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Tag: 8 mars
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8 mars. Seule la lutte peut empêcher le recul de l’émancipation des femmes

Par rapport à l’an dernier, le 8 mars aura lieu dans un monde totalement différent. « La pandémie de covid-19 menace de réduire à néant les progrès réalisés en matière d’opportunités économiques pour les femmes et de creuser l’écart entre les sexes qui subsiste malgré 30 ans de progrès », a écrit le Fonds Monétaire International (FMI) l’été dernier. Dans une opinion publiée dans le Volkskrant (01/11/2020), deux féministes déclaraient clairement : « La pandémie menace aussi l’émancipation ».
Par Anja Deschoemacker
Pour être tout à fait honnête, le FMI aurait dû parler de « progrès très limités et à peine perceptibles » de ces 30 dernières années et souligner que cela s’est produit dans un contexte d’inégalités croissantes où la croissance économique n’a guère profité à la majorité de la population. Mais une chose est claire : les luttes de masse des femmes qui se sont produites à travers le monde cette dernière décennie devront se poursuivre, s’étendre et gagner en organisation si l’on souhaite éviter que la pandémie ne soit le début d’un recul marqué en matière d’émancipation des femmes.
Le salaire des femmes a deux fois plus souffert de la crise sanitaire
Selon un rapport de l’Organisation Internationale du Travail, la crise sanitaire a tout particulièrement fait pression sur les salaires des femmes (De Standaard, 03/12/2020). En Europe, la Belgique est l’un des pays où l’écart entre les genres est le plus important : la perte de salaire due à la pandémie est deux fois plus élevée pour les femmes que pour les hommes, soit 12,7 % contre 6,6 %. Cela s’explique principalement par la surreprésentation des femmes dans les secteurs durement touchés par la pandémie et les confinements (magasins, horeca, tourisme, etc.), mais aussi par le fait que de nombreuses mères ont dû arrêter temporairement de travailler pour s’occuper de leurs enfants. Cette situation s’aggravera encore lorsque les mesures de soutien aux secteurs touchés cesseront et que le chômage structurel se développera.
Tâches domestiques alourdies, essentiellement pour les femmes
De nouvelles statistiques (ONU-Femmes) apparues en novembre indiquent que la pandémie pourrait effacer 25 ans de progrès en matière d’égalité des genres (BBC News, 26 novembre 2020). Selon Anita Bhatia d’ONU-Femmes, l’accroissement de la charge domestique pose « un risque réel de retour aux stéréotypes sexistes des années 1950 ». Avant la pandémie, les femmes consacraient trois fois plus de temps que les hommes au travail domestique non rémunéré. « Je vous assure que ce chiffre a plus que doublé », affirme Bhatia. En Belgique également, il semble que le « congé corona », par exemple, soit pris de manière inégale : en septembre, 75% d’entre eux avaient été pris par des femmes (Bruzz, 23/11/2020).
Forte augmentation de la violence à l’égard des femmes
Les chiffres varient mais, partout, le confinement s’est accompagné d’une forte augmentation de la violence et des agressions sexistes. Avant la pandémie, selon l’ONU-Femmes, 18 % des femmes dans le monde déclaraient avoir été victimes de violences sexuelles et/ou physiques de la part de leur partenaire au cours de l’année écoulée. Au cours d’une vie, il s’agissait de 30% des femmes. Les chiffres de 2020 démontrent une forte augmentation de toutes les formes de violence : du fait du partenaire mais en rue et en ligne. Avant la crise sanitaire, dans l’Union européenne, une femme de plus de 15 ans sur dix disait avoir été victime de harcèlement en ligne; ce chiffre a également fortement augmenté avec l’explosion du temps que nous passons en ligne.
Aucun retour à l’anormal : luttons pour un meilleur avenir pour nous et nos enfants !
Nous ne disposons pas encore d’un tableau complet de la situation. Les mesures de soutien aux entreprises et aux travailleurs empêchent pour l’instant une forte augmentation du chômage et de la pauvreté. Mais n’ayons aucune illusion : ce gouvernement prend des mesures pour sauver son système – le capitalisme – non pas parce que ces partis sont soudainement préoccupés par nos conditions de vie. Marx a soutenu à juste titre dans Le Capital que le capital est insouciant quant à la santé et à la longévité du travailleur, à moins qu’il ne soit forcé d’en tenir compte par la société. C’est encore plus vrai pour les femmes qui, à chaque crise économique, sont renvoyées au foyer ne fut-ce que partiellement, et donc renvoyées vers la dépendance économique vis-à-vis d’un homme.
La pandémie n’a fait qu’accentuer les difficultés auxquelles les femmes sont confrontées dans ce système. La dépression économique en développement assurera que cela reste le cas. Ce qui est nécessaire, ce ne sont pas des mesures temporaires, mais un changement de système qui empêche les femmes de payer le prix fort de la crise. Voilà notre message central pour le 8 mars : combattre chaque mesure qui tentera de nous faire payer la crise, mais aussi nous organiser au travers de cette lutte pour retirer aux capitalistes le contrôle de la société et de nos vies.
Le 8 mars, passez à l’action avec la Campagne ROSA dans votre école, votre entreprise, votre quartier, avec vos proches,… Rejoignez-nous également pour soutenir l’action du personnel soignant, de l’enseignement, de la distribution : ces travailleuses et travailleurs sur lesquels la société a reposé durant cette crise sanitaire. Rejoignez-nous dans la lutte pour un Accord interprofessionnel qui ne permette pas au patronat de répercuter les coûts de la crise sanitaire sur les travailleuses et travailleurs, tout en se sauvant eux-mêmes avec les bénéfices. Aidez-nous à construire une alternative féministe socialiste, en Belgique et dans le monde : rejoignez la Campagne ROSA et faites partie de ROSA – International Socialist Feminists !
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8 mars : Marches et actions contre le sexisme à Bruxelles, Namur, Liège, Louvain, Courtrai, Gand, Anvers, Bruges,…

La crise du coronavirus a exacerbé les inégalités et les discriminations, y compris le sexisme. En moyenne, les femmes ont perdu deux fois plus de revenus que les hommes. Et le travail domestique non rémunéré est à nouveau davantage effectué par les femmes. En plus, une autre pandémie, invisible, fait rage : celle de la violence. Des décennies de progrès sont menacées. La récession économique et le chômage structurel qui va massivement arriver auront largement un visage féminin. Trop, c’est trop !
Exigeons des protections menstruelles gratuites dans nos écoles, services publics et lieux de travail ! La crise sanitaire a permis aux milliardaires de devenir encore plus riches ; les gouvernements ont offert d’énormes sommes d’argent en cadeaux aux grandes entreprises, alors qu’il n’y a soi-disant pas d’argent pour les services sociaux avec des listes d’attente qui s’allonge. 12 % des jeunes femmes déclare ne régulièrement pas avoir assez d’argent pour des protections menstruelles. Elles ne vont alors pas à l’école, ni aux activités de loisirs, de peur d’être harcelées si des taches de sang apparaissent sur leurs vêtements. En Écosse, la fourniture gratuite de protections menstruelles dans les écoles c’est étendue aux pharmacies, aux centres communautaires et maisons de jeunes.
Des services publics forts pour des droits des femmes forts
Les supermarchés ont fait de superbes profits, pourtant le personnel est parmi les moins bien payés de Belgique ! La crise sanitaire montre clairement qui fait fonctionner la société : le personnel de nettoyage, du secteurs sociales, des soins, de l’enfance, etc. : autant de secteurs où les femmes sont majoritaires et où les contrats précaires et les bas salaires sont malheureusement la norme.
On constate une augmentation des violences domestiques. Les femmes sont confrontées à un choix impossible : rester avec un partenaire violent ou courir le risque de la pauvreté. L’augmentation du salaire minimum à au moins 14 euros brut par heure est une première étape nécessaire pour garantir à chacun.e une vie décente et des choix libres.
8 mars : luttons pour une alternative !
Les inégalités ont fortement augmentées. Si les footballeurs sont testés chaque semaine, ce n’est absolument pas le cas du personnel et des résident.e.s des maisons de repos. Les jeunes qui ne disposent pas de leur propre chambre, d’un ordinateur ou d’une bonne connexion internet ont beaucoup de mal à suivre l’enseignement à distance.
Les riches et les grandes entreprises font activement pression pour que leurs intérêts l’emportent. Les femmes, les jeunes, les travailleurs.euses doivent s’organiser pour défendre collectivement leurs intérêts.
Nous exigeons que les richesses disponibles soient utilisées pour empêcher une marche arrière sur le plan des droits et du niveau de vie des nouvelles générations de femmes. Nous voulons une société où les besoins de chacun.e d’entre nous sont mis au centre, et non ceux de l’extrême minorité capitaliste.
La campagne ROSA veut faire du 8 mars une journée de lutte. Nous prévoyons des actions dans différentes villes (dans le respect des mesures sanitaires) : des manifestations (statique), mais aussi des actions à l’école et sur le lieu de travail.
Rejoignez-nous ! Contactez-nous !- Bruxelles – Gare Centrale, 17h30
Actions organisée avec la Marche mondiale des femmes, mouvement dont fait partie la Campagne ROSA. - Liège, Gare des Guillemins, 17h30
- Autres rendez-vous sur le site de la Campagne ROSA
- Bruxelles – Gare Centrale, 17h30
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Coronavirus. La marche de Gand contre le sexisme est annulée

La 4e marche contre le sexisme à Gand aura lieu le 8 mars 2021
C’est malheureusement le seul choix responsable que nous puissions faire. Nous attendions avec impatience la 4e édition de cette Marche contre le sexisme à Gand, à laquelle plusieurs centaines de personnes devaient participer. Cette année devait marquer les esprits. A Gand, la Campagne ROSA a mené ces dernières semaines une campagne intense qui a lié la lutte contre le sexisme à la lutte pour un meilleur salaire minimum. La fusion des deux mouvements annonçait une manifestation combattive ce samedi, à l’instar d’autres initiatives dans cette direction. Ces derniers jours, les réactions enthousiastes n’avaient pas manqué lors de nos campagnes. Lundi dernier, le 9 mars, la grève à l’université de Gand (UGent) fut une excellente occasion d’illustrer que la lutte antisexiste peut et doit se traduire par des revendications socio-économiques concrètes.
Si le gouvernement n’entend pas prendre les mesures qui s’imposent, nous devons prendre nos responsabilités. Il devient de plus en plus évident que le gouvernement est réticent à adopter les mesures nécessaire en raison d’intérêts économiques. La recherche de profits à court terme fait aujourd’hui obstacle à un plan coordonné visant à mettre la santé publique au centre des préoccupations. Les plus faibles en paieront le prix le plus élevé. Ce sont les personnes âgées, les personnes ayant des problèmes de santé, mais aussi tous ceux qui travaillent dans le secteur social qui sont les plus exposés à l’infection. Ils doivent bénéficier de la meilleure protection possible. Nous prenons donc nos responsabilités et suivons les conseils des spécialistes. Chaque fois que cela sera possible, nous garderons nos distances pour tenter de protéger les plus vulnérables.
La Campagne ROSA ne manquait pas d’idées et de propositions à présenter aux manifestants ce samedi. Il nous sera impossible de le faire dans la rue. Mais nous appelons toutes celles et ceux qui désirent s’engager dans ce combat à nous contacter et à nous rejoindre. Nous allons utiliser les semaines à venir pour organiser de nouvelles actions et campagnes et pour nous former politiquement.
La 4e marche contre le sexisme de Gand n’aura pas lieu en 2020, mais nous lançons d’ores et déjà la date du 8 mars 2021.
Appel à la solidarité financière
La Campagne ROSA organise délibérément ses actions sans bénéficier de fonds de la part des autorités, des grandes entreprises ou de riches mécènes. Nos campagnes et le matériel dont nous avons besoin pour les faire vivre dépendent du soutien financier que nous récoltons parmi nos membres et sympathisants. Cette manifestation du 14 mars avait nécessité divers investissements que nous espérions financer le jour-même de la manifestation grâce à la vente d’autocollants et de badges. En conséquence de l’annulation de la marche, il nous manque 1.000 euros pour pouvoir atteindre l’équilibre. N’hésitez pas à nous aider à combler ce manque !
Vous pouvez verser votre contribution sur notre compte :
Numéro de compte de la Campagne ROSA : BE54 5230 8095 8497 (BIC : TRIOBEBB), avec pour communication: « Soutien ROSA + Nom + Prénom » -
Grande manifestation à Bruxelles pour la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes

Le mauvais temps ou le coronavirus n’ont pas empêché des milliers de manifestantes et de manifestants de descendre dans les rues de Bruxelles à l’occasion de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes. Pour la quatrième année consécutive, des actions combatives ont été organisées en Belgique à cette occasion. La Campagne ROSA, qui a organisé la première marche contre le sexisme en 2017, a de nouveau joué un rôle de premier plan cette année. Lors de la manifestation qui a eu lieu à Bruxelles, la Campagne ROSA a formé une délégation d’environ un millier de personnes dans une manifestation qui a réuni au total plus de 10.000 personnes.Le 8 mars étant tombé un dimanche, l’occasion était belle de mobiliser pour une grande manifestation nationale. Avec 10.00 personnes, ce potentiel a été confirmé. Une plus importante participation aurait sans aucun doute été possible si toutes les circonstances avaient été réunies. Ces derniers jours, il n’a quasiment été question que du coronavirus dans tous les médias et certains événements ont même été annulés. A cela s’ajoutait un temps maussade.
La défense de la sécurité sociale était le thème central de ce 8 mars, un filet de sécurité collectif qui a vu le jour il y a 75 ans en Belgique. Le caractère collectif de la protection sociale est diamétralement opposé à la politique d’austérité néo-libérale qui fait peser de plus en plus de risques sociaux sur le dos de chaque individu. Cela se répercute de façon évidente sur les familles, et plus particulièrement sur les femmes en leur sein.
La Journée internationale de lutte pour les droits des femmes est née en 1910 dans le mouvement socialiste, à une époque où ce dernier était en pleine expansion et avait encore une forte influence marxiste. Cette date s’inscrivait dans le cadre des journées internationales combattives autour de revendications offensives, comme pour l’instauration de la journée des 8 heures avec le 1er mai une vingtaine d’années auparavant. Aujourd’hui, une nouvelle génération entre en lutte pour poursuivre la lutte.
La politique antisociale de ces dernières années mine la sécurité sociale et oblige de plus en plus de travailleuses et de travailleurs à occuper des emplois mal payés et à temps partiel. La revendication de salaires plus élevés et d’un salaire minimum de 14 euros de l’heure est donc essentielle. Elle ferait une grande différence dans la vie de beaucoup de travailleuses et de travailleurs, en combinaison de l’individualisation des allocations sociales et d’un investissement public massif dans les services publics et la sécurité sociale.
Le sexisme présent dans toutes les sphères de la société est de plus en plus rejeté. “Mon corps, mon choix”, ont scandé les milliers de manifestantes et de manifestants à l’occasion de cette Journée internationale de lutte pour les droits des femmes. De nombreuses personnes faisaient références à la vague mondiale de protestation féministe sur les pancartes ou dans leurs slogans : “solidarité avec les femmes du monde entier”. Sur la scène de la Marche Mondiale des Femmes, le discours de Ginger Jentzen, de notre organisation-sœur Socialist Alternative, a été écouté avec attention après la manifestation. La lutte contre le sexisme est internationale !
Le sexisme et la division sont ancrés dans l’ADN du capitalisme, un système qui repose sur une forte concentration de richesses les mains d’une poignée de super-riches combinée à une grande inégalité, à des pénuries sociales et à des tensions dans le reste de la population. Cela favorise le sexisme, le racisme, la LGBTQI+phobie. La lutte contre le sexisme et pour l’égalité des droits est donc une lutte contre le capitalisme lui-même.
A l’instar des pionnières et pionniers de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes il y a plus de 100 ans, la Campagne ROSA défend un féminisme socialiste et se bat pour une société sans oppression ni exploitation, où les travailleuses et les travailleurs disposeraient du contrôle et de la gestion démocratiques des moyens de production. De cette manières, les intérêts de la collectivité seraient centraux et non la soif de profit d’une petite élite. La force sociale qui peut réaliser un tel changement de société, c’est le mouvement des travailleurs.Bien entendu, la Campagne ROSA n’est pas active que le 8 mars, elle lutte tout au long de l’année. Ce matin, nos activistes participent à la grève du personnel de l’université de Gand en faveur du salaire minimum de 14 euros, puisque quelques centaines de travailleuses et de travailleurs ne l’atteignent pas encore dans le nettoyage, les restaurants universitaires,… Il s’agit essentiellement de personnel féminin. Le 14 mars, une 4e marche contre le sexisme aura lieu à Gand, à nouveau autour des 14 euros, à l’occasion de l’Equal Pay Day (jour jusqu’auquel une femme doit travailler en moyenne pour obtenir le même salaire qu’un homme qui aurait travaillé jusqu’au 31 décembre). Le rendez-vous est à 15h à l’hôtel de ville.
Enfin, le 28 mars, il y a la conférence nationale de la Campagne ROSA au cours de laquelle nous voulons prendre le temps de discuter afin de nous renforcer dans nos luttes. De nombreux intervenants interviendront sur des thèmes tels que la lutte contre le sexisme, le droit à l’avortement, les femmes et le football, la lutte pour les droits des femmes en Russie, les droits LGBTQI+,… L’évènement prendra place de 10h à 19h à Bruxelles. Événement Facebook.
Quelques reportages-photos:
Photos de Liesbeth:
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L’université de Gand se prépare pour sa plus grande grève depuis des décennies

Action le 14 octobre dernier. Le 9 mars 2020 aura lieu la 4e édition de la grève féministe de l’Université de Gand (UGent). Les trois revendications de la campagne de cette année sont l’introduction d’un salaire minimum de 14€/heure, la statutarisation du personnel des restaurants universitaires et des crèches ainsi que l’internalisation du nettoyage. Cette grève pourrait bien être la plus importante de ces dernières décennies à l’UGent.
Par Tim Joosen, délégué CGSP à l’UGent
La CGSP-UGent fait campagne autour de ces revendications depuis le mois de mai dernier. Une pétition est également utilisée depuis septembre 2019, signée depuis lors par plus de 3.500 membres du personnel et étudiants. Quelques journées d’action ont été organisées avec succès. Le 14 octobre, quelque 70 étudiants, membres du personnel et sympathisants ont lancé ensemble la campagne vers les auditoires, les restaurants universitaires et les lieux de travail.
C’est ainsi qu’un large soutien a pu être construit autour de ces revendications, mais le conseil d’administration de l’université fait la sourde oreille. Il a donc été décidé de passer à la vitesse supérieure au début de cette année avec l’organisation d’une grève pour accroitre la pression sur le conseil d’administration.
Un jour de grève a été choisi pour le 9 mars 2020. Ces trois dernières années, une grève féministe contre le sexisme et pour l’égalité de genre a été organisée à l’UGent le 8 mars. Ces dernières années, cette campagne s’est principalement concentrée sur les revendications des chercheurs : l’inégalité des chances en matière de carrière pour les femmes, la compatibilité de la carrière de chercheur avec la vie familiale, etc. Pour l’action du 9 mars 2020 – le 8 mars est un dimanche cette année – les organisateurs de la grève féministe ont décidé d’inclure les revendications de la campagne de la CGSP comme exigences centrales : un salaire minimum de 14 €/heure, l’extension de l’engagement statutaire au personnel travaillant dans le secteur social (logements étudiants, restos étudiants, crèches, etc.), et l’internalisation du nettoyage, aujourd’hui organisé par un sous-traitant privé, ISS.
Ces dernières semaines, une délégation de la CGSP-UGent, de la Centrale générale de la FGTB (la centrale syndicale des travailleurs d’ISS) et des organisatrices de la grève féministe ont fait le tour de tous les postes de travail des restos, du nettoyage et des crèches. La campagne et ses revendications ont été discutées, et une forte motivation s’est rapidement manifestée ! De nombreux membres du personnel étaient prêts à se battre pour faire aboutir leurs revendications. Dès l’instant où la volonté de partir en grève était claire et massive, un préavis de grève a été déposé.
Le mouvement que nous avons observé ces derniers mois à l’UGent est unique à bien des égards. Le syndicat se bat pour des revendications offensives, non pas en riposte défensive à des attaques contre les conditions travail, mais en allant de l’avant pour une amélioration substantielle des conditions de travail. L’introduction d’un salaire minimum de 14 €/heure entraînerait une augmentation nette de près de 300 € par mois pour les salaires les plus bas. Pour le personnel des restos et des crèches, la statutarisation leur garantirait une bien meilleure protection en cas de maladie de longue durée ou de retraite, ainsi que leur sécurité d’emploi. L’internalisation du nettoyage faciliterait l’application de conditions de travail correctes et la défense des intérêts du personnel chargé du nettoyage. L’ensemble des revendications présentées par le syndicat repose sur ce qui est nécessaire pour le personnel.
L’étroite coopération entre la CGSP-UGent, le syndicat de la ‘‘société mère’’, et la Centrale Générale, le syndicat du sous-traitant de nettoyage, est également unique. Les délégués des deux centrales syndicales ont fait campagne côte à côte, organisant ainsi dans la pratique la solidarité entre les travailleurs au-delà des frontières de leur entreprise. Ensemble, ils défendent les intérêts de tous ceux qui travaillent dans les bâtiments de l’UGent, qu’ils travaillent directement pour l’université ou pour un sous-traitant.
Enfin, il existe également une coopération entre le syndicat et des couches plus larges de chercheurs et de militants étudiants : les Etudiants de Gauche Actifs, la Campagne ROSA, les Jongsocialisten et Comac ont agi avec le personnel, et parmi les organisateurs de la grève féministe se trouvent également des activistes qui n’appartiennent pas au syndicat. Il s’agit là d’un exemple très intéressant d’extension de la solidarité de nature à combattre le morcellement de la classe ouvrière organisé par le patronat.
Le rendez-vous du 9 mars est un prochain test important pour cette campagne : une grève réussie peut donner un nouvel élan pour porter le mouvement à un niveau supérieur : transformer le soutien passif en une mobilisation active. De plus, si la grève est effectivement aussi réussie que prévu, ce sera la plus grande grève à l’UGent ces dernières décennies. Cela modifiera fondamentalement le rapport de forces au sein de cette institution.
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Journée internationale de lutte pour les droits des femmes : pour un féminisme socialiste

Manifestation nationale ce 8 mars : 14h, gare centrale à Bruxelles
La Journée internationale de lutte pour les droits des femmes a déjà une longue histoire derrière elle. Créée lors de la première vague du féminisme – la première journée a lieu en 1911 suite à une décision de la deuxième Conférence Internationale des femmes travailleuses, à la suggestion de Clara Zetkin(1) – elle connut une nouvelle impulsion lors de la deuxième vague (qui commence à la fin des années 1960). Ces dernières années, cette journée a de nouveau été reprise comme journée de lutte. En Belgique, la Campagne ROSA (résistance contre l’Oppression, le Sexisme et l’Austérité) a joué un rôle de pionnier avec l’organisation, le 8 mars 2017, d’une Marche contre le Sexisme à Gand.
Par Anja Deschoemacker
L’émancipation des femmes exige une sécurité sociale forte
Cette année, la Campagne ROSA veut profiter du fait que le 8 mars tombe un dimanche pour mobiliser vers une manifestation nationale à Bruxelles afin d’établir cette journée comme un jour d’action et de lutte pour les années à venir. À cette fin, nous collaborons avec la Marche mondiale des femmes, une coupole d’associations féministes et syndicales.
Le message central de cette année – à l’occasion du 75e anniversaire de la sécurité sociale – est que la lutte féministe implique de défendre la sécurité sociale. Des générations de femmes n’ont pu se libérer, faire leurs propres choix et élever leur famille que grâce à l’existence de ce filet de sécurité.
Les femmes ont été les principales victimes du démantèlement de ce filet de ce mécanisme de solidarité collective au cours de ces 30 dernières années. Ainsi, depuis l’introduction du statut de cohabitant en 1980, les femmes ont été tout particulièrement victimes de la chasse aux chômeurs. Cette perte de droits a contraint les femmes à accepter de nouveaux emplois à temps partiel et mal rémunérés. L’individualisation des allocations sociales et l’instauration d’un salaire minimum brut de 14 euros de l’heure pourraient compenser une grande partie de ce déclin.
La Campagne ROSA et le féminisme socialiste
Aujourd’hui, il fait bon ton de se dire ‘‘féministe’’. Tout comme Alexander De Croo, vice-premier ministre de l’Open VLD dans le gouvernement précédent. Cependant, son ‘‘féminisme’’ ne l’a pas empêché de relever l’âge de la retraite avec le gouvernement, de renforcer la dégressivité des allocations de chômage, d’économiser des centaines de millions en soins de santé,…
Le précédent gouvernement Michel a adopté une longue liste des mesures qui ont durement frappé les femmes, tant au niveau de leurs revenus que de leur charge de travail au boulot et à la maison. De Croo est un féministe à la manière dont le sont tous les partis qui défendent le capitalisme : uniquement si cela ne leur coûte rien, à eux et à leurs amis qui siègent aux conseils d’administration des grandes entreprises !
Même lorsque cela ne leur coûte rien, leurs ‘‘revendications féministes’’ ne constituent jamais une ligne rouge. C’est ce qu’a illustré le débat au Parlement il y a deux ans et à nouveau aujourd’hui au sujet de l’extension de la période pendant laquelle l’avortement peut légalement avoir lieu, de 12 à 18 semaines. Ces sujets sont toujours sujets de marchandage. Il y a deux ans, le MR et l’Open VLD se sont retirés de la majorité alternative formée au Parlement autour de cette proposition. Ils ont soutenu celle de leurs partenaires gouvernementaux, la N-VA et le CD&V : un statu quo. Aujourd’hui, le PS a déjà indiqué que si le CD&V est prêt à former une coalition fédérale Vivaldi, le PS retirera cette proposition des discussions parlementaires afin de la discuter dans les négociations gouvernementales (lire : la laisser tomber ou sérieusement la réduire).
La pleine émancipation des femmes est impossible en restant dans le cadre du capitalisme. Ce système s’épanouit à la fois sur le travail faiblement rémunéré des femmes dans toutes sortes de secteurs et sur le travail non rémunéré des femmes au sein de leur famille. Plusieurs études démontrent que si nous devions convertir ce travail non rémunéré en emplois rémunérés, cela coûterait des milliers de milliards d’euros à l’échelle internationale.Salaire d’appoint
De plus en plus de femmes ont un emploi. Jamais auparavant il n’y a eu si peu de femmes au foyer. Mais cette croissance de la main-d’œuvre féminine s’est accompagnée de la création d’emplois qui n’offrent pas les moyens de vivre correctement. Le modèle du ‘‘gagne-pain masculin’’ a disparu – le salaire des hommes ne suffit plus pour faire vivre confortablement toute une famille – mais il a souvent été remplacé par un modèle qui ne repose pas sur deux vrais salaires, mais plutôt un et demi. Les mères célibataires sont donc condamnées à la pauvreté beaucoup plus souvent que les autres groupes de la société. Quant à celles qui vivent en couple, cela signifie dans de nombreux cas qu’elles restent dépendantes d’un homme pour subvenir à leurs besoins.
Le fardeau des tâches domestiques
Les femmes sont généralement les principales prestataires de soins et de services dans leur famille, même en occupant un emploi. En moyenne, les femmes disposent de beaucoup moins de temps libre que les hommes, même si elles travaillent moins d’heures en dehors du foyer. La suppression progressive des soins de santé et la privatisation de nombreux services (crèches, soins aux personnes âgées,…) impliquent que les tâches domestiques des femmes ont augmenté plutôt que diminué ces dernières années. Des tâches de soins aux autres ont été renvoyées aux familles, pour généralement finir sur les épaules des femmes.
Pour rendre les femmes égales aux hommes sur le marché de l’emploi, il est nécessaire de socialiser largement les services et les soins qui constituent aujourd’hui le travail non rémunéré des femmes : repas chauds au travail et à l’école, blanchisseries et ateliers de repassage, services de nettoyage à domicile, services publics de garde d’enfants, structures d’accueil et de soins à domicile abordables pour les malades, les personnes âgées, les personnes handicapées, etc.
Aujourd’hui, les gouvernements économisent sur les services publics et les soins de santé pour exonérer d’impôts les entreprises et les riches, ce qui permet à ceux-ci d’empocher une portion encore plus grande du fruit du travail des travailleurs. Dans ce système capitaliste en crise, la seule façon de continuer à accroître les profits est de voler davantage à la collectivité et aux travailleurs. Les capitalistes ne fourniront jamais les moyens nécessaires à l’application d’un tel programme d’émancipation.
Notre allié : le mouvement ouvrier
Pour un programme social qui convertit la majeure partie du travail non rémunéré des femmes en emplois rémunérés (et nous voulons des emplois bien rémunérés et des conditions de travail dignes !), la société – et la classe ouvrière qui en constitue la majorité – doit mettre la main sur les coffres-forts capitalistes. Le seul groupe capable de le faire, c’est la classe ouvrière. Notre féminisme est donc socialiste de deux façons : dans le programme socialiste nécessaire à l’émancipation réelle des femmes et à la fin de leur position de second ordre dans la société et aussi dans le lien avec la classe ouvrière dans la lutte en faveur de ce programme.
Combattre les discriminations au sein de mouvement ouvrier
Bien sûr, la classe ouvrière n’est pas exempte de sexisme. Comment en serait-il autrement ? Dans une situation de pénurie, il y aura toujours un conflit entre ceux qui ont accès au peu qui est disponible et ceux qui n’y ont pas accès du tout. Le sexisme, le racisme, la LGBTQI-phobie, le nationalisme oppressif,… sont quotidiennement déversés dans le monde par tous les médias. Mais la classe ouvrière elle-même est victime de ces préjugés, car cette division l’affaiblit. Cette conscience n’est pas toujours et partout présente, mais en période de lutte, la conscience peut se développer par bonds.
C’est ce qui se passe sous nos yeux aujourd’hui dans les pays où la lutte de masse fait rage depuis plus longtemps. Dans des pays comme le Chili, le Liban, le Soudan,… pour n’en citer que quelques exemples, les femmes sont en première ligne de la lutte de masse contre les régimes en place et elles sont non seulement acceptées, mais aussi accueillies avec enthousiasme. C’est l’expérience de la lutte commune contre un ennemi commun – la classe dirigeante – qui permet de briser les préjugés. C’est l’expérience vivante de la lutte : la division nous affaiblit mais, ensemble, nous pouvons constituer un véritable poing capable de donner naissance à une société socialiste qui en finira avec l’oppression et la discrimination.
1) Clara Zetkin, 1857-1933, militante marxiste et féministe du mouvement ouvrier allemand, socialiste puis communiste, meurt en exil peu après l’arrivée au pouvoir d’Hitler.
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8 mars : Luttons ensemble pour de nouvelles victoires !
‘‘Le 8 mars, tous les jours.’’ C’était la banderole brandie par la Commission femmes de la CGSP lors de la manifestation pour une sécurité sociale forte du 28 janvier dernier. Et, effectivement, la lutte pour les droits des femmes, c’est tous les jours !Par Celia (Bruxelles)
Depuis plusieurs mois, les luttes se sont développées dans de nombreux secteurs. Nous avons notamment vu les aide-ménagères des titres-services dénoncer, depuis le mois d’octobre, leurs conditions de travail, leurs bas salaires et le harcèlement sexuel qu’elles subissent tous les jours. Une lutte féministe ? Oui, car ‘‘à Bruxelles, les travailleuses titres-services sont majoritairement des femmes (96 %) d’origine immigrée (98 %) (…) un quart d’entre elles ont plus de 50 ans. Elles ont généralement des enfants, avec une proportion importante (16 %) de mères seules.’’(1) Après plusieurs manifestations, une grève en janvier, et plein de bâtons dans les roues pour pouvoir mobiliser correctement, elles ont réussi à obtenir une augmentation de salaire de 0,8%. C’est moins que l’Accord interprofessionnel (AIP) et ce n’est clairement pas suffisant pour vivre dignement. Mais c’est une première bataille gagnée contre les patrons qui ne voulaient rien céder au départ ! Une lutte légitime ? Oui, car les multinationales continuent de faire des bénéfices sur le dos de ces travailleuses, Sodexo, par exemple, a eu un chiffre d’affaires de 20 milliards d’euros en 2018 ! Alors qu’avec 11,50 € brut/h, les 145.000 travailleuses du secteur figurent parmi les salaires les plus faibles du pays.
Au même moment, c’est le mouvement de La Santé en Lutte qui ne relâche rien et qui s’étend à plusieurs villes belges comme Liège qui vient d’avoir sa première Assemblée générale et Charleroi qui aura la sienne prochainement. Depuis le 8 mars dernier, les travailleurs des hôpitaux ne veulent plus accepter les salaires trop bas, le manque de matériel, les heures de travail à rallonge, et un sexisme devenu très ordinaire ; pour ne citer que certaines de leurs revendications. Une lutte féministe ? Oui, car en Belgique, les infirmiers sont essentiellement des infirmières (à plus ou moins 85%)(2) ! Une grande manifestation de La Santé en Lutte aura lieu le 29 mars, à laquelle le PSL et la Campagne ROSA seront présents.
Enfin, pour citer un dernier exemple de lutte, c’est toute l’université de Gand (UGent) qui sera en grève le 9 mars, pour obtenir une augmentation des salaires les plus bas à hauteur de 14€/heure. A l’UGent, 101 personnes sont payées moins de 14€/h brut. Les catégories moins rémunérées dans l’université sont celles qui travaillent dans les restaurants, donc une majorité des femmes. Il leur faut 12 ans d’ancienneté pour gagner 14€ de l’heure ! Si cette lutte – menée par les travailleuses et les travailleurs – est remportée à l’UGent, ce serait un exemple de victoire, un précédent capable d’entraîner une dynamique similaire ailleurs, dans d’autres universités, dans d’autres secteurs, dans toute la Belgique,… N’oublions pas, qu’en Belgique, dans la tranche des 10% de salaires les plus bas, il y a 70% de femmes !
(1) http://inegalites.be/Titres-services-la-precarite?fbc lid=IwAR1cV5_H1RHi0u_ZTybgSFYGV4LMcizC_Spp9Bm8WS7rXnf7HC7gNwdLvd4#nh1
(2) https://lasanteenlutte.org/blog/ -
25 novembre : Pour une lutte féministe socialiste contre la violence basée sur le genre !

“Nous ne sommes pas silencieux. Nous n’avons pas peur. Nous n’obéissons pas.” – Istanbul, Turquie – chants de protestation contre la violence de genre entendu lors de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes en 2019, au mépris de l’interdiction de manifester imposée par l’État et de l’utilisation des gaz lacrymogènes par la police.“Ma vie n’est pas votre porno” – Séoul, Corée du Sud, slogan principal d’une manifestation de 70.000 personnes contre les ‘caméras espion’ dans les toilettes publiques, octobre 2018.
“La violence sexiste nous tue, tout comme la politique de l’Etat” – pancarte vue lors d’une manifestation à Buenos Aires, en Argentine, contre les féminicides et pour le droit à l’avortement, juin 2019.
“Mon corps n’est pas ta scène de crime” – pancarte vue au Cap, en Afrique du Sud, lors d’une manifestation contre la violence de genre à la suite d’un pic de féminicides, septembre 2019.
A l’approche du 25 novembre, la Journée internationale pour l’élimination de la violence à l’égard des femmes, nous célébrons et nous montrons solidaires des innombrables luttes et mouvements sociaux qui ont éclaté dans le monde entier contre la violence sexiste sous toutes ses formes. #MeToo a levé le voile sur la prévalence de la violence sexiste et familiale, du harcèlement et des abus. L’ampleur de #MeToo a été bouleversante, elle a fait tomber de puissants hommes d’affaires et politiciens et a inspiré des survivantes de tous les milieux, des athlètes aux étudiantes des universités en passant par les travailleuses de secteurs aussi divers que l’agroalimentaire, l’hôtellerie, les usines, le divertissement et la technologie, pour parler haut et fort. #MeToo a mis l’accent sur la nature systémique de la violence sexiste et sur le fait que toutes les femmes ou presque, de même que les personnes qui ne se conforment pas aux normes sexuelles, subissent une forme de harcèlement sexuel et craignent d’être victimes de violence à un moment de leur vie. La bravoure des survivantes qui ont raconté leur histoire personnelle a fait entrer la question dans la sphère publique à une échelle sans précédent. Cela a marqué tous les pays du monde et a donné un énorme élan à la construction de la lutte collective contre la violence sexiste.
La violence de genre enracinée dans le système capitaliste
De plus, que ce soit vis-à-vis de Harvey Weinstein, de Jeffrey Epstein ou de Donald Trump, #MeToo a souligné aux yeux de millions de personnes le sentiment d’impunité concernant les abus et le harcèlement qu’éprouvent les individus riches et puissants de la classe dirigeante. Ces personnes incarnent la nécessité de lutter contre le système capitaliste lui-même quand nous nous soulevons contre la violence de genre sous toutes ses formes et où qu’elle se produise, y compris sous la forme la plus courante de violence, celle issue d’un partenaire ou d’un ancien partenaire.
Les statistiques sont à elles seules une mise en accusation du système. Une femme sur trois dans le monde a été victime de violence physique et/ou sexuelle de la part de son partenaire ou non au cours de sa vie. Dans une étude récente réalisée aux Etats-Unis auprès de plus de 13.300 femmes âgées de 18 à 45 ans, environ une femme sur 16 a déclaré que sa première expérience sexuelle était un viol (JAMA Internal Medicine).
Les idées machistes qui alimentent la violence faite aux femmes et aux enfants alimentent la violence faite à l’égard de la communauté LGBTQI+, et plus particulièrement la communauté transgenre et non conforme au genre. Il est impossible de mesurer les conséquences que représentent la violence et les mauvais traitements généralisés à l’égard des femmes et des familles au niveau financier, mental et physique pour les personnes survivantes. Pour ne citer qu’un exemple, une étude importante a démontré que les graves mauvais traitements subis durant l’enfance sont associés à un risque 79 % plus élevé de développer une endométriose à l’âge adulte, une condition gynécologique atrocement douloureuse. Une enquête menée par Women’s Aid auprès de survivantes britanniques de violence familiale et publiée en mars 2019 a révélé que plus de deux femmes sur cinq parmi elles étaient endettées et qu’un tiers avaient dû abandonner leur maison en raison de la violence subie.
L’explosion des luttes contre la violence de genre et le harcèlement sous toutes ses formes est l’antidote le plus puissant à la violence, aux abus et au harcèlement qui sont l’antithèse de la solidarité de la classe ouvrière et de l’action collective nécessaires pour changer la société.
S’organiser contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail
Parmi les mouvements qui se sont développés au cours de ces dernières années, on trouve des travailleurs qui se sont organisés contre le harcèlement sexuel sur leur lieu de travail. Quatre-vingts pour cent des travailleurs du textile bangladais – parmi lesquels une grande majorité de femmes et de jeunes filles – ont été victimes de harcèlement sexuel sur leur lieu de travail ou en ont été directement victimes, et cette question a largement contribué à la campagne de syndicalisation des travailleurs du textile. Les travailleurs de Google ont mené des actions coordonnées dans plusieurs pays du monde entier le 1er novembre 2018 contre les indemnités de départ de cadres supérieurs accusés de harcèlement sexuel ainsi que contre les discriminations racistes au travail. Non seulement cette action a donné lieu à des concessions de la part de la direction, mais elle a fait partie intégrante des premiers pas vers la syndicalisation des travailleurs de cette société notoirement non syndiquée. En Afrique du Sud, en juin 2019, 200 mineurs à prédominance masculine ont mené une action de grève courageuse, notamment en refusant de manger, alors qu’ils occupaient une mine pendant plusieurs jours contre le harcèlement sexuel dont une de leurs collègues féminines avait été victime de la part d’un patron. Les grèves des travailleurs de l’hôtellerie appelées sous la bannière #MeToo ont brillamment concrétisé dans la lutte les témoignages individuels de #MeToo.
L’introduction de la lutte contre la violence de genre sur le lieu de travail est particulièrement puissante. Entrer en lutte collective avec ses collègues de travail a, par le biais de la grève, le pouvoir économique d’exercer une pression massive sur les entreprises pour licencier les managers véreux ou pour introduire des mesures garantissant une tolérance zéro face au harcèlement sexuel au travail.
D’autre part, la lutte elle-même sensibilise les travailleurs de tous les genres aux questions liées à la violence de genre, ce qui aiguise le sens de la solidarité face à la violence de genre sous toutes ses formes. C’est en soi un défi dynamique posé aux comportements et attitudes sexistes et misogynes. La revendication la plus élémentaire des travailleurs pour la dignité et la sécurité au travail – ainsi que pour des salaires et conditions de travail décents pour tous les travailleurs – signifie notamment de disposer d’un lieu de travail exempt de harcèlement sexuel.
Notre réponse est la lutte de masse
L’autre évolution majeure du mouvement féministe au cours de ces dernières années est le développement de la “grève féministe”. Dans sa forme la plus développée, elle a impliqué jusqu’à 7 millions de travailleurs dans l’Etat espagnol le 8 mars 2019 autour d’une série de revendications allant de l’égalité pour un salaire décent au retrait des mesures d’austérité et à la fin des violences de genre, sur le modèle de la forte grève générale qui avait réuni 5 millions de personnes lors de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes de l’année précédente.
Le 14 juin 2019, en Suisse, un demi-million de personnes sont descendues dans la rue dans le cadre d’une “grève féministe” similaire, une action de grève générale. Cette grève a tout d’abord été appelée par les femmes des syndicats qui avaient fait adopter une résolution appelant à une grève le 14 juin 2019 lors du Congrès syndical suisse de juin 2018. Le fait que des syndicalistes de base et des jeunes femmes soutenant l’appel dans tout le pays soient passées à l’action pour donner corps à cet appel et s’assurer qu’il n’ait pas seulement eu lieu, mais qu’il provoque un tremblement de terre – la plus grande mobilisation de masse des travailleurs depuis des décennies – témoigne d’une radicalisation générale et d’une grande volonté de changement.
Nous en avons également trouvé une expression dans le mouvement de décembre 2018 en Israël qui a uni de manière inspirante Juifs et Palestiniens dans une “grève des femmes” et dans des manifestations de dizaines de milliers de personnes contre les féminicides. En septembre 2019, un groupe de Palestiniennes a défié la répression brutale de l’Etat israélien et a organisé des manifestations contre les féminicides en Cisjordanie, à Gaza et en Israël.
Les “grèves de femmes” ou les “grèves féministes”, ainsi que les occupations massives d’universités au Chili et de places en Argentine, qui ont caractérisé le mouvement de masse contre les fémicides en Amérique latine “Ni Una Menos” (pas une de moins), montrent que mouvement s’approprie les armes les plus puissantes du mouvement ouvrier, les grèves et les occupations. Ce développement est très inconfortable pour les féministes les plus radicalement pro-capitalistes et pro-establishment puisque ce sont les méthodes de lutte de la classe ouvrière qui sont employées et que cela inspire l’ensemble de la classe ouvrière à entrer en action de masse, plus particulièrement par le biais de la grève générale. En Argentine, Ni Una Menos a concentré l’attention du mouvement de masse contre les fémicides sur la violence étatique, à savoir l’interdiction de l’avortement. Ce mouvement de masse d’une inspiration phénoménale, dont la victoire sauverait la vie de femmes et de personnes enceintes et stimulerait considérablement la lutte pour la légalisation de l’avortement en Amérique latine.
Tout comme c’est le cas avec le mouvement des jeunes pour le climat, ces luttes ne sont pas marquées par une conscience qui considérerait cette thématique comme isolée du reste. Il est juste et absolument nécessaire que le mouvement contre la violence de genre s’attaque à l’austérité dans les services publics ainsi qu’aux salaires de misère et lutte pour plus de logements sociaux, contre la gentrification de nos villes, contre la pauvreté des parents isolés et des retraités, contre le sexisme, le racisme et le caractère anti-travailleurs du système judiciaire ou encore pour la justice climatique. Au vu de l’impact de la violence de genre et du harcèlement sur la vie de la classe des travailleurs et des pauvres, tout cela ne représente qu’un seul et même combat.
Pour lutter efficacement contre la violence sexiste, il faut rompre avec le féminisme des dirigeantes d’entreprises telles que Sheryl Sandberg et les féministes libérales de l’establishment politique et économique en général. Leurs intérêts de classe entrent inévitablement en conflit avec les revendications essentielles aux femmes pauvres et issues de la classe ouvrière à travers le monde.
La récente vague de luttes féministes et de mouvements de masse ont déjà remporté d’importants succès. Il y a eu les victoires remportées contre les lois autorisant l’auteur d’un viol à épouser sa victime pour échapper à la prison en Jordanie, au Liban, en Tunisie et en Malaisie. Il y a eu la victoire remportée contre le traitement sexiste de l’affaire de “La manada” (“La meute”) dans l’État espagnol. Il y a eu le mouvement de masse en Irlande contre l’interdiction constitutionnelle de l’avortement, une lutte qui a duré des décennies et qui a remporté le droit à l’avortement gratuit par le biais des services de santé et dans laquelle les féministes socialistes du Comité pour une Internationale Ouvrière (Majorité) ont joué un rôle central.
La menace de l’extrême droite
Cependant, de Trump à Bolsonaro en passant par Viktor Orban, l’essor de la droite populiste et de l’extrême droite démontrent que le système capitaliste ne se contente pas de s’opposer à de nouvelles victoires, il menace également des droits acquis il y a des décennies lors des précédentes vagues de lutte des féministes et ouvrières. C’est ce qu’illustre de façon la manière dont est constamment menacé l’arrêt Roe vs Wade qui a légalisé l’avortement aux États-Unis en 1973, une des plus grandes victoires du féminisme de la deuxième vague.
L’atmosphère créée par la campagne électorale et la victoire de Bolsonaro au Brésil a accru la violence subie par les personnes noires, les femmes et les LGBTQI+, tout particulièrement celles issues d’un milieu ouvrier ou pauvre. Bolsonaro a un jour déclaré à une députée : “Je ne vais pas te violer parce que tu es très laide”. Il entretient des liens avec des groupes fascistes et exprime sans aucune honte sa misogynie et son racisme. Le nombre de fléminicides au Brésil a augmenté de plus de 4 % pour atteindre 1.206 cas en 2018. Les incidents de violence sexuelle signalés cette année-là ont augmenté de 4,1 %, plus de la moitié des victimes étant des enfants de moins de 13 ans. Les chiffres montrent également qu’une femme a été victime de violence domestique toutes les deux au Brésil en 2018. Dans un tel contexte de crise sociale, qui s’est d’ailleurs aggravé depuis son arrivée au pouvoir en janvier 2019, il n’est pas surprenant de constater que les femmes – en particulier les jeunes, les retraitées, les travailleuses, les noires, les indigènes et les pauvres – aient été à l’avant-garde de la lutte contre Bolsonaro. Le soutien ouvert de Bolsonaro à la cupidité des entreprises, quel qu’en soit le coût, est incarné par la privatisation et la destruction de l’Amazonie, l’exemple le plus frappant de la manière dont les profits de l’élite capitaliste brûlent la planète.
La seule manière capable de défier et de vaincre avec certitude la menace de la droite est une lutte reposant la classe ouvrière contre le status quo capitaliste responsable du mécontentement et de l’aliénation liés au développement de la droite. Une nouvelle récession mondiale est imminente. L’élite politique et économique capitaliste tentera de l’utiliser pour aggraver encore la précarité des travailleurs et des jeunes. Il en ira de même avec les inégalités de classe extrêmes qui caractérisent le capitalisme aujourd’hui. Il est urgent de rassembler la classe des travailleurs et les opprimés en lutte. Un tel mouvement peut défendre une alternative socialiste à la crise capitaliste.
Mettre le capitalisme sur le banc des accusés
L’oppression des femmes et des LGBTQI+, et donc son expression la plus flagrante qui est la violence sexiste, fait partie intégrante du système capitaliste. Historiquement, le capitalisme a favorisé dès le début l’idéologie rétrograde de la famille patriarcale comme outil de son ascension. Aujourd’hui, selon une étude d’Oxfam, le travail non rémunéré effectué par les femmes à travers le monde s’élève à la somme astronomique de 10.000 milliards de dollars par an, soit 43 fois le chiffre d’affaires annuel d’Apple. Cela illustre à quel point l’oppression des femmes est dans l’ADN du système. Ce travail non rémunéré est un outil vital pour le capitalisme pour le maintien et le renouvellement de sa force de travail dont le travail crée le profit des classes capitalistes. Les sociétés qui reposent sur l’oppression des femmes et la perpétuent cherchent de par leur nature à contrôler la sexualité des femmes, par exemple par le biais de la structure familiale patriarcale. Les violences de genre et sexuelles font partie de la coercition dans cette structure, ainsi que, par exemple, la limitation par l’État de l’accès aux droits reproductifs. Différentes formes de violence de genre sont liées entre elles, depuis le harcèlement sexuel jusqu’au viol lui-même, avec pour base commune l’objectivisation du corps des femmes.
La lutte pour une société socialiste est un aspect vital de ma lutte pour la libération des femmes et des personnes LGBTQI+, une société où la structure familiale patriarcale deviendrait réellement une chose du passé, une société où serait appliquée la réduction collective du temps de travail et où le logement, les soins aux enfants, les soins aux personnes âgées et les emplois seraient publics, de qualité et accessibles à tous.
Sous le capitalisme, comme l’a expliqué Marx, tout devient une marchandise. Le corps des femmes devient une marchandise par le système du profit. Des industries qui rapportent des milliards comme la pornographie et l’industrie du sexe reflètent, perpétuent et profitent de l’inégalité entre les genres, et sont donc des ennemis de la véritable libération sexuelle et de la liberté. La réaction des Etats capitalistes face à ces industries est souvent de réprimer la majorité des femmes et des personnes non conformes au genre, souvent des migrants et des personnes de couleur, qui travaillent dans ces industries plutôt que de défier les capitalistes qui en tirent du profit. En outre, ceux qui sont brutalement victimes de trafic dans ces industries subissent la répression de l’Etat capitaliste. Cela a été très médiatisé aux Etats-Unis avec le cas de Cyntoia Brown, une jeune fille de 16 ans qui a passé une dizaine d’années en prison après été sous le contrôle brutal d’un proxénète et avoir tué un “client” violent. Une vaste campagne lui a évité de passer encore quatre décennies supplémentaires derrière les barreaux.
La nature même de l’Etat capitaliste et du système repose sur la violence. Comment mettre fin à la violence interpersonnelle dans un monde où les armées capitalistes et impérialistes sont employées par la classe dirigeante pour réprimer et faire la guerre ?
Aujourd’hui, nous assistons à l’invasion brutale du nord de la Syrie par les forces turques dans le but d’écraser la zone autonome kurde du Rojava. Le régime dictatorial d’Erdogan cherche à détruire toute forme d’autonomie gouvernementale kurde dans la région. Cela se passe avec le soutien total du régime de Trump. Une fois de plus, l’impérialisme américain, et l’impérialisme en général, se sont révélés être de faux amis du peuple kurde opprimé. Le courage des combattants des factions armées majoritairement kurdes des YPG (Unités de protection du peuple) et YPJ (Unités de protection des femmes) basées au Rojava dans la lutte contre l’Etat islamique a constitué une source d’inspiration pour beaucoup de gens dans le monde en 2014-2015. La brutale violence d’État à leur encontre est emblématique de la nature violente du capitalisme et de l’impérialisme. Nous savons de plus que les réfugiés créés par la guerre sont parmi les êtres humains les plus vulnérables à la violence sexuelle.
Violence et sexisme dans l’Etat capitaliste
Hong Kong est l’une des villes les plus néolibérales du monde. Un mouvement social de masse pour la démocratie s’y développe, imprégné d’une forte opposition aux conditions de travail et de logement précaires, et fait l’objet d’une répression violente de la part de l’Etat. Des tirs à balles réelles ont eu lieu contre des adolescents qui manifestaient. Des tactiques similaires sont utilisées contre les masses en Catalogne. La violence d’Etat capitaliste est utilisée pour protéger le statu quo.
Étant donné cet aspect de l’État capitaliste – ainsi que le lien inextricable entre capitalisme, impérialisme et guerre – l’existence d’attitudes machistes et racistes au sein de la police et des forces armées est utile et nécessaire au système. Cette réalité est reflétée par les statistiques. Aux États-Unis, des études ont indiqué qu’au moins 50 % des anciens combattants de sexe masculin ayant des problèmes de santé mentale liés au combat commettent des actes de violence conjugale et familiale, et qu’au moins 40 % des familles de policiers sont victimes de violence familiale, comparativement à 10 % de la population générale.
En outre, la mise en cause systématique des victimes dans les procédures judiciaires (le victim-blaming) est une caractéristique des affaires judicaires de violence sexuelle dans le monde entier. En novembre 2018, Ruth Coppinger, députée du Socialist Party (section irlandaise du Comité pour une Internationale Ouvrière (Majorité)), a bénéficié d’une attention virale sur les réseaux sociaux et d’une audiance inédite dans les médias à l’échelle internationale (de la télévision nationale indienne au New York Times) en dénonçant le victim blaming. Elle avait alors tenu en main un string dans l’enceinte du parlement pour dire que “cela ne signifie pas un consentement” après que l’avocat d’un homme accusé d’avoir violé une adolescente avait parlé des sous-vêtements en dentelle de la victime adolescente au tribunal. Elle a utilisé cette plate-forme pour appeler à l’organisation de manifestations en Irlande contre le sexisme enraciné dans cet État et aussi pour défendre l’idée d’une grève mondiale le 8 mars à l’occasion de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes.
Construire la lutte féministe socialiste internationale
Jusqu’au 25 novembre, date à laquelle d’importantes manifestations contre la violence à l’égard des femmes auront lieu dans de nombreux pays du monde, nous publierons sur worldsocialist.net des articles d’un certain nombre de sections du Comité pour une Internationale Ouvrière (Majorité) sur la lutte contre la violence à l’égard des femmes.
Le jour-même, nos camarades du monde entier participeront aux nombreuses manifestations et actions contre la violence de genre. Ils feront tout particulièrement pression pour construire l’aile féministe socialiste du mouvement. Nous voulons rompre résolument avec tout courant féministe qui cherche à s’adapter aux intérêts de l’establishment capitaliste. Le féminisme socialiste est une lutte collective. Il s’agit de solidarité. De s’allier à la classe ouvrière, aux pauvres et aux opprimés du monde de tous les genres et de toutes les nationalités dans une lutte commune contre le capitalisme.
Il est urgent d’intensifier le mouvement pour mettre fin à la violence de genre qui a déjà fait descendre des millions de personnes dans les rues du monde entier, y compris en Europe du Sud et en Amérique latine, par des grèves et des occupations de masse. Les féministes socialistes sont inextricablement liés à la construction d’un mouvement de masse de la classe des travailleurs et des opprimés pour une transformation socialiste de la société.
A Hong Kong, la révolte de masse en faveur de la démocratie qui a éclaté s’est accompagnée de femmes organisant des manifestations #MeToo contre la violence d’Etat et sexiste. Au Liban, où la lutte contre la pauvreté a explosé dans les rues en octobre 2019, les manifestantes ont twitté sur Twitter qu’elles étaient des révolutionnaires et non des “babes” en réponse au traitement sexiste et objectivant qu’elles ont reçu dans les médias. Comme le proclame la chanson Bread and Roses sur la grève des ouvrières textiles à Lowell, aux États-Unis, en 1912 : ” le soulèvement des femmes signifie le soulèvement de nous tous “.
Luttons contre la violence sexiste ! Luttons contre le système capitaliste qui engendre les inégalités et l’absence de démocratie ! Dans ce système, une poignée de milliardaires mènent la barque, profitent de l’oppression des femmes et cherchent à diviser la classe des travailleurs de toutes les manières possibles pour éviter de faire face à une riposte commune. Une alternative socialiste collectiviserait les richesses et les ressources-clés, des banques aux grandes entreprises, pour les placer démocratiquement aux mains de la classe des travailleurs afin de planifier l’économie en fonction des besoins des êtres humains et de la planète. Une telle société, fondée sur la solidarité, la coopération humaine et l’égalité, en finirait avec les racines de l’oppression et commencerait à construire un monde où nous pourrions véritablement nous assurer que plus aucune vie ne serait perdue ou brisée en raison de la violence sexiste.
- Ni Una Menos –pas une de moins – plus aucune vie ne doit être perdue à cause de la violence de genre ; plus aucun dommage à la santé mentale ou physique ! Nous luttons pour mettre fin à la violence de genre, aux abus et au harcèlement sous toutes leurs formes et partout où ils se produisent : au travail, à la maison, dans les écoles et les universités, dans les institutions publiques, dans la rue, en ligne.
- Construisons des manifestations de masse autour du 25 novembre contre la violence de genre, en tant qu’étape vers des manifestations de masse et des grèves de masse au niveau international le 8 mars 2020.
- Saisissons la richesse de l’élite capitaliste pour financer une expansion massive des services publics ; la gratuité des soins de santé (y compris de bons soins de santé mental) ; la gratuité des services de garde d’enfants ; le développement de services spécialisés en matière de violence domestique et sexuelle disponibles localement pour toute personne qui en a besoin. Les soins de santé mentale devraient inclure l’accès local à des conseillers et thérapeutes dont les victimes ont besoin, ainsi que des évaluations et des traitements psychologiques spécialisés pour les auteurs de violences.
- Un véritable contrôle des loyers et la construction de logements sociaux en masse : chacun a le droit à un logement sûr, abordable et paisible.
- Pour une éducation sexuelle gratuite, de qualité, publique, laïque, progressiste, adaptée à l’âge, inclusive envers les personnes LGBTQI+, axée sur le consentement.
- Les syndicats doivent mener une véritable lutte pour la syndicalisation, pour la fin du travail précaire, pour un salaire décent pour tous les travailleurs et contre le harcèlement sexuel sur le lieu de travail. Un tel mouvement pourrait prendre la tête de la lutte contre toutes les formes de sexisme, la misogynie, le racisme, l’homophobie et la transphobie pour construire une lutte unifiée de la classe des travailleurs.
- Mettons fin au sexisme, aux discriminations et au victim-blaming dans la justice ! Tous les services de l’État et les services sociaux en contact avec les victimes et les auteurs d’actes de violence devraient être sensibilisés à la question de la violence sexiste et formés de manière à assurer que les plaignants et les victimes soient traités avec respect. Nous luttons pour un État gouverné démocratiquement par la classe ouvrière qui supprimerait les préjugés actuels en faveur des classes dirigeantes et éliminerait une fois pour toutes la présence du racisme, du sexisme et des discriminations dans l’État et le système judiciaire.
- Mettons fin à la guerre et luttons pour la justice climatique ! Mettons fin aux politiques d’immigration racistes : pour le droit d’asile démocratique !
- Pour la propriété publique démocratique des principaux leviers de l’économie, des principales richesses et ressources ; pour le contrôle et la propriété démocratiques des travailleurs ; pour une planification socialiste démocratique de l’économie afin de subvenir aux besoins des gens et de la planète, et non au profit.
- Nous luttons pour le pain et nous luttons aussi pour les roses ! Pour une société socialiste où la structure familiale patriarcale appartiendrait véritablement au passé, pour un monde socialiste libéré des divisions de classe, de l’oppression, de la guerre et de la violence, où chacun aurait droit à un niveau de vie de bonne qualité et à la liberté de vivre sa vie !
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[INTERVIEW] Ici aussi, le 8 mars a largement fait son retour comme journée de lutte !

Entretien avec Emily Burns, organisatrice nationale de la Campagne ROSA
Cette Journée internationale de lutte pour les droits des femmes a mobilisé bien plus de monde qu’à l’accoutumée. Il est possible d’aller encore plus loin. Cela exige de soigneusement examiner les revendications que nous voulons défendre mais aussi la manière de le faire. Retour sur cette journée qui a renoué avec ses origines combatives.
Emily, ce 8 mars, tu étais à Bruxelles, où la manifestation était la plus imposante depuis de nombreuses années.

Emily. ‘‘Nous étions plus de 10.000 personnes! La Campagne ROSA (Résistance contre l’Oppression, le Sexisme et l’Austérité) a participé à l’organisation de cette manifestation à l’initiative de la Marche Mondiale des Femmes. Une série d’actions et de manifestations ont aussi eu lieu dans d’autres villes, comme à Liège où une Cycloparade a réuni 1.700 personnes à l’initiative de diverses organisations féministes et des syndicats. La Campagne ROSA a aussi organisé une action à Courtrai et, pour la 3e année consécutive, une manifestation à Gand, à laquelle ont participé environ 800 personnes. Nous avons également tenu un stand au festival féministe organisé à Anvers par le Collecti.e.f 8 maars, de même qu’au village associatif organisé par ce même collectif avant la manifestation de la Marche Mondiale des Femmes.’’
Selon toi, qu’est-ce qui a changé par rapport aux autres années ?
‘‘Les grèves historiques de l’an dernier dans l’Etat espagnol en défense de l’émancipation des femmes – mais aussi en réaction à la politique antisociale du gouvernement – ont eu un effet de contagion. Alors que l’an dernier, la Campagne ROSA était parmi les seules organisations à avoir mis sur pied des marches contre le sexisme et la précarité, à Bruxelles, Liège, Namur, Gand et Anvers, cette année, un appel lancé par un nouveau collectif – le Collecti.e.f 8 maars – a suscité un enthousiasme certain pour partir en grève.
‘‘Les syndicats se sont davantage impliqués pour faire vivre cette journée comme une journée de lutte et de revendications. De nombreuses centrales syndicales ont organisé un comité professionnel pour préparer collectivement cette journée. La Campagne ROSA a d’ailleurs été invitée à deux occasions dans ce cadre. Une série de secteurs professionnels majoritairement féminins ont organisé des actions de sensibilisation à l’occasion du 8 mars, soutenues ou non par un préavis de grève.
‘‘Par exemple, aux hôpitaux bruxellois Brugmann et Saint-Pierre, une trentaine de travailleuses et travailleurs ont distribué des tracts aux entrées pour sensibiliser les collègues et les patients aux conditions de travail du secteur et à leur lien avec le problème du sexisme. Sans Contrat à Durée Indéterminée et sans une paie qui permette l’indépendance financière, comment être véritablement libre de dénoncer une situation de harcèlement ou encore de quitter son partenaire sans risque de tomber dans une précarité extrême ? Les déléguées et délégués syndicaux des hôpitaux privés bruxellois ont organisé une action similaire, avec un autocollant servant d’outil pour entrer en discussion.
‘‘Des arrêts de travail ont aussi eu lieu dans des universités. A Gand, c’est déjà la 3e année consécutive qu’une telle action était organisée à l’Université, sous l’impulsion de chercheuses et chercheurs, avec le soutien de la délégation syndicale qui comporte plusieurs membres de la campagne ROSA. Et lors de la manifestation que nous organisions le soir dans la même ville, aucun membre du collège échevinal n’était présent et ce pour la première fois. Les autorités communales savent que les revendications mises en avant par le personnel et les jeunes remettent directement en cause leurs politiques d’austérité… Nous ne pensons pas que l’objectif des manifestations et des actions est nécessairement de réunir le plus de monde possible : nous voulons avant tout réunir celles et ceux qui veulent lutter contre le sexisme dans les faits, et non uniquement avec des belles paroles tout en appliquant une politique qui impacte plus durement la vie des femmes de l’autre.’’
Des hommes ont également participé à ces actions et arrêts de travail. Pourquoi la Campagne ROSA souligne-t-elle autant dans son matériel la nécessité de faire appel tant aux femmes qu’aux hommes ?
‘‘Lorsque seules les femmes font grève sur leur lieu de travail, ce à quoi une partie du mouvement appelait, cela signifie de facto que les hommes doivent compenser par une augmentation de leur charge de travail. Cela s’est vu dans un supermarché bruxellois ce 8 mars, où les femmes étaient en grève, remplacées par des travailleurs masculins portant un brassard en solidarité. Ce n’est pas ainsi que l’on fait mal au portefeuille des actionnaires ni que l’on concrétise le slogan ‘‘Quand les femmes s’arrêtent, le monde s’arrête’’. La division nous affaiblit et ROSA prend cette lutte au sérieux.
‘‘Il ne faut pas remonter loin pour voir l’efficacité des luttes menées de manière unie. À Glasgow en Écosse, le personnel municipal des secteurs à bas salaire a mené une grève en octobre. Il est composé à 90% de femmes. Elles ont été rejointes par les hommes d’autres secteurs municipaux dans ce combat, alors payé 3 à 4 £ de plus à l’heure. Grâce à ça, elles ont obtenu une victoire historique : elles vont toucher rétroactivement leur salaire non perçu pour un montant de 567 millions d’euros et vont être augmentées pour une vraie égalité salariale, mais surtout vers un salaire qui leur permette de vivre dignement !’’
À l’initiative du Collecti.e.f 8 maars, il a beaucoup été question dans la presse de ‘‘grève’’ du travail domestique et des soins aux autres. Qu’en penses-tu ?
‘‘Le collecti.e.f 8 maars est parvenu à avoir une grande couverture médiatique de la Journée internationale de lutte pour les droits des femmes. Grâce à cela, le débat sur les méthodes et les revendications à mettre en avant a débordé le cadre des activistes ‘‘habituelles’’.
‘‘Les femmes prennent encore en charge aujourd’hui la majorité des tâches domestiques et, ce, particulièrement après le premier enfant. Cette surcharge de travail est entretenue dans de nombreux domaines de la société, à travers l’enseignement ou encore les jouets, mais c’est surtout le manque de services publics comme les crèches, les aides familiales et maisons de repos pour nos aînés, les services de repassage,… qui nous oblige à prester une deuxième journée de travail, une fois rentrées du boulot. Et c’est encore plus lourd à supporter pour les familles monoparentales.
‘‘Nous pouvons revendiquer un meilleur financement public des services publics et du secteur non marchand, et aussi pourquoi pas que des secteurs précaires comme les titres-services deviennent un service public organisé localement avec de bonnes conditions de travail ! Organiser une grève dans ces secteurs serait bien utile. Une ‘‘grève des tâches domestiques’’ le 8 mars, ce n’est pas la même chose. Cela peut mettre en lumière des problèmes, c’est certain. Mais veut-on limiter notre lutte à plus de solidarité dans les familles, entre homme et femme, quand la famille ressemble à ça, ou veut-on construire la solidarité au niveau de l’ensemble de la société ? Nous défendons cette deuxième option.’’
Qu’est-ce que tu penses de la lettre ouverte écrite par 6 politiciennes belges francophones à faire des droits des femmes une priorité sociétale dans tous les partis et à tous les niveaux de pouvoir ?
‘‘Il n’y a rien à en attendre. Le gouvernement MR-NVA avait lui déclaré que ‘‘la meilleure prise en compte du genre dans l’emploi sera la pierre angulaire de ce gouvernement’’. Si des politiciennes veulent réellement mener une politique en faveur des droits des femmes, elles doivent relayer des revendications syndicales telles que le salaire horaire minimum de 14€, la semaine des 30 heures sans perte de salaire et avec embauches compensatoires, l’individualisation des droits et le relèvement des allocations sociales au-delà du seuil de pauvreté.’’
Quelle est l’utilité de la campagne ROSA ? N’y a-t-il pas déjà suffisamment d’organisations féministes ?
‘‘Les mouvements en faveur de l’émancipation des femmes prennent de l’ampleur à travers le monde. Ces mouvements s’opposent tous au sexisme qui est au cœur de cette société. Mais d’où cela provient-il ? Comment le combattre ? Comment aller au-delà de la dénonciation ? Avec quelles méthodes ? La campagne ROSA veut s’engager ouvertement dans ce débat. Nous ne pensons pas que c’est en taisant les différences que l’on peut renforcer le mouvement.
‘‘Notre féminisme est un féminisme qui s’oppose non pas aux hommes mais au système capitaliste. Nous participons activement au développement du mouvement tout en soulignant la nécessité de lier ce combat à la force du mouvement ouvrier. Lui seul est capable de bloquer, par la grève générale, la totalité de la société pour contester le pouvoir économique des capitalistes. Nous pourrons ainsi construire une société sur de nouvelles bases, une fois débarrassée des actionnaires ultra-riches, de l’exploitation et des discriminations. Notre féminisme est un féminisme socialiste.’’
La sécurité sociale est née de la lutte acharnée des générations précédentes de travailleurs. Sans Sécu, il y aurait trois fois plus de personnes pauvres en Belgique. La sécurité sociale a pour but de couvrir les risques de la vie, ainsi que les charges de maternité et familiale en s’appuyant sur le principe de solidarité, afin que cela ne retombe pas uniquement sur le dos des individus et de leurs familles. Elle a, entre autres, créé les bases d’une plus grande indépendance des femmes.