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  • Annie colère, un film militant de Blandine Lenoir

    Annie est ouvrière dans une petite usine qui produit des matelas. Elle a deux enfants mais ne souhaite pas en avoir plus. Quand elle se retrouve involontairement enceinte, elle fait appel à une antenne locale du MLAC[1] qui milite, dans une ambiance chaleureuse, pour la légalisation de l’avortement en aidant les femmes à avorter par la méthode Karman, par aspiration, avec l’aide de médecins et de bénévoles. Cela se passe en France en 1974, dans une petite ville de province. Et à l’époque, l’avortement est totalement interdit.

    Par Francine Dekoninck, infirmière, militante syndicale et féministe

    Dans un premier temps Annie estime ne pas avoir le temps de s’engager dans l’association car elle est déjà fort occupée par son travail et sa famille. Mais lorsque Christiane, sa voisine meurt des suites d’un avortement clandestin, elle décide de s’engager dans le mouvement. Elle y découvre une grande solidarité et apprend progressivement à pratiquer elle-même des avortements.

    Le mouvement a du mal à répondre à une demande croissante de la part des femmes. Des tensions éclatent avec les jeunes médecins (tous des hommes[2]). Annie et d’autres bénévoles y voient l’occasion de rendre aux femmes le contrôle de leur corps.

    Lorsque la loi Veil[3] est adoptée par l’Assemblée nationale et que l’avortement est dépénalisé, la question de la dissolution de l’association local du MLAC  est posée. Mais l’avortement à l’hôpital ne sera pas gratuit et la clause de conscience pour les médecins limite de fait l’accès à l’avortement.   Touchée par le mouvement de solidarité qu’elle a découvert au MLAC, Annie décide de commencer des études d’infirmière.

    En Belgique, l’avortement figure toujours dans le code pénal bien qu’il ait été partiellement dépénalisé en janvier 1990 (loi Lallemand-Michielsen). Baudouin 1er,,roi des Belges à l’époque et membre d’une secte catholique[4], refusera d’apposer sa signature sous cette loi.

    Courez vite voir ce film militant qui m’a fort émue car, professionnellement avant 1990, j’ai vu tant de jeunes femmes venues mourir à l’hôpital à la suite d’un avortement clandestin !


    [1] MLAC : Mouvement pour la Libération de l’Avortement et de la Contraception.

    [2] A l’époque les hommes sont largement majoritaires chez les médecins généralistes. Ce qui a changé aujourd’hui.

    [3]La loi Veil, votée en décembre 1974 (274 députés de la gauche et du centre votent pour, 189 députés de droite votent contre) autorisera l’avortement pratiqué par un médecin dans un délai de dix semaines.

    [4]Le Renouveau charismatique.

  • 28 septembre – Journée mondiale pour l’avortement sans risque

    Des avocats sont contactés avant que le personnel médical ne traite des grossesses extra-utérines. Des patientes atteintes d’un cancer se voient reporter un traitement qui leur sauverait la vie parce qu’elles sont enceintes. Des victimes d’agression sexuelle se voient refuser la pilule du lendemain aux urgences. Quelques semaines après l’annulation de l’arrêt Roe v Wade aux États-Unis, la réalité dystopique d’une interdiction d’avorter apparaît au grand jour. L’impact mondial a été brutal : d’un côté, les gens regardent avec horreur, de l’autre, l’extrême droite salive à l’idée d’imposer des interdictions similaires au droit d’avorter dans des pays d’Europe, d’Amérique latine et d’ailleurs.

    Déclaration de ROSA-Réseau international féministe socialiste

    La lutte pour le contrôle du corps des femmes s’intensifie à travers le monde, le droit à l’avortement est attaqué dans des pays comme la Chine, l’Italie, la Hongrie et les États-Unis, non seulement sur le plan juridique mais aussi dans les faits. Même dans les pays où l’avortement est légal, l’accès y est souvent limité par le recours à “l’objection de conscience”, le manque de financement et d’autres pressions exercées par l’establishment conservateur.

    Parallèlement, les mobilisations de masse dans la rue ont permis d’obtenir des gains réels en termes d’accès à l’avortement – il suffit de regarder les victoires en Irlande, en Corée du Sud, en Argentine, au Mexique, en Colombie, entre autres. Alors que le mouvement féministe qui a balayé le monde au cours des dix dernières années se bat pour l’autonomie corporelle, une partie des élites de droite a fait du recul de l’accès à l’avortement un élément clé de son programme. Pourtant, les sondages réalisés dans de nombreux pays indiquent que la majorité des gens ne voient aucun inconvénient à ce que l’avortement soit accessible. Alors pourquoi ces réactionnaires sont-ils si déterminés à polariser cette question ?

    Tout d’abord, il convient de dénoncer leur hypocrisie à couper le souffle. La droite dure n’est pas “pro-vie”. Ce sont les mêmes personnes qui ont laissé des enfants fuyant la guerre et la misère se noyer en Méditerranée, qui ont procédé à la stérilisation forcée de femmes ouïghoures, qui ont tenu des propos horribles visant à mettre en danger la vie des personnes LGBTQIA+ et qui ont favorisé et encouragé la crise alimentaire qui a frappé les États-Unis tout l’été. Par ses actions, l’establishment de droite a prouvé à maintes reprises qu’il se moque de la mort des gens. Les récentes attaques contre l’avortement le confirment une fois de plus – nous savons tous que rendre l’avortement plus difficile d’accès n’empêche pas les avortements de se produire, cela ne fait que mettre les personnes enceintes plus en danger (1).

    Quelle est donc la véritable raison de ces attaques ? Et comment pouvons-nous les combattre avec succès ? Pourquoi une partie de la classe dirigeante est-elle si déterminée à faire reculer notre droit à l’autonomie corporelle ? Ces attaques doivent être considérées dans le contexte plus large des multiples crises du capitalisme dans le monde qui ont toutes un impact sur la capacité des gens à avoir une réelle liberté dans leur décision d’avoir ou non des enfants. Une nouvelle crise économique mondiale menace les profits de l’élite ; et une partie de celle-ci s’inquiète de ne pas trouver suffisamment de main-d’œuvre bon marché. La crise du coût de la vie, qui frappe la classe travailleuse sur tous les continents, rend le choix d’avoir des enfants encore plus inaccessible pour une nouvelle génération. La crise climatique chasse des millions de personnes de leurs foyers, créant une nouvelle crise des réfugiés. La guerre et les conflits forcent les femmes et les enfants à se retrouver dans des situations terribles et vulnérables, loin de chez elles et de chez eux. La crise de l’aide sociale a atteint un point de basculement ; les systèmes éducatifs de nombreux pays sont sur le point de s’effondrer et la crise Covid a déjà montré que les systèmes de santé sont au point de rupture. Ajoutez à cela les crises des violences de genre, du racisme systémique, des attaques contre les droits des trans et des LGBTQIA+ – la liste est sans fin.

    La classe dirigeante n’est pas intéressée ou capable de s’attaquer à ces échecs systémiques. Certains d’entre eux peuvent se dire féministes ou “woke”, mais en réalité, on ne peut pas compter sur eux pour lutter pour une réelle autonomie corporelle ou un réel changement. Ils peuvent être d’accord concernant la légalisation formelle, mais ne se battront jamais avec nous pour un accès réel – un avortement sur demande, sûr, gratuit, accessible et légal.

    Au fond, il est dans l’intérêt de l’establishment de maintenir le statu quo, ou plus précisément de protéger ses profits et sa richesse. Le fait de saper l’autonomie corporelle des femmes présente des avantages pour eux. Sur le plan économique, comme dans des pays tels que la Chine, la classe dirigeante s’inquiète de la chute du taux de natalité et de l’approvisionnement continu en main-d’œuvre bon marché. Sur le plan idéologique, la rhétorique des “valeurs familiales traditionnelles” tente de forcer les femmes à reprendre le rôle de soignantes non rémunérées, ce qui permet de réduire encore davantage les investissements dans les services essentiels tels que la santé et l’éducation, et d’éroder les conditions de travail et les salaires dans ces secteurs.

    C’est clair qui profite de tout ça en premier lieu : les inégalités n’ont jamais été aussi grandes dans toute l’histoire ! Les dix hommes les plus riches du monde ont plus que doublé leur fortune, passant de 700 milliards de dollars à 1 500 milliards de dollars – soit 15 000 dollars à la seconde ou 1,3 milliard de dollars par jour – au cours des deux premières années de la pandémie, alors que les revenus des 99 % de l’humanité ont chuté et plus de 160 millions de personnes supplémentaires ont plongé dans la pauvreté (2). Dans le monde entier, le travail non rémunéré à la maison représente aujourd’hui plus de 10 000 milliards de dollars par an et ne cesse d’augmenter.

    Mais l’impact idéologique d’un retour aux “valeurs familiales traditionnelles” va bien au-delà, avec ses mœurs sexuelles hypocrites. Il remet en question et sape la sexualité des femmes et des personnes LGBTQIA+ et encourage davantage les attitudes sexistes et homophobes. La lutte pour le droit à l’avortement s’inscrit dans un combat beaucoup plus large pour l’autonomie corporelle et l’égalité de toutes les personnes, indépendamment de leur sexualité ou de leur genre. Nous sommes les premières à payer le prix des politiques et des idéologies qui tentent de nous forcer à vivre nos vies sous le contrôle de normes sexuelles et de genre rigides et dépassées, qui ne correspondent pas à nos aspirations à la liberté sur nos propres corps, mais qui sont utilisées pour saper et même réduire au silence les luttes plus larges des trans, des personnes LGBTQIA+ et des femmes.

    Interdire l’avortement n’empêche pas les avortements

    Une telle interdiction augmente fortement le stress et le fardeau financier des personnes qui vivent des grossesses difficiles. Le manque d’accès à un accompagnement médical et légal d’un avortement conduit beaucoup de personnes à se rabattre sur des options dangereuses, voire mortelles (3) . Les personnes qui peuvent se le permettre se rendront simplement là où l’avortement est légalement accessible. Celles qui ne peuvent pas se le permettre sont obligées de chercher de l’aide par d’autres moyens. Les pilules abortives sont aujourd’hui utilisées en toute sécurité dans le monde entier par des millions de femmes à domicile de manière légale ou non. (4) ; ces pilules ont d’abord été “découvertes” par des femmes dans les favelas d’Amérique latine, par celles qui ne pouvaient pas se permettre d’autres moyens de se procurer un avortement.

    L’interdiction de l’avortement a comme effet collatéral majeur d’amoindrir les soins de suivit de grossesse et les soins reproductifs en général ; ça met donc en danger toutes les personnes enceintes. Les conséquences tragiques et mortelles de cette situation peuvent être observées dans tous les pays où l’avortement est interdit. En Irlande, l’horrible traitement réservé à Savita Halappanavar avait déclenché un mouvement de masse dans les rues pour faire annuler l’interdiction de l’avortement. Elle était enceinte de 17 semaines lorsqu’elle a fait une fausse couche. Elle est morte d’une septicémie parce que le corps médical était réticent à intervenir ; le cœur du fœtus mourant battait toujours et la loi interdisait l’avortement. Son histoire a eu un grand retentissement parce qu’elle reflète la crainte de toutes les personnes enceintes de ne pas être entendues et respectées par un corps médical trop occupé à craindre la loi pour vraiment les écouter et pour accorder plus d’importance à leur vie qu’aux questions juridiques.

    L’interdiction d’avorter est dangereuse pour toutes les personnes susceptibles de tomber enceintes. Cela a un impact disproportionné sur les personnes les plus exploitées et opprimées. Alors, comment lutter contre ces interdictions et construire un mouvement qui permette un avortement libre, sûr et légal, accessible à toutes les personnes qui en ont besoin ?

    Les mobilisations de masse dans les rues auxquelles nous avons assisté dans des pays comme l’Irlande, la Corée du Sud, l’Argentine et le Mexique nous donnent un point de départ. Dans tous ces pays, des victoires ont été remportées en ce qui concerne l’accès à l’avortement. Elles ont été remportées avant tout par des mouvements organisés depuis la base ; ils ont poussé la question à l’agenda politique par des mobilisations dans la rue. Ils ont exercé une pression implacable sur l’establishment politique pour le forcer à agir. Chacun de ces mouvements s’est inspiré et a tiré les leçons de ce qui se passait dans d’autres pays ; plus que jamais, la lutte pour l’autonomie corporelle est internationale.

    En Irlande, ROSA et Alternative Socialiste Internationale ont joué un rôle très actif dans le mouvement pour l’abrogation de l’interdiction constitutionnelle de l’avortement et ont prit des initiatives qui ont été déterminantes pour obtenir le droit à l’avortement sur demande jusqu’à 12 semaines, prit en charge par le système de santé publique. Cette victoire s’explique par le fait que nous nous sommes appuyés sur le sentiment croissant en faveur du choix au sein de la classe travailleuse au sens large, plutôt que sur les faibles déclarations “pro-abrogation” de figures de l’establishment libéral qui nous promettaient l’abrogation “dans les 20 prochaines années”… !

    Nous avons participé à construire un mouvement qui a activé le large soutien pour le droit au choix présent dans la population lors de manifestations de masse, de journées d’action, de pétitions, de campagne dans les rues. Nous avons systématiquement utilisé chaque opportunité pour augmenter la pression politique. Fort de cet important soutien, ROSA a défié publiquement l’interdiction constitutionnelle en organisant des bus d’avortement très médiatisés et a contribué à rendre la pilule abortive disponible en toute sécurité. En faisant reconnaître publiquement que la pilule abortive est utilisée chaque année par des milliers de personnes, nous avons forcé la main de l’establishment : toute législation devrait prendre en compte cette réalité et permettre un avortement gratuit, sûr et légal sur demande jusqu’à au moins 12 semaines.

    Cependant, les récentes attaques contre l’accès à l’avortement ont également un impact au niveau international.La défaite de Roe v Wade aux États-Unis a été vue dans le monde entier et a déjà enhardi l’extrême droite dans des pays comme l’Italie et la Hongrie.

    La défaite de Roe v Wade était une attaque délibérée, préparée de longue date et menée avec un fort soutient d’une partie importante du Parti républicain. L’affaiblissement de l’accès à l’avortement et des droits légaux durant des années a jeté les bases de cette défaite. Mais l’absence totale de réaction de la part du reste de l’establishment est tout aussi significative : cela fait 40 ans que les démocrates promettent de légiférer sur Roe v Wade, mais ils n’ont jamais rien fait ! Les ONG et les organisations de planning familial liées au Parti démocrate n’ont pas tiré les leçons des autres pays, à savoir que le droit à l’avortement ne peut être défendu et/ou gagné que par une organisation active de la base. Ces organisations continuent, au contraire, à remettre leur sort entre les mains du même parti qui s’est avéré ne pas vouloir se battre sur cette question pendant 40 ans. Résultat : lorsque Roe v Wade a été attaqué, la faillite d’un “leadership” redevable aux démocrates, sans programme ou stratégie claire et paralysé par le manque d’action est devenue douloureusement claire. Le jour où Roe v Wade a été annulé, dans de nombreuses villes, Socialist Alternative (qui fait partie du réseau Féministe Socialiste international ROSA) était l’organisation qui a mobilisé pour des manifestations pour faire descendre dans la rue la colère palpable de tant de personnes.

    Malgré ce manque de leadership, l’accès à l’avortement reste un enjeu politique majeur aux États-Unis, au point de transformer les prochaines élections de mi-mandat. Les sondages indiquent que le soutien à l’accès à l’avortement a augmenté aux États-Unis depuis l’arrêt de la Cour Suprème. Les femmes s’inscrivent sur les listes électorales à un rythme incroyable. Dans des États comme l’Arizona et la Pennsylvanie, les candidats républicains ont déjà dû revenir sur leur position antiavortement grâce à la pression de l’électorat. Les élections sont considérées comme un premier champ de bataille pour faire reculer les mesures anti-choix.

    Mais cela ne suffira pas pour remporter une véritable victoire. Afin de repousser de manière décisive l’agenda de la droite, nous devons nous organiser et rassembler les communautés qui composent la classe travailleuse et galvaniser la colère en un mouvement doté d’une stratégie et d’un programme clair.

    La victoire remportée à Seattle par Socialist Alternative et la conseillère municipale Kshama Sawant est un excellent exemple du type de stratégie dont nous avons besoin. Cette campagne a fait de Seattle la première ville sanctuaire du pays en matière d’avortement. C’est une victoire importante en soi, mais aussi par son timing qui prouve que la défaite de Roe v Wade ne signifie pas la fin ; il pourrait être le début d’une riposte qui se développe en un mouvement significatif à l’échelle des États-Unis, avec le soutien majoritaire des gens ordinaires.

    Socialist Alternative a remporté cette victoire en construisant une pression depuis la base, en mobilisant la classe travailleuse de Seattle et en utilisant notre position publique pour représenter cette pression de la manière la plus efficace possible. Pétition des électeurs, organisation de prises de parole lors des réunions du conseil municipal et proposition claire sur ce qui est nécessaire pour être une ville sanctuaire efficace en matière d’avortement (y compris défier les mandats d’arrêt) : tout cela a conduit à un vote favorable, où les démocrates locaux ont estimé qu’ils n’avaient pas d’autre choix que de soutenir l’initiative.

    C’est un exemple du type de stratégie dont nous avons besoin. Une stratégie qui repose sur le pouvoir réel de la construction d’un mouvement de masse actif dans les rues et les communautés, prêt à défier les interdictions d’avortement parce que le soutien actif pour une telle défiance a été organisé. Un mouvement qui exige – et non demande – que les politiciens placent la santé des personnes enceintes avant les divagations idéologiques de l’extrême droite. Un mouvement qui s’enracine dans l’action et la représentation indépendantes de la classe ouvrière.

    Un tel mouvement base son programme sur ce qui est nécessaire pour améliorer réellement les choix reproductifs de la population. L’avortement libre, sûr et légal, oui, mais aussi les soins de santé gratuits, y compris des soins accessibles d’affirmation du genre, les crèches gratuites et une sécurité économique et de logement. Si l’on considère ce contexte plus large, le type de mesures nécessaires pour atteindre une véritable autonomie corporelle, il devient clair que l’on ne peut pas faire confiance aux politiciens de l’establishment pour se battre pour nous.

    Ce programme ne peut être réalisé qu’en remettant en question le statu quo, en luttant pour une politique économique qui place les besoins des gens avant les profits d’une minorité. Cela signifie qu’il faut se battre pour savoir qui contrôle et possède ces ressources. Nous voulons des soins de santé sans but lucratif, mais qui soient démocratiquement détenus et contrôlés par les communautés qui les utilisent. Stop aux bulles immobilières spéculatives qui remplissent les poches des grands promoteurs, il faut de logements sociaux publics avec un contrôle des loyers et une sécurité d’occupation.

    Cela signifie construire un mouvement qui rassemble TOUTES les personnes qui bénéficieraient de ces mesures, c’est-à-dire l’immense majorité d’entre nous, la classe travailleuse dans toute sa diversité, afin que nous soyons assez forts pour défier un système capitaliste qui va de crise en crise, en essayant toujours de nous en faire payer le prix. Le capitalisme en tant que système a échoué à nous procurer une sécurité de base, à subvenir à nos besoins et aspirations de base, et même à nous donner le contrôle de nos propres corps. Notre combat pour l’autonomie corporelle doit également mettre clairement en évidence la culpabilité du système : notre combat est un combat anticapitaliste. Les énormes ressources mondiales qui sont actuellement accaparées par une minuscule cabale de profiteurs pourraient être utilisées pour commencer à résoudre les nombreux problèmes que ce système nous a laissés, mais seulement si nous les prenons en charge par la collectivité, de manière démocratique et publique. Une société socialiste est basée sur la compréhension “de chacun.e selon ses capacités, à chacun.e selon ses besoins” ; la solidarité, l’humanité de base et le respect pour chacun.e d’entre nous. C’est la base d’une société dans laquelle l’autonomie corporelle peut réellement être atteinte. Si vous voulez nous aider à construire cette alternative, rejoignez-nous !

    La Journée internationale pour l’avortement sans risque a lieu aujourd’hui, le 28 septembre. Il est très clair que nous devons faire de cette journée une journée de protestations internationales, pour exiger que notre droit à l’autonomie corporelle soit respecté partout dans le monde. Rejoignez-nous !

    1. Chaque année, environ 73 millions d’avortements ont lieu dans le monde, selon l’Organisation mondiale de la santé (OMS). Cela se traduit par environ trente-neuf avortements pour mille femmes dans le monde, un taux qui est resté à peu près le même depuis 1990. Notamment, les taux ont divergé entre les pays qui ont moins de restrictions et ceux qui en ont plus : Entre 1990-94 et 2015-19, le taux moyen d’avortement dans les pays où l’avortement est généralement légal (à l’exception de la Chine et de l’Inde) a diminué de 43 %. En revanche, dans les pays où l’avortement est fortement restreint, le taux moyen d’avortement a augmenté d’environ 12 %. https://www.cfr.org/article/abortion-law-global-comparisons
    2. Briefing d’Oxfam “L’inégalité tue”, 17 janvier 2022.
    3. Près de 90 % des avortements dans les pays où la législation sur l’avortement est libérale sont considérés comme sûrs, contre seulement 25 % des avortements dans les pays où l’avortement est interdit. Selon l’OMS, environ 5 à 13 % des décès maternels dans le monde sont dus à des complications liées à des avortements non sécurisés, dont la grande majorité se produit dans les pays néo-coloniaux.
    4. Pour un accès sécurisé, contactez https://aidaccess.org/en/ ou https://www.womenonweb.org/en/.
  • Rejoignez l’action à Berlin en défense du droit à l’avortement à travers le monde

    Chaque année en septembre, les forces anti-avortement de toute l’Europe se réunissent à Berlin. Il est important de répondre à cette mobilisation par des actions. Surtout dans un contexte d’attaques brutales de la droite contre le droit à l’avortement, les droits des LGBTQIA+ et les mouvements féministes.

    Solidarité internationale pour le droit à l’avortement !

    Après des années de lutte féministe accrue, la droite lance une contre-attaque. Le retrait de l’arrêt Roe v. Wade aux États-Unis en est l’une des expressions les plus importantes. 40 millions de personnes susceptibles de tomber enceintes n’ont plus eu le droit à l’avortement du jour au lendemain. Les personnes LGBTQIA+ sont également en danger. L’attaque contre le droit à l’avortement fait partie de toute une série d’attaques, comme la loi « Don’t say gay » en Floride. La Cour suprême remet désormais ouvertement en question le mariage homosexuel.

    En Chine, le droit à l’avortement a été complètement renversé.. Jusqu’à il y a quelques années, les gens étaient contraints d’avorter dans le cadre de la politique de l’enfant unique. Aujourd’hui, l’État chinois refuse l’accès à l’avortement parce qu’il y a une menace de pénurie de main-d’œuvre. Les personnes appartenant à des groupes minoritaires sont toujours contraintes de se faire avorter.

    Les mouvements féministes sous le feu des attaques

    Les attaques contre le droit à l’avortement sont une inspiration pour la droite dans le monde entier. Lorsque la Pologne a pratiquement aboli le droit à l’avortement en 2020, les pays européens ont fortement désapprouvé. L’Etat polonais a maintenant un allié puissant avec les États-Unis.

    Le retrait du droit à l’avortement aux États-Unis donne à l’extrême droite mondiale la confiance nécessaire pour passer à l’attaque. À Gand, un groupe d’extrême droite a déployé une banderole portant le message suivant : « Priez et agissez contre le péché de l’avortement ». La contre-action de Casa Rosa a mobilisé 100 personnes qui ont clairement fait savoir qu’elles n’étaient pas d’accord avec ce message. Mon corps, mon choix !

    C’est exactement ce genre d’action qui est nécessaire pour réduire l’espace de la droite.

    Lorsque l’extrême droite gagne en confiance, cela conduit à une augmentation généralisée de la violence vis-à-vis de l’ensemble des personnes opprimées et exploitées. Il est nécessaire de réagir à chaque fois qu’elle se mobilise, on refuse qu’elle nous fasse taire ! Une résistance active est nécessaire.

    En nous battant, nous pouvons gagner

    Nous ne pouvons pas compter sur l’establishment politique ou les tribunaux pour acquérir des droits pour les femmes et les protéger. C’est grâce à des années d’actions de masse pour que cette question soit à l’ordre du jour, des campagnes de désobéissance civile organisées pour rendre possible un avortement, la convergence des luttes avec d’autres mouvements et certainement avec le mouvement ouvrier … que l’establishment américain a été forcé à reconnaître ce droit à l’époque. Mais la manière dont a été appliqué Roe v. Wade illustre qu’un acquis – en particulier aussi précaire puisque ce n’était même pas dans la loi – n’est que temporaire sous le capitalisme.

    Ces dernières années, ces même types d’actions, avec une lutte de masse des femmes, des personnes LGBTQIA+ et des travailleurs et travailleuses, ont permis de remporter des victoires en Irlande – une lutte dans laquelle la campagne féministe socialiste ROSA a joué un rôle clé – et dans plusieurs pays d’Amérique latine.

    Les explosions spontanées de colère ne suffiront pas à arrêter la droite. La construction d’un mouvement de masse organisé est cruciale.

    Rejoignez la contre-mobilisation à Berlin

    Viens avec ROSA International et Alternative Socialiste Internationale à Berlin le week-end du 17 et 18 septembre. Le 17 septembre, nous participerons à une manifestation contre les groupes anti-avortement qui se réunissent à cette date dans la ville. Nous formerons un bloc féministe socialiste dans cette manifestation pour le droit à l’avortement, mais aussi à un vrai choix. ROSA international organise une réunion avec différentes militantes internationales après cette manifestation. Ce week-end sera aussi l’occasion de rencontrer des militant.e.s de ROSA d’Angleterre, du Pays de Galles, d’Ecosse, d’Irlande, d’Allemagne, d’Autriche,…

    Informations pratiques

    De Belgique, nous prenons le FlixBus pour Berlin (voyage aller le 16 septembre, retour le 18 septembre).
    À Berlin, nous passerons la nuit dans une auberge de jeunesse.
    Le prix approximatif pour le transport et le logement est de 150 euros. Nous communiquerons un prix exact dès que possible.

    Soutenez notre mobilisation à Berlin

    Pour donner à chacun.e la possibilité de se rendre à Berlin et de continuer à organiser des actions pro-choix , nous lançons un appel aux dons. Chaque petit geste compte : avec 5 €, nous pouvons acheter un nouveau drapeau ; avec 40 €, nous pouvons payer un trajet en bus pour une personne qui n’en a pas les moyens ; avec 100 €, nous pouvons payer la location d’une salle pour y tenir une réunion, …

    BE54 5230 8095 8497 au nom de la Campagne ROSA

    Tu veux y participer et/ou soutenir financièrement cette campagne ? Alors, complète ce formulaire.

  • USA. Seattle devient la première ville sanctuaire pour le droit à l’avortement

    Comment les travailleurs.ses et les marxistes ont-ils remporté cette victoire ?

    Sous l’impulsion du bureau de la conseillère municipale socialiste Kshama Sawant, nous avons réussi à faire de Seattle la première ville sanctuaire en matière d’avortement aux États-Unis depuis que la Cour suprême a annulé le jugement Roe v. Wade !

    Bia Lacombe est une organisatrice de la collectivité pour la conseillère municipale Kshama Sawant.

    Le mois dernier, des milliers de militant.e.s locaux et de jeunes de Seattle ont remporté une victoire historique dans la lutte pour le droit à l’avortement. Sous l’impulsion du bureau de la conseillère marxiste Kshama Sawant, nous avons réussi à faire de Seattle la première ville sanctuaire en matière d’avortement aux États-Unis depuis que la Cour suprême a annulé le jugement Roe v. Wade.

    Il sera désormais interdit à la police de Seattle d’arrêter des personnes faisant l’objet d’un mandat d’arrêt non exécuté en rapport avec des lois anti-avortement en vigueur dans le pays, et il lui sera également interdit de contribuer aux enquêtes sur ces affaires. Les personnes faisant l’objet de mandats liés à l’avortement pourront vivre à Seattle sans être extradées vers l’État qui tente de les poursuivre.

    « Les lois violant l’autonomie corporelle et criminalisant les soins de santé reproductive sont fondamentalement injustes, et notre mouvement ne permettra pas à Seattle d’être complice », a écrit Sawant dans un communiqué de presse célébrant ainsi ce retour en arrière contre la décision de justice honteuse de la cour suprême. « Laissez toute personne menacée par des lois anti-avortement draconiennes venir à Seattle sans craindre d’être poursuivie ! ».

    L’ensemble de la classe ouvrière a subi une grave défaite avec l’annulation de Roe. Des milliers de femmes et de personnes LGBTQ, ainsi que des professionnels de l’avortement et d’autres travailleurs de la santé, pourraient être contraints de fuir leur État d’origine.

    En gagnant cette législation, les travailleurs, les jeunes et les socialistes de Seattle ont démontré ce que signifie être solidaire avec la classe ouvrière au-delà des frontières des villes et des États.

    Mais plus important encore, une telle législation pourrait avoir de profondes répercussions si elle se répandait largement : si la moitié des États américains adoptent une législation similaire refusant d’extrader les personnes ayant enfreint les lois anti-avortement dans l’autre moitié des États, les lois anti-avortement deviendront partout plus difficiles à appliquer.

    Byron Sigcho-Lopez, conseiller municipal de Chicago, et Robin Wonsley, membre du conseil municipal de Minneapolis, camarades de Sawant au sein des Socialistes démocrates d’Amérique, prévoient de faire pression en faveur d’une législation de sanctuaire pour l’avortement dans leurs villes. Notre bureau a également travaillé en étroite collaboration avec le superviseur Heidi M. Wegleitner du comté de Dane, dans le Wisconsin, qui s’est montré solidaire de notre combat en écrivant au conseil municipal de Seattle pour soutenir fermement notre législation.

    Comment les travailleurs.ses de Seattle et Socialist Alternative ont gagné

    Le large soutien et l’enthousiasme suscités par notre loi sur le droit à l’avortement à Seattle était aussi écrasant que ce à quoi on pouvait s’attendre au vu des nombreux sondages nationaux qui indiquent un large soutien au droit à l’avortement. Plus de 5 500 personnes ont signé notre pétition de soutien à la législation. Le jour du vote du conseil municipal, 60 personnes ont témoigné en public pour demander aux démocrates du conseil de voter « oui » sans diluer le projet de loi.

    Une grande partie des signatures de la pétition en faveur d’un sanctuaire pour l’avortement a été recueillie par les membres de Socialist Alternative lors des événements de la Pride à Seattle à la fin du mois de juin, où nous avons parlé à des milliers de personnes LGBTQ de la classe ouvrière de la nécessité d’un mouvement de masse unifié pour vaincre les attaques de la droite contre l’avortement, qui sont fondamentalement liées aussi aux attaques vicieuses contre les jeunes trans et les personnes homosexuelles que nous observons dans tout le pays.

    Les membres de Socialist Alternative ont continué à tenir des stands presque quotidiennement tout au long du mois de juillet, afin de parler au plus grand nombre possible de travailleurs et de les faire participer à la lutte.

    Sur la version en ligne de notre pétition, 850 personnes ont laissé des commentaires avec des histoires personnelles et des mots de solidarité, dont des centaines de membres de syndicats.

    À Washington, nous n’avons vu aucun leadership de la part des démocrates ou de leurs ONG affiliées comme Planned Parenthood et NARAL Pro-Choice. À Washington, nous n’avons vu aucun leadership de la part des démocrates ou de leurs ONG affiliées comme Planned Parenthood et NARAL Pro-Choice. Même les membres de la « Squad » ont refusé d’engager un véritable combat basé sur la mobilisation des millions de travailleurs qui les soutiennent – encore une capitulation devant le leadership démocrate auquel ils avaient promis de s’opposer.

    Les républicains et la droite ont passé 50 ans à s’organiser et à construire pour cet assaut total contre les femmes et les personnes queer. Pendant ce temps, le parti démocrate a passé 50 ans à promettre de nous protéger en codifiant le droit à l’avortement, puis à refuser complètement de se battre malgré chaque occasion. Tragiquement, ceci peut maintenant être ajouté à la longue liste croissante des promesses non tenues des Démocrates – de Medicare for All, d’un salaire minimum fédéral de 15$/h, d’un Green New Deal, et de bien d’autres choses encore.

    Au moment même où ils exprimaient leur indignation face à la décision de la Cour suprême, les membres démocrates du conseil municipal de Seattle tentaient de saper notre législation dans les coulisses, mais refusaient de révéler publiquement leurs intentions. Ils ont tenté d’affaiblir considérablement la clause qui oblige désormais la police de Seattle à ne pas arrêter les personnes faisant l’objet d’un mandat d’arrêt lié à un avortement hors de l’État. La seule raison pour laquelle les démocrates ont fait marche arrière a été le feu des projecteurs braqué sur eux par les centaines de travailleurs qui se sont exprimés et par le bureau de Sawant, prouvant une fois de plus l’efficacité de la mobilisation de la classe ouvrière.

    La seule voie à suivre

    Il appartient maintenant aux mouvements sociaux dirigés par des travailleurs de défendre le droit fondamental à l’avortement, et de reconnaître la leçon la plus importante de cette défaite : nous avons besoin d’un nouveau parti pour les travailleurs qui ne soit pas lié aux entreprises et aux milliardaires. Nous avons besoin d’un parti organisé démocratiquement et dont les représentants élus, comme Kshama Sawant, ne prendront que le salaire moyen du travailleur et seront responsables devant les travailleurs et les opprimés.

    Même si nous obligeons les démocrates à se ranger à nos côtés, nous ne pouvons pas nous permettre de tirer des conclusions erronées. Les démocrates du Conseil ne sont pas soudainement devenus d’authentiques progressistes lorsqu’ils ont voté en faveur de notre projet de loi sur le sanctuaire de l’avortement. Lors de cette réunion, les démocrates ont secrètement présenté un vote visant à mettre fin à la prime de risque de pandémie de 4 $/heure versée par Seattle aux employés des épiceries.

    Taxer Amazon pour financer les avortements gratuits

    Notre pétition pour un sanctuaire de l’avortement comprend également une demande extrêmement populaire visant à augmenter la taxe Amazon de notre mouvement pour financer des avortements gratuits pour tous les résidents et visiteurs de Seattle. Nous présenterons cette loi cet automne, dans le cadre de nos revendications pour le budget populaire de 2023.

    Un travailleur de la santé qui a signé la pétition a souligné l’urgence et l’importance de cette prochaine étape de la lutte, en écrivant : « Notre pays est confronté à une crise et nous devons agir maintenant. Si nous n’augmentons pas les fonds et les ressources consacrés aux avortements, nous ne serons pas prêts lorsque les patients fuyant l’Idaho et d’autres États rouges afflueront. Les cliniques d’avortement de l’Est de Washington sont déjà à pleine capacité, et les choses ne vont faire qu’empirer. Nous devons nous préparer à faire face à cette crise immédiatement en augmentant la taxe Amazon. »

    Le combat ne fait que commencer. Rejoignez-nous !

  • USA. Agir MAINTENANT pour défendre le droit à l’avortement – Déclaration de Kshama Sawant


    Le jour où la Cour suprême a annoncé qu’elle révoquait le jugement Roe v Wade, des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue dans tout le pays. Cette décision honteuse de la droite va à l’encontre du soutien à l’avortement légal de la majorité des travailleuses et travailleurs américains. Mais les manifestations ont également très clairement montré que des millions de personnes sont enragées par l’échec total des démocrates à riposter et par l’idée que tout ce que nous devons faire maintenant est de voter démocrate aux élections de novembre.

    Par Kshama Sawant, élue au Conseil de ville de Seattle, membre de Socialist Alternative (ASI-USA)

    À New York, plus de 20.000 personnes ont défilé avec colère dans Manhattan, sous la conduite de Socialist Alternative et d’autres groupes et syndicats de gauche. L’énergie de la manifestation était si féroce que la marche a duré quatre heures.

    À Fayetteville, dans l’Arkansas, des centaines de personnes ont manifesté dans le centre-ville pour réclamer une alternative féministe socialiste au féminisme libéral en faillite.

    À Houston, où Socialist Alternative a lancé un appel à des manifestations de masse devant le palais de justice fédéral, cinq mille personnes ont participé à la manifestation. Dans une vidéo maintenant virale de la manifestation, on peut voir le démocrate Beto O’Rourke, qui s’est présenté en demandant un temps de parole, baisser la tête de honte alors que la foule autour de lui scandait “Voter démocrate ne suffit pas ! Démocrates nous voyons votre bluff !”

    Dans chaque ville où Socialist Alternative a organisé des manifestations, nos membres rapportent que les foules étaient pleines de jeunes gens furieux non seulement de la barbarie évidente de la droite, mais aussi de l’incapacité et du refus des démocrates de défendre même les droits fondamentaux.

    Des démocrates qui ne font rien

    Il n’a pas échappé aux gens qu’immédiatement après la décision de la Cour suprême, le parti démocrate au pouvoir, plutôt que de se battre pour codifier l’arrêt Roe v Wade ou mettre en œuvre des ordres exécutifs visant à protéger le droit à l’avortement que la grande majorité de la société soutient, a préféré mettre en place un show de « God Bless America » sur les marches de la Cour suprême. Aussi comique que cela puisse paraître, c’est réellement ce qui s’est passé.

    Quelques heures après la révocation de l’arrêt Roe, les e-mails de collecte de fonds des démocrates ont commencé à arriver comme une avalanche. « S’il vous plaît, je n’ai jamais eu autant besoin de votre soutien qu’aujourd’hui. Pouvez-vous contribuer à hauteur de 15 dollars pour que nous puissions gagner ces élections de mi-mandat en novembre et codifier enfin les droits reproductifs dans la loi ? » a écrit Nancy Pelosi. « Pouvez-vous vous précipiter pour faire un don, quel qu’en soit le montant, afin de stopper l’extrême-droite et d’élire un Congrès favorable aux droits en matière d’avortement cette année ? » a demandé le congressiste David Cicilline.

    Ces plaidoyers insultants des démocrates pour obtenir de l’argent et des voix suscitent la colère générale des jeunes. Comme l’a exprimé une jeune femme « c’est comme si l’on nous demandait d’adhérer encore une fois à un système défaillant dans l’espoir qu’il se répare de lui-même ; ce ne sera pas le cas. »

    Nous devons agir MAINTENANT

    Les démocrates, avec leur contrôle de la Maison Blanche et leur majorité au Congrès, ont la possibilité de prendre des mesures significatives – s’ils en avaient la volonté politique – pour surmonter cette attaque de la droite.

    À l’instant même, Biden pourrait

    • Signer un décret autorisant l’ouverture de cliniques d’avortement sur les terres fédérales dans les plus de 20 États où l’avortement est interdit. Les cliniques seraient alors libres de fonctionner dans des bâtiments fédéraux ou des cliniques mobiles pourraient être installées sur tout terrain fédéral.
    • Rendre la pilule abortive accessible dans tout le pays en utilisant les directives de la FDA (l’agence de la santé américaine) pour écarter toute restriction des États.
    • Élargir l’accès aux services de télémédecine pour l’avortement et utiliser le contrôle fédéral du système postal pour garantir que les envois de pilules abortives ne soient pas restreints.

    Au-delà de cela, Biden et les dirigeants démocrates de la Chambre et du Sénat peuvent se battre bec et ongles pour codifier l’arrêt Roe et adopter des lois sur la protection de la santé des femmes. Ils peuvent également abroger de toute urgence taxer les milliardaires afin d’augmenter massivement le financement des cliniques qui plient aujourd’hui sous une demande accrue.

    En plus de ces mesures qui feraient une différence spectaculaire dans la capacité des gens à accéder aux avortements, nous avons également besoin d’une multitude de services sociaux pour garantir que les gens puissent se permettre d’avoir des enfants quand ils le souhaitent.

    Cela signifie une transition immédiate vers l’assurance-maladie pour tous au niveau fédéral, afin de rendre gratuits tous les soins liés à la reproduction et à l’affirmation du genre. Cela implique de rétablir les allocations familiales de l’époque de la pandémie, de se battre pour des services de garde d’enfants universels et des écoles publiques entièrement financées, le tout financé par l’imposition des riches.

    Plus d’excuses

    La congressiste démocrate de gauche Alexandria Ocasio-Cortez (AOC) a raison de dire : « Le président et les leaders démocrates ne peuvent plus s’en tirer avec les tactiques familières des ‘comités’ et des ‘études’ pour éviter de s’attaquer de front à nos crises. » Elle a demandé à Biden de prendre des mesures exécutives immédiates pour protéger l’accès à l’avortement et je suis tout à fait d’accord avec elle. Mais comme nous l’avons appris par l’expérience d’AOC et des autres élues de The Squad (la brigade, surnom donné à diverses élues de gauche au Congrès), demander simplement aux démocrates capitaliste d’agir ne sera jamais suffisant. Les presque neuf années d’existence de Socialist Alternative à Seattle ont montré que nous devons construire un mouvement suffisamment puissant pour forcer les politiciens démocrates à agir, malgré leur opposition.

    Comme Cori Bush l’a fait avec le moratoire sur les expulsions, AOC, Bernie et d’autres membres de The Squad devraient appeler à une installer une occupation devant la Maison Blanche pour exiger que Biden utilise une action exécutive visant à ouvrir des cliniques d’avortement sur les terres fédérales et élargir l’accès aux pilules abortives. Nous pouvons organiser des manifestations de soutien devant les bâtiments fédéraux dans les villes du pays.

    Si les dirigeants démocrates refusent toujours d’agir, nous devrons intensifier la pression en organisant des manifestations et des actions directes dans les bureaux des dirigeants démocrates. Après la fuite du projet de jugement de la Cour suprême en mai dernier, Socialist Alternative a organisé des sit-in dans les bureaux des dirigeants démocrates Pelosi et Schumer. Des milliers de personnes ont suivi les retransmissions en direct, les encourageant avec enthousiasme. C’est le type d’action que nous devrons mener si nous voulons sérieusement forcer les démocrates à agir.

    Lutter pour les villes sanctuaires

    Pendant que nous intensifions nos demandes envers les démocrates pour qu’ils adoptent des mesures immédiates au niveau fédéral, il y a des combats cruciaux que nous pouvons mener au niveau de l’État et au niveau local pour garantir l’accès à l’avortement aux résidents et aux visiteurs étrangers.

    À Seattle, j’ai déposé une loi faisant de Seattle une ville sanctuaire pour toute personne risquant une sanction légale dans son État d’origine pour avoir cherché ou fourni un avortement. Si elle est adoptée, cette loi empêchera la police de Seattle d’arrêter des personnes, qu’il s’agisse de patientes, de médecins ou d’autres prestataires de soins, pour des mandats non exécutés liés à des lois anti-avortement dans d’autres États. Nous présenterons également une loi sur le budget populaire pour rendre l’avortement gratuit à Seattle pour les personnes voyageant depuis des États ayant des lois anti-avortement ainsi que pour les résidents de Seattle, financée par l’augmentation de la taxe Amazon que nous avons gagnée en 2020.

    Il faut se battre pour des législations similaires dans d’autres villes. Notre bureau au Conseil de la ville de Seattle est heureux de constituer une ressource de projets de loi et de débattre des meilleures stratégies pour construire une pression populaire.

    Nous avons besoin d’un mouvement de masse indépendant du parti démocrate

    Afin de répondre à l’assaut des attaques vicieuses de la droite, nous avons besoin d’un mouvement de masse indépendant qui puisse servir de base aux jeunes et aux travailleurs qui cherchent un moyen de riposter.

    Comme l’écrivait Socialist Alternative le jour de la décision de la Cour suprême : « Avec une absence totale de leadership du parti démocrate ou des ONG libérales, stopper la droite dans son élan nécessitera un mouvement complètement indépendant de jeunes et de travailleurs. Ce mouvement doit avoir des objectifs politiques clairement définis, des structures démocratiques et une indépendance totale vis-à-vis des démocrates. »

    Nous devons présenter des candidats socialistes et ouvriers indépendants comme une étape immédiate vers la construction d’un nouveau parti pour les travailleurs et les jeunes qui se battra sans ambiguïté pour nos intérêts.

    Je demande à tous les autres élus socialistes, à tous les dirigeants syndicaux et à tous les dirigeants du mouvement social de se joindre à moi pour appeler à un mouvement de masse démocratique, à de nouvelles organisations de masse de lutte et à une rupture définitive avec le parti démocrate pourri qui a permis à la droite de mener cette guerre contre notre autonomie corporelle.

  • Révocation du droit à l’avortement aux USA : pour un mouvement de masse contre la droite !

     

    Solidarité internationale ! Participez ce dimanche à “PRIDE IS A PROTEST” à Gand !

    • départ collectif de la Gare Centrale à Bruxelles : rdv à 13h pour une petite action et des prises de parole devant la gare avant de prendre le train de 13h56.
    • départ collectif de Liège Guillemins : rdv à 12h30 pour prendre le train de 13h.

    L’arrêt Roe vs Wade a été révoqué. Il s’agit d’une défaite historique pour le mouvement féministe, qui représente une victoire dans la campagne de la droite visant à saper l’autonomie corporelle des femmes et des personnes LGBTQIA+ à travers le pays.

    Déclaration de Socialist Alternative (section d’ASI aux Etats-Unis)

    Malgré le soutien massif en faveur de l’avortement légal, des dizaines de millions de personnes vivent aujourd’hui dans des États où obtenir un avortement signifie enfreindre la loi. Cette situation se répercutera essentiellement sur le dos des femmes pauvres qui, plus souvent encore, doivent parcourir des centaines de kilomètres et manquer plusieurs jours de salaire pour avoir un avortement. Bien que ce soit la droite qui ait mené une campagne déterminée durant des décennies pour révoquer l’arrêt Roe vs Wade, ce sont les démocrates et leurs ONG affiliées qui ont permis que cela se produise.

    Il n’était pas nécessaire qu’il en soit ainsi. Avec le large soutien dont bénéficie le maintien de cet arrêt, les organisations de femmes dirigées par des libéraux auraient pu mener une véritable lutte de masse pour le protéger. La fuite du projet de la Cour suprême en mai dernier aurait pu servir de tremplin à une campagne de plusieurs mois de protestations, de meetings publics et d’actions directes. Au lieu de cela, ils ont activement démobilisé le mouvement et l’ont canalisé vers une campagne inutile vers les élections.

    Des groupes tels qu’EMILY’s List, Planned Parenthood et NARAL Pro-Choice ont annoncé avoir dépensé 150 millions de dollars en faveur des démocrates pour les élections de mi-mandat de 2022. Heather Williams, directrice exécutive du comité de campagne législative démocrate, a déclaré à propos des électeurs démocrates : « La chute de Roe leur donne certainement une motivation et une urgence supplémentaires [pour voter]. » C’est une gifle insultante pour les centaines de milliers, voire les millions de personnes qui cherchaient à agir pour empêcher cette décision.

    « Votez démocrate pour protéger le droit à l’avortement » ne signifie rien alors que ces mêmes démocrates refusent d’agir. Joe Biden est assis sur une pile de décrets qu’il pourrait signer dès maintenant pour étendre et garantir l’accès à l’avortement médicamenteux dans tout le pays. Au milieu d’un assaut barbare et choquant contre les enfants trans et non binaires à travers le pays, Hillary Clinton a déclaré que le « débat sur les transgenres » ne devrait pas être une priorité pour les démocrates. Cela s’ajoute à la longue liste de choses que les démocrates choisissent d’ignorer au lieu de se battre.

    Il est évident que nous avons besoin de nouvelles organisations de masse, totalement indépendantes du parti démocrate, pour se battre sans réserve contre les assauts de la droite.

    Dans de nombreux États, le recul de l’accès à l’avortement, l’attaque contre les droits des enfants transgenres et l’attaque de tout programme antiraciste dans les écoles sont devenus les moyens privilégiés des politiciens républicains pour remonter le moral de leur base. En l’absence totale de leadership de la part du parti démocrate ou des ONG libérales, stopper la droite dans son élan nécessitera un mouvement totalement indépendant de jeunes et de travailleurs.

    Nous avons besoin d’un mouvement de masse doté de structures démocratiques qui puisse servir de quartier général à la lutte pour vaincre la droite et protéger (ou reconquérir) notre droit à l’autonomie corporelle. Ce mouvement doit avoir des objectifs politiques clairement définis, des structures démocratiques et une indépendance totale vis-à-vis des démocrates.

    Les organisations socialistes, les syndicats et les groupes de justice sociale doivent unir leurs forces pour lancer une telle organisation. Les structures nécessaires à notre mouvement doivent être construites afin que les revendications, les tactiques et la stratégie soient décidées démocratiquement.

    Malheureusement, la plus grande organisation socialiste des États-Unis, les Socialistes démocrates d’Amérique (DSA), s’est contentée de lancer un site web qui appelle à faire des dons aux fonds pour l’avortement et à les rejoindre. C’est une abdication de responsabilité au milieu de cette attaque historique.

    Si une nouvelle organisation de masse devait voir le jour, ce que nous pensons être absolument nécessaire, Socialist Alternative la construirait avec enthousiasme et se battrait pour qu’elle ait un programme féministe socialiste.

    Cela signifie un ensemble de revendications qui répondent aux besoins profonds des femmes et des personnes homosexuelles. Des revendications qui portent à la fois sur l’autonomie corporelle et qui donnent aux gens les moyens de fonder une famille s’ils le souhaitent. Cela inclut : un système d’assurance-maladie trans-inclusif pour tous avec avortement gratuit sur demande, des services de garde d’enfants universels, une éducation publique entièrement financée, des logements publics de haute qualité et abordables en permanence, la propriété publique et le contrôle démocratique sur les monopoles de couches et d’alimentation pour bébés, ainsi que de toutes les autres méga-corporations parasites.

    Nous nous battrions pour qu’une telle organisation utilise des tactiques enracinées dans la lutte des classes, plutôt que de s’appuyer sur des actes individuels de résistance. Avec l’annulation de l’arrêt Roe vs Wade, les gens feront ce qu’il faut pour avoir accès à l’avortement, y compris en utilisant les réseaux clandestins, les fonds pour l’avortement et le crowdfunding des amis et de la famille. Mais le fait de se concentrer uniquement sur l’aide mutuelle plutôt que de construire une lutte de masse ne suffira pas à faire revenir l’avortement comme un droit légal dans ce pays. Seule la lutte de masse peut le faire. Cela signifie des manifestations et des protestations de masse, des arrêts de travail, des actions directes et des grèves. Nous pouvons nous inspirer des mouvements féministes historiques en Amérique latine et en Irlande.

    Le féminisme libéral a prouvé sa faillite totale. Se battre pour nos droits et reconquérir ceux que nous avons perdus exige de se battre en faveur d’un féminisme socialiste. Nous avons besoin d’un nouveau parti pour les travailleurs, les femmes, les personnes LGBTQIA+ et toutes les personnes opprimées, qui se base sur les mouvements sociaux et se bat sans ambiguïté pour nos intérêts.

    Ce n’est que sur la base d’une lutte sans faille des jeunes, des travailleurs et de tous ceux qui sont opprimés par ce système brutal que nous pourrons mettre un terme à l’escalade dangereuse de la droite.

  • Répondre à l’attaque contre le droit à l’avortement aux États-Unis par un mouvement international de masse

    Début mai, une fuite a révélé que la Cour suprême des États-Unis envisageait d’annuler l’arrêt Roe v. Wade, la décision de justice qui a rendu l’avortement légal dans l’ensemble des États-Unis en 1973. C’est l’une des réalisations les plus importantes de l’énorme combat de ce qu’on appelle la deuxième vague féministe. Que cette offensive puisse prendre place alors que le parti démocrate – qui s’est toujours présenté comme le grand garant des droits des femmes – est au pouvoir rend la chose d’autant plus amère.

    Par Anja Deschoemacker

    Les conséquences pour les femmes et les personnes susceptibles de tomber enceintes seraient considérables et désastreuses. Dans 13 États, l’avortement serait totalement interdit immédiatement par des lois dites « de déclenchement » (trigger laws) qui entreraient directement en vigueur dès l’abrogation de Roe v Wade. Dans 26 États, des restrictions sévères seraient ensuite votées, qui pourraient servir de tremplin à une interdiction totale.

    Cette attaque fondamentale contre le droit à l’avortement n’est pas une surprise. Les juges de la Cour suprême nommés par Trump avaient été mis à ce poste précisément pour cette raison, sans que cela n’ait jamais été caché. En septembre dernier, une loi a été adoptée au Texas pour interdire l’avortement après six semaines de grossesse et en autorisant les particuliers à poursuivre en justice toute personne ayant pratiqué, ou aidé à pratiquer, un avortement. En Oklahoma, un projet de loi menace les personnes qui fournissent des services d’avortement de peines de prison pouvant aller jusqu’à 10 ans !

    Ces conservateurs s’en prennent non seulement aux droits des femmes – outre l’avortement, l’accès à la contraception, par exemple – mais ils s’emploient également à détruire les droits des personnes LGBTQIA+. D’abord en Floride, puis en Alabama, des lois ont été votées interdisant aux écoles de discuter et d’inclure dans leurs cours des thèmes tels que l’identité de genre ou l’orientation sexuelle. Une douzaine d’autres États discutent de telles lois “don’t say gay”. Quand la droite affirme que la décision de la Cour suprême à venir ne portera que sur l’avortement et non sur d’autres droits, elle ment.

    L’avortement : un droit fondamental et vital

    Pour les démocrates américains, ce droit est une monnaie d’échange, tout comme il l’a toujours été pour les partis libéral, social-démocrate et maintenant vert en Belgique. Ils le font pour la forme, ils en parlent dans les campagnes électorales mais, en fin de compte, ils sont prêts à revenir sur leur décision. Lors de sa campagne électorale, Joe Biden avait promis de rendre le droit à l’avortement légal, chose que promettent les démocrates depuis une cinquantaine d’années. Mais cette promesse n’engageait que celles et ceux qui y ont cru, comme pour la plupart de ses promesses.

    Pour les femmes et les autres personnes qui ont des grossesses non désirées, c’est par contre une question de vie ou de mort. En particulier en cette période de grande insécurité des revenus et d’augmentation rapide de cherté de la vie, le contrôle de sa propre fertilité revêt une importance considérable. Avoir un enfant ou pas peut être la chose qui vous pousse à bout, surtout dans un pays où il n’existe pas d’assurance maladie universelle et même pas de congés de maternité rémunérés. Une personne enceinte se retrouve donc entre le marteau et l’enclume : aucun soutien pour élever un enfant, mais aussi aucune possibilité de ne pas mener la grossesse à bien. De nombreuses tragédies s’ensuivront inévitablement.

    Ce n’est pas une coïncidence si, historiquement, ce sont surtout les femmes ouvrières et pauvres qui ont lutté pour le droit à l’avortement. Les femmes riches ont les moyens de trouver une solution individuelle, tandis que les femmes qui travaillent et les femmes pauvres doivent compter sur des infrastructures et des services publics. Si vous éprouvez des difficultés pour joindre les deux bouts et payer à la fois votre loyer et votre nourriture, il vous est impossible de vous rendre dans un État ou un pays où l’avortement est légal.

    Les femmes noires et les femmes migrantes – notamment sans-papiers – seront particulièrement touchées. Déjà, les femmes noires ont trois fois plus de risques de mourir de complications liées à la grossesse parce qu’elles sont surreprésentées dans le groupe des personnes vivant dans la pauvreté, mais aussi à cause du racisme présent dans toutes les institutions, y compris les soins de santé.

    Il s’agit du droit fondamental de décider de son propre corps, de sa vie et de son avenir.

    Construire un mouvement aux États-Unis, mais la lutte n’est pas terminée ici non plus

    Les sondages démontrent qu’une majorité de la population soutient le droit à l’avortement. Le fait qu’une petite clique de juges non élus, en poste à vie, puisse annuler ce droit juste comme ça est totalement antidémocratique. Mais si cette attaque de droite réussit, cela aura beaucoup à voir avec le fait que les démocrates n’ont pas tenu leur promesse de légiférer sur le droit à l’avortement depuis maintenant un demi-siècle.

    Cela illustre, s’il le fallait encore, que les démocrates sont un parti aux ordres de la classe dirigeante. Même en tant que partisans théoriques du droit à l’avortement, ils s’opposent à tout mouvement capable de remettre en cause leur système ou une partie de celui-ci. Ils savent pertinemment, de par l’expérience historique, qu’un mouvement construit de bas en haut exige rapidement bien plus que ce qu’ils sont prêts à donner. Dans ce cas particulier, il serait question d’un programme social capable d’accorder une véritable possibilité de choix et donc, en plus du droit à un avortement gratuit accessible à tous, des revendications sociales qui permettent d’avoir des enfants sans pour cela devoir s’appauvrir.

    On ne peut compter ni sur l’establishment politique ni sur les tribunaux pour obtenir et sauvegarder les droits des femmes. Ce n’est pas non plus la façon dont Roe v Wade a été imposé. Il a fallu des années d’action de masse dans la rue pour maintenir la question à l’ordre du jour, de la désobéissance civile organisée pour permettre aux femmes d’avorter en toute sécurité, la conclusion d’alliances avec d’autres mouvements sociaux (notamment le mouvement ouvrier), etc. Voilà ce qui a forcé l’establishment américain à accepter de reconnaître ce droit à l’époque.

    C’est également ce type d’action – une lutte de masse menée par les femmes, les minorités sexuelles et de genre et la classe des travailleuses et travailleurs – qui s’est révélée victorieuse ces dernières années en Irlande notamment. Là-bas, notre organisation-sœur le Socialist Party et la campagne féministe socialiste ROSA ont joué un rôle de premier plan. De pareilles victoires ont aussi été obtenues dans plusieurs pays d’Amérique latine.

    C’est ce qui est nécessaire aux États-Unis et c’est ce que défendent nos camarades de Socialist Alternative. Ces derniers ont amorcé des actions dans plusieurs villes, dont des grèves étudiantes le 13 mai, tout en collaborant avec d’autres forces dans le cadre de mobilisations plus larges, notamment aux côtés des travailleurs du secteur de la santé. Socialist Alternative a ainsi organisé des réunions pour permettre aux activistes de débattre de la meilleure façon d’organiser la lutte. Les explosions spontanées de colère seront insuffisantes pour stopper la droite. Le développement d’un mouvement de masse organisé est un point crucial.

    En fin de compte, un nouveau parti devra émerger des luttes de masse contre la droite et les conséquences de ce système capitaliste devenu insoutenable. Il devra regrouper les jeunes, les femmes, les noirs, les migrants et les travailleurs qui ont intérêt à renverser les ultra-riches dans le cadre de luttes en faveur d’une société où ce n’est pas le profit mais les besoins et désirs de la majorité de la population dans toute sa diversité qui détermineront la direction de la société.

    Le 14 mai, plusieurs sections d’Alternative Socialiste Internationale (ASI), dont le PSL/LSP est la section belge, et de Rosa International Socialist Feminists ont organisé des actions de solidarité et nous continuerons sur cette voie. Par solidarité avec les femmes et les personnes enceintes aux États-Unis, mais aussi parce que dans la plupart des pays, comme la Belgique, une évolution comme celle des États-Unis n’est pas inimaginable, sans être très probable à court terme. Ici aussi, le droit à l’avortement n’est pas inscrit dans la loi, l’avortement figure toujours dans le Code pénal et n’a été dépénalisé que dans un certain nombre de cas. L’avortement sur demande n’est possible que jusqu’à 12 semaines, ce qui signifie qu’ici aussi, des centaines de personnes doivent encore se rendre à l’étranger pour accéder à ce service. Les frais de déplacement et le fait que le service doive ensuite être payé rendent la situation très difficile pour de nombreuses femmes.

    Une fois de plus, il ne nous faudra pas compter sur les partis qui ont abandonné leur projet de loi visant à allonger le délai de l’avortement légal et à le supprimer du Code pénal pour constituer le gouvernement fédéral Vivaldi avec le CD&V.

  • [EN ACTION] Solidarité avec les mobilisations pro-choix aux USA ! Notre corps, notre choix !


    Ce samedi, à l’appel du PSL/LSP, de la Campagne ROSA (résistance contre l’Oppression, le Sexisme et l’Austérité) et de la Marche Mondiale des Femmes, un rassemblement de solidarité avec les luttes pour défendre le droit à l’avortement s’est tenu devant l’ambassade des Etats-Unis à Bruxelles, avec également participation de la Gauche Anticapitaliste. Le texte qui suit est la prise de parole d’Anja Deschoemacker, du PSL/LSP et de la Campagne ROSA.

    Au début de ce mois, une fuite a révélé que la Cour suprême des États-Unis a l’intention d’annuler l’arrêt Roe vs Wade, l’arrêt de 1973 qui empêche les États d’interdire ou de restreindre le droit à l’avortement.

    Aux États-Unis, des dizaines de milliers de personnes sont descendues dans la rue ces dernières semaines – nous sommes ici pour nous joindre à leur protestation. Nous voulons que tout le monde entende notre cri de guerre : notre corps, notre choix !

    La Cour Suprême peut prendre sa décision à tout moment entre maintenant et la mi-juillet. Lorsque cette position sera adoptée, de nombreux États suivront l’exemple du Texas, 13 États seront concernés par une interdiction totale et jusqu’à 25 ou 26 États verront le droit à l’avortement fortement restreint.

    C’est une catastrophe, déclenchée par les partisans de Trump, mais contre laquelle les Démocrates ne se battent pas. La promesse de Biden de codifier Roe v Wade – une promesse démocrate vieille de 50 ans ! – était une promesse vide, comme beaucoup de ses promesses !

    Cela montre à nouveau que nous ne pouvons compter que sur nos propres actions, notre propre mobilisation et la construction d’un mouvement par en bas jusqu’à la victoire !

    C’est ainsi que le droit à l’avortement a été remporté en Irlande en 2018, en Corée du Sud en 2019, en Argentine en 2020, au Mexique en 2021, en Colombie en février de cette année. Il est hors de question que nous acceptions de revenir 50 ans en arrière dans l’histoire des États-Unis !

    Si cela se produit, cela incitera les régimes réactionnaires du monde entier à suivre l’exemple des États-Unis. La Campagne ROSA et Alternative Socialiste Internationale (dont le PSL/LSP est la section belge) se battront aux États-Unis et ailleurs pour empêcher que cela ne se produise.

    Aujourd’hui, c’est la Pride. L’arrêt Roe vs Wade aux Etats-Unis était basé sur le droit constitutionnel à la vie privée. Ce n’est pas seulement une décision qui garantit le droit à l’avortement, mais la base de toute une série de droits qui impliquent l’autonomie corporelle des individus, le droit de décider nous-mêmes de ce que nous faisons de notre corps. En tant que tel, il sert également de base à toute une série de droits en faveur des personnes LGBTQIA+ qui sont aujourd’hui menacés.

    Nous sommes donc dans le même bateau. Ce n’est qu’en nous joignant les uns aux autres pour lutter contre toutes les discriminations et oppressions, pour les droits de tous à l’autonomie corporelle, pour les droits de tous à un niveau de vie décent afin de permettre un véritable choix sur nos vies et nos corps – ce n’est qu’en faisant cela que nous pourrons combattre ces réactionnaires.

    la Campagne ROSA et le réseau ROSA International Socialist Feminists ainsi qu’Alternative Socialiste Internationale ne comptent pas sur les soi-disant progressistes de la classe des milliardaires. Tout comme les Démocrates aux Etats-Unis, les libéraux, les sociaux-démocrates et les verts belges sont heureux de défendre nos droits du bout des lèvres, mais ils ont rapidement abandonné la revendication d’un avortement légal jusqu’à 18 semaines en échange d’un poste au gouvernement. Cette histoire s’est répétée tant de fois que toute surprise à ce sujet est en fait un signe de naïveté.

    Nous soutenons aux Etats-Unis – et ailleurs – le droit à l’autonomie corporelle des femmes et des personnes LGBTQIA+. Nous exigeons l’accès à tous les droits reproductifs et à l’assurance maladie pour tous afin que ce droit devienne une réalité pour tous et pas seulement pour ceux qui peuvent payer. Nous exigeons des services de garde d’enfants et d’éducation gratuits et de haute qualité, financés par le public, afin que le fait d’avoir des enfants ne nous appauvrisse pas.

    Nous nous battrons pour tout cela et nous espérons que vous nous rejoindrez dans ce combat. Mais la situation aux Etats-Unis montre comment les lois et les droits progressistes qui ont été gagnés par les luttes de masse intenses du passé peuvent être inversés tant que le contrôle de l’Etat et de l’économie reste aux mains de la classe des super riches, la classe capitaliste.

    La Campagne ROSA et Alternative Socialiste Internationale s’engagent donc dans une lutte à long terme, la lutte pour se débarrasser du système capitaliste qui repose de A à Z sur l’inégalité et s’est construit sur le colonialisme, l’esclavage et l’impérialisme, sur des normes de genre strictes en fonction de la recherche du profit, sur la division de la masse opprimée et exploitée de la population mondiale, les travailleurs et les pauvres.

    Rejoignez-nous pour combattre cette nouvelle attaque contre les droits des femmes et des personnes LGBTQIA+. Et organisez-vous avec nous pour lutter pour un monde véritablement libre, dans lequel le sexisme, le racisme, la LGBTQIA+phobie ainsi que l’oppression nationale et religieuse seront devenus des fantômes du passé.

     

  • Pour défendre le droit à l’avortement, menons la combat féministe socialiste à l’échelle mondiale !

    Alternative Socialiste Internationale (dont le PSL/LSP est la section belge) et le réseau international ROSA International Socialist Feminists lancent un appel à la solidarité mondiale.

    Les femmes, les travailleurs et les pauvres des États-Unis se soulèvent pour défendre le droit à l’avortement. L’État américain – qui a faussement prétendu mener une guerre pour les droits des femmes dans le monde entier – mène maintenant une guerre contre les femmes à l’intérieur de ses propres frontières, une guerre qui a des conséquences à travers le globe. Nous, féministes et travailleurs anticapitalistes socialistes, construisons des réseaux internationaux de résistance en Amérique latine, en Afrique, au Moyen-Orient, en Europe, en Russie, en Chine et dans d’autres parties de l’Asie.

    Le 3 mai, une fuite a révélé que la majorité des juges de la Cour suprême des États-Unis a l’intention de déchirer l’arrêt Roe v Wade qui, depuis 1973, accorde aux femmes le droit légal à l’avortement aux États-Unis et constitue la base de nombreuses autres lois progressistes, y compris concernant la contraception et les droits LGBTQIA+. Cette décision a été accueillie avec colère par les femmes, les jeunes et les travailleurs du pays, où une grande majorité souhaite conserver le droit à l’avortement. Les protestations se sont succédées. Nous voulons soutenir ce combat en menant des actions à travers le monde.

    C’est la deuxième vague de lutte féministe dans les années 1960 et 1970, grâce à l’organisation de masse, qui a permis de remporter le droit à l’avortement dans de nombreux pays. Dans d’autres pays, ce droit inhérent des femmes et des personnes enceintes à décider de leur propre corps a été obtenu plus tard. Au cours des dix dernières années, la lutte féministe a remporté d’importantes batailles. Quelques exemples : l’Irlande a gagné le droit à l’avortement en 2018, la Corée du Sud en 2019, l’Argentine en 2020 et l’avortement a été dépénalisé dans tout le Mexique en 2021. En février de cette année, la plus haute juridiction colombienne a légalisé l’avortement jusqu’à la 24e semaine.

    Parallèlement, la droite poursuit sa lutte contre les droits des femmes et des personnes transgenres. L’année dernière, la droite chrétienne a réussi à imposer une interdiction quasi-totale de l’avortement en Pologne. En Chine, la dictature restreint le droit à l’avortement dans le cadre de sa volonté de créer un marché économique national plus important, et maintenant la Cour suprême des États-Unis suit le mouvement.

    C’est le programme sexiste de Donald Trump qui est en train de se déployer. Alors qu’il était au pouvoir, Trump a nommé trois nouveaux juges à la Cour et il a consciemment choisi des candidats anti-avortement afin de faire basculer la majorité de la Cour et de déchirer l’arrêt Roe contre Wade. Si cela réussit, les avortements seront automatiquement interdits dans 13 États qui ont déjà anticipé les événements et promulgué des lois qu’ils pressent maintenant la Cour suprême de cautionner. On s’attend à ce que de nombreux autres États interdisent l’avortement dans les semaines et les mois qui suivront la décision d’invalider Roe v Wade, si cette dernière s’avère être la décision finale de la Cour. L’interdiction de l’avortement au Texas, déjà en vigueur depuis six mois, prévoit que toute personne en contact avec une femme enceinte souhaitant avorter doit devenir un informateur de l’État – un chauffeur de taxi, par exemple, pourrait être condamné pour complicité. En d’autres termes, il pourrait se produire une situation inhabituelle dans laquelle des personnes aux États-Unis se rendraient au Mexique afin de jouir de leurs droits fondamentaux.

    Mais la colère des gens est aussi grande envers le parti démocrate. Les démocrates ont permis que tout cela se produise. Obama et Joe Biden avaient tous deux promis de légiférer sur le droit à l’avortement, mais ils ont trahi leurs promesses. Une fois de plus, les démocrates ont montré qu’ils représentent l’un des deux partis du grand capital. Si un parti de masse de la classe ouvrière avait existé, il aurait pu au contraire préparer les travailleurs, les femmes, les jeunes et les Noirs à la lutte qui s’impose. La leçon du mouvement Black Lives Matter, qui a également reçu un énorme soutien au niveau international, est que les protestations spontanées ne suffisent pas. Il faut davantage d’organisation et un programme politique socialiste, qui voit à travers la double nature de l’État.

    Il n’y a pas d’autre issue que la lutte. Partout dans le monde, les femmes ont le souffle coupé : est-ce bien réel ?! Les horribles années de maladie et de mort de la pandémie ont donné lieu à une pandémie parallèle de précarisation, ce qui est tout particulièrement le cas des femmes, à la fois par l’intensification du double travail avec la fermeture des écoles et des centres de soins, par le stress de tous les travailleurs de la santé et, surtout, par l’explosion de la violence des hommes envers les femmes dans les foyers. Mais ce que les gouvernements du monde ont cherché à sauver, ce sont les profits des grandes entreprises et des banques. Nous ne sommes même pas sortis de ce cauchemar qu’une nouvelle crise nous frappe déjà en plein visage. Avec l’invasion de l’Ukraine par Poutine, la militarisation a atteint des sommets dans le monde entier. Les prix des denrées alimentaires aussi. Oxfam prévient que 263 millions de personnes supplémentaires pourraient tomber dans l’extrême pauvreté cette année.

    À tout cela s’ajoute une offensive idéologique contre le droit le plus fondamental des femmes – le droit de décider de leur propre corps. Si le programme “pro-vie” des États-Unis parvient à abolir le jugement Roe v Wade, ce sera un coup porté aux femmes du monde entier. Agnès Callamard, secrétaire générale d’Amnesty International, prévient que cela “constituerait un exemple terrible dont d’autres gouvernements et groupes de défense des droits pourraient s’emparer dans le monde entier pour tenter de nier le droit des femmes, des jeunes filles et des autres personnes susceptibles de tomber enceintes”. D’autres pays pourraient suivre cet exemple et promulguer des lois sévères, estime Amnesty, qui cite l’exemple de la Pologne, dont l’interdiction de l’avortement avait été critiquée par l’UE, mais dont le gouvernement de droite trouve aujourd’hui un allié dans la Cour suprême des États-Unis. Ajoutons que les critiques ont de toute façon été étouffées puisque tous ces États ont formé un lien étroit contre la Russie.

    La même semaine où le plan de la Haute Cour pour écraser Roe v Wade a été divulgué, le régime taliban en Afghanistan a annoncé qu’il est désormais obligatoire pour les femmes de porter la burqa (un voile couvrant tout le corps et le visage) lorsqu’elles quittent leur domicile. Les féministes socialistes du monde entier accueillent ces nouvelles avec consternation. La guerre de l’OTAN en Afghanistan a été menée sous le prétexte de “libérer les femmes”. Mais la paix ne peut être construite par le militarisme d’une puissance impérialiste. Sur l’ensemble des ressources que les États-Unis ont dépensé en Afghanistan, seuls deux pour cent étaient destinés au développement économique. 86 % étaient des dépenses militaires. Cela a conduit à la dévastation et au chaos, à partir desquels les talibans ont pu retrouver le chemin du pouvoir.

    La misère en Afghanistan est énorme depuis que toute aide étrangère a cessé. Ainsi, tout d’abord, de nombreuses femmes n’auront même pas l’argent nécessaire pour acheter une burqa. L’interdiction de montrer son visage à l’extérieur est une forme extrême d’objectivation. Les femmes sont réduites à des choses qui appartiennent aux hommes. La mobilité et l’indépendance des femmes sont littéralement limitées par la masse de tissu imposée à leur corps. Des mécanismes similaires se cachent derrière les États qui restreignent le droit à l’avortement. Le corps des femmes est transformé en objet au service des intérêts de l’État. La droite conservatrice aux États-Unis, le régime despotique de Poutine en Russie et la dictature en Chine veulent tous renforcer le rôle de la famille en tant que pilier porteur des sociétés hiérarchisées.

    Le fait que l’État impérialiste le plus puissant du monde tente de franchir cette étape risque d’établir une norme dangereuse que nous devons arrêter. Déjà, les “Global Gag-rules”, que Reagan a été le premier à introduire, ont durement frappé les femmes pauvres dans le monde entier. Elles interdisent aux ONG qui reçoivent de l’argent de l’aide américaine de plaider pour le droit à l’avortement. Donald Trump a étendu ces règles à l’ensemble du secteur de la santé. Les organisations d’aide en Afrique témoignent de la manière dont les gouvernements, comme au Kenya, utilisent cette politique de l’impérialisme américain comme une béquille dans leur propre répression du mouvement pour le droit à l’avortement. Selon l’OMS, trois avortements sur quatre pratiqués en Amérique latine et en Afrique au cours des années 2015-2019 étaient dangereux. Comme le souligne l’institut Guttmacher : “la grande majorité – 92 % – des femmes en âge de procréer (15-49 ans) de la région africaine vivent là où l’avortement est fortement ou modérément restreint.”

    Des millions de femmes risquent de se retrouver dans des situations où elles sont contraintes de vivre une grossesse et d’être parents contre leur gré. Cette situation touchera principalement les femmes de la classe ouvrière et les femmes pauvres. Les enfants grandiront dans des conditions familiales difficiles.

    La santé des femmes sera également affectée de manière négative, en raison du nombre accru de grossesses, de la souffrance mentale et de l’utilisation de méthodes d’avortement dangereuses. En outre, en raison de l’intérêt pour le profit et de la division des soins de santé en classes, les taux de mortalité maternelle sont déjà inacceptables aux États-Unis. Les restrictions à l’avortement, qui font du corps des femmes enceintes un objet de querelles juridiques, rendront la grossesse plus dangereuse pour tous et entraîneront davantage de décès maternels. Les personnes à faibles revenus n’ayant pas accès à l’assurance maladie seront particulièrement touchées. Et les femmes noires qui sont également victimes de racisme au sein du système médical seront particulièrement touchées – les décès maternels chez les femmes noires devraient augmenter de 33 %.

    En soi, c’est un coup porté à la lutte des femmes et à la lutte des travailleurs. La droite réactionnaire et antiféministe de Trump sera renforcée dans d’autres pays et, avec elle, la violence sexiste, la transphobie, le racisme, le fanatisme et la violence. C’est un coup contre la santé de chacun-e, quel que soit son sexe, lorsque les acquis sociaux sont menacés.

    Cette révolution à rebours dans l’État le plus dominant du monde renforce le populisme de droite et le fondamentalisme religieux dans le monde entier, et affaiblit les droits des femmes partout. Cela affaiblit à son tour toutes les autres luttes importantes comme celles contre la guerre, pour les droits des travailleurs et pour le climat.

    C’est pourquoi Alternative Socialiste Internationale et ROSA International Socialist Feminists appellent les organisations de lutte des femmes, les syndicats, les féministes, les organisations LGBTQ+ et les mouvements sociaux du monde entier à agir maintenant. Nos camarades de Socialist Alternative aux Etats-Unis ont déjà fait descendre des milliers de personnes dans la rue pour lutter contre cette interdiction, et nous préparons des débrayages d’étudiants et de travailleurs ainsi que de forts contingents de féministes socialistes pour les actions de masse qui ont lieu actuellement.

    Les féministes socialistes du monde entier doivent discuter de ces questions sur le lieu de travail, dans les quartiers, dans les communautés. Toutes nos luttes sont liées. La droite conservatrice pourrait se sentir renforcée pour lancer des attaques similaires contre le droit à l’avortement dans d’autres pays, et pour intensifier la répression contre les féministes et les socialistes là où le droit à l’avortement n’a pas encore été obtenu.

    ASI et ROSA ont l’expérience de luttes antérieures pour le droit à l’avortement. En Irlande, ROSA a joué un rôle central dans le mouvement de masse qui a obtenu l’avortement gratuit sur demande en début de grossesse, il y a quelques années seulement. Nous savons que ce combat peut être gagné. Le huitième amendement qui interdisait l’avortement en Irlande a même été inscrit dans la Constitution. Mais les lois et les tribunaux peuvent être changés par les forces vives de la société. En Irlande, nos frères et sœurs de ROSA ont mené une action publique de désobéissance civile avec les pilules abortives – montrant que, quelle que soit la loi, les femmes exerceront un contrôle sur leur propre corps. Cela a été un facteur majeur dans l’obtention de l’avortement jusqu’à douze semaines sur demande.

    La force la plus puissante pour le changement est la classe ouvrière organisée, parce que nous, les travailleurs, pouvons frapper le système là où il fait le plus mal – par des grèves et des manifestations de masse, nous pouvons arrêter la machine à profits dont dépendent les capitalistes.

    Le slogan “mon corps, mon choix” signifie de disposer d’une couverture médicale pour tous, d’une augmentation du salaire minimum, de programmes de logement abordable, de la gratuité de l’école et de l’école maternelle et d’autres revendications en faveur d’une société décente pour les enfants et leurs parents. La plupart des avortements aux États-Unis (et dans d’autres pays également) ont pour origine la vulnérabilité économique. (Les données de l’Institut Guttmacher ont montré que 73 % des femmes ont déclaré que le stress financier était à l’origine de la décision d’interrompre leur grossesse, aux États-Unis).

    Les plans ultra réactionnaires de la Cour suprême des États-Unis, qui se réfèrent à des lois du Moyen Âge, montrent que le but ultime de l’État n’est pas de garantir à chacun une vie bonne et sûre, comme il se doit, mais de servir les intérêts d’une petite élite puissante. Cela montre que l’État, lorsqu’il est poussé, agira pour préserver la société de classe injuste, avec son oppression des femmes et son racisme intégrés. C’est pourquoi nous devons lutter pour un autre système, où l’État serait contrôlé et dirigé démocratiquement par tous les travailleurs.

    Nous sommes des féministes socialistes précisément parce que nous réalisons que le capitalisme doit prendre fin. Dans une société socialiste démocratique, les grandes ressources économiques sont détenues en commun et investies en priorité dans les besoins sociaux, la transition climatique et la lutte contre la pauvreté, afin de garantir qu’aucun sexe ne soit opprimé, que chaque personne puisse décider de son corps, que tous les enfants aient une éducation sûre et un avenir prometteur.

    Sur ce chemin, il faut répondre à chaque attaque sexiste. #MeToo a montré la force de la discussion et de l’action collectives, mais #MeToo s’est rapidement dilué. Les grèves féministes ont plus de poids dans la lutte mais ne peuvent pas s’arrêter à des actions symboliques – elles doivent évoluer pour impliquer l’ensemble de la classe ouvrière, car le sexisme est un problème qui nous concerne tous et qui divise notre lutte. Pour commencer, afin d’arrêter l’attaque contre Roe v Wade et l’effet qu’elle aurait à travers le monde, ROSA et ASI organisent des manifestations de solidarité dans plusieurs pays pour aider à faire pression au niveau international sur la décision de la Cour. Ce n’est que le début – si vous voulez aider à construire un mouvement de solidarité combatif, contactez-nous.

  • Argentine : L’avortement légalisé! Un triomphe pour le mouvement de la « Marée verte »

    Maintenant, il nous faut nous organiser autour du féminisme socialiste !

    En un jour historique, le matin du 30 décembre et après 12 heures de débat, le Sénat argentin archaïque a approuvé la loi sur l’interruption volontaire de grossesse (IVE) par 38 voix contre 29.

    Par Marcos Ariel, partisan d’Alternative Socialiste Internationale en Argentine

    Lorsque le résultat du vote a été annoncé, les milliers de militantes et militants de la « Marée verte » – le mouvement féministe de masse qui lutte pour le droit à l’avortement depuis des années – qui assistaient à une veillée devant le Congrès et sur plus de 120 places dans toutes les provinces du pays, comme s’ils n’étaient qu’une seule personne, au milieu des célébrations, des larmes et des embrassades, ont éclaté en un joyeux chœur : « C’est la loi [le droit à l’avortement] ! »

    Cette lutte a franchi une étape importante en 2005, avec la création de la Campagne nationale pour un avortement légal sûr et gratuit (La Campaña), qui sert d’espace de coordination à la majorité des organisations féministes du pays. Mais la véritable explosion a eu lieu en 2018, lorsque la question a été débattue au congrès et dans l’ensemble de la société. Ce fut l’entrée en scène de toute une génération d’adolescentes : les « pibas » qui sont maintenant le moteur de cet immense mouvement. L’utilisation du foulard vert comme symbole de la lutte pour l’avortement légal et comme hommage au foulard des « Mères de la Place de Mai », qui se battent pour les 30 000 personnes qui ont « disparu » pendant la dictature militaire, est devenue populaire parmi les manifestants – qui ont été appelés « grands foulards ».

    Cette victoire est le produit de la lutte collective de trois générations féministes qui ont donné vie à la Marée verte. Le mouvement va continuer à s’étendre car il reste encore à lutter pour l’application effective de la loi, contre les limitations que le texte juridique lui-même contient et contre les obstacles que les réactionnaires opposés aux droits des femmes vont tenter de mettre en place.

    En outre, cet immense triomphe a non seulement un impact sur tous les coins de l’Argentine mais aussi sur le reste de l’Amérique latine, comme on l’a déjà vu au Chili où le Congrès va entamer le processus d’une loi dépénalisant l’avortement. Il sera donc important d’organiser des manifestations pour soutenir la lutte des femmes dans toute l’Amérique latine, jusqu’à ce que le mouvement féministe secoue le continent tout entier

    Une défaite majeure pour l’Eglise catholique

    Dans toute l’Amérique latine, la religion a un grand pouvoir, et tout particulièrement en Argentine où l’Église catholique est fortement liée à l’État. Elle reçoit des millions de subsides de l’État. Avec nos impôts, nous payons les salaires des prêtres et subventionnons leurs écoles privées. Tout cela alors qu’eux-mêmes sont exonérés d’impôts ! Cette église s’est historiquement opposée à tous les droits. Elle était contre la loi qui interdisait l’esclavage, contre la loi de la scolarité obligatoire, contre la loi sur le vote des femmes, le divorce, le mariage pour les couples de même sexe, contre l’éducation sexuelle, et maintenant tous ses secteurs, des plus réactionnaires aux progressistes « prêtres pour les pauvres », sont opposés à la légalisation de l’avortement. Avec le pape François, qui vient d’Argentine, à leur tête, ils ont fait un lobbying vigoureux contre l’avortement et ont été battus.

    Mais ce sont aussi les autres églises, notamment les églises évangéliques, qui ont été vaincues. Suite notamment aux terribles actes pédophiles des prêtres catholiques, ces églises ont gagné beaucoup d’influence, surtout auprès des couches les plus pauvres de la population. Cette victoire nous renforce pour le prochain combat que nous avons devant nous : la séparation de l’église et de l’État.

    Concessions aux réactionnaires

    La célébration de ce triomphe ne doit pas nous faire perdre de vue que la loi approuvée n’est pas celle qui a été élaborée collectivement par « La Campaña », mais celle du président Alberto Fernandez qui contient plusieurs aspects négatifs empirés à chaque étape de l’adoption du projet de loi.

    Face à la marée verte massive, avec une population de plus en plus favorable au droit à l’avortement et son adversaire à la présidence, Mauricio Macri, qui y était opposé, Alberto Fernandez a dû inclure l’avortement légal dans ses promesses de campagne. C’est une promesse qu’il a tenté de rompre jusqu’en 2020. D’abord, il a mis de côté le projet de loi élaboré par « La Campaña », et a produit le sien. Pour rassurer les réactionnaires, il a présenté, avec le droit à l’avortement, une loi pour la « protection de la maternité » par laquelle l’État subventionnera pendant mille jours toute mère qui décide d’avoir son enfant.

    Avec l’avènement de la pandémie, il s’en est servi comme excuse pour éviter de discuter du projet de loi au Congrès car, selon lui, il y avait d’autres questions plus importantes. Une fois la quarantaine décrétée, il a déclaré qu’elle ne pouvait pas être traitée car cette question génère la discorde et nous, les Argentins, devrions être unis contre le virus. De plus, des milliers de personnes se mobilisaient pour briser le confinement. Au milieu de l’année et au moment où le confinement a été assoupli, sa nouvelle excuse était que le système de santé n’était pas préparé. Enfin, il a déclaré qu’en 2020, il n’y avait pas de temps pour s’occuper du projet. Mais, à l’approche du mois de décembre, et devant la nécessité de voter sur l’ajustement des pensions demandé par le FMI, il a décidé de permettre que la loi sur l’avortement soit discutée en même temps que la loi sur l’ajustement des pensions. Le centre du débat est ainsi passé de quelque chose de régressif à quelque chose de progressiste.

    Une fois le projet de loi présenté, d’autres modifications négatives lui ont été apportées, la plus grave étant de faciliter l’« objection de conscience » ; en permettant aux travailleurs sociaux, aux cliniques et aux établissements de santé privés de refuser de pratiquer une interruption de grossesse si tous leurs professionnels, protégés par leurs croyances religieuses, se déclarent objecteurs. C’est très grave, surtout dans les villages de l’intérieur du pays où il y a pénurie de médecins. Cette pratique est déjà utilisée par des groupes anti-choix pour refuser de se conformer à la loi, comme cela s’est produit récemment dans la province de San Juan, où l’un des deux plus grands hôpitaux publics a déclaré qu’il ne procéderait pas à des interruptions de grossesse parce que tous ses gynécologues sont des objecteurs de conscience. Le projet initial de « La Campaña » non seulement n’incluait pas l’objection de conscience, mais l’interdisait.

    D’autre part, la loi approuvée sanctionne par des peines de prison de 3 mois à un an, toute personne enceinte qui pratique un avortement après la 14e semaine de gestation. Le projet « La Campaña » ne prévoyait aucune pénalisation.

    Puis, au dernier moment et lorsqu’aucune modification ne pouvait plus être apportée, le Président s’est engagé à supprimer de l’article 4(b) la « santé intégrale » de la personne enceinte comme cause d’avortement. Cela écarte, par exemple, la santé psychologique ou sociale et viole le concept de santé intégrale établi par l’OMS et ratifié par l’Argentine dans les conventions internationales sur les droits de l’homme.

    Malheureusement, la direction de « La Campaña », politiquement liée au parti au pouvoir, le Frente de Todos, a laissé passer tous ces revers sans appeler à la mobilisation tout au long de l’année. La mobilisation était nécessaire pour faire pression sur le gouvernement et, avec la distanciation sociale appropriée et dans le respect des mesures sanitaires, elle a était possible, comme l’ont démontré d’autres secteurs qui sont descendus dans la rue pour faire valoir leurs droits. Ainsi, le gouvernement, ne sentant que la pression active des secteurs anti-choix, avec l’excuse que des concessions étaient nécessaires pour obtenir les votes au Congrès, a cédé de plus en plus. C’est un faux argument de toute façon, puisque le Frente de Todos dispose de la majorité au Sénat. S’ils avaient vraiment la volonté politique, ils auraient pu voter sur l’ensemble du projet de loi « La Campaña » et en bloc, comme ils l’ont fait pour la loi sur l’ajustement des pensions pour obéir au FMI!

    Pour que la loi soit valable, elle doit être approuvée par le président et inscrite dans la législation. Cette étape de la réglementation est importante car ce n’est qu’alors que nous saurons exactement comment la loi sera appliquée : si le libre accès sera garanti dans le système public, comment seront gérés les patients des cliniques privées qui sont « objecteurs », comment le processus de déclaration des « objecteurs » sera effectué, etc. Nous pouvons nous attendre à ce que d’autres modifications négatives soient incorporées, elles sont déjà demandées par certains sénateurs.

    Nous devons nous organiser autour du féminisme socialiste

    Indépendamment des limites de la loi qui a été adoptée, ce triomphe renforce la Marée verte qui continue à se propager et gagne le soutien de plus de personnes qui étaient auparavant contre l’avortement et qui ont maintenant changé de position. En témoigne le petit nombre de personnes qui ont été mobilisées par le camp anti-avortement, même dans les provinces où l’église a le plus de poids. Ils sont de plus en plus sur la défensive.

    La base du mouvement est consciente que cette victoire n’est pas un cadeau du gouvernement, mais le résultat de la mobilisation et de la lutte et que le combat pour la mise en œuvre effective du droit à un avortement légal, sûr et gratuit doit se poursuivre. Nous devons nous battre chaque fois qu’un hôpital refuse de pratiquer une intervention, ou chaque fois qu’un juge veut mettre un prisonnier en prison pour des avortements pratiqués après la 14e semaine.

    Pour continuer à avancer, il est également nécessaire de s’organiser politiquement en un mouvement féministe cohérent, qui ne tombe pas dans l’opportunisme kirchneriste péroniste (la tradition politique à laquelle appartient Alberto Fernandez), ou dans un féminisme sectaire de petite bourgeoisie qui ne voit pas la nécessité d’une lutte de masse. Si ces courants féministes ont de l’influence, la grande avant-garde qui a émergé dans la lutte pour l’avortement légal regroupe également naturellement les forces du mouvement ouvrier qui défendent ce droit depuis des décennies.

    Cette nouvelle génération de jeunes militantes et militants rejoint la lutte sans préjugés politiques, libérée des liens et de la discipline rigide imposés par les bureaucraties péronistes et autres. Ils et elles se tournent rapidement vers la gauche et s’inscrivent dans d’autres luttes comme celle contre le changement climatique. Issus de la classe ouvrière et de la classe moyenne de plus en plus appauvrie, ils et elles se battront également dans les rues pour que la crise économique ne soit pas payée par les travailleuses et les travailleurs.

    Les limites du Front de gauche (une alliance électorale d’organisations de gauche avec une représentation au Parlement) dues au fait qu’il n’intervient pas de manière unitaire et avec une politique commune l’empêchent de profiter pleinement du nouvel espace qui s’est ouvert. Ce grand espace politique est propice à l’émergence d’une organisation féministe, socialiste et internationaliste à l’image de la campagne internationale ROSA lancée par Alternative Socialiste Internationale. C’est pourquoi nous vous invitons à vous engager avec nous dans la construction de grandes organisations féministes et socialistes en Argentine et dans le reste du monde pour la tâche colossale qui est la nôtre : mettre fin à ce système capitaliste et patriarcal et construire une société socialiste dans laquelle, comme l’a dit Rosa Luxemburg, nous serons socialement égaux, humainement différents et totalement libres.

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