Tag: Question nationale

  • Des dizaines de milliers de Catalans manifestent à Bruxelles

    Des dizaines de milliers de Catalans s’étaient donné rendez-vous aujourd’hui à Bruxelles. Venus par bus, trains, avions, voitures, caravanes,… ils ont constitué une foule massive qui a une fois de plus démontré l’ampleur de la révolte à l’œuvre en Catalogne. Les médias ont repris le chiffre officiel de la police : 45.000 personnes. Et, c’est vrai, il y en avait du monde… En Belgique, le mouvement catalan est parfois comparé au mouvement flamand. Le soutien verbal de la N-VA à Carles Puigdemont et le fait que ce leader catalan recherche la compagnie des membres de la N-VA y contribuent évidemment. Le mouvement social actuellement en cours Catalogne est toutefois un mouvement de masse qui a largement dépassé la direction exercée par le parti de droite PDeCAT de Puigdemont lors du référendum du 1er octobre et très certainement durant la grève générale du 3 octobre. Nous avons également pu voir à plusieurs reprises le slogan et le logo « Refugees Welcome », ce qui n’est pas exactement l’attitude adoptée par les nationalistes flamands de droite…

    En dépit de la barrière de la langue, nous avons pu constater une grande ouverture pour une approche socialiste et anticapitaliste de la question nationale. Nous avions avec nous 80 exemplaires de du journal « Militant » de notre organisation-sœur catalane, Esquerra Revolucionaria (Gauche Révolutionnaire). Il ne nous a rapidement plus rien resté entre les mains. Des dizaines de badges de contre la répression franquiste ont également été vendus.

    Comme nous l’avons écrit dans le dossier central de l’édition décembre-janvier de Lutte Socialiste : ‘‘En tant que marxistes, nous ne restons pas indifférents à l’oppression nationale, nous soutenons le droit à l’autodétermination jusqu’à, et en incluant, l’indépendance. Cependant, le fait de créer de nouveaux Etats capitalistes – avec leur police, leur armée, leur propre bourgeoisie et plus de frontières – ne résoudra pas les problèmes des travailleurs et de la jeunesse. Pour cette raison, notre programme est celui d’une république socialiste catalane et d’une confédération, sur base libre et volontaire, des républiques socialistes, des peuples et des nations qui constituent actuellement l’Etat espagnol.’’

    Photos de Liesbeth:
    Catalaanse betoging in Brussel // Liesbeth

    Photos de Nico:
    Manifestation de soutien à la révolte des masses en Catalogne

    Photos de Mario:
    Manifestation de soutien à la Catalonie // Mario

  • Catalogne : Plus d’un million de manifestants pour la libération des prisonniers politiques


    Pour la lutte jusqu’à la victoire : une république catalane des travailleurs !

    Le samedi 11 novembre, une mobilisation massive de plus d’un million de personnes s’est étendue sur plus de 3,3 kilomètres de l’avenue Marina à Barcelone. Ils exigeaient la libération des prisonniers politiques. Cette démonstration de force représente un changement qualitatif dans la lutte contre la répression et le gouvernement du PP.

    Déclaration d’EsquerraRevolucionaria (Comité pour une Internationale Ouvrière en Catalogne) 

    Les masses veulent lutter jusqu’au bout

    Des millions de personnes ont compris que l’application de l’article 155 de la Constitution et la suppression de l’autonomie de la Catalogne ainsi que l’emprisonnement des «Jordis» et de 8 ministres du gouvernement catalan constituent une attaque sans précédent contre les droits démocratiques. Les mêmes excuses seront utilisées demain par le PP, Ciudadanos et le PSOE pour justifier l’emprisonnement de tout syndicaliste, activiste ou membre d’une organisation de gauche qui remet en question le régime réactionnaire de 1978 et sa Constitution.

    Comme souvent au cours de ces derniers mois, le fouet de la contre-révolution réactionnaire nationaliste espagnole a poussé les masses à descendre à nouveau dans la rue pour s’opposer à la sauvage répression policière et défendre leur droit à décider avec la même détermination que le 1er octobre et que le 3 octobre, date qui avait vu la Catalogne paralysée par une grève générale. La manifestation de masse du 11 novembre a pris place quelques jours à peine après une autre grande journée d’action. Le 8 novembre, en dépit de la campagne de diffamation médiatique et de l’opposition des principaux dirigeants syndicaux (CCOO et UGT), des centaines de milliers de personnes avaient occupé la rue pour une grève générale. Les lieux de travail étaient paralysés et les routes ainsi que les lignes de train bloquées tandis que prenaient place d’innombrables manifestations.

    Le Venezuela et la Russie

    Il est difficile de trouver une période de mobilisation aussi massive, puissante et soutenue dans l’histoire, et ses conséquences sont ressenties par les forces de la réaction. La campagne de mensonges et de manipulation à l’encontre du peuple catalan, de plus en plus grotesque, semble ne pas devoir connaitre de fin et dévoile le visage autoritaire du régime.

    Le gouvernement, avec l’aide de Ciudadanos et du PSOE, déclare maintenant que la crise catalane a été provoquée par Maduro et Poutine, qui ont “saturé” les médias sociaux de “désinformation” sur la Catalogne. Les premières pages des journaux tels qu’El Pais et d’autres contiennent de prétendues preuves selon lesquelles les mobilisations de masse en Catalogne résultent d’une ‘‘intervention étrangère’’. Il est impossible de ne pas comparer cette campagne de propagande avec les plus délirantes de Franco, qui parlait alors de ‘‘complot maçonnique juif’’ financé par la Russie derrière chaque révolte sociale et grèvequi s’opposait à la dictature.

    Cette campagne quiaccuse ‘‘l’ennemi extérieur’’d’être responsable de la crise politique la plus aiguë depuis la fin de la dictature est une preuve évidente de désespoir. On parle déjà de la possibilité d’ingérences russes et vénézuéliennes dans les élections catalanes du 21 décembre, ce qui sera utilisé dans le cas où le résultat du vote seraitdéfavorable aux forces de la réaction.

    Colère et recherche d’alternatives parmi la gauche

    Les 1 et 3 octobre, après que les masses eurent vaincu la répression par l’action de masse, une crise révolutionnaire s’est ouverte en Catalogne. Les capitalistes espagnols l’ont mieux compris que les dirigeants de la gauche réformiste. C’est pourquoi ils ont recouru à une telle répression sans précédent. Ils veulent mettre fin à la crise révolutionnaire en écrasant le mouvement de masse et en effaçant l’idée de “sí se puede” (oui nous pouvons) de l’esprit des masses.

    Ces événements mettent toutes les forces à l’épreuve et provoquent de vifs débats et même des scissions. Le PSOE de Pedro Sanchez et les dirigeants bureaucratiques des syndicats CCOO et UGT ont été traînés derrière Rajoy en soutenant l’article 155. En trahissant le mouvement de masse du peuple catalan contre l’oppression et pour la République, ils se sont eux-mêmes encore plus séparés des couches avancées de la classe des travailleurs et de la vaste majorité de la jeunesse ainsi que des couches moyennes appauvries. Leur conservatisme et leurs intérêts matériels les ont poussés à fusionner à l’Etat et à la classe dirigeante, convaincus qu’ils sont que leur destin est lié à la stabilité du système.

    Dans le même temps, des forces qui se disent républicaines et radicales, comme Podemos et Izquierda Unida (IU), ont emprunté la voie de ‘‘l’équidistance’’ au lieu de défendre la légitimité du référendum du 1er octobre, de clairement expliquer à la classe ouvrière du reste de l’Etat espagnol ce qui est en jeu et d’organiser la lutte dans la rue. Ils appellent l’Etat répressif et les politiciens à convoquer un référendum ‘‘légal’’ avec des ‘‘garanties’’. Ils gaspillent ainsi une excellente occasion de lier la défense de la République catalane à la lutte pour faire tomber le PP et ouvrir la voie à une République des travailleurs dans le reste de l’État espagnol. Ces dirigeants ont dans les faits refusé de répondre à la campagne du nationalisme espagnol.

    Les différences sont bien entendu nombreuses entre ces dirigeants. Le dirigeant d’IU Alberto Garzonest celui qui a été le plus loin. Il refuse d’admettre que les dirigeants du gouvernement catalan emprisonnés sont des ‘‘prisonniers politiques’’, déclarant ‘‘qu’ils savaient ce qu’ils faisaient’’ et qu’ils ne devraient pas trop se plaindre. Cette position est indigne de quelqu’un qui se réclame du marxisme ou du communisme. La première tâche de tout révolutionnaire, comme l’a déclaré Che Guevara, est de combattre toutes les injustices et toutes les attaques contre les droits démocratiques, d’où qu’elles viennent. Présenter, comme le fait Garzon, le mouvement de masse en Catalogne comme un mouvement de l’élite revient à falsifier la réalité. Les dirigeants du PDeCAT et la bourgeoisie catalane ont totalement été balayés par le mouvement. Des centaines de milliers de personnes considèrent la République catalane comme un moyen de briser le régime de 1978, de mettre fin à l’austérité et d’avancer vers la libération sociale et nationale.

    Dire, comme le fait Garzon, que la République catalane va à l’encontre des intérêts de la classe ouvrière et que les «communistes» ne peuvent pas la soutenir, c’est une manipulation flagrante et une falsification du marxisme. Le marxisme a toujours défendu le droit des nations à l’autodétermination – un combat contre chaque tentative de garder une nation dans des frontières contre sa volonté. Les idées de Garzon sont utilisées par la classe dirigeante pour promouvoir la confusion et les préjugés nationalistes espagnols à l’intérieur et à l’extérieur de la Catalogne.
    Pablo Iglesias (Podemos) a rejeté les mesures répressives du gouvernement beaucoup plus clairement que Garzon et a dénoncé l’existence de prisonniers politiques. Mais cela ne suffit pas, si en même temps, il renonce au devoir de mobiliser dans la rue contre la répression et d’expliquer le sens révolutionnaire de ce mouvement. De plus, Iglesias a déclaré que les résultats du référendum du 1er octobre sont “illégitimes”. Quoi de plus légitime qu’un vote qui s’est effectué en dépit des balles en caoutchouc et des matraques, avec la participation d’environ 2,2 millions de personnes, soit plus qu’aux dernières élections européennes?

    Ces positions privilégient le «respect de la primauté de la loi» – une loi héritée du franquisme et destinée à maintenir l’ordre capitaliste – contre la volonté démocratique du peuple. C’est une trahison de l’une des idées centrales qui a permis à Podemos de grandir autant ces dernières années aux dépens du PSOE. Podemos s’est présenté au people comme la force qui en finirait avec le régime de 1978, avec l’austérité, le chômage de masse et les politiques qui ne bénéficient qu’aux grandes banques et aux monopoles.

    Cette contradiction entre la rhétorique et la pratique de Podemos est ce qui a conduit à la scission de Podemos en Catalogne et à la démission du dirigeant de Podemos en Catalogne, Albano Dante Fachin, qui avait maintenu une position bien plus en accord avec les principes initiaux de Podemos. Albano Dante, tout en s’identifiant comme un internationaliste, a correctement défendu que les membres de Podemos devraient être en première ligne du combat pour le référendum, et ensuite pour l’application du résultat du référendum – la République catalane – contre la répression d’Etat. Cela a fait de Dante l’un des leaders les plus populaires des mobilizations en Catalogne.
    La direction espagnole de Podemos a désavoué Albano Dante et l’a pressé de démissionner et de quitter le parti. Ce harcèlement de Dante contraste avec l’indulgence dont ont bénéficié les autres dirigeants de Podemos qui ont encouragé les préjugés nationalistes espagnols, comme Bescansa, ou le dirigeant de l’Iniciativa (Parti catalan qui fait partie de la coalition Unidos Podemos), Joan Coscubiela.

    Si la direction espagnole de Podemos avait adopté la même position que Albano Dante, il lui aurait été beaucoup plus facile de lier le mouvement de masse pour une république catalane avec les couches de la classe ouvrière, en Catalogne et ailleurs, qui s’opposent au PP mais ne font pas confiance au mouvement pour l’indépendance en raison du rôle de Puigdemont et des nationalistes bourgeois du PDeCAT. C’est la tâche centrale du moment: prendre la direction du movement des mains de ces politiciens et la lier à la lutte pour transformer la société et mettre un terme à l’oppression de l’oligarchie catalane et espagnole.

    Parmi les membres des “Comunes” (alliances de gauche municipales établies par Podemos et d’autres forces, dirigées en Catalogne par la maire de Barcelone, Ada Colau) et parmi des milliers de ses électeurs vit un grand mécontentement face à la position défendue par la majorité des dirigeants. Les changements de position d’Ada Colau ont été largement critiqués. Cela a été reflété dans la décision des rangs de ‘Barcelone en Comun’ de rompre l’accord de coalition à la mairie de Barcelone avec le PSC (PSOE catalan) pour protester contre son soutien à la répression. Dans plusieurs sondages, plus d’un tiers des électeurs de “Comun” soutiennent l’indépendance de la Catalogne.

    Poursuivre la lute jusqu’à la victoire

    Après la démonstration de force des 8 et 11 novembre, les organisations de la gauche combattive et des Comités de défense de la République (CDR) qui ont construit leurs forces ces dernières semaines, élaborent un plan d’action pour une mobilisation soutenue jusqu’à la victoire. C’est aussi le meilleur moyen de vaincre la réaction nationaliste espagnole lors des élections du 21 décembre.

    Ce serait une grave erreur de considérer la mobilisation de la rue comme étant une tactique secondaire face à l’électoralisme. C’est exactement le contraire: nous ne pouvons vaincre la réaction et faire une réalité de la volonté du peuple que grâce aux méthodes qui nous ont amené jusque-là. Chaque fois qu’il y a eu un sérieux appel à l’action, les masses ont dépassé toutes les attentes. Chaque fois que les rues ont été abandonnées, les dirigeants du mouvement, dirigés par PDeCAT, ont tenté de battre en retraite, enhardissant par là-même la réaction.

    Il y a beaucoup d’exemples. La stratégie de défense poursuivie par Carme Forcadell et les autres membres de la commission parlementaire catalane devant les tribunaux – qui est de dire que la déclaration de la République n’était que “symbolique” et de promettre de “rester dans le cadre de la constitution” – est une erreur. La Cour suprême (qui leur a accordé la liberté sous caution) a agi différemment avec eux, non pas à cause de cette stratégie, mais à cause de sa peur du mouvement de masse. Des centaines de milliers de personnes, particulièrement des couches de la classe ouvrière qui ont mobilisé les 1 et 3 octobre mais qui n’avaient pas participé au mouvement depuis lors, sont revenus dans la rue les 8 et 11 novembre. Les représentants les plus lucides de la classe dirigeante craignent que l’opposition à la répression combinée au discrédit du régime espagnol et de la monarchie en général, pourrait créer les conditions pour que la classe ouvrière catalane soutienne décisivement la république catalane.

    Nous ne vaincrons pas cette sauvage campagne d’intimidation ou les tentatives de diviser la classe ouvrière catalane avec le poison du nationalisme espagnol en reculant. Accepter le “cadre de la constitution” et caractériser la République comme étant symbolique sont des erreurs qui seront utilisées par la classe dirigeante espagnole pour semer le doute et la confusion.

    Nous ne gagnerons pas par la rhétorique ou des trucs juridiques. C’est la méthode des nationalistes bourgeois en Catalogne, qui battent en retraite à chaque instant pour trahir les aspirations du mouvement. Le seul moyen de vaincre le régime antidémocratique de 1978 est de lutter pour faire de la république catalane une réalité et de lui donner un contenu social, contre les politiques d’austérité que tant le PP que le PDeCAT ont instauré, en mettant fin aux coupes budgétaires et aux expulsions de logements, en garantissant des soins de santé publics et un bon enseignement, des emplois avec des salaires décents et la nationalisation des banques sous contrôle démocratique. Seul le combat pour une République socialiste catalane pour mettre fin à l’oppression de classe et garantir la satisfaction des besoins de la majorité peut unir le mouvement ouvrier en Catalogne et au-delà. Cela permettrait également de gagner la sympathie de millions de travailleurs dans toute l’Europe, affaiblissant ainsi la capacité répressive de l’État espagnol.

    Pour un front unique de la gauche combative ! Pour une république catalane des travailleurs !

    La profondeur de la crise révolutionnaire en cours en Catalogne et les réserves impressionnantes d’énergie et de vie du mouvement qui ont été montrées ces derniers jours commencent à trouver une réflexion dans toutes les organisations, ce qui provoque de grands changements. ERC, sous la pression de sa base, a refusé de reproduire sa coalition électorale avec le PDeCAT. Il y a aussi des nouvelles de mécontentement généralisé à la base de l’ANC (Assemblée Nationale Catalane, organisation de masse pro-indépendance) au sujet de la faiblesse de sa réponse contre la répression d’Etat. Le 12 novembre, 54% des membres de Catalunya en Comu ont voté pour mettre fin à leur collaboration avec le PSC (PSOE catalan) à la mairie de Barcelone. Albano Dante, avec un important nombre de dirigeants et d’anciens dirigeants et membres de Podemos, a créé SomAlternativa (Nous sommes l’alternative), qui discute de participer aux élections avec d’autres partis tels que la CUP et l’ERC.

    Le même jour, les membres de la CUP ont décidé lors de leur congrès national d’opérer un virage à 180 degrés contre la tactique de soutien au PDECAT que sa direction avait suivie. Cette tactique a été une erreur complète – en permettant au PDeCAT de rester à la tête du processus, qu’il a trahi en de nombreuses occasions tout en s’opposant à l’incorporation de revendications sociales – pour gagner la classe ouvrière catalane de manière décisive.

    EsquerraRevolucionaria (le Comité pour une Internationale Ouvrière en Catalogne) a fait appel à la CUP, à Podem, à Catalunya en Comú ainsi qu’à SomAlternative pour constituer un front unique de la gauche combattive pour combattre le régime de 1978. Sur la base de l’organisation et de l’extension des comités CDR, nous devons construire un mouvement généralisé, soutenu et puissant dans les rues pour vaincre la réaction nationaliste espagnole et remporter l’instauration d’une République catalane des travailleurs.

    Rejoignez EsquerraRevolucionària pour lutter en faveur d’une république socialiste de Catalogne !

    • Non à l’article 155! Libération de tous les prisonniers politiques ! Retrait de la police militaire et de la police nationale espagnole hors de Catalogne !
    • Retrait de toutes les réformes réactionnaires du travail et des pensions ! La retraite à 60 ans avec 100% du salaire et de bonnes conditions de travail pour les jeunes travailleurs !
    • Pour un salaire minimum de 1.100 € et une semaine de travail de 35 heures sans perte de salaire !
    • Pour la fin des expulsions de logements ! Expropriation des logements vides détenus par les banques pour créer des logements sociaux publics !
    • Re-nationalisation de tous les services publics privatisés, maintien et augmentation du nombre de fonctionnaires et respect des droits des travailleurs !
    • Retrait des lois réactionnaires dans l’enseignement ! Pour un enseignement public gratuit et de qualité, de la maternelle à l’université !
    • Pour un système de soins de santé universel et gratuit !
    • Solidarité avec les réfugiés ! Retrait des lois migratoires racistes et abolitions des camps pour migrants !
    • Pour le droit démocratique d’expression, de réunion et d’organisation ! Retrait des lois répressives !
    • Nationalisation des banques et des industries stratégiques pour défendre les intérêts des travailleurs et garantir des conditions de vie décentes pour tous !
    • Pour le droit à l’auto-détermination en Catalogne, au Pays basque et en Galice ! Pour une république socialiste de Catalogne et une république socialiste fédérative basée sur l’union libre et volontaire des peoples de l’Etat espagnol, si cela est leur souhait démocratique.

  • Catalogne: Carles Puidgemont en exil à Bruxelles

    Dans le cadre de la venue de Puigdemont et de quatre autres membres du gouvernement catalan, nous avons discuté de la situation en Catalogne avec Boris, responsable du PSL à Bruxelles.

    Que pense-tu des propos de Francken offrant l’asile à Puidgemont ?

    Les déclarations de Théo Francken sont une façon pour la N-VA de corriger son manque de soutien au processus indépendantiste en Catalogne. Ce qu’il propose dans les faits, c’est de couvrir Puidgemont pour que ce dernier abandonne le navire en lui offrant une porte de sortie personnelle. La N-VA participe à un gouvernement qui ne reconnaît pas la république catalane. Pour la N-VA, le principal, c’est de mener une politique d’austérité brutale contre la classe des travailleurs, ce n’est pas le droit à l’autodétermination. Leur nationalisme est un moyen de diviser le mouvement des travailleurs en reposant sur un égoïsme revanchard. Ce n’est pas du tout cet élément qui est dominant dans l’exercice du droit à l’autodétermination des masses en Catalogne. La résistance des travailleurs et des jeunes en catalogne contre l’oppression nationale est aussi une résistance contre l’austérité imposé par le gouvernement central du PP.

    Le président destitué de la Catalogne, Carles Puigdemont, visé par une procédure judiciaire en Espagne, est actuellement à Bruxelles, où il a notamment rencontré Paul Bekaert, avocat spécialisé en mandats d’arrêt européen, extraditions et asile politique. Quels sont les raisons de cet exil ?

    Dans sa conférence de presse, Puidgemont déclare qu’il ne va pas demander en ce moment l’asile politique en Belgique, mais qu’il va quand même rester à Bruxelles pour rester libre face à la répression judiciaire à son encontre. La procédure d’asile pourrait être utilisée en cas de mandat d’arrêt européen, selon son avocat. Il est menacé d’un procès politique pouvant entraîner de lourdes peines de prison pour rébellion, sédition et détournement de fonds. Le procureur présente le référendum catalan comme « un soulèvement violent » et la grève générale du 3 octobre comme un « coup de force ».

    En réalité, Puidgemont et son parti de droite le PDeCAT ne représentent qu’une direction formelle au mouvement. Les 1er et 3 octobre, l’initiative réelle était aux mains des masses qui ont poussé le processus beaucoup plus loin que ce que souhaitaient Puidgemont et le PDeCAT. Sa fuite à Bruxelles vise à sauvegarder sa position personnelle et son prestige en tant que représentant d’un gouvernement symbolique en exil suite à une déclaration symbolique d’indépendance. La droite est incapable de concrétiser les aspirations des masses.

    Il déclare également ne pas vouloir se mêler de la politique belge mais être ici pour assurer que le débat sur l’indépendance de la Catalogne soit un débat international et européen. C’est une illusion d’espérer obtenir la reconnaissance d’une république catalane au travers d’un lobbying envers les institutions européennes et les divers gouvernements et chefs d’Etat. Tous se prononcent contre l’indépendance de la Catalogne. Ils restent attachés aux États-nations historiques du capitalisme et, en même temps, ils craignent que le mouvement en Catalogne remette en cause le système capitaliste lui-même. Seule une lutte des masses à caractère révolutionnaire pourrait arracher de telles concessions à la classe dominante lorsque celle-ci craint le renversement de son système.

    Il s’est exprimé lors d’une conférence de presse à Bruxelles, ce mardi midi, à deux pas des institutions européennes. Il y a notamment déclaré qu’il acceptait le « défi » des élections anticipées convoquée pour le 21 décembre par le chef du gouvernement espagnol suite à la dissolution du Parlement catalan vendredi dernier. Que faut-il en penser ?

    Comme politicien de droite, Puidgemont n’en appelle pas au mouvement de masse en Catalogne pour résister à l’application de l’article 155. Il n’est pas prêt à faire face à la répression du gouvernement du PP à laquelle font face les dizaines de milliers d’activistes sur place. Ce qu’il faut surtout, c’est l’organisation du mouvement en Catalogne. En élargissant par exemple les comités de défense de la république pour résister et désobéir à la mise sous tutelle de la Catalogne par le gouvernement central. Cela devrait être couplé à un appel à la grève générale. Une participation aux élections dans une telle situation mobilisatrice peut assurer que les élections ne représentent pas un pas en arrière mais une occasion pour un gouvernement de gauche prêt à adopter des mesures socialistes, capables de résoudre réellement les problèmes de pauvreté, logements, santé et toutes formes d’oppression. Le gouvernement PP et ses alliés, le PSOE et Ciutadans, ont réussi une certaine démonstration de force en mobilisant 300.000 personnes ce dimanche à Barcelone autour de leur campagne nationaliste réactionnaire. La présence à cette manifestation était renforcée par la campagne de peur des plus de 1700 entreprises qui ont déménagé leur siège hors de Catalogne. Il s’agit d’une menace directe vers la délocalisation d’emplois. Un gouvernement de gauche pourrait y faire face avec l’arme de la nationalisation et ainsi écarter la menace sur l’emploi utilisée par la bourgeoisie catalane et espagnole. Une République socialiste catalane serait une source d’inspiration pour le mouvement ouvrier partout en Europe et en premier lieu dans le reste de l’Etat espagnol.

  • Pour une république catalane libre et socialiste !

    Vaincre l’article 155 et la répression franquiste par la mobilisation de masse!

    La déclaration d’indépendance de la République Catalane par le parlement catalan a provoqué la réaction immédiate de l’État, du gouvernement PP et de leurs alliés, Ciutadans et le PSOE.

    Déclaration d’Esquerra Revolucionaria (CIO-Catalogne)

    La tentative de supprimer la volonté d’un peuple qui s’est exprimé le 1er octobre, en exerçant son droit à décider, malgré la violence policière brutale, et avec une grève générale historique deux jours après, c’est la réponse d’un État héritier du franquisme et des partis qui soutiennent le régime de 78.

    Les marxistes révolutionnaires, opposés à toutes formes d’oppression nationale et de classe, considèrent que la lutte pour la république catalane doit être liée à un programme politique et d’action contre les coupes budgétaires et l’austérité, qui casse avec la logique du capitalisme et avec la domination de l’oligarchie, tant espagnole comme catalane. La république catalane doit être celle du peuple, des opprimés, des jeunes et des travailleurs. Pour cette raison, nous ne pouvons pas laisser cette république et sa défense dans les mains des politiciens bourgeois du PDeCAT qui défendent les intérêts des privilégiés. La lutte pour une république qui défend les aspirations de la majorité, fait partie de la lutte pour une transformation socialiste de la société.

    La classe des travailleurs doit être la force décisive dans la lutte contre la répression et pour la république catalane, et pour cela il est nécessaire de la lier avec une politique de création d’emplois de qualité avec des salaires décents, pour éliminer la précarité et les expulsions des logements, qui défend la santé et l’éducation publique. Une république qui en fini avec le sabotage économique des capitalistes catalans par la nationalisation des banques et des grandes entreprises. C’est la seule façon de conquérir la république et de la défendre, en assurant que l’énorme force de la classe ouvrière catalane se mobilise pour vaincre l’offensive répressive de l’État et du gouvernement central.

    La bourgeoisie espagnole et catalane, les médias traditionnels, tous les partis issus du régime de 78, le système judiciaire, les forces de sécurité et la monarchie se sont unis pour soumettre la volonté des millions de travailleurs et jeunes de Catalogne. En utilisant la violence et la coercition de l’État pour assurer l’ordre établi, la classe dominante espagnole met aussi en danger la stabilité de leur pouvoir politique et économique.

    La classe dominante espagnole et catalane regarde avec effroi la proclamation de la république catalane, pas seulement parce que c’est une rupture avec l’idée nationaliste d’une Espagne grande et libre. Ils savent que cela peut être le prélude d’une lutte encore plus intense et profonde dans l’intérêt des opprimés, contre la domination capitaliste, contre l’ordre social établi, pour une république socialiste en Catalogne, et une république socialiste fédérale, basée sur l’union libre et volontaire des peuples et des nations qui composent actuellement l’état espagnol. Une lutte qui est déjà en train de conquérir la solidarité active des masses opprimées en Europe et dans le monde entier.

    Visca Catalunya lliure, republicana i socialiste !

  • Grève générale historique en Catalogne – A bas le gouvernement PP!

    Continuer la lutte jusqu’à la république socialiste catalane !

    Ce 3 octobre, la Catalogne a connu une journée historique alors que des millions de travailleurs, de jeunes et de citoyens paralysaient les entreprises, les transports, l’enseignement et l’administration. Ils sont descendus dans les rues pour protester contre la brutale répression policière du 1er octobre et contre les menaces d’une violence accrue contre le peuple catalan de la part du Premier ministre espagnol Rajoy et du Partido Popular (PP).

    Déclaration d’Izquierda Revolucionaria [4/10/17]

    La possibilité d’obtenir une république catalane grâce à la mobilisation révolutionnaire des masses provoque la panique parmi la classe dirigeante espagnole. Elle sait que cette victoire ouvrirait la voie à la lutte pour la transformation socialiste de la société en Catalogne mais aussi dans le reste de l’Etat espagnol.

    La crise politique catalane est devenue la crise de la constitution de 1978, ce qui a motivé le roi Philippe VI à s’adresser à la ‘‘nation’’ dans la nuit du 3 octobre. Le roi allait-il dénoncer les violences de la police et de la garde civile à l’encontre des dizaines de milliers de familles, de personnes âgées et de personnes pacifiques qui désiraient simplement voter? Allait-il exprimer sa sympathie envers les près d’un millier de personnes blessées suite à cette intervention répressive de type franquiste? Le roi allait-il condamner les dirigeants du PP et de Cuididanos qui ont qualifié la grève générale et les énormes manifestations du 3 octobre de ‘‘nazies’’ et ‘‘xénophobes’’, en utilisant un langage de guerre civile ? Le roi allait-il s’opposer à la suspension de l’autonomie catalane ?

    Dès le début, nous savions que le roi n’en ferait rien. Comme prévu, la monarchie a soutenu la politique répressive du gouvernement PP en la justifiant comme étant ‘‘la défense de l’état de droit’’.

    Première page du journal d’Esquerra Revolucionaria, notre organisation-soeur en Catalogne.

    L’oppression du gouvernement du PP et de l’appareil d’État contre le peuple de Catalogne montre quel est leur véritable ADN. Cela illustre que l’héritage de Franco continue à travers eux. Après le 1er octobre, loin de diminuer, la réaction a intensifié sa propagande nationaliste-espagnole. Elle présente la mobilisation policière (16.000 personnes) et les mesures répressives à venir comme des actes légitimes visant à défendre ‘‘l’état de droit’’.

    Mais de quel Etat et de quel droit parle-t-on ? De quels droits dispose donc un gouvernement de corrompus et de voleurs qui a pillé les moyens de la collectivité pour enrichir une minorité ? Comment peut-il faire appel à son autorité pour agir de la sorte ? Cet Etat, c’est celui des banquiers qui ont les mains pleines de milliards d’euros volés. ‘‘L’Etat de droit’’ nous noie dans le chômage massif, la précarité, les bas salaires, la pauvreté et la misère. ‘‘L’Etat de droit’’ né du pacte de 1978 – quand la bourgeoisie espagnole et les dirigeants des organisations de gauche (PCE [parti communiste] et PSOE [parti social-démocrate]) ont accepté de réformer la dictature pour éviter une situation révolutionnaire – a garanti la suprématie de la bourgeoisie par un régime monarchique et parlementaire qui comprenait encore de nombreux éléments autoritaires.

    La Constitution de 1978 a cautionné plusieurs choses: un roi imposé par Franco; une loi garantissant l’impunité des crimes de la dictature et de l’appareil d’Etat; le fait que le pouvoir judiciaire, la police et les forces militaires restent aux mains des réactionnaires habituels. Bien sûr, l’économie du ‘‘libre marché’’ et le pouvoir incontesté des capitalistes ont été entérinés tandis que le droit à l’autodétermination a été refusé à la Catalogne, au Pays Basque et à la Galice. La maxime de l’ancienne dictature – Una, Grande y Libre – a été inscrite dans la Constitution.

    Ana Garcia, la présidente du Sindicato de Estudiantes (Syndicat étudiant) qui a notamment appelé à la grève générale étudiante contre la répression et en faveur du droit à l’autodétermination, sera présente en Belgique à l’occasion de notre week-end Socialisme 2017 ! Participez vous aussi !

    L’actuel mouvement de masse actuel qui se déchaîne en Catalogne en faveur des droits démocratiques nationaux a placé à l’agenda un point central: le déni que la Catalogne est une nation. Cela a été répété plusieurs fois par la classe dirigeante centraliste et par la droite via la répression ou la simple conquête militaire. La frustration concernant ce sujet est maintenant combinée avec une frustration généralisée face aux conséquences d’années de crise capitaliste, de chômage massif, d’expulsions, d’emplois précaires, de bas salaires et de manque d’avenir pour la jeunesse.

    La lutte contre l’oppression nationale et l’oppression de classe sont liées, comme ce fut le cas d’autres fois (en 1909, 1931, 1934, 1936 et 1977), générant un potentiel révolutionnaire qui a défié les formes de domination politique du régime capitaliste espagnol.

    La classe ouvrière et les jeunes de l’ensemble de l’Etat doivent comprendre que la cause de la population catalane est également la nôtre. ‘‘Un peuple qui opprime l’autre ne peut jamais être libre’’, a déclaré Karl Marx. C’est pourquoi le mouvement ouvrier tout au long de son histoire a toujours inscrit sur son drapeau la lutte pour l’émancipation nationale et pour l’autodétermination des nations opprimées, dans le cadre de la lutte pour la transformation socialiste de la société.

    L’Etat espagnol prépare de nouvelles agressions contre les habitants de la Catalogne

    Le 1er octobre, un tournant a eu lieu dans la lutte des classes. Non seulement en Catalogne, mais dans tout l’Etat espagnol. Le gouvernement du PP a révélé au grand jour ses actions répressives, sa faiblesse extrême et son manque absolu de légitimité. Dans les jours qui ont précédé le référendum, ses tentatives visant à mobiliser sa base sociale ont été réduites à quelques manifestations limitées dominées par des éléments fascistes, en chantant Cara Al Sol’ (hymne de la phalange espagnole et symbole du franquisme) et en effectuant le salut fasciste.

    Il faut également souligner la complicité des dirigeants actuels du PSOE avec le PP afin de museler les habitants de Catalogne et de les empêcher de se rendre voter le 1er octobre. Le jour-même où des dizaines de milliers de personnes étaient victimes de la violence policière, alors qu’il versait des larmes de crocodile face aux contre les ‘‘accusations de la police’’ sans même oser appeler les choses par leur nom, Pedro Sanchez, le dirigeant du PSOE, a réaffirmé l’inébranlable soutien du PSOE à ‘‘l’état de droit, aux institutions, à la Constitution et à l’intégrité territoriale’’, c’est-à-dire au gouvernement du PP ! Quelle complète faillite politique !

    Comme dans tous les grands événements de l’Histoire, c’est l’action directe des masses, leur intervention révolutionnaire, qui a changé toute la situation. La crise du régime politique espagnol est entrée dans une phase explosive. Cette crise atteint le gouvernement du PP, soutenu par les médias réactionnaires, qui a mis en scène un coup d’Etat contre les institutions catalanes, en dissolvant le gouvernement catalan et en mettant fin à l’autonomie catalane. Le PP et Cuidadanos sont prêts à jouer la carte du nationalisme espagnol et à encourager la polarisation dans la société selon des lignes nationales, en utilisant en abondance une démagogie réactionnaire contre la Catalogne et le peuple catalan. Albert Rivera [leader de Cuididanos] considère cette situation comme une occasion en or d’arracher une partie importante de la base sociale du PP et, par conséquent, il appelle à l’application de l’article 155 [qui permet la mise sous tutelle de régions autonomes d’Espagne par Madrid], ferme la porte à toute négociation avec la Generalitat [le gouvernement régional de Catalogne] et veut accroitre la répression. Cette stratégie met beaucoup de pression sur le PP, qui ne peut renoncer à sa base plus réactionnaire et d’extrême droite.

    Nous devons répondre par une mobilisation massive. Pour une république socialiste catalane !

    La grève générale du 3 octobre a illustré l’énorme force du mouvement. Oui, nous sommes tellement forts que nous avons rendu possible ce qui semblait impossible il y a quelques semaines encore : contrer la répression du PP et remporter la solidarité active des secteurs les plus avancés de la classe ouvrière et des jeunes dans l’Etat espagnol et à travers le monde. Maintenant, nous devons adopter la stratégie adéquate pour atteindre la victoire. Cela nécessite une organisation et un programme révolutionnaire.

    Izquierda Revolucionaria appelle la direction de la CUP [Candidature d’Unité Populaire], de Podemos, de Catalunya in Comú et d’ERC [Gauche Républicaine de Catalogne] à construire un front combatif de gauche reposant sur les comités de défense du référendum (CDR) et sur toutes les organisations qui ont émergé ces dernières semaines en Catalogne. Des ‘‘comités pour la république’’ devraient être construits sur tous les lieux de travail et être coordonnés pour défendre une alternative des travailleurs – internationaliste et révolutionnaire – pour animer le mouvement de masse avec des actions de plus en plus audacieuses et massives. Le front des organisations de gauche doit maintenir une politique d’indépendance de classe et rompre toute allégeance à la bourgeoisie nationaliste (le PDeCAT et Carles Puigdemont, président de la Generalitat de Catalogne).

    Nous ne pouvons pas oublier que même s’ils souffrent actuellement de l’attaque réactionnaire du PP, ces politiciens ont appliqué de sauvages coupes budgétaires antisociales qui ont causé des souffrances immenses. Ils défendent leurs propres privilèges et leurs propres intérêts de classe très concrets: ceux de l’élite économique. Nous ne pouvons pas exclure que ces dirigeants bourgeois trahissent les aspirations des gens comme ils l’ont déjà fait dans le passé et qu’ils acceptent un accord qui leur soit bénéfique avec l’Etat et le gouvernement du PP.

    La gauche qui lutte, le mouvement des travailleurs et les syndicats ouvriers de Catalogne doivent construire ce front de gauche et offrir une solution qui repose sur les intérêts des opprimés dans cette crise révolutionnaire. Cela signifie d’approfondir et d’étendre le combat, de préparer une grève générale illimitée sur les lieux de travail pour résister à toute action répressive violente de l’Etat, pour repousser les forces répressives d’occupation et pour conquérir une république catalane avec un gouvernement de gauche.

    Ce gouvernement de gauche devrait immédiatement appliquer un programme visant à résoudre les graves problèmes auxquels est confrontée la population : le fin des coupes budgétaires, la garantie d’un enseignement et de soins de santé publics et de qualité, la création de millions d’emplois avec un bon salaire et de bonnes conditions de travail, la fin des expulsions de logements et l’instauration d’un plan de construction de logements sociaux publics. Ce gouvernement devrait faire face à la dictature des grandes puissances économiques en nationalisant les banques et les grandes entreprises afin de les placer au service des besoins de la majorité de la société.

    Une république catalane gagnée par l’action révolutionnaire des masses impliquerait nécessairement de lutter contre le PDeCAT et Puigdemont de même que contre toute l’oligarchie politique et économique qui a ordonné à la Catalogne d’appliquer des politiques néolibérales similaires à celles du PP tout en ouvrant la voie à la lutte pour une république socialiste en Catalogne et une république socialiste fédérative basée sur l’union libre et volontaire des peuples et des nations qui constituent actuellement l’Etat espagnol – cela gagnerait la solidarité active des masses opprimées d’Europe et du monde entier.

     

  • Pourquoi nous soutenons le referendum en Catalogne… et pourquoi la N-VA est moins enthousiaste

    1er octobre, rassemblement à Madrid. Nos camarades d’IR étaient présents “contre la répression franquiste et pour la grève générale”

    Pour la N-VA, le maintien de la politique d’austérité est plus important que le droit à l’auto-détermination

    Le référendum sur l’indépendance de la Catalogne a été déclaré illégal par l’Etat espagnol. La période est houleuse et le répression très forte de la part de l’état national. L’opposition de la part de la population catalane s’exprime de façon massive. Nous nous sommes déjà exprimés sur le sujet (voir la déclaration de notre organisation-soeur dans l’Etat espagnol) mais, dans cet article, nous revenons plus spécifiquement sur l’attitude de la N-VA, la force dominante du nationalisme flamand actuel.

    Dossier par Anja Deschoemacker

    Pas de triomphalisme

    Aujourd’hui, à l’occasion du référendum catalan, on ne voit plus rien à la N-VA des visages réjouis et de l’ambiance triomphaliste de la période précédant le référendum écossais sur l’indépendance. Même la combativité de Jan Jambon vis-à-vis de l’indépendance catalane est fortement retombée. Alors qu’en 2015, il faisait encore comprendre que la question catalane valait bien une crise gouvernementale, leurs collègues nationalistes en Catalogne doivent aujourd’hui se contenter d’une déclaration de Bart De Wever selon laquelle l’attitude répressive de l’état espagnol est “stupide et inacceptable”. Le gouvernement fédéral, dans lequel la N-VA est pourtant la force dominante, ne condamne même pas la vaste répression de l’Etat espagnol.

    La détermination de la N-VA sur le plan communautaire en Belgique même est déjà mise en question depuis quelque temps par des figures au sein du mouvement flamand dont, notamment, le Vlaams Belang mais aussi deux ex-N-VA, Hendrik Vuye et Veerle Wouters (V&W) et encore des personnes telles que le politologue Bart Maddens. De fortes critiques s’étaient faites entendre après les récentes déclarations de Bart De Wever selon lesquelles le parti ne défendrait pas d’agenda communautaire lors de la prochaine campagne électorale de 2019.

    Sur le plan européen, ces mêmes milieux critiquaient le passage en 2014, de la N-VA de la fraction EFA (un rassemblement de partis nationalistes/régionalistes et de verts) au parlement européen à la fraction  groupe des Conservateurs et réformistes européens (CRE) où siègent, entre autres, les Tories britanniques. Pour sauver les meubles, la N-VA est restée membre du parti EFA (mais pas de la fraction) et elle a obtenu au sein du CRE, la liberté de voter comme elle l’entend autour des sujet relatifs à la question nationale.

    Dans les deux cas, il s’agissait pour la N-VA de faire passer l’agenda socio-économique avant les objectifs nationalistes. Aujourd’hui, face au référendum catalan, nous remarquons beaucoup moins d’enthousiasme chez les dirigeants de N-VA en comparaison de l’époque du référendum écossais. Selon le mensuel Meervoud, Jan Jambon déclarait encore fin 2015, au sein de la coupole européenne des partis séparatistes, que : “Si la question catalane arrive sur la table du gouvernement belge, cela signifiera la fin de ce gouvernement”. La réalité actuelle est toute autre.

    Le 21 septembre, ce n’est pas Jan Jambon qui a fait face à la Chambre pour répondre au nom du gouvernement aux questions du Vlaams Belang et de V&W quant à la la réaction du gouvernement belge suite aux récents développements autour du référendum catalan. A la demande de Siegfried Bracke, membre de la N-VA et président de la Chambre, c’est le ministre des pensions, Daniel Bacquelaine (MR) qui s’y est collé.

    Cette réponse a parfaitement cadré avec les réactions officielles des institutions de l’UE jusqu’à ce moment. La constitution espagnole n’autorise pas à déclarer l’indépendance, les bourgmestres ne peuvent pas participer à son organisation,… Les arrestations de collaborateurs du gouvernement catalan ne lui posent pas de problème. Il conclut : “Nous souhaitons que cette situation interne soit résolue dans les règles de l’état de droit. Nous continuons à suivre ces évolutions avec l’attention nécessaire.”

    La réponse du Président de la Commission européenne Jean-Claude Junckers a fait comprendre, en outre, que la Catalogne, en cas de scission avec l’Espagne, devrait se soumettre aux procédures normales pour devenir membre de l’UE. Etant donné que l’Espagne peut complètement bloquer cette procédure, il n’y a pas grand-chose à en attendre.

    A la suite de leur propre expérience, les Écossais avaient déjà pu prédire qu’aucun soutien ne viendrait de l’UE pour les tendances indépendantistes des régions européennes. La fraction à laquelle la N-VA appartient au parlement européen, le CRE, sera d’ailleurs dans le camp le plus fortement opposé à la reconnaissance d’une Catalogne indépendante.

    Pourquoi soutenir le référendum en Catalogne

    Cela peut sembler ironique à première vue. Les nationalistes flamands qui se tiennent calmement à l’arrière-plan alors que l’Etat espagnol rappelle les fantômes du régime franquiste dans la répréssion d’Etat contre le référendum catalan alors que l’organisation-soeur du PSL en Catalogne et en Espagne mobilise activement contre cette répression et en faveur du référendum. Il y a pourtant une logique derrière cela : contrairement à la N-VA, le PSL n’essaie pas de défendre les intérêts de la bourgeoisie mais bien ceux d’intérêts des masses laborieuses.

    Notre défense du droit à l’auto-détermination des peuples qui tendent à plus d’autonomie et/ou d’indépendance est honnête et ne sert pas à stimuler un agenda visant à diviser la classe des travailleurs afin d’économiser encore plus durement sur le dos de la majorité de la population. Nous soutenons la lutte pour l’indépendance de la Catalogne précisément parce que cette lutte est indissociable de celle à mener contre la politique d’austérité. Elle se résume à la question suivante : qui doit décider de la politique économique à mener ? L’élite de super-riches ou la grande majorité de la population ?

    Pourquoi la N-VA est moins enthousiaste

    Ce qui se passe aujourd’hui avec le parti gouvernemental N-VA n’est pas différent de ce qui s’est passé avec des partis comparables en Europe : SNP, CIU, les nationalistes basques modérés,… Ou à l’époque avec la Volksunie, le Rassemblement Wallon et le FDF en Belgique. Nés comme partis de la petite bourgeoisie qui tendent à l’autonomie ou l’indépendance, ils ont vite été placés face au choix suivant : soit jouer le jeu des partis d’Etat pour finalement faire de petits pas en avant en échange de leur soutien à un agenda antisocial – et risquer ainsi de se brûler les ailes au pouvoir et de perdre leur base électorale – soit rester en dehors du pouvoir avec un agenda radical et en construisant un mouvement capable d’atteindre l’objectif défini.

    Le SNP en Ecosse et la CIU en Catalogne n’ont pas pu bénéficier longtemps de la majorité absolue qu’ils avaient acquise à une certaine période. Ils ont tous les deux fidèlement appliqué la politique d’austérité qui leur était imposée de la part de l’autorité nationale et ont donc, au mieux, essayé de cacher leur propre responsabilité en créant des procédures dont ils savaient pertinemment qu’elles ne représentaient pas une solution. Dans les faits, ils ont mobilisé les sentiments nationalistes sans tendre réellement vers l’indépendance. Au final, ils ont été obligés d’aller plus loin que ce qu’ils désiraient initialement, poussés par les masses qui en avaient marre de la politique d’austérité.

    En Catalogne, cette pression est massivement présente depuis des années déjà. La majorité des dirigeants nationalistes catalans a été brisée par des forces nationalistes plus radicales qui ont défendu un agenda plus à gauche et progressiste que celui de la CIU et du PDeCat dont est issu l’actuel président de la généralité, Puigdemont. C’est cette pression qui a finalement poussé le PDeCat sur la voie du référendum, bien conscient que l’Etat espagnol ferait tout pour l’empêcher.

    Le nationalisme n’est en effet pas neutre. Il peut être de droite avec pour base l’égoïsme économique et le revanchisme, comme c’est le cas en Flandre mais aussi en Catalogne quand on parle des partis nationalistes bourgeois au pouvoir. Mais il peut aussi être de gauche et tendre à se libérer de l’emprise de la classe dirigeante et de son agenda politique et économique. C’est le cas du large mouvement que nous voyons actuellement en Catalogne. C’était aussi le cas au sujet du mouvement autour du référendum écossais. Dans les deux cas d’ailleurs, sans que la direction des partis nationalistes dominants n’aillent si loin.

    Alors que SNP se trouve dans le camp socio-démocrate d’austérité socialement accompagnée et le PDeCat plutôt au centre, la N-VA est bien plus à droite du point de vue socio-économique. Là où le SNP et le PDeCat ont encore au moins de beaux discours contre une série d’économies (ou pour des réformes progressives), la N-VA se positionne comme la puissance dirigeante qui essaie de toutes ses forces de mener les économies les plus dures et les attaques les plus structurelles contre la classe des travailleurs et les couches les plus pauvres La chance que ces derniers groupes rejoignent un mouvement derrière la N-VA pour l’indépendance de la Flandre est quasiment nulle.

    Alors que la base historique de la N-VA était la classe moyenne flamande – qui prônait aveuglément le nationalisme flamand en ayant en tête que les choses iraient mieux si la “Flandre” n”avait plus à payer pour ces misérables Wallons – cette classe moyenne traverse maintenant l’expérience d’un gouvernement N-VA qui, à l’instar des gouvernements précédents et même plus ardemment, défend surtout les intérêts des grandes entreprises et des ultra-riches. Les moyens qui n’iraient plus en Wallonie (ou vers les chômeurs, les malades, …) n’iront pas non plus vers un renforcement du niveau de vie de la classe moyenne mais disparaîtront tout simplement dans les poches des ultra-riches et des grandes entreprises.

    Lors d’un futur recul électoral de la N-VA, à défaut d’une alternative issue du mouvement des travailleurs dans la lutte pour plus de moyens contre l’élite dominante, une partie de ces voix reviendra à l’ancienne bergerie du CD&V. Une autre partie cherchera des voies plus radicales pour l’agenda nationaliste flamand, ce que le Vlaams Belang et V&W attendent. Ils seront probablement ensemble dans l’un ou l’autre front flamand.

    Bien que le recul de la N-VA ne soit pas pour demain, surtout faute d’alternatives aux partis traditionnels qui soient progressistes, de gauche et suffisamment fortes, il est à terme impossible pour la N-VA de maintenir ce grand écart. Le mouvement perdra inévitablement de sa force à un moment donné, comme cela fut le cas pour le SNP et le PDeCa. En tout cas, la tendance dominante à la N-VA aujourd’hui est de s’accrocher au pouvoir et de considérer l’austérité prioritaire plutôt que de pousser de l’avant un agenda favorable à l’indépendance de la Flandre.

    A défaut de viabilité pour l’indépendance flamande dans la société flamande, la stratégie avancée est de s’en prendre aux Wallons. Sous pression d’un gouvernement thatchérien de droite dominé par la Flandre – et donc par la N-VA -, des sentiments régionalistes pourraient vite remonter à la surface et assurer que des Wallons soient demandeurs d’une confédération. A la N-VA, on a donc dû être ravis que le PS organise un congrès wallon après son congrès idéologique et que les forces régionalistes se fassent entendre au sein de la FGTB wallonne.

    Si un mouvement substantiel émergeait en Wallonie autour d’un programme anti-austérité, lié à la revendication de plus d’autonomie régionale – ce qui n’est pas exclus, surtout si une lutte syndicale nationale contre la politique d’austérité se fait attendre, que le mouvement social rencontre d’autres défaites et que la démoralisation commence à s’étendre – ce mouvement montrera cependant plus de similitudes avec les mouvements d’indépendance écossais et catalan qu’avec le flamand : la classe des travailleurs le marquera de son sceau.

    Le possibilité de voir ce mouvement entrer gentiment dans le schéma de la N-VA et négocier avec elle une confédération dans laquelle la sécurité sociale serait scindée (ce qui, sans mesures compensatoires, mènerait à une sérieuse chute du niveau de vie en Wallonie et à Bruxelles) et la dette publique répartie de part et d’autre – ce qui permettrait à la Flandre de garder un contrôle au moins partiel sur Bruxelles – est cependant plus mince que de celle de voir le mouvement contre la politique d’austérité entraîner les travailleurs flamands derrière lui.

    Ce qu’il adviendrait de Bruxelles et de la communauté germanophone dans un tel développement est une autre question importante. La chance que la N-VA puisse élaborer une proposition qui emporterait l’approbation de la population bruxelloise est nulle. Et que Bruxelles veuille avoir son mot à dire ne fait aucun doute.

    Des études indiquent depuis l’existence de la Région bruxelloise, Bruxelles construit toujours plus sa propre identité, indépendamment de la Flandre et de la Wallonie. Il y a des tensions constantes avec la communauté flamande et la Fédération Wallonie-Bruxelles, toutes deux compétentes pour l’enseignement à Bruxelles. Ces tensions avec la Wallonie peuvent continuer à s’accentuer si les gouvernements de la région bruxelloise, de la région wallonne et de la Fédération Wallonie-Bruxelles conservent à plus long terme des majorités différentes.

    La régionalisation des compétences communautaires à Bruxelles peut vite être à l’ordre du jour. Lors de telles négociations, il y aura peu voire pas de place pour la communauté flamande. Ainsi, “l’enfumage des Wallons” peut avoir pour conséquence que la Flandre perde toute participation à Bruxelles. Et quand la possibilité pour Bruxelles d’exister comme région et communauté en un seul bloc se posera, même dans la petite communauté allemande, le rêve d’une propre région refera surface.

    Si elle a le couteau sur la gorge, la bourgeoisie pourra admettre une indépendance sur le papier – mais une réelle libération est impossible sous le capitalisme. Il est difficile de rénover des châteaux de cartes, chaque carte que l’on bouge met en péril l’équilibre de tout l’édifice et chaque mouvement peut faire s’écrouler tout le château. La bourgeoisie a beau utiliser la question nationale pour semer la division et détourner l’attention de la lutte des classes qu’elle est en train de mener, elle reste un défenseur absolu des Etats-nation existants. Elle n’acceptera que les Etats-nation soient brisés que si l’alternative est une révolution qui menace de renverser le capitalisme.

    Et même dans ce cas-là, elle essaiera d’imposer au nouvel Etat-nation de rentrer dans le rang sur le plan économique – c’est-à-dire de poursuivre la politique d’austérité sur le dos de la majorité de la population – que ce soit via l’Union européenne, le Fonds monétaire international ou la Banque mondiale.

    C’est pour cela que non seulement nous sommes en faveur de l’indépendance de la Catalogne mais également pour une Catalogne socialiste indépendante. L’arrivée au pouvoir d’un gouvernement de gauche sur base du mouvement indépendantiste, un gouvernement qui enfreint les diktats de l’Etat espagnol et de l’UE parce qu’ils rendent impossible une politique sociale serait un énorme stimulant pour la classe des travailleurs ailleurs en l’Espagne et en dehors. Dans un tel scénario, un mouvement de la base pourrait naître rapidement visant à une confédération des Etats socialistes ibériques, ce qui inspirerait la lutte des travailleurs dans toute l’Europe contre la politique d’austérité et le processus de décision anti-démocratique. Ainsi, une Europe de la base pourra être construite où équité et respect de la volonté seront centraux, tous comme les droits des minorités. Un mouvement qui puisse veiller à l’unité des travailleurs.

    Nous ne soutenons les mouvements d’indépendance que si ces éléments sont réunis et alimentés par les masses et, surtout, la classe des travailleurs. Nous ne donnerons jamais notre soutien à un mouvement indépendantiste qui veut obtenir une amélioration pour ses “propres” travailleurs en imposant un appauvrissement à d’autres, comme la N-VA et le PDeCat le défendent. Nous pensons que l’histoire belge montre suffisamment que la question nationale ne sera jamais résolue sur base capitaliste. Commencée sous domination francophone, le français étant la langue de la bourgeoisie, pour arriver à une domination flamande au profit de cette même bourgeoisie, l’Etat capitaliste belge n’a jamais réalisé la libération de qui que ce soit, il n’a signifié qu’exploitation, oppression et discrimination.

  • La répression d’Etat contre le “droit à décider” de la Catalogne

    Après une offensive policière et judiciaire menée sans pitié plusieurs jours durant, piétinant avec fureur les droits démocratiques, le gouvernement du Partido Popular (PP) a décidé de recourir à la répression massive afin d’empêcher le peuple de Catalogne d’exercer son droit de décider de son avenir.

    Déclaration d’Esquerra Revolucionària (Comité pour une Internationale Ouvrière – Catalogne)

    Le peuple de Catalogne a le droit de décider

    Au cours d’une opération rappelant l’époque de la dictature franquiste, la garde civile a arrêté 14 membres du ‘‘Govern’’, l’exécutif régional catalan, responsables de l’organisation du referendum du 1er octobre (‘1-O’). Quand la nouvelle de cette opération autoritaire a été connue, des milliers de jeunes et de travailleurs sont descendus dans les rues de Barcelone et d’autres villes pour s’opposer à cette répression et défendre la liberté et les droits du peuple catalan.

    Hier, une action de solidarité a eu lieu à Bruxelles en face des locaux de la Commission européenne. Le PSL était présent et a distribué le matériel de nos camarades catalans.

    La saisie d’imprimés, les descentes de la garde civile dans les locaux d’imprimerie, l’imposition d’un black-out massif sur les l’information, l’arrestation de jeunes ayant collé des affiches, les menaces de poursuites pénales contre des centaines de maires ayant soutenu le référendum, la saisie de documents dans les bâtiments gouvernementaux, les tentatives d’investir le quartier général de la CUP (Candidature d’Unité Populaire), l’interdiction d’actions politiques en soutien au droit de décider à Madrid, à Gasteiz et à Gijón, l’intervention du gouvernement central dans les finances du gouvernements catalan, le déploiement de milliers de policiers en Catalogne pour intimider la population, etc. tout cela, dans la pratique, est revenu à imposer l’état d’urgence. Voilà la recette que le PP, l’appareil d’Etat, Ciudadanos et, malheureusement, la direction du PSOE ont utilisée afin d’empêcher le peuple catalan d’exercer son droit de vote au sujet du type de relation qu’il entend entretenir avec l’Etat espagnol, y compris au sujet de son droit légitime à l’indépendance.

    Cette attaque contre les droits et libertés démocratiques est sans précédent dans la période récente dans l’Etat espagnol. L’offensive policière a été préparée à l’avance par le gouvernement, au point que le premier ministre Rajoy a rencontré les dirigeants du PSOE Pedro Sanchez et Albert Rivera le mercredi 20 septembre. Que ces dirigeants du PSOE soutiennent cette offensive franquiste contre le peuple de Catalogne est un véritable scandale !

    La complicité des actuels dirigeants du PSOE avec le PP pour museler le peuple catalan et empêcher la tenue du vote le 1er octobre restera dans l’histoire de la social-démocratie comme l’une de ses plus infâmes trahisons. Telles sont les conséquences d’avoir embrassé le nationalisme pro-espagnol pendant des années et d’avoir rejoint la classe dominante sur tous les sujets essentiels. La direction du PSOE n’a pas seulement abandonné le point de vue du socialisme sur la question nationale – la défense du droit à l’autodétermination des nations opprimées – elle s’est, de plus, mise du côté de Franco pour qui la Catalogne n’était pas une nation. Elle est maintenant prête à se lancer dans une nouvelle ‘‘croisade’’ en recourant à la violence et à la répression d’Etat.

    L’idée selon laquelle le referendum représente un ‘‘coup d’Etat’’ et constitue une attaque ‘‘anti-démocratique’’ contre une couche de la population catalane est un des plus grands mensonges que les médias, au service de la bourgeoisie espagnole, tentent de nous faire avaler. C’est une absurdité en soi. Si l’Etat, le PP et les partis qui les soutiennent sont certains à ce point que les partisans de l’indépendance ne représentent qu’une minorité, pourquoi donc ne pas accepter le résultat sorti des urnes ? Pourquoi empêcher la tenue du vote ? Dans le cas du Venezuela, toutes ces personnes ont argumenté en faveur d’un vote, mais elles défendent le contraire en Catalogne !

    A l’occasion d’un vote démocratique sur l’auto-détermination, quiconque ne soutient pas l’indépendance a clairement la possibilité de voter contre. Des partis comme le PP, Ciudadanos ou le PSOE, qui défendent la légitimité de la constitution de 1978, ont beaucoup de moyens et d’influence. La véritable raison qui explique l’attitude fermée de la droite et de l’Etat n’est pas qu’ils défendent la démocratie, mais plutôt l’inverse. Ils refusent au peuple catalan le droit de décider et de faire de la Catalogne une nation. La position du gouvernement, de l’Etat et de ses partisans n’est rien d’autre que la poursuite de ce que la bourgeoisie espagnole et l’Etat central ont défendu historiquement. Concrètement, cela a été synonyme d’écrasement militairement des aspirations nationales de la Catalogne, du pays Basque et de la Galice, à de nombreuses reprises. C’est encore ce qui s’est passé sous la dictature de Franco. Chaque progrès dans la défense de ces droits a toujours été le résultat de mobilisations massives.

    Lors d’une conférence de presse, Carles Puigdemont, le président de la Généralité de Catalogne (la communauté autonome de Catalogne), flanqué de tous ses conseillers, a expliqué la réalité de la situation : ‘‘L’Etat espagnol a de facto suspendu l’idée d’un gouvernement autonome pour la Catalogne et, de facto, un état d’urgence a été instauré’’. Il est véritablement incroyable que le dirigeant d’un parti nationaliste bourgeois doive dire de telles choses ! La situation qui s’est développée voit le PP librement piétiner les droits démocratiques les plus élémentaires ! Nous comprenons maintenant pourquoi Rajoy et son parti ont toujours refusé de condamner la dictature de Franco. Nous voyons ici au grand jour ce que les marxistes ont toujours expliqué : que l’appareil d’Etat espagnol est saturé d’éléments fascisants et réactionnaires. La soi-disant ‘‘transition’’ (le processus ayant permis la sortie du franquisme) ne les a pas purgé, mais les a protégés et encouragés.

    Ce que nous voyons en Catalogne, c’est la suspension de fait du statut du gouvernement catalan et le retrait de ses fonctions politiques les plus importances. Le PP et ses partenaires, encouragés par la presse et les média de la bourgeoisie pro-espagnole, se serrent mutuellement la main et se présentent comme les champions de la démocratie. Le PP est submergé de cas de corruption. Ce parti a sauvagement coupé dans les budgets de l’enseignement public et de la santé. Il a donné plus de 100.000 millions d’euros aux banquiers. Il nous expulse de nos maisons. Il nous condamne à des boulots précaires et aux bas salaires. Il soutient des dictatures militaires (Maroc, Arabie saoudite,…). Il encourage les interventions militaires étrangères de l’impérialisme. Et ce parti veut nous donner des leçons de démocratie !

    La seule réponse à donner, c’est la mobilisation massive de la classe ouvrière et de la jeunesse ! Pour une grève générale de 24 heures maintenant !

    La “une” de la dernière édition du journal d’Esquerra Revolucionària.

    La population catalane a courageusement répondu à cette offensive franquiste, de manière déterminée, dans la rue. Cette protestation va croitre jour après jour. Mais il est urgent et nécessaire d’amener cette lutte vers la classe des travailleurs, d’une manière unitaire, pour réunir la jeunesse et les sections des classes moyennes déjà radicalisées dans cette lutte. Il faut aussi étendre le combat à l’extérieur de la Catalogne. Cette attaque contre les droits démocratiques représente une énorme menace pour la population de tous les territoires, et particulièrement pour les travailleurs, les jeunes et leurs organisations de combat à travers l’Etat espagnol.

    Esquerra Revolucionària soutient pleinement les mobilisations qui se développent en Catalogne et dans l’Etat espagnol. Mais si nous voulons défaire l’offensive autoritaire perpétrée par le gouvernement central, nous avons d’urgence besoin que l’ensemble de la gauche s’implique dans cette lutte, les mouvements sociaux, les syndicats (CUP, ERC, Comu, Intersindical, UGT, CCOO, CGT Catalunya…). Nous nous engageons à utiliser nos forces pour construire le mouvement unitaire le plus fort possible. Cela ne peut être fait qu’en appelant immédiatement à une grande grève générale de 24 heures qui paralysera la vie économique et sociale de Catalogne.

    Cette grève générale en Catalogne doit être accompagnée d’un appel à la mobilisation de la classe des travailleurs et de la jeunesse dans le reste de l’Etat espagnol en soutien au peuple catalan et à ses droits démocratiques. Cela serait un moment crucial à saisir pour la gauche, afin qu’elle gagne la direction du processus et pour défendre le droit à l’auto-détermination avec un programme anti-austérité et contre les coupes budgétaires. Une mobilisation de ce type est la manière la plus efficace d’entrer en confrontation avec le PP et ses politiques nationalistes, de les vaincre et de gagner le droit pour la Catalogne de se gouverner elle-même

    Pour une république socialiste catalane

    Le Sindicato de Estudiantes appelle à la grève générale étudiante pour le 28 septembre.

    Le principal facteur qui a retardé la rébellion sociale issue de la colère des masses contre les conditions sociales et économiques existantes – dans l’idée de faire tomber l’Etat, le PP et ses politiques capitalistes – est que les formations parlementaires à la gauche de la social-démocratie (CUP, can, Comu, Izquierda Unida en Catalogne) et les syndicats ont abandonné la lutte pour être à la tête de ce grand mouvement de masses. Ils n’ont pas réussi à se battre pour un programme qui lie la lutte pour l’autodétermination aux revendications économiques et sociales pourtant exigées par la majorité de la classe ouvrière et de la jeunesse.

    La direction formelle de la lutte contre l’Etat et le Gouvernement du PP a ainsi été offerte au PDECAT (le Parti Démocrate Européen Catalan), permettant à ces politiciens bourgeois d’apparaître comme les victimes de la politique autoritaire de la droite espagnole. Cela a créé une division négative parmi la classe ouvrière. La direction du processus par le PDECAT capitaliste n’a pas renforcé le mouvement, comme l’ont préconisé les dirigeants de la CUP et de l’ERC [Gauche républicaine de Catalogne]. Cela l’a affaibli. Même du point de vue de la défense des droits nationaux, les dirigeants de la PDeCAT ont cherché toutes les excuses pour ne pas appeler au référendum. Mais, la pression du mouvement et la perspective de fortes pertes électorales si elles n’appelaient pas un référendum les ont obligé à agir de la sorte.

    Malgré la volonté de provoquer une réaction et la manipulation des faits des médias, la réalité est que des millions de jeunes et de travailleurs qui n’ont pas voté lors du référendum ‘consultatif’ du 9 novembre ou n’ont pas assisté à la ‘‘journée nationale’’ DIADA, n’étaient pas opposés à la population catalane ayant le droit de décider de leur avenir. La grande majorité d’entre eux se sont mobilisés contre tout ce que le PP représente: les coupes budgétaires, les expulsions, la corruption. S’ils n’ont pas soutenu le référendum jusqu’à présent, c’est parce que le ‘‘processus’’ est dirigé par Puigdemont et Palau, des capitalistes catalans. Ces mêmes personnages ont toujours été du côté du PP contre les travailleurs, en approuvant les ‘‘réformes’’ du travail, les coupes budgétaires dans la santé et l’enseignement ou encore la privatisation d’entreprises publiques.

    Maintenant, tout cela peut changer. Il ne fait aucun doute que la répression déclenchée par le PP est un choc pour des millions de travailleurs et de jeunes issus des quartiers ouvriers de Catalogne. Les images de la Garde civile arrêtant des gens tandis que Rajoy se vantait avec arrogance des mesures répressives ont eu un impact sur la conscience de millions de personnes. Il s’agit d’une répétition de ce que les générations anciennes ont vécu sous Franco, tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la Catalogne. Nous ne devons pas oublier que les droits démocratiques dont nous jouissons aujourd’hui, y compris la restauration de la ‘‘Généralité’’ et du statut de gouvernement autonome de la Catalogne ont été le produit de la mobilisation de masse des travailleurs en Catalogne, dont beaucoup de migrants qui peuplent avec leurs familles les villes de la ceinture rouge de Barcelone et d’autres villes.

    À l’heure actuelle, les conditions sont présentes pour que bien d’autres encore rejoignent les millions de personnes déjà mobilisées, prêtes à défendre le référendum et à lutter contre la répression sans faire confiance au PDECAT. Les dirigeants de la gauche à l’échelle nationale et en Catalogne, conjointement avec les syndicats, pourraient appeler à une grève générale et ainsi mobiliser la classe ouvrière, les jeunes et les couches plus larges de la société tant en Catalogne qu’ailleurs, pour lutter contre le PP et la répression d’Etat. Ils pourraient ainsi se distancier clairement du PDECAT, et il serait alors possible de vaincre la répression et de lier ce combat à une lutte commune contre l’austérité et la privatisation. Cela ouvrirait la voie à un gouvernement de gauche et à l’instauration d’une république socialiste catalane.

    La CUP doit immédiatement lancer une lutte de ce type et rompre son pacte parlementaire avec la droite catalane.

    La seule façon d’assurer le droit à l’autodétermination est d’unifier la grande majorité de la population en Catalogne, sous la direction de la puissante classe ouvrière catalane, avec un programme qui considère comme inséparables la lutte pour l’auto-détermination et la lutte contre le capitalisme. Entre les mains de la bourgeoisie catalane, une véritable libération sociale et nationale de la Catalogne est impossible.

    Esquerra Revolucionària (le Comité pour une Internationale Ouvrière en Catalogne) appelle tous les travailleurs et les jeunes de Catalogne à se battre pour le ”1-O” et le droit de décider de leur avenir, contre ce coup autoritaire du PP et de l’Etat. Pour le droit de décider et de pouvoir voter ! Pour une République socialiste catalane qui met fin à des coupes budgétaires, qui créée des millions d’emplois, qui met en avant les droits du travail et des salaires décents, qui met fin aux expulsions et nationalise les banques et les entreprises pour mettre la richesse au service des besoins de la majorité !

    Une République socialiste catalane engendrerait une sympathie écrasante parmi les travailleurs du reste de l’Etat espagnol (qui souffrent du même ennemi – la bourgeoisie – et subissent les mêmes attaques) et dans tous les autres pays d’Europe, ouvrant la voie à la transformation sociale et à la libération de tous les peuples opprimés.

  • Les partis établis stimulent la division nationale  pour contrer les luttes sociales croissantes

    Les partis établis stimulent la division nationale pour contrer les luttes sociales croissantes

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    Ces derniers mois, des vagues de colère contre la politique brutale du gouvernement ont déferlé sur le pays. Pour le gouvernement et les médias traditionnels, ce sont des ‘‘grèves politiques’’ de francophones pour faire tomber le gouvernement N-VA et porter le PS au pouvoir. Mais si la résistance contre les politiques antisociales a un impact différent côtés néerlandophone et francophone, cela provient notamment des stratégies différentes des dirigeants syndicaux. Des deux côtés de la frontière linguistique, le mécontentement est quasiment égal. Les dirigeants syndicaux flamands semblent avoir peur de prôner le renversement du gouvernement.

    Par Anja Deschoemacker, article tiré de l’édition d’été de Lutte Socialiste

    Différentes traditions existent bien, mais cela ne doit pas être exagéré. Le paysage politique est différent. Le gouvernement fédéral n’a jamais eu de majorité du côté francophone alors que le gouvernement flamand est identique au fédéral sans le MR. Le PS joue le rôle clé des gouvernements wallon et bruxellois. Même si le PS y applique une politique austéritaire au goût amer au niveau régional et local (comme en témoigne la percée du PTB dans les sondages), une solution de rechange au gouvernement fédéral semble évidente et en cohérence avec les coalitions régionales : un deuxième gouvernement Di Rupo. En Flandre, c’est différent: mettre la N-VA de côté au niveau fédéral et en Flandre est mathématiquement possible avec les majorités parlementaires actuelles, mais cela signifie d’écarter le parti qui est incontestablement le plus grand de Flandre.

    Alors oui, le mouvement des travailleurs est confronté à des situations différentes qui, à certains moments, peuvent conduire à une divergence sur ce qui est considéré comme possible à court terme. Mais il serait faux de sauter à la conclusion selon laquelle le gouvernement Michel n’a pas de base sociale du côté francophone, mais dispose du soutien du ‘‘peuple flamand’’, y compris la classe des travailleurs. La participation des travailleurs flamands au premier plan d’action de 2014 et à la manifestation de masse d’octobre 2015, le soutien populaire aux vagues d’actions et l’aversion pour les mesures gouvernementales,… démontrent clairement l’inverse.

    Ce n’est pas surprenant que le gouvernement et les médias bourgeois essaient de communautariser la lutte sociale. Stimuler les divisions communautaires dans les périodes de montée des conflits sociaux est un outil classique des partis établis du pays, des deux côtés de la frontière linguistique d’ailleurs. Jusqu’à récemment, les diplomates et politiciens belges se rendaient partout dans le monde pour conseiller comment intelligemment diviser pour régner dans des pays connaissant des conflits nationaux. La question nationale est la principale raison pour laquelle, dans l’histoire officielle récente, jamais un gouvernement n’est tombé suite à la lutte souvent tumultueuse de la classe ouvrière belge. Dans les années 80’, la chute du gouvernement a été attribuée à la question des Fourons et non pas aux luttes sociales prolongées et massives contre les gouvernements de Martens et Verhofstadt (‘‘baby Thatcher’’). Un gouvernement renversé par le mouvement des travailleurs place directement le gouvernement suivant sous haute pression pour une politique plus sociale. Les partis établis en Belgique sont ainsi solidaires les uns des autres. Une fois leur récolte austéritaire effectuée peut survenir la réconciliation nationale.

    Aujourd’hui, c’est surtout la N-VA qui recourt à la carte du communautaire, mais elle n’a pas la confiance de la bourgeoisie pour la jouer correctement. Le parti indépendantiste s’est montré prêt à enterrer la question nationale pour cinq ans afin d’appliquer une politique d’austérité brutale au goût du patronat flamand. La bourgeoisie a pris un risque calculé en lui donnant cette responsabilité, dans l’espoir de faire d’une pierre deux coups: réaliser les rêves du patronat belge, en particulier en termes de politique antisyndicale, et brûler la N-VA au pouvoir, afin de faire revenir la stabilité.
    Nous avons besoin que le mouvement des travailleurs comprenne mieux ce jeu d’échecs politique afin d’y répondre. Il faut toutefois prendre garde à ne pas se laisser distraire de la lutte des classes, la seule lutte capable de poser les bases d’une solution aux problèmes sociaux et à la question nationale. Nous avons besoin de débattre et d’assurer que nous regardions tous dans la même direction cet automne : la poursuite du nouveau plan d’action syndical jusqu’à la victoire sur toutes les exigences centrales du mouvement. En bref, mettre fin à l’austérité et arracher le retrait des attaques déjà votées contre les droits et conquêtes sociales de la classe des travailleurs. Pour cela, il faut renverser le gouvernement. Ce n’est pas LA solution, mais c’est une étape nécessaire dans cette direction.

  • Le retour de la zizanie communautaire

    La N-VA n’as pas de quoi se jeter des fleurs avec sa politique économique…

    jente8-300x200Il a eu la mise en place de la commission Vuye pour développer l’approche concrète de la N-VA au sujet du confédéralisme. Ensuite, Peter De Roover, principal représentant du mouvement flamand dans la fraction parlementaire de la N-VA, a été nommé chef de groupe N-VA à la Chambre, ce qui en a fait l’une des figures les plus en vue du parti. Puis la ministre l’intérieur flamande N-VA Liesbeth Homans a rejeté l’acte de désignation de Damien Thiéry comme bourgmestre de la commune à facilités de Linkebeek après la démission du bourgmestre Eric De Bruycker en novembre. Et, enfin, les déclarations fracassantes du ministre-président flamand N-VA Geert Bourgeois en faveur d’une Constitution flamande (et donc d’une révision de la Constitution belge).

    Par Anja Deschoemacker

    Tout cela ne survient pas par hasard au moment où il semble que la politique socio-économique du gouvernement de droite ne parvient pas à sortir l’économie du marasme, avec la persistance d’une croissance faible et des déficits budgétaires. Depuis quelques mois, les sondages font état d’une baisse du soutien de la N-VA, même si le parti reste le plus grand, et de loin. Mais une partie de ses électeurs s’enfuit, certains vers l’extrême droite, d’autres vers ses partenaires de coalition du centre-droit traditionnel.

    Au début de la coalition kamikaze, les attentes étaient considérables à la base de la N-VA. Le triomphalisme régnait. Ce “gouvernement socio-économique” allait enfin remettre un peu d’ordre, on allait en finir avec les “chipotages dans la marge” pour appliquer des réformes fondamentales. Un gouvernement sans la social-démocratie allait économiquement guérir le pays. Pour que cela devienne possible, il a fallu imposer à la partie francophone un gouvernement fédéral qui n’avait même pas recueilli un quart des votes francophones. Fini le “l’indolence wallonne” qui entravait l’essor de la “Flandre entreprenante”… Cette politique d’austérité brutale était personnifiée par un des idéologues les plus à droite de Flandre : l’ancien rédacteur en chef du magazine économique et financier Trends, l’actuel ministre des finances Johan Van Overtveldt.

    L’idée était que le PS se replierait vite sur lui-même, après quelques années d’un gouvernement purement de droite. Mais de même que leur politique a fait choux blanc, cela n’a pas vraiment fonctionné. Les figures de proue du PS ont utilisé la politique d’austérité dure du gouvernement fédéral pour essayer de s’offrir une nouvelle virginité politique, comme si c’était possible après plus de trente de collaboration à la politique néolibérale de sous-financement systématique et de démolition des services publics. Le parti n’adopte pas un discours régionaliste wallon et il ne refuse pas d’imposer l’austérité dans les gouvernements régionaux où il siège. Ce n’est que dans les mots, et de temps en temps seulement, qu’il se fait la figure de proue de l’opposition à la politique d’austérité et aux attaques contre la classe des travailleurs. Dans les faits, le PS s’est déjà profilé comme alternative au gouvernement actuel au service de la bourgeoisie, pas comme une alternative de gauche.

    Au milieu d’un processus, il est difficile de déterminer exactement quel sera le résultat final. Les contradictions internes peuvent éclater à tout moment. La N-VA reste le plus grand parti de Flandre et son programme socio-économique concentre les rêves des petits et moyens patrons flamands. Mais le parti échappe au contrôle de la bourgeoisie, diverses section de la classe dirigeante ne lui font pas confiance. De Wever & Co marchent sur la corde raide en essayant de concilier l’exécution du programme de la bourgeoisie et le recours à un discours populiste pour s’attirer le soutien d’un électorat en colère contre l’establishment et la politique des gouvernements précédents. La N-VA tombera à un moment donné.

    Elle en est bien consciente. Réanimer le spectre nationaliste est une manœuvre de diversion destinée à son électorat, lui aussi durement touché par l’austérité, tout en essayant de rassurer sa base traditionnelle nationaliste flamande. Les propositions de confédéralisme, notamment au sujet d’une Constitution flamande, se sont jusqu’ici heurtées à la désapprobation de ses partenaires de coalition. Ses partenaires flamands travaillent déjà à se profiler à son détriment, cela est évident dans le débat sur le contrôle budgétaire. Si la N-VA perd des plumes électoralement, et cela va arriver, ils lui enfonceront un poignard dans le dos. L’opposition à son programme nationaliste flamand peut être le prétexte idéal pour la laisser tomber et faire une concession à l’opposition sociale contre la politique de droite.

  • [TEXTE de CONGRES] Le véritable enjeu de l’impasse communautaire

    texte_congres_communautaireLa situation politique actuelle en Belgique ne peut vraiment pas être comprise sans jeter un oeil sur l’impasse communautaire qui a gardé notre pays sous son emprise depuis de nombreuses années. Dans cette partie du texte de perspectives, nous examinons ce qui se cache véritablement derrière elle. 

    Le texte qui suit est la quatrième partie du texte de perspectives internationales et belges discuté, amendé et voté lors du Congrès national du PSL de novembre 2015. Ce texte est également disponible sous forme de livre et arrivera de chez l’imprimeur début de semaine prochaine. Commandez dès maintenant votre exemplaire en versant 10 euros sur le compte BE48 0013 9075 9627 de ‘Socialist Press’ avec pour mention « texte de Congrès ». les commandes seront envoyées à partir du lundi 1er février.


    texte_congres_livreLe grand capital est allé beaucoup plus loin que la majorité de ses collègues dans d’autres pays. L’économie ouverte, le marché intérieur limité, mais surtout son conservatisme aide à l’expliquer. Il est allé tellement loin là-dedans qu’il a commencé à négliger à partir des années ‘90 les institutions où il exerce traditionnellement sa domination : ses instruments politiques, l’église, l’enseignement, la justice, les médias, etc. Tout ce que Marx décrit comme superstructure. Tant que l’économie connaissait la croissance, personne ne s’en inquiétait. Nous nous attaquerons au problème quand il se posera, disait le défunt premier ministre Jean Luc Dehaene. Mais du moment que l’économie commençait à avoir des ratés, les faiblesses sous-jacentes et les frustrations ont remonté à la surface avec vigueur. Alors, le système a commencé à se heurter à ses contradictions. En Belgique, il y en a traditionnellement surtout trois : les contradictions de classe, nationales et confessionnelles. La contradiction de classe est la plus importante et a, comme d’habitude, fait surface en premier.

    De fait, le mouvement des travailleurs aurait pu imposer son alternative tout ce temps s’il avait disposé d’une direction qui en était réellement convaincue. La grève générale de 1993 contre le plan global était numériquement la plus grande depuis 1936 ! L’innovation de l’époque était le blocage des zones industrielles, des zonnings. Mais la chute du stalinisme dans les pays du Bloc de l’Est avait considérablement miné la confiance envers la possibilité d’une alternative au capitalisme. La social-démocratie a instrumentalisé la frustration et la désorientation à ce sujet pour se débarrasser de chaque référence au socialisme et embrasser l’économie de marché. Les directions syndicales étaient fondamentalement d’accord, même si elles ne pouvaient pas toujours l’admettre ouvertement. « Si nous balayons ce gouvernement par la grève, toute alternative serait encore plus à droite » était leur excuse pour étouffer le mouvement.

    Cela a pris du temps avant que le mouvement des travailleurs ne se remette de cette trahison. Mais en 1997, la délégation syndicale des Forges de Clabeq, malgré le sabotage ouvert des structures officielles des syndicats, a pu rassembler 70.000 syndicalistes dans sa marche multicolore. Elle en paya le prix fort : exclusion du syndicat et un procès qui a duré des années qui a absorbé énormément d’énergies et de moyens. Que les dirigeants syndicaux feraient tout pour faire couler une alternative des travailleurs était maintenant clair. Cela a une fois encore été illustré lors des grèves générales des 7 et 28 octobre 2005 contre le Pacte dit « des Générations ». Lors de ces grèves ont été expérimentés des piquets de grève communs aux grands axes routiers donnant accès aux villes. Mais de nouveau, les dirigeants syndicaux ont réussi à étouffer le mouvement. La division au sommet entre CSC et FGTB contrastait avec l’unité à la base, de plus les dirigeants syndicaux ont pleinement joué sur les contradictions communautaires. C’est alors que la scission de la centrale des métallos de la FGTB a été mise à l’ordre du jour et que les militants de l’ABVV ont symboliquement tourné leur dos au Congrès du SP.a.

    Avec cette direction, une voie de sortie hors de la crise ne pouvait pas venir du mouvement des travailleurs, mais elle ne pouvait pas non plus venir de la bourgeoisie. Son instrument politique principal, le CVP s’est retrouvé dans l’opposition en 1999, pour la première fois en 41 ans, suite à la crise de la dioxine. Il s’agissait de la première fois depuis les gouvernements du socialiste Leburton I et II en 1973 et 1974 que quelqu’un qui n’était pas chrétien-démocrate, Guy Verhoefstadt devenait premier ministre en 1999. Une opération de renouvellement s’imposait. En septembre 2001, le CVP est transformé en CD&V, mais le résultat électoral de 2003 fut décevant. Yves Leterme a repris la présidence de De Clerck. Il pensait que le CD&V ferait mieux de jouer ses atouts principaux : sa capacité de jongler avec les contradictions traditionnelles. Jouer sur les contradictions de classe au travers du MOC (Mouvement ouvrier chrétien) n’allait pas être apprécié par la bourgeoisie. La contradiction confessionnelle, le CD&V pouvait avoir à le regretter. Le plus sûr semblait encore de jouer la carte du communautaire. Depuis quelques temps, il y avait en Flandre la demande d’une formation bien située à droite et flamingante pour prendre le vent des voiles du Vlaams Belang. Pourquoi le CD&V ne pouvait-il pas incorporer cela ?

    Leterme a donc immédiatement joué cette carte. A cette époque, cela semblait être une opération inoffensive. En 2001, la N-VA a été créée des cendres de la Volksunie, dirigée par Geert Bourgeois l’empoté. En 2003, la N-VA n’avait atteint le seuil électoral qu’en Flandre occidentale, mais dans aucune autre province flamande, ni même pour le sénat. Que pouvait donc bien freiner le CD&V pour se renforcer ainsi sur son flanc flamand à partir de la Saint Valentin 2004, qui a donné naissance au cartel avec son partenaire N-VA afin de secouer fortement le gouvernement Verhofstadt ? A l’origine, le CD&V doit avoir pensé « bingo ». Lors des élections flamandes de 2004, le cartel a obtenu 26% et Leterme I était formé, avec deux autres cartels, SP.a-Spirit et VLD-Vivant. Lors des élections fédérales du 10 juin 2007, le CD&V/N-VA a obtenu une plus grande victoire (30%) avec presque 800.000 voix de préférence pour Yves Leterme. Kris Peeters est alors devenu ministre-président flamand. Mais après 194 jours, le Premier ministre sortant, Guy Verhofstadt, a dû former un gouvernement de transition puisque Leterme ne pouvait pas démarrer son gouvernement suite à l’absence d’accord sur la réforme d’Etat. Le 23 septembre 2008, le cartel prit fin.

    Ce n’est qu’à ce moment-là qu’il est devenu clair à quel monstre de Frankenstein Leterme venait de donner vie et qu’il avait estimé la situation de façon totalement erronée. Il y a toujours eu une couche de petits patrons flamingants pour laquelle l’émancipation sociale flamande devait ouvrir la voie à un rouleau compresseur patronal. A côté de cela, il y a une couche beaucoup plus large de petits patrons qui en fait n’ont que peu d’intérêts pour l’émancipation flamande mais qui réalisent bien qu’appliquer leur programme sur le plan fédéral est quasiment exclu. Si la Flandre peut servir de levier pour la casse sociale, alors il ne faut pas hésiter. Tant le Vlaams Belang que la Liste Dedecker se sont offerts à cette couche pour devenir leur porte-parole politique. Mais pour cela, le nationalisme flamand était trop compromis. En raison du cartel avec le CD&V, la N-VA a soudainement été libérée des soupçons d’autoritarisme qui pesaient sur elle, ces patrons flamands ont saisi leur occasion. Au lieu de renforcer le CD&V, Leterme a offert à la N-VA le chainon manquant pour rendre le nationalisme flamand à nouveau fréquentable.

    Les partis classiques ne peuvent pas arrêter la montée de la N-VA

    A partir de ce moment-là, il n’y avait plus rien à faire. En 2009, la N-VA a décroché une victoire sur base de ses propres forces aux élections européennes et surtout aux régionales. Elle a obtenu 13% et rejoint Peeters II au gouvernement flamand, une coalition qui réunissait la N-VA, le Spa et le CD&V. En 2010, Alexander De Croo (VLD) a provoqué des élections fédérales anticipées. Il a fait tomber Leterme II faute de solution concernant l’arrondissement électoral de Bruxelles-Hal-Vilvorde (BHV). C’est le seul arrondissement où des partis d’une autre communauté linguistique pouvaient déposer des listes dans une région unilingue – Hal-Vilvorde – une infraction de la législation linguistique selon les partis flamands. Une scission de l’arrondissement devait en finir avec cette « discrimination ». Les partis francophones n’étaient pas enthousiastes parce que beaucoup d’électeurs francophones y habitent. Dans ces élections anticipées, la N-VA est devenue le plus grand parti du pays en termes de nombre de voix. Une solution pour BHV, des compétences supplémentaires pour les régions et une révision de la loi de financement étaient devenues inévitables.

    Il fallu un record mondial de 541 jours de formation gouvernementale afin de mettre en selle le 6 décembre 2011 Di Rupo I, une coalition tripartite classique. Au jour 459 et survenue la 6e Réforme d’État dite « l’accord papillon » en référence au nœud de Di Rupo. Pour cela, il fallait d’abord que le MR éjecte le FDF avec lequel il était en fédération depuis 1993. Comme nous l’avions prévu, cet accord papillon n’a pas conduit à la scission de la Belgique ni à la révolution copernicienne du fédéralisme vers le confédéralisme. Mais les partis flamands pouvaient réclamer l’arrivée de la scission de BHV avec un minimum de compensations tandis que pour les francophones des 6 communes à facilités, il était possible de voter sur des listes de Bruxelles. Un nombre non-négligeable de compétences, y compris de la sécurité sociale, ont été transférées vers les régions ou les communautés.

    Mais il y avait nombre d’anguilles sous roche. Ainsi, les communautés ont reçu des dotations pour leurs nouvelles compétences, mais pas sans économies automatiques puisque la croissance économique n’est que partiellement prise en compte, dans les soins de santé et les soins au troisième âge par exemple. Les communautés sont responsabilisées et doivent dorénavant contribuer aux pensions de leurs fonctionnaires statutaires. Une compensation est prévue pour les communautés qui perdent des moyens avec la nouvelle loi de financement, mais elle est destinée à disparaitre après dix ans. Les régions reçoivent un système de dotation orienté vers les prestations, avec des boni (ou des mali) pour atteindre des objectifs concernant l’emploi ou encore déterminés par la commission nationale du climat. De plus, ils peuvent utiliser les centimes additionnels sur l’impôt sur les personnes physiques. Ils ont aussi la possibilité des diminutions d’impôts aux sociétés. Elles aussi sont responsabilisées pour le paiement des pensions de leurs fonctionnaires statutaires.

    La 6e Réforme d’Etat contient toute une série d’ingrédients qui garantissent toute une série d’explosions communautaires et ne mèneront certainement pas une pacification durable sur le plan communautaire. Pour cela, la tentation de saboter le niveau d’autorité avec une autre composition politique en utilisant ses propres compétences est trop grande. Le ministre président flamand Bourgeois a fait toute une histoire pour que l’autorité fédérale se retire de l’Organisation Internationale de la Francophonie (OIF). Le gouvernement wallon s’est opposé à la répartition des efforts budgétaires du fédéral. [110] Magnette a reproché au gouvernement fédéral de traiter les régions comme des colonies. [111] Cela n’a vraiment pas aidé que le ministre fédéral des finances le N-VA Van Overtveldt ait sous-estimé la dotation aux Etats régionaux de 600 millions d’euros. [112] Les 310.000 francophones en Flandre se plaignent de harcèlement continu. [113] La ministre flamande N-VA Homans a refusé de nommer le candidat bourgmestre de son partenaire fédéral MR à Linkebeek et a voulu y envoyer un commissaire du gouvernement. [114] Elle a vexé Michel en prétendant, au parlement flamand, que la mission commerciale au Japon du gouvernement fédéral était une infraction de compétences. [115]

    Entretemps, le pyromane Geert Bourgeois a commandé une nouvelle étude sur les transferts à destination de la Wallonie. [116] L’université de Namur estime cela à 8 milliards d’euros par an. [117] Déjà auparavant, la N-VA avait revendiqué l’ouverture de l’Article 195 de la Constitution, ce qui est considéré comme un pas supplémentaire vers le confédéralisme. [118] Dans ce cadre, De Wever a fait noter dans la presse qu’il continue à œuvrer pour l’autonomie fiscale complète. [119] La région bruxelloise est bien refinancée, mais les moyens exigés par l’explosion de la population sont plus importants que ça. Demander de nouveaux moyens à un moment où la nouvelle loi de financement est en discussion puisque le trou dans le budget flamand est plus important qu’attendu ne sera pas une promenade de santé. [120] En ce qui concerne le manque de mobilité sur le marché de l’emploi, c’est à relativiser. Entre 2005 et 2014, le nombre d’habitants de Wallonie travaillant en Flandre a augmenté de 42% vers presque 50.000. Il y a 47.000 habitants de Bruxelles qui travaillent en Flandre, une augmentation de 28%. Le nombre de Flamands qui travaillent en Wallonie a augmenté dans la même période de 29% vers 25.000, alors que les Flamands qui travaillent à Bruxelles a diminué de 0,7% vers 234.000.

    Le gouvernement Di Rupo ne voulait pas simplement enlever du vent des voiles de la N-VA sur le plan communautaire mais aussi démontrer que les économies pouvaient aussi être réalisées avec le PS et sur le plan fédéral. Au début, le formateur Di Rupo trainait encore les pieds. Mais lorsque, fin 2011, Standard & Poor a dégradé sa note pour la Belgique, les taux d’intérêt ont sauté vers 6%. Le premier ministre démissionnaire Yves Leterme a alors fait appel à l’épargnant belge avec un bon d’Etat à 4% d’intérêt (pour ceux de 5 ans) et un précompte mobilier réduit (15% au lieu de 25%). En un minimum de temps, 6 milliards d’euros ont ainsi été collectés. Cela rendait clair pour les « marchés » que spéculer sur un scénario catastrophe vis-à-vis de la Belgique n’avait pas de sens puisque les épargnants belges pouvaient massivement financer la dette publique. Pour Di Rupo, c’était la sonnette d’alarme nécessaire. Les jours qui ont suivi, un accord a été conclu visant à complètement éliminer les déficits budgétaires d’ici 2015. Le 22 décembre 2011 déjà, une grève de 24 heures contre la réforme des pensions a touché les services publics et, le 30 janvier 2012, une grève générale a suivi, caractérisée par un énorme nombre de piquets de grève aux portes des entreprises.

    Mais il était illusoire de pouvoir enlever le vent des voiles de la N-VA en appliquant soi-même l’austérité. Aux élections provinciales et communales de 2012, la N-VA a obtenu une nouvelle victoire éclatante, de même que dans les élections fédérales de 2014. La N-VA obtenait alors 32,5% pendant que le PS perdait quasiment 5%. Mais celui qui en conclurait que les Flamands sont anti-belges se trompe. Même lors du sommet des discussions communautaires, seuls 22% des Flamands se sont résolument prononcés en faveur de l’indépendance alors que 75% préféreraient ne pas voir disparaitre la Belgique et que 42% s’opposaient résolument à l’indépendance. Comparez cela à l’Écosse ! Même après une véritable campagne d’intimidation, encore 45% de la population s’est prononcée pour l’indépendance lors du référendum du 18 septembre 2014. Le 7 mai 2015, cette victoire à la Pyrrhus des politiciens de Westminster a d’ailleurs été punie. Le Scottish Nationalist Party (SNP) arrachait alors 56 des 59 sièges écossais pour le parlement britannique aux conservateurs (Tories), aux travaillistes et aux libéraux-démocrates qui n’ont plus gardé qu’un seul siège chacun. La participation au référendum symbolique en Catalogne en novembre 2014 était faible, avec 2,2 millions de participants sur les 5,5 millions d’électeurs mais, de ceux-là, 80% se sont prononcés en faveur de l’indépendance.

    Une étude de l’UCL sur le niveau de pouvoir auquel les Belges s’identifient le plus confirme cela. En 2014, 23% des Flamands s’identifiaient explicitement avec la Belgique, le double de 2010. Seuls 17% se sentent plutôt Flamands que Belges. En 2010, c’était encore 27%. S’identifient exclusivement avec la Flandre : 8,7% en 2014 contre 8% en 2010 et 7% en 1999. En Wallonie, 37% se sentent exclusivement belges et seulement 12% plutôt wallons que Belges. Des électeurs de la N-VA, 42% s’identifient soit en premier soit en deuxième lieu avec la Belgique, contre 3,3% du cade du parti. Parmi les cadres du PS vit un certain régionalisme alors que, chez sa base électorale, on constate plutôt un belgicisme. [121] Une analyse de la KUL sur le rôle du communautaire dans les élections du 25 mai 2014 illustre que, pour les électeurs flamands, le défi principal des élections était la thématique sociale (presque 40%), puis économique (presque 30%) et seulement pour 6% le communautaire (contre 20% en 2010 et 13% en 2007). Le nombre d’électeurs flamands qui se disent unitaristes ou en faveur d’un retour à une Belgique plus fédérale reste stable depuis 2003 à 24%. Le nombre de partisans d’une scission du pays a diminué de 12% en 2010 vers seulement 6%. Même au Vlaams Belang, en 2014, seuls 31% veulent la scission du pays. A la N-VA, ce n’est que 11%. A la question « à quel niveau l’électeur flamand se sent-il le plus lié », 56% répond « la Belgique » en premier choix et 22% en deuxième choix. La Flandre est le premier choix pour 27,7% et pour 37,9% est le deuxième choix. Sa propre commune est pour 12,8% le premier choix et pour 23% le deuxième. [122]

    Pourquoi la social-démocratie et les verts n’ont-ils pas remporté les élections de 2014 avec leurs thèmes comme défis majeurs ? Parce qu’ils ont perdu toute crédibilité. Le programme de la N-VA est de droite néolibérale et flamand, mais ce n’est pas ça qui explique son succès. Mais, bien qu’il réussit à exploiter les frustrations des classes moyennes et de transformer le manque d’alternatives de la part du mouvement ouvrier électoralement en sa faveur. Elle le fait par la politique traditionnelle de « diviser pour mieux régner ». Elle raconte à l’indépendant que les salaires des salariés sont trop élevés. Aux Flamands qui « travaillent durs », que les autorités lui extorquent son salaire pour le donner aux chômeurs-profiteurs qui s’installent dans le hamac de la sécurité sociale. Aux habitants des logements sociaux et aux allocataires sociaux, que les migrants et les demandeurs d’asile qui n’ont jamais contribué à la sécurité sociale viennent s’installer ici. Aux bons migrants chinois, que les berbères marocains empoisonnent la situation. La N-VA sait parfaitement jouer sur les frustrations et à chaque fois montrer un bouc émissaire pour dévier l’attention du problème réel : la course aux profits propre au capitalisme. Le communautaire ne joue-t-il pas du tout ? Mais si. Lorsque le mouvement des travailleurs n’offre pas d’issue, beaucoup, surtout dans les couches moyennes iront à la recherche ailleurs et alors les tambours communautaires peuvent à nouveau trouver un écho.


     

    110 Trois forces centrifuges qui écartèlent l’Etat, Le Soir 4 avril 2015
    111 Régions et fédéral campent sur leur positions, Le Soir 2 avril 2015
    112 Zesde staatshervorming veroorzaakt budgettair kunst- en vliegwerk, De Tijd 8 juli 2015
    113 Tracasseries, protection des minorités: les francophones de Flandre oubliés, Le Soir 10 juin 2015
    114 Un commissaire pour dégomer Thiéry, Le Soir 8 juillet 2015
    115 Michel woest na uithaal Homans, De Standaard 21 mei 2015
    116 Daar zijn de transfers opnieuw, De Standaard 11 april 2015
    117 ‘Jaarlijks vloeit 8 miljard euro naar Brussel en Wallonië’, De Standaard 6 mei 2015
    118 L’institutionnel s’invite dans les négociations, Le Soir 7 octobre 2014
    119 Autonomie fiscale: le Nord rêve de l’obtenir, Le Soir 20 août 2015
    120 Geen lusten zonder lasten, De standaard 3 april 2015
    121 L’attachement à la Belgique augmente, Le Soir 12 mai 2015
    122 Het communautaire in de verkiezingen van 25 mei 2014, analyse obv de postelectorale verkiezingsonderzoeken1991-2014

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