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Tag: Elections présidentielles US 2016
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Questions/Réponses. Quelle analyse du résultat des élections présidentielles américaines ?
Ces élections ont conduit Donald Trump, un raciste misogyne ignorant démago milliardaire au poste le plus puissant du monde. Ci-dessous, Conor Payne et Eddie Mccabe (Socialist Party, section du Comité pour une Internationale Ouvrière en république irlandaise) se penchent sur les questions les plus urgentes qui en découlent.
Comment Trump a-t-il pu l’mporter alors qu’il était l’un des candidats les plus détestés de l’histoire américaine?
Ces élections étaient bizarres : le deuxième candidat le plus détesté de l’histoire est parvenu à perdre face au plus détesté. L’élection de Trump à la présidence n’implique donc pas un soutien majoritaire pour lui ou pour sa politique. Il a du reste gagné la course avec moins de 26% de l’électorat et a perdu le vote populaire de deux millions de voix.
99 millions de personnes, soit 43% de l’électorat, et en particulier la classe ouvrière et les pauvres, n’ont tout simplement pas été voter. Cela a particulièrement affecté le Parti démocrate, dont le vote s’est effondré d’environ neuf millions de voix par rapport à l’élection d’Obama en 2008. La participation était moindre parmi les noirs, la jeunesse et d’autres couches-clés de la base traditionnelle du Parti démocrate qui n’ont pas ressenti d’enthousiasme pour la candidature de Clinton.
Trump a d’autre part été en mesure de gagner à lui des membres de la classe ouvrière de la «Rustbelt» (”ceinture de rouille”, nord-est industriel du pays, NDT) qui avaient été convaincus par Obama en 2012. Ces villes sont fortement touchées par la désindustrialisation et les accords commerciaux néo-libéraux tels que l’ALENA (Accord de libre-échange nord-américain). Les attitudes racistes et sexistes de Trump ont joué un rôle, ces éléments sont profondément ancrés dans la structure même du capitalisme américain. Mais le soutien accordé à Trump par une partie de la classe ouvrière essentiellement blanche reflète un grand désespoir de même que la volonté de voter pour n’importe quel candidat semblant offrir un changement ou semblant être une opposition à l’establishment.
Trump a capitalisé sur cette colère avec ses attaques contre les accords commerciaux tels que le TPP et le TTIP, son discours sur le «système truqué» et ses appels aux «hommes et femmes oubliés.» La victoire de Trump souligne la crise et la décadence du capitalisme américain et de ses partis politiques. L’establishment républicain a été incapable de le vaincre dans les primaires et celui des démocrates a subi le même échec avec les élections générales. Cela illustre l’affaiblissement de l’autorité et de la base de soutien des deux partis de Wall Street à mesure que le mécontentement se développe dans la société américaine.
Pourquoi Hillary Clinton a-t-elle échoué?
En tant qu’alternative à Trump, le Parti démocrate a misé sur Clinton: la figure représentant le plus parfaitement le statu quo et la domination de l’establishment, de Wall Street et de la guerre. Ses discours payés par les banques de Wall Street, son bilan en tant que secrétaire d’État et le scandale des emails divulgués par Wikileaks ont démontré que Clinton est personnellement impliquée dans ce qu’elle prétendait vouloir combattre.
Au cours des primaires du Parti démocrate, la machine du parti a durement lutté pour s’assurer que Clinton soit nommée et que la campagne de Bernie Sanders soit battue. Sanders a remporté un énorme soutien en défendant des soins de santé solidaires, un enseignement gratuit, un salaire minimum fédéral de 15 $ de l’heure et une «révolution politique contre la classe milliardaire».
Cette campagne avait le potentiel de couper l’herbe sous le pied du populisme de droite de Trump. Un sondage effectué la semaine de l’élection a montré que Sanders aurait vaincu Trump avec 56% des suffrages contre 44%. En truquant les primaires en faveur de Clinton, le Parti démocrate porte sur lui une énorme responsabilité quant à la victoire de Trump. Si l’establishment démocrate n’était pas aussi éloigné de l’atmosphère qui vit au sein des masses, il aurait pu faire des gestes envers la campagne de Sanders et adopter certaines de ses propositions. Il ne l’a pas jugé utile. Au lieu de cela, Clinton a répondu au slogan de Trump, «make America great again» avec le délirant «l’Amérique est déjà grande.» L’establishment démocrate a présenté un choix qui se résumait au statu quo ou à Trump. Nous avons vu pour quel résultat.
Un establishment politique discrédité ne peut pas vaincre Trump. Pour faire échec à son projet politique, les mouvements sociaux de travailleurs, de femmes, de migrants, de personnes LGBTQI et de toutes les autres cibles de la droite républicaine doivent s’unir et construire un rapport de force. Il faut en finir avec la camisole du Parti démocrate et créer une nouvelle alternative politique : un parti pour et par la classe ouvrière.
A quoi ressemblera la présidence Trump ?
Il faut encore voir quelles sont les promesses que Trump va essayer de tenir. Il s’agit fondamentalement d’un populiste, pas d’un politicien aux principes ou convictions solides. Ses fréquents virages 180 degrés l’ont suffisamment démontré. Il a immédiatement fait marche arrière concernant l’arrestation d’Hilary Clinton suite au scandale de ses emails, par exemple.
L’establishment capitaliste qui a massivement soutenu Clinton fera tout son possible pour s’opposer aux politiques et à la rhétorique qui iront à l’encontre de ses intérêts, à l’instar des politiques protectionnistes qui menacent les accords commerciaux tels que le TTIP et l’ALENA. La droite républicaine dont il s’est entouré veillera à cela.
Mais il y a trois choses dont nous pouvons être certains :
1) Trump sera le président de la classe des milliardaires. Il veut par exemple supprimer les biens maigres législations du secteur bancaire. C’est un joli cadeau pour Wall Street. Il veut accroitre les dépenses militaires et se montre ainsi favorable à l’industrie de l’armement. Son approche anti-climat sonne telle une berceuse aux oreilles des compagnies d’énergie. Tout son projet fiscal – 5,5 milliards de dollars – est en faveur des plus riches : 83% de cette somme est destinée aux 20% les plus riches de la population et 50% au seul 0,1%.

Protestation anti-Trump à New York. 2) Trump n’a rien à offrir à la classe ouvrière, y compris aux pauvres électeurs blancs du Wisconsin, de l’Iowa, de l’Indiana et de la Pennsylvanie qui sont passés des démocrates aux républicains lors de ces élections. Trump a pu abuser de leurs votes pour disposer des grands électeurs nécessaires à sa victoire. Toutes les conquêtes sociales obtenues par une lutte acharnée des années durant (y compris les programmes comme Medicaid et Medicare) sont aujourd’hui gravement menacées, tout comme le droit à l’avortement et les droits des personnes LGBTQI.
3) La présidence de Trump provoquera d’importantes convulsions sociales. Son régime va poursuivre son offensive de droite et réactionnaire contre les travailleurs, les femmes, les personnes de couleur, etc. La résistance sera forte, avec des manifestations de masse, des grèves et d’autres formes de lutte. Les forces d’extrême droite et les forces racistes – y compris parmi la police – se sentiront encouragées par sa victoire. Il faudra s’organiser contre ces groupes. Nous avons déjà pu voir un aperçu des luttes que nous réserve la période à venir. Et les choses sérieuses n’ont pas encore commencé.
Lors de la première rencontre entre Trump et Obama, des partisans de Clinton comme Oprah Winfrey ont tweeté, “#Hopelives”. Le journaliste du New York Times, Nicholas Kristof a défendu auprès de ses lecteurs de “donner une chance à Trump”. Obama a exprimé les espoirs d’une grande partie de l’establishment qui, compte tenu de l’inexpérience de Trump, pensent qu’il sera peut-être plus mesuré et tempéré dans son nouveau rôle. Il a déclaré : «mener campagne est une chose différente que gouverner. Je pense qu’il le reconnaît. »Ce pseudo-espoir va à l’encontre de la réalité. Trump n’a pas du tout renié son projet de construire un mur à travers la frontière mexicaine, d’attaquer les droits à l’avortement et d’expulser jusqu’à trois millions d’immigrants sans papiers au cours des deux prochaines années. Un coup d’œil à son équipe de transition démolit l’idée que son administration agira comme un contrôle sur ses ambitions sauvages.
Qu’est ce que l’Alt-right?
La personnalité la plus alarmante nommée par Trump est le suprématiste blanc détraqué, Steve Bannon, qui deviendra son stratège en chef. Bannon a déjà décrit son site Breitbart News comme “la plate-forme de l’Alt-right”. Le mouvement Alt-right ou ”droite alternative” est une mouvance de conservatisme d’extrême droite qui embrasse et favorise généralement le suprématisme blanc, l’antisémitisme, le sexisme, l’homophobie et la transphobie. Le site web néo-nazi, Daily Stormer, a qualifié Bannon de “notre homme à la Maison Blanche”.
En ligne avec la misogynie profonde de Trump, le site Web de Bannon a publié un article titré, «le contrôle des naissances rend les femmes peu attrayantes et folles». Bannon a d’ailleurs été accusé de violences conjugales envers son ex-femme. Elle a finalement été dissuadée de témoigner.
Trump a également nommé Myron Ebell à la transition de l’Agence de protection de l’environnement pour son administration. À l’instar de Trump, Ebell est un dangereux climato-sceptique qui a longtemps présidé la Cooler Heads Coalition, un groupe qui décrit sa mission comme étant de «dissiper les mythes du réchauffement planétaire».
Le 26 novembre prochain, nous accueillerons à Bruxelles KSHAM SAWANT, élue au Conseil de la ville de Seattle (plus d’infos sur l’événement – Qui est Kshama Sawant ?)
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USA. Vers quatre ans de chaos et de luttes! Il nous faut une résistance de masse et un nouveau parti des 99%!
Avec l’élection de Donald Trump, les gens se sont réveillés devant l’un des bouleversements politiques les plus choquants de mémoire vivante, aux États-Unis et dans le monde entier. Il s’agit du point culminant d’un cycle électoral où les Américains ordinaires se sont dressés contre l’establishment politique et les effets destructeurs de la mondialisation et du néo-libéralisme. Cela s’est exprimé à gauche avec la campagne de Bernie Sanders, qui a galvanisé des millions de personnes en faveur d’une «révolution politique contre la classe milliardaire», et, de façon déformée, à droite avec la campagne de Donald Trump.
Déclaration de Socialist Alternative
Mais Trump ne s’est pas seulement présenté comme le défenseur autoproclamé des «hommes et des femmes oubliés» dans les communautés de la classe ouvrière. Il a également dirigé la campagne d’un candidat d’un parti majeur la plus ouvertement fanatique et chauviniste des temps modernes. Il a créé un espace permettant aux nationalistes blancs et aux suprématistes blancs de sortir de leurs tanières et de tenter d’atteindre les travailleurs blancs mécontents et la jeunesse. Il s’agit d’un développement très dangereux.
Cependant, nous rejetons totalement l’idée – mise en avant sans relâche par des commentateurs libéraux qui essayent de détourner l’attention de l’échec éclatant du Parti démocrate – selon laquelle ce résultat illustre que la majorité de la classe ouvrière blanche partage le racisme et la xénophobie de Donald Trump. Hillary Clinton a, en réalité, remporté le vote populaire à une marge étroite. Trump n’a seulement obtenu que 47,5% de l’ensemble, alors que des dizaines de millions de personnes parmi les plus pauvres et les plus opprimés n’ont pas voté.
Le vote en faveur de Trump était avant tout un vote de défiance contre Clinton et l’establishment ; il s’agissait d’un vote pour un «agent de changement» contre un représentant affirmé du statu quo. Nombreux sont ceux ont réagi suite aux attaques qu’il a portées contre le «système figé» et les entreprises qui délocalisent les emplois à l’étranger. Ce qui manquait tragiquement était une voix de gauche pour défendre une réelle alternative contre la séduction du populisme de droite.
Socialist Alternative se trouve du côté des millions de femmes dégoûtées par l’élection d’un misogyne et qui considèrent ce fait comme un pas en arrière; du côté des Latinos qui craignent que les déportations massives de travailleurs sans papiers atteignent des niveaux sans précédent; du côté des musulmans et des Afro-américains qui craignent que le discours haineux de Trump n’incite plus de violence et la croissance d’une force d’extrême droite.
Nous avons immédiatement appelé à la tenue de manifestations dans les villes du pays pour clarifier que les travailleurs et les opprimés doivent être solidaires et se préparer à résister ensemble aux attaques de la droite. Au cours de ces dernières 24 heures, nous avons été inondés de demandes d’information sur notre organisation. Nous devons commencer dès aujourd’hui à construire une véritable alternative politique pour les 99% contre les deux partis dominés par les entreprises et contre la droite afin d’assurer de ne pas passer à travers pareille catastrophe en 2020.
Un choc pour la classe dirigeante
Il faut souligner que le résultat de cette élection n’a pas seulement représenté un choc pour des dizaines de millions de travailleurs, de femmes, de immigrants, de personnes de couleur et de LGBT progressistes. Cela a tout autant été le cas de l’élite dirigeante des États-Unis, pour des raisons différentes.
La majorité de la classe dirigeante considère que Trump est incapable de régner. Il est certainement vrai que l’attitude d’intimidation de Trump – qui humilie publiquement ses adversaires et réagit à chaque léger différent par des messages véhéments sur twitter – a plus à voir avec l’attitude de dictateurs. Même George Bush n’était pas aussi fièrement ignorant des affaires internationales. La classe dirigeante craint que la présidence de Trump ne soit potentiellement très dommageable aux intérêts de l’impérialisme américain au moment même où son autorité mondiale est en déclin, particulièrement au Moyen-Orient et en Asie, et qu’il est contesté par la Russie et, tout spécialement, par un impérialisme chinois de plus en plus affirmé.
La classe dirigeante s’oppose fermement au rejet de Trump des accords de libre-échange et des doctrines économiques capitalistes dominantes des quarante dernières années. La vérité, c’est que la mondialisation est bloquée, elle connait un revers partiel. Le vote pour Trump partage quelques traits avec le vote pour le Brexit en Grande-Bretagne pour quitter l’Union européenne. Il s’agissait également d’un rejet massif de la mondialisation et du néo-libéralisme par la classe ouvrière britannique.
La classe dirigeante craint également que le racisme, la xénophobie et la misogynie de Trump ne provoquent des bouleversements sociaux aux États-Unis. Sur ce point, ils ont certainement raison.
À un niveau plus profond, l’aspect probablement le plus horrifiant pour l’élite dirigeante (parmi laquelle les dirigeants d’entreprise, l’establishment politique et les médias de masse qui les servent) est que la méthode avec laquelle elle a dominé la politique de ce pays par le système des deux partis est dorénavant brisée. Election après élection, le processus des primaires a été utilisé pour éliminer les candidats inacceptables pour les intérêts capitalistes. L’électorat n’avait alors plus le choix qu’entre deux candidats approuvés par l’establishment. L’élite capitaliste pouvait bien fortement préférer l’un à l’autre, elle pouvait vivre avec n’importe lequel. La population ordinaire devait s’en remettre à un «moindre mal» ou alors voter pour un troisième candidat sans chance de l’emporter.Tout cela a changé en 2016. Tout d’abord, Bernie Sanders a récolté 220 millions de dollars sans prendre un sou des grandes entreprises. Il s’est fortement approché de la victoire contre Hillary Clinton au cours de primaires démocrates frauduleuses. Trump a également été largement évité par la «classe des donateurs» républicains. Les deux derniers présidents républicains ainsi que le candidat républicain le plus récent l’ont publiquement rejeté.
Les deux candidats les plus détestés
Il est stupéfiant que suite aux primaires, le choix qu’il restait était entre les deux candidats d’un parti majeur les plus impopulaires de l’ère moderne. Les sondages de sortie des urnes ont montré que 61% des électeurs avaient une opinion défavorable de Trump et 54% disaient la même chose à propos de Clinton.

Durant les primaires, le Comité national démocrate (DNC) a fait tout ce qu’il pouvait pour ouvrir la voie à la candidate choisie par l’établissement, Hillary Clinton. Les sondages montraient pourtant que son opposant, Bernie Sanders, était une meilleure option pour battre Trump. Cela indique qu’une couche importante de l’électorat de Donald Trump était ouverte à une véritable argumentation reposant sur les intérêts de la classe ouvrière et opposée à Wall Street ainsi qu’à son programme de libre-échange tout en défendant l’instauration d’un salaire minimum de 15 $ de l’heure, un enseignement gratuit , un système universel de soins de santé ou encore des investissements massifs dans les infrastructures vertes. Les dirigeants démocrates ont préféré perdre que d’être liés à un programme qui répondait véritablement aux intérêts des travailleurs et des pauvres.De manière tout à fait honteuse, la plupart des dirigeants syndicaux ont jeté leur soutien et des millions de dollars derrière Clinton à l’occasion des primaires alors qu’une importante couche de syndicalistes et plusieurs syndicats nationaux soutenaient Bernie Sanders. De cette façon, des directions syndicales ont aidé à soutenir la candidate de Wall Street contre un challenger favorable à la classe ouvrière.
Hillary Clinton est entrée dans la campagne électorale générale en tant que candidate du capital sérieusement endommagée. C’est le scandale des emails du Département d’État qui a attiré le plus d’attention médiatique, mais les révélations de Wikileaks ont également confirmé et souligné l’image que Sanders avait dépeinte dans les primaires: celle d’une candidate domestiquée par Wall Street qui dit une chose au public et l’opposé aux banquiers.
Les apologistes libéraux chercheront à blâmer la classe ouvrière blanche, les partisans de Bernie Sanders ou même les électeurs de Jill Stein pour ce résultat. Mais comme nous l’avons souligné à maintes reprises, le Parti démocrate a abandonné depuis longtemps jusqu’à la prétention de défendre les intérêts de la classe ouvrière. Pendant des décennies, ce parti a mis en œuvre ou appuyé les mesures néolibérales les unes après les autres pour mettre fin à l’aide sociale, appuyer l’incarcération de masse, instaurer l’ALENA (accord de libre-échange nord-américain) sous Bill Clinton ou encore sauver les banques alors que des millions de personnes perdaient leur maison sous Obama.
Après le crash économique de 2008 et 2009, la gauche a donné un sauf-conduit à Obama. Les démocrates ont contrôlé le Congrès et n’ont guère aidé la classe ouvrière alors que se déroulait la pire crise économique depuis les années ‘30. Cela a ouvert la porte au Tea Party pour mobiliser l’opposition au renflouement de Wall Street et capitaliser sur la colère ressentie contre les politiciens établis.
Sous la pression des 45% qui ont soutenu Sanders dans les primaires démocrates, les démocrates ont adopté la plate-forme la plus gauche à leur convention en 40 ans. Mais Hillary Clinton a dirigé sa campagne solidement centrée sur le message que Trump était un danger existentiel pour la République et que “l’Amérique est déjà grande”. Les donateurs de Clinton ne voulaient pas qu’elle aborde des thématiques telles que celle du salaire minimum ou de la dette des étudiants. On pourrait soutenir qu’Hillary n’avait pas de crédibilité en tant que progressiste, alors que pouvait-elle faire? Eh bien ce qu’elle a fait, ça a été de prendre pour colistier Tim Kaine, partisan du Traité Trans Pacifique (TPP) et de la déréglementation bancaire, au lieu de choisir quelqu’un comme Elizabeth Warren. Elle a refusé de promettre de ne pas nommer dans son administration des employés de Goldman Sachs. Cela était totalement désespérant pour les millions de personnes avides de réels changements.Il n’est donc pas surprenant que Clinton n’ait pas su enthousiasmer une plus grande participation des électeurs. Ni Trump ni Clinton n’ont obtenu 50% des voix. Et tandis que Clinton a obtenu une part très légèrement plus grande du vote populaire, elle a obtenu six millions de votes en moins qu’Obama en 2012 et dix millions de moins qu’Obama en 2008. Les voix de Trump étaient inférieures d’un million à celles du candidat républicain malheureux de 2012 Mitt Romney!
Comme l’a souligné le magazine de gauche Jacobin: «Clinton n’a remporté que 65% des électeurs latinos, comparativement à 71% pour Obama il y a quatre ans. Elle a réalisé cette mauvaise prestation contre un candidat dont le programme comprend la construction d’un mur le long de la frontière sud de l’Amérique, un candidat qui a lancé sa campagne en qualifiant les Mexicains de violeurs. Clinton a remporté 34 % du vote des femmes blanches sans diplôme. Et elle n’a remporté que 54% des votes de l’ensemble des femmes, par rapport à 55% pour Obama en 2012. Et Clinton était opposé à un candidat qui est apparu dans une vidéo où il parlait de saisir les femmes «par la chatte». Clinton n’a pas non plus enthousiasmé les électeurs noirs, dont beaucoup n’ont pas participé aux élections. Et elle a perdu dans les communautés de la classe ouvrière blanche, là où Barack Obama avait habilement gagné lors des deux précédentes élections.
L’establishment démocrate a joué un jeu dangereux dans ces élections, et il a perdu. Ce seront les travailleurs, les communautés de couleur et les femmes qui supporteront le plus lourd prix de leur échec.
Bernie Sanders aurait dû se présenter
Au cours de ces dernières années, nous avons assisté à une profonde polarisation politique aux États-Unis, avec la croissance du soutien des jeunes pour l’idée du socialisme et le mouvement Black Lives Matter, alors que la xénophobie et le racisme se sont ouvertement développés parmi une minorité de la population. Mais la tendance générale dans la société américaine a été un glissement vers la gauche, qui s’est exprimé dans le soutien au mariage égalitaire, au salaire minimum et à la taxation des riches. Cette élection ne change pas cette réalité sous-jacente mais elle place clairement la droite au siège du conducteur avec le contrôle de la présidence, des deux chambres du Congrès et de la majeure partie des législatures d’Etat.
Une grande partie de la classe ouvrière blanche et de la classe moyenne ont effectivement utilisé cette élection pour souligner leur rejet total du Parti démocrate mais aussi de l’establishment républicain. De façon déformée, des dizaines de millions de personnes recherchaient un moyen de s’opposer à l’élite capitaliste. Nous ne pouvons pas fermer les yeux sur la croissance du soutien pour les idées d’extrême droite parmi une minorité, mais il est révélateur, par exemple, que les sondages de sortie aient montré que 70% des gens déclaraient que les immigrés sans papiers “devraient disposer d’un statut juridique” contre 25% qui soutenaient qu’ils devraient être déportés.
C’est pourquoi il est absolument tragique que Bernie Sanders ne soit pas présenté. Nous l’avons exhorté à concourir comme candidat indépendant dès septembre 2014, lorsqu’il a émis l’idée d’une campagne présidentielle. Quand il a décidé de se présenter aux primaires démocrates, nous étions en désaccord, mais nous avons continué à nous engager dans une discussion avec ses partisans sur la manière de concrétiser son programme ainsi qu’au sujet de la nécessité d’un nouveau parti.
Nos avertissements sur les conséquences du soutien à Hillary ont été tragiquement confirmés. Si Sanders avait continué à concourir jusqu’en novembre, comme nous l’avons demandé avec beaucoup d’autres, sa présence aurait radicalement changé le caractère de la course présidentielle. Il aurait presque certainement forcé son chemin dans les débats présidentiels. Nous devons maintenant discuter de la formation immédiate d’un nouveau parti des 99% basé sur les millions de votes qu’il aurait pu recevoir. C’est une occasion de grande ampleur qui a été manquée.
Socialist Alternative a soutenu Jill Stein, la candidate du Green Party, qui a reçu un peu plus d’un million de voix et qui se présentait en défendant une plate-forme essentiellement basée sur les intérêts des travailleurs. Sa campagne comportait beaucoup de limites mais, en dépit de celles-ci, les suffrages qu’elle a reçus illustre de manière restreinte quel est l’énorme potentiel pour le développement d’une alternative de gauche de masse.
Une présidence de chaos et de luttes
L’élection de Donald Trump est une catastrophe qui aura de nombreuses répercussions négatives. Mais il s’agit aussi d’une phase dans le processus actuel de bouleversement politique et social aux États-Unis. Le capitalisme et ses institutions sont discrédités comme peut-être jamais auparavant, un processus qui a continué jusqu’à la fin des élections générales avec le FBI qui s’est interposé dans le processus politique et Trump qui a parlé sans relâche du système politique “figé”.
Inévitablement, on trouvera un désespoir généralisé chez certaines couches de la gauche de même que le sentiment que toutes les tentatives de faire avancer la société sont inutiles. Il est absolument indispensable de repousser cette atmosphère. Les changements réels, comme Bernie Sanders l’a souligné, proviennent de la base, des mouvements de masse sur les lieux de travail et dans la rue.
La victoire de Trump représente le “fouet de la contre-révolution”. Le chaos et les provocations pousseront des millions de personne dans l’action pour se défendre. C’est pourquoi ceux qui ont été radicalisés au cours de la période précédente doivent redoubler d’efforts pour construire un véritable mouvement de masse pour le changement, en toute indépendance du contrôle exercé par le monde des entreprises. Les mouvements sociaux de ces dernières années – surtout Black Lives Matter – démontrent le potentiel existant.
Mais il est également essentiel de garder en tête que Trump va inévitablement décevoir ses partisans. «Construire un mur» ne créera pas des millions de bons emplois pour remplacer ceux perdus par l’automatisation et les accords commerciaux. Et bien qu’il parle d’investir dans l’infrastructure du XXIe siècle, il s’est également engagé à opérer des réductions d’impôt massives pour les milliardaires tels que lui. Un mouvement de masse contre Trump devra faire directement appel à la classe ouvrière blanche et expliquer comment nous pouvons créer un avenir où tous les jeunes pourront disposer d’un avenir décent plutôt que d’essayer de recréer le «rêve américain» en approfondissant la division raciale. Un tel avenir ne peut être atteint qu’avec des politiques socialistes.[divider]
Action “Stop Trump” : Aujourd’hui, à 18h, face à l’ambassade américaine ! (Plus d’infos)
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Si vous désirez une analyse plus profonde du résultat des élections présidentielles américaines, nous vous invitons à venir écouter KSHAMA SAWANT à Bruxelles ce 26 novembre !
- Qui est Kshama Sawant, “l’élue rouge au pays du billet vert”?
- Informations pratiques pour le meeting.
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Action "Stop Trump" face à l'ambassade des USA
Ambassade des Etats-Unis (Boulevard du Régent 27, Métro Arts Loi
Stop au racisme et au sexisme ! Stop Donald Trump !
L’élection de Donald Trump comme président des Etats-Unis retentit comme une gigantesque alarme. La colère et la frustration sont énormes face à l’élite (leurs banques, leurs multinationales, leurs médias, leurs partis politiques,…), mais elles sont exploitées par les populistes de droite. Pour eux, le racisme et le sexisme servent surtout à monter les diverses couches de la population les unes contre les autres.
Hillary Clinton et le reste de l’établissement ont perdu toute crédibilité. Leur politique, c’est celle des 1% les plus riches, c’est celle de Wall Street. Voilà pourquoi la population se détourne d’eux. Seule une alternative de gauche combative et conséquente pourrait stopper Trump, Clinton et leur monde. C’est ce qu’a illustré le gigantesque soutien dont a bénéficié la campagne de Bernie Sanders.
Le combat contre le racisme, le sexisme et le populisme tel que celui de Trump est une lutte pour une société plus juste où les besoins de chacun seraient au centre des priorités et non les profits d’une infime minorité.
Des USA à la Belgique : tous ensemble contre la division !
En Belgique aussi, le racisme et le sexisme empoisonnent la société. Tirons les leçons des États-Unis : nous ne pouvons pas compter sur l’establishment et les partis établis pour lutter contre le populisme de droite! Il nous faut prendre les rues, nous organiser et lutter pour un changement de société depuis la base.– Stop au racisme, Black lives matter !
– Stop au sexisme !
– Les guerres sont le problème, et non les réfugiés.
– Pour une société pour les 99%, pas pour les 1% les plus riches.A l’initiative des Etudiants de Gauche Actifs. Pour rejoindre l’appel et le signer : borismalarme@gmail.com / 0487/74.74.38
Le rassemblement est autorisé par la police.
=> Sur facebook
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Si vous désirez une analyse plus profonde du résultat des élections présidentielles américaines, nous vous invitons à venir écouter KSHAMA SAWANT à Bruxelles ce 26 novembre !
- Qui est Kshama Sawant, “l’élue rouge au pays du billet vert”?
- Informations pratiques pour le meeting.
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Donald Trump. Comment un milliardaire raciste et sexiste peut-il être si populaire ?
Beaucoup se sont réveillés avec une gueule de bois. Non, ce n’est pas Hillary Clinton, la candidate préférée de l’establishment et d’à peu près l’ensemble des médias, qui l’a emporté, c’est Donald Trump. S’il devient le prochain président des États-Unis, c’est que Clinton a principalement perdu en raison… d’elle-même ! L’establishment a un problème majeur de représentation politique dans ce contexte d’échec flagrant du système capitaliste. Beaucoup se demandent comment pareil résultat est devenu possible. Voici ci-dessous deux articles de nos archives qui livrent quelques éclaircissements.
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Elections présidentielles américaines : le discrédit de l’establishment mène à la division. Comment un milliardaire raciste et sexiste peut-il être si populaire ?
Article de Bryan Koulouris, ‘Socialist Alternative’ (CIO-USA) publié en septembre 2015
Robert Reich, l’ancien ministre de l’Emploi sous Clinton, a prévenu l’establishment politique : “les initiés politiques ne comprennent pas que le phénomène politique le plus important en Amérique aujourd’hui est la révolte contre la « classe dirigeante » des initiés qui domine Washington depuis des décennies déjà .” (2 août 2015).
Une révolte se développe contre le racisme, contre les bas salaires, contre la politique immuable (« as usual »). Malgré une plus longue période de redressement économique, les jeunes sont confrontés à des emplois de mauvaise qualité, des dettes astronomiques et à la crise écologique. L’establishment politique est financé et contrôlé par les grandes entreprises. Chaque sondage reflète un nouveau recul pour cet establishment.
Entre-temps, le monde est sous le feu de divisions ethniques et religieuses et de guerres dans de grandes parties du Moyen-Orient. Les dévaluations chinoises et le krach boursier suscitent la peur dans toute l’économie mondiale. En Europe, la politique d’austérité drastique menace la subsistance-même de l’UE. Cela fait en sorte que de plus en plus de gens se rendent compte que ce système ne fonctionne pas.
Comment un milliardaire raciste et sexiste peut-il être si populaire ?
Comment dans un tel contexte, est-il possible qu’un milliardaire aussi raciste et sexiste que Donald Trump puisse avoir une telle écoute ? Trump est écouté pour ses attaques contre les deux partis établis et tous les politiciens. Il dit ouvertement que le système politique est achetable. Et il peut le prouver, il a lui-même acheté de nombreux politiciens. Sa rhétorique n’est pas particulièrement prudente, certains électeurs républicains trouvent ça rafraîchissant. C’est un monstre créé par l’establishment qui attise depuis des années le racisme et une polarisation entre groupes de population.
Il est remarquable que Trump puisse trouver du soutien et de l’enthousiasme tandis que les Républicains établis n’y parviennent pas. Il ont aussi mis beaucoup de temps à réagir aux déclarations les plus condamnables de Trump. Les Républicains sont confrontés à un problème fondamental : ils doivent enthousiasmer une base de droite tandis que cette base s’éloigne toujours plus des électeurs qui glissent à gauche.
Clinton ne peut séduire
La campagne de Bernie Sanders est à un momentum tandis que Clinton ne parvient pas à séduire les Démocrates. Même ici, nous voyons une méfiance envers l’establishment. Les primaires dans les deux partis mettent en avant des candidats qui ne sont pas soutenus par les grandes entreprises qui ont si longtemps dominé la politique américaine.
Ces chocs dans le système politique et la possibilité implicite de candidatures indépendantes pour les élections présidentielles sont les présages d’un tremblement de terre politique plus large aux USA. Reich souligne : “l’Amérique a longtemps connu une classe dominante mais la population était prête à la supporter pendant les trois décennies qui ont suivi la seconde guerre mondiale lorsque la prospérité était répartie largement et que l’Union soviétique constituait une menace. La classe dirigeante semblait alors de bonne volonté et maligne. Mais ces trois dernières décennies – alors que presque tout le progrès économique retournait aux riches, les salaires de la plupart des gens diminuaient – il ressortait que la classe dirigeante se remplissait les poches au détriment des autres.”
Combattre le populisme
Ce système échoue et perd sa légitimité auprès d’une nouvelle génération qui pense s’en sortir moins bien que leurs parents. Des mouvements pour le travail, l’égalité et la liberté occuperont le devant de la scène et trouveront une expression politique.
Le phénomène Donald Trump est cependant un avertissement pour le mouvement ouvrier et les organisations progressistes. Le sentiment anti-establishment peut aussi être mobilisé par des points de vue de droite voire racistes et sexistes.
Dans ce contexte, nous devons nous organiser autour de thèmes qui importent aux personnes de nos quartiers, écoles, lieux de travail : des salaires plus élevés, un logement décent et la fin des violences policières racistes. C’est ainsi que le populisme creux des milliardaires pourra être stoppé et que nous pourrons construire en même temps, un mouvement inspirant pour les gens et qui leur donnera envie d’y être actifs aussi.
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Donald Trump menace les travailleurs
A ses débuts, la campagne de Donald Trump a souvent été perçue comme une blague de mauvais goût. Avec sa houppette blonde et ses déclarations tonitruantes qui tenaient plus de la brève de comptoir que de l’analyse politique, sa candidature aux présidentielles n’était pas prise au sérieux. Mais il est aujourd’hui devenu un sérieux danger. Derrière son approche ultra-populiste se un programme d’extrême-droite. Sans la moindre gêne, il abuse du rejet de l’establishment corrompu pour vendre son programme nationaliste, raciste et sexiste. Trump et toute la clique républicaine défendent une politique de droite au service de l’establishment des riches pour couper l’herbe sous le pied du mouvement organisé des travailleurs et des pauvres.
Par Hanne (Anvers), article tiré de l’édition de juin 2016 de Lutte Socialiste
Comment Trump a-t-il pu avoir ce succès ?
Le parti républicain n’est pas innocent. Même si nombre d’autres candidats malheureux ont déclaré refuser de soutenir Trump, son succès n’est pas tout simplement dû au hasard. Cela fait des années que le Parti républicain utilise le racisme et le sexisme pour s’attirer des voix. Par cette tactique de division, il a pu s’assurer le soutien d’une partie des voix des couches les plus basses de la classe moyenne et d’une partie des travailleurs blancs. En accusant les migrants et les sans-emplois d’être les racines de la pauvreté, les Républicains ont pu détourner une certaine partie de la frustration présente dans la société à leur avantage. C’est également sur cette base que Trump a pu séduire le public conservateur, tandis que ses propos tapageurs et son comportement lui ont donné une image anti-establishment.
Trump: Raciste, fasciste, populiste?
Trump se repose sur les vieilles recettes républicaines: un discours raciste, un comportement sexiste et un programme nationaliste. Il défend la construction d’un mur entre les Etats-Unis et le Mexique pour repousser les migrants car ils seraient responsables de la criminalité. Lors de ses interviews, il dénigre ouvertement les journalistes féminines.
Parallèlement, il affirme vouloir s’opposer aux traités de libre-échange (comme le TTIP, le Traité transatlantique) et interdire aux entreprises d’externaliser des emplois à l’étranger. Ces deux positions trouvent un écho parmi une couche grandissante de travailleurs précaires et de sans-emplois, mais elles offusquent les grandes entreprises. Comment Trump peut-il défendre de telles choses alors qu’il figure parmi les représentants de l’establishment capitaliste ? Trump veut mettre les travailleurs de son coté, il ne peut pas se permettre de simplement accuser les migrants d’être responsables de la crise économique. Une profonde colère s’est développée vis-à-vis du monde des entreprises et des banques, notamment en raison des scandales de corruption mais aussi suite aux récents mouvements de masse aux Etats-Unis et ailleurs. Trump veut se profiler sur ce terrain pour obtenir des voix parmi les travailleurs. Pour le reste, son programme est unilatéralement à l’avantage des riches.
Pour certains, Trump est un fasciste, contrairement à d’autres candidats conservateurs. Est-ce le cas? Nous estimons que non. Trump est indéniablement raciste et sexiste. A n’en pas douter, il constitue une menace pour la classe des travailleurs, très certainement pour ses couches organisées. Mais le fascisme est un autre phénomène, c’est un mouvement de masse utilisé en dernier recours par des parties de la classe dirigeante pour briser le mouvement des travailleurs. Trump est plutôt une figure isolée qui joue sur les angoisses et la colère d’une couche grandissante de la population. Sa réussite est surtout une expression de la polarisation croissante dans la société américaine dans un contexte de crise perpétuelle et de pauvreté en l’absence d’une alternative suffisamment puissante pour organiser ce mécontentement. Trump est avant tout un populiste de droite.
Comment obtient-il autant de votes?
La direction du Parti républicain s’est trompée si elle pensait que l’attitude de Trump effrayerait le grand public. La population américaine cherche désespérément une expression politique pour sa colère envers ce système injuste. Trump a su détourner cette colère.
Cette dernière est du reste également orientée contre les Démocrates, eux aussi membres de l’establishment. Chez nous, les Démocrates sont parfois présentés comme des modérés ou même des progressistes. Mais les Démocrates comme Hillary Clinton sont des marionnettes aux mains de ceux qui les financent : les grandes entreprises, Wall Street, les millionnaires,… Pour gagner des électeurs, Clinton adopte parfois des postures progressistes. Mais les riches investisseurs qui ont financé sa campagne ne sont pas dupes, et beaucoup d’Américains en sont conscients.
Obama a su gagner sa première présidence de manière très populiste, en promettant le ‘‘changement’’. À sa réélection, l’enthousiasme avait déjà considérablement fondu. Aucun changement n’était visible aux yeux de l’Américain ordinaire. Sous sa présidence, les mouvements ont été nombreux contre la corruption, les inégalités mais aussi la violence et les meurtres policiers envers la population noire. L’espoir incarné par Obama n’est pas devenu réalité.
Trump parvient à construire son soutien sur ces frustrations et cette colère. Mais il n’est pas le seul à le faire. Bernie Sanders fait trembler l’establishment démocrate avec sa campagne. Il est financé par la population ordinaire et appelle à des mouvements de masse à la base de la société pour changer ce système corrompu. Malheureusement, Sanders a déjà déclaré qu’il ne se présenterait pas comme candidat indépendant contre Clinton et Trump après les primaires démocrates pour continuer sa ‘‘révolution politique’’. C’est ce que défend notre organisation-sœur aux Etats-Unis, Socialist Alternative.
Comment arrêter Trump ?
La seule manière est de construire une large alternative de gauche. Le potentiel est clairement présent pour l’émergence d’un mouvement de masse capable de lutter contre Trump sans soutenir Hillary Clinton, la candidate de Wall Street. La gauche doit prendre une position indépendante des deux Partis du Big Business et réunir le monde du Travail dans la construction d’une nouvelle alternative.
L’occasion est historique pour construire un nouveau parti de gauche pour enfin briser le monopole politique des Démocrates et des Républicains et pour changer de système. La campagne de Bernie Sanders illustre le potentiel pour s’organiser en dehors du parti démocrate. Des dizaines de milliers de personnes ont participé à ses meetings, bien plus que pour Clinton ou Trump. Sa campagne est entièrement financée par ces mêmes personnes, les grandes entreprises n’y sont pour rien. Si ces masses sont mobilisées dans la direction d’un nouveau parti de et pour les 99%, Trump trouvera de moins en moins d’écho avec sa propagande ultraconservatrice.
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Si vous désirez une analyse plus profonde du résultat des élections présidentielles américaines, nous vous invitons à venir écouter KSHAMA SAWANT à Bruxelles ce 26 novembre !
- Qui est Kshama Sawant, “l’élue rouge au pays du billet vert”?
- Informations pratiques pour le meeting.
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Après Bernie Sanders, comment poursuivre la révolution politique aux USA ?
Parallèlement au profond discrédit de la politique du système capitaliste, la popularité du socialisme a fortement grimpé surtout parmi la jeunesse. Le concept de ‘‘socialisme’’ reste toutefois encore vague pour une grande partie des couches qui s’y ouvrent aujourd’hui.
Par Bart Vandersteene
KSHAMA SAWANT EN BELGIQUE !
- BRUXELLES : Samedi 26 novembre à 18:30, CGSP Bruxelles – ACOD Brussel – Rue du Congrès 17-19 Congresstraat, 1000 Bruxelles (sur facebook)
- GAND: Vendredi 25 novembre à 19:00 – Ledebergplein 30, 9050 Gent (sur facebook)
Ce phénomène a récemment fait son entrée sur la scène politique nationale au travers de la campagne de Bernie Sanders. Notre parti-frère aux États-Unis, Socialist Alternative, avait déjà constaté ce développement avec le succès de leurs campagnes électorales locales. En 2013, Kshama Sawant s’est portée candidate à Seattle et a recueilli 95.000 voix, soit 51 % des votes. Deux ans plus tard, elle a regagné ce siège avec 56 % des votes. Kshama est l’exemple par excellence qu’il est possible de gagner un soutien massif en défendant les idées du socialisme non seulement sur le plan électoral mais aussi dans les luttes. Seattle a été la première ville à se prononcer contre le TPP (Traité trans-Pacifique de libre commerce). Mais c’est surtout la première ville à avoir augmenté le salaire minimum à 15 $ ce qui équivaut, en 10 ans, à un transfert de 3 milliards $ des mains des capitalistes à celles des travailleurs de Seattle.
La recherche d’une alternative à une telle ampleur aux États-Unis, ce n’est pas anodin. Cela aura un impact global. L’élection de Kshama a ainsi déjà fait l’objet d’une couverture médiatique internationale.
Le Parti Socialiste de Lutte est fier d’accueillir Kshama en Belgique pour deux meetings, à Gand le 25 novembre et à Bruxelles le 26. Venez nombreux l’écouter et discuter avec la socialiste la plus connue des États-Unis après Bernie Sanders.
Une réelle alternative de gauche est possible et nécessaire
Fin septembre, un sondage mettait en avant que seuls 12 % des Américains se disaient enthousiastes à l’idée qu’Hillary Clinton remporte les présidentielles. 55 % des électeurs sont dégoutés du processus électoral. Ce qui devait être la grand-messe de la politique américaine a surtout illustré les faiblesses du système et de ses principaux acteurs.
Le soutien électoral que Clinton aura ne représentera en rien une approbation de sa personne et de sa politique, c’est surtout l’expression de la peur d’une victoire de Donald Trump. Même parmi les femmes, seule une minorité approuve Hillary Clinton en dépit des scandales dévoilés ces derniers mois concernant les propos sexistes et les allégations d’agressions sexuelles à l’encontre de Trump.
Le Parti démocrate exploite fortement la peur d’une victoire de Trump afin de marginaliser les candidats indépendants, comme la candidate des Verts Jill Stein. Dans chaque débat, lorsque quelqu’un critique Clinton, la réponse est toute prête : ‘‘Je suis d’accord, mais tu veux Trump comme président ou quoi ?’’ Kshama Sawant a répondu à cette tactique dans une interview pour la chaine Democracy Now : ‘‘Si la première préoccupation du Parti démocrate était vraiment de vaincre Trump, pourquoi ont-ils fait tout leur possible pour battre le candidat qui selon tous les sondages avait la meilleure chance de battre Trump, Bernie Sanders ?’’
Il est bien compréhensible qu’énormément de femmes, de jeunes, d’immigrés… soient horrifiés à l’idée que Trump puisse devenir président et qu’ils votent pour Clinton en la considérant comme un moindre mal. Le danger du populisme de droite ne va pas être résolu de la sorte, bien au contraire. Le danger de l’émergence de nouveaux Trump, probablement plus efficaces, grandira fortement avec Hillary Clinton et sa bande aux commandes du pays.
Kshama Sawant a été citée cet été dans le journal français l’Humanité en développant un tout autre raisonnement : ‘‘Pourquoi, à ce moment historique, alors que des dizaines de millions d’Américains cherchent une alternative en dehors de l’establishment, devrions-nous suivre le Parti démocrate ? (…) Si Sanders se présente comme candidat indépendant en novembre, Trump ne pourra pas avoir le monopole du vote anti-establishment. Mais si Bernie apporte son soutien à Clinton, il ne faudra pas le suivre. Notre légitimité, nous la devons au mouvement, pas à Bernie.’’ Bernie Sanders ne s’est pas présenté comme candidat indépendant. Il aurait été un excellent candidat pour reprendre des millions de voix à Trump. Aujourd’hui, Socialist Alternative appelle à voter pour Jill Stein, la plus forte candidature de gauche indépendante.
L’establishment américain va probablement obtenir la victoire de son candidat favori, Hillary Clinton. Mais il en a payé le prix. Elle sera la présidente la moins populaire de l’Histoire au moment de son investiture. L’année 2017 verra une intensification des luttes contre cet establishment affaibli. Partout à travers le pays se développent des campagnes pour une augmentation du salaire minimum, tout comme pour le droit au congé de maternité ou au congé de maladie. Le mouvement Black Lives Matter (‘‘les vies des Noirs comptent’’) se poursuit et dénonce les violences et les meurtres policiers racistes et institutionnels. Plusieurs protestations massives de ‘Native Americans’ voient également le jour contre des projets anti-démocratiques qui détruisent les réserves et l’environnement, comme celui du Dakota Access pipeline.
La contradiction devient criante entre les soulèvements de classe de nombreux travailleurs et jeunes d’un côté et le caractère pro-capitaliste et antidémocratique du Parti démocrate. Cela met en évidence le potentiel pour la construction d’un nouveau parti politique indépendant des intérêts du patronat des grandes entreprises et des milliardaires. Après la campagne de Bernie Sanders, la possibilité d’aller de l’avant vers un puissant mouvement combattif représentant les intérêts de la jeunesse et des travailleurs.
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Élections présidentielles américaines: les candidats les plus impopulaires de l’histoire
Briser le système des deux partis par un parti de masse des travailleurs
Dans la dernière phase du processus électoral pour la présidentielle américaine, tous les projecteurs pointent vers le duel entre Clinton et Trump, les candidats des deux grands partis. Cette manière de considérer les choses est toutefois biaisée. En effet, 45% des électeurs (près de la moitié !) se considèrent comme indépendants des deux grands partis, contre 32% il y a 8 ans. L’enthousiasme pour les deux grands candidats est limité : seuls 43% de ceux qui veulent se rendre aux urnes se disent enthousiastes à l’idée de le faire. La recherche d’une alternative n’est pas terminée.
Par Bart Vandersteene, article tiré de l’édition d’octobre de Lutte Socialiste
Trump contre Clinton
L’événement le plus sensationnel de cette campagne électorale – le large écho dont a bénéficié l’appel de Bernie Sanders pour une révolution politique contre la classe des milliardaires – est relégué à l’arrière-plan. Les médias ne laissent de place que pour le spectacle du combat entre Donald Trump, le populiste grossier et raciste, et Hillary Clinton, la candidate de l’establishment soutenue par Wall Street.
L’argument principal de Clinton? Elle n’est pas Trump. L’argument principal de Trump? Il n’est pas Clinton. Pour Trump, Clinton est la candidate rêvée car elle lui permet de surfer sur le sentiment anti-establishment qui gronde parmi la population. Quant à Clinton, elle peut compenser le manque d’enthousiasme de sa campagne par l’horreur suscitée par Trump. Ce sera à peine susceptible de convaincre les électeurs à se rendre aux urnes pour y voter pour Clinton.
En ces temps troublés, on ne peut faire de prédictions exactes. Les instruments traditionnels de l’establishment fonctionnent de moins en moins efficacement. La faiblesse de l’establishment souligne encore plus celle de sa favorite, Hillary Clinton. Le grand mystère qui entoure sa santé alimente l’idée qu’elle ne peut être crue sur parole à aucun moment. De récentes révélations concernant l’intervention militaire en Libye, du temps où Clinton était Secrétaire d’État, ont démontré que ces opérations ont contribué au développement de l’État Islamique. Le scandale des e-mails pend encore au-dessus de sa tête. Mais, surtout, Clinton est l’incarnation parfaite de l’arrogante élite dirigeante.
L’Establishment contre Trump
Trump n’est pas le candidat préféré de l’élite qui trône au sommet de la société. Même les frères Koch, archi-conservateurs et bailleurs de fonds du Tea Party, se sont prononcés contre lui et pour Clinton. Ils se disent effrayé que Trump ‘‘détruise la société libre’’. Sont-ils pour autant en désaccord avec son racisme, son sexisme, sa haine de la communauté LGBT+ ? Pas du tout. La société libre dont parlent les Koch & Co, c’est le néolibéralisme effréné et les traités d’échange néolibéraux comme le TTIP, l’ALENA et le TPP.
L’ALENA, signé sous la présidence de Bill Clinton, a eu de dévastatrices conséquences pour la classe ouvrière américaine. Ce fut par contre une bénédiction pour les grands capitalistes. AU Au moins un million d’emplois ont disparu, la plupart en direction du Mexique où la population locale s’est vue exploitée à de très bas salaires. Aux États-Unis, la menace de délocalisation sert d’arme contre les salaires et les conditions de travail. Aujourd’hui, 53% des Américains estiment préférable de laisser tomber l’ALENA. Trump utilise ce genre d’éléments dans son cocktail de slogans populistes (contre le libre-échange, contre les migrants, contre les syndicats,…) qui désigne une succession de boucs émissaires pour instrumentaliser les sentiments anti-establishment d’une grande partie de la population américaine. Tout comme en Europe, le populisme de droite américain ne peut être combattu en reposant sur le ‘‘moindre mal’’. L’establishment est incapable de répondre à l’aversion croissante qu’il provoque. Une alternative de gauche doit être construite.
Le pays le plus riche et le plus inégalitaire au monde
Pour la majorité du peuple américain, l’avenir n’est pas des plus roses. Mais une infime minorité s’en sort bien. Très bien. Le nombre de millionnaires (des ménages qui disposent d’actifs nets pour une valeur d’un million de dollars en plus de leur résidence principale) a continué d’augmenter chaque année. Il a atteint les 10,4 millions de foyers en 2015. En 2008, 5,9% des ménages se considéraient eux-mêmes millionnaires, contre 9% actuellement. Ce n’est pas en raison d’une forte croissance économique bénéficiant à tout le monde, comme le suggère le proverbe américain ‘‘Une marée soulève tous les bateaux’’. Il faut y voir le résultat d’une répartition extrêmement inégale des richesses. Comme le dit Marx : ‘‘L’accumulation de richesse à un pôle signifie donc en même temps à l’autre pôle une accumulation de misère, de torture à la tâche, d’esclavage, d’ignorance, de brutalité et de dégradation morale pour la classe dont le produit propre est, d’emblée, capital.”
La majeure partie du peuple américain est amère. Toutes les promesses de prospérité ont été balayées tandis que les élites s’enrichissent. Bernie Sanders a parlé à l’imagination de millions d’Américains avec son appel à une révolution politique contre la classe de milliardaires. Clinton n’a eu sa nomination comme candidate officielle du Parti démocrate que fin juillet, sur le fil. Elle et la direction du parti se sont révélées incapables de cacher toutes les manipulations qui lui ont facilité l’investiture. Des milliers de courriels divulgués par Wikileaks ont prouvé que les primaires démocrates ont été falsifiées et que Sanders a fait campagne sur un terrain très hostile.
L’impasse du Parti démocrate
Clinton a choisi le très néolibéral Tim Kaine comme candidat vice-président, illustration claire que le Parti démocrate n’a pas été poussé vers la gauche… La plateforme du parti pour les présidentielles a bien intégré quelques maigres concessions, mais elles sont non contraignantes. Avec Kaine, Clinton a opté pour un allié politique qui a l’approbation de Wall Street, auquel il a déjà à plusieurs reprises prouvé sa soumission.
Le Parti démocrate tente de créer l’impression que Trump est sa plus grande préoccupation. Si c’était véritablement le cas, Sanders était alors le meilleur candidat, comme l’ont montrés tous les sondages. La plus grande préoccupation était, dans la pratique, rien de plus que de veiller à ce que le parti soit toujours aux mains de l’élite dirigeante. Sanders était le bienvenu pour attirer de nouveaux électeurs, mais il fallait politiquement le désamorcer. La direction du parti y est parvenue. Clinton a été couronnée candidate présidentielle et Sanders a finalement accepté de la soutenir.
Kshama Sawant (Socialist Alternative), élue conseillère de la ville de Seattle, a déclaré: ‘‘J’ai soutenu la campagne de Bernie Sanders aux primaires démocrates, j’ai parlé à des meetings et j’ai pris l’initiative du Movement4Bernie, mais je pense que nous ne pouvons pas le suivre dans sa décision de soutenir Hillary. Notre révolution politique serait de ce fait transformée en son contraire et serait canalisée pour soutenir l’agenda néolibéral des démocrates. Soutenir des politiciens corrompus acquis à l’establishment, ce n’est pas une manière de leur infliger une défaite. Cela renforcera la droite et lui permettre de pousser l’agenda politique encore plus à droite.’’
La meilleure manière de poursuivre la révolution politique est de construire le plus large soutien possible à la candidate du Parti vert Jill Stein. Sa campagne est la meilleure voie de faire valoir la nécessité d’un parti de masse des travailleurs et de la jeunesse.
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USA: La Convention démocrate la plus contestée depuis 1968
Il nous faut un nouveau parti des 99% pour vaincre la classe des milliardaires
La Convention nationale démocrate (DNC) s’est retrouvée engloutie dans la controverse, les tensions et la contestation. A l’intérieur du DNC, à l’extérieur de ses portes et dans toute la ville de Philadelphie, dans le métro, dans les bars, les restaurants et les hôtels, la polarisation politique est évidente. À bien des égards, cette DNC est la plus controversée depuis 1968. Cela ne fait qu’à nouveau souligner les bouleversements qui prendront place dans les années à venir dans l’opposition à l’establishment.
Par Patrick Ayers, Socialist Alternative (partisans du Comité pour une Internationale Ouvrière aux Etats-Unis)

Protestations à Philadelphie. Des milliers de personnes ont participés aux actions de protestation à l’occasion de la DNC. En dépit d’une chaleur à certains moments véritablement étouffante, quatre manifestations ont eu lieu quotidiennement du centre-ville vers le parc FDR (Franklin Delano Roosevelt), aux portes de la muraille militarisée entourant la DNC.
Les plus grandes manifestations ont eu lieu le dimanche et le lundi, avec la participation de milliers de personnes, la grande majorité d’entre eux n’étant membre d’aucune organisation traditionnelle de gauche. Cette foule représente une nouvelle génération de militants réveillée par la campagne de Bernie Sanders et maintenant prête à aller au-delà. Le slogan le plus populaire était de loin : “Hell No, DNC, nous n’allons pas voter pour Hillary!” Le hashtag #Demexit (en référence au Brexit) est devenu très populaire.
La candidate du Parti Vert Jill Stein était très présente avec un profil énergique dans ces manifestations. Les manifestants l’ont traitée comme une rock star. La grande majorité des manifestants, venus des quatre coins des États-Unis, semblent décidés à la soutenir. Nombreux sont toutefois ceux qui sont prêts à la soutenir en signe de protestation tandis que d’autres entretiennent toujours l’espoir que le Parti démocrate peut être réformé. Socialist Alternative (CIO-USA) a participé à toutes les manifestations, en appelant à soutenir Jill Stein et à construire un nouveau parti des 99%, comme outil essentiel pour développer des mouvements sociaux de masse afin d’aboutir à une véritable révolution politique.
Le “Walk-out”
La DNC a provoqué la colère de nombreux partisans actuels et anciens de Bernie Sanders, non seulement à l’extérieur de ses murs mais aussi en son sein. Des centaines de délégués sont sortis de la convention en signe de protestation le mardi soir (le «Walk-out»).
Quelques jours avant que les délégués du Parti démocrate ne se réunissent à Philadelphie, les emails de la direction du parti publiés par Wikileaks ont révélé au grand jour ce que la plupart des partisans de Bernie avaient déjà soupçonné: la direction du parti a truqué le processus des primaires en la faveur d’Hillary. Les délégués ont subi une pression énorme pour rejoindre la campagne d’Hillary avant même d’arriver à Philadelphie. Pourtant, de nombreux partisans de Bernie ont résisté et s’opposent à la manière dont ils ont été traités.
Bernie a joué le rôle de pacificateur en chef de l’establishment du parti, mais il a échoué. Beaucoup de ses partisans ont hué son soutien à Hillary le lundi matin lors d’une réunion de pré-convention de ses délégués.
Depuis lors, la DNC est allée plus loin pour imposer l’unité en instrumentalisant la peur de Trump, l’autorité morale des dirigeants progressistes et la pure et simple discipline imposée. Nina Turner, partisane de Bernie de premier plan et sénatrice de l’Ohio du Parti démocrate, s’est vue dépouillée de ses droits de même que d’autres partisans de Bernie qui ont protesté à l’intérieur de la salle de la Convention.
Les choses ont atteint leur point culminant le mardi. La DNC avait bloqué les tentatives faites par les délégués de Bernie de proposer démocratiquement une alternative à la nomination de Tim Kaine à la vice-présidence. Tim Kaine a derrière lui une longue liste de prise de position contre le droit des femmes de décider de leur corps ou encore en soutien à la peine de mort et aux politiques économiques pro-entreprises. Sa nomination a été considérée comme une nouvelle trahison. En ne permettant aucune discussion démocratique sur sa nomination, la DNC a livré un exemple de plus de l’arrogance indéfendable des dirigeants du Comité national démocrate antidémocratique.
Après le vote effectué le mardi soir, des centaines de délégués ont quitté la Convention. Les actions de la direction du parti ont créé l’atmosphère pour ce débrayage, mais il ne s’agissait pas totalement d’une action spontanée – aucune protestation efficace ne l’est jamais vraiment.
Kshama Sawant, «Bernie or Bust» (Bernie ou rien), Occupy Wall Street, Movement4Bernie et Socialist Alternative avaient aidé à organiser ce départ collectif. Les membres de Socialist Alternative Pam Keely et Kshama Sawant ont été cités dans Vox.com: «Nous devions le faire», a déclaré à VICE Pam Keeley, déléguée de Bernie Sanders de l’État de Washington, l’une des organisatrices du walk-out. «Nous en avons eu assez de l’hypocrisie, des mensonges, d’être utilisés pour recueillir des votes et des fonds de campagne pour être ensuite jetés comme des ordures. C’est essentiellement un soulèvement de la base.» Elle a précisé qu’environ 80 délégués ont quitté la Convention mais que «plusieurs centaines» en ont été empêchés par la police.
Selon un délégué, Sanders lui-même a envoyé un e-mail demandant à ses délégués de ne pas quitter la Convention. Mais certains de ses partisans sont profondément désenchantés de leur ancienne icône et sont convaincus que le candidat a quitté la voie qu’il a aidé à tracer.
«La raison pour laquelle les gens se sont retrouvés derrière Bernie Sanders était que son message était un message de rébellion contre un establishment détesté», a expliqué Kshama Sawant, élue socialiste au Conseil de la ville de Seattle qui a soutenu le débrayage, a déclaré VICE. «Il n’était pas logique pour Bernie d’attendre que ses partisans soutiennent son choix (en faveur d’Hillary) et disent :« Toute cette révolution politique, c’était super pour quelques mois, mais maintenant, plions-nous devant la quintessence même de cet establishment que nous détestons.»
Une foule de près de 5.000 manifestants se sont rassemblés devant la DNC dès que le débrayage a été connu. Socialist Alternative fut l’une des rares organisations présentes parmi cette foule énergique. Les chants et slogans ont résonné sans interruption en dépit des tensions avec la police, du spray au poivre et des arrestations. La foule a ensuite rejoint Black Lives Matter. Jill Stein s’est adressée à la foule sous les vivats tandis que les manifestants ont occupé les carrefours.
La DNC et la police n’ont pas permis aux manifestants et aux délégués oppositionnels toujours à l’intérieur de se retrouver le mardi soir. Les délégués ont organisé un sit-in à l’intérieur de la tente des médias de la DNC, puis ont été dispersés et envoyés dans des directions différentes. Mais le mercredi et le jeudi, de nombreux délégués oppositionnels ont rejoint les manifestations en dehors de la DNC.
Il nous faut un parti des 99%
La Convention de 1968 a été considérée comme un tournant radical du mouvement contre la guerre du Vietnam. De même, les bouleversements qui ont accompagné la DNC de 2016 et plus généralement les élections présidentielles elles-mêmes constituent un point tournant historique pour la gauche dans la société américaine.
En dépit de la capitulation de Bernie Sanders, beaucoup de ses partisans n’ont pas sombré dans la défaite sans combattre. L’establishment du Parti démocrate va tout faire pour contrecarrer et piéger toute véritable révolution politique.
Il est maintenant temps d’en tirer les conclusions qui s’imposent. Pour gagner notre révolution politique, nous ne pouvons pas compter sur un seul individu. Pour mener à bien la révolution politique, nous avons besoin de notre propre organisation de masse indépendante. Nous avons besoin d’un nouveau parti des 99% pour aider à canaliser la colère croissante de millions de personnes, choisir nos propres candidats, construire des mouvements sociaux de masse à la base et vaincre la classe des milliardaires et son système à deux partis.
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Des délégués quittent la Convention démocrate: pas de soutien pour Hillary !
La nuit dernière, à Philadelphie, de nombreux délégués ont quitté ensemble la Convention nationale du Parti démocrate après qu’Hillary Clinton ait été officiellement nominée candidate démocrate aux élections présidentielles. Bernie Sanders avait mené une campagne de gauche au cours des primaires mais, dorénavant, il fait tout pour enrayer la colère contre l'establishment du parti. Il a décidé de soutenir la candidate de Wall Street et a promis de mener campagne en sa faveur. Un grand nombre de délégués élus durant ces primaires sur base du programme de la «révolution politique contre les milliardaires», selon le slogan de Sanders, pensent différemment. Ils ne sont pas prêts à jeter leurs idées politiques par-dessus bord. Leur départ collectif de la Convention démocrate a notamment été soutenu par Occupy Wall Street, la campagne «Bernie or Bust» (Bernie ou rien) et Movement4Bernie. Ci-dessous notre camarade Kshama Sawant (Socialist Alternative, organisation-soeur du PSL) explique pourquoi ce départ collectif était nécessaire. (Cet article est paru la veille sur le site counterpunch.com).
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Appel de Kshama Sawant: quittez la Convention démocrate !
C’en est assez ! Soutenons les délégués courageux qui vont quitter la Convention (anti)démocrate pour protester contre des élections truquées.

Tract en faveur du débrayage collectif. Un débat sérieux et de grande importance fait rage parmi les Sandernistas (les partisans de Bernie Sanders) depuis que Bernie a approuvé la candidature d’Hillary il y a deux semaines. Ces questions deviennent plus pressantes encore avec l’ouverture de la Convention démocrate.
La question centrale est de savoir si nous devrions suivre l’exemple de Bernie pour soutenir la politique pro-entreprises d’Hillary Clinton ou plutôt continuer la révolution politique en construisant un mouvement indépendant du Parti démocrate. Alors que j’ai soutenu la campagne de Bernie durant les primaires démocrates, que j’ai pris la parole à des rassemblements de Bernie et que j’ai lancé le Movement4Bernie, je crois que nous ne pouvons tout simplement pas le suivre dans sa décision de soutenir Hillary. Notre révolution politique risque maintenant d’être transformée en son contraire et canalisée en soutien à l’ordre du jour néolibéral de la Convention démocrate.
Soutenir des politiciens de l’establishment corrompu n’est aucunement un moyen de vaincre la droite, cela ne fera que l’encourager tout en permettant à l’agenda politique d’être poussé plus loin à droite. Cette stratégie du moindre mal a échoué et c’est ce qui a poussé les 99% de la population au stade que nous connaissons aujourd’hui. L’indignation est grande face à la politique de l’establishment qui a permis à un populiste de droite de se trouver aux portes de la présidence.
Nous ne pouvons pas continuer dans cette impasse.Comme l’a illustré le choix de Clinton de Tim Kaine comme colistier, elle et la direction du Parti démocrate n’ont en aucune manière significative été «poussés vers la gauche» au cours de la primaire, en dépit de quelques concessions limitées concernant le texte de plate-forme (qui est non-contraignant) ainsi que les réformes mineures des règles au sujet des super-délégués.
Avec Tim Kaine, Hillary Clinton a choisi son jumeau politique néolibéral et a reçu l’approbation de Wall Street. Comme pour souligner la signification politique de ce choix de vice-président, et peut-être aussi comme signal pour les entreprises américaines, Tim Kaine a clairement exprimé son soutien total au Partenariat Trans-Pacifique (TPP) et à la déréglementation bancaire quelques jours à peine avant sa nomination. Donald Trump va instrumentaliser les orientations politiques anti-travailleurs et pro-entreprises de Clinton et Kaine contre eux au cours des élections générales. La Convention démocrate lui offre une cible proche de la perfection.
Les révélations de Wikileaks concernant la direction du parti démocrate ont clairement démontré la manière dont sont truquées les primaires démocrates, du début à la fin. Des milliers de mails ont exposé la partialité absolue d’une direction de parti corrompue. Ils ‘agit d’un terrain tout à fait hostile pour un opposant socialiste démocratique.
Les fuites ont aussi complètement exposé l’hypocrisie de la direction du Parti démocrate, qui prétend officiellement que sa priorité est de vaincre Trump. Elle a violemment et antidémocratiquement soutenu Clinton, en dépit du fait que les sondages montraient que Sanders était plus à même de vaincre n’importe quel candidat républicain.
Avec l’attention du pays et du monde concentrée sur la Convention démocrate à Philadelphie, nous avons maintenant des décisions sérieuses à prendre face à de puissantes opportunités. Les actes des délégués et des militants de Bernie Sanders tant à l’intérieur qu’à l’extérieur de la convention ont le potentiel de faire de cette semaine une page de l’Histoire.
Des milliers de personnes rejoignent les manifestations et les rassemblements dans les rues de Philadelphie. De nombreuses actions de protestation ont aussi lieu à l’intérieur de la Convention, notamment contre le Traité Trans-Pacifique avec une action qui a temporairement interrompu la procédure.
Mais la manifestation la plus puissante de toutes sera pour les délégués et les militants de totalement rejeter l’establishment démocrate néolibéral en sortant de la Convention avec le plus grand nombre possible.
Les délégués sont organisés pour une telle une action de débrayage, et plusieurs centaines de délégués peuvent collectivement quitter l’événement. Cela exigera un vrai courage. La Convention est un énorme spectacle soigneusement scénarisé par la noblesse du Parti, y compris des gens comme Michelle Obama et Elizabeth Warren. Mais cette année, peut-être en reconnaissance du soulèvement politique qui a eu lieu, la direction démocrate est allée jusqu’à donner à l’événement un verni populaire, certains travailleurs et militants pouvant eux aussi prendre la parole. L’ampleur et le caractère intimidant de cet événement de 50.000 personnes auront sans aucun doute un impact psychologique.
Mais ceux qui oseront passer à l’étape audacieuse de marcher hors de la Convention et des politiques néolibérales seront accueillis par un rassemblement de militants, de livestreamers, de journalistes et autres. Les médias de masse ont déjà contacté Movement4Bernie en prévision de l’événement. J’espère vous y voir.
Les délégués ont dû s’organiser en cachette, les dirigeants du parti ayant lancé une forte campagne d’intimidation contre tout délégué plaidant pour la tenue d’actions de protestation ou soutenant un autre candidat. La menace de voir leur statut de délégué révoqué a été explicitement évoquée. Mais l’organisation de cette sortie collective est devenue un peu plus connue la semaine dernière quand Occupy Wall Street s’est exprimé en faveur de cette action sur sa page Facebook et sur Twitter, de même que «Bernie or Bust» et Movement4Bernie.
L’un des arguments les plus courants porté contre ce débrayage est que les délégués renonceraient en quelque sorte à leur chance de se battre pour la politique de Bernie et perdraient ainsi leur voix. Mais ce débrayage se déroulera bien après les votes de la plate-forme et des nominations. Après cela, la Convention ne devient qu’une cérémonie antidémocratique : The Hillary Show ™
La peur de Donald Trump va decider de nombreux votes aux élections présidentielles de novembre, comme cela a encore été illustré par les authentiques réactions d’effroi face à l’horrible spectacle de la Convention nationale républicaine de la semaine dernière. Le danger du populisme de droite est réel. Mais c’est aussi pour cette raison qu’il serait tout à fait contre-productif de soutenir Clinton et la direction du Parti démocrate.
Ces dernières décennies, l’establishment démocrate a rejoint les républicains dans la réalisation du projet néolibéral sans être défié par la gauche.
Si les 99% de la population continuent de soutenir les politiciens néolibéraux sur base d’une approche de moindre mal, cela ne fera que créer plus d’espace pour le populisme de droite, comme nous l’avons vu dans d’autres pays. Cette année, l’absence de résistance de gauche au Parti démocrate signifierait que l’espace anti-establishment serait largement ouvert aux candidats de droite comme Donald Trump et le libertarien Gary Johnson. Johnson est déjà crédité de 9% dans certains sondages. Ce serait une catastrophe. Les millions de votes anti-establishment pour Trump et Johnson pourraient aider à consolider la base pour le populisme de droite et offrir le potentiel d’un nouveau parti de droite similaire au Front National en France. Ce danger a déjà été illustré en 2009 avec la croissance du Tea Party, lorsque la droite a exploité la véritable fureur face aux plans de sauvetage de Wall Street pour construire une nouvelle force politique, tandis que la gauche était occupée à excuser Obama.
Nous avons absolument besoin de vaincre la droite, mais cela nécessite une stratégie sérieuse. Pour réussir, nous aurons besoin de construire les mouvements sociaux les plus forts possibles et d’assurer qu’ils soient complètement indépendants des deux partis de Wall Street. Nous aurons besoin de construire notre propre parti politique de masse des 99%, un parti qui œuvrera aux côtés de ces mouvements plutôt que contre eux. Concrètement, en ce moment, nous avons besoin de construire le soutien le plus large possible pour la candidate du Parti Vert Jill Stein, dont la campagne est la continuation claire de notre révolution politique.
Un nouveau parti de masse des 99% devra rejeter tout l’argent et l’influence du monde des entreprises et combattre sans ambiguïté pour nos intérêts. Voilà ce que Bernie a commencé à faire dans ces primaires, et c’est la raison pour laquelle il bénéficié d’un soutien large et véritable non seulement de la part d’électeurs démocrates mais aussi d’indépendants et même de certains républicains. Il n’y a pas de “secret” pour expliquer pourquoi il se porte beaucoup mieux dans les sondages contre Trump qu’Hillary. Le soutien d’Hillary pour le «libre-échange» et les politiques pro-entreprises et anti-travailleurs est clair aux yeux de tous. Bernie a été en mesure d’apporter un défi historique à la direction du Parti démocrate en dépit de toutes les attaques antidémocratiques menées contre sa campagne précisément parce qu’il a appelé à une révolution politique contre la classe des milliardaires.
Malheureusement, Bernie n’a pas continué sur cette voie et a appelé à voter pour l’establishment que nous combattons.Les choses sont maintenant entre nos mains. Pour arracher les choses pour lesquelles nous nous battons, notre mouvement devra se tenir sur ses propres pieds et aller au-delà de Bernie en commençant à poser les bases de la construction de propre parti, un parti de masse des 99%.
Et pour ce faire, nous ne pouvons pas nous permettre de laisser passer des moments comme celui-ci. Un débrayage de centaines de délégués de la convention combiné à des manifestations de masse, comme cela se passe déjà dans les rues de Philadelphie, constituera une prise de position audacieuse en direction de l’indépendance politique des travailleurs et des jeunes.
Ça suffit. Joignez-vous à moi pour soutenir les délégués courageux qui sortiront de la Convention antidémocratique et de ce processus truqué.
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Bernie abandonne la révolution: il est temps de soutenir Jill Stein
Le soutien de Bernie Sanders accordé à Hillary Clinton a profondément déçu des millions de ses partisans. Beaucoup de ceux qui se sont sentis inspirés par son appel à une révolution politique avaient jusqu’ici entretenu l’espoir qu’il refuserait de se ranger derrière la candidate favorite de Wall Street. Mais ces espoirs se sont effondrés.Article de Kshama Sawant initialement publié sur le site CounterPunch.org.
Non seulement Sanders a-t-il décidé de soutenir son adversaire néolibéral, il a aussi commencé à faire campagne en sa faveur, avant même la tenue de la Convention nationale démocrate, jusqu’où il s’était précédemment engagé à poursuivre la lutte. Apparaissant au meeting de Clinton du New Hampshire, il a signifié son intention de l’accompagner sur le sentier de la campagne.
Le soutien énergique de Bernie à Hillary fait suite à des mois de campagne menée contre ses liens étroits entretenus avec Wall Street et le Big Business aux USA. Il a déclaré: «Hillary Clinton fera une présidente remarquable et je suis fier d’être avec elle aujourd’hui.» Le cœur de son discours était fait d’une comparaison thème par thème des deux candidats pro-entreprises. Il a souligné les dangers réels de la politique de Trump, en disant par exemple que l’approche de Trump face au changement climatique «serait un désastre pour notre pays et notre planète.»
Il ne peut y avoir aucun doute au sujet du constat dressé par Bernie de la menace représentée par le populisme de droite de Trump, mais il a tout à fait tort concernant la façon de guérir la maladie. Nous ne parviendrons pas à vaincre la droite de façon décisive en soutenant les politiciens de l’establishment comme Hillary Clinton. C’est l’indignation massive ressentie contre la politique brutale pro-Big Business appliquée par l’establishment politique, dont Hillary est correctement considérée comme une des chefs de file, qui a créé la base de la montée en puissance de Trump. C’est également ce à quoi nous avons assisté il y a quelques années seulement avec la croissance du Tea Party, né de la fureur consécutive aux plans de sauvetage de Wall Street alors tandis que la gauche était occupée à trouver des excuses aux politiques pro-entreprises d’Obama.
Le Parti démocrate (anti-démocratique) ne sera jamais un outil efficace pour vaincre la droite, que ce soit avant ou après les élections. L’expérience a démontré à maintes reprises que ce parti est en fait un allié de longue date de celle-ci. Pour vaincre la droite, il nous faut construire de puissants mouvements de masse unitaires ainsi qu’un nouveau parti politique pour les 99%, un parti qui travaillera aux côtés de nos mouvements plutôt que contre eux.
Hillary Clinton a la distinction douteuse d’être la deuxième candidate la plus impopulaire de l’histoire du scrutin présidentiel des Etats-Unis, ne cédant la place qu’à Donald Trump. La peur de Trump est le principal facteur de soutien pour Clinton tandis que la peur de Clinton est le pilier principal de Trump.
La stratégie du moindre mal a été un désastre total pour les 99% de la population. Sans être contesté par la gauche, le Parti démocrate a aidé le Parti républicain à systématiquement pousser l’agenda politique vers la droite au cours de ces dernières décennies. Tout comme la candidate du Parti Vert aux présidentielles Jill Stein l’a correctement exprimé : «la politique basée sur la peur nous a apporté tout ce dont nous avions peur.»
La campagne de Bernie a ébranlé les fondements de la politique US avec son audacieux défi lancé à l’establishment politique corrompu et à la domination de Wall Street et des super-riches sur la société. Des dizaines de milliers de personnes sont devenues politiquement actives pour la première fois de leur vie et une discussion plus large s’est à nouveau développée au sujet du socialisme. Mais les thèmes défendus par Sanders tels que l’imposition d’un salaire minimum de 15 $ de l’heure à l’échelle nationale (contre 7,5 $ actuellement, NDT), l’opposition au Partenariat Trans-Pacifique (TPP) et la défense d’une assurance-maladie pour tous ne seront en aucun cas plus près d’être concrétisés par cette capitulation face à Clinton.
Au lieu de cela, le soutien de Bernie sera instrumentalisé pour soutenir ce même establishment pourri, y compris les dirigeants du Parti démocrate possédés par le monde des entreprises qui l’ont combattu à chaque étape et qui l’avaient encore hué la dernière semaine. En outre, si Jill Stein ne s’était pas présentée ou avait reçu peu de soutien, les sondages montrent que les deux candidats de droite, le libertarien Gary Johnson et le républicain Donald Trump, seraient les bénéficiaires du vote anti-establishment – ce qui contribuerait à la croissance du terreau pour le populisme de droite.
Le ralliement de Sanders à Clinton est un échec fondamental de leadership. Sanders dispose de la confiance des millions de travailleurs les plus dévoués et engagés ainsi que de la jeunesse. Ils regardent en sa direction. Il a la responsabilité de les conduire dans la bonne voie et non pas dans une impasse politique.
Alors que mon organisation, Socialist Alternative, et moi-même avons activement soutenu la campagne de Sanders en lançant notamment le «Movement4Bernie», nous avons toujours ouvertement exprimé notre désaccord avec sa décision de concourir aux primaires du Parti démocrate. Nous avons également expliqué que cette erreur pourrait être corrigée à mesure que l’expérience précisait le caractère profondément hostile du Parti démocrate contre toute politique progressiste. Nous avons exhorté Bernie à poursuivre sa campagne comme candidat indépendant ou du Parti Vert dans le cas où il serait vaincu, comme nous nous y attendions, et avons lancé une pétition en ce sens signée aujourd’hui par près de 125.000 personnes.
L’expérience de ces primaires truquées a totalement exposé le caractère non démocratique, conservateur et pro-entreprises du Parti démocrate. Alors que Sanders a remporté environ 46% des voix, il n’a reçu le soutien que de huit membres démocrates de la Chambre et d’un seul sénateur démocrate. La grande majorité de l’establishment du parti s’est opposée à Sanders et aux millions de travailleurs et de jeunes mobilisés derrière son appel à une révolution politique contre la classe des milliardaires.
Toute l’expérience de la campagne de Sanders ainsi que le fossé massif entre l’énorme soulèvement de la base des travailleurs et des jeunes derrière Sanders et le caractère conservateur et pro-capitaliste du Parti démocrate a graphiquement mis en évidence le potentiel pour commencer à construire un nouveau parti politique indépendant des intérêts des entreprises et des milliardaires.
Même si Sanders n’était pas prêt à prendre une telle initiative, rien ne l’obligeait à endosser la candidature d’Hillary Clinton, une candidate de Wal-Mart & Wall Street et pro-guerres. Sanders aurait au moins pu refuser de soutenir Clinton et de mobiliser ses millions de partisans pour des manifestations de masse contre le racisme et la misogynie de Donald Trump, tout en les exhortant à voter pour la campagne de gauche radicale de Jill Stein .
Une telle mesure aurait été en phase avec une grande partie de sa base. Dans les derniers sondages, près de la moitié de ses partisans étaient se déclaraient opposés à un appel de vote en faveur de Clinton en dépit des énormes pressions exercées par l’ensemble de l’establishment politique et médiatique. Mais au lieu de corriger son erreur initiale de participer aux primaires démocrates, Bernie est allé plus loin dans l’impasse. Son crédit de gauche sera maintenant cyniquement utilisé pour tenter de pousser les «Sandernistas» derrière l’establishment contre lequel ils se sont révoltés.
Bernie a défendu son soutien à Clinton par des concessions de la plate-forme du Parti démocrate approuvée à Orlando. Pour avoir un sens, cette plate-forme devrait être obligatoirement respectée par les élus du parti. Les politiciens qui votent contre la plate-forme du Parti devraient savoir qu’ils perdraient à l’avenir le soutien du parti. Bien entendu, ce n’est pas de cette manière que fonctionne le Parti démocrate (ou le républicain). En réalité, l’histoire des plates-formes décidées à la Convention démocrate nationale (DNC) se résume à une longue série de vagues promesses invariablement brisées. La plate-forme est habituellement jetée par la fenêtre avant même que l’encre en soit sèche. Hillary Clinton sera libre de choisir quelles politiques mettre en œuvre une fois arrivée au pouvoir, qu’importe ce que dit la plate-forme, et ses décisions seront fortement guidées par ce qui est acceptable aux yeux de ses bailleurs de fonds milliardaires.
Même si la pression a poussé l’establishment démocrate à faire certaines concessions concernant la plate-forme, celles-ci sont limitées. Les positions claires sur les grandes questions considérées comme hostiles aux entreprises américaines – comme que l’assurance-maladie pour tous, l’opposition au TPP ou encore le rejet de la fracturation hydraulique – ont été bloquées. Et alors que l’imposition d’un salaire minimum de 15 $ de l’heure a été approuvée, qui croit sérieusement que Clinton va se battre pour son instauration ? Il suffit de jeter un œil à ses donateurs: les banques de Wall Street, McDonalds, WalMart, Target, Big Pharma (les multinationales pharmaceutiques), HMO et Big Oil (les multinationales pétrolières). Qui parmi eux pourra tolérer le que le salaire minimum national soit doublé ?
Bernie a déclaré, à plusieurs reprises, que «Le Parti démocrate doit s’exprimer sur une conclusion fondamentale: sommes-nous du côté des travailleurs ou des intérêts du Big-Money?» Bernie peut-il affirmer sans rire que le Parti démocrate (ou Hillary Clinton elle-même ) est maintenant parvenu à une conclusion favorable aux travailleurs?
Nous ne pouvons pas nous permettre de suivre l’erreur de Bernie. Il est temps pour nous d’aller de l’avant.
Parce que, ne vous méprenez pas, nous devons vaincre la droite.
Nous allons stopper la croissance du populisme à droite de la même manière que nous allons gagner les revendications pour lesquelles nous nous sommes battus au cours de ces derniers mois. En construisant les capacités combatives et organisées de la classe des travailleurs en de puissants mouvements de masse. Nous démobiliser et remettre notre destin aux mains des politiciens pro-entreprises ne fera qu’encourager la droite.
C’est la force des mouvements syndicaux et socialistes des années ‘30 et ‘40 qui a forcé à obtenir des concessions majeures du démocrate Franklin Roosevelt, et ce fut la force des mouvements contestataires des années ‘60 et ‘70 qui a arraché des concessions majeures au républicain Richard Nixon. Ces deux fois, les dirigeants de ces partis n’ont pas cédé un pouce de plus que ce à quoi ils avaient été contraints par les mouvements sociaux.
La raison principale qui explique pourquoi des programmes sociaux ont été gagnés en Europe et ailleurs (ce à quoi a Bernie a souvent fait référence) et n’ont jamais été mis en place aux Etats-Unis est essentiellement que la classe ouvrière américaine n’avait pas encore réussi à construire son propre parti politique et est resté à la remorque du Parti démocrate pro-capitaliste. Des pays comme la Suède, la Grande-Bretagne et la France ont connu la construction de partis de masse socialistes et travaillistes qui se tenaient face aux partis libéraux et conservateurs capitalistes de leur pays. Ils se sont battus aux côtés de mouvements puissants et ont remporté des gains importants. Les élites dirigeantes de ces pays ont accepté l’instauration de programmes publics dans le seul but de conjurer la menace de bouleversements encore plus profonds sous l’impact de l’activité de la classe ouvrière, et non pas de bonne volonté.
Nous avons face à nous une opportunité historique de commencer la construction d’un nouveau parti de masse des 99%. Nous avons besoin d’un parti basé sur la démocratie véritable, à la direction élue et révocables, qui refuse les donations d’entreprises, qui dispose d’une plate-forme de liaison entre les différents mouvements de lutte et qui est tout à fait prêt à «accueillir le mépris» de Wall Street et des entreprises américaines tout en luttant sans relâche pour nos intérêts.
C’est pourquoi je soutiens la candidature de la candidate du Parti Vert, Jill Stein.
Jill Stein se bat essentiellement sur les mêmes questions que Sanders. Elle appelle à l’établissement d’une assurance-maladie pour tous, d’un salaire minimum national de 15 $, d’une transition rapide vers les énergies renouvelables et à la fin de l’incarcération de masse. À certains égards, elle est allée plus loin que Bernie, en particulier concernant l’opposition aux aspects fondamentaux de la politique étrangère des États-Unis ainsi qu’en appelant à l’annulation de la dette des étudiants.
Il ne fait aucun doute que la campagne de Jill est la continuation claire de notre révolution politique et qu’elle mérite le soutien le plus large possible de «Sandernistas». Plus le vote en faveur de Jill Stein sera fort, plus nous serons en mesure de poser les bases d’un nouveau parti des 99% dans la période qui suivra les élections de 2016.
Je ne suis pas d’accord avec Jill ou le Parti Vert sur tout, mais les Verts ont un rôle important à jouer pour aider à construire une politique indépendante de Wall Street. Ce n’est pas le moment de jeter l’éponge. La capitulation de Bernie est un véritable revers. Mais nous ne devons pas l’accepter, nous avons un véritable travail à faire et des millions de gens sont à la recherche d’une voie à suivre.

Ces dernières semaines, “Movement4Bernie” et Socialist Alternative ont organisé des dizaines de meetings pour parler de la manière de construire la révolution politique. La photo ci-dessus a été prise à Berkley, en Californie, où 200 personnes étaient présentes. Plus tard cette semaine, le «Movement4Bernie» sera relancé sous le nom de «Mouvement pour les 99%», pour refléter son engagement continu dans la lutte pour la révolution politique, avant et après le mois de novembre. Si vous ne l’avez pas encore fait, je vous invite à assister dans votre région à une réunion «Beyond Bernie» (Au-delà de Bernie, NDT) organisée par le «Movement4Bernie» et Socialist Alternative afin de discuter des prochaines étapes de notre mouvement et d’y participer. J’espère que vous le ferez et que vous considérerez d’adhérer à Socialist Alternative.
Dans deux semaines à peine, nous serons à la Convention nationale démocrate. De grandes manifestations et des rassemblements auront lieu en dehors, dans les rues de Philadelphie. A l’intérieur, les délégués de Bernie protesteront également contre la direction du Parti démocrate, et certains organisent activement un débrayage en manifestation.
J’espère que vous pourrez y être en ma compagnie pour protester et saluer les délégués qui franchiront l’étape audacieuse de marcher en dehors de la DNC.
Mais il est aussi grand temps d’un autre débrayage encore plus grand – un débrayage de masse hors de l’emprise de la politique des entreprises du Parti (anti)démocrate. Il est temps de construire notre propre parti ainsi qu’une véritable révolution, assez puissante pour défier la domination des entreprises, le racisme institutionnel, la pauvreté et les inégalités économiques et pour gagner toutes les choses pour lesquelles notre mouvement se bat.
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Etats-Unis: primaires non-démocratique & nécessité d’un parti des 99%
Clinton a, comme attendu, remporté la dernière primaire démocrate mardi 14 juin, lui donnant ainsi une majorité de délégués pour être élue candidate du parti Démocrate aux élections présidentielles. Nous reproduisons ci-dessous une tribune initialement publiée le 21 avril sur le site counterpunch.org (au lendemain de la primaire dans l’Etat de New York) qui revient sur la vraie nature de ces primaires, et le combat pour un parti “pour les 99%”.Par Kshama Sawant, Socialist Alternative (CIO-USA)
De plusieurs manières, et malgré une victoire décisive, mardi, confirmant davantage la vraisemblance de sa nomination, Hillary Clinton émerge de la primaire de New York plus endommagée et son parti plus divisé que lorsqu’ils y sont entrés.
Ce que l’on a nommé la Bataille de New York a permis d’exposer plus ouvertement la réalité douloureuse dont de millions de personnes aux États-Unis prennent conscience – que la primaire du Parti démocrate est truquée en faveur de l’establishment.
Une discussion qui avait commencé sur l’approche descendante (top-down system) des “super délégués” et l’énorme influence de l’argent du big business a mené à une prise de conscience de la nature généralement anti-démocratique de la primaire démocrate et du parti lui-même – avec son système électoral, la concentration en début de campagne des scrutins tenus dans les états conservateurs, la forte manipulation de l’espace médiatique par l’establishment médiatique, ainsi que l’antagonisme des leaders du Parti démocrate envers les candidats issus de mouvements populaires tel que Sanders.
Avant que la primaire du 19 avril n’ait même commencé, plus de 27% des New-yorkais (3 millions de personnes) furent exclus par un système électoral contraignant ainsi que par la révocation du droit de vote des électeurs identifiés comme “inactifs”. Dans une circonscription de Brooklyn, les officiels ont noté que 10% des électeurs s’étant présenté-e-s au scrutin ont appris sur place que leurs noms avaient été effacés. Dans le comté où se retrouve Brooklyn, plus de 125 000 électeurs furent retiré-e-s des registres démocrates, menant à une chute massive d’électeurs éligibles, 14% en 5 mois de temps.
Pendant ce temps, dans le nord de l’état de New York, les plages horaires de plusieurs bureaux de vote dans certaines régions plus favorables à Sanders furent considérablement réduites. De plus, une règle dont très peu de gens étaient conscients dicta que seuls les électeurs enregistrés en tant que démocrates depuis le 9 octobre avaient le droit de vote. Le maire de la ville de New York, Bill de Blasio, ne pouvait s’empêcher de faire la remarque : “La perception selon laquelle plusieurs électeurs ont possiblement été privé-e-s de leurs droits mine l’intégrité du processus électoral dans son ensemble, et doit être corrigée.” Le contrôleur de la ville a promis “d’entreprendre une vérification des opérations et de la gestion du Conseil électoral.”
Alors que l’avance de 15 points détenue par Clinton représente certainement plus que la somme de ces irrégularités, il est également clair que si les indépendants et les autres exclus du vote avaient eu la chance de s’exprimer, le résultat aurait été beaucoup plus serré et Sanders aurait même pu gagner.
Les primaires fermées comme celle de New York sont largement défavorables aux mouvements populaires, écartant du processus les millions de personnes enregistrées en tant qu’indépendants qui en sont arrivés à reconnaître le caractère corrompu des deux partis.
La puissance de l’establishment médiatique new-yorkais s’est pleinement manifestée lors de la primaire alors que celui-ci déclara ouvertement la guerre à Sanders. Même les journaux “progressistes” tel que le New York Daily News se sont rués contre lui, imprimant à répétition des attaques sensationnalistes et diffamatoires sur leurs “unes”.
Peut-être que le résultat le plus important de la primaire de New York ne fut pas le vote, mais bien l’impact politique de la campagne de Sanders sur les dizaines de milliers de personnes activement impliqués ou suivant la campagne de proche lors des dernières journées et semaines.
Ce n’est pas qu’à New York
Les médias au service du big business sont fortement intervenus en appui à Clinton pendant tout le processus de la primaire. Tout d’abord avec un blackout médiatique en 2015, alors que Clinton fut dépeinte comme l’inévitable nominée et que Trump reçut plus de 20 fois la couverture médiatique. Lorsque Sanders arriva à se poser en tant que menace, l’establishment médiatique a tout fait pour tenter de le discréditer. Des attaques incessantes sur ses propositions de projets de loi par des importantes personnalités libérales comme Paul Krugman, jusqu’aux véritables assauts comme celle du Washington Post, le 1er mars, alors qu’un article anti-Sanders fut publié toutes les heures pendant 16 heures.
Des irrégularités dans les scrutins sont apparus d’état en état. Tandis que certaines furent sans aucun doute exagérées, d’autres avaient des effets réels. En Arizona, où les gens ont attendu jusqu’à 5 heures en file pour voter, plusieurs personnes ont également vu leurs inscriptions au registre changer sans qu’ils en aient connaissance.
La primaire dans son ensemble est orientée vers les partisans les plus vieux et les plus riches. Au niveau national, moins de 15% des électeurs éligibles participeront aux primaires et caucus démocrates.
Les travailleurs ont bien vu le caractère pro-business de la direction du Parti démocrate dans toute sa splendeur. Ce n’est pas un accident si, lorsque le sénateur démocrate Jeff Merkley a manifesté son appui envers Bernie Sanders la semaine passée, il était le premier à le faire. En comparaison, 40 sénateurs ont appuyé Hillary, ainsi que 166 représentants de la Chambre. Cet establishment trouve tout à fait inacceptable l’appel, lancé par Sanders, à une révolution contre les milliardaires et les riches donateurs de campagne. Le leadership démocrate se base sur des échanges de faveurs et ils n’ont de cesse d’aller de position élue à carrière lucrative dans les corporations et les lobbies. En même temps, ils utilisent leur influence et leur poids politique afin de s’assurer que les leaders syndicaux et religieux rentrent bien dans le rang.
Ajoutez à ceci les puissances combinées des super PACs (Comités d’Action Politiques, qui sont des organisations privées de lobby politique aux fonds potentiellement illimités, NdT) de Wall Street et vous avez une primaire et un parti politique qui représentent un terrain hostile pour un candidat du 99%.
Un simple fait révèle le caractère truqué du système : les sondages nationaux démontrent que Bernie Sanders obtient, et de loin, les cotes de popularité les plus élevés parmi tous les candidats à la présidence, et qu’il l’emporte sur tous les candidats républicains en affrontement direct. Pourtant, il sera vraisemblablement éliminé avant l’élection générale s’il continue de jouer le jeu du bipartisme.
Une opportunité historique
Nous arrivons à ce qui pourrait être le moment le plus favorable dans l’histoire des États-Unis pour lancer un nouveau parti de la gauche. Face aux deux grands partis, à l’establishment médiatique et à toutes les grandes institutions capitalistes américaines, la confiance publique s’écroule. Huit ans après la Grande récession, alors que la majorité des travailleurs souffre toujours malgré le rétablissement de Wall Street, toute la colère et le mécontentement accumulés s’expriment par une révolte contre les leaders d’establishment démocrates et républicains.
Ceci est le contexte de la montée impressionnante de Bernie Sanders, qui a mené la campagne présidentielle la plus nettement à gauche dans l’histoire des États-Unis depuis Eugene Debs (quoique Debs, qui représentait le Parti socialiste, ne cachait pas son mépris pour la domination corporative du Parti démocrate, et ne fit pas l’erreur fondamentale de faire campagne au sein du parti). Ayant débuté sa campagne sans notoriété, avec un maigre 3% des intentions de vote et aucune personnalité politique de renommée nationale pour le soutenir, Bernie a gagné plus de votes et plus de primaires d’Etat, a amassé plus d’argent et a mobilisé plus de volontaires que n’importe quel candidat de gauche dans l’histoire du Parti démocrate.
Il a été en mesure d’accomplir tout cela avec une authentique plateforme de gauche, tout en refusant les dons corporatifs, en portant l’étiquette socialiste et en prenant comme slogan central un appel à “une révolution politique contre la classe des milliardaires”.
Même selon les standards du courant politique dominant, la force de la campagne de Sanders est stupéfiante. Clinton débuta la campagne électorale avec ce qui apparut, sur papier, comme une des plus formidables machines électorales corporatives jamais assemblée. Pourtant, dans les derniers trois mois, avec des dons de 27$ en moyenne, Sanders a su rallier une base grandissante de petits donateurs – au-delà de 2 millions de personnes – afin de lever une somme bien plus élevée que celle de Clinton. Au seul mois de mars, Sanders a levé $44 millions contre les $29.5 millions de Clinton.
L’année passée, n’importe quel expert politique du courant dominant aurait répété le même mythe selon lequel aucun candidat refusant des dons corporatifs n’aurait la moindre chance d’être élu, encore moins un candidat se déclarant socialiste ! Aujourd’hui, ce mythe est enterré.
Personne ne peut nier le potentiel de l’établissement d’un parti politique de gauche viable à l’échelle nationale, complètement indépendant de l’argent corporatif, mettant de l’avant des projets de lois manifestement de gauche et en faveur des travailleurs. La seule incertitude qui demeure est celle du leadership : est-ce que Sanders prendra l’initiative, et s’il ne le fait pas, le mouvement derrière lui sera-t-il en mesure de rester organisé ?
Un nouveau parti
“Je crois que nous devons considérer très sérieusement, particulièrement en tant que personnes de oucleur et individus progressistes, le lancement soit d’un nouveau parti ou d’un nouveau mouvement…”
Ceci est une citation de Michelle Alexander, auteur du livre The New Jim Crow, en conversation avec Chris Hayes sur la chaîne MSNBC le 1er avril. Trois jours plus tard, dans le New York Daily News, le quatrième plus grand quotidien du pays, la chronique de Shaun King débuta avec cette même citation, à laquelle il rajouta :
“Non seulement je suis d’accord avec Alexander, mais j’aimerais aller plus loin – je crois que ceci se déroule présentement sous nos yeux. Les progressistes politiques partout au pays, dans leur appui à la candidature de Bernie Sanders, sont en train de rejeter le Parti démocrate… nous devrions former notre propre parti politique dans lequel nous serons fermement et audacieusement contre la peine de mort, où nous serons tous pour un salaire minimum décent dans l’ensemble du pays, où nous serons pour une restructuration complète du système judiciaire, où nous serons en faveur de réformes radicales afin de protéger l’environnement et de ralentir le réchauffement climatique, où nous serons pour l’éradication des riches donateurs dans la politique, où nous serons véritablement prêt à considérer les soins de santé et l’éducation pour tous comme un droit et non un privilège.”
D’un point de vue politiquement opposé, la chronique de Paul Krugman du 8 avril dans le New York Times a fait l’écho du propos de Shaun King selon lequel un nouveau parti émergeait “sous nos yeux”. Krugman avertissait Bernie qu’il devait atténuer ses attaques contre Clinton au risque de créer une plus profonde rupture dans le Parti démocrate, osant la question arrogante : “Est-ce que M. Sanders se positionne parmi les partisans du “Bernie ou rien” (Bernie or bust) …? Sinon, que pense-t-il qu’il est en train de faire ?”
Krugman et King ont tous les deux raisons. Alors que la “révolution politique contre la classe des milliardaires” de Bernie devient de plus en plus forte, elle menace d’autant plus de se libérer de la camisole de force du Parti démocrate qui, en fin de compte, est dominé par les grandes entreprises.
C’est pour cette raison que mon organisation, Alternative Socialiste, ainsi que le #Movement4Bernie pétitionnent Bernie pour qu’il poursuive sa campagne jusqu’en novembre en tant qu’indépendant ou avec le Parti Vert avec Jill Stein s’il est bloqué par le processus truqué de la primaire démocrate, et de tenir une conférence afin de discuter la création d’un nouveau parti pour le 99%.
Si des inquiétudes persistent par rapport au fait que cela pourrait contribuer à la victoire d’un républicain, il n’y a aucune raison qui empêche Bernie de faire campagne dans la grosse quarantaine d’états où la victoire est certaine pour un des deux partis, tout en évitant de se présenter dans les états les plus contestés. Ceci permettrait quand même à une campagne historique de faire le lien avec un nouveau parti politique pour les 99% et de poser les fondations pour un mouvement politique perpétué par la prise de pouvoir de centaines de candidats gauchistes à tous les niveaux du gouvernement, indépendamment de l’argent corporatif.
Par contre, si malgré la campagne de diffamation portée contre lui, Sanders demeure fidèle au Parti démocrate et soutient Clinton dans l’élection générale, cela signalerait la démoralisation et la désorganisation de tout le mouvement. Oui, nous avons besoin d’une stratégie pour repousser les républicains de droite, mais l’effondrement du mouvement anti-establishment derrière Bernie au sein de la campagne de Clinton – une fausse union avec la candidate de Wall Street et de l’establishment politique – laisserait le champ libre à des populistes comme Trump ou Cruz et l’élargissement leur base militante.
Si Sanders choisit cette option, les pro-Sanders devront continuer la révolution politique… même sans Sanders.
Une campagne présidentielle indépendante
Le temps est venu de briser les règles. Une campagne présidentielle indépendante menée agressivement par Bernie Sanders, liée à l’établissement d’un nouveau parti populaire pour les 99%, pourrait radicalement transformer la politique américaine. Bernie n’aurait pas besoin de gagner l’élection afin de pousser la société des États-Unis vers la gauche. Même le score de 10 ou 15 millions de voix pour ce nouveau parti (et il y a le potentiel pour un gain beaucoup plus important) pourrait porter un coup dévastateur au monopole politique des deux partis du capitalisme américain.
Partout dans le monde où les travailleurs ont gagné de vastes réformes, comme les systèmes de santé à payeur unique ou l’éducation gratuite ou les congés maternité payés, ce fut grâce à la formation de partis des travailleurs de masse. Au Canada, par exemple, les centrales syndicales ont lancé le Nouveau Parti Démocrate avec la médecine socialisée comme demande centrale. Ils ont gagné moins de 15% des votes, et ont été blâmés pour avoir divisé le vote en faveur des conservateurs, mais afin de limiter l’expansion du Nouveau Parti Démocrate, les conservateurs ont fini par accorder aux travailleurs canadiens leur demande centrale – et ainsi fut créé le système de médecine socialisée au Canada.
D’un autre côté, si Sanders se retire et soutien Clinton après les primaires, le Parti démocrate sera libre de faire un virage à droite dans l’élection générale, s’appuyant sur la peur des républicains afin de forcer les progressistes à rentrer dans le rang.
L’enjeu est tout simplement trop important pour laisser filer ce moment. Le capitalisme mène l’humanité vers une catastrophe sociale et écologique. La campagne de Bernie a montré qu’une riposte viable est possible. Ce qui manque est une stratégie ayant pour but d’alimenter et de développer notre mouvement. Le moment est venu pour ce geste audacieux qu’est la création d’une alternative politique militante et ouvrière – un parti pour les millions et non les millionnaires.





