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  • Nouvelles Conquêtes – Encore une opportunité manquée pour le PS

    Le Parti socialiste subira sans doute une punition électorale ces prochaines années. Sa base ouvrière traditionnelle est de plus en plus remplacée par des couches plus aisées. Il reste pourtant un facteur politique important de même qu’une force dans le mouvement des travailleurs en raison de son histoire et du lien qu’il entretient avec l’appareil syndical de la FGTB. C’est précisément pour cela que le PSL a consacré un atelier de discussion au nouveau livre de Di Rupo, Nouvelles Conquêtes, à l’occasion de son week-end de débats ‘‘Socialisme 2017’’.

    Par Eric Byl

    En dehors de l’orateur, pas un seul des plus de 40 participants – tous activistes du mouvement des travailleurs ou de la jeunesse – n’avaient lu le livre. Ce dernier a néanmoins bénéficié d’une large couverture médiatique qui l’a caractérisé de virage à gauche. Cela à lui seul en dit long sur la crédibilité du PS. Celui qui avait espéré que le PS adopterait un autre cours dans le sillage du nouveau président du parti travailliste britannique Jeremy Corbyn, qui n’est même pas mentionné dans le livre, en est pour ses frais. Bien qu’il a été écrit au moment des scandales autour de Publifin et du Samusocial, qui ont montré qu’un nombre considérable de bonzes du PS sont tout aussi gourmands que de nombreux CEO, on ne lit pas un mot à ce sujet. De plus, hormis quelques remarques cosmétiques, Di Rupo défend intégralement la politique gouvernementale du PS, y compris la privatisation de la RTT (devenue Proximus) qu’il prétend avoir sauvée. Le fait que le parti soit allé trop loin dans sa recherche de compromis et soit donc tenu pour responsable de la politique de démolition sociale néolibérale n’est pas écrit. Di Rupo persiste au contraire : ‘‘sans compromis, la droite va toujours gagner’’.

    La tradition du ‘‘chantier des idées’’

    Nouvelles Conquêtes avait cependant l’ambition d’être la dernière pièce d’une grande consultation interne de refondation : le ‘‘chantier des idées’’. Ce type d’exercice est une longue tradition dans le mouvement ouvrier. La fusion de l’Association générale des travailleurs allemands avec le Parti ouvrier social-démocrate pour constituer, en 1875, ce qui devint le Parti social-démocrate d’Allemagne (SPD) était accompagnée du programme de Gotha.Bien que Marx et Engels aient déjà été très critiques au sujet de son caractère réformiste, ce programme était l’expression d’une phase ascendante de la lutte des classes. Juste avant la Première Guerre mondiale, le SPD comptait plus d’1 million de membres, 15.000 permanents, 90 quotidiens et 4,25 millions d’électeurs qui ont donné 110 sièges au Bundestag. Le programme de Gotha fut un modèle pour le Parti ouvrier belge notamment (POB, 1885). Au cours de cette période, la Belgique est devenue le pays des ‘‘grèves politiques’’ (pour le droit de vote en 1886, 1892 et 1893). Cette radicalisation s’est exprimée dans la déclaration de principe du POB, la Charte de Quaregnon (1894). Même si cette dernière est un mélange d’influences anarchistes, réformistes et marxistes, elle affirme que les sources de toutes richesses – la nature et la force de travail – appartiennent au patrimoine de l’humanité. Ce patrimoine doit, selon la Charte, être dépensé de façon socialement utile au profit du bien-être et de la liberté de tous, ce qui est incompatible avec le capitalisme qui divise la société en deux classes antagonistes.

    La profondeur de cette opposition est illustrée par la résistance incessante de la classe dirigeante face à toute amélioration des conditions de vie du mouvement des travailleurs. Un programme ne devient une force que lorsqu’il est soutenu par un mouvement qui a aussi besoin de victoires pour générer suffisamment de puissance. Il a fallu la Révolution russe d’octobre 1917 puis la révolution allemande de novembre 1918 pour que la bourgeoisie belge soit prête à accorder des concessions substantielles par peur d’être expulsée du pouvoir : le suffrage universel masculin (1919), l’indexation des salaires (1920), la liberté d’association (1921), la journée de huit heures et la semaine de 48 heures (1921) et le retrait des grèves du droit pénal (1921). Aucun mot à ce sujet dans Nouvelles Conquêtes, où il n’est pas question de lutte de classe. Le seul endroit où l’on parle encore des ouvriers est la longue introduction autobiographique dans laquelle Di Rupo exploite ses origines familiales ouvrières. Pour le reste, nous ne trouvons qu’à peine mention de conflits sociaux par le biais de citations d’articles et de thèses d’universitaires renommés. Il semble que Di Rupo n’a pas vu ou parlé à un travailleur pour le chantier des idées du PS. Le fait que des travailleurs ont perdu leur vie, ont été brutalisés et persécutés, il ne le mentionne pas, il revendique toutes les conquêtes sociales comme étant l’oeuvre des ‘‘socialistes’’.

    Ces ‘‘socialistes’’ ont cependant dû être rappelés à l’ordre par les travailleurs à plus d’une reprise. Ce n’est qu’après que les mineurs se sont révoltés en masse en 1932, que le Borinage a été occupé par la gendarmerie et que les avions de chasse ont déchiré l’espace aérien, que le POB a décidé de faire campagne pour le plan De Man (1933), qui comprenait la nationalisation des matières premières ainsi que de l’énergie de même qu’un système de crédit public. Ce plan était loin d’être un programme socialiste, mais il a créé un enthousiasme qui a certainement contribué à la grève générale de 1936. 15 millions de journées de travail ont été perdues pour arracher les congés payés (6 jours), une augmentation salariale (8%) mais aussi l’introduction d’un salaire minimum et de la semaine de 40 heures dans diverses industries. Après la Seconde Guerre mondiale, la FGTB a adopté une déclaration de principes visant l’instauration d’une société sans classes, la socialisation du système bancaire et des groupes industriels, ainsi que le placement du commerce extérieur sous contrôle et gestion publics. Lors de ses congrès extraordinaires de 1954 et 1956, la FGTB plaida en faveurs de réformes structurelles : la nationalisation des mines, du gaz et de l’électricité, le contrôle public de tous les établissements de crédit et une politique d’expansion économique. Au congrès idéologique du PSB (qui succéda au POB) de 1974 encore, la Charte de Quaregnon a été réaffirmée, il y a été préconisé l’instauration d’une société sans classes, une production orientée vers la satisfaction des besoins, une économie démocratiquement planifiée, le plein emploi avec revenus suffisants, la souveraineté du peuple face aux pouvoirs économiques et une fédération socialiste d’Europe.

    Les supplications de Di Rupo

    En comparaison, Nouvelles Conquêtes ne dit rien. Ce n’est pas une plate-forme de revendications, il s’agit d’une supplication qui ne vise pas à imposer un rapport de forces avec le mouvement des travailleurs, mais à persuader les patrons de construire ensemble une Wallonie ‘‘forte et dynamique’’. Le PTB, le plus grand challenger du PS au Sud du pays, ne vaut pas d’être mentionné, tout comme l’appel du secrétaire général de la FGTB wallonne Thierry Bodson en faveur d’une majorité progressiste en Wallonie après les élections régionales. Di Rupo aimerait garder toutes les options ouvertes et ne pas nuire à une éventuelle alliance avec quelques patrons ‘‘progressistes’’ qui détestent l’idée d’une coalition avec le PTB. Mais Di Rupo comprend aussi qu’il doit proposer quelque chose : un bonus social généralisé qui permettrait aux revenus les plus bas d’atteindre le seuil de pauvreté, l’individualisation des droits sociaux, la diminution du temps nécessaire pour bénéficier d’une allocation de chômage d’insertion et le rétablissement de la pension à 65 ans. Sa proposition d’une semaine de quatre jours ne serait pas obligatoire, mais s’effectuerait par le biais de consultations avec les patrons prêts à le faire, tandis que les coûts seraient pris en charge par la sécurité sociale. La seule mesure qui ferait aussi contribuer les riches est la proposition visant à appliquer les barèmes d’imposition progressifs à la totalité des revenus perçus. De plus, Di Rupo veut rendre le remboursement de la dette publique plus dépendant de la croissance économique. Tout le reste, pour Di Rupo, doit venir de l’Europe à travers un protocole sur le progrès social, un salaire minimum européen de 60% du revenu médian, une convergence fiscale et une taxe Tobin (sur les transactions financières). Pourquoi donc la social-démocratie n’a-t-elle pas fait tout ça lorsqu’elle bénéficiait d’une large majorité en Europe ? Il ne s’étend pas sur ce sujet.

    Le livre de Di Rupo est-il complètement hors de propos ? Nous imaginons bien qu’il circule largement dans l’appareil de la FGTB francophone. Une brochure du CEPAG au sujet de la semaine des 4 jours et des 32 heures s’intéresse à la renaissance de la discussion sur la diminution du temps de travail et cite, pour souligner cela, les propositions du PS, du PTB, d’Écolo et de DEFI, mais aussi le patron de la Sonaca, le directeur de l’aéroport de Charleroi, l’organisation des classes moyennes UCM et l’économiste libéral Colmant. Sans le dire aussi explicitement, des illusions y sont promues quant à la méthode de Di Rupo pour aller convaincre les patrons à titre individuel. Di Rupo ne fait guère de revendications directes, aucune ne remet en question le système alors que cela est pourtant nécessaire pour répondre à des préoccupations concrètes et il ne présente aucun modèle de société alternatif. Il exprime simplement sa conviction que le développement historique convaincra progressivement les patrons de la nécessité d’accepter une politique sociale par le compromis. Toute l’Histoire démontre justement que les classes dirigeantes n’ont jamais renoncé volontairement à leurs privilèges, mais en conséquence de la lutte des classes et de la construction de relations de forces… Il trouve cela dépassé. Le mouvement des travailleurs, la gauche et les vrais socialistes doivent exposer les faiblesses de Nouvelles Conquêtes, mais parallèlement se saisir des quelques propositions concrètes pour en faire des points de combat réels et construire une véritable relation de forces afin de pouvoir également les appliquer.

  • Crise politique francophone: aux travailleurs de faire entendre leur voix

    Lorsque, le 19 juin dernier, le président du cdH Benoît Lutgen a retiré sa confiance aux gouvernements bruxellois, wallon et de la fédération Wallonie-Bruxelles (ex-Communauté française), il a justifié son geste en dénonçant les écœurants scandales à répétition qui ont frappé le PS. L’hypocrisie avait de suite sauté aux yeux (le parti ‘‘humaniste’’ ayant lui aussi été mouillé), elle fut encore illustrée à la mi-août, quand le site Cumuleo dévoila que pas moins de six des sept ministres du nouveau gouvernement wallon MR-cdH avaient ‘‘oublié’’ de déclarer certains de leurs mandats, fonctions ou professions…

    Que la collaboration avec le PS dérangeait Lutgen, issu de l’aile droite du cdH, ce n’était un secret pour personne. Ajoutez à cela les sirènes d’une participation éventuelle à une potentielle reconduction du gouvernement Michel au fédéral après 2019 et la chute du parti dans les sondages et vous aurez les principales données derrière le coup de poker de Lutgen. Sauf que, à la fin du mois d’août, il apparaissait prématuré d’avoir annoncé des majorités alternatives à tous les niveaux. Un accord se faisait toujours attendre à la région bruxelloise et à la Fédération WB et les sondages laissaient penser que Lutgen & Co passaient essentiellement pour d’opportunistes aventuriers fauteur de trouble.

    Panique généralisée

    Pas de quoi pavoiser au PS pour autant. Les sondages se suivent et confirment la chute de l’ancien géant, jusqu’à le reléguer en Wallonie en troisième position avec 16% derrière le MR et… le PTB. La colère gronde et a été illustrée par un sondage iVOX réalisé pour Sudpresse, dévoilé le 24 août. Ainsi, pour 2019 : ‘‘(…) c’est à des alliances de gauche que les électeurs PS appellent massivement, en ce compris avec… le PTB. (…) 57,5 % soutiennent une alliance avec Ecolo et 44 % avec le PTB. Toute union avec le MR est massivement rejetée. Mais une réconciliation avec le cdH l’est tout autant.’’

    Peu avant, Elio Di Rupo avait fait la une de la presse en essayant de se parer d’habits de gauche avec la sortie de son livre Nouvelles conquêtes mais le sondage susmentionné était sans appel : un tiers des électeurs du PS ne lui font tout simplement plus confiance, la moitié d’entre eux déclare vouloir modifier son vote s’il se maintient à la tête du parti et 35% assurent qu’ils ne voteront tout simplement plus pour le PS… L’avantage de ces propositions est toutefois qu’elles aideront à populariser certaines revendications essentielles pour répondre à la situation dramatique dans laquelle se trouve une certaine couche de la population.

    Le petit frère du fédéral

    L’Union Wallonne des entreprises (UEW), l’Union des classes moyennes (UCM) et la Confédération de la construction wallonne (CCW) n’ont pas masqué leur joie. Olivier Chastel leur a fait écho en expliquant ‘‘Notre priorité absolue c’est l’emploi’’, sur base de la promotion des flexi-jobs (lisez : précaires), du travail de nuit et autres e-commerce. Il n’a pas fallu longtemps pour que transparaissent dans les médias des appels à ‘‘modérer la taxation des entreprises’’, à limiter les dépenses des communes, ainsi qu’à instaurer un service minimum dans les transports en commun.

    Parmi la base syndicale et auprès d’une large couche de la population, l’inquiétude prévaut face à ce gouvernement régional qui promet les mêmes recettes indigestes qu’au fédéral. Elle doit devenir résistance. Dans celle-ci, le PTB pourrait jouer un rôle moteur. D’énormes possibilités s’ouvrent pour les travailleurs et la jeunesse pour autant qu’ils soient réunis et organisés autour d’une alternative politique combative large, ouverte et démocratique. Celle-ci devra activement mobiliser dans les quartiers, sur les lieux de travail et ailleurs afin de renforcer les syndicalistes les plus audacieux et désireux de ne laisser aucun répit aux partisans de l’austérité, d’où que viennent ces derniers. Le PSL soutiendra toute initiative allant dans cette direction.

  • Samusocial, Publifin & Co… Quelques pommes pourries? C’est tout le système qu’il faut changer!

    Le scandale du Samusocial, qui a vu le bourgmestre de la Ville de Bruxelles Yvan Mayeur présenter sa démission le 8 juin dernier, est venu s’ajouter à une liste déjà longue, très longue… Un aspect a toutefois été encore plus écœurant : on parle ici d’argent qui a été directement pris chez les plus pauvres, dans les poches d’une association qui vient en aide aux sans-abris.

    Un système à deux vitesses

    L’affaire Publifin-Nethys a, en quelque sorte, fait éclater la digue. Maintenant, l’eau arrive de toutes parts et les partis traditionnels ont bien du mal à garder la tête hors de l’eau. Il y a bien entendu la saga du Kazakhgate, qui a poussé à la démission Armand De Decker (MR) mais qui éclabousse jusqu’à Dider Reynders et Olivier Chastel. Et puis l’affaire Telenet dans laquelle a trempé le président de la Chambre Siegfried Bracke (N-VA). Ou l’Electragate autour de l’intercommunale Ores – qui gère le réseau de distribution de gaz et d’électricité de toute la Wallonie à l’exception de la province de Liège (où il s’agit de Resa, filiale de Publifin-Nethys…) – qui aurait surfacturé le prix de l’électricité pendant plus de 20 ans. Ou le scandale de l’Intercommunale de Santé Publique du Pays de Charleroi (ISPPC) où une somme de 240.000 euros aurait été détournée. Ou celui de Citydev, la société en charge du développement urbanistique de la Région de Bruxelles-Capitale, qui a été très généreuse (53.147,10 euros bruts en 2016) avec le président de son conseil d’administration Denis Grimberghs (CDH). Ou celui du CHU Brugmann. Ou celui de Sibelga. Des Cuisines bruxelloises. Etc. Etc.

    Les affaires n’en finissent plus. Il est question de juteux systèmes de jetons de présence, de réunions non-justifiées, de gestion peu transparente, de rémunération excessives, parfois purement et simplement de détournement de fond, de népotisme et de favoritisme, de passe-droits et d’autres entorses à la loi. Le petit monde bien tranquille des politiciens établis est aujourd’hui visible pour ce qu’il est : un microcosme qui repose sur la cupidité et la soif de pouvoir.

    Tout cela éclate après des années où la population a dû se serrer la ceinture et avaler les mesures d’austérité les plus ignobles sous le prétexte que les caisses de la collectivité sont vides. Et il y a de quoi ! Les grandes entreprises et les plus nantis croulent sous les cadeaux et ne paient qu’à peine un impôt. Les politiciens à la base de cette approche ont dû se dire ‘‘il n’y a pas de raisons qu’ils soient seuls à profiter de la mangeoire’’. Quand un travailleur commet une faute qualifiée de ‘‘grave’’, il peut être licencié et perdre ses droits aux allocations de chômage. Et tous ceux-là qui se sont servis sur notre dos ? Vont-ils seulement devoir rembourser tout l’argent qu’ils nous ont volé, dans le cadre de la loi bourgeoise ou non ?

    On ne nous rendra que ce que nous irons chercher !

    La CGSP-ALR (Administration locales et régionales) de Bruxelles a diffusé un tract intitulé ‘‘Pas de moyens ? Plus d’argent ? … ça dépend pour qui !’’ qui exige que ‘‘ce système d’enrichissement personnel sur le dos des usagers et du personnel des services publics doit s’arrêter immédiatement ! (…) Ce sont ces mêmes personnes qui, en réunions de négociation, osent nous répéter qu’il n’y a pas d’argent, pas de budget pour l’amélioration de nos conditions de travail!!’’ La CGSP-ALR exige à juste titre une revalorisation salariale pour tous les travailleurs, une amélioration des conditions de travail, des engagements supplémentaires et la prise en compte effective du bien-être au travail, la statutarisation de l’ensemble du personnel et la fin des contrats précaire et la transparence totale des rémunérations des mandats politiques.

    Il faudrait effectivement saisir la colère qui gronde parmi la population pour mobiliser cette dernière vers la défense et l’extension de nos services publics, de même que pour imposer une véritable transparence via l’implication centrale des travailleurs et de leurs organisations dans la gestion et le contrôle des divers services. Qui mieux que ces derniers peuvent mettre un terme au gaspillage et au managing toxique importé du privé tout en assurant que les intérêts des usagers et du personnel soient centraux ?

  • Crise politique: Vers des gouvernements de droite en Wallonie et à Bruxelles?

    L’Élysette, le siège de la présidence du Gouvernement wallon. Photo: Flickr, Myben.be

    Benoit Lutgen, président du Cdh, a sonné le glas des coalitions avec le PS en Wallonie, à Bruxelles et en Fédération Wallonie-Bruxelles, ouvrant ainsi la voie pour la constitution de gouvernements de droite dans les entités fédérées avec le MR. Pour y parvenir, ils devront en payer le prix afin d’embarquer à bord Défi, incontournable à Bruxelles, et éventuellement Ecolo.

    Edito, par Boris (Bruxelles)

    Les nombreuses affaires Publifin, Kazakhgate, Samusocial,… ont remis à l’avant plan ce secret de polichinelle : les politiciens du PS, MR et CDH sont rongés par le carriérisme et la cupidité. L’avalanche de révélations ne semble plus s’arrêter. L’affaire du Samusocial à Bruxelles-Ville, où des mandataires PS se servent dans les caisses destinées aux plus démunis, a provoqué un profond dégoût. L’instrumentalisation de ce sentiment par le CDH pour tirer la prise des gouvernements des entités fédérées est d’une hypocrisie crasse, ce parti étant lui-même mouillé dans plusieurs affaires. Mais avec des sondages toujours plus mauvais faisant poindre la menace d’une 5e place en Wallonie et d’une 6e à Bruxelles, il fallait probablement faire quelque chose pour tenter de sauver la peau du CDH.

    La bourgeoisification de la social-démocratie et son adhésion à la logique de casse sociale néolibérale ont favorisé l’arrivée de politiciens qui veulent se remplir les poches à la hauteur des cadres de haut vol du privé même dans des anciens partis ouvriers. A la différence des scandales qui ont frappé le PS de plain fouet au milieu des années 90 (INUSOP, Agusta,…) et au milieu des années 2000 (La Carolo), cette fois-ci, la grande récession de 2008 est passée par là. Elle a ouvert un processus de crise profonde pour la social-démocratie à travers l’Europe. En Grèce, en France, aux Pays-bas,… les partis-frères du PS ont été dépassés sur leur gauche. Chez nous, le PS avait encore pu tenir le coup auparavant, grâce à l’absence d’un concurrent de la gauche conséquente et en parvenant à se présenter comme une sorte d’opposition à l’intérieur des gouvernements nécessaire pour adoucir les mesures de casse sociale. Mais, depuis, il y a eu le gouvernement Di Rupo en charge d’éponger les dettes privées sur le dos de la collectivité, qui a ouvert la voie à un gouvernement thatchérien au fédéral.

    Après les révélations du scandale Publifin, le PTB est passé pour la première fois devant le PS dans un sondage en Wallonie, laissant présager une prochaine percée électorale historique. Ce climat de scandales à répétition a donné tout son sens à la pratique d’élus rémunérés à hauteur du salaire moyen des travailleurs. Des élus exigent forcément des rémunérations correspondantes à la classe sociale qu’ils défendent. Mais la crise de la social-démocratie ne fait pas sentir ses effets qu’à gauche, tel que nous avons pu le voir avec l’émergence de La République en marche ! d’Emmanuel Macron en France, dont tente de s’inspirer Lutgen.

    Dans les rangs patronaux, la crise politique en Wallonie et à Bruxelles est considérée comme une opportunité de renforcer le gouvernement Michel. Ainsi, pour l’Union Wallonne des Entreprises : ‘‘Cela rétablirait une certaine symétrie. Et ce serait a priori une bonne chose, car les mesures que prend le fédéral pour réduire le coût du travail et son projet de réforme de l’impôt des sociétés sont d’une grande importance pour les entreprises.’’ Au sein du MR, certain ironisent aujourd’hui sur le terme de ‘‘gouvernement kamikaze’’ qui avait été collé au gouvernement fédéral à ses débuts. Pourtant, à l’automne 2014, le mouvement de grèves l’avait bel et bien mis à genou. Mais l’occasion de lui porter le coup de grâce a été manquée.

    S’en remettre à l’espoir que les élections de 2019 puissent délivrer un tout autre gouvernement est une illusion. Le gouvernement Michel reste fragile, mais sa plus grande force est la faiblesse de son opposition, avec en premier lieu un PS discrédité. Aujourd’hui, l’idée d’une opposition PS-CDH via les entités fédérées a volé en éclat. Cela conforte la possibilité de l’arrivée du CDH au fédéral après les élections de 2019 en cas de besoin pour reconduire un nouveau gouvernement de droite dure. L’avertissement est sérieux pour le mouvement des travailleurs. Nous avons besoin de mesures concernant la transparence de la vie publique mais elles ne sont en soi pas suffisantes. Il nous faut également, et surtout, un programme de lutte pour construire un rapport de force favorable aux travailleurs et à leurs familles. Mais aussi des élus qui vivent d’un salaire similaire au nôtre pour défendre un tel programme de changement social. C’est dans cette optique que le PSL, malgré ses forces modestes, tend la main au PTB pour l’aider à saisir au maximum les opportunités actuellement présentes.

  • Scandale Publifin/Nethys. C’est notre argent, pourquoi n’en avons-nous pas le contrôle ?

    Le chercheur en sciences politiques François Gemenne (ULg) n’y est pas allé de main morte en qualifiant sur la RTBF la structure Publifin-Nethys de ‘‘mafieuse’’ : ‘‘C’est un système de nature mafieuse car il fait la loi lui-même, il distribue de l’argent à tout le monde pour que personne ne pose de questions.’’ Et de l’argent, il en est effectivement beaucoup question, jusqu’à en donner le tournis. Et c’est le nôtre.

    Article tiré de l’édition de février de Lutte Socialiste

    Publifin (anciennement Tecteo) est une société coopérative intercommunale ayant entre autres à charge Nethys, VOO, l’intercommunale Liégeoise de l’électricité et du gaz, les éditions de l’Avenir, etc. En bref, il s’agit d’une boîte énorme (entre pouvoir public et privé) dont le chiffre d’affaire consolidé officiel s’élèverait à 759,1 millions d’euros. Son capital est détenu à 52% par la province de Liège et à 47% par 76 communes.

    Le scandale a tout d’abord commencé par les révélations concernant la générosité de l’intercommunale vis-à-vis des 31 membres (CDH, MR et PS) de ses quatre comités de secteur : 1.340 à 2.871 euros bruts par mois pour des réunions peu fréquentes, non-obligatoires et seulement consultatives (à l’intérêt douteux, donc). Au final, le coût de ces salaires exorbitants s’élève à 2,5 millions d’euros et, au vu de l’irrégularité des réunions, représenterait un bénéfice pouvant aller jusqu’à 516 euros la minute de réunion.

    Bien que parfaitement légal, c’était déjà problématique, surtout en ces temps d’austérité. Mais les choses se sont emballées, les révélations fracassantes ont succédé aux révélations fracassantes. Il a ainsi été révélé que Daniel Weekers, le ‘‘conseiller stratégique’’ de Stéphane Moreau, CEO de Nethys et bourgmestre (PS) d’Ans, gagne 50.000 euros bruts par mois, ce à quoi s’ajoute encore diverses primes et avantages. Une belle somme, qui revient chaque année à 600.000 euros et qui équivaut à plus du double du salaire du premier ministre. Une source anonyme a expliqué au quotidien L’Echo que pour pareil rémunération, ‘‘il travaille 10 heures par semaine’’.

    Stéphane Moreau ne pouvait bien entendu pas être en reste. Toujours selon L’Echo, il toucherait quelque 80.000 euros bruts par mois, soit 960.000 euros bruts par an ! A cela s’ajoute encore, notamment, son salaire de bourgmestre de 80.000 euros. D’autre part, Nethys aurait distribué 4,4 millions d’euros à ses administrateurs, parmi lesquels huit politiques (six mandats PS, un MR et un cdH) en 2014 et 2015 seulement. Et ce ne sont là que quelques exemples…

    Et maintenant ?

    Quand le scandale de ‘‘La Carolo’’ a éclaté en 2005 à Charleroi, tous les politiciens établis ont fait part de leur indignation. Elio Di Rupo avait déclaré, la main sur le cœur : ‘‘Je ne veux plus des parvenus. Je les traquerai moi-même, j’en ai marre des parvenus. Il n’y a pas de place pour les parvenus au parti socialiste’’. Les équipes de com’ d’Elio et les autres peuvent s’économiser pas mal de boulot en reprenant aujourd’hui les déclarations de l’époque… Avec la crise économique, ce fut la même chose : tout le monde parlait de s’en prendre aux banques et au monde de la finance, de ‘‘moraliser le capitalisme’’, etc. Au final, rien n’a changé. Business as usual.

    Dans ces deux exemples, un seul constat s’impose : on ne contrôle pas ce qu’on ne possède pas. En finir avec la dictature de la finance implique de lutter pour la collectivisation du secteur financier. En finir avec les pratiques de Moreau & Co (tout à fait légales jusqu’ici, à la différences de ‘‘La Carolo’’) – et assurer que les autorités publiques œuvrent réellement au bien-être de la collectivité – signifie que les propriétés d’Etat doivent être effectivement contrôlées et gérées par les travailleurs et les usagers et non tout simplement fonctionner comme des entreprises privées dans lesquelles des institutions sont simplement actionnaires.

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    Modération salariale pour les uns… et vraiment pas pour les autres

    Voici ci-dessous quelques salaires de politiciens et de CEO d’entreprises publiques. Selon nous, un représentant des travailleurs doit gagner l’équivalent du salaire des travailleurs. C’est ainsi que Paul Murphy, député membre de notre parti-frère irlandais, ou Kshama Sawant, notre camarade élue à Seattle, reversent une bonne partie du salaire qu’ils reçoivent des autorités pour des campagnes locales, des fonds de solidarité,… La meilleure manière d’éloigner les parvenus, c’est encore de supprimer les privilèges. Pour cela, il nous faut lutter pour un gouvernement pour et par les travailleurs.

    • • Premier ministre : 227.000 euros par an / Vices-Premiers : 227.000 euros / Ministres : 223.000 euros / Secrétaires d’Etat : 212.000 euros
    • Elio Di Rupo : Bourgmestre de Mons : 122.501,14 euros par an
    • Dominique Leroy : CEO de Proximus : 799,175 euros par an
    • Jan Smets : CEO de la Banque nationale : 478.514 euros par an
    • Jean-Paul Philippot : CEO de la RTBF : 295.000 euros par an
    • Johan Decuyper : CEO de Belgocontrol : 204.380 euros par an
    • Luc Lallemand : CEO Infrabel : 303.171 euros par an
  • Le PS et le CETA : Une tempête dans un verre d’eau ?

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    Les présidents du Conseil européen et de la Commission européenne ont été soulagés d’être finalement en mesure d’accueillir le Premier ministre canadien Trudeau pour signer le traité de libre-échange avec le Canada le 30 octobre dernier, trois jours après l’annulation en dernière minute du sommet Union européenne – Canada en raison de l’incapacité de Charles Michel de signer le traité au nom du gouvernement belge. Paul Magnette et le PS ont joué un rôle de premier plan dans ces jours dramatiques qui ont causé panique et indignation parmi les dirigeants européens, y compris les ‘‘camarades’’ sociaux-démocrates de Paul Magnette.

    Dossier de Tanja (Gand)

    Conflits de libre-échange

    La crise du CETA figure sur la désormais fort longue liste des crises qui illustrent la tendance à la désintégration de l’Union européenne. Elle a mis en danger sept années de négociations. Il s’agissait d’ailleurs de bien plus : l’avenir de la politique commerciale européenne au service des grandes entreprises était mise en péril.

    L’establishment a laissé exploser sa colère jusqu’à la conclusion de l’accord. Pour le président de la Commission européenne Juncker, il ne fallait pas laisser plus de temps à la démocratie. Le président du Conseil européen Donald Tusk a averti qu’un échec du CETA signifierait que l’UE ne serait plus jamais en mesure de conclure un accord commercial international.

    Ces accords internationaux sont de toute manière sous une pression intense. Le TTIP (accord de libre-échange entre l’Union européenne et les États-Unis) était déjà sur le point de mourir, du moins sous sa forme actuelle, ce à quoi est encore venue s’ajouter l’élection de Donald Trump. La majorité des adversaires du TTIP ne partagent évidemment rien de commun avec lui. Ceux-là ont fait campagne pour défendre les intérêts des travailleurs, de l’environnement, des droits des consommateurs,… toutes choses auxquelles Donald Trump est profondément opposé.

    Certaines parties de l’establishment se rendent bien compte que forcer le passage risque de verser plus d’huile sur le feu de l’agitation politique. Mais, parallèlement, le commerce international est au cœur du projet européen économique néolibéral qui vise à renforcer la compétitivité des économies européennes. Sans cela, certains représentants des grandes entreprises vont tout simplement se demander à quoi peut encore bien servir l’UE.

    La messe n’est pas dite

    À entendre les politiciens établis et leurs relais dans les médias de masse, plus rien ne peut être fait contre le CETA depuis le 30 octobre. Mais on manœuvre toujours bel et bien dans les coulisses. Guy Verhofstadt défend l’idée d’un CETA non plus considéré comme une ‘‘compétence mixte’’, mais comme dépendant exclusivement de l’Union, ce qui permettrait d’éviter que l’accord ne revienne à l’échelon national ou à celui de certains parlements régionaux pour être ratifié.

    Ce processus de ratification peut encore prendre des années. Les avocats les plus impatients du libre-échange débridé considèrent d’ailleurs que cela ralentit bien trop le flot de profits vers le sommet le plus riche de la société. À l’avenir, une simple décision de la Cour de justice européenne pourrait suffire selon eux.

    Pour l’instant, le CETA doit encore être ratifié par les parlements des États membres. Les choses ont changé après le référendum sur le Brexit du 24 juin dernier afin de combattre le déficit démocratique de l’UE. Ce déficit ne peut pas être nié, il suffit de penser aux agissements de la troïka en Grèce. Une concession a été faite pour sauver ne fut-ce qu’une apparence de démocratie, mais cela explose maintenant au visage de l’establishment européen.

    Le ‘‘non’’ au CETA issu du Parlement wallon a précipitamment fait connaitre ce traité en Belgique et même internationalement. C’est une bonne chose pour le mouvement social. Au plus ces accords sont connus, au plus la résistance se développe. Cela accroit pour le moment la pression sur tous les parlements des États membres de l’UE où ils devront prendre position.

    C’est pour cela qu’il est maintenant possible qu’un référendum soit organisé concernant le CETA aux Pays-Bas. Début novembre, 200.000 signatures avaient été collectées à cette fin, les deux tiers du nombre requis. Un tel référendum augmenterait considérablement les probabilités que le CETA finisse à la poubelle.

    La résistance du PS n’a pas conduit à des changements dans le CETA

    Dans l’édition précédente de Lutte Socialiste, nous expliquions ce qui a poussé le PS à agir de la sorte. Le caractère du PS n’a pas fondamentalement changé, mais Paul Magnette a semblé l’espace d’un instant être une sorte de David des temps modernes contre le Goliath du libre-échange. Le PS n’a toutefois pas tenu. Il reste un potentiel et fiable parti de gouvernement pour la classe capitaliste. Le politologue Dave Sinardet (VUB) a expliqué dans le magasine flamand Knack que ‘‘lorsqu’il était au gouvernement fédéral, le PS n’avait pas fait une affaire du CETA, surtout quand Elio Di Rupo était Premier ministre.’’ Le PS est aussi le parti le plus sous la pression des syndicats et il doit de plus faire face à la croissance électorale du PTB.

    Comme on le dit en Anglais: ‘‘la preuve du pudding, c’est qu’on le mange’’. L’opposition du Parlement wallon au CETA (confirmée le 14 octobre par 46 voix contre 16) n’a finalement rien changé au texte du CETA. L’Investment Court System (ICS), le système controversé de règlement des litiges entre investisseurs et États, fait toujours partie du CETA. C’était pourtant l’un des principaux problèmes soulevés contre le traité, un des points qui a focalisé l’opposition au CETA et au TTIP.

    Qu’en est-il de la déclaration interprétative?

    La résistance du PS n’a abouti qu’à un nouveau document, une déclaration interprétative signée avec le texte du CETA par l’UE et le Canada le 30 octobre qui devrait être juridiquement contraignante. Cette déclaration interprétative comprend des précisions sur l’ICS et pourrait potentiellement conduire à des règles plus strictes concernant ces tribunaux d’arbitrage. Mais cela ne répond pas à la revendication du mouvement qui s’oppose à ce que des multinationales puissent contester des législations devant une cour. Pour divers spécialistes, ce document est avant tout une tentative de calmer les esprits chez les adversaires du CETA. Ce texte visait également à amadouer des adversaires au CETA à l’intérieur du parti social-démocrate allemand (SPD).

    Une déclaration intra-belge négociée entre les différentes entités fédérées du pays est également venue rejoindre les 37 autres déclarations d’États membres et d’institutions européennes. Selon Guillaume Van der Loo (Centre for European Policy Studies), ces déclarations sont consignées dans le procès-verbal, mais ne sont pas juridiquement contraignantes. Toutefois, le fait que ces 38 déclarations existent avec leurs réserves et leurs interprétations met en évidence la pression instaurée sur les différents gouvernements.

    Guillaume Van der Loo a noté que la déclaration intra-belge stipule que les gouvernements régionaux, à l’exception du gouvernement flamand, n’ont pas l’intention de ratifier le CETA sur la base de l’ICS ‘‘tel qu’il existait le jour où le CETA a été signé.’’ Ils ne le ratifieront pas à moins que leurs parlements ne le décident autrement. Le scénario de fin octobre pourrait donc être répété, mais avec cette fois-ci la mort du CETA. La pression sur le PS sera sans aucun doute encore plus forte. Les adversaires du CETA doivent contrer cela en construisant leur propre pression.

    Poursuivre la résistance !

    La commission du commerce international (INTA) du Parlement européen va probablement voter sur le CETA le 5 décembre, le Parlement européen au complet suivra plus tard en décembre ou en janvier. On peut supposer que le CETA y sera approuvé sans aucun problème majeur. Si le Parlement canadien fait de même, la voie serait libre pour son entrée en vigueur provisoire, probablement en mars 2017. L’élément controversé de l’ICS est en dehors de l’entrée en vigueur provisoire. Après à l’adoption du Parlement européen et du Canada commencerait alors le processus de ratification par les parlements nationaux. Si un seul parlement s’y oppose, cela devrait effectivement mettre en branle le processus visant à mettre fin à l’application provisoire. Cela signifierait la fin du CETA. Mais Juncker ripostera en essayant de ne stopper que les parties du traité qui relèvent de la compétence des États membres.

    Le processus de ratification peut prendre un certain temps, peut-être sera-t-il lancé en Belgique après que la Cour suprême allemande ait statué sur l’ICS ; cela introduirait des modifications qui pourraient servir à amadouer le PS. Il est dangereux de limiter la discussion aux éléments les plus symboliques du CETA, comme l’ICS. Nous devons lutter contre la totalité de l’accord.

    L’avenir de cet accord dépend de la pression construite par le mouvement social. La Commission européenne ne peut plus définir la politique commerciale derrière des portes closes. De plus en plus de gens remettent en cause la politique européenne et émettent de légitimes réserves quant aux réels bénéficiaires de ces types d’accords. Vingt ans après la conclusion de l’ALENA (l’accord de libre-échange nord-américain), il est clair que le libre-échange conduit à la désindustrialisation et à la disparition des bons emplois.

    L’inquiétude qui vit parmi de larges couches de la population est l’occasion de mener le débat et de construire un mouvement qui non seulement dénonce les aspects néfastes d’un tel accord, mais préconise également de changer de système économique. Il existe en Belgique un large front de syndicats, d’organisations environnementales, d’ONG, de réseaux anti-mondialisation et de partis comme le PTB ou le PSL. Poursuivons l’organisation d’actions afin de maintenir la pression sur les différents parlements en vue de la ratification du CETA !

  • Le CETA est signé, intensifions la lutte contre la dictature des multinationales!

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    L’accord économique et commercial global (Comprehensive Economic and Trade Agreement, CETA) entre le Canada d’une part et l’Union européenne et ses 28 États membres a été signé ce 30 octobre 2016 par le premier ministre canadien Justin Trudeau et le président du Conseil européen Donald Tusk. La conclusion de cet accord a été temporairement bloquée par le refus du gouvernement wallon qui semblait faire sienne l’opposition du monde syndical et associatif. Ce dernier a finalement plié face aux pressions tout en justifiant cette capitulation par de prétendues garanties notamment concernant les mécanismes de résolution de conflits entre Etats et entreprises privées.

    Avec sa résistance au CETA, le PS a voulu se positionner à nouveau en tant qu’opposition de gauche. Dans plusieurs articles, Magnette était comparé à Tsipras en raison de son discours musclé tout en craquant finalement sous l’intense pression exercée sur le gouvernement wallon. Pour beaucoup de gens, Magnette sera considéré comme ‘‘celui qui a quand-même essayé et qui a attiré l’attention publique sur l’accord’’, particulièrement là où la mobilisation citoyenne contre le TTIP et le CETA était plus faible, comme en Flandre. Formellement, rien n’a changé dans le CETA mais, de manière plus informelle, cela a réduit la marge de manœuvre pour ce type de traités. Parmi la couche plus consciente et combattive de la population, cela a surtout démontré les limites de cette opposition.

    Ce cas a une fois de plus illustré que faire reposer sa stratégie sur les négociations avec les institutions européennes est insuffisant. Il nous faut une stratégie de confrontation et de rupture avec l’Union européenne de l’austérité basée sur la mobilisation des masses et la solidarité européenne ainsi que sur un programme qui vise à aller jusqu’au bout pour défier le règne des multinationales.

    Le débat à l’occasion du CETA est un nouvel exemple des problèmes que rencontrent les grandes puissances pour conclure de nouveaux accords commerciaux mais aussi de la manière avec laquelle les politiciens peuvent réagir sous pression d’une opinion publique qui se radicalise et s’oppose de plus en plus à la mondialisation capitaliste et aux traités commerciaux tels que le TTIP et le CETA, qui visent à poursuivre l’érosion de la démocratie politique et économique. A partir de maintenant, chaque traité de commerce sera probablement suivi avec plus d’attentions qu’auparavant, même si l’establishment européen fera tout pour tuer un tel débat dans l’œuf en assurant que de tels traités ne se décident plus qu’au niveau européen, sans que les parlements régionaux ou nationaux ne puissent se prononcer. Réussir à faire cela dépendra de la force du contre-mouvement social.

    Il est impossible de comprendre la récente posture du gouvernement wallon et du PS en général sans la placer dans le contexte de luttes sociales de ces deux dernières années en Belgique, depuis l’arrivée au gouvernement fédéral de l’équipe de Charles Michel (MR). Un récent sondage réalisé par un des principaux journaux francophones (Le Soir) a encore dévoilé qu’à la question « Pour sortir de la crise, faut-il changer de système ? », 90,9 % des Belges francophones ont répondu “oui”. Il s’agit d’une claire illustration de l’atmosphère qui se développe actuellement et sur laquelle le PS a tenté de surfer, alarmé par sa perte de soutien continue dans les sondages d’opinion.

    ceta02Il n’y a que dans la presse que le “non” au CETA était isolé. Le refus des accords de libre-échange va croissant et est notamment illustré par le fait que les collectivités territoriales (villes, communes,…) ayant pris position contre le CETA ou le TTIP (accord de libre-échange devant être conclu entre l’Union européenne et les Etats-Unis) représentent l’équivalent de 75 millions de personnes ! Au delà de ça, on peut aussi parler des 32.000 personnes qui ont manifesté en Allemagne en septembre dernier, des sondages qui soutiennent que l’opinion est majoritairement défavorable aux traités de libre échange en Allemagne et en France, de la pétition internationale qui a réuni 3 millions de signature contre le TTIP et le CETA,…

    Il faut retirer le pouvoir des mains des multinationales et des actionnaires. De plus en plus de gens en sont convaincus. Mais nous ne pourrons donner corps à cette aspiration qu’en collectivisant les secteurs-clés de l’économie (finance, énergie, sidérurgie,…) dans le cadre d’une économie démocratiquement planifiée afin de satisfaire les besoins de la population dans le respect de l’environnement. Le chemin vers cet objectif est encore long et la lutte ne sera pas aisée, mais il s’agit de la seule manière de sortir de la crise économique et écologique dans laquelle nous a empêtrés la logique du ‘‘libre marché’’.

    => Virage à gauche au PS: réaction de panique face au PTB ou quelque chose d’autre?

  • Virage à gauche au PS: réaction de panique face au PTB ou quelque chose d’autre?

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    Les gouvernements de Bruxelles et de Wallonie bloquent le traité de libre-échange Union européenne – Canada (le CETA), qui n’est encore qu’une pâle copie du Traité Transatlantique (TTIP, UE-USA) bien plus controversé. Le PS remet sur table la diminution du temps de travail et la démocratie économique, des revendications traditionnelles du mouvement ouvrier bannies des décennies durant et reléguées aux programmes de la gauche radicale. S’agit-il simplement d’une réaction de panique face à la percée du PTB dans les sondages ou s’agit-il d’autre chose ?

    Par Eric Byl, article tiré de l’édition de novembre de Lutte Socialiste. Photo : PPICS

    Le programme de Noël (1945) du Parti social-chrétien (PSC, Christelijke Volkspartij, CVP, en néerlandais), abordant la reconstruction d’après-guerre, avait pour titre “qui sera l’architecte ?” Le PSC s’est ainsi présenté comme ‘‘leader de la nation’’. A l’instar de nombreux autres partis traditionnels en Europe, il n’a pu le faire que grâce à l’énorme augmentation des richesses consacrées à acheter la paix sociale dans la période d’après-guerre. Cela résultait de la pression combinée de la force du mouvement ouvrier et de l’existence d’un système alternatif sous la forme des caricatures staliniennes du socialisme à l’Est. À partir de la crise, début années ‘70, il est devenu bien clair que tout cela était exceptionnel et non la règle. Un chômage de masse structurel a fait son apparition et les détenteurs de capitaux exigeaient que leurs profits soient préservés aux dépens des salaires, des conditions de travail et des dépenses sociales.

    Tous les partis traditionnels s’y sont pliés, partis populaires et social-démocratie inclus, jusqu’au Parti Communiste en Italie, même au prix de balancer idéologie et programme par-dessus bord. Cela a sapé leur autorité et a conduit, notamment en Flandre, à une fracture politique. Mais la politique d’austérité a seulement conduit à une nouvelle période de Grande Récession (2008-2009). Il est devenu sans cesse plus clair que les politiciens traditionnels n’offrent de solutions ni pour la crise climatique, ni pour l’afflux de réfugiés, ni pour les conflits militaires, ni pour la relance du commerce mondial, ni pour la pauvreté, la mobilité, la question nationale, l’emploi, le vieillissement de la population, etc.

    C’est pourquoi de plus en plus de gens sortent des sentiers battus de la politique traditionnelle. Ce sont d’abord les populistes de droite et d’extrême droite qui ont pu en tirer profit. De par leur fortune personnelle ou à l’aide de sponsors richissimes, ils disposent des moyens de détourner la colère vers les ‘‘chômeurs-profiteurs’’, les ‘‘réfugiés économiques’’, les ‘‘paresseux du Sud’’, etc. Le phénomène est important et dangereux, mais surtout basé sur ceux qui cherchent une solution individuelle et qui ne regarde pas les forces sociales. Mais ce qui est beaucoup plus important, c’est qu’il y a aussi des groupes sociaux qui tournent le dos à la politique traditionnelle. Cela explique la croissance des nouvelles formations de gauche qui représentent une réelle menace pour la domination capitaliste puisque leur présence stimule l’action sociale et fait renaitre l’espoir. Pensons à Syriza en Grèce, malheureusement jusqu’à la capitulation de sa direction, à Podemos en Espagne, à Die Linke en Allemagne, au Socialistische Partij aux Pays-Bas, à l’Anti Austerity Alliance – People Before Profit en Irlande, etc. Le phénomène fait tache d’huile. Les sondages montrent que le PTB-Pvda peut revendiquer sa place dans cette liste, surtout en Wallonie (16%) et à Bruxelles (11%).

    Le PS s’inquiète, c’est certain. L’introduction d’une semaine de quatre jours au salaire d’une semaine de cinq jours pour le personnel communal de Saint-Josse et pour certains fonctionnaires wallons ayant plus de 60 ans sert à démontrer que les déclarations du PS sur la diminution du temps de travail s’accompagnent d’actes. Evidemment, le PS ne va pas étendre cela à tous les travailleurs des services publics ni l’imposer au privé. Que cela ne retienne pas les syndicats, dans tous les secteurs, de saisir cette revendication comme outil de lutte central contre le chômage. Sa proposition pour le ‘‘double pouvoir’’ (pour des entreprises de ‘‘codécisions’’) dans les entreprises (le conseil d’administration devrait partager son droit de décision avec un conseil des travailleurs) est une manière d’éviter de parler de socialisme. Le danger que cela conduise à la collaboration de classe ou à la cogestion comme en Allemagne est réel. Mais des délégations combatives peuvent aussi saisir l’idée pour contester le pouvoir des actionnaires et la transformer en véritable droit de véto pour les travailleurs. Dans ce cas, les actionnaires s’enfuiraient bien vite. La nationalisation sans indemnisation sous contrôle de la communauté et des travailleurs serait alors la seule issue. Si le PS était vraiment sérieux, pourquoi ne pas commencer avec Caterpillar ?

    Mais il y a autre chose. En Grèce, le PASOK a été balayé du paysage électoral. Aux Pays-Bas, le PvdA a chuté de 38 sièges à 10. Le PSOE espagnol a été dépassé par Podemos. En France, François Hollande fait face à une crise profonde. La tendance à gauche s’exprime dans toutes sortes de nouvelles formations. Depuis peu, cette tendance est devenue si forte que Bernie Sanders a été capable d’enclencher une ‘‘révolution politique’’ avec les primaires du Parti démocrate. Au Royaume-Uni, cette tendance s’est traduite avec Jeremy Corbyn aux primaires du Parti travailliste. Face au précipice, certains dirigeants de la social-démocratie se repentent, partiellement en raison du fait que, soudainement, les commentateurs bourgeois plaident eux aussi pour une politique d’investissements publics.

    Aux Pays-Bas, une figure d’arrière-garde s’est soudainement proposée comme candidat de gauche pour être tête de liste du PvdA. En Espagne l’aile de droite du PSOE organise un coup d’Etat contre le dirigeant du parti, Pedro Sanchez, en représailles de son refus d’accepter un gouvernement minoritaire du PP. En Belgique francophone, le sommet du PS a lui-même changé de cap. Alors que Jeremy Corbyn est devenu l’expression d’un mouvement par en bas, leur tournant s’assimile plutôt à une tentative de survie désespérée par en haut.

    Contrairement à Sanders ou Corbyn, les dirigeants du PS n’ont pas une réputation de fermeté, de crédibilité et d’intégrité. L’incertitude règne donc quant à la mesure jusqu’où ils sont prêts à aller. Mais il est indiscutable que la crise de la social-démocratie entre dans une nouvelle phase. Le PSL continuera à soutenir chaque pas en avant pour le mouvement ouvrier, même de très petits pas. Mais sans entretenir de vaines illusions. La meilleure garantie contre la déception de promesses non-tenues, c’est de construire le mouvement d’en bas et d’exiger de participer à chaque niveau. Sur ce plan-là, il y a encore beaucoup de travail à faire, surtout au PS, mais aussi dans les syndicats et au PTB.

  • Le PS et le SP.a soutiennent Corbyn… uniquement lorsqu’il se soumet à la droite !

    Jeremy Corbyn a récemment été élu président du Parti travailliste, le Labour, en Grande-Bretagne. Cette élection d’un candidat anti-austérité représente un véritable bouleversement dans la situation politique.

    Par Jarmo (Anvers)

    Le Parti travailliste britannique fut l’un des premiers partis sociaux-démocrates européens à embrasser le néolibéralisme et à bazarder toute référence au socialisme ou à une politique favorable aux travailleurs. C’est aussi le parti travailliste, sous la direction de Tony Blair, qui a décidé de partir en guerre en Irak. C’est donc des plus remarquables que c’est précisément ce parti qui, aujourd’hui, se retrouve avec un socialiste à sa tête pour la première fois depuis des décennies.

    L’enthousiasme autour de la figure de Corbyn a même des conséquences en Belgique. La social-démocratie essaie ainsi d’instrumentaliser son succès dans une tentative désespérée de soutenir qu’elle reste politiquement pertinente.

    L’élection de Corbyn – avec 59% des suffrages exprimés – est l’expression de la recherche croissante d’une alternative politique en Grande-Bretagne. Le même processus a déjà conduit à l’émergence de nouvelles formations de gauche comme Syriza et Podemos tandis que, dans d’autres pays, l’espoir se développe que des personnalités de gauche soient capables de reprendre les rênes d’un parti comme le Parti travailliste.

    Des centaines de milliers de jeunes et de travailleurs se sont mobilisés pour la campagne de Corbyn et ont placé leurs espoirs dans son programme d’investissements massifs dans les services publics, de réhabilitation des acquis sociaux comme les pensions et le droit de grève,… et dans la fin de la vague incessante et violente d’austérité qui frappe la population de plein fouet. L’élection de Corbyn est aussi une expression de la désillusion parmi la population britannique pour la direction traditionnelle du Labour, qui reste d’ailleurs opposée au programme de Corbyn. Cette contradiction devra, plutôt tôt que tard, conduire à une scission. Corbyn doit utiliser son soutien et l’enthousiasme qu’il a suscité pour rassembler autour de lui toutes les forces de gauche dans la société afin de construire un nouvel instrument politique pour la classe des travailleurs.

    Il n’y a pas de différences fondamentales entre la direction traditionnelle du Labour et celles du PS et SP.a en Belgique. Ces partis sont partisans de la casse sociale qui, après des années de participation aux gouvernements, ne voient qu’un sentier de destruction sociale lorsqu’ils regardent derrière eux. La social-démocratie belge fut par exemple à la base de la réforme des prépensions, de la privatisation et du démantèlement des services publics,… Ils ont même été les auteurs de mesures haïes comme le Pacte des Générations en 2005 et la chasse aux chômeurs. Probablement aucun jeune en Belgique ne se souvient d’un moment où ces partis ont représenté une force progressiste.

    Cependant, les dirigeants sociaux-démocrates flamands et francophones sentent aussi la recherche d’une alternative politique. Les succès électoraux du PTB, particulièrement du côté francophone, sont déjà une expression partielle de cette recherche. Elio Di Rupo a donc immédiatement félicité Corbyn en disant qu’ils ont ‘‘des objectifs communs : fin à l’austérité, une société juste et plus de justice sociale’’. Kathleen Van Brempt du SP.a a écrit une carte blanche en défense de Corbyn, mais en se limitant au tournant de Corbyn qui a déclaré qu’il n’est plus en faveur d’un Brexit (la sortie de l’euro). Le fait que Corbyn maintient cependant toujours que l’Union Européenne néolibérale n’est qu’un instrument politique aux mains de la classe dirigeante pour imposer une politique d’austérité sévère n’était bien sûr pas mentionné par Van Brempt. Elle essaie, de façon pathétique, d’utiliser la popularité d’un adversaire politique pour se donner une image plus à gauche.

    Van Brempt n’est pas la seule à procéder de la sorte. Paul Magnette fait pareil. Il se réfère à Corbyn, mais surtout aux points spécifiques sur lesquels il a déjà cédé à la droite de son parti. Autrement dit, Magnette défend Corbyn tant qu’il ne s’agit pas des éléments qui ont créé l’enthousiasme ! Magnette lui reproche d’ailleurs de fonctionner comme la ‘‘gauche radicale’’ : de présenter des sujets complexes d’une manière simpliste. Cela n’empêche pas Magnette de déclarer que les programmes de la gauche radicale et du PS ne sont pas trop différents : une taxe des millionnaires, une fiscalité plus juste,… En réalité Magnette montre les limites de telles propositions. Si même des représentants d’une politique d’austérité sont prêts à les défendre en paroles…

    Dans la même logique Di Rupo, tout comme le président du SP.a John Crombez, a déclaré qu’il n’était pas opposé à des coalitions avec le PTB. Ce parti a aussi déclaré d’être en faveur d’une ‘coalition progressiste’ à Anvers avec SP.a et Groen. Le président du PTB Peter Mertens a ainsi affirmé : ‘‘J’espère que personne ne va s’enfermer dans ses propres points de vue et qu’ils vont comprendre que cette collaboration est plus que jamais nécessaire.’’ Tous les précédents indiquent cependant qu’une nouvelle formation de gauche doit se méfier d’une collaboration avec la ‘‘gauche’’ néolibérale.

    Dans la plupart des pays, le mouvement des travailleurs n’a plus d’instrument politique. L’élection des figures de la gauche dans anciens partis du mouvement ouvrier et l’émergence de nouvelles formations d’autre part, sont des expressions de la recherche d’une alternative. Cela peut constituer des pas importants dans la bonne direction. Mais une alternative politique ne sera en dernière instance seulement possible que sur base d’une grande implication du mouvement des travailleurs. Elle exige également la reconnaissance des limites programmatiques de certains partis de gauche, ainsi que la conscience que les anciens partis sociaux-démocrates dans leur état actuel sont devenus des cadavres pourrissants pour le mouvement des travailleurs. Le PSL veut aider au développement de chaque initiative allant vers la formation d’un nouveau parti des travailleurs.

  • Magnette & le PS: tel un phénix qui renaît de ses cendres ?

    La social-démocratie belge et européenne est en crise historique. C’est Paul Magnette, Ministre-Président wallon, qui le dit lui-même dans les toutes premières phrases de son livre ‘‘La gauche ne meurt jamais’’ sorti fin mai. En Belgique, il vrai, cela faisait très longtemps que le PS ne s’était plus retrouvé dans l’opposition au fédéral (1988…), attaqué à sa droite par le gouvernement Michel et à sa gauche par le PTB ainsi que par une fraction de la FGTB. Un des derniers sondages d’Ipsos montre des intentions de vote en baisse pour le PS, à 27% en Wallonie et 19% à Bruxelles(1).

    Par Cécile (Liège)

    Dans ce contexte, le livre de Magnette fait suite au grand ‘‘chantier des idées’’ lancé par un PS qui tente de se redéfinir et qui est secoué par des tensions internes (liées à la réélection de Di Rupo et aux critiques à propos de la bureaucratisation et à l’embourgeoisement du parti(2)). Si l’idée est, selon Di Rupo, de ‘‘redonner la parole aux militants’’, il s’agit surtout de resserrer les rangs parmi ces derniers et chez les délégués syndicaux.

    Selon Magnette, la social-démocratie a besoin d’un ‘‘retour aux grandes idées’’. Selon lui, le PS n’est adepte ni de la troisième voie, ni du centre. La gauche ne doit pas courir après la droite, selon ses termes, mais ne doit pas non plus tomber dans le radicalisme. S’il accorde son soutien à Syriza en Grèce, il décrédibilise toute alternative anticapitaliste en Belgique. Il s’attaque là frontalement au PTB, qu’il dénonce comme du populisme de gauche utilisant des campagnes publicitaires et des slogans simplistes. S’il n’a peut-être pas tout à fait tort, cela est un peu court pour rejeter toute alternative à la prétendue ‘‘gauche’’ de Magnette & Co et pour décrédibiliser l’ensemble des courants politiques et des couches de la population qui veulent sortir du mode de production capitaliste.

    ‘‘Comment continuer à faire vivre des idées de gauche?’’ se demande Magnette. Selon lui, le contexte économique actuel n’est plus favorable aux idées progressistes que le socialisme défend comme l’égalité, la justice fiscale ou la diminution collective du temps de travail. Le hic, c’est que les politiques appliquées par le PS depuis des décennies ont elles aussi contribué à la création de ce grand contexte économique tant déploré par Magnette… Le bourgmestre de Charleroi déclare également que ‘‘l’on ne peut pas se contenter (…) de luttes contre les discriminations qui ne s’attaquent pas à l’ordre social intrinsèquement inégalitaire dont elles sont issues’’ (3) N’est-ce pas pourtant exactement la politique qui a été appliquée dans sa ville en 2013 avec le nouveau règlement de la mendicité visant à disperser les mancheurs et à interdire la mendicité le dimanche (4)? C’est là toute la différence entre des ‘‘idées’’, un discours et un programme politique fort et sérieux, qui met réellement en place les structures dans la société pour que ces idées puissent exister et se réaliser concrètement. Son livre commence par le constat d’une social-démocratie réformiste en crise. On en est encore plus convaincu après l’avoir lu.

    Détail piquant; un millier de manifestants en front commun étaient dans la rue à Namur le jour même de la parution du livre, le 28 mai dernier, afin de dénoncer l’austérité dans la fonction publique de la Région wallonne. ‘‘Même si c’est Magnette qui est ici chez nous, on est quand même dans l’austérité’’ constatait un manifestant rappelant ainsi que les termes de ‘‘rigueur’’ (cher au PS) et ‘‘d’austérité’’ ont la même signification pour les travailleurs.

    Ils n’ont donc pas manifesté avec le livre de Paul sous le bras…

    (1) http://www.rtbf.be/info/belgique/detail_sondage-le-ps-fait-la-grimace-le-mr-sourit-et-maggie-de-block-rit?id=8896349
    (2) http://www.lalibre.be/actu/politique-belge/di-rupo-assure-que-le-ps-se-porte-bien-54e9dad135701001a1df5084
    (3) Magnette, La Gauche ne Meurt Jamais, p.44
    (4) http://www.lesoir.be/250915/article/actualite/regions/hainaut/2013-05-28/charleroi-mendiants-devront-changer-commune-tous-jours

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