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  • ArcelorMittal : Déclaration de solidarité de 18 députés européens de la Gauche Unitaire Européenne

    Aujourd’hui, une manifestation internationale des travailleurs d’ArcelorMittal prend place à Strasbourg au Parlement européen. Divers euro-députés du groupe parlementaire de la Gauche Unitaire Européenne se sont déclarés solidaires de ce combat et défendent la nationalisation de l’outil sans indemnisation et sous le contrôle des travailleurs.

    Strasbourg, 6 Février 2013

    Chers/chères Camarades,

    L’annonce de la fermeture de 7 lignes de production sur les 12 que compte le site de la phase à froid du bassin sidérurgique liégeois démontre s’il en était encore besoin la soif de profit inextinguible du géant ArcelorMittal. Avec l’arrêt de la phase à chaud annoncée précédemment, ce sont plus de 2000 emplois directs et des milliers d’autres emplois indirects qui vont disparaître afin de satisfaire l’avidité de quelques actionnaires et spéculateurs.

    Partout en Europe les travailleurs sont confrontés à cette logique perverse. La fermeture de l’usine Ford à Genk ou du site d’ArcelorMittal à Florange en France montrent que la voracité du capitalisme ne s’arrête à aucune frontière ni aux portes d’aucun secteur économique. C’est pour ça que nous disons avec vous: "Non au diktat de ArcelorMittal! Non aux licenciements et fermetures partout en Europe!"

    Partout les travailleurs qui lui font face ne peuvent compter que sur leurs propres forces, constamment trahis par des politiciens traditionnels qui prennent toujours le parti du plus fort. Même si l’ensemble du monde politique semble s’émouvoir et que des politiciens traditionnels ont dû se prononcer favorablement à la ‘nationalisation’ du site, il est clair que la classe politique contaminée par le dogme néolibéral qui veut d’une nationalisation capitaliste. Le but sera de rendre l’usine ‘attractive’ aux investisseurs. Que-ce-que ça veut dire, alors? Qu’elle sera achetée par des parasites qui veulent la détruire aujourd’hui, gérée par les anciens managers et orientée vers les marchés. Mais pouvait-on attendre autre chose de ceux qui continuent, année après année, à arroser d’argent public un grand patron pour qu’il consente à continuer à faire des bénéfices ici plutôt qu’ailleurs ?

    Pour les travailleurs la seule option envisageable si l’on veut épargner la misère à des milliers de familles est une vraie nationalisation, sans indemnisation pour ArcelorMittal, nous avons déjà payé notamment avec les milliards d’euros des réductions d’impôts qu’ils ont reçus, et sous le contrôle démocratique des travailleurs.

    Nous voulons exprimer notre solidarité fraternelle avec votre lutte et vous souhaiter bon courage, a vous ainsi qu’a tous les autres travailleurs d’ArcelorMittal et de ses sous-traitants partout en Europe.

    Cordialement,

    Les députés européens:

    • Paul Murphy Socialist Party (Irlande)
    • Lothar Bisky Die Linke (Allemagne)
    • Nikolaos Chountis SYRIZA, Coalition de la Gauche Radicale (Grèce)
    • João Ferreira Partido Comunista Português (Portugal)
    • Thomas Händel Die Linke (Allemagne)
    • Takis Hadjigeorgiou AKEL Parti progressiste des travailleurs (Chypre)
    • Jacky Hénin Parti Communiste Français / Front de Gauche (France)
    • Patrick Le Hyaric Parti Communiste Français / Front de Gauche (France)
    • Kartika Tamara Liotard Indépendante (Pays-Bas)
    • Marisa Matias Bloco de Esquerda (Portugal)
    • Willy Meyer Izquierda Unida (Espagne)
    • Younous Omarjee Alliances des Outre-Mers (France)
    • Søren Bo Søndergaard Folkebevægelsen mod EU (Danemark)
    • Alda Sousa Bloco de Esquerda (Portugal)
    • Kyriacos Triantaphyllides AKEL Parti progressiste des travailleurs (Chypre)
    • Sabine Wils Die Linke (Allemagne)
    • Gabi Zimmer Die Linke (Allemagne)
    • Inês Zuber Partido Comunista Português (Portugal)
  • L'Afrique peut-elle sauver le capitalisme ?

    L’élite capitaliste cleptomane vit dans l’opulence, mais la croissance ne touche pas les masses laborieuses

    ”Je suis absolument convaincu du fait que l’Afrique représente la prochaine zone pionnière économique mondiale, et je ne suis pas le seul à partager cette conviction” affirmait en avril dernier Johnnie Carson, sous-secrétaire d’Etat américain pour l’Afrique. Il n’est pas le seul à exprimer son optimisme croissant au sujet de l’Afrique. Comme il l’a fait remarquer, les perspectives de croissance de la Banque mondiale pour l’Afrique pour les deux prochaines années se situent entre 5 et 6 %, un taux de croissance au-delà de celui de l’Amérique latine, de l’Asie centrale ou de l’Europe.

    Peluola Adewale, Democratic Socialist Movement (CIO Nigeria)

    Selon les prévisions du FMI pour les cinq années qui suivent 2011, sept pays africains (Éthiopie, Mozambique, Tanzanie, Congo-Kinshasa, Ghana, Zambie et Nigeria) se trouveront dans les top dix des pays à la croissance la plus rapide au monde. Une analyse du magazine The Economist révélait l’an dernier que six pays africains (Angola, Nigeria, Éthiopie, Tchad, Mozambique et Rwanda) se trouvaient dans le top dix des pays qui ont eu la croissance la plus rapide entre 2000 et 2010. De fait, l’Afrique a commencé à attirer des remarques positives de la part des commentateurs capitalistes, surtout depuis le début de la crise économique mondiale.

    Cette crise, qui est la pire crise capitaliste depuis la Grande Dépression des années 1930, a enflammé l’Europe et les États-Unis, poussant apparemment les stratèges capitalistes à aller chercher le succès ailleurs – et ils en auraient trouvé en Afrique.

    Les grands médias capitalistes ont arrêté leur campagne permanente de dénigrement du continent africain, et acclament à présent en grande pompe la moindre tendance “positive”. On peut voir un exemple clair de tout ceci dans les pages de The Economist où l’Afrique s’est métamorphosée, passant de “Continent sans espoir” en mai 2000 à “Continent rempli d’espoir” en décembre 2011.

    Cependant, la plupart des superbes taux de croissance de ces pays reflètent une hausse de la valeur des exportations des matières premières, à la fois en termes de production et en termes de prix, qui est liée à la croissance de la demande mondiale, surtout de la part de la Chine. Par exemple, le prix du pétrole est passé de 20 $ du baril en 1999, à 147 $ en 2008. Ces statistiques, de manière générale, ne reflètent pas une croissance généralisée de l’économie du continent ni de son niveau de vie. De plus, tout ralentissement de l’économie, que ce soit en Occident ou en Chine, aura pour conséquence une baisse brutale de la demande pour les exportations africaines.

    Une grande misère

    Pour la plupart des travailleurs, qui n’ont vu qu’une aggravation de leurs conditions de vie d’année en année, les statistiques économiques impressionnantes qu’on voit apparaitre çà et là sont un grand mystère. En fait, la forte augmentation du prix de la nourriture et du carburant revient à une attaque constante contre le niveau de vie. L’Afrique est aujourd’hui un continent dévasté par une misère de masse, avec un accès très limité aux nécessités vitales de base.

    Par exemple, en Éthiopie – pays qui se trouve justement sur la “liste d’or” –, 90 % de la population a été classée en tant que “pauvre multidimensionnelle” par un rapport du Programme des Nations-Unies pour le développement (Pnud) publié en 2010. La situation au Nigeria, qui est le plus grande producteur de pétrole africain, a également été très correctement décrite par le Pnud. Son représentant dans le pays, M. Daouda Touré, a remarqué que ”Depuis maintenant plus d’une décennie, le Nigeria a connu un taux de croissance élevé permanent, qui n’a pas eu la moindre répercussion sur le plan de l’emploi ni sur celui de la réduction de la pauvreté parmi ses citoyens.” Il ajoute : ”Les statistiques disponibles en ce moment suggèrent que le taux de pauvreté au Nigeria s’est en réalité aggravé entre 2004 et 2010” (The Nation, Lagos, 29 août 2012). Cela n’a que confirmé ce que le statisticien général du Nigeria, M. Yomi Kale, avait dit concernant le ”paradoxe (…) qui fait que malgré le fait que l’économie nigériane est en pleine croissance, la proportion de Nigérians vivant dans la pauvreté ne fait qu’augmenter d’année en année.” (The Guardian, Lagos, 14 février 2012).

    L’Afrique du Sud, qui est la plus grande économie du continent, est aussi le deuxième pays le plus inégalitaire au monde. Cela, malgré la politique du “black economic empowerment” (promotion économique des noirs) menée par le gouvernement ANC dans l’Afrique du Sud post-apartheid.

    En Angola, les deux tiers de la population vivent avec moins d’un euro (656 FCFA) par jour, et seuls 25 % des enfants fréquentent l’école primaire (The Guardian, Londres, 18 novembre 2011). L’Angola est pourtant le pays qui a eu le taux de croissance économique le plus élevé au monde, avant la Chine, dans les années 2000 à 2010. L’Angola représente à l’heure actuelle un paradis économique pour le capitalisme portugais, dont le pays natal se trouve en ce moment sous les feux de la crise de la zone euro. Ce pays nous offre ainsi un exemple classique de migration inversée entre l’Europe et l’Afrique. Non seulement l’Angola abrite aujourd’hui une communauté de 150 000 Portugais chassés par le chômage dans leur pays, mais il a également massivement investi ses pétrodollars au Portugal. La compagnie pétrolière d’État angolaise, la Sonangol, est le principal actionnaire d’une des plus grandes banques du Portugal, la Millenium BCP. En juin 2010, l’ensemble des investissements angolais dans des entreprises portugaises étaient estimés valoir plus de deux milliards d’euros, selon le Financial Times. Et pourtant, on ne trouve quasiment ni électricité ni eau potable dans tout le pays, même dans la capitale Luanda.

    Tout cela est symptomatique de la situation en Afrique, où la croissance économique se reflète uniquement dans l’opulence de l’élite de voleurs capitalistes au pouvoir, et aucunement dans le développement de l’infrastructure ou dans l’amélioration du niveau de vie de la masse de la population.

    Mais les stratèges capitalistes ne sont pas concernés par le sort des travailleurs. Tant qu’il y a des ressources naturelles à exploiter librement pour leurs super-profits, l’Afrique est pour eux tels un lit de roses.

    Comme le rapportait The Guardian de Londres : ”Il y a parmi le monde des affaires de plus en plus de confiance dans le fait que l’Afrique est la destination d’investissements qui donne les plus grands profits au monde” (28 mars 2012). C’est ainsi que la banque d’investissements mondiales Goldman Sachs disait dans un rapport en mars 2012 que : ”L’Afrique est une destination à laquelle les investisseurs doivent réfléchir, pour une croissance sur le long terme (soit on y participe, soit on rate une bonne occasion).”

    Cette course à la super-exploitation de l’Afrique explique pourquoi le continent, avec ses immenses ressources naturelles et ses immenses terres fertiles pour l’agriculture, est dominé par des multinationales et est dirigé sur base d’une politique capitaliste néolibérale qui bénéficie avant tout à l’Occident impérialiste.

    L’absence d’infrastructures de base (ou, quand elle est présente, sa médiocrité) signifie que l’Afrique est toujours en très grande partie dépendante de ses exportations de matières premières, et que le continent dans son ensemble ne compte toujours que pour un ridicule 2 % de la production mondiale.

    Les soi-disant “investisseurs” ne sont surtout intéressées que par les industries d’extraction qui, bien que créant de la croissance, ne créent que très peu d’emplois. Cet échec dans le développement de l’industrie de transformation explique pourquoi l’Afrique, en tant qu’exemple classique de croissance sans emploi, ne peut imiter le rôle de la Chine en tant que moteur du capitalisme mondial, malgré son immense population et son urbanisation croissante. Au contraire, c’est le capitalisme qui garantit le sous-développement du continent.

    Une corruption rampante

    Les souffrances de l’Afrique sont également dues à la corruption caractéristique de ses dirigeants. Il convient cependant bien de souligner le fait que la corruption est loin d’être propre de l’Afrique ou des pays en développement.

    La plupart des ressources qui restent en Afrique, après les pertes dues au commerce inéquitable et au payement de la dette, sont volées par les dirigeants pro-impérialisme corrompus, puis envoyées vers des comptes en banques privés à l’étranger, en Europe ou en Amérique.

    Le capitalisme néolibéral, qui entraine avec lui privatisations et dérégulations, a donné encore plus de marge aux dirigeants africains pour piller le trésor public, puisque ce ne sont plus eux qui sont censés utiliser ces ressources afin de fournir les infrastructures et les services de base.

    Mais face à cette situation, les travailleurs, les jeunes et les pauvres du continent sont loin d’être passifs. L’Afrique a une longue histoire de luttes de masse contre le colonialisme et le racisme. Plus récemment, on a vu apparaitre des luttes contre les régimes pourris et corrompus et pour une vie meilleure, comme on l’a vu après les insurrections de masse, surtout en Afrique du Nord, qui ont chassé au moins trois dictateurs. En janvier 2012, nous avons assisté à la plus grande grève générale et au plus grand mouvement de masse de toute l’histoire du Nigeria, contre la hausse du prix de l’essence. Les mineurs sud-africains, dans leur lutte pour de meilleures conditions de travail et pour un meilleur salaire, ont quasi mis à genoux l’industrie minière. Le secteur des mines compte pour une très grande part de la richesse du pays ; il est aussi un symbole de l’immense inégalité entre travailleurs et patrons.

    Cette lutte des mineurs, dans laquelle le DSM sud-africain joue un rôle dirigeant, a contribué à mettre au-devant de la lutte la revendication pour la nationalisation de l’industrie minière, ainsi que l’idée d’une alternative politique des travailleurs et des pauvres contre l’ANC.

    Les mouvements de masse des travailleurs et de la jeunesse en Europe, et en particulier en Grèce et en Espagne, contre l’austérité et contre les attaques néolibérales sur l’emploi, sur les salaires, sur l’enseignement et sur la santé, vont continuer à élever la conscience des travailleurs en Afrique. Les nouvelles luttes qui vont se développer en Afrique auront pour effet qu’il n’y aura aucun refuge sûr pour le capitalisme dans un monde de crise, et seront une source d’inspiration afin d’intensifier la quête d’une alternative socialiste.

  • Perspectives mondiales : ‘‘L’ère de l’austérité’’ prépare des convulsions sociales sismiques

    Nous vivons une des périodes les plus dramatiques de l’Histoire

    Les travailleurs grecs, suivis par les portugais et les espagnols, sont à l’avant-garde du mouvement contre cette interminable austérité. Plus personne ne peut aujourd’hui affirmer que la classe ouvrière reste passive face aux attaques du système capitaliste malade et pourrissant. Sa résistance s’est exprimée par une série de grèves générales épiques, mais elle a encore à créer un parti de masse ainsi qu’une direction dignes d’elle pour cette bataille entre travail et capital qui va dominer le début du 21ème siècle. La tâche du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO), grâce à la clarté théorique de ses idées liée à un programme orienté vers l’action, est d’aider à créer cette nouvelle direction, une direction capable d’assurer la victoire de la classe ouvrière.

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    Ce texte est un résumé du projet de document sur les perspectives mondiales discuté lors de la dernière réunion du Comité Exécutif International (CEI) du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) qui a eu lieu en décembre. Le document final est disponible, en anglais, sur le lien suivant.
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    Le caractère instable des relations mondiales (qui peuvent entraîner l’éclatement d’un conflit dans de nombreux endroits du monde et à n’importe quel moment) s’est illustré lors des récents affrontements entre Israël et le Hamas dans la bande de Gaza. Ils se sont limités à un échange de roquettes et de missiles et un accord de cessez-le-feu a été atteint, mais la guerre pourrait reprendre et un assaut d’Israël sur la Bande de Gaza n’est pas à exclure. En retour, des troubles auraient lieu dans le Moyen-Orient.

    D’autre part, une ou plusieurs guerres régionales sont toujours de l’ordre du possible. La Syrie représente un véritable baril de poudre avec le régime de Bachar el-Assad assiégé et menacé d’être renversé, mais avec une opposition divisée sur des lignes sectaires. Les véritables socialistes ne peuvent soutenir ni Assad ni l’opposition, mais doivent s’orienter vers les masses que nous pouvons atteindre avec une voie clairement indépendante basée sur un programme et des perspectives de classe.

    Certaines minorités du pays recherchent encore la protection d’Assad par craintes des conséquences d’une victoire de l’opposition, laquelle bénéficie clairement d’un soutien prédominant de la part de la majorité sunnite de la population, avec une influence grandissante significative d’organisations du type d’Al-Qaïda. De plus, l’intervention de la Turquie contre le régime a augmenté la tension entre les deux pays. Des affrontements armés pourraient avoir lieu entre eux, ce qui pourrait devenir hors de contrôle. Une intervention de l’Iran dominé par les chiites pour soutenir les chiites en Syrie n’est pas non plus à exclure. Pareillement, le conflit pourrait déborder au Liban avec l’éclatement de conflits sectaires. Cela en retour pourrait conduire Israël à saisir l’opportunité de lancer des attaques aériennes contre les supposées infrastructures nucléaires iraniennes, avec sans doute en riposte des salves de missiles et de roquettes de la part de l’Iran et du Hezbollah contre les villes et infrastructures israéliennes.

    Au cours du récent conflit, le régime israélien et la population, plus largement, ont été pris de court par la capacité des roquettes du Hamas de frapper au cœur même de Tel Aviv. Le CIO s’oppose aux prétendues ‘‘frappes chirurgicales’’ d’Israël (qui ne sont en rien chirurgicales) qui ont tué au moins 160 Palestiniens. Mais nous ne soutenons pas pour autant les méthodes du Hamas, qui a lancé des roquettes à l’aveugle contre les villes les plus peuplées d’Israël. Cela a uniquement servi à jeter la population d’Israël dans les bras de Netanyahou, dont les actions punitives seraient soutenues par 85% de la population tandis que 35% soutiendraient maintenant une invasion de Gaza, opération qui verrait des centaines et des milliers de Palestiniens tués ou mutilés, de même que des Israéliens. Le peuple palestinien a le droit de résister aux méthodes terroristes de l’Etat Israélien, mais cette tâche peut être mieux accomplie par des mouvements de masse dans but de faire séparer la classe ouvrière d’Israël du régime vicieux de Netanyahou. En cas d’invasion de Gaza ou d’un autre territoire occupé, le peuple palestinien a tous les droits de résister, avec des armes si nécessaire, contre les envahisseurs.

    Les mineurs sud-africains montrent la voie

    Nonobstant l’influence des facteurs géopolitiques comme les guerres sur le cours des évènements (ce qui peut, sous certaines circonstances, sérieusement altérer nos perspectives), les principales caractéristiques de la situation présente sont l’approfondissement de la crise du capitalisme mondiale et la réponse combattive des la classe ouvrière et des pauvres.

    Cela est symbolisé par le magnifique réveil de la classe ouvrière sud-africaine à la suite des mineurs. Ces grèves héroïques, à l’instar des révolutions au Moyen-Orient et en Afrique du Nord, ont inspiré la classe ouvrière des pays industriels avancés. Un élément ‘‘d’Afrique du Sud’’ pourrait lui aussi être exporté en Europe avec un mouvement similaire au sein des syndicats afin de renverser les dirigeants qui refusent d’organiser la classe ouvrière pour sérieusement résister aux attaques du capitalisme.

    A la suite des mineurs, d’autres pans de la classe ouvrière d’Afrique du Sud sont eux aussi entrés en action dans cette grève qui est en ce moment la plus grande et la plus sanglante au monde.

    Cette lutte a également été caractérisé par un haut degré de conscience de la classe ouvrière (un héritage qui a su être préservé après les révolutions avortées des années 1980, avant la fin du régime de l’apartheid). Cela s’exprime par l’aspiration à la construction de nouveaux syndicats combattifs pour les mineurs afin de remplacer le syndicat officiel des mineurs, complètement corrompu, le NUM. Confrontés à l’ANC tout aussi corrompue, les mineurs (avec l’aide du Democratic Socialist Movement, le DSM, section du CIO en Afrique du Sud) ont lancé un appel pour un nouveau parti de masse des travailleurs. Cela ne peut que renforcer les revendications du même type portant sur la question de la représentation indépendante de la classe ouvrière dans tous les pays (c’est-à-dire la majorité) où la masse des travailleurs n’a pas de parti, pas même un capable de les représenter ne fut-ce que partiellement.

    Même le magazine The Economist, la voix du grand capital, a déclaré : ‘‘le meilleur espoir pour le pays dans les années à venir est une scission réelle dans l’ANC entre la gauche populiste et la droite afin d’offrir un vrai choix aux électeurs.’’ C’est surprenant, sinon incroyable, au premier abord. Aucun journal capitaliste ne propose cela pour la Grande Bretagne ! Mais ce qui alarme The Economist, c’est que face au discrédit de l’ANC (un fossé de la taille du Grand Canyon existe à présent entre les seigneurs, chefs et rois de l’ANC et la classe ouvrière), les masses appauvries ont commencé à se tourner brusquement vers la gauche, vers les véritables militants pour le socialisme, les membres du DSM. Ils vont donc remuer ciel et terre pour essayer d’empêcher les masses d’aller dans notre direction, même si cela signifie de mettre en place une alternative ‘‘populiste’’ pour bloquer le développement d’un vrai parti de masse des travailleurs.

    Les élections américaines

    Le plus important évènement de cette période, au moins dans l’Ouest capitaliste, a été la réélection d’Obama aux USA. Il a été le premier président à être réélu depuis 1945 avec un taux de chômage supérieur à 7,5% dans le pays. Certains stratèges du capital (ou certains imaginant l’être) ont tiré des conclusions complètement fausses hors du résultat de cette élection. Ils affirment que la principale raison pour laquelle Obama a été élu, c’est que le peuple américain blâmait Bush, l’ancien président, pour les catastrophes économiques actuelles. Cela a sans doute été un facteur, certes, mais ce n’était ni le seul, ni le plus décisif. Une grande polarisation a pris place dans la société américaine avec les électeurs d’Obama (malgré leur déception face à son bilan) se rendant massivement au bureau de vote pour empêcher le candidat des 0,01% des riches et des plutocrates, Romney, de remporter les élections.

    Il y avait une réelle peur de ce que signifierait une victoire de Romney, qui aurait fait tourner à l’envers la roue de l’histoire, briser les aides sociales et les réformes limitées dans la santé, etc. Cela a fait accroître la participation électorale qui, même si elle n’était pas aussi élevée qu’en 2008, était néanmoins d’un niveau historique. Le vote populaire a été serré, Obama l’emportant par 50,8% contre 47,5%. Mais il est crucial que la majorité des femmes l’aient soutenu, avec une majorité encore plus forte concernant les jeunes femmes. Il a aussi gagné 80% du vote des minorités (Latinos et Afro-Américains), bien sûr, et des sections significatives de travailleurs syndiqués (dans l’automobile par exemple) ont milité pour lui et l’ont soutenu. Dans cette élection, ce n’était pas seulement une question de victoire du ‘‘moindre mal’’ pour Obama pour ‘‘arranger l’économie’’. Bien sûr, il ne sera pas capable de le faire, à cause du caractère de la crise économique.

    Le magnifique résultat de la candidate de Socialist Alternative aux élections de la chambre des représentants de l’Etat de Washington (un splendide 28% des suffrages) a été un triomphe non seulement pour nos camarades Américains mais pour l’ensemble du CIO.

    C’était la confirmation du fait que présenter des candidats des travailleurs indépendants peut conduire au succès, et à un nouveau parti de masse des travailleurs. De plus, cela s’est produit au cœur même de la plus grande puissance capitaliste au monde. Cette élection est un avant-goût de ce à quoi nous pouvons nous attendre ailleurs dans la prochaine période, en particulier en Afrique du Sud et en Europe, et cela montre le potentiel qui existe dialectiquement aux USA pour les idées et le programme du socialisme.

    L’héritage des trahisons social-démocrates et staliniennes n’existe pas aux USA, ce qui en fait un terrain encore plus favorable pour les vraies idées du socialisme en comparaison de nombreux endroits d’Europe et d’ailleurs à ce stade. De notre point de vue, il en va de même pour la victoire d’Obama. Son deuxième mandat pourrait préparer la voie à la création d’un troisième parti, mais d’un parti de la classe ouvrière cette fois, socialiste, radical et populaire. Bien sûr, toutes les perspectives sont conditionnées par la façon dont l’économie se développera aux USA et dans le monde entier.

    L’économie mondiale fait face à une série de crises

    L’économie américaine (l’une des seules à ré-atteindre le niveau de production d’avant 2008) a ralenti pour atteindre son rythme le plus faible depuis 2009, avec une croissance de moins de 2% alors que, simultanément, toutes les plus grandes économies mondiales ont perdu de la vitesse. Si les Républicains refusent un accord avec Obama, si les USA échouent face à la falaise fiscale, cela pourrait presque automatiquement plonger l’économie mondiale (fondamentalement stagnante) dans une nouvelle dépression encore plus profonde. Les intérêts des capitalistes devraient logiquement forcer les Républicains à chercher un accord avec Obama. Mais le système politique des USA, conçu à l’origine pour une population prédominée par les petits fermiers au XVIIIème siècle, est maintenant complètement dysfonctionnel, de même que le Parti Républicain.

    En 2009, lors de l’un de ses discours parmi les plus révélateurs devant les banquiers américains, Obama a déclaré : ‘‘Mon administration est tout ce qu’il y a entre vous et les fourches.’’ Mais lors des élections, cela ne lui a pas pour autant apporté le soutien de la bourgeoisie américaine dans son ensemble, qui a en général préféré Romney. Cela tend à montrer qu’une classe ne reconnait pas toujours ce qui est dans son meilleur intérêt ! Ce sont les stratèges et les penseurs de la classe dominante, parfois en opposition avec ceux qu’ils sont sensés représenter, qui sont préparés à défendre les meilleurs intérêts des capitalistes et à planifier le chemin à suivre. Aujourd’hui, le problème pour eux est que les différentes routes qui mènent toutes le capitalisme à la ruine.

    Leur perte de confiance est visible dans leur refus d’investir ainsi que dans les avertissements des institutions sacrées du capitalisme : le FMI, la Banque Mondiale, etc. Leurs perspectives de sortie rapide hors de la crise actuelle ont toutes été balayées. Dorénavant, ils sont plongés dans un pessimisme total. Le premier ministre britannique David Cameron et le Gouverneur de la Bank of England ont averti que la crise peut durer encore une décennie, et c’est le même son de cloche au FMI. Le thème des ‘‘banques zombies’’, d’abord employé au Japon, est à présent utilisé pour décrire non seulement les banques mais aussi les économies de l’Amérique, de l’Europe et du Japon. Comme dans le cas du Japon, les économistes bourgeois prédisent une ‘‘décennie perdue’’ pour certains pays et pour l’ensemble de l’Europe. Ils comparent cela à la dépression de 1873 à 1896, au moins en ce qui concerne l’Europe. Martin Wolf, du Financial Times, réfléchit ainsi : ‘‘l’âge de la croissance illimitée est-il terminé ?’’ en citant beaucoup une nouvelle étude ‘‘La Croissance Economique des USA Est-Elle Terminée ? L’Innovation Hésitante Confronte Les Six Vents Contraires’’. (NBER Working Paper no 18315)

    Cela a posé la question essentielle du rôle de l’innovation dans le développement du capitalisme, et en particulier dans l’amélioration de la productivité au travail. Les auteurs de l’étude mentionnée ci-dessus ont conclu qu’il y avait eu ‘‘trois révolutions industrielles’’ depuis 1750 qui ont été cruciales pour le développement du capitalisme.

    La première s’est située entre 1750 et 1830, a vu la création des machines à vapeur, du filage du coton, des chemins de fer, etc. La deuxième était la plus importante des trois avec ses trois inventions principales : l’électricité, le moteur à combustion interne et l’eau courante avec la plomberie, dans une période relativement courte, de 1870 à 1900. Ces deux révolutions ont pris à peu près 100 ans pour que leurs effets se répandent complètement dans l’économie. Après 1970, l’augmentation de la productivité a nettement ralenti, pour un certain nombre de raisons. La révolution informatique et internet (décrits par les auteurs comme la révolution industrielle n°3) ont atteint leur apogée à l’ère d’internet, fin des années 1990. Selon cette étude, son principal impact sur l’économie s’est altéré au cours des 8 dernières années. Les chercheurs en concluent que, depuis les années 2000, l’invention a largement été concentrées dans les appareils de loisir et de communication qui sont plus petits, plus smart et ont plus de capacités, mais ne changent pas fondamentalement la productivité du travail ou le niveau de vie de la même manière que la lumière électrique, les voitures à moteur et la plomberie. Cela ne veut pas dire que la science et la technique n’ont pas le potentiel de considérablement rehausser la productivité, mais le problème est posé par l’état actuel du capitalisme en déclin, incapable de développer pleinement le potentiel de ses forces productives. La baisse tendancielle du taux de profit (et les baisses réelles de rentabilité) décourage les capitalistes d’adopter des innovations qui pourraient développer les forces productives.

    Il y a ensuite le problème de la ‘‘demande’’ qui en retour a conduit à ‘‘une grève de l’investissement’’, avec un minimum de 2000 milliards de dollars de ‘‘capital au chômage’’ dans la trésorerie des entreprises américaines. Et le problème du surendettement par-dessus tout. Styajit Das, du Financial Times, admoneste la bourgeoisie américaine qui ‘‘parait incapable d’accepter la vérité : la perspective d’une croissance économique faible ou nulle pour une longue période. (…) Le maintien de la croissance nécessite toujours plus d’emprunts. En 2008, aux USA, 4 ou 5 dollars de dettes étaient nécessaires pour créer 1 dollar de croissance, contre 1 ou 2 dollars dans les années 1950. A présent, la Chine a besoin de 6 ou 8 dollars de crédit pour générer 1 dollar de croissance, une augmentation de 1 à 2 dollars par rapport à il y a 15 ou 20 ans.’’

    Le capitalisme ne fait pas face à une crise, mais à une série de crises. Ses partisans essaient de faire accepter à la classe ouvrière la perspective d’une croissance faible, voire de pas de croissance du tout, et ainsi qu’elle soit plus encline à accepter de voir ses conditions de vie se réduire drastiquement, comme en Grèce. Nous devons contrer cela par notre programme et en mettant en avant les possibilités illimitées (évidentes même aujourd’hui) qui sont présentes pour autant que la société soit organisée de façon rationnelle et planifiée, c’est-à-dire grâce à l’instauration du socialisme.

    L’insoluble crise de l’Europe

    La crise économique en Europe est la crise la plus sérieuse à laquelle fait face le système capitaliste. Cette crise parait insoluble avec la politique d’austérité qui ne fonctionne clairement pas, l’éclatement de conflits et la mise en garde du FMI contre ‘‘l’austérité excessive’’ appliquée par les gouvernements nationaux en Europe avec la bénédiction des autorités de l’UE et de la Banque Centrale Européenne (BCE). La BCE a d’un côté cherché à implanter, comme l’US Federal Reserve et la Bank of England, une forme de keynesianisme par l’achat d’obligations d’Etat ainsi qu’en accordant des prêts meilleurs marché à certaines banques et pays. Mais de l’autre, ces mêmes autorités (la ‘‘Troïka’’) ont été l’instrument des politiques d’austérité. Pourtant le FMI critique ‘‘l’effet multiplicateur’’ négatif qui s’opère quand une austérité drastique est appliquée (coupes dans les dépenses d’Etat, pertes d’emplois, etc.) car cela réduit les revenus de l’Etat. La BCE et les gouvernements nationaux rétorquent avec l’argument de ‘‘l’absolue nécessité’’ de faire des coupes dans les dépenses d’Etat, accompagnées de toutes les autres mesures d’austérité, de privatisation, etc. Mais en dépit de toutes les attentes, l’austérité a eu pour effet d’éteindre les braises économiques qui subsistaient encore durant la crise.

    Il est vrai que les politiques keynésiennes ont échoué à générer la croissance. Dans la situation actuelle, cela revient à ‘‘pousser un objet avec une corde’’. Cela a conduit les nouveaux keynésiens, comme l’ancien monétariste thatchérien Samuel Brittan, à faire pression pour des mesures plus audacieuses ; il défend ce qui revient à une ‘‘chasse au trésor’’ géante, dans une tentative désespérée de faire bouger l’économie. Il suggère, en plaisantant seulement à moitié, d’enterrer des montagnes de cash, et que les aventuriers qui les découvriraient aillent les dépenser ! Il n’y a pas d’indication que cela se produise, cependant. Les largesses qui ont été distribuées jusqu’ici ont été utilisées pour payer les dettes, pas pour augmenter les dépenses. C’est une indication du désespoir de la classe dominante pour une amélioration, à ce stade. Le keynésianisme a été partiellement essayé et a échoué, mais cela ne signifie pas que, face à une explosion révolutionnaire, les capitalistes ne vont pas recourir à des mesures keynésiennes de grande ampleur. Des concessions peuvent être accordées, et par la suite les capitalistes vont tenter de les reprendre par le biais de l’inflation.

    Même à présent, les autorités européennes tentent d’éviter que la Grèce soit en défaut de paiement en suggérant que plus de temps lui soit donné pour payer. Cela ne va pas empêcher les attaques sauvages contre la classe ouvrière grecque, qui sont appliquées sans état d’âme par l’UE. Cela ne va pas non plus résoudre les problèmes de base de la Grèce, qui vont encore s’accumuler avec la dette colossale. Un défaut de la Grèce est donc toujours probable, ce qui aura d’énormes répercussions dans toute l’Europe, dont en Allemagne, lourdement endettée envers les banques d’autres pays. Il est même possible que l’Allemagne elle-même prenne l’initiative de quitter la zone euro, telle est l’opposition politique intérieure contre la politique de renflouement. Même la proposition de donner à la Grèce plus de temps pour payer ses dettes rencontre une opposition de la part des capitalistes allemands parce que cela signifierait d’effacer une petite partie de leur dette. Il est possible que, en ce qui concerne l’Espagne et certains autres pays, ‘‘la canette soit envoyée plus loin’’. Mais, en fait, la canette va devenir trop grosse pour pouvoir être envoyée au loin ! Par conséquent, une rupture de la zone euro reste en jeu.

    Même les Chinois sont alarmés par la tournure des événements en Europe. Un haut fonctionnaire Chinois, Ji Liqun, assis au sommet d’un fond souverain d’Etat de plus de 350 milliards d’euros, a averti que le public européen est à un ‘‘point de rupture’’. Auparavant, il avait argumenté que les Européens devraient travailler plus, mais il reconnait maintenant que la profondeur de la colère publique pourrait conduire à un ‘‘rejet complet’’ des programmes d’austérité. ‘‘Le fait que le public descende dans les rues et recoure à la violence montre que la tolérance du public en général a atteint ses limites’’, a-t-il commenté. ‘‘Les syndicats sont maintenant impliqués dans des protestations organisées, des manifestations et des grèves. Ca sent les années ‘30.’’ Ses préoccupations inexprimées sont que l’exemple de la classe ouvrière européenne puisse faire des vagues en Chine. Il craint d’autre part pour la sûreté des investissements chinois en Europe.

    La Grèce est la clé de la situation

    En ce moment, l’Europe est la clé de la situation mondiale : c’est là que la lutte des classes est la plus aigüe, c’est là que se trouvent les plus grandes opportunités pour une percée de la gauche et des forces révolutionnaires. Mais s’il en est ainsi, la Grèce est en conséquence la clé de la situation en Europe, suivie de près par l’Espagne et le Portugal dans la chaine des maillons faibles de l’Europe capitaliste. Comme Trotsky le disait de l’Espagne dans les années ‘30, non pas une mais 3 ou 4 révolutions auraient été possibles si les travailleurs grecs avaient une direction prévoyante et un parti de masse à sa tête. Le jour de la dernière grève générale, un programmeur informatique grec a commenté dans le journal britannique The Guardian : ‘‘Personnellement, je suis épaté qu’il n’y ait pas encore eu de révolution.’’ La télévision britannique a aussi commenté que seulement 3% de la population soutient effectivement les mesures d’austérité du gouvernement et de la Troïka. Avec tous les tourments que les Grecs sont forcés d’endurer, à la fin du programme d’austérité actuel, la dette de la Grèce sera encore de 192% du PIB ! En d’autres termes, il n’y a absolument aucune chance que cette dette soit payée. L’austérité sans fin est cependant l’avenir que le capitalisme a décrété pour le peuple grec.

    Toutes les conditions pour la révolution ne sont pas seulement mures, mais pourries. 19 jours de grève générale (parmi lesquelles quatre de 48h et le reste, de 24h) témoignent des réserves colossales d’énergie dont disposent les travailleurs grecs et de leur capacité à résister. Cependant, ils en ont conclu que, malgré une lutte magnifique, la Troïka et les capitalistes grecs n’ont pas encore capitulé. Il est donc nécessaire de se tourner vers le front politique, vers l’idée d’un gouvernement de gauche capable de montrer la voie pour sortir de la crise. Ce processus a trouvé place malgré le fait que les masses soient sceptiques vis-à-vis de Syriza et de sa direction. Des sections significatives des masses sont prêtes à soutenir Syriza, qui reçoit actuellement 30% de soutien dans certains sondages, mais ils ne sont pas prêts à rejoindre ses rangs et à s’engager activement. Il y a une part de cet élément dans beaucoup de pays. La forte déception consécutive à l’échec des partis ouvriers a entraîné un scepticisme extrême envers ceux-ci, même ceux qui sont formellement de gauche. La volonté est bien présente de soutenir les formations et partis de gauche aux élections, mais pas de leur donner du temps et de l’énergie en s’engageant dans leurs rangs et en les construisant. Les travailleurs ont été déçus dans le passé et craignent d’être à nouveau laissés tomber. Bien sûr, cet état d’esprit peut et va être modifié une fois qu’ils auront vu ces partis véritablement accomplir ce qu’ils ont promis. Cependant, au lieu d’aller vers la gauche, les partis de gauche en général – et Syriza en particulier – ont eu tendance à aller vers la droite, en baissant leur programme et en ouvrant même leurs portes à d’ex-dirigeants de la social-démocratie (comme le Pasok en Grèce) qui ont ouvertement joué un rôle de briseurs de grève dans la dernière période.

    Dans les circonstances de la Grèce, les tactiques souples employées par nos camarades grecs – tout en restant fermes sur le programme – répondent aux besoins de cette situation très complexe. Nous devons avoir l’œil non seulement sur les forces de gauche à l’intérieur de Syriza, mais aussi sur les forces importantes qui se situent à l’extérieur et qui, dans certains cas, ont revu leurs positions politiques. Nous ne pouvons pas dire à quel moment le gouvernement actuel va s’effondrer (car il va surement s’effondrer), avec la probable arrivée au pouvoir d’un gouvernement de gauche emmené par Syriza. Mais nous devons être préparés à une telle éventualité, dans le but de pousser ce gouvernement vers la gauche, tout en aidant à créer des comités démocratiques populaires qui peuvent en même temps soutenir le gouvernement contre la droite mais aussi faire pression pour la prise de mesures en défense de la classe ouvrière. Il n’est pas impossible qu’une nouvelle force semi-massive significative émerge des tactiques dans lesquelles nous nous sommes à présent engagés.

    Cela implique non seulement une concentration sur les développements dans la gauche et dans les partis des travailleurs mais aussi contre les dangers de l’extrême-droite, et en particulier celui de la montée du parti fasciste Aube Dorée, dont le soutien est récemment monté jusqu’à 14% dans les sondages, mais qui est maintenant descendu autour des 10%. Une des raisons de cette diminution est la formation de comités de masse antifascistes, que nous avons aidé à initier et dans lesquels nous avons attiré des travailleurs, des jeunes et des réfugiés. Ce travail est d’une importance exceptionnelle et pourrait être le modèle pour le genre de situation à laquelle la classe ouvrière peut être confrontée dans beaucoup d’autres pays à l’avenir.

    Si la classe ouvrière et la gauche échouent à mener à bien une révolution socialiste, l’Histoire témoigne qu’ils devront en payer de lourdes conséquences. Les tensions sociales qui existent en Grèce ne peuvent être contenues pour toujours dans le cadre de la ‘‘démocratie’’. Il y a déjà une guerre civile voilée, avec plus de 90% de la population opposée aux ‘‘un pour cent’’ et cela peut exploser en un conflit dans le futur. Quelques éléments d’extrême-droite en Grèce ont discuté de l’idée d’une dictature, mais ce n’est pas immédiatement à l’agenda. Tout mouvement prématuré qui paraitrait imiter le coup d’état militaire de 1967 pourrait provoquer une grève générale totale, comme en Allemagne en 1920 avec le Putsch de Kapp, et entraîner une situation révolutionnaire. De plus, un coup d’Etat ne serait pas acceptable en ce moment pour l’impérialisme, la ‘‘communauté internationale’’, dans cette ère de ‘‘démocratie et de résolution des conflits’’.

    Dans un premier temps, les capitalistes vont plus probablement recourir à une forme de bonapartisme parlementaire, comme le gouvernement Monti en Italie, mais en plus autoritaire. La position économique et sociale risquée de la Grèce va demander un gouvernement plus ferme et plus à droite qu’en Italie, avec le pouvoir de renverser le parlement ‘‘en cas d’urgence’’. Si cela ne fonctionne pas, et qu’une série de gouvernements de caractère similaire est incapable de forcer l’impasse sociale, et si la classe ouvrière, faute d’un parti révolutionnaire conséquent, échoue à prendre le pouvoir, alors les capitalistes grecs pourraient passer à une dictature ouverte.

    Nous devons avertir la classe ouvrière que nous avons encore du temps en Grèce, mais nous devons utiliser ce temps pour préparer une force capable d’accomplir un changement socialiste de société. Le 14 novembre dernier, la réponse dans toute l’Europe a illustré que les luttes de la classe ouvrière sont liées entre elles. Si les travailleurs grecs brisaient les chaines du capitalisme et en appelaient aux travailleurs de l’Europe de l’Ouest, ou au moins aux travailleurs du Sud de l’Europe, il y aurait une énorme réponse pour un appel pour une confédération socialiste – qui impliquerait probablement l’Espagne, le Portugal et peut-être l’Irlande dans un premier temps, sinon l’Italie.

    La Chine à la croisée des chemins

    Comme le montre le fait que la première visite d’Obama après sa victoire électorale était en Asie, l’impérialisme américain a identifié ce continent comme une région-clé (plus importante que l’Europe, par exemple, stratégiquement et économiquement). Il s’agissait en partie de réaffirmer l’enjeu économique de l’impérialisme américain mais aussi à avertir la Chine de l’importance des intérêts stratégiques militaires des USA. Cela paraissait nécessaire à cause de la réaffirmation militaire de la Chine, qui a été révélée récemment dans les clashs de la marine chinoise avec le Japon à propos d’îles inhabitées contestées. Le Japon commence à construire ses forces militaires, seulement pour sa ‘‘défense’’ bien sûr ! Cela signifie que l’Asie va devenir un nouveau dangereux théâtre de conflits militaires, avec la montée du nationalisme et la possibilité de conflits déclarés, où les diverses puissances seront préparées à se confronter les unes aux autres, avec les armes si nécessaire, afin de renforcer leur influence, leur pouvoir et leurs enjeux économiques.

    La Chine est le colosse de l’Asie, la deuxième puissance au monde après les USA. La façon dont elle se développe va avoir un effet énorme, peut-être décisif, sur la région et le monde. Et la Chine est certainement à la croisée des chemins, comme son élite dirigeante le comprend bien. Comme beaucoup de groupes dirigeants dans l’Histoire, elle sent les tensions contradictoires monter d’en bas et est incertaine concernant la façon de les gérer. Les érudits Chinois décrivent la situation actuelle du pays à The Economist comme ‘‘instable à la base, découragée dans les couches moyenne, hors de contrôle en haut.’’ En d’autres termes, en ce moment, les ingrédients pour une révolution fermentent en Chine. Le temps des taux de croissance spectaculaires de l’ordre de 12% est révolu. La Chine est aujourd’hui telle une voiture embourbée dans la neige : les roues tournent mais le véhicule n’avance pas. La croissance s’est probablement contractée entre 5 et 7%. Le régime revendique une certaine ‘‘reprise’’ mais ne s’attend pas au retour d’une croissance à deux chiffres. Cela va automatiquement affecter les perspectives pour l’économie mondiale. Un taux de croissance de plus de 10% n’était possible que par l’injection de ressources, qui est monté jusqu’à 50% du PIB investi dans l’industrie, ce qui est énorme et sans précédent. Cela a en retour généré du mécontentement et du ressentiment contre la croissance des inégalités et la dégradation de l’environnement ainsi que contre l’accaparation illégale des terres collectives par des fonctionnaires avides.

    Cela et les conditions de surexploitations dans les usines ont généré une opposition énorme parmi les masses avec 180.000 manifestations publiques en 2010 (et ce chiffre a augmenté depuis), en comparaison à l’estimation officielle de 40.000 en 2002. Le retrait du ‘‘bol de riz en fer’’ (la sécurité sociale) et les attaques contre la santé et l’éducation ont ajouté au mécontentement. Cela a forcé la direction à réintroduire un minimum de couverture-santé. La direction chinoise est hantée par la gestion de ce volcan et par la voie économique à adopter. Le village de Wukan s’est soulevé il y a un an et a été victorieux après des batailles avec la police pour réclamer des terres qui leur avaient été volées par la bureaucratie locale. Ceci était symptomatique de ce qui se passe sous la surface en Chine : une révolte souterraine qui peut éclater à n’importe quel moment. A cette occasion, les fonctionnaires locaux ont battu en retraite mais d’un autre côté, les manifestants n’ont pas donné suite à leur mouvement. Il semble que cet incident et beaucoup d’autres sont ‘‘de petits soulèvements qui ne cessent de bouillonner à travers toute la Chine.’’ (Financial Times)

    Beaucoup de protagonistes pensent naïvement que si seulement les seigneurs de Pékin connaissaient l’échelle de la corruption, ils interviendraient pour y mettre fin. Quelque chose de similaire se produisait en Russie sous le stalinisme. Au départ, les masses tendaient à absoudre Staline de toute responsabilité dans la corruption, pour laquelle il n’aurait pas été ‘‘au courant’’. Cela était considéré comme étant le crime de la bureaucratie locale et non pas de Staline lui-même. Mais l’arrestation de Bo Xilai et le procès de sa femme ont aidé à dissiper ces illusions dans la Chine actuelle. Il a été accusé d’avoir abusé de sa position pour amasser une fortune, acceptant d’énormes pots-de-vin tout en permettant la promotion de ses amis à de hauts postes. Bo, membre du sommet de l’élite (un prince rouge, fils d’un dirigeant de la révolution chinoise) est accusé de complicité de meurtre, de corruption passive et de corruption à grande échelle. Cela pose naturellement la question de la manière dont il a pu s’en sortir si longtemps.

    En réalité, ce ne sont pas ces crimes (bien qu’ils soient probablement vrais) qui ont conduit à son arrestation et à son procès imminent. Il représentait un certain danger pour l’élite et faisait campagne pour un poste au plus élevé en évoquant, élément très dangereux pour l’élite, certaines expressions radicales du maoïsme associées à la Révolution Culturelle. En faisant cela, il aurait pu inconsciemment libérer des forces qu’il n’aurait pas été capable de contrôler, qui auraient pu aller plus loin et exiger des actions contre les injustices du régime. Qui sait comment cela se serait terminé ?

    Le régime chinois est en crise. Il est assez visiblement divisé sur les prochaines étapes à accomplir (en particulier sur la question économique). Un prince rouge l’a exprimé brutalement au Financial Times : ‘‘La meilleure époque de la Chine est révolue et le système entier a besoin d’être remanié.’’ Les commentateurs bourgeois de journaux comme The Economist, le Financial Times, le New York Times, etc., ont récemment recouru à la terminologie qu’utilise le CIO, en décrivant la Chine comme ‘‘un capitalisme d’Etat’’. Ils n’ajoutent pas la clause que nous y ajoutons, ‘‘un capitalisme d’Etat avec des caractéristiques uniques’’. Cela est nécessaire pour différencier notre analyse de la position rudimentaire du Socialist Workers Party et d’autres, qui décrivent inexactement les économies planifiées du passé de cette façon. Le sens de la marche de la Chine est clair. Par le passé, le secteur capitaliste a augmenté au détriment des entreprises d’Etat. Mais récemment, et en particulier depuis le plan de relance de 2008, il y a eu une certaine recentralisation et le pouvoir économique a tendu à être plus concentré dans le secteur d’Etat, à tel point que maintenant les entreprises d’Etat pèsent maintenant 75% du PIB total. D’un autre côté, selon The Economist : ‘‘Les experts ne s’accordent pas à dire si l’Etat représente la moitié ou un tiers de la production chinoise, mais sont d’accord pour dire que cette part est plus basse qu’elle l’était il y a deux décennies. Depuis des années, depuis la fin des années 1990, les entreprises d’Etat paraissent battre en retraite. Leur nombre a décliné (à environ 114000 en 2010, une centaine d’entre elles étant des champions nationaux contrôlés centralement), et leur part dans l’emploi a chuté. Mais à présent, même alors que le nombre de compagnies privées a augmenté, la retraite de l’Etat a ralenti et, dans certaines industries, s’est inversées.’’

    Il est clair qu’une discussion féroce a lieu derrière les portes fermées de l’élite. Les ‘‘réformateurs’’ sont en faveur d’un programme déterminé de démantèlement du secteur d’Etat pour se tourner de plus en plus vers le ‘‘marché’’. Ils proposent de lever les dernières barrières à l’entrée et l’action du capital étranger. Selon la rumeur, le nouveau ‘‘dirigeant’’ Xi Jinping, malgré la rituelle rhétorique du ‘‘socialisme avec des caractéristiques chinoises’’ soutient ces réformateurs. D’un autre côté, ceux qui ont proposé l’ouverture, dans l’économie mais aussi avec des réformes ‘‘démocratiques’’ limitées, paraissent mis à l’écart. Des études ont été réalisées sur la façon dont d’anciennes dictatures comme la Corée du Sud aurait réussi une ‘‘transition froide vers la démocratie’’. Elles ont eu lieu quand l’expansion économique ne s’était pas épuisée et même alors, il s’agissait d’un contexte de mouvement de masses. La ‘‘transition’’ proposée en Chine prend place au milieu d’une crise économique massive. Il paraitrait que les dirigeants chinois étudient avidement le rôle de Gorbatchev en Russie. Il avait d’abord l’intention de ‘‘réformer’’ le système et a fini par présider son démantèlement. Dans la Chine actuelle, des réformes importantes d’en haut provoqueront une révolution d’en bas. On ne peut pas exclure qu’une période ‘‘démocratie’’ très faible (avec le pouvoir encore aux mains des anciennes forces, comme aujourd’hui en Egypte avec l’armée et les frères musulmans au pouvoir) pourrait se développer après un soulèvement révolutionnaire en Chine. Mais cela ne serait qu’un prélude à l’ouverture des vannes à un des plus grands mouvements de masse dans l’Histoire.

    Conclusions

    En quatre ou cinq ans de crise économique mondiale dévastatrice, nous pouvons conclure qu’il y a des perspectives très favorables pour la croissance du marxisme, avec toutefois certaines réserves compte tenu du fait que la conscience (la vision large de la classe ouvrière) doit encore rejoindre la situation objective, qui peut encore être décrite comme prérévolutionnaire, surtout à l’échelle mondiale.

    Les forces productives n’avancent plus, mais stagnent et déclinent. Cela a été accompagné d’une certaine désintégration sociale de certaines sections de la classe ouvrière et des pauvres. En même temps, de nouvelles couches de la classe ouvrière se créent ainsi que de parties de la classe moyenne (prolétarisées) et sont forcées d’adopter les méthodes traditionnelles de la classe ouvrière avec les grèves et les organisations syndicales. Le pouvoir potentiel de la classe ouvrière reste intact, même entravé et affaibli par les directions syndicales droitières ainsi que par la social-démocratie et les partis ‘‘communistes’’.

    Le CIO n’a pas encore fait de percée décisive dans un pays ou un continent. Cependant, nous avons maintenu notre position globale en termes de membres et, surtout, nous avons augmenté notre influence dans le mouvement ouvrier. Beaucoup de travailleurs sympathisent et regardent de notre côté, ils peuvent nous rejoindre sur base des événements et de notre militantisme. Nous devons faire face à la situation en formant et préparant nos sympathisants pour le prochaine période tumultueuse, dans laquelle de grande opportunité se présenteront de renforcer les organisations et partis du CIO et l’Internationale dans son ensemble.

  • [INTERVIEW] ITALIE : ''La crise systémique a fait exploser le paysage politique. Les travailleurs ont besoin d’un parti sérieux et combatif pour les aider à résister à l’austérité.''

    Même si l’Italie est l’un des pays européens les plus touchés par la crise, les évènements qui s’y passent actuellement sont moins connus que ceux d’Espagne, du Portugal ou de Grèce, notamment à cause de l’absence de lutte de masse contre l’austérité brutale. Nous en avons discuté avec Giuliano Brunetti, membre de ControCorrente, le parti-frère du PSL en Italie. Dans cette interview, il nous parle de la situation de crise que subissent les travailleurs et leurs familles, du processus de décomposition/recomposition du paysage politique ainsi que des luttes récentes et en cours, en développement.

    Interview réalisée par Stéphane Delcros

    Socialisme.be : Que signifie l’austérité pour les Italiens ?

    Giuliano : D’un point de vue général, la crise a fortement frappé en Italie. En 2012, le niveau de consommation est tombé à son niveau le plus bas depuis la deuxième guerre mondiale. La production industrielle a chuté et le nombre de travailleurs sans emplois a explosé. La situation est surtout difficile pour les pensionnés, les jeunes travailleurs du Sud, et spécialement les femmes.

    Selon l’institut national des statistiques, 52% des pensionnés italiens reçoivent moins de 1.000€ par mois. Le nombre de travailleurs sans emplois s’élève officiellement à 2,9 millions, soit 11,1% ; chez les jeunes, le chiffre est de 36,5%. Mais il faut considérer que les gens qui travaillent ne serait-ce qu’une heure par semaine ne sont pas considéré comme sans emplois. Dans le Sud du pays, plus d’une femme sur deux est sans emploi.

    C’est devenu incroyablement difficile de trouver un job pour un jeune ou un travailleur sans-emploi. Les petites entreprises familiales, qui représentent 90% des entreprises du pays, sont chaque jour en train de fermer par centaines, parfois par milliers, car la production fonctionne pour moins de la moitié de la capacité de production. Les travailleurs de l’usine de Fiat à Melfi (Turin), par exemple, travaillent deux jours par mois. Dans le secteur public, ce sont des dizaines de milliers d’emplois qui sont supprimés, et on attend une nouvelle suppression d’une centaine de milliers d’emplois, avec les 30 milliards d’euros d’économie budgétaires prévues dans le secteur des soins de santé.

    Le gouvernement Monti, soutenu par toutes les fractions politiques principales de la classe capitaliste italienne, a assuré, en un an, l’introduction d’un nombre extraordinaire de réformes antisociales sur les pensions et les salaires. Le gouvernement a réussi le démantèlement de l’article 18 du statut des travailleurs. Cette article de la législation sociale sauvegardait les travailleurs des grosses entreprises contre les licenciements illégaux menés par les patrons. Mais aussi, et peut-être même pire, le gouvernement a réussi à faire passer une réforme constitutionnelle, qui est la traduction, dans la législation nationale, du Pacte budgétaire européen (le Traité d’austérité), avec la nécessité de réduire la dette publique italienne au niveau de 60%, ce qui veut concrètement dire qu’entre 40 et 45 milliards d’euros d’économies vont être mises sur la table chaque année d’ici à 2020 par la coalition gouvernementale qui va diriger le pays.

    Ceci, bien sûr, si on ne prend pas en compte la possibilité d’une lutte généralisée qui développera inévitablement du moment que les conséquences de la crise deviendront de plus en plus visibles et que des couches de jeunes activistes et de travailleurs rentreront dans l’arène politique.

    D’un point de vue social, du fait de l’échelle des attaques et de la crise, du fait de l’appauvrissement généralisé de la population italienne, l’Italie, avec la Grèce, l’Espagne et le Portugal, est l’un des pays européens les plus touchés, même si nous n’y avons pas encore vu le même type de réaction généralisée comme celles qui se sont développées dans les autres pays PIIGS.

    Pourquoi justement, contrairement aux autres pays du Sud de l’Europe, n’y a-t-il pas encore eu de grand mouvement contre l’austérité en Italie ?

    Il n’y a pas d’explication simple à cela, il faut prendre plusieurs éléments en compte. Tout d’abord, il faut se rendre compte que Berlusconi n’a pas été chassé du pouvoir sur base d’une fronde du peuple. Son gouvernement était une coalition entre des représentants du grand capital et du petit capital, avec la Ligue du Nord. Après les nombreux scandales et provocations dont il usait largement, il n’avait pas la force de résister à une mobilisation de masse contre l’austérité nécessaire pour les intérêts des capitalistes italiens.

    Les classes dominantes italienne et européenne ont donc décidé à l’unanimité de trouver un outil plus respectable pour imposer l’austérité. Ils ont alors choisi un vieil homme poli et respectable, Monti, mais en dessous de l’image du bon grand-père se cachent les intérêts de la Troïka et des grandes banques et entreprises qu’il représente. Aujourd’hui, c’est donc seulement un gouvernement du grand capital. Les ministres sont presque tous des grands banquiers. Le ministre de la justice, par exemple, a un patrimoine de 7 milliards d’euros. Mais la bourgeoisie se rend compte qu’elle n’a pour le moment pas d’outil politique. L’euphorie après le départ de Berlusconi a en fait été très courte.

    Le sentiment général qui existe aujourd’hui dans la société est la peur. Ceux qui ont le privilège d’avoir un emploi défendent leur salaire, qui est souvent un moyen de survie pour trois générations, et ils le défendent à tout prix, souvent en acceptant une réduction de la paye, ou une limitation de leurs droits si c’est la condition pour pouvoir ramener du pain à la maison.

    L’entièreté du système politique est en décomposition. Tous les partis principaux, de l’extrême-droite à l’extrême-gauche, sont confrontés à des scandales de corruptions. Cette situation nous ramène au grand chamboulement politique d’il y a 20 ans, quand la classe dominante, la presse et le système judiciaire ont détruit le système politique qui avait géré l’Italie après 1945. Les partis politiques qui sont aujourd’hui en désintégration avaient alors été mis sur pieds.

    L’Italie des Valeurs, un parti populiste et moraliste dirigé par le l’ancien magistrat Antonio Di Pietro, a beaucoup perdu. Son dirigeant fait face à à des accusations de vols ; il est notamment accusé d’avoir acheté une douzaine de propriétés avec l’argent du parti.

    Le Peuple de la Liberté (PDL), le parti de Berlusconi, tout puissant il y a si peu, a perdu près de 70% de ses votes dans la récente élection régionale en Sicile. Le parti est sévèrement touché par une montagne sans précédent de scandales qui impliquent également les gouvernements régionaux du Latium (Rome) et de Lombardie (Milan) où les directions locales du PDL ont été forcées à démissionner après avoir admis le vol de millions d’euros des caisses régionales pour leur usage personnel. Berlusconi semble maintenant incapable de revitaliser son parti, qui est en désintégration visible et en proie à des luttes de factions.

    Même la Ligue du Nord , le parti raciste d’Umberto Bossi, qui avait construit sa crédibilité politique ces deux dernières décennies en attaquant ‘les voleurs de Rome’, est devenue une organisation de voleurs, le type même d’organisation qu’il dénonçait. L’argent du parti a été investit dans l’achat de diamants en Angola, et le jeune fils idiot de Bossi, le chef du parti, a été promu conseiller régional de Lombardie alors qu’il n’avait que 21 ans et qu’il a raté trois fois ses examens finaux à l’école.

    Dans cette situation complexe et rapidement mouvante, une partie de l’élite italienne qui a des doutes sur Bersani, le nouveau leader de la coalition de centre-gauche (PD), essaie désespérément de reconstituer son propre parti politique. Après les gros scandales de corruption des années ’90, la classe capitaliste n’a jamais réussi à avoir son propre outil politique pour remplacer la Démocratie Chrétienne, pour parler en son nom.

    Montezemolo, précédent président de l’organisation des patrons, et propriétaire de Ferrari, a organisé la conférence de fondation de son nouveau mouvement appelé ‘Italia Futura’, en présence de 5.000 personnes, dont le secrétaire général pourri du syndicat CISL, qui a ouvertement lancé l’idée de la nécessité de reconstituer un gouvernement ‘technique’ sous la direction de Mario Monti lui-même.

    Cette perspective, étant donné l’augmentation des soutien pour le Parti Démocrate, ne semble pas la plus probable au stade actuel, mais ne peut être complètement exclue. Monti lui-même a déclaré qu’il était prêt, si on lui demandait, à servir une nouvelle fois le pays après les élections générales du printemps prochain.

    C’est la situation qui a mené à la spectaculaire percée du Mouvement Cinq Étoiles du comédien milliardaire et populiste Beppe Grillo qui est devenu le premier parti politique à Palerme dans le Sud profond et qui est crédité de 20% des votes dans les élections à venir. En fait, même le Mouvement Cinq Étoiles fait face à des complications internes, mais qui ne devraient pas affaiblir leur soutien électoral en ce moment.

    Il y a un manque total de confiance dans toute forme de parti politique et d’institution, y compris dans les confédérations syndicales qui sont vues comme faisant partie de l’establishment. Il y a le sentiment que des grands changements sont en train de se faire et les travailleurs et les gens ordinaires ont peur de ces changements, qui signifient habituellement une chute dramatique des standards et conditions de vie.

    Même le Parti Démocrate (PD), qui a vu son soutien dans la société augmenter autour des élections primaires, est vu avec scepticisme, et certainement sans enthousiasme. La popularité de Monti a brutalement chuté, même s’il reste le politicien le plus populaire. Les membres du Parti Démocrate ont choisi Bersani, un ancien communiste, pour mener le PD aux prochaines élections. Mais il ne faut avoir aucune illusion dans ce Bersani. Il a déjà plus d’une fois prouvé sa capacité à défendre sa classe, et ce n’est pas la nôtre. Ancien ministre du gouvernement Prodi, Bersani s’est rendu responsable du processus de privatisation, notamment des pharmacies et des taxis. Et lui et son parti, ensemble avec le parti de Berlusconi, ont soutenu toutes les mesures antisociales du gouvernement Monti.

    Cette situation politique complexe et l’absence totale d’instrument politique pour les gens ordinaires est une des raisons qui explique l’absence relative de réponse des masses ou, pour être plus précis, la guerre de classe unilatérale que les banquiers et les patrons ont lancé contre les travailleurs et leurs familles.

    Des luttes, plus locales et sectorielles, se sont tout de même développées récemment.

    Oui, d’importantes batailles ont été menées dans le secteur industriel comme la lutte victorieuse des mineurs du Sulcis en Sardaigne qui ont occupé le puit, avec de la dynamite collé à leurs corps pour défendre le seul puit de charbon qu’il reste dans le pays. Ils ont gagné là un répit temporaire.

    La bataille est encore en cours entre les travailleurs, les patrons, les institutions et le système judiciaire à l’Ilva à Tarente, une gigantesque usine de production d’acier en Europe, représentant 40% de la production sidérurgique d’Italie. On y a notamment vu des occupations des usines. C’est une expression de l’énorme colère qui vit parmi les travailleurs. Les juges ont ordonné la fermeture d’Ilva à Tarente à cause de problèmes environnementaux. L’usine est ultra-polluante, des centaines de travailleurs sont morts de cancer dans cette région. Mais fermer Ilva signifierait la décapitation complète de la production industrielle de l’Italie du Sud, la disparition de 20.000 emplois à Tarente et des licenciements sur les autres sites d’Ilva à Gênes et près de Turin.

    Chez Fincantieri à Gênes, les travailleurs ont stoppé avec succès un plan de privatisation qui aurait signifié la fermeture du chantier naval de Sestri. Nos camarades ont été impliqués dans cette lutte majeure et ont joué un rôle-clé dans la défense de ces emplois.

    Dans toutes ces luttes, la FIOM (syndicat des ouvriers du métal de la fédération syndicale CGIL) a joué un rôle important même si elle était assez isolée dans la société. La direction de la FIOM est confrontée à une contradiction majeure : d’un côté elle fait partie de la direction collective de la CGIL, qui tente de freiner les luttes, et de l’autre, elle doit répondre à l’avant-garde des travailleurs la plus combattive et la plus avancée. Cette contradiction va inévitablement devenir plus aiguë à un certain moment.

    Le 14 novembre dernier, la grève générale européenne a été très bien suivie dans certains pays d’Europe du Sud. Comment était la mobilisation en Italie ?

    Le 14 novembre, on a connu 4 heures de grève générale organisée par la Confédération générale italienne du travail (Confederazione Generale Italiana del Lavoro, CGIL), la principale confédération syndicale. C’était beaucoup trop peu au regard de l’ampleur de la politique d’austérité du gouvernement. La FIOM, le secteur public et les télécommunications, qui sont les secteurs les plus importants, ont eux étendu leur grève jusqu’à 8 heures de grève générale.

    Les autres confédérations syndicales (CISL, UIL et UGL) n’ont pas pris part à la grève, pas plus que l’USB, un syndicat dont la base est plus radicale et qui attire quelques-uns des membres les plus militants de la CGIL et des jeunes travailleurs précaires.

    La participation générale à la grève du 14 était assez faible, étant donné la faiblesse de la mobilisation qui était improvisée. Beaucoup de travailleurs se sont demandés quel était l’intérêt de prendre part à la grève de la CGIL, puisque ce même syndicat n’a rien fait lorsque le gouvernement Monti, soutenu pas le Parti Démocrate, a procédé à des attaques sur les pensions, les salaires et la législation sociale.

    De ce que nous savons de sections importantes du syndicat qui n’ont pas pris part aux actions de grève, c’est que les travailleurs ont mis en question la raison même de la grève: ”pour quoi faisons-nous grève?” Et pour beaucoup: ”quel intérêt à faire grève aujourd’hui, alors que mon syndicat n’a même pas levé le petit doigt quand mon salaire a été attaqué?”

    La jeunesse a-t-elle pris part à cette grève ?

    Même si le mouvement étudiant n’est pas directement concerné, durant la semaine passée, on a vu une vague d’occupations d’écoles et d’instituts par des étudiants en colère. L’État italien dépense 1,2% du PIB pour l’éducation, ce qui a pour conséquences une situation où l’école tombe littéralement sur la tête des étudiants, où le papier toilette et le savon manquent et où on impose aux étudiants de contribuer ‘volontairement’ à certaines dépenses. Le mouvement étudiant est une expression claire de la colère qui se développe parmi les jeunes, mais il n’est pas encore certain que ce mouvement se généralise pour le moment.

    Les dernières initiatives prises à gauche vont-elles dans la voie de la formation d’un nouveau parti des travailleurs ?

    La question d’un nouveau parti politique est un aspect important de la stratégie de la classe capitaliste dominante. Mais c’est une question réellement vitale pour le mouvement ouvrier et les secteurs progressistes de la société dans la période turbulente dans laquelle nous entrons.

    Les différentes tentatives qui ont été lancées ces derniers mois pour construire une nouvelle arme pour coordonner et organiser la résistance dans la société ont malheureusement toutes résulté en confusion et alliances politiques contre-nature. Le Comitato No Debito (Comité contre le payement de la dette) dans lequel nous intervenons et dans lequel nous jouons un rôlé-clé, surtout à Bologne et à Gênes, aurait pu être un bon outil. Malheureusement, le sectarisme de certains de ses membres fondateurs (Sinistra Critica et FalceMartello, sections italiennes respectivement du Sécretariat Unifié de la Quatrième Internationale et de la Tendance Marxiste Internationale) et l’incapacité de traduire le refus du payement de la dette aux banquiers en revendications politiques concrètes ont conduit à une situation de faiblesse. Le comité a organisé une manifestation nationale contre le gouvernement en octobre, qui s’est révélée être un certain succès politique. Mais il est peu probable que ce comité puisse émerger comme une force motrice pour la formation d’un nouveau parti des travailleurs dans la période à venir.

    Une autre tentative de créer une formation de gauche a été initiée par un groupe d’intellectuels de gauche regroupés autour du journal national Il Manifesto. L’initiative a organisé une conférence de fondation de l’ALBA (Alliance, Travail, Biens Communs, Environment) qui tente de remplir le vide politique à gauche.

    Le parti de la Refondation Communiste (RC) a essayé de construire son propre outil politique pour revenir au Parlement. Ils ont lancé la Fédération de la Gauche, une alliance électorale avec un autre parti communiste et deux forces plus modestes. Mais cette alliance était mort-née, et la RC essaie maintenant de construire une autre alliance politique sous le nom de ‘Le changement, c’est possible’, autour de Luigi De Magistris, ancien député européen et actuel maire de Naples. Malheureusement pour la RC, un tel développement va probablement pousser leur crédibilité un peu plus vers le bas. Ils avaient déjà perdu énormément lors de leur engagement dans les gouvernements néolibéraux sous la direction de Romano Prodi.

    Toutes ces tentatives ratées de lancer une nouvelle formation politique de gauche ont résulté en faillites complètes. Cela va peut-être ralentir le processus de construction d’un outil politique pour les travailleurs combatifs dans la prochaine période, mais cette question reste ouverte dans la société et ne peut pas être évitée. Les luttes industrielles et sociales seront la clé dans le développement d’une telle force.

    La crise systémique du capitalisme a fait exploser le paysage politique. Toutes les formations politiques majeures paient en fait le prix de leur participation à la défense des intérêts capitalistes ces vingt dernières années. Ces chamboulements politiques et l’austérité paralysent temporairement la majorité des travailleurs. Mais nul doute que notre classe se mettra en mouvement dans la prochaine période. Les travailleurs auront alors plus que jamais besoin d’un parti sérieux et combatif pour les aider à résister à l’austérité. Et nous serons présents, avec ControCorrente, pour stimuler la mise sur pied d’un tel outil, tout en avançant la nécessité de balayer ce système pour une société qui défende les intérêts de tous.

  • Vers une grève générale européenne de 24 heures !

    Le 14 novembre : journée de lutte historique contre l’austérité

    Le 14 novembre dernier, la Confédération Européenne des Syndicats (CES) avait appelé à une journée internationale d’action contre l’austérité. Nous avons pu avoir un petit aperçu de la force réellement monumentale qui est celle du mouvement des travailleurs. Des millions de travailleurs sont partis en grève ou ont manifesté le même jour, dans plus d’une vingtaine de pays. Comment aller de l’avant à présent ?

    Par Nicolas Croes

    Cette journée d’action fut – et de loin – la plus importante jamais organisée par la CES. Le 29 septembre 2010, elle avait organisé une journée d’action, mais il était essentiellement question d’une manifestation à Bruxelles, capitale de l’Union européenne. Plus de 100.000 personnes y avaient participé tandis que l’Espagne connaissait, seule, une grève générale de 24 heures. À l’époque déjà, le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) et ses sections (dont le PSL en Belgique) avait défendu la nécessité d’une grève générale européenne de 24 heures comme prochaine étape dans la construction d’un rapport de force international contre l’austérité.

    Le tract du CIO distribué en plusieurs langues dans le cortège de la manifestation dans les rues de Bruxelles expliquait notamment : « La Confédération Européenne des Syndicats a été obligée d’appeler à cette journée de lutte à cause de la pression exercée par la base syndicale en faveur d’actions solidaires à échelle internationale. Toutefois, certains dirigeants syndicaux verront en cette journée une autre possibilité de faire baisser “la pression” en organisant des actions symboliques inefficaces. (…) Les grèves et les manifestations (…) devraient être entreprises dans la perspective (…) de construire une grève générale de 24 heures dans toute l’Europe. Une telle grève ébranlerait les fondations du capitalisme européen et renforcerait infiniment la confiance et la détermination des travailleurs et des jeunes contre l’offensive d’austérité. »

    Nous avons saisi chaque occasion pour faire entendre ce mot d’ordre, notamment lorsque la Fédération européenne des sidérurgistes (FEM) avait appelé tous les travailleurs d’ArcelorMittal et de ses sous-traitants en Europe à faire grève le 7 décembre 2011, un « exemple à énergiquement utiliser pour défendre l’organisation d’une grève générale européenne de 24 heures », comme nous l’avions dit dans notre matériel politique diffusé à la manifestation du 6 décembre 2011 à Liège, en solidarité avec les métallos d’ArcelorMittal.

    Il a fallu attendre longtemps, jusqu’au 29 février 2012, pour avoir un nouvel appel de la CES, un appel dont l’ambition avait été particulièrement revue à la baisse puisqu’il ne s’agissait que d’organiser des “actions symboliques”. En Belgique, ce mot d’ordre timoré a d’ailleurs été instrumentalisé par nos directions syndicales dans le cadre de leurs efforts visant à faire honteusement atterrir le mouvement anti-austérité qui avait culminé avec la grève générale du 30 janvier 2012.

    La pression de la base se développe

    Cette décision d’organiser le 14 novembre une action coordonnée de plus grande ampleur reflète la pression grandissante issue de la base syndicale, pression qui s’est ouvertement exprimée le jour même. En Espagne et au Portugal, l’appel avait concrètement pris la forme de grèves générales de 24 heures. Au Portugal, cette grève générale fut la plus massive et militante depuis la Révolution des Œillets de 1974 qui avait fait tomber la dictature salazariste au pouvoir depuis 1933. En Espagne, les syndicats parlent d’une participation à hauteur de 77% des travailleurs, soit un pourcentage bien plus élevé que lors des précédentes grèves générales. À Barcelone et à Madrid, un million de personnes ont battu le pavé tandis que de nombreuses régions connaissaient les plus importantes manifestations de leur histoire.

    En Italie, la principale confédération syndicale du pays, la Confédération générale italienne du travail (Confederazione Generale Italiana del Lavoro, CGIL) avait appelé à une « grève générale de 4 heures ». Mais dans plusieurs secteurs, comme le commerce, les télécommunications, les écoles et la fonction publique, la grève a été étendue à 8 heures. La participation aux manifestations a de plus été réellement impressionnante. En Grèce, le secteur privé a stoppé le travail en solidarité durant 3 heures, mais le pays venait de sortir d’une grève générale de 48 heures une semaine auparavant. À Malte et à Chypre, des actions de grève ont également eu lieu. La prochaine étape du mouvement sera très probablement une grève générale commune au sud de l’Europe. Le génie des actions de grèves internationales est sorti de sa lampe.

    Il nous faut un plan d’action !

    Le caractère destructif et interminable de l’austérité n’est pas partout perçu de la même façon. Certains espèrent encore un “retour à la normale” ou pensent que la contagion du scénario grec restera cadenassée au sud de l’Europe. La pression de la base varie donc en intensité. Les dirigeants syndicaux n’ont de plus pas d’alternative à proposer à la classe sociale et sont souvent pieds et poings liés à la social-démocratie. Ils n’offrent pas de perspective qui gonfle suffisamment la confiance des travailleurs pour que ces derniers se lancent dans la lutte. Soit ils n’organisent rien (ce fut le cas le 14 novembre en Flandre), soit ils organisent des actions sans lendemain, dont on ne peut que suspecter qu’elles ont principalement pour but de faire baisser la pression (ce fut le cas en Wallonie et à Bruxelles le 14 novembre).

    Comme nous l’expliquions dans notre tract distribué en Belgique : « Cette situation diminue la pression qui peut venir de la base, un élément qui à son tour est utilisé comme excuse pour ne rien faire de la part de certaines directions syndicales. D’autres préfèrent la fuite en avant dans la radicalité, mais sans avoir préparé le terrain. Il ne nous faut ni passivité, ni aventurisme, mais un plan d’action bien élaboré qui offre une perspective de victoire. »

    L’autorité du capitalisme n’a jamais été aussi minée depuis les années ‘30. Mais la faiblesse des capitalistes ne conduit pas automatiquement à la victoire du mouvement des travailleurs. Cette tâche exige de sérieusement organiser l’offensive, avec des assemblées générales d’information sur les lieux de travail, dans les écoles, les universités et les quartiers pour discuter d’un plan d’action comprenant de bons piquets de grève aux entreprises, dans les zonings industriels et les centres-villes, des manifestations (ce qui permet d’impliquer ceux qui ne sont pas intégrés dans les délégations syndicales comme les chômeurs, les jeunes, les retraités, les travailleurs précaires…), des occupations d’entreprises…

    Cela nécessite également de construire des relais politiques pour les luttes sociales, avec de nouveaux partis pour et par les travailleurs, larges et démocratiques, qui considèrent que l’essentiel de leur activité est dans la rue auprès de la base syndicale et non dans les Parlements. Les élections et l’activité parlementaires ne doivent être que des moyens au service de la lutte des masses contre l’austérité et, in fine, pour un projet de société basé sur l’épanouissement des possibilités de chacun et la satisfaction des besoins de tous. C’est ce que nous appelons le socialisme démocratique.

    • Non à l’austérité! Pour la défense des services publics et des pensions! C’est aux patrons de payer pour leur crise!
    • Pour des syndicats combatifs et démocratiques et des partis larges de travailleurs combatifs!
    • Dans chaque pays : pour un plan d’action combatif, démocratiquement discuté à la base, afin de construire le meilleur rapport de force contre l’offensive antisociale et d’élever la conscience des masses par la discussion et l’action collective !
    • Pour un plan d’action vers une grève générale de 24 heures à l’échelle européenne!
    • Non à la dictature des marchés ! À bas les agences internationales de notations de crédit et le FMI ! Stop au paiement des dettes de l’État aux capitalistes! Arrachons la richesse des mains des spéculateurs super riches!
    • Nationalisation des secteurs clés de l’économie (finance, énergie, sidérurgie…) sous le contrôle démocratique et la gestion des travailleurs!
    • Non au chômage de masse ! Pour la réduction du temps de travail sans perte de salaire et avec embauches compensatoires !
    • Pour des programmes massifs de travaux publics afin de créer des emplois socialement utiles et de répondre aux besoins de la population!
    • Non à l’Europe des patrons et des marchés! Pour une Europe socialiste démocratique!
  • Portugal : Après la plus grande grève générale du pays : vers une grève générale de 48 heures pour faire chuter le gouvernement!

    Malgré les efforts des médias dominants destinés à minimiser l’importance de la grève générale du 14 novembre, ce fut le plus grand mouvement de grève nationale et le plus réussi au Portugal depuis la révolution des Œillets de 1974. Même la violence étatique brutale à la fin de la journée n’a pas pu diminuer l’ampleur et l’impact de l’action.

    Anne Engelhardt, Gonçalo Romeiro et Francisco d’Oliveira Raposo, Lisbonne

    L’action anti-austérité du 14 novembre (‘N14’) au Portugal a illustré à quel point sont grandes la colère et la détermination des travailleurs et des jeunes pour faire tomber le gouvernement et lutter pour de véritables alternatives face aux politiques d’austérité du gouvernement. Mais elle a aussi montré que, pour atteindre ces objectifs, le mouvement devra élaborer une nouvelle stratégie militante et des politiques alternatives claires.

    Un esprit militant

    Parmi les pompiers, les éboueurs, les travailleurs du métro et d’autres groupes de travailleurs, la grève a été suivie à 100%. Au principal centre de tri postal de Lisbonne, le piquet de grève était une véritable célébration de la grève, étudiants et travailleurs discutant et chantant ensemble des heures durant.

    Dès 8h, les étudiants, parfois rejoints par des agents de sécurité, ont bloqué les entrées des universités et ont discuté avec ceux qui voulaient pénétrer à l’intérieur de l’université. De nombreux magasins, pharmacies et stations-service étaient fermés, le secteur privé et les petites entreprises avait également rejoint la grève.

    Malheureusement, la seconde et plus petite confédération syndicale (l’UGT – Union générale des travailleurs), n’a pas appelé à la grève générale, alléguant que l’appel de la Confédération générale des travailleurs portugais (CGTP – la plus grande fédération syndicale) était ”ouvertement politique” et ”sectaire”. Beaucoup de travailleurs affiliés à l’UGT ont toutefois ignoré leurs ”dirigeants” et ont rejoint l’action. Même le secrétaire général de l’UGT – qui est également membre du comité exécutif de la Confédération Européenne des Syndicats (CES), à l’initiative de la journée d’action du 14N – a finalement pris part à la grève!

    A partir de midi, les étudiants ont organisé leur propre manifestation, vers Rossio, la place centrale de Lisbonne, pour rejoindre une manifestation du syndicat des dockers, des membres de la CGTP et des mouvements sociaux.

    Durant la manifestation étudiante, la police a essayé de provoquer des affrontements, mais cette tentative a échoué grâce aux agents de sécurité des universités. À 13 heures, les dockers ont commencé leur manifestation à partir du port, avec chants et slogans. Ils ont été rejoints par des membres de mouvements sociaux, tels que le MSE – un mouvement de chômeurs où sont actifs des membres de Socialismo Revolutionário (section du Comité pour une Internationale Ouvrière au Portugal) et d’autres militants de gauche et qui organise les chômeurs en solidarité avec d’autres, comme les dockers dans le cas présent. Ici aussi, la police a essayé de provoquer des affrontements, mais les agents provocateurs ont été identifiés par des manifestants qui les ont repoussés de la manifestation.

    Absence de direction

    La manifestation des syndicalistes, des étudiants, des travailleurs précaires, des dockers, des chômeurs et des retraités a été caractérisée par un militantisme sans précédent depuis la révolution de 1974.

    Malheureusement, ni le Parti communiste portugais, ni le Bloc de gauche ni la direction de la CGTP n’ont fait face à leurs responsabilités pour développer la lutte. Malgré la colère réellement massive qui était présente dans les les rues, les dirigeants syndicaux ont refusé d’appeler à une escalade de la lutte lors des prises de parole à la fin de la manifestation. Il n’a ainsi pas été appeler à une grève générale de 48 heures avant la fin de l’année, en tant que prochaine étape dans le cadre d’un solide plan d’action visant à faire tomber le gouvernement.

    Une grève générale de 48 heures pourrait radicalement modifier la situation avec l’organisation de réunions démocratiques destinées à discuter de la meilleure manière de mobiliser à cette fin, à préparer d’autres actions comme l’occupation des lieux de travail et des ministères, et à répandre la lutte dans les quartiers, éléments qui avaient été observés durant les protestations de mars et octobre 2011, des manifestations qui avaient été organisées de la base.

    En comparaison d’une grève d’une journée, une grève générale de 48 heures nécessite de nouvelles idées quant à la façon d’organiser les piquets de grève, les occupations, la résistance contre la répression policière, l’alimentation, les transports, etc.

    La direction de la CGTP a dirigé l’initiative du 14 novembre, reflétant ainsi le tournant à gauche relatif qui s’est opéré ces derniers mois ainsi que la forte pression de la base pour une action coordonnée. Elle a appelé les syndicats espagnols à se joindre à l’action. Finalement, la Confédération Européenne des Syndicats a repris cette initiative, et a appelé à une journée d’actions et de grèves contre l’austérité à l’échelle européenne. Malheureusement, la direction de la CGTP n’a pas à canaliser la colère du peuple contre les diktats de la troïka (UE, FMI et BCE) en appelant à la démission immédiate du gouvernement.

    La direction de la CGTP aurait pu, encore une fois, jouer un rôle déterminant. Arménio Carlos, le secrétaire général de la CGTP, lors de son discours à la manifestation, a remercié les mouvements sociaux pour leur contribution positive et militant dans cette grève du 14 novembre. Il aurait cependant pu aller plus loin en demandant aux personnes présentes de se préparer pour la prochaine grève générale et d’en discuter.

    Cela aurait clarifié pour tous les participants que la CGTP défendait un plan d’action unifié pour diriger la lutte vers la chute du gouvernement et l’expulsion de la Troïka. Cela aurait clairement indiqué que la CGTP avait une perspective et un plan de lutte en escalade pour réaliser les principales revendications du syndicat et des mouvements sociaux.

    Comme la lutte des classes est devenue plus forte au Portugal, la classe dirigeante et ses ministres ont déclenché une campagne d’intimidation contre les syndicalistes et les travailleurs. Même si nous avons assisté à plusieurs affrontements mineurs entre les piquets de grève et la police, l’état ​​d’esprit général de la police était ”neutre” ce 14 novembre. Mais les événements de la soirée avaient démontré la tentative évidente de l’Etat et la police d’intimider et de criminaliser les manifestants.

    Des policiers stationnés devant le Parlement ont violemment empêché plusieurs tentatives des manifestants de gravir les marches de l’Assemblée nationale. La police a filmé les manifestants. Après une heure, ils ont soudainement attaqué les manifestants en lançant des pétards et des fusées parmi eux afin de les disperser, provoquant une panique de masse immédiate. Les gens couraient dans tous les sens, pourchassé par la police qui a battu tous les manifestants attrapés.

    Des dizaines de personnes, y compris de jeunes adolescents, ont été arrêtés par la police et n’ont pas été autorisés à téléphoner ou à parler à un avocat. Plusieurs d’entre eux ont été battus. Pour obtenir leur libération, ils ont été contraints de signer une feuille blanche que la police devait remplir plus tard !

    L’alerte rouge de la grève générale

    Arménio Carlos a correctement dénoncé le gouvernement et les attaques brutales de la police contre les travailleurs. Il a déclaré que la grève générale est une alerte rouge pour le gouvernement, qui doit modifier sa politique. Lors d’une conférence de presse, les membres de plusieurs mouvements sociaux ont appelé à la nécessité d’organiser une manifestation contre la violence policière et les attaques contre les droits démocratiques.

    La CGTP a appelé une autre manifestation, le 27 novembre prochain, à nouveau devant l’Assemblée nationale, le jour où le vote final sur le budget du gouvernement aura lieu. Cette démonstration doit devenir un événement majeur. Il s’agit d’une bonne occasion d’appeler à une grève générale de 48 heures et de défendre d’autres mesures pour intensifier le mouvement.

    Si un tel plan d’action est mis en avant, avec une alternative politique claire – à partir d’un front uni des partis de gauche (le Parti Communiste et le Bloc de Gauche) et du mouvement social et des travailleurs – pour un gouvernement qui mettrait en œuvre des politiques socialistes révolutionnaires, cela pourrait changer de façon décisive l’équilibre des forces dans la société et ouvrir une nouvelle ère pour la lutte des classes portugaise et européenne.

    Cela initierait à l’échelle européenne des discussions sur les nouveaux pas à poser en avant pour la résistance internationale contre l’austérité et le capitalisme.

  • Les protestations contre l'expulsion de notre camarade Murugathas se développent

    L’appel à protester contre l’expulsion éventuelle du militant tamoul Murugathas a pu compter sur un large écho. Des dizaines de personnes ont envoyé des mails de protestation au secrétaire d’État à l’asile et à l’immigration afin de s’opposer à l’expulsion imminente d’un homme présent depuis 18 ans dans notre pays, qui y a une famille, et dont la vie sera en danger s’il est renvoyé au Sri Lanka. Parmi les différentes lettres de protestation se trouvent notamment celle d’un dirigeant syndical du Kazakhstan et celle de Paul Murphy, député européen irlandais. Depuis le centre de détention de Steenokkerzeel, Murugathas tient à chaleureusement remercier tous ceux qui le soutiennent.

    Par Geert Cool. Si vous voulez collaborer à cette campagne, n’hésitez pas à nous contacter via : tamil@socialisme.be

    Les expulsions de Tamouls très contestées en Grande-Bretagne

    Le choc qu’ont subi les parents, les amis et les camarades de Murugathas est très grand. Lui-même est d’ailleurs encore aujourd’hui très affecté par son arrestation. Une expulsion signifierait qu’il soit livré aux mains des autorités sri-lankaises, avec le risque qu’il soit torturé. Cette année, des Tamouls ont été expulsés du Royaume-Uni vers le Sri Lanka, et ils ont subi diverses violences dès leur arrivée.

    Le quotidien The Guardian a ainsi publié un article consacré au retour d’un réfugié tamoul (voir cet article). Ci-contre, vous pouvez voir une photo qui illustre ce qui est arrivé aux réfugiés tamouls qui sont retournés au Sri Lanka… Les choses sont allés tellement loin que des décisions judiciaires sont arrivées pour interdire de renvoyer les Tamouls au Sri Lanka (voir cet article du Guardian).

    L’oragnisation de défense des droits de l’Homme Human Rights Watch a également protesté contre les expulsions de Tamouls. Amnesty International souligne également les grands problèmes que rencontrent les droits de l’Homme au Sri Lanka. L’organisation ne croit pas aux vaines promesses du régime (voir cet article d’Amnesty International). Ces plaintes des organisations de défense des droits de l’Homme ont été renforcées par un rapport de l’ONU qui a admis que les Nations Unies ont été incapables de protéger la population civile au Sri Lanka et qui reconnaît explicitement que, même après la guerre civile, les droits de l’Homme ne sont pas respectés.

    Un large soutien et une grande solidarité

    Les messages de protestation ont afflué depuis le lancement de l’appel, de la part de militants politiques, de syndicalistes,… Parmi eux: Esenbek Ukteshbayev, l’une des figures parmi les plus proéminentes de la gauche syndicale au Kazakhstan, lui-même venant à peine de rentrer au pays après un exil forcé destiné à fuir la répression. Des protestations sont également venues d’Inde et de notre parti-frère New Socialist Alternative. Des e-mails de syndicalistes et de militants politiques sont aussi venus du Portugal, d’Italie, de France, des Pays-Bas, de Suède,… En Belgique, la pétition a été signée par des militants du PSL, de Rood!, de la LCR, du PTB, par des syndicalistes de la FGTB et de la CSC, ainsi que par des gens qui ne sont organisés nulle part.

    Le député européen Paul Murhpy (Socialist Party, notre parti-frère en république Irlandaise) a envoyé une lettre à la secrétaire d’État De Block. Il déclare entre autres: ”Je suis membre de la délégation du Parlement Européen qui discute des relation avec l’Asie du Sud, et notamment avec le Sri Lanka. J’ai rencontré Murugathas à plusieurs reprises dans la cadre de mon travail avec cette délégation. Je connais la situation du Sri Lanka de par mon travail avec la présente délégation ainsi que par de nombreux contacts que j’ai dans ce pays. Le rapport de l’ONU ‘Report of the secretary general’s internal review panel on UN action in Sri Lanka’ démontre que les Nations Unies n’ont pas pu protéger les civils dans les derniers mois de la guerre civile. De nombreuses preuves attestent de violations répétées des droits de l’Homme et du fait que les discriminations du gouvernement contre la minorité tamoule se poursuivent sans relâche depuis la fin de la guerre.” (La lettre de Paul Murphy est disponible ici (pdf)). La campagne se poursuivra dans les prochains jours. Lundi sera soumis le recours contre l’arrestation et l’expulsion de Murugathas. Des actions seront prévues. En attendant, nous vous demandons de continuer à faire connaître le cas de Murugathas, à faire signer la pétition et à envoyer les mails de protestation.


    Lettre de Paul Murphy

  • 14 novembre : Premier pas vers une grève générale à l’échelle européenne !

    • Vers une grève générale à l’échelle européenne !
    • A bas les gouvernements de la troïka !
    • A bas l’Europe des marchés !
    • Pour une Europe socialiste démocratique, pour et par les travailleurs !

    Aujourd’hui se déroule la journée d’action européenne la plus importante que la Confédération Européenne des Syndicats (CES) ait jamais organisée. Son caractère est qualitativement différent des fois précédentes. Ce n’est que demain que nous pourrons savoir quelle aura été l’échelle exacte des diverses actions, mais il est clair qu’il s’agit d’un pas important en direction d’une grève générale à l’échelle européenne ! Enfin, nous avons la perspective d’une résistance unifiée du mouvement des travailleurs contre l’offensive de l’establishment européen. Voilà l’essence des actions d’aujourd’hui.

    Tract du PSL

    Tract en version PDF

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    Le message qui sera diffusé dans la presse sera bien différent ! Cette journée d’action sera qualifiée ‘‘d’inutile’’ et ‘‘d’irresponsable’’. Patrons, politiciens, journalistes et académiciens crierons que nous mettons l’économie en danger, que nous scions la branche sur laquelle nous sommes assis, que nous prenons en otage la collectivité. Ils nous dirons qu’il faut devenir plus compétitifs pour sauvegarder notre industrie et nos emplois. Que, pour échapper à l’emprise des marchés, il faut réduire nos dettes publiques et nos dépenses. Que, pour être capables de faire face au vieillissement, il faudra travailler plus longtemps et cotiser plus. Que nous avons besoin d’un choc de compétitivité, d’un plan d’austérité structurel.

    On nous prescrit donc des remèdes identiques à ceux de la troïka (UE, FMI, BCE), responsables du ravage social dont est victime l’Europe du Sud. Ces remèdes n’ont pas entraîné plus de compétitivité, plus d’emplois, moins de déficits budgétaires ou moins de dette publique. Que du contraire ! Ces économies ont conduit droit à une récession plus profonde encore. Pourquoi ces remèdes foireux fonctionneraient-ils ici ? Tout choc de compétitivité en Belgique aura pour réponse une salve de mesures comparables dans nos pays voisins. Notre compétitivité ne s’améliorera donc pas, nous serons tout simplement entraînés dans une spirale négative de casse sociale où les travailleurs d’un pays seront montés contre ceux des autres pays. Seuls les détenteurs de capitaux, les PDG et les membres de conseils d’administration ont à y gagner.

    Il nous faut un plan d’action et une perspective de victoire !

    En Espagne, au Portugal et dans d’autres pays de l’Europe du sud, on sait à quoi conduit la concurrence débridée. La décision de la CES d’organiser aujourd’hui une action coordonnée reflète la pression grandissante issue d’en bas. En Espagne et au Portugal, le travail sera stoppé 24 heures durant. En Grèce, où il y a déjà eu 48 heures de grève la semaine dernière, le secteur privé stoppera le travail en solidarité durant 3 heures, et durant 4 heures en Italie. A Malte et à Chypre, des actions de grève sont également planifiées. L’action d’aujourd’hui est probablement le précurseur d’une grève générale du sud de l’Europe. Le génie des actions de grève internationales peut sortir de sa lampe.

    Le caractère destructif et interminable de la politique d’austérité n’est pas compris partout de la même manière. Faute de perspective, certains en sont encore à simplement espérer un ‘‘retour à la normale’’. Par conséquent, la pression de la base n’est pas partout aussi forte. De plus, les dirigeants syndicaux n’ont en général pas d’alternative à opposer à la casse sociale. Ils sont souvent pieds et poings liés aux politiciens de la social-démocratie et d’ailleurs, et sont ainsi politiquement désarmés. Ils n’offrent pas de perspective qui gonfle suffisamment la confiance des travailleurs pour que ces derniers se lancent dans la lutte. Cette situation diminue la pression qui peut venir de la base, élément qui à son tour est utilisé comme excuse pour ne rien faire de la part de certaines directions syndicales. D’autres préfèrent la fuite en avant dans la radicalité, mais sans avoir préparé le terrain. Il ne nous faut ni passivité, ni aventurisme, mais un plan d’action bien élaboré qui offre une perspective de victoire.

    Malgré la diversité, la tendance est partout à la résistance croissante

    Les différentes formes d’actions – grèves générales et partielles, manifestations de masse, meetings, etc. – reflètent les différences de rythme dans la lutte des classes des différents pays, régions et secteurs. En Belgique cela s’exprime par des appels différents entre la Flandre et la Wallonie, entre la distribution, le métal et les services publics, entre la SNCB et l’enseignement. L’absence d’un mot d’ordre clair en front commun syndical sera énormément mise en lumière dans la presse, tout comme la moindre divergence entre communautés et secteurs. Concernant les patrons et les politiciens, les divergences s’appellent ‘‘diversité’. Concernant les travailleurs et leurs organisations, c’est soudainement présenté comme de la ‘‘division’’. Pour nous, ce qu’il faut accentuer, c’est que le rythme peut bien être différent mais que, partout dans le pays et dans tous les secteurs, la tendance est identique : la résistance va croissante, de même que la recherche d’une alternative.

    L’internationalisme : un levier pour l’action, pas une excuse pour la passivité.

    Dimanche dernier, lors de la manifestation de solidarité avec les travailleurs de Ford, des manifestants ont exprimé une grande sympathie pour la revendication défendue par le PSL de la nationalisation du site. Depuis que cette revendication a été mise en avant par les syndicats l’an dernier dans le cas d’ArcelorMittal, elle fait de plus en plus surface. De suite, on entendait toutefois de ces mêmes manifestants que cela ne serait possible qu’au niveau européen. Nous comprenons bien cette attitude, mais ne sommes que partiellement d’accord. La journée des 8 heures de même que d’autres acquis historiques n’ont pas été décrétés d’en haut sur le plan international, mais ont d’abord été arrachés sur le plan national avant d’être introduits ailleurs. La nationalisation de Ford ou de n’importe quelle autre entreprise devra aussi être appliquée sur le plan national avant de s’attaquer à toute l’Europe. Mais il est également vrai que tout ce que nous arrachons ne pourra être consolidé que lorsque nous prendrons toute cette Union Européenne à la gorge. Aujourd’hui, ce n’est qu’un début dans cette direction. Un plan international d’action coordonné est extrêmement important. Mais cela ne doit pas être instrumentalisé pour freiner la lutte. Les actions doivent être liées à la lutte contre nos propres gouvernements et patrons, dans chaque pays. En Espagne, au Portugal et en Grèce, la nécessité d’actions coordonnées dans toute l’Europe ne doit pas être utilisée pour stopper toute action après le 14 novembre. Un plan d’action allant crescendo avec des grèves de 48 heures peut pousser les gouvernements affaiblis de la troïka et les grandes entreprises dans la défensive. Le 14 novembre doit être le début d’une lutte unifiant la résistance sur le plan européen, non un point final.

    A bas l’Union européenne capitaliste ! Pour une Europe des travailleurs !

    La lutte des classes européenne entre dans une nouvelle et orageuse période de mouvements explosifs des travailleurs et des jeunes. Au Portugal déjà, une attaque contre les salaires a dû être retirée. Pour obtenir des victoires durables et afin de briser le cycle de désespoir et d’appauvrissement, il faut armer le mouvement d’une alternative où les richesses de la collectivité seraient investies dans l’emploi et l’amélioration de la qualité de vie au lieu de payer les dettes des spéculateurs et des banquiers.

    Le PSL veut populariser la revendication de la nationalisation sous contrôle démocratique des banques et des secteurs clés de l’économie. Cela n’est possible que sous un gouvernement des travailleurs. Au fur-et-à-mesure que la lutte des travailleurs européens se coordonnera au-delà des frontières se clarifiera le potentiel d’une alternative des travailleurs contre l’Union Européenne capitaliste des marchés. Ce qu’il nous faut aujourd’hui, c’est un mouvement international qui défende comme alternative une confédération européenne volontaire socialiste et démocratique.

  • Liège : Appel à soutenir la journée de mobilisation contre l'austérité du 14 novembre

    Un appel a été lancé vers le monde politique, associatif et culturel de Liège afin de publiquement soutenir les mobilisations syndicales du mercredi 14 novembre, et cela afin de démontrer que les préoccupations avancées par les organisations syndicales sont largement partagés et d’éviter que les médias ne tentent de minimiser les choses comme cela arrive trop souvent…

    Nous soutenons la grève générale du 14 novembre. Rejoignez-nous !

    Cinq pays européens – Grèce, Espagne, Portugal, Chypre et Malte – ont appelé à une grève générale européenne le 14 novembre. C’est la première fois que cela se produit et les peuples des pays du « nord » de l’Europe doivent répondre à l’appel, contre les plans d’austérité imposés sur l’ensemble du continent.

    En Belgique, au-delà du soutien apporté par les deux principaux syndicats du pays, la FGTB et la CSC, à la journée d’action et de mobilisation convoquée par la Confédération Européenne des Syndicats (CES), plusieurs régionales et centrales de la FGTB ont décidé d’aller plus loin en appelant également à la grève générale : la FGTB Liège-Huy-Waremme, la FGTB Centre, les Jeunes FGTB, la CGSP wallonne, les Métallos Wallonie-Bruxelles, la CGSP ACOD Cheminots, la CGSP ALR Bruxelles. La CNE quant à elle appelle à faire des assemblées générales dans les entreprises et à des actions dans toutes les grandes villes l’après-midi.…

    Liège – comme d’autres villes – sera donc mobilisée ce mercredi 14 novembre 2012.

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    • Parce que, au nom du remboursement d’une dette qui n’est pas la leur, les plans d’austérité en cours sont en train de plonger les populations d’Europe dans la précarité et l’exclusion sociale. Cette politique de rigueur est absurde économiquement et socialement suicidaire. Plus on l’applique, plus la situation s’aggrave. La Grèce, le Portugal, l’Espagne nous le confirment tous les jours. Acceptons-nous que la Belgique suive cette voie ?
    • Parce que les populations en Europe ne sont pas opposées les unes aux autres : ceux qui exploitent les Grecs et les Espagnols sont les mêmes qui exploitent les Belges ou les Allemands. Il est donc fondamental d’être solidaires entre tou-te-s les travailleur-euse-s, avec ou sans emploi, et citoyen-ne-s en lutte dans l’Europe ou ailleurs.
    • Parce que des alternatives sérieuses et efficaces existent pour construire une Europe solidaire, socialement juste et réellement démocratique.
    • Parce que, et contrairement aux articles sur les "prises d’otages" et la soi-disant inutilité des grèves dont les médias ne manqueront pas de nous inonder, nous savons qu’aucun des droits sociaux qui sont en train d’être attaqués de toute part (sécurité sociale, retraites, santé, chômage, services publics) n’a été donné généreusement mais conquis par la lutte en général, et la grève en particulier.

    Nous, mouvements associatifs, partis politiques, citoyennes et citoyens indignés, affirmons notre solidarité et notre détermination dans le refus de l’austérité. Nous affirmons qu’une autre voie est possible. Il est temps d’établir un plan d’action pour développer la lutte contre l’austérité et d’élaborer une stratégie pour sortir de ce système qui impose à la majorité de payer pour une minorité de très riches.

    Nous appelons toute la population de la région liégeoise à diffuser cette information et à se mobiliser en participant à la grève et en rejoignant le rassemblement prévu à 10h30 sur la place Saint-Paul. Le 14 novembre, arrêtons de travailler et de consommer. Dès aujourd’hui, diffusons, facebookons, interpellons nos voisins, nos collègues, fabriquons des pancartes, agissons ensemble… Montrons que nous sommes nombreux-ses, que nous avons des choses à dire et que nous ne nous laisserons pas manipuler !

    Se résigner nuit gravement à notre santé et à celles de nos enfants. Indignons-nous et agissons!

    Premiers signataires :

    • Alter’ Actifs
    • Appel pour une école démocratique (Aped)
    • ASBL Léonard Da Vinci
    • ATTAC
    • Aquilone
    • Barricade
    • Beau Mur
    • Casa Nicaragua
    • Centre Poly-Culturel de Résistance (CPCR)
    • Collectif de Résistances aux Centres pour Etrangers (CRACPE)
    • Collectif Manifestement
    • Collectif Mensuel
    • Collectif Le Ressort
    • COMAC
    • Comité de l’Annulation de la Dette du Tiers-Monde (CADTM) Belgique et Liège
    • Coopérative politique VEGA (Vert et de Gauche)
    • Ecolo Liège
    • Ecolo J Liège
    • Espace Marx Liège
    • Etudiants de Gauche Actifs (EGA)
    • Fédération Liégeoise du Parti Communiste
    • Forum bruxellois de lutte contre la pauvreté (FBLP)
    • Fewla
    • Financité Ardente
    • Flammes de L’espoir (FdE)
    • Front Commun SDF
    • Ginger (mouvement citoyen volontaire, féministe et liégeois)
    • JOC de Liège
    • La Braise Liège
    • La Cinquième Couche, édition
    • La Zone
    • Le Monde des Possibles ASBL
    • Les amis du monde diplomatique de Liège (AMD)
    • LîDjibouti
    • Ligue Communiste Révolutionnaire (LCR)
    • Maison médicale La Passerelle
    • Mediadoc
    • Mouvement de Gauche
    • Mouvement politique des objecteurs de croissance, groupe de Liège (mpOC – groupe de Liège)
    • Ni putes Ni soumises
    • Nerfs d’Acier
    • New Vision
    • Parti de Gauche Bénélux
    • Partito delle rifondazione comunista – federazione comunista del belgio
    • Parti Socialiste de Lutte (PSL)
    • Peuple et Culture Wallonie/Bruxelles
    • Piments Rouges-collectif anticapitaliste
    • Parti du Travail de Belgique (PTB)
    • Riposte-CTE
    • Radio Bistrot
    • Ré-solution
    • Studios du Horla asbl
    • Syndicat des locataires
    • Université populaire de la province de Liège

    Pour signer l’appel : emilie@cadtm.org

  • Les sections du PSL/LSP mobilisent pour les actions du 11 et du 14 novembre

    Dans le cadre des actions du 11 novembre à Genk et du 14 novembre partout en Europe, les militants de PSL/LSP mobilisent dans les quartiers. La solidarité avec les travailleurs de Ford est très importante, mais nous devons revendiquer un plan d’action national pour sauvegarder l’emploi. Ne laissons pas les travailleurs de Ford ainsi que les victimes des 1200 faillites du mois d’octobre, entre autres, lutter seul ! Cette journée à Genk est primordiale et doit prendre place dans un plan d’action national plus large pour sauver les emplois.

    Le 14 novembre est une première journée d’action coordonnée en Europe. La nécessité d’une grève générale de 24h à l’échelle européenne devient une question largement discutée. Ce 14, plusieurs pays européens seront effectivement en grève générale tandis que certains secteurs ou régionales appellent également à la grève en Belgique. Nous voulons aussi saisir cette journée importante pour largement mettre en avant la nécessité de construire une journée de grève générale à l’échelle européenne contre l’austérité.

    Maintenant, bien entendu, la question est brûlante en Belgique. Les différents gouvernements préparent des budgets d’austérité violents et cette journée doit également être un signal: la solidarité européenne passe par la lutte concrète contre l’austérité au niveau national.

    Rejoignez-nous, rejoignez les piquets et les manifestations dans votre région, luttons tous ensemble pour l’emploi et contre l’austérité !


    Ford Genk, Duferco/NMLK, Photo Hall,… Défendons chaque emploi !

    5 milliards € pour les spéculateurs de Dexia, ± 5 milliards € d’austérité pour nous !

    Ce n’est pas à nous de payer pour leur crise. Un plan d’action national pour l’emploi et contre l’austerité est nécessaire!

    11 NOV. Manifestation à GENK, NATIONALISONS POUR SAUVER L’EMPLOI PAS LES PROFITS!

    L’annonce de la fermeture de Ford Genk menace l’emploi de plus de 10 000 travailleurs au Limbourg. Pourtant l’année passée la multinationale enregistrait plus de 20 milliards $ de profit: un record! Plus de 600 emplois menacés à Duferco (La Louvière), la mise en faillite des magasins Photo Hall menace plus de 1300 emplois. Dans le même temps, des milliers de contrats interim ou temporaires ne sont pas renouvelés. “La tornade économique s’abat sur la Belgique” titrait Le Soir, les conséquences sur l’emploi sont catastrophiques, il est nécessaire de résister pour ne pas payer cette crise.

    La soif de profit entraîne ce type de gâchis et les conséquences sont plus dures encore lorsque le système traverse une crise profonde comme en Belgique, en Europe et à travers le monde. Nous devons nous opposer fermement à ces fermetures et à ces licenciements: ne laissons pas l’avenir de la collectivité aux mains des multinationales. Une alternative est nécessaire. Ce que nous avons vu avec le secteur financier, celui de l’automobile le confirme: le marché libre ne permet pas une stabilité pour nos conditions de vie et de travail. Aujourd’hui pourquoi jeter l’usine de Genk? Utilisons le savoir-faire du personnel et les outils de travail dans une production socialement utile et écologiquement responsable par exemple pour développer les moyens de transports publics propres capables de désengorger nos routes toujours plus saturées.

    La manifestation du 11 octobre devrait être un pas dans le cadre d’un plan d’action national pour sauvegarder l’emploi, pas les profits. L’insécurité sur le marché de l’emploi s’amplifie au fur et à mesure des restructurations, fermetures, licenciements. Il est important d’éviter de lutter chacun dans son coin. Chaque lutte doit développer une alternative pour offrir une réponse à ces situations. Revendiquons la nationalisation de l’usine et un plan démocratique de reconversion et de production pour Ford Genk. Construisons un plan d’action national pour défendre chaque emploi et contre l’austérité.

    14 NOV. Journée d’action internationale: POUR UNE GRÈVE GÉNÉRALE EUROPÉENNE DE 24H!

    Ce sera la première journée coordonnée en Europe de grèves générales (Espagne, Portugal, Chypre, Grèce), de manifestations et de grèves (comme en France, en Italie et en Belgique). Les politiques d’austérité ne font qu’approfondir la récession et créent des situations dramatiques comme en Grèce, la Belgique n’est pas épargnée. Pendant la campagne des communales, avec Gauches Communes nous mettions en avant qu’il serait nécessaire après le scrutin de lutter contre les nouvelles attaques qui allaient inévitablement venir à l’agenda. Les discussions dans les régions et au fédéral pour les budgets 2013 illustrent cela. Nos gouvernements d’austérité suivent la même voie que celle tracée en Grèce: attaques sur les services publics (coupes dans l’enseignement) et tentative de privatiser certains (le chemin de fer), attaques sur les fonctionnaires (pensions, non remplacement des départs) etc. Par contre dès qu’il s’agit des banques, les milliards sont mis directement sur la table (entre 5 et 7 milliards supplémentaires pour Dexia d’ici la fin du mois).

    Cette journée d’action est importante pour surmonter le sentiment d’isolement. C’est aussi l’opportunité de faire un pas en avant dans l’élaboration d’un plan d’action combatif pour faire reculer les mesures d’austérité à travers l’Europe et en Belgique. Il est temps de traduire le slogan “ce n’est pas aux travailleurs de payer pour la crise” en une lutte collective et unifiée. Cette journée est aussi un pas en avant pour une grève générale dans toute l’Europe.

    Cette crise, la vague d’austérité et les tsunamis sociaux que provoquent les restructurations illustrent les contradictions présentes dans le système capitaliste entre la volonté de maximaliser les profits privés et la protection de nos conditions de travail et de vie. Chaque lutte est une occasion de discuter de la nécessité de changer ce système et de construire une alternative socialiste démocratique, une économie démocratiquement planifiée capable d’offrir à chacun un emploi décent, de répondre aux besoins de base de la majorité des travailleurs et de leur famille.

    Photo : campagne menée à Saint Gilles

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