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Tag: Italie
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LIBYE: Soutien aux masses et à leur révolution ! Aucune confiance dans l’intervention impérialiste !
Face à l’avance rapide des troupes de Kadhafi, la décision du Conseil de sécurité de l’ONU a été fêtée dans les rues de Benghazi et de Tobrouk. Les puissances coalisées se présentent aujourd’hui en sauveurs de Benghazi. Mais l’intervention militaire va-t-elle véritablement aider la révolution en Libye ?
Par Boris Malarme
La chute des dictateurs Ben Ali et Moubarak a inspiré des millions de jeunes, de travailleurs et de pauvres en Afrique du Nord, au Moyen-Orient et partout dans le monde. Presque chaque pays de la région est touché par les contestations contre l’absence de libertés démocratiques et contre la misère. Ces victoires ont encouragé les masses en Lybie à suivre la même voie.
Kadhafi et ses anciens amis
L’Italie, la France, l’Espagne et l’Allemagne sont les principaux partenaires commerciaux de la Libye. Tous sont engagés dans l’offensive militaire (comme la Belgique), à l’exception de l’Allemagne qui vient de décider d’augmenter son engagement militaire en Afghanistan.
En octobre 2010, la Commission Européenne a passé un contrat de 50 millions d’euros sur trois ans, en échange d’efforts visant à empêcher les réfugiés d’arriver en Europe ! La Libye est aussi un grand investisseur en Europe via le fond d’investissements “Libyan investment Authority”. Khadafi est encore actionnaire de la banque UniCrédit, de Fiat, de la Juventus,… La Lybie – douzième producteur mondial de pétrole et première réserve de pétrole d’Afrique – exporte 80% de son pétrole à destination de l’Europe. La panique sur les bourses et la montée du prix du baril, qui a dépassé le seuil des 120$, a illustré que les marchés craignent le développement de la révolution libyenne et la remise en cause des profits que garantissait le régime.
Nombreux sont ceux qui se souviennent de la visite de Kadhafi à l’Elysée, en 2007, quand Sarkozy balayait toute critique avec ses 10 milliards d’euros de contrats commerciaux. L’Espagne a fait de même pour 11 milliards d’euros.
La Belgique n’est pas en reste (141 millions d’euros d’exportation vers le pays en 2008). La Belgique a d’ailleurs été le premier pays à recevoir Kadhafi en 2004, quand la communauté internationale a cessé de l’isoler. Après une entrevue avec la Commission Européenne, la tente du dictateur a été plantée dans les jardins du palais de Val Duchesse, où Kadhafi a été reçu en grande pompe par Guy Verhofstat, Louis Michel et Herman de Croo. Louis Michel avait préparé sa venue en lui rendant visite à Syrte, entouré de patrons belges. Le CDh et Ecolo avaient bien protesté, mais cela ne les a pas empêché de participer au gouvernement Wallon avec le PS et de valider ensemble la livraison d’armes de la FN en Libye.
Après une première rencontre avec Kadhafi en 1989, Robert Urbain, ministre (PS) du Commerce extérieur des gouvernements Martens et Dehaene, a conduit une mission commerciale en Libye en 1991, avec de nombreux industriels et confirmant l’accord commercial général conclu avec la Libye et gelé en 1983. Les investisseurs ont même dégoté un contrat immobilier mégalomane : deux livres vert monumentaux à la gloire du régime…
Les gouvernements successifs connaissaient les crimes et les atrocités commises par le régime de Kadhafi contre les opposants et la population, mais ont maintenu des liens commerciaux étroits. La participation belge à l’intervention n’est qu’hypocrisie, les politiciens qui tendaient encore hier leur main à Kadhafi essayent aujourd’hui de faire oublier leur attitude passée, tout en tentant de sauvegarder les positions commerciales et les profits des entreprises belges.
En Europe et ailleurs, un fort sentiment de sympathie envers ces révolutions est présent parmi la population. Le soutien de nos gouvernements aux régimes dictatoriaux et répressifs à travers tout le Moyen-Orient et l’Afrique du Nord a écorné leur image “démocratique”. Après avoir soutenu et armé la dictature de Kadhafi, l’entrée en guerre des puissances de la coalition n’a pas pour objectif de venir au secours des masses libyennes et de leur révolution. Jusqu’ici, elles étaient plutôt enchantées de faire affaire avec le régime de Kadhafi au vu des ressources gazières et pétrolières contrôlées par le régime.
Aujourd’hui, les puissances occidentales tentent d’exploiter la révolution afin de restaurer leur prestige et d’obtenir un régime plus favorable à l’emprise des multinationales sur les richesses du pays, ou au moins de sa partie Est, au vu de la possibilité d’une partition du pays. Comment la présence des Emirats Arabes Unis et du Qatar au sein de la coalition peut-elle effacer le caractère impérialiste de celle-ci, alors que ces deux Etats sont militairement impliqués au côté de la monarchie semi-féodale d’Arabie Saoudite dans la répression de la population du Bahreïn ? Les puissances de la coalition n’ont rien fait contre l’Arabie Saoudite et la Belgique ne remet pas en cause son commerce d’armes avec celle-ci.
Malgré ses efforts depuis une dizaine d’années, le régime de Kadhafi n’est pas un allié suffisamment fiable pour l’impérialisme. Mais Kadhafi n’a jamais été l’allié des masses et des révolutions, comme en témoigne son attitude après la fuite de Ben Ali, qu’il considérait comme une grande perte pour les Tunisiens. En 1971 déjà, Kadhafi s’est rangé du côté de la contre-révolution en livrant le dirigeant du puissant parti communiste du Soudan (un million de membres à l’époque) à la dictature de Nimeiry et en l’aidant à écraser la tentative de coup d’Etat de gauche qui avait fait suite à l’interdiction des forces de gauche. Kadhafi a beau qualifier son régime de ‘‘socialiste et populaire’’, ce dernier n’a jamais rien eu à voir avec le socialisme démocratique. Kadhafi et ses fils ont toujours dirigé la Lybie d’une poigne de fer.
“Non à une intervention étrangère, les libyens peuvent le faire eux-mêmes”
C’est ce qu’on pouvait lire fin février sur une pancarte à Benghazi. Cela exprimait le sentiment qui dominait contre toute intervention impérialiste. Mais le maintien du contrôle de Kadhafi sur l’Ouest (malgré les protestations dans la capitale et les soulèvements à Misrata et Zuwarah) et sa contre-offensive vers l’Est ont provoqué un changement d’attitude. Mais les révolutionnaires qui espèrent que l’intervention les aidera se trompent.
La résolution de l’ONU, la ‘‘no-fly-zone’’ aux commandes de l’OTAN et les bombardements des puissances coalisées vont miner tout le potentiel pour concrétiser les véritables aspirations de la révolution libyenne. De plus, le régime essaye d’exploiter les sentiments anti-impérialistes qui vivent parmi la population. Le maintien du régime de Kadhafi ne s’explique pas seulement par la supériorité de son armement, mais surtout par les faiblesses présentes dans le processus révolutionnaire. Ainsi, l’absence de véritables comités populaires démocratiques sur lesquels se baserait le mouvement révolutionnaire et l’absence d’un programme clair répondant aux aspirations sociales de la majorité de la population a fait défaut. Cela aurait permis de bien plus engager les 2/3 de la population de l’Ouest (au-delà des divisions tribales et régionales), de fractionner l’armée et d’unifier les masses contre Kadhafi.
Le Conseil National de Transition rebelle (CNT) est un conseil autoproclamé, largement composé d’anciens du régime de Kadhafi et d’éléments pro-capitalistes, favorables aux puissances occidentales. Parmi eux ; l’ancien dirigeant du Bureau national de développement économique, que l’on trouve derrière des politiques néolibérales et le processus de privatisations qui a pris son envol à partir de 2003. Cela laisse une relative marge de manœuvre à Kadhafi, qui bénéficie encore d’un certain souvenir de ce qui a pu être fait en termes d’enseignement et de soins de santé grâce aux revenus du pétrole depuis 1969, et qui a récemment fait des concessions en termes de salaires et de pouvoir d’achat sous la pression de la révolte.
C’est ce qui explique que l’envoyé spécial du quotidien Le Monde dans l’Est du pays a témoigné “on ne sent pas parmi la population un enthousiasme phénoménal vis-à-vis du Conseil National de transition.” (23/03/2011) Il affirme aussi que si les Libyens de l’Est étaient à ce moment favorables à un zone d’exclusion aérienne, ils sont fortement opposés à une intervention au sol.
Les travailleurs et leur syndicat peuvent aider la révolution libyenne en s’opposant à la participation belge dans l’intervention, en bloquant les exportations de la Libye et en gelant les avoirs de la clique de Kadhafi. Mais l’avenir de la révolution libyenne doit se décider en Libye même. Contrairement à la Tunisie et l’Egypte, la classe des travailleurs n’a pas encore joué un rôle indépendant dans la révolution. La création d’un mouvement indépendant des travailleurs, des jeunes et des pauvres est la seule façon d’empêcher le projet impérialiste, d’en finir avec la dictature et d’élever le niveau de vie de la population.
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Crise des réfugiés – C’est aux multinationales qu’il faut s’en prendre, pas à leurs victimes
Le mois passé, au Niger, j’ai rencontré Jerry. Jerry avait quitté son Libéria natal pour se rendre à pied, en bus, en taxi, en charrette et en stop en Europe, où il espérait enfin trouver un travail. Après avoir parcouru ainsi 4.000 km le baluchon sur le dos et traversé neuf pays, il s’est retrouvé au Maroc, devant un mur. C’est là que la police l’a attrapé. Refoulé en compagnie d’une cinquantaine d’autres Africains venus d’autant de pays différents, il a été relâché quelque part en plein désert algérien. Une caravane l’a ramené au Niger. De là, il comptait prendre un bus pour le Nigéria, puis, ‘‘avec l’aide de Dieu’’, gagner le Sud-Soudan nouvellement indépendant pour y trouver un travail et, enfin, y poser son baluchon, après plus d’un an sur les routes.
Par Gilles (Hainaut)
- Manifestation contre le centre fermé de Vottem: Rapport, par Nicolas Croes
- Reportage-photos par Jente
- Reportage-photos par Nico
- Reportage de la RTBF
- Catégorie "Sans-papiers" de socialisme.be
La misère ou la guerre poussait déjà énormément de gens à rechercher un avenir à l’étranger, la crise capitaliste a déjà renforcé ce processus et nous nous trouvons face à une crise alimentaire, selon le porte-parole de l’agence alimentaire des Nations Unies. Toujours selon ce dernier, la population mondiale n’aurait que 3 possibilités: fuir, mourir ou se révolter. Quitter son pays d’origine n’est jamais facile, mais beaucoup d’immigrés doivent en plus affronter les flots sur de fragiles bateaux surchargés ou encore l’énorme clôture qui est en construction à la frontière gréco-turque. Sur place, ils auront encore à faire face à la peur, la répression, l’enfermement, le racisme… et le froid. Cet hiver, près de 6.000 demandeurs d’asile étaient sans logis et l’an dernier déjà, des familles entières avaient dû dormir dans les gares par un froid glacial.
C’est le système capitaliste qui pousse les gens à quitter leur pays. En Tunisie, les multinationales (dont 146 entreprises belges) exploitaient brutalement les travailleurs avec l’appui du régime policier de Ben Ali, et profitaient des très bas salaires, des droits syndicaux extrêmement limités et du chômage de masse (toujours utile pour maintenir les salaires au plus bas…). Le capitalisme ne peut exister sans exploitation, sans oppression et donc sans “flots massifs” de réfugiés.
En plus, les crises politiques, catastrophes “naturelles” et sociales amplifient le problème. Des milliers de gens tentent de fuir la Libye pour la Tunisie, d’autres milliers cherchent à quitter la Côte d’Ivoire pour le Ghana ou le Libéria. Pareil pour ceux qui quittent le Nord-Soudan pour le Sud-Soudan et vice-versa. En Libye, si les ressortissants français ont pu bénéficier d’un rapatriement rapide, les six mille travailleurs bangladeshis attendent toujours un avion pour les ramener chez eux – suscitant une crise politique au Bangladesh même.
Après la chute de Ben Ali, 5.000 réfugiés tunisiens sont arrivés en Italie en seulement une semaine. Les politiciens de droite et d’extrême-droite comme Marine Le Pen tentent d’exploiter ces images de réfugiés arrivant sur les plages d’Italie. Mais ce n’est pas l’immigration qui constitue une menace pour les conditions de travail et de salaires des travailleurs européens: c’est la soif de profit des banques et des actionnaires, des patrons et des spéculateurs. Ce sont eux les responsables de la crise, eux qui veulent nous la faire payer et c’est encore eux qui bénéficient de toutes les attentions des partis capitalistes, d’extrême-droite ou non.
Les patrons profitent de la situation des sans-papiers pour les exploiter, les criminaliser et faire pression sur nos salaires en nous mettant en concurrence avec ces nouveaux venus. Ces immigrés privés de tous les droits se voient forcés, pour survivre, d’accepter des boulots inhumains et sous-payés. Les patrons cherchent ainsi à saper les conditions de travail durement acquises des travailleurs belges. Travailleurs belges et immigrés ont un intérêt commun : lutter pour un salaire égal pour tous, pour la fin des discriminations, afin de stopper la concurrence entre travailleurs belges et immigrés. C’est main dans la main que nous devons demander cela – non aux divisions ! Régularisation de tous les sans-papiers !
Il faut une campagne d’adhésion massive des immigrés dans les syndicats, et les intégrer activement à la lutte contre la casse sociale, pour la défense de l’emploi, pour le partage du temps de travail entre les travailleurs disponibles sans perte de salaire et avec embauche compensatoire. Mais la concurrence et le ‘‘diviser-pour-mieux-régner’’ ne s’exerce pas seulement au niveau de l’emploi : il faut aussi lutter pour un plan public et massif de construction de logements sociaux, pour plus d’écoles,… Enfin, il faut stopper la politique des États européens qui crée la misère dans les pays du Sud et pousse une partie de la population à désespérément chercher un avenir ailleurs. Cela signifie s’opposer aux aventures impérialistes en Afghanistan et en Libye, exproprier les entreprises belges en Chine, au Congo, etc. et les placer sous le contrôle des travailleurs, totalement reconvertir l’industrie de l’armement, aider à l’organisation de syndicats indépendants en Chine, en Égypte, et ailleurs; soutenir les révolutions au Moyen Orient et en Afrique du Nord,…
En bref, tant en Belgique qu’ailleurs dans le monde, résoudre la question des réfugiés revient concrètement à entrer en conflit avec le système capitaliste et chercher à le renverser. Pour cela, le meilleur moyen reste la mobilisation de masse des travailleurs et des pauvres, le blocage de l’économie par la grève générale et le début de l’instauration d’une autre société basée sur les comités de lutte dans les quartiers, les entreprises, etc. et sur leur coordination et sur la remise en marche de l’économie sous le contrôle et la gestion de ces comités.
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Sauver l’enseignement
Depuis 1980, il faut savoir que le budget pour l’enseignement (avec des hauts et des bas) se réduit comme une peau de chagrin. En 1980, le gouvernement consacrait encore plus de 7% du PIB à l’enseignement, aujourd’hui c’est moins de 5,5%. Ce qui équivaut à 6 milliards d’euros d’économies par ans qui se font cruellement sentir par les étudiants. Les Etudiants de Gauche Actifs appellent activement à participer à la manifestation à l’initiative de la FEF pour une diminution des coûts des études et refinancer publiquement l’enseignement à hauteur de 7% du PIB.
Tract des Etudiants de Gauche Actifs
Manifestation ce 6 Avril 2011, à 14h gare du midi
Dans le secondaire :
Le décret Robin des bois de la ministre Simonet prévoit de diminuer d’un montant de 8 millions d’euros les subsides des 60% des écoles les plus ‘’riches’’ pour les donner aux 25% des écoles les plus pauvres. Comme si, après tant d’années d’attaques budgétaires sur les services publics dont l’enseignement, il restait encore quelque chose de “trop” dans les caisses… La coalition Olivier (PS-CDh-Ecolo) veut ainsi faire croire qu’il fait des efforts mais il n’est en réalité question que de ‘‘faire circuler’’ l’argent d’un côté à l’autre sans remédier au problème fondamental.
Le véritable problème, c’est qu’il y a un manque criant de moyens publics dans l’enseignement, avec en conséquence un manque d’écoles, des classes surpeuplées, un manque de personnel, des bâtiments scolaires délabrés et la multiplication des préfabriqués. Il n’y a pas d’écoles « riches » et d’écoles « pauvres » ! Il n’y a que des écoles pauvres et d’autres écoles très pauvres ! Il nous faut un vrai plan Robin des Bois qui reprend l’argent aux Super-Riches pour refinancer l’enseignement !
Dans le supérieur :
Depuis 1995, le nombre d’étudiants a grimpé de 34,1% dans les universités et hautes écoles, alors que le personnel enseignant a baissé de 1,8%. Le sous-financement chronique auquel fait face l’enseignement supérieur pousse de plus en plus les établissements à licencier du personnel, à en finir avec les services sociaux et à rechercher un financement du privé, quitte à mettre en péril l’indépendance de la recherche et la qualité de nos cursus. On voit déjà aujourd’hui la mise en place de mesures visant à standardiser le nombre de crédits par cours, ce qui revient concrètement à une réduction de l’offre d’éducation, refus d’inscription, privatisation des kots étudiants…
Résistons à l’austérité !
Pourtant de l’argent il y en a : le gouvernement n’a eu aucun problème à débourser 20 milliards d’euros pour les grands actionnaires des banques. Il a donné 9 milliards d’€ de diminution de charge aux grands patrons en 2010; les spéculateurs! Alors que les profits des grandes entreprises et des banques atteignent à nouveau des montants exorbitants, ils veulent nous faire payer leur crise. Peu importe la composition du futur gouvernement, ils sont tous d’accord qu’il faut couper 25 milliards d’euros dans le budget, et faire des économies sur le dos des jeunes et des travailleurs; l’enseignement ne sera pas épargné.
Irlande, Espagne, Grèce, Italie, Grande-Bretagne, France, Autriche… dans tous ces pays, des protestations ont eu lieu ces 12 derniers mois contre les coupes budgétaires dans l’enseignement. Ce qu’il nous faut c’est établir un débat ouvert entre les étudiants et le personnel (aux travers des organisations syndicales) pour préparer une résistance offensive à l’austérité qu’on nous promet. Cette manif est un bon pas pour s’y préparer.
- Pas question de payer leur crise !
- Plus de moyens publics ! 7% du PIB pour l’enseignement !
- Pour un enseignement gratuit et de qualité pour tous !
- Non au processus de Bologne ! Non aux suppressions de cours ! Pas d’ingérence du secteur privé sur la recherche et sur nos campus !
- Stop aux privatisations des services sociaux, des restos et des kots !
- Pour des investissements publics pour des repas de qualité à prix démocratiques & des kots à prix abordable pour tous !
- Gratuité de l’accès à la culture et aux transports en commun !
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Libye: Non à l’intervention militaire occidentale !
Victoire à la révolution libyenne! Construisons un mouvement indépendant des travailleurs et des jeunes!
Même si elle a été fêtée avec joie dans les rues de Tobruk et de Benghazi, la décision du Conseil de sécurité de l’ONU de décréter une ”no fly zone”, une zone d’exclusion aérienne, n’a pas été prise dans le but de défendre la révolution libyenne. Les révolutionnaires libyens peuvent penser que cette décision va les aider, mais ils se trompent. Des calculs économiques et politiques se trouvent derrière les décisions des puissances impérialistes, il ne s’agit pas de sauver la révolution contre Kadhafi. Les majeures puissances impérialistes ont décidé d’exploiter la révolution et de tenter de remplacer Kadhafi par un régime plus fiable. L’annonce par le ministre libyen des affaires étrangères d’un cessez-le-feu immédiat a toutefois compliqué la position de l’impérialisme.
Robert Bechert, CIO
Confrontés à une avance rapide des troupes de Kadhafi, nombreux sont ceux à l’Est du pays qui ont considéré que l’idée d’une ”no-fly-zone” serait de nature à les aider, mais ce n’est pas là le chemin pour défendre et étendre la révolution. Malheureusement, le mouvement initial de la révolution vers l’Ouest, où habitent les deux tiers de la population, n’était pas basé sur un mouvement construit sur base de comité populaire et démocratiques capables d’offrir un programme clair afin de gagner le soutien des masses et des soldats du rang, tout en menant une guerre révolutionnaire. Cela a donné à Kadhafi l’opportunité de regrouper ses troupes.
Le soutien croissant pour une ”no-fly-zone” est une inversion du sentiment exprimé sur des affiches en anglais à Benghazi, en février dernier: “No To Foreign Intervention – Libyans Can Do It By Themselves” (”Non à une intervention étrangère, les Libyens peuvent le faire par eux-mêmes”). Cela suivait les merveilleux exemples de Tunisie et d’Égypte, où l’action de masse a totalement miné les régimes totalitaires. Les masses libyennes étaient confiantes que leur élan finirait en victoire. Mais Kadhafi a été capable de maintenir sa poigne sur Tripoli. Cette relative stabilisation du régime et sa contre-offensive ont conduit à un changement dans l’attitude vis-à-vis d’une intervention étrangère, ce qui a permis à la direction largement pro-occidentale du Conseil National Libyen rebelle de passer au-dessus de l’opposition des jeunes à une demande d’aide à l’Ouest.
Cependant, malgré les déclarations du régime de Kadhafi, il n’est pas certain que ses forces relativement petites auraient été capables de lancer un assaut contre Benghazi, la seconde plus grande ville de Libye, avec environ un million de personnes y vivant. Une défense de masse de la ville aurait pu bloquer l’attaque des forces restreintes de Kadhafi. Maintenant, si le cessez-le-feu se maintien et que Kadhafi reste au pouvoir à Tripoli, une scission de fait du pays pourrait se produire, pour retourner à quelque chose de semblable aux entités séparées qui avaient existé avant que l’Italie ne crée la Libye après 1912 et qui a été restauré par la Grande-Bretagne à la fin des années ’40.
Quel que soit l’effet immédiat de la ”no fly zone”, toute confiance placée dans l’ONU ou dans les puissances impérialistes menace de miner les véritables aspirations de la révolution qui a commencé le mois dernier. Les puissances qui ont menacé d’actions militaires ne sont pas amies des masses libyennes. Jusqu’à récemment, ces mêmes puissances étaient plutôt heureuses de faire affaire et de flatter la clique de meurtriers de Kadhafi afin de maintenir un partenariat, très certainement concernant les industries du gaz et du pétrole libyennes. Le jour suivant la décision de l’ONU, le Wall Street Journal (qui appartient à l’empire Murdoch) s’est lamenté que “le partenariat étroit entre les services secrets du dirigeant libyen le Colonnel Muammar Kadhafi et la CIA a été détruit” (18 mars 2011). Le journal disait encore: “selon un fonctionnaire américain âgé” ce ”partenariat” était ”particulièrement productif”.
Maintenant, après avoir perdu d’anciens dictateurs alliés, Moubarak en Égypte et Ben Ali en Tunisie, l’impérialisme essaye de tirer profit du soulèvement populaire en Libye à la fois pour redorer son image “démocratique” et pour aider à installer un régime plus “fiable”, au moins dans une région du pays. Tout comme avant, la région d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient, en raison de sa situation stratégique et de ses réserves de pétrole, est d’une importance majeure pour les puissances impérialistes.
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Cherchez l’opposant le plus sincère au dictateur libyen…
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Cela révèle l’absolue hypocrisie des principales puissances impérialistes, qui ont soutenu des régimes dictatoriaux et répressifs à travers tout le Moyen-Orient depuis des décennies. Au même moment qu’ils décidaient d’une No-Fly-Zone, ces puissances impérialistes n’ont absolument rien fait contre l’Arabie Saoudite et ses alliés et leur répression de la population du Bahreïn. Dans les 12 heures qui ont suivi la décision de l’ONU, les forces armées d’un autre allié régional, le Yemen, ont tués au moins 39 manifestants dans la capitale, Sanaa. L’ONU n’a été capable de prendre sa décision en Libye à cause du soutien de la Ligue Arabe pour une ”no-fly-zone”, mais ces régimes réactionnaires ne disent rien, bien entendu, à propos de la répression au Bahreïn, au Yémen ou dans un autre pays arabe.
Les considérations de Cameron et de Sarkozy pour la Libye sont en partie motivées par leur impopularité dans leur propre pays, avec l’espoir qu’un succès à l’étranger pourraient renforcer leur position. Cameron espère très clairement jouir d’un effet similaire à celui dont a bénéficié Thatcher après sa victoire en 1983 au cours de la Guerre des Malouines (Falklands). Mais Thatcher a pu compter sur une victoire militaire rapide – une opération ”no-fly-zone” ne conduira pas à une même victoire militaire. Sarkozy, après le désastre de sa politique tunisienne qui a entraîné la chute de son ministre des affaires étrangères, a besoin d’un succès pour contrecarrer les sondages actuels, les élections présidentielles de 2012 arrivant à grands pas.
Les zig-zags de Kadhafi
En dépit des récents rapprochements entre les puissances impérialistes et Kadhafi, ce tyran est resté un allié incertain. Au cours de ses 42 années au pouvoir, la politique de Kadhafi est faite de zig-zags, parfois violents. En 1971, il a aidé le dictateur soudanais, Nimeiry, à écraser un coup d’État de gauche qui avait pris place en réaction à l’interdiction de la gauche, y compris du parti communiste soudanais, qui avait un million de membres. Six ans plus tard, Kadhafi a proclamé une "révolution du peuple" et a changé le nom officiel du pays de ”République Arabe Libyenne” en ”Grande Jamahiriya arabe libyenne populaire socialiste”. Malgré le changement de nom et la création de soi-disant “comités révolutionnaires”, il ne s’agissait pas d’un véritable socialisme démocratique où d’un mouvement en cette direction. Les travailleurs et les jeunes de Libye n’ont pas dirigé leur pays. Kadhafi est resté au pouvoir. Cela est d’ailleurs souligné par le rôle incroyablement proéminent que jouent nombre de ses enfants dans le régime.
Depuis 1969 toutefois, sur base des revenus du pétrole et d’une petite population, de grandes améliorations ont eu lieu, particulièrement au niveau de l’enseignement et des soins de santé, ce qui explique pourquoi Kadhafi peut encore jouir d’une certaine base parmi la population. Même si l’opposition est grandissante contre la clique de kadhafi, spécialement parmi les jeunes et la population qui a reçu une instruction, la peur existe face à l’avenir, face à qui pourra le remplacer, de même qu’existe une grande opposition à tout ce qui sent le pouvoir de l’étranger. L’utilisation répandue du vieux drapeaux monarchiste a aliéné ceux qui ne veulent pas d’un retour à l’ancien régime, et Kadhafi a utilisé cela pour justifier ses actes. Porter le vieux drapeaux peut encore être contre-productif pour les Libyens de l’Ouest, parce que l’ancien roi provient de l’Est.
Mais ces facteurs ne constituent pas une explication complète pour comprendre pourquoi Kadhafi est capable, au moins temporairement, de stabiliser sa position. Alors qu’il y a un soulèvement populaire dans l’Est du pays, Kadhafi a été capable de maintenir sa position à l’Ouest, malgré les protestations à Tripoli et les soulèvements à Misrata, Zuwarah et dans quelques autres endroits.
Le rôle de la classe ouvrière
Contrairement à l’Égypte et à la Tunisie, la classe ouvrière n’a pas joué un rôle indépendant dans la révolution. De plus, de nombreux travailleurs en Libye sont des immigrés qui ont quitté le pays ces dernières semaines.
L’absence d’un élément tel que le syndicat tunisien UGTT (malgré le fait que sa direction nationale est pro-Ben Ali), a compliqué la situation en Libye. Le grand enthousiasme révolutionnaire de la population n’a pas encore eu d’expression organisée. Le ”Conseil National” qui a émergé à Benghazi, très largement un conseil autoproclamé, est une combinaison d’éléments du vieux régime et d’éléments pro-impérialistes. Par exemple, le porte-parole du Conseil, Mahmoud Jibril, l’ancienne tête dirigeante du Bureau national de développement économique de Kadhafi, est décrit par l’ambassadeur américain comme un “interlocuteur sérieux qui a compris la perspective américaine”.
Il est facile pour Kadhafi de présenter ces gens comme une menace pour le niveau de vie des Libyens et comme des agents des puissances étrangères. Cette propagande n’a cependant qu’un effet limité, le niveau de vie de la population étant en train de diminuer, au contraire du chômage (de 10% actuellement), depuis la fin du boom du pétrole dans les années ’80 et depuis le début des privatisations en 2003.
Kadhafi utilise la menace de l’intervention impérialiste pour récupérer du soutien dans le pays, et cela peut avoir un plus grand effet en cas de partition du pays. Combien de temps cela pourra marcher est une autre question. En plus de sa rhétorique anti-impérialiste, Kadhafi a fait des concessions. Chaque famille a reçu l’équivalent de 450 dollars. Certains travailleurs des services publics ont eu 150% d’augmentation de salaire et des taxes sur la nourriture ont été abolies. Mais cela ne répond pas aux revendications de liberté et à la frustration grandissante de la jeunesse libyenne (la moyenne d’âge est de 24 ans dans le pays) contre la corruption du régime.
A travers le monde, des millions de personnes suivent les révolutions dans la région et sont inspirées par elles. Ces évènements ont inspiré des protestations contre les effets de la crise capitaliste dans plusieurs pays. Certains de ceux qui accueillent les événements révolutionnaires de la région peuvent soutenir la ”no-fly-zone”, mais nous affirmons que cela se fait en premier lieu pour défendre les intérêts des puissances impérialistes, ces mêmes puissances qui ne font rien contre la répression dans le Golfe.
Que peut-il être fait pour réellement aider la révolution libyenne? En premier lieu, les syndicats doivent bloquer les exportations de gaz et de pétrole de Libye. Ensuite, les travailleurs dans les banques doivent organiser le gel des finances de Kadhafi.
La ”no-fly-zone” ne va pas automatiquement conduire au renversement de Kadhafi. Comme Saddam Hussein en son temps, le dirigeant libyen pourrait consolider sa position pour un moment dans les parties du pays qu’il contrôle. Comme l’ont montré les expériences de Tunisie et d’Égypte, la clé pour renverser une dictature réside dans un mouvement des travailleurs et des jeunes.
Un programme révolutionnaire
L’avenir de la révolution doit se décider dans le pays lui-même. Cette victoire demande un programme qui peut aller outre les divisions régionales et tribales, et qui soit capable d’unifier la masse de la population contre la clique de Kadhafi et pour un meilleur avenir.
Un programme pour la révolution libyenne qui pourrait véritablement bénéficier à la masse de la population serait basé sur de véritables droits démocratiques: la fin de la corruption et des privilèges, la sauvegarde et le développements de gains sociaux obtenus grâce au pétrole, l’opposition à toute forme de recolonisation et la défense d’une économie démocratiquement contrôlée, sous propriété publique, et d’une planification économique afin d’utiliser les ressources du pays pour le bien des masses.
La création d’un mouvement indépendant des travailleurs, des pauvres et des jeunes pourrait opérer cette transformation réellement révolutionnaire de la société. C’est la seule façon de contrecarrer les plans de l’impérialisme, de mettre fin à la dictature et d’améliorer la vie de la population.
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Le week-end “Socialisme 2011” et la Journée Internationale des Femmes
La Journée internationale des Femmes a plus de 100 ans. Aujourd’hui, les acquis obtenus sont en recul (plus bas salaires, flexibilité du travail incompatible avec la vie de famille,…) Dans ce contexte de position économique plus faible, le sexisme et l’objétisation des femmes sont devenus des phénomènes communs. Lors du week-end de discussions "Socialisme 2011", différents meetings et commissions aborderont la question.
Samedi 12 mars : Meeting d’ouverture (11.00 – 12.00) – “Journée Internationale des Femmes: la lutte contre le capitalisme est plus nécessaire que jamais”
Aujourd’hui, de plus en plus d’acquis sont sous pressions: les emplois pour les femmes sont systématiquement moins des emplois à part entière, leurs salaires sont en moyenne plus bas, la flexibilité sur le marché de l’emploi ne tient pas compte des enfants,… Et dans ce contexte de faible position économique, le sexisme et l’objétisation des femmes est devenue un phénomène de plus en plus commun. Leila Messaoudi (Gauche Révolutionnaire, France), Christine Thomas (Contro Corrente, Italie, auteur du livre “It doesn’t have to be like this”) et Tanja Niemeier (collaboratrice de la fraction GUE – Gauches Unitaire Européenne au Parlement européen) aborderont les leçons du passé pour la lutte des travailleuses d’aujourd’hui.
Dimanche 13 mars : Commission (13h00 – 15h30) – Comment se battre contre le sexisme
Avec Laure Miège, de la commission femmes du PSL, et Christine Thomas.
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La jeunesse européenne en résistance contre l’austérité. A nous maintenant…
Irlande, Espagne, Italie, Grande-Bretagne, France, Autriche,… dans tous ces pays, des protestations ont eu lieu ces 12 derniers mois contre les coupes budgétaires dans l’enseignement. Dans quelques cas, ces mouvements ont directement abouti à des protestations anti-gouvernementales. Fil rouge remarquable : une plus grande politisation des jeunes et une organisation spontanée qui a souvent dépassé les syndicats étudiants.
Par Marc, Gand
Dans plusieurs pays, le potentiel qui existe parmi la jeunesse a largement été démontré. Les étudiants, les écoliers et les jeunes travailleurs sont descendus dans les rues pour refuser les attaques et revendiquer leurs droits. Pour réclamer leur droit à un avenir, en fait.
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Socialisme 2011 – Les jeunes en lutte pour leur enseignement et leur avenir
L’impact de la crise du capitalisme frappe les jeunes de plein fouet. On parle d’une "génération perdue" confrontée à un chômage de masse, à la pauvreté, à la dégradation de l’enseignement. Des mouvements de masse des jeunes n’acceptant pas cette fatalité et contestant les plans d’austérités a déjà vu le jour dans plusieurs pays en Europe. Blocages d’écoles et d’unifs, grèves et manifestations de masse,… Cette résistance de la jeunesse peut jouer un rôle crucial dans le développement de mouvement plus large dans la société. Une commission de Socialisme 2011 est consacrée à ce thème.
Samedi 12 mars, de 15.30h à 18.00h
Avec: Paul Cannalan, organisateur national de la campagne "Youth fight for jobs and éducation" qui joue un rôle important dans le mouvement des étudiants en Angleterre, Alex Lecoq, étudiant à Rouen a été l’un des organisateurs dans sa fac de la lutte contre la réforme des pensions de Sarkosy et Mathias Vanderhoogstraten des Etudiants de Gauche Actifs, qui apportera le point de vue d’EGA sur la manière de préparer également la résistance en Belgique.
- Infos pratiques
- Programme de Socialisme 2011 sur les luttes de la jeunesse
- Programme complet de Socialisme 2011
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Des attaques sévères, profondes et impitoyables
Dans la plupart des pays européens, la crise a durement frappé. Les jeunes n’ont pas été les derniers à en subir le choc et beaucoup de mesures d’assainissement introduites à seule fin de contenter les marchés financiers s’en prennent encore à eux. Augmentation des droits d’inscriptions aux études, réduction des allocations, diminution des droits et de la protection pour les jeunes travailleurs (et, par contre, augmentation de la pression et de la charge de travail).
En Grande-Bretagne, les droits d’inscription ont été augmentés à environ 11.000 euros. En Italie, les étudiants sont descendus dans les rues contre la réforme de l’enseignement supérieur qui s’en prend à sa démocratisation. En Espagne, l’introduction des Accords de Bologne (1) a conduit à de grandes protestations d’étudiants qui s’opposaient à la commercialisation de l’enseignement. En Irlande et ailleurs, le prétexte de la crise a servi d’excuse pour augmenter les droits d’inscription, et absolument aucune mesure n’est prévue pour ceux qui seraient dorénavant incapables de payer leurs études. Bien au contraire! Dans la plupart des cas, les bourses et allocations sont en même temps rabotées.
Face à la protestation, la répression a également été très dure. L’establishment et les gouvernements sont en train de tester jusqu’où ils peuvent aller avant d’être forcés à faire des compromis. Bien que des victoires partielles aient été arrachées en Grande-Bretagne, il est clair qu’il sera nécessaire de faire plus pour sauver la démocratisation de l’enseignement supérieur et, plus généralement, l’avenir des jeunes.
Comment s’organiser ?
Les fortes mobilisations ont été accompagnées d’une très faible direction. Dans les pays où existent des organisations reconnues défendant les droits et les intérêts des jeunes, elles ont souvent constitué un frein sur la lutte. La dynamique du mouvement s’est souvent développée sans la participation de ces organisations. En même temps, l’absence de leadership à d’autres endroits a été une faiblesse afin de donner une orientation capable de maintenir en vie la mobilisation.
Le potentiel est pourtant énorme : une grande partie de la jeunesse est déterminée à ne plus se complaire dans l’apolitisme et la passivité inhérents à la période qui a précédé la crise. La politique de concessions aux marchés financiers et au grand capital est de plus en plus remise en cause, les jeunes contestent de plus en plus les discours officiels au sujet de la crise évitant de montrer les véritables responsables. Il existe un grand potentiel pour le développement d’une conscience anticapitaliste.
Cette dimension idéologique du mouvement est un élément vital, car cela représente déjà une grande part des perspectives de poursuite de la lutte. Cela aide à formuler une alternative et à discuter au sein du mouvement. Le caractère démocratique nécessaire de ce mouvement est également crucial. Les intérêts des jeunes et des étudiants doivent être défendus de façon démocratique, de la même manière que des groupes d’action peuvent s’organiser plus efficacement par la formation de comités.
Organiser et politiser la lutte
Ici et là, on a pu voir cette façon de procéder se développer. En Grande-Bretagne, la direction du syndicat étudiant officiel a été très critiquée et cela a conduit à des initiatives parallèles qui n’acceptaient aucune forme ‘‘d’assainissement négocié’’. De telles initiatives ont notamment vu le jour là où les bâtiments scolaires et universitaires ont été occupés par les étudiants. Lorsqu’il existe des possibilités pour élaborer un programme politique, ces discussions peuvent constituer une bonne base pertinente pour tracer des perspectives dans lesquelles intégrer les différentes actions. Ici aussi, des erreurs peuvent être commises, mais le processus démocratique et la politisation au sein des mouvements sont des éléments fondamentaux. D’où l’importance, dès le début du développement de la lutte, de l’idée d’assemblées générales afin de gagner des couches plus larges à la lutte et d’assurer une large discussion au sujet de la plate-forme de revendications et des décisions à prendre pour faire progresser la lutte.
A différents endroits, les organisations-sœurs du PSL sont intervenues dans ce sens et ont ainsi pu développer et renforcer les mobilisations et la lutte. Au cours de la prochaine période, ce travail de politisation et de démocratisation des mouvements devra bien entendu se poursuivre, il s’agit d’une priorité pour éviter que les bureaucraties étudiantes ne tentent de jouer leur rôle de frein. Il faut assurer que les mouvements à venir, dès leur naissance, soient ouverts à discuter démocratiquement du contenu des revendications de la lutte ainsi que des perspectives d’actions.
(1) Accords de Bologne: Accords visant officiellement à uniformiser l’enseignement au niveau européen mais qui, dans les faits, ont uniquement créé un cadre pour coordonner les attaques contre l’enseignement supérieur.
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Libye: le mouvement de masse se heurte à une féroce répression
En Libye, le mouvement insurrectionnel des masses, lequel balaye actuellement le Maghreb et le Moyen Orient, s’est heurté à une répression d’une férocité inégalée depuis le début du raz-de-marée révolutionnaire. Néanmoins, la survie du régime semble de plus en plus menacée, avec l’Est du pays aux mains de la rébellion et de nombreuses villes dans l’Ouest en proie à des combats entre les masses insurgées et les sbires du régime. Non seulement l’armée s’est-elle retirée d’une grande partie du pays mais de nombreuses unités on rejoint la rébellion.
Par Christian (Louvain)
Cette décomposition de l’appareil d’Etat s’est également manifestée sous forme de défections de diplomates et d’autres éléments proches du pouvoir dont même des ministres et le chef de protocole du dictateur. Alors que ces individus professent être horrifiés par une répression excessive, il est probable que bon nombre d’entre eux sont surtout intéressés pour sauver leur peau et peut-être même leur carrière. Après tout, la Tunisie comme l’Égypte ne sont-ils pas toujours largement dominés par des individus appartenant a la clique des tyrans déchus?
Dans la même veine, les dirigeants occidentaux, lesquels avaient redécouvert le régime de Kahdafi comme un partenaire respectable avec lequel faire d’excellentes affaires, se sont longtemps contentés de vagues déclarations dans l’esprit hypocrite qui leur est propre. Certains, comme Berlusconi, ont tout de même étés incapables de contenir leur désarrois devant le possible effondrement prochain d’une régime ami. L’Italie est après tout le pays impérialiste qui risque de perdre le plus à cause des développements actuels non seulement en ce qui concerne l’approvisionnement en pétrole et la perte d’investissements mais également en ce qui concerne une possible vague de refugiés politiques et économiques (jusqu’a 300.000 selon certaines estimations) qui risque de déferler sur ses côtes dans un avenir proche. De surcroit, on peut se permettre de supposer que Berlusconi, étant donné la délicatesse de sa propre situation, ait de réelles sympathies avec d’autres leaders autoritaires et kleptocratiques dont le pouvoir est menacé.
Malheureusement il ne faut pas uniquement chercher parmi les classes dominantes des pays impérialistes pour rencontrer des sympathies envers le régime libyen. En effet, c’est parmi la "gauche" en Amérique Latine que Kadhafi peut également compter sur un certain nombre de sympathisants. Pour cela, il faut chercher l’explication dans l’histoire de la décolonisation et dans la nature même de cette "gauche" latino américaine. Il faut se rappeler que durant la décolonisation et jusqu’a l’effondrement du stalinisme en Union Soviétique, de nombreux régimes bourgeois dans les pays néocoloniaux se disaient socialistes et nationalisèrent, du moins une partie de leur économie.
Cela fut notamment le cas sous Habib Bourguiba, le prédécesseur de Ben Ali. C’est ainsi que le RCD, l’ancien partis de Bourguiba comme de Ben Ali, aujourd’hui du moins officiellement dissous, faisait partie de la deuxième internationale, l’internationale qui regroupe les partis sociaux-démocrates comme le PS. Cela n’a bien évidement pas empêché le régime de mener une politique de réformes néolibérales ces dernières décennies (les partis sociaux-démocrates dans les pays plus démocratiques ont fait de même) ou à une petite clique autour du président de s’enrichir énormément.
Contrairement au régime tunisiens très proche des pays impérialistes, Kadhafi a longtemps joué le rôle du leader anti-impérialiste. Durant les années ’70, prônant un socialisme panarabe, il a nationalisé l’industrie pétrolière, principale source de richesse du pays. En effet, durant ses premières années aux pouvoir, il a essayé d’imiter la politique bonapartiste de Nasser en Egypte, son idole. Ce cachant derrière une rhétorique anti-impérialiste, le colonel a également cherché à assouvir sa soif de pouvoir et d’auto-affirmation à travers des actions terroristes et en se jetant dans des aventures militaires un peu partout en Afrique. Enfin, aux prises à l’isolement et à des sanctions économiques, le régime a cherché à se réconcilier avec les pays impérialistes. Mettant un terme à ses aventures encombrantes, la Libye a pu recevoir des investissements étrangers, quelque chose qui a permis à la bourgeoise internationale comme à l’élite proche au pouvoir libyen de se remplir les poches à volonté.
Les sympathies que portent les régimes de "gauche" en Amérique Latine pour le dictateur libyen ne sont pas surprenantes, mais risquent d’être utilisées pour discréditer les idées du socialisme. Alors que le régime libyen lançait des rais aériens et des mercenaires contre sa propre population, un fonctionnaire européen a pu prétendre que Kadhafi avait fuit au Venezuela. Bien que rapidement démentie, cette rumeur démontre comment les alliances politiques de Chavez peuvent être utilisées par l’impérialisme et par la propagande bourgeoise.
Bien que le gouvernement vénézuéliens ait condamné la violence en Libye, une déclaration fort ambigüe faite par Chavez sur Twitter "Viva la Libye et son indépendance! Kadhafi fait face à une guerre civile!!" laisse encore bien des doutes sur ses sympathies. Dans ses articles, le Comité pour une Iinternationale Ouvrière avait déjà critiqué les bonnes relations entretenues entre Chavez et des dictateurs comme Ahmadinejad et Kadhafi. Pour de vrais marxistes, la politique ne peut pas se résumer à "l’ennemi de mon ennemi est mon ami", il faut toujours tenir compte des préjugés qui existent encore contre le socialisme à cause des crimes du stalinisme.
Bien qu’il ne soit pas à nous de créer des illusions dans la démocratie bourgeoise, s’allier à des dictateurs qui prétendent être "anti-impérialistes" est une trahison des intérêts de la classe ouvrière. Il n’est pas surprenant non plus qu’Ortega, après sa trahison ignominieuse envers la révolution nicaraguayenne (et ayant reçu des aides économiques de la Libye) ait déclaré son intention de supporter Kadhafi jusqu’a la fin dans la "grande lutte" que celui-ci mène pour son pays. Fidel Castro a quant à lui conseillé dans son article de ne pas juger Kadhafi trop vite et a suggéré que les États-Unis pourraient envahir la Libye d’un moment à l’autre. Une telle déclaration fait preuve d’une sorte de pragmatisme étranger à un vrai socialiste révolutionnaire. Ceci n’est en rien surprenant si on se souvient du silence de Castro lors du massacre de Tlatelolco en 1968 et des autres mouvements de masses de cette même année, sans parler de la ligne stalinienne prise envers les événements de Prague cette même année.
Bien que la survie du régime de Kadhafi est aujourd’hui fortement mise en doute, la situation en Libye reste encore très incertaine et plus difficile à analyser que les développements dans les pays voisins comme la Tunisie ou l’Égypte, faute de journalistes sur place. Le rôle que la classe ouvrière y jouera est impossible à prévoir. Apparemment, l’activité économique est largement paralysée à Tripolis mais non pas par des grèves mais par le fait que la majorité des personnes qui y vivent craint de sortir de leur maison. Dans l’Est du pays, des comités ont apparemment fait leur apparition pour y gérer la situation, mais nul indication n’existe sur la composition de ceux-ci.
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Tunisie, Égypte,… Quelles perspectives et quel programme pour les masses?
Lors de la discussion sur les perspectives internationales du Comité National du PSL-LSP qui s’est tenu ce weekend, un bonne part des interventions ont eu trait au processus actuellement à l’oeuvre dans le Moyen-Orient et au Maghreb. Le texte suivant reprend quelques uns des éléments qui ont été mis en avant, mais la discussion a été plus large et comprenait aussi des aspects historiques (Nasser, la crise du canal de Suez, le pan-arabisme,…) ou encore la situation au Yémen et en Algérie, thèmes sur lesquels nous reviendrons.
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A lire aussi- Révolution en Tunisie, en Egypte,… Rubrique spéciale de socialisme.be
- Egypte : “Nous ne partirons pas tant qu’il ne partira pas!” – Témoignage de la place Tahrir au Caire (3 février)
- Egypte : Le régime de Mubarak ébranlé par les plus fortes manifestations depuis 30 années (27 janvier)
- Article d’Al Jazeera (en anglais) avec entre autres Tony Saunois, du Comité pour une Internationale Ouvrière (2 février)
- La première phase de la révolution a réussi à virer Ben Ali ! Il faut continuer ! (24 janvier)
- Les tâches urgentes de la révolution tunisienne (17 janvier)
- Maghreb : La révolte Tunisienne s’étend en Algérie – Solidarité avec les masses Tunisiennes et Algériennes ! (14 janvier)
- Révolte sans précédent en Tunisie (11 janvier)
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Des mouvements qui ne tombent pas du ciel
Dans le document du 10e Congrès Mondial du CIO consacré au Moyen Orient et à l’Afrique du Nord, il était dit ”tous les despotes et les régimes autoritaires de la région ont peur de mouvements de révolte de masse. Des mouvements en Iran ou en Egypte sont possibles, qui peuvent alors en inspirer d’autres. Si la classe ouvrière n’en prend pas la direction, ces mouvements peuvent prendre des directions très différentes.”
Le mouvement en Tunisie a constitué une source d’inspiration pour toute la région: le Yémen, la Syrie, la Jordanie, l’Algérie,… Ces actions ne tombent pas du ciel, elles sont le résultat d’un cocktail explosif fait d’un chômage énorme, d’une très large pauvreté très large (en Égypte, 40% de la population vit avec moins de deux dollars par jour), d’une politique répressive de la part de régimes autoritaires, mais aussi des traditions de lutte dans la région.
Dans cette région aussi, la crise capitaliste a suivi une politique néolibérale très dure. Entre 2004 et 2009, l’Égypte a attiré 42 milliards de dollars d’investissements extérieurs, investissements obtenus avec la promesse qu’il n’y aurait pas de taxes sur les profits. Une partie du secteur bancaire a été privatisée pour des entreprises d’autres pays et les principaux actionnaires des banques viennent d’Italie ou de Grèce. La Bourse égyptienne, entre 2004 et 2009, s’est développée en étant multipliée par douze.
La crise s’est développée depuis 2009, avec la chute du prix du pétrole et une diminution des investissements, mais l’Égypte est une des places dans le monde où même avec cela, l’économie a continué à croître. Mais cette poursuite de la croissance économique, la population ne l’a pas plus ressentie qu’avant. Différents mouvements avaient déjà eu lieu ces dernières années et qui exprimaient cela.
Entre 2004 et 2008, 194 grèves s’étaient développées chaque année en Egypte, surtout dans les centres textiles et à Suez. Entre 1992 et 2010, le gouvernement a mené sa politique de privatisation, et c’est dans cette période que ceux qui ont moins de deux dollars par jour sont passé de 20 à 44%. 66% de la population a moins de 25 ans, le poids de la jeunesse est extraordinaire et, parmi les chômeurs, 90% a moins de 25 ans. Cela illustre encore une fois que le mouvement ne tombe pas du ciel. Entre 2008 et 2010 il y a eu 1600 grèves chaque année, soit trois fois plus que durant la période précédente.
Différentes multinationales sont présentes en Égypte, comme la multinationale française Lafarge (construction). L’Égypte représente pas moins de 10°% de ses profits. Mais on trouve aussi des entreprises Solvay, Unilever, la Société Générale, Heineken,… En Tunisie, quelques 2.500 multinationales sont présentes, dont plus d’un millier de françaises qui engagent 110.000 travailleurs. Les 146 entreprises belges emploient 20.000 travailleurs.
Ce mouvement n’est pas uniquement basé sur des revendications démocratiques, c’est aussi une expression de la crise mondiale et du fait que toute une génération de jeunes n’a aucune perspective pour l’avenir. La crise capitaliste a brisé chaque espoir d’un meilleur avenir, cette illusion était présente et a été réduite à néant.
On peut parler de mouvements révolutionnaires dans la région, avec une majorité de la population participant activement au mouvement dans l’intention de changer le statuquo en leur faveur et pour retirer la gestion de la société hors des mains de l’élite et des classes dirigeantes. Les manifestations sont massives et très populaires, avec beaucoup de travailleurs, des pauvres mais aussi des couches moyennes. Les appels initiaux ont été diffusés par des nouveaux médias, c’est une bonne manière de les utiliser. Mais il serait exagéré de dire que c’est une révolution Facebook. Ainsi, seulement 6% de la population égyptienne est sur Facebook.
Dans les débats autour de ces évènements, il y a beaucoup de comparaisons avec les mouvements révolutionnaires du passé, comme les Révolutions colorées de la décennie précédente. Des explosions de colère ont ressemblé à cela, mais le mouvement actuel est bien plus profond. La conscience des masses est plus élevée et la conscience des classe est présente, c’est plus difficile à récupérer pour la bourgeoisie. On mentionne aussi la Révolution iranienne de 79, mais il est clair qu’il y a beaucoup de différences avec cela. On parle encore de la chute du stalinisme en 89-91. En fait, toutes les comparaisons ont leurs limites, et chaque révolution a ses propres éléments et sa propre dynamique.
En Tunisie, le mouvement est rapidement parvenu à une première victoire. D’autres régimes tirent la conclusion que faire des concessions est dangereux, cela peut renforcer le mouvement. Chaque concession de Ben Ali a renforcé la confiance des masses, chaque concession a illustré le pouvoir du mouvement. La fuite de Ben Ali n’a ainsi pas stoppé le mouvement, ni la recomposition du gouvernement, ni la démission des ministres de l’UGTT. Les mobilisations continuent, avec toutefois un caractère différent.
Différents secteurs connaissent des grèves. On essaye là aussi de stopper les protestations avec des concessions: les éboueurs ont reçu une augmentation de salaire de 60%. Des programmes sociaux ont été introduits par le gouvernement. Le régime tunisien a implosé, et cela a constitué un catalyseur pour le développement du mouvement en Égypte.
L’Egypte
L’Égypte diffère de la Tunisie au niveau économique (avec le canal de Suez) et politique. C’est aussi la population la plus grande de la région. L’Égypte est un des piliers les plus importants de l’impérialisme américain. Une de ces facettes est la relation avec Israël, un des alliés les plus farouches de Moubarak à l’heure actuelle. Le régime israélien a appelé Moubarak à utiliser la violence contre le mouvement. Le soucis de la classe dirigeante israélienne, c’est l’impact que cela aurait sur les masses palestiniennes. Il y a le problème du blocus de Gaza, auquel le régime de Moubarak collabore. Cette politique est très impopulaire en Égypte même, et ce qui se passerait avec un changement de régime n’est pas clair.
Depuis mercredi, il est clair que le mouvement révolutionnaire en Égypte est compliqué. Jusque mardi, c’était plutôt joyeux. Mardi, il y avait plus d’un million de manifestants au Caire. La façon dont les choses s’étaient déroulées en Tunisie avait créé des illusions sur la facilité de renverser un régime. Mais depuis mercredi, le régime a utilisé les forces de la contre-révolution. La base sociale pour cela, c’est le sous-prolétariat du Caire, mais aussi les fonctionnaires du régime qui ont beaucoup à perdre. On peut faire la comparaison avec la manière dont le régime tsariste s’est opposé à la révolution de 1905 en Russie. Le mouvement sera-t-il assez fort pour aller contre le pouvoir? Les manifestations de vendredi ont confirmé que le mouvement est encore en train de croître et n’a pas perdu de ses forces, mais le potentiel n’est pas utilisé: pas de marche vers le palais présidentiel par exemple. C’était le ”jour du départ”, mais peu a été fait pour que Moubarak dégage vraiment.
Pour arriver à une défaite fondamentale du régime, la classe ouvrière doit intervenir en tant que classe. Comme en Tunisie, il y a des liens très forts entre les directions syndicales et le régime. Tous les dirigeants sont membres du parti de Moubarak. Le régime exerce un contrôle sur la fédération syndicale. C’est vrai, mais dans les dernières luttes, des militants de base se sont opposés aux directions syndicales. Le syndicat des contrôleurs de taxes a même quitté la fédération syndicale pour rejoindre une nouvelle structure syndicale qui défend le salaire minimum, la sécurité sociale,… C’est difficile d’avoir énormément de précisions, mais ce nouveau syndicat est impliqué dans les comités de quartier.
Le mouvement doit partir à l’offensive pour éviter que le régime et les Etats-Unis n’organisent une transition favorable aux capitalistes. Les revendications sociales doivent être centrales dans le mouvement afin d’également mobiliser les couches les plus passives.
Les Frères Musulmans ont hésité avant de s’impliquer. Mais en même temps, des rapports disent que parmi ceux qui ont défendu la place du Caire, il y avait beaucoup de Frères Musulmans. Les cadres étaient contre tout soutien au mouvement, ce sont les jeunes qui ont fait pression, ce sont ces jeunes qui, mercredi dernier, participaient à la défense des manifestants contre la contre-révolution. Un scénario ”à l’iranienne” est peu probable, mais il est possible que les Frères remplissent le vide politique. Quelque soit le régime qui succèdera à Moubarak, il ne pourra toutefois pas collaborer avec Israël de la même manière. En Palestine, tant le Hamas que le Fatah sont contre le soutien au mouvement, ils voient les dangers pour leur propre position. Tout changement de régime en Égypte modifie en fait radicalement les choses au niveau du moyen-orient.
Les Frères Musulmans peuvent jouer un rôle, mais ce n’est pas vraiment le cas aujourd’hui. La direction de Frères dit que leur modèle est plutôt celui de l’AKP d’Erdogan en Turquie et pas le modèle iranien. Ce n’est bien entendu que ce qu’ils disent, mais c’est aussi possible que cela soit une réflexion de ce qu’ils constatent: dans la rue, l’idée d’une société islamiste ne vit pas. Bien entendu, ils savent que s’ils rentrent dans le vide politique existant, ils vont se trouver dans une situation très compliquée, et c’est la raison pour la quelle eux aussi mettent en avant El Baradei pour qu’il négocie avec le régime.
L’armée tente de gagner du temps pour, avec les USA, sauver l’élite et leur propre position dans la société égyptienne. Mercredi, pour beaucoup de manifestants, c’était clair que l’armée avait laissé l’espace pour ceux qui soutenaient le régime. Le chaos peut aider l’armée et cela peut renforcer parmi la population l’idée d’un appel à l’ordre. Mais l’armée n’est pas quelque chose d’homogène. Il y a eu des fraternisations entre soldats et manifestants en certains endroits. Pour les manifestants, il est crucial d’avoir une approche envers les simples soldats pour les détacher de la hiérarchie.
Extension internationale
Un des éléments important dans cette vague de révolte et de révolution, c’est la dispersion internationale. C’est un élément important, mais loin d’être neuf. A l’époque de Nasser, lors de la crise du canal de Suez en 1956, ce dernier avait mis en avant une grève générale dans toute la région, appel qui a joué un grand rôle dans la défaite de l’impérialisme. Mais le nationalisme arabe de Nasser a eu ses limites. Khadafi aujourd’hui est un des derniers représentants de cette époque du nationalisme arabe, qui a eu de grandes répercussions dans la région.
Le développement de cette situation en Égypte a des incidences ailleurs. En Chine, ils essayent d’étouffer les évènements. Les médias ne parlent que de hooligans qui viennent tout casser au Caire. Le régime craint la propagation des protestations, et d’autres aussi, l’Iran par exemple. Khamenei, l’actuel Guide Suprême, a essayé de félicité le ”mouvement pour la libération musulmane” et, comme le Tea Party aux USA, le régime affirme que le mouvement ne vise qu’à instaurer un régime islamiste. De tels mouvements peuvent se développer dans d’autres régions, et un des éléments clé est le prix de l’alimentation. L’agence alimentaire américaine a publié un rapport sur l’insécurité alimentaire qui disait que les gens ont trois options: se révolter, migrer ou mourir. Il y a une grande possibilité qu’une grande révolte se développe sur ce thème.
L’impérialisme ébranlé
Personne n’a vu venir le mouvement en Tunisie. En un mois seulement, Ben Ali a tout perdu. L’énorme vitesse à laquelle le régime a été poussé dans la défensive, la vitesse à laquelle l’armée a été séparée de Ben Ali, la formation rapide des comités qui ont notamment jeté leurs patrons, tout cela est phénoménal. Entretemps, le régime cherche à voir comment canaliser la situation de double pouvoir qui existe. Le problème pour la bourgeoisie et l’impérialisme en Tunisie, c’est qu’ils n’ont pas quelqu’un comme El Baradei ou Amr Moussa, le président de la ligue arabe, qui est égyptien. Les USA continuent à miser sur le premier ministre, mais nous devons voir comment les relations de force vont se développer.
Blair a parlé de Moubarak comme de quelqu’un de très courageux et une force œuvrant pour le bien et Obama, moins directement toutefois, est sur une position similaire. Pour donner une idée du rôle crucial de l’Égypte pour USA: depuis 1979, le pays reçoit 1,3 milliard de dollars de soutien militaire par an de la part des USA. C’est plus ou moins le même montant que ce que les USA donnent au Pakistan et à Israël. L’armée égyptienne est la 10e au niveau mondial, et elle joue un rôle crucial pour défendre les intérêts de l’impérialisme dans la région.
L’impérialisme recherche des figures capables de restaurer la stabilité, mais c’est dans la rue que le résultat du mouvement va se jouer.
Le double pouvoir et le rôle d’une direction révolutionnaire
On peut conclure que le mouvement a jusqu’ici été très spontané et sans véritable organisation, mais on voit aussi un développement important de l’auto-organisation, comme avec la manière dont la sécurité a été organisée place Tahir, très impressionnante, de même que la façon dont des comités de quartier ont été instaurés en Tunisie ou en Égypte pour défendre les quartiers contre les pillages. Des comité sont lancés dans les entreprises aussi, et tout cela peut être la base pour développer un gouvernement des travailleurs et des petits paysans.
Un processus révolutionnaire ne se développe pas de façon linéaire. En Tunisie, on assiste à un reflux du mouvement, malgré le développement d’une grève dans les métros à la suite de la victoire obtenue par les éboueurs par exemple. Cela contraste tout de même fortement avec la grève générale contre le régime et les protestations des semaines précédentes.
Cette période était en fait déterminée par les premiers éléments d’une situation de double pouvoir où les comités de vigilance et les comités de quartier se développaient face au pouvoir du régime. Le danger du vol de la révolution tunisienne avec la complicité des institutions internationales est réel. La direction de l’UGTT soutient le gouvernement de Ghannouchi composé de patrons issus de l’étranger. Il faut réclamer un Congrès Extraordinaire de l’UGTT basé sur l’élection de représentants de la base afin de changer de direction syndicale.
Mais il manque aussi une direction révolutionnaire. Le danger le plus grand est constitué par cette absence de direction qui laisse l’espace pour des figures bourgeoises. Il y a des mouvements comme dans les syndicats, qui sont importants et qui rendent très très difficile pour le régime de pouvoir revenir à la précédente situation, tant en Egypte qu’en Tunisie. Le résultat du mouvement sera décidé par l’organisation des masses: il faut renforcer les comités de base et les pousser à l’offensive contre le gouvernement.
Le limogeage des PDG dans les entreprises en Tunisie et les barrages de travailleurs refusant que les anciens directeurs reviennent posent directement cette question: qui prend la direction des usines? Le gouvernement ? Les travailleurs ? D’autres capitalistes ? Nous devons considérer le développement de comités dans les entreprises, les écoles,… comme la base de la future société socialiste. Il ne suffit pas de s’opposer à la politique libérale, aborder la question du contrôle ouvrier est un point crucial dans le développement du mouvement aujourd’hui.
Il ne suffit pas de réclamer la dissolution du RCD (le parti de ben Ali), la liberté d’expression et syndicale,… Saluer le développement des comités de base est très bien, mais il faut surtout amener la question de la prise du pouvoir par ces comités, les élargir et appeler à une Assemblée Constituante Révolutionnaire sur base de délégués démocratiquement élus dans les comités de base. Contre des mots d’ordre vagues de formation d’un gouvernement intérimaire qui jouisse de la confiance du peuple, il faut pousser la nécessité d’une démocratie des travailleurs basée sur les comités de base et les travailleurs.
Concernant la police, réclamer une police basée sur la supériorité de la loi et les droits de l’homme est illusoire et totalement insuffisant à l’heure où l’on voit des bandes contre-révolutionnaires attaquer physiquement les locaux syndicaux, les militants,… La défense du mouvement doit être basée sur l’extension des comités, et cela vaut aussi pour la justice, etc. Ces comités doivent aussi être étendus à l’armée pour organiser les soldats qui ont fraternisé avec la révolution. Cela doit être la base pour fractionner l’appareil d’État. La direction de l’armée a lâché Ben Ali, mais ne veut pas que le mouvement aille plus loin.
Enfin, concernant notre travail militant, nous devons accorder une grande attention aux sensibilités qui existent vis-à-vis de la question nationale. Il n’est pas question de crier à la révolution du ”monde arabe”, la question est beaucoup plus vaste. Les berbères, par exemple, ne sont pas arabes et sont opprimés au Maroc et ailleurs. On trouve également des berbères en Algérie, en Libye, en Tunisie et en Egypte. Ce terme de ”monde arabe” exclut aussi l’Iran, et l’on se rappelle encore des puissants mouvements de 2009.
On ne peut jamais prédire comment les choses vont se développer, mais ces mouvements confirment la confiance que le Comité pour une Internationale Ouvrière et ses sections, comme le PSL-LSP en Belgique, a toujours eu envers les capacités des masses pour se battre en faveur de leurs conditions de vie. Une fois ces mouvements initiés, cela a conduit à une détermination très profonde. Ces mouvements ont même confirmé les méthodes traditionnelles de la classe ouvrière, même initiés de façon spontanée par les masses.
Bien entendu, c’est aussi la confirmation gigantesque de la nécessité d’une organisation révolutionnaire capable de garantir que l’énergie d’un tel mouvement soit utilisée pour aller vers une une société orientée vers la satisfaction des intérêts des masses, c’est-à-dire une société où les secteurs clés de l’économie sont retirés de la soif de profit du privé pour être démocratiquement planifiés, une société socialiste.