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  • [INTERVIEW] Sexisme en milieu nocturne : « Ne pas lâcher le morceau »

    Entretien avec deux initiatrices du collectif « A nous la nuit »

    Fin 2021, le mouvement « Balance ton bar » a largement libéré la parole sur les agressions et les comportements sexistes dans les cafés. Les centaines de témoignages qui ont afflués ont posé la question : « Comment lutter concrètement contre le sexisme et les agressions dans le milieu festif ? » Nous en avons discuté avec deux initiatrices du collectif « À nous la nuit » récemment constitué à Liège.

    Propos recueillis par Clément (Liège)

    Pour commencer, ça a représenté quoi « Balance ton bar » ?

    Ce qu’on a vu, c’est une prise de conscience généralisée : il y a un sérieux problème avec le sexisme dans le monde de la nuit. On le savait déjà, mais ça a été rendu beaucoup plus flagrant. C’est d’ailleurs bien plus large. Le racisme, la LGBTQI+phobie et particulièrement la transphobie horrible qui existent dans les milieux de sortie sont des problèmes colossaux auxquels il faut répondre. On a d’ailleurs consciemment décidé de ne pas mettre de terme spécifiquement féministe dans « A nous la nuit » pour cette raison.

    Quel est le problème spécifique du sexisme dans les lieux de sortie ?

    En Belgique il n’y a pas d’études, mais il en existe ailleurs qui illustrent qu’on y retrouve toute la palette des comportements sexistes : du harcèlement verbal à la violence physique en passant par les agressions et le viol.

    Il y a des aspects plus spécifiques, comme la soumission chimique qui fait son retour en force. Est-ce qu’il y a plus de cas maintenant ? Les voit-on simplement plus parce que la parole se libère ? C’est probablement la deuxième option. Par exemple aux urgences, à Liège, c’est un phénomène récurrent et on sait qu’il ne se passe pas une semaine sans qu’ils rencontrent ce genre de cas, depuis très longtemps.

    Une autre spécificité, c’est que ça se passe dans des endroits où on sort, où on fait la fête, où on s’alcoolise, etc. La culpabilité chez les victimes de violences sexuelles est déjà un énorme problème, qui est renforcé par la culture du viol (« tu sors le soir, tu t’attendais à quoi ? », « tu portais une jupe »,…) et l’idée qu’en tant que fille, ta sécurité et ce qu’il t’arrive, c’est avant tout ton problème à toi toute seule. Le fait que tu sois dans un lieu de fête, qu’éventuellement tu es alcoolisée, et que tu te fais agresser, ça rajoute une grosse couche de culpabilité. Aller trouver la police ou un organisateur ou simplement demander de l’aide quand tu as un problème mais que tu es dans un état un peu second c’est vraiment, mais vraiment pas évident. Et ça ne devrait pas être comme ça.

    Comment répondre à ce problème ?

    On part du principe absolu que la responsabilité de créer un environnement où faire la fête sans avoir à craindre pour sa sécurité, cela repose en partie sur le public, mais aussi – et surtout – sur les organisateurs qui choisissent d’ouvrir un lieu au public. Et il y a un retard énorme là-dessus. Par exemple, la plupart des labels qui existent sont de vraies coquilles vides sans aucun suivi derrière.

    Impliquer les organisateurs signifie un minimum de sensibilisation et de formation des orga et des crews pour être aptes à réagir correctement. Plein d’outils de base en ligne existent, mais les vraies formations de qualité ont un coût et ce n’est pas toujours facile d’y avoir accès quand on veut. Par exemple, celle qu’on va suivre, on s’y est prises en novembre et il n’y avait de places qu’à la mi-février.

    À partir de là notre idée, c’est de pouvoir retourner vers certains lieux clés à Liège, pourvoir y mettre des choses en place, former d’autres personnes et créer une dynamique. Ça ne se fera pas en un jour d’autant que si à certains endroits il y a une ouverture pour ce genre d’initiative, il y en a clairement d’autre où, tant que leur boîte tourne, ils s’en foutent royalement de garantir un environnement un minimum safe. Mais de l’autre côté il y a un besoin criant de ça, d’où l’importance de la dynamique.

    L’idée se serait de pouvoir à terme avoir des personnes référentes formées dans un maximum de soirée et qui savent comment réagir

    Puis il faut aussi impliquer ton public collectivement. Tu peux faire ça en distribuant des flyers à l’entrée par exemple, et au minimum en ayant des affiches très visibles sur le fait que tel ou tel comportement n’est ni toléré, ni tolérable. Dans ce cadre, mettre au point une charte claire sur laquelle tu t’appuies, ça aide. Bref créer une culture collective « on fait attention » et où, en cas de problème, une victime sait qu’elle peut se tourner vers les orgas, ce qui n’arrive presque jamais aujourd’hui.

    Enfin à côté de la prévention, il y a le suivi après une agression. Pouvoir écouter et orienter immédiatement une victime, ça nécessite des moyens humains et matériels (un lieu prévu à cet effet) important. L’idée n’est évidemment pas de se substituer aux professionnels du secteur. Pour la prise en charge, la référence ça reste les CPVS (Centres pour la Prise en Charge des Violences Sexuelles). Ils font un boulot incroyable avec un personnel hyper formé. Après il n’y en a pas partout, on est bien contente qu’il y en ait un à Liège parce que par exemple, à Verviers, il n’y en a pas. Et si t’as besoin d’une prise en charge après un évènement aussi traumatisant, ton premier réflexe ne va pas être de te taper 30 bornes ou plus…

    Pour conclure ?

    Balance ton bar ça a été une explosion, avec ses forces et ses limites. Mais c’est une fois que l’explosion est passée, quand tu te demandes comment entamer un travail de fond et réellement changer les choses, que tu te rends compte à quel point la tâche est énorme, et qu’il ne faudra pas lâcher le morceau.

  • Violences sexistes et LGBTQI+phobes : c’est tout le système qui est coupable !

    Manifestation de jeudi dernier. Photo : Celia

    Jeudi dernier, près de 2000 personnes se sont mobilisées pour soutenir les victimes d’agressions sexuelles et de viols à Ixelles, pour qu’elles soient crues et prises au sérieux. Il a fallu 17 plaintes pour viol et agression sexuelle dans des bars d’Ixelles avant qu’une enquête ne soit ouverte. A Gand, une ado de 14 ans s’est suicidée faute de recevoir de l’aide après avoir subi un viol collectif : elle avait été mise sur liste d’attente. Ces cas ne font malheureusement pas exception.

    81% des femmes en Belgique ont été victimes d’agression sexuelle, ce chiffre est encore plus élevé pour les personnes LGBTQI+. Une victime sur 10 porte plainte, et seules 4% des plaintes aboutissent à une condamnation… Souvent, c’est la victime qui est jugée…

    Après des décennies de coupes budgétaires dans les soins de santé, la santé mentale, le secteur social, les logements sociaux, etc. lorsque l’on a besoin d’aide, on se retrouve sur liste d’attente pour des mois, parfois des années. Cette situation criminelle conduit à des féminicides et à des suicides.

    Combattre les violences sexistes exige d’arracher des investissements publics MASSIFS pour des services publics de qualité et des emplois décents. Attaquons-nous à la racine du problème : le capitalisme, un système qui sacrifie tout pour les profits des ultra-riches et qui a besoin de nous diviser sur base du sexisme, du racisme, de la LGBTQI+phobie,… pour continuer à nous exploiter. Organisons-nous pour construire un monde reposant sur l’épanouissement de chacun.e, et non sur les profits de quelques-un.e.s. Voilà ce que nous entendons par un “féminisme socialiste”.

    Rejoins la Campagne ROSA (Résistance contre l’Oppression, le Sexisme et l’Austérité) et participe à l’organisation des actions locales du 25 novembre, journée internationale de lutte contre les violences sexistes, ainsi qu’à la manif nationale de la plateforme Mirabal le 28 novembre à Bruxelles.

  • Mai de Campagne ROSA “Organiser la colère contre le sexisme et la transformer en action”

    Lors de l’excellent camp d’été de la Campagne ROSA et du PSL début juillet, Mai a expliqué, lors d’un des meetings, la manière dont les jeunes luttent contre le sexisme. En voici un résumé.

    Mai

    « Depuis cinq ans se déroule un débat permanent autour du harcèlement et de la violence sexistes. Le sexisme est présent partout au point de s’infiltrer dans nos relations et les aspects les plus privés de nos vies.

    « Cela peut donner l’impression que c’est un sujet apolitique. Mais la réalité nous prouve le contraire. Chaque exemple de violence sexiste souligne à quel point cette société est totalement incapable de changer cette réalité pour les femmes.

    « Récemment, une fille a été agressée et filmée par ses agresseurs, mais le juge a décidé qu’il n’y avait pas de véritable viol. Une autre jeune fille de 14 ans victime d’un viol collectif a cherché de l’aide, mais s’est retrouvée sur une liste d’attente : elle s’est suicidée. C’est horrible : les politiques d’austérité rendent inaccessible même l’aide la plus élémentaire.

    « Dans le débat public, l’accent est souvent mis sur les raisons pour lesquelles les garçons agissent ainsi. L’idée selon laquelle il faut « éduquer ton fils » est devenue virale sur les réseaux sociaux. Alors évidemment, les parents ont un rôle à jouer vis-à-vis de leurs enfants. Mais faire cela en toute efficacité dans une société intrinsèquement sexiste ?

    Le sexisme ne tombe pas du ciel

    « Les idées et les comportements sexistes ne sortent pas de nulle part. Ils sont transmis par la société. Ce n’est pas une excuse, très certainement pas, mais au contraire un élément clé pour comprendre les raisons de la taille du problème.

    « La pornification du corps féminin et des relations intimes à travers la publicité, le porno et les médias a, par exemple, un effet extrêmement négatif sur l’image que les jeunes ont d’eux-mêmes et des autres. Cela conduit à une normalisation de la violence. L’industrie publicitaire fait même du comportement sexiste une sorte de symbole de prestige. Avec les réseaux sociaux, cette image du corps et des relations est omniprésente dans la vie des jeunes, ce qui augmente la pression pour s’y identifier.

    « La santé mentale des jeunes est dans une situation désastreuse. Et ça s’est encore aggravé pendant la pandémie. Il y a, par exemple, eu une augmentation spectaculaire du nombre de demandes d’aide professionnelle pour des troubles alimentaires. Ce n’est pas un phénomène marginal. Le fait que des jeunes s’affament ou entretiennent une relation destructrice avec la nourriture pour tenter de retrouver leur estime d’eux-même est, dans bien des cas, le signe que ceux-ci succombent à la pression de la performance à tout prix de la société capitaliste.

    « En plus, les injonctions sont contradictoires : on doit être hyper sexy, mais les tenues sont vite jugées offensantes. Les jeunes en ont marre qu’on leur dise quoi porter en fonction de leur genre.

    « Les rôles genrés ne tombent pas du ciel. La femme est présentée comme vulnérable et celle qui prend soin des autres ; c’est l’expression du futur rôle économique réservé sous le capitalisme. Le code vestimentaire est une question sensible : quiconque a déjà été interpellé sur base de sa tenue sait à quel point cela est intimidant.

    « Les actions où garçons et filles se montrent solidaires et échangent, par exemple, leurs vêtements, les garçons arrivant en jupe à l’école, sont positives. Il s’agit de garder le contrôle de nos propres corps, rien de moins ! Cela vaut d’ailleurs également pour le voile.

    « Souvent, les écoles réagissent de manière conservatrice et répressive. Elles reflètent généralement la société, leur rôle étant de nous préparer à ce qui nous attend au travail. On y apprend à rester assis huit heures et à accepter toutes les règles. Nous sommes conditionnés pour fonctionner dans le cadre des relations de pouvoir du capitalisme. Beaucoup d’entre nous se retrouveront dans des emplois précaires, ce qui nous rendra vulnérables aux abus. L’indépendance financière est cruciale pour sortir d’une relation abusive, mais le capitalisme est incapable d’offrir cette indépendance à tout le monde.

    « De nombreux cas #MeToo ont notamment souligné à quel point la précarité de jeunes artistes au début de leur carrière a servi de « prestigieux » abuseurs. Ce qui est déterminant ici, ce sont les relations de pouvoir.

    « Il n’en a pas été différemment avec la sordide affaire du cercle étudiant élitiste de Louvain, Reuzegom. Lors d’un de leurs baptêmes étudiant, le seul étudiant à la peau foncée est décédé suite à de sévères tortures. Le cercle était déjà bien connu pour son sadisme, ses abus physiques et mentaux, son racisme et son sexisme brutal. Il s’agit d’un vivier de futurs PDG, juges, avocats,… ce qui en dit long sur le type de société dans laquelle nous vivons !

    « La lutte est absolument nécessaire. Sans les actions de la Campagne ROSA, le KVHV (cerclé étudiant catholique d’extrême droite) aurait pu s’en tirer avec son meeting qui avait offert la tribune au misogyne notoire Jeff Hoeyberghs. Le cercle a été suspendu deux mois. C’est une sanction limitée, mais cela les a poussés dans la défensive. L’extrême droite promeut un sexisme brutal dont l’objectif est de repousser les limites de ce qui est acceptable en termes de discrimination. Ce phénomène est ressenti dans toute la société, y compris dans les écoles. À Bruges, une militante de la Campagne ROSA nous a raconté comment un drapeau arc-en-ciel a été brûlé dans l’école par des élèves d’extrême droite.

    Agir sur le terrain

    « Heureusement, de nombreux jeunes veulent riposter. Les actions de la Campagne ROSA l’illustrent, mais aussi, les actions “jupe” dans diverses écoles, même si ces dernières restent symboliques et dépendent de l’initiative individuelle de quelques élèves. La Campagne ROSA entend organiser la colère et la transformer en un plan d’action pour construire un rapport de force capable d’arracher le changement.

    « La journée internationale contre la violence envers les femmes du 25 novembre est un moment important. Cela peut être l’occasion d’organiser des sittings dans les écoles. Plus jeunes, nous avions organisé dans mon école une action avec la Campagne ROSA pour que le sexisme y soit discuté. L’école avait son comité ROSA local, ouvert à toutes et tous. Nous avons préparé un sitting en faisant circuler une pétition contenant trois revendications: porter ce que l’on veut sans être harcelée ; disposer de protections hygiéniques gratuites dans les toilettes et bénéficier de véritables cours d’éducation sexuelle. Cela entre directement en confrontation avec le manque de moyens dans l’enseignement, avec d’élèves par classe et peu d’encadrement individuel. La Campagne ROSA veut convertir la colère concrète des jeunes dans leur environnement immédiat en une lutte à l’échelle de la société pour plus de moyens, notamment pour l’enseignement.

    « Il existe de nombreux autres types d’action possibles le 25 novembre : des actions symboliques, des sittings, des grèves scolaires, etc. Le succès dépendra du nombre de jeunes impliqués et de leur volonté de poursuivre vers la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes (8 mars) et les prochaines actions « Pride is a Protest » fin juin, le jour de l’anniversaire des émeutes de Stonewall. La Campagne ROSA veut créer quelques modèles combattifs dans un quelques écoles pour inspirer les jeunes d’ailleurs. »

  • Pourquoi le combat de Britney Spears bénéficie d’un si large écho

    Photo de Wikimedia Commons

    La méga star de la pop Britney Spears a témoigné pendant vingt-trois minutes lors d’une récente audience au tribunal et s’est exprimée avec force contre la mise sous tutelle utilisée pour limiter considérablement ses droits et l’accès à ses revenus. L’audience du mouvement #FreeBritney – les personnes qui estiment que le père de Spears retient la femme de 39 ans en otage – a récemment suscité l’intérêt du grand public après la diffusion d’un documentaire du New York Times, “Framing Britney Spears”. Plus important encore, l’attention portée à Britney Spears, une adulte légalement contrôlée par son père depuis 13 ans, indique l’évolution des attitudes sociales d’intolérance à l’égard de l’oppression dans tous les coins de la société.

    Par Ginger Jentzen

    Ces tutelles sont nommées par le tribunal sur une personne jugée incapable de prendre des décisions dans son propre intérêt. Ces arrangements peuvent être temporaires, mais certains défenseurs des droits des personnes handicapées soulignent qu’une fois qu’une tutelle est en place, tout changement ou toute résiliation peut nécessiter la présentation d’un seuil élevé de preuves, et qu’il appartient en fin de compte à un juge de décider.

    Dans son témoignage, Britney Spears a déclaré au juge : “J’aimerais pouvoir rester au téléphone avec vous pour toujours, car dès que je raccrocherai le téléphone, ce ne seront que des “non”… Je me sens si seule”. Ce sentiment est loin d’être étranger au tiers des femmes confrontées à la violence domestique au cours de leur vie, piégées par le manque de ressources. Ces femmes confrontées à la violence reconnaissent la manipulation de la carotte et du bâton et l’abus de pouvoir utilisés par l’équipe qui tient Spears en otage. Britney Spears est contrainte à une “enfance légalement construite”, comme l’a dit un commentateur, où “son père prend le genre de décisions que l’on attendrait d’un parent pour une adolescente”. Un juge a récemment rejeté l’appel de Spears visant à mettre fin à la mise sous tutelle. Cependant, l’institution financière impliquée, Bessemer Trust, s’est retirée de son rôle, et quelques jours plus tard, l’avocat de longue date de Spears, nommé par le tribunal, a démissionné, tous deux sous la pression.

    De la chérie de l’Amérique à la vache à lait de l’industrie

    Britney Spears finance l’ensemble de l’opération qui la maintient en captivité. Elle a témoigné que l’équipe l’a légalement forcée à partir en tournée et à accepter une résidence épuisante de cinq ans à Las Vegas. Elle a comparé la mise sous tutelle à un trafic d’êtres humains : pas d’intimité, pas de jours de congé, pas de prise en compte de son emploi du temps et paiement des ravisseurs pour la maintenir dans la servitude.

    Cette histoire démontre un degré médiéval de sexisme. Les personnes qui ont le pouvoir de décider quand la mise sous tutelle doit prendre fin sont les médecins et les avocats qui sont payés pour la superviser. Techniquement, son avocat désigné par le tribunal s’assure que ses tuteurs ne pillent pas ses biens, mais même son tarif horaire de 495 $ est payé à partir de sa résidence légale à Las Vegas. Son père est payé 130 000 dollars par an pour être « conservateur », mais en plus de cela, il a fait appel à un juge pour l’autoriser à recevoir 1,5 % des ventes brutes de la résidence de Las Vegas. On ne devrait pas confier sa santé mentale et son bien-être aux mêmes personnes qui profitent de sa carrière depuis des décennies. Dans son témoignage, elle a déclaré : “Je ne suis pas heureuse, je ne peux pas dormir, je suis tellement en colère que c’est insensé” et “ils devraient être en prison… mon corps précieux qui a travaillé pour mon père pendant les 13 dernières années, en essayant d’être si bon et joli, alors qu’il me fait travailler si dur…”.

    Cela a capté l’attention de millions de personnes parce que le sexisme est bien vivant dans cette société capitaliste et les faits auxquels nous sommes confrontés avec l’histoire de Britney Spears nous rappellent qu’aucun « féminisme de plafond de verre » et aucune quantité d’argent ne peut vraiment libérer l’humanité de l’oppression de genre. La société doit disposer d’une base fondamentalement différente pour construire des relations saines entre hommes, femmes et toutes les personnes actuellement opprimées par le capitalisme. Dans ce système barbare, personne n’a la moindre garantie d’autonomie corporelle.

    #NotJustBritney

    Ce n’est pas non plus une coïncidence si la large solidarité avec la situation de Britney Spears intervient dans le sillage de #MeToo, de la condamnation d’Harvey Weinstein pour viol et d’une génération de jeunes très préoccupés par la santé mentale. Après une année de confinements, la santé mentale des gens ordinaires est extrêmement vulnérable, ce qui n’est qu’aggravé par la classe dirigeante qui menace de mettre fin aux mesures de relance et aux moratoires sur les expulsions. Un jeune sur quatre a déclaré avoir eu des pensées suicidaires au cours de l’année dernière aux Etats-Unis.

    C’est l’effondrement mental de Britney Spears sous la pression de l’industrie et de son sexisme qui est à l’origine de la mise sous tutelle. Britney Spears n’avait que 16 ans lorsque le clip de “Baby One More Time” est sorti, dans lequel on la voit dans un costume d’écolière hyper sexualisé devenu emblématique. La sexualisation des jeunes femmes et la violence sexiste font partie intégrante de la vie sous le capitalisme, ce qui peut être à l’origine de dépressions, d’anxiété, de troubles alimentaires et de toute une série d’autres problèmes de santé mentale.

    Le plus consternant est l’approche draconienne de la curatelle à l’égard des droits reproductifs de Spears, qui l’oblige à garder un stérilet contre son gré. Depuis plus d’une décennie, les femmes de tous les États-Unis subissent les attaques des républicains contre l’avortement et les droits reproductifs. Les militants de la lutte antiraciste et des droits des personnes handicapées ont mis en lumière comment le capitalisme américain a utilisé la stérilisation forcée en tant qu’outil pour faire respecter le colonialisme raciste et l’esclavage. Le New York Times rapporte que ce n’est qu’en 2014 que la Californie a formellement interdit la stérilisation des détenues sans consentement.

    L’expérience de Britney Spears montre que, si les femmes pauvres et opprimées supportent le poids écrasant des attaques contre l’autonomie corporelle et n’ont pas accès aux soins de santé mentale, les menaces contre la liberté reproductive et une approche inadéquate de la santé mentale ont un impact sur la société dans son ensemble. Nous devons construire un mouvement suffisamment fort pour arracher l’industrie de la santé privée et à but lucratif au capitalisme américain, et construire un système national de santé public, Medicare for All, qui puisse garantir des soins de santé reproductifs et mentaux inclusifs. C’est d’autant plus vrai que la Cour suprême a accepté de se saisir d’un cas du Mississippi qui pourrait démanteler Roe v. Wade (arrêt historique rendu par la Cour suprême des États-Unis en 1973 sur la question de la constitutionnalité des lois qui criminalisent ou restreignent l’accès à l’avortement). Leur décision pourrait dans les faits rendre l’avortement plus dangereux, et non moins probable.

    Tout comme nous ne pouvions pas faire confiance aux tribunaux qui ont permis à Weinstein d’éviter une condamnation pour viol pendant plus d’une décennie, nous ne pouvons pas leur faire confiance aujourd’hui pour défendre les droits des femmes ou la liberté reproductive. C’est d’autant plus clair dans le contexte de la récente et honteuse libération de Bill Cosby, qui est une gifle au visage des dizaines de femmes qui se sont courageusement présentées pour mettre fin à ses décennies d’agressions sexuelles prédatrices.

    Nous devons construire une lutte féministe socialiste, reposant sur l’organisation à la base, afin de remporter un véritable changement. Bien que le moment #MeToo ait inspiré des femmes célèbres à dénoncer le sexisme dans l’industrie du divertissement, ce sont les travailleurs des secteurs dominés par les femmes, tels que les soins de santé et l’éducation, qui luttent toujours contre les attaques de l’establishment politique sur leurs salaires, leurs droits et leur sécurité, même en tant que travailleurs de première ligne pendant la pandémie. C’est le phénomène généralisé des débrayages dans des entreprises comme Google et McDonald’s qui a permis de faire pression pour que des personnes comme Weinstein soient condamnées et d’obtenir des changements concrets sur le lieu de travail. Nous devons nous organiser pour mener à nouveau des actions de masse de ce type, et aller encore plus loin.

    Le capitalisme est une menace pour la créativité

    L’expérience de Britney Spears est particulièrement terrifiante, et nous en sommes conscients en raison de sa célébrité, mais elle touche aux notes de sexisme inhérentes à l’industrie du divertissement reposant sur le profit. Cette industrie est marquée par l’exploitation, le contrôle et la limitation de la carrière des femmes par des hommes puissants.

    Les jeunes d’aujourd’hui toléreraient-ils le niveau d’abus des paparazzis et les prises de position sexistes des médias auxquels Britney Spears a été confrontée au début de sa carrière ? L’interview de Diane Sawyer en 2003, dans laquelle elle rendait Spears responsable de sa rupture avec Justin Timberlake, avec qui elle faisait partie de la machine de divertissement de Disney World à l’époque, et lui demandait de justifier les détails intimes de sa vie sexuelle à la télévision nationale, a récemment fait l’objet d’un examen minutieux. Les réseaux sociaux ont donné un accent douloureusement sombre et humoristique à l’ère du sexisme médiatique du début des années 2000, centré sur les carrières d’adolescentes sur-sexualisées comme Spears, Christina Aguilera, les Kardashian et Paris Hilton. Aujourd’hui, les paparazzi traquent Spears lorsqu’elle suit une thérapie.

    La mise sous tutelle est une expression extrême de la façon dont l’industrie du divertissement peut asservir les artistes, en particulier les femmes, en les faisant travailler sous contrat sous la menace de représailles légales pour financer les salaires gonflés des dirigeants, les salles de spectacles à grand spectacle, les annonceurs et les maisons de disques – jusqu’à ce que les artistes ne soient plus rentables ou plus jeunes.

    Dans un secteur où l’écart de rémunération entre les hommes et les femmes et la cooptation des gros bonnets constituent une menace pour les développements artistiques futurs, les artistes individuels sont contraints financièrement à l’exploitation de leurs idées. Par exemple, Michaela Coel a refusé un contrat d’un million de dollars avec Netflix pour garder le contrôle créatif de sa série “I May Destroy You”, qui traite des agressions sexuelles et de leurs conséquences complexes. Tik Tok, Instagram et Snapchat sont autant de moyens puissants pour les jeunes créatifs de partager leur art, mais ils ne sont pas à l’abri d’une cooptation par l’industrie. Les maisons de contenu telles que Hype House et Collab Crib sont ciblées par les sociétés de capital-risque et les grandes fortunes pour investir dans “l’économie créative”.

    En tant que nouvelle frontière pour les créatifs, ces artistes devraient s’organiser en mettant l’accent sur les droits des travailleurs, en formulant des demandes concrètes pour lutter contre le sexisme et le racisme de l’industrie et son influence sur ces plateformes. La Screen Actors Guild (SAG) et l’IATSE pourraient servir d’outils, représentant la manière dont un large groupe de travailleurs ayant des intérêts similaires peut négocier les conditions de travail avec un syndicat. Les techniciens et autres travailleurs contractuels pourraient être des alliés dans cette lutte. Les grands changements culturels contre la violence et l’oppression liées au genre sont enracinés dans la lutte de la classe ouvrière, mais comment mettre fin à la discrimination systémique dans une industrie qui tire des profits des divisions sociales et culturelles amplifiées par le capitalisme ? Les exemples d’artistes qui se battent pour le contrôle artistique sont très importants, mais ils montrent aussi que c’est une bataille difficile qui nécessite une organisation de masse contre l’exploitation de l’industrie dans son ensemble.

    Nous pouvons remporter des victoires contre le racisme et le sexisme inhérents au capitalisme, mais ce système qui a créé et profite de la situation difficile de Britney Spears ne mettra jamais fin aux divisions sociales qui maintiennent la classe dirigeante au pouvoir. La solidarité avec la détresse de Britney Spears que nous constatons aujourd’hui est un signe de la colère croissante des femmes qui se voient refuser tout semblant d’autonomie corporelle. Cet exposé doit nous rappeler que la classe ouvrière peut se battre et obtenir des changements matériels, y compris la fin de la discrimination salariale entre les sexes, la mise en place de services sociaux pour mettre fin à la violence sexiste, la défaite des attaques contre l’avortement et l’obtention de soins de santé et de logements pour tous. L’organisation de masse à la base peut renverser la vapeur contre l’oppression systémique et construire un monde basé sur l’égalité sociale et économique organisée démocratiquement.

  • L’oppression n’est pas un problème individuel, c’est l’ensemble du système qui est coupable !

    Photo de solidarité du groupe de ROSA-Liège et contre la culture du viol

    L’actualité a été révoltante ces dernières semaines. À Liège, une féministe a été attaquée et blessée à coups de couteau. À Gand, une affaire de viol a donné lieu à des condamnations très légères sur fond de culpabilisation des victimes. En Angleterre, Sarah Everards, a été assassinée par un policier britannique et les manifestations fortement réprimées par la police. L’insécurité et à la culture du viol sont encore une fois d’actualité et provoque une vague d’indignation. La Campagne ROSA estime important de prendre le temps de discuter la stratégie à adopter dans la lutte contre le sexisme et la culture du viol.

    Par Arne (Gand)

    Des privilèges ou des droits à étendre à l’ensemble de la population ?

    La lutte contre la culture du viol et les autres oppressions est plus largement dénoncée, c’est encourageant. Mais l’angle d’approche est souvent individuel. Certain.e.s activistes mettent en avant que nous ne pouvons lutter contre la violence sexiste qu’en éduquant les hommes. D’autres estiment que la seule cause d’un viol, c’est le violeur lui-même. D’autres encore, qu’il faut être suffisamment conscient des oppressions et discriminations. Et certains d’ajouter que certaines personnes ne peuvent de toute façon pas en être conscientes parce qu’elles ont le « privilège » d’être blanches, masculines, cisgenres ou hétérosexuelles.

    Il est très important que la justice ne laisse pas sans réponses les agressions sexistes. Mais nous pensons important de questionner la société qui permet à une telle pandémie de violence sexiste de se poursuivre sans que de réels moyens soient déployés pour la combattre. Quelle est cette société qui produit tant de harceleurs et de violeurs ? Les hommes seraient-ils par nature de potentiels violeurs ? Selon nous, la culture du viol ne peut pas être réduite à une question de genre.

    La culture du viol ce n’est pas une question d’ignorance masculine ou de quelques « pommes pourries ». La culture du viol et l’oppression sont liées aux énormes inégalités économiques croissantes et aux relations de pouvoir qui en découlent. Limiter la discussion au genre, c’est éviter la responsabilité de la politique et du système capitaliste lui-même.

    D’où viennent la culture du viol et le sexisme ?

    La culture du viol est activement entretenue. Les comportements machistes sont normalisés par la publicité, l’industrie pornographique. Trop souvent, nous y voyons de manière déguisée du harcèlement qui se termine par un viol. En achetant un certain parfum ou une certaine chemise, il serait possible à tout homme de séduire n’importe quelle femme. Ce type d’images entretient une incompréhension générale dans la société sur ce que signifie le consentement mutuel. Nous sommes constamment trompés à ce sujet. En outre, la sexualité est commercialisée et transformée en marchandise. Il suffit de penser à la publicité de la société “Rich Meet Beautiful” il y a quelques années : “Hé, les étudiantes, choisissez un meilleur style de vie : sortez avec un sugar daddy”. Les inégalités inhérente au système capitalistes, comme la position précaire des étudiantes, sont activement utilisées pour renforcer le sexisme.

    Quelle stratégie la Campagne ROSA propose-t-elle ?

    Le sexisme n’existe pas parce que des individus sexistes naissent chaque année, mais parce que la classe capitaliste l’utilise comme un outil pour nous diviser et augmenter ses propres profits. C’est un problème systémique. Combattre ce système signifie construire activement la solidarité entre tous les jeunes et les travailleurs. Nous devons réaliser qui sont nos alliés et qui sont nos ennemis communs. Nos motivations à construire une autre société seront sans doute parfois différentes, tout comme nos identités et nos sensibilités. Mais elles sont issues du même système, un système qui à besoins de nous diviser, des discriminations et qui se base sur notre exploitation.

    Des couches de plus en plus larges de la population sont consciente du sexisme, comme des autres discriminations, et sont prêtes à se mobiliser. Ainsi, on voit fleurir de nouveaux slogans, banderoles, autocollants et autres. Après avoir identifié contre quoi nous nous battons, l’étape suivante consiste à savoir d’où vient l’oppression et pour quelle alternative nous voulons nous battre.

    La Campagne ROSA défend un féminisme socialiste, c’est-à-dire que nous luttons pour une société fondamentalement différente, centrée sur les besoins de toutes et tous. Devenir « woke » (réveillé) et les différentes approches des politiques d’identité (tel que la théorie des privilèges) permettent de dénoncer un problème massif. Toutefois, elles laissent de côté les véritables responsables de l’oppression et ne visent pas à construire l’unité entre les jeunes et les travailleurs.euses. Il nous semble crucial de ne pas nous laisser diviser pour être capable de parvenir à de réelles victoires. Pour renforcer notre unité, le respect de chaque sensibilité est bien sûr une condition préalable. Ne nous trompons pas d’ennemi. Le système capitaliste a absolument besoin du sexisme pour perdurer, c’est aux capitalistes que le sexisme profite en premier lieu.

    La Campagne ROSA tente d’impliquer le plus grand nombre possible de jeunes et de travailleurs.euses dans cette lutte. La meilleure façon d’y parvenir est de mettre en place un programme unificateur, qui profite à toutes et tous : des emplois et des conditions de travail décents, des logements abordables, des services publics plus nombreux et gratuits, des investissements publics dans les soins et l’enseignement, une réduction collective du temps de travail sans perte de salaire et avec des embauches compensatoire, un salaire minimum de 14 euros brute par heure et des allocations sociales au-dessus du seuil de pauvreté… Un aperçu plus complet est disponible sur CampagneROSA.be

    Agir collectivement pour un tel programme permet de sensibiliser efficacement à toutes les formes d’oppression et permet de lutter pour de mettre fin au système dans lequel le sexisme et les autres formes d’oppression sont si fortement présentes.

  • “Framing Britney Spears” : l’impact dévastateur du sexisme

    Le documentaire du New York Times “Framing Britney Spears” explore la carrière de la célèbre chanteuse tout en soulignant l’impact dévastateur du sexisme et des médias commerciaux sur le bien-être d’une adolescente pleine de vie poussée à bout.

    Par Aislinn O’Keeffe (Socialist Party, ASI-Irlande)

    La jeune star a été sexualisée et considérée comme un simple objet dès son plus jeune âge. Sa maison de disques et les médias l’ont peu à peu coincée dans un cul-de-sac impossible : Britney devait être sexy, mais pas sexuelle. Tout était sexualisé autour de son image mais, en même temps, sa virginité faisait l’objet d’une véritable obsession.

    Cette situation est révélatrice d’un problème social bien plus large, celui de l’objectivation des femmes sous le capitalisme, le processus déshumanisant de réduction d’être humains au rang de simples objets. Dans la société capitaliste actuelle, le processus d’objectivation des femmes est renforcé par l’importance accordée à leur apparence au travers de la publicité, de la télévision, des magazines, de la musique, du cinéma,…

    Transformer en objet et le vendre

    D’immenses industries se sont développées et reposent sur l’exploitation des femmes par le biais de l’objectivation. On estime que l’industrie cosmétique mondiale représentera 438,38 milliards de dollars en 2026. L’industrie pornographique représente 97 milliards de dollars par an. Une foule d’autres industries bénéficient de cette objectivation, notamment la mode, la télévision, le cinéma, la vente au détail, les médias de masse et les médias sociaux.

    Si l’objectivation dévalorise les femmes en tant que personnes, elle dévalorise également les activités qu’elles pratiquent. C’est particulièrement vrai pour les activités spécifiquement associées aux femmes, telles que les tâches ménagères et les soins. Une grande partie de ce travail est effectué gratuitement au foyer tandis qu’elle ne rapporte qu’un salaire inférieur sur le lieu de travail. Au grand plaisir des patrons.

    Déshumanisation et violence

    Dépeindre les femmes comme des objets implique qu’elles peuvent être utilisées et jetées à volonté. C’est d’ailleurs très évident dans la manière dont Britney Spears a été traitée dans les médias : il a toujours été question de son apparence et de sa sexualité supposée, au détriment de son talent et de sa personnalité.

    L’une des conséquences de cette déshumanisation est l’augmentation de la violence. Une grande partie des féminicides est causée par une connaissance des victimes. Un tiers des femmes subira un jour ou l’autre des violences physiques ou sexuelles, du harcèlement sur le lieu de travail aux attouchements non désirés en passant par les agressions verbales et les autres formes de sexisme, jusqu’au meurtre.
    Une vie faite de telles expériences représente une intense violence. Les normes de beauté irréalistes, les agressions, le harcèlement et la manipulation psychologique de la société sont dévastateurs pour la santé mentale.

    Nous refusons tout cela !

    Le débat actuel sur la façon dont Britney Spears a été traitée contient également des éléments positifs. Il est remarquable de constater qu’un changement de mentalité majeur s’est opéré depuis la fin des années 1990. Ceux qui ont grandi avec Brittney regardent avec horreur l’hyper-sexualisation de la star et son traitement par les médias de l’époque. Ce qui était alors “normal” ne l’est heureusement plus pour de nombreuses personnes. C’est en partie le résultat des mobilisations de masse en faveur de l’émancipation des femmes.

    Malheureusement, cela ne signifie pas que la bataille est terminée. Le capitalisme comporte l’oppression des femmes et les discriminations dans son ADN. Pour obtenir un changement fondamental, nous devons nous organiser et utiliser toute la force du mouvement ouvrier pour renverser le capitalisme.

  • Lutter pour l’émancipation des femmes, y compris en période de confinement


    En Chine et en Italie, une augmentation de la violence domestique a été constatée avec le confinement. En Belgique ou en France, des campagnes de sensibilisation ont été lancées pour populariser le numéro d’appel d’urgence, tant pour les violences conjugales que vis-à-vis des enfants. Mais faire appel à ce service est encore plus difficile qu’habituellement en raison du confinement. Les victimes de violences domestiques sont isolées de la société mais pas de leur agresseur !

    Il devient, de plus, non pas difficile, mais carrément impossible de partir, car les refuges trop peu nombreux ne peuvent pas accueillir plus de monde au vu des règles de distanciations sociales. Dans l’immédiat, il faut permettre l’ouverture de suffisamment places de refuges supplémentaires pour femmes et leurs enfants ou personnes LGBTQI+ grâce à la réquisition de chambres d’hôtels ou de centres de loisir avec indemnisation sur base de besoins prouvés, en prévoyant des espaces séparés pour de potentiels malades mis en quarantaine. Une fois la période de confinement passée, il faut un plan massif de construction de logements sociaux et de véritables refuges, y compris par la saisie de bâtiments inoccupés à des fins spéculatives.

    Le confinement représente également un défi pour les familles monoparentales, soit près d’un quart des familles en Belgique, parmi lesquelles 80% de cheffes de ménages féminins. C’est d’autant plus vrai lorsqu’elles vivent en-dessous du seuil de pauvreté à l’instar de la moitié d’entre-elles. Celles-ci se retrouvent souvent enfermées dans un petit logement à devoir jongler entre les enfants et télétravail. Il est nécessaire de soutenir ces familles contre les violences domestiques, mais également contre les risques psychologiques accrus par l’isolement (“burnout parental”). Mais cela nécessite des moyens financiers.

    Nous exigeons :

    L’obligation de l’égalité salariale, même en temps de crise !
    La suppression du statut de cohabitant, l’individualisation des droits sociaux et l’augmentation des allocations familiales afin qu’elles recouvrent réellement le coût de l’éducation d’un enfant.
    L’ouverture de suffisamment places de refuges supplémentaires pour femmes ou personnes LGBTQI+ par la réquisition de chambres d’hôtels ou de centres de loisir, avec indemnisation sur base de besoins prouvés, en prévoyant des espaces séparés pour de potentiels malades mis en quarantaine, dans la perspective d’un plan massif de construction de logements sociaux et de véritables refuges, y compris par la saisie de bâtiments inoccupés à des fins spéculatives, une fois la période de confinement passée.
    Des propositions d’activités pédagogiques pour les enfants accessibles à toutes les familles, pas uniquement celles disposant d’une connexion internet haut débit (par plage horaire spéciale à la télévision publique, etc).

  • Coronavirus. La marche de Gand contre le sexisme est annulée

    La 4e marche contre le sexisme à Gand aura lieu le 8 mars 2021

    C’est malheureusement le seul choix responsable que nous puissions faire. Nous attendions avec impatience la 4e édition de cette Marche contre le sexisme à Gand, à laquelle plusieurs centaines de personnes devaient participer. Cette année devait marquer les esprits. A Gand, la Campagne ROSA a mené ces dernières semaines une campagne intense qui a lié la lutte contre le sexisme à la lutte pour un meilleur salaire minimum. La fusion des deux mouvements annonçait une manifestation combattive ce samedi, à l’instar d’autres initiatives dans cette direction. Ces derniers jours, les réactions enthousiastes n’avaient pas manqué lors de nos campagnes. Lundi dernier, le 9 mars, la grève à l’université de Gand (UGent) fut une excellente occasion d’illustrer que la lutte antisexiste peut et doit se traduire par des revendications socio-économiques concrètes.

    Si le gouvernement n’entend pas prendre les mesures qui s’imposent, nous devons prendre nos responsabilités. Il devient de plus en plus évident que le gouvernement est réticent à adopter les mesures nécessaire en raison d’intérêts économiques. La recherche de profits à court terme fait aujourd’hui obstacle à un plan coordonné visant à mettre la santé publique au centre des préoccupations. Les plus faibles en paieront le prix le plus élevé. Ce sont les personnes âgées, les personnes ayant des problèmes de santé, mais aussi tous ceux qui travaillent dans le secteur social qui sont les plus exposés à l’infection. Ils doivent bénéficier de la meilleure protection possible. Nous prenons donc nos responsabilités et suivons les conseils des spécialistes. Chaque fois que cela sera possible, nous garderons nos distances pour tenter de protéger les plus vulnérables.

    La Campagne ROSA ne manquait pas d’idées et de propositions à présenter aux manifestants ce samedi. Il nous sera impossible de le faire dans la rue. Mais nous appelons toutes celles et ceux qui désirent s’engager dans ce combat à nous contacter et à nous rejoindre. Nous allons utiliser les semaines à venir pour organiser de nouvelles actions et campagnes et pour nous former politiquement.

    La 4e marche contre le sexisme de Gand n’aura pas lieu en 2020, mais nous lançons d’ores et déjà la date du 8 mars 2021.

    Appel à la solidarité financière

    La Campagne ROSA organise délibérément ses actions sans bénéficier de fonds de la part des autorités, des grandes entreprises ou de riches mécènes. Nos campagnes et le matériel dont nous avons besoin pour les faire vivre dépendent du soutien financier que nous récoltons parmi nos membres et sympathisants. Cette manifestation du 14 mars avait nécessité divers investissements que nous espérions financer le jour-même de la manifestation grâce à la vente d’autocollants et de badges. En conséquence de l’annulation de la marche, il nous manque 1.000 euros pour pouvoir atteindre l’équilibre. N’hésitez pas à nous aider à combler ce manque !

    Vous pouvez verser votre contribution sur notre compte :
    Numéro de compte de la Campagne ROSA : BE54 5230 8095 8497 (BIC : TRIOBEBB), avec pour communication: « Soutien ROSA + Nom + Prénom »

  • Ne nous limitons pas aux tribunaux pour lutter contre le sexisme

    Le quotidien ‘De Standaard’ du vendredi 13 décembre a publié une carte blanche de plusieurs organisations féministes. Dans cet article, Furia, le ‘Vrouwenraad’ (Conseil des femmes en Flandre), Ella et RoSa VZW appellent à la correctionnalisation des déclarations sexistes écrites dans le cadre de la loi anti-discrimination. La correctionnalisation signifie qu’un crime peut également être poursuivi et donc puni sans une procédure lourde devant la Cour d’assises. Jusqu’à présent, cela n’est possible que pour les déclarations orales, telles que celles de Jeff Hoeyberghs, ce qui signifie que les discriminations écrites ne sont en pratique pas poursuivies.

    La Campagne ROSA (Résistance contre l’Oppression, le Sexisme et l’Austérité) soutient chaque pas juridique réalisé pour combattre le sexisme. La correctionnalisation des déclarations sexistes écrites contribuerait à limiter la propagation du discours sexiste.

    Selon nous, il reste cependant essentiel de mener parallèlement le combat dans la rue, sur les campus et sur les lieux de travail afin de s’en prendre aussi au terreau sur lequel prolifère le sexisme. Les déclarations sexistes ne sont que les symptômes d’un sexisme structurel profondément enraciné dans la société, ce contre quoi le recours à la justice isolée n’offre pas de solution complète.

    Par exemple, l’égalité juridique obtenue entre femmes et hommes est encore loin de résoudre les inégalités économiques et sociales. En Belgique, l’écart de rémunération est toujours de 21%. Dans notre système économique néolibéral, le travail des femmes est encore considéré comme une “prime” qui s’ajoute au salaire masculin. Cette situation place de nombreuses femmes dans une situation de dépendance économique et/ou matérielle vis-à-vis des hommes.

    Un autre exemple est la loi contre le sexisme de 2016, qui est également mentionnée dans la carte blanche. Elle offre la possibilité de punir les individus qui harcèlent les femmes. Mais qu’en est-il de l’industrie de la publicité, qui utilise les corps des femmes pour vendre tout et n’importe quoi ? Pour faire des profits, le corps des femmes est présenté comme un objet.

    L’utilisation systématique du corps des femmes dans la publicité, combinée à la situation de dépendance financière de nombreuses femmes, a un impact énorme sur l’image et la place des femmes dans la société. Cela favorise la violence et la culture du viol, en présentant les femmes comme des objets à utiliser selon son bon vouloir. La question n’est donc pas seulement de savoir quelles sanctions sont nécessaires pour les individus, mais aussi comment nous nous attaquons à la base sociale qui nourrit le sexisme.

    Une société où tout est utilisé pour réaliser le plus de profits possible reposera toujours sur l’oppression et la majorité de la population en paiera le prix. C’est pourquoi la Campagne ROSA lutte pour l’indépendance socio-économique des femmes et donc également contre la logique de profit du capitalisme.

    Les avancées juridiques n’auront réellement leur effet que si elles s’accompagnent d’un mouvement actif et militant, de terrain, qui s’attaque également au terreau fertile pour les discriminations. C’est ce à quoi nous voulons nous consacrer. En 2017, à Gand, nous avons commencé à développer la Campagne ROSA, en appelant à une marche contre le sexisme le 8 mars pour la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes. Nous avons alors pu renouer avec des traditions mises de côté durant de nombreuses années, celles d’un 8 mars militant et combatif.

    La Campagne ROSA se réjouit que, pour le 8 mars 2020, qui aura lieu un dimanche, une manifestation nationale contre le sexisme prendra place à Bruxelles. Nous invitons tout le monde à y participer.

    Une semaine plus tard, le samedi 14 mars 2020, une autre marche aura lieu à Gand. Le 14 mars sera la Journée de l’égalité salariale, une journée idéale pour lutter en faveur de meilleurs salaires, de l’égalité salariale, de pensions qui permettent de vivre décemment, etc. Bref, des mesures socio-économiques qui touchent tout le monde et sont essentielles dans la lutte pour l’émancipation des femmes.

  • L’UGent sermonne légèrement le KVHV et refuse de prendre ses responsabilités

    La campagne ROSA (Résistance contre l’Oppression , le Sexisme et l’Austérité) et EGA (Étudiants de Gauche Actifs) ont organisé une action hier matin au Conseil d’administration de l’UGent, l’université de Gand, suite au meeting du cercle étudiant d’extrême droite KVHV avec Jeff Hoeyberghs comme orateur. Plus tôt cette semaine, la campagne ROSA a diffusé par vidéos des extraits de cette réunion scandaleuse, ce qui a bénéficié d’une grande attention des médias nationaux comme internationaux. Entre 250 à 300 personnes ont répondu à notre rendez-vous à 8h du matin à UGent afin d’exiger l’exclusion du cercle KVHV. Cette demande d’exclusion était également défendue par le front communal syndical de l’UGent et par le représentant des étudiants au Conseil d’administration.

    La réunion du Conseil d’administration était déjà terminée depuis longtemps lorsque le communiqué de presse du recteur a finalement été envoyé. Le Conseil d’administration refuse de prendre une sanction contre le KVHV en plus de la suspension de deux mois déjà décidée par le PFK (Convention politique philosophique de l’Université de Gand).

    En soi, cette suspension est déjà une victoire et résulte directement d’une semaine orageuse d’action et d’indignation générale dans les médias et sur les réseaux sociaux. Les provocations arrogantes du KVHV leur sont revenues en pleine face comme un boomerang. Même eux doivent maintenant bien admettre qu’ils ne peuvent pas s’en tirer à bon compte. Leurs tentatives de banaliser la discrimination et la haine rencontrent la mobilisation active des jeunes et des travailleurs.

    Le KVHV est donc suspendu pour deux mois comme l’a déjà décidé le PFK qui peut prendre des sanctions contre des associations indépendamment du Conseil d’administration. Le PFK est une structure faîtière responsable de la reconnaissance et du contrôle de toutes les associations politiques et philosophiques de l’UGent. Cet organisme est autorisé à imposer des sanctions aux associations étudiantes qui en sont membres, mais cela ne signifie pas que le Conseil d’administration n’est pas autorisé à prendre d’autres mesures. Finalement, cela équivaut à avoir simplement tapoté sur les doigts du KVHV. Le Conseil d’administration de l’université se dérobe ouvertement à ses responsabilités concernant les discours tenus dans ses locaux.

    Un réseau élitiste

    Si le recteur refuse d’exclure le KVHV, c’est parce qu’il ne veut pas s’opposer à la pression du vaste réseau élitiste autour du KVHV. Il s’agit d’un réseau d’individus puissants de l’élite politique d’au moins trois partis, de personnalités influentes au sein des institutions étatiques et de membres d’influentes chambres de commerce. Ce réseau s’étend au Conseil d’administration avec le provocateur de droite Siegfried Bracke (N-VA). Le recteur ne veut pas affronter ce réseau, peut-être parce qu’il espère ainsi montrer patte blanche pour faire du lobbying en faveur de l’UGent.

    Après avoir survécu à la tempête médiatique de septembre 2018 autour de Schild & Vrienden et de Dries Van Langenhove, les Gantois du KVHV (parmi lesquels de nombreux membres de Schild & Vrienden) se sentent intouchables. Récemment, Dries Van Langenhove, ancien membre du KVHV gantois, a même été élu comme député du Vlaams Belang. Leur confiance n’a fait que croître. Avec la première action tenue au moment-même de ce meeting avec Jeff Hoeyberghs et encore plus avec l’action d’hier, les étudiants et le personnel de l’UGent ont mis un terme aux tentatives de banalisation du discours de haine à l’université. Entre 250 et 300 manifestants ont crié haut et fort leurs slogans pour que le Conseil d’administration prenne des initiatives, pour refuser le sexisme à l’UGent et pour que le KVHV ne bénéficie plus des subsides des autorités universitaires.

    Les activistes ont exigé que l’ensemble du Conseil d’administration vienne les voir pour leur donner une explication de la situation. La campagne ROSA avait préparé une lettre ouverte avec l’intention de la délivrer. Seul le recteur est sorti et a malheureusement refusé de prendre la parole face aux étudiants et au personnel présent. Cette absence de message a provoqué l’indignation des personnes présentes. Le fait que le Conseil d’administration se cachait n’a pas été apprécié et les activistes se sont dirigés vers l’entrée de la salle de réunion en manifestant.

    Une variante extrême d’un sexisme profondément enraciné

    La campagne ROSA souligne que les déclarations de Jeff Hoeyberghs ne sont qu’une variante extrême d’un sexisme profondément enraciné dans la société. Les responsables de l’austérité du gouvernement flamand sont les mêmes que ceux qui cherchent à dévier la colère sociale vers les réfugiés et les migrants. De cette façon, ils éloignent l’attention de leur politique antisociale radicale. Ce sont ces mêmes partis qui estiment aujourd’hui que le sexisme relève de la liberté d’expression !

    Notre lutte pour une société sans discrimination est liée à la lutte contre toute forme de politique antisociale. Qui plus est, il s’agit d’une lutte pour une société différente, où une petite élite ne contrôlera plus la grande majorité des richesses en ayant donc intérêt à répandre la division pour régner.

    Soutenez-nous financièrement sur le n° de compte BE54 5230 8095 8095 8497 ou en devenant membre !

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