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Tag: Verhofstadt
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Les partis traditionnels organisent la précarité de l’emploi
L’emploi est l’un des thèmes privilégiés de cette campagne électorale. Tous les partis y vont de leurs propositions. Le VLD de Verhofstadt veut « de nouveau » créer 200.000 emplois. Vande Lanotte (SP.a) a fait encore plus fort: il fait miroiter 260.000 nouveaux postes de travail.
Peter Delsing
Des milliers d’emplois ont été perdus récemment dans des entreprises comme Arcelor, Volkswagen et Opel. Les « promesses » des partis traditionnels font donc vibrer une corde sensible. Mais, si même des entreprises prospères procèdent à des licenciements massifs, qui donc est encore sûr de garder son emploi ? Le profit maximum pour les grands actionnaires dicte sa loi à tout et à tous. Et pour eux « beaucoup » (de profits) n’est pas encore assez.
Emplois précaires
Verhofstadt joue avec les chiffres pour démontrer que le gouvernement n’est pas loin d’avoir créé les 200.000 emplois promis. Une étude évoquait 158.000 emplois il y a quelques mois. Mais de quels emplois s’agit-il ? D’après la Banque Nationale, le nombre d’emplois fixes a reculé de 2% depuis 2003. Ce sont les dizaines de milliers d’emplois à temps plein et à durée indéterminée que les patrons ont supprimés. Ils ont été remplacés par des contrats d’intérim ou à durée déterminée. Et par les titres-services aux frais de la Sécu.
La seule chose que ce gouvernement a faite, c’est généraliser l’emploi précaire. Prenons les titres-services qui servent surtout à rémunérer l’aide à domicile. En janvier 2007, 4.212.000 titres-services (horaires) avaient été utilisés dans le pays, contre 2.206.564 en janvier 2006 et seulement 903.179 en janvier 2005.
D’après la Banque Nationale, 18.000 nouveaux emplois à temps plein ont été créés en 2005 sous le régime des titres-services. En 2006, 61.759 personnes étaient employées avec des titres-service (dont 60.745 femmes !). Les moyens affectés à tous ces titres-services flexibles et précaires à outrance pourraient servir à créer de 30.000 à 40.000 emplois publics statutaires. Les pouvoirs publics pourraient organiser des services à domicile au niveau local, avec des droits syndicaux complets pour le personnel. Mais ça n’intéresse évidemment pas ce gouvernement néolibéral.
Détricotage
Ce qui l’intéresse en revanche, c’est de détricoter le statut des travailleurs qui ont encore un emploi fixe et bien payé. C’est tout bénéfice pour les patrons. Plus il y a de travailleurs précaires, plus les conditions de travail se détériorent pour tout le monde.
Regardez La Poste. L’entreprise est aujourd’hui partiellement entre les mains du privé et l’une des plus grandes utilisatrices de travail intérimaire du pays. Des travailleurs presque sans droits – un intérimaire y regardera à deux fois avant de protester contre ses conditions de travail – servent ainsi de bélier contre les autres travailleurs, comme ce fut par exemple lors des grèves qui ont éclaté ces dernières années à La Poste.
En 2006, le nombre d’heures de travail intérimaire a augmenté de 13% alors que 2005 avait déjà été une année record pour le secteur. Le nombre d’intérimaires a augmenté jusqu’à 363.000, auxquels il faut encore ajouter 129.000 jobs étudiants. On est loin désormais de « pallier à une hausse temporaire de la production », le motif officiellement invoqué à l’origine pour faciliter le travail intérimaire.
Dans beaucoup d’entreprises, le travail intérimaire est devenu une donnée permanente. Les patrons l’utilisent souvent comme une période d’essai préalable à un contrat à temps plein et à durée déterminée ou indéterminée.
En fait, tout ceci est illégal. Mais la chasse aux entreprises qui organisent la précarité de l’emploi semble moins prioritaire aux yeux du gouvernement et des médias que la chasse aux chômeurs.
Partage du travail
La croissance limitée du nombre d’emplois sous la coalition violette a été due pour moitié à des emplois subsidiés (les titres-services) ou à la prolifération sauvage des emplois intérimaires et à durée déterminée. Comment un travailleur peut-il construire un avenir dans ces conditions ?
Ce que les chiffres ne révèlent pas non plus, c’est le stress et les problèmes psychiques qui affectent beaucoup de gens : d’après une étude récente, 17% de la population belge a déjà connu une dépression. On signale trop rarement que l’augmentation de la précarité de l’emploi y est pour quelque chose.
Ce n’est pas la précarité qu’il faut partager, mais le travail disponible. La semaine des 32 heures sans perte de salaire et avec embauche compensatoire pourrait offrir un début de solution et diminuer la pression du travail. Le MAS pense que ce serait un pas en avant. Mais nous pensons aussi qu’une telle mesure ne pourrait être acquise de manière définitive que dans un autre type de société. Dans une société socialiste avec un gouvernement qui soit au service de la majorité de la population et pas d’une minorité de capitalistes.
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Les partis traditionnels : faire du neuf avec du vieux
Les partis traditionnels mènent campagne pour les élections du 10 juin. Ils nous font miroiter une vie meilleure avec toutes sortes de promesses. Les agences de marketing ont identifié les groupes-cibles, les slogans qui leur conviennent et l’image à laquelle ils renvoient. On se rendra mieux compte de la nécessité d’une autre politique en se penchant plus attentivement sur ce que les partis traditionnels nous préparent.
Thierry Pierret
PS : à gauche toute ?
Elio di Rupo n’était pas peu fier de présenter la liste PS pour le Sénat. Y figurent notamment l’ex-président de la CGSP Cheminot José Damilot et l’ex-président du Mouvement ouvrier chrétien (MOC) François Martou.
Le ralliement de Damilot et de Martou doit permettre au PS de se refaire une virginité de gauche après 19 années de politique néolibérale qui ont vu le taux de pauvreté grimper jusqu’à 15% de la population. Dans le même laps de temps, des milliers d’emplois ont été perdus dans les services publics comme La Poste, Belgacom ou la SNCB.
Lorsque di Rupo était ministre des entreprises publiques, il disait pourtant pis que pendre de José Damilot. Lors des grèves à la SNCB, il prenait le parti de la direction de la SNCB et traitait Damilot d’irresponsable. C’est aussi l’époque où di Rupo donnait le coup d’envoi de la privatisation de l’ancienne RTT (devenue Belgacom). Maintenant que Damilot est à la retraite, di Rupo s’en sert pour profiler le PS comme le défenseur des services publics…
Pour ces élections-ci, le programme du PS fait de l’amélioration du pouvoir d’achat la priorité n°1. Le problème, c’est qu’ils sont au pouvoir depuis 19 ans. Pourquoi feraient-ils demain ce qu’ils ne font pas aujourd’hui et qu’ils ne faisaient pas hier ? Il n’y a a pas si longtemps, le PS faisait campagne sous le slogan « le progrès partagé ». Mais nous avons eu la régression sociale en partage !
Ecolo : fini l’alternative, vive l’alternance!
Ecolo semble quelque peu remis de sa raclée électorale de 2003. Ils se préparent même à l’éventualité d’un retour au gouvernement. Si Ecolo dans l’opposition a voté contre le Pacte des Générations, il veut imposer au prochain gouvernement la mise en oeuvre d’un « Plan national pour le climat ».
Ils promettaient le même genre de chose avant leur première participation gouvernementale. Ils ont imposé des taxes qui nous empoisonnent l’existence sans que les gaz à effet de serre ne cessent d’empoisonner l’atmosphère. La politique néolibérale n’a pas été infléchie d’un iota.
Ecolo a fait son deuil des « convergences de gauche » avec le PS. Ils sont prêts à retourner au gouvernement avec n’importe quel partenaire pourvu qu’on leur laisse suffisamment de postes ministériels. Le président du MR, Didier Reynders, ne s’y est pas trompé : il souhaite la victoire d’Ecolo qui incarne à ses yeux une « gauche responsable ». Qu’importe si ce positionnement de plus en plus droitier jette le trouble parmi les membres et même parmi les élus. Il est décidément bien loin le temps où un Jacky Morael plaidait pour l’alternative plutôt que pour l’alternance…
CDH : la régression sociale à visage humain ?
Le CDH a achevé sa mutation de parti principal de la bourgeoisie (le PSC à l’époque) en parti-aiguillon de la politique néolibérale. Sa présidente, Joëlle Milquet, se targue d’avoir fait du parti un pôle d’attraction pour toute une couche de jeunes. Lors des dernières élections, le CDH a en effet attiré des électeurs qui n’auraient jamais voté pour l’ancien PSC. C’est surtout Ecolo qui en a fait les frais.
Pourtant, le CDH a autant de mal que les autres partis traditionnels à renouveler ses cadres. En témoigne le débauchage de personnalités de la « société civile » comme le constitutionnaliste Jean-Marc Delpérée, la présentatrice de la RTBF Anne Delvaux ou le patron du Festival de Dour Carlo di Antonio.
Le CDH se targue de vouloir remettre l’humain au centre de la politique. Mais le genre humain semble avoir des limites assez étroites pour le CDH. Les chauffeurs de bus des TEC n’en font manifestement pas partie, eux qui sont systématiquement pris pour cible par leur ministre de tutelle, le CDH André Antoine, à chaque fois qu’ils font grève pour défendre leurs conditions de travail ou leurs collègues licenciés. Les étudiants étrangers non plus, que le Décret « non-résidents » de la Ministre CDH de l’enseignement supérieur Marie-Dominique Simonet a chassés en grand nombre des Hautes Ecoles francophones. Les travailleurs âgés pas davantage puisque le CDH n’a pas voté contre le Pacte des Générations qui allonge la durée de la carrière.
MR : le libéralisme social a fait long feu
Le MR se targue de concilier le libéralisme et le progrès social. Il aurait rompu avec le néolibéralisme pur et dur des années quatre-vingt. Dans une interview à La Libre Belgique, le député wallon Richard Miller oppose les vertus du libéralisme social au socialisme. Ce qui ne l’empêche pas de défendre l’action de Margareth Thatcher et de Jean Gol… Après quoi, il ajoute « Mais je mets quiconque au défi de me prouver qu’une mesure proposée par un ministre libéral dans les gouvernements Verhofstadt a été antisociale ». Ah bon, les baisses d’impôts pour les plus riches et les entreprises, l’amnistie fiscale pour les fraudeurs, l’allongement de la durée du travail, la suspension de milliers de chômeurs, tout ça n’est pas antisocial pour Richard Miller !
Richard Miller objecterait sans doute que le Pacte des Générations et la chasse aux chômeurs sont des initiatives d’un ministre du SP.a. Mais il se fait justement que le MR voit dans le SP.a un modèle à suivre. Une délégation d’élus MR s’est rendue récemment à Ostende pour voir comment les autorités locales (SP.a) luttaient contre le chômage. Là-bas, les chômeurs sont convoqués systématiquement tous les quinze jours par le VDAB (l’équivalent de l’ORBEm et du FOREm en Flandre). Ils ne peuvent refuser deux fois de suite une offre d’emploi sous peine d’exclusion. Mais il s’agit le plus souvent d’emplois à temps partiel, d’intérims ou d’autres formes d’emploi précaire. On y gagne parfois à peine plus qu’au chômage. Cette politique ne crée pas d’emplois, elle ne fait qu’augmenter la concurrence entre salariés pour les mêmes emplois.
La délégation MR est revenue enchantée d’Ostende. L’un de ses membres a même dit des élus SP.a qu’ils pourraient être membres du MR ! Mais pour Miller, « Il n’est pas exact que tous les partis sont pareils, que les programmes se ressemblent, que tout est chou vert et vert chou ». Dans ces conditions, la proposition du MR que le versement des allocations de chômage reste illimité dans le temps n’est que de la poudre aux yeux.
Il est grand temps pour une autre politique
Face aux campagnes des agences de marketing et à la poudre aux yeux des partis traditionnels, il nous faut une autre politique. Une politique qui s’oppose aux atteintes à nos acquis sociaux, qui ne tombe pas dans le piège des bisbrouilles communautaires, qui ne cède pas au tout répressif, qui ne se laisse pas acheter par des postes et qui ne se contente pas de défendre en paroles les intérêts des travailleurs et de leurs familles.
Lors des grands mouvements sociaux des 10 dernières années, nous n’avons pu compter sur aucune formation politique pour relayer nos revendications au Parlement ou pour utiliser ses positions parlementaires à l’appui de nos mouvements de luttes. Le 28 octobre 2005 a vu 100.000 travailleurs manifester contre les atteintes à nos (pré)pensions. Seuls les 4 députés d’Ecolo ont voté contre le Pacte des Générations.
Si nous voulons nous faire entendre politiquement, il faut rompre avec la politique antisociale des partis traditionnels. Nous devrons le faire nous-mêmes et le Comité pour une Autre Politique peut y donner la première impulsion en participant aux élections. Une voix pour le CAP n’est pas une voix perdue, c’est au contraire un signal important. Et, comme le socialiste américain Eugène Debs le disait déjà il y a près de 100 ans, mieux vaut voter pour ce que vous voulez sans l’obtenir que voter pour ce que vous ne voulez pas mais que vous aurez.
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Changeons de cap … avec le C.A.P. !
Promesses creuses, surenchère communautaire …
Depuis l’été, il est impossible d’échapper à la campagne électorale. Surenchère communautaire, effets d’annonce publicitaires etc tous les moyens sont bons pour faire parler de son parti … et surtout de soi.
La question communautaire est le sujet le plus commode pour le positionnement des partis traditionnels. Suite à différentes provocations d’hommes politiques flamands, dont l’interview remarquée d’Yves Leterme au journal français Libération dans laquelle celui ci ironisait sur les capacités des francophones à apprendre le néerlandais, le PS s’était profilé comme l’avant-garde de la défense des francophones.
Tous les autres partis ont embrayé sur ce thème. Le « front » francophone s’est ensuite un peu déforcé. Le MR, en concurrence électorale directe avec le PS, s’est rapproché du VLD et a accueilli avec enthousiasme le Manifeste Citoyen de Verhofstadt (où il est notamment question d’augmenter la flexibilité des travailleurs et de nouvelles attaques sur les pensions). Pendant ce temps, le PS s’est profilé comme le plus fidèle défenseur de l’unité du pays, de la monarchie et des institutions (comme lors des débats qui ont suivi l’émission de la RTBF sur la scission du pays ou à l’occasion du procès concernant la villa du prince Laurent).
Tous ces débats communautaires viennent bien à propos pour éviter de devoir donner des réponses claires aux véritables problèmes que sont le logement, les conditions de travail, les salaires,… qui touchent tous les travailleurs qu’ils soient flamands, bruxellois ou wallons.
La grande nouveauté de cette campagne est pourtant la découverte de l’écologie. Avant fer de lance du seul ECOLO (dans une optique où il faut faire payer les consommateurs et non pas les entreprises qui sont pourtant seules à décider de ce qui arrive dans nos rayons et de la manière de les produire), l’environnement est maintenant bien présent dans les discours de la plupart des politiciens. Elio Di Rupo a rencontré Nicolas Hulot et annoncé que répondre au défi climatique devrait être une priorité. Le CDH l’a suivi. Sur le site du MR par contre, le silence reste d’or. Tapez-y « écologie » et vous ne verrez apparaître aucun sujet !
Cela sera peut-être au programme de la MR-TV ? Car, non contents d’être omniprésents dans les médias au point d’étouffer toute autre voix, les partis traditionnels ont décidé de mettre le paquet sur la toile. Le MR et le CDH ont annoncé (à grand bruit) la création de leurs télévisions respectives sur le net. Pour le PS cependant, internet « ne peut pas remplacer le contact avec les gens ». On imagine ce que le PS entend par là, lui qui confond si souvent « contact avec les gens » et « cadeaux aux amis ». Pour le reste, après près de 20 ans au pouvoir, le PS a montré que son principal contact avec la rue, main dans la main avec les autres partis établis, était plutôt d’y faire descendre les travailleurs mécontents.
S’ils veulent en finir avec la dégradation de leurs conditions de vie et de travail, travailleurs et allocataires ne doivent compter en rien sur les partis traditionnels. C’est pour cette raison que les militants du MAS/LSP aident le Comité pour une Autre Politique (CAP) à faire signer les listes de parrainage qui lui permettront de se présenter aux élections du 10 juin.
Alors que les partis établis n’ont besoin que de quelques signatures de parlementaires (qu’ils ont déjà), une nouvelle formation comme le CAP doit récolter deux fois 5.000 signatures pour pouvoir présenter des listes au Sénat tant du côté néerlandophone que francophone.
Aidez-nous à récolter ces signatures et à présenter une véritable alternative pour les travailleurs et leurs familles le 10 juin !
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La direction de VW fait chanter les travailleurs afin d’imposer le recul social
La direction de Volkswagen/Audi a fait chanter les travailleurs de Forest afin de leur imposer des économies drastiques. Après des mois à traînailler pendant que le personnel demeurait dans l’incertitude, les travailleurs ont finalement eu le choix: s’adapter au recul social ou ficher le camp.
Geert Cool
Un référendum sans choix
Le 27 février, un nouveau référendum s’est tenu. Les travailleurs devaient se prononcer sur une déclaration d’intention signée par les directions syndicales et la direction de VW et Audi.
Dans celle-ci, le maintien de 2.200 emplois est confirmé, mais seulement jusqu’en 2009/2010. Au cas où l’Audi A1 ne décollerait pas, de nouveaux licenciements, ou même une fermeture, pourraient suivre. La déclaration d’intention fixe seulement la production entre 2007 et 2009/2010.
En échange du maintien des 2.200 emplois, une réduction des « coûts salariaux » de 39,9 euros à 32 euros par heure (-20%) est exigée. Concrètement, il s’agit d’une augmentation du temps de travail de 35 à 38 heures par semaine, mais cela ne suffira pas à tempérer la soif de profits des patrons ni à arriver à assainir 20% des coûts actuels. Les directions syndicales ont annoncé « développer des alternatives afin de réduire les coûts salariaux pour un minimum d’impact sur les acquis sociaux. »
La direction d’Audi a posé ses conditions et les travailleurs se sont retrouvés le dos au mur dans ce nouveau référendum. Choisir entre la peste et le choléra n’est pas un vrai choix : les travailleurs étaient d’office perdants. La direction et les dirigeants syndicaux voulaient un référendum moins serré que le premier (bien que 24% des ouvriers ont tout de même voté contre cette fois-ci!). Après coup, il leur est possible d’affirmer que les travailleurs se sont mis d’accord sur le recul social.
VW: 2,75 milliards d’euros de profit en 2006
Après avoir repris le travail sans garanties sur papier, il était déjà clair que ce serait difficile d’arracher des concessions supplémentaires à la direction. Après la lutte de novembre et décembre, des primes de départ élevées ont été obtenues. Selon l’organisation patronale Agoria, c’étaient « des primes extraordinaires ».
Agoria a ajouté que le recul social s’est fait selon les normes allemandes: là aussi, les patrons ont imposé un allongement du temps de travail (de 28,8 à 33 heures par semaine) et un assainissement de 20% sur les salaires. Après l’Allemagne, les travailleurs belges doivent eux aussi suivre la spirale vers le bas sur les salaires et les conditions de travail. Seule question : où s’arrêtera cette spirale, en arrivant aux conditions de travail de l’Europe de l’Est ou de la Chine et l’Inde ?
Cette casse sociale a pas mal coûté aux patrons. Gilbert Demez, professeur en droit social à l’UCL, s’étonne de la hauteur des primes de départs à VW : « La hauteur de la prime de départ paraît assez incompréhensible, dit-il. La restructuration se justifie d’autant moins aujourd’hui. Avec l’argent qu’elle met sur table pour financer les primes de départ, l’entreprise aurait facilement pu maintenir la production du site de Forest à son niveau actuel pendant plusieurs années. » (La Libre, 11 décembre 2006)
Mais Forest doit servir d’exemple en matière de recul social et la direction est prête à en payer le prix. Après les menaces de fermeture précédentes, le nouveau chantage se basait toujours sur la possibilité de fermeture. Le choix des travailleurs était : accepter ou se noyer.
Parallèlement, les profits de VW continuent à monter. En 2006, le groupe a réalisé le double des profits nets de l’année précédente: 2,75 milliards d’euros. C’est une augmentation très forte comparée au 1,12 milliard d’euros de 2005, mais VW veut plus encore. L’objectif est 5 milliards d’euros de profits. Pour cela, c’est aux travailleurs de payer.
Les politiciens traditionnels prennent parti pour la direction
Le gouvernement intervient sans hésiter dans les discussions sur le recul social à VW. Selon lui, les restructurations sont normales et nécessaires. Le gouvernement veut les rendre plus faciles et intervient dans le débat en ce sens. Le professeur libéral Marc De Vos déclare dans le quotidien flamand De Morgen: « Celui qui prend comme perspective une vision globale comprend que des restructurations sont nécessaires pour moderniser l’économie. Les travailleurs de Forest ont voté en faveur du futur. »
Il a l’air de quoi ce futur? Faire travailler plus longtemps pour gagner moins afin de stimuler le profit et les cours boursiers. Et, si nécessaire, avec l’appui actif des autorités, malgré le dégoût que cela provoque généralement dans le public libéral. Verhofstadt a été négocier lui-même avec la direction de VW et il a offert des cadeaux fiscaux, des assainissements sur les salaires et une flexibilité accrue.
Il faut une autre politique!
Le 28 février, De Morgen a donné exceptionnellement la parole aux rebelles de Volkswagen – qualifié de « noyau dur » dans les médias. L’un d’entre eux disait: « Il ne faut pas reculer de 50 ans. Nous ne sommes pas esclaves, mais travailleurs. Le patronat doit nous respecter. » La réalité, c’est que le site de VW à Forest était rentable, mais la direction veut augmenter son profit sur le plan mondial au dépens des travailleurs.
Pendant de nombreuses années, VW était exemplaire en terme de normes sociales acquises par les travailleurs. Aujourd’hui, VW est tout aussi exemplaire, mais dans la casse sociale. Si ils arrivent à imposer plus de temps de travail sans augmentation salariale à VW, pourquoi alors d’autres entreprises et secteurs ne suivraient-ils pas ? General Motors menace déjà le site d’Opel à Anvers d’une restructuration drastique.
Celui qui s’oppose à cette logique de casse sociale est présenté comme un « gros bras », un « emmerdeur », un « hooligan »,… Tel a été le sort des rebelles de Volkswagen. Ils ont été attaqués par toute la scène politique traditionnelle, par les médias et même par leurs dirigeants syndicaux.
On les a insulté, mais comme l’un des rebelles l’explique au De Morgen: « Je ne suis pas un homme de beaucoup de mots. Je n’ai pas peur du travail, mais il faut que les conditions soient justes. Si nous devons bosser 38 heures par semaine, c’est trop dur. Vingt minutes de pause, ce n’est quand-même pas possible ? Quand pourrons nous manger nos tartines à l’aise? »
Ce n’est pas une position isolée ou limitée à une « centaine de têtes brûlées » ou de « gros bras de la FGTB Métal Wallonne » (Gazet van Antwerpen du 27 janvier). Même lors du référendum du 27 février, 24% ont rejeté les plans de la direction d’Audi. A côté des 500 qui ont voté contre, beaucoup de travailleurs ont voté pour sans aucun enthousiasme. Par manque de stratégie de lutte contre la casse sociale, ils n’ont vu d’autres issues que d’accepter les plans de la direction d’Audi.
Nous pensons qu’il faut une autre politique où ce ne sont plus les profits d’une petite minorité qui déterminent tout. Nous voulons par contre une politique répondant aux besoins des travailleurs et de leurs familles, qui s’oppose aux licenciements, au démantèlement social et au chantage patronal.
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Les partis traditionnels se mettent en ordre de bataille pour faire encore un peu plus de la même politique
La campagne pour les élections fédérales de cette année est désormais lancée. Les préparatifs des partis traditionnels vont de pair avec une série de propositions antisociales, le tout nappé d’une sauce communautaire. Le Premier ministre Verhofstadt (VLD) a pondu un “nouveau” Manifeste du Citoyen. Son possible successeur Yves Leterme (CD&V) y est allé d’une petite phrase sur la nécessité d’une politique d’austérité pure et dure comme aux Pays-Bas.
Geert Cool
Le Manifeste du Citoyen de Verhofstadt est moins innovateur que son auteur voudrait nous le faire croire. Verhofstadt y propose de calculer davantage le temps de travail plutôt en termes d’heures de carrière. Des horaires individuels permettent d’augmenter la flexibilité, bien entendu parce que les travailleurs demanderaient « des horaires de travail souples », et aussi de remettre en cause l’âge de la pension.
Sauce hollandaise…
Pour les chômeurs, Verhofstadt a repris une idée de son collègue de parti Rik Daems. Il s’agit d’imposer aux chômeurs des “emplois de proximité” à temps partiel en échange de leur allocation de chômage. Les fossoyeurs néolibéraux du service public ne précisent évidemment pas que cela se fera au détriment d’emplois qui étaient auparavant prestés par du personnel statutaire.
Le candidat le plus souvent cité à la succession de Verhofstadt, Yves Leterme (CD&V), est politiquement proche des propositions de Verhofstadt. Leterme se prononce aussi pour accentuer… la même politique. Au début du mois de décembre, lors d’un déjeuner-débat avec de petits entrepreneurs à Gand, il a dit qu’il voulait mener une politique similaire à celle de son homologue hollandais Balkenende: une politique néolibérale pure et dure avec de graves atteintes à la sécurité sociale et aux salaires. Balkenende et son parti chrétien-démocrate sont même allés aux élections avec la « promesse » d’allonger la durée du travail hebdomadaire de 38 heures à 40 heures sans augmentation de salaire.
Leterme ne semble pas se soucier de la résistance que vont susciter de telles atteintes aux conditions de travail et de salaire ainsi qu’aux droits des chômeurs. « Mieux vaut une adaptation en profondeur que laisser les choses suivre leur cours » (…) Même si ça doit susciter quelques remous en septembre et octobre. »
De son côté, Frank Vandenbroucke (SP.a), ministre de l’enseignement flamand et promoteur de la chasse aux chômeurs, trouve lui aussi qu’il faut régionaliser l’emploi. Cela aboutira immanquablement à des différences dans les conditions d’accès au chômage, les critères d’ “emploi convenable”,…
Tout cela doit remplir d’aise Karel Van Eetvelt, porte-parole de l’Union des Classes Moyennes flamandes (UNIZO) qui s’indigne qu’ “actuellement seuls 10% des milliers de chômeurs qui n’ont pas suffisamment cherché d’emploi ont été sanctionnés. Il y a obstruction au niveau national.”
Régionaliser l’emploi servira donc à exclure plus de chômeurs en Flandre d’abord, en Wallonie ensuite.
… et goût de l’effort
Un autre candidat Premier ministre, c’est Elio Di Rupo. Il a surtout insisté sur le fait qu’il était peut-être temps qu’un francophone devienne Premier ministre. Malgré toutes les chamailleries et les problèmes internes, il ne ménage pas ses efforts pour former un front de tous les partis francophones.
Le profil très flamand du CD&V lui facilite la tâche à tel point que la présidente du CDH Joëlle Milquet a déclaré : « sur le plan institutionnel, le CD&V n’est absolument pas notre parti frère, (…) les partis francophones sont ma famille politique. » En même temps, elle propose un “contrat collectif” qui obligerait chaque chômeur inscrit à suivre une formation.
Le ministre wallon de l’emploi et de l’économie, Jean-Claude Marcourt, lui emboîte le pas avec son nouveau contrat de gestion pour le FOREm. Il y prône une « culture de l’effort » et une individualisation accrue de l’accompagnement des chômeurs, un doux euphémisme qui dissimule une pression accrue à accepter n’importe quel emploi.
L’une et l’autre présentent leurs propositions, qui augmentent la concurrence entre salariés sur le marché du travail sans créer d’emplois, comme des alternatives aux revendications flamandes de régionalisation accrue de la politique de l’emploi. Di Rupo était satisfait du Manifeste du Citoyen de Verhofstadt parce qu’il y évitait toute surenchère communautaire. Verhofstadt y parle d’emploi, d’économie et du climat. « Nous sommes donc sur la même longueur d’onde », a déclaré di Rupo.
Que Verhofstadt se succède à lui-même ou qu’il soit remplacé par Leterme ou di Rupo, il est déjà certains que les prochaines années seront encore marquées du sceau de la politique néolibérale qui consiste à économiser sur le dos des travailleurs et de leurs familles pour augmenter les profits des entreprises.
Tests de popularité
Vu que les partis traditionnels convergent sur l’essentiel, ils vont de nouveau mettre l’accent sur la forme. Les publicistes dominaient déjà la campagne pour les élections communales. Patrick Janssens a donné l’exemple. Le publiciste Noël Slangen lui a emboîté le pas en rejoignant le bureau du VLD. Mais les autres partis n’accordent pas moins d’importance à la perception.
Michel Daerden (PS) a accédé à la renommée mondiale avec sa fameuse interview où il n’était manifestement pas en possession de tous ses moyens. Il a suffit de cette prestation comique à la télévision pour faire grimper en flèche la cote de popularité de Daerden. D’après un sondage de La Libre Belgique, il est maintenant le sixième politicien le plus populaire du côté francophone. Daerden s’appuie maintenant là-dessus pour revendiquer la tête de liste à Liège.
C’est ainsi qu’on fait de la politique actuellement. L’image prime tout sans qu’elle ait besoin de la politique pour être façonnée. La popularité ne repose pas sur une politique, mais sur une image.
Besoin d’une autre politique
Face aux partis traditionnels et à l’extrême droite, nous avons besoin d’une autre politique. D’une politique qui rompe avec le néoliberalisme et qui soit du côté des travailleurs et de leurs familles. Après le mouvement contre le Pacte des Générations, c’est la conclusion qu’a tirée un groupe de militants syndicaux et politiques, de travailleurs, … Le Comité pour une Autre Politique (CAP) a été créé sur cette base.
Le CAP présentera ses propres listes aux élections. Des pourparlers avec le PTB sur la possibilité d’un cartel dans la province d’Anvers ont buté sur la condition du PTB que Jef Sleeckx y soit lui-même candidat malgré ses 70 ans. Le PTB n’était intéressé que par le nom de Sleeckx. Nous pensons pourtant qu’on a besoin d’une autre politique qui parte de la base.
Quand Jef Sleeckx a dit dans une interview qu’il y avait eu des discussions avec des militants de Groen !, certains médias ont aussitôt annoncé que le CAP négociait avec Groen !. Il n’y a pas de discussions prévues avec Groen !. La motion qui a été votée le 28 octobre dit clairement que le CAP ne collaborera pas avec des forces politiques qui participent ou ont participé à la politique néolibérale ou qui ont approuvé la Constitution européenne. Dans un cas comme dans l’autre, Groen ! peut se sentir visé à juste titre selon nous. Cela n’empêche pas que beaucoup de membres de Groen ! montrent de l’intérêt pour le projet du CAP.
Ce type de réaction médiatique fait partie intégrante de la politique actuelle : beaucoup d’attention aux personnalités et aux petits jeux politiciens à visée électoraliste. Il ne manque plus que les demandes de participation à toutes sortes de programmes de divertissement à la télévision.
Le CAP rompt avec cette politique avec un programme et une campagne où la solidarité occupe la place centrale. Solidarité avec toutes les victimes du système néolibéral: les ouvriers de VW qui doivent travailler plus dur ou pour moins cher, les usagers des bureaux de poste qui vont disparaître, les chômeurs qui se font radier, les travailleurs déjà financièrement exsangues à cause des prix élevés du logement et qui doivent payer plus cher leur électricité suite à la libéralisation,…
Le MAS/LSP apportera sa pierre à la campagne électorale. Nous voulons nous atteler avec le CAP à la construction d’un large réseau de solidarité qui puisse renforcer la résistance à la politique néolibérale. Nous livrons en pages 6 et 7 des interviews sur l’état des lieux de la campagne du CAP : le programme, la campagne électorale, la construction d’une organisation nationale, …
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Politique des partis traditionnels : 277 bureaux de Poste en moins…
Politique des partis traditionnels : 277 bureaux de Poste en moins…
En février et mars, La Poste va fermer 277 bureaux et 400 à 500 autres suivront après les élections de juin. Tout ça parce que La Poste entrera d’ici peu dans le marché «libre» et devra subir la concurrence d’autres sociétés. Les politiciens belges affirment qu’ils s’opposent à la libéralisation européenne. Mais c’est avec leur soutien qu’une partie de La Poste a été cédée à une société postale danoise. Cette dernière insiste maintenant pour que La Poste devienne une société rentable et capable, elle aussi, de fournir de super-bénéfices.
Bart Vandersteene
Pour cela, il faut d’abord « assainir »… aux frais de la collectivité. Le personnel est réduit, le timbre non-prior disparaît (suite à quoi nous allons payer le prix d’un timbre prior pour n’importe quel envoi), des prestations de services sont supprimées, … Les gouvernements successifs de Martens, Dehaene et Verhofstadt ont chacun suivi cette voie néo-libérale. Ces vingt dernières années, le PS et le SP.a ont participé aux gouvernements et portent par conséquent une grande responsabilité dans la dégradation de nos services publics.
La Poste est parfois appelée la « banque des pauvres ». Nombreux sont ceux – souvent les personnes âgées – qui vont encore régulièrement à leur bureau de poste pour effectuer leurs virements, poser des questions au sujet de l’arrivée du courrier, demander de l’aide pour toutes sortes d’envois,… Pour eux, la fermeture de leur bureau est un petit drame. Mais conserver beaucoup de bureaux de poste n’est pas conforme au modèle néo-libéral qui a pour seule règle : le moins possible pour la collectivité et le plus possible pour les riches. La suppression de la prestation des services ne profitera qu’aux riches actionnaires.
Tous les partis traditionnels se retrouvent sur une même politique néo-libérale. Face à cela, il y a un besoin urgent d’une autre politique qui remettrait au premier plan les besoins de la collectivité et la solidarité.
Une résistance locale contre les fermetures des bureaux commence à se développer. Des associations de quartier, des commerçants, des paroisses et beaucoup de personnes touchées par ces fermetures ont lancé des pétitions, des campagnes d’affichage, … Mais le plus souvent tous les espoirs sont mis dans des démarches envers des personnalités politiques. C’est une réaction compréhensible mais cela ne suffira pas. Beaucoup de politiciens ne versent que des larmes de crocodile. Dans le conseil communal gantois, par exemple, où quelques dirigeants nationaux (comme Verhofstadt lui-même) sont pourtants présents, une motion a été votée contre la fermeture de bureaux. Mais que font réellement ces partis contre la politique qui mène à la fermeture des postes ?
C’est d’une résistance collective des groupes locaux et des syndicats au niveau national dont nous avons besoin! Une telle résistance a besoin d’un partenaire politique pour défendre et appliquer une autre politique. C’est l’ambition du Comité pour une Autre Politique (CAP). À l’initiative de Jef Sleeckx, et avec le soutien du MAS/LSP, le CAP s’est attelé à la construction d’une alternative au néo-libéralisme. En participant aux élections, nous voulons rassembler les forces qui peuvent construire une nouvelle formation politique. Vous aussi, participez avec nous à relever ce défi !
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VW-Forest. Une paix sociale sans accord est une illusion
Trois semaines à peine après la fin d’une grève de 7 semaines, les travailleurs de VW ont de nouveau stoppé le travail. Motif? Pour certains: la prise en otage et la menace de la survie de l’entreprise par un petit noyau dur de militants-FGTB principalement francophones. Selon l’Alternative Socialiste : le fait que la grève s’est terminée sans solutions, tant pour ceux qui ont accepté la prime de départ, que pour ceux qui ont “l’obligation morale” (c’est formulé ainsi) de partir en prépension et pour la structure future de l’entreprise.
Eric Byl
Pas de garanties écrites
Même le journal patronal flamand de Tijd, qu’on ne peut pas soupçonner d’être à gauche, a conclu ainsi son éditorial du 26 janvier: “Le personnel de Forest qui ne part pas avec une super-prime, veut des garanties quant à son avenir. Sur papier. Tant que celles-ci ne sont pas réalisées, il y aura du chahut aux portes de Forest.”
La direction de Forest pensait pouvoir s’en sortir avec sa stratégie de pourrissement. Sept semaines de grève, dont 6 payées par VW, et la promesse de primes record auraient dû suffire pour que les travailleurs retournent au turbin sur les genoux.. Les délégations syndicales ont été habilement trompées. Tant la direction belge que Verhofstadt, Van Velthoven et Vande Lanotte se sont présentés comme des alliés “pragmatiques”. Ils ont, d’après leurs dires, tout fait pour limiter les dégâts et sauver l’entreprise. Même les organisations patronales ont soudainement trouvé des milliers de postes vacants. Une exception aux règles du Pacte de Générations n’a finalement pas été retenue, mais « avec tant de chômeurs, la possibilité de réemployer des plus de 50 ans est minimale » ont annoncé les délégations syndicales.
Beaucoup de promesses, donc. Mais rien sur papier. Un employé a écrit sur le site néerlandophone des travailleurs de VW: “Comme employé, j’ai les réflexions suivantes. Cela fait 3 semaines que nous avons repris le travail. Nous n’avons toujours pas plus d’info qu’avant la reprise. Nous ne savons encore rien sur notre avenir. Notre direction n’a aucune réponse concrète à donner. Est-ce qu’il faut s’étonner alors de la frustration régnante? De plus en plus, je me demande si tout ce scénario n’est pas un jeu prémédité de la direction.”
Aucun plan d’action
La situation à VW est porteuse de leçons pour tous les syndicalistes.
Au printemps 2006: l’hebdomadaire “Der Spiegel” annonce un plan de restructuration pour Forest, voire même sa fermeture. Pas de calicots, ni de tracts, ni de réunions d’informations. Au contraire, les délégations syndicales reconfirment leur confiance dans la direction. Du temps précieux pour construire un rapport de forces est perdu.
Au conseil d’entreprise du 21 novembre, un débrayage spontanné a déjà lieu. La direction annonce la perte de 4.000 emplois. Suit une assemblée du personnel avec une participation massive, y compris des travailleurs des usines de sous-traitance. Les discours se font à partir du deuxième étage du parking sans possibilité de poser des questions ou de faire des remarques. Il n’y a pas de tract reprenant les points principaux du conseil d’entreprise, ni de mot d’ordre. L’option des primes de départ est tout de suite évoquée, pas un mot sur un plan d’action. Chaque orateur conclut avec une déclaration de solidarité avec les travailleurs en sous-traitance, mais leurs délégués et militants ne sont jamais invités aux réunions de militants à VW et ils se retrouvent, comme beaucoup d’autres, dépendants de la presse.
Mis sous pression, les syndicats organisent une manifestation de solidarité le 2 décembre. Des bus sont alors organisés pour tracter les autres usines d’assemblage. Mais un vrai plan d’action en vue de transformer la large solidarité avec les travailleurs de VW en mobilisation concrète n’est pas construit. C’est au MAS, au PTB et au Comité de soutien de VW de distribuer des affiches de solidarité, là où les syndicats disposent d’un réseau énorme de délégués, de militants et de membres qui peuvent, sur un mot de leurs directions, distribuer partout dans le pays de telles affichettes. Une grève de solidarité dans toutes les grandes entreprises, même durant une seule heure, n’est à aucun moment prise en considération. Néanmoins, 25.000 personnes participent à la manif, mais elles sont renvoyées chez elles sans mot d’ordre.
Les délégations syndicales rendent bien visite aux patrons et aux politiciens, mais les travailleurs, chez eux ou au piquet, en sont réduits à deviner ce qui se passe. Verhofstadt réussit à se profiler comme le sauveur de VW après avoir obtenu de vagues concessions de la direction sur le maintient de 3.000 postes et la possibilité de produire, à partir de 2009, des Audi A1 à Forest.
Victoire à la Pyrrhus
Ce n’est donc pas étonnant que beaucoup de travailleurs ont choisi de mettre de l’eau dans leur vin en acceptant les primes de départ. Après deux ans d’impôts, il n’en restera plus qu’un tiers, ce dont beaucoup ne s’étaient pas encore rendu compte. Les délégations ont laissé s’inscrire des travailleurs avant même d’avoir trouvé des solutions pour toutes les catégories, y compris les pré-pensionnables et ceux qui continueront à travailler à VW. De cette façon, ils ont de nouveau abondonné la construction d’un rapport de forces.
Finalement, les délégations ont, sans garanties pour le futur, fait voter la fin de la grève par un référendum mal organisé, et même selon certains manipulé. Le résultat : 56% contre 44% pour l’arrêt de la grève. Cette “victoire d’en haut” la direction la paiera cher. Une paix sociale ne s’impose ni par la menace, ni par l’usure, mais par un accord porté par la base.
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Nous, on est déjà fauchés! C’est aux patrons de payer!
Si l’on en croit Verhofstadt dans sa déclaration de politique générale: « les citoyens ont, aujourd’hui, plus dans leur poche. Ce n’est pas une promesse, mais bel et bien un fait. » De qui se moque-t-il ? Il serait plus correct de dire : « Une minorité de citoyens bien nantis ont plus dans leurs poches parce que celles de la majorité des autres ont été vidées. »
Cédric Gérôme
« L’économie se porte bien », affirme Verhofstadt. Du point de vue du patronat, cela ne fait aucun doute. Les profits des grosses entreprises belges atteignent effectivement des montants records : entre le premier trimestre 2005 et le premier trimestre 2006, les profits des entreprises cotées dans l’indice boursier Bel-20 ont grimpé de 56%. Mais, contrairement à ce que prétend Verhofstadt, notre pouvoir d’achat dégringole d’année en année. En l’espace de 25 ans, le pouvoir d’achat de nos salaires et de nos allocations a subi une baisse réelle estimée à pas moins de 20% !
Agoria, la fédération des entreprises du secteur technologique et du métal, se réjouit de la confirmation par le Premier Ministre du doublement des réductions de charge sur le travail de nuit et en équipes. Mais prévient-elle, « cette mesure ne garantit pas pour autant l’emploi ». Ça, on s’en était déjà rendu compte depuis longtemps. Réduction des charges et modération salariale semblent pourtant bien être le coktail que nous prépare le patronat en vue des négociations sociales de l’automne, et cela avec le soutien tacite des directions syndicales.
Verhofstadt poursuit : « Il existe deux façons de faire de la politique : soit se laisser bercer par les flots ; soit, jouer le rôle du capitaine avec un objectif tout tracé à l’esprit. Même si l’on sait que l’on devra parfois braver eaux houleuses et tempêtes violentes. »
La « tempête violente » de l’octobre dernier est encore dans toutes les mémoires : les deux grèves générales successives contre le Pacte des Générations, qui avaient fortement secoué le sommet syndical, ont considérablement réduit la marge de manoeuvre pour lancer une attaque de grande envergure contre nos salaires. Surtout qu’en prévision des élections législatives de 2007, la période est plutôt mal choisie. Dès lors, s’il existe un point sur lequel gouvernement, patronat et directions syndicales s’entendent parfaitement, c’est sur la nécessité d’éviter une répétition du scénario de l’an dernier.
C’est ce qu’exprime Jean-Claude Daoust, président de la FEB, lorsqu’il dit : « J’invite mes collègues des syndicats à maintenir le climat de négociation serein des mois écoulés ». Les leaders syndicaux ont visiblement compris le message. Reste à savoir si les militants de base vont le comprendre de la même manière…
Le « rétablissement de la compétitivité » est devenu depuis un an la rengaine préférée des médias, des politiciens et des patrons. Il est bien regrettable de constater que les directions syndicales ne font pas grand-chose d’autre que de reprendre en choeur le même refrain, à quelques nuances près…
Participez avec nous à la mise sur pied d’une nouvelle formation politique pour faire entendre une autre voix – celle des salariés, des jeunes et des militants qui ne veulent plus encaisser sans broncher les attaques perpétuelles sur leur niveau de vie – et préparer les luttes de demain.
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Analyse des élections communales. Un recul masqué de la coalition violette
Quelques tendances principales se dégagent des élections communales et provinciales du 8 octobre. Les partis chrétiens-démocrates en sortent victorieux dans les trois régions du pays. C’est aussi le cas de l’extrême droite en Flandre et, dans une moindre mesure, en Wallonie, mais pas à Bruxelles. Le VLD et les écologistes sont en net recul, à l’une ou l’autre exception locale près. Le MR équilibre les gains et les pertes.
Par Els Deschoemacker, Thierry Pierret et Jean Peltier
Le SP.a progresse fortement dans les grandes villes, surtout à Anvers où il reprend au Vlaams Belang la position de premier parti. Une réussite qu’il faut néanmoins tempérer par le fait qu’il n’a pris des sièges qu’à ses partenaires de coalition, mais aucun au VB. Le PS recule significativement là où des scandales ont éclaté (Charleroi, La Louvière, Namur, Mons, Huy,…) mais il reste le principal parti en Wallonie où il maintient, voire conforte, nombre de majorités absolues.
Les chrétiens-démocrates: retour au “bon vieux temps” de l’Etat-CVP
Le CD&V a reconquis la majorité des cantons flamands et dépasse à nouveau la barre des 30%. Il n’avait plus engrangé une telle victoire depuis 20 ans. Du côté francophone, le CDH poursuit lui aussi sa remontée et a conquis 10 cantons de plus qu’aux élections régionales de 2004.
Cela signifie-t-il pour autant un retour au « bon vieux temps » où la famille CVP-PSC (les anciens noms du CD&V et du CDH) était le parti-pivot de toute coalition gouvernementale grâce à une base stable dans toutes les couches de la société ? Loin de là !
D’une part, parce qu’au fil des ans et quels que soient leurs scores électoraux, tous les partis traditionnels ont perdu de leur autorité dans la société. D ‘autre part, parce que, s’il reviennent au pouvoir national en 2007 (ce qui est probable), le CD&V et le CDH ne pourront pas compter sur une grande stabilité politique dans leur propre zone d’influence. Du côté francophone, les liens sont nettement plus distendus aujourd’hui entre la CSC et le CDH. En Flandre même, une partie des membres de la CSC ont participé aux grèves contre le Pacte des Générations du gouvernement violet, contre l’avis de la direction de la CSC et surtout contre l’avis du CD&V qui trouvait que ce pacte n’allait pas assez loin !
En outre, tant le CD&V que la N-VA (un petit parti autonomiste flamand de droite issu de l’éclatement de la Volksunie) ont jusqu’ici tiré profit du cartel qui les unit. Mais pour combien de temps ? Le nationalisme flamand risque à terme de devenir une véritable épine dans le pied des chrétiens-démocrates flamands. Le fait qu’une majorité de petits patrons flamands prônent plus d’indépendance pour la Flandre va sans doute inciter le parti à aller plus loin dans cette direction. Une attitude qui est en porte-à-faux par rapport aux positions du CDH et surtout aux aspirations de la base syndicale comme l’a encore rappelé le congrès national de la CSC il y a quelques jours…
La coalition violette en sursis?
La coalition violette a perdu ces élections. Elle n’aurait plus de majorité en Flandre avec un VLD – le parti du Premier ministre – qui plafonne à 16%. Du côté francophone aussi , la violette est en recul. Si on extrapole le résultat des élections provinciales au niveau fédéral, tant le MR (-5) que le PS (-2) perdraient des sièges par rapport aux élections de 2003. La coalition libérale-socialiste passerait de 98 à 79 sièges à la Chambre en 2007, soit une majorité de seulement 4 sièges.
La défaite globale de la violette est pourtant reléguée à l’arrière-plan par la victoire de l’une ou l’autre de ses composantes dans quelques grandes villes comme Bruxelles, Liège, Gand et surtout Anvers.
Dans ces élections, le vote pour le moindre mal a de nouveau joué en faveur de la social-démocratie. Bien qu’ils soient les architectes et les maîtres d’oeuvre de la politique néolibérale au niveau national, PS et SP.a ont encore réussi à présenter leurs réformes antisociales comme un mal nécessaire pour préserver notre sécurité sociale ou assurer une bonne gestion communale.
Poursuivre dans cette voie mène pourtant à une impasse. L’augmentation de la pauvreté, le bradage des services communaux, la disparition des emplois correctement payés, … ne feront que nourrir le terreau de l’extrême-droite. La seule digue qui puisse tenir contre l’extrême-droite, c’est aussi une digue contre ce genre de politique. Ces élections ont de nouveau démontré la nécessité d’une opposition de gauche sous la forme d’un nouveau parti des travailleurs.
Flandre: un coup d’arrêt au Vlaams Belang?
Une des principales questions de cette campagne était : le Vlaams Belang peut-il encore progresser à Anvers et arriver au pouvoir dans certaines communes flamandes ? Le verdict est tombé : le Vlaams Belang recule à Gand ainsi que dans les districts d’Anvers-Centre et de Borgerhout. Et les commentateurs de proclamer aussitôt que « un SP.a fort peut stopper la montée du VB ». Au lieu d’être vu comme l’une des causes de la marée noire montante depuis 1991, le SP.a est maintenant présenté comme le sauveur et le bourgmestre d’Anvers et ex-président du SP.a Patrick Janssens fait figure de héros !
Qu’en est-il réellement ? Pour l’ensemble de la Flandre, le Vlaams Belang progresse de 6,6% par rapport aux élections communales de 2000. Il a augmenté d’un tiers le nombre de villes où il se présentait, passant de 459 à 794 conseillers communaux. Ce qui ne peut que renforcer l’implantation du parti. Dans ce sens, le triomphalisme ambiant est totalement déplacé.
A Anvers, grâce à la campagne médiatique centrée sur « Patrick », le SP.a a pu présenter l’enjeu du scrutin comme un duel entre Patrick (Janssens) et Filip (Dewinter). Patrick Janssens a récolté un peu plus de 70.000 voix de préférence, Filip Dewinter un peu plus de 60.000. Le parti de Janssens a progressé de 16% et devient du même coup – mais de peu – le premier parti d’Anvers à la place du VB.
Mais le grand soupir de soulagement à Anvers ne doit pas empêcher de voir la réalité en face : personne n’a réussi à prendre un siège au VB ! Comme Dewinter l’a fait remarquer, le SP.a a « cannibalisé » ses propres partenaires dans la coalition. Le VLD perd 5 sièges, Groen ! 4 et le CD&V 1. Le SP.a en gagne 10 avec un score de 35%.
Pour expliquer la victoire des coalitions au pouvoir à Anvers et Gand, les commentateurs mettent en avant la « bonne gouvernance » de ces villes, et en particulier les opérations de rénovation urbaine. Mais celles-ci ont surtout été mises en oeuvre dans l’intérêt de la classe moyenne qui a réinvesti certaines portions du centre-ville au détriment de toute une population fragilisée qui y vivotait depuis des années et qui avait offert au Vlaams Blok sa première percée électorale à la fin des années ‘80 et au début des années ‘90. La composition sociale de certains quartiers a changé parce que les pauvres en ont été chassés.
Ceci explique les progrès successifs du SP.a, le champion de la nouvelle classe moyenne et le maître d’oeuvre de ce type de « rénovation urbaine ». Mais la valeur des logements a tellement grimpé que les moins nantis ont dû quitter certains quartiers de Borgerhout et d’Anvers-Centre… pour s’établir dans les quartiers plus périphériques où le Vlaams Belang continue à se renforcer.
Bruxelles: une politique “proche des gens”?
A Bruxelles, le PS conforte sa position de premier parti régional qu’il avait déjà ravie au MR en 2004. C’est d’autant plus remarquable que le MR – sauf à Bruxelles-Ville où il s’effondre – et le CDH progressent également. Le PS progresse dans les grosses communes de la première ceinture comme Schaerbeek (où il fait plus que doubler son score mais où Onkelinx rate le poste de bourgmestre grâce à la nouvelle alliance entre MR et Ecolo), Molenbeek ou Anderlecht et il franchit pour la première fois la barre des 30% à Bruxelles-Ville. C’est surtout Ecolo qui fait les frais de cette progression. L’extrême-droite (FN et VB) stagne, sauf à Schaerbeek où la Liste Demol, apparentée au VB, perd la moitié de ses voix et 3 de ses 4 élus. Est-ce à dire que les politiciens bruxellois ont su rester « proches des gens et de leurs préoccupations » comme ils aiment à le dire? Rien n’est moins vrai.
Le vote des Belges d’origine immigrée et des étrangers non européens, qui pèse lourd dans certaines communes, a certainement fait barrage à l’extrême-droite. Les partis, surtout le PS, ont joué à fond la carte du vote communautaire en ouvrant largement leurs listes à des candidats d’origine turque, marocaine et africaine. Le principal, sinon le seul critère de sélection était leur capacité à récolter des voix dans leur communauté. Nombre d’entre eux ont été élus le 8 octobre. Ils vont rapidement être associés à la politique néolibérale. Ils vont sans doute essayer d’en atténuer les effets dans leur quartier ou leur communauté en aidant leurs électeurs à surmonter individuellement les problèmes sociaux qu’ils auront contribué à créer par leur soutien à des mesures antisociales. Mais le clientélisme – ce que les politiciens appellent « être proche des gens » – se heurtera à ses limites et ceux-ci devront tôt ou tard rendre des comptes sur leur attitude au Conseil communal ou au Collège.
Wallonie: le PS en équilibre instable
Une marée noire était parfois annoncée le 8 octobre. Les résultats sont beaucoup plus diversifiés. Mais le lien est clair entre les résultats du PS et du FN. Dans le Hainaut, là où les scandales à répétition ont ébranlé le PS, celui-ci connaît des reculs parfois impressionnants (13% à Charleroi, 14% à La Louvière, 10% à Mons) et le FN refait une percée. Par contre, là où le PS a échappé (pour le moment ?) aux scandales, comme dans la région liégeoise, il maintient ses résultats, voire les améliore, après avoir réussi à se présenter comme le rempart contre le libéralisme agressif du MR et de Reynders. Et le FN ne perce pas (1 seul siège à Liège).
Si le PS n’a pas été envoyé au tapis lors de ces élections, ses résultats mitigés et la reprise des inculpations (le bourgmestre de Charleroi Van Gompel en tête) minent quand même sa position tant au sein du gouvernement Verhofstadt qu’à la Région wallonne. Cela explique certainement sa volonté d’ouvrir ses majorités dans plusieurs villes au MR ou au CDH. Mais le résultat en sera immanquablement une politique encore plus néolibérale. Et un espace encore plus grand pour le développement du FN dans les prochains scrutins.
Le PTB triple le nombre de ses sièges
La gauche se souviendra de ces élections en raison du « décollage électoral » du Parti du Travail de Belgique. Le PTB progresse un peu partout et triple le nombre de ses sièges qui passe de 5 à 15. En Wallonie, il conserve ses 2 sièges à Herstal et en gagne 1 à Seraing et La Louvière ; par contre, il n’obtient pas de siège à Bruxelles. Mais 11 de ces 15 sièges sont gagnés par des « Médecins pour le Peuple » est révélateur. Autour de ses Maisons médicales, le PTB a construit une intervention locale et mené des actions contre les sacs-poubelles payants, pour le logement social, pour plus de facilités pour les jeunes, … qui, avec sa participation active à la lutte contre le Pacte des Générations, a pu convaincre une partie des électeurs.
Ce résultat démontre en tout cas le potentiel pour une politique d’opposition au néolibéralisme. Un nouveau parti, défendant réellement les travailleurs et reposant sur une forte base syndicale, pourrait obtenir de tels scores dans toute la Belgique. C’est ce qui fait toute l’importance de l’initiative du Comité pour une autre politique (CAP)…