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  • La manifestation pour nos pensions du 16 mai ne doit pas être un but en soi

    Manifestation du 19 décembre 2017. Photo : Mario.

    Après une campagne d’information au cours de laquelle des centaines de milliers de journaux sur les pensions ont été distribués, une manifestation prendra place le 16 mai à Bruxelles. Le dossier des pensions suscite beaucoup de colère : comment se fait-il que nous ayons à travailler plus alors que les profits augmentent ? La pression du travail signifie que peu de gens s’imaginent travailler jusqu’à 67 ans, et le gouvernement veut maintenant augmenter la pression sur chacun d’entre nous pour que nous travaillions plus longtemps de toute façon. Il faut agir. La manifestation du 16 mai est une mobilisation importante. Nombreux sont toutefois ceux qui se demandent : et ensuite, que se passera-t-il ?

    Si le gouvernement devait changer d’avis après une manifestation, nous n’aurions pas à manifester à nouveau au sujet des pensions. Il serait cependant erroné d’estimer que les manifestations et les actions n’ont aucun effet. Si nous ne faisons rien, le gouvernement rongera encore plus rapidement et plus durement nos conditions de vie. Sans nos actions, le débat public est presque entièrement entre les mains de la droite, et le tandem Michel-De Wever pourra bientôt poursuivre avec une nouvelle législature. C’est plus d’actions qu’il nous faut, pas moins. Pas d’action simplement prévues pour renforcer la position de négociation des directions syndicales, mais des actions réfléchies, allant crescendo, qui impliquent des couches plus larges de la population et ont un effet sur l’opinion publique. Impossible ? À l’automne 2014, nous y sommes parvenus avec une manifestation nationale suivie de grèves provinciales puis d’une grève générale nationale.

    La suspension des actions après ce plan d’action de 2014 a engendré confusion et frustration parmi de nombreux militants. Les délégués combatifs doivent faire tout ce qui est en leur pouvoir pour transformer la frustration en une compréhension de ses causes. Les dirigeants syndicaux n’ont pas osé continuer après 2014 jusqu’à la chute du gouvernement, en partie par manque de perspectives d’alternatives à ce gouvernement. Au sein du capitalisme, peu de marge existe pour que la classe ouvrière puisse arracher des concessions. Résultat, ces dernières décennies, la social-démocratie s’est de plus en plus identifiée au capitalisme et aux politiques qui constitue à nous présenter la facture des cadeaux faits aux ultra-riches. Les syndicats peuvent eux-mêmes défendre un projet politique et mener campagne pour instaurer une pression.

    Notre lutte pour une politique différente prendra du temps, nous devons nous y préparer. Après le 16 mai, les protestations ne peuvent pas s’arrêter. Un plan d’action bien élaboré et crescendo peut accroître la pression. Regardons la France et le soutien pour le mouvement social. Les actions doivent également avoir un objectif clair : la chute du gouvernement et de la politique d’austérité. Il nous faut aussi, au travers de ces actions, construire notre représentation politique contre celle des ultra-riches.

  • 16 mai : manifestation de masse pour des pensions dignes

    D’ici au 16 mai, chacun d’entre nous devrait faire une priorité absolue de la manifestation en faveur d’une “pension digne à un âge décent”. Il nous reste encore quelques jours pour convaincre nos collègues, nos amis, notre famille et nos voisins de venir. Soyez assurés que le gouvernement et le patronat attendent fébrilement de voir combien de personnes les syndicats vont faire descendre dans la rue.

    Cela signifie-t-il pour autant qu’ils vont mettre tous leurs projets au placard si nous sommes nombreux ? Ce n’est pas aussi simple que ça. Mais une participation faible ou modérée ne fera que renforcer leur zèle pour nous attaquer à nouveau, maintenant qu’ils le peuvent encore.
    Une forte participation, en revanche, peut contrecarrer leurs plans, tempérer leur ardeur. Dans ce cas, ils feront tout ce qui est en leur pouvoir pour contester les chiffres de participation. Les médias seront mis sous pression pour ne pas trop y prêter attention et, si cela ne fonctionne pas, pour en minimiser l’effet autant que possible. Si nous sommes vraiment très nombreux, ils tenteront de gagner du temps, d’étaler leurs plans dans le futur et peut-être même d’essayer d’apaiser les dirigeants syndicaux avec quelques concessions cosmétiques.

    Ce que craignent le gouvernement et les patrons, c’est une manifestation si importante et si combative que les dirigeants syndicaux n’auront pas d’autre choix que d’y donner suite. Ils craignent surtout une réédition du scénario de 2014, avec des assemblées du personnel, des concentrations, davantage de manifestations et, surtout, des grèves régionales et nationales. Cela a fait vaciller le gouvernement en décembre 2014. C’est alors que la N-VA a fait appel à la “primauté de la politique”, au fait que les décisions sont prises par la politique et non dans la rue. Les faits ne sont toutefois des faits que dans la mesure où ils correspondent à la réalité, un gouvernement dont les mesures sont combattues massivement et activement, ne peut et ne doit pas rester debout.

    Les mesures du gouvernement sur les pensions ont été expliquées en détail dans le journal des pensions que les syndicats ont distribué à plus d’un million d’exemplaires depuis mars. Essentiellement, cela signifie que nous devrons travailler de plus en plus longtemps pour des pensions qui seront encore plus basses que les actuelles, déjà parmi les plus basses d’Europe. Par conséquent, un pensionné sur trois vit sous le seuil de pauvreté. Le gouvernement belge dépense proportionnellement moins pour les pensions que ceux des pays voisins. Même si l’ensemble du programme des syndicats devait être mis en œuvre, la Belgique dépenserait proportionnellement moins pour les pensions que, par exemple, la France ou l’Autriche.

    Ce journal sur les pensions était une merveilleuse initiative, mais pourquoi ne pas la lier à une formation pour tous les militants pour qu’ils puissent l’expliquer à leurs collègues en toute connaissance de cause ? Pourquoi n’y a-t-il pas déjà eu une concentration syndicale autour d’elle ? Le potentiel existe pour un puissant mouvement, non seulement en ce qui concerne les pensions, mais aussi contre la charge de travail insoutenable, comme en témoignent les grèves spontanées chez Lidl ou les grèves chez B-Post, Brussels Airlines, les fonctionnaires fédéraux et d’autres. La pleine réalisation de ce potentiel exige une préparation minutieuse à tous les niveaux.

    Ce que veulent les syndicats :

    1. Le retour à l’âge légal de la pension à 65 ans.
    2. Un régime solide et juste pour les métiers lourds et le travail pénible
    3. 1.500 € de pension garantie
    4. De meilleures pensions légales : 75 % du salaire moyen (au lieu de 60 % actuellement).
    5. L’alignement du plafond de calcul des salariés sur celui des indépendants
    6. Une meilleure prise en compte du travail à temps partiel pour la pension.
    7. La liaison automatique des allocations au bien-être

    Les dirigeants syndicaux savent aussi bien que nous que l’obtention de ces revendications nécessite une majorité de gauche prête à rompre avec la politique d’austérité permanente de ces gouvernements et des gouvernements précédents et qui nous est imposée par l’Europe. Pour prendre ces revendications au sérieux, les syndicats doivent soutenir activement les partenaires qui veulent les traduire politiquement et rompre les liens entretenus avec ceux qui ne sont pas prêts à le faire. Cependant, pour consolider ces revendications, il nous faut également une société qui produit pour les besoins de la grande majorité de la population et non pour les profits d’une poignée de capitalistes qui récompensent généreusement leurs représentants politiques pour services rendus.

  • Luttons pour nos pensions !

    Si nous fêtons le premier mai aujourd’hui encore, c’est parce que cette journée de lutte commémore la force de la classe ouvrière et a entrainé des conquêtes sociales. Il est dans de nombreux cas difficile de le voir avec des fêtes ou des manifestations dociles, mais le Premier Mai est le symbole de la journée internationale de lutte pour les 8 heures. C’est la menace des mouvements révolutionnaires par en bas qui a arraché des réformes par en-haut. La Belgique ne fait pas défaut : c’est la vague de protestations consécutive à la première guerre mondiale qui nous a livré la journée des 8 heures. Cette guerre avait ouvert la voie à la révolution russe, une rupture anticapitaliste à laquelle la révolution allemande a fait écho il y a tout juste un siècle. En Belgique, les rangs des syndicats grossissaient et le suffrage universel masculin fut octroyé, de même que la journée des 8 heures. Il a fallu lutter, mais nous avons gagné !

    Tout cela semble bien lointain. Quand avons-nous encore gagné quelque chose et arraché de nouvelles conquêtes ? La plupart des mouvements ont un caractère défensif, pour préserver d’anciens acquis. Prenons les pensions par exemple. Nous devons nous battre contre la propagande mensongère du patronat et leurs représentants politiques. L’efficacité de ces derniers est reflétée par la concentration accrue des richesses au sommet de la société. Des rapports d’Oxfam, nous savons qu’une poignée d’individus possèdent plus que la moitié la plus pauvre de la population mondiale. Et cette tendance continue. Les revenus des CEO d’entreprises du Bel20 ont augmenté de 20% l’an dernier. Dans ces sphères-là, la norme salariale, ça n’existe pas… Cette récompense accompagnait l’augmentation des bénéfices de ces entreprises de 7 milliards d’euros.

    C’est cette chasse aux profits qui est responsable des attaques contre nos pensions, pas notre espérance de vie. Mais un bon mensonge contient un élément de vérité. Nous vivons plus longtemps, c’est vrai. Et le financement de notre sécurité sociale, et donc de nos pensions, pose problème, c’est tout à fait vrai aussi. Le patronat instrumentalise ces faits pour nous en faire porter la responsabilité : refuser de réformer notre système de pension serait un désastre pour les générations futures. Cette propagande ment par omission. Elle oublie de préciser que notre productivité a augmenté de 14% entre 2000 et 2016 alors que nos salaires n’ont augmenté que de 7%. L’autre moitié a disparu dans les poches du patronat. Le revers de la médaille, c’est le spectaculaire envol du nombre de burnouts, de maladies liées au stress et de personnes qui arrêtent de travailler pour cause de maladie. Voilà qui permet de comprendre pourquoi, en dépit d’une espérance de vie en hausse, nous ne vivons en bonne santé que jusque 64 ans en moyenne. Cela non plus, la propagande patronale ne nous le dit pas.

    Dans ce système capitaliste, c’est la soif de profits qui règne en maître. C’est la raison pour laquelle le financement des pensions pose problème. C’est aussi pour cela que sont ignorées des revendications parfaitement évidentes – une pension minimum de 1.500 euros équivalente à 75% du salaire au lieu des 60% actuels, le retrait des mesures visant à l’allongement de la durée des carrières et des attaques sur la prépension, le maintien des périodes assimilées, l’augmentation des pensions du privé au niveau de celles du public,…

    Tout cela est pourtant nécessaire : avec 882 euros (pour les femmes) et 1.181 euros (pour les hommes) par mois en moyenne, nos aînés sont condamnés à la pauvreté. Disposer d’une pension digne est absolument envisageable, mais pas sans défier les bénéfices des grandes entreprises. Le combat sera ardu. Il nous faut le mener de la manière la plus efficace : en impliquant un maximum de collègues dans l’organisation d’actions crescendo et leur mise en pratique, en construisant de plus forts instruments politiques pour les travailleurs (la politique néolibérale des partis ‘‘partenaires’’ des syndicats affaiblit notre résistance et a plongé la social-démocratie dans une crise historique) en élaborant nos politiques alternatives et en ayant l’objectif de rompre avec ce système.

    La bataille pour une pension digne et un travail soutenable vient seulement de commencer. À l’époque, la journée des 8 heures était tout aussi impossible et impayable, jusqu’au moment où la lutte est devenue mondiale. Adoptons une approche combative couplée à la perspective d’une victoire. La journée d’action nationale du 16 mai ne doit pas être la fin mais le début d’une nouvelle lutte offensive tant sur le terrain social que politique !

  • Pourquoi les fonctionnaires fédéraux font-ils grève le 30 avril ?

    27 février, la CGSP en action.

    • ‘‘Le 30 avril ne sera pas une grève ponctuelle’’ (CGSP).
    • ‘‘D’autres actions suivront en mai’’ (CSC-Services publics).

    Ce lundi 30 avril, les fonctionnaires fédéraux partiront en grève en front commun. C’est remarquable. Il y a tout juste deux mois, le 27 février, la CGSP avait organisé seule une grève des services publics. Cette action était dirigée contre la réforme des pensions. A l’époque, les syndicats chrétiens et libéraux avaient laissé passer l’action pour donner priorité à la consultation. Depuis lors, cependant, le gouvernement fédéral et son ministre N-VA de la Fonction publique, Steven Vandeput, l’ont rendue si fade que tout le personnel sera à l’arrêt et que le front commun a rapidement été rétabli. Pour la CGSP, il ne s’agit pas d’une grève ponctuelle tandis que la CSC-Services publics annonce déjà que d’autres actions suivront en mai.

    Par Eric Byl

    La cause directe de la colère de la CSC est le refus de Vandeput d’accorder un jour de pont pour le 30 avril. Cela semble mineur, et cela sera présenté de la sorte par le gouvernement, mais cela provient d’une “harmonisation” du système de congés. C’est la goutte qui fait déborder le vase. Depuis l’été dernier, le gouvernement fédéral et Vandeput lancent attaque après l’autre sur la fonction publique fédérale. Le rejet de ce jour de pont s’ajoute à la suppression des nominations permanentes et du crédit maladie et à l’introduction du travail temporaire. Ces mesures, et d’autres, visent au ‘‘redesign’’ (à redéfinir) les autorités fédérales’’, qui aurait besoin d’être ‘‘plus légères et plus efficaces’’.

    Cela renvoie à l’image des services publics répandue par la droite depuis des décennies, celle d’un appareil encombrant et inefficace. Dans les années ‘80, Verhofstadt, l’ultra-libéral de l’époque, fulminait au sujet du ‘‘dégraissage’’ de l’Etat. Nous supportons encore les conséquences catastrophiques de ses travaux de démolition, mais l’État n’a pas diminué de taille avec lui non plus. La même chose se produit avec Vandeput. Il ‘‘élaguera pour faire grandir’’ les autorités. Pas moins de 16.600 emplois fédéraux ont été perdus entre l’arrivée au pouvoir du gouvernement et le mois de septembre dernier, mais cela ne conduit pas à l’efficacité tant souhaitée. Les services publics fédéraux peinent au contraire à garder la tête hors de l’eau.

    Pourquoi cela ? La société ne s’est pas arrêtée ces dernières décennies. Des tâches relativement simples sont devenues plus complexes. Pensez aux pensions. Autrefois, les carrières mixtes étaient exceptionnelles et la plupart des travailleurs effectuaient toute une carrière chez un ou tout au plus deux employeurs. Le calcul de leur pension était relativement simple. Les carrières d’aujourd’hui sont un enchevêtrement compliqué de toutes sortes de régimes et le calcul des pensions est un processus qui prend beaucoup de temps devant être mené à son terme par de moins en moins de personnes. Il en va de même pour l’évasion et la fraude fiscale : c’est aujourd’hui une technologie de pointe. Un certain nombre de nouvelles tâches sont aussi apparues pour les autorités publiques. La soif de profits dans l’industrie alimentaire a nécessité la création d’une agence alimentaire qui n’existait pas il y a plus de 20 ans. Il existe aujourd’hui des régulateurs d’énergie, des organismes de lutte contre la cybercriminalité et le terrorisme, des normes environnementales, des cours d’intégration civique, etc.

    Vandeput veut simplifier et réduire l’administration publique pour qu’elle soit plus efficace, mais il refuse d’entendre que les tâches deviennent de plus en plus complexes et exigent de nouveaux besoins et de nouvelles spécialités. Il prétend vouloir moderniser, mais il veut en fait revenir au maigre appareil d’État pré-industrialisation, sans parler de l’ère cybernétique. Bien sûr, certaines tâches peuvent être standardisées par l’informatisation, mais lorsqu’il s’agit de faire appliquer les règles, il faut beaucoup plus de fonctionnaires sur le terrain et beaucoup plus d’investissements pour suivre le rythme des petits malins du secteur privé.

    Vandeput attaque tous les fonctionnaires, mais surtout les plus fragiles. Il veut par exemple remplacer le crédit maladie pour les fonctionnaires fédéraux par un salaire annuel garanti de 30 jours. Après ces 30 jours, les fonctionnaires auront droit à 60 % de leur salaire, que l’on soit victime d’un cancer, d’un problème cardiaque, d’un accident majeur, d’un burn-out. Vandeput rendre le régime des fonctionnaires encore plus désavantageux que celui des travailleurs contractuels ou des employés du secteur privé. En cas de rechute, ils auraient à nouveau droit à un salaire garanti, alors qu’un fonctionnaire statutaire n’aurait plus de jours de maladie.

    Si cela ne dépendait que du gouvernement fédéral, seuls les fonctionnaires exerçant des fonctions dites d’autorité seraient désormais nommés. On est loin de la sécurité d’emploi, qui est néanmoins le plus grand atout pour travailler pour le gouvernement fédéral. Dans l’administration fédérale, il existe principalement des fonctions spécialisées qui nécessitent un certain niveau de connaissances, d’expérience et de compétences. Si le statut disparaît, il sera encore plus facile pour le secteur privé de les recruter. Le gouvernement aura-t-il recours à des travailleurs intérimaires inexpérimentés ? Vont-ils traiter notre déclaration d’impôt ? Vont-ils vérifier la sécurité de nos aliments sans aucune connaissance ? En outre, les travailleurs intérimaires coûtent deux fois plus cher que les fonctionnaires ordinaires.

    Le ministre Vandeput se défend en soulignant que les possibilités de promotion seront plus nombreuses pour tout le monde. Qu’il simplifie, modernise et veut éliminer les inégalités du passé. ‘‘Les syndicats s’y opposent-ils ?’’, demande-t-il de façon démagogique. Les syndicats soulignent que les possibilités de promotion ne protègent pas contre les licenciements lorsque le service est transféré aux régions et aux communautés dans le cadre d’une réforme de l’État. De plus, disent-ils, Vandeput dirige la fonction publique fédérale comme s’il s’agissait d’une petite PME : le niveau d’éducation et les qualifications ne sont plus importantes, la sécurité de l’emploi n’est plus une nécessité et les pénuries de personnel sont comblées par des travailleurs intérimaires. Cela peut peut-être fonctionner dans une PME, mais pas dans des services fédéraux qui exigent neutralité, objectivité et continuité ! Les propositions du ministre Vandeput mèneront à encore plus d’arbitraire et de népotisme.

    L’âge de la pension a été porté à 67 ans. Beaucoup de gens ont du mal à rester au travail jusqu’à cet âge. Mais le ministre ne facilite pas les choses en abolissant le crédit maladie et en révisant le régime de congé. Travailler plus longtemps et, en même temps, réduire les possibilités de connaitre un travail faisable, c’est intenable. Il n’y a rien de plus spécifique au fonctionnaire que son statut. Il bénéficie d’une protection juridique spéciale parce que son employeur peut changer d’affiliation politique. Cette protection est garantie par le statut. Il ne s’agit pas d’un contrat de travail normal dans lequel les deux parties doivent s’entendre sur les conditions. Un fonctionnaire est nommé unilatéralement par le gouvernement et n’a aucun droit de regard sur sa rémunération ou ses conditions d’emploi. Il n’a le droit d’exiger que le respect des règles prévues par le statut. Si le statut cesse d’exister, la garantie de traitement neutre sera également nulle et non avenue. Sans nomination permanente, les fonctionnaires deviennent totalement dépendants d’un gouvernement politique.

    Il y a plus de raisons qu’il n’en faut pour entamer la lutte collective, y compris avec des grèves. Malheureusement, les dirigeants syndicaux pensent trop que tout le monde est pleinement conscient de l’impact des mesures et leurs efforts pour clarifier cela sont insuffisants. La grève peut être un succès le 30 avril, mais elle n’est guère, voire pas du tout, liée à des assemblées du personnel sur les lieux de travail et à des tentatives d’impliquer autant de fonctionnaires que possible dans les piquets de grève et les autres actions. Le danger d’une telle stratégie est que l’enjeu n’est plus ressenti comme un conflit entre le personnel et le gouvernement, mais comme un conflit entre les syndicats et le gouvernement, avec le personnel comme spectateurs. Espérons que les militants saisiront l’occasion de la grève du 30 avril pour y remédier.

  • La droite ne pliera que si elle a peur Mais: “Tout objectif sans plan n’est qu’un souhait.’’ (Antoine de Saint-Exupéry)

    Manifestation en défense de nos pensions, décembre 2017. Photo : Mario

    Dans son interview accordée au quotidien flamand De Standaard le 3 mars dernier, Paul Magnette n’avait pas tort sur un point au moins : ‘‘La droite ne pliera que si elle a peur’’. En dépit des tensions internes, d’une popularité en berne et l’amateurisme crasse de ses ministres, le gouvernement Michel n’a pas très peur en ce moment. La raison en incombe à l’absence de toute opposition suffisamment conséquente. Ce n’est pourtant pas le potentiel qui manque.

    Edito de l’édition d’avril de Lutte Socialiste, par Nicolas Croes

    Un gouvernement en posture de faiblesse

    Les réductions salariales (avec le saut d’index mais aussi toutes les taxes supplémentaires sur l’énergie, le sucre, le tabac, etc.), les attaques contre les pensions et la criminalisation des membres les plus faibles de la société n’y font rien : le gouvernement n’atteint pas ses propres objectifs. L’excédent budgétaire se fait attendre et il n’y a pas de réduction fondamentale de la dette publique. Ce que le gouvernement prend dans les poches de la collectivité a depuis longtemps été dépensé en cadeaux fiscaux et autres pour les ultra-riches.

    Le gouvernement aime attribuer la relative relance économique actuelle à l’impact de sa politique. Cette dernière assure par ailleurs que nous n’en ressentons pas les effets. Selon une étude de l’Institut européen des syndicats (ETUI), en 2017, le salaire réel en Belgique était 1,1% plus bas qu’en 2010. La productivité a par contre augmenté de 6,6 % au cours de la même période. Ceux qui travaillent voient leur situation empirer tandis que de plus en plus de gens sont laissés pour compte : 21,5% de la population affirme avoir du mal à joindre les deux bouts selon l’institut belge de statistiques.

    Cette politique dégrade la popularité du gouvernement. Selon le sondage VTM / Het Laatste Nieuws du 9 mars, le gouvernement parvient à obtenir 72 des 150 sièges du Parlement. Avec les quatre sièges du CDH, une majorité est encore possible, mais fort étroite. Qu’en sera-t-il lors des élections de mai 2019 ? C’est très incertain.

    Outre les conséquences de la politique d’austérité, la position du gouvernement est minée par ses propres agitations. La dernière en date est la dissimulation de mensonges dans le cadre de l’achat de nouveaux avions de chasse F35. Le ministre de la Défense Steven Vandeput (N-VA) affirme qu’il ne savait rien, ce qui signifie au minimum qu’il n’a pas de contrôle sur son propre sommet militaire. Quoi qu’il en soit, il est peu évident d’expliquer pourquoi des milliards sont dépensés pour de nouveaux avions de combat alors que les anciens n’ont pas besoin d’être remplacés. Et que les moyens manquent pour nos pensions, l’infrastructure ou les services publics. Lorsqu’elle était encore sur les bancs de l’opposition, la N-VA parlait de l’achat de F35 comme d’un ‘‘suicide fiscal’’, ‘‘certainement en période d’économies’’. (Communiqué de presse du 19 octobre 2011). Mais ça, c’était avant.

    Les querelles incessantes entre partenaires de la coalition, particulièrement du côté flamand, complètent le tableau.

    Comment faire peur à ce gouvernement affaibli ?

    Dans son interview au De Standaard, Paul Magnette a développé ce qui a jadis effrayé la droite. ‘‘Lorsque qu’ils craignaient l’éclatement d’une révolution communiste après la Première Guerre mondiale, ils ont introduit le suffrage universel et la journée des huit heures. La menace d’un mouvement de masse et le renforcement de la position de l’Union soviétique après la Seconde Guerre mondiale ont conduit à la mise en place du système de sécurité sociale’’. Magnette reconnaît ainsi ce que nous avons écrit dans notre édition de février : ‘‘Ce gouvernement ne cèdera que si son existence est menacée’’. Mais dans les deux périodes citées, les prédécesseurs de Magnette à la tête du parti ont tout fait pour arrêter une potentielle révolution par en bas avec des réformes par en haut.

    Si ce gouvernement tient encore bon, c’est que l’opposition n’utilise pas, ou à peine, ses faiblesses. Elle les partage d’ailleurs. De quelle crédibilité dispose encore le PS lorsqu’il crie au scandale alors que ses propres dignitaires se sont enrichis en allant jusqu’à se servir dans les fonds destinés aux sans-abri à Bruxelles? Comment ce parti peut-il s’opposer sérieusement à l’achat des F35 alors que c’est sous le gouvernement Di Rupo, avec le ministre De Crem, que la voie a été ouverte pour cette dépense de milliards d’euros ? Vous-même ne manquez très certainement pas d’exemples de la sorte.

    Nous sommes nombreux à vouloir mettre fin à l’austérité. Pour que cet objectif soit atteint, il nous faut un plan. De cette manière, il nous serait possible de mobiliser la colère générale qui s’exprime non seulement dans les sondages, mais aussi dans toute action syndicale, même appelée au dernier moment et sans perspective claire. Un potentiel ne dure pas éternellement. La dynamique créée par les manifestations et grèves de l’automne 2014 a été laissée en plan. Bien des militants, dégoutés, ont ensuite jeté l’éponge. L’opinion publique elle aussi a tourné. Mais des actions bien préparées – construites avec des assemblées du personnel et reposant sur des objectifs clairs et adaptés aux situations concrètes de chaque secteur – feraient toute la différence. Il semble hélas que les dirigeants syndicaux ne soient pas prêts à aller au-delà d’une vaste campagne d’information sur les pensions et veuillent se concentrer sur les élections plutôt que sur les actions.

    Pareil attentisme est dangereux. Faute d’être organisée, la colère peut se transformer en fatalisme voire même en cynisme. Dans un tel contexte, les préjugés racistes et les provocations les plus diverses peuvent prendre racine. La N-VA ne se retiendra pas. Dans un tel cas de figure, l’arrivée d’un deuxième gouvernement Michel n’est pas à exclure.

    L’enjeu des élections d’octobre

    Avant les législatives, il reste encore les communales et les provinciales. Du côté néerlandophone, elles offriront la possibilité d’élire des membres du PTB à divers conseils communaux. Du côté francophone, la possibilité de coalitions progressistes PS / Ecolo / PTB suscite un certain enthousiasme. La perspective de telles coalitions est également défendue à la FGTB. L’occasion est à saisir pour défendre un programme combatif au cours d’actions et de campagnes. Le PTB devrait utiliser cet enthousiasme pour s’engager dans l’offensive et exercer une pression maximale sur le PS pour le forcer à regarder à sa gauche et non vers le MR.

    Ce soutien croissant pose de grands défis au PTB. Participer à la gestion d’une commune sans faire de différence conduira à une punition rapide et sévère. C’est ce que nous avons vu avec l’arrivée de Syriza au pouvoir en Grèce, mais aussi avec le SP hollandais aux élections locales du 21 mars dernier. Il n’y a pas de choix, il faut construire un rapport de force dans la perspective d’entrer en confrontation ouverte avec le capitalisme. Cela nécessite une mobilisation conséquente organisée autour d’un programme combatif mais aussi de politiquement préparer les couches plus larges de la population avec des débats ouverts et démocratiques. Il faudra parler de propositions et mesures concrètes, mais aussi de la manière de résister à la riposte de l’establishment capitaliste qui fera tout pour étouffer dans l’œuf chaque alternative anti-austérité. Il n’y aura qu’une direction à prendre: celle du socialisme démocratique. Les marges pour mener une autre politique sont absentes dans la société capitaliste.

  • Pour une pension minimum de 1500 euros !

    Coût d’une pension décente : 7 milliards
    Hausse des bénéfices des grandes entreprises : 7 milliards

    Plusieurs records ont été battus au cours de ces derniers mois. On n’a jamais vu autant de cas de dumping social. Les profits des grandes entreprises ont bondi. Selon une étude de l’Institut de Coopération Syndicale Internationale, le revenu réel moyen des travailleurs a reculé de 1,1% depuis 2010. En même temps, les dividendes des actionnaires explosent. Tous ces faits sont bien entendu liés : ce système roule pour une petite minorité très riche, aux dépens de la majorité de la population.

    Le gouvernement Michel ne va pas s’arrêter en si bon chemin. Les pensions sont dans la ligne de mire. Après le recul de l’âge de la pension, voilà le système des pensions à points, la révision de l’aménagement pour les métiers pénibles, la démolition des pensions des services publics. Il est pourtant évident que le montant moyen des pensions est insuffisant. Une pension moyenne s’élève aujourd’hui à 1.181 euros pour un homme et 882 euros pour une femme ! C’est beaucoup moins que le coût moyen d’un séjour dans une maison de repos (1.562 euros). En moyenne, nous vivons en bonne santé jusque l’âge de 64 ans. Mais le gouvernement veut nous faire travailler jusque 67 ans. L’objectif n’est pas d’améliorer nos vieux jours en nous faisant travailler plus longtemps mais d’aboutir à un résultat où très peu de travailleurs auront encore une carrière (et une pension) complète !

    L’allongement de l’espérance de vie n’est pas un problème. La productivité et le volume des richesses produites sont tels que le paiement de toutes les pensions est possible. L’allongement de la durée de vie n’est qu’un rideau de fumée pour augmenter les profits. Les caisses de la sécurité sociale sont périodiquement ponctionnées par les baisses de cotisation patronales (les prétendues ‘‘charges sociales’’). La prochaine baisse de 8% de l’impôt des sociétés (de 33% à 25%) tarira bientôt les caisses de l’État. Il est grand temps d’arrêter ce hold-up!

    Les organisations syndicales viennent de lancer une campagne d’information sur l’enjeu des pensions en éditant un journal à 1 million d’exemplaires. On peut y lire que garantir une pension minimale de 1.500 euros à chaque salarié coûterait 1,6 milliards d’euros et une pension à 75% du salaire moyen coûterait 4,9 milliards d’euros. Soit un total de 6,5 milliards d’euros. Cela représente beaucoup d’argent ! Mais c’est aussi autant que la hausse des bénéfices des 18 sociétés cotées au Bel 20 (à la Bourse de Bruxelles) et qui viennent de publier leurs résultats de l’année 2017. Il y a donc assez d’argent pour garantir des vieux jours dignes à chacun et à chacune. C’est une question de volonté politique.
    Nous n’atteindrons pas cet objectif en nous bornant à quémander une aumône auprès du gouvernement. Car celui-ci est fermement résolu à défendre bec et ongles les intérêts des privilégiés.

    La campagne d’information syndicale n’a de sens que si elle débouche sur une série d’actions allant crescendo vers un mouvement général capable de faire plier ce gouvernement des patrons. Le PSL, ses militants et ses sympathisants mettront toute leur énergie pour faire aboutir une telle perspective.

  • Ne les laissons pas nous diviser ! Il nous faut l’unité et une autre société !

    “Stop au racisme ! Stop au sexisme ! Ne nous laissons pas diviser ! “

    ‘‘La gauche doit choisir entre des frontières ouvertes et l’Etat providence’’ : la carte blanche de De Wever de fin janvier relève d’un vieil adage : ‘‘diviser pour mieux régner’’. Constatant que la politique migratoire gouvernementale est taxée d’inhumaine ou d’amorale notamment par les partis de l’opposition et les milliers de manifestants solidaires des migrants, De Wever répliquait en expliquant que sa morale et sa politique consistent à garantir le financement des protections sociales en Belgique. Qui peut croire cela ?

    Par Nicolas M, responsable jeunes du PSL 

    Le dossier est brûlant, il agite les négociations entre syndicats et patronat/gouvernement : les pensions sont le grill, la droite continue sciemment sa politique d’attaques frontales contre nos conditions de vie et de travail. En parallèle, les opposants à la politique migratoire brutale du gouvernement Michel s’agglutinent par milliers à chaque nouvelle rafle. Ce que parvient à faire la droite c’est de lier les différentes parties de sa politique. Servir l’intérêt de la majorité est trop coûteux, il faut sabrer dans les dépenses publiques et transférer l’argent vers les riches et les grandes entreprises. Depuis 2014, il n’y a plus de tabou, le gouvernement roule sur tous les dossiers, bien aidé par la faiblesse de son opposition. Nous écrivions le mois passé que celui-ci ne fera de concession que s’il se sent menacé. Cette réflexion est cruciale pour tous ceux qui veulent s’opposer à lui.

    Pour De Wever, il nous faut choisir. Oui, c’est vrai, mais pas entre les options qu’il propose. Si l’argent manque pour accorder une pension décente à chaque travailleur, pour embaucher massivement dans les soins de santé et assurer un accueil digne à nos aînés et aux patients, etc. c’est parce que les richesses disponibles sont accaparées par le privé. 220 milliards d’euros évadés vers les paradis fiscaux – un manque à gagner de quelques 28 milliards en fraude fiscales (6 à 7% du PIB !) – c’est quand même autre chose que les vagues de migrants qui fuient la misère et la violence et vivent dans une précarité insoutenable ! Par contre, il est vrai que nous ne pourrons pas renverser l’actuelle politique d’accueil sans mobiliser les moyens nécessaires à son financement.

    Le choix qui nous fait face est soit de continuer à subir les manœuvres de la classe dominante et de ses représentants politiques, soit de rassembler et d’unifier les exploités pour organiser leur lutte commune en faveur d’une alternative politique qui mettra un terme aux pénuries, aux attaques antisociales et aux discriminations. De Wever fait tout pour repousser le cauchemar de son camp : un soulèvement généralisé contre tous les aspects de la politique capitaliste. Un tel mouvement ne tombera pas du ciel. Il exige de la préparation. Diverses opportunités d’avancer dans cette direction nous font face.

    Sans lier le combat pour un accueil décent des migrants à celui contre la précarité grandissante en Belgique (21,5% de la population affirme difficilement pouvoir joindre les deux bouts !), nous laissons le champ libre aux idéologues de la classe dominante pour qu’ils nous mettent dos à dos, neutralisent nos revendications et nous taxent d’inconscients. Battons-nous pour un plan massif d’investissements publics pour des logements sociaux, un refinancement de l’enseignement et des emplois décents pour chacun, sans distinction d’origine, de lieu de naissance ou de religion.

    Les extrêmes inégalités, la surexploitation et les pénuries puisent leurs racines dans le système capitaliste. De la propriété privée des moyens de production et d’échange découle le manque de financement des services publics, ainsi que le pillage à l’œuvre dans les pays d’origine des migrants, source de tensions économiques et de guerres. C’est tout un modèle économique qui demande à être renversé.

    De notre unité et de nos revendications doit découler un débat sur le type de société dont nous – la grande majorité, travailleurs pressés comme des citrons, pensionnés pauvres, travailleurs migrants, travailleurs persécutés – avons besoin. La nationalisation des secteurs clés de l’économie, y compris l’entièreté du secteur financier, mis sous contrôle des travailleurs et de leur famille, permettrait d’orienter les immenses richesses disponibles vers la satisfaction des besoins de la population et non vers la soif de profits d’une infime minorité. Unifions nos luttes et défendons les mesures socialistes démocratiques qui s’imposent.

  • Journée de grève dans le secteur public en défense de nos pensions

    Dans les médias dominants, c’est à peine s’il a été question de la grève de la CGSP pour autre chose que les “perturbations” entrainée, à grands renforts de témoignages d’usagers dépités. Il fallait être attentif pour entendre sérieusement parler des raisons qui avaient poussé à l’action. Pourtant, la colère gronde, profonde et largement ressentie.

    Le gouvernement de droite continue de s’en prendre à tout et à tout le monde, même s’il s’agit de travailleurs ordinaires. Les pensions du secteur public font l’objet de critiques, notamment en ce qui concerne la réglementation des métiers lourds. L’objectif du gouvernement est de faire en sorte que tout le monde travaille plus longtemps. Après l’augmentation collective de l’âge de la retraite à 67 ans, des méthodes sont maintenant recherchées pour augmenter la pression individuelle afin que chacun puisse travailler effectivement jusqu’à 67 ans. Après cela, l’âge de la retraite sera à nouveau remis en question.

    Nous avons publié un article sur les mesures spécifiquement contestées par la CGSP et sur la préparation de la journée de grève d’hier. Voir:“Pensions. Le démantèlement des métiers lourds dans les services publics : prélude à celui du privé”.

    La journée d’action a débuté le lundi soir avec des piquets de grève dans diverses gares. Les piquets étaient notamment impressionnants à Anvers, Gand et Bruxelles. Du côté néerlandophone, l’accent avait été mis le mardi sur un rassemblement militant à Bruges où environ 2000 personnes étaient présentes. Les piquets de grève étaient nombreux à Bruxelles, dont une bien fourni à l’hôpital Brugmann. Les grévistes y ont exprimé leur soutien pour les deux personnes sans-papiers encore arrêtées après l’intervention policière dans un centre culturel bruxellois il y a peu. Du côté francophone, les piquets et concentrations militantes étaient également nombreux. A Tournai, un rassemblement militant a réuni 2000 personnes. A Liège, il y a également eu un cortège de la CSC à partir de l’hôptial de la Citadelle jusqu’au Carrefour Belle Ile menacé de fermeture.

    Gare de Gand Saint Pierre

     

    Gare d’Anvers Berchem. Photo: Liesbeth

     

    Gare d’Anvers Berchem. Photo: Liesbeth

     

    SNCB Bruxelles. Photos : PPICS

     

    SNCB Bruxelles. Photo: PPICS

     

    Piquet CGSP Amio Bruxelles. Photo : PPICS

    Rassemblement de Tournai. Photo : Stéphane

    Quelques photos de la concentration militante à Brugge, par Laurent. ACOD militantenconcentratie in Brugge // Laurent

    Quelques photos de la concentration militante de Brugge, par Els.
    ACOD militantenconcentratie Brugge // Els

    Hôpital Brugmann :
    Grève CGSP: Brugmann // Nico

     

  • Pensions. Le démantèlement des métiers lourds dans les services publics : prélude à celui du privé

    Le syndicat socialiste des services publics, la CGSP, a déposé un préavis de grève intersectorielle pour le 27 février. Ce qui a motivé cette grève, c’est le projet de loi sur les métiers lourds pour les membres du personnel statutaire dans les services publics. “Après l’augmentation de l’âge de la pension pour tous les travailleurs du pays, après le dossier de la pension mixte, après la suppression de la pension pour inaptitude physique et après la pension à points, le gouvernement attaque à nouveau les membres de son personnel’’, selon la CGSP.

    Par Eric Byl

    Comme on pouvait s’y attendre, cela ne convient pas au ministre fédéral des pensions, Daniel Bacquelaine (MR). Il argumente que le préavis de grève est prématuré puisque son nouvel avant-projet n’est pas encore – au moment où nous écrivons cet article – passé au conseil des ministres. De plus, selon Bacquelaine, après approbation en première lecture, une concertation avec les partenaires sociaux est prévue. La CSC et le SLFP semblent s’en satisfaire provisoirement, mais la CGSP n’est pas rassurée. Le gouvernement veut, en effet, déjà une réglementation définitive pour début mars. Il n’est pas sûr qu’ils pourront respecter ce timing, mais nous savons d’expérience qu’avec ce gouvernement, la ‘‘concertation’’ ne signifie rien de plus que des aménagements à la marge.

    Les grandes lignes du projet sont d’ailleurs déjà fixées. Selon la réglementation actuelle, le fonctionnaire construit chaque année un 60ème (tantième) de sa pension. Après 45 ans, cela donne droit à une pension complète correspondant à 75 % (45/60) du salaire médian des 10 dernières années de carrière (auparavant, il s’agissait des 5 dernières années mais, sous Di Rupo, cela a été ‘‘assaini’’). Le système tient compte de métiers spécifiques pour des raisons de sécurité ou de charge physique ou psychique auxquels un ‘‘tantième préférentiel’’ est appliqué. Dans ce cas, la pension n’est pas calculée en 60èmes mais, comme pour le personnel roulant de la SNCB, en 48èmes, pour les facteurs, les pompiers et le cadre opérationnel de la police et l’armée, en 50èmes et pour les professeurs, en 55èmes. Ils atteignent leur pension complète dès qu’ils atteignent le nombre d’années correspondant à 75 % de leur tantième (préférentiel). Pour un conducteur de train, cela correspond à 36 ans (36/48), pour un facteur à 38 ans (38/50), pour un professeur à 42 ans (42/55).

    Dans le projet du gouvernement, ces tantièmes préférentiels disparaissent et font place à quatre ‘‘critères de pénibilité’’ sur base de la charge physique, de l’organisation de travail spécifique, des risques liés à la sécurité et de facteurs mentaux ou émotionnels. En fonction qu’un, deux ou trois de ces critères sont applicables, le nombre d’années de carrière sera multiplié par 1,05, 1,10 ou 1,15, mais partir avant son 60ème anniversaire devient impossible quoi qu’il en soit. Le Soir a calculé la différence entre une carrière complète dans l’ancien système par rapport au nouveau.

    Un enseignant à la pension perd, dans ce cas, 8,31%, un militaire 10,99% et un facteur 11,14%. Cela confirme la position des syndicats selon laquelle ceux qui tombent aujourd’hui sous les tantièmes préférentiels voient, à carrière identique, diminuer leurs droits en matière de pension. De plus, des périodes de maladie, de maternité, d’accidents de travail ou de congés pour soins ne sont plus prises en compte pour une pension anticipée en cas de métiers lourds. Beaucoup de femmes surtout, mais pas uniquement, sont impactées.

    Pour compenser la perte de pension, les travailleurs recevront désormais un ‘‘bonus métiers lourds’’ qui pourrait rapporter jusqu’à 200€ brut par mois s’ils continuent à travailler jusqu’à l’âge théorique de la pension. Pour beaucoup de travailleurs, cette ‘‘option volontaire’’ deviendra vite un impératif économique insupportable. De plus, de nombreuses professions actuellement qualifiées de ‘‘lourdes’’ ne le seront plus à l’avenir. Au Comité national des pensions, le bras de fer pour déterminer les critères de pénibilité s’est déjà soldé par un blocage. Les syndicats se basent sur la loi sur le bien-être, mais les employeurs estiment cela trop large et veulent un examen physique individuel.

    Le seul critère collectif qu’ils veulent bien reconnaître serait le travail de nuit. En bref, ici encore, comme nous l’indiquions dans Lutte Socialiste le mois dernier, les employeurs veulent transformer un droit collectif en approche individuelle. Ils veulent casser notre force collective parce qu’il est plus facile de mettre sous pression des individus. Ce qui inquiète également la CGSP, c’est que les nombreux contractuels présents dans le public risquent d’être exclus.

    Mieux organiser la lutte

    Personne ne doute du fait que ces mesures sur les pensions soient une étape de plus dans le démantèlement des conquêtes sociales et qu’elles doivent être stoppées. Mais la question est la suivante : comment ?

    A l’instar de la grève de la CGSP du 10 octobre dernier, beaucoup de travailleurs, y compris des affiliés et militants CGSP, ont dû prendre connaissance de la grève du 27 février via ces médias qui noircissent constamment nos actions. Comme pour le 10 octobre, l’appel du 27 février a été tel un coup de tonnerre dans un ciel dégagé. Personne n’a été consulté au préalable et on n’a demandé à personne de prendre le pouls de ses collègues. Il n’y a pas eu de concentration préalable de militants, pas de réunion intersectorielle, ne parlons pas d’assemblée du personnel, pour préparer la base. On dirait que le secrétariat de la CGSP part du principe que nous suivons en détail les propositions mises sur table et que nous pouvons, comme des spécialistes accomplis, protéger nos collègues, en un tour de main, de tous les faux arguments que le gouvernement et les médias nous font avaler.

    Il n’y a, à nouveau, pas de front commun.Nous comprenons que nous ne pouvons pas attendre indéfiniment la CSC et le SLFP et nous n’entretenons aucune illusion sur la combativité de beaucoup de leurs dirigeants. Mais, au secrétariat de la CGSP, on sait quand même qu’un front commun syndical se construit de la base. Une campagne d’information liée à des consultations sur le terrain, éventuellement combinées à des arrêts de travail nous aurait permis d’exercer une pression sur les autres syndicats via nos collègues ou tout du moins, d’ouvrir un débat. Il est, dès à présent, très facile de présenter la grève de la CGSP comme une fuite en avant. Lors des assemblées de militants qui ont suivi l’annonce de la grève, les critiques ont fusé par rapport à ce manque de préparation des actions.

    Le plus grand risque est que la grève échoue et que la force de frappe difficilement construite, tant par notre syndicat que par les délégués sur le terrain, soit minée. Nous avons tout juste évité que la grève du 10 octobre 2017 ne soit utilisée par le gouvernement pour attaquer les syndicats de manière frontale mais nous ne pouvons pas nous permettre d’aligner les grèves mal préparées les unes après les autres. Le secrétariat de la CGSP avoue lui-même ne pas croire que le jour de grève du 27/02 sera suffisant pour faire changer le gouvernement d’avis et encore moins pour le faire tomber. De plus, pour l’instant, la volonté de faire une grève générale souffre encore du résultat décevant de 2014, même dans les services publics. Il faut y travailler : les gens doivent être convaincus de la nécessité d’une grève et de son utilité. Il doit donc y avoir une perspective de victoire.

    Les germes de cette perspective sont pourtant à portée de mains. Dans plusieurs entreprises et secteurs, il y a bel et bien une volonté de faire grève, cela s’est démontré dans les prisons, chez De Lijn et à la STIB. Mi-mars, l’enseignement flamand devrait mener action en front commun. La direction de la CGSP et celle des autres syndicats feraient mieux de s’associer aux actions existantes, de les élargir au lieu de, à un moment donné, tout freiner et tout isoler et, à un autre, annoncer une grande grève intersectorielle. De plus, chacun est conscient du fait que ces réformes dans les services publics représentent un test pour la discussion sur les métiers lourds dans le privé. Il serait par conséquent logique que les syndicats des services publics coordonnent leurs actions avec celles du secteur privé.

    Pourquoi ne pas organiser des concentrations de militants en préparation d’arrêts de travail et d’assemblées du personnel sur tous les lieux de travail ? Pourquoi pas une grande conférence syndicale sur les pensions ? Pourquoi pas des actions coordonnées avec des témoignages de solidarité, des arrêts de travail, des grèves tournantes pour préparer les esprits ? Pourquoi ne pas choisir de construire progressivement un rapport de forces au lieu de gaspiller toutes nos munitions en une fois ? Les militants du PSL actifs à la CGSP feront en tout cas de leur mieux pour faire de cette grève un succès et éviter une défaite mais nous insistons auprès du secrétariat de la CGSP pour qu’il se concerte, désormais, avec la base pour développer la meilleure stratégie possible qui construise une perspective de victoire.

  • Défendre nos pensions par une résistance offensive !

    Le gouvernement Michel ne se retient pas. Après avoir augmenté l’âge de la pension à 67 ans, il cherche maintenant à imposer une pression supplémentaire pour nous faire travailler plus longtemps. C’est l’idée derrière le régime de pension à points, mais peut-être également avec le régime à venir pour les métiers lourds ainsi qu’en entamant immédiatement la discussion sur les retraites du secteur public. Si nous ne voulons pas travailler jusqu’à la tombe, littéralement, il faut bloquer la politique actuelle !

    Par Geert Cool

    Individualisation des droits collectifs

    La pension est un droit collectif garanti par le mouvement des travailleurs. C’est nous-mêmes qui la payons avec nos cotisations à la sécurité sociale. Les ‘‘cotisations patronales’’ font d’ailleurs également partie de notre salaire. Lorsque, ces dernières années, le gouvernement a réduit les cotisations à la sécurité sociale pour donner plus de cadeaux fiscaux aux employeurs, une partie de notre salaire a dans les faits été versée aux patrons. Et après ça il vient nous dire que les moyens manquent dans le système de sécurité sociale et que c’est encore une fois à nous de payer !

    Après une attaque contre les droits à la pension de la collectivité, avec l’augmentation de l’âge de la retraite à 67 ans et la réduction des possibilités de retraite anticipée, le gouvernement prend maintenant une autre direction. Avec l’individualisation du droit collectif à la pension, chaque travailleur est poussé à travailler plus longtemps. C’est ce que montrent tant la pension à points que l’approche individuelle de la discussion sur les professions lourdes.

    La pension à points signifie que chaque travailleur reçoit des points tout au long de sa carrière. À la fin du voyage, le gouvernement détermine combien valent ces points en fonction notamment des possibilités financières du moment. Cela pose problème pour plusieurs raisons. Le caractère incertain du montant de la pension que nous recevrons ouvre la voie à une pression accrue en fin de carrière pour encore bosser un an ou deux et parvenir à une pension un minimum digne. Cela ouvre parallèlement la porte à la démolition des pensions par catégorie professionnelles spécifiques. Et combien de points obtiendront une personne en congé de maladie ou un chômeur ? Qu’est-ce qui permettra d’obtenir des points dans dix ans ?

    Aucune décision n’a encore été prise concernant les métiers lourds. Mais si c’est aux employeurs de décider, la reconnaissance d’une profession lourde se fera au cas par cas. En intégrant les professions lourdes dans le régime des pensions à points (une année de travail dans un emploi lourd se traduirait par plus de points), il serait possible d’augmenter la diversification des régimes (un nombre différent de points par année de travail).

    Cela ouvre la porte à une approche plus individuelle. Si toutes ces mesures sont adoptées, l’âge légal de la pension pourra alors être mis de côté. Sous prétexte que certaines personnes ‘‘veulent’’ travailler plus longtemps que 67 ans, cette frontière peut disparaître. Les autorités taisent qu’en fait, beaucoup ‘‘voudront’’ travailler plus longtemps tout simplement pour péniblement parvenir à un montant de pension décent.

    Ce sont les femmes qui seront le plus durement touchées. Selon Eneo (mouvement social d’aînés), quatre retraités sur dix vivent en dessous du seuil de pauvreté en Belgique. Les pensions des femmes sont en moyenne inférieures de 26% à celles des hommes. Avec des mesures telles que la limitation des périodes assimilées, cet écart se creusera encore. De plus, le manque d’investissement dans le secteur des soins et dans les services publics entraine le fait qu’une plus grande part du fardeau des soins incombe à la famille, aux femmes la plupart du temps.

    Pour une pension mensuelle minimale de 1.500 euros

    L’espérance de vie augmente, mais nous ne sommes en bonne santé que jusqu’à 64 ans en moyenne, soit en-dessous de l’âge de la retraite. Nous vivons plus longtemps, mais nous travaillons aussi de manière plus productive. Notre productivité a augmenté de 15 % entre 1995 et 2009, alors que la productivité augmentait encore plus rapidement les années précédentes. En 2009, nous avons donc produit autant en 34 ans de carrière qu’en 1995 en 40 ans. Et le gouvernement de droite veut nous faire travailler plus longtemps ? L’inconvénient de cette productivité considérable, c’est que de plus en plus de gens ne tiennent plus le coup. Cela se voit au nombre de dépressions et de burn-out. L’augmentation de l’âge de la pension et la suppression progressive de la retraite anticipée doivent être abolis.

    Le gouvernement proclame que le système de points est nécessaire pour offrir une pension décente à tout le monde. Si ce gouvernement se souciait effectivement de la qualité de vie des personnes âgées, il investirait massivement dans les soins pour les personnes âgées. Aujourd’hui, un séjour dans une maison de repos en Flandre coûte en moyenne 1.655 euros par mois alors que la pension légale moyenne s’élève à 1.100 euros par mois. Pas besoin d’être un génie des mathématiques pour remarquer le problème. Faute d’investissements publics, des entreprises privées ont la possibilité de réaliser de juteux bénéfices sur le dos du personnel et des personnes âgées. Il ne faut pas s’attendre à de la compassion avec ce gouvernement, même vis-à-vis de nos aînés.

    Pour vivre dignement, le montant de la pension doit au moins être de 1.500 euros par mois. Et cette revendication est encore modeste en considérant le coût des maisons de repos. Quand le gouvernement dit que les caisses sont vides pour y faire face, il ferme volontairement les yeux sur les richesses et les profits qui s’accumulent dans les poches d’une infime élite. Les Paradise Papers ont encore remis en lumière que 7.900 milliards d’euros seraient planqués dans les paradis fiscaux. Pour peu qu’on aille chercher l’argent là où il est, les moyens ne manquent pas.

    Pour une résistance offensive !

    De toute évidence, le gouvernement ne va pas céder. Après le succès de la manifestation pour nos pensions du 19 décembre – 40.000 personnes, à nouveau plus que prévu – le Premier ministre Charles Michel a accusé les syndicats d’être des menteurs et les manifestants des idiots. Selon lui, nous n’avons rien compris et le gouvernement doit tout nous expliquer encore une fois. Michel et le ministre des pensions Bacquelaine (MR) ont parlé de «désinformation», de «mensonges» et de «fakes news». De par cette attitude, le gouvernement montre immédiatement qu’il est illusoire de penser que les dirigeants syndicaux obtiendront quoi que ce soit de sérieux par la négociation.

    Pour arracher quelque chose, il faut construire une relation de force qui menace la survie du gouvernement. La manifestation du 19 décembre a donné un aperçu du potentiel qui et le nôtre. Les dizaines de milliers de manifestants avaient le soutien de centaines de milliers de personnes inquiètes pour leur pension.

    Le jour où le site web mypension.be a été lancé, pas moins de 160.000 personnes s’y sont connectées. On retrouve cette inquiétude dans tout le pays. Le défi est d’y répondre avec une campagne d’information et de mobilisation qui donné un élan vers des actions plus larges, en donnant suffisamment de temps pour être en mesure de convaincre les collègues et les amis de la nécessité d’agir. Les grandes manifestations et actions de grève peuvent reposer sur des assemblées du personnel sur le lieu de travail et des comités d’action dans les quartiers, autour par exemple de pétitions à faire signer sur les marchés pour faire connaître les revendications du mouvement. Les actions ne doivent pas être des événements ponctuels visant à relâcher un peu la pression. L’enjeu de la mobilisation doit être clair: mettre fin à la politique de droite et à l’austérité.

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