Tag: Socialist Party

  • Le député européen Paul Murphy dénonce l’homophobie

    Le Parlement européen vient de connaître un débat sur l’homophobie et le mariage homosexuel. L’eurodéputé Paul Murphy (élu de notre parti frère irlandais le Socialist Party) a dénoncé l’homophobie institutionnalisée, notamment le fait que la télévision publique irlandaise RTE ait versé une indemnité à des célébrités Irlandaises dénoncées comme homophobes par l’artiste Rory O’Neill.

  • Angleterre : Des étudiants chassent le Secrétaire d’État à l’Éducation

    Rowan Atkinson, chez nous, est surtout connu pour son rôle légendaire de Mr Bean. Sa carrière ne se limite toutefois pas à ce personnage désopilant. A côté de l’Inspecteur Fowler, un autre de ses grands succès est hélas moins connu dans le monde francophone, celui de la Vipère Noire (Blackadder), série qui a précédé le personnage de Mr Bean. Pour le secrétaire d’Etat, ce fameux et hilarant personnage d’Edmund Blackadder serait à proscrire… car il nuit à la mémoire de la ‘‘noble cause’’ de la première guerre mondiale !

    Basé sur un article de Chris Moore, Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles)

    Cette série qui a marqué les années ‘83 à ‘89 raconte l’histoire d’Edmund Blackadder et de son domestique Baldrick à travers les âges, de 1485 à 1917. Chaque saison suit ces deux anti-héros dans une époque différente où ils sont les descendants des personnages de la saison précédente. Et il est entre autres question de la première guerre mondiale, autour du capitaine Edmund Blackadder et du soldat Baldrick. A leur côté se trouve notamment le lieutenant George, joué par l’acteur Hugh Laurie qui connaîtra plus tard une renommée mondiale sous les traits du docteur House.

    Pour Michael Gove, cette série est une arme aux mains des ‘‘historiens de gauche’’ qui l’utilisent comme propagande dans leurs leçons sur la Grande Guerre. C’est que cette dangereuse bande de comiques-révolutionnaires dénigre le patriotisme et le courage britanniques, dépeignent la grande boucherie mondiale comme une ‘‘pagaille illégitime’’ alors qu’il s’agissait en fait d’une ‘‘noble cause’’. Des propos pareils, on n’a pas fini d’en entendre à l’occasion des commémorations des 100 ans du début de la guerre… Mais il faut reconnaître que la série ne présente vraiment pas l’impérialisme britannique de la manière qui sied à la classe dominante. Le capitaine Blackadder explique ainsi notamment qu’il a participé à diverses campagnes en Afrique avant la première guerre mondiale à un moment où ‘‘le prérequis pour toute bataille était que l’ennemi ne porte d’arme à feu en aucune circonstance’’. C’est dire s’il était préparé à partir diriger les troupes sur le front… L’absurdité de la Grande Guerre est passée à un humour acide de cet acabit tout au long des épisodes.

    En ayant tenu de tels propos, après coup, le secrétaire d’Etat a probablement dû regretté d’avoir précisément décidé de visiter une école bien particulière, celle d’un étudiant qui a connu une certaine notoriété en jouant le rôle… du Capitaine Darling, le rival de Blackadder ! Et plus d’une heure durant, les élèves de Marling ont chassé le politicien conservateur dans les locaux de l’école. Bien entendu, il n’était pas question que de cette histoire – qui n’est somme toute qu’une illustration de ce qui se cache dans le crâne du triste personnage – c’est la politique du gouvernement concernant l’enseignement qui était la cible de la colère des élèves. C’est ce qu’a illustré l’une d’entre eux, Janneke Bax-Pratt, qui a précisé : ‘‘L’enseignement ne devrait pas être élitiste, il devrait être accessible à tout le monde, c’est pour ça que je proteste.’’

    C’est ainsi que des centaines d’élèves ont attendu de pied ferme l’un des membres les plus méprisés du cabinet de coalition au pouvoir, qui regroupe les Libéraux-démocrates et les Conservateurs. Le secrétaire d’Etat a même dû se réfugier dans une salle de classe avec quelques officiels et le député conservateur local, tandis que les élèves encerclaient le bâtiment en scandant ‘‘Gove dégage !’’.

    Quelques enseignants ont bien tenté de repousser les étudiants lorsqu’ils parvenaient trop près de Gove, mais ils n’ont su résister à la vague de jeunes déterminés à faire entendre la voix de leur colère. D’autres membres du corps enseignants ont adopté une autre approche, bien plus sympathique envers les élèves… Plusieurs parmi eux ont approuvé la proposition du Socialist Party (parti-frère du PSL en Angleterre et au Pays de Galles) de soutenir leurs étudiants et de construire des liens au travers de cette action de protestation en vue des prochaines actions que les enseignants devront eux-mêmes mener contre les futures attaques qui frapperont les conditions de travail et de salaire des enseignants.

    Janneke a parlé au nom de nombreuses personnes en disant : ‘‘Gove est pathétique et lâche; il devrait avoir le courage de venir et de parler aux élèves.’’ Will, un autre élève, a ajouté : ‘‘pourquoi Gove ne coupe-t-il pas dans son salaire à la place de s’en prendre à notre enseignement et à notre avenir ?’’

    La politique du gouvernement vise à promouvoir un enseignement élitiste qui se limitera à apprendre aux élèves à régurgiter la matière. Du point de vue de ces gens-là, pourquoi donc dépenser de l’énergie et de l’argent pour un enseignement de qualité pour tous alors qu’il n’y a de toute façon pas d’emploi décent pour tous les diplômés ? Finalement, jamais dans toute sa carrière Rowan Atkinson n’aura réussi à atteindre le degré d’absurdité de cette société…

  • [film] Noël 1914 – Quand les soldats ont cessé de se battre

    Un petit antidote contre la désinformation autour de la Première Guerre Mondiale que la classe dirigeante va répandre

    Nous sommes à l’aube du centième anniversaire de la Première Guerre Mondiale et la classe dirigeante britannique et ses scribes dans les médias vont libéré une nauséabonde avalanche de propagande chauviniste afin de masquer la réalité derrière cette guerre. C’est un bon moment pour revoir sur le film Joyeux Noël, un film semi-factuel datant de 2005 retraçant la trêve de Noël 1914 à travers les yeux de soldats français, écossais et allemands.

    Jimmy Haddow, Socialist Party

    Le film est essentiellement centré sur six personnages: Gordon (officier de la Royal Scots Fusiliers), Audebert (officier français réticent qui est également fils et petit-fils de membres de l’état-major français), Horstmayer (officier allemand juif), Palmer (prêtre écossais officiant comme brancardier) et un soldat qui est chanteur d’opéra allemand ainsi que sa partenaire et compagne danoise. L’acteur écossais qui joue le rôle du prêtre, le père Palmer, est Gary Lewis, qui a déjà joué le rôle du père du jeune Billy Elliot dans le film du même nom. Avant de devenir acteur, il était membre de Militant, le prédécesseur du Socialist Party Scotland (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Ecosse), et avait entre autres été fortement impliqué dans la grève des mineurs de 1984 et dans d’autres batailles de la classe ouvrière des années ’80.

    Le 28 juin 1914, un étudiant nationaliste serbe assassina l’héritier du trône austro-hongrois, l’archiduc François-Ferdinand d’Autriche, lors d’une visite d’Etat à Sarajevo, en Bosnie. Cinq semaines plus tard, à partir du 4 août, l’Autriche, la Russie, l’Allemagne, la France et la Grande-Bretagne étaient en guerre, tous les politiciens capitalistes des pays belligérants et leur presse ne cessant de répéter que le conflit serait terminé pour la Noël. Ce fut loin d’être le as, la guerre a causé un nombre de morts estimé à dix millions au cours de quatre années de bain de sang industrialisé.

    Quelles causes derrière la guerre?

    L’assassinat de l’archiduc qui a servi de prétexte officiel à la guerre était en fait quasiment sans conséquence en tant que tel. Les véritables causes derrière le conflit étaient économiques : un combat pour les matières premières, les colonies et les marchés d’Asie, d’Afrique et d’ailleurs entre la Grande-Bretagne, l’Allemagne, la France et même la ”petite Belgique”. Cela, combiné à la croissance du capitalisme en Europe de l’Est et du Sud-Est, a soulevé la question de l’autodétermination nationale des peuples balkaniques en Etats nationaux. Le tout ensemble a assuré que la situation était explosive en 1914.

    Chaque pays belligérant s’est drapé de couleurs patriotiques. Le film Joyeux Noël commence d’ailleurs avec des scènes d’écoliers récitant des discours patriotiques en faisant l’éloge de leurs pays respectifs et en condamnant leurs ennemis. En Ecosse, deux jeunes frères sont engagés à combattre, suivis de leur prêtre, le père Palmer. En Allemagne, un chanteur d’opéra est interrompu pendant une représentation par un officier allemand lui annonçant qu’il était appelé à servi dans l’armée. L’officier français se penche quant à lui sur une photo de sa femme enceinte qu’il a dû laisser derrière lui dans la partie de la France occupée par l’Allemagne.

    À Noël, la guerre s’était stabilisée avec une sorte de ”rideau de fer” de tranchées qui s’étendaient de la frontière suisse à la mer du Nord. Quelques jours avant Noël, les Écossais et les troupes françaises, dans Joyeux Noël, menèrent un assaut combiné sur les tranchées allemandes en France. L’attaque provoqua de lourdes pertes des deux côtés, sans toutefois parvenir à rompre l’impasse de la guerre de tranchées. L’un des deux frères écossais est mortellement blessé lors de l’assaut et son frère, Jonathan, est contraint de l’abandonner en plein no man ‘s land. Dans la confusion du retrait, l’officier français perd son portefeuille, comprenant la photo de sa femme, dans la tranchée allemande.

    Pendant ce temps, la chanteuse d’opéra danoise, Anna, bien connue dans les cercles supérieurs de la classe dirigeante allemande, obtient l’autorisation d’effectuer un récital de Noël pour le prince héritier Guillaume de Prusse. Son amant allemand, le soldat Sprink, est retiré du front et reçoit la permission de l’accompagner. Ils passent une nuit ensemble et effectuent leur représentation. Ensuite, Sprink exprime son amertume dans le confort du siège de l’état-major et décide de revenir au front chanter pour les troupes. Sprink s’oppose tout d’abord à la décision d’Anna de l’accompagner, mais finit par accepter. Là, le réalisateur et auteur Christian Carion a utilisé sa licence artistique, car il semble n’y avoir aucune trace de femme civile au front en 1914.

    La trêve officieuse

    La trêve officieuse est initié lorsque les Ecossais commencent à chanter des chansons fête, accompagnés à la cornemuse, sous al direction du père Palmer. Les chanteurs d’opéra arrivent alors sur la ligne de front allemande et Sprink chante pour ses camarades. Alors que Sprink chante Douce Nuit, il est accompagné par un joueur de cornemuse de la ligne de front écossaise. Sprink répond au joueur de cornemuse et quitte sa tranchée avec un petit arbre de Noël.

    Suivant l’exemple de Sprink, les officiers français, allemands et écossais se rencontrent ddna sle no man ‘s land et se mettent d’accord pour un cessez-le feu à l’occasion de cette soirée. Les différents soldats se rencontrent et se souhaitent Joyeux Noël, Frohe Weihnachten, et Merry Christmas. Ils échangent du chocolat et du champagne, se montrent des photographies de leurs proches et évoquent leurs souvenirs d’avant-guerre. Palmer et les Ecossais célèbrent une brève messe pour les soldats (en latin comme c’était alors le cas dans l’Église catholique) et les soldats se retirent profondément émus. Jonathan reste cependant totalement insensible aux événements, toujours sous le coup de la mort de son frère.

    Le jour de Noël, les officiers prennent leur café ensemble et décident d’enterrer leurs morts. Plus tard, les deux camps jouent un match de football l’un contre l’autre – un événement qui a historiquement eu lieu ce jour-là. Le lendemain, après s’être abrités de tirs d’artillerie des deux côtés, les commandants décident qu’il est temps pour chacun de suivre son propre chemin. Les soldats français, écossais et allemands doivent maintenant faire face aux conséquences inévitables des décisions de leurs supérieurs. Alors que les Allemands reviennent dans leurs tranchées, les chanteurs d’opéra Sprink et Anna restent avec les Français et demandent à l’officier français de les faire prisonniers, afin qu’ils puissent rester ensemble.

    Dans le film, comme dans la vraie vie, les soldats ont écrit des lettres à leurs proches, et l’élite militaire et politique de chaque pays a lancé une vague de répression. Une lettre d’un soldat des Gordon Highlanders affirmait que les Allemands en avaient marre de la guerre tout comme lui et qu’ils disaient avoir été trompés par le Kaiser sur les raisons de la guerre. Un autre soldat du Seaforth Highlanders a dit à ses parents qu’ils avaient eu un cessez-le feu de trois jours à Noël et que des soldats bavarois lui avaient dit qu’ils étaient fatigués de la guerre, que cela ne leur profiterait d’aucune manière et qu’ils étaient socialistes.

    Les états-majors de toutes les nations ont vu de grands dangers dans cette fraternisation et des directives sont arrivées pour y faire face. Le Général Forrestier-Walker de l’armée britannique a publié un édit interdisant la fraternisation, car ”cela décourage les initiatives du commandement et détruit l’esprit offensif dans tous les rangs (…) des rapports amicaux avec l’ennemi, des armistices non officielles et l’échange de tabac et d’autres équipements, pour tentant et parfois amusant qu’ils soient, sont absolument interdits.”

    Le Père Palmer est ensuite renvoyé à sa propre paroisse et son bataillon démantelé en marque de honte. Malgré le fait qu’il ait souligné l’humanité et la bonne volonté de la trêve, il est réprimandé par son évêque écossais, qui prêche ensuite un sermon anti-allemand pour les nouvelles recrues, dans lequel il décrit les Allemands comme le Mal et commande aux recrues de tuer chacun d’entre eux. Le Père Palmer surprend ce sermon et retire la croix chrétienne qu’il portait au cou.

    Le dégoût envers le commandement politique et militaire

    De retour dans les tranchées, les Ecossais sont commandés par un major furieux et irrité par la trêve. Il ordonne de tirer sur un soldat allemand qui entre dans le no man’s land et le traverse vers les lignes françaises. Les soldats refusent de le tuer et tirent un coup de semonce au-dessus de sa tête. Encore une fois, un grand nombre de lettres envoyées à l’arrière ont mentionné ce type d’action, des deux côtés du fil de fer barbelé. Mais Jonathan tire sur l’Allemand pour venger la mort de son frère, le blessant mortellement.

    La punition de l’officier français, Audebert, est d’être envoyé à Verdun, il reçoit aussi une sévère engueulade de son général de père. Mais le jeune Audebert n’exprime aucun remord pour la fraternisation qui a pris place sur le front, et parle de son dégoût pour les commandants militaires et politiques qui parlent de sacrifice, mais ne savent rien de la lutte dans les tranchées.

    Horstmayer et ses troupes,confinés dans un train, sont informés par le prince héritier qu’ils constituent une honte pour l’armée allemande et qu’ils doivent être expédiés au front de l’Est, sans la permission de voir leurs familles lors de leur passage à travers l’Allemagne. Il piétine alors l’harmonica d’un soldat et déclare que Horstmayer ne mérite pas sa Croix de Fer. Au départ du train, les Allemands commencent à fredonner un chant écossais qu’ils ont appris des Ecossais.

    Laissons le dernier mot à Lénine, l’un des dirigeants du parti marxiste bolchevique et co-dirigeant de la révolution russe d’Octobre 1917. Lorsqu’il a entendu parler de la Trêve de Noël, il a déclaré que, s’il y avait des organisations prêtes à se battre pour une telle politique parmi les soldats de toutes les nations belligérantes, il pourrait y avoir une fin rapide de la guerre en faveur de la classe ouvrière et des pauvres . Il avait écrit: «Essayez d’imaginer Hyndman, Guesde, Vandervelde, Plékhanov, Kautsky et le reste [les dirigeants des partis sociaux-démocrates et ouvriers qui ont soutenu la guerre] qui, au lieu d’aider la bourgeoisie (ce dans quoi ils sont maintenant engagés), formeraient un comité international d’agitation pour la fraternisation et pour l’établissement de relations amicales entre socialistes de tous les pays belligérants, à la fois dans les tranchées et parmi les troupes en général. Que seraient les résultats dans quelques mois?”

    Joyeux Noël, Christian Carion, 2005, 116 mins – disponible en DVD

  • "Ce gouvernement n'est qu'un gang de charlatans"

    Au Parlement irlandais, notre camarade le député Joe Higgins (Socialist Party, CIO-Irlande) a dénoncé le gouvernement et a appelé à un boycott de masse de la nouvelle taxe sur l'eau.

  • USA : Trois candidatures marxistes à Boston, Minneapolis et Seattle

    L’austérité et les coupes budgétaires se multiplient et s’abattent partout aux Etats-Unis. Au niveau local, ce sont les politiciens locaux qui appliquent loyalement l’agenda néolibéral des grandes entreprises et sabrent dans les services publics. Manifester contre ces attaques n’est pas suffisant, il faut également défier ces politiciens capitalistes aux élections dans le cadre de la discussion concernant la représentation politique de la classe ouvrière. Le 6 novembre prochain se dérouleront des élections locales aux USA, et nos camarades de Socialist Alternative déposeront trois candidats.

    Par Joshua Cohen, Socialist Alternative (CIO-USA)

    Des candidats de Socalist Alternative participeront aux élections des conseils communaux de Boston, Minneapolis et Seattle. Chacun d’eux base ouvertement son programme sur le socialisme, la construction des mouvements sociaux et le soutien aux luttes, en totale indépendance des Démocrates et des Républicains. Leurs campagnes aideront à populariser l’idée d’une politique indépendante de la classe ouvrière, basée sur la défense de ses intérêts propres, à développer le soutien en faveur d’une telle politique et à instaurer une pression sur l’establishment capitaliste local.

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    En novembre dernier, notre camarade Kshama Sawant s’était présentée dans le district de Seattle, dans l’Etat de Washington, contre le Président de la Chambre des Représentants de l’Etat de Washington. Elle avait obtenu le score historique de 27%.

    Les directions syndicales, les libéraux de gauche et d’autres estiment que de telles campagnes locales auraient plus d’impact en collaborations avec les Démocrates. Ils pensent donc que se présenter comme étant ouvertement séparés du Parti Démocrate en tant que candidats de Socialist Alternative est inutile.

    Pourquoi dès lors ne pas rechercher le soutien des diverses sections locales du Parti Démocrate ? Il est vrai qu’elles sont relativement démocratiques (et souvent largement progressistes) et que leur soutien pèse beaucoup dans la balance électorale car elles peuvent mobiliser des activistes dans chaque quartier tout en bénéficiant du soutien d’électeurs qui votent régulièrement aux élections locales.

    Mais ces sections locales n’existent qu’afin de fabriquer de futurs carriéristes. Elles fonctionnent sur le modèle du népotisme ; les rejoindre ne relève pas d’un choix politique mais d’un choix de carrière. Elles ouvrent des portes. Ces gens s’opposent avant tout aux candidatures indépendantes car elles menacent leurs connexions personnelles avec les candidats qui, en retour, leur offrent un emploi, un diplôme ou d’autres avantages.

    Un outil pour les grandes entreprises

    A l’échelle nationale, Obama et les Démocrates continuent de travailler en parallèle avec leurs alliés du privé, en s’attaquant à la sécurité sociale, à la santé et à l’éducation publique, en expulsant les immigrés (plus que n’importe quel autre président auparavant), et en cherchant à faire du profit dans les soins de santé.

    Le Parti Démocrate est dominé par les intérêts capitalistes. Des organisations telles que le récemment dissout Democratic Leadership Council existent avant tout pour soutenir des candidats favorables aux grandes entreprises face à ceux qui pourraient nuire aux résultats électoraux du Parti Démocrate et donc l’empêcher de promulguer ses mesures néolibérales.

    En parallèle avec les politiciens nationaux, les gouverneurs et les maires tant républicains que Démocrates appliquent les coupes budgétaires les plus violentes et immédiates. Dans le Massachusetts (où se situe la ville de Boston, NDT), le gouverneur démocrate Deval Patrick s’est ouvertement vanté d’avoir fait accepter des baisses salariales aux syndicats (Boston Globe, 18/12/2009).

    Seattle : Kshama Sawant

    Minneapolis : Ty Moore

    Boston : Seamus Whelan

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    Au niveau local, la majorité des districts sont sous le monopole d’un seul parti. La plupart des grandes villes comme Minneapolis, Seattle et Boston sont complètement dominées par le Parti Démocrate. A Seattle, par exemple, aucun Républicain n’a été élu au conseil municipal depuis 1991 !

    Quand des syndicalistes, des activistes ou des progressistes se présentent comme candidats ou décident de défier le statuquo aux primaires démocrates, ils se heurtent à un réseau de vieux potes qui repousse tout changement et menace les nouveaux candidats : ‘‘Si vous n’acceptez pas nos règles, on ne vous fera pas de quartiers.’’

    Malgré cela, certains militants ouvriers, dont des syndicalistes et des activistes progressistes, parviennent parfois à remporter des élections locales face aux Démocrates. Bien que Socialist Alternative ne soutienne pas les Démocrates, nous cherchons à œuvrer avec tout militant authentique de la classe ouvrière. Nous en appelons donc à ces progressistes au sein du Parti Démocrate : libérez-vous du piège de ce parti qui vous traque sans cesse, et œuvrez avec nous pour construire un nouveau parti indépendant de la machine électorale capitaliste et des pots-de-vin !

    Les candidats de Socialist Alternative se présentent ouvertement en tant que socialistes et marxistes pour donner un écho à la défense des intérêts de la classe ouvrière et instaurer un maximum de pression sur l’establishment pour décrocher des avancées en faveur des travailleurs et de la jeunesse.

    Cela demande que les candidats se démarquent des Démocrates et de leur programme néolibéral. Même dans des villes comme Boston et Seattle, où une longue histoire de monopole politique a mené à des élections non-partisanes, c’est-à-dire où les affiliations aux partis ne sont pas listées sur le bulletin de vote, il est nécessaire de revendiquer clairement notre indépendance face au Parti Démocrate qui contrôle totalement ces villes dans l’intérêt des riches et des puissants.

    Si une campagne vise vraiment à construire des mouvements, elle doit être sérieuse quant à son programme et à ses organisations. A Minneapolis, notre camarade Ty Moore est un militant bien connu d’Occupy Homes, et il utilise cette campagne pour donner plus de visibilité au mouvement Occupy Homes, en luttant ouvertement contre les politiciens responsables des expulsions et des saisies.

    Boston : cas d’école d’un monopole politique

    Pendant 20 ans, le maire de Boston Thomas Menino est resté au pouvoir grâce à une stratégie simple : récompenser ses amis, et attaquer sans répit ses adversaires. En 2009, le progressiste Démocrate Sam Yoon l’a défié. A la suite de sa défaite, il a dû quitter Boston pour trouver du travail. Il était considéré comme ‘‘radioactif’’ par les employeurs locaux, qui craignaient des représailles de Menino s’ils employaient son adversaire (Boston Phoenix, 27/06/2010).

    Boston est contrôlé d’une main de fer par le Parti Démocrate. La machine du parti est divisée en quartiers et en circonscriptions, et contrôle l’argent et les ressources humaines nécessaires pour faire élire n’importe quel politicien en ville. Ce pouvoir n’est pas échu aux branches locales de l’organisation, mais bien à ses dirigeants, et ce depuis les 20 ans au pouvoir de Tom Menino.

    L’Alternative Socialiste

    Le mouvement Occupy a été l’occasion pour de nombreux jeunes de participer à leurs premières actions. Il a révélé la colère que génère l’inégalité de la société américaine et a donné un nouveau souffle au militantisme et à la lutte contre l’injustice. Des sujets tels que la dette étudiante, les saisies de domicile, la destruction de l’environnement, le déclin des écoles publiques, le sous-financement des transports publics, les bas salaires, et d’autres préoccupations de la classe ouvrière ont été exposées et combattues.

    Trois candidats de Socialist Alternative se présentent aux élections municipales en 2013. Ces campagnes sont un outil pour mettre en avant les luttes pour les revendications soulevées lors du mouvement Occupy et pour répandre les idées du socialisme parmi des milliers d’autres personnes.

    Aucun acquis social ne nous a été cédé sans que la classe ouvrière se soit battue. Les week-ends, la semaine de travail de 40 heures (constamment menacée), l’assurance-santé à charge de l’employeur, l’enseignement public, l’abrogation des lois de Jim Crow (sur la ségrégation raciale) sont autant d’héritages des luttes de masse de la jeunesse et des travailleurs. Seule une stratégie impliquant des manifestations massives, des actions de désobéissance civile, des grèves et des occupations peut protéger et améliorer nos conditions de vie au travers de la lutte.

    Présenter des candidats ayant participé à ces luttes est une tactique utile pour construire des mouvements. Utiliser les campagnes électorales et, en cas de succès, nos élus comme des plateformes peut aider à diffuser les idées du mouvement au plus grand nombre, et à le maintenir lors des périodes creuses.

    En Irlande, Joe Higgins a d’abord été élu en tant que socialiste à un poste de représentant local à la suite d’une campagne contre une taxe sur l’eau, quand le gouvernement irlandais tentait d’étouffer la population sous les taxes. Depuis, il a été élu et réélu au Dail (parlement irlandais) en tant que membre du Socialist Party (CIO-Irlande) sur base de son combat ininterrompu lors de cette campagne et de bien d’autres. Sa position et son soutien affirmé aux luttes ont apporté une énorme visibilité aux mouvements.

    Socialist Alternative se bat pour la création d’un nouveau parti basé sur les mouvements sociaux et les travailleurs, et refuse l’argent du privé. Un tel parti devrait être contrôlé démocratiquement par ses membres et accepter l’alliance en son sein de différentes tendances de gauche.

    Tant que les travailleurs et les jeunes s’intéresseront aux élections, les militants devront s’engager activement dans cette arène limitée, sur la base de la lutte pour les intérêts de la classe ouvrière et de tous ceux exploités par le capitalisme. Le Parti Démocrate détient le plus abject record d’attaques sociales, autant aux niveaux local que national, et il devrait être jeté aux ordures pour lutter contre la dictature des marchés.

    En construisant l’opposition de gauche indépendante la plus forte possible pour défier les Démocrates aux élections locales de 2013, nous pouvons aider à tracer le chemin vers la création d’un nouveau parti qui représenterait les intérêts de la classe ouvrière et de tous les ennemis du capitalisme.

    Un tel parti, aux côtés de mouvements de masse dans la rue, représenterait un énorme bond en avant pour vaincre les forces de l’austérité et du capitalisme.

  • [DOSSIER] Turquie : Une ‘‘violence guerrière’’ pour écraser le mouvement – Leçons d’une lutte de masse

    ‘‘Violence guerrière’’, c’est ainsi que le comité ‘‘Solidarité Taksim’’, qui coordonne 127 groupes en opposition au Premier Ministre Erdogan, a décrit les actes de la police qui a pris d’assaut et nettoyé le Parc Gezi, près de la Place Taksim à Istanbul. Mais les nouvelles couches de travailleurs, de jeunes et de pauvres qui sont entrées en scène se sont promises : ‘‘ce n’est qu’un début, continuons le combat’’

    Kai Stein, CIO

    "Sur la place, un concert d’un artiste renommé était donné, avec des centaines de personnes et de familles, dans une ambiance festive. Tout à coup, la police est arrivée de toutes parts avec des canons à eau et du gaz lacrymogène’’, a raconté Martin Powell-Davis, un membre de l’exécutif du syndicat des enseignants britannique (NUT) et également du Socialist Party (section du CIO en Angleterre et au Pays de Galles et parti-frère du PSL). Il faisait partie d’une délégation de syndicalistes qui s’était rendue au Parc Gezi en solidarité. Des milliers de personnes s’étaient pacifiquement réunies dans le coeur de la ville après plus de deux semaines de manifestations.

    La police, venue de tout le pays par bus, a violemment mis fin à l’occupation pacifique qui avait commencé le 31 mai dernier. Ils ont fait usage de balles en caoutchouc, de grenades assourdissantes et de gaz lacrymogènes ; ils ont même mené des attaques dans les hôtels autour de la Place Taksim qui étaient utilisés comme hôpitaux d’urgence et comme refuges. Erdogan s’est vanté plus tard d’avoir donné l’ordre d’attaquer.

    Ce mouvement de protestation de masse avait commencé en s’opposant à un projet immobilier qui nécessitait d’abattre les arbres d’un parc pour faire place à un centre commercial et à des baraquements militaires de style ottoman. La répression qui s’est abattue sur le mouvement avait déclenché un soulèvement de centaines de milliers de personnes à travers toute la Turquie. Des manifestations ont eu lieu tous les jours, avec des occupations de places et des actions locales. Les 4 et 5 juin, le KESK, la fédération syndicale du secteur public, avait appelé à une grève du secteur public contre la violence policière. Le 16 juin, une grève avait encore été lancée contre la brutalité policière pour vider l’occupation principale à Istanbul, cette fois également soutenue par le DSIK (la fédération syndicale de gauche, qui compte plus de 300.000 membres et est l’une des 4 principales fédérations), mais aussi par bon nombre de groupes professionnels représentant les médecins, les ingénieurs et les dentistes.

    Plus de deux semaines durant, la police anti-émeute a essayé de réduire les manifestants au silence. Le 15 juin, l’association des médecins turcs a rapporté que 5 personnes avaient été tuées, 7.478 blessées, dont 4 gravement ; dix personnes avaient perdu un oeil, touchées par les grenades lacrymogènes de la police.

    Le mouvement est sur le déclin

    Cependant, malgré la forte répression et les arrestations, la résistance est toujours présente. Les gens arrivent sur les places en manifestations silencieuses. Cela illustre la forte détermination des militants et le dégoût de la violence d’État.

    Ces nouvelles brutalités peuvent redonner un nouveau souffle aux manifestations. Il est très probable qu’une nouvelle période de l’histoire sociale du pays s’ouvre sur base des conclusions à tirer du mouvement. Sosyalist Alternatif (la section du CIO en Turquie) appelle les partis et les organisations de gauche et les syndicats de gauche à organiser des débats et des discussions au sujet des forces et des faiblesses du mouvement de contestation. Cela pourrait s’effectuer à l’aide d’un congrès national organisé à Istanbul et destiné à rassembler tous les militants pour construire un mouvement socialiste capable d’offrir une alternative basée sur les intérêts des travailleurs et des pauvres au régime autoritaire d’Erdogan.

    Une nouvelle génération entre en scène

    Ces 3 semaines de manifestations ont illustré l’ampleur des modifications qui se sont produites en Turquie au cours de cette dernière décennie. La croissance économique qui a suivi l’effondrement de l’économie turque en 2001 a permis à Erdogan de renforcer son soutien et de rester au pouvoir pendant plus de dix ans ; mais il a aussi créé une nouvelle génération de travailleurs et de jeunes insatisfaits de leur vie faite d’emplois précaires, de bas salaires et de chômage. D’autre part, une nouvelle couche de la classe moyenne et de la classe des travailleurs comprend son rôle dans la société et n’accepte pas le paternalisme de cet État qui cherche à imposer ses règles jusqu’à la consommation d’alcool ou la tenue vestimentaire. Erdogan voudrait que chaque couple ait 3 enfants, ce qui a été accueilli avec un cynisme total : ‘‘Tu veux vraiment plus d’enfants comme nous ?’’ a ainsi répondu dans la presse un jeune manifestant parmi des centaines de milliers d’autres. Les femmes de la classe des travailleurs et de la classe moyenne ont également gagné en assurance. Elles n’acceptent pas les attaques d’Erdogan et du gouvernement contre le droit à l’avortement, leur interférence dans la politique familiale et les diverses obligations vestimentaires.

    Alors que les principales places étaient occupées, des batailles plus dures avaient lieu entre la police et des travailleurs – jour après jour – dans les quartiers les plus pauvres d’Istanbul, d’Ankara et de nombreuses autres villes. Bien peu d’attention médiatique y a été accordée.

    Erdogan a tenté d’accuser les manifestations d’être manipulés et téléguidés par des puissances étrangères et leurs médias (le ‘‘grand jeu’’ des ‘‘forces extérieures’’ comme il l’a dit) et des partis d’oppositions, surtout du CHP (le Parti Républicain du Peuple, kémaliste). Le régime cherche des boucs émissaires. Les déclarations d’Erdogan laissent peu de doutes sur son incompréhension totale des changements fondamentaux qui ont lieu dans la société turque.

    Pendant des décennies, la politique turque a semblé n’être que le résultat de l’affrontement de deux ailes de la classe dominante. D’un côté se trouvent les kémalistes, l’aile de la classe dominante d’idéologie laïque, très enracinée en ce moment dans la bureaucratie d’État, la justice et l’armée. Ils portent la responsabilité du coup d’État militaire de 1980 qui a littéralement écrasé la gauche. De l’autre côté se trouvent les forces islamiques soi-disant modérées autour de l’AKP d’Erdogan qui, depuis plus de 10 ans, repousse les kémalistes dans leurs retranchements. Ils ont ainsi réussi à purger la direction militaire autrefois puissante et à construire leurs propres réseaux.

    Une grande partie des manifestants ont utilisé des symboles kémalistes pour montrer leur colère, comme des drapeaux turcs et des portraits de Kemal Atatürk. Cependant, ce n’est pas par hasard si aucun des partis kamélistes n’a osé prendre la direction des manifestations. Le dirigeant du CHP, Kilicdaroglu, a appelé au calme de la même manière que le président islamiste Gül. Le parti fasciste MHP, lui aussi kaméliste, a dénoncé le mouvement de protestation en déclarant qu’il était dominé par la gauche radicale. Certains groupes, comme l’organisation de jeunesse de droite TGB, ont essayé d’intervenir, mais avec très peu de résultats.

    Mais beaucoup de gens, pour la toute première fois, se sont retrouvés à porter le drapeau turc ou la bannière de Kemal Atatürk avec à leurs côtés, à leur grande surprise, des drapeaux et symboles kurdes. Ils se sont battus ensemble, côte-à-côte. Ce sentiment extrêmement fort d’unité contre le régime a aussi été exprimé par le fait que les fans des trois clubs de foot d’Istanbul (Besiktas, Galatasaray et Fenerbahce) avaient enterré la hache de guerre pour soutenir ensemble le mouvement.

    Selon un sondage de l’université de Bilgi, 40% des manifestants avaient entre 19 et 25 ans, près de deux tiers ayant moins de 30 ans. Plus de la moitié des gens manifestaient pour la première fois, et 70% ont déclaré qu’ils ne se sentaient proches d’aucun parti politique. Cette nouvelle génération de jeunes a eu un premier avant-goût de l’État turc et de sa brutalité. Le mouvement a réuni des couches totalement différentes de la population, unies par le sentiment que ‘‘trop, c’est trop’’. Des écologistes ont initié la bataille, ensuite sont arrivés des travailleurs du secteur public menacés de privatisations, de pertes d’emplois et de diminutions de salaires. Les jeunes, aliénés par le paternalisme oppressant du gouvernement, a envahi les places. Les femmes sont descendues en rue contre les effets des multiples attaques contre leurs droits. Les Kurdes revendiquaient de leur côté un changement réel, car malgré les pourparlers officieux entre les gouvernements et le PKK (Parti des Travailleurs Kurdes), 8000 journalistes, politiciens et militants sont toujours emprisonnés. Tous se sont retrouvés sous le slogan ‘‘Tayyip istifa’’ – ‘‘Erdogan, dégage’’ qui a dominé les rues dès le début de la vague de manifestation qui a déferlé sur le pays. On a beau pu trouver des symboles réactionnaires dans les manifestations, les aspirations des gens vont bien plus loin que ce que les politiciens capitalistes kémalistes corrompus du CHP ont à proposer.

    La dynamique du mouvement

    Le vendredi 31 mai, la violence policière a transformé une manifestation écologique en soulèvement. Des manifestations spontanées ont eu lieu dans tout le pays. Chaque soir, les gens martelaient leurs casseroles et leurs poêles dans les quartiers ouvriers et les banlieues. Pendant le premier weekend, 67 villes ont connu des manifestations. Le dimanche 1er juin, la police s’est retirée de la place Taksim. Un sentiment d’euphorie s’est répandu dans le mouvement ; les gens disaient que le mouvement avait gagné. Une atmosphère festive prévalait dans les grandes places occupées, et pas seulement à Istanbul.

    Alors que la vitesse à laquelle les manifestations se sont répandues dans tout le pays et la volonté de prendre les rues chaque jour malgré la violence policière et les gaz lacrymogènes étaient enthousiasmantes, les manifestations étaient très peu coordonnées. Des comités d’action ont bien été mis sur pied, mais ils se concentraient surtout sur des questions pratiques : comment organiser les premiers secours, les soins aux blessés, la distribution de nourriture, installer les tentes, etc. Ces comités ont été développés par des groupes de gauche, mais n’ont pas donné moyen d’inclure la majorité des occupants des places et des manifestants dans les débats et les prises de décision.

    Malheureusement, nous n’avons pas vu d’assemblées du même type que celles qui ont caractérisé la contestation en Espagne ou en Grèce en 2011. Des critiques peuvent être faites sur certaines faiblesses mais, sur les places occupées par les Indignés grecs ou espagnols, les discussions collectives étaient quotidiennes, en petit groupe ou en assemblées massives, et chacun pouvait exprimer son opinion. Cela permettait le développement d’un véritable débat qui, malgré certaines faiblesses, permettait au mouvement de tirer des conclusions concernant les revendications et la stratégie requise pour la lutte.

    Sosyalist Alternatif (section du Comité pour une Internationale Ouvrière en Turquie) soutenait la nécessité de telles assemblées sur les places, dans les lieux de travail et les quartiers, villes et villages, afin de constituer des comités de représentants démocratiquement élus, révocables à tous niveaux et à tout instant. L’absence de cette direction élue et contrôlée par la base capable de coordonner la lutte dans les différentes villes et entre elles faisait justement défaut en Grèce et en Espagne.

    Sans de telles structures, le mouvement – qui s’était rapidement étendu aux 88 provinces du pays et à toutes les principales villes – a stagné et n’a pas été capable de développer une stratégie pour aller de l’avant. C’est pourquoi la stratégie d’Erdogan – avoir le mouvement à l’usure – a marché. Le mouvement s’est épuisé dans les combat quotidiens avec la police.

    Grève générale

    Les deux jours de grève de la fédération syndicale du secteur public, le KESK, les 4 et 5 juin, ont constitué une étape importante pour amener la lutte à un niveau supérieur. La classe des travailleurs organisée est potentiellement le plus grand pouvoir présent dans la société, en Turquie et ailleurs. Le KESK a appelé les autres syndicats à utiliser ce pouvoir et à rejoindre la grève. Seul le DISK, le syndicat le plus à gauche, a suivi, mais il a aussi limité son appel à quelques heures de participation symbolique à la lutte du KESK le 5 juin.

    Les syndicats ont ensuite fort peu tenté d’organiser, de coordonner et de développer la lutte. Le KESK a seulement appelé à une nouvelle grève générale le 17 juin, quand le mouvement avait déjà subi de graves revers.

    Seuls, le KESK et le DISK n’étaient pas en position d’annoncer une grève générale. Cependant, ils auraient pu offrir plus de direction de coordination au mouvement. Ils auraient pu commencer par lancer une série de grève avec leurs associés pour mettre pression sur les autres syndicats afin qu’ils rejoignent le mouvement et aident à offrir une véritable stratégie pour forcer Erdogan à se retirer. Malheureusement, cela n’a pas été le cas.

    Erdogan dégage!

    Le sixième jour de bataille contre la police, le mercredi 5 juin, ‘‘Solidarité Taksim’’ a annoncé 5 revendications principales. Cette coalition de 127 groupes basée sur la place Taksim est devenue de facto la direction du mouvement. Eyup Muhcu, le président de la chambre des architectes de Turquie, était le porte-parole de cette coupole qui, officiellement, n’avait pas de leader. Leur effort s’est concentré sur la limitation des revendications à l’arrêt de la destruction du Parc Gezi, à la condamnation des responsables de la répression policière, à l’interdiction des gaz lacrymogènes, et à la relaxe des manifestants emprisonnés.

    Pour importantes qu’elles soient, ces revendications n’étaient pas celles qui avaient su unifier le mouvement les jours précédents. ‘‘Tyyip istifa’’ (‘‘Erdogan, dégage’’), était le principal slogan scandé et il était ouvertement dirigé contre le gouvernement AKP, ses politiques et son idéologie.

    En présentant les 5 revendications comme le dénominateur commun des manifestants, la direction de cette coupole déclarait que cela était de nature à unifier le mouvement. Cependant, la direction des manifestations a échoué à montrer une perspective de mobilisation apte à faire tomber le gouvernement AKP. ‘‘Le Parc Gezi et la défense du mouvement contre la police sont des éléments importants – mais valent-ils le coup de se faire tabasser jour après jour ?’’ se sont demandés les travailleurs et les jeunes.

    En réduisant les objectifs du mouvement à ces 5 revendications, ‘‘Solidarité Taksim’’ a politiquement battu en retraite au moment où le mouvement prenait de l’élan, où la grève du KESK était encore en cours et où une recherche désespérée de stratégie avait commencé. Il s’agit d’un un tournant décisif.

    Cela a permis à Erdogan (par exemple dans les négociations avec ‘‘Solidarité Taksim’’ le 13 juin) de tout ramener aux questions environnementales liées au Parc Gezi ou à une partie de la police ayant été trop loin. Il a donc été capable de minimiser les autres questions sociales afin de diviser utilisé le mouvement entre les ‘‘bons écologistes’’ et les ‘‘terroristes’’ qui défendaient des revendications sociales plus offensives.

    Abaisser le niveau des revendications n’a pas non plus apaisé le gouvernement. La retraite du mouvement de contestation n’a fait qu’encourager l’élite dirigeante à réprimer plus encore. L’agence de presse Reuters a cité (le 15 juin) Koray Caliskan, un politologue de l’université de Bosphore, après que la Place Taksim ait déjà été vidée : ‘‘c’est incroyable. Ils avaient déjà enlevé toutes les bannières politiques et en étaient réduits à une présence symbolique sur le parc.’’ C’était le moment propice pour qu’Erdogan parte à l’offensive et nettoie le Parc Gezi de toutes ses forces.

    Le soutien d’Erdogan

    Était-il nécessaire de laisser tomber les revendications orientées vers la chute d’Erdogan étant donné qu’il disposait – et dispose encore – d’un énorme soutien, ce qu’il a illustré en rappelant que 50% des électeurs avaient voté pour lui ?

    Dans le cadre de cette épreuve de force, Erdogan a mobilisé des dizaines de milliers de personnes pour le soutenir lors d’une manifestation à Ankara le dimanche 15 juin. Le 16 juin, les manifestants ont été bloqués sur une autoroute menant à Istanbul, la police a encerclé la Place Taksim et des batailles violentes ont à nouveau opposé des dizaines de milliers de personnes à la police. En même temps, des bus mis à disposition par la municipalité d’Istanbul et l’AKP transportaient des gens à un rassemblement en faveur d’Erdogan. Plus de 200.000 de ses partisans sont venus écouter son discours pendant des heures.

    L’AKP a pu se construire un soutien sur base du rejet des anciens partis et des militaires et face à la menace constante d’un nouveau coup d’État. Les gens en avaient assez de la répression de la vieille élite kémaliste, et se sont tournés à ce moment vers Erdogan, étant donné que lui-même était considéré comme une des victimes de ces cercles réactionnaires. Mais cela n’a été possible qu’à cause de l’absence d’une force organisée et massive de la classe des travailleurs. Erdogan a un soutien et, après 10 ans de croissance économique, peut puiser dans ses réserves sociales relatives, même si la croissance économique a considérablement ralenti cette dernière année. Cependant, son succès électoral repose surtout sur la soumission forcée des médias, sur la répression et sur l’absence de toute opposition crédible et indépendante de l’establishment capitaliste.

    Le seuil électoral de 10% en Turquie – à l’origine destiné à empêcher l’entrée au parlement des partis pro-Kurdes, des partis islamistes et des scissions des anciens partis de droite kémalistes – est maintenant utilisé contre le développement de nouvelles forces. La vieille opposition est considérée comme corrompue et liée au vieux système électoral qui s’est effondré avec l’économie en 2001.

    Quand les manifestations ont commencé, les chaînes de télé turques diffusaient des émissions de cuisine, des documentaires historiques ou (dans le fameux cas de CNN Turquie) des documentaires sur les pingouins. Les quatre chaînes qui ont osé parler du mouvement sont maintenant menacées de lourdes amendes. Les autorités ont même essayé de fermer la chaîne de gauche Hayat TV. La Turquie comprend plus de journalistes emprisonnés que la Chine et l’Iran réunis ! Les droits syndicaux et les droits des travailleurs sont systématiquement violés.

    Étant donné la répression autoritaire et massive de tout mouvement de contestation, il y a toutes les raisons d’appeler à la fin de ce gouvernement et de refuser de reconnaître sa légitimité.

    Quelle alternative à Erdogan?

    Poser la question de la chute d’Erdogan et de son régime pose inévitablement celle de l’alternative à lui opposer. Les manifestants ne voulaient pas d’un retour aux affaires du CHP kémaliste. Quel pouvait donc être le résultat de la revendication de la chute d’Erdogan?

    Des comités locaux, régionaux et nationaux issus du mouvement auraient pu poser les bases d’un développement de la lutte sur ce terrain. De tels corps auraient pu constituer la base sur laquelle se serait organisé et reposé un réel gouvernement des travailleurs, des jeunes et des pauvres. D’un autre côté, il est certain que ces comités ont besoin d’une force politique qui puisse proposer cette stratégie et lutter pour qu’elle conduise à la victoire. La question clé est de construire un parti de masse de la classe des travailleurs armé d’un programme anticapitaliste socialiste.

    Le HDK/HDP (Congrès Démocratique des Peuples / Parti Démocratique des Peuples) est un pas prometteur dans cette direction. Il s’est développé à partir d’une alliance électorale des forces de gauche autour du BDP, le principal parti de gauche pro-kurde. Les organisations et partis de gauche ont besoin de s’unir aux syndicats de gauche et aux syndicalistes combatifs en intégrant de nouveaux militants et travailleurs pour développer un tel parti de classe.

    Contester Erdogan et le système sur lequel il repose

    La tâche du mouvement des travailleurs et de la gauche est aussi d’offrir une alternative politique claire à ceux qui soutiennent encore Erdogan afin de les détacher de lui.

    Le gouvernement a imposé des politiques néolibérales et profondément antisociales même quand l’économie était encore en pleine croissance. Tout en améliorant les conditions de vie du peuple à certains égards, les politiques d’Erdogan ont aussi fortement augmenté les inégalités. Son gouvernement a adopté une politique de privatisations et d’attaques contre les droits des travailleurs, en envoyant notamment systématiquement la police contre les travailleurs en grève. Seules les couches de la classe capitaliste proches de l’AKP ont été vraiment capables de profiter de la situation.

    L’AKP a tenté de s’attirer un soutien en se présentant comme le défenseur des valeurs islamiques, en s’opposant par exemple à l’alcool ou aux baisers en public et favorisant la construction d’une mosquée Place Taksim. Tout cela était destiné à détourner l’attention des questions économiques et sociales. Erdogan a voulu défendre sa position en s’appuyant sur les couches les plus conservatrices et religieuses de la société. Mais ces dernières sont elles aussi affectées par les attaques antisociales d’Erdogan.

    Le mouvement doit rejeter toute tentative d’ingérence de l’État dans les vies personnelles du peuple. En même temps, il doit mettre fin aux tentatives d’Erdogan de diviser pour régner. La lutte de masse qui s’est développée en Turquie n’est en rien un combat entre forces laïques et religieuses. Des revendications portant sur l’augmentation du salaire minimum, le droit à chacun de disposer d’un logement décent, le respect des droits démocratiques et des droits des travailleurs peuvent permettre de sérieusement éroder le soutien à Erdogan sur une base de classe.

    Quelles perspectives ?

    La croissance économique des ces dernières années a constitué un élément important du soutien à Erdogan et permet de comprendre l’origine de ses réserves sociales. Mais cela a également créé des attentes élevées et une certaine confiance en eux parmi les travailleurs et les jeunes. Cependant, l’économie turque est fragile et dépend beaucoup du capital étranger. Selon le FMI: ‘‘les besoins de financements extérieurs de la Turquie représentent à peu près 25% de son Produit Intérieur Brut.’’ Le rapport poursuit en disant que cela ‘‘va continuer à provoquer une vulnérabilité considérable.’’

    Le déficit du budgétaire actuel a augmenté d’un cinquième sur les 4 premiers mois de cette année. Le ralentissement du taux de croissance (de +8,8% en 2011 à +2,2% en 2012) est significatif et est fortement influencé par la crise européenne, l’Europe étant le principal marché du pays. En comparaison de la situation des pays européens voisins, comme la Grèce et Chypre, ou du Moyen-Orient, le sentiment de progrès économique peut toujours exister. Mais le taux de croissance n’est destiné qu’à atteindre les 3,4% en 2013 selon les prévisions du FMI, en-dessous de l’objectif de 4% du gouvernement. Ces prévisions ont été faites avant la répression des manifestations et leur effet sur la consommation intérieure et le tourisme n’ont ainsi pas été pris en compte.

    Le taux de croissance de l’année passée et les prévisions de cette année ne sont pas suffisants pour absorber la population croissante qui arrive sur le marché du travail, ce qui promet déjà de nouvelles batailles. Étant donné la fragilité du paysage économique, les probables répercutions dues à l’onde de choc de la crise européenne et la réduction de l’investissement étranger, il est certain qu’il y aura des batailles, pour les parts d’un gâteau sans cesse plus petit. Les perspectives économiques n’annoncent aucune stabilité sociale pour les prochains mois ou années, bien au contraire.

    Cadre international

    Le processus de révolution et de contre-révolution en Afrique du Nord et au Moyen Orient, les mouvements de masse contre l’austérité en Europe et le mouvement Occupy aux USA ont tous eu un effet sur la jeunesse turque. Malgré la différence considérable que constitue le fait qu’Erdogan est encore capable de mobiliser un certain soutien social, les mouvements de masse pour les droits démocratiques et sociaux apprennent les uns des autres. Le mouvement en Turquie sera également une source d’inspiration pour le Moyen-Orient et au-delà.

    Un régime de droite, présenté comme un modèle pour les autres pays sunnites, a été puissamment remis en question par le peuple. Le modèle tant vanté d’un État islamique moderne a été montré tel qu’il est : la surface d’une société en pleine tourmente.

    La Turquie est un allié de l’OTAN qui possède ses ambitions propres d’agir en tant que puissance régionale. Le bellicisme du régime turc envers la Syrie a augmenté la tension dans la région, avec toute une vague de réfugiés qui se sont enfuis en Turquie. Ceux qui ont pris part au mouvement contestataire ont souvent exprimé la peur d’être entraîné dans la guerre civile syrienne, qui est partie d’un soulèvement populaire pour aboutir à un cauchemar de guerre civile ethnique et religieuse.

    Le régime AKP a essayé d’exploiter la fragmentation de l’Irak : ils mènent des négociations avec le Nord kurde pour essayer d’établir une zone d’influence turque dans les régions kurdes. Les perspectives sont incertaines. A moins que la classe ouvrière n’intervienne avec son propre programme contre le sectarisme et le nationalisme, de nouveaux affrontements ethniques et religieux sont inévitables en Irak dans des régions comme Kirkuk. Cela aura des répercussions en Turquie.

    Alors qu’Erdogan essaie d’instrumentaliser la question kurde pour gagner en influence dans la région et se baser sur une alliance avec les dirigeants kurdes pour changer la constitution (qui lui permettrait de devenir président, avec plus de pouvoirs), il maintient des milliers de Kurdes emprisonnés pour avoir défendu les droits des Kurdes. Mais les aspirations des Kurdes d’en finir avec l’oppression vont se heurter aux objectifs d’Erdogan de faire d’eux une partie d’un nouvel empire de style ottoman dirigé par Ankara.

    La montée des tensions dans la région, qui découle de l’implication d’Israël dans la guerre civile syrienne et de la propagation de cette guerre au Liban ou en Turquie, en plus des conflits entre Israël et l’Iran avec une possible implication des USA, peuvent ébranler encore plus la stabilité de la Turquie et du régime d’Erdogan et ainsi déclencher de nouveaux mouvements et des conflits religieux ou ethniques.

    Cependant, le premier effet du soulèvement turc dans la région est d’encourager les travailleurs, les jeunes et les pauvres à retourner aux origines du processus révolutionnaire en Afrique du Nord et au Moyen Orient: l’implication active des masses elles-mêmes dans la lutte pour les revendications démocratiques et sociales.

    Toutes les sections de la société en action

    Le mouvement de contestation n’a pas seulement poussé à l’action les couches les plus basses de la classe moyenne et les enfants de la classe des travailleurs, qui ont constitué les couches les plus visibles du mouvement, en particulier dans les médias étrangers. La classe ouvrière de toutes les villes s’est durement battue contre la police. Les nouvelles couches de la classe ouvrière et des jeunes ont tout juste commencé à ressentir leur propre force et les classes moyennes urbaines, comme les architectes, les médecins et autres, ont également été présentes dans le mouvement.

    Dans le même temps, Erdogan a essayé de mobiliser la population plus rurale, ce qui pourrait se retourner contre lui plus tard. La polarisation de la société elle-même est si forte qu’elle va encourager encore la politisation d’une nouvelle génération, y compris dans les campagnes.

    Mais même au sommet de la société, des scissions et conflits sont devenus apparents. Juste au moment où Erdogan pensait être parvenu à son but de se retirer les vieux kémalistes de leurs positions stratégiques dans la bureaucratie d’Etat, de nouvelles scissions sont apparues dans ses propres rangs.

    Les plans d’Erdogan sont non seulement de se présenter à la présidentielle l’année prochaine mais aussi de changer la constitution en un système présidentiel qui lui permettrait de se maintenir au pouvoir. Mais le président sortant Gül, lui aussi de l’AKP, a proposé une stratégie nettement plus conciliante à l’égard du mouvement. Il pourrait ne pas tout simplement céder la place à Erdogan.

    Pendant les années où il a gagné en influence, le mouvement Gülen (une tendance islamique modérée basée autour du millionnaire Gülen qui vit aux USA) a soutenu Erdogan. Par exemple, ses écoles religieuses ont bénéficié de la privatisation de l’éducation, une politique mise en place par Erdogan. Mais des divergences entre Erdogan et Gülen se sont développées depuis un an et sont devenues de plus en plus visibles pendant les manifestations, ce qui a conduit les politiciens pro-Gülen à critiquer le style autoritaire d’Erdogan.

    Le gouvernement AKP se sent assez en confiance pour utiliser l’armée, ayant purgé les kémalistes. La police était ainsi accompagnée par la police militaire. Le Premier Ministre adjoint a même menacé d’utiliser l’armée pour écraser le mouvement le 17 juin. D’un autre côté, pendant le premier week-end de conflit, des soldats ont donné des masques chirurgicaux aux manifestants contre le gaz lacrymogène. Selon les médias étrangers, la police a montré une certaine hésitation, un mécontentement et de l’indignation face à la manière dont était traité le mouvement.

    Derrière ce mouvement se trouvent les premiers signes d’un processus révolutionnaire : toutes les classes et forces de la société commencent à s’engager activement dans le destin du pays. Même s’il y a une pause avant la prochaine phase de la lutte, le processus qui a commencé est profond.

    Malgré la défaite temporaire, les travailleurs se sentiront encouragés à défendre leurs revendications et à entrer en lutte. Le tout puissant Erdogan peut avoir finalement gagné, mais ses yeux au beurre noir reçus de la part du mouvement montrent qu’il n’est pas invincible.

    Un grand débat a commencé sur la manière dont devrait fonctionner la société. Les gens sont poussés dans le débat politique par une énorme polarisation. Les anciens partis des kémalistes sont incapables de donner une expression à la colère et aux aspirations de la nouvelle génération, et les nouvelles générations le savent. Tant qu’une alternative de masse n’est pas construite, les classes moyennes et les travailleurs peuvent encore voter pour eux. Cependant, il y aura des tentatives de construire de nouveaux partis de lutte. Le HDK pourrait donner la bonne voie à suivre s’il parvient à pénétrer profondément dans la classe ouvrière turque. Les travailleurs et les jeunes ont besoin de forces de gauche. Les idées marxistes sont nécessaires dans ce processus de construction d’un parti de masse, enraciné dans la classe ouvrière, pour montrer comment sortir du cauchemar du capitalisme et de la répression.

    Une nouvelle couche de jeunes est entrée en scène. Elle va y rester et changer la Turquie. Comme le dit un des slogans les plus scandés dans les rues d’Istanbul et d’Ankara : ‘‘Ce n’est qu’un début – continuons le combat.’’

    Revendications de Sosyalist Alternatif (CIO-Turquie):

    Pleins droits démocratiques

    • Libération immédiate de tous les manifestants emprisonnés
    • Pour une commission indépendante composée de représentants des syndicats et du mouvement pour enquêter sur la violence policière
    • Libération de tous les prisonniers politiques
    • Pleins droits démocratiques dont le droit de manifester, de se rassembler, de former des partis et des syndicats
    • Mobilisation totale des travailleurs contre l’intervention de l’armée ; pleins droits démocratiques dont le droit pour la police et les soldats de former des syndicats
    • Abolition de toutes les lois anti-terroristes et des tribunaux spéciaux et de toutes les lois répressives et réactionnaires introduites par le gouvernement AKP ces dernières années
    • Non à la censure, pour des médias libres – fin de la répression contre les journalistes, les bloggers, les chaînes de télé et sur tweeter, non à la fermeture de Hayat TV
    • Libertés et droits de pratiquer ou non toute religion, fin du paternalisme d’État, et de toutes tentatives de diviser pour mieux régner. Pour les droits démocratiques de tous de vivre leurs vies comme ils l’entendent.
    • Non à la répression des Kurdes, droits égaux pour tous dont la reconnaissance des minorités et des droits des minorités. Droits à l’auto-détermination dont celui de former un État indépendant.
    • Les troupes étrangères hors de Syrie, non à l’intervention militaire de la Turquie et des puissances impérialistes dans la région.
    • Pour une assemblée constituante de représentants démocratiquement élus sur les lieux de travail, dans les quartiers, les villes et les villages afin de garantir les pleins droits démocratiques et la sécurité sociales à l’ensemble de la population

    Emplois, salaires décents, sécurité sociale

    • Finissons-en avec l’enrichissement de l’élite, avec les projets de construction sur la place Taksim et tous les projets basés sur la logique du profit
    • Non aux privatisations, renationalisation des sociétés privatisées
    • Non aux attaques contre les travailleurs du secteur public
    • Pour une augmentation significative du salaire minimum
    • Des logements et conditions de vie décents pour tous
    • Nationalisation des banques et des entreprises qui dominent l’économie sous le contrôle et la gestion des travailleurs
    • Pour une planification démocratique et socialiste de l’organisation et du développement de l’économie dans l’intérêt des travailleurs et des pauvres sans s’attaquer à l’environnement
    • Pour un gouvernement des travailleurs, des jeunes et des pauvres, agissant en fonction des intérêts de ces derniers
    • Pour une riposte internationale contre l’exploitation, l’oppression et le capitalisme. Pour une démocratie socialiste, une confédération socialiste des États du Moyen-Orient et de l’Europe sur base volontaire et égale.
  • Sri-Lanka : La riposte des travailleurs se développe

    La journée de grève générale du 21 mai a constitué un important pas en avant pour les travailleurs au Sri Lanka. Cette grève particulièrement significative – dénommée au Sri Lanka ”grève d’avertissement” – a été appelée par le comité de coordination de l’alliance des syndicats comme un coup de semonce contre l’énorme hausse des tarifs de l’électricité pratiquée par le gouvernement du président Mahinda Rajapakse.

    Srinath Perera, United Socialist Party (USP – CIO Sri-Lanka)

    Malgré que la grève n’ait pas été une victoire totale, elle a cependant envoyé un message fort au régime autocratique de ce pays. Dans les faits, l’action de ce 21 mai fut la première grève générale nationale depuis la défaite de la grève générale historique de juillet 1980. À cet égard, elle représente le début d’une nouvelle ère pour la classe ouvrière srilankaise.

    La grève a connu un réel succès dans la zone de ”libre-échange” de Kztunayake et dans la zone industrielle de Rathmlana, près de Colombo, où les syndicats de gauche ont une base solide. La grève a également été forte dans certaines régions rurales et dans les zones de plantations de thé du Hill Country. À Katunayake et à Biyagama, beaucoup de travailleurs sont sortis de leurs usines pour rejoindre la grève. Cependant, ils ont été chassés par la police alors qu’ils tentaient de manifester devant leurs lieux de travail. Plus tard, l’armée a été déployée pour réprimer ces travailleurs, qui occupaient leurs usines.

    De plus, à Rathmalana, un grand nombre de travailleurs ont fait grève et ont organisé une manifestation le long de la route principale. Plus de 500 personnes ont rejoint l’action pendant environ trois heures. Un meeting s’est alors tenu par la suite avec les discours d’un représentant de l’USP (United Socialist Party, section du Comité pour une Internationale Ouvrière au Sri Lanka et parti-frère du PSL) et des dirigeants du NSSP. Des actions similaires ont eu lieu dans de nombreuses autres régions. Des piquets de grèves ont été les actions les plus couramment adoptées dans de nombreux lieux de travail.

    Beaucoup de petits commerçants de Colombo et d’ailleurs ont fermé leurs magasins en solidarité avec la grève. À Anuradhapura, Watawala, Chilaw et Jaffna, les associations de commerçants ont soutenu la grève et ont stoppé leurs activités pendant plusieurs heures. Dans le district d’Anuradhapura, plus de 75% des enseignants – un nombre considérable – ne se sont pas présentés au travail et les activités scolaires ont été fortement touchées. Les professeurs d’universités se sont prononcés en faveur de la grève – un développement significatif. Les employés de plusieurs plantations de thé sont également entrés en grève.

    Le secteur public

    La principale faiblesse de cette grève a été la participation minimale des employés du secteur public. Sans leur participation, une grève générale ne peut être un succès total. Cela parce que les employés du secteur public (comptant plus de 1,2 million de personnes) administrent presque toutes les fonctions primordiales à la vie quotidienne de la population.

    Bien que l’Alliance syndicale ait travaillé sans relâche pour faire de cette grève un succès, son incapacité à atteindre des couches importantes de la classe ouvrières, principalement dans le secteur public mais aussi dans certains établissements du secteur privé, fut visible. Les trahisons des dirigeants soi-disant radicaux des syndicats traditionnels du LSSP et du CP – qui vacillaient au départ avant de tenter de saboter la grève – ont eu une impact sur la majorité des travailleurs qui étaient déjà désorientés par la gigantesque propagande anti-grève du gouvernement et par les diverses menaces et intimidations des patrons.

    La nécessité de construire une coordination nationale des différents comités d’usine de travailleurs est la leçon la plus importante de cette grève qui fut le résultat de plusieurs années de campagne.

    Les différents dirigeants syndicaux, liés à différents partis politiques, sont maintenant poussés à se réunir et à prendre des décisions communes pour porter en avant les revendications des travailleurs. Cette unité doit être consolidée par la formation, au niveau national, d’une convention démocratique des travailleurs pour la discussions des plans futurs, des problèmes que rencontre la classe ouvrière et pour prendre des décisions communes sur l’action future.

  • Non au terrorisme! Non au racisme! Non à la guerre!

    L’assassinat gratuit, barbare et vicieux d’un soldat désarmé à Woolwich avant-hier est un évènement terrible qui a du être profondément traumatisant pour les personnes qui y ont assisté et, bien sur, une effroyable tragédie pour la victime, sa famille et ses amis. Le voisinage a fait preuve d’une incroyable bravoure en intervenant pour tenter de secourir la victime.

    Déclaration du Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles), section de Greenwich

    Le Socialist Party condamne totalement cette attaque, tout comme il a condamné les attentats de Londres et les évènements du 11 septembre à New-York ainsi que toutes les attaques similaires basées sur des massacres sans distinction. Ce dernier meurtre est apparu comme étant purement aléatoire, la victime n’ayant probablement été choisie que par le t-shirt ”Help for Heroes” qu’elle portait.

    Les responsables ont déclaré avoir agi au nom de l’Islam et en protestation contre les occupations en Irak et en Afghanistan. Cependant, la vaste majorité des musulmans a été elle aussi écœurée et horrifiée par cette attaque, tout autant que le reste de la population.

    Les occupations impérialistes brutales en Irak et en Afghanistan, qui ont conduit à la mort de plus d’une centaine de milliers de civils, ne sont pas de la responsabilité des soldats ordinaires, mais des gouvernements qui ont pris la décision d’envahir et ensuite d’occuper.

    Le Parti Travailliste a participé à l’invasion de l’Irak malgré l’opposition de la majorité de la population, avec notamment la plus grande manifestation de l’histoire britannique, à laquelle le Socialist Party avait participé.

    Le terrorisme

    Le terrorisme est une méthode de lutte complètement erronée et contre-productive. C’est le terrorisme de masse du 11 septembre 2001 qui a donné à George Bush l’occasion de se justifier pour envahir l’Afghanistan puis l’Irak.

    Un des responsables de l’attaque à Woolwich a appelé le peuple de Grande Bretagne à renverser le gouvernement. C’est ce dernier qui poursuit l’occupation de l’Afghanistan et qui applique de terribles mesures d’austérité sur les travailleurs britanniques. Cependant, cet assassinat brutal sera utilisé par le premier ministre David Cameron pour tenter de renforcer le soutien à son très impopulaire gouvernement faible et divisé.

    Dans le sillage de cet évènement, les voyous racistes de l’EDL (English Defense League) ont déjà tenté cyniquement d’utiliser ce meurtre pour attiser le racisme contre les musulmans. Deux attaques contre des mosquées ont déjà eu lieu dans la nuit du meurtre de Woolwich. Le Socialist Party est totalement opposé au fait de prendre les musulmans comme boucs émissaires à la suite de ce tragique assassinat.

    Pour combattre les méthodes erronées et dommageables de n’importe quelle section de la société, l’unique manière de faire est d’unir les travailleurs, de toutes origines, pour construire un mouvement contre le racisme, contre le terrorisme, mais aussi contre l’austérité incessante du capitalisme.

    Droits démocratiques

    Nous devons également résister à toutes les tentatives du gouvernement d’utiliser cet évènement comme excuse pour attaquer nos droits démocratiques. La législation anti-terroriste a été utilisée pour saper toutes les protestations contre l’austérité. De simples travailleurs se sont battus et ont péri pour ces droits par le passé.

    Ce n’est pas la première fois que les travailleurs de Greenwich ont du se dresser contre les tentatives de division. A deux minutes à pied sur la même route que le lieu de la dernière tragédie, l’IRA (Irish Republican Army) avait bombardé le pub Kings Arms en 1974. La communauté de Greenwich s’est alors opposée à ceux qui tentaient d’attiser le sentiment anti-irlandais de l’époque.

    En 1993, Stephen Lawrence fut assassiné à Eltham, à juste vingt minutes de là. Une campagne de masse contre le racisme fut mise sur pied par les membres du Socialist Party (alors appelé Militant) et d’autres. Cela a conduit à la fermeture des locaux de Welling de l’organisation d’extrême droite BNP (British Nationalist Party).

    Il est important aujourd’hui, plus que jamais, que les travailleurs de Woolwich et du pays dans son ensemble se souviennent de cette histoire de solidarité et de lutte.

    Nous devons nous dresser contre les tentatives de nous diviser dans le sillage de cet évènement tragique.

  • Pourquoi il faut s’opposer au sommet du G8

    Cette année, le sommet du G8 se tiendra dans le comté de Fermanagh, en Irlande du Nord, les 17 et 18 juin. Cette rencontre réunit les chefs de gouvernement de huit grandes économies capitalistes mondiales afin de discuter de la manière de continuer à favoriser au mieux les intérêts de ceux qu’ils représentent : les super-riches, les grandes entreprises et les banquiers.

    Socialist Party (CIO-Irlande du Nord)

    Les dirigeants du G8 représentent des gouvernements qui attaquent frontalement le niveau de vie de la population. Ils sont déterminés à faire payer aux simples travailleurs, aux jeunes et à la classe moyenne le coût d’une crise dont nous ne sommes pas responsables pour financer le renflouement des banquiers et des spéculateurs. Leur programme d’austérité tue l’économie et a créé un chômage de masse à travers le monde, en particulier chez les jeunes. Alors que les super-riches continuent de s’enrichir, des milliards de personnes sur notre planète vivent avec moins de 2 dollars par jour.

    Ensemble, les gouvernements du G8 sont coupables d’inaction concernant le changement climatique qui menace notre environnement et l’avenir de l’humanité. Pour eux, les profits des compagnies pétrolières sont plus importants que notre planète. En 2001, le G8 a publié un communiqué de promotion pour la fracturation hydraulique (« fracking »), une méthode dangereuse d’extraction de gaz susceptible de contaminer les réserves d’eau. Les multinationales et de nombreux politiciens locaux salivent à l’idée d’appliquer ce processus à Fermanagh, contre la volonté des collectivités locales.

    Le G8 et le système capitaliste qu’il représente sont étroitement liés à la guerre et à la souffrance que celle-ci cause chez les peuples à travers le monde. Les gouvernements membres se sont directement engagés dans les campagnes impérialistes en Irak, en Afghanistan, en Libye et au Mali pour ne citer que quelques exemples. Certains soutiennent l’oppression de l’État d’Israël sur le peuple palestinien. En attendant, ils financent et arment les régimes dictatoriaux dans le monde entier.

    Où qu’ils aillent, les pays du G8 ont été confrontés, à juste titre, aux protestations des syndicats, des militants de gauche radicale, des militants pacifistes et des défenseurs de l’environnement. Nous ne pouvons pas leur permettre d’utiliser l’Irlande du Nord comme tribune vers laquelle se tournent les caméras pour y faire des discours vides de sens sur la paix et la prospérité sans opposition. Rejoignons la protestation contre le G8 et aidons à faire passer un message clair au monde : nous nous opposons à l’agenda du G8 et ces criminels ne sont pas les bienvenus ici !

    Qui compose le G8 ?

    Obama – belliciste en chef

    Des milliers de civils ont trouvé la mort dans ses frappes de drones au Pakistan et dans d’autres pays. Obama a poursuivi l’occupation de l’Afghanistan. Il a brisé sa promesse de fermer le camp de torture de Guantanamo et a emprisonné Bradley Manning qui avait exposé au grand jour les crimes de guerre américains.

    Cameron – l’héritier de Thatcher

    Le gouvernement conservateur dirigé par Cameron dirige un programme de coupes brutales qui dévaste les communautés de la classe ouvrière en Grande-Bretagne et en Irlande du Nord. Parallèlement, il défend systématiquement ses amis banquiers. Les réductions de Cameron sur les allocations – y compris sa taxe impopulaire sur « les chambres à coucher » – et les attaques contre les soins de santé nationaux (NHS) visent à démanteler l’État-Providence.

    Angela Merkel – architecte de l’austérité

    Angela Merkel est idéologiquement engagée dans le programme d’austérité européen visant à faire baisser le niveau de vie de la classe ouvrière. Elle a exigé que les travailleurs et les jeunes de Grèce et d’autres pays soient jetés par terre plutôt que de faire payer les banquiers.

    Poutine – dictateur élu

    Poutine règne sur un régime institutionnellement corrompu dirigé par une oligarchie parasitaire. L’appareil d’État intimide et harcèle ceux qui osent parler. Récemment encore, les membres du groupe punk Pussy Riot ont été condamnées à une lourde peine pour avoir interprété une chanson qui critiquait Poutine.

    Qu’en est-il des « bénéfices » du G8 ?

    En Irlande du Nord, une campagne de propagande médiatique a tenté de nous faire croire que le G8 est une bonne chose. On nous a raconté que ce sommet allait booster notre économie, attirer les investissements étrangers et le tourisme tout en plaçant clairement l’Irlande du Nord sur la ‘‘scène mondiale’’. Combien de fois avons-nous entendu ces mêmes déclarations pleines de promesses ? Les communautés de la classe ouvrière d’Irlande du Nord attendent toujours les ‘‘dividendes de la paix’’ promises il y a 15 ans !

    La vérité est que le programme d’austérité du G8 consiste à un sabotage de l’économie, localement et globalement. L’assemblée exécutive ôte 4,3 milliards de livres sterling de notre économie à travers les coupes budgétaires. L’investissement a chuté parce que les entreprises ne sont pas convaincues de pouvoir faire suffisamment de gros bénéfices. Le tourisme a chuté parce que les gens ont tout simplement moins d’argent à dépenser. La station Lough Erne, dans laquelle va se tenir le sommet, est un bel exemple de cette situation. Elle a déposé le bilan et a été fermée. Elle est maintenant réouverte provisoirement et le personnel a été réembauché avec de plus petits salaires. Tout l’argent que rapportera le sommet du G8 sera perdu dans le dispositif massif de sécurité.

    Pas d’argent pour les soins de santé – 30 millions de livres pour protéger le G8 !

    Fermanagh sera transformé en zone militarisée à l’approche du sommet du G8, provoquant un énorme bouleversement dans la vie de la population. Des milliers de policiers ont été postés dans la zone, ainsi que l’armée. Des autopompes ont été préparées et le Conseil national de police a autorisé l’achat d’avions drones espions. Pendant que les politiciens ferment les écoles et réduisent les services de santé, aucune économie n’est faite sur les exigences de Cameron et de Poutine.

    Il y a eu une tentative délibérée de la police, des politiciens et des médias pour intimider les gens à exercer leur droit de protester contre le G8. Cela s’est accompagné d’une tentative de discréditer les opposants au G8 en les faisant passer pour des voyous violents et à les lier à des républicains dissidents. Il s’agit d’une considération inexacte. Nous cherchons à manifester pacifiquement. Les véritables coupables de violence se situent au sein même du sommet du G8 !

    Rejoins l’opposition socialiste !

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    Le G8 représente le système capitaliste qui voit notre monde dominé par une minuscule élite de super-riches. Ce système engendre la pauvreté, la guerre, la destruction environnementale et la division. Nous sommes pour un monde socialiste, dans lequel l’immense richesse qui existe deviendra une propriété publique et sera utilisée démocratiquement pour assurer une existence décente à tous.

    Le Socialist Party et son internationale le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) cherchent à construire une force politique capable d’unir les travailleurs et les jeunes, passant au-delà du fossé sectaire entre catholiques et protestants, pour défendre nos intérêts communs, nos intérêts de classe.

  • Marikana : le massacre qui changea la face de l’Afrique du Sud

    Une critique surprenante de la faillite du projet “progressiste” de l’ANC (African National Congress, le parti de Nelson Mandela) a été diffusée sur la BBC2 fin du mois dernier. Dans ce documentaire, un ancien militant anti-apartheid britannique revient en Afrique du Sud et constate ce qu’est devenu l’ANC. Ce film a permis de faire plus largement connaître les récents événements survenus en Afrique du Sud et dans lesquels les militants de notre parti-frère en Afrique du Sud jouent un rôle déterminant.

    Par Alec Thraves, Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles)

    Peter Hain, est député du Parti Travailliste pour la circonscription de Neath (au Pays de Galles, en Grande-Bretagne). Ancien activiste anti-apartheid dans sa jeunesse, il retourne dans son Afrique du Sud natale et découvre comment l’ANC est en train de perdre le soutien des travailleurs noirs et comment ce parti est perçu après avoir ordonné le massacre de Marikana, où 34 mineurs de l’entreprise Lonmin ont été tués par la police en août 2012.

    La critique de la faillite des idéaux de société et des projets “progressistes” (notamment autour de l’ancien slogan de l’ANC “une meilleure vie pour tous”) de l’ANC après 18 ans au pouvoir – et plus particulièrement encore concernant la vie des pauvres – est très forte, Peter Hain a l’air ostensiblement choqué et profondément déprimé lorsqu’il entend dire de la part d’anciens partisans de l’ANC qu’après le massacre de Marikana, ils ne voteront plus jamais pour ce parti. Peter Hain confirme également ce que le Democratic Socialist Movement (DSM, section sœur du PSL en Afrique du Sud) avait déclaré immédiatement après le massacre, à savoir que ‘‘Marikana avait chnagé l’Afrique du Sud pour toujours.’’

    Les membres du DSM n’ont pas attendu plusieurs mois ou dû entendre le rapport de la commission d’enquête du gouvernement Zuma pour savoir ce qui s’était réellement passé, puisqu’ils avaient entendu les faits racontés des bouches même des survivants. Les événements de Marikana ont constitué un meurtre prémédité, consciencieusement planifié avec la complicité des plus hautes instances du groupe minier Lonmin, de la police et du gouvernement.

    Les vidéos montrant les mineurs se faire massacrer par la police ont conduit le député Hain à accepter le fait que la brutalité du capitalisme sud-africain était toujours bien présente, même avec un gouvernement à majorité noire dominé par l’ANC. Ce reportage démontre clairement que le NUM (National Union of Miners, le syndicat national des mineurs) a été pris la main dans le sac pour s’être laissé corrompre par la direction de la mine et que les syndicats liés à l’ANC (comme le COSATU : Congress of South African Trade Unions, la centrale générale liée à l’ANC) ont été utilisés pour briser le mouvement de grève !

    Par contre, ce reportage comporte des manques, notamment le fait qu’après le massacre de Marikana se sont développés des dizaines de comités de grèves illégaux qui ont répandus la grève à travers toute la région minière, impliquant des douzaines de puits miniers et plus de 150.000 mineurs. Ces comités furent initiés, développés et dirigés par des membres et des sympathisants du DSM (Democratic Socialist Movement, section du CIO en Afrique du Sud). Peter Hain a bien entendu voulu mettre en avant le rôle de son héros Nelson Mandela, et a de ce fait involontairement expliqué quelle fut sa contribution à la situation désastreuse actuelle, à laquelle doit aujourd’hui faire face la classe ouvrière sud-africaine.

    Les objectifs de Mandela – d’après son ami Peter Hain – étaient d’obtenir une majorité parlementaire noire et une démocratie libérale stable. Afin d’atteindre cet objectif, Nelson Mandela a accepté que le capitalisme continue d’exister sans être menacé, un capitalisme dominé par une bourgeoisie blanche, en échange d’un gouvernement dominé par des noirs. Le résultat de cette politique d’équilibre des pouvoirs après 18 ans sont un terrible accroissement des inégalités entre riches et pauvres et l’arrivée d’une élite noire corrompue s’enrichissant sur le dos des masses pauvres.

    Peter Hain cherche à se convaincre lui-même que tout ne fut pas pour le plus mal. Il dit notamment que l’ANC a construit 3 millions de nouvelles maisons. Je les ai vues ces maisons à Durban et à Johannesburg et elles ne sont pas appelées ‘‘boites d’allumettes’’ pour rien (matchbox houses en anglais). S’y allonger signifie d’avoir ses pieds dépasser de la porte ! Elles ne sont pas bien solides, ne disposent pas de toilettes ou d’accès à l’électricité, et n’ont pas la moindre arrivée d’eau. Peter Hain notait aussi que les écoles promises par l’ANC ont été construites. Mais les professeurs que j’ai rencontrés là-bas, au ghetto de Freedom Park, me racontaient qu’ils avaient 60 élèves par classe, sans aucun cahier, ce qui n’est pas une amélioration par rapport au reste de l’Afrique.

    C’est un député Hain complètement démoralisé que l’on voit attaquer le président Zuma à propos de la corruption monumentale qui règne à tous les niveaux de pouvoir de l’ANC tant au niveau local que national. Zuma a rejeté l’attaque, en niant avoir utilisé 24 millions d’euros des caisses de l’Etat pour rénover et remeubler son luxueux complexe immobilier et rejetant l’accusation sur les médias au prétexte qu’ils avaient exagéré le problème. Peter Hain est resté quasiment sans voix devant tant l’incompétence, l’arrogance et la collusion patronale qui imprégnait la réponse présidentielle. Cet entretien est extrêmement indicatif de la fracture désormais présente entre les masses et les dirigeants de l’ANC.

    Toute l’ironie de l’histoire, c’est que Peter Hain s’est tourné vers l’ancien dirigeant des jeunesses de l’ANC, Julius Malema, en cherchant une opposition à la corruption de la direction représentée par le président Zuma. Après Marikana et durant les 2 mois de grève des mineurs, Malema a cherché à s’attirer les bonnes grâces des travailleurs en exigeant avec eux la nationalisation des mines. Ce n’était cependant pas une profession de foi idéologique mais bien une tentative populiste de gagner un certain soutien dans le cadre de sa lutte interne contre Zuma et pour être ré-admis dans l’ANC. Homme d’affaire millionnaire, Malema est sorti du même moule que les restes des noirs apprentis bourgeois corrompus de l’ANC. Ce n’est en aucun cas un allié des travailleurs.

    Partout où Hain est allé durant ses deux semaines de visite, l’histoire de l’oppression capitaliste de la classe ouvrière sud-africaine a constamment défilé sous ses yeux. Dans la province du Cap-Occidental, les ouvriers agricoles sont censés vivre avec seulement 7,5€ par jour. Mais un grand propriétaire a magnanimement autorisé ses laboureurs a “manger autant de raisin qu’ils le souhaitent et on serait surpris de voir à quel point ils peuvent manger.’’ (citation reprise du documentaire) Dans la province du Cap-Orientalse développe un exode massif de jeunes à la recherche d’un emploi. Au final, nombre d’entre eux se sont retrouvés abattus par balles au fond des mines de Rustenburg. Les familles qu’ils laissent derrière eux n’ont littéralement pas un sou et essaient de survivre tant bien que mal à travers les campagnes.

    Au jour d’aujourd’hui, la réalité matérielle des masses en Afrique du Sud est des plus sombres. Mais Peter Hain conclut ce documentaire impressionnant en essayant de rester optimiste, en espérant que l’ANC sera à la hauteur de ses tâches et de son héritage démocratique. Une telle pensée utopique n’est pas étonnante de la part d’un député du parti travailliste proche du patronat britannique. Les expériences des mineurs et des autres franges de la classe ouvrière sud-africaine et les leçons qui en ont été tirées au cours de ces quelques derniers mois ont tracé de biens meilleures balises concernant la manière de traiter avec les grosses fortunes du gouvernement de l’ANC.

    Ainsi, les mineurs du Comité National de Grève (toujours non officiellement reconnu aujourd’hui), les membres du Démocratic Socialist Movement (CIO-Afrique du Sud) et de d’autres groupes de la classe ouvrière ont lancé ensemble le Worker’s and Socialist Party (WASP, Parti des travailleurs et des socialistes) dans le but de concurrencer à armes égales l’ANC aux prochaines élections. Il s’agit d’un énorme pas en avant pour offrir aux travailleurs et aux masses pauvres une représentation politique qui leur soit propre.

    La seule option pouvant constituer une alternative à ce gouvernement corrompu protégeant un régime capitaliste brutal et à ce que Peter Hain décrit comme ‘‘profondément démoralisant’’ est la construction d’une société socialiste démocratique basée sur la nationalisation des secteurs-clés de l’économie dans le cadre d’une planification démocratique de l’activité économique.

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