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  • [VIDEO] Chine : Solidarité avec les travailleurs en lutte de Jasic Technology !

    Nous publions ci-dessous une vidéo produite par chinaworker.info concernant une importante lutte qui prend actuellement place à Shenzhen, en Chine. Chinaworker.info appelle à l’organisation d’actions de solidarité, comme la prise de photos avec l’affiche de solidarité (que vous trouverez ici), à l’instar de l’image ci-dessous prise à Bruxelles.

     

  • Solidarité avec les travailleurs de Jasic Technology Shenzen (Chine)

    Action de protestation menée au poste de police de Shenzhen

    Depuis le 18 juillet, les travailleurs de Jasic Technology, une usine de Shenzhen (en Chine) employant 1.000 ouvriers fabriquant des machines et des robots, luttent pour la création d’un syndicat démocratique, c’est-à-dire indépendant. L’entreprise, les autorités locales du PCC (le parti « communiste » chinois) et le syndicat officiel contrôlé par l’État s’y opposent et ont sévèrement réprimé le combat.

    La police a arrêté 30 travailleurs le 27 juillet, dont 14 sont toujours en détention. Des travailleurs ont fait état de cas de torture et d’agressions physiques commis par la police. Les personnes libérées sont sous surveillance policière. L’entreprise a licencié plusieurs des travailleurs impliqués dans la lutte. Des travailleurs et des militants étudiants de gauche ont organisé des manifestations devant le poste de police pour protester contre la répression et exiger la libération de leurs camarades. Ces travailleurs pourraient être accusés de “chercher des troubles et les provoquer”, ce qui peut entraîner cinq ans de prison.

    Action de solidarité à Hong Kong

    Le 11 août, une militante de premier plan de ce combat, Shen Mengyu, a été enlevée par des personnes non identifiées (des forces de sécurité) et son lieu de détention est toujours inconnu. Le Comité pour une Internationale Ouvrière (dont le PSL/LSP est la section belge) exige que la police révèle où elle se trouve et sur base de quelles accusations elle est détenue. Nous exigeons sa libération de même que celle des autres travailleurs détenus sans qu’aucune accusation ne soit portée contre eux. Nous exigeons que les politiciens locaux et les fonctionnaires de police responsables soient congédiés pour avoir ordonné cette répression. Nous exigeons la reconnaissance immédiate du droit des travailleurs de Jasic Technology à constituer un syndicat démocratique et indépendant ainsi que la réintégration immédiate de tous les travailleurs licenciés.

    Action de solidarité de la section Bruxelles-Nord du PSL / LSP

    Les patrons de cette société privée cotée en bourse entretiennent des liens étroits avec le gouvernement local du PCC et sont déterminés à mettre fin à cette tentative d’établir un syndicat qui n’est pas sous le contrôle de l’entreprise.

    Vidéo du personnel en lutte de Jasic Technology chantant l’Internationale :

  • Chine : Aggravation de la crise et résistance de masse

    L’article qui suit est la retranscription de l’introduction de l’atelier de discussion consacré à la situation en Chine qui a été donnée à l’édition 2018 de l’école du Comité pour une Internationale Ouvrière. Cette introduction avait été donnée par Pasha, de Socialist Action, CIO à Hong Kong.

    L’année écoulée peut être décrite comme une année de grands changements en Chine – montrant l’aggravation de la crise de la dictature du parti unique et la forme particulière du capitalisme d’État chinois. Il y a eu un changement historique dans la structure du régime du “Parti communiste” (PCC) avec le couronnement de Xi Jinping comme “dirigeant à vie” en mars dernier.

    Depuis le mois d’avril, nous avons assisté à une série de grèves audacieuses qui se sont répandues dans de nombreuses provinces. Dans les relations internationales, le conflit entre les États-Unis et la Chine s’est aggravé de façon dramatique. Il s’agit du plus important conflit mondial entre les deux plus grandes puissances économiques.

    Le ministère chinois du commerce a décrit les droits de douane imposés par le président Trump le 6 juillet comme étant “la plus grande guerre commerciale de l’histoire économique”. Ce n’est pas encore la “plus grande jamais vue”, mais une nouvelle escalade est possible. Le conflit Etats-Unis / Chine n’est pas un phénomène passager ; c’est maintenant une réalité permanente, avec des hauts et des bas, qui définit une partie cruciale des perspectives du CIO concernant le capitalisme mondial.

    Nous observons également une nouvelle phase dans le malaise économique de la Chine. La répression du régime contre les dettes et opérations bancaires parallèles (« shadow banking ») a entraîné un nouveau ralentissement économique et, une fois de plus, un retour partiel aux politiques de relance, c’est-à-dire à une augmentation de la dette. Ce changement peut devenir plus important dans les mois à venir. Le problème de la dette de la Chine est un problème pour l’ensemble du système capitaliste mondial. Aucun pays dans l’histoire n’a accumulé autant de dettes.

    Eloignement de la politique de Deng Xiaoping

    La réunion de mars du « Congrès national du peuple » – le pseudo parlement chinois – a été surnommée le « couronnement de Xi Jinping ». Le congrès a supprimé les limites du mandat de la présidence afin que Xi puisse gouverner à vie.

    Depuis la fin des années 1970, la Chine est gouvernée par une forme de “leadership collectif”, un système mis en place par Deng Xiaoping, l’architecte du retour de la Chine au capitalisme. Le modèle de partage du pouvoir de Deng, ainsi que d’autres règles politiques, ont été conçus pour sauvegarder la “stabilité” et empêcher que les luttes de pouvoir au sein de l’État n’aillent trop loin et ne menacent l’existence de la dictature.

    Depuis la crise mondiale du capitalisme de 2007-08, l’élite dirigeante du PCC a besoin d’un “homme fort”, avec un pouvoir centralisé sans précédent, pour la sauver de ses propres crises – une dette croissante et des troubles de masse qui augmentent.

    En six ans, depuis son arrivée au pouvoir, Xi a mené une vaste campagne de lutte contre la corruption, qui porte en partie sur celle-ci et l’obtention du soutien du public, mais qui a surtout servi à consolider la position de Xi et à supprimer toute opposition. Mais plutôt que de surmonter les tensions au sein de l’État chinois et de l’élite dirigeante, la consolidation du pouvoir de Xi a porté les tensions à un niveau potentiellement plus élevé.

    Malgré la censure massive d’Internet, les citoyens chinois ont rapidement exprimé leur cynisme et leur opposition en ligne à l’égard du couronnement de Xi par des métaphores satiriques. Les censeurs d’Internet ont dû rapidement interdire toute une liste de mots tels que “limite de deux mandats”, “amendement constitutionnel”, “je ne suis pas d’accord”, “Corée du Nord”, et même “Winnie l’ourson” (considéré comme ressemblant trop au dirigeant chinois).

    Cela a mis en évidence le véritable niveau de soutien de Xi parmi les masses. Certains commentateurs ont décrit Xi comme le leader le plus fort depuis Mao, mais Mao était un dirigeant bonapartiste à la tête d’un mouvement qui a renversé le capitalisme en Chine ; le gigantesque culte de la personnalité que le régime a construit autour de Mao n’a été possible qu’en raison de son rôle dans la révolution.

    Xi Jinping préside un système capitaliste d’Etat et sa véritable base de soutien parmi les masses est exagérée. Son pouvoir repose principalement sur la répression, le nationalisme, le “lavage de cerveau” massif des médias et le fait que certaines couches de la population connaissent encore des améliorations. Mais c’est de plus en plus fragile. Les fondements du règne de Xi – niveaux d’endettement sans précédent, répression accrue et nationalisme – constituent une succession de crises à venir.

    Répression et conséquences

    Aujourd’hui, la répression étatique est la pire depuis 1989. Le budget du gouvernement pour la sécurité intérieure était de 193 milliards de dollars l’année dernière – il a triplé depuis 2007. C’est 19 % de plus que le budget militaire de la Chine (sécurité extérieure).

    Dans la région musulmane du Xinjiang, deux fois moins grande que l’Inde, la Chine a construit “l’État policier parfait”, selon le journal The Guardian. Entre 500 000 et 1 million d’Ouïghours musulmans ont été détenus dans des camps de prisonniers de type militaire – jusqu’à un sur dix de la population. Le PCC gouverne maintenant le Xinjiang par le biais d’un système ouvertement raciste de type apartheid avec des lois plus répressives pour les musulmans.

    Malgré le fait que le régime ait la machine d’État répressive la plus sophistiquée au monde, la résistance de masse et les protestations s’intensifient. Depuis la fin de 2017, les masses en Chine ont participé avec audace à des manifestations en ligne à grande échelle et à des grèves des travailleurs de plusieurs provinces, ce qui représente un tournant dramatique.

    En avril, les grutiers se sont mis en grève dans au moins 13 provinces pour réclamer de meilleurs salaires et de meilleures conditions. Ils ont ensuite appelé à une grève à l’échelle nationale le 1er mai. Étant donné la répression et la censure de l’État, c’est un exploit en soi. Ces luttes sont organisées par le biais de groupes de discussion en ligne et de messageries instantanées.

    Grèves multi-provinciales

    La grève des grutiers était historique dans le sens où c’était l’action la plus impressionnante, coordonnée et audacieuse à ce jour. Auparavant, presque toutes les grèves en Chine se déroulaient dans une usine ou un district. Une grève à l’échelle nationale est un très grand changement. La lutte d’avril semblait ouvrir le chemin aux luttes nationales.

    En juin, c’était au tour des camionneurs. Les camionneurs en grève dans plus de 12 provinces ont protesté contre la hausse du prix du carburant, les péages routiers coûteux, le harcèlement policier et l’exploitation accrue par une application d’embauche de type « Uber » ». L’action des camionneurs s’est déroulée dans les villes de Chongqing à l’ouest jusqu’à Shanghai à l’est. C’est similaire à la distance de Madrid à Londres. Faire cela sous la dictature la plus puissante du monde est impressionnant.

    Et depuis avril, les anciens combattants de l’armée de plusieurs provinces avaient organisé des manifestations pour réclamer le paiement des pensions et des prestations de retraite. Certains anciens combattants ont été battus par des gangsters payés par les gouvernements locaux du PCC. Par le biais de liens et de réseaux au sein de l’armée, des dizaines de milliers d’anciens combattants ont été mobilisés pour manifester en solidarité à travers le pays.

    La lutte des vétérans de l’armée est importante parce qu’elle sape la propagande nationaliste de Xi Jinping. Il y a 57 millions de soldats retraités en Chine. Cette question peut également avoir une incidence sur les soldats en service. Comment l’Etat peut-il défendre la “nation chinoise” s’il laisse ses anciens combattants mourir de faim et les frappe lorsqu’ils protestent ?

    Plus tôt cette année, le gouvernement a mis sur pied un nouveau ministère des Anciens Combattants parce qu’il était préoccupé par les protestations des anciens combattants. Mais le fait que des protestations aient éclaté de toute façon montre les limites de l’Etat pour faire face à ces problèmes.

    #Metoo en Chine

    Parmi les autres mouvements importants en Chine figurent les mouvements féministes et LGBTQI+. Le mouvement #Metoo qui a balayé le monde a aussi profondément affecté la Chine. En janvier, une universitaire chinoise travaillant aux États-Unis a révélé en ligne qu’elle avait été agressée sexuellement par son professeur il y a douze ans. Son tweet est devenu viral et a reçu un énorme soutien en ligne parmi les femmes en Chine.

    Cela a déclenché un mouvement en ligne, en particulier dans les écoles et les collèges. Cela a même forcé l’État à se contenter de belles paroles et à condamner la violence sexuelle. En même temps, le PCC craignait que le mouvement devienne incontrôlable et a donc rapidement interdit toute tentative d’organiser des manifestations dans les rues. Un blog féministe de premier plan a été interdit.

    Les censeurs de l’État ont ensuite décidés d’interdire les sujets LGBTQI+. Weibo, la principale plateforme de blogs en Chine, a annoncé qu’elle supprimerait les “contenus illégaux”, y compris l’ « homosexualité ». Cela a déclenché un contrecoup massif. La campagne #IamGay a appelé au boycott de Weibo. Avec plus de 500 millions de partage sur le net, il s’agissait probablement du plus grand mouvement en ligne au monde. Elle a forcé l’entreprise et les autorités à renverser l’interdiction du contenu « homosexuel ».

    De la récente vague de luttes, il y a plusieurs caractéristiques que nous pouvons observer. Les luttes de masse en Chine s’organisent de plus en plus malgré la répression et la censure de l’Etat, capables de se mettre en scène et de se coordonner à travers tout le pays. Les travailleurs tirent clairement les leçons du passé, ils se rendent compte que les problèmes ne peuvent être résolus localement.

    La radicalisation de la conscience de masse est également une caractéristique, bien qu’elle soit inégale. Les travailleurs limitent généralement leurs revendications à l’économie et évitent de contester directement le régime du PCC, en partie pour éviter la répression de l’État et en partie à cause des illusions persistantes du PCC.

    Si le régime recourt à la répression, ce qui est définitivement le cas sous Xi Jinping, ce n’est qu’une question de temps avant que les travailleurs ne tirent la conclusion que la dictature est un obstacle à tout changement réel et cela amènera leurs luttes vers une direction politique plus claire.

    Ralentissement économique

    L’économie chinoise est confrontée à des crises sur de multiples fronts. L’économie est en ralentissement après une courte période de légère reprise en 2017. Depuis le début de 2018, le marché boursier a perdu 2 billions de dollars américains, comparativement à 5 billions de dollars américains lors du krach boursier de 2015.

    Les données économiques du 2ème trimestre devraient être beaucoup plus faibles qu’au 1er trimestre. Les chiffres du commerce de détail en mai étaient les pires depuis 15 ans. Le taux de croissance de l’investissement est le plus faible depuis 20 ans. La part de la dette dans le PIB est passée de 141 % en 2008 à 256 % l’an dernier. Ce chiffre s’élève à 304 % du PIB si l’on inclut les banques de l’ombre. En fait, le niveau d’endettement réel est beaucoup plus élevé. Cela s’explique par le fait que la plupart des dettes bancaires fictives ne sont pas enregistrées. Même le gouvernement ne connaît pas le tableau complet.

    Le dernier ralentissement oblige le PCC à redémarrer la stratégie de relance économique. Pendant dix ans, nous avons vu le même zigzag dans la politique économique – de la relance au resserrement du crédit et de retour à la relance, c’est-à-dire davantage de dette. Le problème de la dette est particulièrement grave au niveau des administrations locales (les administrations locales en Chine sont les villes et les provinces, de sorte que certaines sont plus grandes que la plupart des gouvernements nationaux en Europe ou dans le monde).
    Cela a été en partie à l’origine des protestations des anciens combattants de l’armée. En fait, les gouvernements locaux d’au moins 32 villes de six provinces financent maintenant leurs dépenses de sécurité sociale et de retraite avec des prêts des banques ou des banques fictives. Ce problème ne fera qu’empirer avec le vieillissement rapide de la population chinoise.

    Une ville de la province du Hunan n’a pas été en mesure de payer ses fonctionnaires à temps en mai. Ces arriérés de salaires – pour les fonctionnaires – étaient les premiers dans l’histoire moderne de la Chine. Nous voyons déjà la crise de la dette se transformer en crise sociale, et nous en verrons d’autres à l’avenir.

    Guerre commerciale et conflit impérialiste

    L’escalade de la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine est un autre coup porté à l’économie chinoise déjà vulnérable. Le 6 juillet, les droits de douane imposés par l’administration Trump sur 34 milliards USD d’importations en provenance de la Chine représentaient le premier coup de feu après une longue période de menaces. Cela a depuis lors été suivi par des droits de douane sur 16 milliards USD d’importations supplémentaires et la menace de Trump d’élargir ce chiffre à 200 milliards USD de marchandises chinoises d’ici septembre.

    Le régime chinois est forcé de riposter « dollar pour dollar » avec ses propres tarifs douaniers contre les marchandises américaines, mais en fait, il a offert des concessions à Trump et voulait désespérément éviter la guerre commerciale. Dans le conflit commercial plus large, il y a une « guerre de la technologie ». L’objectif principal de l’impérialisme américain et de Trump est d’arrêter « Made in China 2025 » – le plan du PCC pour devenir une superpuissance technologique.

    Les sanctions du gouvernement américain qui interdisaient à la troisième plus grande entreprise d’infrastructure de télécommunications ZTE d’acheter quoi que ce soit à des entreprises américaines, ont essentiellement forcé la fermeture de l’entreprise pendant 70 jours en avril-mai. La crise du ZTE a mis en évidence la dépendance de la Chine à l’égard de l’Occident pour la technologie. ZTE obtient 90 % de ses « semi-conducteurs » auprès d’entreprises américaines.

    Trump a accepté de lever l’interdiction sur ZTE, mais l’accord subséquent est toujours humiliant pour l’entreprise et l’État chinois. Ils doivent payer une amende équivalente à deux ans de bénéfices. Mais pire encore, ils ont dû licencier l’ensemble du conseil d’administration et accepter des bureaucrates américains au sein de l’entreprise. Cela ressemble un peu à ce que la troïka du FMI et de l’UE a fait à la Grèce – envoyer des bureaucrates de l’UE pour vérifier que les Grecs ne “trichaient” pas.

    La situation est compliquée par le fait que même Trump a partiellement perdu le contrôle de la guerre commerciale – le Congrès américain, les républicains et les démocrates exigent maintenant des mesures encore plus sévères contre la Chine.

    Dévaluation

    Dans le cadre de ces représailles, la Chine a permis à sa monnaie, le yuan, de baisser face au dollar. Toutefois, il s’agit d’un mouvement dangereux, car il pourrait déclencher une fuite massive de capitaux de la Chine, comme ce qui s’est produit en 2015. Le régime devrait alors imposer davantage de contrôles des capitaux.

    Mais avec plus de contrôle des capitaux, il peut dire adieu au rêve d’ « internationaliser le yuan » pour en faire une monnaie de réserve mondiale. En fait, l’internationalisation du yuan a régressé au cours des trois dernières années. Moins de pays veulent utiliser la monnaie chinoise dans les paiements internationaux. Le franc suisse et le dollar canadien ont maintenant une plus grande part mondiale que le yuan. Cela est important parce que la domination du dollar américain dans l’économie capitaliste mondiale restreint les politiques que le régime chinois peut suivre.

    Les Etats-Unis et la Chine, les deux plus grandes puissances impérialistes, se disputent la domination économique et géopolitique. La confrontation entre eux a été accentuée par la crise mondiale depuis 2008.

    Alors qu’une « guerre spontanée » ou un affrontement militaire direct n’est pas une perspective immédiate, les guerres commerciales et autres conflits économiques peuvent devenir un substitut à l’action militaire. Tous les accords auxquels ils parviennent dans la guerre commerciale actuelle ne peuvent être que de courte durée et fragiles. Leurs conflits peuvent frapper davantage l’économie mondiale, qui ne s’est pas remise de la grave crise d’il y a dix ans.

    Le conflit taïwanais peut être relancé dans le cadre de la rivalité croissante entre les États-Unis et la Chine. Cela peut conduire à une guerre ou à une grave crise militaire à l’avenir. La crise capitaliste a aussi rapidement exposé le gouvernement DPP  « pro-indépendance » de Taiwan, élu en 2016, en tant que parti capitaliste néo-libéral qui défend également une augmentation des dépenses en armements et davantage d’accords avec l’impérialisme américain, tout en imposant l’austérité aux travailleurs. Aucune des élites au pouvoir, qu’il s’agisse des États-Unis, de la Chine ou de Taïwan, n’a de solution et ne fait que rendre la situation plus dangereuse.

    Le projet « Belt and Road »

    Xi Jinping a lancé l’initiative « Belt and Road » (BRI) en 2013 pour gagner de nouveaux marchés à l’étranger pour écouler la production excédentaire du capitalisme chinois. Il s’agissait également de se préparer aux futures guerres commerciales et construire un protectionnisme accru à l’échelle mondiale. La BRI a été ajoutée à la constitution du PCC l’année dernière – la première fois qu’une politique étrangère a été intégrée dans la constitution – pour signaler qu’il n’y aurait pas d’inversion de cette politique.

    Aujourd’hui, l’Initiative intègre plus de 70 pays. Son ambition est de relier le monde sous-développé en une sphère économique dirigée par la Chine via la construction de pipelines, d’autoroutes, de ports, de chemins de fer, de réseaux électriques.

    Nous décrivons le BRI comme un « impérialisme avec des caractéristiques chinoises ». Ces caractéristiques sont des prêts financés par l’État pour la construction d’infrastructures et l’exportation de certains éléments du régime autoritaire de la Chine. Il y a aussi une composante militaire avec certains projets de l’IRB – pour les ports et certains chemins de fer en particulier – principalement motivés par des considérations militaires stratégiques.

    La stratégie de la Chine pour s’emparer de terres et ressources dans les petits pays moins développés est simple : elle leur accorde des prêts pour des projets d’infrastructure, obtient le contrôle des projets et, lorsque le pays n’est pas en mesure de rembourser les prêts, les entreprises chinoises et l’État deviennent propriétaires du projet.

    Cependant, les aspirations impérialistes de la Chine sont déjà confrontées à des revers. Des manifestations de masse ont éclaté au Vietnam en juin contre les capitaux étrangers, principalement des entreprises chinoises. Ces sociétés ont acheté des terres au gouvernement vietnamien sur des baux de 99 ans, des arrangements qui rappellent les anciens traités du colonialisme. Le tsunami politique de l’élection malaisienne en mai a vu le nouveau gouvernement mettre au rebut le projet de train à grande vitesse Kuala Lumpur-Singapour dirigé par les Chinois.

    L’investissement mondial dans l’initiative Belt and Road est aujourd’hui ralenti. Au cours des cinq premiers mois de cette année, les contrats signés par des entreprises chinoises ont diminués de six pour cent par rapport à l’année dernière. Le nombre croissant de défauts de paiement de la dette du BRI aura un impact direct sur les entreprises chinoises, qui sont lourdement endettées. Ainsi, l’initiative, lancée à l’origine par le PCC pour exporter la capacité excédentaire et alléger la dette, fait maintenant partie du problème.

    La répression à Hong Kong

    Les développements en Chine ont également eu des implications importantes à Hong Kong où le PCC tente de décapiter la lutte démocratique. Le gouvernement de Carrie Lam représente une nouvelle escalade de la répression.

    Au cours de l’année écoulée, six législateurs de l’opposition démocratiquement élus ont été disqualifiés, plus de 40 jeunes et autres activistes ont été emprisonnés pour avoir participé à des manifestations antigouvernementales, et six candidats ont été interdits de se présenter aux élections pour des raisons de soutien à l’ « indépendance » ou à l’ « autodétermination ».

    De nouvelles lois draconiennes sont introduites, y compris la loi sur l’hymne national. Toute personne à Hong Kong reconnue coupable d’ « irrespect » de l’hymne national chinois est passible d’une peine d’emprisonnement pouvant aller jusqu’à trois ans.

    Les principaux partis bourgeois pro-démocratie ont été en plein recul politique. Ils n’ont pas réussi à proposer une nouvelle stratégie de lutte contre le gouvernement autoritaire. Ces « pan-démocrates » ont en réalité été un frein à la lutte pour la démocratie pendant des décennies, avec des similitudes avec le rôle des dirigeants sociaux-démocrates et des dirigeants nationalistes bourgeois dans d’autres parties du monde :

    1. Ils ne croient pas à la lutte de masse et essaient toujours de trouver un compromis avec le régime qui, dans le cas de la Chine, n’a aucune chance d’aboutir.
    2. Ils craignent que les mouvements de masse, une fois qu’ils « s’échappent », deviennent incontrôlables et se radicalisent.
    3. Ils défendent le capitalisme et ne veulent donc pas pousser la lutte contre la dictature chinoise « trop loin », car cela mettrait aussi en danger le capitalisme.

    Le CIO est le seul à réclamer un mouvement démocratique de lutte basé sur un programme socialiste, avec un parti ouvrier de masse comme noyau dur. Nous expliquons également que la démocratie, y compris l’autodétermination à Hong Kong, ne peut être gagnée qu’en s’associant aux luttes de masse en Chine ainsi qu’à l’échelle internationale et en renversant la dictature du PCC.

  • Chine. La grève nationale des camionneurs, signe des temps à venir

    Les grèves des camionneurs dans plus de 12 régions confirment la tendance croissante vers les actions syndicales «interrégionales»

    Par des correspondants de chinaworker.info

    Les chauffeurs de camions de toute la Chine ont pris part à des grèves et à des actions de protestation contre l’augmentation des coûts du carburant, les péages routiers et une nouvelle application en ligne qui les monte les uns contre les autres dans la recherche d’emplois.
    Ces grèves sans précédent ont commencé dans la province de Jiangxi et du Chongqing, les 8 et 9 juin respectivement. Elles se sont ensuite étendues à d’autres régions. Un appel anonyme en ligne a appelé les “30 millions de camionneurs à travers la Chine” à se joindre à la grève. Les manifestations ont pris diverses formes, des conducteurs bloquant les routes dans certaines zones. Les vidéos présentes sur les médias sociaux montrent des convois de camions conduisant lentement, certains couverts de banderoles, les conducteurs klaxonnant et scandant des slogans.

    Bien qu’elles ne soient pas directement inspirées par des événements internationaux, ces grèves coïncident avec celles des camionneurs en Iran et au Brésil ces dernières semaines. Ces protestations ont surgi pour des raisons similaires : la hausse des prix du carburant jouant un rôle majeur.

    “Nous nous battons simplement pour survivre”

    Plus de 80 % des marchandises chinoises sont transportées par camions. Les grèves de juin pourraient donc représenter les premiers mouvements d’un géant. Plusieurs commentateurs avertissent que les grèves pourraient éclater à nouveau, surtout si les prix du carburant continuent d’augmenter.

    “Nous nous battons simplement pour survivre”, a déclaré un camionneur basé à Shandong au South China Morning Post, indiquant que de nouvelles manifestations pourraient être organisées plus tard dans l’année. En plus des coûts du carburant, la colère des grévistes est dirigée contre les péages élevés, le harcèlement de la police (qui a fait de l’imposition d’amendes aux camions surchargés un commerce rentable), ainsi que la mafia qui exige d’être payée pour laisser les camionneurs tranquilles.

    “Vous devez payer des frais et des péages partout où vous allez, pour utiliser l’autoroute ou les autoroutes nationales. Même les petits endroits demandent de l’argent maintenant”, a déclaré à Radio Free Asia un chauffeur appelé Shen.

    Un gros titre du Wall Street Journal a décrit les grèves comme étant “inégales” – mais cela n’est guère surprenant dans les conditions ultra-répressives de l’État policier chinois. L’ampleur de la protestation était toutefois impressionnante, les camionneurs étant rentrés en lutte dans plus d’une douzaine de régions et de villes, de Chongqing à l’ouest à Shanghai à l’est (l’équivalent de la distance entre Londres et Varsovie). Tout cela, bien sûr, avec un silence médiatique total en Chine, les censeurs du régime assurant qu’il ne soit pas possible de disposer d’une image plus claire des événements et du nombre de personnes impliquées.

    Pour cette seule raison, la grève est politiquement très importante, même si les chauffeurs eux-mêmes, comme la plupart des autres travailleurs impliqués dans la lutte, ont évité les revendications politiques directes. Malgré cela, le gouvernement aura été ébranlé par ce dernier épisode en date d’une vague de grèves interrégionales qui a balayé la Chine en 2018.

    Précédemment, c’étaient les grutiers et les livreurs d’aliments qui sont simultanément entrés en lutte dans des dizaines de villes. Bien que ces grèves aient été soudaines et de courte durée – inévitablement – elles indiquent clairement une nouvelle tendance à la lutte des travailleurs. Cela reflète des changements importants survenus dans la conscience des travailleurs de même que la sophistication dans l’organisation de manifestations à travers différentes régions sous les yeux attentifs d’un Etat policier.

    L’ordonnance de censure suivante, émise le 11 juin et diffusée sur le site Internet China Digital Times, souligne l’inquiétude du gouvernement face à cette dernière grève “interrégionale” : “Tous les sites Web de toutes les régions doivent immédiatement effacer toutes les nouvelles concernant les conducteurs de camions de marchandises et ne laisser aucune pierre non-retournée. Il faut renforcer la surveillance et se prémunir strictement contre les reportages et les commentaires provocateurs des médias étrangers.”

    Les reportages de certains médias étrangers ont déclaré à tort que certains chauffeurs en grève ont appelé sur des vidéos au renversement de la dictature du Parti “communiste” (?????). En y regardant de plus près, on entend les conducteurs chanter “A bas Huochebang” (?????), le nom d’une application en ligne de type Uber utilisée pour connecter les chauffeurs avec les clients du fret.

    La « gig economy »

    Cette application appartient au groupe Manbang, une société récemment fusionnée qui détient un monopole virtuel dans le secteur du transport par camion. Les conducteurs de camions, dont 90 % sont des indépendants, se plaignent que la nouvelle version de l’application les oblige à se soumettre à une course vers le bas les uns contre les autres. Le paiement du transport diminue alors que les coûts augmentent.

    Il s’agit d’un nouvel exemple de la « gig economy » (expression issue des Etats-Unis pour désigner l’économie des petits boulots, à la manière des musiciens qui courent après les cachets sans emploi fixe, gig signifiant « concert », NDT) que connaissent les économies occidentales et qui prend racine en Chine. Les emplois temporaires et précaires augmentent, les entreprises préférant embaucher de soi-disant indépendants plutôt que des employés à plein temps.

    Les mêmes facteurs expliquent des éruptions similaires de protestations de la part de travailleurs tels que les chauffeurs de taxi et les livreurs d’alimentation. Cela illustre à quel point, dans une économie capitaliste axée sur le profit, les nouvelles technologies augmentent énormément l’exploitation et la pression sur les travailleurs au lieu d’alléger leur charge de travail.

    Alors que la plupart des camionneurs chinois sont nominalement des entrepreneurs « indépendants », ce sont en réalité des esclaves salariés sous un autre nom. Une enquête publiée en avril par la Social Services Academic Press a révélé qu’en 2016, les camionneurs chinois travaillaient plus de 12 heures par jour pour un revenu mensuel moyen d’environ 8.000 yuans (1000 euros). Selon le South China Morning Post, les chauffeurs « sont constamment sur la route, dorment dans leurs camions et ne peuvent pas voir leur famille des mois durant ».

    Cette charge de travail excessive est imposée aux chauffeurs par la nécessité de rembourser les dettes que bon nombre d’entre eux ont contractées pour acheter leurs camions.

  • Relations mondiales : Divisions ouvertes au G7

    L’échec du G7 et les pénalités douanières reflètent le désordre capitaliste mondial.

    Les déclarations de Trump à la suite de sa rencontre de Singapour avec Kim Jong-un ont fortement contrasté avec l’humeur pessimiste de la plupart des autres dirigeants qui l’avaient accompagné au dernier sommet du G7, au Canada.

    Par Robert Bechert, Secrétariat international du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO)

    Ce G7 fut une démonstration de faiblesse de la part de ce club de dirigeants. La réunion n’a pas pu cacher les divisions croissantes entre les vieilles puissances impérialistes, chose inédite depuis le début de ces réunions en 1975. Ce rassemblement de dirigeants capitalistes de premier plan n’avait vraiment rien à dire sur les questions cruciales auxquelles le monde est confronté. Le déclin du G7 a été fortement symbolisé par le retrait de Trump du communiqué final du G7. Cet exemple largement symbolique de la politique “America First” de Trump a été suivi par quelque chose de plus significatif, l’imposition de taxes douanières supplémentaires sur une série d’exportations chinoises vers les États-Unis.

    Ces mesures, ainsi que l’imposition antérieure de taxes supplémentaires sur les importations d’acier et d’aluminium aux États-Unis, ont accru les craintes des opposants de Trump, et de certains secteurs clés du milieu américain des affaires, que ces pénalités douanières puissent déclencher une guerre commerciale ou, à tout le moins, un ralentissement de l’économie mondiale.

    Ces mesures, ainsi que d’autres développements tels que la réaffirmation du rôle du régime russe au Moyen-Orient et ailleurs, ouvrent un nouveau chapitre dans les relations mondiales.

    Les affrontements individuels entre leaders n’étaient pas uniquement le résultat de la brutalité de Trump, de son ego, de ses propres « fake facts » et de ses changements rapides de politique. Plus fondamentalement, ils reflètent les changements qui surviennent dans les relations politiques et économiques mondiales alors que les rivalités et l’instabilité augmentent à un moment où l’économie internationale n’a pas encore échappé aux conséquences de la crise qui a commencé en 2007/8.

    La montée en puissance de la Chine nouvellement capitaliste et l’affaiblissement relatif de l’impérialisme américain constituent des éléments cruciaux. Ce déclin est l’une des raisons pour lesquelles Trump utilise des tarifs douaniers contre la Chine. Historiquement, la première puissance de toute époque a défendu le libre-échange, en raison de sa domination du marché mondial, comme l’a fait la Grande-Bretagne au XIXe siècle. En outre, la domination stratégique internationale dont les Etats-Unis ont bénéficié après l’effondrement de l’ex-Union soviétique est terminée. Mais, en dépit de la montée en puissance de la Chine et de son rôle international croissant, les États-Unis demeurent aujourd’hui encore la première économie mondiale et la puissance militaire mondiale prédominante.

    D’autres ingrédients de ce mélange international volatil sont l’aiguisement des questions environnementales, comme l’approvisionnement en eau, et la façon dont certains pays connaissent une croissance démographique rapide qui modifie également les équilibres de force régionaux, tout en posant fortement la question de ce que l’avenir réserve à des dizaines de millions de jeunes.

    Pour les jeunes en particulier, le futur caractère de l’emploi est posé par les changements structurels profonds qui se produisent à la fois dans les économies nationales et dans l’économie mondiale à mesure que la technologie et la numérisation se développent. Une question clé sera de savoir qui bénéficiera de ces changements, les capitalistes et une petite élite ou au contraire la masse de l’humanité. Actuellement, beaucoup de ces développements sont utilisés pour accroître les profits et aiguiser la concurrence au détriment des travailleurs.

    Dans ce contexte, l’économie mondiale a renoué avec la croissance, mais à un rythme plus lent qu’avant la crise de 2007/8. Cependant, une grande partie de cette croissance repose sur l’utilisation de la dette pour tenter de surmonter les séquelles persistantes de cette crise. Rien qu’en 2017, la dette mondiale totale a augmenté de plus de 20.000 milliards de dollars pour atteindre 237.000 milliards de dollars, soit l’équivalent de 30.000 dollars pour chaque être humain sur la planète, ce qui a suscité des craintes d’une nouvelle crise financière.

    Simultanément, l’Union européenne (UE) est confrontée à ses propres problèmes de tensions entre ses membres, aux effets de Brexit, à la prévention d’une nouvelle crise monétaire de l’euro, à l’impact de l’afflux de migrants et à son propre déclin international relatif. Ce n’est pas un hasard si, au G7, le nouveau gouvernement italien était le seul qui semblait éprouver de la sympathie à l’égard de certaines des positions de Trump.

    Tout cela s’est traduit par une concurrence accrue entre puissances rivales pour maintenir ou accroître leur part d’un marché à croissance lente et à concurrence plus intense. L’”America First” de Trump en est un exemple frappant, mais il exprime plus ouvertement et plus grossièrement ce que tous les capitalistes visent. L’administration de Trump ne s’inquiète pas de l’instabilité que ses actions créent, elle la considère comme une rupture de l’équilibre avec ses rivaux et libère l’impérialisme américain de certaines des contraintes imposées par la collaboration avec d’autres puissances. Mais la classe dirigeante américaine est loin d’être la seule à poursuivre ses propres intérêts, actuellement c’est Trump qui est tout simplement le plus direct à le dire. L’impérialisme allemand est actuellement généralement plus circonspect dans la manière dont il cherche à diriger l’UE, bien qu’il ait été brutal lorsqu’il a réussi à mettre la Grèce au pied du mur en 2015.

    Trump veut également toujours préserver sa base aux Etats-Unis, la plupart de ses tweets lui sont destinée, un régime régulier de vantardises concernant ce qu’il a “fait”, de nationalisme et d’attaques populistes contre ses opposants. Outre la droite, une partie importante de la base de Trump est composée de ceux dont le niveau de vie était déjà en difficulté avant la récession et qui se sentaient les laissés pour compte de ce qu’ils voyaient comme un establishment élitiste. Ainsi, Trump continue de promettre de “rendre l’Amérique à nouveau grande” ainsi que de ramener des emplois de bonne qualité dans le pays et d’attaquer hypocritement les membres de la classe dirigeante américaine qui osent s’opposer à lui.

    Mais, à bien des égards, la situation aux États-Unis n’est pas unique. Partout dans le monde, la colère et l’aliénation minent les institutions et les structures existantes, y compris les parlements et les partis politiques. Dans de nombreux pays, avant même l’éclatement de la crise de 2007/8, des années d’attaques néolibérales et de revers pour les mouvements ouvriers avaient entraîné une polarisation croissante de la richesse et une diminution des conditions de vie tant pour la classe ouvrière que pour des sections de la classe moyenne.

    Depuis lors, la longue crise a davantage creusé le niveau de vie, le travail “atypique” (les contrats à durée déterminée, le travail précaire, le développement de secteurs à bas salaire imposés par les autorités, etc.) s’est étendu et de plus en plus de gens craignaient que leurs enfants et leurs petits-enfants aient un niveau de vie moins élevé et des perspectives de vie moins bonnes. En plus de cette colère, l’idée s’est développée parmi beaucoup de gens qu’ils payent une crise dont ils ne sont pas responsables, en dépit des efforts vains de la classe dirigeante pour leur faire accepter l’inverse. Le fait que de nombreuses banques, dont il est généralement admis qu’elles ont déclenché la crise de 2007/8, ont recommencé à réaliser d’énormes bénéfices ne fera que renforcer cette amertume.

    Autre source d’amertume ; la récente croissance économique limitée n’a pas, dans de nombreux pays, entraîné d’augmentation réelle et soutenue des revenus et des conditions de travail de la classe ouvrière ou de la classe moyenne. Actuellement, l’Allemagne, la plus grande économie européenne, connaît le taux d’emploi le plus élevé de son histoire, mais les syndicats estiment qu’environ 20% des travailleurs se trouvent dans le secteur des bas salaires.

    Cela survient à un moment où, à l’échelle internationale, l’énorme polarisation des richesses s’est poursuivie. Les politiques d’”assouplissement quantitatif” (QE, quantitative easing) menées par de nombreux gouvernements dans le but d’atténuer l’impact de la crise ont dans les faits également servi à enrichir davantage la classe dirigeante. En Grande-Bretagne, la Banque d’Angleterre estime que les 10% des familles les plus riches ont bénéficié en moyenne chacune de 350.000 livres sterling grâce à ces opérations d’assouplissement quantitatif entre 2009 et 2014, soit environ 1.345 livres sterling de revenus supplémentaires chaque semaine, et ces familles ont certainement gagné bien plus depuis lors.

    Après le début de la crise, pays après pays, les protestations se sont multipliées, qu’il s’agisse de luttes industrielles, de manifestations de masse ou de la naissance de nouveaux mouvements politiques. Toutefois, jusqu’à présent, ces développements n’ont pas conduit à des changements décisifs. Cela s’explique en grande partie par le fait que les dirigeants de ces mouvements ne disposent pas d’un programme visant à contester le système capitaliste ou ne sont pas disposés à le faire. Cet échec, qui s’est surtout traduit par la trahison des dirigeants de SYRIZA en Grèce en 2015 lorsqu’ils ont accepté de mettre en œuvre des politiques d’austérité, a souvent ouvert la voie à la croissance des populistes de droite et des partis d’extrême droite. Ces forces ont parfois mentionné de véritables questions et craintes, mais ont donné des réponses erronées, souvent enrobées d’une propagande réactionnaire et nationaliste.

    La victoire de Trump elle-même était en partie enracinée dans la déception éprouvée face aux promesses « d’espoir » d’Obama, qui ne se sont pas concrétisées pour nombre d’Américains, au côté de la campagne pro-entreprise pourrie de Clinton. Alors que Trump représente une partie de la classe dirigeante américaine, sa prise de pouvoir sur le parti républicain américain et son arrivée à la présidence reflète combien les classes dirigeantes nationales ont, du moins pour l’instant, perdu leur emprise sur les événements politiques dans leurs propres États. Même si les politiciens capitalistes et les machines d’Etat n’ont pas dans le passé tout simplement été de simples marionnettes aux mains de la classe dirigeante, ils représentaient généralement leurs intérêts généraux, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui avec les gouvernements actuels aux Etats-Unis, en Grande-Bretagne et maintenant en Italie.

    Mais les événements ne se développent pas en ligne droite. La victoire de Trump elle-même a stimulé l’opposition au sein des États-Unis. Il ne faut pas oublier qu’il a perdu le vote populaire en 2016 et que Trump craint évidemment de futures défaites électorales. Il veut désespérément maintenir sa base ensemble, se présenter comme un “outsider” et est prêt à blâmer les autres pour tous ses échecs. Ses tactiques grossières, souvent basées la logique de « diviser pour mieux régner » tant au niveau national qu’international, peuvent elles-mêmes accroître les turbulence et provoquer des changements rapides.

    Malgré son caractère international, fortement renforcé par la mondialisation, le capitalisme, de par sa nature même, est enraciné dans l’État-nation, ce qui entraîne des rivalités, des affrontements et est à l’origine de conflits et de guerres. Avant la Seconde Guerre mondiale, c’était même le cas entre alliés. Ce n’est qu’en 1939 que l’armée américaine a cessé de mettre à jour son « War Plan Red », un plan consacré à un éventuel conflit militaire avec la Grande-Bretagne. Et même alors, ce plan a été préservé un certain nombre d’années. Il est évident qu’il n’y a aucune perspective de guerre entre les États-Unis et la Grande-Bretagne aujourd’hui, mais l’histoire joue encore un rôle aujourd’hui. Ainsi, dans le cadre de sa propagande, Trump a récemment reproché au Canada d’avoir incendié Washington DC en 1814, alors qu’il s’agissait en fait d’une armée britannique.

    Après 1945, le capitalisme a été contesté durant des décennies par le stalinisme. Le stalinisme ne représentait pas le socialisme, mais un régime totalitaire qui a émergé à partir des développements contre-révolutionnaires survenus en Russie dans les années 1920 et 1930. Cependant, pendant des décennies, ce système ne reposait pas sur une économie capitaliste. Pendant un certain temps, surtout après 1945, les puissances capitalistes ont craint que la transformation de pays comme la Russie et la Chine soit considérée comme des exemples illustrant que des alternatives au capitalisme étaient possibles. L’existence d’Etats non capitalistes, bien que staliniens, a fourni un ciment qui a généralement gardé sous contrôle les rivalités et les conflits entre grandes puissances capitalistes. Mais après l’effondrement du stalinisme en ex-Union soviétique et en Europe, suivi de la transformation de la Chine en une forme particulière de capitalisme d’État, ce ciment s’est dissous. C’est en partie pourquoi Trump et ses partisans estiment que c’est le bon moment pour lancer une contre-offensive contre les capitalistes rivaux qui prospèrent aux dépens des Etats-Unis.

    Mais ce ne sont pas seulement les politiques de Trump qui causent des perturbations. Les tensions s’intensifient à nouveau au sein de l’Union européenne, non seulement sur la question des migrations, mais aussi sur l’avenir de la zone euro, en particulier sur la manière de faire face à une nouvelle crise bancaire, ce qui est largement considéré comme une possibilité. L’UE peut également être confrontée par le fait que l’Italie et d’autres pays de l’UE, se tournent vers Trump afin de bénéficier d’un effet de levier contre l’Allemagne et la France, ce qui conduirait à des affrontements plus profonds.

    Depuis les années 1930, les divisions capitalistes internationales n’ont jamais été aussi ouvertes. Alors que des affrontements militaires directs entre grandes puissances capitalistes sont très peu probables à ce stade, la possibilité de conflits régionaux, de guerres par procuration et, plus tard, peut-être même d’escarmouches entre les forces américaines et chinoises ne peut être exclue.

    Bien sûr, dans ces conflits, l’hypocrisie ne manque pas de part et d’autre. Les médias capitalistes des pays qui ressentent les attaques de Trump ont critiqué son incapacité à mentionner les droits de l’homme avec Kim Jong-un, mais ils omettent souvent de mentionner le silence de leurs propres gouvernements sur les droits de l’homme en Arabie Saoudite et dans les autres dictatures du Golfe.

    La polarisation qui prend place aux États-Unis montre comment les politiques de Trump, l’enrichissement de sa propre famille et son comportement personnel provoquent une opposition. Parallèlement, la combinaison d’une croissance économique limitée et d’une augmentation considérable des bénéfices de nombreuses entreprises aux États-Unis commence à encourager les travailleurs à faire pression pour obtenir leurs revendications. Le nombre total de membres des syndicats américains a augmenté de 262.000 personnes l’an dernier, les trois quarts de ces nouveaux affiliés ayant moins de 34 ans. Cette année a déjà été marquée par une vague de grèves parmi les enseignants, souvent organisées par la base, afin d’exiger plus de moyens pour l’enseignement ainsi que de meilleurs salaires et de meilleures conditions de travail.

    Tant aux États-Unis qu’à l’échelle internationale, on craint que les politiques de Trump, malgré sa rencontre amicale avec Kim Jong-un, ne conduisent à de nouveaux conflits militaires, en particulier au Moyen-Orient. Ceci, au côté de sa politique réactionnaire, constituera un facteur important dans les manifestations de masse qui accueilleront la visite de Trump en Grande-Bretagne en juillet.

    Mais aux États-Unis même, l’intérêt croissant pour le socialisme reflète la recherche d’une issue pour la société. Parmi ceux qui cherchent une alternative se développe la compréhension que les victoires de la droite – d’abord George W. Bush et maintenant Trump – étaient le reflet de la déception populaire à l’égard des présidences de Bill Clinton et d’Obama. La victoire de Trump, comme les succès de la droite dans d’autres pays, est liée au fait que les républicains traditionnels et Hilary Clinton n’étaient pas en mesure de faire face aux populistes et nationalistes de droite, ainsi qu’à l’extrême droite, qui exploitent les craintes et la colère de la population.

    C’est pourquoi il est si nécessaire de construire une alternative socialiste contre les troubles et les dysfonctionnements du capitalisme. Des luttes prendront place sur des questions importantes comme les conditions de vie, l’oppression, l’environnement et les droits démocratiques, ainsi que contre les politiques menées par les politiciens capitalistes. Il est d’une nécessité vitale de discuter du programme et des stratégies nécessaires pour remporter ces batailles mais, pour parvenir à un changement durable, cela doit être lié à la construction ou à la reconstruction d’un mouvement socialiste clairement indépendant du capitalisme et qui lui soit opposé.

    Cela signifie d’avoir la perspective de renverser le capitalisme, de placer les secteurs économiques clés sous propriété publique et de commencer à démocratiquement planifier l’utilisation des talents humains et des ressources à travers le monde dans l’intérêt de l’humanité et non pour satisfaire l’avidité capitaliste. C’est ce que Socialist Alternative défend aux Etats-Unis dans les divers mouvements de lutte qui s’y développent et ce que d’autres activistes du Comité pour une Alternative Ouvrière défendent également dans le monde entier.

  • 1949 – La révolution chinoise

    Dirigeant communiste s’adressant aux survivants de la Longue Marche.

    Le capitalisme et l’impérialisme ont été chassés du pays, mais le pouvoir politique est resté entre les mains d’un parti unique stalinien

    En cette année du 60e anniversaire de la République populaire de Chine (c’est article a initialement été publié en 2009), le régime du Parti communiste chinois est particulièrement nerveux. Il dépend de plus en plus de campagnes de propagande prestigieuses, du style Jeux olympiques, pour s’assurer une certaine base de soutien ; en effet, malgré des décennies de croissance économique record, il est à présent confronté au mécontentement des travailleurs, des paysans et de la jeunesse.

    Ma?o Tsé-Tou?ng (Mao Zedong), l’homme à la tête du Parti communiste chinois au moment de la fondation de la République populaire chinoise il y a 60 ans, a beau être crédité d’être le père fondateur de la nation, le point de vue officiel du régime actuel est que sa politique était une vision d’« ultragauche », qui a dû être « corrigée » par le retour à la loi du marché sous son successeur Te?ng Hsia?o-P’i?ng (Deng Xiaoping) en 1978. Pour en savoir plus sur la véritable histoire révolutionnaire de la Chine, nous devons tout d’abord nous pencher sur ses origines.

    Par Vincent Kolo du groupe « Ouvrier chinois » (section chinoise du CIO), 2009

    Le PCC (Parti communiste chinois) n’est pas arrivé au pouvoir à la tête d’un mouvement des travailleurs. Étant donné son orientation stalinienne et ses méthodes de même type, le PCC était à l’origine en faveur d’un programme limité, l’établissement d’une « nouvelle démocratie », dans le cadre d’une économie capitaliste. Mais, presque malgré lui, le PCC s’est retrouvé hissé à la tête d’une des plus puissantes vagues révolutionnaires de l’histoire mondiale.

    C’est cette véritable fièvre révolutionnaire de masse, dans le cadre du contexte international qui se mettait en place après la Seconde Guerre mondiale, qui a poussé le régime de Mao à introduire les changements qui ont transformé la Chine de fond en comble.

    Cela faisait longtemps que la Chine était connue comme « le grand malade » du continent asiatique ; c’était un pays pauvre, même par rapport au reste de l’Asie à cette époque. Avec son immense population (près de 500 millions d’habitants en 1949), la Chine était le plus grand « État failli » du monde et ce, depuis près de 50 ans.

    De 1911 à 1949, la Chine était un territoire déchiré, partagé entre différents chefs de guerre, avec un gouvernement central corrompu, à la merci des interventions des puissances étrangères. Mais mettre une terme à la domination des comptoirs coloniaux et à l’occupation par des armées impérialistes étrangères n’a été qu’un des gains de la révolution parmi d’autres. Le régime de Mao a également introduit une des réformes foncières les plus importantes de l’histoire mondiale – même si elle n’était pas aussi étendue que la réforme foncière mise en place par la révolution russe, la population rurale concernée était quatre fois plus grande.

    La révolution paysanne

    Cette révolution paysanne a, comme le disait l’historien Maurice Meisner, « annihilé la classe féodale chinoise en tant que classe sociale (en lui ôtant toutes les terres qui constituaient la base de son pouvoir), éliminant ainsi pour de bon une des classes dirigeantes qui avait eu avait eu le règne le plus long de l’histoire mondiale, une classe qui avait pendant très longtemps représenté un obstacle majeur à la modernisation et au retour de la Chine sur la scène mondiale. »

    En 1950, le gouvernement de Mao a également signé une loi sur le mariage qui interdisait les mariages arrangés, le concubinage et la polygamie, tout en facilitant l’obtention de divorces pour les hommes comme pour les femmes. C’était un des bouleversements les plus importants jamais vus dans l’histoire des relations familiales et maritales.

    Lorsque le PCC a pris le pouvoir, 80 % de la population était analphabète. En 1976, à la mort de Mao, l’analphabétisme était tombé à 10 %. En 1949, l’année où Mao a pris le pouvoir, il n’y avait que 83 bibliothèques publiques dans tout le pays, et 80.000 lits d’hôpitaux – une situation d’arriération. En 1975, on y trouvait 1250 bibliothèques et 1.600.000 lits d’hôpitaux.

    L’espérance de vie est passée de 35 ans en 1949 à 65 ans en 1975. Les innovations dans la santé publique et le système d’enseignement, la réforme de l’alphabet (simplification des caractères chinois), le réseau de « docteurs aux pieds nus » mis en place pour couvrir la plupart des villages ont en effet transformé les conditions des populations rurales pauvres. Toutes ces réalisations, à une époque où la Chine était bien plus pauvre qu’aujourd’hui, démontrent la faillite du nouveau système de marché libre et de privatisation qui a amené la crise dans les systèmes de santé et d’enseignement.

    L’abolition du féodalisme était une précondition cruciale pour le lancement de la Chine sur la voie du développement industriel moderne. Le régime de Mao avait tout d’abord espéré pouvoir conclure une alliance avec certaines sections de la classe capitaliste et a laissé des pans entiers de l’économie entre les mains du privé. Mais il s’est rapidement retrouvé contraint d’aller beaucoup plus loin qu’initialement prévu, en expropriant même les « capitalistes patriotes » pour incorporer leurs entreprises dans un plan étatique sur le modèle du système bureaucratique en vigueur en Union soviétique.

    Comparé à un véritable système de démocratie ouvrière, le plan maoïste-stalinien était un outil assez rudimentaire et brutal, mais un outil néanmoins, incomparablement plus vital que le capitalisme chinois corrompu et anémique qui l’avait précédé.

    Au vu du caractère relativement primitif de l’économie chinoise au début de la révolution, le niveau d’industrialisation obtenue tout au long de cette phase d’économie planifiée est absolument époustouflant. De 1952 à 1978, la part de l’industrie dans le produit national brut est passée de 10 % à 35 % (données de l’OCDE). Il s’agit d’un des taux d’industrialisation les plus rapides jamais vus, supérieur au taux d’industrialisation du Royaume-Uni à l’ère de la révolution industrielle de 1801-1841 ou à celui du Japon lors de sa période de transition au capitalisme de 1882 à 1927 (ères Meiji et Taïsh?). Au cours de cette période, la Chine a bâti des industries nucléaires, aéronautiques, maritimes, automobiles et de machinerie. Le PIB mesuré en pouvoir d’achat s’est augmenté de 200 %, tandis que le revenu par habitant augmentait de 80 %.

    Une révolution n’est pas l’autre

    Les deux grandes révolutions du 20e siècle, la révolution russe de 1917 et la révolution chinoise de 1949, ont plus contribué à changer le monde que n’importe quel autre évènement au cours de l’histoire mondiale. L’une comme l’autre ont été la conséquence de l’incapacité du capitalisme et de l’impérialisme à résoudre les problèmes fondamentaux de l’humanité. L’une comme l’autre ont été des mouvements de masse d’une ampleur épique, et non pas de simples coups d’État militaires comme les politiciens bourgeois aiment le raconter. Ayant dit ceci, il faut cependant noter des différences fondamentales et cruciales entre ces deux révolutions.

    Le système social établi par Mao n’était pas le socialisme, mais le stalinisme. C’est l’isolement de la révolution russe à la suite de la défaite des mouvements révolutionnaires en Europe et ailleurs au cours des années 1920 et 1930 qui a fait arriver au pouvoir une bureaucratie conservatrice en Russie sous Staline, qui tirait son pouvoir et ses privilèges de l’économie étatique.

    Tous les éléments de démocratie ouvrière – la gestion et le contrôle de l’économie et de la politique par des représentants élus et dépourvus de privilèges – avaient été anéantis.

    Cependant, comme l’a expliqué Léon Trotsky, une économie planifiée a tout autant besoin de démocratie pour vivre que le corps humain a besoin d’oxygène. Sans cela, sous un régime de dictature bureaucratique, le potentiel de l’économie planifiée peut être dilapidé et au final, comme cela a été démontré il y a maintenant un peu plus de vingt ans, l’ensemble de l’édifice se voit menacé de destruction.

    Mais c’est le modèle stalinien qui a été adopté par le PCC lorsqu’il a pris le pouvoir en 1949. Car même si l’URSS stalinienne était loin d’être un véritable système socialiste, l’existence d’un système économique alternatif au capitalisme et les gains visibles que cela représentait pour la grande masse de la population exerçaient un puissant pouvoir d’attraction et de radicalisation dans la politique mondiale.

    La Chine et la Russie, en raison de leurs économies étatiques, ont joué un rôle important dans la politique mondiale en contraignant le capitalisme et l’impérialisme à faire toute une série de concessions, notamment en Europe et en Asie.

    La révolution chinoise a accru la pression sur les impérialistes européens qui ont fini par évacuer leurs colonies dans l’hémisphère sud. Elle a aussi contraint l’impérialisme états-unien, craignant de voir ces pays suivre l’exemple chinois, à financer la reconstruction et l’industrialisation rapides du Japon, de Taïwan, de Hong Kong et de la Corée du Sud afin de pouvoir utiliser ces États en tant que satellites et zones-tampons pour contrer l’influence de la révolution chinoise.

    Si tant la révolution chinoise que la révolution russe étaient dirigées par des partis communistes de masse, il existait des différences fondamentales entre ces deux partis tant en terme de programme que de méthode et avant tout en terme de base sociale. La révolution russe de 1917, dirigée par le parti bolchévique, avait un caractère avant tout ouvrier, un facteur d’une importance cruciale. C’est ce facteur qui a doté la révolution russe d’une indépendance politique et d’une audace historique qui a permis à tout un pays de s’engager sur une route qui n’avait jamais été ouverte auparavant. Les dirigeants de cette révolution, notamment Lénine et Trotsky, étaient des internationalistes qui considéraient leur révolution comme le début de la révolution socialiste mondiale.

    Au contraire, les dirigeants du PCC étaient en réalité des nationalistes avec seulement un fin vernis d’internationalisme. Cela correspondait à la base paysanne de la révolution chinoise. Lénine a toujours dit que la paysannerie est la moins internationaliste de toutes les classes sociales. Ses conditions de vie, son isolement et sa dispersion, lui donnent une mentalité de village qui lui rend bien souvent difficile même le développement d’une perspective nationale.

    Plutôt qu’un mouvement ouvrier de masse basé sur des conseils avec des dirigeants élus par la base (ces conseils, appelés en russe « soviets », étant le véritable moteur de la révolution russe) dirigé par un parti prolétarien marxiste démocratique (le parti bolchévique), en Chine, le pouvoir a été pris par une armée, l’Armée de libération du peuple chinois (ALP). La classe ouvrière n’a pas joué le moindre rôle dans la révolution chinoise – au contraire, elle a même reçu des ordres pendant la révolution de ne pas faire grève ni manifester mais d’attendre l’arrivée de l’ALP dans les villes.

    La paysannerie est capable d’un grand héroïsme révolutionnaire, comme toute l’histoire de lutte de l’Armée rouge en Russie ou de l’Armée de libération du peuple en Chine l’a montré, que ce soit dans la lutte contre le Japon ou contre le régime dictatorial de Tchang Kaï-chek (Jiang Jieshi). Cependant, elle est incapable de jouer le moindre rôle politique indépendant. Tout comme les villages suivent toujours la ville, la paysannerie, sur le plan politique, est condamnée à toujours suivre l’une ou l’autre des classes urbaines : soit la classe prolétaire, soit la classe capitaliste.

    En Chine, au lieu de voir les villes se tourner vers la campagne, le PCC est arrivé au pouvoir en construisant une base de masse parmi la paysannerie avant d’occuper les villes qui étaient essentiellement passives, fatiguées par des années de guerre. La base sociale de la révolution a eu pour résultat qu’elle a pu copier un modèle social existant (celui de l’URSS), mais pas en créer un nouveau.

    La théorie de la « révolution par étapes »

    L’orientation du PCC envers la paysannerie a été élaborée à la suite de la terrible défaite de la révolution chinoise de 1925-1927, une défaite causée par la théorie de la « révolution par étapes » promue par l’Internationale communiste sous la direction de Staline. Selon cette théorie, la Chine n’était encore qu’à l’étape « nationaliste-bourgeoise » de la révolution (avec un territoire national sous la coupe de différents chefs de guerre), et donc les communistes devaient soutenir et servir le Parti nationaliste (le Kouoo-mi?n tang / Guomin dang) bourgeois de Tchang Kaï-chek. L’impressionnante base jeune et ouvrière du PCC a été brutalement massacrée lors de la prise du pouvoir par le Parti nationaliste.

    Mais si une importante minorité trotskiste s’est formée peu après cette défaite, tirant à juste titre la conclusion que la révolution chinoise devait être guidée par la classe ouvrière et non pas par les bourgeois, la majorité des dirigeants du PCC s’en sont tenus à la conception stalinienne de la « révolution par étapes », même si, ironiquement, ils ont eux-mêmes fini par comprendre qu’il fallait abandonner cette idée après leur prise du pouvoir en 1949.

    Par conséquent, à la fin des années 1920, le principal groupe de cadres du PCC (pour la plupart issus de la petite-bourgeoisie intellectuelle), conservant ces idées erronées et pseudo-marxistes, est passé à la conception d’une lutte armée à partir du village. Tch’e?n Tou?-hsie?ou (Chen Duxiu), le fondateur du PCC, qui deviendra plus tard trotskiste et sera chassé du parti pour cette raison, avait averti du fait que le PCC risquait de dégénérer au rang de la « conscience paysanne », un jugement qu’on peut qualifier de prophétique. Alors que le parti comptait 58 % d’ouvriers en 1927, il n’en comptait plus que 2 % en 1930.

    Cette composition de classe est restée pratiquement inchangée jusqu’à la prise de pouvoir en 1949, étant donné que la direction ne se focalisait plus que sur la paysannerie et rejetait les villes en tant que centres de la lutte.

    On assistait en même temps à une bureaucratisation croissante du parti, au remplacement du débat et de la démocratie internes par un régime de décrets et de purges, avec le culte de la personnalité autour de Mao – toutes ces méthodes étant copiées de celles de Staline.

    Un environnement paysan, une lutte principalement militaire, sont beaucoup plus enclins à donner naissance à une bureaucratie qu’un parti immergé dans les luttes du prolétariat. Par conséquent, alors que la révolution russe a dégénéré en raison d’un contexte historique défavorable, la révolution chinoise était bureaucratiquement déformée dès le début. C’est ce qui explique la nature contradictoire du maoïsme, d’importants gans sociaux accompagnés d’une féroce répression et d’un régime dictatorial.

    La guerre d’occupation

    Lorsque la guerre d’occupation japonaise a pris fin en 1945, l’impérialisme états-unien a été incapable d’imposer de façon directe sa propre solution pour la Chine. L’opinion publique avait en effet un fort désir de voir les soldats rentrer au pays. Les États-Unis n’ont donc pas eu d’autre option que de soutenir le régime corrompu et incroyablement incompétent de Tchang Kaï-chek en lui envoyant des quantités massives d’armement et de soutien financier.

    Les États-Unis n’avaient cependant que peu de confiance dans le régime du Parti nationaliste chinois, comme l’exprimait le président Truman quelques années plus tard : « Ce sont des voleurs, il n’y en a pas un pour racheter l’autre. Sur les milliards que nous avons envoyé à Tchang, ils en ont volé 750 millions ».

    Pour les masses, le régime « nationaliste » a été une véritable catastrophe. Ce fait est en grande partie oublié aujourd’hui, sans quoi nous n’assisterions pas au phénomène grotesque du regain de popularité de ce parti aujourd’hui en Chine parmi la jeunesse et les classes moyennes.

    Au cours des dernières années du règne du Parti nationaliste, plusieurs villes étaient réputées être remplies de « personnes en train de mourir de faim dans les rues et abandonnées là ». Les usines et les ateliers fermaient en raison du manque de matières premières ou parce que leurs travailleurs étaient trop faibles pour pouvoir accomplir leur travail, tant ils avaient faim. Les exécutions sommaires par les agents du gouvernement, le crime omniprésent sous la tutelle des gangs mafieux, tout cela était la norme dans les grandes villes.

    En plus de la redistribution des terres qu’il opérait dans les zones qu’il avait libérées, la plus grande force du Parti communiste était la haine de la population pour le Parti nationaliste. C’est également ce facteur qui a favorisé des désertions massives des soldats de Tchang Kaï-chek qui passaient à l’Armée de libération du peuple. À partir de l’automne 1948, à quelques exceptions près, les armées de Mao avançaient la plupart du temps sans aucune opposition sérieuse.

    Dans une ville après l’autre, partout dans le pays, les forces du Parti nationaliste se rendaient, désertaient, ou se mutinaient pour rejoindre l’ALP. Dans les faits, le régime de Tchang qui pourrissait de l’intérieur présentait au Parti communiste des circonstances extrêmement favorables. Les autres mouvements de guérilla maoïste qui ont tenté de reproduire chez eux la victoire de Mao (en Malaisie, aux Philippines, au Pérou, au Népal) n’ont pas eu autant de chance que lui.

    Les grèves des travailleurs

    Avec une véritable stratégie marxiste, le Parti nationaliste aurait certainement pu être dégagé beaucoup plus rapidement et à bien moindres frais.

    Dès septembre 1945, à la suite de la débandade militaire du Japon, jusqu’à la fin 1946, les travailleurs de toutes les grandes villes ont organisé une vague de grèves splendide, avec 200.000 grévistes rien qu’à Shanghaï. Les étudiants marchaient en masse dans les rues, dans le cadre d’un mouvement de masse qui reflétait la radicalisation des couches moyennes de la société.

    Les étudiants exigeaient la démocratie et rejetaient la mobilisation militaire du Parti nationaliste dans le cadre de la guerre civile contre le Parti communiste. Les travailleurs exigeaient des droits syndicaux et des hausses de salaire après des années de blocage salarial.

    Au lieu de donner une direction à ce mouvement prolétarien, le PCC a cherché à le freiner, appelant les masses à ne pas recourir à des « extrémités » dans le cadre de leur lutte. À ce moment-là, Mao était toujours convaincu de la nécessité d’un « front uni » avec la bourgeoisie nationale, qu’il ne fallait pas effrayer en soutenant les mouvements des travailleurs.

    Les étudiants ont été utilisés par le PCC en tant qu’objet de marchandage afin de faire pression sur Tchang Kaï-chek, pour le convaincre de se rendre à la table des négociations. Le PCC a tout fait pour maintenir séparées les luttes des étudiants et les luttes des travailleurs.

    Les lois inévitables de la lutte de classe sont ainsi faites qu’en s’efforçant de limiter ce mouvement, le PCC a automatiquement entrainé sa défaite et sa démoralisation. De nombreux militants étudiants et travailleurs se sont retrouvés pris par la vague de répression qui a ensuite été lancée par le régime nationaliste. Bon nombre ont été exécutés.

    Une occasion en or a été ratée, ce qui a permis à la dictature du Kouo-min tang de prolonger sa vie d’autant d’années, tout en rendant les masses urbaines passives, simples spectatrices de la guerre civile qui se jouait dans le pays.

    Après la révolution

    Toujours aussi fidèle à la théorie stalinienne de la « révolution par étapes », Mao écrivait ceci en 1940 : « La révolution chinoise à son étape actuelle n’est pas encore une révolution socialiste pour le renversement du capitalisme mais une révolution démocratique bourgeoise, dont la tâche centrale est de combattre l’impérialisme étranger et le féodalisme national » (Mao Zedong, De la Nouvelle Démocratie, janvier 1940).

    Afin d’accomplir ce bloc avec les capitalistes « progressistes » ou « patriotes », Mao a tout d’abord limité sa redistribution des terres (en automne 1950, elle ne concernait encore qu’un tiers du pays). De même, alors que les entreprises appartenant aux « capitalistes bureaucratiques » (les cadres du Parti nationaliste) avaient été nationalisées directement, les capitalistes privés ont conservé le contrôle de leurs entreprises, lesquelles, en 1953, comptaient toujours pour 37 % du PIB.

    La situation a beaucoup changé avec le début de la guerre de Corée qui a éclaté en juin 1950. Cette guerre, qui s’est soldée par la division de la Corée entre une Corée du Nord, « communiste » (stalinienne) et une Corée du Sud capitaliste (sous protectorat états-unien), a fortement intensifié la pression des États-Unis, avec toute une série de sanctions économiques et même la menace d’un bombardement nucléaire sur la Chine.

    Cette guerre, et la brusque intensification de la situation mondiale qui l’a accompagnée (c’était le début de la « guerre froide » entre l’Union soviétique et les États-Unis) a eu pour conséquence que le régime de Mao, pour pouvoir rester au pouvoir, n’a pas eu d’autre choix que d’accomplir la transformation complète de la société, accélérant le repartage des terres et étendant son contrôle sur l’ensemble de l’économie.

    La révolution chinoise a donc été une révolution paradoxale, en partie inachevée, qui a permis d’obtenir d’énormes avancées sociales mais tout en créant une dictature bureaucratique monstrueuse dont le pouvoir et les privilèges ont de plus en plus sapé le potentiel de l’économie planifiée.

    Au moment de la mort de Mao, le régime était profondément divisé et en crise, craignant que de nouveaux troubles de masse ne lui fassent perdre le pouvoir.

    Un mécontentement grandissant face aux successeurs de Mao

    Lorsque les dirigeants actuels de la Chine contemplent la gigantesque parade militaire du 1er octobre, sans doute pensent-ils en même temps aux problèmes croissants auxquels ils sont confrontés au fur et à mesure que la crise du capitalisme mondial s’approfondit. Les centres d’analyses du gouvernement ont déclaré que le pays a perdu 41 millions d’emplois en 2008 en raison de la baisse des exportations (-23 % cette année). En même temps, le nombre de grève se serait accru de 30 %.

    Le gouvernement est agité. Ça se voit par sa décision de limiter à 200.000 le nombre de participants à la grande parade de la Fête nationale à Pékin – il y a 20 ans encore, on s’accommodait sans difficultés d’un million de participants. Le régime a également prohibé les cérémonies et parades dans les autres villes. Pour quelle raison ? Parce qu’il est terrifié que ces évènements pourraient être exploités pour en faire des marches contre son gouvernement. Partout dans le pays, le régime fait face à une opposition massive de la part de la population, pas seulement dans les régions d’ethnies non chinoises (comme l’Ouïghouristan à majorité turco-musulmane dans l’ouest, où d’ailleurs les Ouïghours n’étaient pas les seuls à marcher contre le régime, les Chinois aussi y étaient).

    Les étudiants de deux universités de Pékin se sont mis en grève contre leur programme d’entraînement trop rigoureux qui leur est imposé avant la cérémonie du 1er octobre, certains allant même jusqu’à brûler leurs uniformes de cérémonie. Sur de nombreux réseaux, on voit les gens commenter « C’est votre anniversaire, maintenant moi j’ai quoi à voir dans ça ? ». Beaucoup de jeunes sont devenus de fervents anticommunistes, qui soutiennent le capitalisme mondial en pensant à tort qu’il s’agirait d’une alternative au régime actuel. D’autres préfèrent se tourner vers l’héritage de Mao, qui a été selon eux complètement trahi par ses héritiers politiques. Au vu de toutes les turbulences sociales et politiques dans le pays, les marxistes tentent, via leur site et leurs publications, de gagner l’adhésion de ces jeunes au socialisme démocratique mondial en tant que seule alternative viable.

  • Chine. La répression brutale frappe une nouvelle victime, un militant tibétain

    Une vidéo de neuf minutes réalisée par le New York Times et diffusée en 2015 pourrait coûter quinze ans de prison au militant tibétain Tashi Wangchuk qui tenait à avertir du recul de sa culture et de sa langue face au mandarin. Il n’est que la dernière victime d’une répression sans précédent au cours de laquelle des centaines de dissidents et de défenseurs des droits humains ont été arrêtés, enlevés, “disparus’’, torturés, contraints de comparaître dans des “aveux” télévisés et, dans de nombreux cas, condamnés à de sévères peines de prison destinées à dissuader d’autres personnes de contester la politique de Pékin.

    Via chinaworker.info

    Tashi, 32 ans, un commerçant de la préfecture tibétaine de Yushu, dans la province de Qinghai, a été arrêté deux mois après avoir témoigné à visage découvert dans un documentaire vidéo du Times. Il a été maintenu deux ans en détention secrète, puis jugé le 4 janvier de cette année pour “incitation au séparatisme”. La vidéo (voir lien ci-dessous) a été visionnée lors d’un procès de quatre heures à peine et, selon l’avocat de Tashi Wangchuk, il s’agissait de la principale ‘‘preuve’’ contre lui. Le tribunal doit encore prononcer sa sentence, mais on craint qu’il ne soit condamné à quinze ans de prison.

    Les tribunaux chinois sont étroitement contrôlés par le régime et ont un taux de condamnation qui avoisine les 99 % et même les 100 % dans le cas de procès politiques comme celui-ci. Des observateurs internationaux ont condamné la détention et le procès de Tashi Wangchuk, qu’Amnesty International qualifie de ” bidon” en se basant sur des “accusations fallacieuses et flagrantes”.

    L’affaire met également en lumière l’aggravation de l’oppression des minorités ethniques en Chine. Les Tibétains, les musulmans ouïgours et d’autres minorités, y compris les Kazakhs qui vivent pour la plupart également dans le Xinjiang et qui sont de plus en plus durement réprimés, sont confrontés aux discriminations, à la négation de leurs droits, à la répression et aux difficultés économiques les plus diverses. Cette situation déplorable s’étend également jusqu’à Hong Kong, région ‘‘privilégiée’’ et théoriquement ‘‘autonome’’.

    Depuis que des manifestations de masse ont éclaté au Tibet en 2008, la répression atteint des niveaux inédit au nom de la lutte contre le ‘‘séparatisme’’ et le ‘‘terrorisme’’. Dans sa courte interview vidéo, Tashi Wangchuk décrit le quotidien des Tibétains ordinaires comme étant ‘‘fait de pressions et de peur’’. Certains faits illustrent l’angoisse du peuple tibétain face aux politiques ultra-répressives de la Chine:

    – Il y a eu 140 immolations de contestataires depuis 2009, des manifestations désespérées contre la répression
    – Il existe plus de 1.800 prisonniers politiques tibétains, beaucoup d’entre eux sont en prison pour avoir tout simplement écrit ou parlé.

    >> Accéder à la vidéo du New York Times – “A Tibetan’s Journey for Justice”.

    Une approche non-révolutionnaire

    Tashi n’est manifestement pas un révolutionnaire ni un défenseur de l’indépendance tibétaine. Le journaliste du New York Times Johan M. Kessel, qui a réalisé ce film, affirme que Tashi lui a spécifiquement précisé durant leur rencontre qu’il ne soutenait pas l’indépendance. Comme beaucoup d’autres personnes ciblées par la répression de ces dernières années, il a simplement réclamé que le système connaisse des réformes au lieu de préconiser un changement politique plus radical voire même la chute de la dictature.

    Tashi Wangchuk a simplement plaidé – de façon pacifique – en faveur des droits garantis par la Constitution, comme l’a rappelé Sophie Richardson, directrice de Human Rights Watch China. ‘‘Si les autorités chinoises considèrent cela comme une incitation au séparatisme, il est difficile de dire ce qui ne l’est pas.’’

    Tashi s’est rendu à Pékin pour appeler à la restauration du bilinguisme dans l’enseignement pour que le tibétain soit enseigné à côté du mandarin. La langue tibétaine a subi le sort des autres langues minoritaires et a dans les faits été éliminée à tous les niveaux de l’enseignement primaire. Le tibétain, le mongol et la langue ouïgoure turque, par exemple, peuvent encore être étudiés mais sur la même base que l’anglais ou le français, c’est-à-dire en tant que langues “étrangères”.

    Ce n’était pas le cas dans le passé. Même au cours des années Mao – communément appelées “l’époque sombre” de la répression – la politique linguistique n’était pas aussi rigide et lourde. Il est évident que les politiques actuelles du régime chinois n’ont strictement rien à voir avec un véritable marxisme ou avec le socialisme. Prenons par exemple l’approche extrêmement sensible et démocratique de Lénine, dirigeant de la Révolution russe, sur la question linguistique. Comme il l’a écrit avant la révolution: ” (…) les marxistes russes disent qu’il ne doit pas y avoir de langue officielle obligatoire, que la population doit avoir accès à des écoles où l’enseignement sera dispensé dans toutes les langues locales, qu’une loi fondamentale doit être introduite dans la Constitution déclarant invalides tous les privilèges d’une nation et toutes les violations des droits des minorités nationales.” [V.I. Lénine, une langue officielle obligatoire est-elle nécessaire? Janvier 1914]

    L’affirmation du régime chinois actuel selon laquelle une seule langue officielle, le mandarin, est nécessaire pour faciliter le développement économique et l’intégration est une approche fausse et aveugle. Elle est le reflet d’une mentalité policière grossière qui considère que la coercition est la meilleure réponse pour tous les problèmes. De nombreuses sociétés économiquement développées disposent de systèmes éducatifs où s’épanouissent plusieurs langues, de la Suisse à Singapour. Mais les politiques linguistiques de Pékin ont été adaptées à son programme nationaliste.

    Fragmentation de la Chine

    Au cours de la dernière décennie, alors que les craintes de Pékin d’agitation massive et de fracturation de la Chine ont augmenté, des mesures répressives de grande envergure ont été mises en œuvre, en particulier dans les régions tibétaines et dans le Xinjiang à majorité musulmane. Des dizaines de milliers de policiers auxiliaires ont été recrutés, des établissements religieux ont été militarisés et un ‘‘État profond’’ sans précédent a été mis en place grâce aux dernières technologies de surveillance de masse. Ces méthodes sont testées dans les régions minoritaires pour être ensuite utilisées à l’avenir contre la majorité des Han chinois – contre des travailleurs en grève ou des manifestants contre la pollution.

    Les politiques linguistiques actuelles du régime sont contraires à la Constitution chinoise, qui garantit la liberté des minorités ethniques d’utiliser leur propre langue parlée et écrite. Ces clauses, comme beaucoup d’autres dans la Constitution (qui “garantissent aussi” les droits démocratiques et la liberté d’expression) sont dénuées de sens. C’est ce qui se trouve au cœur du prétendu “crime” de Tashi Wangchuk qui, comme le montre le documentaire du Times, s’est rendu à Pékin pour demander aux autorités de faire respecter les droits culturels constitutionnels du peuple tibétain.

    Son procès pour “incitation au séparatisme” envoie donc un message sans équivoque, mais peut-être pas celui que le régime chinois entend faire passer. Ce dernier veut démontrer sa force et sa détermination pour écraser l’opposition. Mais un autre message est également envoyé, que cela soit désiré ou non. Ce message, c’est qu’il est impossible de poursuivre la “réforme” au sein du système autoritaire chinois. Si vous réclamez des réformes, même très limitées, surtout si vous le faites publiquement ou si vous embarrassez la dictature en proposant une modification de sa propre constitution, vous serez puni avec la même malice que si vous défendiez une révolution. De cette façon, la dictature ne laisse qu’un seul chemin ouvert à ceux qui veulent et ont besoin de changement : le chemin de la révolution.

    Plutôt que de créer une “stabilité”, la répression sans précédent qui est à l’oeuvre dans les régions des minorités ethniques chinoises suscite un mélange explosif de désillusion, de peur et de colère. Tout cela fait du régime chinois le plus puissant promoteur des revendications d’indépendance nationale, comme il l’est devenu à Hong Kong. Avec de telles politiques, le pouvoir de la Chine n’est pas renforcé, mais plutôt affaibli à plus long terme. La vaine mission de Tashi Wangchuk à Pékin et la réaction du régime ont fait de lui un héros de la jeunesse tibétaine. Mais la jeune génération partagera-t-elle sa conviction qu’il est possible de faire entendre raison à Pékin ?

    Ce n’est qu’en construisant des organisations indépendantes de la classe ouvrière qui unissent les opprimés de toutes les ethnies dans une lutte commune qu’il est possible de vaincre la répression et le pouvoir arbitraire d’un régime dictatorial. Cela fait partie d’une lutte mondiale contre les inégalités grotesques, l’oppression nationale, la destruction de l’environnement, la guerre et l’occupation étrangère. Ces horreurs découlent de la nature du capitalisme mondial qui est un pilier majeur du régime prétendument ‘‘communiste’’ chinois.

  • Hong Kong : Seule la lutte de masse peut vaincre la répression

    Pas une semaine ne passe sans que la dictature chinoise n’intensifie sa pression sur Hong Kong

    Pékin entend accroître son contrôle politique et réprimer la culture de manifestations de masse en faveur de la démocratie à Hong Kong. Plus récemment, il a encore forcé le ton en appelant à l’application de l’article 23, une loi de sécurité nationale qui permettrait de criminaliser l’opposition au régime du Parti communiste (PCC).

    Article issu du site de la campagne “Stop repression in Hong Kong and China” – Signez la pétition !

    L’indépendance

    Ce 12 octobre, des actions de protestations ont eu lieu dans 23 villes à travers le monde afin de dénoncer la répression politique croissante à l’oeuvre à Hong Kong. Cette campagne est l’oeuvre de Global Solidarity – Stop Repression in Hong Kong & China, dans laquelle des membres du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO, dont le PSL est la section belge) jouent un rôle clé. A Bruxelles, une délégation de membres du PSL s’est rendue au Hong Kong Economic and Trade Office (qui est directement géré par le Gouvernement de la Région administrative spéciale de Hong Kong de la République populaire de Chine).

    Le sentiment croissant pour l’indépendance parmi la jeunesse de Hong Kong a ébranlé le régime. La répression crée inévitablement un contrecoup, mais la dictature n’apprend pas et croit que la force et l’intimidation sont des solutions pour ses problèmes.

    Le soutien pour l’indépendance de Hong Kong n’a gagné un soutien massif qu’au cours de ces trois dernières années, en conséquence directe de la poigne qu’exerce Pékin, de l’énorme frustration qui a suivi l’échec des manifestations de 2014 (la « révolution des parapluies », en raison des parapluies utilisés pour se protéger des gaz lacrymogènes, un mouvement de masse qui a duré plusieurs semaine à l’automne 2014) et de l’autoritarisme de l’ancien chef de l’exécutif de Hong Kong Leung Chun-ying. Ce n’est pas pour rien que Leung est devenu connu sous le sobriquet de «père de l’indépendance de Hong Kong».

    On dit que la définition de la folie est de faire la même chose encore et encore en attendant un résultat différent. La réponse de la dictature est de réprimer encore plus fortement. Ses hommes de main à Hong Kong, comme Leung et son successeur Carrie Lam, ont éjecté les élus indépendantistes du Legco (le Conseil législatif de Hong Kong) et ont persécuté de nombreux militants, certains ayant été contraints à l’exil. Une attaque plus large a ensuite été lancée contre le mouvement démocratique.

    Les localistes (favorables à l’autonomie de Hong Kong) n’ayant aucune idée de la manière de mobiliser et d’organiser une lutte politique sérieuse et étant handicapés par une idéologie de droite raciste, ils se sont révélés constituer une cible très facile à réprimer pour Pékin. L’effondrement organisationnel du localisme n’a toutefois pas été synonyme de fin des idées indépendantistes. Au contraire, le sentiment anti-Chine se renforce, tout particulièrement parmi la jeunesse. Qui cela surprendra-t-il ?

    La loi sur le respect de l’hymne national

    La riposte du gouvernement a été d’accroitre la répression et d’accentuer les menaces. Le 1er octobre, le pseudo-parlement chinois, l’Assemblée nationale populaire, a adopté une nouvelle loi sur l’hymne national imposant des peines sévères pour tout ‘‘acte d’outrage’’ pouvant aller jusqu’à trois ans de prison. La loi sera copiée dans les statuts de Hong Kong dès que l’ANP pourra modifier sa Loi fondamentale (qui sert de constitution à Hong Kong).

    L’establishment de droite pro-Pékin – des politiciens qui ont ouvertement appelé à ce que les défenseurs de l’indépendance soient «tués comme des cochons et des chiens» – veut que la loi soit appliquée rétroactivement. Cela frapperait de vieilles «infractions», puisque la plupart des cas de supporters de football hongkongais huant l’hymne chinois lors de matches ont été filmés. Cela permettrait à la police et aux procureurs d’engager des poursuites en vertu de la nouvelle loi. Davantage de policiers et d’agents de police infiltrés sont envoyés aux matches de l’équipe de Hong Kong pour y enregistrer les actes « criminels ».

    Il s’agit d’un gaspillage monstrueux de l’argent public et de ressources policières. Au même moment, le crime réel du vol de milliards et de la manipulation de contrats des autorités dans le but d’enrichir une élite corrompue aux frais du public reste impuni.

    Un terrain d’essai

    Le contrôle de Xi Jinping sur le régime chinois étant maintenant apparemment cimenté, Pékin a l’humeur triomphante jusqu’à l’excès. L’économie, nous dit-on, s’est «stabilisée» et l’influence politique mondiale de la Chine s’étend. Hong Kong est donc devenu un terrain d’essai pour le régime de Xi, qui représente l’élite milliardaire chinoise, pour démontrer l’étendue de son pouvoir.

    L’actuel série de mesures antidémocratiques vise à briser le mouvement démocratique à Hong Kong en attaquant ses sections les plus radicales et orientées vers la lutte comme Long Hair (de son vrai nom Leung Kwok-Hung) et la Ligue des Sociaux-Démocrates (LSD) tout en faisant pression sur les démocrates modérés pour qu’ils se prosternent, acceptent que la démocratie totale n’est «pas négociable» et se distancient davantage des manifestations de masse.

    Les dirigeants pro-démocratie ont joué un rôle de frein majeur sur la lutte pour la démocratie en insistant aveuglément sur l’obtention d’un compromis avec un régime intransigeant. Ils redoutent la lutte de masse et participent aux manifestations démocratiques pour freiner le mouvement et empêcher les «radicaux» de prendre l’avantage.

    Mais même ceux qui veulent en finir avec la lutte et accepter les conditions de Pékin comprennent bien que cela leur ferait perdre tout soutien parmi les masses. Ces pressions peuvent prendre de l’ampleur au cours de la prochaine période avec le regain de vigueur du régime pour l’article 23.

    L’article 23

    Toute une série de personnages officiels chinois et de politiciens pro-Pékin ont appelé le gouvernement de Carrie Lam à relancer l’article 23, spectaculairement vaincu en 2003 en raison d’une opposition publique massive. Rao Geping (considéré en Chine comme un expert de Hong Kong, membre du Comité chinois de la Loi fondamentale) a récemment déclaré que le recours à cette législation était « affaire d’urgence ».

    Les commentaires publics de Carrie Lam montrent qu’elle est moins enthousiaste. Elle insiste sur le fait qu’elle se chargera du retour de l’article 23 lorsqu’il y aura une «atmosphère sociale convenable». Elle est bien consciente de l’histoire de Hong Kong et du mouvement explosif de 2003, même si Pékin dédaigne de tels «détails». Ce mouvement a mis fin à la carrière de son prédécesseur Tung Chee-hwa.
    En commentant les hésitations de Lam, le chroniqueur du South China Morning Post, Alex Lo, a déclaré que l’article 23 pourrait déclencher « une conflagration politique qui ferait ressembler les manifestations [de 2014] Occupy à un jeu d’enfant ».

    Pékin pousse à l’adoption de plus de mesures répressives à Hong Kong. Les dirigeants officiels du mouvement pour la démocratie se voient contraints de s’y opposer verbalement, sans offrir aucune piste, aucune stratégie et aucun programme pour riposter et vaincre ces attaques sans précédent contre les droits démocratiques.

    Le 20 août dernier, alors que 140.000 personnes manifestaient pour protester contre l’emprisonnement de 16 jeunes militants, les démocrates modérés ont été contraints de se joindre à la marche – mais ils ne l’avaient pas appelée. Cette marche gigantesque a été initiée par quatre groupes plus petits et plus radicaux, parmi lesquels le LSD et des activistes de la circonscription des Nouveaux territoires du Nord-Est. Cet exemple illustre la manière dont un mouvement de masse peut rapidement se doter de nouvelles organisations et d’une nouvelle direction dans le feu de l’action. Le plus important est de disposer d’une idée claire de ce qu’il convient de faire.

    Les choses n’étaient pas différentes en 2014, lorsque les occupations de masse du mouvement des parapluies ont éclaté d’en bas, initiées par des jeunes et des étudiants ignorant les «leaders» tels que ceux de la campagne Occupy Central, qui désiraient limiter la lutte. Occupy Central a été créé par des modérés et des intellectuels libéraux proches des leaders pan-démocratiques pour leur donner le contrôle du mouvement et couper la voie aux alternatives plus radicales. Les dirigeants d’Occupy Central ont refusé de soutenir les grèves et les manifestations des étudiants qui ont pourtant déclenché le mouvement des parapluies.

    Pour que le mouvement démocratique se réorganise et résiste efficacement aux attaques de Pékin, il doit tenir compte de ces leçons. La combativité ne manque pas parmi les Hongkongais. Mais une direction combattive est nécessaire pour offrir une stratégie claire au lieu de démobiliser et de continuellement refroidir les espoirs.

    Les dirigeants pan-démocratiques, avec leur attachement au capitalisme, un système qui a besoin de la dictature chinoise et qui bloque toute tentative de déstabilisation de son pouvoir, rejettent une telle approche combative. Ils optent toujours pour le «compromis» par opposition à la lutte.

    Un nouveau mouvement démocratiquement contrôlé par la base est nécessaire, en reposant sur la classe ouvrière et en faisant appel aux masses en Chine – dont le mécontentement grandit – pour faire cause commune contre la dictature.

    Un parti de masse des travailleurs qui attirerait à lui les couches les plus combatives du mouvement pour la démocratie pourrait relier ce combat à celui visant à en finir aux salaires de misère, à accorder à chacun un logement décent et à augmenter les investissements publics dans les soins de santé et l’éducation.

    C’est la même élite anti-démocratique – les magnats capitalistes et les fonctionnaires du PCC – qui bloque toute solution face à ces  problèmes. L’instauration de politiques socialistes, liées à la démocratie immédiate et complète, sont le seul moyen de gagner.

  • [HISTOIRE] Le massacre de Shanghai par Tchang Kaï-Chek

    Le massacre de Shangai en 1927

    Le 12 avril 1927, un coup d’État militaire sanglant orchestré par Tchang Kaï-Chek a changé le cours de la Révolution chinoise. Un dossier de Vincent Kolo, de chinaworker.info

    Il y a 90 ans, la classe ouvrière chinoise et son jeune parti communiste (PCC) ont subi une terrible défaite dans leur bastion de Shanghai, ce qui fut un tournant décisif dans la Révolution chinoise. Cet important anniversaire a largement été passé sous silence en Chine. Le PCC maoïste / stalinien arrivé au pouvoir en 1949, basé sur une armée paysanne rurale plutôt que sur le pouvoir organisé de la classe ouvrière urbaine, n’a jamais été en mesure d’expliquer ce qui s’est passé en 1927 et encore moins les dirigeants «communistes» actuels.

    Au milieu des années 1920, un flux révolutionnaire a permis une croissance explosive du PCC qui était alors un parti de classe avec une base ouvrière. À cette époque, il aurait été possible – si un programme et une direction correcte avaient existé – que la classe ouvrière chinoise prenne le pouvoir suivant la voie de la Révolution socialiste russe en 1917.

    Dans les grandes villes de Shanghai et de Guangzhou (Canton), les travailleurs avaient effectivement pris le pouvoir. Ils ont toutefois ensuite été vaincus et écrasés en raison des tactiques désastreuses imposées par Staline et la nouvelle élite bureaucratique qui consolidait alors son règne sur l’Union soviétique.

    Afin de rester au pouvoir en Russie, la bureaucratie stalinienne a utilisé l’énorme autorité de la Révolution russe pour propager une politique et des méthodes étrangères à cette révolution.

    Si la révolution chinoise avait triomphé, elle aurait changé le monde. Cela aurait revigoré la classe ouvrière internationale après une période de revers et injecté une nouvelle vie dans la Révolution russe qui célébrait son dixième anniversaire, ce qui aurait donné aux travailleurs la confiance nécessaire pour repousser la contre-révolution stalinienne.

    Chasse aux sorcières anti-communistes

    Le 12 avril 1927, la répression sanglante à Shanghai a commencé avant le lever du soleil, signalée par une explosion de clairons du quartier général militaire de Tchang Kaï-Chek, chef du parti nationaliste bourgeois le ‘Kuomintang’.

    Les gangs armés de la «triade», qui avaient revêtis des salopettes ouvrières avec des brassards blancs ornés du personnage Kung («travailleur»), se sont répandus dans les entreprises contrôlées par les capitalistes étrangers et ont commencé à y chasser syndicalistes et communistes. Des soldats se sont ensuite déplacés pour désarmer les milices ouvrières de la garde rouge de la ville, une force de plus de 5.000 soldats. Les forces militaires étrangères, en particulier françaises, ont également joué un rôle clé dans la répression avec 40 navires de guerre étrangers occupant des positions dans le fleuve Yang Tsé (fleuve qui traverse Shanghai).

    Les travailleurs ont été abattus et décapités dans les rues à une telle échelle que l’un des généraux de Tchang reçut le surnom de “The Hewer of Communist Heads” (« Le décapiteur de communistes ») par le magazine Times. Des communistes arrêtés ont été vus jetés vivants dans les fours des locomotives. La confusion et le désordre extrême régnaient parmi les travailleurs alors que leurs dirigeants leur avaient assuré une alliance nécessaire avec les soldats du Kuomintang – formés et armés par l’Union soviétique.

    Dans « The Tragedy of the Chinese Revolution » (« La tragédie de la révolution chinoise »), un compte rendu magistral de cette période par le trotskyste américain Harold Isaacs, celui-ci affirme que le 12 avril «ne fut une surprise pour quiconque, sauf pour les travailleurs eux-mêmes».
    Après le coup d’État de Tchang Kaï-Chek, les arrestations et les exécutions de membres et de sympathisants du PCC s’étendirent dans toutes les zones sous son contrôle. Environ 300.000 personnes ont été tuées au cours de l’année suivante.

    Les syndicats et les grèves furent interdits. Tchang établit la dictature du parti unique, reposant sur le capitalisme chinois et fortement dépendant des puissances impérialistes, de l’Allemagne et plus tard de l’Amérique. Son régime était vicieux opposé à la gauche et a continué le combat même après que ses forces aient perdu le pouvoir face aux armées rouges de Mao Zedong dans les années 1940 et lors de sa fuite à Taïwan.

    La décimation du PCC après la défaite de 1927 (dont les membres sont passés de 58.000 à environ 10.000) a envoyé la plupart des dirigeants survivants loin des villes et vers une orientation rurale «paysanne», plus tard défendue par Mao. Cela a joué un rôle dans le fait que la classe sociale la plus nombreuse de Chine, la paysannerie, est devenue le principal objectif de la lutte révolutionnaire, la classe ouvrière des villes étant reléguée à un rôle auxiliaire de soutien passif. Cette approche déséquilibrée et erronée était liée à la dégénérescence du parti selon les lignes staliniennes, avec une direction bureaucratique du haut vers le bas et une perspective de plus en plus nationaliste.

    La révolution permanente

    La Chine a émergé de sa révolution de 1911 comme étant un «État en faillite». L’ancien système dynastique s’était effondré, mais les années suivantes ont montré l’incapacité de la bourgeoisie à mener une lutte révolutionnaire contre le féodalisme, les seigneurs de guerre et la domination étrangère.

    À l’instar de leurs homologues russes, les capitalistes chinois sont arrivés tardivement et dépendaient fortement à la fois des intérêts impérialistes étrangers, mais aussi de la classe des propriétaires fonciers en Chine.

    Sous la direction de Lénine et Trotsky, la Révolution russe a triomphé comme étant une révolution ouvrière qui a réussi à attirer à ses côtés la paysannerie et ainsi à abolir le capitalisme et la propriété privée des terres. Ils avaient compris que les capitalistes russes étaient liés aux intérêts impérialistes et étaient incapables de diriger une révolution capitaliste nationale contre le système semi-féodal existant ; et que cette révolution devait donc être dirigée par la classe ouvrière contre les capitalistes.

    Ce processus a été plus clairement élaboré par Trotsky dans sa brillante théorie de la révolution permanente. Il a expliqué que les travailleurs, une fois au pouvoir, ne s’arrêteraient pas aux tâches purement capitalistes de la révolution (redistribuer la terre et établir une république démocratique), mais continueraient à mettre en œuvre les mesures socialistes comme la propriété publique sous contrôle de l’État et le contrôle démocratique des travailleurs sur l’économie, élargissant leur révolution à l’échelle internationale.

    Ce sont les mencheviks russes (sociaux-démocrates de droite) qui, avec une véhémence tout opposée aux bolcheviks, ont insisté pour que la révolution marche derrière une direction capitaliste, les partis ouvriers se limitant à un rôle de soutien jusqu’à ce que le capitalisme soit consolidé – un processus qu’ils estimaient devoir durer plusieurs décennies.

    Sous le stalinisme, cette ‘théorie des étapes’ menchevik est devenue une caractéristique des partis communistes officiels avec des résultats désastreux en Espagne, au Vietnam, en Indonésie, au Chili et dans de nombreux autres pays. La révolution chinoise fut la première où ces idées erronées sont devenues une politique officielle du parti communiste, freinant la lutte de la classe ouvrière dans l’intérêt d’une «alliance» avec le Kuomintang capitaliste.

    La faiblesse du capitalisme chinois

    Sun Yat-sen, le «Père de la Chine moderne» et chef du Kuomintang jusqu’à sa mort en 1925, a personnifié la faiblesse politique de la classe capitaliste chinoise. Sun avait une foi incroyable dans les puissances impérialistes et les manœuvres en coulisses. Il était hostile à la lutte des classes et la considérait comme ‘clivante’. Les perspectives de Sun étaient semblables aux réformateurs bourgeois et aux «démocrates» en Chine, à Hong Kong et à Taiwan aujourd’hui.

    La Révolution russe de 1917 a porté le marxisme jusqu’en Chine. Avant cela, de nombreux intellectuels attribuaient le retard de la Chine à l’absence d’un «gouvernement fort» plutôt que de le considérer comme un produit du capitalisme et de l’impérialisme. Les intellectuels chinois ont ensuite commencé à regarder vers les idées de Lénine, Trotsky et du premier gouvernement ouvrier au monde. Ces intellectuels ont joué le rôle de fermant révolutionnaire en aidant les idées marxistes à croître parmi la jeune classe ouvrière. Le PCC, fondé en 1921, a progressé pour devenir en quelques années une force de masse.

    La capacité de combat de la classe ouvrière chinoise a commencé à se manifester à travers plusieurs luttes importantes au début des années 1920, tel que la lutte épique des marins de Hong Kong de 1922 qui a secoué toute la Chine. Ces mouvements ont commencé à intéresser le dirigeant du Kuomintang. Sun Yat-sen, dont les efforts pour courtiser l’impérialisme n’avaient conduit nulle part. Il a alors dû se tourner vers l’Union soviétique pour obtenir une aide militaire, mais aussi pour avoir un levier permettant d’influencer le mouvement ouvrier. Cela a abouti sur un accord par lequel le Kuomintang recevait de l’équipement et une formation militaire importante et à travers lequel il était reconnu par le gouvernement de Staline comme «la force dirigeante» dans la révolution chinoise.

    Staline voyait l’alliance avec le Kuomintang comme le plaçant au cœur de la politique chinoise – un régime amical qui offrirait une frontière orientale sûre. La contre-révolution stalinienne en Union soviétique, à travers laquelle le contrôle démocratique par la classe ouvrière sur le gouvernement et l’économie avait été démantelé, signifiait que l’internationalisme prolétarien de 1917 cédait de plus en plus la place à des politiques répondant aux prérogatives nationales de la nouvelle élite bureaucratique.

    Le PCC a été invité à fondre ses forces dans le Kuomintang, décrit de façon invraisemblable par le leadership du Komintern (International Communiste) comme une «alliance de l’intérieur». Sun Yat-sen ne voulait pas que le PCC rejoigne le Kuomintang en tant que parti, mais uniquement en tant que membres individuels, ce que le Komintern / Staline a accepté. En conséquence, le PCC était politiquement subordonné au programme du Kuomintang et à son leadership bureaucratique. Il y avait des doutes parmi beaucoup de communistes chinois, mais le prestige du Komintern était tel que cette politique fut acceptée.

    Trotsky s’est opposé à la politique d’entrée dans le Kuomintang, en prévenant que cela supprimerait l’indépendance politique aux communistes. Il n’était pas opposé à un bloc plus limité autour d’actions spécifiques, par exemple contre les impérialistes qui occupaient des villes chinoises clés, mais la ligne de Staline était équivalente à la construction d’un parti commun au sein duquel des représentants politiques de la bourgeoisie noieraient la voix spécifique des communistes. Comme le prévoyait Trotsky, cette politique s’est révélée catastrophique, entraînant un changement complet de l’orientation du PCC sur les questions de perspectives, de programmes et de tactiques pour la révolution à venir.

    Le flux révolutionnaire

    Lorsque les troupes britanniques tuèrent onze travailleurs lors d’une manifestation à Shanghai en mai 1925, cela déclencha une grève générale et une recrudescence révolutionnaire dans les principales villes chinoises. Des millions de paysans sont également entrés dans des associations paysannes qui, dans de nombreux villages, ont commencé à fonctionner comme des soviets embryonnaires avec des milices armées. Les adhésions au PCC ont augmenté passant de 1 000 à 20 000 en 1925, puis elles ont plus que doublé l’année suivante. Les nouvelles organisations syndicales ont attiré des millions de membres.

    La classe capitaliste et les propriétaires fonciers ruraux dont les fils étaient bien représentés dans le corps d’officiers des armées du Kuomintang ont eu peur des demandes de plus en plus radicales de la classe ouvrière (pour une réduction du temps de travail et contre le régime dictatorial en place dans de nombreuses usines) et de la paysannerie (pour une réforme agraire et contre les oppressantes taxes de la classe des propriétaires fonciers). Ces contradictions ont conduit à de premiers affrontements entre les dirigeants du Kuomintang et les communistes à Guangzhou, où le Kuomintang avait mis en place un «gouvernement national» en juillet 1925. Mais avant cela, la classe ouvrière de Guangzhou déjà réussi à établir un soviet de facto, les ouvriers révolutionnaires élus dans ledit ‘Conseil’ géraient le «deuxième gouvernement» de la ville.

    En mars 1926, Tchang a organisé un coup d’État à Guangzhou, affirmant avoir découvert un complot communiste pour le kidnapper. Son coup n’a réussi que grâce à la confusion au sein de la direction du PCC en raison de ses mauvaises perspectives et de son orientation contradictoire. Les gardes rouges des travailleurs (à ne pas confondre avec les groupes d’étudiants pendant la Révolution culturelle de Mao) ont été désarmées et les premiers communistes ont été arrêtés, y compris les conseillers russes du Kuomintang. Cela s’est produit malgré la présence de milliers de troupes fidèles au PCC, sans parler de centaines de milliers de travailleurs organisés, et des milliers d’armes.

    Tchang est parvenu à établir une dictature militaire à Guangzhou, ordonnant la dissolution des organisations de travailleurs. Et le Komintern n’a pas levé le doigt en signe de protestation ! Staline a réitéré sa position selon laquelle l’alliance avec le Kuomintang dût être préservée à tout prix. Au lieu d’organiser les travailleurs pour résister au coup d’État, le PCC a été invité à faire de nouvelles concessions, en ce compris bannir les membres du PCC qui occupaient les meilleurs postes au Kuomintang et dans l’armée et accepter que toutes les communications entre le PCC et Moscou passent par le siège du Kuomintang.

    De manière criminelle, toutes les informations concernant le coup d’État de Guangzhou ont été supprimées au sein du mouvement communiste à l’échelle internationale, car cela ternirait la direction stalinienne et la métrait dans l’embarras. Les rapports de la presse occidentale sur le coup d’État ont été taxés de “fabrications impérialistes” conçues pour semer des divisions entre le PCC et le Kuomintang.

    L’avertissement de Guangzhou

    Quelques jours après le coup d’État de Guangzhou, le Comité exécutif du Komintern a voté l’admission du Kuomintang comme section sympathisante, avec un vote contre : celui de Trotsky. “En se préparant au rôle de bourreau”, a déclaré Trotsky, Tchang Kaï-Chek “voulait avoir la couverture du communisme mondial, et il l’a obtenu”.

    L’analyse de Trotsky et sa lutte contre la désastreuse politique de la Chine de Staline étaient inconnues en Chine et dans le mouvement communiste plus large en raison de la censure imposée par la machine stalinienne au nom de la «discipline du parti».

    Néanmoins, l’opposition à la ligne de Staline a commencé à se cristalliser au sein du PCC. En juin 1926, le fondateur et président du parti, Chen Duxiu, a remporté une majorité pour sa proposition visant à remplacer l’emprisonnement du PCC au sein du Kuomintang par un bloc de deux partis distincts. Cela a été transmis à Moscou où la proposition a été rejetée.

    En février 1927, les travailleurs de Shanghai se sont exprimés contre le chef de guerre de la ville Sun Chuanfan et, pendant des semaines de combats de rue, ont défait ses forces, appelant à une grève générale et prenant le contrôle des principales artères de la ville ou encore du chemin de fer et des imprimeries. Cette victoire a été réalisée bien avant que les armées de l’expédition du nord de Tchang Kaï-Chek aient atteint la ville. Les organisations ouvrières contrôlaient la ville, mais ce n’était toutefois pas un mouvement suffisamment conscient.

    Il fallait annoncer la formation d’un gouvernement ouvrier et paysan pour la nationalisation immédiate des grandes entreprises, une réforme agraire, la cessation des entreprises étrangères, les droits démocratiques et la formation de soviets à travers la Chine. Un appel spécial aurait dû s’adresser aux soldats du rang dans l’armée dirigée par le Kuomintang pour la construction de soviets de soldats alliés aux travailleurs et aux paysans. Tragiquement, aucun appel de ce type n’a été émis parce que le PCC était piégé dans le concept d’un mouvement de «toutes les classes» sous la direction de la «bourgeoisie révolutionnaire».

    Dans la lutte des classes, plutôt que de séparer les événements ou les étapes historiques (comme le fait l’Histoire bourgeoise), le marxisme analyse la révolution et la contre-révolution comme les côtés opposés d’un même processus révolutionnaire en formation.

    La classe ouvrière a besoin d’un parti avec un programme et une direction clairs qui lui permette d’aller vers le socialisme. La tragédie de la Révolution chinoise fut que les travailleurs étaient privés d’une telle direction révolutionnaire. Le jeune Parti communiste était une force héroïque, mais ce n’était pas encore un parti bolchevik, et son potentiel de développement a été saboté par les politiques qui lui ont été imposées par le régime de Staline.

    Les événements de Guangzhou ont été une répétition générale pour l’affrontement beaucoup plus sanglant à Shanghai un an plus tard. Malheureusement, un seul côté était préparé pour cela: la contre-révolution capitaliste. La masse des travailleurs et des paysans et même de leur couche avancée n’avait pas été assimilée les leçons les plus importantes de Guangzhou – le danger de la contre-révolution et le programme et les méthodes nécessaires pour le combattre. Jusqu’au moment où il a donné son coup fatal, Tchang Kaï-Chek a encore été présenté dans la propagande officielle communiste en tant qu’allié et «leader de la révolution».

    Pour plus d’informations sur la Révolution chinoise de 1925-27, nous vous recommandons:

    • Harold Isaacs, La tragédie de la révolution chinoise (1938)
    • Léon Trotsky, Problèmes de la Révolution chinoise (1927-1931)
  • Hong Kong. Les bureaux de Socialist Action cambriolés

    Une motivation politique n’est pas à exclure

    Ce mardi 6 décembre, les bureaux de Socialist Action et de l’organisation du CIO en Chine, chinaworker.info, situés à Mong Kok (Hong Kong) ont été victimes d’une effraction.

    Par des correspondants de Socialist Action, section du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) à Honk Kong.

    Les ordinateurs ont été volés de même que de l’argent, pour une valeur de plus de 50.000 HK $ (soit environ 6.000 euros). Les voleurs sont entrés en brisant une porte, un crime extrêmement rare dans ce quartier où vivent en majorité des familles très pauvres dans de petites unités subdivisées. Le crime a eu lieu en pleine journée alors que les locaux, qui servent également de logement, étaient exceptionnellement vides. Les voleurs ont également renversés diverses caisses et piles de documents avant d’inonder le sol.

    “Nous pensons qu’il ne s’agit pas seulement d’un vol criminel, mais peut-être bien de quelque chose de plus sinistre encore”, a déclaré Sally Tang Mei-ching, présidente de Socialist Action à Hong Kong. “Nous ne pouvons pas exclure que ce soit une attaque politique – l’activité clandestine des forces de sécurité chinoises a augmenté cette année à Hong Kong. Nous avons perdu plusieurs dossiers dont d’importantes archives politiques de nos articles et publications. Ceux-ci ont été endommagés lorsque les cambrioleurs ont ouvert tous les robinets afin de délibérément provoquer l’inondation des lieux avant de partir.”

    Sally Tang Mei-ching, présidente de Socialist Action à Hong Kong

    “Il semble très probable qu’il s’agisse d’une attaque motivée par des mobiles politiques, peut-être perpétrée par les forces de sécurité de Chine continentale ou commanditées par elles. Pourquoi les voleurs ont-ils emporté tous les ordinateurs qui sont ensemble assez lourds à transporter alors qu’ils ne valent pas beaucoup s’ils sont revendus? Un ordinateur était vraiment daté, mais il a tout de même été dérobé. Il ne pouvait avoir de valeur que si l’on voulait vérifier les informations qu’il stockait. L’acte d’inondation est également très suspect – il ne semble pas être le fait de criminels ordinaires seulement motivés par l’argent. Il semble que les cambrioleurs aient voulu nous faire autant de dégâts que possible », explique Sally Tang Mei-ching.

    L’endroit est utilisé par les camarades de Socialist Action, mais aussi à l’occasion par des dissidents de Chine continentale. Il est également utilisé comme salle de réunion et centre de ressources pour des activistes réfugiés. Le CIO est une organisation juridique à Hong Kong (Socialist Action) mais elle est interdite en Chine continentale puisqu’elle appelle au renversement de la dictature. Ses membres sont donc victimes de persécutions et d’arrestations. La répression a nettement augmenté en 2016.

    Mong Kok est un quartier populaire de Hong Kong et le bâtiment est très vieux. Les voisins affirment qu’il n’y a pas eu de cambriolage dans cette maison depuis vingt ans.

    «Les compagnies d’assurance ont refusé de nous assurer parce que le bâtiment est très vieux, les biens et l’argent volés n’étaient donc pas assurés», explique Sally Tang Mei-ching. «Certains ordinateurs appartenaient aux bénévoles qui contribuent à la production de notre magazine et de notre site Web.»
    Un appel financier a été lancé par crowd-funding intitulé «Defend Hong Kong and China Socialists». Il nous faut réunir au moins 6,500 dollars américains (environ 6.100 euros) pour récupérer les pertes liées à cette effraction. Le remplacement des ordinateurs et des équipements électroniques représente à lui seul au moins 3.900 dollars. D’autres mesures sont nécessaires telles qu’installer des portes et des serrures plus puissantes ainsi que mettre à niveau les caméras de sécurité. Les dégâts causés par les inondations s’élèvent également à plusieurs milliers de dollars.

    «Nous voulons que nos bureaux soient à nouveau fonctionnels le plus rapidement possible», explique Sally. «C’est très important pour la lutte contre le gouvernement non démocratique de Hong Kong, qui est entré dans une phase critique avec l’instauration d’une large purge visant à disqualifier des législateurs élus, parmi lesquels l’élu de gauche ‘Long Hair’ Leung Kwok-hung. Nous devons également réagir face aux nouvelles mesures répressives du régime chinois. Nous ne voulons pas perdre de temps, mais malheureusement, nous ne pouvons actuellement même pas payer notre loyer.

    Nous lançons donc un appel aux donations de la part de socialistes, de militants de la démocratie et de sympathisants à Hong Kong, en Chine et à l’étranger. Envoyez votre don à travers notre page ‘Defend Hong Kong and China Socialists’.

    Socialist Action

    Socialist Action a été fondée à Hong Kong en 2010. L’organisation lutte pour la démocratie immédiate et complète à Hong Kong et en Chine ainsi que pour une alternative socialiste contre le règne antidémocratique des magnats capitalistes. Socialist Action est une force active dans la lutte contre le racisme et le sexisme, pour les droits des travailleurs et des personnes âgées ainsi que contre le traitement inhumain des réfugiés par le gouvernement de Hong Kong.

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