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Tag: Belgique
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La Vivaldi titube vers 2024… et au-delà ?
Le mouvement ouvrier ne peut se résigner à attendre les élections
Le Premier ministre De Croo n’a pas pu profiter de beaucoup de vacances cet hiver en raison des négociations avec Engie. L’entreprise se frotte les mains : elle touchera le maximum pour l’élimination des déchets nucléaires en échange de la promesse de prolonger deux réacteurs, ce pour quoi elle recevra également des subsides. Engie vient de se garantir des milliards de bénéfices. À peine cet accord était-il conclu que de nouveaux dossiers pénibles s’entassaient déjà : pensions, pouvoir d’achat, réforme fiscale et, en mars, conclave budgétaire.
Par Geert Cool
Les partis traditionnels dégringolent
Le Premier ministre tente de se prétendre efficace, son gouvernement n’est pourtant pas un modèle de stabilité. De Croo a même dû intervenir dans son propre parti, l’Open VLD, et a envoyé balader la secrétaire d’État au budget Eva De Bleeker après qu’elle ait inscrit la réduction de la TVA sur l’énergie comme un élément permanent du budget, ce qui a entraîné un déficit plus important que prévu. Pour la remplacer, il a débauché à l’Open VLD Alexia Bertrand, jusque-là cheffe de groupe MR au Parlement bruxellois et administratrice du puissant holding Ackermans & van Haaren (AvH, une des entreprises du Bel20). Il espère un sursaut électoral grâce à un « effet De Croo », mais les sondages n’en montrent aucun signe. A l’image du CD&V, les libéraux flamands se trouvent sous le seuil des 10%.
Le tassement des partis traditionnels du centre est un phénomène international. Du côté francophone, il ne reste plus grand-chose de la démocratie chrétienne. L’exemple de la social-démocratie en France montre que les choses peuvent aller vite. Encore tout puissant il y a dix ans, le PS a dû l’an dernier conclure un accord avec la France Insoumise afin de survivre quelque peu au parlement. Le phénomène s’explique par les politiques menées : quel que soit le parti au pouvoir, la politique est invariablement antisociale.
Renouveler le personnel politique en allant à la pêche dans la société civile (comme la journaliste Hadja Lahbib directement passée de la RTBF à la tête du ministère des Affaires étrangères) et autres campagnes de marketing (changer son nom et son logo pour devenir Les Engagés (sic) ou Vooruit) ne permet plus de restaurer un soutien électoral. Les politiciens du centre se tournent vers la coopération interpersonnelle. « Des individus agissant de manière interpersonnelle, ou inversement des personnes travaillant ensemble pour garantir la liberté individuelle : c’est le cœur de ce que j’appelle l’intervidualisme », a écrit Gwendolyn Rutten (Open VLD) dans une carte blanche explicitement adressée au CD&V et à Vooruit. Son collègue Bart Tommelein s’était auparavant explicitement prononcé en faveur d’un parti unique de centre. Jean-Luc Crucke (ex-MR) rêve d’une démarche similaire avec Les Engagés et Défi. La longévité de toute solution organisationnelle à un problème politique est toutefois bien incertaine.
La Vivaldi survivra-t-elle à 2024 ?
Pour l’instant, le gouvernement tente d’apaiser la contestation sociale. Il entend utiliser des primes ponctuelles dans les entreprises qui réalisent des bénéfices «élevés» pour mettre fin à la lutte contre la norme et la loi sur les salaires. Une lutte autour des pensions a été évitée par le PS avec les propositions de sa ministre, Karine Lalieux, qui s’en prend encore une fois aux pensions, mais de manière moins agressive qu’auparavant. La Commission européenne impose cependant de remettre la question sur table si la Belgique veut recevoir près de 850 millions d’euros de fonds européens pour son plan de relance, au moment même où la France est secouée par une puissante vague de mobilisations en défense des retraites.
Le PS se prétend du côté des travailleuses et travailleurs en mettant aux enchères les attaques les plus aiguës contre nos conditions de vie. Mais la marge se réduit pour continuer selon ce principe. Parallèlement, le PS continue à alimenter son discrédit avec de nouveaux scandales au Parlement wallon et au Parlement européen.
Les marges manquent pour parvenir à des accords. La Banque Nationale prévoit un taux de croissance faible de 0,6 % en 2023. La récession (prévue par d’autres organismes financiers) est évitée selon elle grâce à la consommation privée qui, avec l’indexation des salaires et allocations, se maintient mieux que dans les pays voisins. Le relèvement des taux d’intérêt directeurs des banques centrales, afin de freiner l’inflation, gonfle à nouveau le poids du remboursement de la dette publique. Le conclave budgétaire de mars ne sera pas évident.
La formule Vivaldi est fatiguée. Un maintien au-delà de 2024 semble pourtant probable, du moins s’ils conservent leur majorité. Non pas par enthousiasme, mais parce que les partis de la Vivaldi sont condamnés l’un à l’autre. Quelle autre option ont-ils ? Un gouvernement avec la N-VA qui provoque le mouvement ouvrier pourrait exploser au visage de tous ceux qui y participent. Le bilan du gouvernement flamand ne fait que le confirmer. De plus, la N-VA impose déjà des exigences communautaires comme condition à une participation gouvernementale. Personne n’en veut.
Les gains prévisibles de l’extrême droite en Flandre et du PTB en Wallonie, à Bruxelles, mais aussi en Flandre ne faciliteront pas la tâche des partis traditionnels en 2024. Ils feront tout leur possible pour mettre le VB et le PTB dans le même sac et parler du « succès des extrêmes ». Le PTB réagit en adoptant une position « remarquablement modérée », remarque De Standaard. Pour l’establishment capitaliste, relayer la colère est toujours « extrême ». Pour limiter l’espace de l’extrême droite, la gauche doit transformer ce mécontentement en un combat conséquent pour transformer toute la société.
La passivité n’est pas une option
Pour De Croo, le plus grand défi de la dernière année complète de son gouvernement est la compétitivité des entreprises belges. Fin décembre, la Banque Nationale a annoncé que la marge bénéficiaire brute des sociétés non financières avait chuté de 45,1% à 44,9% au troisième trimestre. C’est encore bien au-dessus de celles des pays voisins. Inverser ce léger déclin sera toutefois la priorité absolue et acharnée de De Croo.
C’est du même type de détermination que le mouvement ouvrier a besoin avec un relais politique qui se bat pour défendre ses intérêts et s’engager en faveur de véritables augmentations de salaires, d’investissements publics massifs dans les soins de santé et l’enseignement, de la nationalisation du secteur de l’énergie et d’autres secteurs clés, de la construction de logements sociaux, de l’élimination des listes d’attente…
Impossible de le faire en attendant les élections et en stopper la lutte sociale par crainte que la chute du gouvernement ne conduise à un gouvernement encore pire. Imposer nos préoccupations au centre du débat public, cela ne se fait que par la lutte. En organisant notre colère et en construisant un rapport de forces. En démontrant dans la pratique que seul le mouvement ouvrier offre une alternative à la misère sociale des politiciens capitalistes. C’est par l’unité dans la lutte que nous pouvons repousser la division et la haine réactionnaires. Une approche socialiste de la lutte sociale et du changement de société est sérieusement nécessaire aujourd’hui.
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Belgique – Le gouvernement thatchérien peut être battu !
En décembre 2018, le PSL a organisé des congrès régionaux ou des assemblées générales afin de discuter du fonctionnement local du parti et d’établir les lignes directrices de notre travail politique pour la période à venir. Cela s’est bien entendu effectué sur base d’une discussion politique concernant la période dans laquelle nous nous trouvons. Une contribution du Bureau exécutif du PSL sur la situation internationale et belge a été utilisée à cette fin. Nous avons publié la partie internationale de ce texte hier, voici la seconde partie consacrée à la Belgique. Ce texte a été écrit à la fin du mois d’octobre.
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Les partis du gouvernement continuent leurs attaques – Vertenueil répond
Cet été, le gouvernement fédéral de droite a illustré qu’il n’allait pas arrêter ses réformes en attendant les élections. Son accord d’été comporte notamment une attaque contre les chômeurs avec 26 mesures pour les activer mais, en particulier, une dégressivité accrue après six mois d’allocation plus élevée. Les fonctionnaires ne pourront dorénavant plus transférer leurs 21 jours de maladie annuels payés à 100% du salaire (les salaires retombent ensuite à 60%) d’une année à l’autre. C’est pire que dans le privé où, pendant 30 jours, le salaire est payé à 100% pour retomber ensuite à 60%. Dans le privé, les jours de maladie ne sont pas transférables, sauf contre-indication de la Convention collective de travail (CCT) du secteur. Selon Jambon (N-VA), trop de fonctionnaires épargnent leurs jours de maladie pour partir en pension jusqu’à deux ans à l’avance. Mais, selon Medex, qui effectue les contrôles pour le SPF santé, il n’y aurait que 0,6% d’absences pour maladie où le doute serait permis.
La condition de carrières pour la prépension ou la RCC (Régime de chômage avec complément d’entreprise) passe de 40 à 41 ans de carrière et, à partir de 2019, la RCC en cas de restructuration ne sera plus possible qu’à partir de 59 ans et 60 ans en 2020. Le récent accord conclu à Mestdagh, qui prévoit la RCC à partir de 56 ans, ne sera plus possible d’ici quelques mois. Le gouvernement veut aussi, en concertation avec les partenaires sociaux, revoir la formation des salaires, quitter progressivement le principe d’ancienneté pour un salaire reposant sur la prestation et la productivité. Il faut encore voir comment cela sera mis en pratique, mais cela pourrait signifier que les salaires collectifs fixes devront probablement graduellement faire place à des salaires à négocier individuellement.
Celui qui estimerait que le pire serait derrière nous a reçu un avertissement de la part de la N-VA par la voix de son dirigeant de fraction à la Chambre, Peter De Roover, qui a fait savoir que ‘‘ces gouvernements [du fédéral et de la région flamande, NDA] appliquent trop peu le programme de la N-VA.’’ Personne ne doute que cette critique a été mise en scène par le parti lui-même. Le dirigeant de la fraction au parlement flamand, Matthias Diependaele a d’ailleurs ajouté : ‘‘si la base se fait entendre, c’est qu’en effet la politique pourrait bien être plus à droite. Je le reconnais. Moi-même je déplore que nous n’ayons pas été capables de limiter dans le temps les allocations de chômage’’.
Mais la limitation du chômage dans le temps n’est pas ce dont il s’agit ici en premier lieu. Ce que la N-VA déplore surtout, c’est qu’elle n’a pas été en mesure de casser la force fondamentale des syndicats, c’est-à-dire que le gouvernement s’est révélé insuffisamment thatchérien. C’est pourquoi elle s’est fixée comme objectif, à côté de la limitation dans le temps des allocations de chômage, d’également transformer les négociations salariales collectives en négociations individuelles, de limiter le droit de grève, d’inspecter le contenu des caisses de grève, d’instaurer une personnalité juridique pour les syndicats, de retirer le paiement des allocations de chômage des syndicats et des allocations de maladie des mutualités. Cela ne signifie rien d’autre que de paralyser les mutualités et les syndicats. Nous savons tout de suite quel est l’enjeu des élections de mai 2019.
Directement cet été, les syndicats avaient annoncé qu’ils ne laisseraient pas passer l’accord d’été du gouvernement sans riposter. Mais, à l’exception d’une action du syndicat socialiste de la fonction publique aux écluses, il apparaissait qu’une fois l’été passé, les syndicats s’étaient endormis. Au sujet des ‘‘grandes’’ actions syndicales du 2 octobre contre l’accord d’été, les rumeurs parlaient d’un quizz à Gand pour la Flandre orientale et, pour la province d’Anvers, d’une manifestation à Turnhout.
Cela a changé lors de l’annonce effectuée par le président de la FGTB Vertenueil de faire du 2 octobre une journée de grève générale. Les discussions n’ont pas manqué au sujet de cette annonce. Certains prétendaient que Vertenueil, en tant que nouveau président de la FGTB, voulait montrer sa radicalité, d’autres que ses paroles n’étaient que du théâtre. Il se pourrait bien qu’il s’agit ici d’un exemple de stratégie de communication mais, au-delà de cela, nous préférons qu’un nouveau président de la FGTB montre ses dents tout de suite à beaucoup d’autres qui veulent surtout amadouer le gouvernement et le patronat en voulant démontrer qu’il est possible de discuter avec eux. Cela peut bien être accompagné d’un peu de théâtre si cela sert à l’action et non pas à la passivité.
S’il y a une critique à faire sur l’annonce de Vertenueil, c’est qu’il aurait mieux valu préparer celle-ci par des assemblées du personnel et des concentration militantes avant de partir devant la presse. Mais il se pourrait bien que Vertenueil savait que plusieurs centrales de la FGTB feraient tout pour boycotter d’office toute action sérieuse et que la CSC et la CGSLB n’avaient pas en tête d’organiser quoi que ce soit. Il se pourrait donc qu’en allant à la presse, il a voulu faire pression. Nous supposons qu’il a tenu compte de la possibilité que le bureau fédéral de la FGTB ne le suive pas, ce qui s’est confirmé. Lorsque les négociations sur l’Accord interprofessionnel (AIP) commenceront bientôt, cela lui sera certainement reproché par les représentants patronaux et cela a donc affaibli sa position.
D’autre part, avec cette déclaration, Vertenueil a sans doute redonné vie à la résistance sociale et a fortement contribué au succès du 2 octobre. Il a ainsi coupé court à la stratégie électorale des partis du gouvernement, en particulier la N-VA et le MR. Ces derniers voulaient jouer la migration, la sécurité et l’identité pour dévier l’attention de leur programme antisocial. Les attaques de la N-VA sur les libertés syndicales ne sont d’ailleurs pas présentées par la N-VA comme des attaques sur les acquis sociaux mais contre un appareil sclérosé très éloigné du ‘‘flamand ordinaire qui bosse dur’’.
L’action sociale empêche le gouvernement de mettre ses thèmes au centre
Le 20 septembre, 6000 personnes essentiellement de la FGTB ont manifesté à Namur contre l’intention du gouvernement wallon de transformer le statut des APE (Aide à la promotion de l’emploi). Les APE sont des emplois subsidiés dans des maisons de repos, des écoles, des clubs sportifs, des hôpitaux, des communes et des CPAS, des ASBL de jeunesse et culturelle, à la province, etc. Au total, il s’agit de 60.000 emplois éparpillés sur toute la Wallonie, dont des milliers sont menacés et, avec eux, de nombreuses associations ou services. Déjà le 25 juin, 10.000 manifestants avaient répondu à l’appel, alors lancé par tous les syndicats et les patrons impliqués. Une grève générale des fonctionnaires wallons a d’abord été annoncée pour le 10 octobre et a été reportée au 19 octobre.
Les syndicats des fonctionnaires flamands ont organisé 7 assemblées du personnel durant la 2e semaine de septembre. La participation a été tellement grande et la colère tellement forte que les syndicats ont été obligés d’appeler à la grève pour le 21 septembre. Apparemment, cette annonce a suffi pour faire reculer la ministre flamande Hoomans. La concertation sur ‘‘l’harmonisation des conditions de travail’’ a été renvoyée à des groupes de travail. Il était plus qu’évident que les sommets syndicaux rechignaient à passer à l’action, nous espérons pour le personnel que les syndicats n’ont pas ainsi laissé passer le moment d’éviter une harmonisation vers le bas. Une semaine plus tard, le 28 septembre, 10.000 fonctionnaires fédéraux ont manifesté, surtout des pompiers et des policiers, à propos de revendications semblables. Des escarmouches ont eu lieu avec la police à hauteur de la rue de la Loi.
Avec le nouveau Journal des pensions du front commun syndical consacré aux métiers lourds, qui était moins fort que l’édition précédente, tout cela a contribué au développement d’une atmosphère sociale. De plus, les ‘‘actions de sensibilisation’’ prévues dans le secteur privé étaient prises plus au sérieux. Ainsi, dans les entreprises chimiques anversoises, une pétition a circulé à propos des fins de carrière et des métiers lourds, une part importante de l’accord d’été. A GSK, dans le Brabant wallon, des assemblées du personnel ont eu lieu. Mais en général, à nouveau, la préparation restait dépendante de l’initiative de quelques individus ou, au mieux, d’une délégation combative.
Nous avons dit que si le 2 octobre était de cette façon transformé en succès, cela pourrait être un bon début pour lancer une grève générale encore avant la fin de l’année, comme la FGTB de Charleroi & Sud-Hainaut l’a exigé à juste titre. La FGTB de Liège-Huy-Waremme n’a pas voulu attendre jusque-là et a appelé à la grève régionale le 2 octobre. Finalement, ce jour-là, 65.000 syndicalistes ont manifesté toutes provinces confondues.
C’est surtout en Flandre que la participation a dépassé les attentes. C’est probablement dû au fait que le moyen d’action correspondait mieux à ce qui vit dans les entreprises et dans le mouvement des travailleurs en général. Pour toutes sortes de raisons, la volonté de partir en grève y est plus limitée. Non pas nécessairement parce que beaucoup de gens seraient d’accord avec les mesures gouvernementales, mais la propagande de droite continuelle contre les migrants, les socialistes et les syndicats y laisse en effet ses marques. En plus, un certain cynisme s’est installé contre les syndicats qui aboient mais qui s’enfuient la queue entre les pattes lorsque les choses deviennent sérieuses. Une grève générale y est possible, mais seulement après avoir mené une intense campagne d’assemblées du personnel, de concentrations militantes, etc. Si le succès des manifestations du 2 octobre démontre quelque chose, c’est que les syndicats, s’ils le voulaient, disposent toujours des militants nécessaires pour mener une telle campagne intense. S’ils ne le font pas, alors, ce qui attend la classe ouvrière, c’est une série de reculs prononcés, et ce qui attend les syndicats, c’est de perdre leur pertinence.
En Wallonie et à Bruxelles, la participation était plus clairsemée, bien que là aussi un certain cynisme existe aussi quant à la volonté d’agir des directions syndicales. La participation moindre était surtout due au fait que beaucoup de gens estiment qu’une manifestation est inadéquate et n’est pas à la hauteur des attaques du gouvernement. Ils auraient préféré saisir l’arme de la grève. Néanmoins, le gouvernement avait perdu l’initiative de déterminer les thèmes du débat public autour des élections communales et provinciales.
Une cascade de contrariétés
Comme d’habitude, après cette contrariété, une cascade d’autres a suivi. Fin septembre, il était devenu clair qu’en novembre, seul un des sept réacteurs nucléaires serait disponible en Belgique à cause du manque d’entretien. Les constructeurs privés de l’époque ne suivaient pas les plans de construction à la lettre et les centrales nucléaires n’ont jamais été prévues pour durer aussi longtemps. C’était une mauvaise nouvelle pour la N-VA qui, ces dernières années, était devenue le porte-voix du lobby nucléaire au sein du gouvernement. Voilà qui ne renforcera certainement pas la confiance dans le secteur. Mais il s’agissait également d’une mauvaise nouvelle pour le MR. Cet hiver, un manque d’approvisionnement à hauteur de 1700 mégawatts serait possible. Cela s’était déjà produit il y a quelques années, la ministre Marghem était donc avertie, mais elle n’a rien fait. Tant en novembre qu’en janvier et février, il est possible qu’il faille appliquer le plan de délestage.
Démarrer de la capacité supplémentaire et importer du courant de France aura un coût supplémentaire. Cela fera augmenter la facture d’énergie des ménages de 40%, et ceci alors qu’à cause de la libéralisation les factures sont devenues 72% plus chères entre 2007 et 2017. Les prix de l’énergie ont déjà conduit à la faillite de quelques casseurs de prix chez les fournisseurs. Ceux qui étaient en faveur de la libéralisation ont toujours nié que cela conduirait à des pénuries d’approvisionnement et finalement même à des black-out. Lors de l’application du plan de délestage il y a quelques années, on en parlait alors comme d’une maladie infantile. Ce n’est apparemment pas le cas. La revendication de la nationalisation du secteur énergétique, la seule possibilité pour rendre une transition énergétique possible, gagnera en force.
En septembre encore, le gouvernement a connu une autre contrariété. La N-VA surtout, mais de fait tous les politiciens, y compris de l’opposition, craignent qu’un camp de tentes de transmigrants puisse être créé quelque part à la côte depuis la fermeture de la jungle de Calais. La seule manière dont ils pensent pouvoir l’éviter, c’est par la dissuasion : pas de structure d’accueil, des conditions aussi mauvaises que possible et systématiquement envoyer la police. C’est cette politique qui conduit à des drames tels que la mort de la petite Mawda. L’homme qui correspond à cette politique à poigne s’appelle Theo Francken.
Lui est conscient de l’hypocrisie de l’establishment et du caractère intenable de leur ‘‘fondamentalisme des droits humains’’. Il a même écrit un livre où il se plaint de ‘‘la démographie incontrôlée’’ et de ‘‘la discrimination institutionnalisée’’ dans les pays musulmans. A la Fnac, ce livre s’est retrouvé entre celui de Woodward sur Trump et la dernière édition de Mein Kampf. Lorsque, en septembre, Francken a voulu répondre à la police, qui se plaignait de toujours devoir embarquer les mêmes transmigrants, en relâchant 200 autres sans-papiers pour faire de la place, il apparaissait qu’une trentaine de condamnés figuraient parmi ces derniers. Par après, il est apparu qu’ils étaient simplement connus de la justice. Mais, comme illustration de son improvisation politique, cela pouvait compter. Sa maxime ‘‘Humain, mais ferme’’ devenait soudainement du travail bâclé.
Le 5 septembre, la VRT a diffusé un reportage sur Scild & Vrienden. Ce club élitiste d’extrême droite s’était fait remarquer ces dernières années par quelques actions ‘‘méchantes’’. A un piquet de grève, à une action en soutien aux réfugiés et en volant et en brûlant un drapeau de la FGTB. Ils ont attiré l’attention de la presse avec des provocations médiatiques inspirées de l’Alt-right et se sont vus offrir un forum, entre autres dans les pages de De Morgen et de Humo. En agissant comme service d’ordre pour Francken et à cause de la sympathie quasiment ouverte d’autres membres de la N-VA, ils pensaient pouvoir s’en sortir, jusqu’à ce qu’ils soient dénoncés par la VRT comme une milice privée d’extrême droite qui appelait à l’armement, qui organisait des camps d’entraînement et qui, derrière l’écran, avait les positions racistes, sexistes et LGBTQI-phobes les plus brutales.
Contrairement au VMO, au Voorpost, à BBET et à d’autres, S&V est composé d’enfants de l’élite richissime. Les conditions sont bien entendu complètement différentes mais, si les autres groupes s’inspirent plutôt de la SA allemande de l’entre-deux guerres, alors S&V s’inspire plutôt des SS avec un dédain pour le petit peuple. S&V fait un point d’honneur de l’occupation de postes dans la société, mais le groupe a mal estimé quelles étaient les relations de forces et a provoqué une résistance qui a surpassé de loin ses fantasmes juvéniles. Pour le gouvernement, l’affaire sent mauvais. Des membres de S&V figuraient sur les listes électorales du CD&V, de l’Open-VLD et bien entendu du Vlaams Belang, mais surtout sur des listes de la N-VA. S&V ne provient pas seulement du NSV (organisation étudiante officieuse du Vlaams Belang) et du KVHV (cercle étudiant catholique conservateur) mais aussi des Jeunes-N-VA. Pour la N-VA, qui avait eu peine à se débarrasser des soupçons pesants sur son passé dans la collaboration, c’est très ennuyant. Avec d’autres, les Etudiants de Gauche Actifs (EGA), la campagne ROSA et les Syndicalistes contre le fascisme ont saisi l’occasion pour pousser la droite le plus possible dans la défensive.
Un des arguments les plus importants du gouvernement Michel c’est que, malgré l’austérité, il aurait, grâce au Tax-shift, réussi à faire croître ‘‘notre’’ pouvoir d’achat. Chaque salarié ou allocataire social sent bien qu’il y a quelque chose de pas net derrière cela. Mais lorsque l’on continue à répéter un mensonge, après quelques temps, ce dernier a un effet. Mais, dans les jours ayant précédé les élections du 14 octobre, cela a été taclé par le service d’étude du PTB. Ce dernier a pu lire dans les chiffres d’AMECO, la banque de données de la commission européenne, que la proportion des salaires dans le revenu national brut (RNB) a diminué de 50,5% en 2015 lors de l’arrivée de Michel au pouvoir à 48,5% fin 2017. Il s’agit d’une baisse de 2% chiffrée à 9 milliards d’euros. Si la proportion des salaires n’avait pas baissé, chaque salarié aurait 191 euros en plus par mois !
La proportion des salaires dans le RNB est ainsi plus basse dans notre pays que dans les pays voisins, elle a diminué 2 fois plus en Belgique qu’au Pays-Bas et 7 fois plus en Belgique qu’en France pendant qu’en Allemagne la proportion représentée par les salaires a même augmenté de 0,6%. La proportion du profit des entreprises dans le RNB a augmenté dans cette même période de 2,7% pour atteindre 22%. Cette augmentation représente 12 milliards d’euros, la plus grande augmentation depuis le début de l’étude de ces statistiques il y a 32 ans. La croissance du profit en pourcentage du RNB est en Belgique équivalente au double des Pays-Bas, à 5 fois plus qu’en France et à 6 fois plus qu’en Allemagne.
Cette discussion prend place sur le niveau flamand aussi. Matthias Diependaele, président du groupe de la N-VA au Parlement flamand, prétendait fin septembre sur Radio Een que le pouvoir d’achat du flamand a grimpé de 7% entre 2017 et 2019. Il tenait le chiffre du ministre-président flamand Geert Bourgeois (CD&V), dans le texte duquel s’était glissé une erreur de frappe, puis qu’il s’agissait de la législature complète de 2014 à 2019. Le Bureau du Plan a calculé cela et a corrigé le chiffre à 4,7%. Beaucoup moins que les 9% du gouvernement Leterme/Peeters de 2004-2009, par après, une baisse de 5% s’est produite durant la grande récession. A Bruxelles, la croissance pour 2014-2019 serait de 3,2% et en Wallonie de 3,6%.
Mais cela ne sont que des moyennes qui ne nous apprennent rien. Selon le Bureau du plan, cette augmentation serait surtout due au fait que plus de gens sont au boulot, à la forte augmentation des fortunes et à des diminutions d’impôts telles que le tax-shift. Dans son baromètre socio-économique, par contre, la FGTB démontre que, sur 2 années, 2016-2017, le pouvoir d’achat des salariés en Belgique a diminué de 1,7% pendant que celui des pays voisins a augmenté partout, de 0,85% en France, de 2,2% en Allemagne et de 2,91% aux Pays Bas. Entre 2000 et 2016, dans l’eurozone, le revenu disponible, pas seulement les salariés, mais aussi les allocations sociales et les fortunes, n’a connu de croissance moindre qu’en Belgique qu’en Espagne, en Italie, au Portugal et en Grèce.
Dans sa réplique au service d’étude du PTB, le MR admet que les revenus bruts ont diminué, mais il ressort un autre argument favori du gouvernement, c’est-à-dire que, grâce à cela, 219.000 jobs ont été créés. Mais le baromètre socio-économique illustre que la croissance des emplois en Belgique est depuis le 2e trimestre de 2015 en dessous de la moyenne européenne, que la Belgique est 25e sur 28 en termes de croissance économique et 24e sur 28 en terme de taux d’emploi. En plus, 53% des nouveaux emplois depuis les débuts du gouvernement Michel sont partiels, 41% à temps plein et 6% en intérim ou du travail saisonnier. Le baromètre socio-économique nous raconte aussi des choses intéressantes sur les indépendants : le nombre d’indépendants qui sont pour 75% dépendants d’un client, c’est-à-dire le nombre de faux indépendants, était de 13,4% en 2010 contre 29,2% en 2015. Le nombre d’indépendants pour moins de 75% dépendants d’un client, les vrais indépendants, a diminué de 86,6% en 2013 vers 70,8% en 2015.
La FGTB a aussi comparé les revenus des plus de 60 ans par rapport au reste de la population. Dans la zone euro, ils sont en moyenne 3% plus bas. Aux Pays-Bas, ils sont 14% plus, tout comme en Allemagne, mais il s’agit de 22% de moins en Belgique. Si nous regardons les dépenses pour les pensions en pourcentages du PIB, l’Autriche dépense 13,2%, la France 13,8%, l’Allemagne, 10,6% et la Belgique 10,2%. La fortune moyenne de tous les Belges, immobilier compris, est de 510.000 euros, mais c’est en raison de l’existence de quelques très grands, car la fortune médiane, celle de celui qui se trouve tout juste au milieu, n’est que de 217.900 euros. La fortune financière moyenne, sans immobilier, est de 215.000 euros. La fortune financière des 10% les plus riches correspond à 13 fois la fortune médiane, presque un record européen. Les 50% les plus pauvres disposent ensemble de 11,5% de la fortune, moins que le 1% le plus riche qui représentent 12,1%. Le risque de pauvreté a parallèlement augmenté pour atteindre 15,9%.
Le gouvernement balaye tout cela comme étant de la ‘‘propagande de gauche’’. Le constat du Bureau du Plan a fait plus mal. Selon lui, le déficit budgétaire de 2018 ne serait pas de 0,7% ou 3,2 milliards d’euros, l’objectif que le gouvernement s’était imposé lui-même après avoir abandonné l’ambition d’un budget en équilibre, mais de 1,8% du PIB, soit 8,2 milliards d’euros ! Pas moins de 5 milliards de plus. Ce qui ramène le déficit budgétaire après 5 années d’austérité dure quasiment à nouveau au niveau de celui en vigueur à l’accession au pouvoir de Michel.
Les élections du 14 octobre et leur signification
Toutes ces contrariétés ont conduit à un point tournant pour les partis du gouvernement, d’abord dans les sondages à partir du début de l’été et puis, surtout, lors des élections elles-mêmes. Jusqu’au dimanche après-midi des élections, presque tous les partis, à l’exception du SP.a, avaient remporté les élections, la victoire des Verts était réelle mais modérée et la Flandre avait surtout voté à droite. En Belgique francophone, en revanche, les partis traditionnels, en particulier le PS, avaient perdu face à une vague verte à Bruxelles et une vague verte et rouge vif en Wallonie. La conclusion était évidente : nous vivons dans un pays à deux démocraties, l’une toujours plus à droite en Flandre, l’autre toujours plus à gauche à Bruxelles et en Wallonie.
Le soir-même et les jours suivants, les médias ont dû ajuster leur analyse. En Flandre, nous sommes passés d’un perdant et de nombreux gagnants à de nombreux perdants et deux gagnants. En Wallonie, la coalition de droite MR-CDH s’avère finalement être le plus grand perdant ; et à Bruxelles c’est le MR. Les trois partis gouvernementaux flamands atteignent toujours 58,1% ensemble, mais c’est 6,4% de moins qu’en 2012 et 8,5% de moins qu’en 2014 ! La N-VA perd 3,4% comparé à 2012 et 7% comparés à 2014 et retombe à 24,9%. La perte du CD&V se situe entre 0,6 et 1,6%.
Le grand perdant SP.a perd 1,2% en comparaison de 2012 et 3,7% comparé à 2014 tandis que Groen gagne 4,9% comparé à 2012 et 4,5% comparé à 2014. Le PTB gagne 1% comparé à 2012. Ensemble, les partis ‘‘de gauche’’ (le SP.a, Groen et le PTB), représentent 26,6% et sont encore loin du compte. L’écart entre ces partis et les partis au pouvoir diminue de 11% par rapport à 2012. Pour le gouvernement flamand, cela signifierait que la N-VA (de 43 à 33 sièges) et le CD&V (de 27 à 26) ne suffiraient plus à constituer une majorité régionale (63 sièges) et que l’Open VLD (de 19 à 18) passerait du rang de partenaire facultatif à celui de partenaire indispensable pour une majorité.
La N-VA a fait un bon score là où des figures connues tiraient la liste et est le plus grand parti autour d’Anvers, mais le CD&V a étonnamment bien tenu le coup en Flandre occidentale et au Limbourg. L’Open-VLD a pu sauvegarder et conquérir quelques maïorats importants. Le Vlaams Belang a absorbé une grande partie de la perte de la N-VA et se remet fortement de son niveau le plus bas en 2014. Face à 2012, le VB gagne 4% et 7,9% face à 2014. Surtout dans la région de la Dendre et autour de Turnhout, il obtient des scores importants mais, avec 13%, le parti est encore loin de son score monstre de 21,5% en 2006.
Certains dans le mouvement ouvrier vont saisir la progression du Vlaams Belang pour renforcer le fatalisme et défendre un grand front des partis démocratiques, y compris ceux de droite. Ce serait folie d’entamer une collaboration avec les partis qui créent justement le terreau fertile de l’extrême droite. Il ne faut pas exagérer la progression du VB, mais bien être alerté, considérer de réanimer Blokbuster et donner plus d’attention à Syndicalistes contre le fascisme. Il y a entre-temps en Flandre une vingtaine de communes où la N-VA et le VB parviennent ensemble à la majorité. La remontée du VB confirme ce que nous avons systématiquement souligné : tant que la politique de casse sociale et d’exclusion continue, il est prématuré de déclaré la mort du VB. Du moment que le ballon de la N-VA se vide, celui du VB peut se remplir. La lutte contre l’extrême droite est donc loin d’être terminée.
En Wallonie et surtout à Bruxelles, le PS est très heureux qu’après les scandales chez Publifin et Samusocial, la perte est restée limitée à 7,9% (25,9%). Le parti sauvegarde ainsi sa position dans toutes les villes centrales importantes, à Liège, Charleroi, la Louvière, Mons et Tournai et parvient à reconquérir Molenbeek et Koekelberg à Bruxelles, tandis que la perte est négligeable à Bruxelles-Ville. La grande percée de la N-VA dans la région, avec laquelle ce parti espérait pouvoir bloquer la formation du gouvernement bruxellois en mai prochain, ne s’est pas produite. Le MR perd 4%, mais cela signifie qu’il perd 4 de ses 6 bourgmestres bruxellois. Et ses figures de proues Marghem à Tournai et Belot à Rochefort font un très mauvais score. Son partenaire de coalition wallon, le CDH, perd 3,5%, mais est déjà content de ne pas être totalement rayé de la carte.
ECOLO est le grand vainqueur sur toute la ligne avec 16,2%. Ce n’est pas exagéré de parler d’une vague verte, ni d’une vague rouge vif pour le PTB (+7,2% vers 10%). Avec un tel résultat, la prise de pouvoir régionale du MR et du CDH en Wallonie serait sanctionnée en mai 2019. Le MR et le CDH n’arrivent qu’à 33 sièges alors qu’il leur en faudrait 38, PS-CDH n’en a que 34 et PS-ECOLO (36) ne suffirait pas. Si Défi fait un meilleur score en 2019 en utilisant ces têtes bruxelloises en Wallonie, une coalition PS-ECOLO-Défi n’est pas exclue. Sinon arrive à l’horizon une coalition contre-nature PS-MR (45 sièges).
Bart Sturtewagen, éditorialiste de De Standaard a expliqué : ‘‘La coalition suédoise survit, mais elle a été mise à rude épreuve. Sa viabilité est menacée. La gauche est en plein mouvement, mais n’est toujours pas une alternative. Les extrêmes de droite et de gauche progressent.’’ Nous le dirions en d’autres termes mais son analyse est correcte. Comme toute la droite, il fait un amalgame entre la gauche radicale et l’extrême droite. Ce n’est pas la promotion de la haine, des discriminations, de l’intimidation et de la violence qui est invoquée pour étendre le cordon sanitaire au PTB.
Mais toute l’Histoire a été jusqu’à présent marquée par des guerres, des guerres civiles, des massacres, des génocides, etc. Les machines à tuer les plus efficaces ont toujours été celles qui avaient atteint le plus haut niveau technologique, et elles se trouvent aujourd’hui en Occident, où ce sont les ‘‘partis démocratiques’’ qui gouvernent. Si le nombre de crimes commis par leurs prédécesseurs ou des alliés à qui ces armes ont été fournies devient la norme, alors presque tous les partis doivent être interdits. C’est totalement hypocrite, la droite le sait pertinemment, mais elle veut à tout prix éviter un gouvernement de gauche des travailleurs. Pour l’instant, cela peut être évité sans faire appel au Vlaams Belang. Mais quand ça deviendra vraiment crucial, les portes du pouvoir s’ouvriront pour lui aussi. De Wever a envisagé tester ce que signifierait une percée prudente du cordon sanitaire par une coalition avec la liste du Vlaams Belang ‘‘Forza Ninove’’, mais les blagues racistes de sa tête de liste et le salut hitlérien de ses partisans ont torpillé le projet.
De nouveau vers une formation gouvernementale avec le confédéralisme en arrière fond
Avec ce résultat, la coalition suédoise perdrait totalement sa large majorité (de 85 à 73 sièges sur 150) sur le plan fédéral. Elle pourrait alors embarquer le CDH (7 sièges), mais ce serait une coalition de cinq perdants ! Cela, on voudra l’éviter. Cela pourrait expliquer pourquoi Bart De Wever (N-VA) à Anvers, Tommelein (VLD) à Ostende, De Clercq (VLD) et Van Hecke (CD&V) à Gand lorgnent vers Groen. Les Verts se prétendent ‘‘ni de gauche, ni de droite’’, ils prennent des voix des deux côtés et pourraient servir de monnaie d’échange si les partenaires de la coalition suédoise souhaitent continuer.
Groen peut bien prétendre ce qu’il veut, dans l’opinion publique on le considère comme de gauche. A chacune de ses participations précédentes au pouvoir, Groen a été sévèrement puni par la suite. Il nous semble peu probable que ce parti rejoigne un gouvernement de droite au niveau fédéral, et certainement pas sans Ecolo à ses côtés. Bien que l’environnement a certainement joué un rôle important, nous pensons que le succès d’ECOLO à Bruxelles peut aussi s’expliquer partiellement par le fait que ce parti est considéré comme tolérant vis-à-vis des réfugiés et des sans-papiers. C’est probablement le parti le plus populaire dans le mouvement de solidarité contre la politique migratoire brutale de Francken.
Pour ECOLO et pour le PS, il faudrait déjà une grave crise institutionnelle appelant à leur ‘‘sens de l’Etat’’ avant de rejoindre un gouvernement comprenant la N-VA. Mais si le résultat du 14 octobre devient également celui du 26 mai, cela ne peut être complètement exclu. Le caractère thatchérien du gouvernement serait de ce point de vue adouci.
Renvoyer la N-VA sur les bancs de l’opposition pourrait se faire aussi après les contractions nécessaires. De la simulation de Vives sur la manière dont les élections provinciales se traduiraient en sièges pour mai 2019, il apparaît qu’une tripartite classique ou une autre combinaison de 3 des 4 familles politiques (avec les verts) obtiendrait une majorité fédérale. Est-ce qu’il se pourrait que les coalitions PS-MR dans diverses communes en Wallonie et à Bruxelles représentent un premier pas du PS pour décoller le MR de la N-VA, un peu la contrepartie francophone de la tentative d’approche de la N-VA vers Groen ?
Même si des gouvernements asymétriques ne sont plus exceptionnels, cela signifie presque avec certitude qu’il faudrait aussi éjecter la N-VA du gouvernement flamand pour éviter que ce gouvernement devienne l’exécutif de lutte de la nation flamande contre le gouvernement fédéral. Mais cela exige une tripartite renforcée des verts, ce qui implique en Flandre que seuls la N-VA, le VB et le PTB s’il obtient des élus seraient dans l’opposition. Dans ce cas aussi, une lourde artillerie communautaire sera mise en position pour tirer des obus confédéraux. Les négociations gouvernementales deviendront d’office compliquées.
Les coalitions progressistes n’arrivent pas
La FGTB wallonne s’était déjà prononcée en faveur d’une majorité progressiste PS-PTB-ECOLO au parlement wallon en 2019. Le même appel a également été lancé au niveau communal. Le lendemain des élections, la FGTB a condamné les ‘‘alliances contre nature’’ PS-MR conclues au lendemain des élections, comme à Verviers. Le syndicat a d’ailleurs mené une action à Liège pour soutenir sa revendication. La FGTB explique qu’il y a un déplacement politique vers la gauche en Wallonie, qui était prévisible, et que la composition d’alliances PS-PTB-ECOLO est la seule manière d’opérer un virage à 180 degrés contre les politiques d’austérité du gouvernement Michel selon la FGTB.
Le PTB a eu raison de vouloir prendre du temps pour en débattre au sein de ses structures et consulter ses membres. C’est compréhensible, le soir-même des élections, on a vu les partis traditionnels former immédiatement des ‘‘accords au coin d’une table’’, en se répartissant les postes. Il est préférable de prendre le temps nécessaire, de consulter la base et de préférence de mener les négociations le plus ouvertement possible au lieu de se laisser piéger dans des négociations secrètes. La constitution de coalitions progressistes doit être ancrée dans un large débat public au sein du mouvement des travailleurs sur la manière de mettre sur pieds une politique de rupture anti-austérité. Mais cela n’enlève rien au fait que le PTB aurait pu se préparer plus tôt en répondant à l’appel de la FGTB lorsqu’elle l’a lancé et en discutant d’avance avec la FGTB, et dans la mesure du possible avec le PS et ECOLO, sur ce qu’une telle coalition pourrait représenter.
Immédiatement après les élections, il y a eu des discussions entre le PS et le PTB. Pour le PS, l’enjeu était clair dès le début : illustrer qu’il est impossible de parvenir à un accord avec le PTB, que ce parti ne veut pas participer au pouvoir et qu’un vote pour ce parti n’a aucun sens. A Charleroi, où le PS a pu sauvegarder sa majorité absolue, Paul Magnette a invité le PTB mais a immédiatement déclaré que le programme local du PTB augmenterait les dépenses annuelles de 30% ce qu’il considérait comme impayable et irréaliste. Ainsi, il voulait se dédouaner de la responsabilité de ne pas conclure d’accord avec le PTB.
A Herstal, où Frederic Daerdenne a aussi une majorité absolue avec le PS-H, les choses se présentaient de façon différente. Daerdenne a offert des pourparlers de coalition au PTB avec l’argument qu’ils représentent une tendance réelle dans la commune. Finalement, il n’y a pas eu d’accord, mais il apparaît que la tentative a été réelle. A Liège, il a été clair dès le début que le PS préférait une coalition avec le MR de Christine Defraigne. Defraigne s’est auparavant comportée comme franc-tireur au MR, qui n’était pas d’accord avec les attaques fortes contre le PS et est maintenant remerciée pour cette approche.
A Molenbeek, la situation était différente. Là, le MR avait chassé le PS de Philippe Moureaux, pourtant le plus grand parti, chose considéré comme historique à l’époque. Pour pouvoir y parvenir, le MR a été obligé d’offrir à ses partenaires de coalition plus petits , le CDH et Ecolo-Groen, autant de postes d’échevins qu’au MR. Catherine Moureaux (PS) a par conséquent laissé entendre immédiatement après sa victoire cette année que des pourparlers avec Françoise Schepmans (MR) n’étaient pas à l’ordre du jour et qu’elle préférait une coalition PS-PTB-Ecolo en raison des nombreuses convergences et de la nécessité d’une majorité progressiste pour s’attaquer aux ‘‘besoins sociaux urgents’’.
Maintenant que les pourparlers ont échoué et que finalement une coalition PS-MR est formée, le PTB prétend que Moureaux n’a jamais voulu rien d’autre. Nous en doutons. On ne peut pas reprocher au PTB d’être allé aux négociations avec un programme impayable. Dans sa note, le PTB revendiquait 1000 logements sociaux en 6 années de temps, alors qu’il y a pas moins de 17.000 personnes sur les listes d’attentes ; le recrutement de 20 instituteurs, un par école communale, pour 1 million d’euros ; la restauration de la garderie (accueil extra-scolaire) gratuite que Schepmans avait supprimée d’un coût de 2 millions d’euros ; la limitation du salaire des échevins à 6000 euros bruts et la réduction du collège échevinal d’un échevin ; un chèque sport ou culture pour chaque adolescent de 200 euros, d’un coût 1,5 million d’euros.
Le PTB lui-même chiffrait tout cela à 5,3 millions d’euros, le tout à récolter complètement avec des impôts supplémentaires comme de doubler la taxe sur les bureaux, une taxe sur les logements inoccupés, une taxe sur les terrains à bâtir non-bâtis, une taxe sur les places de parking commercialisées, une taxe de surface sur les grandes galeries commerciales et sur les caisses automatiques et une taxe sur les antennes de GSM.
Nous pensons que le PTB a adopté cette approche car il pensait que Moureaux était sérieuse. A Charleroi, les revendications du PTB étaient comparables, 3000 logements sociaux, etc. Pour les revenus, de nouveau toute une série d’impôts étaient énumérés tels que sur la force motrice, mais là, le PTB a aussi questionné le carcan budgétaire imposé par les autorités supérieures en inscrivant dans l’accord une lutte pour arracher 15% de moyens supplémentaires des autorités supérieures. Bref, là où le PTB s’en tenait au cadre budgétaire à Molenbeek, le PTB a proposé de la rompre à Charleroi, au moins partiellement. Nous pensons que c’est parce que le PTB était convaincu dès le début à Charleroi que le PS ne faisait que du théâtre.
Sur quoi les négociations à Molenbeek ont-elles échoué ? Dès la deuxième entrevue, ECOLO a décroché. ECOLO et aussi le PTB reprochent au PS d’avoir trop tenu au clientélisme. Cela ne nous étonnerait pas, mais est-ce que les choses étaient différentes lorsqu’ECOLO était en coalition avec Schepmans ou cela serait-il différent n’importe où avant de disposer d’une majorité absolue ? N’était-ce pas plutôt le refus du PS de passer une majorité des échevins à Ecolo et au PTB bien que ces partis représentent bien moins que la moitié des élus, qui a été à la base de la cassure ?
Dès qu’ECOLO a quitté le navire, le PTB a dit que le déséquilibre entre le PS et le PTB était si grand que le PS pouvait bloquer n’importe quelle proposition du PTB. Mais ça, un partenaire de coalition peut quand même le faire à tout moment. Le PTB ne s’imagine pas que le travail au sein du conseil communal peut être soutenu par une mobilisation active de l’extérieur et vice versa et que cela aussi fait partie de la construction d’une relation de forces. Mais le plus important, c’est que le PTB n’a pas cassé la négociation sur base du programme, mais sur la division des postes, là où le programme aurait dû être le point de départ pour en arriver à une majorité.
Qu’est-ce qu’un programme d’urgence sociale signifierait à Molenbeek ? A l’initiative de la CGSP ALR (Administrations locales et régionales), des mobilisations importantes du personnel ont eu lieu dans les services publics locaux et régionaux pour de meilleures conditions de travail 3 jours avant les élections. Est-ce que cette majorité de gauche adopterait les revendications du syndicat ? Cela signifierait entre autres la staturisation du personnel contractuel, de s’en prendre aux bas salaires et d’instaurer une réduction collective du temps de travail sans perte de salaire et avec embauches compensatoires.
Dans son livre ‘‘Nouvelles Conquêtes’’, Di Rupo ne s’était-il pas prononcé pour la semaine des 4 jours et un salaire minimum de 14 euros de l’heure ? Est-ce que ce n’était pas justement les revendications du personnel ? Pourquoi cela n’est-il pas devenu les points cruciaux dans les négociations ? Ou bien le PS l’avait accepté, une bonne partie du personnel avait connu une forte avancée et la démonstration était faite de ce qu’une coalition avec le PTB était capable de faire. Ou bien le PS l’aurait refusé et alors cela aurait été clair que ce parti n’est même pas prêt à mettre en application ses propres promesses en concrétisant les positionnements du parti sur le plan local.
Évidemment, un salaire minimum de 14 euros et une semaine de 4 jours ne résoudrait pas tout, tout de suite. Mais cela seulement déjà aurait sans doute provoqué un énorme enthousiasme et jeté la base pour une lutte pour obtenir plus à Molenbeek mais probablement aussi ailleurs. Il y a aussi le gigantesque désinvestissement public source de nombreuses pénuries sociales, y compris au niveau local. Pour changer cela résolument, il faut stopper le transfert des moyens publics vers les profits des grandes entreprises et les riches pour rattraper le retard en investissements publics.
Ces investissements doivent être orientés vers les besoins sociaux, cela signifie une augmentation drastique du nombre d’écoles, de crèches communales et de logements sociaux publics pour répondre aux nécessités. A Saint-Gilles, avec Gauches Communes, nous avons traduit cela vers un programme local. Sur base des besoins sociaux concrets, nous avons revendiqués un plan radical d’investissements publics pour 4 écoles, 30 crèches, 3000 logements sociaux et 850 emplois décents. Nous avons expliqué qu’il est absolument nécessaire que des majorités de gauche brisent les carcans budgétaires existants. Impossible sans cela d’appliquer un programme qui représente un vrai changement et ne se limite pas à des mesures symboliques dans la marge.
Notre attitude avant, pendant et après le 14 octobre
Un conseil communal de gauche qui opère un virage à 180 degrés contre l’austérité sera nécessairement une majorité de désobéissance. Elle sera rapidement soumise par la région à une trajectoire budgétaire faite de coupes budgétaires contre les services publics et le personnel. Si elle s’y oppose, la région pourrait carrément suspendre le conseil et prendre le contrôle de toute la commune : un coup de force contre le mandat des électeurs. La région et le fédéral se comportent de la même manière envers les communes que la commission européenne envers les Etats nationaux ou comme les créanciers se sont comportés envers la Grèce. Cette campagne de Gauches Communes peut sembler plus difficile à mener, mais elle préparait le débat aux attaques venant de la droite, pour qui une politique de rupture anti-austérité serait ‘‘impayable’’.
Le PTB est confronté aujourd’hui à la difficulté de ne pas avoir mené cette campagne, de ne pas avoir préparé ses militants et ses électeurs à faire face à cette offensive. Il aurait fallu clarifier la nécessité de construire un réseau de villes rebelles qui stimule la mobilisation active de la population et du mouvement des travailleurs pour rompre avec la camisole de force budgétaire. Le PTB en était d’ailleurs conscient. Très exceptionnellement Raoul Hedebouw parlait de ”fronde municipaliste” en analogie avec Mélenchon, mais c’était de manière exceptionnelle, certainement pas de façon systématique. Avec Gauches Communes, nous avons défendu ce modèle de gauche qui, aujourd’hui, a toute son importance dans le débat sur des majorités de gauche.
Nous savions que le PTB allait réaliser une percée électorale. Pour beaucoup de syndicalistes et de jeunes radicalisés, c’est le seul espoir possible sur le plan électoral. Au plus était forte la percée du PTB, au plus l’idée serait minée que seule la droite a quelque chose à proposer et que la gauche n’offre pas d’alternative. Plus d’une année avant les élections communales, nous avons écrit au PTB pour inviter à nous voir et discuter ensemble de la manière de contribuer au mieux au résultat le plus fort possible. Nous avons offert de déposer des candidats du PSL sur les listes du PTB. Nous n’avons pas reçu de réponse pour finalement essuyer un refus sec 11 mois après.
Malgré cela, nous ne voulions pas aller à l’encontre du souhait de ce qui représente selon nous une partie importante du mouvement ouvrier. A Gand, où nous sommes jusqu’à un certain point une donnée objective avec une capacité de réaction et de mobilisation reconnue, ils nous ont finalement permis de mener campagne, à condition que cela se fasse séparément des membres et sympathisants du PTB. Cela nous a permis, avec notre propre profil, d’approcher de nombreux électeurs du PTB. En tant que non-membre du PTB et membre du PSL, nous avons quand même appelé à voter PTB, cela n’était pas un frein mais plutôt un avantage et l’occasion d’un dialogue plus ouvert.
Nous étions préparés à soutenir le PTB au maximum mais sur base de notre propre profil politique. En plus, nous ne voulions pas complètement disparaître du terrain électoral. A Keerbergen, où le PTB n’avait pas de listes, nous avons déposé une liste de 9 candidats tirée par un membre du PSL et avec seulement un autre membre du PSL sous le nom de ‘‘Gauche conséquente’’. En composition sociale, cette liste était particulièrement prolétaire, une représentation idéale de tous les travailleurs de la région. La liste a obtenu 2% dans la deuxième commune la plus riche de Belgique où les partis de droite, Open-VLD, N-VA et CD&V ensemble font un score de 83,4%, 94,5% si nous incluons aussi les verts, Groen.
Saint Gilles fait partie des communes les plus pauvres du pays, les partis de gauche, PS (39,6%), Ecolo (28,1%), PTB (13%) et Gauches Communes (2,3%) y obtiennent ensemble 83%. Nous savions qu’électoralement nous serions pris en tenaille mais nous voulions d’une façon ou d’une autre pouvoir propager quelque part notre programme et nous espérions pouvoir répéter notre résultat de 2014 (1,12%). En commençant tôt avec un programme reposant sur les besoins sociaux, élaboré en discussion avec les délégués syndicaux du personnel local, et qui offre une perspective combative mais réelle, nous sommes devenus une partie importante de la lutte électorale et il n’a pas été du tout possible de nous marginaliser.
Nous avons organisé 62 stands en 8 semaines, avec chaque semaine un nouveau tract dans chaque boîte, avec des affiches dans les commerces et d’innombrables discussions. Nous avons réussi à rendre nos thèmes centraux, les logements sociaux, les crèches et l’emploi. Nous avons obligé le conseil communal à répondre et à assurer que les thèmes de la droite, réfugiés, sécurité et identité, n’ont jamais fait surface. Le MR est retombé de 15% à 9%. Le CDH de 8% à 3,7% et Défi de 3,9% à 3,3%. Quand il a été demandé à ECOLO pourquoi le parti ne voulait pas entrer en coalition avec le PTB, ECOLO a répondu que le programme du PTB – 30 crèches, 4 écoles, 3000 logements sociaux et 850 emplois – était impayable. Mais c’était notre programme, pas celui du PTB, qui se limitait à la rénovation de 100 logements sociaux, du parking gratuit et plus d’espaces verts.
Depuis 2006, le nombre de votes de la gauche radicale à Saint Gilles à évolué de 2,15% ensemble en 2006 vers 7,48% en 2012, 9,08% en 2014 et 15,30 % en 2018. Evidemment, le PTB représente la grosse majorité de cette croissance. Mais Gauches Communes a obtenu en 2018 autant à elle seule que toute la gauche radicale jusqu’à 2007, avant le congrès de renouvellement du PTB de 2008, et autant que le PTB en 2010.
Que le PTB dispose maintenant d’élus dans beaucoup de communes où nous avons un fonctionnement ne peut pas rester sans conséquence pour nous. Là où l’occasion se présente pour des actions locales, nous les mettrons sous pression pour aborder ces problématiques au conseil communal. Nous devons suivre ce qu’ils font, faire des suggestions concernant le programme et l’action de manière amicale mais correcte et, là où nous disposons nous-mêmes d’une force, en particulier à Gand et à Saint Gilles, nous mettrons les élus PTB sous pression avec nos propres actions.
Perspectives vers mai 2019
Le gouvernement Michel est mauvais pour l’économie
Le gouvernement devra faire attention dans la prochaine période, jusqu’aux élections. Sur le plan économique, les dernières prestations sont décevantes. Le gouvernement s’est même fait corriger par la commission européenne puisque, en plus du déficit budgétaire qui est 5 milliards d’euros plus grand que prévu, le déficit structurel aussi, donc sans influence conjoncturelle et dépense unique, reste 1% au-dessus de l’objectif de 0,8% de 2018 et de 0,8% au-dessus de l’objectif de 0,61% de 2019 comme trajet vers l’équilibre total vers 2020. La commission européenne craint ‘‘une déviation sérieuse’’ de la trajectoire prévue.
Autre mauvaise nouvelle pour le gouvernement : la Belgique baisse cette année à nouveau de 2 places sur la liste du Forum économique mondial (FEM) concernant la compétitivité. En 2011, la Belgique était encore en 15e position, elle est maintenant à la 21e place. En plus, les perspectives n’ont pas l’air positives pour ces prochains mois. Le ralentissement économique depuis le premier trimestre était considérable, surtout en Wallonie qui dépend de l’exportation pour 40% de son PIB. De cela, 50% va vers les pays voisins : la France (24%), l’Allemagne (16%) et les Pays Bas (8%). Seuls 20% sont exportés en dehors de l’Europe. Selon le service d’étude de l’Union wallonne des entreprises (UWE), la croissance de l’économie wallonne en 2018 serait de 1,4% et en 2019 de 1,3% contre 1,9% en 2016 et 1,8% en 2017.
Le ralentissement de la croissance est aussi présent en Flandre qui dépend pour 80% de son PIB de l’exportation et est moins sensible à la conjoncture du marché intérieur. En plus, la Flandre exporte également plus à l’extérieur de l’Europe. On craint surtout pour la montée des prix du pétrole et plus globalement pour les prix de l’énergie. Pour l’industrie belge qui est très énergivore, ce serait un coût supplémentaire considérable, mais aussi pour les ménages puisque le marché du logement belge consomme beaucoup d’énergie. En plus, on craint le protectionnisme, surtout sachant que la Belgique est l’une des économies les plus ouvertes au monde, qui exporte 70% de tous ses biens et services et importe une partie comparable.
Des tensions géopolitiques peuvent également traverser les perspectives économiques, les sanctions contre l’Iran par exemple signifient une malchance pour quelques ténors économiques belges. Ce n’est pas pour rien que Reynders avait visité Téhéran dès que l’accord nucléaire avait été conclu. Le Brexit peut aussi constituer un danger sérieux, on estime que cela pourrait signifier une perte 26.000 emplois dans le pays, dépendant d’un Brexit plus dur ou plus soft. Selon la Banque nationale, la conjoncture économique est déjà en train de tourner, ainsi le nombre d’emplois intérim a reculé en septembre de 3,1% comparé au pic de décembre de l’an dernier. Les emplois intérimaires sont considérés pour l’économie comme les canaris dans les mines.
Les syndicats pourraient battre le gouvernement
Après le 2 octobre, l’action sociale ne s’est pas du tout arrêtée. Déjà le 16 octobre, les syndicats des policiers ont été dépassés par leur base qui s’est déclarée massivement malade, ce qui a concerné jusqu’à 25% des effectifs à Bruxelles. Les pompiers aussi sont tout le temps sur le point de partir en action. Les fonctionnaires wallons se sont mis en grève le 19 octobre. A la chaîne de distribution Mestdagh, un mauvais accord social a été négocié. Le nombre de licenciements a été réduit de 450 à 340 et une RCC à partir de 56 ans a été convenue, mais l’ouverture le dimanche, plus de flexibilité et la non-rémunération des pauses ont été donnés en échange. Ce n’est pas du tout devenu la victoire connue chez Lidl avant l’été.
Cette victoire était présente chez Ryanair où la justice belge est dorénavant applicable et la concertation collective n’a pas seulement été arrachée pour les pilotes mais aussi pour le personnel de cabine. Cette victoire était aussi présente à Aviapartner où des contrats partiels ont été transformés en temps plein et des intérimaires reçoivent un contrat fixe et 3 millions d’euros sont investis dans du matériel. Dans beaucoup de lieux de travail, la frustration est telle que des confrontations soudaines et très dures peuvent arriver. Il est caractéristique que celui qui tient bon obtient ce qu’il veut.
Il y a moins de succès lors des actions généralisées où l’initiative ne vient pas d’en bas, pas du lieu de travail, mais d’en haut, de l’appareil syndical. Là, il est apparemment impossible de s’accorder ni entre syndicats, ni entre régionales, ni entre centrales professionnelles. De plus, on commence à en avoir marre sur les lieux de travail de toujours devoir attendre le sommet, puis soudainement d’avoir des mots d’ordre sans la moindre consultation et, lorsque l’action est mise en branle, de devoir tirer le frein à main sans la moindre idée du résultat et évidemment sans la moindre consultation.
A la fin des manifestations du 2 octobre et dans les jours après, nous n’avons rien entendu concernant de nouvelles actions. Le comité fédéral de la FGTB a décidé qu’à l’approche du 26 octobre, un processus de discussion serait initié dans toutes les instances, tant dans les régionales que dans les centrales. C’est positif : ainsi les militants peuvent être impliqués et il est possible d’aborder les discussions sur un programme avec lequel nous pouvons aborder nos collègues et les convaincre. Mais il reste entre temps évident que nous n’allons pas arracher nos revendications en le demandant gentiment à l’un ou l’autre gouvernement. Il faut être honnête et clair : il faudra lutter.
Cet automne, un nouvel Accord interprofessionnel (AIP) sera discuté. C’est un moment idéal pour vraiment mettre en route la lutte pour les 14 euros de l’heure, pas comme une lutte pour un futur lointain, mais comme quelque chose dont les travailleurs et leurs familles ont besoin dans l’immédiat. Si le salaire minimum n’est augmenté qu’au rythme des derniers AIP, cela peut encore durer 30 ans avant d’atteindre les 14 euros de l’heure. Le mieux serait d’immédiatement aller vers un vrai salaire fédéral minimum sans échappatoire.
La division pourrait menacer nos actions et nos revendications. En effet, la description des professions lourdes est, par exemple, traitée séparément pour les agents de la fonction publique et le secteur privé. Ne nous laissons pas prendre à ce jeu. Nous devons nous préparer à cette bataille. Cela se fait de préférence en continuant à augmenter la pression jusqu’au dernier jour de ce gouvernement, non pas en attendant que le gouvernement s’efface de lui-même et en criant de temps à autre, nous devons constamment défier la politique dans la rue et dans les entreprises afin que nos besoins soient centraux.
La proposition de la FGTB de Charleroi & Sud-Hainaut d’organiser encore une grève générale avant la fin de l’année n’a pas été retenue au comité fédéral de la FGTB, mais il y aurait quand même une journée d’action avant le 15 décembre. Ce que cela va devenir n’est pas encore clair. Mais, apparemment, chaque régionale et chaque centrale serait libre de la manière de mettre les choses en place. Quelque part en mars, il y aurait une manifestation syndicale européenne à Bruxelles pour plus de démocratie et concernant les pensions. Nous ne savons pas encore ce que cela va vraiment devenir. Pourtant, les élections ont démontré que le gouvernement est affaibli et peut être battu.
Mais cela exigerait une campagne nationale des syndicats, avec des formations de militants, des réunions du personnel, des concentrations militantes, des manifs provinciales ou nationales et des grèves à tour de rôle aboutissant à une grève générale nationale. Nous ne savons pas ce qui s’est passé exactement, mais l’annonce dans la presse que le secrétaire fédéral FGTB Tamellini la FGTB voudrait déposer une liste de gauche en mai 2019 pour mettre pression sur le PS, le PTB et ECOLO en faveur d’une coalition progressiste et puis la négation par Vertenueil illustre que, pour l’instant, à la FGTB, ils ne savent plus quoi faire.
Pourrons nous voter en mai prochain pour un gouvernement de la ‘‘taxe des millionnaires’’
Nous pouvons pourtant en mai de l’année prochaine pour un gouvernement de la ‘‘taxe des millionnaires’’, du moins si les syndicats réalisent que seul un appel de vote clair pour le PTB peut éviter une coalition de droite. En nous renvoyant de nouveau en direction de la social-démocratie ou même des verts, non seulement la base risque de décrocher encore plus, mais nous courrons alors le risque que ces partis préfèrent dépanner la droite plutôt que de mettre sur pied un gouvernement de gauche.
Mais le PTB aussi a une responsabilité. Tout d’abord, il est loin d’être sûr qu’en Flandre il obtienne son premier élu. Pour cela, il est nécessaire de réunir toutes les forces de gauche. Le PSL l’a déjà suggéré de nombreuses fois au PTB, a offert de contribuer de prendre cette initiative, mais a été rejeté à chaque fois jusqu’ici. C’est un luxe que le PTB, nous du PSL, les syndicats et les autres forces de gauche ne peuvent plus se permettre. Si nous laissons de nouveau l’initiative à la droite, nous et notre classe prendront une vraie raclée. Le PTB ferait d’ailleurs bien de ne pas attendre jusqu’au jour des élections mais de prendre le plus vite possible, sur base de son résultat aux élections communales, une initiative pour mettre autour de la table autant d’activistes possibles sur le plan local et régional pour préparer ce combat ensemble.
La justice fiscale est quelque chose sur lequel les syndicats reviennent régulièrement et un souhait sur lequel reviennent des couches larges dans la société. C’est sur ça que le PTB répond avec sa taxe des millionnaires. Evidemment, le PTB sera de nouveau, comme chacun qui va à l’encontre des intérêts de l’élite dominante, être mis de côté comme irréaliste. On va référer au danger de la fuite des capitaux. Le PTB essaye à chaque fois d’y répondre en faisant référence à l’Impôt sur la fortune en France (ISF).
Il s’agissait d’un impôt sur la fortune beaucoup plus limité et avec nombre d’exceptions qui rapportait chaque année entre 4 et 5 milliards d’euros et est remplacé depuis le début de cette année par un impôt sur la fortune immobilière (ISI) qui n’est plus applicable qu’à l’immobilier. Dans sa forme originale, argumente le PTB, elle n’entraînait qu’une fuite de capitaux négligeable de 0,3%, ce qui fait conclure au PTB que ce serait également faisable dans le cadre de la taxe des millionnaires. Mais l’ISF était très restreint, avec une recette très limitée, presque un coup dans l’eau. Ce que le PTB propose devrait rapporter, à juste titre, 9 milliards d’euros dans une économie 6 fois plus petite que celle de la France. En France, cela représenterait 54 milliards d’euros, environ 12 fois ce que rapportait l’ISF.
L’ISF a été à l’époque en 1981 introduit par le gouvernement Mitterrand qui a déjà été cité comme un exemple par Raoul Hedebouw à Manifiesta. Parallèlement, Mitterrand avait augmenté le salaire minimum de 10%, introduit une allocation familiale et un 15e mois, la pension à 60 ans, et 5 grandes entreprises et des banques ont été nationalisées. Ce qui a suivi, c’était des lock-out patronaux et des riches qui traversaient la frontière suisse avec des valises pleines d’argent. Mitterrand a cédé par après et son gouvernement a appliqué une politique d’austérité dure avec entre autres l’abolition de l’indexation des salaires. Cela a conduit à une énorme démoralisation.
La leçon que nous pouvons en tirer n’est pas de laisser tomber la taxe des millionnaires, mais qu’une telle mesure exige un programme de mesures socialistes avec entre autre le non-paiement des dettes publiques, la nationalisation des banques et l’usage de l’arme de la nationalisation contre la contre-offensive patronale inévitable.
Les élections de mai tombent au même moment que les élections européennes. Pour celles-ci, Mélenchon a pris l’initiative d’un mouvement ‘‘maintenant le peuple’’ qui s’oppose à l’Europe des entreprises et plaide pour casser les traités qui tiennent la population européenne dans une camisole de force austéritaire. Ce mouvement est entre-temps soutenu par La France Insoumise, Podemos en Espagne, le Bloc de gauche portugais, l’Alliance rouge verte danoise, le parti de gauche suédois et l’Alliance de gauche en Finlande.
Le mouvement veut être une collaboration progressiste reposant sur la démocratie et la solidarité contre le dumping social et pour des droits sociaux garantis. Ils plaident pour la justice fiscale et un système financier équilibré par le contrôle public et le droit à la propriété publique du secteur bancaire. Il veut aussi des investissements publics dans l’énergie renouvelable et la technologie durable. Elle rejette les accords commerciaux et les tribunaux d’arbitrage privés, l’Europe-forteresse et la militarisation de l’Europe.
Bien que le PSL aurait préféré un rejet plus explicite de l’Europe du capital et un plaidoyer explicite pour une fédération socialiste volontaire en Europe, nous estimons qu’il s’agit d’un pas en avant important en Europe et, jusqu’à un certain point une réponse sur ce qui s’est passé avec Syriza lorsque la Grèce a été financièrement asphyxiée par la troïka et que le gouvernement avait hélas cédé.
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85 riches possèdent autant que la moitié de l’Humanité !
Il nous faut un autre système!
En ce début d’année, le premier ministre Di Rupo (PS) n’a cessé de multiplier les réunions de famille. Forum économique de Davos, Cercle de Wallonie,… Son message est clair : selon lui, ‘‘la Belgique est sur la bonne voie’’. Mais qu’est-ce que cela peut bien vouloir dire dans un pays sans croissance et où les maigres emplois créés ne permettent plus depuis longtemps de compenser les fermetures et destructions massives d’emploi ?!
Par Baptiste (Nivelles)
Il suffit de savoir à qui ce discours est adressé : aux fortunés, au patronat et à leurs plus puissants défenseurs. Se présentant comme étant leur ‘‘humble serviteur’’, le Premier ministre s’efforce de maintenir les privilèges des nantis en faisant payer la crise aux travailleurs et à leur famille, car après tout ‘‘ce sont les entrepreneurs qui sont à l’origine du bien-être de la population’’. Et peu importe le fait que nous créons les richesses par notre travail, quelque part nous ne faisons que profiter du système, et en particulier les bénéficiaires d’allocations bien entendu…
Ce sont pourtant ces politiques néolibérales qui ont créé un fossé toujours plus grand entre riches et pauvres, alors que jamais dans l’histoire de l’humanité il n’y a eu autant de richesses et de possibilités technologiques. Ces richesses permettraient à chacun d’avoir accès à des conditions de vie décentes, mais la réalité est tout autre.
De la précarité à la pauvreté
Pour 99% de la population, le bilan n’est pas folichon : austérité budgétaire tous azimuts, gel des salaires, réforme des prépensions, dégressivité accrue des allocations de chômage,… Pour beaucoup de ménages, notamment quand il y a une perte d’emploi, la route vers la pauvreté est de plus en plus courte. La réforme du chômage de 2012 prévoyait une baisse de 25% du montant des allocations, et à cela s’ajoute une augmentation des sanctions et l’exclusion des allocations d’insertion d’environ 55.000 personnes le 1er janvier 2015. En 2010, les indemnités de chômage ne représentaient déjà plus que 27% du salaire annuel brut moyen, contre encore 42% 20 ans plus tôt. Nul doute que la situation s’est encore dégradée.
La Belgique : un paradis fiscal sans île, mais bien rentable
Par contre, pour les patrons et autres nantis à la recherche de refuge fiscal, la Belgique est ‘‘the place to be’’, grâce à l’absence d’impôt sur la fortune et parfois carrément sur les bénéfices réalisés par les entreprises. Pourtant, le taux d’imposition des sociétés est théoriquement de 33,99%. Mais dans les faits, en intégrant les divers cadeaux offerts au patronat, intérêts notionnels en tête, ce taux n’avoisine plus que les 20% depuis 2008. Pour l’année 2012, on estime que la déduction des intérêts notionnels a permis aux entreprises en Belgique d’exempter d’impôt quelque 20,4 milliards € de bénéfices engrangés.
La baisse du taux effectif est quasi continuelle depuis 2001, et ce n’est plus un secret pour personne, ce sont les plus puissantes multinationales présentes en Belgique qui payent le moins sur des bénéfices souvent gigantesques : ArcelorMittal, Electrabel, Janssen Pharmaceutica, ABInbev,…
À qui ce système profite-t-il ?
En Belgique, ce pays où tout va bien, environ 15% de la population vit sous le seuil de pauvreté tandis qu’en même temps les 20% les plus riches possèdent 61% du patrimoine financier.
Pour nous, les factures ne font qu’augmenter sous la pression de plans d’austérité se chiffrant à chaque fois à plusieurs milliards ; pour eux, tout est mis en place pour préserver les milliards de bénéfices. Après un à trois ans de chômage, un chef de ménage devra s’en sortir avec 1.090,70€/mois, un cohabitant avec 483,86 €/mois ; au même moment, les patrons d’entreprises publiques se voient subir l’affront de recevoir des rémunérations annuelles plafonnées à 250.000 €… Alors, qui profite du système : ceux qui tentent de survivre avec des moyens à en manger des cailloux ou ceux qui vivent grassement à ne plus savoir que faire de leur pognon ?
Lors de son discours de rentrée, la secrétaire générale de la FGTB Anne Demelenne a déclaré vouloir le retrait de la réforme du chômage au vu de la catastrophe sociale imminente. Des actions seraient à prévoir d’ici les élections du 25 mai, pour ‘‘ faire passer la revendication à tous les partis traditionnels’’. Nous avons besoin d’un plan d’action pour lutter contre cette escroquerie néolibérale, mais jouer le rôle de l’aiguillon pour des partis qui ne nous représentent pas n’est plus viable. De plus, nous avons besoin d’un parti politique qui représente nos intérêts !
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Action de solidarité contre les répressions en Russie
Lundi 27 janvier 2014 – 12h30 – Bruxelles – Rond-point Schuman
A la veille du lancement des Jeux Olympiques d’Hiver de Sotchi, déjà considérés par beaucoup comme des jeux de la honte, l’Union Européenne reçoit dans quelques jours la Russie dans le cadre d’un sommet bisannuel. La LCR (Ligue Communiste Révolutionnaire), les JAC (Jeunes Anticapitalistes), le PSL (Parti Socialiste de Lutte) et EGA (Etudiants de Gauche Actifs) appellent à manifester notre solidarité contre les répressions en Russie dans le cadre d’une action à l’initiative d’associations LGBTQI (1) et d’ONG belges et russes.
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La Russie, un exemple de répressions
Le régime autoritaire de Vladimir Poutine est bien décidé à asseoir son pouvoir en menant une bataille ferme contre les opposants politiques et en instrumentalisant les minorités. Il a adopté dernièrement une série de lois répressives et liberticides.
La loi votée en 2012, relative aux « agents étrangers » dispose que toute organisation qui reçoit des fonds de l’étranger doit s’enregistrer en tant qu’« organisation remplissant les fonctions d’un agent étranger » si elle prend part à des « activités politiques ». Cette loi vise à étouffer et rendre illégales de nombreuses organisations politiques et ONG par le biais de lourdes amendes et procès. Par ailleurs, et malgré l’amnistie prononcée dernièrement à l’occasion des 20 ans de la Constitution, la plupart des personnes inculpées dans le cadre de « l’affaire du 6 mai » reste en prison, notamment les activistes de gauche Alexeï Gaskarov et Sergueï Oudalstov.
Les personnes LGBTQI et leurs alliés ne vivent plus en sécurité depuis que la Douma russe a voté plusieurs lois homophobes visant à « protéger les mineurs de la propagande homosexuelle » ! Les organisations qui luttent contre les discriminations envers les personnes LGBTQI sont devenues illégales, trainées en justice et reçoivent de lourdes amendes. Ces lois ont accru l’homophobie et on ne compte plus aujourd’hui les nombreuses agressions contre les personnes LGBTQI et leurs défenseurs.
Les populations migrantes, internes (Caucase du Nord) et externes (ex-républiques soviétiques principalement), sont elles aussi en danger. Elles ne sont plus seulement la cible d’attaques de la part de groupes d’extrême-droite mais doivent également aujourd’hui subir la colère du citoyen lambda désemparé, avec la complicité des autorités russes qui alimentent la machine xénophobe en instrumentalisant les travailleurs migrants à des fins politiques et électoralistes. Pendant ce temps, Poutine se paie des jeux olympiques d’hiver de luxe sur le compte du contribuable et à la sueur du front de milliers de ces travailleurs migrants surexploités. Avec les récentes attaques terroristes dans la ville de Volgograd, dont le régime de Poutine est le seul responsable du fait de sa gestion du conflit dans le Nord Caucase, le climat de suspicion et la « caucasophobie » ambiante risquent de s’aggraver. Et il y a fort à parier que les populations musulmanes du Caucase paieront le prix fort en termes de répression et de mesures sécuritaires…
Après une période de croissance économique dont la récente classe moyenne a pu bénéficier en voyant une partie de ses revenus augmenter, ce qui a eu pour effet de booster la consommation interne, les investissements et la croissance ralentissent. A la crise économique, Poutine utilise les mêmes recettes européennes : les travailleurs et leurs familles paient la facture. Des coupes budgétaires drastiques sont opérées dans les services publics, dans les soins de santé actuellement, pendant que le budget de la défense représente une très grosse part des dépenses publiques.
L’Union Européenne, un exemple éternel de démocratie réelle ?
Comme en Russie, l’Union Européenne, derrière son masque de démocratie, cache en fait un programme de casse sociale et de lois réactionnaires comme réponse à la crise. Les pays de l’Union européenne traitent de manière inhumaine les populations migrantes par des politiques de traques, d’enfermement et de déportation quand celles-ci n’ont pas péri noyées dans la Méditerranée. En Espagne, un projet de loi pour restreindre le droit des femmes à l’avortement est discuté dans les assemblées nationales. En Belgique, alors qu’il y a une grande pénurie d’offres d’emploi, le droit aux allocations de chômage a été fortement restreint. Les droits à la pension dans de nombreux pays on été eux aussi attaqués. Les salaires dans les services publics ont été diminués drastiquement dans les pays les plus touchés par la crise comme en Grèce, au Portugal, en Roumanie.
Dans ce contexte, on comprend qu’il ne soit pas question des droits des LGBTQI et des minorités ethniques, du bien-être des peuples de Russie et d’Europe ou encore de la liberté d’expression lors des sommets bisannuels UE-Russie. Ce dont il s’agit, c’est bien de conclure des accords économiques au profit des 1% les plus riches. La Russie et l’Union Européenne sont au moins d’accord sur un même point : faire payer la crise du capitalisme par les 99% de la population.
Il est temps de résister au recul de nos droits fondamentaux et à ces vagues d’austérité sociales. Manifestons notre solidarité envers tous ceux qui luttent en Russie et ailleurs POUR :
- la liberté politique et syndicale
- la libération des opposants politiques
- l’arrêt des déportations des sans-papiers
- le retrait immédiat des lois homophobes
- l’égalité des droits entre les hétéros et les LGBTQI
- le droit pour toutes les femmes de disposer de leur corps
- la cessation immédiate de tous les plans d’austérité
- des services publics gratuits et de qualité
- des emplois pour tous rémunérés à hauteur du coût réel de la vie
(1)Lesbiennes, Gays, Bisexuels, Transgenres, Queers, Intersexes. Pour plus d’informations sur les personnes transgenres et intersexes, rendez-vous sur le site web de l’association « Genres Pluriels » : http://www.genrespluriels.be
(2)Ou affaire « bolotnoe », du nom de la place où, le 6 mai 2012, une manifestation qui s’inscrivait dans le cadre du mouvement démocratique né de la contestation des élections frauduleuses de décembre 2011 et mars 2012 dégénérait suite à une provocation de la police. Cet événement a servi de prétexte au régime pour lancer une série d’arrestations et de procès sous des accusations montées de toute pièce (telles que « violences à l’égard de policiers » et « activité antiétatique »), semant ainsi la peur au sein des opposants de tout bord et muselant le mouvement.
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Ce n’est pas à nous de payer pour la crise du capitalisme !
Tract du PSL pour le blocage du sommet européen organisé par l’Alliance D19-20
L’Alliance D19-20 est une alliance inédite entre producteurs de lait et syndicalistes en vue du blocage du prochain sommet européen. Aujourd’hui 18 décembre, un meeting se tiendra à Bruxelles au sujet de l’impact des politiques d’austérité et des modes de luttes contre celles-ci. Demain, des actions de blocage du sommet européen prendront place à Bruxelles. Voici ci-dessous le tract prévu par le PSL pour ces occasions.
Tract du PSL // Tract en version PDF
Ce n’est pas à nous de payer pour la crise du capitalisme !
Tout comme l’alliance D19-20, le Parti Socialiste de Lutte (PSL) est convaincu qu’il faut combattre l’austérité sous toutes ses formes. Comment et avec quelle orientation ? Discutons-en afin d’envisager les prochains pas à poser.
‘‘Pour ne pas payer l’argent perdu par les banques’’
Depuis 2008, la Belgique a consacré 35 milliards d’euros pour éponger les dettes du capitalisme-casino. Cet endettement des autorités publiques est maintenant utilisé pour justifier les mesures d’austérité ! Pendant ce temps, les produits financiers dérivés ont dépassé le niveau d’avant la crise des subprimes !
Le secteur financier doit être retiré des mains des capitalistes. Une seule banque publique dans un océan de géants financier privés ou la scission des activités bancaires de dépôts et d’affaires sont des mesures insuffisantes. Seule la nationalisation de tout le secteur financier sous contrôle et gestion démocratiques permettrait de libérer les moyens nécessaires pour satisfaire les besoins de la population.
‘‘Pour nos emplois et nos acquis sociaux’’
Statuts, salaires, pensions, allocations de chômage, fonction publique,… tandis que les licenciements pleuvent dans le privé, les autorités belges et européennes cassent nos acquis sociaux.
Pourquoi laisser les équipements et les travailleurs d’ArcelorMittal, Ford ou Caterpillar finir à la casse ? Revendiquons la nationalisation des entreprises qui opèrent des licenciements collectifs ou des fermetures, sous le contrôle des travailleurs. Nous en avons besoin pour faire face aux innombrables défis sociaux, dans le cadre d’un plan d’investissements publics massifs dans l’infrastructure scolaire, les soins de santé, les transports en communs, les logements sociaux,… et pour créer des emplois de qualité et socialement utiles. Contre le chômage massif et les temps partiels aux salaires partiels, il faut réduire le temps de travail à 32h/semaine, sans perte de salaire ni augmentation des cadences et avec embauches compensatoires.
‘‘Pour notre souveraineté alimentaire’’
En dix ans, la Belgique a perdu plus de 55% de ses producteurs de lait. Le modèle d’agriculture que l’Union européenne nous propose, avec le Traité transatlantique notamment, est basé sur la disparition progressive des fermes pour ouvrir la voie à l’agro-business, à de gigantesques infrastructures qui sacrifieront sur l’autel du profit la qualité de notre alimentation comme celle de l’emploi. Refusons que le modèle Monsanto ne devienne notre avenir ! Une alimentation saine, c’est une alimentation protégée de la logique de profit !
‘‘Pour une démocratie réelle’’
La ‘‘démocratie’’ actuelle, c’est la dictature des marchés. Le TSCG, le Traité d’austérité, retire aux Parlements le droit de déterminer leurs orientations budgétaires et permettra aux institutions européennes d’automatiquement sanctionner les États-membres.
La démocratie réelle n’existera pas tant que les principaux leviers de l’économie (les secteurs-clés tels que la sidérurgie, la finance, l’énergie, la grande distribution,…) restent sous contrôle du privé, tant que ceux qui produisent les richesses ne décideront pas de la manière dont la production s’effectuera et à quelles fins.
‘‘Pour notre avenir et notre environnement’’
Les quelques petites avancées obtenues en termes de normes environnementales peuvent être vite balayées en tant que ‘‘freins à la libre concurrence’’. Face au péril écologique, nous avons besoin d’un audacieux plan de réorientation de l’économie vers les énergies renouvelables, une production respectueuse de l’environnement,… Un tel plan n’est possible que si la collectivité possède les principaux leviers de l’économie.
‘‘Battons-nous ensemble !’’
Il nous faut un syndicalisme de combat ! Nous devons résolument sortir de la logique des manifestations-ballades sans lendemain pour construire un rapport de forces à l’aide d’un véritable plan d’action offensif allant crescendo et avec grève(s) générale(s). Nous devons lutter pour chaque millimètre et ne rien céder.
Mais soyons francs, aucune des revendications mentionnées ci-dessus n’est réalisable sous ce système capitaliste. Il faut lier notre lutte à la nécessité d’une société alternative, réellement démocratique et socialiste.
Site de l’Alliance D19-20
Meeting
Informations pratiques
Blocages D19-20, rdv 7h
- Bld de L’Impératrice-Arenberg (à proximité de la Gare Centrale)
- Botanique – Rue Royal (à proximité de Botanique)
- Rue Bélliard – Av des Arts (à proximité de Trône ou Arts-loi)
- Avenue d’Auderghem – Rue Belliard (à proximité de Schuman)
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‘‘Formidable’’ pour eux – ‘‘fort minable’’ pour nous
‘‘Tout va bien’’ selon Di Rupo… Qu’il regarde un peu du côté des travailleurs !
Le discours de rentrée du Premier ministre, dernier discours avant les élections, visait à nous convaincre que ‘‘nous’’ sommes à nouveau sur la bonne voie et que l’action du gouvernement a permis de prévenir le pire. L’offensive avait commencé durant l’été, avec l’énumération de toutes les ‘‘bonnes actions’’ du gouvernement Di Rupo. Les choses vont maintenant plus loin. Sans doute espèrent-ils poursuivre sur cette lancée jusqu’aux élections de mai 2014.
Edito de l’édition de novembre de Lutte Socialiste, par Els Deschoemacker
Le grand mérite de cette équipe gouvernementale serait d’avoir terrassé l’atmosphère de crise et d’avoir favorisé un retour progressif de la confiance. L’affirmation a été soutenue par les meilleurs sondages pour les partis au pouvoir depuis les débuts du gouvernement. Di Rupo pourrait maintenant même compter sur l’approbation de 60% des Flamands.
Et c’est un fait que si on compare notre rentrée politique à celles des Pays-Bas ou de France – où des mesures d’austérité de plusieurs milliards d’euros sont annoncées dans les pensions, les soins de santé,… avec les inquiétudes et l’instabilité que cela comporte -, ce gouvernement a su appliquer un rythme d’austérité plus progressif et éviter une baisse brutale du pouvoir d’achat. La fameuse ‘‘recette belge’’ dont on parle désormais systématiquement est présentée comme une alternative à suivre.
Cette recette a été concoctée par la nécessité. En effet, le gouvernement Di Rupo ne disposait pas, lors de sa prise de fonction, d’une autorité politique suffisante pour faire autrement, sachant qu’il valait mieux ne pas jeter de l’huile sur le feu de la crise politique et avec la crainte de voir s’éveiller un ennemi beaucoup plus dangereux, sous la forme d’un mouvement ouvrier radical. La sagesse était de ne pas en rajouter.
Tout a été fait pour dévier l’attention des problèmes réels. Les Diables Rouges et Stromae ont même été récupérés sans vergogne. Tout est soudainement ‘‘formidable’’.
Mais ces bonnes nouvelles ont un goût très amer en considérant les problèmes sociaux quotidiens qui restent en suspens, et qui n’ont fait que croître sous ce gouvernement. Que ressentent les travailleurs de Ford à Genk ou d’ArcelorMittal, confrontés avec leurs collègues d’autres entreprises à un plongeon dans la misère sociale, au point même de choisir de s’ôter la vie ? Qu’en est-il des habitants de quartiers comme Meulenberg à Houthalen, où aucun emploi n’est disponible pour 27% des jeunes ? La Belgique comprend 110.000 indépendants qui doivent parvenir à joindre les deux bouts avec seulement 833 euros par mois. N’est-ce pas une honte qu’un enfant sur dix naisse dans la pauvreté en Flandre, un sur quatre en Wallonie et, pire encore, quatre sur dix à Bruxelles, soit près de la moitié de tous les enfants ?! ‘‘Fort minable’’? Oui !
La réalité, c’est que la ‘‘recette belge’’, faite d’austérité plutôt lente, mais régulière et de politique dite de relance basée sur la diminution des coûts de la main-d’œuvre à la suite de la spirale européenne infernale, développe lentement mais sûrement la pauvreté, l’insécurité et le chômage. L’austérité ‘‘douce’’, ce sont des conditions de vie dures.
Le mouvement des travailleurs ne doit pas se laisser endormir par le chantage selon lequel la seule alternative à ce gouvernement est un autre encore plus à droite avec la N-VA. Il est vrai que cette formule-là ne ferait que diviser davantage la population active et accélérer le rythme des attaques contre nos conquêtes sociales. Nous ne devons pas nous limiter à un choix entre une politique antisociale et une politique très antisociale. La seule solution dans l’intérêt des travailleurs ne peut venir que du camp des travailleurs eux-mêmes. L’initiative de la régionale de la FGTB de Charleroi & Sud-Hainaut appelant au développement d’une riposte de gauche contre cette politique peut activement mobiliser et réunir les différentes tendances de gauche, mais aussi la classe des travailleurs elle-même. Cela mérite tout le soutien possible!
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Comment le racisme pourrait-il être relatif?
La présidente du CPAS de la ville d’Anvers, Liesbeth Homans (N-VA), a déclaré dans une interview que le racisme est un terme relatif souvent utilisé pour couvrir un échec individuel. Il n’est pas rare de voir ainsi des néolibéraux faire porter la responsabilité des problèmes sociaux précisément aux victimes de ces problèmes.
Leur raisonnement est simple : celui qui a difficile à trouver un travail, un logement décent,… l’a bien cherché. En poussant à peine cette logique un peu plus loin, les chômeurs deviennent des paresseux confortablement couchés dans le hamac de la sécurité sociale. La N-VA devrait donc logiquement trouver que l’augmentation du chômage en Flandre au cours de l’année écoulée (+10%) est due à l’augmentation du nombre de paresseux… Ou est passé le ‘‘flamand qui bosse dur’’ cher à l’argumentaire de la N-VA ?
Aurions-nous donc sans nous en apercevoir obtenu l’égalité des chances à tel point que la réussite ou l’échec ne serait qu’une question individuelle et non pas de position sociale ? Plusieurs études, y compris l’enquête PISA (Programme international pour le suivi des acquis des élèves), ont pourtant constaté que l’enseignement est fortement inégalitaire en Belgique, l’écart est très grand entre les meilleurs et les pires résultats, une situation largement due au facteur déterminant de l’origine sociale. 10% des enfants d’origine pauvre obtiennent leur Certificat d’enseignement secondaire supérieur (CESS), contre 90% des enfants issus de familles à plus riche patrimoine.
La pauvreté est encore plus fréquente dans les populations d’origine marocaine et turque, qui comprennent des taux de pauvreté de plus de 50% en Belgique. Avec l’état actuel de notre enseignement, il est difficile pour les jeunes issus de ces communautés de sortir de la pauvreté. Le risque de sombrer dans le chômage est également plus élevé. En Flandre, un quart des immigrés d’origine extra- européenne sont au chômage. Même chez les immigrés hautement qualifiés, le taux de chômage est de plus de 20%, contre seulement 3% en moyenne. Les agences pour l’emploi préfèrent souvent des gens à la peau pas trop brune et avec un nom bien ‘‘belge’’.
Tout cela n’a rien à voir avec des problèmes individuels, mais tout avec un système dans lequel la discrimination est profondément ancrée. Ce n’est pas une question morale, mais la conséquence directe de la logique d’une société incapable d’assurer à chacun une vie décente et un bon avenir.
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A propos du parti – Nouvelles du PSL
Cette rubrique de socialisme.be vous propose des nouvelles de notre parti, de ses activités et initiatives,… Cette rubrique comprend donc divers courts rapports d’actions, des brèves de campagne, des appels pour des conférences, des rapports de réunion, ou encore de petits textes de nouveaux membres qui expliquent pourquoi ils ont rejoint notre parti.
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A noter dans votre agenda
- Jeu. 2 juillet. Anvers. Assemblée générale des membres du PSL avec propositions de campagne pour l’été.
- 4-7 juillet. Camp des Etudiants de Gauche Actifs.
- 22-26 juillet. Ecole d’été du CIO
- 26 juillet – 4 Août. Grèce. Camp d’été antifasciste de YRE (Youth Against Racism) et Zone Antinazie
- Juillet et août : Programme de formation marxiste des districts Hainaut-Namur et Liège-Luxembourg du PSL
- 26 octobre. Manifestation nationale contre les SAC
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Protestations syndicales
Lundi dernier, diverses manifestations ont pris place à Bruxelles dans le cadre d’une journée d’action et de grève des travailleurs du secteur public et d’une mobilisation contre le traité européen d’austérité (le TSCG). Des militants du PSL étaient bien entendu présent, dans le cadre de leur délégation syndicale ou pour diffuser notre matériel politique. Au final, nous avons vendu 38 exemplaire de notre mensuel Lutte Socialiste et fait un abonnement. Nico (de Liège) a été le meilleur vendeur (9 journaux), suivi de près par deux autres camarades liégeois, Tibaud et Robin, qui ont chacun diffusé 8 exemplaires.
L’été sur socialisme.be
Dès ce lundi, socialisme.be adoptera son rythme estival. Concrètement, cela signifie que le nombre de publications diminuera sensiblement. Cette rubrique des nouvelles du parti du dimanche paraîtra aussi moins régulièrement.
Edition d’été de Lutte Socialiste
Dans cette édition d’été de Lutte Socialiste, l’accent est bien entendu particulièrement mis sur nos campagnes jeunes, et plus particulièrement concernant les Sanctions Administratives Communales (SAC). Plus largement, partout dans le monde, nous voyons se développer les instruments de répression contre toute forme d’organisation de la résistance. Les exemples de la répression très brutale des mobilisations de masse en Turquie et au Brésil, que nous parcourrons aussi dans nos pages d’été, en sont à ce titre très révélateurs de l’état actuel de nos "démocraties" bourgeoises. Le dossier central du journal aborde d’ailleurs plus en profondeur le rôle de l’Etat et de la répression dans la société capitaliste.
D’autres thèmes sont encore abordés, comme l’antifascisme (en page 15), l’antisexisme (en page 7) et nous revenons aussi sur les mobilisations contre Monsanto (en page 14).
Dans nos pages politiques, vous pourrez trouver un rapport d’un débat organsié à Bruxelles dans le cadre de l’appel de la FGTB de Charleroi & Sud-Hainaut concernant la nécessité de construire une alternative anticapitaliste à la gauche du PS et d’Ecolo. Il s’agit aussi d’une manière de revenir sur la letre ouverte à la gauche que nous avons publiée le mois dernier. Une certaine attention est également consacrée à l’impact de la politique d’austérité au niveau communal. L’exemple d’Anvers (en page 2) est plus particulièrement abordé, mais comme nous le montrons avec l’exemple de Charleroi (en page 6), l’austérité et la politique antisociale ne sont pas réservées aux villes gérées par la N-VA. Avec le PS, on reste dans une approche qui criminalise les pauvres au lieu de s’en prendre à la pauvreté.
Sur le plan syndical, vous trouverez un article qui aborde la question suivante : la lutte de classe existe-t-elle toujours aujourd’hui? D’autres thèmes plus spécifiques sont aussi abordés, concernant ArcelorMittal et les transports en commun.
Aperçu du contenu :
- L’austérité, ça ne marche pas
- “Les suites de l’appel de la FGTB de Charleroi afin de construire un rassemblement de gauche en Belgique !” || L’austérité frappe les communes et les villes
- EDITO : Comment stopper les requins capitalistes ? || Après les aveux, changement de cap au FMI ? Hum hum…
- La lutte de classe existe toujours… mais comment la remporter ?
- ArcelorMittal : Tout ce qu’il y a à gagner, nous l’arracherons par la lutte – Aucune confiance envers les politiciens du capital ! || Pas de Fyra, mais un transport en commun gratuit et de qualité !
- Charleroi, exemple d’une politique socialiste ? || Turnhout : Protégeons notre maison des jeunes
- Tous unis contre le sexisme
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Aperçu du Meeting à Bruxelles :“Les suites de l’appel de la FGTB de Charleroi afin de construire un rassemblement de gauche en Belgique !”
La salle était comble ce 18 juin, une centaine de personnes étaient présentes pour participer à ce débat organisé dans le cadre des ‘‘Mardis politiques’’ du Garcia Lorca par ‘‘Alternatives à Bruxelles’’ (un collectif de sections de partis de gauche étrangers en Belgique : Izquierda Unida (Espagne), Rifondazione Comunista (Italie), Die Linke (Allemagne) et le Parti Socialiste Unifié (Maroc)), et par la fondation Joseph Jacquemotte.
Par Boris Malarme
Daniel Piron, secrétaire régional de la FGTB de Charleroi et Sud-Hainaut et Lahoucine Tazribine secrétaire permanent CNE-GNC dans le secteur privé, ont ouvert le débat, suivis par des orateurs de la gauche politique, Saïd Cherrid pour le Mouvement de Gauche, Anja Deschoemacker pour le PSL et Stephen Bouquin pour Rood! Voici un aperçu – non-exhaustif – de cette rencontre.
Daniel Piron a expliqué la démarche de l’appel de la FGTB de Charleroi. Pour celle-ci, il fallait faire quelque chose et ne pas se contenter de gérer les restructurations et les plans d’austérité. Après la grève générale du 30 janvier 2012, de nombreux militants sont montés à la tribune pour s’opposer au lien existant entre la FGTB et un PS qui “trahit” les travailleurs en appliquant l’austérité. Après débat dans le syndicat, cela a conduit à l’appel du 1er mai 2012 appelant à un rassemblement politique anticapitaliste à la gauche du PS et d’Ecolo. Après les élections communales, la régionale de la FGTB s’est réunie avec 8 formations politiques invitées et avec la CNE, la centrale des employés de la CSC, pour créer un espace de discussion entre organisations.
Le 27 avril de cette année, une journée de discussion sur ce thème avait rassemblé environ 400 personnes. Daniel Piron a expliqué que deux conclusions ressortaient de l’événement : une demande ‘‘d’exister avant les élections de 2014’’ et une demande d’étendre l’initiative parmi les travailleurs d’une part, à toutes les régions du pays d’autre part. C’est pourquoi la FGTB de Charleroi prépare une ‘‘plaquette’’ explicative qui sera distribuée en masse dans les entreprises à Charleroi et ailleurs.
Pour Lahoucine Tazribine, il faut premièrement défendre des alternatives aux restructurations, comme la réduction collective du temps de travail. Ensuite, aucun élu des partis traditionnels n’a répondu à l’opposition des syndicats au traité européen d’austérité (le TSCG), la CNE compte bien le rappeler aux prochaines élections. Un autre élément est la percée du PTB, qui a notamment maintenant deux conseillers communaux à Bruxelles, ce qui reste insuffisant. C’est pourquoi il faut soutenir l’appel de la FGTB de Charleroi pour la construction d’un relais politique large pour les luttes des travailleurs. Il a poursuivit en expliquant que le combat de la gauche est celui de l’Egalité, et qu’il faut développer l’unité des travailleurs au-delà des frontières linguistiques et construire un front commun. Il a encore rappelé l’attachement de la CNE à l’indépendance syndicale, ce qui signifie de ne pas avoir de partenaire privilégié et de rester un contre-pouvoir. Il a conclu en expliquant que Bruxelles-Hal-Vilvorde représente la moitié des 160.000 affiliés de la CNE, la centrale s’impliquera donc activement à Bruxelles pour construire autour de l’Appel de Charleroi.
Anja Deschoemacker, a développé que l’Appel de Charleroi est un fait historique en tant qu’expression du gouffre existant entre la basse syndicale et la social-démocratie. Quelle que soit la composition du prochain gouvernement, l’austérité sera approfondie et ce fossé est destiné à croître. Des figures telles que Hollande ou Di Rupo n’ont pas de solution face à la crise, aucun espace n’existe pour un programme néo-keynésien ou néo-réformiste. Appliquer un plan radical d’investissements publics pour répondre aux innombrables nécessités sociales (en termes de logement, d’enseignement, d’emploi, de soins de santé,…) exige de nationaliser les banques ainsi que les secteurs-clés de l’économie.
Après ces éléments de programme, Anja a également développé la proposition du PSL de combiner la campagne autour de la ‘‘plaquette’’ avec un deuxième meeting à Charleroi en octobre après une campagne dans les entreprises de tout le pays afin d’en faire un succès plus massif. Même si ce sont les luttes des travailleurs qui peuvent changer la société, obtenir des élus de gauche en 2014 peut constituer une aide précieuse pour donner plus d’impact aux idées de gauche, développer la conscience de classe et représenter un porte-voix pour les luttes. Comme le PTB est actuellement dans la meilleure position électorale, le PSL a proposé à l’ensemble des formations de gauche de se présenter ensemble aux élections de 2014, sous la forme de listes ‘‘PTB-Unité’’ ou quelque chose de similaire, avec une composition de liste qui soit motivante pour toutes les formations, avec une bonne coordination et la liberté de chaque composante de diffuser son matériel politique propre et d’expliquer les raisons de sa participation à de telles listes.
Ensuite ont suivi les orateurs du Mouvement de Gauche et de Rood!, avant que de nombreuses personnes interviennent de la salle pour exprimer leur soutien à l’Appel de Charleroi et leur volonté de s’engager à l’élargir. Parmi ceux-ci se trouvaient des militants et délégués du Setca et de la LBC à Bruxelles, ou encore des camarades de la gauche européenne comme Maïté Mola (Izquerdia Unida, vice-présidente du PGE, le Parti de la Gauche Européenne) et Giorgos Karatsioubanis (président de Syriza-Belgique). Le seul regret exprimé par la salle était le fait le PTB ait décliné l’invitation de participer au débat.
L’organisation d’un prochain débat à Bruxelles plus orienté vers des syndicalistes a été proposée par les orateurs syndicaux en guise de piste de conclusion, ainsi qu’un appel aux organisations à faire réussir l’initiative, face aux risques qu’ont pris la FGTB de Charleroi Sud-Hainaut et la CNE.
Le PSL a envoyé le 24 mai dernier une lettre ouverte pour l’unité de la gauche. Ce texte est disponible ici.
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StopSAC : Après TegenGAS en Flandre, la résistance s’organise du côté francophone
Quelques mois après le lancement de la plateforme TegenGAS en Flandre, c’est au tour de Bruxelles de mettre en place un outil militant pour résister collectivement aux Sanctions Administratives Communales (SAC). Celle-ci a vocation de réunir et d’organiser individus et organisations dans la lutte contre la criminalisation des jeunes et la répression des mouvements sociaux qui s’effectuent aussi par ces amendes.
Par Clément (Bruxelles), article issu de l’édition de juin de Lutte Socialiste
Manifestation : On ne tolère pas les SAC, ce samedi 29 juin, 14h, Gare Centrale (Bruxelles)
- StopSAC.be
La création d’une telle plateforme ne tombe pas du ciel, elle répond aux inquiétudes qui ont fait suite à divers événements ayant frappé des militants sociaux (après l’occupation du PS en soutien aux sans-papiers ; après le tabassage ‘‘pour leur propre sécurité’’ (dixit le shérif-bourgmestre Freddy Thielemans) des manifestants antifascistes à Trône en juin 2012 ; après l’arrestation de 145 opposants au banquet des riches d’un lobby patronal européen) mais également suite à la volonté affichée de la ministre Milquet de généraliser le protocole des SAC à toute la Belgique et de l’approfondir avec une baisse de l’âge minimal à 14 ans, une augmentation du montant maximal jusqu’à 350€ et la mise en place d’agents communaux en civil (les agents ‘‘constatateurs’’) chargés de traquer la fraude.
Mais dans un contexte de crise, pour les communes, les SAC sont aussi un moyen de renflouer leurs caisses sur le dos des habitants. Ainsi, un adjoint de Milquet a avoué que les SAC allaient ‘‘coûter 1 million d’euros mais en rapporter trois.’’ Enfin, les SAC, dans une période de contestation sociale accrue du système, sont aussi un moyen de mettre au pas des franges de la population qui se radicalisent : les jeunes et les militants seront les premiers visés. C’est dans ce contexte que se lance la plateforme StopSAC.
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Nouvelles de TegenGas
Gand : 120 participants à un débat sur les SAC
En Flandre, les SAC (Sanctions Administratives Communales) se disent GAS (Gemeentelijke Administratieve Sanctie). La campagne TegenGAS (contreSAC) avait organisé un débat le 16 mai dernier, en collaboration avec une quinzaine d’organisations gantoises. Le bourgmestre Daniël Termont (SP.a), alors qu’il se définit comme le bourgmestre le plus progressiste de Flandre, y a ouvertement défendu le recourt au SAC, contre Mathias Vander Hoogerstraete (Etudiants de Gauche Actifs et TegenGAS), Raf Jespers (Ligue des Droits de l’Homme) et Geert De Cock (Union des Jeunes avocats). La participation imposante, 120 personnes, illustre que le thème préoccupe beaucoup parmi la jeunesse gantoise.
Anvers : Attention aux poubelles !
Le 1er mai dernier, les fonctionnaires qui gèrent les SAC n’étaient pas en congé… Ce jour férié tombait au moment où les poubelles sont normalement ramassées, et plusieurs habitants n’y avaient pas prêté garde. Cela, l’administration communale l’avait bien anticipé, et du personnel supplémentaire a été envoyé dans les rues. Au moins 308 d’entre eux ont donc reçu une SAC pour avoir déposé leur poubelle à leur porte le bon jour, mais un jour férié.
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D’une réponse juridique à un mouvement de lutte politique
La première réunion (avant le lancement de cette plateforme) a tourné autour de la réponse à donner aux procédures SAC qui commençaient à tomber sur les militants antifascistes de l’action à Trône. Mais dès celle-ci, il paraissait clair que la lutte ne peut se limiter à un plan purement juridique, d’où l’organisation d’une manifestation de protestation le 18 février, qui a rassemblé plus de 200 participants. La seconde réunion fin février rassemblait déjà une quinzaine d’organisations qui cherchaient toutes un outil collectif pour lutter contre ces SAC. La plateforme est née à ce moment-là, même si la concrétisation plus ‘‘formelle’’ de celle-ci n’eut lieu qu’en mai.
L’objectif est de mener la lutte sur deux fronts : un front politique mais aussi un front juridique pour mettre en évidence les failles et les contradictions propres aux SAC. Une telle campagne juridique étant lourde en procédures et en frais (il y a 31 dossiers de contestations qui ont été introduits pour 40€ chacun), la nécessité de se regrouper est donc apparue comme évidente.
La résistance en ordre de bataille
Cette plateforme regroupe maintenant une dizaine d’organisations (les Jeunesses Ouvrières Chrétiennes, les Etudiants de Gauche Actifs et le Parti Socialiste de Lutte, l’Union syndicale étudiantes-étudiants FGTB, COMAC,…) qui comprennent la nécessité de ce combat car les SAC peuvent également déboucher sur une interdiction de lieux. Par exemple, dans le cas des ouvriers de Ford Genk qui faisaient grève et qui furent dégagés par les huissiers, il n’y aurait à l’avenir même plus besoin d’huissiers. Cela illustre clairement la volonté politique sous-jacente à ces mesures : mater les opposants.
Face à cela, ces organisations ont organisé un rassemblement suite à une interpellation du conseil communal de Bruxelles-ville le 13 mai dernier où, en dépit de la période d’examens et de la pluie, une bonne cinquantaine de personnes étaient présentes. Cette action n’était qu’un pas supplémentaire pour maintenir la pression. Tout l’été durant (dans les quartiers mais aussi dans les festivals), une campagne de mobilisation sur la question des SAC sera menée, avec l’objectif de frapper un grand coup à la rentrée.
Un appel a également été lancé vers de nombreuses délégations syndicales et organisations militantes pour élargir cette plateforme. La collaboration s’annonce fructueuse et si elle porte ses fruits, le shérif n’a qu’à bien se tenir.
Soyez solidaires de la campagne de contestation juridique, versez sur le compte de la plateforme (BE09 5230 8059 5557) votre contribution avec la mention ‘‘soutien StopSac’’ pour nous aider à faire face aux frais judiciaires.
A Ixelles ou ailleurs nous ne paierons pas leur SAC !
Samedi 27 avril, à Ixelles, la police a mené une journée coup de poing, garnissant ainsi les poches de la commune. En quelques heures, 148 amendes Sanctions Administratives Communales ont été distribuées par les ‘‘agents de la paix’’. La majorité pour jets de mégots, mais aussi pour avoir planté des fleurs dans l’espace public, promené un chien sans laisse ou encore avoir mis la musique trop fort en voiture… Ces sanctions criminalisent la population ixelloise, et ne visent, en réalité, qu’à alimenter les caisses des communes.
Par Laure (Ixelles)
Alors que les Ixellois font déjà les frais de plans d’austérité drastiques, la commune leur demande de se saigner davantage en faisant pleuvoir des SAC totalement arbitraires. Rappelons en effet que 3 jours auparavant était voté au conseil communal des coupes budgétaires brutales sabrant dans le personnel communal à hauteur de 1,2 million € pour 2013, supprimant 30 équivalents temps-pleins, fermant 2 restaurants communaux, diminuant de 50% les subventions aux associations, augmentant et créant de nouvelles taxes et redevances,…
Ces sanctions sont donc un pis-aller pour combler le trou budgétaire creusé par les banques, en allant chercher l’argent dans les poches des travailleurs.
Mais ce n’est pas tout, ces amendes sont utilisées pour criminaliser et réprimer ceux qui s’opposent à l’austérité puisque nombreux sont ceux qui ont déjà reçu des amendes pour avoir manifesté ou tracté sur la place publique ces derniers mois. Il s’agit donc très clairement d’une atteinte à la liberté d’expression et à la liberté de manifester ! Contre les plans d’austérité et contre les SAC à Ixelles, nous nous sommes mobilisés et nous continuerons à le faire. Nous ne pouvons tolérer cette criminalisation des jeunes et des travailleurs dans nos communes. Nous ne pouvons tolérer le musellement de la contestation. Nous ne pouvons tolérer de toujours devoir payer à travers les amendes, ou des mesures antisociales.
Ce qu’il nous faut, c’est une vraie réponse à nos problèmes : des emplois décents, des logements abordables, des services publics de qualité… c’est-à-dire une politique sociale qui s’en prend aux vrais responsables de la crise et pas à ses victimes !