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  • Les Etats-Unis en route vers la faillite ?

    Le 1e octobre dernier, date officielle à partir de laquelle le budget 2014 est d’application aux USA, plus d’un million de ménages ont eu une bien mauvaise surprise. Considérés comme ‘‘non essentiels’’ à la survie du pays par le gouvernement Obama, 800.000 fonctionnaires fédéraux se sont retrouvés en congé forcé et sans solde pour une durée indéterminée. Des centaines de milliers d’autres, plus ‘‘vitaux’’, ont quant à eux pu rester à leur poste… sans être payés. La raison de cette mise à l’arrêt de l’Etat fédéral ? Tout simplement l’absence d’un budget 2014 permettant le fonctionnement de l’administration…

    Par Baptiste (Nivelles), article tiré de l’édition de novembre de Lutte Socialiste

    Que s’est-il passé ?

    Le budget fédéral doit être avalisé par deux entités : le Congrès, à majorité républicaine, et le Sénat, à majorité démocrate, ce qui impose, de facto, un compromis entre les deux partis du big-business américain. Or, ce nouveau budget a une particularité : l’introduction de ‘‘l’ObamaCare’’ (ou Affordable Care Act), la loi sur l’assurance maladie. Cette dernière est tout ce qui reste à Obama pour encore pouvoir justifier que ses deux mandats à la présidence des Etats-Unis aient eu, quelque part, un caractère un tant soit peu progressiste par rapport à ses prédécesseurs. Bien que sans cesse aménagée en faveur des lobbys pharmaceutiques par rapport à ce que promettait Obama lors de ses campagnes électorales, cette loi est, par la même occasion, le cheval de bataille de l’ultra-conservateur ‘‘Tea Party’’, cet horrible monstre de Frankenstein du parti républicain. La stratégie du Tea Party était dès lors simple : faire pression sur les républicains pour rentrer dans un bras-de-fer sur le nouveau budget avec l’espoir de postposer, d’année en année, l’entrée en vigueur de cette loi sur l’assurance maladie. D’où le blocage du 1e octobre dernier, qui a mis en place le shutdown, une cessation organisée des agences fédérales.

    Un blocage politique sur fond de crise économique profonde

    L’absence d’un budget pour 2014 n’était pas le seul enjeu des négociations. Les politiques de guerres et les politiques de rabattement fiscal pour les plus riches qu’Obama a menées ces dernières années, en digne successeur de Bush, ont creusé les déficits budgétaires, augmentant chaque année le plafond record atteint par la dette. Cette dernière avoisine aujourd’hui les 17.000 milliards $, soit plus de 100% du PIB des USA. Or, le plafond maximal que la dette pouvait atteindre avait été fixé à 16 700 milliards $ lors d’un vote au congrès en août 2011. Pour pouvoir continuer à emprunter sur les marchés, ce qui est indispensable pour un budget en déficit, il fallait donc voter, en même temps que le budget, un relèvement du plafond de la dette. Sans cela, le budget précédent ne pourrait même pas être reconduit puisque l’Etat ne pourrait plus rien emprunter, et donc il n’aurait plus été en mesure de répondre à ses obligations élémentaires. C’est la raison pour laquelle les Etats-Unis risquaient pour la première fois de leur histoire un défaut de paiement si un accord n’était pas trouvé pour le 17 octobre.

    Ce scénario, synonyme de catastrophe financière pour tout le système capitaliste, a été écarté grâce à un accord obtenu dans les dernières heures de la nuit du 16 octobre. Tout est à présent fini ?

    Rien n’est moins sûr. Certes, un accord a bien été trouvé entre les républicains et démocrates, en échange de nouvelles concessions sur l’ObamaCare, notamment le renoncement à une taxe sur les sociétés d’assurance, mais cet accord est un compromis très minimal sur le budget et sur la dette. Le relèvement du plafond de la dette est autorisé jusqu’au 7 février et les agences fédérales fermées durant le shutdown peuvent rouvrir… jusqu’au 15 janvier ! D’ici là, un accord complet sur le budget 2014 doit être trouvé, sans quoi l’histoire recommencera de plus belle.

    Un épisode de plus dans la crise des instruments politiques de l’impérialisme…

    S’agit-il d’une étrange mise en scène calculée ? Cette situation chaotique est plutôt le reflet d’une crise des instruments politiques traditionnels de l’impérialisme américain. La façade démocratique du système s’étiole au fur et à mesure des politiques néolibérales, qui dégradent toujours un peu plus le niveau de vie de la population, et les partis du big business s’en retrouvent profondément discrédités. Face à cela, les républicains avaient cru trouver un outil miracle : le Tea Party, la droite populiste hystérique façon US, leur permettant de canaliser une partie du sentiment ‘‘anti-establishment’’ tout en tirant vers la droite les lignes politiques. Depuis, les républicains ont littéralement perdu le contrôle de leur outil populiste et se retrouvent poussés dans des stratégies aventuristes, pas forcément dans l’intérêt de la classe qu’ils représentent, à savoir les capitalistes et le big-business.

    Ce dernier épisode représente une défaite pour les républicains puisque l’ObamaCare rentrera bien en vigueur. Des règlements de compte entre les fractions ‘‘responsables’’ et les fractions ‘‘aventuristes’’ risquent fort de prendre place dans les mois qui viennent dans le camp républicain. Obama a-t-il enfin vaincu le Tea Party ? À nouveau, des concessions ont dû être réalisées, et malgré qu’il ait pris l’ascendant sur ses adversaires politiques, son impopularité restera importante tant que la crise du capitalisme nuira aux 99% de la population et que ses politiques ne feront que creuser le fossé entre riches et pauvres. En outre, l’accord actuel reste très maigre et l’essentiel devra encore être discuté en janvier prochain. La crise politique est loin d’être clôturée.

    … dont la note est à chaque fois reportée sur le dos des travailleurs et de leurs familles

    Le précédent ‘‘clash’’ financier des Etats-Unis avait eu lieu au mois de mars dernier. Le gouvernement devait élaborer un plan drastique de diminution des dépenses publiques pour le 1e mars, cette date butoir faisant suite au relèvement du plafond de la dette voté en août 2011. Faute d’accord, des coupes automatiques ont eu lieu dans les dépenses publiques de l’ordre de 85 milliards $ en 2013 et ensuite pour 1 200 milliards $ sur 10 ans ! Ces coupes se retrouvent surtout dans les budgets de la Défense, mais également dans les budgets sociaux, comme les soins de santé, l’éducation,… Selon Standard and Poor’s, les 16 jours de shutdown d’octobre ont, quant à eux, causé une perte pour l’économie américaine d’environ 24 milliards $, ce qui équivaut à une contraction de l’économie de 0,7% durant cette période. À nouveau, les travailleurs et leurs familles auront payé la note, notamment à travers le chômage économique, et ce alors que les membres du Congrès percevront bien eux l’intégralité de leur 174 000 $ annuel !

    Il est plus que temps d’avoir un parti de masse pour représenter les intérêts des travailleurs et des pauvres. Wall Street a deux partis, les démocrates et les républicains, alors que la classe ouvrière n’en a aucun. Socialist Alternative (section du CIO aux Etats- Unis) fait campagne pour la construction d’un tel parti. Lors des dernières élections locales à Seattle en 2012, notre camarade Kshama Sawant avait obtenu 29% sur base d’un programme socialiste, illustrant le potentiel qu’ont de telles idées parmi la population.

    Le capitalisme ne fonctionne pas, le socialisme doit le remplacer

    Le capitalisme est arrivé depuis longtemps dans un stade de délabrement. Il ne propose aucun avenir pour la société. La guerre de classe, le chaos économique et les crises politiques sont ses seules perspectives. Ce système doit être remplacé par le socialisme, où les secteurs clés de l’économie sont nationalisés, permettant une planification démocratique de la production et des budgets en fonction des besoins de tous, et non en fonction des lobbys privés.

  • USA : Les campagnes électorales de Socialist Alternative ont remporté un grand succès

    C’est aujourd’hui 5 novembre que se déroulent les élections locales américaines, et les campagnes pour un siège de conseiller municipal à Minneapolis et à Seattle menées par Socalist Alternative (CIO-USA) ont bénéficié d’un puissant momentum. Des candidats de taille se sont sentis forcés de soutenir leurs adversaires de Socialist Alternative en réponse à leurs campagnes basées sur les mouvements sociaux et une foule de volontaires.

    Kai Stein, CIO

    Ty Moore pour le conseil communal de Minneapolis

    Les politiciens capitalistes et les lobbyistes nationaux des grandes entreprises, étroitement liés au secteur bancaire, ont clairement choisi leur candidate, Alondra Cano, pour la course serrée au conseil municipal du ward 9 à Minneapolis. Cela donne à la classe ouvrière une image bien plus claire du choix qui s’offre à eux, et de choisir un candidat qui sera de leur côté, Ty Moore. Ty est un militant de longue date d’Occupy Homes, qui défend les propriétaires de maisons contre les expulsions et les saisies immobilières. Il est aussi un membre de Socialist Alternative.

    A la surprise générale, l’un des principaux grands groupes lobbyistes américains, précédemment basé à Chicago, a rejoint la course. L’association nationale des Realtors (NAR), un groupe de lobbyistes du domaine de l’immobilier, soutient les démocrates et les républicains, y compris des dirigeants du Tea Party comme Michelle Bachman et Ted Cruz. Le groupe a investi 40 millions de dollars dans les élections l’année dernière. Deux semaines avant le jour des élections du 5 novembre, ce Super-PAC (comité d’action politique) a envoyé massivement et à deux reprises, à quelques jours d’intervalle, des tracts appelant à voter pour Cano.

    Ce soudain intérêt dans la politique locale à Minneapolis est une reconnaissance de l’énorme écho qu’a trouvé la campagne de Socialist Alternative, malgré un budget plus que limité. L’intervention des corporations américaines dans les quartiers du sud de Minneapolis fait partie du programme de la NAR pour faire reculer la résistance des propriétaires de maison contre les expulsions.

    Par exemple, ils poursuivent en justice la ville de Richmond, où un maire membre du Green party acquiert des bâtiments privés pour reloger des gens endettés durement touchés par les banques. Ces expropriations sont généralement utilisées pour virer les « petites gens » pour faire de la place pour les grands constructeurs immobiliers, des autoroutes, ou pour satisfaire des intérêts financiers. Richmond donne une idée de comment se servir d’outils inhabituels dans la lutte contre Wall Street.

    Occupy Homes a saisi cette idée et dit que tous les outils possibles doivent être utilisés à Minneapolis. La campagne insiste sur le fait qu’après le krach économique de Wall Street, les banques ont été sauvées, et maintenant ces mêmes banques s’en prennent à des centaines de familles dans le ward 9 à Minneapolis, et tentent de les expulser de leurs maisons. Occupy Homes a organisé avec succès la résistance contre les expulsions et a empêché les banques de saisir des maisons. C’est l’un des points principaux de la campagne de Ty Moore.

    Alors qu’Alondra Cano se présente toujours publiquement comme une militante et une organisatrice qui défend les gens contre les banques, la vérité a éclaté lorsque l’establishment local s’est mis à la soutenir après que la campagne de Ty Moore ait fait de l’ombre à la sienne avec ses distributions de tracts en porte-à-porte et ses centaines d’enseignes dans les jardins.

    Pendant que Cano serrait la main de personnes menacées d’expulsion, le maire envoyait la police pour les expulser au profit des banques. Ce même maire qui a collaboré à une campagne de don pour Cano, approuvée par le DFL (Democrats Farmer Labor Party, les démocrates du Minnesota).

    Lors de cette campagne, qui n’a pas été organisée dans le Ward 9 mais dans les quartiers les plus riches de Minneapolis, la machine du DFL était visible ; les responsables d’une subvention au propriétaire de l’équipe de football des Vikings, le milliardaire Zygi Wilf, y ont fait office de coorganisateurs.

    L’intervention non dissimulée d’énormes sommes versées par le NAR renforce encore plus l’engagement de centaines de volontaires participant à la campagne de Ty Moore. Le SEIU, l’un des plus puissants syndicats du pays, soutient sa campagne. Occupy Homes mobilise ses membres pour aider à convaincre des gens à voter pour Ty. L’appel de don national lancé l’année dernière par la candidate du Green party à la présidence, Jill Stein, par Matt Gonzales, qui a participé à la campagne présidentielle de 2008 avec Ralph Nader, et bien d’autres, a trouvé un plus large écho alors que les gens ont pu voir l’importance nationale qu’ont revêtues ces élections.

    Kshama Sawant à Seattle

    Richard Conlin détient son siège au conseil communal de Seattle depuis 16 ans. Conlin dispose d’un réseau de pouvoir et de soutien basé sur les grandes entreprises et les entreprises immobilières influentes. Cependant, le fait qu’il ait rassemblé plus d’argent pour sa réélection que tout autre candidat à Seattle ne provient pas de sa popularité. En regardant de plus près la liste de ceux qui l’ont soutenu, il est clair que les constructeurs immobiliers et les grandes entreprises sont nerveux quant à l’issue de cette course très serrée.

    Après avoir obtenu 44.000 votes aux primaires d’août, Kshama Sawant est en course pour que la classe ouvrière obtienne un représentant élu au conseil communal. 300 volontaires font du porte-à-porte. Un énorme effort dans la collecte de dons a permis à cette campagne socialiste d’envoyer des tracts dans 140.000 foyers. Kshama a défié le candidat sortant dans un débat télévisé et à de nombreux forums politiques. Cette course coudes à coudes a encouragé l’influent hebdomadaire local, The Stranger, à faire campagne pour Kshama, plongeant l’establishment de Seattle la peur.

    Conlin s’est même senti obligé à commencer une horrible compagne de diffamation. Dans le Seattle Times, le principal journal pro-establishment de la ville, Conlin s’est interrogé sur « l’engagement civique » de Kshama car elle n’a voté qu’à 3 des 4 élections auxquelles elle aurait pu voter. Conlin sembler lier engagement civique et votes, mais son attaque implicite est cependant claire : Kshama est une immigrée (elle a obtenu la nationalité américaine en 2010). Cette attaque contre une candidate de couleur venant de l’immigration a eu un effet polarisateur et a aussi mobilisé de nouveaux appuis pour la campagne Vote Sawant.

    The Stranger a donné une réponse claire aux accusations de Conlin et a conclu : « le problème de Conlin, c’est que Kshama Sawant est trop engagée. Colin devrait cesser de faire une fixette sur ses votes. Il devrait plutôt s’inquiéter de ses propres votes contre le transit, pour des autoroutes à moitié financées, contre les congés maladie, pour une loi anti-mendicité qui a violé la norme des droits civiques de la ville, et contre une amélioration de la sécurité des centres pour sans-abris, entre autres ».

    Le dernier tour des élections a déjà commencé. Les habitants de Seattle ont deux semaines pour envoyer leur vote. Près de 200.000 électeurs décideront entre un politicien capitaliste et une militante de la classe ouvrière. Une campagne organisée à la base de la population lutte contre l’influence de l’argent sur la politique, et l’issue est incertaine.

    Pour un salaire de 15$ de l’heure.

    Une des principales revendications de la campagne Vote Sawant est l’instauration d’un salaire minimum de 15$ de l’heure et le droit à une syndicalisation totale. Les t-shirts rouges portés par les partisans de la campagne qui réclament cette augmentation au lieu du minimum de 9,19$ à Seattle sont devenus la marque visuelle de la campagne.

    Cette revendication soulevée par les travailleurs des fast food l’année dernière s’est répandue dans tout le pays, réveillant les aspirations de millions de travailleurs à bas salaires. Elle résonne parmi les couches les plus pauvres de la classe ouvrière américaine, mais a gagné un soutien bien plus large.

    Au cours de la campagne de Seattle, poussés par Kshama Sawant et ses supporters, même les deux candidats au poste de maire en commencé à approuver cette revendication, mais en termes vagues. Si les travailleurs ne peuvent pas compter sur ces deux candidats démocrates, cela montre tout de même l’impact d’une campagne acharnée.

    Toutes sortes d’attaques ont été lancées contre la revendication de hausse du salaire minimum de la campagne de Kshama. Ceux qui bénéficient le plus de la surexploitation des travailleurs sont des entreprises comme McDonald’s, Walmart et la chaîne de supermarchés Target. L’argument qui est sans cesse ressorti est que les petites entreprises ne tiendraient pas le coup.

    Cependant, il est évident qu’un salaire de 15$ de l’heure ne serait qu’un premier pas pour gagner suffisamment avec un emploi à temps plein pour nourrir une famille. Et ces fameuses petites entreprises sont déjà coulées à cause de la pauvreté, des expropriations et de l’économie brisée basée sur la sur-accumulation de capital sans investissement alors que des familles de travailleurs souffrent. La correction de cette situation qui plonge depuis trop longtemps des familles dans la pauvreté sera une première étape pour réparer toute l’économie.

    A Minneapolis, la campagne de Ty Moore pour le poste de conseiller communal a aussi trouvé un grand écho avec la revendication d’un salaire minimum de 15$ de l’heure, y compris dans une manifestation pour les droits des immigrés début octobre. Le conseiller actuel du ward 9 a déclaré être « tout à fait sûr » que la ville ne peut imposer une telle législation. Le Minneapolis Star Tribune cite Gerry Schiff dans un article sur un forum des candidats (auquel ce dernier n’était même pas présent): « Ce n’est qu’un leurre que Ty Moore agite et qui montre qu’il ne comprend rien au poste pour lequel il se présente ».

    Sans surprise, le conseil communal n’a eu aucun problème à contourner la loi pour offrir un cadeau de 150 millions de dollars à un milliardaire en l’attribuant au stade des Vikings, évitant ainsi un référendum obligatoire de la population de la ville.

    La loi qui empêche Minneapolis de décider d’un salaire minimum est injuste et n’a même jamais été attaquée en justice, une mesure que le conseil communal pourrait immédiatement prendre en implémentant cette augmentation de salaire. L’ordonnance d’un salaire minimum peut forcer immédiatement tous les contractants de la ville à appliquer cette mesure d’un salaire minimum de 15$ de l’heure. Des victoires comme le mariage pour les couples de même sexe n’ont pas été remportées par des politiciens qui disaient qu’ils en étaient incapables, mais par des mouvements avec des dirigeants qui ont montré le chemin en défendant les intérêts de la classe ouvrière.

    Le combat pour un salaire de 15$ ne prendra bien sûr pas fin le jour des élections, le 5 novembre. Les efforts de dizaines de milliers de travailleurs des fast foods, du SEIU, d’autres syndicats et de nombreux militants communautaires ont montré le potentiel d’un soulèvement des parties les plus pauvres de la classe ouvrière des Etats-Unis.

    Ouverture politique

    La force des deux campagnes de Socialist Alternative à Minneapolis et à Seattle réside dans le fait qu’elles dérivent d’un programme pour défendre la classe ouvrière contre Wall Street. Ce programme est basé sur la bonne compréhension de la colère née lors du mouvement Occupy en 2011, qui n’a pas disparu, et qui reste une source pour de futurs grands mouvements et de grandes secousses politiques.

    Des millions d’Américains sont aliénés par les deux partis du grand capital et recherchent une alternative. Mais plus que ça, malgré la petite croissance économique, le système politique et économique est brisé et de nombreux Américains le réalisent. Des tensions sociales montent.

    Les populistes de droite et les libertariens (lobbyistes ultralibéraux, pro marché) tentent de combler le vide politique. Mais tous les indicateurs pointent vers le développement lors des prochaines années de la recherche d’une nouvelle alternative de gauche, peut-être populiste au départ, mais qui affirmera au fur et à mesure son caractère de classe. Le potentiel s’ouvre pour une coalition des militants et des candidats travaillistes, socialistes et du Green party pour offrir une alternative aux politiques capitalistes.

    Malgré d’énormes tâches et des forces réduites, Socalist Alternative est extrêmement bien positionnée pour contribuer à ces développements pour aider la riposte contre la soif de profits, et pour la lutte pour un futur socialiste.

  • États-Unis : après le “shutdown” – Soupirs de soulagement, mais l'austérité va continuer

    C’est avec un grand soulagement que la population des États-Unis d’Amérique, simples travailleurs comme grands patrons, a appris la fin du “shutdown” de l’administration. 800 000 employés du gouvernement retournent au travail ; la plupart seront payés pour ces deux semaines sans travail.Malgré le fait que ces évènements soient perçus à juste titre comme une défaite pour le Tea Party, les Démocrates tout autant que les Républicains prévoient de lancer de grandes attaques sur les programmes d’aide sociale tels que Medicare, Medicaid et la sécurité sociale, dans le cadre de leurs négociations “bipartisanes” quant au nouveau budget fédéral, qui doivent commencer en décembre.

    Par Bryan Koulouris, Socialist Alternative (CIO-USA)

    Pour Robert Reich, qui était secrétaire au Travail sous le président Bill Clinton, « Obama a déjà proposé une méthode pour réduire les futures dépenses de la sécurité sociale, en modifiant la manière dont les montants à payer sont ajustés en fonction de la hausse du cout de la vie – en utilisant un indice des prix au consommateur “en chaine”, ce qui veut dire que lorsque les prix augmentent, les gens sont censés économiser en se tournant vers des alternatives meilleur marché. Mais cela n’a aucun sens si l’on parle des personnes âgées, qui dépensent déjà une part énorme de leurs revenus en médicaments, soins à domicile, et appareils médicaux dont les prix augmentent plus vite que l’inflation. »

    Ces propositions de coupes budgétaires ne feront qu’encore saper l’autorité déjà mise à mal de notre système politique foireux. Qui plus est, nous devons déjà nous attendre à connaitre une crise similaire en janvier et février 2014. Un sondage Gallup effectué durant le shutdown a révélé que 60 % de la population trouve qu’il faut créer un nouveau parti aux USA – un record ! –, tandis que 26 % seulement pense que le système à deux partis fonctionne correctement. Voilà qui révèle une polarisation profonde au sein de la société américaine. L’immense vide à gauche se reflète directement par le succès des campagnes électorales locales menées par notre section américaine, Socialist Alternative.

    La droite se retrouve isolée

    Les politiciens du “Tea Party” (fraction de droite populiste à l’intérieur du parti républicain) et même certains de leurs riches sponsors avaient planifié ce shutdown gouvernemental longtemps à l’avance. Ils pensaient que c’était là leur dernière chance de battre le “Obamacare”, partie intégrale de leur bataille pour une politique ultra-austérité tout en activant leur base de droite en vue des élections de mi-mandat qui se dérouleront l’année prochaine. Au lieu de cela, ils n’ont fait que révéler au grand jour les énormes divisions au sein du parti républicain et démontrer l’ampleur de la crise politique apparemment permanente qui traverse la classe dirigeante américaine.

    Le Tea Party est une invention de vieux républicains visant à créer une organisation faussement militante et “populaire” en se servant de l’énorme colère contre les renflouements bancaires et de la grande déception envers Obama. Ils ont reçu un certain écho dans un pays fort polarisé, et ont pu organiser de grands meetings qui rassemblaient des participants essentiellement blancs, âgés, vivant à la campagne ou dans les faubourgs résidentiels (suburbs) et de “classe moyenne”. L’idéologie du Tea Party colle à celle de ces personnes qui sont déçues du déclin relatif de la puissance américaine dans le monde et se sentent souvent mal à l’aise du fait d’avoir un président noir. Cette base a dans beaucoup d’endroits fortement ébranlé les primaires républicaines (élections au sein du parti), ce qui a poussé les candidats et députés républicains à se radicaliser et à refuser tout consensus bipartisan avec le reste de la classe dirigeante.

    Le Tea Party a reçu beaucoup de publicité de la part des médias capitalistes, qui l’ont utilisé pour orienter le débat vers la droite et pour faire passer le programme d’austérité. Mais aujourd’hui, ils sont fortement discrédités. Chaque nouveau sondage montre à quel point le Tea Party est déconnecté de la réalité et du point de vue de la grande majorité de la population concernant la plupart des enjeux de société. Le mouvement Occupy a complètement bouleversé le débat quant à la crise, en accusant les véritables responsables, qui sont non pas l’intervention gouvernementale dans l’économie, mais la classe dirigeante dans son ensemble, et les inégalités au sein de la société.

    La rhétorique du Tea Party a peut-être aidé les républicains lors des primaires dans les quartiers résidentiels, mais ce n’est pas une stratégie durable ni pour le parti républicain, ni pour ses riches mécènes. Même les frères Koch, des milliardaires ultra-conservateurs, ont fini par publier une déclaration dans laquelle ils se distancient du Tea Party et de son rôle dans le shutdown gouvernemental. Idem en ce qui concerne le célèbre pasteur de droite Pat Robertson.

    Le dernier jour avant le début du shutdown, plusieurs très grands patrons sont intervenus auprès de John Boehner et de politiciens Tea Party pour tenter de les convaincre d’arrêter leurs menaces, qui revenaient à pointer un revolver sur la tempe de l’économie américaine. D’autres membres du Tea Party ont averti à Boehner que tout geste de soumission de sa part reviendrait à mettre un terme à sa carrière politique. Mais à présent, ils tentent de contenir le conflit au sein du parti républicain, qui est passé de la “guerre froide” à la “guerre de tranchées”. On s’attend encore à de grandes batailles lors des primaires républicaines pour les élections de mi-mandat, sans doute alimentées par les nouvelles divisions qui émergeront peut-être concernant la question du budget d’État en janvier et février prochains.

    Tout cela a déjà fait énormément de dégâts aux institutions dirigeantes américaines dans la perception des travailleurs américains comme aux yeux de la population mondiale.

    Une immense colère

    C’est surtout le Tea Party qui est jugé responsable du shutdown, mais la plupart des gens sont également en colère contre tous les politiciens quels qu’ils soient. Il a été largement révélé que les députés du Congrès continuaient à recevoir leurs salaires, alors même que 800 000 fonctionnaires et employés de l’État se retrouvaient de force en congés sans solde, et que la fermeture de l’ensemble des services publics (comme les urgences hospitalières) a causé un grand nombre de morts.

    Les dirigeants syndicaux n’ont pas appelé à la moindre manifestation contre le shutdown. Ce faisant, ils ont laissé passer une immense occasion de construire le soutien aux syndicats et pour un programme d’urgence pour l’emploi qui serait financé par des taxes sur les millionnaires et sur les grandes entreprises. La colère qui vit dans la société devait pourtant bien s’exprimer quelque part. Le Tea Party a tenté de mobiliser des camionneurs pour fermer les routes qui mènent à Washington DC, afin de capitaliser sur la frustration et de la diriger contre les Démocrates : cela a été un flop complet.

    Des millions de gens ont vu Dylan Ratigan, un commentateur libéral, donner à la télévision un discours de cinq minutes extrêmement radical et apparemment improvisé, venant du cœur, qui a ensuite été partagé des centaines de milliers de fois sur Facebook.

    Ratigan disait que « Des dizaines de milliers de milliards de dollars sont extraits des États-Unis d’Amérique par un système financier, un système boursier, un système de taxation, qui a été mis en place par les deux partis. Le Congrès est vendu ! Il faut arrêter affaire d’argent dans la politique ! Le système bancaire est totalement corrompu et il nous pille ! » Il n’a évidemment pas été jusqu’à dire qu’il nous faut un nouveau parti qui représente les 99 % de la population, pour installer le socialisme démocratique, mais le fait de voir ce pétage de plomb radical autant diffusé montre bien la conscience qui est en train de se développer.

    Un écran de fumée pour couvrir la boucherie

    L’adoption du budget fédéral a été renvoyé à un “comité congressionnel” qui prendra ses décisions dans les prochaines semaines. Obama et les dirigeants du parti démocrate ont déjà affirmé être prêts à attaquer tous les grands programmes sociaux qui nous viennent du “New Deal” et de la “Great Society”, qui avaient été imposés par des mouvements de masse des travailleurs, des opprimés et de la jeunesse. Obama a même été jusqu’à dire qu’il voudrait diminuer les taxes sur les grandes entreprises. Bien que beaucoup de gens sont contents de voir les politiciens “mettre leurs différences de côtés pour se mettre au travail”, le problème est que le programme des deux partis n’est pas du tout orienté vers la défense des intérêts de la population laborieuse et des pauvres. Il se base plutôt sur une approche conflictuelle qui vise à instaurer une politique pro-capitaliste. Tout accord budgétaire bipartisan s’en prendra de nouveau aux programmes essentiels que sont Medicare et la sécurité sociale, plutôt que taxer l’incroyable richesse de notre élite super-riche. Il faut donc s’attendre à voir encore grandir la déception envers les Démocrates si ces coupes budgétaires devaient être effectuées.

    Le vide politique

    Il y a d’immenses ouvertures pour le mouvement syndical et pour la gauche pour intervenir dans ce débat. Les récents sondages, les discours radicaux à la télévision, la popularité du mouvement Occupy, les luttes déterminées menées par les travailleurs à bas salaire – toutes ces éléments indiquent une ouverture massive que la gauche doit saisir fermement.

    Socialist Alternative, section américaine du CIO, a montré l’exemple avec nos campagnes électorales extrêmement politiques et dynamiques à Seattle et à Minneapolis. Il faut que d’autres militants de la classe prolétaire se dressent et se présentent aux élections de mi-mandat de 2014, au niveau local et national.

    Il nous faut des candidats qui viennent du syndicat des enseignants, en lutte contre les coupes et la privatisation de l’enseignement ; des candidats qui soient des propriétaires de maison menacés d’expulsion par les banques et les flics, en lutte contre les saisies immobilières ; des candidats qui soient des travailleurs à bas salaire, qui se présentent contre les politiciens capitalistes ; des militants anti-sexistes, anti-racistes, anti-homophobie, pour rompre avec la politique des deux partis des patrons.

    Plus que jamais, cette crise montre à quel point Wall Street a deux partis, tandis que nous n’en avons aucun. Un pas énorme dans la construction d’un parti qui soit un parti des 99 % de la population, serait de voir deux-cent candidats indépendants se présenter pour les élections de 2014. Des candidats liés aux mouvements sur le terrain, des candidats qui refusent de se voir achetés, des candidats avec un programme de lutte pour et avec les travailleurs, les jeunes et les pauvres.

  • USA : Les socialistes révolutionnaires ouvrent la voie vers une représentation politique des travailleurs indépendante du capital

    L’an dernier, les États-Unis ont été moins plongés dans la tourmente économique que l’Union Européenne. Il ne faudrait pourtant pas en conclure que des changements fondamentaux n’y sont pas à l’œuvre. Ce bon vieux ‘‘Rêve Américain’’ gît sur le sol, brisé. L’impressionnant mouvement Occupy qui a déferlé sur le pays en 2011 passera à l’Histoire comme l’une des premières manifestations de ce virage dans la société américaine.

    Par Bart Vandersteene

    L’économie sous perfusion

    L’élite américaine est parvenue à repousser une crise similaire à celle qui frappe l’Union Européenne à l’aide d’une intervention gouvernementale sans précédent. Sans cette ingérence de la part d’autorités publiques qu’ils détestent pourtant tellement, tous les grands adeptes du ‘‘libre marché’’ et du libéralisme auraient assisté, impuissants, à l’effondrement total de leur système. Sans l’intervention du gouvernement et l’instauration d’une politique monétaire basée sur l’injection permanente d’argent dans le système, le chaos économique se serait abattu sur le pays de même qu’une révolte sociale de grande ampleur.

    Avec une croissance de 2,2% en 2012, le pire semble être passé. D’ailleurs, commentateurs et politiciens bourgeois proclament l’arrivée de la fin de la crise: le déficit budgétaire US est passé de près de 10% à 4%, le Dow Jones a atteint un niveau plus élevé que celui d’avant la crise et le taux de chômage a chuté de 9,4% en 2009 à 7,4% aujourd’hui.

    Pourtant, la crise n’a pas disparu. Pas moins de 5% de la population a perdu son logement, les investissements privés sont à un niveau excessivement bas malgré des taux d’intérêts historiquement bas et les politiques d’austérité font des ravages à tous niveaux. De l’ensemble des emplois créés depuis 2010, les bas salaires en représentent… 76% ! Il s’agit d’emplois temporaires qui fondent comme neige au soleil dès que l’économie cahote à nouveau, avec des salaires qui descendent régulièrement sous les 11 $ de l’heure (soit 8,22 €). Un quart des travailleurs américains gagnent moins que le salaire minimum en vigueur en Belgique. Pour tous ceux là, le Rêve Américain a cédé la place à une longue et pénible lutte pour la survie. En 2007, 55% de la population américaine décrivait sa situation financière comme étant ‘‘bonne’’ ou ‘‘parfaite’’. Ils ne sont aujourd’hui plus que 32%. Les autorités sont toujours tenues de maintenir l’économie sous perfusion pour éviter le pire. Les moyens de la collectivité ne sont pas orientés vers l’investissement public et la création d’emplois, mais vers l’impression d’argent pour maintenir au plus bas les taux d’intérêt et ainsi donner du temps aux banques pour se nettoyer quelque peu avant l’arrivée de la nouvelle vague de la crise.

    La faillite de Detroit constitue-t-elle un précédent?

    En juillet, la faillite de la ville de Detroit, autrefois le berceau de l’Amérique industrielle moderne, fut un coup dur pour le prestige des Etats-Unis. C’est l’exemple le plus extrême de l’effondrement de la société américaine. Pendant des décennies, Detroit a constitué un réservoir à profits pour les grandes entreprises du secteur automobile. Aujourd’hui, la ville est désertée et polluée.

    Cette ville jadis synonyme de prospérité et de progrès connaît un terrifiant taux de chômage (50%) tandis que deux tiers des enfants vivent sous le seuil de pauvreté. Conséquence de la désintégration du filet social suite à de nombreuses années de coupes dans les budgets des services publics et des services sociaux, la criminalité y est cinq fois plus importante que la moyenne américaine. 47% de la population est analphabète. Mais Detroit n’est que le sommet d’un iceberg titanesque. Des dizaines de petites villes sont au bord de la faillite et plusieurs États sont aux prises avec une énorme montagne de dettes. Dans la pratique, une faillite signifie que de nombreux engagements des autorités sont en péril, comme le paiement des pensions.

    ‘‘15 dollars de l’heure et un syndicat’’

    Cette année, des dizaines d’actions se sont produites sous ce slogan, sur base de la colère des travailleurs des secteurs à bas salaires (notamment dans les fast-foods). Le salaire minimum fédéral est actuellement de 7,25 $ de l’heure (5,5 euros). Si le salaire minimum de 1968 avait suivi l’inflation, il serait aujourd’hui de 16,8 dollars. Impossible de se construire une vie décente avec de tels salaires. Des millions d’Américains combinent donc plusieurs emplois pour pouvoir joindre les deux bouts, ce qui explique le soutien rencontré par les actions en faveur d’un salaire minimum de 15 $ de l’heure. Il s’agit aussi du slogan principal de Socialist Alternative à Seattle.

    Socialist Alternative : une belle percée à Seattle, et maintenant à Minneapolis?

    Démocrates et Républicains ne représentent que les deux facettes d’une même médaille : celle d’une politique aux ordres de l’élite capitaliste. Il a fallu une campagne très intelligente à Obama & Co pour réussir à faire croire en la perspective d’un ‘‘changement’’ en 2008. Mais Obama n’a rien changé, et sa popularité est très fortement retombée. Les promesses non tenues ont alimenté une grande frustration dont le danger est qu’elle soit instrumentalisée aux élections de mi-mandat de 2014 par les Républicains et, surtout, par les populistes de droite du Tea Party. Ils ne manqueront pas d’accuser des boucs émissaires tels que les immigrés, les demandeurs d’emploi, les syndicats,…

    Mais cela peut être différent. L’espace pour une alternative politique de gauche radicale est étonnamment grand. Nos camarades de Socialist Alternative, malgré leurs moyens limités, ont pu s’en rendre compte dans leurs campagnes menées pour les élections locales dans les grandes villes que sont Seattle, Minneapolis et Boston. Défendre un programme explicitement anticapitaliste et socialiste ne constitue pas un obstacle.

    À Seattle vient de se dérouler un premier tour destiné à désigner les deux candidats du second tour du 7 novembre. La candidate de Socialist Alternative, Kshama Sawant, a obtenu le résultat impressionnant de 35% (44.458 voix). C’est un résultat sans précédent pour un tel type de campagne. Un commentateur politique en parlé en ces termes: ‘‘ce n’est rien de moins qu’un tremblement de terre. Kshama a tracé une nouvelle voie pour des candidats indépendants qui prennent directement en main la défense des intérêts et des thèmes de la classe ouvrière.’’ Des dizaines de militants et de volontaires sont maintenant sur le pied de guerre pour la dernière ligne droite vers le second tour du 7 novembre.

    Nous sommes tout aussi impatients de voir quels seront les résultats obtenus à Boston et Minneapolis. Ty Moore, candidat de Socialist Alternative à Minneapolis, y affrontera le candidat démocrate Alondra Cano dans la neuvième circonscription de cette ville de 400.000 habitants. Ty et Socialist Alternative ont acquis une certaine renommée au fil du temps grâce à leurs campagnes, notamment contre les expulsions et les saisies immobilières. Ces dernières années, des millions de familles ont été littéralement foutues à la porte de chez elles faute de pouvoir rembourser leurs hypothèques, la plupart du temps en raison de clauses scandaleuses imposées par les banques lors de la conclusion des prêts. Essentiellement sous l’impulsion de Socialist Alternative, le mouvement Occupy s’est orienté sur cette question et a lancé ‘‘Occupy Homes’’. De plus, la campagne de Ty bénéficie du soutien de la principale centrale syndicale de Minneapolis et de nombreux militants locaux. Ty a une petite mais réelle chance de se faire élire au conseil communal.

    Socialist Alternative est la seule organisation de gauche radicale américaine à avoir correctement estimé les profonds changements en cours dans la société et les possibilités que cela ouvrait sur le plan politique. Le mouvement Occupy a laissé éclater au grand jour la colère et la rage de millions de personnes. La tonalité du débat politique a été puissamment modifiée au sein de la population. La jeunesse refuse de plus en plus la logique du système qui l’étrangle avec des prêts étudiants hors de prix et des emplois aux salaires de misère tandis que les travailleurs s’opposent à l’austérité et aux attaques antisyndicales. C’est sur ce contexte que ce sont rajoutés les scandales des révélations de Bradley-Chelsea Manning sur les crimes de guerre de l’armée US et du programme de surveillance massif de l’administration Obama.

    Dans une déclaration qui a suivi le succès du premier tour à Seattle, Socialist Alternative a notamment expliqué reconnaître que ‘‘les élections ne sont pas l’endroit idéal pour faire de la politique et que c’est en soi insuffisant pour aboutir à un réel changement. Le pouvoir du Grand Capital et des médias contrôle la politique sous le capitalisme. L’histoire nous montre que chaque victoire des travailleurs a été remportée par des mouvements de masse. (…) Le développement de la lutte sociale dans les mois à venir déterminera le résultat exact des élections.

    La ‘‘faisabilité’’ se mesurera à l’aune de l’organisation des jeunes et des travailleurs ainsi qu’à l’augmentation d’actions, de grèves, etc. (…) Nos campagnes constitueront un exemple vivant de la manière dont la gauche et les travailleurs peuvent mener des campagnes indépendantes et servir de modèle pour se répandre dans tout le pays. Ce n’est que l’avant-goût de la prochaine vague de résistance qui va défier la politique des deux partis du Big Business.’’

  • Capitalisme et culture du viol

    En décembre 2012, l’horrible viol collectif d’une étudiante de 23 ans à Delhi, en Inde, suivi de sa mort, a placé le fléau du viol sur le devant de la scène. Ce cas particulier ne sort malheureusement pas du tout de l’ordinaire par sa nature ou sa gravité. Ce qui l’a rendu exceptionnel, c’est la réponse explosive du mouvement ‘‘rage against rape’’, qui a fait descendre dans la rue une foule de femmes aussi bien que d’hommes opposés aux viols et à la violence sexuelle extrêmement fréquents, commis surtout contre les femmes et les enfants.

    Par Emma Quinn & Laura Fitzgerald, Socialist Party (CIO-Irlande)

    ‘‘Rage against rape’’ en Inde – malgré la nature problématique des appels à la peine de mort et à la castration pour les auteurs de viols (en plus de ne pas répondre aux causes sous-jacentes du viol, cela donnerait encore plus de pouvoir à un Etat indien qui réprime et va continuer à réprimer les luttes des travailleurs et mouvements sociaux) -, le développement du phénomène ‘‘Slutwalk’’ ces dernières années, fer de lance de la montée de la remise en cause de la ‘‘culture du viol’’, sont autant de développements véritablement positifs.

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    Socialisme 2013

    Commission le samedi 13/04 : Les causes de la violence envers les femmes et comment la combattre

    Commission le dimanche 14/04 : Le débat pro-choix sur le droit à l’avortement. Avec des militantes pour les droits des femmes, notamment Aisha Paulis (commission femmes du PSL)

    Plus d’infos et programme complet

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    La ‘‘culture du viol’’ peut être décrite par le fait de réagir aux viols et à la violence sexuelle en culpabilisant les victimes et les survivantes en se demandant comment elles s’habillent, quel est leur passé sexuel, leur consommation de drogue ou d’alcool, etc. de façon à la fois subtile et ouverte. C’est ainsi que réagissent la police et la justice, à des degrés variables en fonction des divers pays du monde. Il s’agit d’une vulgarisation du viol. Au cours de cette dernière période, ce phénomène s’est développé dans un contexte où, de plus en plus, les femmes et leurs corps se voient rabaissés au rang d’objet dans la culture dominante.

    Le viol est une question de pouvoir

    Le viol n’est pas une question de désir sexuel, mais plutôt l’expression ultime du pouvoir, du contrôle et de la suprématie sur un autre être humain. La majorité des victimes et des survivantes sont des femmes et la grande majorité des auteurs de viols sont des hommes. Les hommes victimes d’un viol sont particulièrement stigmatisés, en partie parce que c’est considéré comme une expérience émasculatrice. L’exemple de femmes soldates participant à l’humiliation sexuelle de prisonniers hommes dans la prison d’Abu Ghraib, en Irak, montre comment le viol et l’abus sexuel sont fondamentalement une expression du pouvoir : les forces impérialistes ont utilisé les abus sexuels dans le but très conscient de dégrader et de démoraliser.

    Les milliers d’années d’oppression de la femme ont signifié des milliers d’années de soumission, et notamment de viol. Les viols fréquents sur les esclaves par les possesseurs d’esclaves dans le Sud des Etats-Unis avant la Guerre Civile sont un exemple parmi beaucoup d’autres du viol en tant qu’expression de cette soumission imbriquée dans l’oppression économique également subie.

    Le début de la société humaine divisée en classes sociales – il y a environ 10.000 ans – a constitué un moment crucial dans l’instauration des structures et de l’idéologie qui oppressent les femmes. L’idéologie de la famille nucléaire et patriarcale en particulier, qui a atteint son apogée dans la Rome Antique lorsque les pères avaient droit de vie et de mort sur leur femme et leurs enfants, est une idéologie façonnée et utilisée par le système économique actuel du capitalisme. Malgré les grandes luttes et les changements survenus depuis lors, la promotion de cette idéologie a contribué à pérennisé l’oppression des femmes.

    Ce n’est nullement une coïncidence si la plupart des viols et des abus sexuels sont perpétrés par une connaissance de la victime, souvent même un membre de la famille, un partenaire ou un ex-partenaire. Sous le capitalisme, l’idéologie de la famille patriarcale (soutenue depuis les débuts de ce système) a permis que les femmes soient des sources d’heures de travail non rémunéré – comme elles le sont encore aujourd’hui de bien des façons et dans bien des cas – en effectuant le travail domestique, en s’occupant des enfants et des membres âgés de leur famille ou des malades.

    Cette idéologie était en contradiction avec la nécessité d’intégrer la force de travail féminine dans le système de profit, mais elle a aidé à justifier les plus bas salaires des travailleuses, une réalité toujours d’application aujourd’hui dans les pays capitalistes développés. En Irlande, selon un récent rapport de l’OCDE, les femmes gagnent en moyenne 14% de moins que les hommes, et ce fossé s’élargit à 31% pour les femmes qui ont des enfants (en Belgique, l’écart moyen est de 24%, NDT).

    L’Ère de l’austérité et son impact sur les femmes

    Ces dernières décennies, l’entrée massive des femmes dans la force de travail – tout en augmentant souvent l’exploitation que les femmes subissent à la fois en tant que travailleuses et en tant que femmes – a eu un impact progressiste. En s’engageant dans la force de travail, les femmes ont pris confiance en elles et, en réalité, les idées réactionnaires concernant la famille patriarcale et le rôle subalterne des femmes ont été profondément ébranlées. Par exemple, la grande majorité de la population européenne, hommes et femmes, n’acceptent plus l’idée selon laquelle les femmes ne devraient pas être égales aux hommes.

    L’ère de l’austérité actuelle signifie concrètement une énorme destruction de nos emplois, de nos services publics et de nos conditions de vie. Les femmes sont plus particulièrement affectées par les attaques contre le secteur public parce qu’elles représentent la majorité des travailleurs de ce secteur (en particulier dans la main d’œuvre peu payée du secteur public) et en raison de la nature progressiste des services publics qui peuvent socialiser ce qui auparavant étaient des problèmes privés pour les femmes (comme de prendre soin des malades et des personnes âgés).

    Des services sont en train d’être complètement érodés, comme l’aide à domicile (un service qui a en fait commencé sur base volontaire et non payée – notons l’impact de l’idéologie patriarcale qui montre les femmes comme des ‘‘soignantes naturelles’’ -, et pour lequel on s’est battu pour qu’il devienne financé et développé par l’État). Les femmes, en particulier, vont porter le fardeau de cette érosion, avec comme résultat probable le retour réactionnaire aux rôles traditionnels de genre. L’élite au pouvoir a besoin de trouver des moyens pour justifier ce retour en arrière. La publicité et les autres moyens de propagande (particulièrement aux USA) ont été massivement utilisés pour mettre l’accent sur la ‘‘place naturelle des femmes au foyer’’ en tant qu’épouses, soignantes et domestiques non payées, de même que leur subordination aux hommes juste après la seconde guerre mondiale, alors que les femmes étaient massivement entrées dans les usines pendant la guerre.

    Cette propagande nous paraît aujourd’hui grossièrement sexiste et dépassée. Cependant, d’autres formes de propagande sexiste ont été de plus en plus développées, dans les médias en particulier. L’offensive s’est même intensifiée cette dernière décennie : rabaissement de la femme au rang d’objet, marchandisation du corps féminin et ‘‘pornification’’ de la culture.

    L’impact du ‘‘nouveau sexisme’’

    Le ‘‘nouveau sexisme’’, appuyé en grande partie par l’industrie cosmétique (très rentable), joue actuellement un rôle dans le renforcement des vieilles idées selon lesquelles la valeur d’une femme se mesure à son apparence et à son look, en dénigrant sa valeur en tant qu’être humain égale aux hommes. Cette attaque idéologique offre aux politiciens l’espace pour mener une politique sexiste et réactionnaire. Ainsi, lors des émeutes de Londres en 2010, certains politiciens ont tenté d’expliquer le phénomène par l’éclatement de la famille traditionnelle en reportant la faute sur les parents célibataires, afin de ne pas parler des causes sociales derrière cette explosion de colère (taux de chômage élevé, aliénation et pauvreté massive parmi la jeunesse).

    En Espagne et au Royaume Uni, des partis politiques au pouvoir souhaitent aujourd’hui revenir sur le droit à l’avortement : une véritable indication de l’instrumentalisation des femmes en tant que boucs émissaires de même qu’un cas concret de casse des droits des femmes et de leur liberté de choisir. Aux USA, le degré auquel le parti de droite Tea Party a influencé le discours et la politique représente à la fois une attaque idéologique et une menace physique contre les droits des femmes. Les restrictions à l’accès à l’avortement y ont tellement augmenté que certains États n’ont plus qu’une seule clinique pratiquant l’avortement ouverte ! Paul Ryan, le candidat républicain malchanceux à la vice-présidence américaine aux élections de 2012, a précédemment soutenu une loi qui tentait de permettre aux violeurs de poursuivre en justice les victimes qu’ils auraient mises enceinte pour les empêcher d’avorter ! Voilà le contexte dans lequel la ‘‘culture du viol’’ existe. C’est aussi le contexte dans lequel cette culture doit être remise en cause.

    Les violences sexuelles comme arme de guerre et de domination

    Le viol en tant qu’expression de la suprématie et de la domination est illustré par les abus commis par de nombreux prêtres en position de pouvoir, des cas systématiquement couverts par la hiérarchie de l’Eglise Catholique. On peut également parler du cas du célèbre présentateur de la BBC Jimmy Saville (un proche de Margareth Thatcher qui a été protégé par la véritable institution qu’est la BBC) qui a abusé d’enfants et de jeunes vulnérables et marginalisés en toute impunité, des décennies durant.

    La violence sexuelle est utilisée comme arme de guerre afin d’intimider et de dégrader l’ennemi ; en Syrie, c’est en fait la première raison pour laquelle il y a eu un exode massif de femmes et d’enfants dans des camps de réfugiés de Jordanie et du Liban. L’attaque de femmes et de filles par des hommes armés, parfois à plusieurs, est une caractéristique significative et problématique de la guerre civile syrienne. C’est globalement le cas des zones de guerre ; on estime à 200.000 le nombre de victimes de violences sexuelles en République Démocratique du Congo dans le cadre de conflits armés. Le viol y est décrit comme une arme ‘‘moins chère que les balles et les bombes.’’

    L’Afrique du Sud connait des statistiques parmi les plus alarmantes, le taux de viols d’enfants et de bébés y est le plus élevé au monde. 37% de la population masculine admet avoir commis un viol et plus de 500.000 attaques sexuelles ont lieu chaque année. Le problème est notamment enraciné dans la croyance très répandue qu’une relation sexuelle avec une vierge guérit du sida. Ce pays comprend le plus grand nombre de séropositifs : 11% des habitants sont affectés. La Zambie, le Zimbabwe et le Nigeria sont aussi infestés par les attaques sexuelles à cause de ce mythe dangereux.

    Attaques contre les femmes sur la place Tahrir

    L’un des exemples les plus frappants de ce que représente le viol et d’où il provient se trouve peut-être dans le contexte de révolution et de contre-révolution qui se déroule en Égypte actuellement, au cœur symbolique de la révolution, place Tahrir.

    L’héroïque révolution qui a renversé le dictateur Moubarak en 2011 n’était en fait qu’une demi-révolution : le dictateur corrompu a été renversé par une lutte de masse et une grève générale, mais les bases-mêmes du capitalisme et de l’impérialisme n’ont pas été abattues pour céder la place à un gouvernement représentant les travailleurs et les pauvres visant à placer les richesses sous propriété publique et démocratique. Sans une telle démocratie, les portes ont été ouvertes pour que l’armée et l’Islam politique reviennent à l’avant. Cependant, les femmes, les travailleurs et les pauvres qui se sont battus héroïquement pendant la révolution ne sont pas simplement rentrés chez eux. Les femmes ont été présentes durant tout le soulèvement révolutionnaire de ces dernières années en Égypte, et elles sont encore présentes dans le mouvement aujourd’hui.

    La participation des femmes à la lutte, dans les soulèvements révolutionnaires et dans la quête de changement de la société, n’est pas seulement essentielle, elle est aussi une indication positive de la lutte en elle-même. Les réactionnaires en Égypte comprennent fort bien cela et visent spécifiquement les femmes pour tenter de toucher le mouvement dans son ensemble.

    Le viol est un des outils de ces réactionnaires. Des rapports montrent que la Confrérie Islamique a organisé et payé des groupes d’hommes pour attaquer brutalement et agresser sexuellement les femmes militantes sur la place Tahrir. Les femmes s’arment déjà elles-mêmes pour réaffirmer qu’on ne les forcera pas à rentrer à la maison, et des groupes de manifestants – hommes et femmes – organisent la défense pour résister à ces attaques.

    Viol et violence sexuelle en Irlande

    En Irlande en 2011, plus de 2000 survivantes à la violence sexuelle se sont rendues au RCC (cellule de crise sur le viol, NDT). Des milliers d’autres cas ne sont pas rapportés et on estime que jusqu’à une irlandaise sur sept souffre de graves abus sexuels, physiques ou émotionnels. En Irlande, la question du viol et des abus sexuels est complexe. Historiquement, le pays a été dominé par le contrôle de l’Église et par ses idées tordues sur la moralité. La vision du sexe est empreinte de peur et de honte, surtout en ce qui concerne les femmes. Le sexe était uniquement considéré comme un outil de procréation et une fille considérée comme ‘‘légère’’ était ‘‘une femme déchue’’. Malgré un rejet de ces idées réactionnaires par la plupart des gens d’aujourd’hui, la ‘‘culpabilité catholique’’ et la poussée du sexisme ‘‘moderne’’ (les femmes rabaissées au rang d’objet et la commercialisation du sexe) ont contribué à développer une culture de culpabilisation des victimes d’abus.

    Un sondage récent a montré que 41% des gens pensent qu’une femme est partiellement ou totalement responsable si elle se fait violer en ayant bu de l’alcool, 37% pensent qu’elle porte une part de responsabilité si elle a excessivement flirté avec un homme et 26% pensent qu’elle est responsable si elle portait des vêtements qui révèlent son corps.

    Le sensationnalisme suscitant la peur qui est cyniquement appuyé par les tabloïds possédés par des milliardaires a aidé à perpétrer le mythe que le viol est quelque chose qui n’est commis que par des hommes louches dans des ruelles sombres. En réalité, une femme sur cinq est abusée par son partenaire actuel ou son ex, 39% par un ami ou une connaissance. Le lieu le plus courant des viols est la maison de la victime.

    Selon les estimations, seuls 7% de tous les viols en Irlande sont condamnées. La DPP (Director of Public Prosecution) ne poursuit qu’un tiers des cas reportés, ce qui signifie que 70 cas sur 100 sont déjà perdus à ce stade. ‘‘Le manque de preuves’’ est la première raison pour laquelle la majorité des dénonciations ne va pas plus loin. Il y a significativement plus de chances d’aboutir à une condamnation si l’attaque se produit dans un espace public par un inconnu de la victime, par rapport aux agressions bien plus courantes où l’auteur est connu d’elle. Depuis l’introduction en 1990 de la pénalisation du viol conjugal, il n’y a eu qu’une seule condamnation, ce qui est choquant lorsqu’on considère que 18% des agressions sexuelles sur les femmes sont commises par des hommes qui ont ou ont eu une relation intime avec elles par le passé.

    Une étude par le Rape Crisis Network Ireland a monté que jusqu’à 40% des victimes de viols retirent leur plainte en raison de la faible réaction de la police. Les cas sont souvent abordés de façon insensible et des incidents comme le scandale de la ‘‘rape tape’’ de Rossport n’est pas pour rassurer les victimes lorsqu’elles rapportent la violence sexuelle. Dans cette vidéo, des policiers menaçaient deux manifestantes arrêtées de les violer si elles n’obéissaient pas à leurs instructions. Une autre tendance alarmante dans le système judiciaire irlandais est l’augmentation du nombre de procès où des hommes riches donnent une compensation financière à leur victime au lieu d’être condamnés à la prison.

    Le viol en Inde

    Le viol collectif et le meurtre d’une étudiante en médecine de 23 ans à Delhi ont amené la question de la violence sexuelle dans les médias de masse, obligeant les gens à se rendre compte de l’impact de la ‘‘culture du viol’’ en Inde et à travers le monde. La façon sournoise dont ce cas a été géré par la police a mis en lumière l’attitude dédaigneuse envers le viol en Inde.

    Il s’agit du crime le plus répandu dans le pays : au moins 24 000 incidents sont rapportés chaque année et on estime que seuls 50% des viols sont rapportés. Cette culture est un arrière goût amer du système féodal dominé par les hommes en Inde. Il existe un énorme mépris des femmes dans tout le large et varié spectre politique et religieux du pays. En contradiction directe avec le système discriminatoire, il n’est pas exceptionnel qu’un homme d’une caste inférieure agresse une femme de la classe supérieure dans la rue. La propriété des femmes par les hommes dépasse le statut social même ici, ce qui indique à quel point l’oppression des femmes est enracinée.

    Les femmes des classes inférieures Dalit ou intouchables qui sont les plus vulnérables. La société indienne leur offre peu de protection ou de justice et la majorité du temps, les attaques contre ces femmes ne sont pas remarquées et restent impunies. L’idéologie de la domination masculine dans une période de changement social rapide et abrupt, avec les femmes et les castes inférieures qui entrent dans la force de travail en raison des investissements capitalistes en Inde, est le contexte dans lequel le viol est si endémique et répandu dans le pays.

    Remettre en cause la ‘‘culture du viol’’

    ‘‘Mon violeur ne sait pas qu’il est un violeur. Vous lui avez appris que ce n’est pas de sa faute. J’avais trop bu, j’ai flirté, et mes vêtements étaient trop courts. Je l’ai cherché. Il m’a laissée dans l’escalier d’un parking. Mon (ex) petit copain m’a craché à la figure. Il m’a traitée de pute, il n’a traitée de salope. Je l’avais mérité. Mes amies me jetaient des sales regards. Elles m’ont dit que j’étais un déchet, sans réaliser que ça aurait pu être elles. Cette culture, votre culture, leur a dit, m’a dit, que c’était de ma faute. Et j’ai souffert. Mais mon violeur ne sait pas que c’est violeur. Je n’ai pas honte. Je reste debout.’’

    Comme l’indique cette citation d’une participante à la slutwlak de Washington DC en 2011, une culture qui ramène les femmes au rang d’objet, qui promeut une vision bancale de la sexualité des femmes, qui culpabilise les victimes et non les agresseurs, qui encourage les femmes à ne pas sortir seules la nuit, à prendre des cours de self-défense, à s’habiller d’une certaine façon pour éviter le harcèlement et attaques sexuel mais n’apprend pas aux hommes et aux jeunes pourquoi ‘‘non, c’est non’’ – fait absolument partie du problème auquel on doit s’attaquer.

    La prolifération de l’industrie pornographique – généralement destinée aux hommes et centrée sur une vision des femmes, de leur sexualité et du sexe en général très étroite, dirigée par les hommes et souvent misogyne, qui lie de plus en plus le sexe et la violence – alimente cette culture. C’est aussi le contexte de la gueule de bois de la promotion idéologique des rôles traditionnels de chaque genre qui dénigre aussi les femmes et appuie la subordination des femmes aux hommes. Plus encore, c’est le contexte de la promotion de l’idée, propre au capitalisme, de la responsabilité individuelle et de l’individualisme, qui isole les femmes à leur détriment, et des normes sociales et culturelles arriérées, qui donne naissance à la ‘‘culture du viol’’. Les phénomènes Slutwalk et Rage Against Rape sont en opposition à cette culture, et sont en soi une politisation des questions du viol et de l’oppression. Cela joue un rôle dans l’éducation des masses à cette question.

    Les femmes et la lutte pour le socialisme

    Comme nous l’avons vu, l’ère de l’austérité est une énorme menace contre les conditions de vies et les droits de chacun. Les travailleuses, aux côtés de leurs collègues masculins, sont à l’avant-garde de la lutte contre les coupes budgétaires et les suppressions d’emplois. En Irlande, nous avons surtout vu les travailleuses des entreprises Thomas Cook et La Senza occuper leur lieu de travail lorsqu’elles étaient menacées de licenciement. Les attaques contre le secteur public dans toute l’Europe requièrent une lutte énorme et un mouvement d’opposition massif. Les femmes peuvent jouer un rôle central dans un tel mouvement.

    En plus d’un combat déterminé spécifique pour remettre en cause le sexisme, l’objectification, la violence et les agressions sexuelles, il est vital qu’un mouvement contre l’austérité mette aussi ces questions en avant et les relie afin d’assurer que les femmes puissent être au centre du mouvement, et aussi jouer un rôle dans l’éducation des hommes, qui eux-mêmes n’ont pas intérêt à ce que la situation actuelle perdure.

    Depuis le début de la ‘‘Grande Récession’’ de la crise capitaliste, il y a eu une baisse de 29% du nombre de filles qui finissaient leurs études primaires (le taux est de 22% pour les garçons). Dans le pays le plus riches au monde, les USA, 17 millions de femmes vivaient dans la pauvreté en 2011 (de même que 12,6 millions d’hommes). Ces inégalités sont abjectes, de même que l’énorme pauvreté et la destruction des conditions de vie que le système du profit fait subir à la majorité des femmes, des hommes, des enfants et des jeunes dans le monde.

    La lutte pour en finir avec ce monde de violence, d’oppression, de pauvreté et d’austérité doit mettre le socialisme à l’ordre du jour, c’est à dire la propriété publique démocratique des principales richesses et ressources, et la planification démocratique de l’économie en fonction des besoins de la population.

    Une lutte massive pour réaliser ce changement en Irlande, en Europe et partout dans le monde, et une société basée sur la solidarité humaine et l’égalité, pourraient poser les bases pour remettre en cause et mettre fin à l’oppression des femmes que le viol incarne.

  • USA : les électeurs ont rejeté le programme de la droite

    Le 9 novembre, un soupir de soulagement a parcouru le monde à l’annonce de la réélection d’Obama. Mitt Romney n’allait pas devenir le nouveau président américain. Les républicains avaient réussi à terrifier le monde avec leur rage d’ultra-droite. Mais l’enthousiasme pour ce nouveau mandat d’Obama est considérablement plus faible qu’en 2008. Ces 4 dernières années, Barack Obama a été vu tel qu’il est : une marionnette de Wall Street et de l’élite américaine, avec un agenda simplement plus doux que celui des républicains.

    Par Bart Vandersteene

    De ‘l’espoir’ de ‘changement’ au ‘moindre mal’

    Par rapport aux élections de 2008, il y a eu 12 millions d’électeurs en moins. Cela déjà en dit long sur le déclin de l’enthousiasme de la population américaine. En 2008, on considérait Obama tel un sauveur qui apportait ‘‘espoir’’ et ‘‘changement’’. Bien des choses se sont passées depuis lors, et il ne représente plus aujourd’hui que le ‘‘moindre mal’’. Il a finalement remporté ces élections malgré son propre bilan présidentiel. Les banques se sont vu offrir des centaines de milliards de dollars, les services sociaux ont été amputés et des millions de familles ont perdu leurs maisons. De nombreux militants anti-guerre avaient voté pour Obama, même s’il a poursuivi l’œuvre guerrière de Bush, et la prison de Guantanamo n’est toujours pas fermée, en dépit de toutes ses promesses.

    Près de la moitié de la population (146 millions d’Américains) vit sous le seuil de pauvreté, ou se situe à peine au-dessus. Ce nombre était moindre avant l’arrivée d’Obama. Les riches, par contre, sont devenus encore plus riches. En 2010, 93% de l’augmentation du revenu a été empochée par les 1% les plus riches.

    Austérité

    La crise a déjà fait de sérieux ravages aux États-Unis, mais le pire est encore à venir. De dramatiques programmes d’assainissement ont jeté à la rue des centaines de milliers de travailleurs des services publics et de l’enseignement en particulier. Mais malgré tous ces efforts budgétaires, le déficit pour 2012 représente environ 7% du PIB du pays. Le gouvernement fédéral a donné toutes sortes de cadeaux fiscaux aux riches, mais n’a pas encore osé présenter toute la facture à la population. Chaque année, les dépenses excèdent les recettes à hauteur de plus de 1.000 milliards de dollars. Obama ne sera plus en mesure de continuer à jouer à cache-cache, il devra appliquer l’austérité et l’agenda de Wall Street, et essayera de faire passer la pilule avec quelques mesures contre les riches, essentiellement de l’ordre de la symbolique. Cela ne suffira toutefois pas pour éviter des manifestations, de larges mouvements sociaux et la radicalisation.

    Obama était-il le meilleur à élire ?

    Le large soutien dont Obama a encore pu bénéficier est dans une large mesure comparable à celui sur lequel les sociaux-démocrates européens peuvent encore compter, encore et encore, mais avec un succès de moins en moins éclatant. Leur argument principal est la peur de la brutalité de la droite dure. Cette logique a été poussée à son paroxysme aux USA, où l’establishment laisse le choix entre voter pour Pepsi ou pour Coca-Cola, deux variantes d’une seule et même politique. Accepter cette logique aurait signifié à Anvers de mener campagne pour Patrick Janssens afin d’éviter l’élection de Bart De Wever. L’argument porte constamment moins loin.

    Tout comme chez nous, il existe aux USA des positions politiques qui pourraient rassembler un très large soutien, mais qui ne sont défendues par aucun grand parti. Il suffit de penser à la défense des soins de santé, de l’augmentation des taxes sur les riches, de la réduction des dépenses en matière de défense ou d’un véritable programme de création d’emplois. Pas moins de 72% des Américains ont déclaré qu’ils envisageraient de voter pour un troisième parti si ce parti reprenait ces questions à son compte, 22% se sont déclarés certains de voter pour lui. Les syndicats ont dépensé environ 500 millions de dollars pour la campagne d’Obama. Ce montant rendrait capable de réaliser une campagne gigantesque pour un candidat qui défendrait réellement le programme des syndicats. Les Démocrates, fossoyeurs du mouvement social

    Toutes les réformes majeures obtenues dans l’Histoire américaine n’ont pas été le fruit de l’activité des Démocrates, mais bien le résultat de mouvements de masse. Le Parti Démocrate est devenu un obstacle pour les réformes progressistes de grande envergure et, concrètement, il tente de faire taire les protestations sociales à la première occasion.

    Il suffit de comparer le bilan des gouvernements du républicain Richard Nixon et du démocrate Bill Clinton. La politique appliquée par le premier serait considérée comme une politique de gauche aujourd’hui. Il a pris des mesures de protection de l’environnement (création de l’Environmental Protection Agency) et de la sécurité au travail, a mis un terme à l’intervention américaine au Vietnam, a étendu la sécurité sociale et a mis fin à la ségrégation raciale dans les écoles publiques du sud. Le second, quant à lui, s’est attaqué à la sécurité sociale, a laissé carte blanche au secteur financier, a signé une loi défavorable aux homosexuels, a refusé de ratifier de Protocole de Kyoto,…

    Ce n’est pas que Richard ‘‘Watergate’’ Nixon était un bon gars comparativement à Clinton. La différence est entièrement due au climat politique et social du moment. Nixon était sous la pression constante et gigantesque d’un mouvement de masse. Clinton, par contre, est devenu président dans les années 90, à l’époque du règne incontesté et sans partage du néolibéralisme. Les conséquences de ses politiques et la déception qui en a résulté constituent la raison par excellence qui explique l’élection de Bush en 2000 et sa réélection par la suite. La logique de soutien au candidat du ‘‘moindre mal’’ entraîne souvent de devoir taire ses critiques, chaque opposition étant de nature à affaiblir la position du ‘‘moindre mal’’ pour ouvrir la voie au ‘‘plus grand mal’’. Cette logique musèle tous les mouvements sociaux. Par conséquent, notre organisation-sœur aux USA, Socialist Alternative, défend le rassemblement de toutes les forces de gauche afin de bâtir un instrument politique indépendant de Wall Street et défendant les intérêts des travailleurs et de leurs familles.


    29% pour un candidat marxiste à Seattle !

    Kshama Sawant était la candidate de Socialist Alternative dans l’État de Washington. Elle a atteint un résultat réellement historique aux USA en étant capable de regrouper sous son programme 29% des voix de son district au cours d’une âpre lutte électorale pour un siège au parlement de l’Etat.

    Sawant a défendu un programme explicitement socialiste, et s’est attiré plus de 20.000 voix. Aux USA, il s’agit du meilleur résultat obtenu depuis de très nombreuses années par un candidat de gauche indépendant. Son résultat constitue une base sur laquelle construire. Après les élections, Socialist Alternative a lancé un appel à tous les militants de gauche (militants du mouvement Occupy, des syndicats, des mouvements sociaux,…) afin de se regrouper sur une liste unitaire dans le cadre des élections municipales de 2013.

    Le résultat de Sawant est aussi une réponse fantastique face à l’argument selon lequel les Américains seraient tous de droite et allergiques au socialisme. Nos camarades américains ont réussi à concrétiser les idées du socialisme démocratique et à les populariser en défendant un programme de lutte contre les coupes budgétaires et contre les cadeaux fiscaux pour les riches, la revendication de la nationalisation de Boeing, Microsoft et Amazon (dont les sièges sont à Seattle), etc.

    Le journal local The North Star a déclaré le 11/8/12. “Ne nous trompons pas: Sawant et Socialist Alternative ont écrit l’Histoire à Seattle.”

    Les autres candidats à ces élections n’ont pas fait le poids face à la machine à fric électorale des Démocrates et des Républicains. Jill Stein du Parti Vert a obtenu 400.000 voix. Le populiste de droite Gary Johnson, candidat du Parti libertarien, a reçu un million de voix. Tout comme les victoires du Tea Party en 2010, ce dernier résultat illustre le potentiel également présent pour les idées populistes de droite.

    La polarisation est croissante dans la société. Les contradictions entre classes sociales sont de plus en plus ouvertes et le désespoir est explosif parmi des dizaines de millions de familles de travailleurs. En l’absence d’alternative, il est à craindre que l’extrême droite ne puisse obtenir plus de soutien au cours de la prochaine période. Mais si une initiative de gauche conséquente se développe, alors la polarisation peut aussi conduire à un plus grand soutien pour les solutions réellement socialistes.

    www.socialistalternative.org

  • USA : Les électeurs rejettent le programme de la droite

    Il faut se préparer à lutter contre la politique des deux partis de Wall Street

    Des dizaines de millions de personnes ont soupiré de soulagement en entendant que Mitt Romney et Paul Ryan n’entreraient pas à la Maison Blanche. Les syndicalistes, les femmes, les afro-américains, les latinos et les LGBT ont considéré avec raison le programme des Républicains comme une véritable menace.

    Bryan Koulouris et Ty Moore, Socialist Alternative (Partisans du CIO aux USA)

    La droite a essayé de voler ces élections en intimidant les électeurs, en prenant une posture économique faussement populiste dans les dernières semaines, en injectant environ un milliard de dollars dans la campagne,… afin de tenter de convaincre les pauvres, les jeunes et les personnes de couleur de renoncer à leurs droits. Mais le soutien électoral d’Obama n’était en rien semblable à celui qui avait couronné la campagne énergique et enthousiaste de 2008. Cette année, la participation a baissé de 12 millions d’électeurs comparé à 2008. La plupart des gens ont voté Obama en le voyant comme le ”moindre mal” plutôt que comme le sauveur qui apporterait ”l’espoir et le changement” d’il y a 4 ans.

    Le mouvement Occupy Wall Street a eu un impact sur l’élection en mettant en avant une discussion sur les inégalités économiques entre ”les 99% et les 1%”. Des millions de gens ont été indignés de voir que 6 milliards de dollars ont été dépensés dans les élections fédérales. Le message d’Occupy contre la domination des grandes entreprises a aussi alimenté une saine haine contre Mitt ”Milliards” Romney.

    Obama a remporté cette élection malgré son bilan politique favorable aux grandes entreprises. Les banques ont reçu des milliers de milliards de subventions alors que les services sociaux ont subi des coupes budgétaires et que des millions de familles ont perdu leurs maisons. Beaucoup d’électeurs anti-guerre ont soutenu Obama, malgré les bombardements continuels de civils dans plusieurs pays, malgré la continuité du modèle de Bush d’une présidence impérialiste qui n’a de comptes à rendre à personne, malgré la guerre en Libye, malgré le fait que les attaques de drones, partout dans le monde, ne fassent l’objet d’aucune discussion au Congrès.

    Beaucoup d’électeurs d’Obama ont été profondément déçus de sa performance pendant ces quatre dernières années, le voyant – très justement – comme une marionnette de Wall Street et des 1% de super-riches. L’administration Obama a commencé son deuxième terme sans réel mandat. La ”base” du Parti Démocrate parmi les syndicalistes, les personnes de couleur, les femmes et les LGBT a ravalé sa colère contre Obama pendant l’élection et a voté pour le ”moindre mal”. Maintenant, après les élections, toute la colère refoulée est prête à bouillir.

    La demande d’emplois, d’investissements dans l’énergie, de fonds pour l’éducation, du droit au logement, et de solutions à une liste sans fin d’injustices va revenir à la surface. Et Obama va recommencer à faire passer les intérêts de Wall Street et du grand capital en premier, provocant à nouveau l’indignation et l’opposition. Le temps est mûr pour construire de nouveaux mouvements des travailleurs et des opprimés, politiquement indépendants des deux partis des grandes entreprises.

    Une situation en changement

    Pour la première fois au niveau national, les électeurs de Washington, du Minnesota, du Maine et du Maryland ont voté en faveur du droit au mariage entre personnes de même sexe, un tournant historique dans la lutte pour l’égalité pour les LGBT. Beaucoup d’autres questions progressistes ont gagné dans le pays, depuis des augmentations du salaire minimum à la défense des droits syndicaux et des mesures contre la très raciste ”guerre contre la drogue”. Les électeurs du Minnesota ont rejeté une tentative d’inscrire dans leur constitution des restrictions électorales parmi les plus dures du pays. Cela montre un changement dans la démographie et un changement dans les attitudes parmi les travailleurs et les jeunes. Si on ajoute à cela la colère massive de la classe ouvrière, tout cela constitue une base pour des mouvements explosifs dans les prochaines années.

    Romney a largement basé sa stratégie sur le vote des hommes blancs (surtout dans le Sud) et l’espoir qu’il y aurait une forte abstention (quitte à truquer le scrutin pour que ce soit le cas). Depuis les années 1960, la tactique des Républicains a toujours été de gagner les élections en attisant la peur et la haine chez les électeurs blancs. Cette stratégie va être de plus en plus difficile à appliquer dans les élections nationales, ce qui va devenir encore plus clair dans les prochaines élections avec la nouvelle génération qui atteint l’âge de voter. Cette défaite électorale va approfondir cette crise qui fermente dans le Parti Républicain, qui va être forcé de redéfinir son identité ou risquer d’être réduit à un parti minoritaire permanent.

    Même s’il n’y a pas eu de grand changement dans la composition du Congrès selon les lignes des partis, les changements de législateurs Républicains valent le coup d’être remarqués. Les Républicains ”modérés” du Maine et le ”centriste” Dick Lugar ont perdu leurs sièges, tout comme plusieurs des plus fous du Tea Party. Malgré plusieurs défaites du Tea Party, l’équilibre des forces dans la délégation Républicaine au Congrès s’est déplacé encore plus vers la droite, préparant le terrain pour une nouvelle impasse du bipartisme.

    Mais dans le discours de victoire d’Obama, il a répété son engagement de ”franchir l’allée” vers les Républicains. En fait, le bipartisme d’Obama est élaboré cyniquement pour donner une couverture à ses politiques ouvertement en faveur des grandes entreprises, qui vont bientôt être exhibées. Les deux partis préparent des coupes historiques dans la Sécurité Sociale, Medicare et dans d’autres programmes vitaux, avant la fin de l’année 2012. Cela pourrait provoquer une radicalisation, des manifestations et davantage de luttes. Dans ce contexte, il y a des opportunités de construire une résistance unifiée de la classe ouvrière, des campagnes électorales contre le monde des affaires, et un parti politique des 99%.

    Construire le mouvement socialiste dans un nouvel environnement

    Le résultat historique obtenu par la candidate de Socialist Alternative (les partisans du CIO aux USA), Kshama Sawant, dans l’état de Washington, illustre le potentiel présent pour construire un mouvement contre le capitalisme. Se présentant ouvertement comme socialiste, Sawant a obtenu plus de voix que n’importe quel Républicain n’en a jamais obtenu contre Frank Chopp durant les 18 ans de carrière de ce puissant politicien Démocrate.

    En faisant campagne contre les coupes budgétaires et les évasions fiscales et en appelant à la propriété publique de Boeing, Microsoft et Amazon, le défi électoral de Socialist Alternative a permis de populariser les idées du socialisme démocratique, de gagner plus de 11 906 voix de la classe ouvrière qui pourraient atteindre les 20 000 une fois le décompte terminé. Ce résultat est le plus élevé au niveau local pour les candidats indépendants de gauche sur cette année 2012, dans tout le pays, et quelque chose doit être construit à parti de là.

    Pour tirer profit de cette situation, nous avons besoin d’appeler audacieusement à une résistance organisée contre les coupes budgétaires en impliquant les centaines de milliers de membres des syndicats, les militants du mouvement Occupy, les militants des collectivités locales et les jeunes. Ces coalitions auront besoin de préparer des grèves et des actions directes massives pour défendre le niveau de vie contre les attaques du capital. A partir de ces luttes, nous pouvons créer la base pour ce dont nous avons besoin – un parti massif de la classe ouvrière avec un programme socialiste démocratique.

    Parmi d’autres nouvelles, il y a la menace du populisme de droite. Gary Johnson, le candidat du Parti Libertaire à la Présidentielle, a reçu plus d’un million de voix, trois fois plus que la plus importante candidate de gauche, Jill Stein du Parti Vert. Comme les victoires du Tea Party en 2010, cela donne un aperçu du potentiel de croissance pour les idées populistes de droite si la gauche et le mouvement ouvrier échouent à construire une alternative politique massive à l’establishment capitaliste détesté.

    Ces élections, qui ont lieu lors de la cinquième année de la crise économique, ont montré l’approfondissement de la polarisation de la société américaine. Cette polarisation politique et sociale découle de l’affûtage des divisions de classe et de la montée du désespoir de dizaines de millions de travailleurs. Le manque d’une voie politique clairement pour la classe ouvrière dans les élections et la concurrence entre les politiciens capitalistes donnent une expression déformée à la colère de classe. Dans cette situation, les idées de droite pourraient récolter du soutien, et ces quatre dernières années nous avons vu une montée rapide des groupes haineux.

    D’un autre côté, là où une initiative audacieuse de la gauche est menée, la polarisation de classe peut aussi conduire les gens à considérer des solutions plus radicales. Il y a de plus en plus de recherche d’idées qui ouvrent une porte de sortie de la misère capitaliste supervisée par les deux partis du grand capital. Comme le montre la campagne de Socialist Alternative pour Kshama Sawant, la société américaine devient de plus en plus fertile pour les idées socialistes.

  • Elections aux USA – And the winner is … Wall Street !

    Durant tout le mois d’octobre, l’écart s’est resserré dans la course électorale américaine entre Mitt Romney et Barack Obama. Le cadidat républicain a gagné en soutien en exploitant la profonde déception éprouvée envers Barack Obama ainsi que l’état encore déplorable de l’économie des Etats-Unis. La polarisation s’est accrue et, simultanément, le soutien pour Obama s’est développé, beaucoup le considérant comme le ‘‘moindre mal’’ et étant prêts à voter pour lui à contrecœur pour ne pas laisser passer la droite Républicaine.

    Brandon Madsen de Socialist Alternative (partisans du CIO aux USA)

    Aucun doute n’existe quant au vainqueur de ces élections présidentielles : ce sera Wall Street et le grand capital ! Les élections de 2012 ont encore plus été inondées d’argent par les entreprises que n’importe quelle élection précédente, avec une estimation de 5,8 milliards de dollars injectés dans la course électorale !

    En 2008, Barack Obama a été élu à la présidence à la suite d’un tourbillon d’enthousiasme pour ‘‘l’espoir’’ (Hope) et le ‘‘changement’’ (Change) qu’il promettait à l’Amérique. Mais ce sentiment est retombé depuis longtemps.

    Sous sa présidence, des dizaines de millions d’Américains ont souffert du chômage, des fermetures d’entreprises et des expulsions. Le haut niveau de chômage structurel a à peine changé depuis 2009. Selon le Bureau of Labor Statistics, en février 2012, 42,6% des 23,5 millions de chômeurs étaient sans travail depuis plus de 6 mois.

    Selon le Bureau de Recensement des USA, 49,1 millions d’Américain vivent sous le seuil de pauvreté, et 97,3 autres millions sont classés dans les ‘‘revenus faibles’’ – c’est-à-dire juste au dessus du seuil de pauvreté. Cela représente au total 146,4 millions d’habitants des USA, soit près de la moitié de la population du pays. Ce nombre a augmenté de 4 millions pendant le mandat d’Obama, et cela touche dans une plus grande proportion les Noirs, les Latinos et les femmes. Pendant ce temps, sous Obama, les riches ont continué à s’enrichir énormément. Une analyse des déclarations de revenus montre que 93% des augmentations de revenus ont été empochées par les 1% les plus riches et 37% par les 0,1% les plus riches à eux seuls.

    Des promesses rompues

    Bien qu’il ait promis le contraire, Obama a dirigé les USA sur la même voie de corporatisme de droite, d’impérialisme et de destruction de l’environnement que ses prédécesseurs. Il a soutenu le sauvetage de Wall Street en laissant tomber les travailleurs et les plus pauvres. Son budget 2011 a représenté la plus grande chute des dépenses publiques de l’histoire américaine et a eu un sérieux impact sur l’enseignement, la santé et le travail.

    La grande promesse d’Obama envers les syndicats était de faire voter l’Employee Free Choice Act, qui aurait rendu plus facile l’organisation syndicale. Cette promesse a été abandonnée et oubliée presque immédiatement après l’investiture d’Obama.

    Obama avait promis la fin des politiques impérialistes au Moyen-Orient de l’ère de Bush. En réalité, il a augmenté les dépenses militaires, intensifié la guerre en Afghanistan, bombardé et envahi la Libye, et mené plus d’attaques de drones (le plus grand nombre jamais connu) au Yémen, au Pakistan et en Somalie (des pays contre lesquels les USA ne sont même pas en guerre). Il avait aussi promis la fermeture du camp de Guantanamo, toujours ouvert actuellement.

    Le ‘‘moindre mal’’

    Malgré l’atroce bilan d’Obama, la perspective de la victoire du candidat républicain Mitt Romney est assez terrifiante pour que des millions d’Américains votent tout de même pour le candidat démocrate, pour ne pas laisser passer Romney.

    Cependant, la seule raison pour laquelle Romney (un vautour capitaliste de la pire espèce, tellement à droite que même certains républicains ne sont pas enthousiaste sur sa candidature) a une chance de gagner est qu’Obama a totalement échoué à répondre aux problèmes auxquels font face les USA. Cela a aussi permis la montée du populisme de droite, incarné par des tendances comme le Tea Party ou encore comme les libértariens de et Ron Paul.

    L’échec des Démocrates à résoudre la crise économique permet à la logique tordue des fanatiques et à l’utopisme capitaliste de se frayer un chemin. Loin d’être capables d’empêcher les pires de la droite de se renforcer, les Démocrates leur ont grand ouvert la porte.

    Dans les médias, les différences relativement superficielles entre les candidats sont exagérées et utilisées pour maintenir l’illusion qu’il y a un réel choix dans ces élections. La réalité qui se cache derrière cette illusion est que les deux candidats sont fondamentalement d’accord sur les problèmes les plus fondamentaux qui touchent les travailleurs. En plein dans la pire crise de l’emploi rencontrée depuis la Grande Dépression des années ‘30, les deux partis sont rejettent tout programme d’emplois financé au niveau fédéral. Avec leur idéologie pro-capitaliste, ils s’opposent de façon quasiment moraliste à la création d’emplois par l’Etat, en disant aux travailleurs qu’ils doivent attendre que les aléas des marchés et du secteur privé penchent en leur faveur.

    La politique d’Obama pour l’enseignement atteint des sommets d’anti-syndicalisme et de privatisations. Les Démocrates ont tellement attaqué les professeurs que le colistier de Romney, le membre du congrès et partisan du Tea Party Paul Ryan, a félicité le maire démocrate de Chicago, Rahm Emmanuel, pour sa manière de traiter la grève du syndicat des professeurs de Chicago !

    Les deux partis sont d’accord sur la nécessité d’une ‘‘réforme’’ (c’est-à-dire, de commencer à démanteler et à privatiser) les programmes de ‘‘prestations’’ tels que Medicare, Medicaid et Social Security, afin de diminuer le déficit budgétaire. L’exemple le plus frappant d’accord entre les deux partis est peut-être celui sur la nature du renflouement des banques et le fait d’en faire supporter la facture par les travailleurs et les pauvres.

    Sur la question fondamentale de la protection du système capitaliste, il n’y a aucune différence concrète entre ces deux partis.

    Obama n’a pas seulement renouvelé sans le changer le Partiot Act de Bush, qui légalise différentes formes d’espionnage des citoyens par l’Etat, mais il a aussi donné pour la première fois des justifications juridiques pour, entre autres, la détention pour une durée indéterminée de n’importe qui à travers le monde, y compris des citoyens américain, sans charges ni procès.

    En fait, la plus grande différence entre Obama et Bush est qu’Obama a été capable d’appliquer des politiques bien plus à droite que Bush, sans s’attirer la colère massive des organisations du mouvement social, des syndicats et des libéraux de gauche en général.

    C’est en ce sens qu’Obama ne peut même pas être qualifié de ‘‘moindre mal’’ mais, selon le mot de Glen Ford du Black Agenda Report, ‘‘du mal le plus efficace’’.

    Une alternative de gauche

    C’est pourquoi il est urgent de construire une alternative pour et par la classe ouvrière et de rompre avec le système bipartiste, afin de donner à la classe ouvrière une voix politique dans ce système où ils n’en ont pas à ce jour.

    Non seulement il y a chez les travailleurs une aspiration à un choix viable d’un troisième parti, comme le montrent différents sondages nationaux, mais le potentiel est bien présent pour le construire au sein du mouvement ouvrier.

    En 2008, les syndicats américains ont donné 400 millions de dollars à Obama et aux Démocrates, un chiffre qu’ils veulent dépasser cette année. De plus, l’AFL-CIO (la plus grande confédération syndicale Américaine) a levé 400.000 volontaires destinés à militer pour les candidats démocrates. Cela est suffisant pour construire un troisième parti crédible qui représente les intérêts des travailleurs et ne prend pas l’argent des grandes entreprises.

    Rompre avec la mainmise des deux partis sur la politique américaine n’est donc pas une question de faisabilité mais de volonté politique.

    Malheureusement, jusqu’ici les dirigeants des syndicats et des autres organisations du mouvement social ont échoué à rassembler leur volonté et sont restés attachés au Parti Démocrate avec toutes ses conséquences désastreuses.

    Tout en luttant pour essayer de changer cela, Socialist Alternative (les partisans du Comité pour une Internationale Ouvrière) appelle à voter pour le candidat à la présidence des Verts, Jill Stein, aux élections à venir. Stein défend un ‘‘New Deal Vert’’ pour l’emploi, la fin des guerres, l’annulation de la dette des étudiants, et appelle à un réel système de santé, entre beaucoup réformes progressistes.

    Il n’est pas question ici d’une approbation générale du Parti Vert, qui n’arrive pas à voir le capitalisme comme le problème central ou à se baser décisivement sur la classe ouvrière. Cependant, la campagne de Jill Stein avait le plus de potentiel d’être une campagne de gauche forte dans le pays et, de cette façon, de montrer la voie à suivre le plus clairement pour que la gauche rompe avec les Démocrates.

    L’étau des deux partis capitalistes dans lequel la classe ouvrière américaine et les mouvements sociaux sont coincés a bloqué le progrès et permis à tout le spectre politique de basculer à droite au cours des décennies précédentes. Il est temps de rompre avec la logique du capitalisme, de l’impérialisme et de l’austérité – et des partis qui les mettent en œuvre. Il n’y a pas de meilleur moment qu’actuellement.

  • Occupy souffle sa première bougie. Nous tenons l'allumette pour la suite !

    Ce lundi 17 septembre 2012, le mouvement Occupy souffle sa première bougie. Et si en cette période, il semble s’être justement éteint, il ne faut pas crier à la défaite et se laisser bercer par la nostalgie. Tout reste à faire ! Retour en arrière…

    Par Elodie (Liège)

    Apogée

    Le 17 septembre 2011 marque le début officiel du mouvement Occupy. Né au États-Unis, il a tout d’abord regroupé quelques centaines de jeunes, organisés en campement dans le Zucotti Park de New-York, autour de la constatation des inégalités économiques et sociales croissantes qui émanent du système capitaliste actuel. Très rapidement, ce mouvement s’est vu renforcé par l’adhésion de plusieurs milliers de personnes, jeunes et travailleurs. Le 17 septembre, une manifestation est organisée dans le quartier de Wall Street, véritable fleuron du capitalisme financier. Un millier de personnes y participent. Il ne faut pas attendre longtemps pour voir ce mouvement de protestation s’étendre et dépasser les frontières new-yorkaises. Seulement deux semaines plus tard, le 5 octobre, une seconde manifestation s’organise à Wall Street rassemblant cette fois 12000 personnes ! Le 9 octobre, l’occupation s’empare de 900 villes à travers le monde : Sydney, Chicago, Boston, Paris, Hong Kong, Madrid, Berlin pour n’en citer que quelques unes. Aucun continent n’est épargné ! A la date du 15 octobre, on dénombre des manifestations dans pas moins de 1500 villes de 82 pays. De ce mouvement colossal mondial émane un slogan : « We are the 99 % » !

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    Liège: MEETING des Etudiants de Gauche Actifs

    Un an après Occupy Wall Street

    • Un an après, où en est-on ?
    • Comment les ‘’99%’’ peuvent-ils lutter contre les ‘’1%’’ ?
    • Les mobilisations de masse peuvent-elles changer les choses ?
    • Quelle alternative aux partis de Wall Street ?
    • Comment renverser le système capitaliste ?
    • Par quelle alternative le remplacer ?

    Mardi 25 septembre, 19h00, Université de Liège, place du XX Août, Salle Wittert

    Page Facebook du meeting
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    Inégalités, précarisation, la logique capitaliste

    La crise économique de ces dernières années a révélé de façon encore plus manifeste les contradictions et les inégalités inhérentes au système capitaliste. Les 1% les plus riches de la population, qui détenaient déjà dans leur mains la plus grosse part de richesse mondiale avant la crise, ne cessent de voir leur capital augmenter. Le régime est différent pour les 99% restants de la population. La crise ne fait pas que des heureux. Elle a laissé une ardoise considérable qui doit être résorbée… L’austérité sous le vocable d’ « effort collectif » devient alors l’apanage des différents gouvernements à travers le monde pour la sortie de crise. Coupes budgétaires, licenciements, chômage, attaques sur les conditions et les droits sociaux, le « collectif » devient une notion relative, épargnant les mieux lotis véritables responsables de la crise. L’effort sera donc uniquement fourni par ceux qui luttaient déjà bien souvent pour leur survie économique. A la clé ? La promesse d’un futur heureux sous un capitalisme moral rendu possible grâce à un retour de l’intervention étatique et à la sacro-sainte régulation qui empêcherait toute réitération de la crise.

    Au début de celle-ci, la présence de l’État fut en effet rendu directement perceptible par les opérations de nationalisation de nombreuses institutions bancaires et financières à travers le monde. Mais le terme de « nationalisation » utilisé lors de ces opérations diffère bien de celui que nous entendons en tant que révolutionnaires socialistes. Sitôt renflouées par l’argent public, ces institutions furent aussitôt rendues au privée. La question de la dette publique et des plans d’austérité a vite remplacé celle de la nationalisation et de l’intervention étatique. C’est que l’économie de marché et le système capitaliste sont, de l’avis de nos politiciens traditionnels (qu’ils soient libéraux ou sociaux-démocrates !), les meilleurs qui soient. Seulement voila, si le slogan « there is no alternative » a pu trouvé auditoire pendant un certain temps, plus question pour la population et les travailleurs d’y recourir. Le système montre, de façon presque risible, ses contradictions par la montée des inégalités sociales et économiques. Les uns trinquent, les autres déboursent ! Les conditions qui ont donné un terreau à la crise, loin d’avoir été écartées et abolies, ont été renforcées. C’est à partir de cette constatation que s’est constitué le mouvement Occupy. Le mouvement des indignés espagnols mais surtout le processus révolutionnaire en Afrique du Nord et au Moyen-Orient qui s’étaient déroulés auparavant ont certainement ouvert la voie en illustrant qu’une mobilisation peut payer ! L’ensemble de ces mouvements de protestation ont eu pour mérite d’inaugurer un nouveau terrain idéologique. Non, Monsieur Fukuyama, le capitalisme n’est pas la fin de l’histoire ! Il ne faudra cependant pas se contenter de le regarder s’auto-décomposer, car le capitalisme s’est muni de nombreux moyens économiques et politiques pour survivre. Il faudra donner une impulsion à sa perte, une impulsion qui ne peut passer que par une mobilisation et surtout une organisation de masse !

    La force de la mobilisation

    Le mouvement Occupy a eu le mérite de pointer du doigt les véritables responsables de la crise. Aux États-Unis, les politiciens de droite du Parti Républicain et du Tea Party, surfant sur la vague de la désillusion suite à la présence d’Obama et du Parti démocrate au gouvernement, n’avaient de cesse de s’en prendre au service public et aux syndicats comme initiateurs de la crise. Les démocrates n’opposaient pas une grande résistance face à ces déclarations et à cette logique. Un terrain idéologique de droite se démarquait au sein de l’ensemble du monde politique américain. Le gouverneur républicain du Wisconsin, Scott Walker avait d’ailleurs proposé une législation détériorant les conditions de travail des enseignants et d’autres fonctionnaires. Celle-ci fut adoptée dans plusieurs États républicains après que les dirigeants syndicaux aient démobilisé la lutte contre ces mesures.

    Le début du mouvement Occupy a marqué une rupture avec ces politiques réactionnaires. Plus question de s’en prendre au secteur public et aux syndicats. Il était temps de remettre les pendules à l’heure en s’attaquant aux véritables responsables de la crise désignés comme les banquiers de Wall Street et les actionnaires millionnaires. Ayant rejoint les constatations du mouvement, de nombreux militants syndicaux se sont organisés et ont initié des actions concrètes telles que la grève générale à Oakland (Californie) en novembre 2011. La ville portuaire avait alors décidé de fermer cinq écoles pour raisons budgétaires. La population est alors entré en lutte. Une première manifestation fut organisée le 25 octobre 2011. Celle-ci fut brutalement réprimée. Mais les travailleurs ne se sont pas laissé faire : une grève générale fut votée en assemblée. La première aux États-Unis depuis 1946 ! La ville, qui abrite le 5ème plus grand port américain, s’est vu bloquée par des milliers de citoyens.

    Cette action, qui ne fut pas la seule, a véritablement démontré aux participants la nécessité de s’organiser en tant que classe des travailleurs contre le système capitaliste. Face à la force de cette protestation et de ces mouvements qui trouvaient du soutien global au sein de la population américaine, les politiciens, et plus particulièrement les démocrates, furent contraints d’adapter leur discours en conséquence afin d’y insérer (en surface du moins) les revendications des « 99% ».

    La lacune de l’organisation

    Malgré son immense potentiel, le mouvement Occupy s’est laissé dépassé par ses faiblesses. La plus grande de celle-ci était la volonté de ce mouvement de s’établir comme « a-politique ». Aucune revendication concrète n’a pu alors émerger. De par cette lacune, peu sont les citoyens ayant participé activement au mouvement. Le soutien fut majoritairement passif. Cela est sans aucun doute dû à une absence de visée, de programme et par conséquent de plan d’action.

    La question du ras-le-bol était bien présente, mais celle de l’alternative à apporter à la société actuelle était beaucoup plus floue. Beaucoup se focalisaient sur le maintien des campements, y voyaient des embryons d’une société plus égalitaire. En plus de rester fortement éloigné de la question immédiate de l’emploi qui était la préoccupation majeure des travailleurs, ceux-ci ont rapidement été dispersés par les forces de l’ordre. Les actions et mobilisations du mouvement sont restés trop souvent dans le domaine du symbolique pour négliger les actions concrètes.

    Selon nous, un changement de société doit passer par une organisation politique de masse capable de porter et d’organiser un plan d’action concret favorable aux travailleurs et à la majorité de la population. Le problème est qu’actuellement, plus aucun parti traditionnel ne représente les intérêts des travailleurs et ne portent leur revendications. Il ne tient qu’à nous de nous réorganiser autour d’un véritable projet politique favorable à la majorité de la population qui puisse tendre vers une société véritablement égalitaire : une société socialiste !

    Si aujourd’hui le mouvement Occupy semble s’être éteint, son souvenir restera une étincelle dans la mémoire de la population et des travailleurs. Il a montré que le dégoût de cette société capitaliste inégalitaire et remplie de contradictions est partagé par un grand nombre de citoyens qui sont prêts à se mobiliser et cela à travers le monde. Ne laissons pas cette étincelle s’éteindre définitivement ! Donner à cette mobilisation une visée et un plan d’actions concret ! Il ne tient qu’à nous d’allumer le feu ! Contre le capitalisme ! Pour une société socialiste !

  • Etats-Unis : procédure de rappel au Wisconsin

    Il y a près d’un an et demi, la ‘‘bataille du Wisconsin’’ avait sonné le début du réveil de la classe ouvrière américaine. Les masses s’étaient alors soulevées avec énergie contre le gouverneur républicain Scott Walker et ses attaques contre les droits syndicaux. Ce 5 juin se déroule dans l’Etat un scrutin de rappel à l’encontre du gouverneur réactionnaire, une procédure inédite puisque seuls deux gouverneurs ont été ainsi destitués en deux siècles d’histoire.

    Le gouverneur Walker est arrivé au pouvoir en 2010, porté par la vague du Tea Party à l’occasion des élections de mi-mandat et sur fond de profonde défaite pour le Parti Démocrate. Directement, il s’en est pris aux retraites et à l’assurance-santé des fonctionnaires mais, surtout, afin de faire passer ces attaques antisociales et d’autres qu’il prévoyait, il a voulu affaiblir la réstance en lançant une véritable offensive contre les droits syndicaux et en particulier contre le droit de négociation par conventions collectives.

    C’est dans ce même Etat que sont nées les toutes premières conventions collectives de travail aux USA, dans le courant de l’année 1959. D’emblée, cette attaque a donc pris une dimension éminement symbolique, d’autant plus que cette offensive antisyndicale a débuté dans le contexte d’une autre, nationale celle-là, qui visait à détruire l’intervention du public dans l’économie. Ainsi, dans l’Etat de l’Ohio, le gouverneur Kasich a tenté de faire passer une loi autorisant les patrons à imposer leurs diktats dans le cas d’un conflit portant sur une convention collective. Une centaine de projets de loi visant à restreindre l’action syndicale ont été recencés à l’époque. Comme le disait le gouverneur Scott Walker, il s’agissait véritablement de ‘‘changer le cours de l’histoire’’.

    Mais, le 10 février, lorsque le gouverneur Walker a présenté sa loi de programme budgétaire pour l’année 2011, c’est un véritable soulèvement qui a débuté, un soulèvement qui a constitué un avant-goût de la révolte plus large initiée en septembre de la même année avec le mouvement ‘‘Occupy Wall Street’’. Son programme comprenait de grandes réductions d’impôts pour les riches (à hauteur de 142 millions de dollars), avec une diminution du budget de l’enseignement de 1 milliard d’euros, une diminution salariale de 8% pour les fonctionnaires et une diminution du budget de l’assurance-santé pour les plus défavorisés. La riposte a surpris par son ampleur et sa vitesse : des milliers et des milliers de manifestants défilaient dans les rues tous les jours, avec également l’occupation de bâtiments officiels, dont celui du siège du Parlement de l’Etat. Sur les banderoles, on pouvait notamment lire ‘‘Manifestons comme les Egyptiens’’, en référence à la révolution égyptienne du 25 janvier 2011. Le 12 mars 2011, 200.000 personnes avaient défilé dans les rues, soit pas moins d’un 25e de la population de l’Etat.

    Wall Street a deux partis, nous avons besoin du nôtre !

    Finalement, ses propositions ont fini par être adoptées après de nombreuses semaines de manifestations de masse. La force du nombre était clairement du côté de la population, mais le gouverneur avait pour lui l’avantage du temps et la faiblesse des directions syndicales, qui ont tout fait pour éviter d’avoir à organiser une grève générale. Les liens entretenus entre la direction syndicale et le parti démocrate sont tels qu’aujourd’hui, dans ce scrutin de rappel, le colistier du candidat démocrate contre le camp républicains est le dirigeant du syndicat des pompiers. Pour le camp démocrate, à l’époque, il fallait surtout éviter de favoriser le développement d’une trop grande polarisation sur des thèmes de classe, ce qui aurait exposé les démocrates à plus de critiques de la part des républicains, mais aurait aussi pu permettre de plus ouvertement encore démasquer le rôle du parti démocrate en tant que parti de Wall Street.

    Ce double jeu de la part du parti d’Obama peut encore se voir dans les sommes dépensées au cours de cette campagne pour le rappel du gouverneur Walker : les républicains ont dépensé trois fois plus d’argent qu’eux (17,8 millions de dollars). Ce n’est guère surprenant. Dans d’autres Etats, ce sont ces mêmes démocrates qui mènent la politique d’austérité, et Obama n’a pas désiré investir trop de moyens et transformer ce vote en une élection préfigurant les présidentielles.

    Les militants de la base ont recueilli 900.000 signature pour revendiquer l’application de cette procédure de rappel, sur une population de 5 millions d’habitants à peine ! C’est en soi une belle victoire, comme le serait le départ deWalker. Mais quelque soit l’issue du vote, ce travail militant aura été volé par l’un des deux partis de Wall Street. Aucune confiance ne peut être accordée aux démocrates. Entre eux et les républicains, il n’existe que des divergence concernant le rythme de l’austérité, pas sur sa logique elle-même.

    Nos camarades américain de Socialist Alternative font campagne autour du slogan ‘‘Wall Street a deux partis, nous avons besoin du nôtre’’. Cette nécessité d’un nouveau parti des travailleurs, un parti des 99%, est pleinement illustré dans cette ‘‘bataille du Wisconsin’’, où les liens entre les syndicats et le parti démocrate ont empêcher le mouvement de masse de balayer les lois scélérates de Walker et peuvent meintenant conduire au véritable vol de l’énergie militante qui a permis cette procédure de rappel.

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