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  • “We live in a political world” Le Parti Communiste et Bob Dylan

    Cet automne s’est éteint Irwin Silber, membre de la Ligue américaine de la jeunesse communiste et rédacteur en chef du magazine américain de musique folk Sing Out ! dans les années 60. C’est lui qui avait initié la campagne contre Bob Dylan l’accusant d’avoir prétendument trahi les mouvements radicaux de l’époque. Frank Riley, un ancien député travailliste du Lancashire, s’est penché sur la relation entre Dylan et le Parti Communiste.

    Jamais un artiste populaire n’avait reçu autant d’attaques virulentes et de critiques que Bob Dylan lors de son apparition au Newport Folk Festival en mai 1965 et, par la suite, lorsqu’il est passé à l’électrique. Cette polémique a perduré pendant des années et fait même encore écho aujourd’hui. La performance de Dylan à Newport a eu des répercussions considérables, pas seulement dans le monde de la musique folk, mais aussi sur la musique populaire basée sur les traditions américaines, en particulier la musique rock.

    Bob Dylan a ramené les paroles pleines de sens dans les chansons populaires. En plus de cela, il a produit de véritables textes poétiques et a été, pour le meilleur ou le pire, l’inspirateur d’une multitude d’auteurs-compositeurs. Même les Beatles ont déclaré s’être écartés de paroles niaises sous l’influence de Dylan. Mais le rôle du Parti ‘‘Communiste’’ (CP) – aux Etats-Unis et, plus tard, en Grande-Bretagne – qui dans un premier temps l’a porté aux nues pour ensuite tenter de le démolir, n’a pas été correctement expliqué. Les partis ‘‘Communistes’’ étaient les alliés du régime bureaucratique d’Union Soviétique, soutenant l’Etat totalitaire comme étant le véritable socialisme et justifiant toutes les dérives de la politique soviétique.

    Lorsque Dylan est monté sur scène à Newport avec un groupe de rock électrique et a entamé la chanson Maggie’s farm, une adaptation d’une vieille chanson folk, Penny’s Farm, il a créé un véritable tollé au sein des traditionalistes folk. Pete Seeger, qui était à l’époque (et toujours maintenant d’ailleurs) le leader vétéran de la scène folk américaine et qui a figuré sur liste noire durant l’ère Maccarthiste, a quasiment fait une attaque. Il y a beaucoup de légendes concernant cette journée : on raconte notamment que Seeger aurait tenté de couper les fils électriques avec une hache et que lui et le manager de Dylan, Albert Grossman, se seraient battus dans la boue.

    Seeger a admis que s’il avait eu une hache, il aurait coupé les câbles et les tensions entre les organisateurs et l’équipe de Dylan dans les coulisses seraient avérées. Ce qui est certain, c’est que Dylan a été hué par une grande partie du public. L’ordre a dû être rétabli et, finalement, Dylan est revenu sur scène avec une guitare acoustique et a chanté certaines de ses chansons « acceptables ».

    Dans quelle mesure l’explosion de Newport a été organisée et préparée, personne ne le sait vraiment. Mais il semblait bien y avoir une véritable organisation derrière les protestations qu’il a reçues à tous les concerts de sa tournée mondiale qui a suivi. Sa conversion à l’électrique n’était pourtant pas si étonnante. Son album Bringing It All Back Home, mi acoustique mi électrique, sur lequel figurait la chanson Maggie’s Farm, était en vente depuis des mois.

    En fait, Dylan avait commencé à jouer du rock’n roll à l’école. Il avait même joué du piano à quelques concerts avec Bobby Vee. Dans le ‘‘yearbook’’ de son école, dans lequel les étudiants écrivent ce qu’ils comptent faire après leurs études, même si ses projets étaient d’aller à l’Université du Minnesota, il a écrit : ‘‘Rejoindre Little Richard’’. Sa prétendue ‘‘trahison’’ était simplement un retour aux sources. Il a d’ailleurs changé plusieurs fois de style au cours de sa longue carrière, ce qui a souvent ravi, troublé ou irrité les fans, ses homologues et les critiques.

    Le jeune Robert Allen Zimmerman, devenu par la suite Bob Dylan, originaire de Hibbing, une ville minière du Minnesota, est rapidement devenu célèbre en 1962-63 grâce à plusieurs chansons contestataires qu’il avait écrites dans la tradition populaire, notamment Blowin ‘in the Wind et The Times are A-Changin. Depuis lors, Dylan a écrit et interprété toutes sortes de chansons populaires américaines à partir de diverses traditions – folk, rock, blues, country, gospel, même jazz – devenant, sans doute, l’auteur-compositeur et interprète le plus influent dans l’ère de l’après-guerre. Bien qu’il ait été initialement présenté comme une sorte de Messie politique, et soigneusement entretenu par le Parti Communiste américain inconsciemment et contre sa volonté, il est soudainement devenu un ‘‘traître’’.

    Un nouveau Woody Guthrie?

    Dylan est arrivé à New-York en 1961 alors qu’il était âgé de 19 ans. Il était passionné par la musique du chanteur folk Woody Guthrie auquel il avait rendu visite avant sa mort dans un hôpital du New Jersey. Guthrie était un proche sympathisant du Parti Communiste. Ses collègues, dirigés par Pete Seeger, ont repopularisé ce qu’ils considéraient comme des chansons du peuple dans le cadre de leur activité politique. Bien que Guthrie n’ait probablement jamais rejoint officiellement le Parti Communiste, il acceptait la ligne du parti tout autant que ses camarades qui étaient membres. Il a d’ailleurs eu, pendant un moment, une colonne dans le journal du Parti Communiste, le People’s Daily World. Il a également écrit et chanté des chansons de paix entre 1939 et 1941, pendant la période du pacte Hitler-Staline, lorsque les partis Communistes en Grande Bretagne et aux Etats-Unis s’opposaient à la guerre.

    En fait, selon Seeger, c’est Guthrie qui a en premier changé la ligne quand Hitler a envahi l’Union Soviétique. Seeger raconte : ‘‘Woody a eu un sourire sur le visage. Il m’a dit ‘‘Bon, je suppose que nous n’allons plus chanter de chansons pacifistes’’. Je lui ai dit ‘‘Quoi ? Tu veux dire que nous allions supporter Churchill ?’’. Il m’a dit ‘‘Churchill a retourné sa veste. Nous allons retourner notre veste’’. Il avait raison’’. (Interview de Phil Sutcliffe, Mojo n°193, décembre 2009). Il est intéressant de constater qu’ils n’ont pas dit que c’était Staline, mais Churchill, qui a été obligé de retourner sa veste.

    Guthrie est devenu célèbre aux Etats-Unis particulièrement avec sa chanson This Land is Your Land qu’il concevait comme un hymne radical, une alternative au God Bless America de Irving Berlin. Cependant, le fond de sa chanson correspondait plus au rêve américain qu’à une revendication pour la collectivisation des terres. Il a d’ailleurs été engagé par les organismes gouvernementaux pour promouvoir le New Deal de Roosevelt. Il a été payé pour chanter dans les villes touchées par la crise et dans les villages qui allaient être détruits pour faire place à des projets hydroélectriques, notamment le barrage de Grand Coulee, qui est devenu le titre d’une de ses chansons.

    Dylan fréquentait le Greenwich Village à New York, un quartier ouvrier et bohémien. Talent précoce, il a été nourri par beaucoup d’artistes plus âgés qui gravitaient autour de Seeger. Il est tombé amoureux de Suze Rotolo, une artiste de 19 ans qui militait dans le mouvement pour les droits civiques (elle apparait sur la couverture du deuxième album de Dylan Freewheelin’). Ses parents ayant été des ouvriers communistes militants, Rotolo était ce qu’elle appelait ‘‘un bébé à couche-culotte rouge’’. Elle a grandit dans ce milieu.

    Les membres du Parti Communiste, Seeger et Irwin Silber, éditeurs de Sing Out !, un magazine qui présentait les nouvelles chansons, étaient constamment en contact avec Rotolo, faisant en sorte qu’elle garde leur protégé sous la main. Mais il semble qu’elle n’était pas vraiment consciente de ce qu’ils faisaient. Pour ce qui la concernait, elle voulait juste aider Bob. Ils espéraient que Dylan deviendrait le nouveau Woody Guthrie et contribuerait à la diffusion de leur version du socialisme en devant la grande star du monde folk.

    Dylan a avoué : ‘‘Elle vous dira combien de nuits je suis resté éveillé pour écrire des chansons que je lui montrais en lui demandant si c’était juste. Parce que je savais que son père et sa mère étaient associés aux syndicats et elle était familière aux concepts d’égalité et de liberté depuis plus longtemps que moi. On vérifiait les chansons ensemble.’’ (Robert Shelton, No Direction Home : The Life and Music of Bob Dylan). Plus tard, il a dit qu’il ne savait pas qu’ils étaient communistes et que même si il l’avait su, il n’en aurait pas tenu compte. Dave von Rong, chanteur folk qui se surnommait lui-même ‘‘le maire troskyste de la rue McDougall’’ (Greenwich Village), est également devenu l’ami de Dylan et a rapidement découvert que celui-ci était apolitique.

    Un explorateur musical

    Ceci ne veut pas dire que Dylan n’était pas sincère dans ses chansons sur les droits civiques et ses actions. Son amour de la musique afro-américaine et son éducation juive ont fait de lui un antiraciste naturel. Les artistes noirs avaient également un très bon rapport avec Dylan – il n’a jamais été considéré comme un libéral blanc qui se donne bonne conscience. Les artistes noirs américains, de la famille Staples, en passant par Stevie Wonder à Jimi Hendrix, ont enregistré des chansons de Dylan. Bobby Seale (un des fondateurs du Black Panther Party For Self Defense) a consacré un chapitre de son livre Seize the Time à une discussion avec Huey P Newton, le leader des Black Panthers, sur le morceau Ballad of the thin man de Dylan. Ironiquement, pendant que le Parti Communiste attaquait cette chanson et d’autres, Columbia records a failli ne pas la sortir sous prétexte qu’elle était communiste.

    Harry Belafonte, un chanteur noir qui avait connu le succès dans le mainstream (style de jazz apparu dans les années ‘50), a consacré beaucoup de son temps et de son argent à promouvoir de nouveaux artistes noirs. Néanmoins, il a permis à Dylan de connaitre sa première expérience d’enregistrement en lui permettant de jouer de l’harmonica sur son album Midnight special. Dylan recourt encore occasionnellement à des commentaires politiques dans ses chansons.

    Dylan a été grandement sous-estimé par ceux qui cherchaient à l’exploiter, y compris par le PC. Loin d’être le plouc de Hibbing, Dylan profitait sans scrupule de ceux qui pouvaient être bénéfiques à sa carrière. Ses camarades d’école et ses amis musiciens de Saint Paul et de Minneapolis l’avaient bien compris. Il ‘‘absorbait’’ tout ce qui pouvait être utile plus tard, d’où son surnom ‘‘d’éponge’’ pour ses ‘‘emprunts’’ de tout ce qu’il pourrait utiliser musicalement : les idées, les chansons et les arrangements. Il tente toujours de justifier cela en disant qu’il était un ‘‘explorateur musical’’.

    Ce à quoi les musiciens folk autour de Seeger se sont vraiment opposés en 1965 n’était pas le passage de Dylan aux instruments électriques, mais son refus d’écrire plus de chansons ‘‘qui pointent du doigt’’ (tel que Dylan appelait les chansons protestataires). Ils l’ont accusé d’être ‘‘introspectif’’ et donc implicitement d’être réactionnaire. C’était, en fait, un écho du ‘‘réalisme socialiste’’ et de la ‘‘culture prolétaire’’ stériles qu’avait adopté Staline et qui se manifestaient dans les instances folks de la pureté musicale.

    La scène folk britannique

    En Grande-Bretagne, un développement similaire s’est développé dans le monde de la musique folk. En 1951, le Parti Communiste de Grande-Bretagne (le CPGB) a publié une brochure ‘‘La menace américaine sur la culture britannique’’. La menace perçue sur la musique britannique a été prise avec sérieux par les membres du Parti Bert Lloyd (mieux connu comme le folkloriste A. L. Lloyd) et par le chanteur folk Ewan MacColl (de son vrai nom Jimmy Miller), auteur de la chanson populaire Dirty Old Town qui parle de sa ville natale, Salford.

    MacColl, après avoir rencontré le folkloriste américain et membre du Parti communiste Alan Lomax, dont la secrétaire s’est révélée être Carla Rotolo, la sœur de Suze, a changé son attention vis-à-vis de la musique folk. MacColl et Loyd ont entrepris, avec succès, d’instaurer un ‘‘revival’’ folk en Grande-Bretagne. Il y avait beaucoup d’échanges créatifs entre la Grande-Bretagne et les Etats-Unis. Effectivement, il est évident que Pete Seeger, dont la sœur Peggy, chanteuse folk, est devenue par la suite la compagne de MacColl, a modelé le revival folk aux Etats-Unis sur le travail de Lloyd et MacColl.

    Cette année a également été celle de la rédaction du programme du CPGB, La Route Britannique du Socialisme, une affirmation complètement réformiste de la théorie stalinienne du ‘‘socialisme dans un seul pays’’. Les théories musicales de MacColl découlaient directement de cela. Un débat sur ce qu’étaient les chansons ‘‘pures’’ et ‘‘ouvrières’’ a fait rage dans le monde folk britannique, avec MacColl en chef d’orchestre. Il a finalement adopté la position absurde que si un chanteur était anglais, alors la chanson devait être anglaise, un chanteur américain, la chanson devait être américaine et ainsi de suite. Ils ont également précisé les définitions de ‘‘traditionnel’’, ‘‘commercial’’, ‘‘ethnique’’, ‘‘amateur’’, etc. Cela a été adopté en tant que politique dans une majorité groupes sur lesquels MacColl et ses supporters avaient de l’influence.

    Entre alors, dans ce champs miné, Bob Dylan. En 1962, Dylan vient en Grande-Bretagne. Après quelques difficultés à entrer dans le Club de Singer, installé dans le pub Wakefield de Londres, on l’a autorisé à chanter trois chansons, dont deux à lui. Des témoignages contemporains disent que MacColl et Peggy Seeger, qui tenaient le club, étaient hostiles. Comme Dylan était peu connu, une explication pourrait être qu’Alan Lomax leur ait parlé de lui. La relation entre Dylan et Carla Rotolo battait de l’aile, une relation immortalisée dans le morceau Ballad in Plan D : ‘‘Pour sa parasite de sœur, je n’avais aucun respect’’, ce qui peut l’expliquer. Ou cela pourrait être qu’ils ne considéraient pas ses propres chansons comme du folk ‘‘combatif’’. Plus tard, quand Dylan a été déclaré traitre par le PC, MacColl a été un pas plus loin et a annoncé que le travail précédent de Dylan n’avait pas été de la vraie musique folk.

    La campagne pour les droits civiques

    Dylan n’a été impliqué que rarement dans les actions politiques publiques. Il s’est rendu dans les états du sud aux Etats-Unis avec Pete Seeger pour supporter la campagne de droit de vote des noirs. Il a également chanté, avec Joan Baez, aux côtés de Martin Luther King sur la plateforme de la Marche sur Washington – là ou a été prononcé le fameux discours ‘‘J’ai fait un rêve’’. (L’activité politique de Baez provient d’un mouvement Quaker de paix : son père était un éminent physicien qui a refusé de travailler sur des projets liés aux armes et ses chansons traditionnelles folks lui viennent de sa mère moitié écossaise moitié américaine).

    Quand il était dans le sud avec Seeger, Dylan a chanté une nouvelle chanson, Only a Pawn in Their Game, sur le récent meurtre du leader du mouvement des droits civiques, Megdar Evers. Tout le monde savait que le coupable était Byron De La Beckwith, un membre du Ku Klux Klan. Mais cela a pris 30 ans (jusqu’en 1994…) pour trouver un jury du Mississipi prêt à le condamner. Dans sa chanson, Dylan accuse fermement le capitalisme, en montrant que les blancs pauvres sont utilisés comme des pions par la classe dirigeante pour diviser la classe ouvrière. ‘‘Le pauvre homme blanc est utilisé dans les mains de ceux-là comme un outil’’, un extrait qui résume le contenu de cette chanson.

    Seeger a affirmé avoir trouvé ce nouveau point de vue intéressant (No Direction Home, film documentaire de Martin Scorsese (2005)). Cela montre la position libérale du PC: voir le racisme simplement comme une question de blancs et de noirs. Les mots de Dylan, au contraire, reflètent une certaine conscience de classe.

    The « Judas » protest

    Un mois après la débâcle de Newport, le 28 aout 1965, Dylan a joué à Forest Hills avec un groupe de rock nouvellement formé basé sur The Hawks et qui prendra plus tard le nom de The Band. Une foule de 14.000 personnes a applaudi les 45 premières minutes acoustiques du concert et a ensuite hué la deuxième moitié du concert quand le groupe est monté sur scène. Le 24 septembre 1965, à Austin aux Texas, Dylan a débuté une tournée autour de l’Amérique et puis du monde qui a durée une année entière. L’évènement de Forest Hills s’est répété partout. Jamais encore on avait vu des gens acheter des tickets de concert pour exprimer un tel mécontentement sonore. Levon Helm, le batteur, a été tellement dégouté qu’il a renoncé avant la fin de la tournée américaine et a été remplacé.

    Alors que la tournée avait atteint la Grande-Bretagne en mai 1966, la tendance était installée. A Edinburgh, la Ligue des Jeunes Communistes a débattu et a décidé d’organiser une grève quand les instruments électriques sont apparus sur scène. Des évènements similaires sont arrivés à Dublin et à Bristol. La presse a très peu couvert cela, excepté pour le Melody Maker qui a fait la une le 14 mai. Avant le concert à Manchester, la société universitaire de Folk a tenu un meeting lors duquel a été voté le boycott du concert.

    C’était dans ce contexte que s’est déroulé l’extraordinaire concert au Free Trade Hall de Manchester le 17 mai 1966. Lors de la première partie du concert, il n’y a eu comme d’habitude aucun problème. Après trois chansons dans le second set – ironiquement, immédiatement après la chanson ‘‘communiste’’ Ballad of a Thin Man – les protestations ont commencé. Une fille s’est approchée de Dylan et lui a donné un bout de papier, sur lequel était écrit, on l’apprendra plus tard, ‘‘Dis au groupe de rentrer chez eux’’. Ensuite, dans un moment de silence entre deux chansons, on a pu clairement entendre le cri de protestation ‘‘Judas !’’. Dylan était visiblement et audiblement furieux et secoué – ce concert figure à présent officiellement sur un cd, après des années de contrebande.

    Bien que cela soit généralement vu comme le summum de cette période bizarre, les choses sont devenues bien plus sérieuses à Glasgow, ou un fan, armé d’un couteau, a tenté de pénétrer dans la chambre d’hôtel de Dylan. Personne ne peut véritablement accuser le Parti Communiste à propos de ce dernier évènement, mais il y a toujours un doute sur le fait que ses membres dirigeaient les évènements extraordinaires de la tournée de 1965-66, basées sur une interprétation stalinienne déformée de la culture prolétaire mêlée à une dose malsaine de nationalisme.


    Note:

    ‘‘Nous vivons dans un monde politique’’ est la première ligne de la chanson Political World qui ouvre l’album O Mercy (1989) de Bob Dylan

  • Gay Pride : 800.000 personnes à Paris contre l’homophobie

    Ce samedi 26 juin, les rues de la capitale accueillaient l’édition 2010 de la Gay Pride, dans une ambiance électrique et combative. Plus de 800.000 personnes ont ainsi défilé sous le drapeau arc-en-ciel ! Le mot d’ordre était clair : «Violences, discriminations, ASSEZ! Liberté et Egalité, partout et toujours.» Les principales revendications mises en avant cette année : le droit au mariage et à l’adoption, ainsi que la lutte contre la violence homophobe et les discriminations, revendications à la justesse cruellement illustrée le soir même : un homme s’est en effet fait poignardé.

    Par Pablo V. (Bruxelles)

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    Après 40 ans de Gay Pride, la lutte continue

    La fin des années ‘60 a été riche en luttes : mai 68, mobilisations anti-guerre, Printemps de Prague, mouvement noir,… C’est dans ce contexte de luttes que naissent les émeutes de Stonewall à New York, luttes qui symbolisent le début du mouvement LGBT.

    Par Julien (Bruxelles)

    A l’époque, les LGBT n’avaient légalement aucun droit et les descentes homophobes de flics étaient fréquentes. Le 28 juin 1969, un raid un peu plus violent que d’habitude au Stonewall va amener les LGBT à se mobiliser contre les attaques policières et les lois homophobes. En solidarité avec les mouvements afro-américains, des slogans comme ‘‘Gay Power’’ et ‘‘Gay is good’’ seront criés à chaque manifestation. Le Gay Liberation Front fut fondé par les militants LGBT de l’époque à New-York et s’étendra très vite au Canada, en Australie et dans beaucoup de pays européens. Très vite est née une collaboration pratique entre le GLF, les Blacks Panthers et les mouvements anti-guerre.

    Cette année, cela fera 40 ans que la première Gay Pride a été organisée à New-York. Le but était clairement de revendiquer des droits. Aujourd’hui, le milieu gay est beaucoup trop cher et beaucoup de LGBT en sont exclus. La Gay Pride est hélas essentiellement devenue l’opportunité de faire de l’argent et l’aspect revendicatif est de plus en plus mis de côté.

    (Petit) tour du monde de l’homophobie

    • 8 pays dans le monde exécutent des homosexuels.
    • L’homosexualité est punie par la loi dans une soixantaine de pays.
    • Aux Etats-Unis, les homosexuels sont exclus de l’armée. “Nous n’avons pas été en mesure d’empêcher le massacre de Srebrenica en Bosnie parce que l’armée était composée de soldats gays” se justifie un ancien commandant des forces de l’Otan.
    • Il est légal de licencier pour homosexualité dans 30 Etats américains.
    • Pour le numéro deux du Vatican, les multiples scandales de pédophilie qui secouent l’Eglise catholique sont liés à l’homosexualité et non au célibat des prêtres.
    • Dans les pays de l’Europe de l’Est, les Gay Pride sont violemment réprimées.

    A lire également:

    • DOSSIER: l’égalité reste à gagner!
    • DOSSIER: Histoire du mouvement LGBT – Les émeutes de Stonewall – 1969
    • Deux réfugiés LGBT agressés à Bruxelles
    • Répression des LGBT en Europe de l’EST
    • Les propos de Léonard font réagir le mouvement LGBT
    • Les droits des LGBT avant et maintenant
    • Luttons contre l’homophobie! – Interview d’une camarade brésilienne
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      A côté de chars publicitaires, se trouvaient de nombreuses associations LGBT telles que ACT UP, SOS homophobie,… mais aussi les syndicats (CGT, CFDT…), l’ensemble de l’opposition (NPA, PCF, Parti de Gauche, Europe Ecologie, PS,…), d’anciens militants du FHAR (le front homosexuel d’action révolutionnaire), ainsi qu’une soixantaine d’associations diverses (sans-papiers, sportifs, policiers,…). La commission LGBT du PSL-LSP participait également à l’évènement, aux côtés de nos camarades français de la Gauche Révolutionnaire, courant du NPA.

      Pour beaucoup, c’était l’heure de faire le bilan du gouvernement Sarkozy. En effet, aucune promesse de campagne n’a été respectée au point que GayLib (mouvement pourtant associé à l’UMP) s’est attaqué frontalement au gouvernement («Assez de promesses, l’égalité maintenant!») Au niveau européen aussi, avec l’aide du PPE et du Saint Siège, la majorité présidentielle s’est singularisée dans son opposition virulente au projet de loi visant simplement à combattre les discriminations homophobes au sein de l’Union. Pourtant, il s’agit bien d’une urgence. Selon une étude menée par la Halde en 2006, 85% des homosexuels se disent victimes de discriminations voilées (dénigrement ou rejet), et 40% d’entre eux affirment subir des discriminations ouvertes (blagues, insultes, harcèlement, voire violences physiques), émanant, la plupart du temps, de collègues. Les coupes budgétaires et l’austérité que nous annonce Sarkozy ne devrait pas améliorer cette situation, bien au contraire.

      Un homme poignardé en pleine Gay Pride cette année !

      La Gay Pride battait son plein dans le quartier du Marais à Paris, lorsque, vers minuit, un homme d’une quarantaine d’année s’effondre. Il s’est fait poignarder. Au même moment, une fusillade éclate à San Francisco blessant 3 personnes (dont une grièvement) dans une attaque terroriste contre la Gay Pride californienne. Ces attaques homophobes montrent que si aujourd’hui, pour certains, affirmer son orientation sexuelle est devenu moins complexe que par le passé, pour les autres, cette même affirmation peut devenir synonyme de violence et d’oppression. Par ailleurs, on se rappelle tous des dernières Gay Pride en Europe de l’Est et en Russie, où les militants LGBT devaient à la fois esquiver les coups de matraque de la police et les cocktails molotov lancés par des fascistes et des extrémistes religieux. Pire encore, les homosexuels sont actuellement persécutés dans plus de 60 pays dans le monde (prison à vie, coups de fouet…) et sont encore condamnés à la peine de mort dans huit pays. Dans un tel contexte, on ne peut pas rester les bras croisés.

      Néanmoins, la violence homophobe n’est pas inéluctable !

      Il y a fort à parier, par ailleurs, que la crise qui fragilise les plus opprimés à travers la destruction d’emploi, des services publics et d’éducation aura des conséquences sur les LGBT. A l’inverse, la défense des droits sociaux, le partage du temps de travail pour travailler tous, la garantie d’un logement décent,… permettrait sans doute de briser cet engrenage de tensions au sein de la société, et d’en finir avec la logique du « diviser pour mieux régner » chère à Nicolas Sarkozy et autres PPE.

      C’est pourquoi nous devons nous organiser pour résister à la violence homophobe, tout en construisant un rapport de force avec les travailleurs pour changer la société. Si pour vous aussi, ne rien faire, c’est laisser faire, alors rejoignez le PSL et sa commission LGBT. Samedi, nous avons par exemple tenu un stand avec de nombreuses brochures sur l’histoire du mouvement LGBT, Stonewall, avec notre organisation sœur en France (la Gauche Révolutionnaire) lors de la Gay Pride parisienne. Une initiative encourageante des deux côtés de la frontière !

  • Relations commerciales Etats-Unis / Union Européenne : Echange entre l’ambassadeur américain et Joe Higgins

    Ce premier juin, dans la Commission du Parlement Européen consacrée au commerce international, l’eurodéputé Joe Higgins (CIO-Irlande) s’est adressé à l’ambassadeur américain auprès de l’Union Européenne. Il y a abordé la crise économique actuelle et le rôle de l’administration Obama. Voici la vidéo de cet échange, ainsi que la traduction de cette discussion en français.

    Joe Higgins :

    ‘‘Merci Président.

    ‘‘M. l’Ambassadeur, vous avez dit qu’un des plus graves problèmes sur base de laquelle nous, je veux dire la génération actuelle, serons jugés, est la manière dont nous nous occuperons de la crise économique et financière actuelle.

    ‘‘Cependant, comme vous le savez, ce désastre économique a été précipité par la spéculation et par la soif de profit téméraires de la part d’institutions financières américaines et internationales, qui ont été facilitées par la folie de la dérégulation et de la libéralisation mise en place coûte que coûte par les administrations américaine et européenne.

    ‘‘Et donc, que va faire l’administration Obama quant à cette situation, si l’on prend en compte que des hedge funds surpuissants sont toujours en train de mener le même type d’activités sur les marchés financiers et sur le plan international ?

    ‘‘Ou en train de spéculer, par exemple, contre le peuple grec et exigeant un prix énorme de la part de la classe ouvrière grecque qui est en train de payer pour les superprofits engrangés par la spéculation de ces mêmes personnes.

    ‘‘La plupart de ces requins sont basés sur la côte Est des Etats-Unis, les hedge funds, et plus à Londres.

    ‘‘Donc, que pense faire votre administration contre ce que j’appelle la dictature de ces hedge ffunds et de ces institutions financières ?

    ‘‘Deuxièmement, vous avez mentionné le fait que le libre-échange était considéré avec suspicion par la population laborieuse des Etats-Unis. Les accords de libre-échange.

    ‘‘Et l’instinct de la classe ouvrière américaine est ici correct, parce que les accords de libre-échange, selon moi, n’ont pas été faits dans leur intérêt, mais dans l’intérêt des grandes corporations internationales qui bénéficient du libre-échange, forçant par-là une spirale vers le bas des salaires et des conditions de travail pour la population laborieuse.

    ‘‘Ceci s’est très certainement vérifié aux Etats-Unis, comme ailleurs dans le monde.

    ‘‘Maintenant, puis-je vous demander, M. l’Ambassadeur – comme vous le savez, dans les années 60, 70, et 80, les administrations américaines ont soutenu pratiquement chacune des dictatures puantes qui ont émergé en Amérique latine et ailleurs, au nom de la facilitation du commerce, avec un immense profit pour les grandes entreprises américaines.

    ‘‘Pourtant, qu’est-ce qui a changé dans l’approche de l’administration Obama par rapport au commerce ?

    ‘‘Le commerce est-il toujours une activité « neutre », qui ne doit pas se mêler des Droits de l’Homme et autres ?

    ‘‘Ou bien, qu’est-ce qui a réellement changé avec la nouvelle administration ?

    ‘‘Et si quelque chose a réellement changé, pourquoi votre administration continue-t-elle toujours à accorder un soutien économique et un traitement énormément favorables à des Etats qui violent les Droits de l’Homme à la face du monde entier, tels qu’Israël, et que sera le résultat du désastre et du massacre de ces gens qui apportaient de l’aide humanitaire à Gaza ?

    ‘‘Et ceci va-t-il causer une quelconque modification de vos relations commerciales avec Israël, par exemple ?

    ‘‘De la même manière, avec le Honduras, comment justifiez-vous le maintien de relations ouvertes avec un gouvernement boiteux, provenant au départ d’un coup d’Etat ?

    ‘‘Et pour terminer, MM. le Président et l’Ambassadeur : vous vous êtes référés au désastre de la marée noire dans le Golfe du Mexique, qui constitue bien entendu une énorme source d’inquiétude pour le peuple américain, pour les travailleurs, pour les écologistes, pour tout le monde.

    ‘‘Quelles en sont les implications pour le forage pétrolier à grande profondeur, après ce désastre ?

    Réponse de William E. Kennard, Ambassadeur des Etats-Unis auprès de l’Union Européenne :

    ‘‘M. Higgins, vous avez soulevé un certain nombre de problèmes et posé un certain nombre de questions.

    ‘‘Une sur la régulation financière, et vous avez émis le commentaire que les Etats-Unis sont responsables de la crise financière.

    ‘‘Je pense que nous avons passé le stade où nous pouvons chercher à savoir sur qui mettre la responsabilité de qui a causé cette crise et de qui ne l’a pas causée.

    ‘‘Vous voyez, nous y sommes tous ensemble, et on doit résoudre cela tous ensemble.

    ‘‘Une anecdote familiale – mon père était un petit entrepreneur. Il avait un petit partenariat. Mon père est un Afro-Américain, et son partenaire était un Blanc. Et je me souviens d’une époque, où ils avaient du mal, ils avaient des difficultés avec leur entreprise et ils se demandaient comment ils pourraient rentrer dans leurs frais. Et mon père s’est tourné vers son partenaire et lui a dit « Tu sais, on n’est pas arrivé ici sur le même bateau, mais maintenant, on est tous les deux dans la même galère ».

    ‘‘Voilà où nous en sommes. Je pourrais dire que la crise de l’Eurozone est un produit de l’Europe, mais en quoi cela va-t-il nous aider ?

    ‘‘En quoi cela va-t-il nous aider à résoudre le problème ? La réalité, est que nous sommes tous emmêlés dans un réseau financier mondial et interconnecté, et que nous devons travailler à cela tous ensemble. Vous avez aussi dit que nous n’avons rien fait pour réformer la finance.

    ‘‘Je prends assez mal ceci. Nous sommes très près de faire passer au Congrès Américain une des plus importantes réformes de nos lois financières depuis la Grand Dépression. Nous en sommes très près.

    ‘‘Et il est très important que, tandis que nos lois passent à travers le Congrès Américain, il y ait une coordination étroite avec l’Union Européenne. Parce que, à nouveau, ceci est un système interconnecté.

    ‘‘M. Abory était à Washington et à New York récemment, pour justement parler de cet enjeu, et je suis conforté dans l’idée que nous pouvons agir ensemble – si pas en harmonie, au moins en coordination au fur et à mesure que notre réforme financière sera mise en place.

    ‘‘De même, je ne suis pas du tout d’accord avec votre thèse selon laquelle la politique de libre-échange ne prend pas en compte les enjeux sociaux et environnementaux.

    ‘‘Le Président Obama a mené campagne autour d’une plate-forme visant à s’assurer que les négociations commerciales soient sensibles aux enjeux sociaux et environnementaux.

    ‘‘Il a donné une directive à l’ensemble du gouvernement, et c’est quelque chose auquel nous pensons chaque jour au gouvernement des Etats-Unis.

    ‘‘Israël, je m’excuse, je n’en ai pas parlé. Hier, nous avons tous été témoins d’une tragédie en haute mer autour d’une tentative d’amener un convoi d’aide humanitaire à Gaza. Le Président a tout de suite émis une déclaration.

    ‘‘Je ne sais qu’en dire de plus, à part que, avant de tirer une quelconque conclusion, il nous faut bien nous renseigner sur ce qui s’est passé.

    ‘‘Je pense qu’à chaque fois que qu’une telle chose se produit, il est important de comprendre ce que sont les faits, ce qui s’est réellement produit, et ensuite d’agir en conséquence.

    Joe Higgins MEP:

    ‘‘Un acte de piraterie dans les eaux internationales, M. l’Ambassadeur, ce qui s’est produit est assez clair.

    Ambassadeur américain:

    ‘‘Eh bien, nous verrons. Tous les faits ne nous sont pas encore parvenus.

  • Gay Pride: Lesbiennes, Gays, Bis, Trans, Hétéros… L’égalité reste à gagner!

    Ce samedi 15 mai, 35000 LGBT’s (Lesbiennes, Gays, Bi’s, Trans) et hétéros se sont rendus à Bruxelles pour la Belgian Pride. Différents partis traditionnels (ECOLO, Groen !, PS, VLD, NVA) étaient présents. Malheureusement, aucun d’entre eux ne proposait de réelles solutions face aux problèmes que rencontrent les LGBT’s. Cependant, comme chaque année, le PSL/LSP était aussi présent sous le slogan «Lesbiennes, Gays, Bis, Trans, Hétéros… L’égalité reste à gagner!» Discrimination à l’embauche et au logement, agression, suicide… il faut un vrai programme pour les LGBT’s!

    Contrairement au PS et à ECOLO, nous ne somme pas venus avec des ballons et des tatouages à l’eau, mais avec nos journaux et des brochures sur les émeutes de Stonewall (1969). En tous, une quinzaine de camarades sont venus de toute la Belgique pour participer à la Belgian Gay Pride. Nous avons vendu une vingtaine de journaux et plusieurs brochures.

    Plus que des lois, il y a un vrai besoin d’investissements publics massifs. 80% des LGBT’s de moins de 25 ans ont été victimes d’homophobie à l’école. Un LGBT sur quatre qui fait son coming-out chez ses parents est viré de chez lui. A New-York, entre 20 et 40% des SDF sont LGBT. Notre tract était donc clair : nous avons besoin de plus de moyen pour enrayer l’homophobie : des cours d’éducation sexuelle, des logements à prix démocratique,… sans encore compter les nécessités qui s’imposent pour faire face aux effets de la crise.

    A l’occasion de la Gay Pride, nous avons utilisé notre première brochure sur l’histoire du mouvement LGBT: «Les émeutes de Stonewall». C’est suite à ces émeutes qu’il y a 40 ans, la première Gay Pride a eu lieu à New-York. A l’époque, la Gay Pride avait un caractère clairement revendicatif. Avec la diminution des subsides publics, la Gay Pride s’est, au fil des ans, marchandisée. Les partis traditionnels et les entreprises utilisent cette marche pour se présentés comme étant ouverts aux droits des LGBT’s, mais ils ne revendiquent rien. L’année dernière, nous avions commencé une campagne Pride not profit contre la commercialisation de la Belgian Gay Pride. Cette année, nous avons continué à mettre en avant cette idée avec notre tract et un badge «Pride not profit».

    Contrairement aux partis traditionnels, nous n’attendons pas la Gay Pride pour combattre l’homophobie. Avec la Commission LGBT du PSL, nous somme actifs toute l’année. Pour plus d’informations sur nos campagnes, vous pouvez nous contacter à LGBT@socialisme.be.

  • Lesbiennes, gays, bis, trans, hétéros – Défendons la liberté de choix de l’orientation sexuelle!

    En mars dernier, deux jeunes réfugiés, Yahia et Ramzi, ont été victimes d’une agression homophobe violente dans le métro bruxellois. Les deux jeunes hommes avaient déjà fui leurs pays d’origine – la Palestine et l’Algérie – pour échapper aux persécutions homophobes. Cette agression n’est que la partie émergée de l’iceberg. En effet, chaque jour, ce sont des milliers de LGBT (Lesbiennes, Gays, Bisexuels et Transsexuels) qui su-bissent l’homophobie.

    Par Stéphane (Bruxelles)

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    Après 40 ans de Gay Pride, la lutte continue

    La fin des années ‘60 a été riche en luttes : mai 68, mobilisations anti-guerre, Printemps de Prague, mouvement noir,… C’est dans ce contexte de luttes que naissent les émeutes de Stonewall à New York, luttes qui symbolisent le début du mouvement LGBT.

    Par Julien (Bruxelles)

    A l’époque, les LGBT n’avaient légalement aucun droit et les descentes homophobes de flics étaient fréquentes. Le 28 juin 1969, un raid un peu plus violent que d’habitude au Stonewall va amener les LGBT à se mobiliser contre les attaques policières et les lois homophobes. En solidarité avec les mouvements afro-américains, des slogans comme ‘‘Gay Power’’ et ‘‘Gay is good’’ seront criés à chaque manifestation. Le Gay Liberation Front fut fondé par les militants LGBT de l’époque à New-York et s’étendra très vite au Canada, en Australie et dans beaucoup de pays européens. Très vite est née une collaboration pratique entre le GLF, les Blacks Panthers et les mouvements anti-guerre.

    Cette année, cela fera 40 ans que la première Gay Pride a été organisée à New-York. Le but était clairement de revendiquer des droits. En Belgique, la Gay Pride n’arrivera que bien plus tard puisque cette année, nous en sommes à la quinzième édition. Malheureusement, depuis qu’elle existe, la Gay Pride reçoit de moins en moins de subsides et doit de plus en plus faire appel au privé pour assurer son existence.

    Aujourd’hui, le milieu gay est beaucoup trop cher et beaucoup de LGBT en sont exclus. La Gay Pride est hélas essentiellement devenue l’opportunité de faire de l’argent et l’aspect revendicatif est de plus en plus mis de côté.

    (Petit) tour du monde de l’homophobie

    8 pays dans le monde exécutent des homosexuels.

    • L’homosexualité est punie par la loi dans une soixantaine de pays.
    • Aux Etats-Unis, les homosexuels sont exclus de l’armée. “Nous n’avons pas été en mesure d’empêcher le massacre de Srebrenica en Bosnie parce que l’armée était composée de soldats gays” se justifie un ancien commandant des forces de l’Otan.
    • Il est légal de licencier pour homosexualité dans 30 Etats américains.
    • Pour le numéro deux du Vatican, les multiples scandales de pédophilie qui secouent l’Eglise catholique sont liés à l’homosexualité et non au célibat des prêtres.
    • Dans les pays de l’Europe de l’Est, les Gay Pride sont violemment réprimées.

    A lire également:

    • Deux réfugiés agressés à Bruxelles : l’homophobie frappe dans le métro !
    • Répression des LGBT en Europe de l’EST
    • Les propos de Léonard font réagir le mouvement LGBT
    • Les droits des LGBT avant et maintenant
    • Luttons contre l’homophobie! – Interview d’une camarade brésilienne
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      Pourtant, en Belgique, les homos ont les même droits que les hétéros (le mariage ainsi que le droit d’avoir des enfants) et l’homophobie est reconnue comme une discrimination punissable par la loi. Mais ce ne sont que des mots sur du papier! Dans la pratique, l’égalité entre hétéros et LGBT reste à gagner.

      Selon une enquête européenne, 80% des gays et lesbiennes de moins de 25 ans déclarent avoir été victimes de violences verbales et souvent physiques durant leur scolarité du fait de leur orientation sexuelle différente. De nombreux spécialistes s’accordent pour dire qu’un cours d’éducation sexuelle doit figurer au programme scolaire, incluant les différentes sexualités existantes (hétérosexuelles comme homosexuelles, bisexuelles et transsexuelles). Cet enseignement ne doit pas se résumer à une simple après-midi sur toute la scolarité d’un enfant mais doit être un cours à part entière donné par un professeur formé (et surtout pas homophobe!)

      Pareil apprentissage serait un fameux coup de main pour combattre l’homophobie en habituant tous les individus dès leur plus jeune âge à considérer toutes les sexualités et toutes les différences. Mais hélas, depuis plus de 20 ans maintenant, les gouvernements successifs se sont acharnés à étouffer l’enseignement, comme tous les services publics, d’ailleurs. Les enseignants ont de moins en moins de moyens pour assurer leurs tâches: bâtiments tombant en ruine, classes surpeuplées, quasi absence d’outils pédagogiques,…

      Un cours efficace et constructif d’éducation sexuelle ne peut être envisagé que dans le cadre d’un enseignement public de qualité, accessible à tous et totalement gratuit. C’est pourquoi nous revendiquons un refinancement de l’enseignement à hauteur de 7 % du PIB.

      Aux Etats-Unis, plus d’un jeune LGBT sur quatre qui fait son coming-out (qui rend son homosexualité publique) est victime de l’homophobie de ses parents et se voit obligé de quitter son foyer. On estime ainsi qu’entre 20 à 40 % des jeunes sans-abris américains sont des LGBT. En Europe, d’autres chiffres illustrent les difficultés d’être LGBT: 12,4 % des jeunes gays tentent de se suicider (contre 5,9 % des garçons hétéros) et 25 % des jeunes lesbiennes (contre 5,4 % des jeunes filles hétéros). La situation en Belgique est similaire à celle des Etats-Unis ou du reste de l’Europe.

      Jeunes et moins jeunes LGBT ont plus que jamais besoin de structures d’accueil qui les protègent des agressions homophobes qu’ils vivent au quotidien à la maison, à l’école, au travail ou encore en rue. Mais en matière de protection des personnes en danger (LGBT, femmes battues, petite enfance…), l’Etat ne fait quasiment rien. À l’heure actuelle, de tels centres d’accueil sont presque inexistants, très souvent payants et les listes d’attentes sont très longues. En d’autres mots, de nombreux LGBT ou femmes victimes de violences homophobes ou sexistes n’ont d’autre choix que de continuer à recevoir des coups ou alors de fuir du domicile, bien souvent pour la rue ou la prostitution. Un programme de services d’aide aux personnes victimes d’agressions en tout genre n’est pas à l’agenda du gouvernement, au contraire occupé à faire des coupes budgétaires abyssales dans tous les secteurs des services publics.

      C’est pourquoi nous revendiquons des services publics d’aides aux personnes en danger gratuits, de qualité et qui prennent en compte les problèmes réels rencontrés par toute la population, jeunes et moins jeunes, LGBT comme hétéros, hommes ou femmes.

      Cela fait maintenant plus de 30 ans que le SIDA fait des ravages aux quatre coins du monde et toujours pas de vaccin malgré les connaissances scientifiques actuelles et le travail acharné fourni par des milliers de chercheurs. Pourquoi? La recherche scientifique est de plus en plus entre les mains de grosses entreprises privées comme les grands groupes pharmaceutiques, par exemple, lesquels orientent principalement la recherche vers leur propre profit. Ainsi, GSK, le 2e groupe pharmaceutique mondial a réalisé un profit de presque 2 milliards d’euros rien que sur la vente du vaccin contre la grippe H1/N1. GSK finance de nombreux programmes de recherches dans le domaine de la santé.

      La recherche doit rester entre les mains des services publics et être entièrement orientée vers les besoins réels de la population afin de trouver au plus vite des vaccins contre le SIDA et toutes les autres MST.

      Combien de couples gays et lesbiennes ne sont pas victimes d’homophobie quand ils sont à la recherche d’un logement? Une grande part du logement est entre les mains du privé, qui décide de choisir le locataire ‘‘désiré’’. Combien aussi d’immigrés, de mères seules avec enfant(s) ou encore de chômeurs se voient refuser l’accès à un logement tout cela parce que des propriétaires peu scrupuleux ne se gênent pas pour éloigner les ‘‘mauvais payeurs’’?

      Nous revendiquons un plan massif de construction de logements sociaux de qualité, à des prix raisonnables et surtout avec un contrôle démocratique de la collectivité afin de contrer toute forme d’arbitraire.

      Toutes les mesures proposées ci-dessus visent à combattre sur le terrain l’homophobie et font partie intégrante du programme du PSL/LSP. LGBT, hétéros, femmes, immigrés, jeunes… on a tous à y gagner! Mais ce programme ne s’appliquera pas tout seul! C’est à nous de nous battre pour l’instaurer et participer à la construction d’une société basée sur les besoins réels de toute la population et non sur les profits d’une minorité qui, pour mieux asseoir son pouvoir économique et politique, joue pleinement sur la division des travailleurs selon leur sexe, leur couleur de peau ou encore selon leurs orientations sexuelles. Si toi aussi, tu veux renverser le système capitaliste et toutes ses conséquences telles que le sexisme, le racisme et l’homophobie, rejoins le PSL/LSP.

  • Histoire du mouvement LGBT – Les émeutes de Stonewall – 1969

    Pour fêter les 40 ans des évènements de Stonewall, autrement dit la naissance d’un mouvement gay international, le PSL publie un article de Lionel Wright paru originellement dans le magazine de notre organisation-sœur en Angleterre, Socialism Today. Partant des émeutes de Stonewall, cet article nous livre un portrait d’une brulante actualité sur la lutte des LGBT’s, de 1969 à nos jours.

    Dossier par Lionel Wright

    Un événement somme toute assez banal s’est déroulé il y a 40 ans, plus exactement le 27 juin 1969 à Greenwich Village, dans l’Etat de New York, un événement qui était arrivé des milliers de fois auparavant à travers les Etats-Unis au cours des décennies précédentes. Ce jour là, la police a fait un raid contre un bar gay.

    Dans un premier temps, tout s’est déroulé de manière bien réglée, selon un rituel consacré par l’usage. Sept inspecteurs en civil et un officier en uniforme sont entrés dans le bar. Directement, le personnel du bar a cessé de servir les boissons, diluées dans l’eau et excessivement chères, tandis que leurs patrons mafieux, en toute hâte, enlevaient les boîtes de cigare qui servaient de caisses enregistreuses. Les officiers ont exigé les papiers d’identité des clients et les ont ensuite escortés à l’extérieur, jetant certains dans les "paniers à salade" qui stationnaient dehors et poussant violemment d’autres hors du trottoir.

    Cependant, à un certain moment, les soi-disant contrevenants ont décidé de ne plus se laisser faire et ont commencé à résister. Le débat fait toujours rage : quel est l’incident réel qui a suscité l’émeute? Etait-ce une lesbienne habillée en homme qui a résisté à son arrestation, ou une "drag queen" qui s’est arrêtée dans l’embrasure de porte, face aux officiers, et a posé d’un air provoquant, en rameutant la foule ?

    Un vétéran des émeutes et activiste des droits des homosexuels, Craig Rodwell, raconte: "un certain nombre d’incidents se sont produits simultanément. Il n’y a pas eu UNE chose ou UNE personne en particulier, il y avait juste … un embrasement de groupe, une explosion de colère massive."

    La foule de clients éjectés a commencé à jeter des pièces de monnaie aux officiers, en moquerie par rapport au (tristement célèbre) système de récompenses au travers duquel des chefs de police extorquaient d’immenses sommes d’argent aux établissements gays et utilisaient le prétexte de la "morale publique" pour donner une vitrine régulière à leur racket. Bientôt, aux pièces de monnaie ont succédé des bouteilles, des pierres et d’autres objets. Les acclamations ont jailli à mesure que les prisonniers étaient relâchés. L’inspecteur principal de police Pine se rappelle plus tard " je me suis retrouvé à plusieurs reprises dans des situations de combat, mais je ne me souviens pas d’un moment où j’ai eu plus peur que cette fois-là. "

    Pine ordonna à ses subalternes de retourner dans le bar vide pour le saccager. Ils ont aussi brutalement tabassé un chanteur folk hétérosexuel qui avait eu le malheur d’entrer dans le bar à ce moment. À la fin de la soirée, un adolescent avait perdu deux doigts après avoir eu sa main coincée dans une porte de voiture. D’autres ont été hospitalisés après les assauts de la police et les coups de matraques. L’historien des émeutes, Martin Duberman, affirme que la police réservait aux jeunes hommes "féminisés" un "traitement spécial".

    L’inspecteur Pine et ses subordonnés ont presque été brûlés vifs lorsque quelqu’un a jeté un liquide inflammable par la porte du bar pour essayer d’y mettre le feu. Dans le même temps, un parcmètre couché sur le pavé a été utilisé comme bélier de fortune. La foule commença alors à crier "Pouvoir Gay!" Et comme la nouvelle se répandait à travers Greenwich Village, des centaines de gays et de lesbiennes, des noirs, des blancs, des Hispaniques, principalement travailleurs, ont convergé dans le quartier de Christopher Street, aux alentours du bar. La police était à présent plus nombreuse, ayant entretemps reçu le renfort de la Force de Patrouille Tactique (TPF), une équipe de répression des émeutes spécialement formée pour disperser les manifestants protestant contre la Guerre du Viêt-Nam.

    Duberman dépeint cette scène de deux douzaines de policiers anti-émeutes avançant vers Christopher Street, les bras liés à la manière des formations pratiquées par la légion romaine : "Les émeutiers reculèrent lentement dans leur évolution, mais – contrairement aux attentes de la police – ne se dispersèrent pas en courant à toutes jambes…des centaines de personnes… se rassemblèrent pour éviter les coups de matraque, firent le tour du bloc, se retrouvèrent derrière les policiers et les bombardèrent de débris de toutes sortes. Lorsque les flics réalisèrent qu’une foule considérable s’était simplement reformée dans leur dos, ils devinrent particulièrement susceptibles vis-à-vis de quiconque s’approcherait d’eux d’un peu trop près. "

    Mais les protestataires n’étaient pas effrayés. Le scénario se répéta plusieurs fois : la TPF dispersait la foule, seulement pour que celle-ci se reforme à nouveau derrière eux, hurlant des railleries, jetant des bouteilles et des briques, mettant le feu aux poubelles.

    Quand les flics manoeuvrèrent afin de changer complètement de direction, ils se retrouvèrent face à face avec leur pire cauchemar : une rangée de drag queens, les bras étreints, donnant des coups de talons à la manière de fusées aériennes prêtes à décoller, et chantant de leurs voix sardoniques :

    ‘We are the Stonewall girls, We wear our hair in curls, We wear no underwear, We show our pubic hair… We wear our dungarees, Above our nelly knees!’

    La traduction donne ceci: ‘Nous sommes les filles de Stonewall, Nous portons nos cheveux en boucles, Nous ne portons aucun sous-vêtement, Nous montrons nos poils pubiens… Nous portons notre bleu de travail, Au-dessus de nos genoux!’

    "C’était un contrepoids délicieux et plein d’humour et de dédain par rapport à la force brutale de la TPF." (Stonewall, Duberman, 1993). Le soir suivant, les manifestants sont revenus sur les lieux, leurs effectifs gonflés par des milliers d’autres. Des tracts étaient distribués, intitulés "La mafia et les flics hors des bars gay!" Les protestations et les perturbations ont continué avec une intensité variable pendant cinq jours.

    À la suite des émeutes, des discussions intenses ont eu lieu dans la communauté gay de la ville. Pendant la première semaine de juillet, un petit groupe de lesbiennes et de gays ont commencé à évoquer la fondation d’une nouvelle organisation appelée "Gay Liberation Front" (GLF), le Front de Libération Gay. Ce nom a consciemment été choisi en lien avec les luttes anti-impérialistes au Viêt-Nam et en Algérie. Les sections du GLF se sont attelées à organiser la solidarité avec les membres des Black Panthers arrêtés, ont récolté des fonds pour les travailleurs en grève et ont lié la lutte pour les droits des gays à la lutte pour le socialisme.

    Un magazine gay de New York a publié une édition spéciale sur les émeutes, tout en publiant un hommage au livre de John Reed sur la Révolution d’Octobre, "Dix jours qui ébranlèrent le monde". Durant les années suivantes, des lesbiennes et des gays ont mis sur pied un Front de Libération Gay ou un organisme semblable au Canada, en France, en Grande-Bretagne, en Allemagne, en Belgique, aux Pays-Bas, en Australie et en Nouvelle-Zélande.

    Le mot Stonewall est partout entré dans le vocabulaire des lesbiennes, des gays, des bisexuels et des transgenres comme un symbole emblématique de la résistance de la communauté gay face à l’oppression, exigeant une égalité complète dans tous les domaines de la vie. Depuis les émeutes, ce nom a été adopté de nombreuses fois dans différents contextes liés à la question gay, des associations de défense de locataires jusqu’à des clubs de vacances pour gays. De même, un groupe de défense des droits des gays en Angleterre porte le nom de Stonewall, bien que sa stratégie – consistant uniquement à faire du lobbying et du marchandage auprès du gouvernement du New Labour – est loin de l’esprit militant et héroïque déployé par la résistance sur Christopher Street en juin 1969.

    Le GLF n’existe plus aujourd’hui, mais l’idée du "pouvoir Gay" est plus forte que jamais. En attendant, dans beaucoup de pays et de villes, le concept de la "Gay Pride" (littéralement : la fierté Gay) se développe sous la forme d’une marche annuelle.

    La génération actuelle de jeunes lesbiennes, de gays, de bisexuels et beaucoup d’activistes des droits des homosexuels d’aujourd’hui sont nés ou ont grandi après 1969. Et au cours des décennies qui nous séparent des ces événements, la politique aux Etats-Unis est passée à travers une période très différente. Entretemps, la signification réelle des émeutes a été éclipsée par une sorte de légende construite autour de Stonewall.

    Le développement de la contre-culture

    Pourquoi les événements de Stonewall se sont-ils produits à ce moment-là? Comment se fait-il que des actions initialement entreprises par moins de 200 personnes aient pu mener à une protestation aussi large, et donner un coup de fouet au mouvement gay?

    Dans son livre "Politique Sexuelle, Communautés Sexuelles", écrit en 1983, l’historien John D’Emilio a révélé la préhistoire de Stonewall. L’auteur décrit comment le processus d’industrialisation et d’urbanisation ainsi que le mouvement des ouvriers des plantations et des fermes familiales émigrant vers des emplois salariés dans les villes, a rendu plus facile, pour des Américains ayant des attirances pour le même sexe, d’explorer leur sexualité. Avant les années 1920, une contre-culture homosexuelle s’était cristallisée dans la Barbary Coast de San Francisco, le quartier français de la Nouvelle Orléans, ainsi que dans le quartier de Harlem à New York et à Greenwich Village.

    Il existe des preuves évidentes que des personnes ayant des orientations homosexuelles ont existé partout à travers l’histoire. Ce qui a varié considérablement est la vision que la société en avait, et comment les personnes que nous décrivons aujourd’hui comme des homosexuels et des lesbiennes se considéraient elles-mêmes aux différentes étapes de l’histoire.

    La signification du changement social décrit ci-dessus, et de l’apparition d’une contre-culture, consiste, pour le développement d’un mouvement en faveur des droits des homosexuels, en ce qu’un nombre croissant d’individus homosexuels étaient capables de sortir de l’isolement. Ils apprirent progressivement l’existence d’un grand nombre d’autres gays, et commencèrent à se sentir membres d’une communauté gay plus large.

    Dans la société en général, les pénalités pour l’homosexualité étaient sévères. Des lois d’Etat à travers le pays criminalisaient les actes sexuels avec des personnes du même sexe, tandis que de simples gestes de tendresse en public, comme par exemple deux hommes ou deux femmes se tenant les mains, pouvaient mener à l’arrestation. Même se déclarer gay ou lesbienne pouvait aboutir à l’envoi dans une clinique psychiatrique, sans la moindre audition.

    Au sein de cette contre-culture embryonnaire, il y avait moins d’espace pour les lesbiennes que pour les hommes gays, du fait que les femmes avaient généralement moins d’indépendance financière, et il était donc plus dur pour une femme de rompre avec les normes sociales et de s’épanouir dans une relation à caractère homosexuel. Pendant la Deuxième Guerre Mondiale, tout ça changea. Les routines et les normes de temps de paix ayant été rompues, les gays des deux genres trouvèrent davantage d’occasions pour exprimer plus librement leur sexualité.

    Les femmes entrèrent massivement tant sur le marché du travail que dans les forces armées, et disposaient également d’un nouveau pouvoir d’achat, leur permettant entre autres d’explorer leur sexualité. Dans le film-documentaire "Before Stonewall", une ex-militaire lesbienne du nom de Johnnie Phelps relate comment elle fut un jour appelée avec une autre femme pour aller voir le Général-en-chef de son bataillon – qu’elle estimait "être gay à 97 %."

    Le Général Eisenhower – car c’était lui – lui expliqua qu’il voulait "fureter" les lesbiennes du bataillon, et lui ordonna de rédiger une liste à cette fin. Tant Phelps que l’autre femme informèrent poliment le Général qu’elles dresseraient volontiers une telle liste, à condition qu’il soit préparé à remplacer tous les employés de bureau chargés des classements des dossiers, les conducteurs, les commandants, etc, et que leurs noms seraient en haut de la liste! Eisenhower abandonna l’idée. Quelques années plus tard pourtant, pendant la chasse aux sorcières de McCarthy, Eisenhower, en tant que président américain, obtiendra sur son ordre des listes abondantes destinées à prendre des mesures contre des milliers de personnes soupçonnées d’être des communistes ou des "pervers sexuels."

    Répression accrue

    Avec le retour aux conditions de paix, les millions d’Américains qui avaient rencontré des gays et avaient eu des relations de ce type dans le cadre de leur service ou dans l’économie de guerre, virent cette ouverture temporaire au sein de la société américaine toucher à sa fin. La plupart des nouveaux lieux gays issus de la guerre fermèrent leurs portes, en même temps que les gens qui avaient fait leur service étaient démobilisés, et que la plupart des nouvelles venues sur le marché du travail retournèrent des usines vers le foyer.

    L’orthodoxie sexuelle avait subi des entorses majeures, et un âge sombre s’annonçait maintenant pour les homosexuels. Mais le génie de l’expérimentation gay et lesbienne était sorti de sa bouteille. Les choses ne pouvaient plus jamais être tout à fait comme avant. Un des effets de la guerre fut qu’un grand nombre de lesbiennes et de gays qui sortaient de leur service décidèrent de rester dans les villes portuaires afin de conserver un peu de liberté sexuelle, loin des pressions familiales et toute idée de mariage.

    A San Francisco en particulier, la population gay avait solidement augmenté, du fait que beaucoup de lesbiennes et de gays sortis de l’armée s’installaient dans cette ville. En l’espace d’une décennie, ce phénomène – combiné avec une politique moins répressive dans l’Etat de Californie envers les bars gay ainsi que d’autres facteurs, tels que la légitimité donnée à l’homosexualité au travers du mouvement littéraire des "Beats", avec des auteurs comme Jack Kerouac – contribua à faire de San Francisco la "capitale de l’homosexualité" aux Etats-Unis.

    Récemment, en Grande-Bretagne, nous avons vu, aussi bien avec des gouvernements travaillistes que conservateurs, tous deux soutenant le libre-marché, comment l’idéologie de la famille est utilisée comme pilier de soutien au système économique et social. Les attaques des deux partis sur les parents isolés en fournissent un exemple assez clair.

    Dans les Etats-Unis des années 1940 et 1950, la reconstruction de l’après-guerre et le tournant vers la consommation de masse, placés sous le sceau de la Guerre Froide, ont abouti à ce que les autorités promeuvent fortement la structure familiale traditionnelle. L’autre côté de la médaille était une répression accrue contre ceux qui sortaient du "cercle magique" du mariage, de la parenté et du ménage en s’engageant dans des relations homosexuelles.

    Les enquêtes du "House Un-American Activities Committee" ont abouti à ce que des milliers d’homosexuels perdent leurs emplois dans les départements gouvernementaux. L’interdiction d’engager des homosexuels au niveau fédéral est restée en vigueur jusqu’en 1975. D’Emilio a démontré la nature des attaques à l’encontre des homosexuels. Dans le district fédéral de Columbia seulement, il y eut 1.000 arrestations chaque année au début des années 1950. Dans tous les Etats, les journaux locaux publièrent les noms des personnes accusées d’homosexualité, avec pour conséquence le licenciement de nombreux travailleurs. Le service postal ouvrait le courrier des gays et des lesbiennes et transmettait les noms. Les universités tenaient des listes d’étudiants soupçonnés d’être gays.

    L’apparition des Droits pour les Homosexuels

    C’est contre cet environnement hostile que le mouvement en faveur des droits des homosexuels aux Etats-Unis est entré en action. En 1948, Harry Hay, un gay membre de longue date du Parti communiste américain, décida de fonder un groupe défendant les droits homosexuels. C’était le premier chapitre de ce que les gays de l’époque appelaient le mouvement "homophile".

    Comme tous les Partis Communistes dans le monde entier, le parti américain se revendiquait de l’héritage de la révolution russe. Une des premières mesures des Bolcheviks avait été d’en finir avec la criminalisation des gays. Mais dans les années 1930, la montée de la bureaucratie stalinienne s’est concrétisée par une reprise de la politique anti-gay, tant en Union soviétique que parmi les Partis Communistes mondiaux.

    Dans cette situation, déterminé à poursuivre son projet, Hay demanda d’être expulsé du PC. Etant donné son ancienneté, le parti déclina sa demande. Ensemble avec un petit groupe de collaborateurs incluant d’autres anciens membres du PC, Hay lança la "Société Mattachine" (SM) en 1950. Ce nom provient d’un groupe mystérieux de musiciens contestataires du Moyen-Âge, qui n’apparaissaient en public qu’avec des masques, et étaient probablement homosexuels.

    D’Emilio décrit le programme de la SM comme visant à l’unification des homosexuels isolés, à l’éducation des homosexuels pour qu’ils se conçoivent comme une minorité opprimée, et la construction d’une direction à leur lutte, en vue de leur propre émancipation. Hay appelait à une "culture homosexuelle éthique" et comparait cela aux cultures émergentes des peuples noirs, juifs et mexicains aux Etats-Unis. La Société Mattachine organisait des groupes de discussion locaux pour promouvoir ce programme "éthique". Ils soutenaient que "le stress émotionnel et la confusion mentale" parmi les gays et les lesbiennes étaient "socialement conditionnés."

    Malgré la dégénérescence stalinienne du PC, dans lequel Hay avait reçu deux décennies de formation politique, les fondateurs de la SM appliquaient clairement des méthodes marxistes afin de comprendre la position des gays et déterminer des perspectives et une voie pour aller de l’avant. Pour la structure de Mattachine, Hay utilisait les méthodes de clandestinité que le PC avait dû employer face aux attaques des autorités, mais qui se sont aussi développées dans le contexte des méthodes anti-démocratiques du stalinisme dans le mouvement ouvrier.

    Pour combattre la persécution à laquelle les gays faisaient face, la SM était basée sur un réseau de sections agencées sur cinq niveaux. Hay et les autres dirigeants faisaient partie du cinquième niveau, mais étaient inconnus des membres des premier et deuxième niveaux. Pendant trois ans, la SM développa efficacement son réseau de groupes de discussion. La croissance s’accéléra en 1952 après que la SM ait gagné une victoire célèbre contre la police, lorsque des accusations qui s’étaient abattues sur un des membres du groupe à Los Angeles furent abandonnées, suite à une campagne de tractage menée par une organisation de front appelée "le Comité de Citoyens pour l’Interdiction de la Persécution".

    Cependant, l’année suivante, suite à un article écrit par un journaliste McCarthiste à Los Angeles, le "cinquième niveau" décida d’organiser une "convention démocratique." Lorsque cet événement prit place, le groupe de Hay fut critiqué par des éléments conservateurs et anti-communistes, qui exigèrent que la SM prête serment de fidélité, ce qui était une tactique McCarthiste classique. La direction réussit à défaire toutes les résolutions de l’opposition, et la demande pour un serment de fidélité ne put obtenir une majorité.

    Néanmoins, Hay et ses camarades décidèrent de ne pas se présenter pour des positions au sein d’une organisation qu’ils avaient pourtant établie et construite. Cela permit aux conservateurs de prendre le contrôle sur le groupe. Beaucoup de ceux qui avaient soutenu les buts originels de l’organisation partirent dégoûtés, et il fallut deux ans pour pouvoir regagner de nouveaux militants. Si le groupe de Hay était resté actif, il aurait pu offrir un pôle d’attraction pour les militants gays et lesbiennes. Malheureusement, il n’en fut pas ainsi, et le mouvement fit un pas en arrière, perdant ainsi une décennie d’avancées.

    Tandis que les fondateurs de la Société Mattachine avaient préconisé une première version de la "Gay Pride" la nouvelle direction reflétait les préjugés sociaux répandus contre les homosexuels. Le nouveau président de la SM, Kenneth Burns, écrivit dans le journal de l’organisation : "Nous devons nous blâmer pour notre propre situation critique… Quand l’homosexuel se rendra-t-il compte que la réforme sociale, pour être efficace, doit être précédée par la réforme personnelle ?"

    La position de la nouvelle direction était que les gays ne pouvaient pas se battre pour des changements dans la société américaine, mais devaient s’appuyer sur des médecins "respectables", des psychiatres, etc, pour s’assigner les bonnes grâces des autorités, dans l’espoir d’un traitement plus favorable. Mais le problème était que la grande majorité de telles personnalités prétendaient que l’homosexualité était une maladie. Aussi incroyable que cela puisse paraître aux activistes gays actuels, des prétendus "experts" anti-gays étaient autorisés à écrire des articles dans les publications de la SM et à s’exprimer dans les meetings de l’organisation !

    Vers la fin de cette période, lorsqu’un professionnel nommé Albert Ellis affirma lors d’une conférence que "l’homosexuel exclusif est un psychopathe", quelqu’un dans l’audience s’écria : "Nimporte quel homosexuel qui viendrait chez vous pour un traitement, docteur Ellis, serait un psychopathe!"

    La montée de l’activisme gay

    Beaucoup de gays et de lesbiennes qui devaient encore "sortir de l’ombre" – c’est-à-dire s’identifier publiquement comme homosexuel – le firent au travers de la campagne pour les droits civils du mouvement noir, qui débuta dans les années 1950. Dans la décennie suivante, l’influence de la campagne pour les droits civils se fit sentir dans le mouvement gay. L’establishment opportuniste – au travers de gens comme Burns – était de plus en plus remis en question par une nouvelle génération de militants.

    Finalement, tant dans la Société Mattachine qu’au sein d’un groupe conservateur de lesbiennes appelé "Les Filles de Bilitis" (FB), la direction préféra dissoudre la structure nationale plutôt que de voir l’organisation tomber dans les mains de radicaux. Des individus et des sections de la SM et des FB continuèrent alors à se voir sur une base non-encadrée. Ca et là, des dirigeants militants parvinrent à gagner des majorités, souvent après des batailles colossales.

    Dans ce processus, une figure influente était l’astronome Frank Kameny, qui avait été viré d’un emploi gouvernemental dans le cadre des purges anti-gay. Après s’être battu sans succès contre sa victimisation dans les tribunaux, il conclut que le gouvernement américain "lui avait déclaré la guerre" et décida de devenir un militant pour les droits des homosexuels à plein temps. Kameny était répulsif quant à la vieille direction du mouvement homo, et à leur allégeance lâche envers l’establishment médical : "L’esprit plein de préjugés est imperméable à l’information, et n’est pas éducable.", "Les experts réels en matière d’homosexualité sont des homosexuels", affirmait-il.

    Faisant référence aux organisations de la campagne pour les droits civils, Frank Kameny notait : "Je ne vois pas le NAACP et le CORE s’inquiéter de savoir quel chromosome ou quelle gène produit une peau noire, ou de la possibilité de blanchir le Noir." De la même manière que les luttes des Noirs américains avaient vu émerger des slogans tels que "le Noir est Beau", Kameny inventa le slogan "l’Homosexuel est Bon" et persuada finalement le mouvement homo de l’adopter dans l’élan de Stonewall.

    Les militants homos entamèrent des campagnes avec des piquets publics et des affiches, ainsi que d’autres actions directes, et montèrent également une offensive contre les méthodes de persécution de la police et du gouvernement, contre l’interdiction de l’emploi pour les gays et sur toute une série d’autres questions. Les dirigeants conservateurs de la SM et des FB avaient conseillé à leurs membres de garder leur distance de l’environnement ouvrier des bars gay.

    Mais à partir des années 1960, à San Francisco, pour la première fois, les bars gay devinrent des forums importants pour les activistes afin de recruter aux groupes gay et organiser des campagnes. D’Emilio décrit ce phénomène comme "la fusion entre le mouvement et la contre-culture."

    Vingt ans après qu’Harry Hay ait conçu l’idée de la Société Mattachine, la société américaine avait subi une transformation radicale. La montée d’un mouvement des femmes (avec des lesbiennes en vue parmi les organisatrices), le changement parmi la population noire d’un mouvement des droits civils vers un mouvement de "pouvoir noir", – mouvements dont certains embrassaient les idées socialistes – la révolte contre la guerre américaine au Viêt-Nam sur les campus américains, l’influence des événements de mai 1968 en France, ainsi que les effets secondaires d’autres mouvements de rébellion contre l’establishment tels que les hippies, tout ça contribua à donner aux campagnes gays et lesbiennes un caractère plus militant.

    Un courant au sein du Front de Libération Gay soutenait qu’une lutte révolutionnaire contre le capitalisme était nécessaire pour construire une société socialiste et en finir définitivement avec l’oppression de gays.

    Craig Rodwell conclut : "Il y avait un sentiment politique actif très volatil, particulièrement parmi la jeunesse … quand la nuit des Emeutes de Stonewall explosa, tout convergea en cet instant. Les gens demandent souvent ce qu’il y avait de spécial cette nuit-là… Il n’y avait pas une seule chose spéciale. C’était juste que tout venait ensemble et en même temps, un de ces moments dans l’histoire où lorsque que vous êtes présent, vous vous dites : ça y est, c’est ça ce que nous avons tant attendu. "

  • Crise économique, chômage et pauvreté

    La Banque Mondiale a récemment adapté ses données sur la pauvreté dans le monde. En 2000, elle estimait que 985 millions de personnes vivaient sous le seuil d’extrême pauvreté de 1 dollar par jour. Maintenant, il est question de 1,4 milliard de personnes qui vivent sous un seuil relevé à 1,25 dollar par jour… pour l’année 2005, il y a trois ans déjà.

    Par Emiel, MAS-Anvers

    Depuis lors s’est déclenchée la crise alimentaire, avec au bas mot 100 millions de personnes qui ont rejoint l’extrême pauvreté. Près d’un quart de la population mondiale risque donc de ne plus pouvoir se nourrir. Dans des dizaines de pays, des émeutes de la faim ont déjà éclaté.

    Selon les Nations Unies, il y aurait pourtant suffisamment de stocks sur la terre pour nourrir 12 milliards de personnes, deux fois la population mondiale. Où est donc le problème ? Une partie de la population mange trop et l’autre pas assez ? La prospérité grandissante (d’une petite minorité) de Chinois en est-elle la cause ? Ou alors la consommation de viande en Occident ? Sans vanter pour autant les habitudes alimentaires occidentales, nous pensons que ces raisons sont très insuffisantes.

    La distribution inégale des richesses découle de la manière dont est orientée la production, où les profits passent bien avant les besoins. Ainsi, l’université d’Arizona a-t-elle calculé qu’aux Etats-Unis, près de la moitié de la nourriture produite est jetée, notamment parce que la date de péremption a été dépassée (1).

    Autrement dit, la nourriture excédentaire attend d’être périmée et jetée plutôt que d’être mise à disposition de ceux qui ont faim. L’exemple le plus pervers de la course aux profits en matière d’alimentation est la spéculation sur les céréales et les matières premières qui fait exploser les prix.

    L’économie entre en récession

    Aux Etats-Unis, la récession signifie une hausse de la pauvreté, du chômage, des expulsions et des saisies de logements. L’effondrement du marché immobilier américain a donné naissance à des nouveaux quartiers de tentes et de taudis. Les occupants de 2 millions de logements ont été expulsés et, selon les économistes, ce chiffre peut encore grimper jusqu’à 10 millions. L’an dernier, il y avait 37,3 millions de pauvres aux USA, soit 1 million de plus que l’année précédente. 18% des Américains de moins de dix-huit ans vivent dans la pauvreté.

    Le capitalisme américain n’est pas encore sorti d’affaire. Son secteur financier est évidemment le plus atteint. Mais la crise a déjà commencé à se développer dans l’économie réelle, aux Etats-Unis, mais aussi en Europe et en Asie. Les travailleurs du secteur financier ont été les premiers touchés, plus de 60.000 emplois ont déjà disparu essentiellement à New York et à Londres. En Grande-Bretagne, on estime que le chômage va augmenter d’un demi-million. C’est une condamnation sans appel du capitalisme et du néolibéralisme. La domination du marché à seulement conduit à ce qu’une poignée de milliardaires soit responsable de la misère de millions de personnes.

    En Europe, les perspectives de croissance sont mois après mois revues à la baisse et plusieurs pays sont déjà entrée en récession, ce qui signifie pour les salariés une baisse du pouvoir d’achat et des pertes d’emplois. Les travailleurs n’ont pas la chance de recevoir autant d’attention de la part des gouvernements que les grandes banques en crise. Car, si besoin est, celles-ci peuvent même être nationalisées pour éviter une faillite, comme ce fut le cas pour la Northern Rock Bank en Grande Bretagne ou encore pour les sociétés de crédit hypothécaires Freddie Mac et Fannie Mae aux USA. Pour sécuriser les bénéfices des actionnaires, la collectivité doit payer – ce que certains économistes bourgeois ont appelé sans rire « le socialisme pour les riches ». Mais, pour nos revendications salariales, il paraît qu’il n’y a pas de moyens…


    1. Humo, 09/09/08

  • Néolibéralisme en crise – la fin d’une époque

    Crise économique, politique et sociale

    Plus aucun économiste digne de ce nom ne se permet de nier l’existence d’une crise économique, même si, afin de ne pas effrayer la population, certains (comme le candidat républicain à la présidentielle US John McCain) osent encore affirmer que « les fondamentaux de notre économie sont forts ». Cette crise, qui est sans doute loin d’avoir atteint son pic et dont nous ne ressentons encore que partiellement les effets, aura inévitablement des répercussions sur la gestion du capitalisme et sur les conditions de vie de milliards de travailleurs.

    Dossier de Stéphane, MAS Liège

    Subprimes et pouvoir d’achat: la crise à tous les étages!

    Cette crise a débuté il y a un an comme une crise purement financière à partir de la crise des subprimes, ces prêts hypothécaires à grands risques réalisés par des sociétés de crédit US. Dans l’incapacité de rembourser leurs prêts, des centaines de milliers de familles américaines se sont retrouvées à la rue. Mais, plus grave pour les capitalistes, de nombreuses banques se sont ainsi retrouvées avec un sérieux manque à gagner.

    Cette crise financière n’est évidemment pas restée sans conséquence sur l’économie réelle et ce sont les travailleurs qui ont une fois de plus payé pour l’incapacité du capitalisme à gérer l’économie correctement. Ainsi, la crise financière s’est rapidement propagée à d’autres secteurs comme l’alimentation ou l’énergie (qui a attiré beaucoup de capitaux spéculatifs : 81% des contrats pétroliers au Nymex, la bourse des matières premières à New York, sont aux mains de spéculateurs) provoquant ainsi l’inflation que nous connaissons depuis maintenant plusieurs mois.

    Ensuite, la crise s’est étendue à la production en tant que telle; plongées dans la tourmente, une série d’entreprises publiques et privées ont dû « assainir » ou « restructurer » (cochez le mot le moins choquant) comme en Espagne où 300.000 postes ont été supprimés, surtout dans la construction, ou en Californie où 22.000 fonctionnaires ont été licenciés. Une entreprise comme General Motors (Opel, Saab, Daewoo, Cadillac, etc.) qui a connu une perte de 15 milliards de dollars ne va sans doute pas se tourner les pouces en voyant ses profits baisser mais elle va tenter de réduire ses coûts en attaquant les salaires et/ou en licenciant.

    Cette crise que nous ressentons déjà avec vigueur en Europe et dans le monde occidental est sûrement encore plus dure à vivre dans les pays néo-coloniaux comme l’Afrique par exemple où les émeutes de la faim de succèdent.

    Et alors que le tableau semble déjà plus que sombre, le FMI annonce que si, pour l’instant, les pertes sont estimées à 400 milliards de dollars, une seconde vague de crise est possible et que les pertes finales devraient se situer autour de 1.000 milliards de dollars. Bref, c’est la crise à tous les étages!

    Les vieilles tactiques ne fonctionnent plus…

    Au cours des « trente glorieuses » (de1945 à 1975), la croissance avait été très forte et les avantages sociaux acquis par les travailleurs avaient considérablement augmenté. Quand la crise a éclaté, au milieu des années ‘70, les capitalistes ont expliqué aux travailleurs qu’il fallait limiter ces acquis pour la survie de l’économie. Au cours des trente dernières années, à chaque fois qu’une crise a pointé le bout du nez à la porte de l’économie et que l’ombre de la diminution des profits s’est profilée, les capitalistes ont toujours mis en avant que les travailleurs devaient faire des sacrifices, qu’il fallait se serrer la ceinture tous ensemble, etc.

    Aujourd’hui ce n’est plus possible : la croissance bancale des années ‘90 et 2000 n’a aucunement profité aux travailleurs. Celle-ci s’est en effet réalisée non par un progrès général de la société mais par la surexploitation des travailleurs, assurée tant par la précarisation du travail que par l’arrivée d’une nouvelle main d’oeuvre bon marché désormais disponible dans les anciens pays à régime stalinien nouvellement entrés dans le jeu capitaliste.

    Les riches et leurs enfants d’abord !

    Depuis la fin des années ‘70 jusqu’à aujourd’hui, le dogme néo-libéral a régné en maître sur la planète et parmi les penseurs du capitalisme. Suivant ses théoriciens Milton Friedman et Friedrich Hayek, la non-intervention de l’État dans l’économie était la règle d’or. On a alors procédé à des privatisations à tour de bras.

    Aujourd’hui, l’immeuble est en feu et les capitalistes coincés à l’intérieur appellent l’État à la rescousse. Celui-ci, après maintes hésitations par peur que le mythe du néo-libéralisme ne s’effondre, a répondu favorablement et a clairement fait passé le message : ça sera les riches et leurs enfants d’abord !

    Ainsi par exemple, la banque britannique Northern Rock, qui avait joué avec le feu en investissant dans les subprimes et qui s’y étaient brûlée, a été nationalisée par le gouvernement travailliste afin d’éviter la faillite. Celui-ci a donc fait sienne la devise de « privatisation des bénéfices et collectivisation des pertes ». De leur côté, les pouvoirs publics US ont injecté des sommes faramineuses pour sauver les grandes sociétés de crédit Fanny Mae et Freddie Mac.

    Dans le même temps, ces mêmes gouvernements qui n’hésitent pas à dépenser des millions de dollars pour sauver des entreprises et le portefeuille de leurs actionnaires continuent d’affirmer que les caisses sont vides et que, malgré la baisse du pouvoir d’achat, des augmentations salariales sont impossibles. Pourtant, comme le dit le dicton « qui veut, peut ». En réalité, les gouvernements – qu’ils soient « sociaux-démocrates » comme c’est le cas en Grande-Bretagne ou « libéraux » comme aux Etats-Unis – ont bien montré qui ils souhaitaient sauver : l’État-pompier vient tirer des flammes les multinationales et leurs actionnaires et laisse les travailleurs sur le carreau.

    La Chine pour sauver la baraque ?

    Certains économistes capitalistes rêvent que la Chine vienne sauver le monde de la crise et/ou qu’elle prenne le relais des États-Unis comme leader économique mondial. Mais ne nous y trompons pas, la structure économique de la Chine est complètement différente de celle des États-Unis. Le marché US est depuis longtemps le marché d’écoulement en dernier ressort de la production mondiale. Depuis le début de la crise, la production trouve de moins en moins de débouchés. La Chine, elle, a une économie principalement dirigée vers l’exportation et, malgré les dires de tous les admirateurs de la « république populaire », le niveau de vie des Chinois n’augmente que très peu. De plus, la Chine n’a pas été non plus épargnée par la crise et les entreprises chinoises procèdent elles aussi à des licenciements.

    Certains estiment que les capitaux chinois et asiatiques pourraient sauver les entreprises occidentales et il est vrai qu’ils font actuellement tout pour ce qu’ils peuvent pour sauver le marché occidental sans lequel ils ne trouveraient plus de débouchés pour leurs produits.

    Ainsi les investissements des fonds souverains en Occident vont en augmentant. Ces « fonds souverains » sont des capitaux appartenant à un État ou dépendant fortement de celui-ci., comme par exemple l’Abu Dhabi Investment Authority qui investit à travers le monde les revenus pétroliers des Émirats Arabes Unis ou encore la China Investment Corporation qui gère des capitaux de l’État chinois.

    Ces capitaux ont, selon certains économistes, l’avantage d’être plus stables et, à l’inverse des capitaux purement privés, de moins chercher le profit à court terme en ayant une vision à plus long terme.

    La fin d’une époque

    Même si ces capitaux peuvent avoir un effet bénéfique pour l’économie, les investissements de ces fonds souverains ne sont pas nécessairement bien accueillis, les États voyant avec peu d’enthousiasme leurs entreprises passer sous le contrôle de fonds d’Etat étrangers. Il est en effet inévitable qu’entrent en contradiction les intérêts du pays dans lequel les capitaux sont investis et les intérêts du pays investisseur. Ainsi par exemple, l’acquisition de ports US par un fonds d’investissement de Dubaï, petite monarchie arabe du Golfe pourtant grand alliée des Etats-Unis, n’a pas plu au gouvernement de George Bush qui a immédiatement forcé celui-ci à les revendre.

    Nous voyons ici comment le néo-libéralisme, fondé sur le désinvestissement de l’État et le libre-échange absolu, peut être mis de côté en cas de crise et de menace pour « les intérêts stratégiques » du gouvernement US.

    Cette méfiance vis-à-vis de ces fonds avait été bien résumée par un journaliste financier américain qui déclarait il y a quelques mois « Voulons-nous que les communistes (la Chine) ou les terroristes (Abu Dhabi, Qatar) possèdent nos banques ? Je prendrai n’importe lequel, je pense, parce que nous sommes tellement désespérés » ou encore par le chef du fonds souverain d’investissement norvégien qui disait « Ils ne nous aiment pas mais ils veulent notre argent ».

    La crise augmentant, on voit de plus en plus clairement comment le libre-échangisme et la globalisation font place au « chacun pour sa pomme ».

    Quelles conséquences pour les travailleurs?

    La crise, en définitive, devrait donc créer des tensions fortes entre États, entre impérialismes mais aussi entre classes sociales.

    En s’approfondissant, la crise intensifiera aussi la lutte pour le contrôle des ressources essentielles car un retour du protectionnisme signifie que chaque État devra plus que jamais compter uniquement sur lui-même et devra donc contrôler de manière sûre des ressources comme le pétrole ou le gaz. On vient d’en voir un exemple avec la récente guerre entre la Russie et la Géorgie qui n’est pas sans rapport avec le fait que la Russie voit l’oléoduc Bakou-Tbilissi-Ceyhan passer à travers le territoire de la Géorgie (l’allié privilégié des États-Unis dans le Caucase).pour transporter le pétrole de la Mer Caspienne et de l’Asie centrale en contournant la Russie.

    Mais la crise économique et un retour en grâce de méthodes protectionnistes risquent aussi de stimuler la colère de millions de travailleurs. Si l’État est capable de nationaliser pour préserver les profits des actionnaires, pourquoi ne peut-il pas nationaliser pour préserver les emplois des travailleurs?

    Il est clair que les premières conclusions tirées par les travailleurs seront de demander à l’Etat des réponses concrètes à leurs problèmes concrets. Mais l’expérience et l’intervention des marxistes seront décisives pour démontrer aux travailleurs que l’État est par nature un État au service des capitalistes et qu’il défend les intérêts de ceux-ci et non ceux de la majorité de la population. Seule une société où la production serait orientée et gérée par les travailleurs peut permettre de répondre aux besoins profonds de ceux-ci. Seul le socialisme peut sortir l’humanité des crises, des guerres et de la misère.


    1. Jim Cramer, CNBC Finance News Network, NY Times, 20/01/2008

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  • Augmentation des prix, rébellion et pauvreté.

    La flambée des prix de la nourriture a récemment causé une tempête de protestations et ce partout à travers le monde. Ces grèves et manifestations ne sont que la réaction des ouvriers et paysans face à cette envolée des prix.

    Robert Bechert, Comité pour une Internationale Ouvrière, Londres (article publié le 23 avril sur socialistworld.net)

    Haiti, le Cameroun, l’Egypte ou l’Indonésie ne sont que quelques uns des pays qui ont connu récemment des protestations de masses.

    Si les envolées des prix sont choquantes, elles ne donnent qu’un aperçu seulement de ce qui est en train de se passer, des millions de personnes doivent en fait se battre pour arriver à nourrir leurs familles. Les médias ne cessent de nous rapporter ce qui se passe : le riz a augmenté de 75% en deux mois, le blé de 130% durant l’année dernière et en une seule journée, le riz a augmenté& mondialement de 10%.

    Des millions de personnes sont forcées d’économiser simplement sur ce qu’ils consacrent à la nourriture et des millions de personnes ressentent une colère immense. Au Salvador, les pauvres mangent deux fois moins qu’il y a un an. La Banque Mondiale a estimé que 100 millions de personnes en plus ont déjà été poussé dans «l’extrême pauvreté». Même dans les pays « développés », les prix augmentent : en Grande Bretagne, un test comparatif reprenant 24 produits de consommations courants a montré que leurs prix avaient augmenté de 15% en une année.

    Cette crise a même choqué les institutions capitalistes telles que le Fond Monétaire International ou la Banque Mondiale, principalement car elles en craignent les conséquences. Le président de la Banque Mondiale a déclaré que 33 pays étaient en proie à un «malaise social» à cause de la hausse des prix des denrées alimentaires. Le terme «malaise» est une sous estimation grossière de la situation : la pénurie alimentaire et l’inflation peuvent provoquer des révolutions.

    Les travailleurs commettraient une erreur en se reposant sur ces gens, ou sur des philanthropes, pour trouver une solution. Bien sur, ils pourraient organiser une aide d’urgence, mais c’est fondamentalement leur système – l’économie de marché – qui est à l’origine de la crise.

    Les demandes d’actions se multiplient.

    Mais, quelles sont les causes de la crise ?

    Clairement, un grand facteur de la crise est le chaos du marché «libre» et la spéculation qui l’accompagne. Loin d’être le fil conducteur qui guide les progrès humains, le marché aggrave l’inflation du prix de la nourriture. Comme la crise économique mondiale provenant des USA a provoqué un effondrement des possibilités de spéculations financières, les spéculateurs capitalistes se sont reportés sur la nourriture et les matières premières.

    Encore inondés des super profits datant de la dernière période de croissance économique, ils se sont accaparé les stocks de nourriture. Comme les gens sont bien obligés de manger pour vivre, ils pensaient ainsi pouvoir s’enrichir encore plus en spéculant sur les prix de la nourriture et des autres matières premières. Depuis le début de l’année, le nombre d’accords financiers conclus quotidiennement sur le marché CME de Chicago (Chicago Mercantile Exchange – bourse de produits des matières premières, particulièrement au niveau de l’alimentation) a augmenté de 20%. L’Ethiopie a tenté de lutter contre cette spéculation en interdisant les accords dans « le futur » (des paris sur les prix à venir de la nourriture et des matières premières). Mais l’action d’un seul pays, a fortiori s’il est issu du monde néocolonial, n’a qu’un impact limité.

    Cependant, la spéculation n’est pas la seule cause de la hausse des prix. Certaines autres causes telles que la demande croissante de nourriture, le changement climatique ou encore les «bio» carburants ont été très souvent mentionnés. Lester Brown, directeur du Earth Policy Institute à Washington a déclaré, pas plus tard qu’en avril dernier, que la surface utilisée aux USA pour produire des biocarburants ces deux dernières années aurait pu fournir à 250 millions de personnes leurs rations en grain.

    L’hebdomadaire de droite « The Economist » a involontairement mentionné un autre facteur de la hausse des prix : l’offensive néolibérale depuis les années 1980. « The Economist » a expliqué que les rendements des nouvelles récoltes avaient tendance à diminuer naturellement, et que c’était seulement en produisant de nouvelles variétés que l’on pouvait maintenir ou faire progresser les rendements.

    Cependant, « la plupart des recherches agronomiques sont financées par des gouvernements qui, dans les années 1980, ont commencé à réduire (…) les dépenses (…) ils ont préféré faire intervenir le secteur privé. Mais, beaucoup des entreprises privées engagées pour remplacer les chercheurs d’Etats se sont révélé n’être intéressés que par le profit. La part de l’agriculture dans les dépenses publiques dans les pays en voie de développement a chuté de moitié entre 1980 et 2004. Ce déclin a eu un impact inévitable… Entre les années 1960 et 1980, dans les pays en voie de développement, le rendement des céréales principales augmentait de 3 à 6% par année. Maintenant, la croissance annuelle est revenue à 1 à 2%, en dessous de l’augmentation de la demande. « Nous payons le prix de 15 ans de négligence » a déclaré Bob Ziegler, directeur de l’Institut international de recherche sur le riz, basé aux Philippines. » (The Economist, 19 avril 2008).

    En réalité, ce n’est pas de la « négligence » mais le dogme néolibéral et la recherche de nouvelles zones où faire des profits qui s’est ajouté à cette crise alimentaire.

    Qu’est ce qui peut être fait ?

    Dans beaucoup de pays, des voix se font entendre pour instaurer un contrôle du prix de la nourriture, pour introduire ou défendre les subsides pour la nourriture ou encore pour une hausse des salaires. Les syndicats devraient exiger une hausse des salaires qui suit l’inflation. Les salaires devraient être liés à un indice des prix qui correspondrait réellement au coût de la vie. Cependant, de telles mesures, bien que bienvenues, ne seraient que provisoire.

    Le contrôle de l’approvisionnement en nourriture doit être immédiatement retiré des mains des spéculateurs, des négociants internationaux et des grosses compagnies agroalimentaires. Le mouvement ouvrier doit exiger que ces institutions soient nationalisées pour permettre la mise en place d’un plan de distribution de nourriture, à des prix raisonnables, pour tous.

    Mais une telle nationalisation devrait être contrôlée démocratiquement au rique d’être utilisée par les gouvernements pour s’enrichir eux mêmes ainsi que leurs alliés capitalistes.

    Dans beaucoup de pays, le contrôle de l’importation ou de l’exportation a toujours été source de corruption et de mercantilisme. L’argentine, le Vietnam ou l’Inde ont déjà interdit certaines exportations de nourriture ou ont instauré des taxes sur celles-ci. Mais de telles mesures n’abaissent pas automatiquement le coût de la nourriture, et peuvent mener de petits fermiers à la rébellion.

    Seul un contrôle et une gestion des ressources par les travailleurs combinée à une comptabilité ouverte pourra assurer la répartition équitable de la nourriture et ce sans marché noir. Les petits fermiers et les petits commerçants doivent donc se voir attribuer des revenus et une place dans la chaîne de distribution de la nourriture. Si le rationnement doit être imposé, il doit être laissé sous le contrôle démocratique des travailleurs, pas sous celui des gouvernements corrompus servant des élites.

    Des mesures doivent être prises pour « booster » l’approvisionnement en nourriture. Les entreprises produisant les graines, le fertilisant,… doivent également être nationalisées sous le contrôle des travailleurs. Alors, de nouvelles récoltes pourront être développées pour répondre aux besoins et non pas pour réaliser des profits. Les engrais pourront aussi être rendus plus accessibles.

    Les banques, dont beaucoup ne survivent plus que grâce aux aides de l’Etat, devraient également être nationalisées et leurs ressources employées pour fournir aux petits fermiers des crédits bon marchés.

    Les grands producteurs agricoles, eux aussi, devraient encore être nationalisés. Sur cette base, il serait possible de commencer à planifier l’augmentation de la production de nourriture avec l’aide de progrès dans l’irrigation ou dans d’autres techniques, pour répondre aux besoins et non pour s’adapter au marché.

    Pour sauver notre planète, le capitalisme doit être éliminé.

    Fondamentalement, cela signifie contester le système capitaliste en lui-même. La crise financière a vu des banquiers courir auprès des gouvernements pour demander de l’aide. L’argument néo libéral selon lequel l’Etat ne peut intervenir dans le marché s’écroule, poignardé en plein cœur par les capitalistes eux mêmes.

    Cependant, l’Etat n’est pas neutre. Dans les pays capitalistes, l’Etat agit pour protéger les intérêts des capitalistes. La nationalisation d’entreprises, voir même d’un secteur entier de l’économie, n’est pas en soi une cassure vis-à-vis du capitalisme. La propriété publique avec la nationalisation des secteurs clés de l’économie est la vraie alternative au système du marché qui produit régulièrement des convulsions.

    Déjà dans un certain nombre de pays, ce sont les organisations de travailleurs, telles que les syndicats, qui ont été forcées de défendre les « norme de vie ». Le mouvement des travailleurs a la responsabilité d’agir, de prévenir la faim et d’offrir une alternative. Les travailleurs, organisés internationalement, ont la capacité de décider de l’utilisation des ressources du monde.

    Cependant, ce n’est pas juste la question de la popularisation de l’alternative socialiste; c’est un but. Récemment, lors d’un discours aux Nations Unies à New York, le président bolivien, Evo Morales, a déclaré que : « pour sauver la planète, il faut éliminer le capitalisme. » C’est absolument correct, mais de tels appels verbaux doivent mener à des conclusions concrètes à moins de ne rester que du vent. Si Morales est sérieux, son gouvernement peut servir d’exemple en mobilisant les pauvres et les travailleurs pour briser le capitalisme, et montrer que cela peut être fait. Cela sera un appel aux pauvres et aux travailleurs du monde entier pour suivre le même parcours.

    L’impact brutal de l’augmentation des prix de l’alimentation va, comme le craint la Banque Mondiale, ouvrir une nouvelle période de lutes révolutionnaires et de possibilités pour construire une force socialiste de masse capable de mettre fin au capitalisme, capable de mettre fin à la misère, capable de mettre fin à la pauvreté et à la faim.


    Liens:

  • Le coût des études doit baisser !

    Enseignement supérieur et universitaire

    La Fédération des Etudiants francophones (FEF) et la Vlaamse Vereniging van Studenten (VVS) lancent une campagne contre la forte augmentation du coût des études dans l’enseignement supérieur.

    La FEF et la VVS rappellent que la Belgique a signé en 1983 le Pacte des Nations-Unies connu sous le nom de Pacte de New York. Celui-ci stipule dans son article 13 que « l’enseignement supérieur doit être rendu accessible à tous, en pleine égalité (…) notamment par l’instauration progressive de la gratuité ». Pour la première fois aussi depuis longtemps, une vieille revendication d’Etudiants de Gauche Actifs (EGA, l’organisation étudiante du MAS) refait également surface, celle d’un salaire étudiant. Selon la FEF, les coûts des études ont atteint en moyenne 6.000 à 7.000 euros par an pour les étudiants qui habitent chez leurs parents et 10.000 à 12.000 euros pour les étudiants kotteurs !

    Ce sont surtout les droits d’inscription, le logement, le transport et l’alimentation qui prennent la plus grosse part du budget. Le minerval universitaire coûtait l’équivalent de 250 euros en 1983 ; il est aujourd’hui de 789 euros (et l’an prochain, il montera à 820 euros). Les prix du logement ont augmenté d’environ 60 % en dix ans. A cela s’ajoutent les augmentations générales des prix, entre autre dans l’alimentation et l’énergie (ces dernières ont en outre eu des répercussions sur les prix des transports). Et il faut également tenir compte d’autres frais supplémentaires car il est devenu impossible d’étudier sans ordinateur ni connexion internet.

    Pour renverser la situation, EGA affirme qu’il faut absolument investir afin que l’enseignement supérieur devienne accessible : plus de moyens pour les services sociaux comme les logements, les repas bons marché, l’accès gratuit à internet, un accès à des ordinateurs,…

    Ceci nécessite aussi plus de personnel, avec un salaire décent plutôt qu’un statut bidon. Les moyens financiers doivent venir de l’Etat qui doit augmenter le budget de l’enseignement jusqu’à 7 % du PIB (Produit Intérieur Brut), une revendication qu’EGA met déjà en avant depuis des années.

    Enseignement supérieur Flamand

    De plus en plus ouvert au marché, de moins en moins accessible aux étudiants

    Plus de 100 formations sont menacées dans l’enseignement supérieur flamand par une nouvelle vague de restrictions qui visent à faire disparaître des petites orientations.

    Comment faire cela le plus simplement possible ? Le Ministre de l’Enseignement flamand Vandenbroucke (SP.a) – qui a déjà été à la base de plusieurs plans de rationalisation de l’enseignement supérieur et universitaire flamand ces dernières années – veut supprimer toutes les orientations qui comptent moins de 115 étudiants. Quelque 130 formations sont ainsi menacées dans les Hautes Ecoles et les Universités.

    C’est surtout dans les orientations artistiques et scientifiques que les coupes devraient être faites si cela ne dépendait que du ministre. Alors que tous les pédagogues savent que de petits groupes permettent d’avantage d’offrir des formations de qualité (parce qu’il y a un contact personnel avec les étudiants et un suivi), Vandenbroucke instaure la frontière absurde du minimum de 115 étudiants pour chaque formation. Sinon, le seul choix possible est de fusionner ou de disparaître.

    La commission qui devait préparer la «rationalisation» de l’enseignement supérieur a mis un an pour rédiger un rapport. La règle des 115 y est centrale et serait introduite progressivement en commençant par une première norme de 80 étudiants par formation en baccalauréat pour 2012.

    Vandenbroucke veut introduire une logique de management dans l’enseignement supérieur : ce ne sont pas les étudiants qui comptent, mais l’efficacité économique.

    La démocratisation de l’enseignement supérieur n’a pas eu lieu

    Steven Groenez , chercheur à l’Institut supérieur du Travail (HIVA) de Louvain, a réalisé une étude sur la démocratisation de l’enseignement supérieur. Il est arrivé à une conclusion frappante : les inégalités n’ont presque pas changé depuis la Deuxième Guerre Mondiale.

    Les enfants d’ouvriers ont quatre fois moins de chances de franchir le cap de l’enseignement supérieur que les enfants des employés supérieurs. Actuellement, il y a plus d’enfants de familles ouvrières qui étudient, et pourtant « ils n’ont pas les mêmes chances » selon Groenez. « Le nombre d’étudiants issus de groupes sociaux inférieurs a certes progressé, mais celui des étudiants issus des groupes sociaux plus favorisés a progressé tout autant ».

    L’inégalité commence d’ailleurs déjà à un âge précoce, dans l’enseignement primaire et secondaire.

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