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Tag: Israël/Palestine
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Massacre à Gaza : pour une lutte de masse pour la levée du blocus !

Déclaration du secrétariat du Mouvement de lutte socialiste, Israël-Palestine (Première publication en hébreu le 16 mai 2018)
Alors qu’à Jérusalem, une cérémonie messianique prenait place pour l’inauguration de l’ambassade américaine, ce même jour du transfert de l’ambassade américaine fut le plus meurtrier dans la bande de Gaza depuis la guerre de 2014. Le gouvernement Netanyahu, main dans la main avec une odieuse campagne de provocation, a envoyé l’armée pour noyer dans le sang la protestation de masse des habitants de Gaza qui subissent depuis plus d’une décennie un siège brutal.
Une soixantaine de manifestants ont été abattus durant cette journée seule, ce qui s’ajoute aux dizaines de personnes tuées lors des manifestations de ces dernières semaines. Parmi les victimes se trouvaient des jeunes de 14 à 16 ans et un bébé de huit mois mort après une exposition massive aux gaz lacrymogènes.
Le massacre des manifestants – au service de la perpétuation du siège et de l’oppression des travailleurs palestiniens et des pauvres – n’a pas empêché Netanyahu de déclarer que c’est “un grand jour pour la paix” !
La provocation du transfert de l’ambassade américaine de Tel-Aviv à Jérusalem montre la manière dont l’administration Trump continue à piétiner les droits des Palestiniens, y compris leur propre État et leur capitale, Jérusalem, des droits que l’ambassadeur américain en Israël, David Friedman, de droite dure, nie explicitement. La même administration, qui a apporté son plein soutien au massacre, continuera à réciter des slogans cyniques sur la paix et à promouvoir le “Deal du siècle”, basé sur un soutien continu à l’occupation israélienne et le déni des droits des Palestiniens.
Comme si l’augmentation de la puissance du conflit n’était pas “suffisante”, le retrait des États-Unis de l’accord nucléaire iranien augmente encore les tensions nationales dans la région, et ses conséquences peuvent être très destructrices, avec en ce compris un réel danger de guerre.
La protestation n’est pas du terrorisme !
Contrairement à la propagande de l’establishment israélien qui a favorisé l’hystérie sécuritaire et qualifié le mouvement de protestation “d’incident terroriste”, le Mouvement de Lutte Socialiste (organisation israélo-palestinienne du CIO, dont le PSL est la section belge) a clairement indiqué au cours des dernières semaines qu’il s’agit d’une protestation civile juste et importante qui devrait également recevoir la solidarité des travailleurs et des jeunes Israéliens.
La Confédération syndicale internationale (ITUC) a condamné les assassinats et blessures infligées aux manifestants par le gouvernement Netanyahu, ainsi que le transfert de l’ambassade orchestré par son ami Trump. C’est la responsabilité des responsables des organisations des travailleurs en Israël d’adopter ce type de position afin de participer à la recherche d’une solution pour les travailleurs des deux côtés de la division nationale.
Le rassemblement pour la “Grande Marche du Retour” est, à ce jour, la plus importante protestation contre le blocus de Gaza. La mobilisation de dizaines de milliers de manifestants dans une lutte pour leur vie est une source d’espoir. Le jour du transfert de l’ambassade, la bande de Gaza a été fermée et quelque 50 000 manifestants ont été signalés – un chiffre qui équivaut à des manifestations d’environ 200 000 personnes en Israël, selon la taille de la population.
Des semaines de manifestations avec des milliers et des dizaines de milliers de personnes n’ont fait aucun blessé ou mort en Israël, contre environ 110 Palestiniens tués et quelque 10 000 blessés dans la bande de Gaza, la plupart du temps par balles réelles. Ces chiffres suffisent à eux seuls à ridiculiser la rhétorique de l’establishment israélien qui parle de la “violence” et du danger présumé que représentent ces manifestations. Ils illustrent qui est réellement confronté à la violence, large et organisée ; c’est une guerre unilatérale contre les manifestants qui comprend des tirs précis de tireurs d’élite sur les manifestants et le recours à des chars d’assaut.
Les actions désespérées d’individus ou de groupes, comme le nombre d’incendies criminels par des “cerfs-volants incendiaires” ou l’endommagement des conduites de gaz à l’entrée de la bande de Gaza, ont causé des dommages mineurs, mais ils sont avant tout le résultat de la terrible détresse forcée quotidiennement avec une brutalité arrogante par le gouvernement capitaliste israélien.
L’activité du Hamas ?
En raison du blocus, les habitants de la bande de Gaza sont confrontés à seulement quatre heures d’électricité par jour, à un manque d’eau potable, à l’effondrement des infrastructures, au taux de chômage le plus élevé du monde, à de sévères restrictions de leurs libertés de mouvement, aux manques de traitements médicaux et à des tirs sur les pêcheurs, les agriculteurs et les manifestants. Dans ce contexte, on a même signalé une augmentation du nombre de suicides.
Oui, les dirigeants de droite du Hamas et de l’Autorité palestinienne contribuent à aggraver la situation, chacun à sa manière, mais le contrôle principal de la bande de Gaza reste entre les mains de la droite israélienne. Le gouvernement israélien, en coopération avec son homologue égyptien, applique un blocus en guise de politique punitive collective à l’encontre d’environ deux millions de personnes, dont la moitié a moins de 18 ans, accompagné d’une tentative longue et infructueuse de forcer un changement de direction politique.
L’establishment israélien saute, comme s’il trouvait un gros butin, sur l’affirmation du Hamas selon laquelle parmi les tués ces dernières semaines, 50 personnes seraient issues de ses rangs ; comme si l’affiliation politique des victimes changeait quelque chose au fait qu’il s’agissait de manifestants non armés, ne mettant personne en danger et qui ont été abattus avec des balles réelles. De même, l’affirmation des militaires selon laquelle 24 de ceux tués le 14 mai auraient été listés comme “ayant des antécédents terroristes” ou comme “activités terroristes hostiles” est totalement hors de propos. Ce sont des excuses démagogiques : l’armée a tiré sans distinction liée à l’identité politique ou au passé des blessés et des morts.
Il convient de noter que s’il semble que le Hamas ait été impliqué et – dans une certaine mesure – ai pu influencer les manifestations, non seulement les manifestations elles-mêmes étaient parfaitement justifiées, mais elles ont également été largement soutenues par la population de Gaza qui s’est mobilisée en masse, tous courants politiques confondus, en ce compris les résidents non affiliés politiquement.
Il existe aussi des voix critiques parmi les militants protestataires sur le rôle joué par le Hamas. Le Hamas lui-même n’a pas du tout tendance à offrir une voie de lutte de masse ; il a, par contre, certainement essayé d’exploiter le développement de la protestation pour tenter de récupérer la sympathie publique qu’il a perdue en raison de son incapacité à offrir une stratégie efficace pour sortir la bande de Gaza de la crise. Les habitants de Gaza, et eux seuls, devraient avoir le droit de choisir démocratiquement leurs dirigeants et la possibilité de les remplacer lorsqu’ils ont échoué et qui ne servent pas leurs intérêts.
Le gouvernement Netanyahu préfère une confrontation militaire
La véritable menace posée par la protestation n’était pas “l’extermination d’Israël”, comme l’a insinué Netanyahu – il sait lui-même combien cet argument est ridicule au vu de l’équilibre des forces entre d’un côté des milliers de manifestants et de l’autre la plus grande force militaire du Moyen-Orient. La véritable menace pour l’establishment israélien c’est l’audace héroïque des masses de Palestiniens – femmes et hommes, jeunes et vieux – en lutte contre l’intolérable régime oppression et qui les maintient dans la pauvreté et pour d’exiger des changements.
Dans le cadre de la propagande du régime, il y a un recyclage de l’affirmation selon laquelle les tentatives des manifestants de percer l’immense clôture de leur prison justifie pratiquement leur exécution, pas des moyens de dispersion de la manifestation ou des arrestations, mais des exécutions pures et simples. Cette revendication s’inscrit dans la droite ligne du régime de droite israélienne de continuer à imposer un siège aux pauvres de la bande de Gaza par tous les moyens nécessaires, y compris les assassinats.
Les socialistes rejettent catégoriquement un tel amalgame avec les actions du gouvernement capitaliste et soutiennent le droit des habitants de la bande de Gaza à protester, à lutter, à s’organiser et à se défendre contre les agressions militaires. Si de l’aile droite ne veut pas voir les masses percer les clôtures du siège, personne ne l’empêche de lever le blocus et de permettre la liberté de mouvement des résidents et des marchandises d’une manière organisée à travers les points de passage.
La véritable menace, que le gouvernement Netanyahu s’est efforcé de contrecarrer par une répression meurtrière, était l’expansion d’une lutte populaire de masse. Cela aurait pu forcer le régime de droite israélienne à se retirer de la politique de siège et cela aurait montrer la voie aux Palestiniens en général vers la construction d’une lutte efficace pour changer la situation sur le terrain. Il faut espérer qu’en dépit de la répression barbare des manifestants dans la bande de Gaza, la manifestation parviendra à se renouveler par la base à grande échelle avec la demande de changement.
Cependant, le gouvernement Netanyahu préfère une série de confrontations militaires avec le Hamas à une protestation populaire de masse. Il a ainsi envoyé des avions de combat pour bombarder dans la bande de Gaza en réponse à plusieurs tentatives des manifestants de percer la clôture de la plus grande prison du monde, et a menacé de renouveler la politique d’assassinats contre les dirigeants du Hamas. Dans ses actions pour protéger le siège et l’occupation, le régime de Netanyahu augmente le danger d’une nouvelle guerre sanglante.
Le gouvernement de droite continue également à rejeter les propositions répétées de désescalade du conflit et de réhabilitation de la bande de Gaza. De telles demandes sont sur la table depuis des années et auraient pu empêcher les horribles épisodes de guerre qui ont semé le deuil et la destruction à une échelle monstrueuse dans la bande de Gaza, et qui ont également conduit à des tirs de roquettes et des attaques contre des civils israéliens.
Le Mouvement de Lutte Socialiste continue d’avertir que la menace numéro un pour la sécurité des travailleurs israéliens est le gouvernement pro-capitaliste et colonie de Netanyahu, et son programme nationaliste et messianique de destruction, avec la coopération des imitateurs de Netanyahu – Lapid et Gabbai – sur les bancs de “l’opposition”.
Face à ce danger, une lutte devrait être construite des deux côtés de la fracture nationale et une alternative de changement socialiste devrait être proposée afin d’offrir une porte de sortie au travers du chemin de destruction conduit par Netanyahu, Trump et leurs partenaires.
Le Mouvement de Lutte Socialiste revendique :
- La fin des tirs sur les manifestants ! Stop à la politique de la gâchette ! Manifester n’est pas du terrorisme !
- La création d’une commission d’enquête indépendante – comprenant des représentants israéliens, palestiniens et internationaux d’organisations indépendantes des travailleurs, de la société civile et des droits de l’homme – pour enquêter sur l’assassinat des manifestants. Poursuivre la chaîne des responsables, y compris à l’échelon politique.
- L’adhésion des organisations ouvrières en Israël aux organisations ouvrières du monde entier en condamnant l’assassinat de manifestants et la poursuite du blocus et de l’occupation, et en soutenant la lutte pour la paix.
- Solidarité avec la protestation des habitants de Gaza. Oui aux manifestations conjointes des Juifs et des Arabes, des Israéliens et des Palestiniens, contre le siège, l’occupation, la pauvreté, les inégalités et le gouvernement Netanyahu pro- capital et pro-colonies. Oui à la lutte pour la paix et la justice sociale !
- Oui à l’expansion de la protestation populaire, oui à la lutte de masse des Palestiniens pour la libération nationale et sociale. Pour la mise en place de comités d’action démocratique pour aider à organiser des manifestations et à défendre les manifestations.
- Stop aux politiques de soi-disant “Gestion des conflits”. Stop blocus contre les habitants de la bande de Gaza, stop à l’occupation. Stop à l’imposition de la pauvreté et de la détresse et aux dépossessions. Pour la fin de l’oppression nationale du peuple palestinien.
- Mettre fin à la négation du droit à l’autodétermination – oui à un État palestinien indépendant, démocratique, socialiste et égal, avec sa capitale à Jérusalem-Est, aux côtés d’un Israélien démocratique et socialiste qui assurera une véritable égalité des droits pour tous.
- Pour une solution juste pour les réfugiés palestiniens. La reconnaissance de l’injustice historique de la Nakba – la destruction de centaines de communautés et le déracinement de centaines de milliers de personnes – et la reconnaissance du droit des réfugiés qui le souhaitent à rentrer chez eux, tout en assurant une vie décente et l’égalité pour tous les résidents.
- Une lutte pour la paix régionale. Solidarité avec les luttes au Moyen-Orient et dans le reste du monde contre les élites corrompues, l’oppression et la pauvreté. Oui à l’égalité pour toutes les nationalités, à la démocratie et au changement socialiste.
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Gaza : « Plus ils nous tuent, plus la colère augmente »
Entretien avec un militant de GazaCes dernière semaines, la bande de Gaza a connu une des vagues de contestation les plus importantes jamais vue de la part de Palestiniens contre le siège brutal qui leur est imposé par le régime israélien en collaboration avec l’Égypte, et qui force la population à vivre dans des conditions épouvantables.
Entretien accordé au journal “The Socialist”, journal du Socialist party (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Angleterre et au Pays de Galles)
Ces actions, qui ont rassemblé des milliers de gens semaine après semaine, ont subi une répression extrêmement sanglante de la part du gouvernement israélien. Au moment où nous écrivons cet article, plus de 100 manifestants ont été tués et plus de 10.000 ont été gravement blessés par le gouvernement capitaliste israélien, prêt à tout pour empêcher l’émergence d’un mouvement de masse.
Le Mouvement de lutte socialiste (section du CIO en ISraël-Palestine) est en entière solidarité avec ce mouvement. Nos camarades ont parlé avec un jeune militant palestinien, Ahmed a-Na’ouq, 24 ans, originaire de Deir el-Balah dans la bande de Gaza. Il nous a raconté l’impact de la répression ultraviolente, des conditions de vie atroces et du mouvement de contestation.
Ahmed nous a décrit la scène de l’une des premières actions : “C’était horrible. J’ai vu des manifestants se faire tuer pendant qu’on les amenait aux ambulances. Les Israéliens étaient fortifiés derrière une colline de sable. Grâce à un générateur, nous avions du courant ce soir-là. La plupart du temps, il n’y a aucun approvisionnement en électricité. Plus ils nous tuent, plus la colère augmente. Imaginons, par exemple, que l’armée israélienne ait tué mon frère, je n’aurai plus peur. Je ne pourrai plus rester à la maison. Et… l’armée israélienne a tué mon frère dans la dernière guerre.”
Plus de 2000 habitants de Gaza sont morts dans la guerre de 2014, dont le grand frère d’Ahmed et plusieurs de ses amis. Lui-même n’a jamais quitté Gaza de sa vie. “Mon plus grand rêve est de voyager. Je ne suis jamais sorti de Gaza de ma vie. Ça me détruit vraiment.”
Les actions des habitants de ces dernières semaines sont les plus importantes jamais organisées contre le siège. Près de 40.000 personnes étaient là le premier jour. Malgré la lourde répression, le mouvement s’est poursuivi. 50.000 personnes étaient encore mobilisées le 14 mai.
Ce mouvement, appelé la « Grande Marche du retour », était censé culminer le 15 mai, qui est le 70e anniversaire de la « Nakba » palestinienne, le jour où 800.000 habitants ont été déguerpis de leurs maisons et de leurs terres pour faire de la place à Israël nouvellement créé. Depuis ce jour, ils ne sont plus rentrés chez eux. 70 % de la population de Gaza sont des familles de réfugiés de 1948. La grand-mère d’Ahmed est une réfugiée de Beer-Sheva.
Ahmed nous explique : « Nous ne protestons pas dans l’idée que cette seule action nous permettra de récupérer nos terres. L’objectif est de rappeler au reste du monde que c’est notre droit de rentrer chez nous. Cette action est exclusive aux gens de la bande de Gaza. Personne ne manifeste en ce moment en Cisjordanie ou au Liban. Mais à notre niveau, les conditions ne font qu’empirer. Il n’y a plus d’eau du tout. Même la mer, qui est la seule source de rafraichissement en été, est entièrement polluée, parce que nous n’avons plus d’électricité pour faire fonctionner les stations de traitement des eaux usées. »
De nombreux bâtiments sont toujours en ruine depuis la guerre de 2014. Le taux de chômage à Gaza est un des plus élevés du monde, officiellement de 40 %, voire 60 % chez les jeunes de moins de 30 ans. Les médias font état d’une hausse du nombre de suicides ces deux dernières années. Le salaire moyen est d’à peine 13 € par jour.
« Toutes les sources de revenus sont en train d’être coupées. L’Autorité palestinienne nous enfonce encore plus d’ailleurs, en coupant les salaires de ses employés à Gaza – un revenu dont beaucoup de gens dépendent. Même les employés du Hamas ne reçoivent pas de salaire complet. Aussi, depuis que Trump a annoncé le retrait des États-Unis de leur financement, l’Agence des Nations unies pour les réfugiés palestiniens et les autres ONG sont en crise. Cela a provoqué la disparition de nombreux services de base à la population. L’État israélien a lui aussi cessé les transferts budgétaires. Les quelques employés d’ONG qui ont la chance d’être encore payés ne touchent plus que la moitié ou le tiers de leur salaire ».
Une réalité catastrophique
La crise que connaissent les ONG à Gaza a été décrite dans un article publié le mois passé par Ahmed, qui lui-même est coordinateur du projet « Nous ne sommes pas des numéros », qui publie le récit de la vie des jeunes Palestiniens dans cette zone fermée. La moitié de la population a moins de 18 ans – soit un million de gens.
Toute une génération est née et a grandi dans cette réalité catastrophique. Ce sont ces jeunes gens qui sont à l’avant-plan du mouvement de contestation.
« La première manifestation à laquelle je suis parti était celle du deuxième jour, le 31 mars. Des milliers de gens y étaient. Ce qui m’a tout d’abord impressionné était l’atmosphère positive, les gens qui agitaient des drapeaux et qui criaient des slogans pour la liberté. Ils étaient loin de la clôture, peut-être à 800 mètres, vers la première rangée de maisons. Mais ceux qui s’étaient rapprochés de la clôture, étaient les plus en colère ; ce sont eux que les soldats israéliens ont abattu ».
La propagande du gouvernement israélien cherche évidemment à décrire ces manifestants comme les véritables auteurs des violences. « Mais qui est réellement victime de la violence dans ce combat inégal ? La presse officielle israélienne n’est qu’un outil au service du régime pour créer une hystérie sécuritaire. Elle met en avant les dégâts infligés aux cultures par les « cerfs-volants Molotov », tout en fermant les yeux sur la violence extrême exercée 24 h sur 24 sur les habitants de Gaza. Le comité d’organisation des manifestations a bien insisté sur le fait qu’il ne recherche pas de confrontation directe avec l’armée ».
Ahmed remarque que, face au mouvement qui regroupe de nombreux « jeunes en colère, dépourvu de toute possibilité de mener une vie normale », l’armée israélienne utilise des armes mortelles, y compris, selon les équipes médicales, des balles explosives aux effets particulièrement sanglants (peut-être même des balles dum-dum).
Nous avons demandé à Ahmed dans quelle mesure il pense que cette répression décourage les manifestants. « La plupart des gens sont favorables, mais d’autres disent que ça ne sert à rien, que ça ne permettra pas de faire cesser le siège ni les crimes contre nous. Et certaines personnes ont vraiment peur de cette situation. Mais la majorité soutiennent et pensent que c’est une excellente initiative qui permet d’attirer l’attention du reste du monde sur notre situation ».
Il s’agit selon lui d’un mouvement populaire, non contrôlé par le moindre parti politique. Même le comité d’organisation, qui inclut des représentants des différentes factions du mouvement national palestinien, ne contrôle pas chaque action sur le terrain. Il pense que les actions vont se poursuivre après le 15 mai.
Et il a un autre message : « Il y a des victimes dans les deux camps. Notre situation à Gaza est tout simplement catastrophique. Les Palestiniens souffrent énormément. Et les Israéliens aussi souffrent de l’insécurité. Il nous faut trouver une solution qui convienne aux deux camps. Les Israéliens de mon âge doivent ouvrir les yeux. Ce que le gouvernement israélien fait est très mauvais. Ils doivent s’y opposer. S’ils demandent à leur gouvernement de changer de politique, je pense que nous avons une chance pour l’avenir. Nous devons tous nous dresser contre l’oppression et l’injustice pour exiger une vie normale, une vie qui garantisse l’égalité de tout le monde ».
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Le combat socialiste pour la libération des Palestiniens et l’unité des travailleurs
Ce 14 mai, alors que les Etats-Unis inauguraient leur ambassade à Jérusalem, au moins 52 Palestiniens ont été tués par des soldats israéliens. En un mois et demi, le nombre de personnes ainsi tuées s’élève à 100. L’article ci-dessous a été écrit avant ces événements dans la perspective des 70 ans de la « Nakba » (la « catastrophe » en arabe). Il a été publié le 11 mai sur le site du Comité pour une Internationale Ouvrière www.socialistworld.net.
70 ans après la fondation d’Israël

Photo : Socialist Party (Angleterre et Pays de Galles) Cette année marque le 70e anniversaire de la fondation de l’État d’Israël, en 1948. Pour les réfugiés palestiniens, l’événement est connu sous le nom de “Nakba”, le mot arabe désignant ‘‘catastrophe’’, lorsque plus de 750.000 personnes ont été forcées de quitter leurs villes et villages pour s’appauvrir et devenir des sans-abris.
En outre, 300.000 Palestiniens ont été chassés de chez eux pendant la Guerre des six jours en 1967. Depuis lors, les Palestiniens de Cisjordanie et de Gaza vivent sous une occupation israélienne de plus en plus insupportable et brutale.
Dans la perspective d’une grande marche de protestation prévue pour la journée de la Nakba de cette année, le 14 mai, la colère et la frustration se sont exprimées dans des manifestations hebdomadaires – initialement de plus de 30.000 personnes – près du mur de Gaza, réclamant le droit au retour des réfugiés. Craignant cette escalade, le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu a autorisé les soldats à tirer pour tuer, avec le résultat horrible que plus de 45 manifestants ont été tués jusqu’à présent (le 11 mai, NDT) et que des milliers de personnes ont été blessées.
Le déplacement de l’ambassade d’Israël de Tel Aviv à Jérusalem, ce 14 mai, ajoute de l’huile sur le feu de la colère de masse. C’est un signal fort du président américain Trump en soutien à Israël pour sa domination de cette ville de même qu’une énorme rebuffade à la revendication des Palestiniens de disposer de leur propre Etat, avec également Jérusalem pour capitale.
M. Trump a également réduit la participation américaine au financement de l’agence des Nations Unies qui vient en aide aux réfugiés palestiniens, aggravant encore davantage les conditions déjà désastreuses qui prévalent dans les territoires occupés. La bande de Gaza, densément peuplée, souffre de pénuries d’électricité, d’eau courante et de produits de base et 50% de sa main-d’œuvre est au chômage.
Les résidents palestiniens de Cisjordanie, de Jérusalem-Est et de Gaza sont confrontés à des confiscations de terres, à des démolitions de maisons et à des incursions régulières de soldats israéliens au cours desquelles il est tout à fait normal que des Palestiniens soient tués ou blessés.
En outre, les colons juifs de droite harcèlent ou attaquent les Palestiniens et ces “crimes de haine” connaissent une augmentation à l’heure actuelle selon l’agence de renseignement israélienne Shin Bet. La détention dans des conditions dramatiques est également un outil courant de l’occupation – une majorité des adultes masculins des territoires occupés ont été détenus à un moment donné de leur vie. Plus de 6.000 Palestiniens, y compris des enfants, sont actuellement détenus.
C’est notamment le cas d’Ahed Tamimi, 17 ans, dont l’histoire s’est répandue dans les médias internationaux après son emprisonnement pour avoir giflé et frappé un soldat israélien qui ne voulait pas quitter la cour de la maison familiale. L’incident a eu lieu juste après qu’Ahed ait appris que son cousin avait été tué par une balle de l’armée israélienne.
L’action de masse
Face aux actions meurtrières du gouvernement Netanyahu, il est clair que la lutte des Palestiniens doit être très bien organisée et démocratiquement dirigée, évaluée et préparée pour obtenir le maximum d’impact et de succès potentiels. Les actions de masse contre l’occupation peuvent être très efficaces, comme l’a illustrée la première intifada (soulèvement) qui a éclaté en 1987.
L’été dernier, alors que les autorités israéliennes installaient de nouveaux checkpoints autour du complexe de la mosquée Al Aqsa de Jérusalem, des protestations massives de Palestiniens dans l’est de cette ville ont forcé le gouvernement à opérer un revirement de position.
Dans un premier temps, les manifestations près de la frontière de Gaza au cours de ces dernières semaines avaient également pris la forme de mobilisations de masse, en dépit de conditions particulièrement répressives. Développer ce type de lutte est la voie à suivre, et non pas celle des actes de désespoir comme un retour aux attaques terroristes individuelles ou collectives contre les civils israéliens qui ont marqué la deuxième intifada.
Ces méthodes sont contre-productives. Elles aident les politiciens de droite en Israël. Alors que les socialistes soutiennent pleinement le droit des Palestiniens à s’armer et à se défendre, nous demandons en même temps qu’un appel soit lancé aux Israéliens ordinaires pour leur expliquer qu’ils ne sont pas ciblés et que l’objectif de la résistance est la suppression de l’occupation brutale et des blocus.
La division de classe en Israël
Des deux côté de la division nationale, la classe ouvrière et la classe moyenne n’ont rien à gagner du conflit ou des conditions de vie pauvres et précaires qu’offrent les partis politiques pro-capitalistes.
En Israël, la population palestinienne minoritaire souffre d’un taux élevé de pauvreté, mais c’est aussi le cas d’environ 20% des enfants juifs, qui vivent dans la pauvreté. Une grande partie des juifs israéliens connaissent des salaires de famine, un travail précaire, des logements trop chers et, dans l’ensemble, une lutte quotidienne pour joindre les deux bouts. En Israël, le coût de la vie est parmi les plus élevés des 35 économies avancées et en développement de l’OCDE. Pourtant, le revenu disponible après l’intervention du gouvernement est l’avant-dernier de l’OCDE. Seul le Mexique fait encore pire.
La société israélienne est une société de classe comme les autres à travers le monde. Elle comprend l’un des pires écarts entre riches et pauvres. Un petit nombre de magnats contrôle l’économie. Les travailleurs israéliens sont régulièrement contraints à entrer en lutte. En décembre dernier, par exemple, les travailleurs de Teva pharmaceuticals ont occupé une usine à Jérusalem et ont manifesté contre la menace de 1.750 pertes d’emplois. Ils ont été soutenus par une grève générale d’une demi-journée.
Les mois suivants, des dizaines de milliers de juifs israéliens et de demandeurs d’asile – principalement africains – ont manifesté à Tel-Aviv contre les déportations forcées de réfugiés. Il y a également eu des manifestations hebdomadaires – des dizaines de milliers de personnes à un moment donné – contre la corruption des autorités. De nombreux députés et fonctionnaires font l’objet d’une enquête policière, y compris Netanyahu lui-même, que la police a recommandé d’inculper.
Le conflit national
Concernant le conflit national, aucun des principaux partis politiques n’offre de solution. Une majorité de la population juive est actuellement victime de l’atmosphère réactionnaire propagée par en-haut. Les gouvernements israéliens ne sont pas des novices dans l’instrumentalisation de la crainte d’attaques commises par les milices palestiniennes, par des individus ou des États voisins – en particulier l’Iran – et la coalition de Netanyahu ne fait pas exception à la règle. En avril dernier, les ministres ont créé un véritable barrage de propagande en réponse aux protestations de Gaza. Le ministre de la Défense Avigdor Lieberman a déclaré qu’il n’y a ‘‘aucun innocent’’ à Gaza et que ‘‘tout le monde est lié au Hamas’’.
Le conflit national est dans une impasse et aucune négociation significative n’a lieu. Netanyahu fait face à une opposition dans son parti, le Likoud, et à la menace de l’effondrement de sa coalition gouvernementale s’il fait la moindre concession, notamment en raison de la présence du parti pro-colons de la Maison juive.
Son gouvernement de droite a promulgué des lois qui visent à freiner l’activité d’ONG qui aident la cause des Palestiniens et à réduire les droits du 1,8 million de Palestiniens qui vit en Israël, y compris en déclarant qu’Israël est l’État-nation du peuple juif.
Mais le statu quo de l’occupation est aussi un grand problème pour la classe dirigeante israélienne et elle est divisée sur ce qu’il convient de faire. Certains, au sommet, préconisent d’accorder des concessions à l’Autorité palestinienne pour essayer d’acheter une période de coexistence plus stable. L’occupation et la répression sont coûteuses – l’armée absorbe 13% du budget de l’Etat – et Israël fait face à la critique ainsi qu’à un certain degré d’isolement au niveau mondial pour sa brutalité dans les territoires.
En outre, bien que Netanyahu continue de poursuivre une politique de ”faits accomplis” sur le terrain, par l’expansion des colonies et des infrastructures exclusivement juives, la classe dirigeante israélienne est confrontée à un problème démographique concernant sa base nationale. La population palestinienne dans toutes les zones qu’elle contrôle dépassera bientôt la population juive – si ce n’est pas déjà fait.
Un Etat ou deux ?
En raison de l’incapacité des partis politiques traditionnels à trouver une solution à deux États et de la mesure dans laquelle l’entreprise de colonisation a brisé la Cisjordanie, il existe des minorités des deux côtés de la fracture nationale qui croient qu’une solution à un seul État est maintenant possible.
Sur une base socialiste – que ce soit à un stade précoce ou à un stade ultérieur – un État unique répondant aux besoins et aux aspirations tant des Palestiniens que des juifs pourrait faire l’objet d’un accord démocratique et ainsi être réalisé. Mais à partir d’aujourd’hui, la méfiance développée à la suite de décennies d’effusion de sang et la crainte des deux côtés de devenir une couche discriminée d’un État unique (comme le sont aujourd’hui les Palestiniens en Israël) signifie qu’une solution à un seul État n’est pas envisagée par la plupart des gens.
Cette opinion est forte parmi les juifs israéliens en conséquence de la vie dans un État dont on leur a dit qu’il protégerait leurs intérêts après les persécutions des juifs en Europe de l’Est et au-delà, puis les horreurs de l’holocauste. Aujourd’hui, les guerres qui font rage dans la Syrie voisine et le soutien des masses à travers le Moyen-Orient pour la cause palestinienne viennent renforcer une “mentalité de citadelle assiégée” pour les juifs israéliens et la défense de l’État d’Israël.
L’Autorité palestinienne
Pour les Palestiniens, l’horreur de la répression et de la victimisation est devenue forte après avoir subi un déni de leurs droits fondamentaux par le régime israélien. Mais les partis politiques au pouvoir au sein de l’Autorité palestinienne ne montrent pas plus de voie à suivre que ceux d’Israël.
Le soutien au président palestinien Mahmood Abbas, le leader du Fatah, s’est effondré à mesure que le niveau de vie de la population s’est détérioré et que sa stratégie consistant à plaider la création d’un État palestinien auprès des puissances impérialistes du monde entier a échoué à maintes reprises.
Ces puissances considèrent que leurs liens commerciaux et géopolitiques avec Israël sont beaucoup plus importants. Et, en tout cas, elles ne peuvent pas simplement passer outre le refus de la classe dirigeante israélienne de concéder la création d’un véritable Etat palestinien à leur porte.
Le parti islamiste de droite Hamas, au pouvoir à Gaza, n’a pas d’autre choix que d’adopter une position plus anti-impérialiste que le Fatah, que les Etats-Unis et l’UE qualifient d’organisation terroriste. Mais il n’a pas non plus de stratégie pour faire avancer la lutte pour la libération des Palestiniens. Le Hamas n’envisagera jamais la seule voie possible pour pleinement la réaliser – c’est-à-dire une lutte démocratiquement organisée reposant sur un programme socialiste – car cela signifierait la suppression de ses positions et de ses privilèges.
Pour s’accrocher à certains de ces “droits” élitistes, et en réponse à la pression de l’Egypte et d’autres régimes arabes, il a essayé de se réconcilier avec le Fatah, acceptant de formellement renoncer à son leadership à Gaza, mais les accords n’ont pas encore abouti.
Un sondage réalisé au début de cette année indique que plus de 50 % de la population de Gaza et de Cisjordanie ne font confiance à aucune des factions politiques ou religieuses actuelles. En Israël, lors des dernières élections générales, seuls 16,7% ont voté pour le parti de Netanyahu, le Likoud. La plus grande partie de l’électorat était représentée par les 27,7 % qui n’ont pas voté du tout.
Les alternatives de la classe ouvrière
De nouvelles organisations des travailleurs indépendantes doivent voir le jour des deux côtés de la fracture nationale, gérées et contrôlées démocratiquement et capables de s’attirer du soutien en agissant dans l’intérêt des gens ordinaires.
La seule voie idéologique pour obtenir ce soutien est l’adoption d’un programme socialiste, car seule une solution socialiste peut mettre fin à l’insécurité, aux guerres, aux inégalités, à la dépossession, à la discrimination et au faible niveau de vie qui sévissent sous le capitalisme au Moyen-Orient.
Nos prédécesseurs marxistes se sont opposés à la création de l’Etat d’Israël en Palestine il y a 70 ans, prévoyant que cela n’apporterait pas la sécurité pour les Juifs et que cela serait source de souffrances pour les Palestiniens.
Cependant, au cours des décennies qui ont suivi, les marxistes ont dû reconnaître qu’une conscience nationale israélienne s’est développée, qu’une grande majorité de la population est maintenant née en Israël et qu’une classe dirigeante existe avec l’une des forces militaires les plus puissantes et lourdement armées à sa disposition sur la planète. Mais nous reconnaissons aussi, ce qui est crucial, qu’il existe une classe ouvrière israélienne forte d’un million de personnes avec le pouvoir potentiel de défier leurs exploiteurs capitalistes et de les renverser.
L’opposition au sionisme, à la droite israélienne et aux capitalistes israéliens n’est en aucun cas une opposition antisémite au peuple juif, ni à la classe ouvrière et à la classe moyenne israéliennes.
Notre organisation sœur en Israël-Palestine, le Mouvement de lutte socialiste – comme nous, membre du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) – dispose de sections à Jérusalem, Tel Aviv et Haïfa qui soutiennent les luttes des travailleurs israéliens, juifs et arabes, et défendent la nécessité de s’unir dans un nouveau parti des travailleurs.
Ils protestent activement contre l’occupation et le blocus de Gaza, soutiennent le droit au retour des réfugiés, et appellent à l’instauration de deux Etats socialistes garantissant tous les droits des minorités qui les composent.
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Gaza: Protester n’est pas du terrorisme
- Pour une enquête indépendante sur les tueries
- Stop au blocus, stop à l’occupation israélienne!
- Pour une solution socialiste à la question nationale
Marcher sur la terre de votre propre pays n’est généralement pas considéré comme un crime. Mais pour deux millions de Palestiniens emprisonnés à Gaza, une telle action est considérée comme une menace pour l’Etat d’Israël.
Lorsque les habitants de Gaza, la plus grande prison du monde, ont lancé une protestation de masse contre le siège brutal d’Israël et d’Égypte et la terrible détresse dans laquelle ils se trouvent, le gouvernement Netanyahu a envoyé l’armée contre eux.
Le résultat fut la mort de 18 Gazaouis et plus de 1.500 blessés lors de la Marche palestinienne vers la frontière entre Gaza et Israël pour marquer le Jour de la Terre (commémoration des Palestiniens tués le 30 mars 1976 pour protester contre l’expropriation de leurs terres par Israël), et exiger la levée du siège de Gaza par Israël.
Il est typique de la machine “hasbara” (propagande) de l’occupation de retourner la réalité et de qualifier de “violente” toute manifestation palestinienne. L’agression militaire quotidienne et le siège qui étrangle environ deux millions de personnes ne sont pas considérés comme violents, mais bien par contre la protestation de masse contre cette situation.
La répression des manifestations par le gouvernement Netanyahou n’a pas pour but de protéger le public israélien. Non. La provocation, la diabolisation et la guerre militaire contre des civils non armés ont pour but de dissuader le peuple palestinien de se battre pour ses droits et de noyer sa protestation dans le sang. Il est destiné à maintenir le siège, l’oppression nationale des Palestiniens, la pauvreté et la détresse. Et il est destiné à jeter du sable aux yeux des travailleurs juifs et des jeunes et à les mobiliser contre la lutte des travailleurs et des jeunes palestiniens pour une vie digne. Pour Netanyahu en particulier, la guerre contre les manifestations offre une autre occasion d’exploiter les craintes concernant la sécurité parmi le public israélien afin de détourner l’attention du public des soupçons de corruption à son encontre et des échecs énormes de son gouvernement.
Il est important de souligner qu’un régime qui attaque les manifestants est un danger potentiel aussi pour les luttes futures des travailleurs israéliens et des jeunes qui feront face à une opposition et à une dénonciation féroce de la classe dirigeante. De plus, le massacre de manifestants palestiniens et la poursuite même du siège et de l’occupation, non seulement suppriment tout horizon de paix, mais constituent un avertissement du danger d’une nouvelle détérioration de la vie des travailleurs dans un avenir immédiat. Il est important que les travailleurs et les jeunes israéliens expriment leur opposition et participent aux manifestations contre la politique sanglante du gouvernement Netanyahu.
Avec la provocation que constitue le transfert de l’ambassade américaine à Jérusalem, qui ignore de fait le droit des Palestiniens à leur propre État avec Jérusalem comme capitale, ainsi qu’avec le 70e anniversaire d’Israël, qui est officiellement célébré en ignorant la situation et les droits des Palestiniens, la récente protestation fait partie d’une série de manifestations prévues pendant un mois et demi. Celles-ci marqueront le 70e anniversaire de la Nakba palestinienne – la destruction systématique de centaines de villages et de communautés palestiniennes occupées et le déracinement de plus de 750.000 résidents pendant la guerre de 1948.
Au cours des prochaines semaines, des rassemblements et des manifestations sont prévus dans la bande de Gaza, en Cisjordanie et à Jérusalem, ainsi qu’en Jordanie, en Syrie et au Liban. Ces protestations, soutenues par les principales factions du mouvement national palestinien, est la plus étendue pour les droits des réfugiés palestiniens depuis les manifestations houleuses de milliers de réfugiés aux frontières avec Israël lors de la Journée de la Nakba en 2011, dans le contexte des mouvements révolutionnaires appelés le «printemps arabe». A l’époque, quinze manifestants avaient été tués et des centaines blessés.
Le premier jour de protestation a eu lieu le 30 mars, jour de la terre, commémorant la grève arabo-palestinienne en Israël en 1976, au cours de laquelle six manifestants avaient été abattus. “Qu’est-ce qu’il y a de dangereux avec des enfants se tenant à des centaines de mètres des chars et des soldats armés? Tout ce que nous avons demandé d’exprimer dans la marche est simplement nos vies intolérables”, a déclaré Hasan al-Kurd, l’un des organisateurs de la manifestation, sur le site israélien Local Call. “Nous avons eu beaucoup de morts et de blessés. Mais pensent-ils vraiment que c’est ce qui nous arrêtera? Après tout, nous n’avons pas d’autre choix que de continuer à manifester. Je veux faire appel au public israélien et lui demander de faire pression sur son gouvernement. Les gens ici vont continuer à mourir et à la fin cela va exploser à leur visage .
“Nous ne sommes pas venus ici pour nous battre, nous sommes venus pour retourner dans notre pays”, pouvait être lu en hébreu pendant la manifestation palestinienne. Environ 70% des habitants de la bande de Gaza sont des réfugiés, c’est-à-dire une population déracinée par la force en 1948 et poussée dans la bande qui est devenue l’une des zones les plus densément peuplées du monde et un ghetto assiégé de pauvreté et de crises terribles.
“Le monde doit comprendre que nous vivons dans une grande prison, chaque citoyen de Gaza le ressent dans sa propre vie et veut transmettre ce message”, a déclaré un membre du comité d’organisation cité dans Haaretz. “La marche est pour notre retour, elle est censée transmettre au monde un message : Assez avec le siège, assez avec l’occupation’’, a-t-il expliqué.
Tandis que le gouvernement du capital et des colonies de Netanyahu organise des célébrations pour marquer le 70e anniversaire d’Israël – et pour mobiliser la sympathie du public avec le nationalisme – les droits des réfugiés palestiniens et les droits des Palestiniens en général continuent d’être grossièrement attaqués quotidiennement.
Le 15 mai, date de la Nakba, les manifestations devraient atteindre leur sommet avec la “One Million March”. La lourde répression militaire vise à contrecarrer l’expansion du mouvement de protestation, car un scénario dans lequel les masses se battent pour leurs droits menace le régime d’occupation, comme chaque dictature. La mobilisation de dizaines de milliers, voire de centaines de milliers de personnes, pourrait permettre, entre autres, une manifestation de masse contre les barrières du siège de la bande de Gaza – un scénario que non seulement le gouvernement israélien craint mais aussi le Hamas. Le Hamas ne s’intéresse pas vraiment à une lutte de masse indépendante qui échapperait à son contrôle et prouverait que les masses palestiniennes peuvent faire ce dont la puissance militaire du Hamas n’est pas capable : menacer le pouvoir, le siège et l’occupation.
Dans le contexte d’une lourde répression militaire, on ne sait pas encore dans quelle mesure ce mouvement pourra se développer dans les semaines à venir. L’expansion du groupe qui organise les activités de protestation peut aider à renforcer la protestation, en organisant des comités démocratiques de résidents et en tenant des réunions pour discuter et décider des prochaines étapes de la lutte et des moyens d’organiser l’autodéfense des manifestants.
La tendance constante de la classe dirigeante israélienne à exploiter les craintes de la population israélienne doit être remise en question, ce qui ne peut être fait qu’en offrant une réelle alternative.
Les socialistes soutiennent une lutte palestinienne massive et indépendante, telle qu’elle a été organisée pendant la première Intifada. Nous soulignons qu’il est dans l’intérêt de la population des travailleurs israélienne et des jeunes de ne pas se laisser tromper par les incitations du gouvernement Netanyahu, mais de tendre une main courageuse de solidarité et de paix aux manifestations palestiniennes et de protester contre le gouvernement capitaliste israélien, contre l’occupation et le siège.
Tout en luttant maintenant pour mettre fin à la répression et gagner des revendications démocratiques et sociales, une alternative plus large doit être proposée. Des luttes significatives pourraient certainement gagner des acquis importants, mais c’est seulement sur une base socialiste qu’il sera possible d’unifier les conditions de vie des Palestiniens avec celles des Israéliens – et d’élever, en fait, le niveau de vie général bien au-delà des meilleures conditions réalisé sous le capitalisme – et de garantir une complète égalité des droits dans tous les domaines. Ce n’est qu’ainsi qu’il sera possible de s’assurer que toutes les ressources servent rationnellement et démocratiquement le bien-être des masses, et de permettre également l’investissement nécessaire pour les réfugiés palestiniens. Une solution juste à leur situation exige une lutte pour garantir des conditions de bien-être et d’égalité dans la région, et la promotion du dialogue direct et du consentement, qui inclurait la reconnaissance de l’injustice historique et du droit au retour.
Il faut en finir avec le déni du droit à l’autodétermination : Pour un État palestinien indépendant, démocratique, socialiste et égal, avec Jérusalem-Est comme capitale, à côté d’un Israël démocratique et socialiste qui garantissent une véritable égalité des droits pour tous.
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Israël/Palestine : Stop aux arrestations d’adolescents, fin de l’occupation !

Ahed Tamimi, 16 ans, et sa cousine de 21 ans, Nour Tamimi, ont été arrêtées il y a trois semaines dans la nuit du 19 décembre, lors d’un raid militaire sur leur maison dans le village de Nabi Saleh, en Cisjordanie. La mère d’Ahed, Neriman Tamimi, a été arrêtée alors qu’elle se rendait au poste de police pour savoir ce qui était arrivé à sa fille. Les ordinateurs portables et les téléphones de la famille ont été confisqués par l’armée.
Par Neta Most, Socialist Struggle / Nidal Ishtiraki (CIO en Israël / Palestine)
Tout cela est la conséquence d’une vidéo documentant les deux jeunes femmes faisant face à deux soldats armés avec un gilet pare-balles et essayant à mains nues de les sortir de chez elles. Quelques minutes plus tôt, un proche d’Ahed, Muhammad Tamimi, âgé de quinze ans, avait grièvement été blessé après avoir reçu une balle en métal plaquée de caoutchouc dans la tête.
Il ressort clairement du film que les soldats n’ont jamais été blessés ou même menacés. Ils ont gardé leurs armes, mais sont repartis sans les arrêter ni les attaquer. La publication de l’incident a provoqué un tollé parmi la droite israélienne, de l’extrême-droite fasciste de Benzi Gupstein et de ‘‘The Shadow’’ (un rappeur devenu ardent défenseur de l’extrême-droite sur les médias sociaux) aux ministres de la sécurité, Lieberman, et de l’éducation, Bennet. Ce dernier a exigé l’arrestation de la jeune fille pour avoir osé expulser un soldat de chez elle dans les territoires occupés.
Ces arrestations hautement couvertes par les médias, avec explications d’un porte-parole de l’armée israélienne, semblent être un acte de vengeance visant à montrer que si les soldats s’étaient retirés face aux protestations d’habitant non armés, cela n’étaient rien de plus qu’un geste tactique. Les arrestations visent aussi à dissuader les jeunes Palestiniens de se battre contre l’occupation, particulièrement à la suite des manifestations qui ont suivi les déclarations de Trump concernant Jérusalem et l’emplacement de l’ambassade des Etats-Unis en Israël.
Les militaires accusent Ahed de divers chefs d’accusation, parmi lesquels ‘‘agression contre les forces de sécurité’’. Sa mère fait également l’objet de poursuites et Nour a également été officiellement accusé d’agression présumée contre un soldat.
Elles sont détenues dans la prison militaire d’Ofer, célèbre pour son recourt à des méthodes douteuses visant à briser les prisonniers, comme l’isolement et le manque de sommeil (Nour a depuis lors été libéré après 16 jours de détention). Elles seront jugées en cour martiale, une cour martiale dont le taux de condamnation avoisine les 100%. Étant donné que l’incident initial pour lequel elles ont été arrêtées ne suffit pas à justifier leur arrestation, même selon les normes du système judiciaire militaire, le bureau du procureur général de l’armée israélienne a demandé à maintes reprises de prolonger leur arrestation afin d’ajouter à leur mise en accusation d’autres infractions qui auraient été commises dans le passé. Dans ces conditions, non seulement ils n’ont aucune chance de bénéficier d’un procès équitable, mais il y a un réel danger qu’ils restent en prison pour des années.
Au même moment, les colons juifs filmés en agressant des Palestiniens, des militants de gauche israéliens ou même des policiers et des soldats ne sont pas confrontés aux tribunaux militaires et évitent quasiment systématiquement d’être traduits en justice.
La couverture médiatique nie la réalité
La discussion dans les principaux médias israéliens a surtout porté sur la question de savoir si l’officier aurait dû réagir immédiatement en faisant usage de la force ou plutôt faire preuve de retenue devant la caméra. L’image dépeinte est celle d’un soldat qui se tenait là, innocent, tandis que deux jeunes filles essayaient de l’affronter et de le faire réagir violemment devant la caméra. Au regard des faits, il est évident que l’histoire est exactement inverse: c’est l’armée qui est entrée de façon provocante dans le village pour pousser les habitants à réagir afin de justifier une plus forte oppression.
Plusieurs éditoriaux sont allés plus loin et ont dépeint Ahed, 16 ans, comme une provocatrice ou une actrice habile qui a intentionnellement créé cette situation pour présenter les soldats de l’armée israélienne sous un mauvais jour devant une caméra. Comme si la famille Tamimi avait invité des soldats armés à envahir leur maison pour qu’ils aient mauvaise mine ! Aucune fille, n’importe où dans le monde, ne choisit de naître et de vivre sous l’occupation d’une armée étrangère. Depuis la déclaration de Trump, au moins 610 Palestiniens ont été arrêtés par l’armée israélienne, dont plus de 170 enfants et adolescents. Ont-ils tous “orchestré” leurs arrestations pour ternir la réputation des soldats ?
La plupart des médias israéliens ignorent le principal problème : pourquoi les soldats sont-ils entrés dans Nabi Saleh ? Seule une poignée de journalistes a mentionné les protestations populaires dans le village – celles que les soldats devaient réprimer – contre l’occupation et le vol du village par la colonie voisine, Halamish.
L’eau du puits, qui se trouve sur des terres privées palestiniennes, est utilisée par les fermiers palestiniens de Nabi Saleh. Mais les colons entendent leur interdire d’exploiter leurs terres. L’armée israélienne est là pour protéger ce vol et pour empêcher les habitants de protester contre l’injustice. La plupart du temps, la répression des manifestations se fait à l’aide de la force brute. Des civils non armés sont souvent tués. Deux manifestants ont été assassinés ces dernières années, Mustafa et Rushdi Tamimi.
Le jour de l’incident filmé où Ahed et sa cousine ont affronté les soldats, l’armée ne s’est pas arrêtée à la répression des manifestations, elle a envahi le village afin de bien faire comprendre aux habitants que protester ne sert à rien. C’est au cours de la répression des manifestations contre l’invasion du village par l’armée que Muhammad Tamimi a reçu une balle dans la tête.
L’armée était donc là pour protéger la prise de contrôle d’un puits utilisé par les habitants de la région par les colons. L’armée était là pour faire respecter l’oppression et l’occupation. Les colons juifs ont le droit de voler tandis que les Palestiniens se voient privés de leur droit de protester.
Solidarité et lutte à venir
Ces arrestations brutales et arbitraires ont suscité une solidarité que le gouvernement et l’armée redoutent. La vidéo d’une jeune Palestinienne confrontée à un officier armé est devenue virale. Des travailleurs et des jeunes du monde entier ont suivi l’arrestation de la jeune fille et des manifestations pour exiger sa libération ont été organisées dans plusieurs pays.
Cette réaction révèle les limites du pouvoir du régime d’occupation face à la population civile et peut certainement pousser davantage de jeunes à s’y opposer. ‘‘Ahed est la représentante d’une nouvelle génération de notre peuple, de jeunes combattants de la liberté (…) Ils doivent devenir la ligne de vie qui fera revivre notre révolution’’, a écrit son père dans une lettre publique.
Ces arrestations visent à mettre un “prix” sur la résistance au régime militaire dans les territoires occupés. Le gouvernement des colonies et du capital de Netanyahou tente avec arrogance de briser la résistance à l’occupation par une oppression meurtrière. Il essaie de “gérer le conflit” aux dépens de l’avenir des travailleurs et des jeunes palestiniens, mais aussi des Israéliens. Il faut mettre un terme aux attaques gouvernementales au lieu d’arrêter des jeunes filles qui se dressent contre l’occupation et l’oppression. Le combat pour le retrait de l’armée et des colons des territoires occupés est un combat pour la paix.
• Soutien aux manifestations de protestation et de solidarité demandant la libération des Tamimis !
• Non aux arrestations arbitraires et à l’incarcération sans procès ! Non aux détentions administratives ! Pour le droit de chaque détenu d’être représenté par un avocat, de connaître les charges retenues contre lui et de bénéficier d’un procès équitable !
• Retrait des militaires des territoires occupés ! Pour la fin de l’occupation des territoires palestiniens et la fin des colonies !
• Libération de tous les prisonniers politiques palestiniens ! Pour des procès équitables supervisés par des organisations indépendantes des travailleurs et de défense des droits humains des deux côtés du conflit !
• Pour la création d’un État palestinien indépendant, démocratique et socialiste, avec pour capitale Jérusalem-Est, aux côtés d’un Israël démocratique et socialiste, avec une véritable égalité des minorités, dans le cadre de la lutte pour un Moyen-Orient socialiste et pour la paix dans la région ! -
Colère massive suite à la reconnaissance par Trump de Jérusalem comme «capitale» israélienne

La déclaration de Trump de reconnaissance unilatérale de Jérusalem comme capitale d’Israël, tout en ignorant le droit des Palestiniens à un Etat avec une capitale à Jérusalem, a déclenché une vague de protestation dans le monde et a déjà entrainé des morts parmi les Palestiniens. Quatre Palestiniens tués, plusieurs centaines de blessés, des roquettes dans le sud d’Israël, des bombardements dans la bande de Gaza: la déclaration arrogante de Trump est déjà tachée de sang.
Par Shahar Benhorin et Yasha Marmer, Mouvement Socialiste de Lutte (CIO-Israël/Palestine)
Cette déclaration accepte la revendication du régime israélien d’une reconnaissance unilatérale de Jérusalem divisée et frappée par la pauvreté comme seule capitale d’Israël, et, en fait, la reconnaissance du statu quo de l’occupation continue à Jérusalem-Est tout en niant le droit des Palestiniens à disposer d’un Etat ayant une capitale à Jérusalem.
La décision de Trump a déclenché des protestations justifiées dans le monde entier et particulièrement parmi les Palestiniens. Des dizaines de milliers de personnes ont protesté à Amman en Jordanie, tandis que des milliers de personnes ont manifesté dans les villes de la région et autour du globe. Des milliers de Palestiniens ont manifesté à Jérusalem-Est, parallèlement à une grève des commerces. Des milliers de personnes ont manifesté à Ramallah, avec des manifestations organisées dans plusieurs parties de la bande de Gaza et dans toute la Cisjordanie. De l’autre côté de la ligne verte (en Israël), des milliers de personnes ont protesté à Umm al-Fahm, des milliers dans la région de Wadi Ara tandis que d’autres manifestations s’ébranlaient avec des centaines de participants à Jaljulia, Kafr Kanna, Qalansuwa, Nazareth et d’autres villes. Le Haut comité de suivi pour les citoyens arabes d’Israël a appelé à une manifestation devant l’ambassade américaine à Tel Aviv et à une manifestation à Sakhnin.
Le nombre de victimes dues à cette prise de position de Trump pourrait augmenter dans les jours et les semaines à venir, à la suite de la répression militaire des manifestants palestiniens, des bombardements des forces de défense israéliennes dans la bande de Gaza et des attaques aveugles contre les civils israéliens.
Avant la déclaration de Trump – qui, selon Trump et Netanyahu [le Premier ministre israélien] aidera à promouvoir la paix! – le Département d’Etat américain a ordonné aux diplomates américains de se mettre à l’abri et d’éviter les visites inutiles en Israël pendant deux semaines par souci pour leur sécurité. La sécurité des Palestiniens et des Israéliens ne concerne pas l’administration Trump et ses partenaires dans le gouvernement de Netanyahou. L’empressement du gouvernement de Netanyahou à défendre la poursuite de l’occupation, à tout prix, peut à lui seul ouvrir un autre chapitre d’une escalade significative et continue du conflit israélo-palestinien et aggraver les tensions dans la région.
Le Premier ministre israélien, le président et les dirigeants des partis d’opposition, Avi Gabbay et Yair Lapid, ont salué la démagogie de Trump. Les représentants de la droite et des colons l’interprètent comme un feu vert pour la poursuite de l’expansion des colonies et de la «judaïsation» des quartiers palestiniens de Jérusalem-Est, pour des démolitions systématiques de maisons, pour l’oppression et l’expropriation des Palestiniens. Le gouvernement envisage toujours d’annexer la colonie de Maale Adumim, de construire des colonies dans la zone E1 et d’exclure des dizaines de milliers de Palestiniens de la zone municipale de Jérusalem. Pendant ce temps, le ministre du logement, Yoav Gallant, qui n’a pas réussi à résoudre la crise du logement, a déjà annoncé la construction de milliers de nouvelles colonies à Jérusalem-Est.
Les mesures visant à empêcher toute possibilité d’établir une capitale palestinienne à Jérusalem ont longtemps été soutenues silencieusement par les administrations américaines, accompagnées de condamnations purement verbales. Trump a transformé le soutien silencieux en un soutien bruyant et provocateur. Quand il dit que son administration soutiendra une solution à deux États, si les deux parties sont d’accord, il indique clairement qu’il est prêt à soutenir l’idée de la création d’un État palestinien seulement si le gouvernement israélien l’accepte. Apparemment, Trump ne prend pas position sur les limites de la souveraineté israélienne à Jérusalem. Mais, en fait, il donne un soutien clair à la poursuite de la prise de contrôle violente et unilatérale du côté est de la ville par le régime israélien en collaboration avec les organisations de colons.
Réactions internationales
Trump a annoncé les préparatifs pour la relocalisation de l’ambassade des États-Unis à Jérusalem, conformément à la loi américaine qui a été approuvée par le Congrès en 1995, dans le contexte des Accords d’Oslo. La loi a appelé à déplacer l’ambassade américaine et à reconnaître Jérusalem comme la capitale «indivisible» d’Israël. La mise en œuvre de la loi a été reportée à plusieurs reprises par une dérogation présidentielle signée tous les six mois. Trump a signé cette renonciation maintenant, comme il l’a fait en juin dernier. Il aurait pu déclarer la relocalisation immédiate de l’ambassade dans le bâtiment du consulat des États-Unis à Jérusalem, mais une telle mesure ne ferait qu’accentuer les critiques à son égard, y compris de la part de responsables gouvernementaux américains.
Le secrétaire d’État Tillerson, le secrétaire à la Défense Mattis et le directeur de la CIA, Pompeo, faisaient partie de ceux qui s’opposaient à la déclaration. Ils craignaient, comme d’autres officiels de l’establishment américain, que les intérêts de l’impérialisme américain soient endommagés par la résurgence de la rage contre les Etats-Unis à l’échelle internationale, les dommages aux relations avec les régimes de la région, l’érosion de la stabilité dans la région et affaiblissement de l’influence américaine sur l’Autorité palestinienne (AP). En effet, la démarche de Trump était un objectif propre pour la politique étrangère américaine. Cela s’est manifesté par la réunion d’urgence du Conseil de sécurité des Nations unies, par la condamnation des gouvernements européens, par la réunion d’urgence des ministres des Affaires étrangères de la Ligue arabe au Caire et par la déclaration de l’Autorité palestinienne de couper les liens avec les Etats-Unis.
Seule une poignée de régimes internationaux étaient prêts à s’adapter à ce type de politique concernant Jérusalem: Taïwan a copié la position de Trump et les promesses d’aller dans la même direction ont été faites par les “mini-atouts” de la Hongrie, de la République tchèque et des Philippines. La plupart des gouvernements du monde n’oseront pas adopter la politique de Trump concernant Jérusalem dans un avenir proche, pour leurs propres considérations stratégiques mais aussi en raison de l’opposition publique significative à l’occupation israélienne des territoires de 1967 [ceux occupés à la guerre de 1967]. Même la République tchèque a souligné dans sa déclaration de presse qu’elle ne reconnaissait comme capitale d’Israël que “Jérusalem à l’intérieur des frontières de 1967”. Cette déclaration s’inscrit dans la nouvelle position de la Russie qui a déclaré en avril qu’elle considérait Jérusalem Ouest comme la capitale d’Israël et Jérusalem-Est comme la capitale du futur Etat palestinien.
Netanyahu se vante d’un renforcement des relations avec les dirigeants du monde entier, mais sous la surface – aux États-Unis, en Europe et ailleurs – il y a une tendance significative à la critique plus forte de la politique israélienne. Au Moyen-Orient, bien que les régimes sunnites arabes agissent pour resserrer une alliance stratégique avec l’Etat israélien, ils doivent prendre en considération le sentiment public et la solidarité généralisée avec la lutte palestinienne pour la libération nationale.
“L’accord du siècle”
Après le discours de Trump, le New York Times a publié que le prince héritier saoudien Mohammed bin Salman avait fait pression sur l’Autorité Palestinienne (AP) pour que soit accepté un accord de capitulation avec Israël. Selon cet accord, la capitale palestinienne sera située à Abu-Dis et non à Jérusalem-Est, les colonies ne seront pas supprimées et le «droit au retour» [des réfugiés palestiniens] ne sera pas reconnu. Mais publiquement, les dirigeants saoudiens ont été obligés de jouer un air différent. Ils se sont opposés, tout comme leurs homologues du royaume jordanien, à la déclaration de Trump avec des communiqués acerbes. Ils craignent des protestations éventuelles du peuple saoudien. Hassan Abu Hanieh, un analyste jordanien, a expliqué dans le Financial Times [6.12.17] que “le leadership arabe sera considéré comme complice de cette situation, et il y a une conviction croissante parmi les populations que leurs gouvernements sont en collusion avec Israël”.
Trump a l’intention de révéler dans les prochains mois une nouvelle “feuille de route” qui, selon lui, résoudra le conflit israélo-palestinien. Trump utilise sa récente intervention pour intensifier la pression sur l’Autorité Palestinienne et l’OLP (Organisation de Libération de la Palestine) pour accepter tous ses diktats. Tout cela alors que Trump continue également de menacer de fermer le bureau de l’OLP à Washington. Il soutient que la suspension du soutien officiel des États-Unis à Israël sur la question de Jérusalem n’a pas aidé à promouvoir un accord, jusqu’à présent. Par-là, Trump envoie un message à la direction palestinienne que si cela ne correspond pas à ses conditions – la nécessité de satisfaire le gouvernement de Netanyahu qui refuse toute reconnaissance d’un état palestinien – les Etats-Unis vont faire payer l’addition. Cependant, faire pression sur l’Autorité palestinienne d’une manière aussi publique et sévère compromet encore plus toute base pour la promotion de son «accord du siècle».
Trump arrache du visage de l’impérialisme américain, une fois de plus et de façon « laide », le faux masque d’ «intermédiaire honnête» qu’il prend dans le conflit israélo-palestinien. Jusqu’à la récente déclaration, le président palestinien Mahmoud Abbas cherchait vigoureusement les grâces de Trump, et a même déclaré en septembre: “Nous sommes très près d’une véritable paix entre les Palestiniens et les Israéliens”. Dans le même temps, la majorité des Palestiniens ne croient pas au canular de la paix de Trump et préféreraient qu’Abbas démissionne de son poste. Maintenant, Trump a poussé les hauts dirigeants de l’AP dans un coin. Parallèlement au gel des relations avec les Etats-Unis, Abbas refusera de rencontrer le vice-président américain Mike Pence qui prévoit de se rendre à Bethléem à Noël. Il semble aussi qu’Abbas refusera l’invitation de rencontrer Trump à la Maison Blanche, du moins pour l’instant.
Mais l’élite de l’AP est dans une impasse en termes de stratégie. Elle craint le développement de manifestations populaires de masse. Les dirigeants de l’AP sont également conscients qu’il n’y a pas d’autre puissance impérialiste qui serait acceptée par le régime israélien pour «sponsoriser» les négociations. Abbas peut espérer un parrainage et une nouvelle initiative de la part de la Russie ou de l’Union européenne, mais le gouvernement de Netanyahu refusera de collaborer à toute initiative de ce genre, comme l’a clairement montré l’exemple français. Les chances de renouvellement des pourparlers directs entre l’AP et le gouvernement de Netanyahu sont faibles ou inexistantes.
Quant aux dirigeants du Hamas, ils espéraient, comme l’avait expliqué à l’époque leur leader Khaled Mashal, que l’administration Trump fournirait aux Palestiniens une “opportunité spéciale”, car elle contenait “un plus grand seuil d’audace” que celles d’avant. Ils ont placé leurs espoirs dans le «processus de réconciliation» avec le Fatah [le parti d’Abbas], parrainé par le régime de Sissi en Egypte, mais ce processus n’a pas encore pris son essor. L’Autorité palestinienne refuse de lever les sanctions économiques imposées à Gaza et le Hamas refuse de désarmer.
La possibilité d’une nouvelle escalade de la confrontation avec Israël arrive au mauvais moment pour les dirigeants du Hamas. Dans le contexte de la crise à Gaza, ils n’ont pas été en mesure de présenter des résultats au cours de la dernière période. Ils préfèrent donc éviter de lancer des roquettes sur Israël (les organisations salafistes revendiquent la responsabilité des derniers lancements). Sans présenter de solution pour Gaza, le Hamas appelle à une «nouvelle Intifada» dans les territoires de Cisjordanie et à Jérusalem, visant à couvrir son manque de stratégie crédible pour faire avancer la lutte palestinienne.
Protestations sur le terrain
L’idée d’un soulèvement important contre le régime d’occupation a eu un large soutien pendant un certain temps parmi les Palestiniens dans les territoires de 1967. Dans le même temps, il y a un profond pessimisme quant aux résultats potentiels de la lutte. Par conséquent, compte tenu de la lourde répression militaire israélienne qui a déjà entraîné le meurtre de deux manifestants et des centaines de blessés, y compris par balles réelles, les manifestations de masse en réaction à la déclaration de Trump, notamment en Cisjordanie, ont, jusqu’à présent, été limitées.
En juillet dernier, un soulèvement de milliers de manifestants à Jérusalem-Est a réussi à vaincre la provocation arrogante du gouvernement de Netanyahou – une attaque contre la liberté de culte et de mouvement dans la ville antique, surnommée “la crise des détecteurs de métaux”. Après la déclaration de Trump, des milliers de personnes sont descendues dans les rues de Jérusalem-Est, parallèlement à des manifestations dans d’autres endroits. Il n’est pas clair, à ce stade, si ces manifestations palestiniennes de «rage» se transformeront en un soulèvement plus large et prolongé. Mais une protestation à grande échelle, qui défiera la dictature de l’occupation et des colonies, est définitivement nécessaire.
Trump et Netanyahu sont prêts, en exploitant le fanatisme nationaliste, à détériorer la région vers une autre crise sanglante, pour permettre leur survie au pouvoir. La réponse appropriée est de sortir et de lutter contre ceux-ci et leur programme désastreux. Des manifestations importantes dans les territoires palestiniens et dans toute la région sont nécessaires. De grandes manifestations au sein de la « Ligne verte », y compris en réunissant des Juifs et des Arabes, contre l’occupation et pour la paix sont essentielles pour bloquer les fauteurs de guerre et détruire cette même occupation. La lutte pour la paix exige d’être large, contre l’occupation et pour des politiques allant dans l’intérêt des travailleurs et des pauvres, des deux côtés de la division nationale.
Netanyahou essaie de saisir la déclaration de Trump pour détourner l’attention non seulement des arguments justes de ceux qui s’opposent à l’occupation, mais aussi du grand mouvement de protestation contre la corruption qui a récemment émergé contre son règne et contre toute une série de problèmes sociaux.
Dans le contexte des manifestations internationales et face à une incitation féroce et à la répression militaire contre les manifestants palestiniens, il est nécessaire de mobiliser la solidarité et d’élargir les protestations, y compris au sein du mouvement contre la corruption en Israël et en impliquant les organisations d’ouvriers et d’étudiants israéliens.
La propagande hypocrite qui tente de dépeindre Jérusalem comme une ville «unifiée» et prospère qui préserve la liberté de culte et la dignité de tous, vise à cacher la réalité des divisions profondes. Le mur de séparation, les checkpoints, la provocation sans fin sur base de la nationalité et de la religion, la discrimination, la pauvreté, le vol de maisons et de terres des résidents sont les réalités vécues par la majorité des palestiniens. A cela il faut rajouter les marches racistes et haineuses promues par l’État et les abus quotidiens de la police des frontières et des autorités.
Dans le cadre de la lutte contre l’occupation et pour la paix, le Mouvement Socialiste de Lutte appelle à l’établissement de deux capitales nationales à Jérusalem, assurant une vie de bien-être, d’égalité des droits, de liberté de mouvement et de liberté religieuse. Dans le contexte de deux Etats socialistes, démocratiques et égaux, il sera possible de créer une société qui permettra à Jérusalem de s’épanouir véritablement en tant que ville pluraliste sans ghettos misérables, sans discrimination et sans murs de béton.
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Israël-Palestine : Netanyahu menace de réagir avec « une poigne de fer » aux attentats contre les synagogues
Article paru en novembre dernier sur le site du Comité pour une Internationale Ouvrière dont nous vous proposons ici une traduction.Une nouvelle vague de rage et de protestation en réponse aux nouvelles séries de répression
Yasha Marmer, Socialist Struggle Movement, section du CIO en ISraël-Palestine
Depuis la fin de la guerre brutale de juillet-août contre Gaza, massacre qui a causé la mort de presque 2.200 habitants, les communautés palestiniennes de la Cisjordanie occupée et surtout de Jérusalem-Est annexée refusent de retourner à une soi-disant vie « normale » sous l’occupation.
La fin de l’été et l’automne 2014 ont vu des centaines et parfois des milliers de jeunes Palestiniens descendre dans les rues de Jérusalem-Est presque quotidiennement pour protester contre l’extension des colonies et la répression. Les protestations sont aussi une réaction à une série de provocations nationalistes et religieuses sur le Mont du Temple/l’Esplanade des Mosquées orchestrées par le gouvernement et des groupes israéliens d’extrême-droite.
En parallèle, la polarisation nationaliste augmente aussi de manière significative à Jérusalem suite à un nouveau cycle de répression et d’attentats terroristes. De nouvelles victimes des deux côtés de la fracture nationale s’ajoutent au nombre de morts quasi quotidiens.
En automne dernier, un Palestinien de 22 ans a été tué lors de protestations et d’affrontements avec l’armée près de Hébron ; un adolescent de 14 ans a été tué par un sniper de Tsahal dans la région de Ramallah ; un jeune garçon de 12 ans a été tué par des soldats dans la même région. Depuis le début de l’année, au moins 50 Palestiniens ont été tués dans la Cisjordanie occupée par l’armée israélienne et des colons.
Dimanche 16 novembre, Yousuf Hasan al-Ramouni, un chauffeur de bus palestinien âgé de 32 ans a été retrouvé mort pendu dans un dépôt de bus à Jérusalem. Sa famille croit fermement qu’il a été victime d’un attentat nationaliste alors que la police israélienne a déclaré qu’il s’agissait d’un suicide.
Deux jours après, deux jeunes Palestiniens de Jérusalem-Est ont attaqué des fidèles juifs dans une synagogue dans le quartier de Har Nof situé à Jérusalem-Ouest, faisant quatre morts. Les deux agresseurs et un policier israélien ont trouvé la mort dans la fusillade.
Le nombre terrible de morts causé par la guerre de l’été dernier a été suivi d’une expansion croissante des colonies et de confiscations de terres. C’est dans ce contexte que des individus palestiniens ont mené des séries d’actes tragiques et désespérés d’attaques à l’arme blanche et à la voiture bélier précédant l’attentat contre la synagogue. Six Israéliens dont un bébé de trois mois ont y trouvé la mort.
La protestation se propage
Début novembre, les manifestations et confrontations incessantes à Jérusalem-Est ont été accompagnées par une vague de rage et de protestation dans les communautés palestiniennes en Israël. Ces dernières se sont déclenchées après que la police a tué par balles de sang-froid Khayr Hamdan (22 ans) à Kafr Kana, une ville arabo-palestinienne au nord d’Israël.
Les enregistrements de vidéosurveillance montrent Hamdan en train de frapper sur la fenêtre fermée d’une camionnette de la police israélienne après l’arrestation de son cousin suite à une dispute familiale. Trois policiers sont sortis de la fourgonnette et ont tiré sans aucun avertissement dans le dos de Hamdan alors qu’il reculait et ne menaçait personne. Après la fusillade, Hamdan a été trainé dans la camionnette de la police. Quelques heures après il a succombé à ses blessures à l’hôpital.
Le jour suivant des milliers de Palestiniens ont manifesté. Des dizaines de milliers ont pris part à une grève générale populaire de 24 heures, décrétée par le Comité suprême des citoyens arabes-palestiniens d’Israël. Beaucoup de petites entreprises étaient fermées. Des écoliers étaient en grève – 2.000 d’entre eux ont aussi manifesté à Sakhnin et Kfar Kanne le jour suivant. Beaucoup de manifestants brandissaient des pancartes fait-maison où l’on pouvait lire : « La faute : être Arabe – La punition : la mort ».
La réaction du Premier ministre Netanyahu face aux protestations contre la police meurtrière a été de dire : « à tous ceux qui manifestent contre Israël et qui sont en faveur d’un état palestinien, je dis quelque chose de simple : je vous invite à déménager là-bas ». Déménager où ? Pour clarifier son intention, Netanyahu, qui s’oppose à l’idée même d’un état palestinien, a ordonné au ministre de l’Intérieur d’envisager de révoquer la citoyenneté israélienne de ceux qui « ont agi contre l’état ».
« Tirer pour tuer »
Le meurtre tragique de Hamdan et les images de vidéosurveillance choquantes ont eu pour conséquences d’étendre les protestations – mais pas à une grande échelle – de Jérusalem-Est aux communautés palestiniennes au nord d’Israël. Mais les causes de la colère sont plus profondes que cela.
La plupart des attentats contre des Israéliens à Jérusalem se sont terminés en exécutions sur place des agresseurs par la police après que cette dernière les a arrêtés et immobilisés. Ces meurtres sans procès ont été soutenus par la direction de la police et les ministres du gouvernement.
Le Ministre de la Sécurité Intérieure (responsable de la police) Yitzhak Aharonovitch a fait l’éloge de la police meurtrière en disant qu’il souhaite que chaque acte de terreur se termine par l’exécution sur place de l’agresseur. Ceci ne vaut apparemment que pour les Palestiniens puisque que les terroristes juifs qui attaquent des communautés palestiniennes restent la plupart du temps impunis.
Ces déclarations ont révélé très clairement que la famille et la communauté de Hamdan ne peuvent attendre aucune justice de l’enquête lancée sur le meurtre par l’unité d’investigation de la police. Cela fait resurgir les souvenirs d’octobre 2000 lorsque 13 citoyens arabes-palestiniens d’Israël non-armés ont été abattus par des tirs à balles réelles pendant les protestations qui se sont déroulées en Israël au commencement de la seconde Intifada. Pas un policier ou officier n’a été inculpé pour ce crime. Depuis lors, 48 jeunes palestiniens avec la citoyenneté israélienne sont morts sous les balles de la police. Dans seulement trois cas, l’officier a été reconnu coupable de crime et même pour ces cas-là ils ont purgé une peine de seulement 6 à 14 mois de prison (statistiques de centre Mossawa).
Une semaine avant la déclaration d’Aharanovitch, en Cisjordanie, une fille palestinienne de 5 ans a été tuée après avoir été renversée par un véhicule conduit par un colon qui a pris la fuite. Il a été libéré immédiatement après un bref interrogatoire, malgré que le délit de fuite n’ait pas pu être exclu. Contrairement à cela, après que la police a tué Hamdan, les ministres du gouvernement de Netanyahu l’ont étiqueté immédiatement de terroriste.
Pendant que les porte-paroles de Netanyahu donnent des ordres largement médiatisés de démolir les maisons des familles de suspects terroristes palestiniens sans aucun procès ni condamnation, de telles mesures n’ont jamais été prises contre des terroristes juifs, y compris après le meurtre récent de Mohammed Abu Khdeir à Jérusalem.
Ces actes sont une autre tentative de la part du régime israélien de consolider une image de suprématie militaire contre le mécontentement qui ne fait que se développer des deux côtés du mur. Les déclarations récentes de renforcer l’expansion des colonies et la construction de centaines de nouveaux logements à Jérusalem-Est visent en fin de compte à atteindre le même objectif.
Jérusalem-Est
A la fin du mois d’octobre, le bureau du Premier ministre a annoncé le lancement d’un projet de construction de plus de 1.000 nouveaux logements dans les colonies de Ramat-Shlomo et Ar-Homa à Jérusalem-Est. L’objectif de ces plans est de consolider encore plus fermement l’annexion de Jérusalem-Est et de fermer la porte à toute perspective pour un état palestinien avec Jérusalem-Est pour capitale.
Il ne fait aucun doute que ces déclarations encouragent l’extrême-droite et d’autres groupes de colons. Le mois précédent, ils ont réussi à exproprier plusieurs dizaines de maisons dans le quartier palestinien très pauvre de Silwan. Ceci n’était plus arrivé depuis plus de 20 ans. L’usurpation des maisons s’est faite avec l’aide d’une grande présence de la police anti-émeute et des frontières sous les félicitations publiques des ministres du gouvernement. Le ministre du logement, Uri Ariel, du parti raciste pro-colonisation, « Le Foyer juif », a même déclaré qu’il avait l’intention d’emménager dans l’une de ces maisons.
Les groupes de colons qui exproprient les familles palestiniennes de Silwan, situé seulement à quelques kilomètres des lieux saints de Jérusalem, sont les mêmes qui prennent part à des visites provocatrices sur l’Esplanade des Mosquées/Le Mont du Temple. L’objectif déclaré de ces visites qui ont atteint un pique historique en septembre dernier lors de la saison des vacances juives, est de « reprendre possession » de l’enceinte de la Mosquée Al-Aqsa qui est déjà occupée et annexée. Des membres de l’extrême-droite qui siègent à la Knesset (le parlement israélien) et des ministres du gouvernement prennent part à ces visites presque chaque semaine accompagnés par la police anti-émeute en tenue de combat.
Ce sont des actes non seulement à caractère religieux mais aussi nationaliste qui augmentent la menace pour les fidèles musulmans de voir leur accès à l’Esplanade des Mosquées encore plus limité. Les protestations et affrontements qui se sont déroulés dernièrement à l’intérieur et à l’extérieur de l’Esplanade ont même amené un haut responsable de la police israélienne à admettre que : « En essayant de se rendre à plusieurs reprises sur le Mont du Temple, des membres de la Knesset provoquent les Palestiniens à réagir ».
Mais cet officiel de la police ferme clairement les yeux sur la politique provocatrice des forces de police qui imposent une punition collective aux fidèles musulmans en leur y limitant fréquemment l’accès.
Ceci va de pair avec d’autres formes de punition collective contre les quartiers, villages et camps de réfugiés palestiniens dans la région de Jérusalem ces dernières semaines, telles que : de nouvelles restrictions dans les déplacements, des routes barrées, des démolitions de maisons, des amendes draconiennes et contraventions imposées par les autorités locales sur la population réduite à la misère.
Ceci arrive après presque un demi-siècle de discrimination systématique et de négligence criminelle des infrastructures, une pénurie d’écoles, de logements et d’emplois. Les niveaux de pauvreté (78%) et de chômage (40% chez les hommes, 85% chez les femmes) ont atteint aujourd’hui leur plus haut niveau depuis le début de l’occupation à Jérusalem-Est en 1967.
En plus de cela, les attaques physiques et les attentats terroristes contre les Palestiniens organisés par des groupes ou individus d’extrême-droite, comme l’enlèvement et le meurtre horrible de Mohammed Abu Khdeir âgé de 16 ans par des terroristes juifs l’été dernier, ne cessent pas. Les dernières semaines, deux mosquées ont été incendiées en Cisjordanie.
Bien que la peur monte parmi la classe dirigeante israélienne qui craint de perdre le contrôle de la situation, elle sent aussi la pression augmenter qui la pousse à faire preuve de force contre toute tentative des Palestiniens à défier le statu quo. Dans ce contexte, on comprend mieux les désaccords sur les tactiques et la stratégie entre les différents chefs de la police, l’armée, les services secrets et le gouvernement.
Face au mécontentement grandissant, le gouvernement de Netanyahu répond par plus de répression. Depuis le début de la guerre contre Gaza, environ 1.000 jeunes palestiniens ont été arrêtés dans la région de Jérusalem-Est, dont beaucoup de mineurs et parmi eux, un enfant de 10 ans.
Le gouvernement joue un jeu cynique. Alors que les résidents israéliens de Jérusalem aspirent à la sécurité et à la stabilité, il jette de l’huile sur le feu.
Dans sa promesse à « restaurer le calme », le gouvernement a ordonné le déploiement de 1.000 policiers supplémentaires dans Jérusalem-Est annexée, 2.500 troupes dans la Cisjordanie occupée et a augmenté la présence policière aux alentours des communautés palestiniennes qui vivent en Israël. En plus de tout cela, Netanyahu a ordonné de détruire plus de maisons, de sanctionner par des amendes les parents dont les enfants participent à des jets de pierre et d’interdire les organisations à Jérusalem qui encouragent « l’incitation », c’est-à-dire toute forme de lutte contre l’occupation.
Une nouvelle Intifada ?
En prenant en compte les conditions horribles sur le terrain et l’opposition arrogante du gouvernement Netanyahu à faire des concessions significatives en Cisjordanie ou Gaza, un nouveau soulèvement de grande ampleur – une troisième intifada – serait juste une question de temps.
Quelques commentateurs dans les médias israéliens parlent des récents évènements comme une nouvelle intifada ou une « intifada silencieuse » ou une « intifada urbaine ». Dans certains cas, le but cherché est de faire peur délibérément au public israélien et de pousser le gouvernement à « faire quelque chose ». Mais il faut souligner que les récentes protestations ne se déroulent pas encore à grande échelle et par conséquent on ne peut pas encore parler d’intifada, dans le vrai sens du terme – un soulèvement de masse contre l’occupation et l’oppression nationale. Néanmoins, cette sorte de soulèvement est absolument nécessaire pour arrêter et renverser la politique arrogante et brutale du régime israélien.
Les arrestations et intimidations sont des obstacles à un tel soulèvement. Ces dernières ont pour objectif des démanteler toutes formes de directions locales qui peuvent mener des luttes dans les communautés palestiniennes à Jérusalem-Est et au-delà.
L’autorité palestinienne dirigée par le Fatah ne fait aucun effort pour surpasser cet obstacle. Sa politique de « coopération à la sécurité » avec l’armée israélienne se traduit par un retrait et une suppression des protestations. Un des hauts fonctionnaires du Bureau du dirigeant de l’Autorité palestinienne Mahmud Abbas a expliqué la logique tordue qui se cache derrière : « Nous allons aux Nations-Unies pour demander la reconnaissance de l’Etat palestinien. On ne peut pas se permettre que la Cisjordanie et Gaza ressemblent à la Somalie avec des hommes armées et masqués partout, parce que le monde ne nous écoutera pas ».
D’un autre côté, le Hamas a déclaré quelques jours symboliques de colère en Cisjordanie mais sans être capable ou avoir la volonté de mobiliser des couches plus larges pour une lutte efficace dans le temps. Le principal intérêt pour la direction du Hamas est de stabiliser la situation à Gaza par la mise en œuvre de nouveaux accords avec le régime israélien d’un côté et avec le régime égyptien de l’autre, par l’entremise du Fatah.
Ce n’était donc pas surprenant que l’agence palestinienne d’informations Ma’an ait mené un sondage avec la question : « Est-ce que les attentats à la voiture bélier expriment une rage populaire contre le racisme de l’occupation ou se produisent-ils parce que les organisations restent silencieuses ? »
Sortir de l’impasse
Les difficultés dans la situation actuelle sont claires. La guerre récente contre Gaza a révélé les limites de la puissance militaire d’Israël, mais elle a aussi montré que la balance militaire des forces est clairement du côté de la machine de guerre israélienne. D’un autre côté les Autorités palestiniennes sont clairement limitées dans leur campagne diplomatique. Les reconnaissances symboliques récentes d’un Etat palestinien par différents pays européens peuvent aider à dévoiler les politiques du régime israélien mais elles ne changent rien sur le terrain. Cette impasse peut mener à davantage d’actes contreproductifs et désespérés mais aussi à une plus grande ouverture pour de nouvelles méthodes de lutte et de nouvelles forces politiques qui peuvent émerger à gauche.
Des manifestations de grandes et moyennes envergures dans les territoires palestiniens occupés peuvent gagner rapidement la solidarité du monde entier et éventuellement relancer la lutte révolutionnaire dans la région, particulièrement en Jordanie et Egypte. Elles peuvent aussi changer l’opinion et gagner le soutien d’une partie significative de la société israélienne. Des sondages récents montrent que le soutien aux politiques du gouvernement Netanyahu est loin d’être solide.
Selon un sondage effectué au début du mois de novembre mesurant l’indice de paix, 64% des juifs israéliens considèrent que la raison principale pour laquelle Netanyahu a relancé la construction de colonies était de «consolider sa position dans la droite et parmi les colons ». A la question : « Quelle est la bonne façon d’empêcher des attentats terroristes ? », une majorité de juifs (52.5%) ainsi que d’Arabes palestiniens (81.2%) en Israël ont déclaré qu’« il faudrait reprendre les négociations pour la paix ».
La gauche socialiste israélienne devrait s’efforcer de creuser plus profondément les fissures qui ont commencé à resurgir dans le soutien au gouvernement avec la fin de la guerre contre Gaza. Elle doit expliquer le contexte des mauvaises conditions économiques. Elle doit expliquer la nécessité de construire un mouvement dirigé par la classe ouvrière en Israël qui peut mettre en avant une issue socialiste à cette crise sans fin et cela profitera à toute la classe ouvrière de la région.
Le soutien élevé parmi les Israéliens pour une reprise des « pourparlers de paix » est une indication de leur mécontentement envers le gouvernement Netanyahu. Mais il faut aussi souligner que de vraies discussions pour la paix ne peuvent prendre place qu’avec la fin de l’occupation, de l’état de siège, du projet de colonisation et toutes autres formes d’exploitation et d’oppression des Palestiniens. Seule une lutte peut rendre cela possible.
L’état actuel de la lutte demande à mettre en place urgemment des comités populaires démocratiquement élus dans les communautés palestiniennes afin d’organiser des actions plus larges, de mobiliser la couche plus large des travailleurs et des jeunes et d’organiser une auto-défense efficace y compris armée contre la répression mortelle de l’armée israélienne et des attaques des colons. Ces comités peuvent générer des discussions à tous les niveaux de la société sur la question de comment avancer sur la voie de la lutte pour la libération nationale et sociale.
Le Mouvement de Lutte pour le Socialisme, section sœur du PSL en Israël/Palestine appelle à :
-Renforcer les protestations contre l’extrême-droite et le gouvernement de Netanyahu pro- « capital et colonies ». Juifs et Arabes doivent s’unir dans leurs manifestations – Stop aux attentats nationalistes, stop au terrorisme.
– Une enquête indépendante concernant le meurtre de Hamdan doit être menée par des représentants de la communauté, des organisations des travailleurs et du grand public. Pour un contrôle démocratique sur la police qui devra être soumise à une supervision démocratique effectuée par des comités de polices communautaires.
– Mettre sur pied des comités d’action élus démocratiquement dans les communautés où des manifestations prennent place pour aider à organiser la lutte.
– L’armée israélienne doit se retirer des territoires palestiniens ! Stop à l’occupation et aux activités de colonisation. Stop à la politique de siège sur Gaza.
– Pour un état palestinien indépendant, démocratique et socialiste au côté d’un état israélien démocratique et socialiste, avec deux capitales à Jérusalem et l’égalité des droits pour les minorités, dans le cadre d’une lutte pour un Moyen Orient socialiste et la paix dans la région. -
Seules les actions de masse peuvent arrêter les conflits impérialistes
Environ 10.000 personnes ont participé à la manifestation contre la guerre à Gaza du 27 juillet dernier à Bruxelles. Moins d’un mois plus tard, 5000 personnes se rassemblaient à nouveau dans la capitale pour protester contre la violence de l’État israélien. Ces manifestations et la vague d’actions locales qui ont pris place dans notre pays témoignent de l’indignation et du soutien grandissant pour la cause palestinienne.
Par Elise (Charleroi)
Cette colère du public s’est rapidement manifestée à la suite de l’offensive «Bordure protectrice» déclenchée le 8 juillet dernier par le gouvernement Netanyahu. Ce dernier a instrumentalisé la mort de trois jeunes israéliens comme prétexte pour justifier la nécessité d’une intervention militaire à Gaza. Depuis le début de l’offensive, près de 2.000 Palestiniens ont trouvé la mort, dont une grande proportion d’enfants étant donné que l’âge moyen des 1,8 million d’habitants de la bande de Gaza n’est que de 17 ans. Plus de 460.000 personnes ont été déplacées.
Une situation dans l’impasse
Selon le gouvernement israélien, cette attaque était nécessaire pour neutraliser la force militaire du Hamas à Gaza et supprimer les tirs de roquettes. En réalité, cette vague de violence ne fait que renforcer le désespoir du peuple palestinien, encourageant le sentiment de vengeance et le risque d’actes terroristes envers les citoyens israéliens. De plus, l’offensive à Gaza a déjà causé la mort de 53 soldats israéliens, un bilan bien supérieur au nombre de victimes des tirs de missiles effectués par le Hamas et autres milices palestiniennes dans les douze dernières années.
Les négociations n’offrent que peu d’espoir, étant donné que le gouvernement israélien exige une démilitarisation
totale de Gaza par le Hamas comme condition pour un cessez-le-feu, tandis qu’Israël garderait l’ensemble de ses moyens d’agression militaire envers les Palestiniens. Les revendications du Hamas et du Djihad islamique concernent principalement la levée du siège sur Gaza et la fin des agressions israéliennes. Mais celles-ci ne son pas acceptables pour le gouvernement Netanyahu qui s’est engagé dans une guerre de prestige présentée comme la seule solution pour garantir la sécurité du peuple israélien.Même si une trêve durable est finalement négociée, les conditions de vie des Palestiniens resteront épouvantables étant donné les conséquences dévastatrices des attaques des deux derniers mois : pénurie d’eau potable et d’électricité, destruction des systèmes d’évacuation, destruction d’un tiers des hôpitaux… Le risque d’apparition de maladies est augmenté et la population devra affronter une grave crise humanitaire.
Le rôle des puissances impérialistes
Face à cette crise, les gouvernements occidentaux hésitent à prendre position. Il faut dire que ces pays ont du mal à cacher leurs relations lucratives avec Israël. Ainsi, alors que la Maison-Blanche a timidement regretté les attaques de l’armée israélienne sur les écoles de l’ONU, les États-Unis octroient toujours une énorme aide économique et militaire à Israël, ayant ainsi contribué à la création de l’une des plus puissantes armées du monde. Pour la Grande-Bretagne, c’est le commerce d’armes très lucratif avec Israël qui justifie la position pro-Israël du premier ministre David Cameron.
À force de briser et de diviser les différentes autorités palestiniennes qui se sont succédé et de multiplier les colonies et le contrôle sur Gaza, le gouvernement israélien a favorisé la radicalisation du peuple palestinien et la montée de forces islamistes telles que le Hamas ou le Djihad islamique. Une fois de plus, les puissances impérialistes se retrouvent confrontées au monstre de Frankenstein qu’elles ont elles-mêmes contribué à développer. En Syrie et en Irak, aux frontières d’Israël, les milices de l’État islamique sèment la terreur et menacent les intérêts des puissances occidentales dans la région. Comble de l’ironie quand on sait que ces milices djihadistes trouvent leurs racines dans la résistance des sunnites suite à l’invasion américaine de l’Irak en 2003, et qu’elles ont été financées et armées par la Turquie, l’Arabie saoudite et le Qatar avec l’approbation des USA, qui voyaient là un moyen d’affaiblir le pouvoir de Assad en Syrie et de créer un futur ennemi pour l’Iran.
Le peuple palestinien n’a donc rien à espérer des puissances impérialistes pour son salut. La stratégie du Hamas repose pourtant sur des alliances avec les puissances arabes et a déjà montré ses limites. Ainsi, le Hamas a cesser d’avoir le soutien de l’Égypte lorsque les Frères musulmans ont été chassés du pouvoir par l’armée de Sissi. Il a également perdu celui de la Syrie et de l’Iran après avoir refusé d’accorder son soutien au régime d’Assad. Par ailleurs, la stratégie des tirs de roquettes du Hamas n’apporte aucune avancée au peuple palestinien; au contraire, elle permet au gouvernement israélien de justifier ses attaques et, en tuant des civils israéliens, crée une division et diminue le soutien pour la cause palestinienne parmi les Israéliens.
Déjà dans les années 1980, la stratégie de l’OLP de Yasser Arafat était de s’appuyer sur les pays arabes pour mener une lutte armée de libération de l’extérieur. Cependant, le soutien des pays arabes n’était lié qu’à leur propre intérêt économique. Ainsi, le Roi de Jordanie négociait en secret avec Israël pour récupérer la Cisjordanie qu’il considérait comme une province de son royaume. Cette stratégie a causé une faillite complète de la lutte palestinienne, menant à une insurrection des masses et à la première intifada en 1987.
Seules des actions de masse pourront arrêter le massacre
En 1987, la première intifada a mené à une situation de double pouvoir dans les territoires palestiniens, qui n’étaient plus contrôlés ni par l’administration civile israélienne ni par les autorités municipales palestiniennes. Le pouvoir était entre les mains de comités populaires élus dans les villes, les villages et les camps de réfugiés. Le mouvement n’a pu être arrêté que par la trahison de l’OLP de Yasser Arafat qui a repris le pouvoir des comités et créé l’Autorité palestinienne, ce qui n’a pas empêché Israël de continuer à créer des colonies. Cette impasse a débouché sur la Seconde Intifada en 2000, dominée par les attentats-suicides organisés par le Hamas, sans participation des masses et sans processus démocratique.
En Afrique du Nord, seuls les mouvements de masse des travailleurs et des jeunes ont été capables de faire tomber les dictateurs avec qui les puissances impérialistes collaboraient depuis des décennies. Le peuple palestinien ne peut compter que sur ses propres forces et celles des travailleurs israéliens pour mettre fin au conflit. Le 26 juillet dernier, une manifestation antiguerre a rassemblé 6.000 personnes à Tel-Aviv, et une autre près de 10.000 en août, dont une majorité de juifs, et ce malgré la propagande du gouvernement. Cela montre le potentiel pour des mouvements de masse dans la région.
Le monde dans la tourmente
Les minorités nationales ne peuvent espérer la fin de leur oppression sous le système capitaliste. En effet, les impératifs de profits de ce système sont antagonistes à l’octroi de droits démocratiques pour les différentes minorités d’un pays, tels que les droits linguistiques. De plus, dans une période de crise du capitalisme comme celle que nous traversons aujourd’hui, les tensions inter-impérialistes sont brutalement ravivées et donnent lieu à une multitude de conflits locaux. Dans de telles situations, chaque puissance impérialiste instrumentalise chaque nationalité, chaque ethnie pour mieux défendre ses intérêts, et ce y compris militairement. On le voit en Ukraine, où les droits de la population russophone sont utilisés comme prétexte par Poutine qui n’est en réalité guidé que par les intérêts économiques que représentent le passage du gaz russe vers l’Europe ou la base marine russe en Crimée. De la même manière, l’Union européenne utilise le sentiment anti-Poutine pour tenter de développer une emprise sur l’économie ukrainienne. Les tensions impérialistes créées par le système capitaliste mènent inévitablement à la guerre et à la misère pour les masses.
C’est pour cette raison que le Mouvement Socialiste de Lutte, section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Israël-Palestine, section soeur du PSL, soutient non seulement la fin du siège de Gaza et des attaques israéliennes, mais également la création d’organisations indépendantes de travailleurs en Palestine et en Israël, ainsi que la lutte de masse des Palestiniens sous leur propre contrôle démocratique pour leur droit à l’auto-détermination, avec comme objectif la création d’un État palestinien indépendant, socialiste et démocratique, au côté d’un État d’Israël socialiste et démocratique, dans le cadre de la lutte pour un Moyen-Orient socialiste.
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Socialisme et droits nationaux
Contribution au débat autour de la situation en Ukraine, Israël-Palestine et autres pays
manifestation contre la guerre à Gaza, 17 août 2014, délégation du PSL et des Étudiants de Gauche Actifs. Photo : MediActivista.Avec le conflit sanglant en Ukraine et le massacre du peuple palestinien à Gaza, la “question nationale” revient une fois de plus en force à l’avant-plan du débat. Quelle feuille de route pour résoudre des conflits apparemment vieux de plusieurs siècles ? C’est la question qui est directement posée au mouvement des travailleurs, dans les régions immédiatement affectées par la guerre mais aussi à l’échelle internationale.
Article de Peter Taaffe, secrétaire général du Socialist Party, section du CIO en Angleterre et Pays de Galles.
L’Ukraine
Les évènements de ces derniers mois ont fort bien illustré le fait que les différentes puissances capitalistes n’ont pas la moindre volonté ni d’ailleurs la moindre capacité à trouver une solution démocratique et équitable à la situation en Ukraine. D’un côté, l’hypocrisie éhontée du capitalisme américain et du capitalisme européen ; de l’autre, le régime oligarchique de Poutine en Russie – et ces deux camps cherchent à se faire passer pour le défenseur des “minorités et nations opprimées” – bien que peu de travailleurs conscients en soient dupes. Tout cela n’est que pur calcul, couplé à des enjeux cruciaux sur le plan stratégique, politique et militaire. Le “droit à l’auto-détermination” n’est pour ces puissances qu’un slogan vide de toute substance, une petite monnaie politique facilement jetable au cas où elle irait à l’encontre de leurs intérêts.
« Nous allons mettre la Russie à genoux avec nos sanctions », crient les puissances impérialistes occidentales, États-Unis en tête. « Nous répondrons par nos propres sanctions, en confisquant les actifs des entreprises britanniques comme Shell ou British Petroleum », leur répond le régime poutinien.
Si les capitalistes, leurs partis et leurs représentants politiques n’offrent aucune solution, certains militants de gauche, dont certains se considèrent même marxistes, révèlent une profonde confusion idéologique et une totale incapacité à s’y retrouver parmi ces graves conflits ethniques et nationaux en Ukraine et au Moyen-Orient. Au Royaume-Uni, il n’y a pas une once de socialisme – et encore moins de marxisme – dans l’approche et l’analyse mises en avant par la plupart des forces qui se réclament pourtant de la “gauche”.
Par exemple, un tract distribué à Londres par la campagne “Solidarité avec la résistance antifasciste en Ukraine” lors de la dernière manifestation de soutien à la population de Gaza, proclamait : « Nous sommes contre le soutien accordé au régime d’extrême-droite de Kiev par les gouvernements britannique et occidentaux ». Nous sommes d’accord avec cela, surtout vu que le gouvernement de Kiev se base sur des forces de droite radicale, voire néofascistes, pour mener sa campagne meurtrière dans l’Est ukrainien.
Mais pourquoi ne pas également condamner le régime oligarchique impérialiste russe dirigé par Poutine, en donnant une critique de son intention de dominer le “proche étranger”, ce qui inclut plusieurs pays de l’ex-Union soviétique, en mettant de côté les droits nationaux et démocratiques de ces pays ?
Nulle mention de cela dans ce tract. Par contre, un des principaux dirigeants de cette campagne est intervenu lors du meeting de lancement pour dire : « Ce n’est pas mon rôle de critiquer l’oligarchie russe ; mais si je devais le faire, alors ma critique porterait non pas sur le fait qu’elle intervient trop, mais sur le fait qu’elle n’intervient pas du tout ! ». Poursuivant sur sa lancée, cette même personne a été jusqu’à dire que « il n’y a pas de question nationale » en Ukraine, et que « Quand je vois arriver en face l’impérialisme américain, l’Otan, Angela Merkel, le gouvernement britannique et les fascistes ukrainiens – moi je connais mon camp ». L’idée donc est que le mouvement des travailleurs – puisque cette intervention vient d’un “marxiste” – devrait se ranger du côté du régime oligarchique de Poutine et soutenir son intervention en Ukraine.
Notre analyse est que nous soutenons sans réserve les aspirations nationales légitimes des peuples de l’Ukraine, de Crimée, etc. tout en nous opposant et en combattant les forces d’extrême-droite et ouvertement fascistes en Ukraine, qui n’ont en réalité pas obtenu plus de 3 % des voix lors des dernières élections. En même temps, nous cherchons à forger et renforcer une unité de classe, en donnant un soutien critique aux forces véritablement socialistes sur le terrain, même si elles sont faibles.
Pas de formule toute faite
Il est extrêmement important de soutenir les aspirations nationales et démocratiques authentiques des peuples de l’Ukraine et de la sous-région. Par exemple, si on prend la question de la Crimée, il était correct de soutenir le droit à l’auto-détermination – y compris la sécession d’avec l’Ukraine, ce qui semblait être le souhait de l’immense majorité de la population. Mais en même temps, les marxistes ont pour devoir, lorsqu’ils donnent leur soutien critique à tout mouvement pro-indépendance authentique, de défendre les droits de toutes les minorités : dans le cas de la Crimée, cela inclut les Ukrainiens de Crimée, les Tatars, et les autres minorités nationales (Biélorusses, Arméniens, Juifs, Grecs, Rroms)
Des voix ont dénoncé le fait que le référendum en Crimée n’a pas été organisé de manière équitable et pacifique. Mais il ne fait aucun doute que la majorité de la population désirait réellement revenir à la Russie. Tous ces doutes auraient pu cependant être dissipés par l’élection d’une assemblée constituante – ou parlement – révolutionnaire composé de délégués élus lors d’assemblées de masse locales afin de faire respecter la décision populaire ou d’organiser un référendum démocratique.
Cela signifie-t-il que nous sommes pour le séparatisme et la désagrégation de tout État multinational ? Non, pas de manière automatique. Devant la question nationale, il n’existe aucune solution ou formule toute faite. La situation sur le terrain en Ukraine est d’ailleurs extrêmement fluide : ce qui peut être une revendication correcte aujourd’hui pourrait se voir demain emporter par les évènements.
Par contre, nous sommes contre la rétention par la force d’un groupe ou d’une nationalité au sein d’un État qui est considéré par ce groupe ou cette nationalité comme étant un oppresseur. Nous sommes pour une confédération socialiste sur base volontaire. C’est en suivant cette méthode qu’a été créée la véritable Union soviétique fondée par Lénine et Trotsky – pas sa caricature sanglante stalinienne qui ne faisait en fait que masquer la domination de l’élite bureaucratique russe centralisée.
Mais comme Lénine le disait d’ailleurs il y a un peu plus de cent ans, la société nouvelle, qui devrait nécessairement être démocratique tout autant que socialiste, ne pourra être ba?tie sur base de “la moindre contrainte” envers un groupe ou une nationalité. De manière générale, le droit à l’auto-détermination s’applique à une nationalité liée à une entité territoriale bien définie. Cependant, cette entité peut aussi parfois prendre la forme d’une ville, ou d’une entité plus petite qui se considère malgré tout comme différente et à part des autres pays ou régions l’entourant. Par exemple, nous avons déjà envisagé l’éventualité de voir apparaitre dans le futur une entité spéciale pour la ville de Bruxelles – au sein d’une confédération socialiste belge –, vu que la population de cette ville se considère clairement ni flamande, ni wallonne.
De même, la lutte en Ukraine, et en particulier dans l’Est, pourrait se voir si fragmentée par le conflit sanglant en cours aujourd’hui, que cela pourrait avoir pour résultat non pas un État ni un micro-État continu, mais un processus de “cantonisation” de la région. Dans la grande ville de Donetsk, bombardée par les forces du gouvernement ukrainien et dont la majorité de la population (autrefois d’un million de personnes) a pris la fuite, on pourrait voir se développer une situation où la population réclamerait une séparation de l’Ukraine comme de la Russie. Il incombera dans ce cas aux marxistes, si c’est la volonté de la population de la ville, de soutenir cette aspiration, tout en liant cette revendication à celle d’une confédération socialiste d’Ukraine et de la sous-région.
Une telle solution n’est pas du tout utopique, comme le suggèrent nos adversaires. Le monde unipolaire des dernières décennies, dans lequel les États-Unis étaient en mesure d’imposer leur volonté et d’influencer directement le cours des évènements sur la scène mondiale, n’est plus. Les États-Unis restent, il est vrai, la première puissance économique et militaire, et le resteront encore pendant un certain temps. Mais cette puissance a des limites. Un nouveau “syndrome” post-iraqien est apparu aux États-Unis, où la population est fatiguée de la politique guerrière menée par son État et exprime de plus en plus son opposition à l’interventionnisme. C’est pourquoi les bombardements aériens et l’utilisation de drones sont devenues les méthodes d’intervention préférées. D’un autre côté, de tels bombardements ne produisent bien souvent que l’effet inverse de celui qui était désiré.
Israe?l-Palestine
Tel un fil d’Ariane, seule une analyse marxiste consistante peut nous mener à travers le dédale de la question nationale. Ceci vaut en particulier pour la question très complexe des droits nationaux des peuples palestinien et israélien, une fois de plus mis en avant par la dernière offensive sur Gaza – qui ressemble maintenant plus à Grozny en Tchétchénie, avec d’innombrables morts et dont un quart de la population de 1,2 millions d’habitants a fui.
Le CIO a toujours et patiemment expliqué que la seule issue par rapport à ce conflit sanglant qui puisse satisfaire les droits des Palestiniens comme des Israéliens serait de mettre en avant une solution à deux États sur le long terme – une Palestine et un Israël socialiste – avec la possibilité d’une capitale partagée à Jérusalem, en liant cela au concept d’une confédération socialiste. C’est cette idée, ainsi que notre opposition à des sanctions non ciblées envers Israël – parce que cela pourrait avoir pour conséquence de pousser les travailleurs israéliens encore plus dans les bras de la droite et du gouvernement israélien – qui est maintenant attaquée aux États-Unis par l’Organisation socialiste internationale (ISO).
Cette organisation a émis le 17 aout une critique de nos camarades américains du groupe Socialist Alternative, selon laquelle “Leur attitude envers les travailleurs juifs israéliens coïncide avec la position traditionnelle de ce groupe et du CIO selon laquelle l’existence d’Israël serait légitime (…) C’est cette croyance dans le droit des Israéliens à former leur propre nation qui justifie également le CIO à s’opposer au boycott d’Israël. Mais cette approche se base sur une compréhension fondamentalement erronée du principe socialiste du droit des nations à l’auto-détermination. Dans toute la tradition du marxisme authentique, il n’y a jamais eu le moindre soutien envers le droit à l’existence d’un État colonisateur – qui est par définition un État d’apartheid, que ce soit un État juif dans lequel les non Juifs sont privés de droits politiques, ou que ce soit l’État d’apartheid sud africain dans lequel les non-blancs étaient également privés de ces droits.”
Le droit à l’auto-détermination n’est pas un “principe socialiste”, comme l’affirme l’ISO, mais une tâche démocratique ; même s’il est vrai qu’à notre époque, les véritables principes démocratiques ne peuvent plus être défendus et résolus que par la révolution socialiste. Nous avons déjà répondu à de nombreuses reprises à ces arguments et à beaucoup d’autres. Dans notre ouvrage “Marxism in Today’s World”, nous écrivions ceci : « La loi la plus importante de la dialectique est que la vérité est concrète. Si on prend les débats historiques, il est clair que le trotskisme, en partant de Trotsky lui-même, s’est opposé à la formation d’un État juif sur le territoire de la Palestine. C’était la position qu’il a adoptée dans la période de l’entre-deux-guerres. Cependant, il a modifié sa position après que la persécution des Juifs par les Nazis soit devenue évidente. Une nouvelle situation était survenue. Trotsky a toujours été très flexible lorsqu’il fallait prendre en compte de nouveaux facteurs importants. Il y avait réellement un sentiment de la part de la population juive qu’il fallait absolument quitter l’Allemagne et l’Europe, et cela était accompagné du rêve d’une nouvelle terre promise.”
« Sous le socialisme, raisonnait Trotsky, si les Juifs désiraient un État, disons, quelque part en Afrique, avec l’accord des populations africaines, ou en Amérique latine – cela pourrait être considéré ; mais pas en Palestine. Car il s’agirait là pour les Juifs d’une véritable souricière ». Il est surprenant de voir à quel point cette prédiction s’est réalisée… Le mouvement trotskiste s’est opposé à la création d’un État juif séparé en Israël, parce qu’il aurait constitué un frein à la révolution arabe. Israël a été créé sur base de la colonisation des terres arabes en en chassant les Palestiniens et en utilisant un mélange de rhétorique nationaliste radicale, voire “socialisante”, destinée à la population juive qui avait échappé au cauchemar de l’Holocauste et de la Seconde Guerre mondiale.
Sur la question des États colonisateurs, nous avons déclaré : « Un État ou une série d’États peuvent être établis par le déplacement brutal de populations. Jetons un œil par exemple à la déportation forcée de la population grecque de nombreuses régions d’Asie mineure ou à celle des Turcs de Grèce à la suite de l’effondrement de l’Empire ottoman. Si on revenait en arrière pour redessiner la carte, on aurait de nouveau d’énormes échanges de population. Ailleurs, les crimes terribles commis en Europe à l’encontre des Juifs sous le capitalisme nazi ont été utilisés en tant que justification pour un nouveau crime à l’encontre du peuple palestinien. Cela demeure un fait historique indiscutable.”
“Cependant, la réalité aujourd’hui est que, au fil du temps, nous avons vu se former une conscience nationale juive ou israélienne. Que disent les marxistes à ce sujet ? Devrions-nous simplement ignorer la situation réelle et maintenir coute que coute notre vieille position ? La solution de [l’ISO] et d’autres militants de gauche est d’avoir un seul État palestinien – ce qui était notre position au début –, un État palestinien unifié avec des droits à l’autonomie pour les Juifs en son sein. Cependant, ces gens ont mis en avant cette revendication dans un cadre capitaliste, alors que nous ne l’avions jamais envisagé autrement que sur base du socialisme. Nous n’avons pas non plus une position d’une solution à deux États sur base capitaliste, comme le font certains petits groupes. Car il s’agit là d’une utopie ».
“D’autres propositions considéraient seulement de donner une petite portion de la Palestine historique au peuple palestinien. La proposition de l’ancien Premier ministre israélien Olmert, pour une redivision de la Palestine (dont plus personne ne parle à présent), n’aurait laissé que 10 % du territoire aux Palestiniens pour y former leur État : un véritable bantoustan. Et certainement pas une solution pour un État viable du point de vue des Palestiniens. Dans le cadre du capitalisme, il n’y a pas la moindre possibilité de parvenir à une solution viable à deux États. On ne peut exclure un arrangement temporaire, mais cela ne serait pas non plus une solution aux problèmes nationaux des Palestiniens ni des Israéliens. Néanmoins, l’idée d’une solution à deux États, d’une Palestine socialiste et d’un Israël socialiste dans le cadre d’une confédération socialiste du Moyen-Orient est, à ce stade, une revendication programmatique correcte.” (Marxism in Today’s World, édition 2013, pp. 29-30)
Il ne fait aucun doute que l’ISO et autres rejettent l’idée d’une confédération socialiste du Moyen-Orient en tant que solution irréalisable par rapport aux souffrances des masses à travers la sous-région. Mais les capitalistes eux-mêmes se rendent bien compte des énormes retombées économiques qui pourraient provenir de la mise en place d’une telle confédération : « Par exemple, l’Égypte bénéficie d’une main d’œuvre à bon marché mais a un taux de chômage élevé. La Libye a du capital en excès, d’immenses projets d’infrastructures et une demande insatiable de main d’œuvre. La Turquie a l’expertise pour la construction d’aéroports, de ponts et de routes. Tous ces éléments doivent être rassemblés. Selon notre recherche, au moins 20 milliards de dollars ont été promis à l’Égypte par les pays du Golfe au cours des derniers mois, mais sans aucun plan sur le long terme. La Ligue arabe, en tant que structure régionale, ne possède pas non plus ni la crédibilité, ni la capacité, ni la créativité nécessaires au rassemblement de toutes ces nations ». (Financial Times, 20 June 2014)
Les capitalistes du Moyen-Orient sont incapables de réaliser un tel projet. Mais la classe des travailleurs, œuvrant de manière unifiée tout en instaurant le socialisme démocratique à travers toute la sous-région, serait bien capable de mettre sur pied une confédération socialiste.
Les campagnes de boycott d’Israël
L’ISO compare de manière grossière Israël aujourd’hui à l’Afrique du Sud de l’apartheid. Cependant, cela ne renforce pas sa critique du CIO, bien au contraire. Contrairement à ce que prétend l’ISO, il y a de profondes différences entre le régime d’apartheid sud-africain et Israël, surtout du point de vue démographique. En Afrique du Sud, il y avait sept fois plus de Noirs et “colorés” que de Blancs. Cela ne correspond pas du tout à la situation actuelle en Israël-Palestine. Si elle se sent menacée de destruction, la population israélienne ripostera.
Nous écrivions dans Marxism in Today’s World (p. 32) que : « Même le “camp de la paix” prendra les armes si il voit remis en question le droit des Juifs à un État séparé. La classe des travailleurs israéliens se battra si elle se voit menacée de se faire jeter à la mer. Par conséquent, il nous faut employer des revendications transitoires afin d’approcher les masses. Pour nous, la population doit décider d’elle-même quelles seront les frontières du futur État dans le cadre d’une confédération socialiste. Nous pourrions même voir, à la suite d’une révolution socialiste au Moyen-Orient, les Israéliens et Palestiniens décider de vivre ensemble dans le cadre d’un seul État avec une autonomie pour les deux peuples. Nous ne pouvons rien prédire à l’avance. Mais la dialectique de cette situation est que, dans le contexte actuel, si vous tentez d’imposer un État unique à ces peuples, cette proposition sera rejetée.
Israël est une plaie béante au beau milieu de la sous-région. Un enjeu vital pour la révolution au Moyen-Orient est de trouver une méthode pour dissocier les travailleurs israéliens de leur classe dirigeante. Mais si vous les menacez ou remettez en question l’idée d’un “foyer” israélien, alors il n’y a aucune chance d’arriver à cet objectif ».
En ce moment, nous devons assumer le fait que les peuples palestinien et juif ont décidé qu’ils ne peuvent pas vivre ensemble au sein d’un même État. C’est ce que leur dicte leur conscience. Que doivent dire les marxistes ou les trotskistes dans une telle situation ? L’ISO se contente tout bonnement de répéter des formules abstraites qui n’ont absolument aucun lien avec la situation sur le terrain. Les socialistes et marxistes ne peuvent forcer différents peuples à vivre au sein d’un même État.
À propos des campagnes de boycott, l’ISO a maintenant commencé à s’en prendre à un article de Judy Beishon, publié il y a un an dans notre magazine Socialism Today (nº 169). Une fois de plus, leurs arguments sont non seulement erronés, mais tombent en plus à côté de la plaque. Ni Judy, ni le CIO n’est contre le boycott de manière générale. Nous préférons, il est vrai, insister sur le fait que seule une action de masse et unie de la part des travailleurs israéliens et palestiniens pourra donner naissance à une force capable de renverser les capitalistes, en Israël comme en Palestine. Cependant, des boycotts ciblés peuvent jouer un rôle auxiliaire afin d’affaiblir l’État israélien : par exemple, le boycott des exportations d’armes israéliennes, ainsi que des marchandises produites dans les territoires occupés, ou des universités qui y sont situées. De telles mesures pourraient être utiles, car elles serviraient à dénoncer l’oppression des Palestiniens. Mais en elles-mêmes, elles ne seront jamais suffisantes pour sérieusement saper l’emprise du gouvernement et de la classe dirigeante israéliens – pas plus que les sanctions et boycotts de produits sud-africains n’ont véritablement affaibli le régime d’apartheid. En outre, cette campagne ciblée, qui pourrait acquérir un nouveau soutien vu la vague d’horreur qui vient de déferler à Gaza, devrait être discutée non seulement avec les Palestiniens, mais surtout avec les travailleurs israéliens. Tout cela était décrit et détaillé dans l’article de Judy, avec lequel nous sommes en plein accord.
La même approche unilatérale a été adoptée par l’ISO par rapport aux tirs de missiles lancés par le Hamas sur Israël en guise de représailles. Nous ne nous sommes jamais opposés au droit des Palestiniens à se défendre contre les attaques israéliennes, y compris à organiser une défense armée de Gaza et à lancer des attaques légitimes sur des cibles militaires en Israël même. Mais nous avons toujours par contre souligné non seulement l’inefficacité des méthodes employées actuellement – c’est comme lancer des cailloux sur des tanks – mais aussi leur caractère carrément contre-productif lorsque ces méthodes sont employées envers des civils, car elles ne font que repousser les travailleurs israéliens dans les bras de leur propre pire ennemi : le gouvernement de droite de Netanyahu – tout comme les attaques d’Israël envers des civils ne fait en réalité que renforcer le Hamas plutôt que l’affaiblir.
La question nationale est incomparablement plus compliquée aujourd’hui que celle qui existait à l’époque de Lénine et Trotsky. Pour les marxistes, elle a deux facettes. D’un côté, nous sommes opposés au nationalisme bourgeois, qui cherche à diviser la classe des travailleurs. Nous sommes pour l’unité maximale de la classe des travailleurs au-delà des frontières et des continents et à l’échelle mondiale. Mais de l’autre côté, nous sommes contre toute incorporation forcée de nationalités distinctes au sein d’un même État contre leur volonté. Nous sommes pour l’indépendance de l’Ukraine, mais sommes totalement opposés au régime de Kiev et à sa politique de répression des droits des minorités tout en s’appuyant sur des éléments de droite néofasciste et nationalistes ukrainiens. De même, nous sommes contre le chauvinisme grand-russe de Poutine et de ses partisans, et luttons pour une indépendance de classe dans la lutte pour une confédération socialiste de la sous-région.
Ce n’est que de cette manière, avec un programme de classe et des perspectives nettes, qui évitent la propagande abstraite, que nous pourrons tracer un chemin afin de gagner les travailleurs aux idées du socialisme et du marxisme, même dans des situations objectives difficiles faites de guerres et de conflits.
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[PHOTOS] Manifestation nationale contre la guerre à Gaza (4)
Ce dimanche, une manifestation nationale a eu lieu à Bruxelles afin de protester contre le terrorisme d’Etat israélien et contre l’offensive menée contre la bande de Gaza. Le cessez-le-feu temporaire na pas arrêté les horreurs subies par la population palestinienne. Le conflit n’est toujours pas résolu. Les actions de protestation et de solidarité restent donc de première importance. Cette manifestation nationale a pu compter sur la présence d’environ 5000 participants, moins que la dernière fois, alors que les attaques contre Gaza étaient plus au cœur de l’attention. Cette mobilisation n’en reste pas moins remarquable durant les vacances d’été.
Le PSL et les Étudiants de Gauche Actifs (EGA) étaient bien entendu présents lors de cette manifestation, au sein d’une délégation combative aux nombreux slogans contre la guerre, le blocus, l’occupation et l’exploitation capitaliste. Dans ce bloc du cortège, on pouvait aussi trouver d’autres groupes, notamment des militants des JOC (Jeunes Organisés et Combatifs) et un groupe de Cachemiris de gauche. Nous sommes intervenus avec un tract spécifique, un supplément à notre journal Lutte Socialiste, des affiches et des badges.
Les photos ci-dessous sont de Mediactivista.
