, alors ce régime doit s’en aller.” (3)
La direction politique actuelle de l’Union européenne ignore ce conseil. Elle s’accroche à la logique d’un capitalisme européen concurrentiel débarrassé des certitudes du passé : un emploi stable avec un revenu décent, une bonne sécurité sociale et des services publics. Selon elle, pour être capable de survivre face à la concurrence dans ce monde capitaliste globalisé, le taux de profit doit impérativement augmenter et les salaires doivent donc baisser. Afin de poursuivre la diminution continuelle des impôts sur les ‘entrepreneurs’, l’État doit être réduit à sa portion ‘adéquate’ et la dette publique doit être éliminée. L’Union Européenne et l’Union monétaire fournissent pour les capitalistes européens l’outil idéal pour créer une spirale négative de concurrence interne.
Il n’est toutefois pas exclu que, sous la pression des mouvements de masse, l’Union soit obligée de changer son fusil d’épaule. Le succès du mouvement en Grèce et l’inspiration que cela entrainerait internationalement pourraient énormément accélérer le processus. Mais vers où? Si la règlementation concernant le déficit budgétaire devenait plus lâche et si les réformes néolibérales pouvaient être introduites plus tardivement, l’État pourrait à nouveau investir. Cela atténuerait certainement les souffrances actuelles de la population, sans pour autant offrir de solution fondamentale. L’impulsion que recevrait l’économie avec une baisse moins rapide du pouvoir d’achat de la population et des investissements de la part des autorités se verrait contrariée par la chute des investissements des capitalistes puisque le retour sur investissement ne se verrait pas amélioré. Il n’est pas possible de sortir de cette crise en restant enserré dans le carcan du capitalisme.
SYRIZA tente-t-il de concilier l’eau et le feu ?
Au cours des négociations avec l’Eurogroupe, Yanis Varoufakis semblait naïvement croire que ses arguments pouvaient l’emporter. La direction de SYRIZA n’était pas préparée au scénario d’une Union européenne inflexible et aucun plan ‘‘B’’ n’était prévu. La population n’était pas préparée à la situation telle qu’elle se profile.

Xekinima, l’organisation sœur du PSL, milite activement en Grèce pour assurer que le gouvernement SYRIZA tienne bon et ne cède pas au chantage de l’establishment européen. Durant ‘‘Socialisme 2015’’ Nikos Kannelis (conseiller communal de Xekinima à Volos, élu sur une liste SYRIZA) nous donnera plus d’informations sur les développements cruciaux qui prennent place en Grèce et sur l’approche des marxistes révolutionnaires. Durant sa campagne électorale, SYRIZA n’a pas abordé la thématique de la sortie de l’euro. Pour une grande majorité des Grecs, ce n’était pas une option à considérer jusqu’à tout récemment. Une bonne partie des Grecs estime spontanément que quitter l’Union monétaire, en restant sous le capitalisme, ne représenterait pas un pas en avant, voir même plutôt le contraire. L’establishment capitaliste européen sait pertinemment que la direction de SYRIZA n’a pas d’autre scénario en tête que celui de rester au sein de l’eurozone. Elle est par conséquent soumise à une énorme pression et reste sensible au chantage exercé sur elle.
Les ambitions de ce gouvernement, répondre aux aspirations sociales et non aux dictats des banques, entrent en complète contradiction avec la législation et les visées de la zone euro. La direction de SYRIZA doit donc préparer la base du parti et la population à l’éventualité d’un Grexit (une sortie de la Grèce hors de l’eurozone) si le gouvernement grec reste fidèle aux principes qui l’ont conduit au pouvoir.
Qu’importe que la Grèce se trouve en dehors ou au sein de l’Union européenne, la situation ne sera pas fondamentalement améliorée tant que les lois du libre marché et du capitalisme seront en vigueur. Sur base capitaliste, l’économie et les investissements ne peuvent positivement se développer qu’en générant des profits suffisants pour les 1% les plus riches. Cela est incompatible avec le programme de SYRIZA et avec les besoins des 99%.
Le gouvernement doit préparer la population à une confrontation directe et lui soumettre une stratégie capable d’arracher la victoire. Oui, il faut négocier et tester les limites de ce qu’il est possible de faire dans le cadre des relations de forces actuelles au sein de l’Union européenne. Mais il faut parallèlement développer le mouvement social ainsi que son auto-organisation en Grèce de même qu’à l’étranger en s’engageant à répondre par une riposte sérieuse à chaque menace de mettre la population au pain sec et à l’eau. En réponse à la fuite des capitaux, il faut instituer un contrôle des capitaux. La collectivité a suffisamment payé pour sauver le secteur financier, autant qu’il soit placé sous contrôle et gestion publics. Voilà qui balayerait tout chantage financier en dégageant les moyens pour un vaste programme d’investissements publics. La menace des 1% de délocaliser les entreprises ou d’arrêter tout investissement afin de créer un cimetière social peut être coupée court par l’expropriation. Les secteurs clés de l’économie doivent être démocratiquement nationalisés avec pour objectif que la création des richesses soit utile à la majorité sociale et non pas consacrée à la maximisation des profits d’une infime minorité. Un tel programme offensif – traduit aux bons moments en slogans directs et en propositions concrètes – pourrait convaincre la majorité des Grecs d’emprunter la voie du socialisme et de préparer le terrain pour une Europe de la solidarité.
À qui la faute?
Un récent éditorial du Financial Times suggérait que la dette publique grecque réduisait le pays quasiment au rang d’esclave. ‘‘Pour être en mesure de rembourser ses dettes, la Grèce devrait fonctionner quasiment comme une économie esclave qui devra atteindre des années durant un excédent budgétaire primaire de 5% du PIB uniquement aux bénéfices de ses créanciers étrangers.’’ (4)
La dette grecque est effectivement tel un roc pendu au cou de la population qui en supporte collectivement la charge. Cela est largement dû au casino financier mondial. L’un des endroits les plus lucratifs a longtemps été la Grèce. Les banques étrangères y ont engrangé de gigantesques gains spéculatifs année après année, tandis que les dettes ont été renvoyées à la population. Une autre portion de cette dette publique résulte du clientélisme instauré par l’élite politique et économique afin de graisser le système lui permettant de s’enrichir. L’exemple des Jeux olympiques organisés à Athènes en 2004 est particulièrement illustratif : les juteux contrats conclus entre les politiciens et leurs amis entrepreneurs ont finalement centuplé le montant initialement prévu pour l’organisation de l’évènement (11,5 milliards d’euros au lieu de 123 millions).De l’argent accordé à la Grèce par la Troïka, seuls 11% ont été utilisés pour soutenir les finances de l’État alors que la véritable crise humanitaire qui a lieu dans le pays a considérablement accru les besoins sociaux et que pendant ce temps, les 0,1% les plus riches n’ont pratiquement pas payé d’impôts. Le reste de l’argent prêté par la Troïka a totalement disparu dans le remboursement des dettes de jeu des requins du secteur financier international.
La revendication de l’annulation de la dette publique doit être liée à celle de faire payer les véritables responsables. Grâce à la confiscation des profits spéculatifs, à l’imposition des fortunes et à la collectivisation du secteur financier, la société pourra récupérer ce qui lui a été volé. Ces exigences sont nécessaires pour répondre à la propagande qui vise à diviser les peuples d’Europe à l’instar de cette idée selon laquelle chaque Belge devrait payer les dettes des Grecs. Organisons la solidarité internationale avec leur lutte ! Une victoire remportée en Grèce renforcerait la lutte contre nos propres autorités austéritaires.
Pour plus d’infos et d’analyses : Rubrique “Grèce” de ce site
Notes
1. Wolfgang Münchau; FT; 15 février 2015 Athènes doit tenir ferme contre l’échec des politiques de la zone euro
2. The Economist, 31 janvier 2015, ‘‘ Go on, Angela, Make My Day’’
3. Wolfgang Münchau; FT; 15 février 2015 Athènes doit tenir ferme contre l’échec des politiques de la zone euro
4. Financial Times; 26 janvier 2015; La victoire électorale de SYRIZA est une chance de parvenir à un accord -
Podemos, le Syriza espagnol ?
L’élection d’un gouvernement dominé par Syriza en Grèce a encouragé les forces de gauche anti-austérité à travers toute cette Europe ravagée par la crise, et même bien au-delà. Mais ce n’est nulle part plus le cas qu’en Espagne, là où Podemos, une force considérée comme le « Syriza espagnol », prend de plus en plus d’ampleur.Par Danny Byrne, Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO)
Les sondages mettent régulièrement Podemos en première ou deuxième position avec plus de 20% de soutien, menaçant la survie du système bipartite espagnol construit autour du Parti Populaire et du PSOE. Plus de 100.000 personnes ont encore tout récemment participé à la « marche pour le changement » qui a eu lieu à Madrid à l’appel de Podemos le 31 janvier dernier. L’année 2015 verra de nombreuses élections dans l’Etat Espagnol et Podemos sera à n’en pas douter une force avec laquelle il faudra compter.
Podemos prévoit que son score va inexorablement augmenter dans ces élections jusqu’au point culminant de la prise du pouvoir. Même si la possibilité d’une majorité absolue paraît très mince, du moins à ce stade, les deux principaux partis capitalistes espagnols – le PP conservateur et le PSOE ex-social démocrate – pourraient être forcés de former une « grande coalition » destinée à freiner l’avance de Podemos. Une telle manœuvre ne ferait qu’accélérer la spirale mortelle de ces deux partis, tout particulièrement concernant le PSOE.
A l’instar de Syriza, Podemos a frappé les esprits de millions de personnes qui l’ont considéré comme un outil potentiel pour en finir avec le cauchemar de l’austérité en Espagne et réclamer une vie digne après des années de déchéance. Podemos pourra-t-il tenir ses promesses et satisfaire ces aspirations ?
Podemos était au devant de la scène lors du rassemblement de clôture de la campagne de Syriza, son dirigeant Pablo Iglesias rejoignant Alexis Tsipras dans son discours final aux cris de « Syriza, Podemos, Venceremos » (« nous allons gagner » en espagnol). Cependant, alors que Syriza provient d’une alliance de groupes de gauche, Podemos a émergé en tant que nouveau mouvement, séparé des partis de gauche traditionnels.
A bien des égards, le succès de Podemos est un produit de l’échec des organisations traditionnelles de la gauche et du mouvement des travailleurs. Alors qu’une nouvelle période de lutte des classes intense et de changement radical survenait, les directions de ces organisations – en particulier Izquierda Unida (Izquierda Unida, IU) – ont continué les vieilles politiques de collaboration et d’accords avec le système et les partis du patronat. Ainsi, pour les millions de personnes en lutte contre l’austérité (en particulier ceux qui viennent du mouvement d’occupations Indignados), la gauche traditionnelle et les syndicats paraissent plus comme étant une partie du système que comme une force qui mène la lutte contre celui-ci.
Podemos est apparu comme une alternative avec un programme de gauche anti-austerité et un programme pour annuler la dette illégitime. Il a employé beaucoup de la phraséologie et des revendications des Indignados et d’autres mouvements sociaux et ne traîne pas la casserole d’avoir géré le système dans le passé, ce qui le rend attractif pour la nouvelle génération.
« Le peuple »
Centré autour de Pablo Iglesias et d’autres universitaires de gauche, Podemos a insisté sur l’existence de « la casta » – une caste politique corrompue de politiciens capitalistes. Cela a exploité le sentiment massif de rejet du capitalisme, exprimé par les Indignados dans un sentiment anti-parti. Podemos déclare représenter l’entrée « du peuple » dans la politique, par-dessus la tête des politiciens discrédités.
Ses dirigeants ont mis Podemos en avant non pas comme un parti dans le sens traditionnel du terme, mais comme un « espace participatif » par lequel le peuple d’Espagne peut faire entendre sa voix politique dans son ensemble. Son fondement organisationnel n’est pas un réseau de sections ou de comités de la base, mais des « assemblées citoyennes » ouvertes à tous les citoyens espagnols. La direction de Podemos est élue par des primaires sur internet. Plus tard, des votes seront organisés concernant les questions politiques importantes sur base de consultations en ligne. Plus de 300.000 personnes se sont inscrites pour y participer.
D’après ses dirigeants, cela signifie que « Podemos est le peuple ». Certaines contradictions sont toutefois présentes. N’y a-t-il pas une partie du peuple qui, plutôt que de vouloir en finir avec l’austérité, veut au contraire la défendre ? Il y a assurément des gens qui en bénéficient, comme les grands banquiers et les actionnaires à qui l’odieuse dette publique est payée, et qui font aprtie du « peuple ». Il est crucial pour le mouvement anti-austérité de comprendre que le peuple qui a besoin d’une voix politique, ce sont les travailleurs, les chômeurs, les jeunes, les pensionnés, etc. En d’autres termes, la classe des travailleurs prise au sens large, dont les intérêts vont à l’encontre de ceux d’un autre « peuple » : la classe capitaliste.
Pour les révolutionnaires socialistes, impliquer la classe des travailleurs dans la politique signifie de les rendre actifs au sein de structures démocratiques qui permettent la discussion, le débat et la prise de décision collectifs concernant la politique et la stratégie du mouvement. Cela signifie bien plus qu’un simple clic occasionnel dans une élection ou un référendum en ligne.
Podemos a des centaines de « cercles », ou sections, dans tout le pays, mais elles ont un rôle symbolique en ce qui concerne son fonctionnement. L’absence de cercles de masse dans les quartiers et les lieux de travail pour servir de briques à la construction de Podemos signifie qu’en pratique, il fonctionne vraiment du haut vers le bas. Podemos a une direction très restreinte – autour du secrétaire général Iglesias – qui décide de tout.
Démocratie ?
Cette manière de fonctionner, tout en se parant de phraséologie démocratique, assigne à la masse du peuple un rôle passif. Il s’agit d’un obstacle à la construction d’une force politique véritablement démocratique et massive pour la classe des travailleurs espagnole.
Des dizaines de milliers de personnes sont sorties en rue pour « la marche pour le changement » pour finalement être simplement renvoyées chez elles après qu’on leur ait dit de voter pour Podemos quand le temps serait venu ! Une telle mobilisation aurait dû servir de point de départ pour un mouvement de masse durable de manifestations et de grèves destiné à renverser le gouvernement et à mettre fin à l’austérité. Une potentielle victoire électorale ne représente qu’un épisode de ce processus.
La question est loin d’être académique étant donné les affrontements avec le big business et la Troika que provoqueraient l’adoption de mesures anti-austérité (comme cela s’est vu en Grèce). Tout gouvernement de gauche ne peut appliquer que les politiques qu’il est capable de défendre dans la rue et sur les lieux de travail. La mobilisation et l’auto-organisation de la classe des travailleurs est une préparation précieuse pour une telle éventualité.
Les dirigeants de Podemos, reflétant d’une certaine façon ceux de Syriza, ont également viré vers la droite à mesure que leur soutien montait. Le programme initial de Podemos était un programme radical de gauche, qui promettait un revenu décent universel pour tous, le droit au logement et la nationalisation des secteurs stratégiques de l’économie. Cependant, au cours de ces derniers mois, les dirigeants ont modéré leur rhétorique, laissant tomber des promesses-clé comme la retraite à 60 ans et le non-paiement de la dette au nom du « réalisme » et du « contexte » international qui rend ces projets impossibles.
Il est vrai qu’il existe un « contexte » qui agit contre les mesures nécessaires pour en finir avec la misère des travailleurs. Ce contexte, c’est celui de la domination continue des multinationales et des banquiers. Les marchés et les institutions (nationales comme européennes) vont agir contre tout gouvernement qui essaie de gouverner en faveur du peuple. Cependant, au lieu d’accepter cela et d’adapter son programme à ce qui est possible dans ce cadre, les mouvements de masse de la classe des travailleurs contre l’austérité ont besoin de lutter pour transformer ce contexte et briser ce cadre !
Des politiques socialistes
Seule l’organisation et la mobilisation de la classe des travailleurs et l’arrivée d’un gouvernement de gauche armé d’une politique révolutionnaire socialiste visant à remplacer la dictature des marchés par une démocratie des travailleurs basée sur la propriété publique démocratique des richesses peut faire face à cette tâche. Un tel gouvernement se lierait à la classe ouvrière de Grèce, d’Irlande, du Portugal et de toute l’Europe pour construire une fédération socialiste sur les cendres de UE capitaliste.
Socialisme Revolucionario, l’organisation sœur du Parti Socialiste de Lutte dans l’Etat espagnol, lutte pour organiser un pôle révolutionnaire de la gauche, des travailleurs et des mouvements sociaux en défense d’une telle stratégie.
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Liège : Une centaine de personnes assistent à notre meeting consacré à Syriza
Ce 5 février, une centaine de personnes ont participé à Liège au meeting organisé par le Parti Socialiste de Lutte (PSL) et les Etudiants de Gauche Actifs (EGA) au sujet de la victoire de Syriza en Grèce et des leçons à tirer pour la lutte anti-austérité en Europe.
Nous avons eu le plaisir d'accueillir pour l'occasion Maria Panagi, membre du secrétariat de Syriza Belgique. Il était initialement question d'écouter le député européen Georges Katrougalo, mais ce dernier est devenu ministre du gouvernement d'Alexis Tsipras…
A ses côtés se trouvait Bart Vandersteene, porte-parole national du PSL, qui s'est récemment rendu en Grèce, dans le cadre de la campagne électorale, auprès des camarades grecs du PSL, Xekinima.
De nombreuses questions sont venues de la salle au sujet de la dette publique, de la relation du nouveau gouvernement avec les masses, de la signification de cette victoire électorale pour le reste de l'Europe et tout particulièrement l'Espagne,… Il a aussi été question des parallèles entre la nouvelle situation en Grèce et l'Amérique latine du début des années 2000, notamment avec le Venezuela de Chavez.
Nous aurons encore d'autres occasion d'approfondir ces questions !
Photos : Jean-Claude et Loïc
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Grèce : pourquoi Syriza et le KKE ne sont pas parvenus à un accord ?
Seules des politiques socialistes peuvent mettre fin au cauchemar austéritaire !
Article de Xekhinima (section grecque du Comité pour une Internationale Ouvrière et parti-frère du PSL)
SYRIZA a formé un gouvernement de coalition avec le parti des Grecs Indépendants, un parti qui a émergé en tant que scission du parti de droite Nouvelle Démocratie. C’est un parti fidèle au système capitaliste, pénétré de la logique du capital et des «forces du marché». Que SYRIZA coopère avec un tel parti signifie bien sûr de s’engager sur une pente glissante et dangereuse.
SYRIZA s’est orienté sur cette voie après avoir contacté le KKE (Parti communiste grec) pour discuter de la possibilité de former un gouvernement de coalition de gauche. Le KKE a refusé toute collaboration avec SYRIZA, refusant jusqu’à donner un vote de confiance à un gouvernement SYRIZA. Cette position – le refus du KKE de tout type de collaboration ou vote de confiance pour un gouvernement dirigé par SYRIZA – a été publiquement répétée à plusieurs reprises au cours de la campagne électorale par les dirigeants du KKE. Il se dit également, au sein de SYRIZA, qu’Alexis Tsipras a téléphoné au secrétaire général du KKE, Koutsoumbas, la nuit même des résultats électoraux, mais que ce dernier a refusé de rencontrer Tsipras.
Pourquoi le KKE a-t-il refusé?
Le KKE justifie ce refus sur base de «différences idéologiques et politiques». Mais pourquoi avoir refusé d’accepter de travailler avec SYRIZA sous certaines conditions? Pourquoi le KKE n’a-t-il pas fait part d’une série de conditions minimales nécessaires à rendre une coopération ou un vote de confiance possible, c’est-à-dire une série de mesures dans l’intérêt de la classe ouvrière et de la masse du peuple grec et contre le pouvoir du grand capital?
Le KKE aurait pu accorder un vote de confiance au gouvernement SYRIZA sur base de l’application de politiques favorables à la classe des travailleurs tout en affirmant maintenir sa complète indépendance idéologique, politique et organisationnelle en restant en dehors du gouvernement. La direction de SYRIZA n’aurait ainsi eu aucune possibilité de justifier de se tourner vers les populistes de droite des Grecs Indépendants. Le KKE aurait ainsi également pu atteindre la base de gauche de SYRIZA et les millions de travailleurs qui ont voté pour SYRIZA afin de se débarrasser de la barbarie de la Troïka.
Le ‘fier’ KKE
Les dirigeants du KKE se disent «fiers» d’avoir maintenu leurs forces et même légèrement augmenté leur score électoral par rapport à juin 2012 (de 1%). En réalité, leur soutien a chuté de 3% en dessous de leur résultat des élections de mai 2012 et il est même inférieur à la moitié des votes obtenus en 1981 (environ 11%)!
Est-il possible pour un «parti communiste» qui se définit comme révolutionnaire de si dire heureux et fier d’avoir 5,4% au moment de la crise économique la plus profonde que le pays ait connu et face à une catastrophe sociale aussi massive? Un parti socialiste / communiste révolutionnaire disposant d’une assise importante parmi la classe des travailleurs, comme c’est le cas du KKE, aurait dû, dans ces conditions, «s’envoler» à l’instar des bolcheviks en 1917. Mais au lieu d’essayer de voir ce qui n’allait pas avec leur politique, les dirigeants du KKE se sont déclarés «satisfaits»!
Que signifie la “coopération”?
Le KKE aurait pu proposer à SYRIZA un programme minimum clair et favorable à la classe des travailleurs comme condition préalable à toute coopération : restauration du salaire minimum, des pensions et des relations de travail; investissements massifs dans l’enseignement et les soins de santé; la fin des privatisations; l’abolition du TAIPED (l’organisme chargé de superviser les privatisations imposées par les accords avec la Troïka); la renationalisation de tous les services publics privatisés; la mise sous propriété publique du système bancaire avec contrôle et gestion des travailleurs; etc. (certaines de ces mesures ont effectivement commencé à être appliquées par le gouvernement SYRIZA).

Bart Vandersteene prendra la parole à Liège ce 5 février au côté d’un représentant de SYRIZA au Parlement européen. Ce débat prendra place à l’ULG, Place du XX Août, à 19h à la salle Wittert. Parallèlement à cet accord minimal, le KKE aurait pu ouvertement et librement expliquer ses désaccords avec SYRIZA, sur l’intention de ce dernier de rester au sein de la zone euro par exemple, sur le fait que SYRIZA ne s’oriente pas vers l’annulation totale de la dette, etc.
Qui aurait à gagner d’une telle prise de position? Si la direction de SYRIZA avait refusé d’accepter l’offre du KKE, sa direction aurait été ouvertement exposée et le KKE aurait pu lancer un appel aux travailleurs et à la base de SYRIZA. Si la direction de SYRIZA avait accepté cet accord avec le KKE, l’attraction du KKE aurait été encore plus grande parmi la masse des travailleurs et la base de SYRIZA puisque la classe ouvrière aurait grandement gagné d’une politique plus à gauche. La plupart des travailleurs se seraient identifiés aux politiques impulsées sous la pression du KKE.
La direction du KKE se décrit comme étant les défenseurs de la révolution en Grèce, mais l’essence du succès des «politiques révolutionnaires» est d’être capable de convaincre les masses de la nécessité de politiques socialistes révolutionnaires, pas de s’isoler d’elles par sectarisme au nom de la «pureté idéologique».
Un gouvernement instable avec les Grecs Indépendants
Agissant de façon «intelligente», la direction de SYRIZA a appelé le KKE à coopérer et, lorsque celui-ci a refusé, elle est entrée en collaboration avec les Grecs Indépendants. À ce stade, de nombreux Grecs considèrent cette option comme la seule qui restait à disposition de SYRIZA et estiment que les dirigeants du KKE ont contribué à l’arrivée de ce résultat.
Malgré cela, dans les rangs de SYRIZA mais aussi chez de nombreux travailleurs, il est clair que ce gouvernement sera instable. Au début, les Grecs Indépendants seront probablement d’accord sur l’instauration d’un certain nombre de politiques populaires et de mesures d’urgence – le gouvernement de coalition est déjà en train d’instaurer une série de réformes favorablement accueillies par les masses – mais les différences centrales émergeront tôt ou tard concernant le caractère fondamental de l’économie capitaliste et les intérêts de l’élite capitaliste. Les conflits apparaîtront au sujet de politiques qui frapperont les riches ou les profits des entreprises et des multinationales, sans encore parler des nationalisations et du contrôle social que les travailleurs doivent exercer.
Ce ne sont pas des questions abstraites ou académiques! Sans ces mesures, l’économie ne sortira pas de la crise à l’avantage des travailleurs. Sans reprise économique, la crise ne pourra pas être vaincue, ce qui conduira à plus d’agitation sociale et politique. Cela se réflétera au sein du gouvernement de coalition, y causant une crise profonde.
Face à la crise
La base de SYRIZA doit se préparer à une crise avec les Grecs Indépendants. Il n’y a qu’une seule façon d’y faire face : mener la lutte au sein de SYRIZA, avec la gauche et les travailleurs qui se situent à l’extérieur du parti, afin que SYRIZA adopte un programme audacieux qui défendra sérieusement les intérêts de la classe ouvrière et des couches moyennes qui sont écrasées par les politiques de la troïka. Fondamentalement, cela signifie d’adopter un programme de rupture anticapitaliste socialiste, ce que la direction de SYRIZA a clairement démontré ne pas vouloir faire sans y être contraints par la pression de la gauche du parti et de la société.
Si et quand les Grecs Indépendants feront mine de refuser de soutenir des mesures gouvernementales qui s’en prendront aux intérêts de la classe dirigeante, SYRIZA devrait se montrer prêt à aller vers un mandat populaire et à appeler à des élections anticipées. Les masses grecques comprendront que les Grecs Indépendants sont un obstacle à la mise en oeuvre de politiques favorables à leurs intérêts. SYRIZA pourrait donc accroître son soutien électoral pour un gouvernement majoritaire en défendant un programme anti-austérité socialiste. La direction de SYRIZA en a-t-elle envie ? Il ne fait aucun doute que c’est pourtant la volonté de la base de SYRIZA et des masses en général. Mais c’est loin d’être clair aux yeux de la direction.
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[INTERVIEW] Grèce : Arrivée de SYRIZA au pouvoir et effondrement des vieux partis
Les partis de gauche ont échoué à constituer un gouvernement – SYRIZA entre en coalition avec le parti populiste de droite des Grecs Indépendants
Interview d’Andros Payiatsos, membre de Xekinima (section grecque du Comité pour une Internationale Ouvrière et parti-frère du PSL), par Niall Mulholland, socialistworld.net.
Quelle importance revêt le résultat des élections grecques?
Ce résultat peut être décrit comme étant historique. Il représente l’effondrement des anciennes forces politiques qui ont régné en maître sur la scène politique grecque des décennies durant et également l’émergence d’une nouvelle formation de gauche, Syriza, qui est parvenue à grimper de 4 à 5% en 2010 pour atteindre les 36,5% de ce 25 janvier sur base d’un programme de gauche favorable à la classe des travailleurs. Il est, de plus, à remarquer que cette performance a su être obtenue en dépit de la campagne d’intimidation massive lancée en Grèce par la classe dirigeante selon laquelle une victoire de Syriza serait synonyme de l’effondrement du pays, de la sortie de l’euro, etc. Malgré tout, cela n’a eu aucun effet, ou alors très limité, sur les masses qui ont voté pour Syriza, particulièrement dans les zones ouvrières des grandes villes, et Syriza a été proche de remporter une majorité absolue.
Le Pasok (le parti traditionnel de la social-démocratie) a vu son soutien électoral réduit à un peu plus de 5%, soit quasiment un tiers du résultat obtenu lors de sa fondation en 1974. Le parti a même été dépassé par le parti néonazi Aube Dorée. Le Pasok a récemment connu une scission orchestrée par Papandreou (l’ex Premier ministre du Pasok) qui a lancé un nouveau parti dans le but de se distancier de l’effondrement du Pasok. Ce nouveau parti, le Mouvement pour le Socialisme Démocratique, n’a toutefois pas été en mesure de faire son entrée au Parlement en ne récoltant que 2,5% des voix alors que le seuil électoral est de 3%.
On trouve dans le pays des éléments d’effondrement social et d’appauvrissement massif. La Grèce a connu un effondrement économique global de 27% de son Produit Intérieur Brut soit, en considérant les choses du point de vue économique uniquement, pire encore que durant l’occupation nazie pendant la Seconde Guerre mondiale. On y trouve une pauvreté de masse : les estimations officielles font état de 6,3 millions de personnes sous ou autour du seuil de pauvreté sur une population de 11 millions, ce seuil de pauvreté étant fixé à 450 euros par mois seulement. Le taux de chômage s’élève à 26-27% tandis qu’il se situe autour des 55% pour la jeunesse. Environ 100.000 jeunes ont quitté le pays à la recherche d’un meilleur avenir. Voilà les conditions dans lesquelles le nouveau gouvernement est appelé à trouver des solutions.
Hier, Syriza a annoncé constituer une coalition avec le parti des Grecs Indépendants. Pourquoi Syriza n’a-t-il pas été en mesure de parvenir à un accord avec le Parti communiste grec (KKE)?
Syriza a fait appel au Parti communiste grec (KKE) afin de former un gouvernement réunissant les partis de gauche, mais le KKE a refusé. Il s’agit d’une réflexion du sectarisme général du Parti communiste pour qui le fait qu’il existe des différences idéologiques et politiques suffit à refuser toute forme de collaboration avec toute force de gauche en Grèce. Cette politique est générale et n’est pas spécifique à Syriza. Le KKE a même affirmé qu’il refuserait d’accorder un vote de confiance à un gouvernement Syriza. Ce parti se déclare très fier d’avoir augmenté son vote de 1% par rapport aux élections de juin 2012, ce qui représente environ 50.000 votes. C’est ridicule, parce que le KKE a obtenu 5,5% maintenant et 4,5% en 2012, mais il réunissait encore 11% des suffrages en 1981. La société grecque traverse sa crise la plus dévastatrice depuis des décennies et le KKE se dit fier d’avoir reçu 5,5% de soutien électoral : cette approche est scandaleuse!
Cela a donc ouvert la voie à ce que la direction de Syriza puisse entrer en alliance avec les Grecs Indépendants pour former un nouveau gouvernement de coalition. Il est correct de dire qu’une partie de la direction, son aile la plus à droite, a toujours été favorable à l’option d’un gouvernement de coalition avec les Grecs Indépendants, même sans jamais l’avoir publiquement déclaré, afin de les utiliser comme alibi pour éviter la mise en œuvre de politiques socialistes naturellement exigées par la base du parti et par la classe des travailleurs.
Les Grecs Indépendants est un parti né en 2012 d’une scission populiste de la Nouvelle Démocratie (le parti traditionnel de la droite), lorsque Samaras (le précédent premier ministre, membre de la Nouvelle Démocratie) a effectué un saut périlleux en passant d’une position opposée au Mémorandum (protocole d’accord signé en 2010 entre le gouvernement grec et les autorités européennes) à la conclusion d’un nouveau protocole à la première minute où il s’est retrouvé à la tête du gouvernement (le Mémorandum II de mars 2012), et donc en accord avec la troïka afin d’appliquer de sévères mesures d’austérité. [La «troïka» est le terme désignant l’Union européenne, la Banque centrale européenne et le Fonds monétaire international, trois organisations chargées de superviser la mise en place des mesures d’austérité par le gouvernement grec suite aux prêts d’urgence accordés à la Grèce par le FMI et d’autres gouvernements européens à des conditions drastiques, NDT]
Les Grecs Indépendants proviennent à l’origine de la droite du parti. Ils n’ont aucune relation avec la classe des travailleurs ou avec l’application de politiques de gauche. Ils soutiennent la domination des marchés et le système capitaliste. Ils n’appellent pas à la sortie de l’Union européenne ou de la zone euro, mais sont opposés au Mémorandum et à l’austérité. Ils ont un caractère légèrement nationaliste (ils se décrivent comme «patriotiques»). Ils ne s’opposent ni à l’UE, ni à la zone euro, mais ils pourraient être disposés à aller dans cette direction en cas de conflit sérieux avec la Troïka.
Cette force politique ne représente en aucun cas un allié durable dans une coalition avec Syriza. Cela signifie que le nouveau gouvernement de coalition sera instable, car il se base sur des forces qui représentent des camps opposés.
A l’étranger, la réaction de la gauche et des travailleurs face à la victoire de Syriza a été très enthousiaste. Comment les choses se sont-elles passées en Grèce ?
La progression de Syriza a pu compter sur un écho enthousiasme des masses à l’échelle internationale. Elle semble agir comme un catalyseur dans le cadre des formations de gauche et des mouvements sociaux afin qu’ils aillent à la contre-offensive. Le potentiel est présent pour ce faire.
Les choses sont différentes en Grèce. La meilleure façon de décrire la situation pour la masse des travailleurs et des jeunes, c’est qu’ils ont poussé un grand soupir de soulagement à la publication des résultats des élections, sans qu’il n’y ait de sauvage jubilation. Syriza a mis «trop d’eau dans son vin», le parti a trop édulcoré son programme, tout particulièrement dans la période la plus récente. Le «programme» est devenu extrêmement flou et imprécis.
Les travailleurs estiment que les choses ne sauraient être aussi mauvaises qu’avant. Pour eux, très clairement, il faut mettre un terme à ces attaques antisociales barbares lancées par le gouvernement et la troïka. Ils ont donc voté en masse pour Syriza, tout en restant très sceptiques quant à ce que l’avenir apportera. On peut trouver une expression de ce constat dans le fait que les célébrations au centre d’Athènes le soir des élections ont attiré environ 5000 personnes. Ce n’est pas même la moitié des membres de Syriza à Athènes… Les travailleurs sont modérés et certains sont même sceptiques quant à la victoire de Syriza. Reste qu’ils sont très heureux d’avoir punis le Pasok et la Nouvelle Démocratie, les principaux partis pro-troïka.
Aube Dorée a réussi à maintenir son vote en dépit de la répression de l’État, y compris l’emprisonnement de plusieurs de ses dirigeants. Cela doit-il être source de préoccupation pour la gauche ? Aube Dorée pourrait-il utiliser la prochaine période pour essayer de se reconstruire?
Cela est très préoccupant. Tous les partis de masse de gauche tendent à sous-estimer le danger du néofascisme, mais Aube Dorée a démontré disposer d’un noyau dur électoral significatif de centaines de milliers de personnes. C’est maintenant une organisation ouvertement nazie et clairement meurtrière. Malgré cela, Aube Dorée a été en mesure de maintenir un vote similaire à celui de 2012. Cela signifie que le danger du néofascisme reviendra au premier plan à l’avenir, en particulier si un gouvernement dirigé par Syriza échoue. Les travailleurs, les classes moyennes et la gauche doivent être préparés à cela.
Pendant la campagne électorale, Xekinima (section grecque du Comité pour une Internationale Ouvrière) n’a pas été en mesure de conclure un accord avec Syriza concernant la présentation de candidats mais a cependant tout de même mené campagne lors de ces élections. Comment cela s’est-il passé?
Nous avons connu une très bonne campagne, en particulier en tenant compte du fait qu’il n’y avait que 11 jours de campagne en raison des conditions particulières dans lesquelles ces élections ont eu lieu. Elles ont été annoncées tout à coup par le gouvernement sortant, puis Syriza et tous les autres partis ont passé plus de deux semaines à décider des listes de candidats. La direction de Syriza a refusé les candidats que nous avons proposé parce qu’elle savait que nous aurions des députés élus et que cela aurait été un pôle d’opposition de gauche au sein de Syriza et vers l’extérieur.
Néanmoins, la section grecque du Comité pour une Internationale Ouvrière est très bien sortie de ces élections en dépit du refus de Syriza de permettre à nos camarades d’être présents sur ses listes. Ce recul a été rapidement surmonté parce que les camarades de Xekinima ont compris que ce qui était nécessaire pour la société et la classe ouvrière était une victoire pour Syriza. Nous avons mené une campagne très forte en distribuant quasiment 9.000 tracts quotidiennement et en vendant près de 250 journaux de notre organisation chaque jour. Nous sommes entrés en contact avec de nombreuses personnes et nous prévoyons d’organiser des réunions de section ouvertes dans différents quartiers au cours de ces prochaines semaines, car il n’était pas possible de les tenir durant la campagne électorale.
Que pensez-vous qu’il va se passer avec les discussions entre le nouveau gouvernement grec et la troïka et, en particulier, le gouvernement allemand de la chancelière Angela Merkel? Il est estimé que Merkel pourrait adopter une ligne dure et, malgré les souhaits de Tsipras, que cela pourrait conduire à un défaut de paiement de la Grèce. Mais d’autres spéculations affirment que, sous la pression de préserver la zone euro, la Troïka et Merkel vont tenter de renégocier la dette de la Grèce, non pas pour l’annuler, mais pour en rééchelonner le remboursement.
C’est une question cruciale. Il est clair que les deux parties veulent négocier et parvenir à un compromis. La direction de Syriza veut très clairement un compromis. Merkel semble être prête à une sorte de compromis. Le cas échéant, ils savent que cela pourrait provoquer une réaction en chaîne et une crise majeure de la zone euro. Mais la question est de savoir s’il est possible de parvenir à un compromis. Merkel pourrait être prête, je suppose, à accorder quelques concessions. Il pourrait notamment être question de parler d’une prolongation du remboursement de la dette, ce qui signifierait une certaine diminution de cette charge sur budget de l’Etat grec sur base annuelle.
Mais, d’autre part, vis-à-vis des travailleurs, Syriza devra concrétiser au minimum quelques revendications telles que les suivantes: le retour du salaire minimum à son niveau d’avant la crise, accorder des avantages sociaux aux couches complètement opprimées de la société qui ne sont pas en mesure de survivre ou de faire face à leurs besoins quotidiens (nourriture, électricité, etc.),… Ils doivent viser à rétablir les relations de travail qui ont été complètement déréglementé. Ils doivent restaurer la législation du travail, puisque tout a totalement été dérégulé. Ils doivent mettre fin aux conditions de travail d’esclave qui sont devenues pratique courante dans le secteur privé : des travailleurs se voient obligés de travailler jusqu’à 12 heures par jour, sept jours par semaine, sans même avoir de rémunération de leurs heures supplémentaires. Ils doivent se débarrasser des mines d’or en Chalcidique (Halkidiki), au Nord du pays, qui représentent un énorme problème environnemental. Ils doivent réintégrer dans leur emploi les travailleurs de l’ERT, le radiodiffuseur national, etc.
Ces choses, Syriza ne peut pas se permettre de ne pas essayer de les obtenir. Ces revendications sont considérées par la société, par les électeurs et la base de Syriza, comme basiques et immédiates à obtenir! Si Syriza ne fait rien à ce sujet au cours de la première période de son gouvernement, cela se traduira immédiatement par une crise majeure au sein de Syriza. Syriza sera donc forcé de se positionner dans le sens de la réalisation de ces mesures.
Mais ces mesures ont beau être basiques pour résoudre la crise humanitaire qui sévit actuellement en Grèce, elles mettraient en miette le programme appliqué par la troïka au cours de ces quatre dernières années. La question est donc la suivante : la classe dirigeante allemande serait-elle prête à consentir à ce genre de compromis? Le moins que l’on puisse dire, c’est que cela est douteux. Par conséquent, même s’il ne peut y avoir aucune certitude quant à ce que deviendra l’équilibre des forces après ces négociations entre la Grèce et la Troïka, je crois que la question du défaut de paiement reviendra avec force sur la table.
Pour Xekinima, si la Grèce se retrouve en défaut et hors de la zone euro, un gouvernement de gauche devrait immédiatement introduire le contrôle étatique des capitaux et du crédit ainsi que le monopole étatique sur le commerce extérieur, dans le cadre d’un vaste programme de mesures d’urgence qui doit de toute façon être appliqué dès aujourd’hui, avec la nationalisation des banques et des secteurs clés de l’économie, l’introduction du contrôle et de la gestion par les travailleurs, la planification démocratique de l’économie, etc. pour faire face à la crise, protéger les travailleurs et leurs droits et transformer la société selon une orientation socialiste.
Quel sera le rôle de Xekinima dans la période à venir?
La direction de Syriza utilisera les Grecs Indépendants comme alibi pour ne pas appliquer les politiques pro-travailleurs et socialistes pourtant nécessaires. Nous devons exiger l’application d’un programme cohérent et favorable à la classe des travailleurs, même au prix d’une crise gouvernementale et de l’organisation d’élections anticipées. Le rôle principal que nous avons à jouer, de concert avec d’autres forces de gauche est de faire campagne pour l’instauration de politiques socialistes favorables aux travailleurs, en collaboration avec de grandes sections de la base de gauche de Syriza.
Je pense qu’un des effets majeurs de ce gouvernement sur la société, dans un premier temps, sera de fournir un nouveau souffle à la classe ouvrière et aux mouvements sociaux pour passer à la contre-offensive. En d’autres termes, les travailleurs doivent se mobiliser pour exiger de reprendre ce qu’ils ont perdu au cours de ces dernières années. Dans cette situation, le gouvernement Syriza pourrait être poussé vers la gauche et même appliquer des mesures allant bien au-delà de ce que la direction de Syriza prévoit actuellement. Notre tâche essentielle est de faire tout ce qui est en notre possible pour aider à construire et à renforcer le pouvoir et l’action indépendante de la classe des travailleurs. Cela sera déterminé par le caractère de la lutte de classe qui aura cours dans la période qui nous fait face.
La seule solution de sortie de crise réside dans l’application de politiques socialistes et d’un programme socialiste. Tout gouvernement qui refuse de considérer ces mesures finira en crise. Nous appelons par exemple Syriza à répudier la dette publique, à introduire un salaire et une pension de base décents, à investir massivement dans le bien-être, les soins de santé et l’enseignement. Un programme socialiste implique également de placer sous propriété publique les grandes sociétés sous contrôle et gestion démocratiques de la classe ouvrière, dans l’intérêt de la majorité de la population.
La réaction extrêmement positive exprimée dans le monde entier à la nouvelle des résultats de Syriza illustre que la classe des travailleurs grecque dispose de millions d’alliés parmi la classe ouvrière européenne et mondiale. Un programme socialiste appliqué par un gouvernement de gauche susciterait un écho encore plus puissant à travers l’Europe. L’exemple grec frapperait partout les imaginations et poserait les bases de la lutte pour une confédération socialiste européenne, sur base libre et égale.
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Victoire de SYRIZA : réactions "live" d'Athènes
Voici ci-dessous quelques courtes réactions de Grèce de la part de notre camarade le parlementaire irlandais Paul Murphy et de notre porte-parole national Bart Vandersteene. Bart Vandersteene fera une tournée de meeting en Belgique à son retour, en compagnie d’un représentant de Syriza au Parlement européen. Il sera à Liège le 5 février.
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Fireworks in Europe tonight. 1%, your time is coming to an end. pic.twitter.com/gxWB36BTPG — Paul Murphy (@paulmurphyAAA) 25 januari 2015
Slogan sums it up. #Syriza should fight for government of #Left and for similar movements across Europe. pic.twitter.com/n26BMndSVw
— Paul Murphy (@paulmurphyAAA) 25 januari 2015
Thousands are gathering in Athens to hear @atsipras give victory speech #Syriza #ekliges2015 pic.twitter.com/x0nkzQQozL — Bart Vandersteene (@bvandersteene) 25 januari 2015
No chance, closed for good @PASOK campaign tent. #Syriza and anti-austerity voters big winners of the night! pic.twitter.com/168OgLxyYA
— Bart Vandersteene (@bvandersteene) 25 januari 2015

