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Tag: Socialisme
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USA : Les socialistes révolutionnaires ouvrent la voie vers une représentation politique des travailleurs indépendante du capital
L’an dernier, les États-Unis ont été moins plongés dans la tourmente économique que l’Union Européenne. Il ne faudrait pourtant pas en conclure que des changements fondamentaux n’y sont pas à l’œuvre. Ce bon vieux ‘‘Rêve Américain’’ gît sur le sol, brisé. L’impressionnant mouvement Occupy qui a déferlé sur le pays en 2011 passera à l’Histoire comme l’une des premières manifestations de ce virage dans la société américaine.
Par Bart Vandersteene
L’économie sous perfusion
L’élite américaine est parvenue à repousser une crise similaire à celle qui frappe l’Union Européenne à l’aide d’une intervention gouvernementale sans précédent. Sans cette ingérence de la part d’autorités publiques qu’ils détestent pourtant tellement, tous les grands adeptes du ‘‘libre marché’’ et du libéralisme auraient assisté, impuissants, à l’effondrement total de leur système. Sans l’intervention du gouvernement et l’instauration d’une politique monétaire basée sur l’injection permanente d’argent dans le système, le chaos économique se serait abattu sur le pays de même qu’une révolte sociale de grande ampleur.
Avec une croissance de 2,2% en 2012, le pire semble être passé. D’ailleurs, commentateurs et politiciens bourgeois proclament l’arrivée de la fin de la crise: le déficit budgétaire US est passé de près de 10% à 4%, le Dow Jones a atteint un niveau plus élevé que celui d’avant la crise et le taux de chômage a chuté de 9,4% en 2009 à 7,4% aujourd’hui.
Pourtant, la crise n’a pas disparu. Pas moins de 5% de la population a perdu son logement, les investissements privés sont à un niveau excessivement bas malgré des taux d’intérêts historiquement bas et les politiques d’austérité font des ravages à tous niveaux. De l’ensemble des emplois créés depuis 2010, les bas salaires en représentent… 76% ! Il s’agit d’emplois temporaires qui fondent comme neige au soleil dès que l’économie cahote à nouveau, avec des salaires qui descendent régulièrement sous les 11 $ de l’heure (soit 8,22 €). Un quart des travailleurs américains gagnent moins que le salaire minimum en vigueur en Belgique. Pour tous ceux là, le Rêve Américain a cédé la place à une longue et pénible lutte pour la survie. En 2007, 55% de la population américaine décrivait sa situation financière comme étant ‘‘bonne’’ ou ‘‘parfaite’’. Ils ne sont aujourd’hui plus que 32%. Les autorités sont toujours tenues de maintenir l’économie sous perfusion pour éviter le pire. Les moyens de la collectivité ne sont pas orientés vers l’investissement public et la création d’emplois, mais vers l’impression d’argent pour maintenir au plus bas les taux d’intérêt et ainsi donner du temps aux banques pour se nettoyer quelque peu avant l’arrivée de la nouvelle vague de la crise.
La faillite de Detroit constitue-t-elle un précédent?
En juillet, la faillite de la ville de Detroit, autrefois le berceau de l’Amérique industrielle moderne, fut un coup dur pour le prestige des Etats-Unis. C’est l’exemple le plus extrême de l’effondrement de la société américaine. Pendant des décennies, Detroit a constitué un réservoir à profits pour les grandes entreprises du secteur automobile. Aujourd’hui, la ville est désertée et polluée.
Cette ville jadis synonyme de prospérité et de progrès connaît un terrifiant taux de chômage (50%) tandis que deux tiers des enfants vivent sous le seuil de pauvreté. Conséquence de la désintégration du filet social suite à de nombreuses années de coupes dans les budgets des services publics et des services sociaux, la criminalité y est cinq fois plus importante que la moyenne américaine. 47% de la population est analphabète. Mais Detroit n’est que le sommet d’un iceberg titanesque. Des dizaines de petites villes sont au bord de la faillite et plusieurs États sont aux prises avec une énorme montagne de dettes. Dans la pratique, une faillite signifie que de nombreux engagements des autorités sont en péril, comme le paiement des pensions.
‘‘15 dollars de l’heure et un syndicat’’
Cette année, des dizaines d’actions se sont produites sous ce slogan, sur base de la colère des travailleurs des secteurs à bas salaires (notamment dans les fast-foods). Le salaire minimum fédéral est actuellement de 7,25 $ de l’heure (5,5 euros). Si le salaire minimum de 1968 avait suivi l’inflation, il serait aujourd’hui de 16,8 dollars. Impossible de se construire une vie décente avec de tels salaires. Des millions d’Américains combinent donc plusieurs emplois pour pouvoir joindre les deux bouts, ce qui explique le soutien rencontré par les actions en faveur d’un salaire minimum de 15 $ de l’heure. Il s’agit aussi du slogan principal de Socialist Alternative à Seattle.
Socialist Alternative : une belle percée à Seattle, et maintenant à Minneapolis?
Démocrates et Républicains ne représentent que les deux facettes d’une même médaille : celle d’une politique aux ordres de l’élite capitaliste. Il a fallu une campagne très intelligente à Obama & Co pour réussir à faire croire en la perspective d’un ‘‘changement’’ en 2008. Mais Obama n’a rien changé, et sa popularité est très fortement retombée. Les promesses non tenues ont alimenté une grande frustration dont le danger est qu’elle soit instrumentalisée aux élections de mi-mandat de 2014 par les Républicains et, surtout, par les populistes de droite du Tea Party. Ils ne manqueront pas d’accuser des boucs émissaires tels que les immigrés, les demandeurs d’emploi, les syndicats,…
Mais cela peut être différent. L’espace pour une alternative politique de gauche radicale est étonnamment grand. Nos camarades de Socialist Alternative, malgré leurs moyens limités, ont pu s’en rendre compte dans leurs campagnes menées pour les élections locales dans les grandes villes que sont Seattle, Minneapolis et Boston. Défendre un programme explicitement anticapitaliste et socialiste ne constitue pas un obstacle.
À Seattle vient de se dérouler un premier tour destiné à désigner les deux candidats du second tour du 7 novembre. La candidate de Socialist Alternative, Kshama Sawant, a obtenu le résultat impressionnant de 35% (44.458 voix). C’est un résultat sans précédent pour un tel type de campagne. Un commentateur politique en parlé en ces termes: ‘‘ce n’est rien de moins qu’un tremblement de terre. Kshama a tracé une nouvelle voie pour des candidats indépendants qui prennent directement en main la défense des intérêts et des thèmes de la classe ouvrière.’’ Des dizaines de militants et de volontaires sont maintenant sur le pied de guerre pour la dernière ligne droite vers le second tour du 7 novembre.
Nous sommes tout aussi impatients de voir quels seront les résultats obtenus à Boston et Minneapolis. Ty Moore, candidat de Socialist Alternative à Minneapolis, y affrontera le candidat démocrate Alondra Cano dans la neuvième circonscription de cette ville de 400.000 habitants. Ty et Socialist Alternative ont acquis une certaine renommée au fil du temps grâce à leurs campagnes, notamment contre les expulsions et les saisies immobilières. Ces dernières années, des millions de familles ont été littéralement foutues à la porte de chez elles faute de pouvoir rembourser leurs hypothèques, la plupart du temps en raison de clauses scandaleuses imposées par les banques lors de la conclusion des prêts. Essentiellement sous l’impulsion de Socialist Alternative, le mouvement Occupy s’est orienté sur cette question et a lancé ‘‘Occupy Homes’’. De plus, la campagne de Ty bénéficie du soutien de la principale centrale syndicale de Minneapolis et de nombreux militants locaux. Ty a une petite mais réelle chance de se faire élire au conseil communal.
Socialist Alternative est la seule organisation de gauche radicale américaine à avoir correctement estimé les profonds changements en cours dans la société et les possibilités que cela ouvrait sur le plan politique. Le mouvement Occupy a laissé éclater au grand jour la colère et la rage de millions de personnes. La tonalité du débat politique a été puissamment modifiée au sein de la population. La jeunesse refuse de plus en plus la logique du système qui l’étrangle avec des prêts étudiants hors de prix et des emplois aux salaires de misère tandis que les travailleurs s’opposent à l’austérité et aux attaques antisyndicales. C’est sur ce contexte que ce sont rajoutés les scandales des révélations de Bradley-Chelsea Manning sur les crimes de guerre de l’armée US et du programme de surveillance massif de l’administration Obama.
Dans une déclaration qui a suivi le succès du premier tour à Seattle, Socialist Alternative a notamment expliqué reconnaître que ‘‘les élections ne sont pas l’endroit idéal pour faire de la politique et que c’est en soi insuffisant pour aboutir à un réel changement. Le pouvoir du Grand Capital et des médias contrôle la politique sous le capitalisme. L’histoire nous montre que chaque victoire des travailleurs a été remportée par des mouvements de masse. (…) Le développement de la lutte sociale dans les mois à venir déterminera le résultat exact des élections.
La ‘‘faisabilité’’ se mesurera à l’aune de l’organisation des jeunes et des travailleurs ainsi qu’à l’augmentation d’actions, de grèves, etc. (…) Nos campagnes constitueront un exemple vivant de la manière dont la gauche et les travailleurs peuvent mener des campagnes indépendantes et servir de modèle pour se répandre dans tout le pays. Ce n’est que l’avant-goût de la prochaine vague de résistance qui va défier la politique des deux partis du Big Business.’’
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Contre le capitalisme: Organisons la résistance!
En recevant son prix de ‘‘manager de l’année’’, Jan De Nul, le bien-nommé, a déclaré que s’il y a tellement de gens au chômage, c’est parce que ‘‘L’envie de travailler n’y est pas.’’ C’est particulièrement le cas chez les immigrés selon ce patron : ‘‘Vous savez combien d’immigrés nord-africains travaillent ?’’
Tract de rentrée des Etudiants de Gauche Actifs (EGA)
Voilà parfaitement synthétisée toute l’atmosphère actuelle. Tous ces capitalistes qui ont spéculé et profité de la moindre occasion pour cacher leurs profits dans des paradis fiscaux s’évertuent maintenant à faire endosser la responsabilité de la crise à ses victimes ! Chômeurs, immigrés, jeunes, retraités,… personne n’y échappe. Selon une étude récente d’Adecco, en Belgique, les jeunes envoient en moyenne 13 candidatures par mois mais doivent attendre 8,9 mois avant d’avoir effectivement un emploi.
Nous sommes embourbés dans la crise depuis cinq ans, et aucun rayon de soleil ne pointe à l’horizon. Le taux de chômage chez les jeunes a augmenté pour atteindre plus de 22% et, même avec une croissance économique limitée en 2014, le pire est à venir. Quant aux jeunes qui trouvent un emploi, ce sont souvent des jobs temporaires et précaires. Essayez dans ces conditions d’acheter ou même de louer une maison quand l’on exige de plus en plus d’avoir un contrat de travail à durée indéterminée… Ce système nous prépare une ‘‘génération sans avenir’’ !
Les capitalistes tentent par tous les moyens de masquer les causes de ce désespoir. Chercher un bouc émissaire parmi les victimes est très populaire, de même que monter diverses couches de la population les unes contre les autres. Le racisme, le sexisme et l’homophobie ont le vent en poupe. Cela donne aux militants d’extrêmedroite la confiance nécessaire pour passer à l’étape suivante et recourir plus ouvertement à la violence, comme en Grèce ou en France.
S’opposer à cette logique, ça signifie s’exposer à la répression. Nous n’en sommes pas encore à devoir traiter avec les gaz lacrymogènes, mais l’arsenal répressif belge a tout de même été élargi, notamment avec les Sanctions Administratives Communales (SAC) dont l’arbitraire permet d’être utilisées à toutes les sauces.
Nous voulons organiser la contre-offensive. Se plaindre tout seul n’est pas suffisant, nous devons nous structurer et lutter pour une alternative ! Il est nécessaire de se battre non seulement contre les effets de la crise, mais aussi contre ses causes. Le capitalisme créé la famine, la misère, le racisme et la répression. Et la crise montre, qu’encore une fois, ce système n’a aucun avenir à nous proposer. Construisons un outil de lutte avec lequel nous bâtirons une société différente, dans laquelle les intérêts de la majorité ne sont pas étouffés par ceux d’une infime minorité. C’est ce que nous appelons une société socialiste. Maintenant, n’hésite plus et rejoins-nous !
Syrie : Non à l’impérialisme, à la dictature d’Assad, à l’islam politique réac tionna ire et à toutes les forces capitalistes !
Il y a deux ans et demi, la Syrie a connu de larges soulèvements populaires sous l’impulsion des révolutions en Egypte et en Tunisie. Mais, les régimes semiféodaux du Qatar et d’Arabie Saoudite et les États impérialistes sont rapidement intervenus pour dévier le mouvement vers une guerre civile sectaire qui a, de plus, intensifié les tentions entre Sunnites et Chiites dans la région. Les images atroces de centaines de tués et de milliers de blessés, suite au recours aux armes chimiques, ont choqué la population du monde entier. Obama et d’autres politiciens occidentaux profitent de cette situation et tentent d’instrumentaliser ce sentiment populaire à leur avantage.
Vouloir en finir avec cette horreur est légitime, mais espérer que les gouvernements impérialistes puissent livrer cette solution est une terrible erreur, on l’a vu avec l’Irak, l’Afghanistan ou encore la Lybie. Nous ne pouvons pas prendre de raccourci !
L’intervention des forces impérialistes n’a aucune solution à offrir et n’a rien à voir avec la protection des civils, mais bien avec le renforcement de la domination impérialiste dans cette zone cruciale du monde. L’intensification des bombardements ne conduira qu’à une augmentation des souffrances des masses. Le régime syrien d’Assad est relativement fort et ne tombera pas en quelques jours. Puis, vu l’importance d’Al-Qaïda en Syrie, il existe aussi un grave danger d’un accroissement du terrorisme. Une intervention mènera, comme cela a déjà été le cas dans d’autres pays, à un conflit ethnique plus important encore, et qui pourrait durer des années, sans parler de l’impact au-delà des frontières syriennes.
Mais simplement s’opposer à l’intervention impérialiste est insuffisant, cela laisse la porte ouverte à un soutien au dictateur Assad. Pire, certains vont jusqu’à défendre l’idée erronée selon laquelle ‘‘les ennemis de nos ennemis sont nos amis’’. Il n’est pas non plus possible de prendre parti pour le camp des rebelles, liés soit à l’islam politique réactionnaire, soit à d’anciens dirigeants du régime. Chacune de ces forces défend des intérêts liés à l’exploitation et à l’oppression des masses. Notre seul camp, c’est celui de notre classe, celle des travailleurs, des jeunes, des opprimés ! Nous devons encourager son auto-organisation ! Cette approche est celle que nous défendons avec les Etudiants de Gauche Actifs.
Cette tâche est immense, mais la Syrie n’est pas isolée du reste du monde : les processus révolutionnaires sont contagieux et avancent par vagues. Les luttes de masse en Tunisie et en Egypte s’orientent vers la chute du système lui-même et pas seulement vers celle d’un gouvernement capitaliste autoritaire qui sera remplacé par un autre. La construction d’un rapport de forces vers un régime basé sur la satisfaction des besoins des masses aura ses répercussions sur la Syrie et ailleurs. L’élément crucial sera la construction d’instruments de lutte (comités, syndicat et parti) afin d’unir et de défendre les travailleurs et les pauvres par-delà leur religion ou leur ethnie.
Racisme, homophobie, sexisme : tout ce qui nous divise nous affaiblit !
L’extrême-droite et les forces réactionnaires instrumentalisent la colère sociale pour l’orienter contre des boucs émissaires, protégeant ainsi les vrais responsables de la crise : les capitalistes.
Les néonazis grecs d’Aube Dorée n’hésitent pas à utiliser la force contre les immigrés ou leurs opposants politiques. En juin, à Paris, le jeune militant antifasciste Clément Méric a été tué par des néonazis. Ripostons contre ces idées nauséabondes ! Lorsque l’extrême droite veut occuper les rues, tels les jeunes néofascistes flamands du NSV, mobilisons largement pour des contre-manifestations non-violentes !
En Russie, les lois et le harcèlement homophobes pleuvent et deviennent monnaie courante. En France, des mouvements conservateurs se sont développés contre le droit au mariage homosexuel. Chez nous, des courants similaires organisent des piquets d’intimidation devant les centres d’avortement de plusieurs villes contre le droit des femmes à disposer de leur corps. Défendons le droit à l’avortement, mais aussi le droit d’avoir des enfants sans s’appauvrir ! C’est pourquoi nous luttons aussi pour des places gratuites et de qualités pour chaque enfant dans les crèches et dans l’enseignement ! Pour des services publics de qualité, non à l’austérité !
Tout ce qui nous divise nous affaiblit ! Luttons ensemble pour une autre société sans discrimination de sexe, d’orientation sexuelle, de nationalité ou de religion !
Soutiens SOP-SAC
Les Sanctions Administratives Communales (SAC) sont de plus en plus répandues dans notre société. Petit à petit, tout est déclaré comme étant nuisible : un jeune qui mange un sandwich sur les marches d’une église ou un travailleur qui a le malheur de sortir ses poubelles un jour trop tôt. Mais ceux qui protestent contre les maux de cette société sont aussi touchés ! A Anvers, par exemple, ceux qui ont manifesté contre Monsanto, ont été arrêtés et sont menacés de recevoir une amende. Dans la logique d’austérité, les SAC sont devenues une nouvelle méthode pour faire rentrer de l’argent.
A Anvers, la ville espère toucher entre 1 et 1,25 millions d’euros des SAC. Nous refusons cette logique et appelons à soutenir Stop- SAC ! Le 26 octobre, il y aura une manife – station nationale contre les SAC dans la lignée de celle du 29 juin durant laquelle 1500 manifestants sont descendus dans les rues de Bruxelles. Cette dernière à clairement montré à Milquet – Madame SAC – que l’opposition à ces amendes n’est pas « du bruit sur internet ». Rejoins la campagne Stop-SAC !
Agenda
Meetings de rentrée
Tu veux mieux nous connaitre ? Alors viens à nos meetings de rentrée!
A Bruxelles, notre premier meeting sera sur l’héritage de la révolution chilienne de 1973 pour les luttes d’aujourd’hui (en + : expo photo des luttes sociales au Chili). La semaine d’après, nous parlerons de la situation en Syrie et de l’alternative à Assad et aux rebelles.
A Liège, après un premier débat sur la Syrie et la situation de révolution et de contre-révolution au Moyen Orient et en Afrique du Nord tenu début septembre, un meeting sera organisé sur l’héritage de la révolution chilienne.
- Bruxelles : Meeting Chili: 18/09, 19h au H13.08
- Bruxelles : Meeting Syrie: 24/09, 19h au H22.15
- Liège : Meeting Chili : 24/09, Fédération des Etudiants (Fédé), 24 Place du XX Août, 19h
Soutiens la campagne Stop-SAC
EGA est à la base de la campagne Stop-SAC en Belgique et l’initiative de la manifestation nationale du 26 octobre. Participe toi aussi à la construction d’un comité Stop-SAC dans ton université, ta haute-école…
26 oct, 14h à la gare du Nord
Encerclons le parlement!
EGA soutient l’appel des comités Action-Europe (CAE) pour aller manifester autour du parlement contre le gel des salaires!
26 sept, 17h à la Colonne du congrès
Manifestation contre les armes nucléaires
Fukushima a ramené dans l’actualité le danger du nucléaire civil… Ne laissons pas les gouvernements capitalistes l’utiliser comme arme!
Manif le 20 oct à 13h au Parc Jubel
Manifestation anti-NSV
Début mars, les néo-nazis du NSV (jeunes du Vlaams Belang) organisent leur marche de la haine annuelle. EGA organise systématiquement une contre-manif qui surpasse chaque fois celle de l’extrême droite !
Début mars 2014 à Anvers
Rejoins EGA!
Comment devenir membre? Contacte-nous !
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Via SMS : “membre EGA + Nom + Ville” au 0473.25.33.25
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Chili 1973 : l’autre 11 septembre
11 septembre 1973, les Forces Armées chiliennes aidées par les Etats-Unis exécutent un coup d’Etat contre le gouvernement de l’Unité Populaire présidé par le socialiste réformiste Salvador Allende. La population est massivement réprimée, les organisations de gauche sont interdites et plus d’une centaine de milliers de militants politiques s’exilent pour fuir la torture et les assassinats. Une dictature militaire s’établit et implante au Chili une politique néolibérale extrêmement brutale privatisant tout sur son passage.
Dossier de Pablo N. (Bruxelles)
De cette manière 2 ans après le putsch militaire, le pouvoir d’achat des salariés est réduit de 40% et le taux de chômage atteint vite 15 à 20% contre 4% en 1973. Après 17 ans de dictature et le retour à la ‘‘démocratie’’ en 1990, la société chilienne est encore fortement marquée par cette sombre période. Même après 20 ans de gouvernement de ‘‘centre-gauche’’, la Constitution en vigueur est toujours celle du régime militaire, la politique néolibérale est toujours présente, la pauvreté aussi et la répression également. En effet, le 6 août dernier, un militant mapuche (une des nations indigènes du Chili) a été assassiné par les Forces Spéciales de la police.
‘‘Poder Popular’’ et résistance de l’élite capitaliste
Pourquoi ce coup d’Etat ? Pourquoi la population chilienne a-t-elle subit une telle dictature sanglante ? Tout commença en novembre 1970 avec l’arrivée au pouvoir d’une coalition de partis de gauche, l’Unité Populaire. Elle était formée autour des deux grands partis des travailleurs – le Parti Communiste et le Parti Socialiste – auxquels s’ajoutaient de plus petits partis de gauche chrétiens ou radicaux. Le nouveau gouvernement s’engagea dans des réformes importantes au profit des travailleurs, des paysans et des pauvres du pays. Les terres agricoles furent équitablement partagées, les salaires augmentèrent de 30% en moyenne, les prix des matières premières furent bloqués, etc. Cela provoqua un immense enthousiasme parmi la population chilienne, doublé d’un regain de combativité parmi les militants politiques et syndicaux qui voulaient de plus en plus exercer une démocratie directe : le ‘‘poder popular’’ (pouvoir populaire). Mais cela provoqua également l’ire des classes possédantes qui ne reculèrent devant aucun procédé pour attaquer le gouvernement et les classes exploitées.
Jusqu’à ce qu’une première tentative de putsch ait lieu en octobre 1972, au travers d’un lock-out patronal (grève patronale et fermeture des usines) paralysant toute la société chilienne. Les syndicats de camionneurs, soudoyés par la CIA, déclenchèrent une grève illimitée et tous les syndicats patronaux suivis par les Ordres professionnelles (avocats, médecins, architectes, etc.) les rejoignirent.
Le gouvernement et les dirigeants nationaux des partis et du syndicat ne surent comment réagir. En effet, la crise les avait pris de cours et même s’ils étaient aux commandes de l’appareil d’Etat, ils ne purent instaurer des mesures efficaces. Cet appareil était encore trop sous l’emprise de la droite et des capitalistes et a saboté toutes les actions légales de Salvador Allende.
L’initiative des masses
La réponse vint alors de la population. Dans les campagnes, les paysans et les peuples indigènes occupèrent les terres des grands propriétaires. Dans tous les quartiers, surtout dans les plus pauvres, se formèrent des Comités de Ravitaillement et de Contrôle des Prix (JAP, Juntas de Abastecimiento y Precios) qui réquisitionnèrent les commerces et les supermarchés qui trichaient avec les prix et vendaient des produits au marché noir. A la fin janvier 1972, il en existait 2.200 dans tout le pays, qui redistribuaient quotidiennement et équitablement les marchandises.
Mais ce fut dans les zones industrielles que la réponse se fit la plus profonde et la plus dangereuse pour le système capitaliste. Ainsi les délégués syndicaux issus d’un même cordon (zoning) industriel se sont organisés en coordinations. Ces coordinations prirent en main l’occupation des usines, désertées par les cadres supérieurs et les patrons. Petit à petit, grâce à leur solidarité, ils commencèrent à autogérer la production. Souvent les cordons ont garanti le transport des travailleurs et des produits ou encore la distribution des aliments, tout en assurant la garde des entreprises contre d’éventuels sabotages. Un nouveau pouvoir issu des travailleurs était en gestation.
Le pays put ainsi reprendre une activité économique relativement normale mais, pour la première fois, la classe des travailleurs avait pris conscience de sa puissance et de sa capacité à faire marcher la société sans les capitalistes. De cette manière, la grève patronale prit fin, mais la lutte qui opposait les classes sociales devint visible aux yeux de tous. Le Chili entrait dans un processus véritablement révolutionnaire et les cordons industriels furent son expression la plus poussée.
Le gouvernement cherche la conciliation
Pourtant le gouvernement d’Allende tenta de calmer la combativité des chiliens. Il entra dans une politique de discussions stériles avec les secteurs dit ‘‘progressistes’’ des capitalistes dans le but de contrer l’impérialisme étranger et la grande bourgeoisie locale. Il tenta de rendre les entreprises occupées et autogérées par les cordons industriels à leurs patrons. De leur côté, les travailleurs, tout en continuant à soutenir l’Unité Populaire, critiquèrent durement ses concessions et ses demi-mesures. Ils exigeaient de celui-ci, la ‘‘mano dura’’ (main ferme) contre les sabotages de la droite et les attaques de groupes d’extrême-droite en même temps que la nationalisation officielle des entreprises occupées.
Fin juin 1973, le Chili fit face à une nouvelle tentative de coup d’Etat, mais cette fois-ci militaire. Elle fut rapidement avortée. Les travailleurs et les paysans en profitèrent pour étendre les occupations et renforcer le pouvoir populaire en créant de plus large coordination.
Mais la population chilienne commença à se rendre compte du danger qui venait. Plusieurs manifestations ont eu lieu devant le Palais Présidentiel, dans lesquelles les slogans les plus repris exigeaient l’armement des masses afin qu’elles puissent se défendre. Pourtant, aucun des partis de gauche n’a répondu à ce souhait. Quant aux cordons industriels, même s’ils étaient souvent dirigés par des militants de la base de ces partis politiques, ils ne reçurent aucune aide pour se développer. Au contraire, les partis au pouvoir tentèrent de les maintenir sous le contrôle de la bureaucratie nationale du syndicat.
Pendant ce temps les capitalistes se réorganisèrent. Ils purgèrent l’armée et la police des éléments de gauche qui y avaient une forte influence et, un peu plus de deux mois plus tard, ils déclenchèrent un ultime coup d’Etat. Les travailleurs, sans armes, sans direction politique ou militaire, furent désemparés et subirent de plein fouet la répression de la dictature de Pinochet.
Quelles leçons pour aujourd’hui ?
Revenons maintenant à notre époque. La Tunisie est en proie à une situation, à priori, fort différente du Chili d’Allende. Pourtant, elle a été et est toujours le théâtre de la première révolution du 21ième siècle et, encore une fois, des organes d’auto-organisation de la population sont apparus.
Durant l’apogée révolutionnaire, des comités de vigilance se sont formés pour protéger les quartiers contre les forces du dictateur Ben Ali. Des travailleurs ont repris à leur compte la gestion d’entreprises dirigées par des proches de l’ancien régime et des comités de ravitaillement se sont développés pour faire face à la désorganisation de la société. Récemment, au début du mois d’août 2013 – bien que peu d’informations nous parviennent et que la situation a l’air de changer – on a appris que dans la ville de Sidi Bouzid, berceau de la révolution tunisienne, la population avait constitué un comité de Salut public contrôlant les affaires de la ville, sous l’autorité du syndicat UGTT (Union Générale des Travailleurs Tunisiens). Des comités similaires ont été créés dans d’autres villes rejetant le pouvoir central.
Ainsi la population tunisienne, d’abord dans son rejet du gouvernement de Ben Ali et ensuite de celui des islamistes réactionnaires d’Ennahda a formé de nouveaux instruments de luttes répondant aux nécessités directes de la population. Sur cette base, un parallèle avec le phénomène des cordons peut commencer à être esquissé. C’est à partir de ce genre de pouvoir émergeant qu’une véritable démocratie des travailleurs peut être construite en renversant le capitalisme et instituant le contrôle démocratique des secteurs-clés de l’économie.
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École d'été du CIO : La crise européenne et la lutte de classe
Il faut une alternative socialiste pour ce continent en crise
C’est Hannah Sell, membre dirigeante du Socialist Party d’Angleterre et du pays de Galles et membre du Secrétariat international du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO), qui a introduit la discussion en session plénière sur la situation en Europe lors de l’école d’été du CIO qui s’est déroulée en Belgique en juillet et à laquelle ont assisté près de 400 militants, venus de 33 pays différents.
Rapport par Robin Clapp, Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles)
Tout le continent européen est en proie à une austérité brutale qui est la réponse de la classe dirigeante à cinq ans de récession économique. Cela fait six trimestres consécutifs que le PIB de la zone euro chute. Cette récession cause la panique parmi les capitalistes, qui sont maintenant aux prises avec les répercussions du ralentissement économique de plus en plus grand en Chine. Ce ralentissement étouffe les chances d’une reprise économique dans les quelques parties du monde qui sont jusqu’ici parvenues à se maintenir et à passer pour des acteurs de croissance économique.
L’Allemagne, qui était demeurée la locomotive économique de la zone euro, a maintenant commencé à stagner. Elle a connu sa plus grande contraction du PIB en quatre ans lors du premier trimestre de 2013. Alors que les marchés européens sont ravagés par la crise, les capitalistes allemands s’étaient en partie tournés vers le marché chinois, tirant parti de la demande chinoise qui semblait alors insatiable. Ils étaient ainsi parvenus depuis 2009 à doubler leurs exportations vers la Chine.
Une crise qui s’ouvre en plein cœur de la zone euro
Merkel est en train de réaliser qu’une nouvelle phase de la crise est en train de se développer au cœur même de la zone euro. L’Allemagne va sans doute bientôt connaitre sa première fermeture d’une usine automobile depuis 1945, et déjà les prédictions économiques changeantes ont eu pour répercussions un certain nombre de grèves, encore petites, mais extrêmement importantes.
L’industrie automobile européenne est en crise. L’énorme surproduction conduit à des pertes annuelles de 4 milliards d’euros pour les producteurs.
Dans toute la zone euro, le niveau général de la demande a chuté de 5 % par rapport au niveau d’avant la crise en 2007, alors qu’en Europe méridionale (Italie, Espagne, etc.) la demande s’est littéralement effondrée, avec une chute de 15 %.
L’expression sans doute la plus choquante de la crise européenne est la hausse sans précédent du taux de chômage, qui affecte surtout les jeunes. Les conséquences sociales de cette véritable bombe à retardement se feront sentir dans tous les pays. Le chômage des jeunes est de 60 % en Grèce, de 50 % en Espagne, et de 40 % en Italie et au Portugal. Il n’est pas un pays de l’Union européenne qui ne soit affecté. Dans un pays après l’autre, on voit les jeunes quitter leur pays à la recherche de travail. Notre camarade Laura du Socialist Party irlandais a expliqué que, dans son pays, l’émigration a atteint le même niveau que celui lors de la grande famine du milieu du 19ème siècle. Beaucoup de jeunes européens partent “se chercher” dans les anciennes colonies de leur pays. C’est ainsi que des légions de jeunes Portugais se rendent à présent en Angola ou au Mozambique.
L’inégalité en Suède
La Suède avait autrefois la réputation d’être un modèle d’“État-providence” social-démocrate sans son pareil après la Seconde Guerre. Pourtant, à partir des années ’80, l’inégalité s’est accrue dans ce pays plus rapidement que dans aucun autre pays européen. Un jeune sur quatre y est maintenant au chômage. Dans les quartiers ouvriers, le nombre de jeunes chômeurs est encore plus grand. Les émeutes de Stockholm qui se sont produites récemment reflètent le fait que là-bas comme ailleurs, ce chômage structurel mène à un dangereux déséquilibre qui ne peut que causer des explosions sociales.
Notre camarade Elin du Rättvisepartiet Socialisterna (Parti de la résistance socialiste, CIO-Suède) a expliqué comment le CIO a pu faire une importante intervention dans ce mouvement explosif, canalisant les très compréhensibles sentiments de colère, de désespoir et de dégout vis-à-vis des partis politiques en général, en une explication de pourquoi il nous faut absolument développer une alternative socialiste. Plus de 500 personnes ont participé à notre meeting dans le quartier de Husby d’où étaient parties les émeutes, en soutien à nos revendications pour la fin de la brutalité policière, pour des emplois et pour des logements pour les jeunes.
Les mouvements révolutionnaires sont une conséquence inévitable de la profonde crise qui affecte toute l’Europe, et les plus malins parmi les capitalistes en sont fort conscients. C’est de là que viennent leurs récentes tentatives désespérées, mais absolument inadéquates, de discuter de plans de création d’emploi lors de leur forum européen pour l’emploi.
Même là où les jeunes ont des emplois, ils tombent souvent dans le “précariat”, c’est-à-dire des contrats à l’heure, sans aucune sécurité d’embauche. Plus de 1,6 million de jeunes Italiens survivent grâce à des emplois temporaires sous-payés ; en Allemagne, 9 millions de travailleurs gagnent moins de 8,5 € de l’heure dans des emplois qu’on appelle des “mini-jobs”.
Notre camarade Angelica de Sozialistische Alternative (Alternative socialiste, CIO-Allemagne) a fait remarquer que les salaires de beaucoup de travailleurs allemands sont si bas que le pays est de plus en plus considéré comme un pays de pauvres. Les entreprises belges qui se trouvent près de la frontière allemande ne cessent de se plaindre de la concurrence illégale qui leur est faite par les entreprises allemandes et qui les force à fermer.
Au cours des cinq dernières années, nous avons vu des luttes ouvrières se développer à l’échelle de tout le continent. Mais ces luttes n’ont été que le prélude des puissants mouvements qui vont se développer au cours de la prochaine période.
La base sociale du capitalisme grec
En Grèce, où le niveau de vie a été attaqué d’une manière qui n’a été vue nulle part ailleurs en Europe depuis l’époque du fascisme d’avant-guerre, il y a eu d’innombrables grèves générales d’un jour, par lesquelles les travailleurs et la classe moyenne ont tenté de se défendre. La base sociale du capitalisme grec a été complètement désintégrée : les docteurs, les avocats, les enseignants, les employés de banque se retrouvent tous dans les files du chômage ou en train de mendier dans les rues.
Si la classe ouvrière grecque avait eu un parti révolutionnaire d’une certaine taille, elle aurait pu prendre le pouvoir à plusieurs reprises déjà, mais à cause des capitulations de la part des vieux partis sociaux-démocrates – et même de la part de nouvelles forces de gauche comme Syriza qui refuse de comprendre l’ampleur de cette crise et par conséquent la nécessité d’une révolution sociale afin de renverser le capitalisme – la politique d’austérité est toujours dominante.
La rapidité et l’énormité de la crise a stupéfait les travailleurs à divers degrés. Cela, en plus des effets rémanents de l’effondrement du stalinisme, de la dégénérescence des anciens partis ouvriers qui se sont rendus à des positions pro-capitalistes et de l’échec des tentatives de construire de nouveaux partis des travailleurs durables, a fait que la classe ouvrière aujourd’hui manque d’une conscience socialiste large.
Toutes ces complications ont pour effet que le processus révolutionnaire pourrait tirer en longueur, même alors que la situation est de plus en plus mure pour une transformation socialiste de la société.
De nouvelles luttes sont inévitables dans chaque pays. Même là où le niveau d’organisation des travailleurs s’est dégradé, la lutte va développer la conscience, et notre intervention peut faciliter cela, comme le montre l’exemple de l’Afrique du Sud.
Dans ce pays, malgré nos modestes forces, nous avons été capables d’intervenir de manière décisive grâce à un programme et une orientation correctes en directions des mineurs. La création du Workers and Socialist Party (WASP) marque un point tournant et constitue un immense pas en avant pour l’ensemble de la classe ouvrière.
Tensions de classe, ethniques et nationales
La crise capitaliste va non seulement intensifier les tensions de classe, mais aussi les tensions nationales et ethniques. Les travailleurs connaitront des retraites, des complications et des défaites, mais qui n’auront pas en général le caractère de défaites fondamentales qui auraient pour résultat de briser les travailleurs pour toute une période historique. En Italie par exemple, une situation pré-révolutionnaire s’est prolongée pendant toute une décennie dans les années ’70.
À l’époque comme maintenant, la principale question est celle de la direction, et notre défi est de construire un parti révolutionnaire et d’intervenir dans la construction de partis des travailleurs de masse qui servent à la fois d’école pour le développement de la lutte de classe et de structures dans lesquelles la méthode et le programme du marxisme peuvent être débattus et adoptés.
Dans toute une section de la société grecque vit un désespoir largement répandu. La direction du parti de gauche Syriza a commencé à virer à droite. Ses dirigeants ne portent plus de jeans et de t-shirt, mais arborent des costumes-cravate et un programme qui abandonne tranquillement le refus de payer la dette pour remplacer cette revendication par celle de l’annulation des intérêts de paiement de la dette. Tsipras, le dirigeant de Syriza qui avait failli prendre le pouvoir l’année passée, a vu son taux de soutien dans les sondages tomber à 10 % – moins que celui du premier ministre de droite Samaras!
Malgré cela, un gouvernement Syriza reste la perspective la plus probable après les prochaines élections, et cela pourrait mener à une nouvelle vague de lutte de classes en Grèce. Il y a déjà toute une série d’occupations d’usine, les travailleurs prenant des mesures concrètes pour défendre leurs emplois, et ces actions pourraient s’étendre à une échelle de masse sous un gouvernement Syriza, non pas sous la direction de ce parti, mais sous l’impact de la volonté des masses d’aller plus encore de l’avant.
Aube dorée au gouvernement ?
La classe capitaliste grecque est en train de débattre de la possibilité de laisser entrer le parti néo-fasciste Aube dorée au gouvernement dans le cadre d’une coalition dirigée par le parti de droite Nouvelle Démocratie, maintenant ou afin de former un gouvernement après les prochaines élections générales.
Une telle manœuvre de leur part pourrait créer une explosion à travers toute la société grecque, qui reflèterait la puissante insurrection asturienne, en Espagne en 1934, lorsque Gil Robles, chef du parti d’extrême-droite Confédération espagnole des droits autonomes (CEDA), est devenu ministre du gouvernement.
Ekaterina, de Xekinima, section grecque du CIO, a insisté sur le fait que bien que le soutien à Aube dorée dans les sondages se soit élevé jusqu’à atteindre entre 10 % et 15 %, cela n’a pas mené à un accroissement de sa puissance de combat de rues. La menace que pose Aube dorée a cependant nécessité la création de comités antifascistes dans lesquels nous jouons un rôle majeur.
Il ne fait aucun doute qu’une victoire de Syriza provoquerait une nouvelle phase de crise redoublée, pendant laquelle Aube dorée pourrait s’accroitre si aucune opposition ne leur était offerte. Sur le long terme, au fur et à mesure que les vieilles normes sont ébranlées, la classe dirigeante de chaque pays va se préparer pour de grands conflits de classe, y compris pour la guerre civile.
Toutes les institutions du capitalisme sont en effet de plus en plus démasquées et discréditées, au fur et à mesure que la crise s’approfondit. En Tchéquie et au Luxembourg, les dirigeants ont été forcés de démissionner à la suite de scandales d’espionnage ; le gouvernement bulgare a été chassé du pouvoir par les plus grandes manifestations jamais vues dans ce pays depuis la chute du Mur il y a 20 ans.
Tout comme ses camarades en Espagne, le gouvernement portugais a été appelé de gouvernement “zombie” (cadavre qui continue à marcher) : les ministres démissionnent l’un après l’autre à la suite d’une grève générale qui a explicitement réclamé la démission de tout le gouvernement. 80 % des travailleurs portugais ont participé à cette grève, y compris une grande partie de la police et des forces armées.
Le scandale de corruption qui a submergé le premier ministre Rajoy en Espagne a révélé la pourriture au cœur même du gouvernement. Le journal El Mundo parle à juste titre d’un esprit pré-révolutionnaire qui s’est emparé de larges couches parmi les masses. La seule raison pour laquelle ce gouvernement n’est pas encore tombé est que les capitalistes n’ont pas d’autre alternative viable, et ont peur de la hausse du soutien pour le parti Izquierda Unida (Gauche unie), qui se trouve juste derrière le Parti socialiste espagnol dans les sondages.
La pause espagnole
Le camarade Rob du groupe Socialismo Revolucionario (CIO-Espagne) a expliqué qu’il y a eu cette année une certaine pause dans la lutte à la suite de la terrible grève des mineurs de 2012 qui contenait en elle-même les germes d’une guerre civile, à la suite de l’occupation des hôpitaux partout dans le pays, et de deux grèves générales qui ont entrainé respectivement 10 et 11 millions de travailleurs. Mais cette année a en réalité été une année de meetings et de débats intenses. Ainsi, on a vu une assemblée de la gauche locale attirer 1000 personnes pour discuter de la prochaine étape dans la lutte.
Nous avons mis en avant la revendication d’une grève générale de 48 heures liée à l’établissement d’assemblées partout dans le pays afin de lutter pour faire tomber le gouvernement. Il faut un front uni de la gauche avec les mouvements sociaux, autour des mots d’ordre « Non à l’Europe des patrons », « Nationalisation des moyens de production », et « Droit à l’auto-détermination » pour les Catalans et les autres nationalités qui le demanderaient.
Notre camarade Eric du Parti Socialiste de Lutte (PSL, CIO-Belgique) a souligné la férocité sans précédent des attaques qui sont perpétrées sur leurs travailleurs par les capitalistes belges. La Belgique est restée sans gouvernement officiel pendant 540 jours, parce que la classe dirigeante était perdue en palabres quant à la meilleure façon d’avancer dans un contexte d’antagonismes nationaux croissants. Ni la majorité de la classe dirigeante, ni la classe ouvrière ne désirait la scission de la Belgique, mais dans une période de crise, les divisions peuvent devenir plus aigües entre la Flandre et la Wallonie.
Mais inévitablement, vu le manque d’une alternative socialiste large à portée des masses, il y a aussi la montée de sentiments nationalistes anti-européens.
En Europe méridionale, même si la troïka (FMI, Commission européenne et Banque centrale européenne) est absolument détestée, on voit que même en Grèce, les travailleurs sont très prudents et craignent de demander la sortie de l’UE, car ils ont peur de ce que pourrait représenter l’alternative.
Notre camarade Sacha, de notre section allemande, a fait remarquer que le point de départ devrait être une lutte pan-européenne contre l’austérité. Nous avons vu le 14 novembre 2012 la première occasion d’organiser une grève générale pan-européenne de 24 h dans plusieurs pays à l’occasion d’une journée d’action européenne de la Confédération Européenne des Syndicats (CES), mais cela n’a pas été saisi.
Un système en perdition
Cette crise n’est pas seulement celle de la monnaie européenne, mais du système tout entier. Aucune politique économique alternative de type keynésienne (dépenser l’argent de l’État en grands travaux pour relancer la croissance) ne pourra reboucher complètement les failles fondamentales qui se sont ouvertes de manière si visible au cours des quelques dernières années.
Nous avons compris dès le départ que le projet de la monnaie euro n’était pas tenable. Ce n’est que grâce à la phase de croissance qui a duré jusqu’en 2007 que son échec a pu être reporté. Mais à présent, nous voyons devant nos yeux se dérouler une réaction en chaine au ralenti qui va à un certain moment faire éclater la zone euro.
Déjà, ce processus est très visible à Chypre où, à la suite de la crise bancaire, l’imposition du contrôle des capitaux par les capitalistes est contraire aux règlements de l’UE, mais est justifiée par la gravité exceptionnelle de la situation. L’économie chypriote est une catastrophe, et on s’attend à ce qu’elle se contracte d’un chiffre record – -25 % l’an prochain.
Le Portugal est au bord d’une deuxième demande de renflouement, tandis que les bureaucrates européens à Bruxelles ne parviennent pas à dormir à cause de leurs cauchemars de la faillite de l’Espagne ou de l’Italie, dont les dettes collectives s’élèvent à plus de 3000 milliards d’euros – soit six fois plus que l’argent disponible dans le fonds de secours européen.
Tout est en train d’être fait pour éviter une autre crise avant les élections générales en Allemagne du 22 septembre. Mais les problèmes s’accumulent et deviennent de plus en plus graves. Les dettes souveraines italiennes sont de plus en plus considérées comme n’ayant aucune valeur ; une autre très grande source d’inquiétude est l’état de zombie de nombreuses banques, qui sont sur perfusion dans tous les pays, même en Allemagne et en Autriche.
La classe ouvrière n’accepte pas l’austérité de manière passive
Une véritable union bancaire européenne ne peut être obtenue sous le capitalisme, et bien que nous ne puissions prédire les délais exacts, et que le processus de décomposition de l’Union européenne pourrait tirer en longueur, il est clair que de nouvelles crises peuvent faire irruption à tout moment, jusqu’à devenir si grandes dans le futur qu’elles seront impossibles à contenir.
Ce qui est clair, est que la classe ouvrière ne va pas accepter passivement la misère qui est en train de lui être imposée.
Dans chaque pays, les dirigeants syndicaux freinent la lutte. Il refusent encore, à cette étape, malgré l’énorme pression, d’appeler à des grèves générales de 24 heures en Espagne et au Royaume-Uni. Au Royaume-Uni, le Rassemblement syndical (TUC) “discute” de cette question depuis déjà onze mois, alors qu’en France les syndicats ont finalement cédé et annoncé une journée d’actions début septembre.
Notre camarade Faustine, de la Gauche Révolutionnaire (CIO-France), a souligné l’impressionnante impopularité de Hollande. Alors qu’il avait été élu dans l’enthousiasme après les années brutales de Sarkozy, il est à présent le président le moins populaire de toute l’histoire de la cinquième république, moins populaire même que Sarkozy ! Leila, également de France, a ajouté que chaque jour, 6 grèves sont déclarées dans ce pays, en réaction au fait que le pouvoir d’achat des travailleurs a été repoussé à son niveau de 1984.
Ce n’est que par le développement des mouvements à partir de la base et avec une pression croissance de la part de la classe ouvrière que les syndicats seront forcés à organiser des actions. Nous jouons à ce titre un rôle très important au Royaume-Uni via le NSSN, Réseau national des délégués syndicaux (National Shop Steward Network).
Même certains dirigeants syndicaux de gauche affichent leurs hésitations vis-à-vis de telle ou telle question. Le capitalisme exerce une incroyable pression sur eux afin de les contraindre à agir de manière “responsable” ; mais au bout du compte, ils peuvent être – et le seront – contraints par la pression de la classe ouvrière à appeler à des actions.
Des conflits généralisés
En outre, dans une telle période de remous sociaux, chaque lutte syndicale a le potentiel de déborder en un conflit plus généralisé, contre le système lui-même.
En Grèce, dix-sept des syndicats les plus combatifs se sont unis pour forger un programme de lutte. En particulier le syndicat de l’électricité a articulé toute une série de revendications que nous soutenons pleinement. Mais en cette période, ce qui est décisif n’est pas un programme bien rédigé, mais l’action.
Ce blocage ne peut être contenu pour toujours. La lutte magnifique des travailleurs afin de contrer la fermeture de la radio-télévision nationale grecque, ERT, montre comment des mouvements peuvent et vont se développer à partir de la base, malgré le fait que les travailleurs semblent de prime abord pieds et poings liés.
En Irlande, la campagne contre la taxe des ménages (la Houshold Tax) est devenue un phare au milieu de toute la frustration accumulée contre l’austérité. L’imposition de la brutale taxe sur le nombre de chambres au Royaume-Uni (la Bedroom Tax) peut être perçu comme un catalyseur similaire pour une lutte industrielle et sociale plus large.
Le mouvement contre les expulsions de domicile en Espagne a jusqu’à présent obtenu plus de 1000 victoires. Lorsque ce mouvement a débuté, on a vu une réponse hystérique dans les médias qui qualifiaient les manifestants de “nazis” ou de “terroristes”. Pourtant, 89 % de la population soutiennent le mouvement, plus que la cote de popularité de tous les politiciens pris ensemble!
La haine envers les partis politiques est une expression de la conscience anticapitaliste grandissante parmi les travailleurs, bien que cela ne se traduise pas encore en un soutien conscient au socialisme. Cette tendance est sans doute la plus grande en Espagne, mais elle est en réalité un phénomène qui se produit à l’échelle continentale.
Le cynisme vis-à-vis des politiciens corrompus et ne prêchant que l’austérité est une phase inévitable du développement de la conscience – on peut comparer ça à la coquille d’œuf qui abrite le poussin de la conscience révolutionnaire future. Nous devons comprendre ce processus et intervenir de manière adéquate et délicate en luttant pour une représentation politique indépendante de la classe ouvrière.
Les forces populistes
Au même moment, le vide politique peut être en partie rempli par toutes sortes de forces populistes particulières, de gauche comme de droite. En Italie, le très instable Mouvement 5 étoiles a paru surgir de nulle part, mais malgré une légère baisse de soutien depuis les dernières élections, lors desquelles son succès a complètement abasourdi la classe dirigeante, il bénéficie toujours de 18-20 % dans les sondages.
En Belgique, le Parti du Travail de Belgique (PTB), ex-maoïste, a lui aussi tiré profit de ce processus. Au Royaume-Uni, le Parti pour l’indépendance du Royaume-Uni (UKIP), populiste de droite et nationaliste, a obtenu un score impressionnant lors des dernières élections municipales, sur base d’une campagne anti-UE, anti-immigrés.
Il est tout à fait possible que le UKIP devienne le plus grand parti du pays (en termes de vote) au Royaume-Uni lors des élections européennes de l’année prochaine, et même qu’il se consolide en même temps que des partis tels que le Front national français ou le de la Liberté autrichien (FPÖ). Cette perspective est loin d’être certaine cependant, et dans tous ces pays, l’établissement d’un véritable parti des travailleurs peut mettre un terme à ce processus de développement de la droite populiste ou radicale.
On voit un exemple de cela au Portugal, où le Parti communiste et le Bloc de gauche bénéficient ensemble d’un soutien de plus de 20 % dans les sondages. S’ils avaient bien voulu former un “Front uni”, comme les militant du CIO le réclament depuis longtemps, ils auraient pu proposer une véritable alternative, ensemble avec les mouvements sociaux. Ils auraient pu attirer des millions de personnes en plus avec une bannière qui aurait proclamé la prise du pouvoir et non pas simplement plus de manifestations.
Leur échec a cependant mené à une légère reprise électorale pour le Parti socialiste, qui est maintenant de plus en plus perçu comme une alternative viable au gouvernement de droite (alors que ce parti avait été chassé du pouvoir après sa déculottée électorale magistrale d’il y a deux ans à peine, pour avoir appliqué la même politique que celle qui est en ce moment appliquée par la droite officielle).
Le virage à droite de Syriza
En Grèce, la question de ce que la gauche doit faire s’est posée de manière très vivante. L’appel initial de Syriza à former un gouvernement de gauche a vu son soutien croitre de manière exponentielle. Mais l’abandon de la promesse de nationalisations à grande échelle, et le refus de Syriza de soutenir le préavis de grève des enseignants (alors que 90 % avaient voté pour l’action), ont désorienté ses anciens sympathisants, et en ont même dégouté plus d’un.
À présent une nouvelle constitution a été imposée à Syriza, créant un parti “unifié” qui interdit la double appartenance politique (alors que Syriza était au départ une coalition de différentes forces politiques) et qui rend le parti plus “sûr” pour le capitalisme. Bien que le scepticisme soit largement répandu par rapport à Syriza, notre camarade Andros, de Grèce, a expliqué comment nous utilisons notre position en tant que force indépendante pour intervenir dans diverses luttes sociales et industrielles, y compris avec la construction des comités antifascistes. Au même moment, nous cherchons à construire l’“Initiative des 1000” – lancée par les forces de gauche hors et dans Syriza – et à travailler de manière de plus en plus étroite avec ceux qui, à gauche, gravitent autour de la nécessité d’un programme de transition qui appelle à un “front uni” des partis des travailleurs, à un gouvernement de la gauche et à une politique socialiste.
Un grand pas en avant en Espagne, et un indice du fait que les travailleurs sont prêts à soutenir des formations de gauche qui mettent en avant ne serait-ce qu’une embauche de programme de lutte, est la résurgence de Gauche unie (Izquierda Unida, IU) qui reçoit maintenant 16-17 % de soutien dans les sondages. IU appelle à la démission du gouvernement et a maintenant changé sa position par rapport à la Catalogne – alors qu’elle était opposée à l’auto-détermination, elle soutient à présent le droit des Catalans à décider eux-mêmes de leur situation nationale.
Mais le processus ne se déroule pas de manière linéaire : certaines sections de la direction d’IU ont leurs yeux sur une éventuelle coalition avec le Parti socialiste, comme c’est d’ailleurs déjà le cas dans la région d’Andalousie. Cependant, du fait que IU est un parti fluide qui est toujours susceptible de subir une pression de sa base, il n’est pas prédéterminé à suivre un virage à droite qui aura un succès immédiat.
Les marxistes doivent chercher à organiser les forces les plus larges possibles à gauche, y compris les mouvements sociaux et ceux qui se trouvent au sein de IU et qui opposent le “coalitionnisme” avec les forces pro-austérité telles que le Parti socialiste.
En même temps, ici comme partout ailleurs, nous devons développer un noyau marxiste qui puisse servir de colonne vertébrale pour la gauche.
Les attaques du Labour britannique sur le syndicat Unite
De nouvelles possibilités s’ouvrent au Royaume-Uni dans la lutte pour la construction d’un nouveau parti des travailleurs. L’attaque sur le syndicat Unite par la direction du Labour (parti travailliste) menée par Ed Miliband – après que Unite ait demandé au parti de rendre plus de compte au syndicat en cherchant à ce que des membres du syndicat soient sélectionnés en tant que candidats pour les élections nationales – illustre pleinement la futilité de toute tentative de “réformer” le Labour.
Miliband a appelé la police pour qu’elle mène une enquête sur le comportement de Unite (la police a répondu qu’il n’y avait pas la moindre raison d’entamer pareille enquête), et a commencé à mener campagne pour supprimer tout lien entre son parti et les syndicats. Cela a fait scandale parmi les syndicalistes. Certains dirigeants syndicaux de droite vont maintenant jusqu’à soulever la question de savoir comment leurs membres pourront encore accepter de cotiser pour leur carte de parti au Labour.
La section Unite de la région Nord-Ouest a maintenant, à la suite d’une initiative de la part de nos camarades, appelé le syndicat à se désaffilier du Labour – un pas en apparence petit mais potentiellement historique en vue de la formation d’un nouveau parti des travailleurs, travail déjà débuté par nos membres en collaboration avec le syndicat du rail RMT, qui a mené à la création de la Coalition syndicale et socialiste (TUSC).
Une crise prolongée
C’est Tony Saunois, dirigeant du Secrétariat international du CIO, qui a conclu la discussion. Cette crise est d’une nature prolongée, et cela est essentiellement le résultat de la capitulation des anciens partis ouvriers face au marché, ce qui a laissé la classe ouvrière dépourvue d’organisations politiques combatives.
À ce stade, le rythme des évènements est différent dans le nord ou dans le sud de l’Europe. Bien que la classe dirigeante fera tout pour surmonter la crise, et pourrait même bénéficier de périodes de pause temporaire dans la lutte de classe, ces pauses ne seront que de brève durée et ne seront pas basées sur la moindre reprise réelle, ni sur aucune fondation solide.
Des millions de vies ont été brisées partout en Europe au cours des cinq dernières années. Étant donné la gravité de la crise, les travailleurs ont été frustrés du fait que les évènements ne se soient pas développés plus rapidement. Cela vient avant tout des trahisons historiques des soi-disant dirigeants officiels du mouvement ouvrier, dans tous les pays. Aucun nouveau parti de masse de la classe ouvrière n’est né depuis, ou n’a paru capable de s’opposer à l’austérité néolibérale tout en articulant un programme socialiste qui montre la voie hors de cette crise étouffante.
Mais la capacité de la classe ouvrière à lutter, à tirer derrière elle la classe moyenne et les légions de jeunes désœuvrés et d’autres, a été démontrée sans que ne subsiste le moindre doute à cet égard – et particulièrement en Grèce, où on a cherché à repousser les forces du néolibéralisme avec une grève générale après l’autre.
La montée de l’extrême-droite, et même l’émergence d’organisations ouvertement néo-fascistes en tant que menaces réelles dans des pays comme la Hongrie ou la Grèce, devrait nous rappeler que dans les périodes de crise massive, les graines de la contre-révolution peuvent germer dès le moment où le mouvement ouvrier ne parvient pas à offrir une alternative.
Aube dorée est l’expression du désespoir. Bien que son noyau soit bel et bien néofasciste, de nombreuses autres personnes peuvent être tirées hors de ses rangs ou dissuadées d’y entrer pour peu que nous parvenions à offrir une alternative socialiste à la Grèce.
Des leçons sont tirées
Des leçons profondes sont en train d’être emmagasinées par les travailleurs et les jeunes, au fur et à mesure que sous la surface, la conscience change. D’importants nombres de travailleurs commencent à comprendre le fait que le capitalisme ne peut mener qu’à l’austérité, et que par conséquent un changement fondamental est nécessaire dans la manière dont la société elle-même est organisée – une transformation socialiste.
Nous devons nous préparer pour ces développements explosifs qui aujourd’hui semblent être encore loin de la surface, mais qui demain feront irruption partout à la fois. Nous devons nous apprêter pour de nouvelles vagues de lutte de masse, y compris des grèves et sans doute des occupations d’usines et d’entreprises.
Nous pouvons contribuer à pousser l’histoire pour qu’elle aille plus vite. Notre tâche est d’accélérer ce développement moléculaire grâce à nos interventions dans tous les pays. Nous devons habilement développer notre programme, nos tactiques et nos revendications, afin d’atteindre la classe ouvrière qui a démontré à de nombreuses reprises déjà sa volonté de lutte.
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[DOSSIER] Quel rôle les coopératives peuvent-elles jouer pour changer le monde?
Des millions de personnes autour du monde cherchent désespérément la voie de sortie hors de la misère infligée par le capitalisme. Au milieu des soulèvements de masse constants qui surgissent dans beaucoup d’endroits du monde, beaucoup débattent des nouvelles et vieilles idées sur la manière de changer la société au mieux. L’idée de coopératives de travailleurs et de consommateurs est l’une de ces discussions qui a regagné de l’attention.
Par Kirk Leonard, Socialist Party (CIO-Australie)
Les socialistes devraient-ils préconiser les coopératives comme un moyen de transformer fondamentalement le monde, ou devraient-ils les discréditer crument en tant que pure fantaisie ? La discussion et le débat à ce sujet se déroulent depuis de nombreuses décennies, il s’agit d’une caractéristique commune au mouvement socialiste dès ses premiers pas.
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Pour en savoir plus
- Belgique : Le retour des coopératives – Affronter le capitalisme avec ses propres armes?
- Arco : l’échec de la ‘‘banque éthique’’
- Friedrich Engels : Socialisme Utopique et Socialisme Scientifique
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Robert Owen – un industriel écossais de la fin du 17ème et du début du 18ème siècle – est considéré comme étant le premier défenseur et théoricien des coopératives. Les idées d’Owen étaient parmi les tendances dominantes du socialisme utopique pré-marxiste. Owen rêvait de villages coopératifs indépendants, construits à l’écart de la société capitaliste. Il a mené plusieurs expériences concrètes. Malheureusement, les expériences d’Owen ont échoué et son mouvement s’est effondré, mais ses idées initiales ont continué d’alimenter la théorie, la pratique et le débat pour les décennies à suivre.
Dans les années qui ont suivi les expériences d’Owen, le mouvement des travailleurs à travers l’Europe a commencé à organiser des magasins coopératifs pour saper la vente capitaliste et réduire les prix. Les travailleurs ont également mis en commun leurs ressources pour créer des usines coopératives sans propriétaire capitaliste bien que celles-ci ne furent pas aussi populaires que leur magasin. C’est dans ce contexte que les coopératives ont été discutées, débattues et que l’on a écrit sur le sujet dans mouvement socialiste. Des géants de la théorie socialiste comme Marx, Lénine et Luxemburg ont tous écrit à ce propos.
Les prix élevés des denrées alimentaires, la menace de catastrophes écologique et les pertes d’emplois dans les entreprises des pays capitalistes avancés ont fait ressurgir l’idée de coopératives dans certaines parties du mouvement ouvrier d’aujourd’hui. Le projet Earthworker d’établir une coopérative de travailleurs de fabrication verte à Victoria (en Australie) en est un exemple. Selon un de ses principaux organisateurs, le projet Earthworker se veut être une ‘‘tentative pratique, innovante et visionnaire pour commencer à construire un nouveau système économique qui respecte en même temps l’environnement et les travailleurs.’’
L’ensemble actuel de dirigeants syndicaux a échoué à mener un véritable débat sur les questions urgentes de l’emploi, de l’économie et de l’environnement. Au cours des 25 dernières années, les discussions sur une autre façon de gérer la société ont été étouffées par la domination de l’ALP (Australian Labor Party, équivalent australien du PS) et de son idéologie du ‘‘libre marché’’ dans le mouvement. Les socialistes accueillent et encouragent toute opportunité d’analyser et de discuter des problèmes qu’affrontent les travailleurs, avec pour objectif de s’organiser et d’agir. Les socialistes voient le débat autour de la question des coopératives comme une voie saine pour explorer ces très importantes questions.
Les mouvements coopératifs trouveront presque certainement une nouvelle vie alors que la crise globale du capitalisme se déploie. La classe ouvrière cherchera instinctivement des voies pour panser les plaies sociales et améliorer sa qualité de vie. Au cours des dernières années, les médias ont été remplis d’un grondement constant de mécontentement contre le supermarché duopole Woolworths-Coles. Il est possible d’imaginer que les épiceries coopératives – où les consommateurs mettent en commun leurs ressources pour mettre en place leurs propres magasins et des achats en gros groupés auprès des fabricants – pourraient gagner en popularité dans le but de répondre à ce problème.
Aussi bien les coopératives de producteurs que de consommateurs ont leurs points positifs. Premièrement, elles peuvent apporter un certain soulagement immédiat vis-à-vis des différents symptômes du capitalisme, comme les prix abusifs et la surexploitation. En cas de succès, les coopératives peuvent également avoir le potentiel de fournir de l’argent et d’autres formes de soutien aux fonds de grève, aux syndicats, à des campagnes ou à des organisations politiques qui profitent à la classe ouvrière dans son ensemble.
Les coopératives peuvent également fonctionner comme des écoles importantes pour ceux qui y sont impliqués. Elles sont des exemples de preuve qu’il est possible d’organisation la production et la distribution sans la présence de l’avidité capitaliste privée. Par cette voie, elle aide à démonter le mythe selon lequel la classe ouvrière ne peut s’organiser ou gérer la société et montre que la classe capitaliste est parasitaire et non nécessaire. Elles montrent une vision d’une société alternative plus pratique et plus accessible.
D’un autre côté, il y a aussi des dangers idéologiques pour les travailleurs dans les coopératives. Les coopératives qui existent dans le décor général du capitalisme sont toujours sujettes aux lois des opérations capitalistes. Elles cherchent souvent des prêts et du financement auprès des banques capitalistes et elles doivent rivaliser au niveau des prix contre d’autres entreprises capitalistes privées, parmi d’autres restrictions. Cela signifie que les travailleurs des coopératives sont poussés et tirés à jouer le rôle contradictoire dans leur propre exploiteur. S’ils refusent de jouer avec ces règles, ils courent le risque que la coopérative s’effondre.
Les travailleurs peuvent potentiellement apprendre sur la nécessité de prendre le pouvoir économique et politique de la classe capitaliste à travers ce processus. Cependant, les gens ont tendance à se pencher sur la solution la plus facile ou la moins complexe pour tout problème qu’ils rencontrent. Plutôt que de s’attaquer aux vastes questions politiques, économiques ou sociales, ceux qui sont impliqués dans les coopératives se limitent souvent aux perspectives de petites entreprises ou se concentrent exclusivement sur les problèmes commerciaux auxquels font face leur propre coopérative.
Via ce processus, beaucoup des vieilles coopératives de consommateurs à travers l’Europe ne sont plus que des coopératives que de nom. Beaucoup sont bel et bien des entreprises capitalistes à l’heure actuelle. En Australie, beaucoup de coopératives, par exemple la chaîne en croissance de librairie coopératives dans les universités, sont également des commerces capitalistes à peine voilés.
Les coopératives peuvent être une voie légitime par laquelle les travailleurs tentent d’améliorer leurs conditions. Mais certaines personnes vont plus loin, argumentant qu’établir des coopérative est une stratégie capable de transformer radicalement le monde. Mais est-il possible que le capitalisme puisse être dépassé et remplacé par une masse critique de coopératives de producteurs et de consommateurs ? La réponse est non.
Les coopératives de producteurs sous le capitalisme sont hybrides. Elles sont des ‘‘îles socialistes’’ dans l’océan capitaliste. Elles sont vulnérables aux forces de tempêtes de cet océan capitaliste : les conditions de crédits, le prix des matières premières, les loyers, la compétition, la capacité de faire du bénéfice, … . Elles peuvent seulement être à l’abri de certaines de ces pressions en trouvant un marché garanti pour éviter la ‘‘libre compétition’’.
Cela rend les coopératives de producteurs dépendantes des coopératives de consommateurs, ou à des notions comme ‘‘le consumérisme éthique’’. De cette façon, les coopératives sont écartées des plus importantes sphères de l’industrie lourde, ce qui doit être prise en compte si nous voulons véritablement effectuer un changement économique et social fondamental.
Il y a de véritable limites dans lesquelles les coopératives peuvent se confronter aux bases du capitalisme – la manière dont les biens et les services sont produit – à une échelle importante.
Le capitalisme se maintient par le contrôle des classes capitalistes sur l’État, leur contrôle de la finance et leur contrôle sur la majorité des entreprises, particulièrement l’industrie première et lourde. Un mouvement coopératif menaçant pourrait aisément être saboté commercialement, ou par d’autres manières, par ces bases du pouvoir capitaliste. En revanche, les coopératives n’offrent aucune possibilité de prendre ce pouvoir des mains de la classe capitaliste. En tant que tel, il est impossible pour un mouvement coopératif en soi de renverser le capitalisme. Comme l’a affirmé la marxiste allemande Rosa Luxemburg, les coopératives sont ‘‘une attaque portée contre les rameaux de l’arbre capitaliste.’’
A ce point, la tâche principale pour les véritables socialistes est de reconstruire les organisations de la lutte des classes. Nous avons besoin de reconstruire des partis des travailleurs et de transformer nos syndicats en forces combatives. Il y a une nécessité absolue de réinjecter les idées du marxisme dans le mouvement des travailleurs. Avoir une compréhension scientifique de comment fonctionne le capitalisme est la clé si vous voulez réaliser de véritables changements sociaux.
Alors que le mouvement coopératif ressurgit, les socialistes devraient promouvoir les politiques de la lutte des classes et la solidarité parmi elles. Par exemple, à côté de la construction de coopératives, le mouvement des travailleurs a besoin d’une campagne pour la nationalisation des secteurs clés de l’économie. Les coopératives peuvent être un auxiliaire à la lutte des classes mais pas un but en soi, elles doivent systématiquement être liées à une stratégie plus large de prise de pouvoir économique, politique et social hors des mains de la classe capitaliste.
En fin de compte, un réel changement social ne sera possible que si nous prenons les secteurs majeurs de l’économie hors des mains des capitalistes et que nous les plaçons en propriété publique sous contrôle et gestion démocratiques des travailleurs et de la collectivité. De cette manière, le concept de coopératives peut être implanté dans la société, avec la planification nécessaire qui permettra que la richesse soit distribuée équitablement et que le chômage et la destruction environnementale appartiennent au passé.
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École d'été du CIO : La crise capitaliste mondiale et la lutte de classe
‘‘Nous nous tenons au seuil de grandes convulsions, les plus grandes de l’histoire mondiale, les puissants mouvements auxquels nous assistons ne sont que les précurseurs.’’ Voilà comment Peter Taaffe (membre du Secrétariat international du Comité pour une Internationale Ouvrière, CIO) a décrit la situation internationale actuelle lors de l’édition 2013 de l’école d’été du CIO au cours de la session plénière intitulée “Le monde capitaliste dans la tourmente – la crise et la lutte de classe aujourd’hui”. Les “puissants mouvements” dont il parlait sont les énormes mouvements de masse en Turquie, au Brésil, en Égypte et en Afrique du Sud qui se sont produits au cours de l’année écoulée et qui ont démontré la puissance colossale des masses une fois qu’elles partent en action. Ces mouvements ont pris le relais des manifestations contre l’austérité qui ont enflammé l’Europe ces dernières années.
Kevin Parslow, Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles)
Les occupations massives des places en Turquie ont été suivies par une action de masse de la part de la classe ouvrière. Des millions de personnes se sont mobilisées en Égypte pour le renversement du président Morsi, bien plus qu’au cours du déclenchement de la révolution il y a deux ans, bien que l’absence d’une direction indépendante de la classe des travailleurs ait aidé les chefs de l’armée à se saisir de cette occasion pour se réinstaller au pouvoir. La lutte entre les forces de la révolution et de la contre-révolution n’est toutefois pas terminée. Au Brésil, les manifestations de masse qui ont débuté en tant que protestation contre la hausse du prix des transports publics ont fait descendre la population de 120 villes dans la rue. À un moment, plus d’un million de personnes étaient dans les rues. Ils ont forcé le gouvernement à reconnaitre les immenses problèmes sociaux qui ravagent le pays.
Dans le passé, de tels mouvements en Amérique latine auraient pu conduire à des idées de “guérilla”, mais l’Amérique du Sud est aujourd’hui le continent qui a la plus grande urbanisation : 84 % de sa population vit en ville. La classe ouvrière et les pauvres des villes constituent l’écrasante majorité de la population et guident les mouvements de masse, bien que ces mouvements aient également leurs répercussions dans les zones rurales. Ce sont ces énormes changements qui sont en train de préparer les forces de la révolution partout dans le monde.
Ces évènements – avidement suivis via les médias de masse et les médias sociaux par les travailleurs du monde entier – démontrent aussi la manière dont chaque pays du monde est actuellement connecté aux autres comme par des câbles d’acier. Les évènements se produisant dans un pays, sur un continent ou dans une région exercent un effet hypnotique sur la manière dont les masses laborieuses conçoivent le monde. De la sorte, ils renforcent la nécessité de l’internationalisme, principe sur lequel est basé le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) et sur lequel il va croître.
L’essence du marxisme est de généraliser les expériences de la classe ouvrière et d’en tirer les leçons pour le mouvement des travailleurs, et dans notre cas surtout pour l’intervention du CIO, afin de servir de guide pour nos actions aujourd’hui comme à l’avenir. Sans une large compréhension des perspectives, nous serions comme un capitaine de navire sans boussole au milieu d’un océan déchainé.
Nous ne pouvons pas analyser les évènements de manière pragmatique et empirique. Les marxistes doivent approcher la “réalité” d’une manière qui englobe tous les points de vue, qui considèrent une chose sous l’ensemble de ses facettes et nous pas sous un seul angle de vue. Sans cela, nous ne pouvons pas nous préparer pour le moment où les évènements prendront soudainement un tout autre tour et revêtiront leur forme la plus importante : celle de la révolution.
Peter Taaffe a expliqué le fait que c’est notre méthode qui a permis au CIO de prévoir cette situation où le gouvernement de l’African Nntional Congress (ANC) en Afrique du Sud allait inévitablement ouvrir le feu sur les travailleurs. Le massacre de Marikana l’an dernier et les protestations et grèves de masse qui ont suivi ont totalement changé la situation dans le pays. De même que nous avions annoncé l’arrivée de mobilisations de masse et le renversement de Moubarak en Égypte, nous avions également anticipé le développement d’une nouvelle phase de la révolution, car nous avons une compréhension des lois de la révolution. Ce sont les masses qui font la révolution ; leur mécontentement envers les Frères musulmans les a fait redescendre dans les rues pour se débarrasser d’eux.
Le caractère de la période actuelle
Nos conclusions sont basées non pas sur nos sentiments, mais sur la compréhension du caractère de la période actuelle, qui est marquée par la crise économique la plus dévastatrice jamais rencontrée, qui entre à présent dans sa cinquième ou sixième année. Nous vivons dans une société capitaliste où un quart de la jeunesse mondiale est sans travail, sans formation, sans expérience.
C’est cette situation économique désespérée qui a donné l’impulsion initiale à la révolution en Égypte. Plus de 1.500 usines ont fermé depuis le début de la révolution en 2011. La moitié des 80 millions d’Égyptiens vivent sous le seuil de pauvreté ou en sont proches. Un journal, le jour où Morsi a été dégagé, titrait : ‘‘C’était une révolution de la faim.’’
Cependant, Peter Taaffe a prévenu du fait que le renversement de Morsi par l’armée – même si cela peut apparaitre au départ comme se faisant au nom de larges sections du mouvement de masse, en particulier des libéraux – représente un danger potentiel pour la classe ouvrière. Les travailleurs égyptiens ont révélé leur appétit phénoménal pour la lutte et pour l’organisation. Notre camarade David Johnson a ainsi expliqué dans la discussion que les syndicats indépendants sont passés en deux ans de 50.000 membres à 2,5 millions. Toutefois, un des dirigeants de ces syndicats a rejoint le cabinet dirigé par l’armée après le renversement de Morsi ! Le mouvement qui a renversé Morsi et les Frères musulmans avait derrière lui des figures de l’ombre des institutions d’Etat et du régime de l’ancien dictateur Moubarak.
La déchéance de Morsi et des Frères musulmans a forcé les puissances régionales du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord à se repositionner. Leur attitude est guidée par la nécessité de trouver la première proposition semblant être la meilleure à même de servir la contre-révolution contre le mouvement révolutionnaire en Afrique du Nord et au Moyen Orient. Les intérêts de ces puissances sont à présent en train de se polariser et de menacer les masses de la région, comme on le voit avec la sanglante guerre civile en Syrie.
L’armée égyptienne n’est pas en train de jouer le rôle de l’armée portugaise dans la révolution de 1974 au Portugal, la révolution des Œillets. Les soldats qui composaient cette armée avaient été radicalisés par les guerres d’indépendance néocoloniales. L’armée égyptienne, comme toutes les armées capitalistes, est là pour, en dernier recours, protéger la propriété privée et elle possède elle-même des parts très importantes de l’économie nationale, à l’instar de l’armée pakistanaise.
Le résultat le plus probable des évènements qui se déroulent en ce moment en Égypte est que les Frères musulmans et leurs collègues dans le reste de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient vont être très affaiblis. Cela aura des conséquences en Tunisie, où le gouvernement Ennahda a lui-même beaucoup de problèmes à se maintenir au pouvoir. Après l’assassinat de Chokri Belaïd, un mouvement de grève générale a éclaté et près d’un million et demi de personnes sont descendues dans les rues du pays (qui comprend 11 millions d’habitants). [Depuis lors, un autre dirigeant de l’opposition de gauche, Mohamed Brahmi, a été assassiné et de nouvelles mobilisations de masse ont éclaté, NDLR]
Nous devons toujours insister sur la nécessité de l’indépendance de la classe ouvrière et de ses organisations par rapport à toutes les forces pro-capitalistes, et lutter pour la création de formes de lutte ouvrière indépendantes.
Des explosions sociales
Ce n’est pas toujours une crise économique qui provoque le mouvement de masse. Le Brésil comme la Turquie ont connu une croissance économique ces dernières années. Mais les fruits de la croissance n’ont pas été équitablement distribués.
C’est ce facteur qui a été à la base des explosions sociales qui se sont produites dans ces deux pays. On y a vu non seulement des manifestations, mais également des occupations de places, des assemblées, etc. Nos camarades brésiliens se sont fortement investis dans cette lutte tout au long de cette déferlante politique et sociale. Contrairement à l’Europe, ce n’est pas une austérité étouffante qui a provoqué ces évènements révolutionnaires. L’importante croissance économique a renforcé le pouvoir de la classe ouvrière et des masses, qui ont révélé leur pleine puissance au cours de ces mouvements.
Avec l’intensification mondiale de la lutte de classe, l’État capitaliste a dû recourir à des mesures de guerre civile contre les droits et les conditions de vie de la classe ouvrière et des pauvres.
C’est de cela qu’a voulu nous avertir Edward Snowden grâce à ses révélations ; une surveillance massive est en train d’être mise en place contre la population et ses organisations, et des espions de la police sont implantés dans les mouvements et organisations ouvrières et anticapitalistes.
Bien que ces mesures sont antidémocratiques, les capitalistes ne peuvent pas établir aujourd’hui un État policier, à cause de l’opposition qu’une telle tentative de leur part susciterait. Mais la croissance des néofascistes d’Aube Dorée en Grèce illustre le danger qui fait face à la classe ouvrière à moyen et long termes. Les travailleurs doivent tout faire pour se battre contre les tentatives qui sont faites de grignoter ou d’attaquer leurs droits démocratiques et civiques, notamment contre les lois antisyndicales.
Tous ces développements ont suscité une large désillusion vis-à-vis du président Obama, qui a révélé qu’il est tout aussi antidémocratique et répressif que l’était George W Bush. Son impopularité est accrue par l’absence de la moindre amélioration des conditions de vie des travailleurs aux États-Unis. La récente faillite de la ville de Detroit illustre bien la profondeur de la crise.
Au niveau international, l’“assouplissement quantitatif” (le fait d’imprimer de l’argent) a eu l’effet de stabiliser la situation économique, jusqu’à un certain niveau. Mais, comme notre camarade Robin d’Angleterre l’a expliqué, cela a conduit à plus de spéculations, et de nouvelles “bulles” financières sont en train de gonfler à nouveau, qui pourraient éclater dans un futur proche.
Peter Taaffe a expliqué que la faible reprise de la position économique dans certains pays, la petite pause dans la lutte de classe et la réussite de la classe capitaliste à imposer ses mesures d’austérité malgré tout ont soulevé les questions : ‘‘Avons-nous trouvé la sortie ?’’ et ‘‘Le capitalisme serait-il parvenu à trouver un nouvel équilibre économique ?’’ Ce sont là les espoirs des capitalistes du monde entier.
Les marxistes ont toujours répété qu’il n’y a pas de “crise finale du capitalisme” : le capitalisme ne disparaitra que lorsque la classe ouvrière prendra le pouvoir. Mais si la classe ouvrière, à cause de la faiblesse ou de l’absence de sa direction, ne parvenait pas à prendre le pouvoir, on ne pourrait alors exclure une nouvelle phase de croissance pour le capitalisme dans le futur. Mais cela n’est clairement pas notre perspective à court terme.
Cela, les théoriciens du capitalisme sont forcés de l’admettre. Ils n’ont en réalité absolument aucune idée de la manière dont ils parviendront à se sortir de l’impasse dans laquelle est entrée leur système.
Dans toutes les grandes économies du monde, il y a peu ou pas de croissance. Et maintenant que l’économie chinoise commence à ralentir, cela aura un effet très profond en Chine – où la révolution sera à l’ordre du jour – comme dans le reste du monde, dans tous les pays qui soit fournissent des capitaux à la Chine (comme l’Allemagne), soit lui fournissent des matières premières, comme l’ont bien répété les camarades d’Australie et du Canada dont les pays ont récemment profité de la croissance chinoise, mais pour combien de temps encore ? Le camarade Raheem du Nigeria a quant à lui montré que les bénéfices tirés de la vente de matières premières, comme le pétrole nigérian, sont extrêmement mal redistribués : à peine 1 % de la population possède 80 % de la richesse de l’ensemble du pays, où70 % de la population vit dans la pauvreté !
Une économie “Frankenstein”
Le camarade Zhang de Chine a décrit la montagne de dettes qui accable la Chine et son économie comme étant similaire au monstre de “Frankenstein” – énorme, monstrueuse et hors de contrôle ! Peter a montré que les travailleurs chinois commencent à bouger, avec des grèves, des manifestations, et même l’emprisonnement d’un patron qui voulait fermer son usine sans payer d’indemnités de licenciements à ses travailleurs !
La révolution ne survient pas de manière automatique à un moment du ralentissement ou de la croissance, mais au passe d’une période à une autre. Le consensus parmi les économistes capitalistes est que nous sommes maintenant dans une “dépression”. Vu l’ampleur de l’austérité et les tentatives de convaincre la classe ouvrière de inéluctabilité d’une période sans croissance, de nouvelles attaques pourraient décourager la lutte.
Mais il y a une réelle perspective d’un approfondissement de la crise. La “reprise” aux États-Unis est la plus faible depuis la Seconde Guerre mondiale. Et les dettes colossales des banques du monde entier sont toujours là. Tant que nous sommes sous le capitalisme, il y aura un chômage de masse permanent ou semi-permanent.
Le Japon a tenté une “opération croissance” récemment, mais qui s’essouffle déjà. La dévaluation de sa monnaie par le Japon pose le problème d’une guerre des devises ; le protectionnisme, dont la dernière illustration est le conflit entre l’Europe et la Chine sur la question de l’importation de panneaux solaires, a lui aussi le vent en poupe.
Une question centrale du point de vue du capitalisme est qu’il n’y a pas de “marché”. C’est la conséquence du contrecoup massif de la dette, et de l’arrivée de la déflation.
Le magazine The Economist commentait : ‘‘D’ici 2020, il y aura 900.000 milliards de dollars d’actifs financiers dans le monde, comparé à 90.000 milliards de dollars de PIB mondial. Le résultat de tout ceci sera une économie mondiale inondée de manière structurelle par des capitaux et du même coup, un manque d’autant plus grand de créneaux dans lesquels investir.’’
C’est là l’explication de la vague de privatisations mondiale : les capitalistes cherchent à faire des profits sur le dos d’anciens services ou industries étatiques. Cela va produire une catastrophe sociale. Mais les capitalistes espèrent ainsi trouver un débouché à tous les capitaux qu’ils ont accumulés, ce qui inclut près de 2000 milliards de dollars détenus par des banques américaines qui ne paient aucune taxe.
Peter a conclu en disant que nous sommes dans une période de longue crise prolongée. Cette crise va à son tour mener à une intensification des conflits entre puissances capitalistes pour la domination du globe, surtout au Moyen-Orient, en Asie-Pacifique, et en Afrique.
Des vagues de mouvements révolutionnaires radicalisés
Au cours de cette nouvelle période, nous allons voir vague après vague de mouvements révolutionnaires radicalisés. Des dizaines de milliers de travailleurs avancés et des millions de gens issus des masses sont en train de méditer et d’apprendre les leçons du Brésil, de la Turquie, du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord.
Cependant, leur compréhension politique est toujours à un point historiquement bas, en raison de toute une série de facteurs, y compris les effets rémanents de l’effondrement du stalinisme et la rapide plongée dans la crise qui a stupéfait la classe ouvrière. La camarade Didi du Brésil a expliqué la manière dont les dirigeants ouvriers ont aidé à semer la confusion : en 1992, ils avaient dirigé des mouvements contre le gouvernement, ce qui avait mené à sa chute, mais cette année, ils n’ont fait que semer la confusion à cause du manque de direction. Mais les capitalistes eux-mêmes comprennent le caractère de cette crise, et certains d’entre eux sont très clairs sur le fait qu’ils craignent une révolution, et en particulier une révolution socialiste.
Ils vont tout faire pour détourner les mouvements ou les empêcher de prendre un tour révolutionnaire. Le camarade Robert Bechert du Secrétariat international, dans sa conclusion de la discussion, a commenté le fait que certains “experts” comparent ces mouvements aux mouvements révolutionnaires de 1848 ou de 1968, mais font tous les efforts possibles pour éviter toute comparaison avec 1917 et avec la période révolutionnaire qui a suivi la Première Guerre mondiale ! Les mouvements de masse de l’année passée étaient il est vrai impressionnants, mais les marxistes ne doivent pas se laisser “intoxiquer” par les premiers succès, mais juger sobrement quel programme et quelle stratégie sont nécessaires afin de garantir le fait que la classe ouvrière et les pauvres pourront atteindre leurs objectifs.
Peter a dit que les capitalistes n’ont pas tenu compte des marxistes, mais qu’une petite poignée de marxistes dans un pays comme l’Afrique du Sud est parfois tout ce qu’il faut pour déclencher une transformation de masse.
Il y a du scepticisme et de l’opposition de la part de la nouvelle génération à l’idée de “partis” en général, qui sont identifiés aux partis pro-capitalistes, à leur politique et à leur énorme corruption. Les camarades Andros de Grèce, et Kevin d’Irlande ont expliqué à quel point les travailleurs veulent se battre contre l’austérité, mais en même temps sont toujours ahuris par la période précédente et par leur faible niveau de compréhension, ce qui agit partiellement comme un frein à l’idée de la lutte.
Andros en particulier, a montré qu’il y a eu des explosions sociales très importantes en Grèce, mais que le manque de direction ne nous a jusqu’ici infligé que des défaites dans la bataille contre l’austérité. La direction de Syriza (la coalition de gauche radicale qui a failli remporter les élections l’année passée) est en train de virer très à droite. Mais il est possible que de nouveaux dirigeants, y compris des marxistes, se voient propulsés à l’avant de la scène par le mouvement au cours de la période à venir.
Les dernières remarques de Peter ont fait état de la volatilité de la situation politique, qui a suscité de nouvelles campagnes et organisations, comme le mouvement Occupy, les Indignados en Espagne, le mouvement Cinq Étoiles en Italie,… Dès que les masses voient un instrument pour se battre pour leurs propres intérêts – surtout à une échelle de masse – et qui est incorruptible, elles accourent se ranger sous sa bannière. Dans quelques années, en regardant en arrière, il aura été clair que l’impasse actuelle n’aura été qu’une phase transitoire.
De nouvelles formations de masses vont inévitablement apparaitre, étant donné le chemin qui reste à parcourir à la classe ouvrière. Ces formations mèneront à la création de partis révolutionnaires de masse.
Nos tâches à présent sont de construire le Comité pour une Internationale Ouvrière et de nous préparer tous ensemble, avec la classe ouvrière, à jeter les fondations de nouveaux partis révolutionnaires de masse et d’une Internationale de masse.
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Ne nous regardez pas, rejoignez-nous !
Le PSL est un parti marxiste très actif qui mise énormément sur l’implication et l’engagement de ses membres. Parvenir à un réel changement de société nécessite de construire une force dont les perspectives ne se limitent pas à l’horizon immédiat et qui se base sur la richesse que constitue l’expérience de la lutte de la classe des travailleurs à travers l’histoire pour orienter son activité quotidienne. Nous agissons et partageons nos expériences collectivement afin de renforcer l’impact de nos idées dans les luttes.
Vous aussi, vous pouvez jouer un rôle important dans la lutte pour une société socialiste, n’hésitez pas à en discuter avec un de nos militants. Nous laissons ci-dessous la parole à quelques nouveaux membres qui expliquent les raisons pour lesquelles ils ont rejoint notre parti.
Tout d’abord, laissez-moi préciser que ma vision n’est pas objective, mais subjective. J’ai été profondément influencé par mes rencontres, par mes lectures ou encore les films et les séries que j’ai vus. Parallèlement à tout cela, j’ai toujours aimé réfléchir et, après une réflexion plus approfondie, j’ai décidé de m’engager. Certains peuvent bien me qualifier d’idéaliste, je veux parvenir à une société qui ne laisse personne abandonné à son sort.
Avant de rencontrer le PSL, je m’étais déjà intéressé à la manière dont fonctionne le système et à ce que je pouvais faire pour influencer le cours des choses. Quelque soit le bout par lequel on prend les choses, on parvient à la conclusion que le capitalisme ne fonctionne pas. C’est un système basé sur la loi du plus fort, et cela ne signifie pas celui qui travaille le plus, mais bien celui qui possède le plus. Pour les multinationales, il n’y a qu’une seule règle : celle de la recherche du profit maximal sans se soucier des souffrances que cela cause (licenciements, travail des enfants, conditions de travail inacceptables,…)
Je trouve qu’il est grand temps qu’arrive un nouveau système et de chercher quelles réponses apporter. Au café, j’ai régulièrement discuté avec un ami de l’alternative à opposer au capitalisme, mais j’étais très critique. Il s’est avéré qu’il était membre du PSL. J’ai finalement participé à quelques réunions et, à ma grande surprise, ils parlaient de choses auxquelles j’avais longuement pensé. Parfois, la conclusion était très différente de ce à quoi j’étais parvenu, mais ce n’étais pas mauvais pour autant. Il ne s’agit pas d’une ‘‘vérité absolue’’, mais de discuter des leçons à tirer de l’histoire et de la manière de les utiliser pour l’avenir dans le cadre d’un parti révolutionnaire qui aspire à jouer un rôle fondamental dans un changement de société. Espérons que cela arrive très vite, car le système actuel est primitif. Nous méritons d’accéder à une nouvelle phase de l’humanité où chacun sera réellement l’égal de l’autre, qu’importe sa couleur, son sexe, son orientation sexuelle ou sa religion. Les discriminations doivent disparaître, elles n’apportent rien de bon.
Prêt pour la révolution ?
Myrddin (Anvers)
There are alternatives ! Et une société alternative est nécessaire! La démocratie recule à cause du capitalisme, l’inégalité et l’injustice sont en augmentation exponentielle. La voracité de notre système économique, l’esprit égoïste et la soif de pouvoir de politiciens imbus d’eux-mêmes détruisent l’éthique et l’aspect social de la société. Combien de temps les gens peuvent-ils continuent à l’accepter ? Les protestations qui fleurissent un peu partout illustrent que les gens sont fatigués de cette situation. Des alternatives sociales, économiques, écologiques et politiques sont mises en avant (voir: www.bonnes-nouvelles.be). Avec le PSL, je me bats pour ces alternatives et pour les rendre plus visibles.
Je dois l’avouer, j’ai moi-même éprouvé un temps une certaine indifférence et un certain scepticisme dans les possibilités de changement. Mais des événements de ma vie m’ont poussé à concrétiser mon implication, je suis devenue plus critique, j’ai pu avoir une vision plus large de la société et j’ai vraiment commencé à m’intéresser aux problèmes sociaux. Il y a deux mois, j’ai rejoint le PSL. Depuis lors, j’ai pu rencontrer beaucoup de gens formidables au sein du parti et j’ai pu élargir mes connaissances. Je crois en l’approche du PSL à 200% et voudrais exhorter tout le monde à nous rejoindre et à lutter ensemble pour une société juste et humaine.
Kelly (Gand)
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[DOSSIER] La lutte de classe existe toujours… mais comment la remporter?
‘‘Il y a une lutte des classes, c’est ma classe qui la gagne.’’ Cette célèbre citation n’est pas sortie du 19e siècle, elle provient d’une interview accordée à CNN en 2005 par Warren Buffet, actuellement quatrième fortune mondiale. La suite de cette phrase n’a hélas pas eu la même notoriété, mais c’est elle qui nous intéresse le plus : ‘‘alors qu’elle ne le devrait pas.’’ Comment faire pour que ce ne soit plus le cas ?
Par Nicolas Croes
A la lumière de la crise économique, il est aujourd’hui bien difficile de masquer la réalité de cette lutte des classes opposant fondamentalement une classe de détenteurs des capitaux et des moyens de production – la classe capitaliste – et une autre contrainte de vendre sa force de travail pour vivre – la classe des travailleurs. Les explosions sociales se succèdent, plus ou moins organisées, plus ou moins massives, mais aucune voie de sortie n’émerge.
Sous l’impact du combat de la classe des travailleurs organisée, l’écart entre riches et pauvres s’était progressivement réduit dans les pays capitalistes développés jusque dans les années ’80, pour à nouveau se développer sous les coups de la politique néolibérale. Aujourd’hui, ce fossé atteint une taille exceptionnelle, et la crise est utilisée comme prétexte pour l’accroître plus encore. Il ne s’agit pas d’un flux et d’un reflux ‘‘naturel’’, mais de l’expression de la modification des rapports de force dans le cadre de cette lutte de classe en développement au sein du système capitaliste. L’histoire de ce processus est riche d’enseignements pour aujourd’hui.
Des acquis sociaux se sont retrouvés transformés en leur contraire, comme c’est le cas en Belgique pour les négociations salariales collectives (l’Accord Interprofessionnel). A l’origine, il s’agissait d’assurer que les salaires augmentent également dans les secteurs de travail les plus faibles, où la force syndicale était moins implantée, mais ce mécanisme a été vidé de son contenu au point que nous nous retrouvons avec un gel salarial pour les deux années à venir tandis que le gouvernement veut faire durer ce blocage des salaires au moins pour 6 ans. Tout employeur qui céderait à la pression de la lutte des travailleurs pour augmenter les salaires se verrait infliger une ‘‘amende’’ (c’est surtout leur offrir le meilleur argument qui soit pour refuser tout en bloc), tandis que ceux qui respecteront le gel bénéficieraient de nouvelles réductions de charges.
Comme partout en Europe, la politique d’austérité s’abat sur les travailleurs et leurs familles tandis que les conditions de travail et de salaire sont attaquées sur les lieux de travail. Pourtant, jamais autant de richesses n’ont été produites. Les dix familles belges les plus riches possèdent ensemble une fortune estimée à 42 milliards d’euros ! Quelque 1000 ménages possèdent chacun une fortune de plus de 20 millions d’euros et les 10% des ménages les plus riches possèdent la moitié de la fortune belge totale (soit 1,9 million d’euros par ménage en moyenne).
Les travailleurs, seule force sociale capable de s’opposer à la voracité des capitalistes
Mais si l’élite capitaliste dispose de son capital, la classe des travailleurs possède une puissance incroyable de par son nombre. Cette masse est la seule force capable de briser la spirale négative de casse sociale, que ce soit en Belgique, en Europe ou dans le monde, la seule force capable de bloquer l’économie par la grève et de s’en prendre au capital là où ça lui fait mal: au portefeuille.
L’arme favorite de la bourgeoisie dans la guerre de classe, c’est le chantage à l’emploi et aux investissements, par la fermeture d’entreprises, la fuite de capitaux,… Les politiciens de l’establishment se réfugient toujours derrière cette peur – feinte ou non – pour justifier les mesures destinées à soutenir la ‘‘compétitivité des entreprises’’ qui sont un véritable hold-up contre la collectivité. La seule riposte appropriée doit venir du mouvement des travailleurs et des jeunes et de sa mobilisation, avec l’expropriation de ces entreprises et leur contrôle sous gestion démocratique des travailleurs. Après tout, ce sont les travailleurs qui créent les richesses. Mais cela signifie automatiquement de réduire la puissante arme syndicale au simple rang de jouet de lobbying. Aucun acquis social n’a été obtenu en suppliant des politiciens déjà acquis au camp capitaliste, toutes nos avancées sociales ont été obtenues par une lutte acharnée. Aujourd’hui, il est crucial d’en revenir à un syndicalisme de lutte de classe.
Contre l’avalanche d’austérité et de pertes d’emplois, où est notre plan d’action ? Comment se fait-il que les milliers de travailleurs qui sont actuellement concernés par la procédure Renault (et donc menacés d’un licenciement collectif dans leur entreprise) soient isolés chacun sur leur site ? Nous avons besoin d’un bon échéancier d’actions crédibles connu suffisamment longtemps à l’avance, allant crescendo, avec l’organisation de grèves générales, y compris en lien avec les luttes d’autres pays (tout particulièrement dans le cas de l’Europe).
C’est de cette manière qu’il sera possible de redonner confiance à tous les hésitants qui ont tendance à considérer que ça ne sert à rien de manifester ou de faire grève. Comment ne pas se mettre à douter quand la lutte se limite à une succession de ballades entre Bruxelles-Nord et Bruxelles-midi ? Et pourtant, les appels lancés par les syndicats, aussi insuffisants soient-ils, sont loin de tomber dans le vide. Quel serait l’impact d’une large campagne de sensibilisation et de mobilisation capable d’aller à contre-courant de la propagande patronale des médias dominants ? Quel résultats donnerai une implication active de la base syndicale dans la prise de décision ? On pourrait décupler les forces militantes.
La démocratie syndicale pour oser vaincre
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Lutte de classe ?
‘‘L’Histoire de toute société jusqu’à nos jours, c’est l’histoire de la lutte des classes. Homme libre et esclave, patricien et plébéien, baron et serf, maître de jurande et compagnon, en un mot : oppresseurs et opprimés, se sont trouvés en constante opposition; ils ont mené une lutte sans répit, tantôt déguisée, tantôt ouverte, qui chaque fois finissait soit par une transformation révolutionnaire de la société tout entière, soit par la ruine des diverses classes en lutte.’’ Marx et Engels, Manifeste du Parti communiste, 1848
[/box]Il est logique que dans cette situation les discussions portant sur la stratégie et les tactiques syndicales se développent. Mais ce débat ne trouve pas de cadre aujourd’hui, aucun plan d’action n’est présenté et discuté démocratiquement avec la base, et c’est bien souvent le cas également dans les délégations d’entreprises. La tradition de tenir des Assemblées Générales régulières des travailleurs est à reconstruire. L’exemple d’une démocratie réelle, d’une démocratie des travailleurs et des exploités, devrait venir en premier lieu des syndicats. On peut régulièrement entendre que les critiques affaiblissent la force des travailleurs, nous pensons tout le contraire, dès lors qu’il s’agit de critiques constructives destinées à renforcer la lutte de classe en faveur des travailleurs. Une telle démocratie syndicale est surtout un péril pour les partisans d’un syndicalisme de collaboration de classe et pour qui le PS représente le summum de ce que la gauche a à apporter à la collectivité.
Les sommets syndicaux se sont sans cesse plus reposés sur des positions dites réformistes, c’est-à-dire sans remettre en question la question de la propriété privée des moyens de production. De là a découlé la nécessité de s’adapter à l’Etat capitaliste et à tenter de coopérer avec lui pour tenter de récupérer le plus de miettes possibles tombant du festin des patrons et actionnaires. Dans le cadre de la crise actuelle, toute marge a disparu, la ‘‘concertation sociale’’ est rompue.
L’ère dans laquelle nous sommes rentrés ne laisse plus d’espace aux petits accords et aux demi-mesures. Mener le combat syndical tel que cela se fait jusqu’ici équivaut à laisser le patronat et le gouvernement détruire impitoyablement notre niveau de vie, et un nombre grandissant de syndicalistes en est parfaitement conscient.
Warren Buffet est un éminent représentant de sa classe sociale, et il sait parfaitement que toute la pyramide capitaliste ne peut subsister que si sa base d’exploités n’entre pas en mouvement. La force de ce régime économique, social et politique ne réside pas en son sein, mais dans la faiblesse de la direction des travailleurs. Cela doit changer, et cela peut changer.
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Comment stopper les requins capitalistes ?
Il nous faut une riposte socialiste contre la dictature des marchés
Si le mois de juin est habituellement celui des déclarations d’impôts, la fiscalité a cette année-ci été plus largement présente dans les médias. Ainsi, la Commissaire européenne Neelie Kroes (1) s’en est prise aux géants Apple, Google ou encore Amazon pour avoir délocalisé leurs profits vers des paradis fiscaux, en toute légalité. L’évasion fiscale était également l’un des grands thèmes de discussion des dirigeants des grandes puissances industrielles du G8 (2) réunis fin juin en Irlande du Nord. Alors, ça y est, on va enfin s’en prendre aux grandes entreprises et à leurs superprofits ?
Edito de l’édition d’été de Lutte Socialiste, par Nicolas Croes
Rien n’est moins sûr, et ce n’est pas une surprise. Face à la crise du système, les classes dominantes doivent parvenir à convaincre que la clé du problème est en marge du système et non pas en son cœur, tout en donnant l’illusion que les ‘‘grands’’ aussi vont devoir (un peu) payer. Bref, un beau tour de passe-passe destiné à détourner l’attention.
Un simple dysfonctionnement ?
Cette approche n’est pas sans conséquence, y compris à gauche où l’on trouve nombre d’analyses qui se contentent finalement de dénoncer le sommet fiscal de l’Iceberg sans aller au fond des choses. Le thème de la ‘‘justice fiscale’’ est ainsi un des points essentiels – si pas le seul dans certains cas – abordés par divers collectifs militants ou par les structures syndicales.
Alors, évidemment, sur ce terrain, la situation est proprement aberrante. Le contrôle budgétaire de juin a abouti à un sixième effort budgétaire (en un an et demi !) de l’ordre de 526 millions d’euros pour boucler 2013 et 3,5 milliards d’euros doivent déjà être trouvés pour le budget 2014. Pendant ce temps, le fisc perd chaque année des sommes colossales à cause de la fraude et de l’évasion fiscales, sans oublier les différents cadeaux offerts aux patrons, tels que les Intérêts Notionnels (3). Mais comment croire qu’une meilleure fiscalité suffira à résoudre les problèmes de l’économie capitaliste ? Comment éviter l’évasion du capital vers d’autres pays ? Et comment traiter les 1.000 milliards d’euros d’actifs toxiques qui restent stockés dans les ‘‘bad banks’’ européennes (4) ?
Il est légitime de prendre appui sur des thèmes qui révoltent de larges couches de la population, mais prendre appui signifie d’aller ensuite plus loin et de tracer la voie vers un autre type de société. Le système fiscal est très inéquitable, certes, et il est surtout impossible à réformer efficacement sans enlever aux riches les moyens de pression dont ils disposent: les leviers économiques majeurs que sont les secteurs de l’énergie, de la finance, de la sidérurgie,…
Contre un cancer généralisé, l’homéopathie ne fonctionne pas
Cette question fondamentale du contrôle public et démocratique des secteurs-clés de l’économie a disparu de l’analyse de la plupart des forces anti-austérité. Même dans les rangs syndicaux, on trouve de nombreuses déclarations contre le ‘‘capitalisme financier’’ et non pas contre le capitalisme tout court, à l’instar de la CGSP-Wallonne qui parlait de ‘’L’économie capitaliste [qui] est aujourd’hui dominée par la finance et la spéculation, cela mine l’économie réelle et détruit notre modèle social’’ dans le cadre de la journée d’action du 24 juin. La finance et la spéculation se nourrissent des réserves que les capitalistes ‘‘industriels’’ refusent d’investir à cause de la crise de surproduction du capitalisme. S’en prendre à la spéculation, cela signifie avant tout de leur couper leurs fonds d’approvisionnement, et donc de saisir l’argent qui dort sur les comptes des multinationales et grandes entreprises afin de répondre à la multitude de besoins sociaux qui manquent de moyens.
Ce mois de juin fut aussi celui des révoltes extraordinaires en Turquie et au Brésil. Ces deux exemples ont, une nouvelle fois, exprimé que la colère peut se développer sous un calme apparent et s’exprimer ensuite massivement à la suite d’une petite étincelle. Reste à organiser cette rage et l’orienter contre le système lui-même. Là-bas comme ici, nous avons besoin d’un plan d’action offensif – basé sur des mobilisations de masse et des grèves générales – qui pose ouvertement les jalons vers une société où l’économie serait débarrassée de la logique de profit, une société socialiste démocratique.
Notes
(1) Commissaire européenne en charge des Nouvelles Technologies, citation extraite de ‘‘Europe : les géants d’internet invités à ne plus contourner le fisc’’, RTBF.be, 17 juin 2013.
(2) Le ‘‘G8’’ ou ‘‘Groupe des 8’’ est un groupe de discussion et de partenariat économique qui réunit huit pays parmi les plus puissants au monde : les États-Unis, le Japon, l’Allemagne, la France, le Royaume-Uni, l’Italie, le Canada et la Russie.
(3) En 2010, le fisc belge a perdu plus de 5 milliards d’euros de recettes à cause du système de la Déduction des Intérêts Notionnels. (Marianne.net, La Belgique, un paradis pour les multinationales françaises, 15 juin 2013)
(4) LesEchos.fr, « Bad Banks » : une bombe de 1.000 milliards d’euros pour les contribuables européens, 17 juin 2013
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STOP à la répression et aux SAC – STOP au racisme et au fascisme – STOP au capitalisme !
Luttons ensemble pour le socialisme!
Dans un discours prononcé lors de la présentation du prix du ‘‘manager de l’année’’ Jan De Nul le bien-nommé a déclaré que s’il y a tellement de gens au chômage, c’est parce que ‘‘L’envie de travailler n’y est pas.’’ C’est d’ailleurs particulièrement le cas chez les immigrés selon ce patron : ‘‘Vous savez combien d’immigrés nord-africains travaillent ?’’
Voilà parfaitement synthétisée toute l’atmosphère actuelle. Tous ces capitalistes qui ont spéculé et ont profité de la moindre occasion pour cacher leurs profits dans des paradis fiscaux s’évertuent maintenant à faire endosser la responsabilité de la crise par ses victimes ! Chômeurs, immigrés, jeunes, retraités,… personne n’y échappe. Évidemment, ce n’est pas la faute des grandes banques – sauvées par l’argent public que nous devons maintenant rembourser. Évidemment, ce n’est pas la faute des capitalistes – qui ne pensent qu’aux profits qu’ils pourront réaliser dans des pays à bas salaire et tant pis sur des usines s’effondrent et causent des centaines de mort comme au Bangladesh. Evidemment, c’est de notre faute.
Nous sommes maintenant embourbés dans la crise depuis cinq ans, et aucune lumière ne pointe à l’horizon. Le taux de chômage des jeunes a augmenté jusqu’à atteindre plus de 22% et, même avec une croissance économique limitée en 2014, le pire est à venir. Quant aux jeunes qui trouvent un emploi, ce sont souvent des jobs temporaires et précaires. Essayez dans ces conditions d’acheter ou de louer une maison alors qu’on exige de plus en plus comme condition d’avoir un travail à durée indéterminée… Ce système nous prépare une ‘‘génération sans avenir’’.
Les capitalistes tentent par tous les moyens de masquer les causes de ce désespoir. Chercher un bouc émissaire parmi les victimes est très populaire, de même que monter diverses couches de la population les unes contre les autres. Le racisme, le sexisme et l’homophobie ont le vent en poupe aujourd’hui. Cela donne aux militants d’extrême-droite la confiance nécessaire pour passer à l’étape suivante et recourir plus ouvertement à la violence, comme en Grèce ou en France.
S’opposer à cette logique, cela signifie de s’exposer à la répression. Nous n’en sommes pas encore à devoir traiter avec les gaz lacrymogènes comme en Turquie, mais l’arsenal répressif belge a tout de même considérablement été élargi, notamment avec les Sanctions Administratives Communales (SAC) dont l’arbitraire permet d’être utilisées à toutes les sauces, contre des ‘‘nuisances’’ et ‘‘incivilités’’ souvent fantasques et, très certainement, contre les actions de protestation.
Ne nous laissons pas faire et organisons la résistance ! Fin octobre, une nouvelle manifestation nationale contre les SAC prendra place. D’autre part, nous mènerons des campagnes antifascistes, tant en Belgique qu’en solidarité avec des luttes à l’étranger. Simplement dénoncer le système et ce qu’il engendre est cependant insuffisant, nous devons nous organiser pour défendre un projet de société alternatif. Nous devons être unis contre la crise du système, ses conséquences mais aussi ses causes.
C’est pourquoi nous relions toutes nos campagnes à la lutte contre le capitalisme et pour une société socialiste démocratique. Le capitalisme porte en lui la faim, la misère, le racisme et la répression, malgré toutes les richesses et la technologie disponibles. Ce système ne nous réserve qu’un avenir en forme de cauchemar. Avec le PSL et les Etudiants de Gauche Actifs, nous voulons construire un outil révolutionnaire capable de lutter pour une société dans laquelle la satisfaction des intérêts de la majorité de la population occuperait la place centrale. C’est ce que nous entendons par socialisme. Ne nous regardez-pas, rejoignez-nous !