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  • Égypte : Le gouvernement des Frères musulmans confronté à l'opposition populaire

    Aucune confiance dans l’une ou l’autre faction politique capitaliste ! Pour une lutte de masse pour les revendications des travailleurs !

    En Egypte, le début de l’année 2013 a été marqué par une vague de manifestations populaires de masse contre le président Morsi et son gouvernement des Frères musulmans. Les plus importants soulèvements ont eu lieu non au Caire, mais dans des villes du delta du Nil et le long du canal de Suez. Ces régions ont été négligées pendant des années et donc ont connu une nouvelle vague de luttes contre la misère, la répression étatique et dans certains cas, contre le nouveau régime lui-même. Notre camarade Georg Maier, qui a récemment visité le Caire, analyse ici la crise politique, sociale et économique qui vit en Égypte.

    Par Georg Maier, Sozialistische LinksPartei (SLP, CIO-Autriche)

    Impasse économique

    Le chômage a constamment augmenté au cours de ces derniers mois. Les prix de la plupart des marchandises, surtout des produits de base, ont également augmenté. Le régime tente d’arranger un emprunt de 4,8 milliards de dollars auprès du FMI afin d’accroitre ses réserves en monnaie étrangère, qui s’élèvent aujourd’hui à 13,6 milliards de dollars (comparé à 36 milliards en 2011).

    Le régime a produit une liste de 100 “produits de luxe non-nécessaires” (y compris par exemple, des “luxes” tels que les noix !), sur lesquels il y aura des restrictions à l’importation. On constate avec intérêt que le gaz lacrymogène ne semble par contre pas être un produit de luxe, puisque le gouvernement en a récemment acheté une quantité équivalente à 2,5 millions de dollars auprès d’une entreprise américaine. Tout cela a déclenché des manifestations de mécontentement, même parmi les membres des Frères Musulmans (dont beaucoup de commerçants qui forment la base des Frères musulmans, et qui souffrent en ce moment des restrictions à l’importation), ce qui a encore plus sapé l’autorité du régime aux yeux de beaucoup de personnes.

    Si le FMI accepte cette nouvelle demande d’emprunt, cela sera évidemment avec les conditions du FMI. Celles-ci visent en général la réduction des subsides. On a déjà vu la coupe des subsides des prix du gaz et de certains produits pétroliers, qui ont déclenché des manifestations dans le delta du Nil, accompagnées de barrages routiers et sur les lignes de chemin de fer. On s’attend à ce que l’effet le plus dévastateur de ces coupes soit l’impact sur le prix du pain. Le pain subsidié coûte en ce moment 5 piastres dans la plupart des boulangeries. Or, la rumeur et les discussions mentionnent le fait que le prix pourrait tout d’un coup se rehausser à 25 piastres ! Déjà des gens parlent d’une possible “révolte du pain”, ou, comme certains l’ont appelée, d’une “intifada du pain”. Les médias ont fait état d’émeutes au cours desquelles des supermarchés et des boulangeries auraient été vandalisées.

    L’industrie du tourisme (qui employait naguère à peu près 12 % de la main d’œuvre du pays) est soumise à une très grande pression, et ceux qui autrefois vivaient de la vente de services ou marchandises aux touristes connaissent maintenant beaucoup de difficultés.

    Les Frères musulmans en perte de soutien

    Il y a un sentiment largement répandu selon lequel le parti au pouvoir n’est pas mieux que l’ancien régime Moubarak. Le vieux système de népotisme a été à son tour adopté par les Frères musulmans – suscitant la colère du peuple. Avec le “rattrapage” opéré par les Frères musulmans, des dizaines de milliers de sympathisants des Frères musulmans reçoivent un poste dans la fonction publique, les membres du parti sont promus plus rapidement, et les contrats publics sont attribués de gré à gré à des entreprises appartenant aux membres du parti. Même en zone rurale, où le soutien en faveur des Frères musulmans lors des dernières élections était particulièrement élevé, cela a causé des manifestations massives contre les autorités régionales, y compris l’incendie du QG des Frères musulmans dans plusieurs villes provinciales.

    Par exemple, à Kafr el-Cheik, ville de 150.000 habitants dans le delta du Nil, complètement négligée par le gouvernement central depuis des décennies, le gouverneur a publiquement déclaré ceci : ‘‘Je soutiens la “frère-musulmanisation” du pays, parce que c’est ça, la démocratie.’’ Alors qu’au même moment, le président Morsi et de hauts cadres gouvernementaux du Parti pour la liberté et la justice (le parti des Frères musulmans) nient l’existence de ce rattrapage.

    La situation économique désespérée a causé à Kafr el-Cheik l’immolation d’un jeune chômeur, à qui les autorités avaient conseillé d’aller cirer des chaussures dans la rue ou d’aller demander l’aumône auprès d’une association caritative. Ce suicide a déclenché des manifestations dans cette ville normalement calme et conservatrice, connue uniquement pour être la ville natale de Mohammed Atta, un des terroristes qui ont causé l’attentat du 11 septembre 2001 aux États-Unis. Des milliers de gens ont marché sur le bureau du gouvernement pour réclamer des droits sociaux et la chute du régime.

    Le président Morsi et les Frères musulmans ne cessent de perdre du soutien. Ils ont été élus sur base de leur promesses de démocratie et de justice sociale, mais ne peuvent ni ne veulent mettre en place la moindre amélioration. Les gens sont de plus en plus scandalisés, et de plus en plus de gens réclament le départ du gouvernement précisément dans ces circonscriptions qui ont voté des candidats Frères musulmans au parlement lors des élections de 2011-2012. Au cours des élections syndicales aussi, les Frères musulmans sont en net recul depuis plusieurs mois. Dans le syndicat des vétérinaires, qui était traditionnellement sous contrôle des Frères musulmans tout au long de l’ère Moubarak, ceux-ci ont été entièrement chassés de la direction du syndicat lors des dernières élections en son sein.

    Une nouvelle vague de révoltes

    La lutte la plus importante de celles qui se déroulent en ce moment à été la révolte à Port-Saïd, ville portuaire à l’extrémité nord du canal de Suez. Durant des semaines, la ville a été quotidiennement ébranlée par des manifestations et a connu de ce fait un état de grève générale virtuel. La police a été battue et contrainte de quitter la ville. À la place, les citoyens ont mis en place une “police populaire”. Lorsque la police est revenue début mars, elle n’a été capable de se réinstaller qu’avec la “protection” de l’armée. Cela reflète le changement de rôle au sein des structures étatiques, et pourrait indiquer un rôle renouvelé et plus actif pour l’armée (voir plus bas).

    La lutte de Port-Saïd est à un très haut niveau de confrontation avec l’État capitaliste et de remise en question de son rôle. Mais il y a aussi certainement des caractéristiques “spéciales” de cette lutte, qui reflètent l’incertitude sur le plan politique et le manque d’une réelle perspective pour la lutte des travailleurs et des masses pauvres. Une revendication centrale, qui représente surtout les intérêts des capitalistes et des commerçants locaux, est la réouverture de la zone franche du port. Il semble que cette revendication ait été reprise par certains jeunes et travailleurs. La deuxième caractéristique “spéciale”, qui vit surtout parmi les jeunes actifs dans la lutte, est la revendication de la libération des martyrs de la répression policière de même que des supporters de l’équipe de foot du al-Masry Club qui ont été condamnés à mort à la suite du massacre de bon nombre de supporters d’al-Ahly. Cette revendication isole du coup le mouvement du Caire, où la plupart des supporters d’al-Ahly demandent au contraire une plus forte condamnation des auteurs. Mais ce sont les forces de sécurité responsables du massacre qui devraient être jugées. Une enquête indépendante et démocratique accomplie par les supporters des deux camps et par les syndicats devrait être organisée afin de déterminer ce qu’il s’est réellement produit ce jour-là. Les véritables criminels sont les cadres du gouvernement qui désiraient prendre leur revanche sur les al-Ahly Ultras pour leur rôle héroïque pendant et depuis la révolution, c’est eux qui devraient répondre à la justice.

    À ces deux revendications, les travailleurs ont ajouté leurs revendications économiques (de meilleurs salaires, etc.). Mais, face à la répression policière et à la mauvaise volonté du régime qui refuse la moindre concession (au moins tant que le mouvement en reste à ce stade), la plus importante revendication développée par le mouvement est celle de la chute du régime et de la fin du règne des Frères musulmans. Le gouvernement a peur que le mouvement ne se répande. Des mouvements similaires sont déjà nés (bien que d’une moindre ampleur) dans d’autres villes du canal et du delta, comme à Suez, à Ismaïlia, à Mansourah, et à el-Mahallah.

    L’appareil d’État

    Toutes ces révoltes et manifestations représentent une réelle menace pour l’élite dirigeante – la nouvelle comme l’ancienne. Il est possible, comme cela est largement discuté parmi la population, que le Conseil suprême des forces armées (CSFA) prenne le pouvoir, comme il l’a fait après la chute de Hosni Moubarak en 2011. De plus en plus de gens, partisans de l’ancien régime, grands commerçants et entrepreneurs, qui aimeraient voir une “main forte” diriger le pays. Il y a des manifestations dans les quartiers riches du Caire pour demander le retour au pouvoir du CSFA.

    L’intervention de l’armée à Port-Saïd, où elle a affirmé ne jouer qu’un rôle “neutre”, sans attaquer directement les manifestants, tout en protégeant les institutions publiques, est censé nous rappeler du rôle qu’a joué le CSFA en février 2011. Confronté à une détermination et à une confiance accrue de la part des manifestations de masse qui se déroulaient à l’époque, le CSAF n’était pas certain que les simples soldats obéissent à l’ordre de tirer, c’est pourquoi l’ordre n’a pas été donné. L’armée n’a pas attaqué les manifestants, mais en même elle s’est assurée que le mouvement n’échappe pas à tout contrôle et ne renverse les fondations mêmes du capitalisme égyptien et de son État.

    Il semble aussi y avoir des fractures au sein de la police. Des milliers de policiers sont en ce moment en grève indéterminée afin d’exiger de ‘‘ne pas se retrouver impliqués dans le conflit politique entre le gouvernement et l’opposition’’, comme l’a déclaré dans les médias un colonel de police, qui a également revendiqué la démission du ministre de l’Intérieur, Mohammed Ibrahim. Cela alors que le gouvernement s’efforce de renforcer la police et sa capacité à disperser les manifestations. Depuis la mi-février, les simples agents de police ont le droit de porter des pistolets et des munitions (auparavant, le port d’armes était réservé aux officiers et à certaines forces spéciales). L’appareil d’État de manière générale fait toutes sortes d’efforts dans le but de pouvoir dans les faits réprimer l’opposition et les révoltes. Le parti d’extrême-droite salafiste Gamaad al-Islamiya est lui aussi en train de mettre en place des “comités de citoyens” (dans les faits, des milices islamistes) afin d’attaquer les manifestations.

    Toutes ces évolutions sont dangereuses pour le mouvement ouvrier et pour la gauche. Confronté à la répression policière, aux miliciens pro-gouvernementaux et aux groupes islamistes de droite, le mouvement ouvrier doit développer une stratégie claire afin de se défendre. On a vu récemment dans les manifestations l’apparition d’un “Black Block” (“Bloc noir”), groupe assez désorganisé de jeunes portants des masques noirs afin de se battre avec la police et les miliciens. Bien qu’un tel développement soit compréhensible, l’existence d’un tel mouvement est utilisée comme prétexte par le gouvernement pour attaquer les manifestants et au final, le Bloc s’est avéré impuissant à protéger les manifestations de manière adéquate.

    Ce qui est nécessaire est la mise en place de comités d’auto-défense organisés démocratiquement, basés dans les quartiers populaires et dans les usines. Il nous faut des structures démocratiques afin de protéger de manière efficace le mouvement ouvrier contre toutes les attaques. Les luttes doivent être articulées en un programme révolutionnaire clair, qui s’en prenne non seulement à l’État bourgeois, mais au système capitaliste dans son ensemble.

    Il faut une organisation indépendante de la classe ouvrière et un programme

    Il y a en ce moment deux grandes fédérations syndicales indépendantes, dont le nombre de membres total s’élève à 2,5 millions de travailleurs. Certains de ces syndicats au sein de ces deux fédérations ont organisé des grèves et des occupations massives et puissantes. Mais lorsque les travailleurs participent aux manifestations contre le régime ou dans les révoltes générales de masse comme à Port-Saïd, où les travailleurs constituent la vaste majorité de la population participante, ils ne le font pas en tant que travailleurs ou en tant que classe, mais en tant que manifestants à titre individuel. Seule la classe ouvrière peut montrer la voie en avant pour la lutte. Ce qu’il manque ici, c’est une voix politique ouvrière qui puisse développer la lutte et combiner les revendications économiques légitimes avec la revendication de la nationalisation des usines, etc. sous contrôle et gestion ouvriers, et développer un véritable programme socialiste révolutionnaire pour la lutte.

    Ce qu’il nous faut est un parti socialiste révolutionnaire pour les travailleurs et pour les jeunes. Un tel parti peut se développer sur base des luttes quotidiennes des travailleurs dans les entreprises comme sur base des révoltes de masse. Les socialistes, les syndicalistes et les militants de groupes locaux doivent s’unir sur une base de lutte commune contre les attaques perpétrées par le gouvernement Morsi, contre les capitalistes qu’il sert et contre le système capitaliste pourri dans son ensemble, et mettre en avant un programme socialiste clair qui satisfasse aux besoins des masses pauvres et qui fasse progresser la lutte pour une Égypte socialiste.

    Tandis que les Frères musulmans perdent leur soutien et que de nouvelles vagues de lutte massives ébranlent le pays, toute une série d’organisations de gauche et socialistes soutiennent toujours les forces de l’opposition laïque libérale telles que le Front de salut national (FSN) dirigé par Mohammed El Baradei, Amr Moussa et Hamdeen Sabbahi. Une telle position, dans la perspective de révoltes et d’insurrections de masse à cause de la situation économique, ne peut être qualifiée que de désastreuse.

    Le FSN, tout comme le Parti pour la liberté et la justice, les salafistes ou le CSFA, ne représente au final qu’une autre faction de la classe dirigeante capitaliste. Le soutien d’une faction capitaliste par la gauche ne fait que rendre la tâche plus ardue pour le développement d’une organisation indépendante de la classe ouvrière et de la jeunesse. Lorsque les socialistes suivent une faction capitaliste, décrite comme étant “progressiste”, c’est un signe de manque de confiance dans la force de la classe ouvrière, et cela fait dévier de son objectif la lutte qui peut être menée et remportée par la classe ouvrière organisée. Tout comme certains socialistes autoproclamés soutenaient jusqu’à récemment les Frères musulmans, le soutien à El Baradei et au FSN ne fera que freiner le développement d’une organisation des travailleurs véritablement socialiste, dont l’Égypte (et les autres pays du monde) a pourtant tellement besoin.

    Afin de rallier la vaste majorité des travailleurs, des jeunes et des masses pauvres, il est nécessaire de rompre avec toute faction de la classe capitaliste et de développer et de discuter des revendications communes de lutte autour desquelles les militants syndicaux et de groupes locaux, les jeunes et les travailleurs puissent s’organiser et lutter.

    • Non aux dictats du FMI ! Non à toute coupe dans les subsides aux denrées de base !
    • Droits démocratiques : droit de manifester, droit d’organiser des syndicats
    • Non au “rattrapage” des Frères musulmans ! Élections et contrôle démocratiques de l’administration et des cadres étatiques
    • Salaire minimum de 1200 livres par mois (86 000 francs CFA/135 €), indexation automatique des salaires en fonction du cout de la vie
    • Programme massif d’investissements public afin d’améliorer l’infrastructure, les soins de santé, l’enseignement, fournir à tous des logements de qualité à cout accessible, et créer des emplois décents
    • Nationalisation de toutes les banques, ex-entreprises étatiques privatisées et grandes entreprises sous contrôle et gestion démocratique par les travailleurs, reliées entre elles pour une planification démocratique de l’économie
    • Appel à tous les travailleurs partout au Moyen-Orient et en Afrique du Nord pour la solidarité en une lutte commune
    • Pour un gouvernement socialiste démocratique en Egypte et une fédération socialiste d’Afrique du Nord et du Moyen-Orient.
  • Tandis que coût de la vie s’envole, les patrons chargent l’index

    Ces derniers mois, les patrons, les partis traditionnels et les médias dominants n’ont pas tari d’idées pour ‘‘réformer’’ le mécanisme de l’index, le mécanisme d’adaptation automatique des salaires à la hausse des prix. Ces diverses propositions ont pour objectif de créer un climat défavorable aux travailleurs dans le cadre des négociations entre syndicats et patrons portant, entre autres, sur nos salaires pour les deux prochaines années. Avec l’indexation et l’adaptation partielle des salaires aux prix, les travailleurs peuvent encore sauvegarder une partie de leur niveau de vie. Mais pour les grandes entreprises, cette protection est de trop dans une situation d’insécurité économique et de crise de l’euro.

    Par Peter Delsing

    Les propositions patronales visent à vider l’index de sa substance, alors que cet outil pour les travailleurs est déjà considérablement affaibli. Syndicats, le journal de la FGTB, a calculé que le prix des produits compris dans le panier qui sert à calculer l’index a augmenté de 15,66% entre 2005 et 2010. Cela ne tient pas compte de l’augmentation des prix de l’essence qui, depuis l’introduction de l’index-santé, n’est plus compris dans l’index, au contraire du gaz et de l’électricité. Et heureusement ! Mais l’essence, c’est quand même important pour les ménages belges : depuis début septembre, les prix battent les records. Certains à droite veulent aller plus loin et retirer tous les prix de l’énergie, donc également le gaz et l’électricité.

    Hausse des prix, instabilité, crise et nature chaotique du système

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    500 millions de livres de profits grâce à la spéculation alimentaire

    Ces deux dernières années, la banque britannique Barclays a réalisé un profit de 500 millions de livres (626 millions d’euros) grâce à la spéculation sur l’alimentation. Goldman Sachs, Morgan Stanley et Barclays forment le trio de tête de la spéculation alimentaire. Alors que, chez les gens normaux, on apprend aux enfants en bas âge à ne pas jouer avec la nourriture, les choses sont différentes pour les grands banquiers. Eux, ils jouent avec des stocks astronomiques de nourriture, poussent les prix vers le haut et réalisent de gigantesque profits en condamnant des millions de personnes à la faim.

    Les grandes banques parient sur les prix alimentaires et font de la nourriture un produit financier. La faim et la pauvreté deviennent ainsi des ‘opportunités d’affaires’. Un système peut-il être plus cynique que ça ? En 2010, Barclays a réalisé un profit de 340 millions d’euros grâce à la spéculation alimentaire, contre ‘seulement’ 189 millions en 2011, une diminution expliquée par la diminution du prix du maïs et du soja. Les prix élevés de 2010 étaient de très bonnes affaires. Depuis 2000, les institutions financières ont misé plus de 200 milliards de dollars sur le marché des “ressources agricoles”.

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    Les hausses des prix se font sentir sur plusieurs domaines. En 2011, en Belgique, l’inflation était de 3,49%, et elle sera probablement autour des 3% pour l’année 2012. Dans une période de crise, certains prix ont tendance à augmenter – à cause de pénuries consécutives à la nature non-planifiée de la production capitaliste ou à cause des quasi-monopoles tels qu’Electrabel. Mais d’autres prix ont aussi tendance à diminuer quand l’économie entre dans une récession sévère. Lors de l’année de crise 2009, l’économie belge s’est contractée de -2,7% et les prix n’ont augmenté que de 0,26% cette année-là, un chiffre historiquement faible.

    Mais aujourd’hui, alors que nous entrons dans une nouvelle phase de récession, la tendance reste à l’augmentation des prix. Le prix des logements n’a ainsi commencé que très récemment à diminuer en Belgique (-2% durant le premier trimestre de 2012 comparé au dernier trimestre de 2011). Mais d’après l’OCDE et le magazine ‘The Economist’, les prix des logements belges restent surévalués de 50% à 56%. Cette bulle n’a pu grandir qu’à cause du refus des gouvernements successifs de mener une politique sociale d’investissements dans la construction de logements sociaux abordables et convenables.

    En plus, le coût réel du logement est consciemment sous-estimé dans le calcul de l’index. Le loyer d’une maison ne compte par exemple que pour 6,23% du budget d’un ménage d’après le nouveau panier de l’index instauré en 2004. Pour beaucoup de familles, la réalité est pourtant plus proche des 25 à 30% (voire plus).

    La hausse des prix de l’énergie – électricité et gaz – a été stimulée par la politique irresponsable de libéralisation et par la cupidité d’entreprises comme Electrabel et GDF-Suez. Le gaz et l’électricité doivent être protégés de la soif de profits, cela doit être un service à la collectivité placé sous le contrôle démocratique de celle-ci. Quant à la hausse du prix de l’essence, elle résulte de la spéculation boursière et de l’instabilité provoquée au Moyen-Orient par le capitalisme sénile. L’ensemble du secteur de l’énergie doit être planifié de façon démocratique en fonction des besoins de la population et dans le respect de l’environnement.

    Depuis 2007, les marchés alimentaires ont connu deux chocs qui ont fait augmenter les prix de plus de 50% (Wired, 6 mars 2012). Dans les pays occidentaux, cela a entraîné des prix plus élevés dans les supermarchés et une grande pression sur le budget familial mais dans le monde néocolonial, il a été question de véritables famines.

    Les conditions météorologiques plus extrêmes, dans ce système capitaliste incapable de gérer la crise écologique, ont conduit à de plus fréquentes sécheresses. Cela a par exemple eu un impact sur les récoltes de maïs aux Etats-Unis et en Russie, avec en conséquence des pénuries et une hausse des prix. L’utilisation de certaines céréales pour des biocarburants a aussi contribué à ce processus. Plus fondamentalement, la situation résulte d’un système non planifié où seul domine le profit à court terme, sans prendre en considération l’homme ou l’environnement. Les hausses de prix alimentaires sont aussi stimulées par la spéculation des fonds d’investissements privés et des banques d’investissements (Goldman Sachs, Barclays,…) Le ‘soutien aux banques’ et à leurs profits ont ainsi volé le pain de la bouche de 115 millions de personnes à travers le monde néocolonial depuis 2008 (chiffre de la Banque Mondiale).

    Pas touche à l’index !

    Les propositions des patrons et de leurs politiciens pour réformer l’index sont diverses et variées. On parle notamment d’indexer uniquement le salaire net, après imposition, ce qui mine notre sécurité sociale (nos pensions, nos soins de santé, nos allocations,…). On parle aussi de n’adapter que les salaires les plus bas. Mais l’index n’est pas un instrument de redistribution des richesses, seulement un instrument d’adaptation des salaires à la hausse des prix.

    Les salaires des grands managers doivent être limités par une taxe plus élevée sur les hauts revenus, ou – pourquoi pas – en introduisant une différence maximale entre les grands salaires et les autres, sur base d’une décision politique impulsée par le mouvement syndical puisqu’on ne peut s’en remettre à l’Etat capitaliste. La Fédération des Entreprises Belges (FEB) a aussi émis l’idée de négocier sur base de l’estimation d’un taux d’inflation sur deux années, ce qui revient à être dépendants de la décision arbitraire du patronat ou de ce que ce patronat essaie de vendre aux directions syndicales tous les deux ans lors de l’Accord Interprofessionnel. Bien sûr, Karel Van Eetvelt (de la fédération patronale Unizo) n’a pas pu s’empêcher d’aller plus loin : si on ne peut pas toucher à l’index, il faut laisser les travailleurs bosser deux heures de plus par semaine, sans la moindre adaptation du salaire !

    Les travailleurs et leurs familles doivent lutter pour la restauration complète de l’index afin que les adaptations des salaires et des allocations représentent réellement l’augmentation du coût de la vie rencontrée ces 30 dernières années. Chaque bricolage de l’index doit être rejeté. Les patrons et les politiciens établis veulent essentiellement que le pouvoir d’achat et le niveau de vie des travailleurs et de leurs familles se détériore plus vite que dans les pays voisins (la ‘‘compétitivité’’). Obtenir des salaires décents et disposer d’une bonne sécurité sociale, cela se heurte au capitalisme et à sa crise sans issue. Les richesses sont pourtant suffisantes dans la société : entre 1970 et 2011, la croissance économique moyenne fut de l’ordre de 2,3%, bien que ce rythme diminue. Le capitalisme assure que cette richesse soit répartie de manière sans cesse plus inégale. Les travailleurs et les jeunes doivent s’opposer à ce système. Lutter pour la défense de droits sociaux fondamentaux comme l’index, cela signifie lutter pour une autre société, une société socialiste.

  • “Nous voulons des emplois, des logements sociaux et des services publics de qualité’’

    Interview de Bart Vandersteene et Anja Deschoemacker

    Ces dernières années, les déficits dans le secteur du logement, de l’enseignement, des soins de santé, de la garde des enfants,… se sont fortement accrus. Les conseils communaux, de différentes manières, ne mènent plus qu’une politique néolibérale qui a plus d’attention pour le city-marketing que pour les besoins de la population. Nous avons discuté avec Bart Vandersteene, tête de liste pour Rood ! à Gand, et avec Anja Deschoemacker, tête de liste de l’alliance Gauches Communes à Saint-Gilles.

    Toute une série de villes voient fleurir des projets de prestige, avec des budgets qui auraient sans doute pu trouver une meilleure affectation. Mais nos centres-villes sont tout de même plus jolis maintenant, non ?

    Bart : L’objectif du city-marketing est en effet de donner l’impression d’une amélioration et, plus particulièrement, de rendre le centre-ville plus attractif. Le centre-ville n’est plus cette zone grise dans laquelle rien ne se passe, toute une série d’événements et d’attractions créent une certaine dynamique. Mais l’objectif n’est pas tellement de nous rendre la vie plus agréable, il est avant tout d’attirer des capitaux privés, entre autres concernant l’immobilier et le tourisme.

    Les loyers et les prix deviennent dès lors complètement inaccessibles pour les simples travailleurs, souvent forcés de déménager en banlieue ou dans une commune proche. Et là, il ne se passe rien. Les prix de l’immobilier dans les centres-villes, à la location ou à l’achat, conduisent à une plus grande dualité entre cette élite pour laquelle la ville est encore accessible et le reste de la population. Ces prix élevés instaurent une pression sur l’ensemble du marché. Sans disposer de grands moyens, il faut actuellement s’endetter très fortement pour pouvoir acheter.

    Les événements organisés sont orientés vers un public fortuné, avec des entrées fort chères ou des tarifs pas croyables pour manger ou boire quelque chose. L’argument que tout cela bénéficie au moins aux classes moyennes ne tient pas la route non plus. Combien de magasins, de restaurants et de cafés reste-t-il aujourd’hui dans la plupart des grandes villes sans faire partie d’un grand groupe ?

    Anja : Les projets de rénovation urbains sont nécessaires. Il suffit de se balader un peu dans la plupart des quartiers de Bruxelles pour se rendre compte que beaucoup de rues et de maisons ont besoin d’une remise à neuf. Mais les projets de prestige ne profitent pas à la population. Au contraire, la rénovation du centre-ville telle qu’elle est appliquée aujourd’hui sert plutôt à chasser des quartiers une partie de la population – sa couche la plus pauvre – afin de faire de la place pour les projets des promoteurs immobiliers. Vu qu’il n’y a plus d’espace pour construire de nouveaux bâtiments, on ne peut attirer une “meilleure population” qu’en forçant la “moins bonne population” à déménager.

    Les problèmes des communes bruxelloises sont bien connus : taux de chômage élevé, grande pauvreté, prix immobiliers exorbitants y compris pour des logements de piètre qualité. La croissance de la population met constamment sous pression le marché et les prix de l’immobilier. Ça fait vingt ans que les communes de la Région bruxelloise font passer d’autres priorités. Le résultat est absurde. D’un côté, on manque de logements à prix accessibles, de l’autre, il y a un énorme vide : 1,2 million de mètres carrés d’espaces de bureaux vides, soit près de 10 % de l’espace total. On compte aussi 12.000 appartements vides de plus de 100 m². Mais le manque de logements décents nous assure des loyers de 800 euros dans un proche avenir. Qu’attendent donc la Région et les communes pour s’attaquer à tous ces espaces vides ?

    Les campagnes pour les communales se limitent généralement à des débats portant sur les pavés qui manquent ou sur le manque de places de parking. Quelle différence peut-on faire au niveau communal ?

    Anja : Le niveau communal n’est pas différent des autres niveaux. Tout dépend des choix politiques, des priorités du budget et de l’endroit où on va chercher l’argent. Les communes ont de très larges compétences, qui incluent d’ailleurs la récolte d’impôts, les investissements publics (en Belgique, les communes sont responsables de 50 % des investissements publics), la création de services à la population,…

    Certains disent que la politique communale n’a rien à voir avec l’idéologie. C’est faux. Les compétences communales sont bien évidemment limitées par les décisions politiques des niveaux supérieurs, mais nous retrouvons à ces niveaux les mêmes partis qu’aux communes. Une commune pourrait très bien prendre la tête de la lutte contre la politique d’austérité, il serait possible de mobiliser la population sur une telle base. Nous n’avons rien à attendre des partis établis ; nous devons construire une opposition active à l’austérité dans les communes comme ailleurs. Là aussi, l’austérité va frapper de plus en plus dans les années à venir.

    Bart : Pour nous, les élections portent sur les besoins les plus urgents et les plus importants de la majorité de la population. L’emploi, le logement, les services publics tels que l’enseignement, l’accueil des enfants… Un conseil communal peut faire une différence à tous ces niveaux.

    Prenez par exemple notre revendication d’un emploi stable et décent pour tous. Une ville ou une commune peut commencer à créer des emplois par ellemême, dans les services publics déjà existants ou de nouveaux services nouvellement créés. Une commune peut mener campagne pour une “ville sans intérim”, en supprimant les contrats précaires des services communaux et en menant campagne contre les emplois temporaires dans le secteur privé. Ce n’est tout de même pas normal qu’à Gand, des grosses entreprises telles que Volvo emploient plus d’intérimaires que de travailleurs sous contrat ! Et on ne parle même pas encore des soustraitants… Les contrats temporaires et intérims ne représentent aucune valeur ajoutée pour la société, ils n’en ont que pour les employeurs qui peuvent ainsi liguer un groupe de travailleurs contre un autre et licencier plus facilement leur personnel.

    Une ville peut aussi jouer un rôle pionnier avec de nouveaux services publics. Les besoins sont nombreux : rien qu’à Gand, il manque 1000 places dans les crèches. Mais on pourrait aussi construire des cafétérias à prix modiques dans les quartiers, afin de pouvoir s’asseoir à une terrasse dans notre propre voisinage sans courir au centre-ville pour boire une bière ou un café à plus de 2 euros. Restos sociaux, centres de réparation de vélos,… les possibilités sont infinies.

    Tout cela est-il réaliste ? Peut-on dépenser plus alors qu’il y aura encore moins de moyens pour les communes dans les années à venir ?

    Bart : Nous partons des besoins, de ce qui est nécessaire à la majorité de la population, et non pas des exigences des élites qui deviennent de plus en plus marginales au sein de ce système. Ceux qui nous disent qu’il n’y a pas de moyens ou qu’une autre politique n’est pas possible “à cause de l’Europe”, sont ces mêmes politiciens qui siègent eux-mêmes à la tête de leur parti ou du gouvernement fédéral ou régional, mais qui n’ont par contre aucun problème à maintenir la déduction des intérêts notionnels. Se réfugier derrière la phrase ‘‘c’est un autre niveau de pouvoir qui est responsable’’ est ridicule. Les mêmes partis siègent à tous les niveaux et appliquent la même politique d’austérité.

    Anja : Il est toujours plus facile d’aller chercher l’argent parmi la majorité de la population avec toutes sortes de taxes communales et d’amendes que de faire contribuer l’élite. Un éboueur ne peut pas déménager dans un paradis fiscal. D’immenses profits sont réalisés dans notre pays, mais les patrons et les grands actionnaires ne vont pas nous livrer cette richesse sur un plateau. Nous devons collectivement prendre le contrôle des richesses existantes. Les secteurs-clés de l’économie (énergie, sidérurgie, finance,…) doivent passer aux mains du public.

    Quand, dans les années ′80, les camarades anglais du PSL sont parvenus au pouvoir à Liverpool, toute la ville a été transformée en un grand chantier. Une grande campagne médiatique a alors été lancée à contre ce conseil communal dominé par les marxistes. Mais un lecteur a alors écrit au journal local : ‘‘Je ne sais pas qui était Léon Trotsky, mais à en juger par le nombre de nouveaux logements qui sont en train d’être construits à Liverpool, il devait certainement être un fameux maçon.’’ Qu’en est il pour notre pays ?

    Bart: “C’est également nécessaire. Rien qu’à Gand, il y a 7.500 personnes sur la liste d’attente des logements sociaux. Cela correspond environ au nombre de logements sociaux promis par tous les partis ces 18 dernières années – partis qui sont parvenus, au cours de la même période, à construire en tout et pour tout 750 logements.

    Nous sommes pour une politique de construction et de rénovation urbaine axée sur les logements sociaux. Cela nécessite de reprendre le secteur du bâtiment entre nos propres mains, afin de rehausser la qualité des édifices, mais également d’assurer la qualité et la sécurité de l’emploi du secteur. Répondre à la demande de logements sociaux réduirait cette liste d’attente, certes, mais instaurerait également une grande pression à la baisse sur les prix de l’immobilier dans le privé.

    La tendance à laquelle nous assistons aujourd’hui est exactement inverse. Quant aux subsides au loyer pour ceux qui ne s’en sortent pas, cela revient à subsidier les loyers élevés qui, grâce à ces subsides, deviennent tout d’un coup accessibles pour les ménages à bas revenu. Un programme massif de construction de logements sociaux aurait l’effet inverse de faire baisser tous les prix. La ville de Vienne, en Autriche, est aujourd’hui le plus grand propriétaire de logements de toute l’Europe, suite à la mise sur pied d’une compagnie publique de construction par les socialistes au pouvoir dans les années ′20.

    Anja : À Liverpool, le conseil communal élu a tenu ses promesses. Ici, les campagnes se suivent avec les mêmes belles promesses, rarement suivies d’effets. L’accord de gouvernement de la Région bruxelloise prévoit de parvenir à 15 % de logements sociaux en ville d’ici 2020, contre 9 à 10 % à l’heure actuelle. Cela signifierait la construction de plus de 34.000 logements sociaux. À Saint-Gilles, avec ses 8,5 % de logements sociaux, il faudrait construire 1717 nouveaux logements d’ici 2020 ; à Ixelles ou Uccle, qui comptent 4 % de logements sociaux, il en faudrait 5000. Les communes sont en fin de mandat, et le conseil régional actuel n’a plus que deux ans jusqu’aux prochaines élections. Au rythme de construction actuel, ces 15 % resteront sur papier, alors que cela ne suffirait même pas. Cet objectif de 34.000 nouveaux logements (alors que la liste d’attente comprend 50.000 personnes) ne prend en compte ni les évolutions de ces huit prochaines années, ni toutes les familles qui ne se sont même pas inscrites sur liste d’attente, en sachant très bien que “ça ne sert à rien”.

    Vous envisagez donc les choses dans un contexte plus global. Mais que dire de tous ces petits problèmes tels que la propreté, les pavés manquants ou les rues défoncées ?

    Anja : Toutes ces rues mal entretenues dans des quartiers populaires dégueulasses ne sont jamais que le revers de la médaille des projets de prestige orientés uniquement vers le city-marketing, vers les attractions touristiques et toutes sortes de projets commerciaux (shopping-centers,…). À d’autres moments, le mauvais état de certains quartiers se voit tout à coup utilisé comme prétexte pour “rénover” ces mêmes quartiers, ce qui signifie bien souvent que les couches les plus pauvres devront céder la place à des ménages à plus hauts revenus. Le conseil communal de Liverpool des années ′80 avait construit des logements sociaux, mais a aussi amélioré les conditions de travail du personnel communal et en a engagé suffisamment que pour s’occuper de la propreté et de l’entretien de l’infrastructure publique.

    Bart : La propreté à Gand ne s’est pas améliorée depuis la privatisation d’Ivago à la fin des années ′90. Les sacs poubelles sont devenus de plus en plus chers et, pour être sûr que les gens n’abandonnent pas leurs déchets dans la rue, on a diminué le nombre de poubelles publiques. On nous a ainsi encouragés à ramener tous nos déchets à la maison, pour utiliser les sacs payants. L’entreprise de collecte de déchets Ivago tire chaque année un revenu de 3,5 millions d’euros rien que de la vente des sacs poubelles jaunes (sans compter tout le reste). Cet argent est en grande partie redistribué en dividendes pour la ville et pour des actionnaires privés, tels que le groupe Suez. Il est possible de revenir à une collecte de déchets gratuite, sans que cela ne coute quoi que ce soit à la collectivité ; seuls les actionnaires privés ont à y perdre. Mais les actionnaires ont-ils vraiment besoin de tirer profit des déchets qu’ils nous ont déjà vendus auparavant ?

    Une collecte gratuite des déchets, une poubelle à chaque coin de rue, un parc à containers dans chaque quartier: voilà comment lutter contre les ordures. Mais cela va à l’encontre de la politique communale libérale, où on ne se soucie que des profits des actionnaires privés tandis que la responsabilité pour les problèmes nés de cette politique est refourguée sur le dos des victimes de cette politique.

    Quelle est l’objectif de la participation électorale de Rood ! à Gand ?

    Bart : Rood ! a l’ambition de former une large force de gauche, nous voulons donc renforcer la gauche grâce à cette campagne. Cela aurait été plus facile si on avait obtenu une initiative unitaire également avec le PTB ; de véritables cartels de gauche pourraient nous donner plus d’élus. Une campagne enthousiaste avec laquelle nous pouvons positionner Rood ! en tant que véritable acteur peut renforcer la possibilité d’aller vers une campagne de gauche unie en 2014 (élections fédérales, régionales et européennes). Dans notre pays aussi, il y a une grande ouverture pour la gauche. Les frontières nationales ne me semblent pas être si étanches au point que nous ne pourrions pas connaitre la même situation qu’avec le SP aux Pays- Bas ou avec Mélenchon en France.

    À Gand, on nous dit qu’après les élections communales, il y aura la coalition la plus à gauche possible, avec le cartel SP.a-Groen. Leur politique ne sera néanmoins pas différente des précédentes. La crise économique va conduire à des plans d’austérité, la politique du city-marketing va continuer à fleurir, mais une couche de plus en plus grande de la population va remettre en question cet emballage certes fort joli, mais vide. Nous ne pouvons pas nous permettre de laisser la droite se présenter comme la seule opposition à cette politique ; il faut construire une forte opposition de gauche qui soit capable d’organiser la résistance. C’est le défi que Rood ! veut relever.

    Et quel est l’objectif de Gauches Communes à Saint-Gilles, Jette, Ixelles et Anderlecht ?

    Anja : Tout comme Rood ! en Flandre, les organisations et individus qui participent à l’alliance Gauches Communes ont surtout l’ambition de renforcer le camp de la gauche. La création d’une formation large, qui prenne réellement en compte les revendications du mouvement ouvrier et des mouvements sociaux, et qui soit prête à se lancer dans la lutte pour défendre ces intérêts, sera une étape absolument nécessaire afin de rompre l’impasse que représente le capitalisme en crise, de quitter le cercle vicieux qui signifie toujours plus de pauvreté, toujours plus de désespoir pour de plus en plus larges groupes de la société.

    Gauches Communes se présente dans quatre communes bruxelloises, dans l’idée de populariser une formation de gauche large, au fonctionnement démocratique, mais aussi de renforcer les forces de gauche existantes dans ces communes, afin de démarrer l’opposition à la politique d’austérité communale au cours de la période à venir. Une encore plus large collaboration aurait été encore mieux. Mais vu le manque d’enthousiasme et l’attitude attentiste de certains partenaires potentiels, nous n’avions pas la possibilité de patienter plus longtemps. Gauches Communes reste bien entendu ouvert à toute discussion en vue d’une encore plus large collaboration dans le cadre de campagnes contre la politique d’austérité ou d’autres formes de protestation.

  • Grève générale des services publics : Rapport et photos de Bruxelles

    Par des militants du PSL-Bruxelles

    Piquets de Grève à la SNCB et la Stib

      Tant le mercredi soir que le jeudi matin, le piquet a eu peu de travail à la Gare de Bruxelles Midi et de Bruxelles Nord. A l’exception de quelques agents de sécurité et de quelques employés des consultants, presque personne ne s’est présenté. Parmi les personnes présentes, on était convaincu que cela n’était qu’un début et que, certainement en Wallonie, d’autres actions seront menées ces prochains jours.

    Il était nécessaire de rapidement réagir, sur ça tout le monde était d’accord. La volonté de partir en action, y compris par des grèves, et cette fois-ci pas pour rentrer sagement au boulot par après, vit depuis longtemps chez le personnel de la SNCB. D’où le succès dès que la direction syndicale a donné son feu vert. Celle-ci a été prise de vitesse par la base.

    Il y en avaient pourtant au piquet qui n’étaient pas entièrement à l’aise. Une grève décrétée d’en haut, sans discussion préliminaire, est simplement plus facile à arrêter, sans consultation de la base, qu’une décidée après un vote démocratique à la base.

    Les déclarations de Marc Leemans de la CSC sur la VRT, après la réunion avec le gouvernement le mercredi, selon lesquelles le gouvernement a montré sa volonté de concerter, a sonné pour beaucoup comme un avertissement.

    Cette fois-ci, au piquet on demandait explicitement le tract de Libre Parcours, journal d’action de militants de base combatifs et critiques des transport public. Il était beaucoup question de l’instauration de contacts directs entre les cheminots flamands et francophones et de la nécessité d’une alternative politique pour les travailleurs, non seulement pour remplacer le SP.a, mais aussi le PS.

    La grève a été également été très bien suivie à la Stib. Quasi personne n’a été travailler et donc aucun métro, tram ou bus n’a pu rouler.


     

    Blocage des sorties du ring à Drogenbos & Delta

    Une bonne centaine de syndicalistes était présent à 7h pour bloquer l’accès de la capitale à Drogenbos et autant à Delta. L’action a été menée par la CGSP Bruxelles rassemblant des militants des administrations régionales et locales, des CPAS, des hôpitaux publics, des enseignants, des travailleurs de Bruxelles-Propreté et de la Stib. La journée de grève à Bruxelles-Propreté a en très grande partie empêché la récolte des poubelles. L’atmosphère était combative, mais le sentiment était présent qu’une grève a besoin de plus de temps pour être réussie dans plusieurs secteurs que trois jours seulement. A part quelques exceptions, ce qui était remarquable aux piquets c’était le soutien d’un nombre d’automobilistes à la journée d’action malgré le fait qu’ils ont été longtemps bloqués. Le sentiment que tous sont attaqué par le plan pension est perceptible. Les blocages ont duré jusqu’aux environs de 10h45.


    Concentration à la tour des pensions

    Également dans la matinée s’est déroulée une concentration à la Tour des pensions. Heureusement, cela a été rejoint par une délégation nombreuse de pilotes. Ils contribuent depuis des années à une caisse supplémentaire qui rend possible la retraite anticipée à 55 ans, à hauteur de 10 % de leur salaire. Selon le PSL, cela n’est pas un luxe pour un boulot qui exige une concentration de 100%. Si le gouvernement ne change pas ses propositions, il se saisira de cette caisse. On se fâcherait pour moins que cela.

    Les militants Setca-non-marchand, bien que n’étant pas officiellement en grève, sont venus exprimer leur solidarité et distribuer de la soupe ”sans balles” ont-ils souligné. Leurs homologues de la centrale générale, qui étaient dans la rue pour les ateliers protégés il y a quelques semaines, participaient également.

    Des militants de l’enseignement et des anciens hôpitaux du CPAS se sont plaints. Impossible, disent-ils, en trois jours de temps, de mobiliser notre personnel. Nous n’avions même pas un tract, au mieux, un email a fait le tour, disent-ils. ”Comment atteindre en 3 jours de temps les 3500 membres du personnel à notre hôpital, normalement il nous faut deux semaines”.

    ”Chez nous c’est la distribution des bulletins”, nous signalaient quelques enseignants en grève. Dans les deux cas, il s’agissait surtout d’une grève de militants et de délégués.

    La grève a été sans aucun doute une première étape réussie. Il aurait été mieux de la déclarer d’abord dans certains secteurs et d’organiser dans d’autres des arrêts de travail afin d’informer et de voter formellement sur une date grève dans le courant de début janvier pour que les secteurs dans lesquels plus de trois jours est requis pour organiser une grève, puissent s’accrocher au mouvement.

    Peut-être il faut en tirer des leçons à l’approche de la grève générale du 30 janvier et cette fois-ci la préparer soigneusement. A la tour de pension, on n’a plus mentionné cette journée de  grève, mais le tract du PSL était accepté avec enthousiasme, précisément à cause de la référence dans le titre à cette importante journée. Ensuite trois cars de syndicalistes se sont rendus chez Van Quikenborne.


    Les pompiers arrosent la rue du cabinet de Van Quikenborne et le siège de Suez

    Les pompiers bruxellois ont également marqué cette journée de grève. Départs à la retraite retardés, pensions réduites, ils ont manifesté leur colère avec leurs camions et puis à coup de lances à incendie place du Trône. Ils ont d’abord arrosé abondamment de mousse la rue du cabinet de Van Quickenborne puis ils s’en sont pris au siège de Suez-Tractebel.

    Bruxelles est la seule ville ou tous les pompiers sont professionels. Avec 970 pompiers actuellement à Bruxelles, les hommes du feu souffrent d’un manque d’effectif. Voici un exemple concret de l’impact du plan pension du gouvernement Di Rupo:

    Actuellement, pour un Pompier de barème D153, pour une entrée en service à 20 ans et un départ en pension à 60, il gagne 2737 euros bruts par mois de pension, 2737 euros également s’il est entré à 25 ans et 2658 euros bruts par mois s’il est entré à 30 ans. Avec la proposition de Van Quickenborne, le premier aura une pension de 2558 euros bruts par mois et partira à 62 ans, le second aura une pension de 2220 euros bruts par mois et le troisième une pension de 1920 euros bruts, toujours en partant en pension à 62 ans.


    Action de la CNE devant le siège du PS

      Plus tard ce jeudi, nous sommes allés avec quelques centaines de membres de la CNE francophone au siège principal du PS, pour protester contre les politiques libérales que le parti mène au gouvernement.

    Le porte-parole a souligné que de nombreux membres CSC ont voté pour le PS, en espérant voter pour un parti de gauche. Les insignes PS à l’entrée ont été remplacés par des lettres bleues et une grande banderole bleue a été fixé à la façade. Des affichettes annonçaient ”je Lutte des Classes”, une allusion à la doctrine officielle que le PS a depuis longtemps oubliée, et "Le capital s’enfonce, mais pas nous”.

    Pendant un moment une vingtaine de policiers antiémeute a tenté de chasser les manifestants. Apparemment, ils ont pensé qu’ils y arriveraient sans problèmes et sans résistance. Vraisemblablement, il a fallu un appel de la part du PS pour faire reculer les agents. Une confrontation entre le syndicat et la police à la porte du PS, cela allait probablement trop loin pour ce parti.

    Entretemps le groupe n’était plus composé seulement de militants CSC, quelques collègues de la FGTB les avaient rejoints sous de vifs applaudissements. Finalement, une délégation de cinq militants a été reçue, mais après quelques minutes, elle se retrouvait à nouveau dans la rue, sans résultat. Les travailleurs n’ont plus de représentation politique.

  • Y a-t-il encore un parti qui défende nos intérêts ?

    Les partis traditionnels dévalisent les travailleurs et leurs familles

    Leterme l’avait déjà promis : on ne peut pas économiser 2-3 milliards d’euros par an sans que “la population” ne doive elle aussi mettre la main au portefeuille. Mais les 10 milliards d’euros qui devront être trouvés l’an prochain afin de ramener le déficit budgétaire à 2,8% du PIB ne pourront l’être que sur base d’une attaque drastique contre la sécurité sociale.

    Par Yan (Anvers)

    Voler aux pauvres pour donner aux riches

    Ou bien y aurait-il une alternative ? Les entreprises de notre pays ont engrangé en 2009 (année de récession !) 94 milliards d’euros de profit avant imposition, desquels elles n’ont payé que 11 milliards d’euros en impôts sur les sociétés (soit 11,8%). Est-il irréaliste de penser faire un effort à ce niveau-là ? Selon les partis traditionnels, c’est hors de question. Dès qu’on parle d’impôt sur la fortune, on nous répond que ce ne serait “pas applicable parce qu’il n’y a pas de cadastre sur la fortune”. Si les négociateurs osent ne serait-ce que soulever la question de la hausse de la taxe nucléaire à hauteur de 750 millions d’euros, le patron de GDF-Suez-Électrabel menace immédiatement de bloquer tous les investissements en Belgique. Les plus riches n’auront pas leur sommeil perturbé par l’austérité…

    En bref : les travailleurs et leurs familles payent la note, et les patrons restent hors d’atteinte. Cela fait déjà 20 ans que nous n’entendons plus aucun des partis traditionnels faire la moindre objection par rapport à cela : ‘‘Pourquoi devr-ions-nous encore augmenter l’énorme pression fiscale des entreprises ? Elles vont toutes s’en aller ! Non, nous ferions mieux de continuer à grignoter les allocations de tous ces chômeurs profiteurs, à attaquer les conditions de travail et de salaire, à réduire les pensions des fonctionnaires – qui sont d’ailleurs beaucoup trop nombreux. Ces chômeurs, ces travailleurs et ces pensionnés, eux, ne peuvent fuir nulle part.’’

    Chaque jour, nous sommes harcelés par toutes sortes d’argumentations, sans que personne n’y réponde. Si cela démontre bien une chose, c’est que nous autres, petites gens, ne disposons plus d’un parti qui se batte pour défendre nos droits, d’une formation qui fournisse une expression politique à la lutte des travailleurs d’ArcelorMittal, ou des travailleurs et travailleuses des chemins de fer. Le PSL pense qu’un tel parti, avec des syndicats combatifs, est nécessaire pour mettre fin à la casse sociale.

    C’est pourquoi nous nous sommes impliqués dès le début dans Rood!, une initiative large qui débute en Flandre autour d’Erik De Bruyn (ex-membre du SP.a), dont nous avons déjà beaucoup parlé dans ce journal. Rood! veut poser les bases pour un nouveau parti de gauche en Flandre, pour commencer, puis dans toute la Belgique. Grâce à la notoriété de son porte-parole en Flandre, en tant que socialiste reconnu, Rood! peut déjà compter sur l’intérêt de toute une série de syndicalistes, de jeunes et de travailleurs.

    Rood! a confirmé son potentiel. Remplira-t-il les attentes ?

    Le fait que Rood! ait été repris dans un récent sondage d’opinion de la Gazet van Antwerpen à propos des élections communales à Anvers a été révélateur. Le résultat de 1,1% que Rood! a reçu dans ce sondage – avant même d’avoir commencé à mener une véritable campagne publique – montre tant son potentiel que le long chemin que l’initiative a encore à parcourir. Dans le même sondage, le PTB obtenait 2,5%, ce qui n’est pas assez pour un siège au conseil communal. Pour l’instant, on dirait que le PTB refuse toute collaboration électorale sur une base égale. C’est dommage, car une concentration des forces avec d’autres militants de gauche et de syndicalistes pourrait créer une dynamique qui pourrait faire progresser de quelques pas la reconstruction d’une alternative de gauche.

    L’expérience pratique a montré que Rood! pourrait se développer en une formation qui poserait la base pour un nouveau parti des travailleurs en Belgique. Pour cela, une orientation vers le mouvement ouvrier est cruciale. Si Rood! intervient dans les mouvement de grève avec un programme qui part des besoins qui vivent dans la société, qui exige les moyens requis et qui refuse toute austérité, alors il peut devenir un facteur politique important.

    Rood! peut créer des structures démocratiques qui permettent aux syndicalistes combatifs et aux autres militants de discuter d’un programme et d’une stratégie pour les mouvements de lutte, sur base de leur propre expérience. Les mastodontes lourds et monolithiques qu’étaient les anciens partis sociaux-démocrates appartiennent au passé. Les courants politiques actuels méritent leur place dans de nouvelles formations de gauche. Le PSL veut participer à la construction de Rood! de manière loyale, tout en continuant la discussion avec toutes les personnes impliquées – sans poser d’ultimatums – quant à la nécessité d’avoir un programme qui rompe avec le capitalisme et qui ouvre la voie pour une société socialiste démocratique.

  • NON au plan d’économies de la SNCB !

    En octobre, le conseil d’administration du groupe SNCB a pris une décision quant au plan d’économies de la direction de la société de transport SNCB. Une première proposition comprenant la suppression de 300 trains et de 36 arrêts a été réduite à la suppression de 170 trains en Belgique, de 23 trains transfrontaliers et à une étude sur les arrêts. Réduire le nombre de trains, c’est réduire les prestations de conducteurs et d’accompagnateurs et, donc, le nombre de postes sera progressivement diminué. Aux guichets, on en déplorera la perte de près de 200. Un tiers du personnel dans l’administration ne sera pas remplacé et 650 postes sont menacés dans les ateliers.

    Article tiré de l’édition de novembre de Lutte Socialiste

    La direction a déclaré que 222 trains ne compensent même pas leurs frais énergétiques. Il faut dire que le contrat énergétique est très mauvais et coûte à la SNCB 10 millions d’euros de trop. Les chemins de fer sont une vache à lait pour les profits privés de Suez. La suppression de 170 trains touchera environ 2800 passagers, particulièrement des navetteurs qui travaillent en équipe et qui n’ont aucun moyen de transport public alternatif. Cela vient s’ajouter à ce que les voyageurs ont dû avaler précédemment en termes de retards et de trains annulés. Le conseil souhaite également introduire un supplément de 7 euros pour les voyageurs qui achètent leur billet sur le train. Cela ne va pas réduire la violence contre les accompagnateurs de train… Au cours du premier semestre de 2011, le nombre d’incidents avec agression sérieuse a augmenté de 15% par rapport à l’an dernier.

    La suppression des 170 trains diminuera les services fournis par la SNCB. Inévitablement, les assainissements dans les ateliers auront leurs répercussions sur le matériel, déjà problématique, avec tous les retards que cela entraînera. La SNCB veut de plus s’en prendre aux guichets et a commandé de nouveaux distributeurs de billets. Même s’ils fonctionnent mieux que les actuels, cela ne pourra jamais entièrement remplacer un être humain. Une machine ne peut répondre à aucune question. Pour les voyages internationaux, un marché ‘‘libéralisé’’, il faut déjà payer 7 euros de plus en prenant son billet au guichet et pas sur internet. Ces fermetures sont néfastes pour le service, mais cela supprimera également une présence visible des travailleurs des chemins de fer et des gares sans aucune forme de contrôle social.

    Rudi Thomaes, de la FEB (la fédéra-tion patronale belge), exhorte les négociateurs gouvernementaux à donner 910,6 millions d’euros pour sauver le groupe SNCB. Il veut aussi éviter de remplacer jusqu’à 16.000 départs en retraite. Aujourd’hui, de nombreuses catégories de personnel sont déjà confrontées à une pénurie de main-d’oeuvre. Par contre, il souhaite voir plus d’activités accordées aux sous-traitants.

    Il faut discuter de la façon d’organiser le transport de marchandises et de personnes. Quel que soit le choix, le financement doit suivre. Service public et profit sont incompatibles. La mauvaise gestion actuelle nous coûte beaucoup d’argent : l’an dernier, 210 millions d’euros ont été gaspillés en consultations externes. L’expérience actuelle du personnel est visiblement trop faible… La scission du groupe, mère de nombreux problèmes, coûtera 100 millions d’euros par an de plus en gestion et administration supplémentaires.

    Pour le second ‘‘sauvetage’’ de Dexia, l’argent public a immédiatement été disponible sous forme de garanties pour une ‘‘bad bank’’. Les profits privés doivent être sauvegardés à tout prix, contrairement aux cheminots et aux usagers. Nous sommes pour une société qui opère des choix différents. Organisons une résistance sérieuse ! Nous n’avons pas besoin d’actions qui ne font qu’évacuer un peu de pression, mais d’un plan d’action élaboré à la base et capable d’unifier le mécontentement du personnel et des voyageurs.

    Avec la logique de profit : vers 10.000 camions par jour en plus sur la route ?

    On demande au personnel du transport de marchandise de la SNCB de passer à SA Logistics. Cela ouvre la porte à une privatisation complète. Alors que Dexia est nationalisée, le fret va dans l’autre direction. Comme si le transport de marchandises par rail n’était pas une tâche de base du gouvernement…

    Le transport de marchandises par rail deviendrait limité aux éléments les plus rentables pour laisser le reste au transport routier ? Le transport ‘diffus’ (où les wagons sont d’origines diverses) est menacé. Ce transport représente 8.000 camions sur les routes en plus chaque jour. C’est extrêmement mauvais pour l’environnement, le trafic et le personnel. Mais la direction de la SNCB a l’oeil rivé sur les profits immédiats.

    La direction tient des séances d’information où le personnel peut se familiariser avec les conditions de travail et de salaire de Logistics SA. La direction demande au personnel de passer à la SA, mais ce n’est pas un véritable choix pour le personnel : le SA reprend le trafic de marchandise dans son intégralité.

    Afin d’éviter toute résistance collective, la direction met pression sur les travailleurs pour signer à titre individuel. A plus long terme, ces travailleurs doivent renoncer à leur statut pour continuer le même boulot en tant que contractuel. Dans un premier temps, le caractère statutaire restera sous une forme contestée (et probablement illégale), celle de ‘détachement’, c’est-à-dire que le personnel statutaire de la SNCB sera loué par la SA. Il est évident qu’il s’agit d’un tremplin pour un statut contractuel tout court.

    Le personnel craint qu’une nouvelle phase de la récession puisse immédiatement faire plonger Logistics, ce qui peut causer la faillite et la reprise de la division la plus rentable par un groupe étranger. On imagine très bien ce que cela signifierait en termes de conditions de travail.

    Actuellement, la pression est mise sur les travailleurs individuellement, par chantage : ne pas signer équivaut à perdre son boulot actuel, à être déplacé ailleurs dans le groupe SNCB. Mais SA Logistics ne peut pas fonctionner sans le personnel existant ! La formation de nouveaux conducteurs contractuels est coûteuse et prend du temps. Les conducteurs du transport de marchandises doivent utiliser cet élément dans la lutte collective pour le maintien de leur statut.

  • Nationalisation du secteur sidérurgique sous le contrôle des travailleurs !

    Combien de trahisons et de mensonges de la part du patronat et des autorités ? Combien de sacrifices pour les travailleurs ? Tout ça pour arriver à la fermeture ?! Voilà le mépris et l’arrogance du capitalisme. Pourquoi poursuivre avec cette logique ? Un secteur aussi vital que celui de la sidérurgie, ou encore de la finance ou de l’énergie, devrait être placé sous le contrôle démocratique de la collectivité. Pourquoi Mittal est-il en droit de définir quel sera notre avenir et celui de nos enfants ?

    Tract du PSL

    Tract en version PDF

    Le front commun syndical est allé protester auprès du formateur Di Rupo : l’Etat a pu dégager 4 milliards d’euros pour sauver les spéculateurs et les actionnaires de Dexia. Ce n’est pas la première fois que les banques profitent des caisses de la collectivité. Pourquoi l’arme de la nationalisation ne peut-elle pas être utilisée pour la sidérurgie ? Pour sauver les emplois, pas les profits des actionnaires.

    Pourquoi notre sueur doit-elle servir LEURS profits?

    Depuis la faillite des Forges de Clabecq en 1997, on a dit aux métallos que la sidérurgie était condamnée. ”Faut se faire une raison ”camarades”… Le seul espoir, c’est un repreneur privé”. Combien de fois a-t-on entendu ce refrain ? Attirer ce ”privé” passe évidemment par la flexibilité ou des concessions salariales. Et des cadeaux au patronat, on en a vu défiler. Combien d’argent est parti dans les caisses des super-riches alors que nos écoles étouffent, faute de moyens ? Et nos pensions, nos routes, nos hôpitaux ? On nous a fait payer de tous côtés, et encore une fois maintenant ?

    Il faut chercher une autre logique. ”Un âne ne butte jamais deux fois sur la même pierre”, dit le proverbe. N’entretenons aucune illusion envers le privé, il n’a pas de solution pour nous. Une seule chose peut sauver nos emplois : retirer l’outil des griffes du privé pour le placer aux mains de la collectivité. Attention, pas pour le refourguer au privé ensuite ! Pourquoi collectiviser les pertes et privatiser les profits ? Nous avons déjà connu cette situation dans les années 1980-1990, avant la vente à Usinor, avec une forte implication du gouvernement wallon, qui attendait de tomber sur un repreneur privé.

    Nationaliser : Impossible ? Et comment ?

    Pour le ministre wallon Jean-Claude Marcourt, c’est ‘‘impossible pour l’Union européenne’’. Seule une reprise de la part d’un opérateur industriel pourrait sauver la phase à chaud. Mais ArcelorMittal devrait la céder à un concurrent. Les directives européennes contre les nationalisations ont été levées en 2008 pour que les États membres courent porter secours aux banques. Pourquoi pas pour sauver l’emploi ?

    Les déclarations de Marcourt & Co illustrent qu’on ne peut pas compter sur les politiciens traditionnels pour nous aider. Si on parvenait à arracher la nationalisation par la lutte, il faudrait éviter à tout prix de laisser de tels énergumènes gérer une sidérurgie nationalisée. La manière dont est actuellement géré le public (la SNCB par exemple) est un argument massue pour dire : non merci ! Cette fois-ci, on aimerait bien que ça fonctionne…

    Nationaliser, sans rachat ni indemnité, sous le contrôle des travailleurs et de leurs familles

    L’impact de la sidérurgie sur la région est tel qu’il justifie pleinement le rachat de l’outil par les autorités. Mais pourquoi racheter ? La collectivité a suffisamment été volée par ArcelorMittal. En plus des très généreux cadeaux fiscaux, 236 millions d’euros ont été accordés pour les quotas de CO2, la Région wallonne a investi 20 millions en recherche scientifique à destination d’ArcelorMittal,… Il faut même réclamer de l’argent !

    ArcelorMittal n’est pas un évènement isolé. Partout dans le monde, les travailleurs et les jeunes entrent en action contre ce système qui n’agit qu’en fonction des profits. Ils occupent les grandes places et les gèrent sur base d’assemblées générales. Pourquoi, après l’occupation des places en Egypte, en Espagne, en Grèce, à Wall Street, ne pas commencer à occuper notre entreprise.

    La seule réponse, c’est la nationalisation du secteur entier, sans rachat ni indemnités, sous le contrôle démocratique des travailleurs et de la collectivité. Cela signifie que les métallos, qui connaissent parfaitement leur entreprise, forment un collectif de direction démocratique.

    Comment pouvons nous concrétiser cette idée ? Par une occupation de l’entreprise et par la formation d’un comité de lutte démocratique, basé sur des assemblées générales souveraines.

    IL FAUT UNE LUTTE INTERNATIONALE

    Au Luxembourg, ArcelorMittal vient d’annoncer la fermeture ‘‘provisoire’’ de l’aciérie et de l’un des deux laminoirs de Schifflange. 600 métallos vont se retrouver dans une ‘‘cellule de reclassement’’ et d’innombrables emplois seront perdus chez les sous-traitants. En France, le site de Florange-Hayange est menacé de fermeture : 1.100 ouvriers au chômage technique et au moins 400 intérimaires aux contrats résiliés. D’autres sites sont encore menacés à travers l’Europe, tandis que les conditions de travail sont attaquées partout dans le groupe.

    Aucune confiance dans le futur gouvernement !

    Leterme l’avait déjà dit : on ne peut pas économiser 2-3 milliards d’euros par an sans toucher à la “population”. Les 10 milliards d’euros qui devront être trouvés l’an prochain le seront sur le dos de notre bien-être.

    VOLER AUX PAUVRES POUR DONNER AUX RICHES

    Quelle alternative ? En 2009, les entreprises ont réalisé 94 milliards d’euros de profit avant imposition en Belgique, et n’ont payé que 11 milliards d’euros d’impôts (soit un taux de 11,8%). Est-il irréaliste de penser faire un effort à ce niveau-là ?

    Selon les quatre partis traditionnels, c’est hors de question. Dès qu’on parle d’impôt sur la fortune, ce ne serait “pas applicable parce qu’il n’y a pas de cadastre sur la fortune”. Si les négociateurs essayent de soulever la question de la hausse de la taxe nucléaire à 750 millions d’euros, le patron de GDF-Suez-Electrabel menace de bloquer tous les investissements en Belgique. Le sommeil des plus riches ne sera pas perturbé par l’austérité…

    Contre cette logique, nous avons besoin d’une bonne riposte syndicale. Le SETCa a soulevé la question d’une grève générale contre l’austérité, et c’est une excellente initiative. Mais le combat syndical doit avoir un prolongement politique.

    Cette fois-ci, le premier ministre sera PS. A quel point le programme d’économies sera-t-il différent? EN Flandre, un nouveau mouvement socialiste a été lancé : ‘ROOD!’ Cette initiative a été prise par SP.a-Rood, l’aile gauche dont le porte-parole Erik De Bruyn avait reçu 33% des votes aux élections présidentielles du SP.a en 2007. Ce groupe était arrivé à la conclusion qu’il est impossible de rendre le SP.a plus à gauche ou plus démocratique.

    Chaque jour, nous sommes harcelés par la propagande des riches, sans que personne n’y réponde. Nous ne disposons plus d’un parti qui se batte pour défendre nos droits.

    Le PSL pense qu’un tel parti, avec des syndicats combatifs, est nécessaire pour mettre fin à la casse sociale. CONTACTEZ-NOUS !

  • Résistons ensemble au démantèlement des chemins de fer publics !

    Ce mardi, plusieurs dizaines de syndicalistes se sont à nouveau réunis devant le Conseil d’Administration de la SNCB afin d’y protester contre les mesures de restructuration. La direction a décidé de supprimer 170 trains. Il est aussi question du non-remplacement d’un cheminot sur 3 et, avec la disparition de certains trains, il y aura moins d’accompagnateurs. Les syndicats estiment que 1.200 emplois sont menacés.

    Rapport et photos

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    Ces attaques contre le service de transport public cachent mal la volonté de préparer sa libéralisation. La direction assainit et tente de rendre chaque mètre de rail compétitif et rentable pour les actionnaires. En effet, l’argument mis en avant – pour ces trains supprimés notamment – est le fait qu’ils ne sont pas rentables si on regarde le coût de la ligne et le nombre de tickets vendus. Cette situation doit d’avantage mettre en cause le prix scandaleux de l’énergie pratiqué par Suez, car le but d’un service public est de permettre un accès abordable à un service de qualité, pas de maximaliser les profits aux dépends des usagers et des travailleurs du secteur.

    Lors de cette action, la direction a réappuyé sa volonté d’appliquer les nouvelles mesures. Il est maintenant temps de discuter au sein des délégations syndicales d’un plan d’action plus ferme pour faire reculer la direction.

    Ce mercredi une action de grève a également pris place à Anvers. C’est un bon point de départ pour discuter de quels types d’actions nous voulons mettre en place pour sauvegarder nos transport public.

    Les travailleurs des TEC, de De LIJN ou de la STIB sont eux aussi confrontés aux mêmes attaques: réduire les coûts pour dégager du profit. Un plan d’action travailleurs et des usagers, ensemble, est nécessaire. Il faut d’ailleurs souligner que des navetteurs et des usagers étaient présents aux deux actions devant le Conseil d’Administration de la SNCB. Solidarité!


    Photos de l’action de mercredi à Anvers


    Photos de l’action de mardi à Bruxelles

  • Luttons pour le maintien du travail statutaire et pour plus de moyens pour les services publics!

    Aujourd’hui, le conseil d’administration se réuni à nouveau pour tenter d’adopter un plan d’assainissement. La procrastination est le maître mot de ces politiciens néolibéraux qui veulent réaliser des assainissements tant que cela ne touche pas leur basse-cour électorale.

    Tract de Libre Parcours,

    A l’action du 7 octobre dernier ; nous avons vu apparaître Guido De Padt (VLD, maire de Grammont). Il ne veut pas de coupes à Grammont. Patrick Dewael, du même parti, est uniquement préoccupé par sa réélection à Tongres. Ce que comprendra le contrat de gestion n’est pas clair non plus.

    Les passagers souffrent

    Le management de la SNCB veut supprimer 302 trains, environ 8% de l’offre totale. 222 de ces trains ne pouvaient même pas compenser leur coût énergétique. Les 80 autres pouvaient le faire, mais n’obtiennent pas un taux d’occupation de 40 passagers. Il s’agit toutefois d’un contrat énergétique très mauvais. L’énergie nous a coûté € 10 millions de trop. Nous sommes devenus une vache à lait pour les bénéfices privés de Suez. Ce problème ne sera pas résolu avant que le secteur de l’énergie ne soit nationalisé.

    La suppression de 302 trains touche 6.000 voyageurs, en particulier des navetteurs qui travaillent en équipe et n’ont aucune alternative.

    La SNCB a demandé à Infrabel de geler les investissements dans 36 gares. Cela nous donne une idée de l’ampleur de l’opération d’austérité.

    Nous avons besoin d’un débat public sur le transport public de passagers et de marchandises. Cette discussion doit commencer à partir des besoins. L’argent est une question de choix.

    Plus que 1000 emplois statutaires menacés

    Le personnel roulant perdra 210 postes, un nombre similaire disparaitra des guichets. Un tiers du personnel dans l’administration ne sera pas remplacé. Cela représente un assainissement annuel de 3 millions d’euros.

    Dans les ateliers, le conseil veut imposer un régime de travail ‘plus efficace’ afin d’assainir 12 millions d’euros par an. Finalement, 650 postes à temps plein dans les ateliers seront supprimés. Les pensionnés ne seront plus remplacés.

    Descheemaecker affirme que les prix des services de Holding en termes de RH et de ICT ne sont pas conformes aux prix du marché. Il s’oppose au Holding et au statut du personnel. Il est publiquement en faveur du travail contractuel comme étant la norme.

    Stratégie de décomposition?

    Jos Digneffe de la CGSP-Cheminots a raison de dire que c’est curieux qu’on transporte chaque année plus de passagers et qu’on réalise plus de revenus, tout en connaissant encore des pertes. On croirait presque qu’il y a une intention malveillante derrière…

    Comment continuer?

    L’action d’aujourd’hui ne suffira pas. Ce plan d’austérité n’est qu’un avant-gout. Le prochain gouvernement devra assainir et il y a des appels à la vente des parties de Belga-com et de bpost qui restent encore aux mains du public.

    Nous avons besoin d’un plan d’action préparé par la base. Une première étape doit consister à élargir la résistance contre les assainissements dans le trafic intérieur de passagers au triage et aux conducteurs des marchandises.


    Demain, il y aura des actions pour le maintien du travail dans les RCC (Rail Cargo Centers, gares de triage). Dans l’accord signé par la direction de la CSC Transcom en novembre 2010, la direction garantissait la préservation de 531 postes statutaires jusqu’en 2014. La CGSP cheminots veut que ces postes soient permanents. La direction de la CGSP voit une sortie dans un triage non-discriminatoire, donc aussi pour les opérateurs privés. Mais la logique du marché lui-même est la cause de nos problèmes, il faut s’attaquer à cette logique.

  • Retour sur la crise de Suez de 1956

    Le 5 novembre 1956, les paras britanniques et français descendent sur Port Saïd, en Égypte, afin de prendre contrôle de l’accès au canal de Suez. Deux mois plutôt, devant une foule enthousiaste, le président égyptien Gamal Abdel Nasser avait déclaré : ‘‘nous défendrons notre liberté. J’annonce la nationalisation du canal de Suez.’’ Au vu des récents évènements révolutionnaires en Egypte, il est bien entendu utile de revenir sur la crise de Suez et sur le Nassérisme.

    Dossier de Dave Carr

    La Grande-Bretagne, la France et les Etats-Unis avaient refusé d’accorder à l’Égypte un emprunt pour la construction du barrage d’Assouan, un projet qui avait pour objectif de rendre l’eau disponible toute l’année, d’étendre les surfaces irriguées, d’améliorer la navigation sur le fleuve et de produire de l’électricité. Nasser a répliqué qu’il prendrait les 100 millions de dollars de revenus du canal de Suez afin de financer le projet.

    Cette nationalisation a, bien entendu, glacé le sang de l’impérialisme britannique et français. Nasser avait maintenant le contrôle d’un passage stratégique par où défilaient les stocks de pétrole arabe vers l’occident. De plus, il commençait à obtenir de plus en plus de soutien de la part des ouvriers et paysans pauvres dans toute la région. Ces mouvements menaçaient directement les régimes fantoches de différents du Moyen-Orient.

    Après 1945, les ouvriers et paysans du monde colonial étaient entrés dans un nouveau stade de leur lutte anti-impérialiste et pour la libération nationale et sociale. Les jours de la domination directe des vieilles puissances coloniales étaient désormais comptés.

    Le Premier ministre britannique Anthony Eden avait été encouragé par son gouvernement conservateur pour tenter de remettre le royaume britannique plus fortement en avant sur la scène internationale. Malgré le déclin économique et politique grandissant de l’impérialisme britannique consécutif à la seconde guerre mondiale, Eden pensait que la Grande-Bretagne pouvait jouer un rôle de premier plan dans le cours des grands évènements mondiaux. La classe dirigeante française pensait elle aussi qu’il était possible de redorer le blason de la gloire coloniale du pays. Mais l’approche brutale de l’impérialisme français au cours des guerres coloniales avait conduit à la défaite de la guerre d’Indochine et la guerre d’Algérie, déjà entamée, allait elle-aussi bientôt se solder par une cuisante défaite conduisant au retrait du pays.

    Réaction occidentale

    ‘‘Nous bâtirons ce barrage avec les crânes des 120.000 ouvriers égyptiens qui ont donné leur vie pour la construction du canal’’. Cette déclaration de Nasser avait constitué, pour les ouvriers et les chômeurs des bidonvilles du Caire et d’Alexandrie ainsi que pour la population de la région entière, une attraction énorme.

    La réaction de l’occident était prévisible. Tant au Parlement britannique qu’au Parlement français, Nasser a été comparé à Mussolini et Hitler. En Grande –Bretagne, les médias bourgeois et les parlementaires conservateurs n’avaient de cesse de parler de ‘‘Nasser-Hitler’’, tandis que les parlementaires travaillistes ou libéraux demandaient eux-aussi des mesures contre l’Égypte. Le Premier Ministre Eden ne le désirait que trop, et les avoirs du canal de Suez ont été immédiatement gelé dans les banques britanniques. Il s’agissait de presque deux tiers des revenus du canal.

    Le dirigeant du Parti Travailliste Hugh Gaitskell a soutenu le gouvernement conservateur auprès des Nations Unies, et a même déclaré qu’une intervention armée n’était pas à exclure contre Nasser. Le Premier Ministre français Guy Mollet promettait lui aussi une sévère riposte.

    Le gouvernement britannique a tout d’abord voulu montrer qu’il désirait résoudre la crise de façon diplomatique. Une conférence de 24 pays maritimes a été convoquée à Londres afin de discuter de la ‘‘menace contre la libre navigation internationale’’. Pendant ce temps, l’armée appelait les réservistes, et une grande force navale a commencé à se rassembler.

    En réponse, Nasser a lancé un appel pour une grève internationale de solidarité à l’occasion du début de la conférence. Le 16 août, des grèves massives ont donc eu lieu en Libye, en Égypte, en Syrie, en Jordanie et au Liban, ainsi que de plus petites actions de solidarité au Soudan, en Irak, en Tunisie et au Maroc. Partout, les ambassades britanniques et françaises étaient assaillies par des manifestants.

    La conspiration

    Le président américain Eisenhower, en pleine campagne électorale, a refusé de soutenir toute intervention militaire franco-britannique. L’impérialisme américain était en fait engagé dans un bras de fer avec les impérialismes français et britanniques pour gagner de l’influence dans le Moyen-Orient et en Afrique du Nord.

    Le prétexte servant à intervenir en Égypte a été une intervention israélienne armée dans le Sinaï, négociée au préalable avec les gouvernements français et britanniques. Les troupes britanniques et françaises sont ensuite venues s’interposer entre les troupes israéliennes et égyptiennes pour ‘‘protéger’’ le canal de Suez.

    Les représentants des gouvernements israéliens, français et britanniques s’étaient réunis secrètement le 24 octobre dans le voisinage de Paris, à Sèvres, et un pacte avait été conclu lors de cette réunion. Le Ministre des Affaires étrangères britannique, Anthony Nutting, a plus tard ouvertement expliqué que l’intervention britannique faisait partie d’une ‘‘conspiration commune avec les Français et les Israélien’’. Les Protocoles de Sèvres stipulaient que ‘‘L’État hébreu attaquera l’Égypte le 29 octobre 1956 dans la soirée et foncera vers le canal de Suez. Profitant de cette agression ‘surprise’, Londres et Paris lanceront le lendemain un ultimatum aux deux belligérants pour qu’ils se retirent de la zone du canal. Si l’Égypte ne se plie pas aux injonctions, les troupes franco-britanniques entreront en action le 31 octobre.’’

    Israël a utilisé le prétexte d’attaques transfrontalières de Palestiniens et du fait que le port d’Eilat avait été fermé par Egyptiens, et sont donc passé à l’offensive le 29 octobre. Le lendemain, comme convenu, les Français et les Britanniques lançaient un ultimatum commun pour imposé aux deux pays de se retirer à une quinzaine de kilomètres du canal.

    L’Égypte a bien entendu refusé cet ultimatum hypocrite. Les troupes britanniques et françaises sont donc intervenues. Les aéroports égyptiens ont été attaqués et, le 5 novembre, la zone de canal a été envahie. 1.000 Egyptiens, principalement des civils, sont décédés lors de l’invasion de Port Saïd.

    La défaite

    Le mouvement ouvrier s’est mobilisé contre cette intervention et, à Londres, une grande manifestation s’est tenue à Trafalgar Square. Lorsque les manifestants sont parvenus aux environs de Downing Street, où réside le Premier Ministre, des confrontations avec la police ont eu lieu.

    Au même moment, une révolte ouvrière éclatait en Hongrie, contre la dictature stalinienne, et cette révolte a été écrasée par les tanks soviétiques. Le même jour, l’Égypte était envahie.

    Les conséquences internationales ont été extrêmes. Les plupart des pays arabes ont rompu leurs relations diplomatiques avec la Grande-Bretagne et la France. Le pipeline britannique de Syrie a été saboté et l’Arabie Saoudite a bloqué les exportations pétrolières destinées à la Grande-Bretagne tandis que les USA exigeaient un retrait d’Égypte. L’Union Soviétique menaçait elle aussi de représailles.

    La faiblesse économique et politique de l’impérialisme britannique a été révélé au grand jour à la lumière de ces évènements. Le canal de Suez a été bloqué, des navires coulés. Très vite, l’essence a dû être rationnée en Grande Bretagne. De leur côté, les Etats-Unis ont refusé d’accorder un emprunt au pays, et ont empêché le gouvernement britannique d’en avoir un de la part du FMI. La Livre britannique a chuté, et ses réserves de monnaie étrangères ont rapidement été épuisées.

    Après six semaines, les troupes britanniques et françaises ont dû quitter l’Egypte, en pleine déroute, de même que les troupes israéliennes. Nasser est apparu comme le grand vainqueur qui avait humilié l’impérialisme. En Grande Bretagne, le Premier Ministre Eden a été brisé politiquement et moralement, et a dû démissionner.

    Après la crise de Suez, le processus révolutionnaire dans la région a connu un nouveau dynamisme.

    Qu’est ce que le nassérisme?

    Nasser est parvenu au pouvoir après un coup d’Etat militaire contre le monarque corrompu Farouk, renversé en 1952. Le Roi Farouk était une marionnette de l’occident, et plus particulièrement de l’impérialisme britannique.

    A ce moment, 6% de la population du pays détenait 65% des terres cultivables tandis que 72% de la population devait se contenter de seulement 13% de la terre. Il y avait des millions de paysans sans terre ou de chômeurs, obligés de vivre dans les bidonvilles du Caire et d’Alexandrie. Les occupations de terres et les grèves s sont développées, mais aucune formation politique des travailleurs n’était en mesure de conduire les ouvriers et les paysans dans la lutte pour le pouvoir. Le colonel Nasser a profité de ce vide politique.

    Ce dernier a opéré diverses réformes, tout en laissant le capitalisme intact. Il recourait à une rhétorique socialiste afin d’obtenir le soutien des ouvriers, mais n’a en même temps pas hésité à arrêter et à faire fusiller des dirigeants de grève. Il désirait recevoir l’appui des puissances occidentales, mais s’est finalement appuyé sur la bureaucratie soviétique en contrepoids contre l’impérialisme. Cet exercice d’équilibre dans son propre pays et face aux pouvoirs étrangers a assuré qu’il devienne un dictateur avec des caractéristiques de type bonapartiste.

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