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  • USA. La caravane des migrants : la corruption du capitalisme mise en lumière

    Une caravane de milliers de migrants s’est constituée à Tijuana, à la frontière américano-mexicaine, près de San Diego. Migrants demandeurs d’asile fuyant la violence dans leurs pays d’origine, le Honduras, le Guatemala et le Salvador, ils ont voyagé pendant des semaines rien que pour atteindre la frontière. À leur arrivée, ils ont été accueillis avec une frontière militarisée et des gaz lacrymogènes. L’administration Trump a qualifié la caravane d’invasion de terroristes et de gangsters financée par George Soros. Cependant, les travailleurs doivent voir cette manifestation tragique pour ce qu’elle est vraiment : une mise en accusation du capitalisme mondial.

    Par Christopher Carroll, Socialist Alternative (Etats-Unis)

    La réponse de Trump et le manque de réponse des démocrates

    À l’approche des élections de mi-mandat, Trump a commandé à la hâte 5 800 soldats à la frontière américano-mexicaine. Nous devrions voir cela pour ce que c’est : une manœuvre électorale grossière et farfelue, conçue pour enflammer la base électorale de Trump. Suite à cette manœuvre cynique, Trump a presque complètement cessé de parler de la caravane après le jour du scrutin, comme l’ont souligné certains médias.

    Pendant ce temps, les troupes sont occupées à installer des barbelés tout en pratiquant des scénarios de jeu de guerre contre une caravane de personnes âgées, d’enfants et de parents épuisés. Faisant écho à son allié, le premier ministre israélien Benjamin Netanyahu, Trump a déclaré : «?S’ils lancent des pierres, nos militaires réagiront. J’ai dit [aux officiers de la garde nationale] de considérer [les pierres] comme un fusil?». Les groupes anti-immigrés ayant des antécédents violents, comme les Minutemen, sont également à la frontière, sous l’impulsion de la rhétorique vile et haineuse de Trump.

    L’asile est un processus d’obtention de la résidence dans un autre pays, car il n’est pas sûr pour vous de rester dans votre pays d’origine en raison de la persécution ou d’autres raisons. Pour pouvoir demander l’asile aux États-Unis, vous devez déjà être aux États-Unis. Ainsi, le fait de refuser l’entrée aux personnes est l’une des tactiques de la droite pour empêcher les migrants de recevoir l’asile. L’une des premières démarches de Trump a été de refuser l’asile à toute personne entrant dans le pays en dehors d’un point d’entrée, créant ainsi un nouvel obstacle à l’application. En réalité, Trump tente de mettre fin à l’application d’un droit humain internationalement reconnu (même s’il est souvent violé dans la pratique) à la frontière du sud. Bien entendu, cette «?interdiction d’asile?» serait contestée devant les tribunaux, mais même si un juge fédéral l’invalide, nous ne pouvons pas compter sur la Cour suprême pour défendre le droit d’asile.

    Les migrants ont commencé à atteindre la frontière le 20 novembre. Trump a ordonné que seuls 100 demandeurs d’asile par jour puissent être traités. Cela a entraîné des retards importants et une tension accrue, aboutissant à l’utilisation de gaz lacrymogène et de balles en caoutchouc par les troupes américaines sur des migrants sans défense. Certes, une poignée de roches ne fera pas tomber les militaires les plus puissants de la planète. Comme pour toutes choses venant de Trump, cette crise de l’immigration actuelle a été dramatisée à l’extrême. Ce n’est pas seulement aux États-Unis : le nouveau gouvernement italien dans lequel un parti d’extrême droite joue un rôle clé refuse d’autoriser tout navire de migrants en provenance d’Afrique du Nord à débarquer. En Hongrie, le gouvernement de droite a construit une barrière frontalière pour empêcher l’entrée de migrants en provenance de «?pays musulmans?».

    Ces dernières années, la xénophobie à ciel ouvert a pris de l’ampleur, et est activement encouragée par la droite, en particulier par Trump. Historiquement, des sections de la classe dirigeante ont attisé la xénophobie afin d’exploiter la peur et l’insécurité économique de certaines couches de la classe ouvrière. La grande majorité des travailleurs américains font face à une économie sans emplois aux salaires décents, offrant des emplois de plus en plus mal rémunérés, non syndiqués, et les privant de services sociaux vitaux.

    Le discours anti-migrants ressemble à ceci : les migrants viennent soit pour occuper des emplois de travailleurs américains, soit pour se livrer à des activités criminelles. Le nouveau tournant dans l’ère post-11 septembre est la désinformation selon laquelle des terroristes djihadistes pénètrent dans la frontière au sud alors qu’ils se cachent parmi les demandeurs d’asile. Mais les migrants n’ont pas créé les conditions économiques qui laissent tant de travailleurs américains sans emploi, appauvris et profondément anxieux – ce sont les grandes entreprises et le système économique capitaliste qui le font. Les migrants réagissent simplement à des conditions économiques similaires, souvent plus graves, dans leur propre pays.

    Pendant ce temps, la classe dirigeante bénéficie une fois de plus de l’opportunité de semer une division artificielle parmi la classe ouvrière. Manipulant ses conditions économiques médiocres et à l’étranger, la classe dirigeante s’engage dans un exercice d’équilibre qui cherche à acquérir un flux constant de main-d’œuvre migrante exploitable, tout en menaçant d’expulsion ces travailleurs afin de renforcer leur statut de deuxième classe. Dans le passé, les grandes entreprises américaines ont soutenu la «?réforme de l’immigration?» tant qu’elles conservent un statut de deuxième classe pour la plupart des «?sans-papiers?» actuels.

    Cette main-d’œuvre migrante bon marché contribue également à réduire les niveaux de salaire des travailleurs nés aux États-Unis. La déportation sert également à intimider les travailleurs immigrés pour qu’ils n’adhèrent pas à un syndicat, tout comme la menace de sous-traiter leurs emplois à l’étranger dissuade les travailleurs nés aux États-Unis de s’engager dans des activités syndicales.

    La direction du parti démocrate se présente comme opposée au fanatisme de Trump et aux attaques contre les migrants. Elle s’est opposée à la construction du mur et à la séparation des familles; certains démocrates influents sont allés plus loin et ont soutenu l’appel à «?abolir ICE?» (United States Immigration and Customs Enforcement, agence de police douanière et de contrôle des frontières). Mais ont cédé maintes et maintes fois au moment décisif. Et bien sûr, l’administration Obama a déporté plus de personnes que toutes les autres administrations précédentes combinées! À ce stade, les démocrates ne semblent avoir aucune politique d’immigration cohérente.

    La politique d’immigration américaine est un désastre humanitaire. Elle est anti-ouvrière et de plus en plus agressive et brutale. ICE détient actuellement 44.000 personnes. Des archives judiciaires récentes montrent qu’il reste encore 171 enfants séparés de leur famille et détenus aux États-Unis plus de quatre mois après qu’un juge ait ordonné à l’administration Trump de réunir toutes les familles séparées à la frontière américano-mexicaine.

    Mais à un niveau plus profond, toute la «?crise?» à la frontière du sud est fabriquée. Plus tôt cette année, un titre dans le New York Times disait tout : «?Les postes-frontière ont diminué depuis des années, malgré les déclarations de crise de l’immigration clandestine?» (20/06/18). La plus grande source d’immigration aux États-Unis aujourd’hui vient d’Asie.

    Pourquoi la caravane s’est-elle développée?

    Toutes les démarches de l’administration Trump ont été soutenues par une campagne de propagande soutenue qui tente de décrire les migrants désespérés comme une armée envahissante de terroristes et de gangsters.

    Cependant, il y a de vraies personnes et d’importants problèmes en jeu. Les migrants de la caravane sont des personnes en quête d’asile qui fuient la misère et la désintégration violente de la société.

    Voici un échantillon de ce que les migrants ont dû affronter au cours de leur voyage depuis l’Amérique centrale : extorsion de fonds par la police; extorsion par des gangs organisés; les violences d’État commises par des militaires mexicains à la frontière entre le Guatemala et le Mexique; traversées de rivières dangereuses avec des nourrissons, des enfants et des personnes âgées; faim constante, déshydratation et épuisement. Historiquement, la migration en solo a été une expérience encore plus périlleuse pour les travailleurs, en particulier les femmes victimes d’agression et de viol. Il convient de noter que les caravanes de migrants ne sont pas un phénomène nouveau. En raison des dangers de voyager à travers le Mexique, les migrants trouvent qu’il est plus sûr et moins coûteux de voyager par groupes au Nord. La caravane actuelle a été créée au départ pour des raisons de sécurité, pas pour envahir les États-Unis.

    Histoire de l’impérialisme américain

    La politique étrangère américaine, particulièrement brutale en Amérique centrale, a conduit à des régimes particulièrement brutaux et à des zones de domination des cartels de la drogue. C’est le résultat de la politique de «?guerre à la drogue?» menée par les administrations américaines successives. Des centaines de milliers de personnes fuient la violence et l’instabilité. L’argent des contribuables américains a également été utilisé pour financer la School of the Americas de Fort Benning, en Géorgie, où des officiers de l’armée de plusieurs pays d’Amérique latine ont été formés à la contre-insurrection et à la torture.

    Un exemple récent est le Honduras où Barack Obama et Hillary Clinton (quand elle était secrétaire d’État) ont soutenu le coup d’État militaire de 2009 du président Zelaya, un populiste de gauche qui avait adopté de légères réformes du travail et de la terre. Après des élections factices soutenues par l’administration Obama, plusieurs militants du Front national de résistance populaire et plusieurs journalistes ont disparu, rappelant ainsi l’histoire profondément répressive de la région. Notamment en 2016, la dirigeante environnementale et autochtone Berta Caceres a été assassinée après des années de lutte contre les inégalités, la dégradation de l’environnement et le pouvoir des multinationales centrées autour du barrage hydroélectrique Agua Zarca.

    Sur le plan économique, les accords commerciaux multinationaux successifs, tels que l’Accord de libre-échange centre-américain (CAFTA), ont entraîné une augmentation des inégalités et une pauvreté extrême. Ces accords garantissent le statut d’une toute petite élite dirigeante qui supervise le sous-développement permanent de leurs pays respectifs pendant que les États-Unis exploitent leurs matières premières et leur main-d’œuvre bon marché. Les peuples d’Amérique centrale ont besoin d’une coopération régionale fondée sur la solidarité de la classe ouvrière et non sur les bénéfices des multinationales. Une telle confédération socialiste des Amériques entraînerait un transfert massif de ressources qui profiterait énormément aux pays et régions les plus pauvres et permettrait aux populations de vivre en sécurité avec des emplois décents dans leur pays d’origine.

    Solidarité des travailleurs et travailleuses!

    Soyons clairs, chers collègues : les migrants sont des travailleurs et travailleuses qui demandent l’asile à des gouvernements répressifs et cherchent désespérément du travail pour pouvoir subvenir à leurs besoins et à ceux de leur famille. Ce ne sont pas des terroristes. Ils et elles ne sont pas des gangsters. Ce sont des ouvriers. Nos sœurs et frères, nos nièces et nos neveux. Des innocents liés dans un système coupable. Un système coupable d’exploitation, de privation et de désespoir. Coupable de négligence cruelle ou d’oppression meurtrière.

    Le Capital ne reconnaît pas les frontières nationales. Il traverse librement les frontières à la recherche de profits, laissant derrière lui la misère et la destruction. Les forces puissantes qui contraignent ces migrants, ces réfugiés économiques et demandeurs d’asile, sont produites par le capitalisme. Le chaos du marché mondial et la soif de profit impérialiste déplacent des millions de travailleurs et de pauvres dans le monde entier.

    Le seul moyen de garantir l’élévation du niveau de vie de tous les travailleurs est d’exiger des droits et des avantages pour tous les travailleurs. De plus, les syndicats doivent jouer un rôle actif et décisif dans le dossier de l’immigration, rejetant et plaidant contre les idées anti-immigration.

    Ce que Socialist Alternative demande :

    • Retirer les troupes de la frontière immédiatement. Non à un mur frontière militarisé.
    • Construire un mouvement pour défendre les immigrant·e·s de la violence et de l’intimidation de la droite;
    • Embaucher plus de personnes pour traiter toutes les demandes d’asile dès que possible;
    • Les entreprises américaines ont réalisé des milliards de dollars en exploitant l’Amérique centrale, qu’on impose à ces grandes entreprises de payer pour la réinstallation des réfugié·e·s et des demandeurs d’asile, tout en construisant des logements abordables pour tous;
    • Abolir ICE et mettre fin aux politiques de détention inhumaine et d’expulsion massive, ainsi que redonner des droits légaux complets pour tou·te·s les immigrants;
    • Mettre sur pied un programme massif de reconstruction des infrastructures nationales sur des lignes vertes, créant des millions d’emplois syndiqués bien payés pour les non-migrants et les migrants. Taxer les grandes entreprises pour financer une éducation, un logement et des soins de santé de qualité pour tous;
    • Instaurer un salaire minimum national de 15 $ et des droits syndicaux pour tous les travailleurs.

    La caravane de migrants à laquelle nous assistons n’est pas le théâtre de l’absurde. C’est le réel dans sa forme la plus brute et inflexible. C’est une mise en accusation du capitalisme et de l’impérialisme en temps réel. Un miroir brisé appelant tous les travailleurs à la solidarité. Dernière révélation du choix ultime de l’humanité : la barbarie ou le socialisme.

  • Mexique : Soulèvement de la jeunesse contre la violence du système

    Par Izquierda Revolucionaria (section mexicaine du Comité pour une Internationale Ouvrière)

    Ces derniers jours, un mouvement étudiant massif a secoué le Mexique. Cette démonstration de force inspirante provient de la communauté étudiante de l’UNAM (la principale université de Mexico) et d’autres campus qui se sont unis pour expulser des campus les groupes fascistes “porros”. Plus de 39 campus ont démocratiquement procédé à un vote au cours d’assemblées de masse visant à entrer en grève pour 24 à 72 heures.

    Les jeunes en lutte pour leur avenir

    Cette atmosphère est la réflexion de l’énorme confiance que le mouvement étudiant a gagnée après la défaite historique de la droite et l’élection d’AMLO (Andrés Manuel López Obrador) lors des élections du 1er juillet. Ces élections ont illustré l’énorme mécontentement social accumulé au fil des ans et qui s’est exprimé dans des luttes dispersées mais très combatives.

    Ce mouvement étudiant montre une fois encore au grand jour non seulement l’ampleur de la colère présente parmi la jeunesse mais aussi le potentiel révolutionnaire qu’elle représente.

    Le 3 septembre, le mouvement a été victime d’une provocation. Une cinquantaine de voyous “porros” ont interrompu une manifestation de jeunes qui réclamaient une plus grande sécurité sur le campus, la fin de la répression, la fin des féminicides et d’autres revendications contre le prix des études, la violence et les directions autoritaires dans les écoles et universités. Cette attaque a fait 6 blessés parmi les étudiants, dont 2 sont toujours dans un état grave.

    Une première victoire

    Les “porros” sont des troupes de choc issus des “porras” (groupes de supporters hooligans). Il s’agit d’une couverture pour des gangs à la solde des autorités universitaires. Formés et contrôlés par des hauts fonctionnaires et des politiciens, ils jouent depuis longtemps un rôle de premier plan dans la violence visant à affaiblir le mouvement étudiant et ses dirigeants les plus importants. Ils sont en réalité très faibles. L’attaque préméditée que nous avons subie le 3 septembre a été combattue avec courage et force par le mouvement, qui a repoussé les voyous et les a forcés à quitter le campus. Maintenant, avec la force que l’expansion du mouvement a montrée, nous devons continuer jusqu’à ce que ces groupes aient été définitivement expulsés de l’UNAM.

    La pression du mouvement s’est déjà fait sentir dans la direction académique de l’UNAM. Une récente déclaration d’Enrique Graue, le recteur de l’UNAM, condamnant les événements et annonçant l’expulsion de 18 de ces voyous de l’université, constitue une première et grande victoire pour le mouvement. Personne ne nous a rien donné et cette réaction est le résultat de la lutte des étudiants et des grèves qui ont eu lieu.

    Continuons la lutte !

    Le combat doit se poursuivre à la suite de cette première victoire. L’associé le plus notoire des “porros”, Benjamin Barajas, un promoteur connu des gangs, continue d’être dans la gestion du Collège des Sciences et des Lettres. Nous exigeons son expulsion immédiate de tout bureau de l’UNAM. Il est également essentiel de dénoncer les actions de la sécurité de l’UNAM et d’exiger le limogeage de Teofilo Licona (dit “le cobra”) qui a permis l’attentat du 3 septembre.

    Le recteur doit mettre en œuvre ces exigences ou démissionner.

    Le problème doit être résolu à la racine. Nous avons besoin d’une université démocratique qui permette aux étudiants de s’exprimer librement, de faire preuve d’esprit critique et de se développer réellement dans une atmosphère sûre, sans harcèlement ni violence. Les hauts fonctionnaires devraient être élus par la base avec la participation de toute la communauté universitaire. Fini les fonctionnaires corrompus et autoritaires ! Si nous n’éliminons pas tous ces instigateurs de violence, les “porros” se regrouperont tôt ou tard.

    Aucun étudiant ne devrait être obligé de payer des frais de scolarité pour fréquenter l’université, comme c’est le cas dans des campus comme CCH Azcapotzalco. L’université libre est le résultat des impôts payés par des millions de travailleurs et de jeunes. L’argent pour une éducation de qualité existe, mais il est mal distribué et dépensé pour la corruption et les salaires très élevés des cadres supérieurs.

    Etendre et unir la lutte

    Les manifestations de solidarité ont été magnifiques et les grèves de solidarité qui ont eu lieu dans tout le pays montrent le potentiel massif de ce mouvement. Il est tout à fait possible de construire une lutte nationale contre la violence à l’égard des jeunes – victimes de ce que l’on appelle la “guerre contre la drogue” -, contre les féminicides, contre les gangs fascistes et contre la criminalité. La violence structurelle que nous subissons sous le capitalisme ne peut être arrêtée que par une lutte de masse, consciente et organisée !

    Le Sindicato de Estudiantes et Izquierda Revolucionaria (section mexicaine du Comité pour une Internationale Ouvrière au Mexique) appellent à la constitution de comités de lutte dans chaque campus et de brigades d’information pour lutter contre le silence et le mensonge des médias. Nous croyons également que notre arme la plus puissante est l’unité avec la classe ouvrière, dans la lutte contre les mégaprojets d’infrastructure capitalistes qui ruinent le pays, et avec tous les groupes et organisations qui sont victimes de la violence du système et de l’Etat.

  • Mexique : AMLO remporte une victoire historique

    Le texte ci-dessous est la déclaration initiale d’Izquierda Revolucionaria (section mexicaine du Comité pour une Internationale Ouvrière) relative aux élections présidentielles mexicaines. Plus de détails seront publiés sous peu sur socialistworld.net et socialisme.be.

    La victoire écrasante d’Andrés Manuel López Obrador, connu sous le nom d’AMLO, aux élections présidentielles du 1er juillet représente un tournant. Après des décennies de tyrannie de la part du PRI (Parti révolutionnaire institutionnel, le parti au pouvoir), de violence militaire et policière, de privatisation des secteurs stratégiques de l’économie et de réformes réactionnaires de la législation du travail et de l’éducation, des millions de travailleurs, de jeunes, d’autochtones et de femmes ont remporté une victoire après des décennies de lutte. La victoire d’AMLO et du Morena (le Mouvement de régénération nationale, le parti d’Obrador) est avant tout le résultat de la lutte inlassable de tous les opprimés pour transformer la société et mettre fin au cauchemar du capitalisme mexicain.

    Au moment d’écrire ces lignes, les chiffres officiels n’ont pas encore été publiés, mais les premiers résultats confirment la victoire écrasante d’AMLO avec 52-53% des voix, le vote le plus élevé pour un président dans l’histoire du Mexique. Ricardo Anaya du PAN néolibéral a remporté environ 22% des suffrages et José Antonio Meade du PRI au pouvoir n’a gagné que 16% des voix. Ces élections furent désastreuses pour les partis de l’establishment.

    AMLO doit tenir ses promesses face aux travailleurs et aux pauvres

    L’atmosphère d’euphorie parmi les masses est difficile à décrire. Il est d’autant plus important pour les forces de gauche, le mouvement ouvrier et les mouvements sociaux de comprendre la grande pression du capitalisme, de l’impérialisme et de l’appareil d’Etat sur le nouveau président.

    Dans le but d’apaiser l’oligarchie et la classe dirigeante au Mexique et au niveau international, AMLO a insisté durant sa campagne sur le fait qu’ils n’avaient rien à craindre de lui car il n’envisageait ni nationalisations ni expropriations. Cette idée que l’on peut construire un capitalisme plus “humain” où les patrons et les spéculateurs accepteraient de partager leurs profits et de réduire l’exploitation ne peut toutefois qu’aboutir à une catastrophe. On peut affirmer la même chose de l’idée de mettre fin à la corruption sans remettre en cause les fondements du capitalisme. L’expérience d’autres pays d’Amérique latine – la Bolivie, le Brésil, le Venezuela, l’Argentine, etc. – et d’Europe – comme la Grèce avec SYRIZA – nous a appris beaucoup de choses à ce sujet.

    Tous ces grands patrons auxquels AMLO “fait confiance” et qu’il invite à participer à son projet répondront de la même manière que leurs homologues capitalistes d’ailleurs. Ils diront : appliquez une politique économique qui respecte nos intérêts, votre seul choix est de le faire volontairement ou non.

    La victoire d’AMLO est un développement majeur, mais elle ne signifie pas pour autant la fin de l’exploitation et de l’absence de démocratie. La classe dirigeante mexicaine n’est pas seulement corrompue et cruelle, elle a aussi derrière elle une longue expérience de répression sanglante lorsqu’elle est menacée. Cette victoire ne conduira à un véritable changement pour les masses que si elle est la rampe de lancement d’une lutte pour l’instauration d’un programme socialiste.

    Nous devons assurer qu’AMLO s’en tienne à sa parole et lui montrer dans l’action que, pour en finir avec les privilèges de l’élite, nous devons nous battre pour un programme socialiste.

    • Retrait des réformes néolibérales !
    • Renationalisation des services publics privatisés !
    • Instauration d’accords salariaux collectifs, pour un salaire minimum de 12.000 pesos par mois !
    • Réintégration de tous les travailleurs licenciés suite à la réforme de l’enseignement et assurance de la stabilité de travail pour tous les enseignants !
    • Pour des services sociaux gratuits et dignes !
    • Non aux féminicides ! La communauté LGBTQI+ doit bénéficier de tous les droits démocratiques !
    • Pour un programme d’emplois publics visant à assurer aux familles pauvres l’accès à es crèches et à des cantines !
    • Nationalisation sous contrôle ouvrier des banques et des secteurs stratégiques de l’économie afin de garantir le bien-être de tous !

  • Mexique : contestation nationale suite à la disparition d’étudiants

    mexique

    Une conséquence de la « guerre contre les drogues » menée par les États-Unis

    Lorsqu’on parle de manifestations étudiantes aujourd’hui, on pense avant tout au mouvement de Hong Kong, qui a récemment accaparé une grande attention médiatique. On parle moins de ce qui est en train de se passer en ce moment au Mexique, à la suite de la « disparition » de 43 étudiants dans l’État de Guerrero. Il s’agit pourtant d’un mouvement d’ampleur national qui est en train de se développer à l’échelle de tout le pays, et qui mérite d’être bien suivi par les révolutionnaires du monde entier.

    Par Tim Heffernan, Socialist Alternative (CIO-Canada), Toronto

    Au départ, c’est une histoire sordide de trafiquants de drogue, de politiciens corrompus et de policiers ripoux, tous impliqués dans l’attaque d’un groupe de jeunes militants qui fréquentaient les « normales rurales » – des centres de formation d’enseignants. Si les détails de ces évènements sont toujours très flous, il semblerait que la nuit du 26 septembre, une bagarre s’est produite entre des étudiants et la police locale dans la petite ville d’Iguala, dans le Guerrero.

    Les étudiants « normalistas » s’étaient rendus à Iguala pour y « réquisitionner » des bus – avec l’autorisation des chauffeurs, disent les étudiants – afin de se rendre à Mexico pour la commémoration du (second) massacre de Tlatelolco de 1968 (lorsque 300 manifestants étudiants ont été abattus dix jours avant les Jeux olympiques de Mexico). La pratique de « réquisition » de transport est relativement courante de la part des normalistas.

    Voici le récit qu’a fait un journaliste des horribles évènements du 26 septembre : « Le manque de fonds pour leur internat rend ce genre de « réquisition » et d’autres actions de ce genre (comme la « réquisition » de camions transportant du lait et autres produits alimentaires) souvent nécessaires pour les étudiants. Une fois que les étudiants rentrent à l’école, ils rendent normalement les bus ou camions à leur propriétaire. Mais cette fois, la police a bloqué les bus et ouvert le feu, tuant six personnes sur le coup (dont trois étudiants et trois passants qui n’avaient rien à voir dans l’affaire), tandis que 43 autres étudiants ont tout simplement… disparu.

    La dernière fois que ces étudiants ont été vus, ils étaient en train de monter de force dans les fourgons de la police. On ne les a jamais revus depuis. Quelques jours plus tard, lors de fouilles, plusieurs fosses communes ont été découvertes dans les environs. Toujours aucune trace des étudiants, mais cela a permis de retrouver les restes de nombreuses personnes également disparues auparavant, qui ont visiblement été torturées et brulées vives (sans doute par des trafiquants de drogue) » (Leonidas Oikonomakis sur le site roarmag.org)

    Depuis lors, le dirigeant du principal gang de narco-trafiquants de la région a été arrêté, ainsi que 36 policiers. Le conseil régional de l’État de Guerrero a destitué le maire de la ville d’Iguala, qui est également recherché ainsi que le chef de sa police locale dans le cadre d’une affaire de crime organisé. Le maire et sa femme ont pris la fuite.

    Les plus grandes mobilisations étudiantes depuis des dizaines d’années

    Cette affaire de « disparitions » a déclenché la colère de la population du Guerrero et de tout le Mexique, surtout parmi les étudiants des universités. On a vu mercredi 22 octobre la plus grande marche étudiante du Mexique depuis au moins vingt ans, estimée à 100 000 manifestants – un chiffre d’autant plus impressionnant que la marche a été organisée un jour en semaine. Beaucoup de gens font référence au mouvement de 1968. Un journal rapportait : « Il y avait des torches, des bougies, des trompettes, mais surtout, un silence retentissant, tandis que des dizaines de milliers de jeunes gens venus en délégation de toute la ville de Mexico défilaient tels un fleuve humain pendant plus de quatre heures, de l’Ange de l’Indépendance sur l’avenue de la Réforme jusqu’au Zócalo, avec un seul cri : « Ils les ont pris vivants, qu’ils nous les rendent vivants ! » (www.proceso.com.mx)

    Les manifestants réclamaient la démission du chef de l’État, Peña Nieto, et dénonçaient les trois principaux partis politiques (PRI, PAN et PRD) pour leur proximité avec le « narcopoder » (le pouvoir de la drogue). Les manifestations se sont répandues à travers tout le Mexique pour former un des plus grands mouvements qu’ait connu la nation ces dernières années, mobilisant des milliers d’étudiants des universités et de lycéens, tout en recevant également le soutien des syndicats, des milices de gauche et d’une grande partie de la population de manière générale.

    Le gouvernement de Peña Nieto est fortement critiqué de son incapacité à retrouver ces étudiants même quatre semaines après les évènements. La population mexicaine subit depuis des années les conséquences de la « guerre contre les drogues » menée par les États-Unis, qui a fait au moins 70 000 morts et des milliers de disparus. Mais c’est cette dernière horreur, où l’on voit la police corrompue s’associer aux trafiquants meurtriers pour assassiner des adolescents, qui a à présent mis le feu à tout le pays.

    Sur la chaine NBC, on voyait un père déclarer à la foule massée à Mexico : « Il est incroyable que ce gouvernement qui ne cesse de vanter l’état avancé de sa technologie se retrouve maintenant inapte à utiliser cette technologie pour retrouver un groupe de 43 étudiants. Il n’a qu’à retrouver nos enfants, ou subir les conséquences ».

    Toujours selon la NBC, des étudiants bloquaient jeudi les principaux axes de la capitale, empêchant le trafic de circuler. Si les manifestations dans la capitale sont jusqu’ici restées pacifiques, on ne peut en dire autant de la situation dans le Guerrero, où les manifestants ont dévasté et brulé plusieurs bâtiments, y compris la mairie de la ville d’Iguala, et occupent plusieurs mairies et stations radio. Deux groupes miliciens anti-trafiquants soutiennent le mouvement, tandis qu’un groupe local de guerrilleros de gauche a juré venger les étudiants disparus.

    En plus de critiquer le président Peña Nieto et son Parti révolutionnaire institutionnel (PRI), les manifestants sont furieux vis-à-vis du PRD (Parti de la révolution démocratique) qui dirige l’État de Guerrero et la ville d’Iguala. Les manifestants, ainsi que de nombreux sénateurs et députés, ont appelé à la démission du gouverneur du Guerrero, Angel Aguirre, qui a finalement décidé de jeter l’éponge mardi soir.

    Les marches coïncident avec d’autres mouvements de contestation étudiante, ce qui renforce la pression sur le président. Les étudiants des collèges techniques de Mexico occupent leurs campus en guise de protestation contre la modification de leur cursus, par laquelle ils ne recevraient plus qu’un diplôme de technicien au lieu d’ingénieur. Ils considèrent cette réforme comme une tactique pour les payer moins une fois qu’ils auront obtenu leur diplôme, ce que le président voudrait utiliser pour attirer plus d’entreprises étrangères au Mexique. Pendant ce temps, les étudiants de l’État de Guanajuato marchaient mardi après qu’un de leurs camarades ait été assassiné – enlevé par la police selon plusieurs témoins, bien que le procureur d’État démente cette affirmation.

    « Cela fait longtemps que les Mexicains accumulent la colère par rapport à toute une série d’enjeux », disait Ricardo Rivas, un instituteur présent à la marche à Mexico. « Une fois que cette colère va exploser, c’est tout le pays qui va partir. Ce mouvement pourrait bien devenir encore plus grand. » (www.nbcnews.com)

     

    Plus d’infos :

  • Brésil : Victoire pour la lutte de masse

    Les gouverneurs de Sao Paulo, Rio de Janeiro et beaucoup d’autres villes ont réduit les prix des transports mais la lutte doit continuer

    Suite au tsunami de luttes de masse de ces derniers jours, le gouvernement d’Etat de Sao Paulo, les préfets de Sao Paulo et Rio de Janeiro (les deux plus grandes villes brésiliennes) et des dizaines de capitales d’Etat et de villes de tout le pays ont décidé de réduire le prix des transports.

    Andre Ferrari, LSR (CIO au Brésil)

    La réduction des prix, de 20 centavos à Sao Paulo, dans autant de villes, représente la victoire la plus considérable pour la lutte de masse après près de 20 ans d’offensive néolibérale de la classe dirigeante contre les travailleurs et les pauvres.

    Les gouvernements d’Etat intransigeants, autoritaires et répressifs ont été forcés de faire marche arrière après deux semaines de mobilisation intense, qui ont balayé tout le pays. Le 17 juin, plus de 300 000 personnes sont descendues en rue dans différentes villes. Près de 200 000 personnes ont manifesté à Sao Paulo et Rio, là où la mobilisation est le plus concentré. A Brasilia, le Congrès a été occupé, ainsi que l’hôtel de ville de Sao Paulo.

    A Sao Paulo, les manifestations ont paralysé les principales grandes routes et manifesté vers Ponte Estaiada, un monument à de riches spéculateurs immobiliers. Après une répression policière brutale la semaine précédente, qui a déclenché des manifestations encore plus grandes, le 17 juin, le gouverneur d’État a décidé de ne pas aller plus loin dans la répression.

    A Rio de Janeiro, cependant, il y a eu une répression très forte et de nombreuses arrestations, dont un membre du LSR (Liberté, Socialisme et Révolution, section du Comité pour une Internationale Ouvrière au Brésil). Le camarade a été accusé d’être ‘‘membre d’un gang criminel organisé’’ et relâché avec une amende. A Bell Horizon (dans l’État de Minas Gerais), où un match de football pour la Copa das Confereacoes avait lieu dans le nouveau stade moderne, il y avait plus de personnes qui manifestaient devant le stade que de spectateurs à l’intérieur.

    80 000 personnes ont répondu à l’appel à une nouvelle manifestation le lendemain 18 juin à Sao Paulo, qui a complètement occupé la place Praca da Sé, dans le centre ville. Au même moment, des manifestations avaient lieu à Avenida Paulista, où il y a eu des tentatives désorganisées de prendre l’hôtel de ville et le bureau du préfet de la ville. A Rio de Janeiro, la veille, les bureaux de l’Assemblée Législative d’État a été occupée pendant des heures par des manifestants d’une telle manière que c’était clairement une authentique rébellion populaire.

    Toute la journée du 19 juin, des manifestations de masse ont eu lieu. Les autoroutes étaient bloquées et fermées, les arrêts de bus étaient entravés et dans la banlieue de Sao Paulo, le MSTS (Mouvement des Travailleurs Sans Toit) ont organisé des manifestations dans les grandes rues, avec la participation active du LSR (CIO-Brésil). Des signes montraient que la lutte se radicalise et commence à exploser dans les endroits pauvres autour de la ville, incluant les travailleurs, ce qui ajoute à la pression sur le gouvernement.

    Suite à l’appel à de nouvelles manifestations unifiées, à un niveau national, le 20 juin, les autorités de Sao Paulo et de Rio ont décidé d’annoncer la réduction des prix. [Cet article a été initialement publié le 20 juin, et ce jour-là, plus d’un million de personnes ont manifesté dans tout le pays, NDLR]

    Divisions dans les partis au pouvoir

    Cela est ressorti de débats importants et de divisions au sein des partis au pouvoir. Une réunion d’urgence a été organisée, avec Lula (l’ex-président du Brésil, qui n’a pas de fonction officielle aujourd’hui), la présidente Dilma Rouseff et le préfet de Sao Paulo, Fernando Haddad. Pendant cette réunion, la Prefectura était cernée de manifestants.

    Le matin suivant, Haddad a déclaré qu’une réduction des tarifs des transports serait une position ‘‘populiste’’. Cependant, cette argumentation a fait long feu. A un match de football entre le Mexique et le Brésil, à Fortaleza, où le stade était entouré de manifestants, une conférence de presse a été organisée par Haddad et le gouverneur de Sao Paulo, Alkmin, membre du parti de droite PSDB (Parti Social Démocrate Brésilien, en opposition au gouvernement fédéral). Hadda et Alkmin ont annoncé qu’une réduction des prix serait appliquée.

    On retrouve un sentiment antiparti dans beaucoup de couches du mouvement en raison du fait que le PT (Parti des Travailleurs) s’est transformé en un parti ouvertement capitaliste, et que la confédération syndicale CUT est devenue une courroie de transmission du gouvernement fédéral. Dans cette situation, des sections de la droite organisée ont attisé un fort rejet des partis, dirigé contre les partis politiques de gauche présents dans les manifestations. Le sentiment antiparti s’est souvent traduit par des attaques physiques contre ceux qui portent des bannières et des drapeaux de partis de gauche. Il est souvent arrivé que les provocateurs de droite à la base de ce type d’agissement se révèlent par la suite être des agents de police infiltrés.

    Étant donné les dimensions exceptionnelles de ce mouvement de masse, toutes les forces politiques du pays – y compris des représentants du gouvernement fédéral et des fédérations patronales – ont de manière très cynique tenté de récupérer à leur compte l’idéalisme de la jeunesse qu’illustre ces mobilisations. La classe capitaliste brésilienne est entrée en lutte et elle se bat pour obtenir la direction du mouvement en reprenant certaines de ses revendications.

    Dans cette situation, les partis de gauche (le P-SOL, le PSTU et le PCB), les mouvements sociaux qui ont une orientation de classe (comme le MTST et Terra Livre, avec lesquels le LSR collabore activement), différents fronts syndicaux (comme CSP-Coluntas, Intersindical et d’autres) et certains groupes anarchistes commencent à rejoindre le mouvement. Cela était particulièrement visible dans le cadre des mobilisations pour le 20 juin. Ils défendent tous le droit des partis de gauche à venir manifester librement sous leurs bannières et visent à empêcher la droite de s’attirer un soutien dans le mouvement.

    Malgré les éléments contradictoires dans la conscience politique des participants au mouvement, celui-ci est tout de même parvenu à obtenir une victoire et à réduire les frais de transport. Maintenant, la question se pose de voir comment poursuivre la lutte. Aucun accord n’existe sur cette question entre les mouvements sociaux combatifs et la gauche. Les manifestations du 20 juin pourraient ainsi devenir qu’une commémoration de ce qui a été accompli plutôt qu’un pas en avant pour continuer le mouvement.

    Le LSR appelle à l’organisation d’assemblées et de forums du mouvement afin d’établir un cahier de revendications et un programme destiné à approfondir les acquis déjà remportés sur les prix du transport public. Les gouvernements qui ont annoncé une réduction des coûts du transport annoncent aussi des coupes budgétaires dans les programmes sociaux. Le mouvement devrait demander que les moyens nécessaires à la satisfaction des besoins sociaux soient pris sur les comptes des entreprises privées qui exploitent le système de transport et non pas dans d’autres programmes sociaux.

    Même après réduction des prix du transport, le coût des déplacements est un lourd fardeau pour les travailleurs et les étudiants. La revendication pour le transport gratuit était l’une des vieilles revendications du PT, que le parti a abandonnée en virant à droite. Cette revendication devrait être reprise. Elle devrait aussi être liée à la revendication de la municipalisation et de la nationalisation du système de transport.

    Les ressources pour garantir ce système et l’améliorer en qualité devraient être trouvées en suspendant le paiement des dettes des conseils locaux et d’États au gouvernement fédéral, dettes qui sont pour l’instant utilisées pour faciliter la recherche de profits des banques et des spéculateurs.

    Le mouvement a besoin de se lier à d’autres luttes

    Pour continuer la lutte pour un transport public gratuit et de qualité, les mouvements doivent se lier à d’autres luttes qui ont défendu les revendications des travailleurs, des jeunes et des habitants des villes. Il faut particulièrement se lier à la campagne contre les crimes commis dans la préparation de la prochaine Coupe du Monde qui aura lieu l’année prochaine au Brésil. Des milliers de familles ont été expulsées de leurs maisons à cette fin. Des millions de réals sont dépensés dans la construction de nouveaux stades et d’autres projets d’infrastructure pour la Coupe du Monde alors qu’il y a insuffisamment d’écoles et d’hôpitaux.

    Il est aussi nécessaire de soulever les revendications de la défense des droits démocratiques, de la liberté d’expression et du droit de manifester. La Coupe du Monde signifie, en réalité, la déclaration de l’Etat d’urgence. En pratique, cela signifie la criminalisation de la pauvreté et des mouvements sociaux contestataires.

    Il est également nécessaire d’approfondir les actions de masse pour attirer directement à ce mouvement la classe ouvrière et reprendre les méthodes de lutte de la classe ouvrière dans ces mobilisations, comme le recours à l’arme de la grève et de la grève générale. C’est la meilleure façon d’empêcher la droite de gagner une influence dans le mouvement. La classe dirigeante brésilienne prépare en ce moment les conditions pour la tenue d’une grève générale. La question d’une grève générale de 24 heures est à poser tôt ou tard si nous voulons que le mouvement se maintienne et se renforce.

    Il est urgent de construire un front uni des mouvements sociaux et politiques de gauche à court terme dans la perspective d’une lutte pour une assemblée nationale des travailleurs, des jeunes et des communautés qui pourrait discuter d’un programme de lutte et du type de plan d’action à appliquer.

    Une nouvelle page s’est tournée concernant la lutte de classe au Brésil. Après une longue période, nous sommes sortis d’un désert d’années de néo-libéralisme et d’étouffement des luttes sociales. Nous ne devons pas gaspiller cette opportunité.

  • Environnement. Pénurie énergétique et changement climatique : Il faut une planification socialiste pour les énergies alternatives

    Un spectre hante le monde – le spectre du changement climatique irréversible. Mais en même temps, le monde est saisi d’une soif désespérée d’énergie. Chaque année, nous générons et utilisons de plus en plus, produisons de nouveaux produits, tandis que les habitants des pays riches sont persuadés de jeter leurs vieux produits. Au Royaume-Uni, la consommation d’énergie est restée à peu près constante pendant les 30 dernières années, parce que presque tous nos biens de consommation sont importés. L’énergie qui est nécessaire à la fabrication de ces produits, par exemple, en Chine, est une des raisons pour lesquelles la demande en énergie s’est tellement accrue. Mais la demande en énergie n’est pas simplement un besoin de l’“Occident avide”.

    Par Geoff Jones, Socialist Party of England and Wales (CIO-Angleterre et Pays de Galles)

    Au fur et à mesure que les travailleurs des pays en voie de développement s’organise et obtiennent le droit à la parole, ils demandent eux aussi le droit de pouvoir posséder tous ces biens que nous tenons pour indispensables à la vie : des frigos, des lampes électriques, des radiateurs ou climatiseurs.

    La construction de routes, de chemins de fer, de logements décents, tout cela demande de l’énergie, même si de nouvelles technologies permettent aujourd’hui de ralentir la croissance de cette demande – par exemple, l’utilisation de téléphones portables nous épargne la nécessité de mettre en place un réseau de câbles téléphoniques ; les ampoules LED consomment beaucoup moins que les ampoules incandescentes traditionnelles.

    La concentration de dioxyde de carbone et autres gaz à “effet de serre” dans l’atmosphère terrestre augmente de plus en plus. Cette augmentation de leur concentration va mener à une hausse de la température mondiale, dont les conséquences pourraient être catastrophiques pour l’humanité. 87 % de notre énergie dans le monde est produite en brulant des carburants fossiles non-renouvelables – essentiellement le pétrole, le gaz et le charbon –, ce qui génère du dioxyde de carbone.

    Au Royaume-Uni, la proportion est presque la même, bien que le gouvernement Con-Dem se soit engagé à ce que 15 % (à peine) de notre énergie provienne de sources d’énergie renouvelables d’ici 2020. Une telle politique qui finalement ne mène à aucun changement, ne peut que nous conduire à la catastrophe.

    Les sources d’énergie aujourd’hui

    Aujourd’hui, la plupart de notre énergie est produite par de grosses multinationales dont le seul but est une offre sur le court terme et de super profits.

    Pour extraire le pétrole, ils passent des contrats avec les seigneurs féodaux du Moyen-Orient, et ils transforment des terres agricoles en déserts pollués. Ce n’est que lorsque la pollution causée par l’extraction du pétrole apparait plus proche de chez eux, comme on l’a vu avec la catastrophe du golfe du Mexique, que les multinationales pétrolières (essentiellement américaines) affichent un tant soit peu de repentir – mais ça ne dure jamais qu’un bref moment.

    Cela fait une génération que l’offre mondiale de pétrole est dominée par les dictatures du golfe Persique. L’Arabie saoudite produit ainsi à elle seul le dixième des exportations de pétrole. Cherchant désespérément d’autres sources, les compagnies pétrolières bâtissent des plate-formes pétrolières en haute mer qui forent de plus en plus profond et dans des zones de plus en plus dangereuses.

    L’ironie suprême est que le réchauffement climatique lui-même cause la fonte des glaces polaires, ce qui ouvre tout d’un coup l’accès aux immenses gisements de pétrole et de gaz de l’Arctique, ce qui ne peut avoir pour conséquence qu’une hausse encore plus catastrophique de la température mondiale.

    L’exploitation à ciel ouvert des sables bitumineux du nord du Canada, qui est un procédé extrêmement polluant et inefficace, fournit malgré tout 20 % des importations de pétrole américaines. À présent, il y a un projet de démarrer une exploitation qui créera dans le nord du Canada un désert toxique de la taille de l’Arabie saoudite, qui amènera ensuite le pétrole sur la côte Pacifique à l’ouest afin qu’il puisse y être acheminé vers la Chine. Ce projet a déjà provoqué de nombreuses manifestations.

    Certains “biocarburants” sont une source alternative d’énergie, mais leur culture implique la destruction d’immenses superficies de forêt tropicale en Amérique latine et la reconversion de terrains aux États-Unis et ailleurs uniquement pour la production de maïs, à fins de biocarburant. Toutes ces terres pourraient à la place être employées pour cultiver des vivriers.

    Après le pétrole, le gaz naturel est la deuxième plus grande source d’énergie du Royaume-Uni ; dans le monde, ce combustible est troisième derrière le charbon et le pétrole. Dans les années ’80 et ’90, les Tories ont utilisé les champs de gaz de la mer du Nord pour restaurer leur économie capitaliste en faillite. À présent ces gisements sont presque épuisés. En 2011, les importations de gaz ont excédé la production nationale pour la première fois.

    Dans le reste du monde, la production continue de s’accroitre, mais les réserves ne sont évidemment pas inépuisables. En outre, rien ne permet d’empêcher les exportateurs d’augmenter leurs prix sans prévenir (comme l’Opep, Organisation des pays exportateurs de pétrole, l’avait fait en 1973 en décidant subitement une hausse de +70 %), ou d’éviter de couper totalement leurs fournitures énergétiques, comme la Russie l’a fait subir à l’Ukraine en 2009 en coupant le “robinet à gaz”.

    La nouvelle panacée serait à présent la “fracturation hydraulique” – un forage profond dans les couches de schiste géologiques pour en extraire du gaz. Au Royaume-Uni, les ministres Con-Dem ont sauté sur cette occasion pour permettre aux firmes privées de foncer sur ce nouveau créneau, même après qu’une première expérience ait déclenché des séismes mineurs et ait révélé un véritable risque de pollution des eaux souterraines.

    Les Tories parlent de gaz “bon marché”, mais le gaz qui sera ainsi produit sera vendu sur le marché mondial ; donc son prix sera aligné sur le prix mondial. De toute manière, un récent rapport indique que le cout de l’extraction par fracturation hydraulique serait plus élevé que le prix mondial actuel du gaz.

    Enfin, il y a le charbon. La Chine est le plus grand producteur de charbon mondial. Elle extrait trois fois plus de charbon que les États-Unis et six fois plus que l’Inde, qui sont les deux autres plus grands producteurs mondiaux. Depuis que les Tories ont détruit l’industrie charbonnière britannique dans les années ’80, le Royaume-Uni est contraint d’importer deux fois plus de charbon que ce qu’il en produit.

    À l’échelle mondiale, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) prédit, sur base des tendances actuelles, que le charbon sera la plus grande source d’énergie mondiale d’ici 2020, et que si cette tendance continue, le climat mondial connaitrait une hausse de température de 6°C d’ici 2100.

    L’énergie nucléaire, qui était généralement considérée il y a 50 ans comme une source d’énergie bon marché et non-polluante, a depuis longtemps perdu de son aura. Les réacteurs nucléaires, utilisant des systèmes conçus pour produire des armes nucléaires, laissent derrière eux des montagnes de déchets radioactifs hautement dangereux.

    Au centre de traitement des déchets nucléaires de Sellafield, en Angleterre, le stock de déchets radioactifs est égal en volume à 27 piscines olympiques, et les autorités n’ont aucune idée de quoi faire avec ! (ce serait déjà bien s’ils savaient où se trouve l’ensemble des déchets). On pourrait construire des systèmes qui produisent moins de produits dangereux mais, à nouveau, les gouvernements et les entreprises privées ne sont pas désireux de financer les investissements sur le long terme que cela implique.

    Pendant ce temps, la possibilité de systèmes efficaces et non-polluants tels que la fusion nucléaire (plutôt que la fission) semble n’avoir été qu’un mirage, qui s’éloigne au fur et à mesure qu’il parait plus proche.

    La capture du carbone ?

    Le charbon, le pétrole et le gaz requièrent des procédés de plus en plus chers, dangereux et polluants pour leur extraction, tout en continuant à relâcher de plus en plus de gaz à effet de serre. Les émissions mondiales de dioxyde de carbone sont passées de 20 gigatonnes par an en 1990 à près de 30 gigatonnes par an aujourd’hui. Neuf gigatonnes sont produits par les seules centrales électriques au charbon.

    Le changement climatique ne peut plus être empêché, mais il pourrait être ralenti en capturant une partie du dioxyde de carbone émis et en le stockant quelque part. Mais cela voudrait dire un investissement considérable dans la recherche afin de développer des systèmes adéquats ; cela couterait de l’argent et nuirait aux bénéfices des compagnies énergétiques. Les gouvernements parlent de la nécessité de capturer et stocker le carbone, mais il faut beaucoup plus de recherches ; aussi, le nombre d’installations à capture du carbone actuellement opérationnelles est minuscule si on le compare à l’ampleur du problème.

    Il y avait dans le monde en 2011 seize installations à grande échelle de capture du carbone, qui toutes ensemble ne capturaient qu’un millième du carbone généré à l’échelle mondiale. Il est prévu d’en construire plus (surtout en Chine), mais dans de nombreux cas, les investissements gouvernementaux se font longtemps attendre.

    Au Royaume-Uni par exemple, l’installation de capture de carbone de Longannet, qui devait capturer environ 1,5 mégatonnes de carbone par an, n’a finalement jamais vu le jour, parce que les propriétaires espagnols de Scottish Power et le gouvernement Con-Dem ne sont pas parvenus à se mettre d’accord sur le financement du projet.

    Bien que Ed Davey, secrétaire d’État à l’énergie Con-Dem, aime discourir à longueur de temps sur les “formidables opportunités” qui se présentent dans l’industrie de la capture de carbone, il n’y a en ce moment que très peu de recherches effectuées, et aucune installation de capture de carbone à grande échelle n’existe au Royaume-Uni.

    Il existe une alternative

    Il existe pourtant une alternative à l’accroissement indéfini de l’utilisation de carburants fossiles. En fait, en novembre 2009 déjà, dans un article paru dans la célèbre revue américaine Scientific American, on démontrait que simplement en utilisant la technologie dont nous disposons déjà à l’heure actuelle, il serait possible de satisfaire toute la demande mondiale en énergie, en utilisant des sources d’énergie renouvelables et non-polluantes. Quelles sont ces sources ? Essentiellement les énergies solaire, éolienne, et hydraulique.

    L’énergie solaire, générée par des panneaux photovoltaïques, est déjà familière. On la voit un peu partout, sur les calculatrices de poche et sur les toits des maisons. La baisse de cout extrêmement rapide des matériaux nécessaires pour la fabrication des panneaux photovoltaïques rend aujourd’hui possible et compétitive la génération d’énergie solaire à une échelle industrielle.

    En Californie par exemple, près de 2 gigawatts d’énergie solaire ont été installés. Cela est d’une part réalisé par des “fermes solaires”, champs de panneaux solaires à grande échelle, et d’autre part, par les nombreuses installations sur les toits des maisons et des entreprises, qui subviennent ainsi à leurs propres besoins.

    Cette “génération d’énergie distribuée” a aussi le grand avantage de fortement diminuer le cout du transport de l’électricité. De tels plans ont été adoptés en Allemagne, et c’était également un des objectifs du dernier gouvernement britannique, qui voulait créer une “taxation adaptée” afin d’encourager les firmes solaires britanniques (mais ce plan est passé à la trappe sitôt les Con-Dem au pouvoir).

    Bien sûr, la Californie est un cas particulier, vu qu’elle jouit d’un climat idéal, et de centaines d’hectares de désert ; mais l’idée des fermes solaires est reprise sur d’autres continents. Au Ghana par example, un projet d’installation solaire devrait fournir 155 mégawatts – 6 % de la demande énergétique ghanéenne.

    Aussi, un immense projet appelé “Desertec”, vise à satisfaire 15 % de la demande énergétique européenne à partir de fermes solaires en Afrique du Nord, acheminée par des câbles sous la Méditerranée. Mais ce projet rencontre beaucoup de critiques. Au premier rang, les Africains qui se demandent pourquoi ils devraient envoyer toute cette électricité en Europe, quand eux-mêmes en ont tellement besoin. Mais il reste tout de même que ce projet démontre que la génération d’énergie solaire à grande échelle est possible.

    L’énergie éolienne est devenue la source d’énergie renouvelable la plus diabolisée. Mis à part les mythes selon lesquels les champs éoliens en haute mer terroriseraient les dauphins et tueraient les oiseaux migrateurs, l’énergie éolienne est souvent décrite comme inefficace et chère. En réalité, tout cela est faux.

    Une récente étude effectuée par un groupe de recherche très respecté, Cambridge Econometrics, a démontré qu’il est possible d’installer des turbines éoliennes en haute mer qui satisferaient à un quart de la demande énergétique britannique à un cout modique, à peine plus que le cout équivalent d’utilisation de gaz équivalent, tout en créant des dizaines de milliers d’emplois dans le secteur de la construction.

    Il faut, il est vrai, des systèmes de stockage de l’énergie pour s’assurer de la fourniture au cas où il n’y a ni vent, ni soleil, mais cela peut être fait.

    On entend aussi l’argument comme quoi le régime des vents n’est pas fiable. Moins que les oligarques russes et les sultans arabes ?

    L’énergie hydraulique, qui utilise des turbines actionnées par l’eau stockée dans de grands réservoirs (lacs de barrage), est la plus ancienne forme d’énergie renouvelable.

    Aux États-Unis dans les années ’30, l’Autorité de la vallée du Tennessee a été instituée en tant qu’agence fédérale hydraulique – suscitant une vive critique de la part des compagnies énergétiques – afin de fournir des emplois et une électricité à bon marché grâce à un réseau d’immenses barrages. En Chine, le barrage des Trois Gorges, qui traverse le fleuve Yangtzi, devrait fournir 22,5 gigawatt. Mais ce barrage a déplacé 1,3 millions d’habitants, et causé de graves dégâts écologiques.

    D’un autre côté, l’énergie océanique et marémotrice est une immense ressource mais qui est complètement négligée, surtout si on parle d’une nation insulaire telle que le Royaume-Uni.

    En Europe, il n’existe qu’une seule installation marémotrice à grande échelle, celle de l’estuaire de la Rance, en France, qui fonctionne depuis 1966, et génère 240 mW. Mais des projets grandioses tels que celui du barrage maritime de l’estuaire du Severn, censé produire 5 % des besoins énergétiques britanniques, ne sont sans doute pas la meilleure option. Une majorité de l’industrie de la construction pourrait se voir engagée dans ce projet pendant des années, et il pourrait avoir des conséquences environnementales imprévisibles. D’un autre côté, un réseau de générateurs marémoteurs tel que proposé par l’ONG Friends of the Earth, produirait tout autant d’énergie pour beaucoup moins de dégâts écologiques.

    Enfin, le développement de générateurs utilisant l’énergie des vagues (ou houlomotrice) est complètement ignorée par le gouvernement et par les entreprises énergétiques.

    En fait, dans l’ensemble, très peu d’intérêt est affiché par les gouvernements et les multinationales de l’énergie partout dans le monde pour le développement de systèmes non-polluants.

    Bien que la recherche dans de nouvelles technologies encore inconnues puisse offrir des solutions encore plus efficaces dans le futur, et devrait d’ailleurs être financée comme il le faut, il est urgent de s’occuper de ce problème aujourd’hui et maintenant. Au Royaume-Uni, la dépendance obsessive de la part du New Labour et des Tories sur l’industrie privée nous mène droit au pire.

    D’un côté, il faut absolument fermer les centrales électriques au charbon qui vomissent des tonnes de dioxyde de carbone dans l’air, d’autant plus étant donné leur âge, vu que que les firmes énergétiques refusent d’investir dans de nouveaux générateurs qui seraient un peu plus propres.

    D’un autre côté, nous voyons que les gouvernements ont toujours échoué à maintenir le moindre engagement envers la production d’énergie non-polluante et les économies d’énergie. Ils espèrent pouvoir se baser sur des centrales au gaz, en important du gaze ou en utilisant des procédés polluants et potentiellement très dangereux tels que la fracturation hydraulique.

    Quoi qu’il en soit, le prix des combustibles va inévitablement s’accroitre, ce qui veut dire que de plus en plus de gens seront poussés dans la misère de ce fait. Et le chef de l’office de régulation de l’industrie, Ofgen, nous a déjà prédit que dans quelques années, le Royaume-Uni connaitra sans doute des délestages, ce que nous n’avons jamais vu dans le pays depuis la grève des mineurs de 1974.

    Que doivent faire les marxistes?

    Tout d’abord, nous ne devons pas accorder la moindre confiance au système capitaliste pour nous sortir de la catastrophe qui arrive à grands pas.

    Au Royaume-Uni, nous devons réclamer :

    • La fin immédiate des essais de fracturation hydraulique.
    • La renationalisation du secteur de la production et de la distribution d’énergie, afin de permettre la mise en place d’un plan de capture de carbone, et de nous sortir de l’utilisation de combustibles fossiles aussi rapidement que possible.
    • Une reconversion à très grande échelle de l’industrie de la “défense” vers la production de générateurs éoliens et solaires, en nationalisant les grandes compagnies énergétiques quand cela est nécessaire, sans compensation sauf sur base de besoins prouvés.
    • Un programme national d’expansion de la “génération énergétique distribuée” sur chaque nouveau bâtiment construit : à chaque logement et chaque entreprise ses panneaux solaires.
    • Une expansion massive du système de transport public, en particulier des chemins de fer, afin de réduire la pollution par les véhicules qui circulent sur les routes.
    • Un plan massif et public de recherche et de développement dans les systèmes de génération d’énergie marémotrice et houlomotrice.

    Dans le monde :

    • Les organisations des travailleurs, des peuples indigènes et des militants écologistes doivent s’opposer à tous les plans de développements désastreux tels que l’extraction des sables bitumineux et les plantations de cultures à “biocarburants”.
    • Il faut soutenir la lutte des peuples des pays à basse altitude, en particulier d’Asie du Sud-Est et du Pacifique, qui seront contraints à la migration et à l’appauvrissement national à cause de la hausse du niveau de la mer et du changement climatique.
    • Il faut se battre pour un plan énergétique international afin de satisfaire aux besoins de l’humanité en utilisant uniquement les énergies renouvelables.
  • Argentine : Kirchner nationalise l’entreprise de pétrole YPF

    L’annonce de la présidente péroniste de l’Argentine, Cristina Fernandez Kirchner, que 51% des parts de l’YPF seraient prises par l’Etat a rencontré un soutien massif en Argentine et a été vu comme une attaque envers la multinationale Repsol. Mais elle s’est attirée les foudres de l’impérialisme.

    Tony Saunois, CIO

    Le ministre de l’industrie espagnol, José Manuel Soria, a dénoncé cela comme un acte ”d’hostilité envers l’Espagne qui aura des conséquences”. Rajoy a parlé d’un acte ”arbitraire et hostile” qui casse le ”climat d’amitié” entre les deux pays. Le British Financial Times a reproduit ce ressentiment. Son éditorial, titré ”un acte lamentable de piraterie économique”, a mis en garde l’Argentine qu’elle pourrait être ”suspendue du G20” et prévenu Kirchner : ”Elle ne devrait pas oublier que tout acte ont des conséquences”. (FT 18/4/2012)

    Le président néolibéral du Chili, Pinera, et Camderon, du Mexique, se sont aussi joints aux critiques contre cette acte de Krichner. Même Evo Morales le président Bolivien, dans une réaction assez lâche, a argumenté que c’était une question bilatérale entre deux Etats et que son gouvernement jouissait de bonnes relations avec Repsol ! Son propre gouvernement a pourtant subi des attaques similaires de la part du Brésil lorsqu’il a pris des mesures du même type contre Petrobras, la multinationale brésilienne ! (Depuis l’écriture de cet article, Morales a annoncé la nationalisation de l’entreprise de Transport d’électricité TDE, NDLR)

    La nationalisation des parts de l’YPF est un développement significatif qui a des conséquences importantes au-delà de l’Argentine, c’est d’ailleurs ce qui se cache derrière le déversement de venin contre l’intervention d’Etat de Kirchner. La classe dominante mondiale a peur que cela puisse constituer un précédent pour d’autres gouvernements alors que la crise économique mondiale s’aggrave. ‘‘Le chant des sirènes populistes séduit à nouveau…’’ a ainsi titré Moisés Naim dans son article paru dans le Financial Times du 19 avril 2012. Ces développements en Argentine sont une anticipation de ce qui pourrait se développer dans d’autres pays alors que la crise du capitalisme s’intensifie. En ce sens ils signifient le début d’une nouvelle ère.

    L’hostilité et l’opposition internationales aux mesures similaires de Hugo Chàvez au Venezuela dans le passé (quand son gouvernement avait également agi contre Total, BP et Chevron), elles n’atteignaient pas le même niveau que les réactions actuelles consécutives à l’intervention de Kirchner. C’est que la situation mondiale est maintenant beaucoup plus critique pour le capitalisme mondial. L’idée que d’autres gouvernements puissent être forcés d’intervenir et d’aller encore plus loin dans les nationalisations de secteurs de l’économie (que cela soit sous la pression de la population ou pour défendre leurs propres intérêts) terrifie à présent la classe dominante.

    Une nouvelle politique de la classe dominante?

    L’intervention de Kirchner, en saisissant 51% des parts de l’YPF, pourrait être annonciatrice d’une nouvelle situation où les gouvernements se verraient forcés d’intervenir, par une intervention d’Etat, afin de tenter d’atténuer les effets d’une sérieuse récession prolongée ou d’un marasme économique.

    Cela remet aussi la question de la nationalisation à l’ordre du jour politique ; la classe dominante craint que la classe ouvrière se saisisse de ce mot d’ordre et exige son application. Les développements en Argentine sont en conséquences extrêmement importants internationalement.

    L’intérêt géopolitique de l’Amérique Latine et des Amériques est un élément supplémentaire important. Le déclin perceptible d’Hugo Chàvez laisse un espace que Kirchner tente de remplir. L’impérialisme États-Unien a donc été plus prudent dans sa réaction, ne voulant pas pousser Kirchner davantage dans la ‘‘camp populiste’’. Le journal espagnol El Pais a cité un haut fonctionnaire États-Unien qui, à la suite du récent Sommet des Amériques en Colombie, disait que : ‘‘Nous avons des divergences occasionnelles avec l’Argentine, mais nous ne voulons pas que cela (la nationalisation de l’YPF) compromette notre large coopération économique et sur la sécurité’’ avec l’Argentine. (El Pais 16/4/12)

    Cette re-nationalisation partielle de YPF est directement issue des conséquences désastreuses des privatisations massives menées en Argentine dans les années ’90 sous le règne du président péroniste Carlos Menem. Traditionnellement, le péronisme (un mouvement nationaliste populiste) a adopté une politique de lourdes interventions de l’Etat dans l’économie. Mais Menem avait change d’orientation et s’est dirigé vers des privatisations massives, résultat de l’adoption de la logique néolibérale qui prévalait intentionnellement. Il s’agissait à tel point d’un nouveau départ pour le péronisme qu’il a été surnommé le “Menemismo”.

    L’YPF a été privatisé en 1992. Tout comme les autres privatisations, ce fut un désastre pour les masses, mais a qui représentait d’immenses opportunités pour les capitalistes argentins et pour les multinationales telles que Repsol qui sont retournées en Amérique Latine tels de nouveaux conquistadores, en achetant des pans entiers de l’économie d’Argentine et de l’Amérique Latine.

    Ces privatisations ont véritablement été catastrophiques pour l’économie. Comme Kirchner l’a fait remarquer, le manque d’investissements et de développement dans les secteurs de l’énergie et du pétrole a eu pour conséquence que l’Argentine a dû commencer à importer du gaz et du pétrole pour la première fois depuis plus de 17 ans. Et cela malgré la découverte de champs de gaz étendus, connus sous le nom de Vaca Muerta (la ‘‘vache morte’’). ‘‘Cette politique vide, de ne pas produire, de ne pas explorer, nous a pratiquement transformés en un pays non-viable en raison de la politique du business, et non à cause d’un manque de ressources’’, était l’une des raisons invoquées par Kirchner pour prendre une part majoritaire de l’YPF. (El Pais 17/4/12)

    Récemment encore, l’Aérolinéas Argentinas privatisée, les compagnies d’électricité et quelques autres ont aussi été renationalisées, en partie pour des raisons similaires. Ce changement de politique par le gouvernement Kirchner fait suite à un net ralentissement de l’économie, à une augmentation de l’inflation, à l’introduction de coupes budgétaires ainsi qu’au développement du chômage.

    Ce qu’elle dit dans les faits, c’est que si le secteur privatisé n’assurera pas les services essentiels, alors l’Etat va intervenir et le faire. Cependant, malgré l’épanchement d’hostilité de la part des représentants du capitalisme et de l’impérialiste, Kirchner n’a pas effectué une nationalisation socialiste.

    Trotsky et le Mexique de 1938

    En mars 1938, le gouvernement populiste radical du Mexique dirigé par Làzaro Càrdenas a nationalisé les compagnies pétrolières Anglo-Américo-Néerlandaises. Trotsky argumentait que cette étape devait être soutenue et que les syndicats et la classe ouvrière devraient lutter pour un contrôle et une gestion démocratique par les travailleurs dans la nouvelle industrie d’Etat, bien que celle-ci n’ait pas été construite sur des bases socialistes. Cette approche est une leçon pour l’Argentine aujourd’hui.

    De la même manière, les marxistes britanniques revendiquaient le contrôle et la gestion démocratique par les travailleurs lors des nationalisations des houillères, des chemins de fer et d’autres secteurs de l’économie par le gouvernement travailliste d’après-guerre. Ils proposaient concrètement que les conseils de ces entreprises soient formés d’un tiers de syndicalistes de l’industrie en question, un tiers de représentants de la Confédération Syndicale (représentant la classe ouvrière au sens large) et d’un tiers de représentants du gouvernement.

    La nationalisation partielle de Kirchner a été suffisante pour provoquer la colère de la classe dirigeante. Elle ne signifie pas qu’un simple changement dans la politique du gouvernement, il s’agit d’un changement dans la politique de la dynastie Kirchner elle-même. Christina Kirchner n’a pas été partisane de la classe ouvrière et des pauvres d’Argentine. Son prédécesseur et défunt mari, Néstor Kirchner, était un partisan enthousiaste de la privatisation de l’YPF en 1992. En 1999, il a vendu 5% des parts de l’YPF à Repsol détenues en Patagonie, dans la province de Santa Cruz où il était alors Gouverneur.

    Comme Repsol augmentait sa possession de YPF jusqu’à 99%, Kirchner a alors appuyé une politique d’ « Argentinisation » et a insisté pour qu’un pourcentage reste détenu par des intérêts argentins. En conséquence, le groupe Argentin Peterson, possédé par la famille Eskenazi, a reçu 25% des parts de l’YPF. Celles-ci n’ont pas été touchées par la récente nationalisation partielle.

    Au gouvernement, les Kirchner ont amassé une fortune. Quand Nestor Kirchner a été élu président en 2003, la fortune du couple était estimée à 2,35 millions de dollars. Pendant son règne, la richesse des Kirchner a augmenté d’un étourdissant 900% en 7 ans. Au moment de la mort de Nestor en 2012, ils possédaient 18 millions de dollars avec 27 maisons, appartements, magasins et hôtels à leur nom. En 2003, la famille n’avait pas d’intérêts économiques dans la ville Patagonienne El Calafate. En 2010, les Kirchner dirigeaient 60 à 70 % de l’activité économique de la ville.

    Les mesures prises par Cristina Kirchner, qui vont être très populaires en Argentine, sont une intervention d’Etat pour essayer de résoudre la crise de l’énergie. Elles ont été prises en partie pour essayer de résoudre le déficit énergétique et l’échec de Repsol à développer l’industrie. Elles sont aussi une tentative par Kirchner d’obtenir du soutien dans un contexte d’économie déclinante et d’attaques contre la classe ouvrière. Elle a essayé d’invoquer la mémoire de la populiste radicale et nationaliste Evita Peron (en annonçant les mesures devant une image d’une Evita souriante et en présence des Madres de la Plaza, les mères des milliers de disparus sous la dictature militaire).

    Cette intervention montre comment la classe dominante peut être contrainte de changer sa politique et de soutenir l’intervention d’Etat quand elle y est forcée ou quand ses intérêts sont menacés.

    En faisant cela, Kirchner a frappé un grand coup aux intérêts de l’impérialisme espagnol et de sa multinationale Repsol. Elle a agité le spectre que d’autres coups plus forts soient frappés contre les autres pays et replacé la question des nationalisations à l’ordre du jour politique. Cela a terrifié la classe dirigeante du monde entier. La revendication de nationalisations doit maintenant être reprise par les organisations des travailleurs mondialement. En Espagne, la formation de gauche Izquierda Unida s’est opposée au gouvernement Espagnol et a défendu le droit du gouvernement Argentin à nationaliser l’YPF, ce qui est positif. Cependant, l’achat de 51% des parts de l’YPF ne constitue pas une ‘‘nationalisation socialiste’’. Kirchner elle-même a été très claire lorsqu’elle a déclaré : ‘‘Le modèle n’est pas l’étatisation, c’est clair, mais la récupération de la souveraineté et du contrôle du fonctionnement de l’économie.’’ (El Pais 17/4/12)

    Le Comité pour une Internationale Ouvrière et ses sections à travers le monde (dont le PSL en Belgique) s’opposent aux protestations des politiciens impérialistes et capitalistes.

    Nous soutenons toutes les mesures authentiques prises contre l’impérialisme. Nous demandons que des actions réelles soient entreprises contre la domination impérialiste de l’économie et des capitalistes nationaux qui exploitent les peuples d’Argentine. Nous soutenons donc une nationalisation socialiste démocratique du secteur de l’énergie entier.

    Pour la nationalisation de Repsol, de toutes les multinationales et de tout l’YPF en ne payant une compensation que sur base de besoins prouvés ! Le secteur de l’énergie nationalisé devrait alors être dirigé démocratiquement par la classe ouvrière d’Argentine, dans le cadre d’un plan démocratique de toute l’économie basé sur la nationalisation des grandes entreprises.

  • Illusion de stabilité en Amérique Latine

    Nous publions ci-dessous un rapport de la commission consacrée à la situation en Amérique Latine qui s’est tenue lors de la rencontre du Comité Exécutif International (CEI) du Comité pour une internationale Ouvrière. L’Amérique Latine donne l’apparence illusoire d’être curieusement isolée du contexte mondial de stagnation, de récession et de crise économique. Les économies basées sur l’exportation, particulièrement au Brésil, ont bénéficié de la demande chinoise insatiable de matières premières et enregistré de forts taux de croissance.

    Matt Dobson, Socialist Party (CIO-Ecosse)

    Andre Ferrari de la LSR (CIO-Brésil) a introduit cette discussion, qui a illustré les contradictions et les déséquilibres sur lesquels ces illusions d’une croissance continue et de stabilité politique sont construites. La croissance économique ne va pas réduire les écarts de richesse communs à tous les pays où les conditions épouvantables de la majorité. Le Brésil, alors qu’il bénéficie de son partenariat avec la Chine, a aussi accumulé d’énormes dettes.

    Le ralentissement économique à venir en Chine et l’aggravation de la crise en Europe et aux USA va amoindrir la demande d’exportations et les investissements, menaçant la croissance de la région à court terme et menant probablement rapidement à un ralentissement de l’économie. Cela conduira à une nouvelle période de conflits de classe mouvementés, dangereux pour la continuité des partis, dirigeants et gouvernements qui sont dans leur deuxième ou troisième mandat en Colombie, au Brésil, en Argentine et au Venezuela.

    Cela s’est déjà vu au Pérou; le nouveau gouvernement d’Ollanta a été élu sur la promesse d’imiter les réformes en faveur des pauvres du premier gouvernement Lula au Brésil et de Chavez au Venezuela. Mais, immédiatement confronté à un mouvement social dans le secteur minier, Ollanta a décrété l’état d’urgence. Ollanta s’est droitisé avant même les élections. Durant la campagne, entouré des conseillers brésiliens de Lula, il s’est « Lularisé » ou « dé-Chavezé ».

    Anticipant la crise à venir, Dilma, qui remplace Lula à la présidence du gouvernement PT, a abandonné l’extension de l’intervention de l’état et a un nouveau programme d’ajustement fiscal qui fera des coupes dans les programmes sociaux. Mais même avant que cela ne soit mis en œuvre, la croissance du Brésil n’a pas été capable de contenir l’éclatement de conflits de classe. Luciano de LSR a rapporté que, comme les politiciens ont promis d’amener la plus grande économie de la région dans le « premier monde », la classe ouvrière organisée a répondu en entrant en action pour exiger le partage des richesses générées par le boom économique. Des grèves ont perturbé les projets d’infrastructures du gouvernement, qui essayent à tout prix (dont la destruction de l’environnement) de créer un accès à l’océan Pacifique et aux marchés inexploités des pays voisins et des projet prestigieux de la Coupe du Monde et des Jeux Olympiques à venir.

    Des mouvements de grève ont éclaté au cœur de la machine d’état : les pompiers de Rio ( qui sont militarisés et armés) ont fait grève avec le soutien massif de la population. Des sections-clé des travailleurs ont été impliqués dans des luttes, comme les travailleurs des banques, les enseignants, les travailleurs du pétrole, de la construction, et les métallos.

    La Bolivie et le Venezuela

    La première décade de ce siècle a vu des soulèvements révolutionnaires dans toute la région, des mouvements de masse propulser au pouvoir des dirigeants et des gouvernements, dont les politiques de réformes en faveur des pauvres ont été les premières à défier le consensus du néo-libéralisme après l’effondrement du stalinisme. Mais depuis quelques années, les régimes de Morales en Bolivie et de Chavez au Venezuela se sont droitisés, ont enrayé la révolution n’ont pas fermement rompu avec le capitalisme et les grands propriétaires terriens.

    Cela a permis aux forces de la contre-révolution de gagner du terrain. Les membres du CIO en Bolivie ont rapporté que Morales, prêt à tout pour les investissements des multinationales Brésiliennes, et se rendant compte que la Bolivie est menacée par la crise économique lorsque les réserves de gaz seront épuisées dans quinze ans, a attaqué les communautés indigènes sur lesquelles il avait construit sa base, autorisant la construction d’une autoroute à travers des aires rurales protégées. Un mouvement des fermiers producteurs de coca soutenus par la classe ouvrière a fait reculer le gouvernement.

    Avec la maladie de Chavez et la montée du soutien pour l’opposition de droite néo-libérale, due aux problèmes économiques, le Venezuela est entré dans une période incertaine. William de Socialismo Revolucionario (CIO au Venezuela) a rapporté que l’augmentation des investissements dans les programmes sociaux et le prix élevé du pétrole pourraient permettre au gouvernement d’être ré-élu en octobre. La santé instable de Chavez pourrait déclencher une crise après les élections, même s’il est ré-élu, ce qui semble le plus probable. Les travailleurs ne sont pas satisfaits des organisations bureaucratiques, des coalisions politiques, des partis et des fédérations syndicales qui ont été construites pour assurer le maintien du régime au pouvoir plus que comme des outils pour la lutte des masses.

    Les forces du CIO dans chacun de ces pays ont apporté un soutien critique aux réformes et nationalisations de Chavez et Morales, défendant les acquis sociaux obtenus par la pression des masses contre les attaques de la contre-révolution, et ont expliqué que pour consolider ces acquis il est nécessaire de rompre avec le capitalisme. Cependant, l’échec de ces régimes à rompre avec le capitalisme les a conduits à se droitiser.

    Aujourd’hui, la tâche des socialistes dans chacun de ces pays est de construire des organisations de la classe ouvrière et des pauvres indépendantes, des partis politiques qui s’engagent à se battre pour la réquisition des industries, des banques, des terres et de l’économie sous la propriété démocratique publique. Alors que la situation au Venezuela est compliquée par les attaques du régime contre les syndicats qui luttent, le soutient pour l’idée de construire une nouvelle force politique basée sur la classe ouvrière et les pauvres s’élargit en Bolivie, ce qui montre les puissantes traditions socialistes et révolutionnaires en Bolivie, en comparaison du Venezuela. Les organisations des travailleurs qui étaient cruciales dans le mouvement révolutionnaire qui a mené Morales au pouvoir cherchent maintenant une alternative combattive.

    Le Chili

    Dans la dernière période, le Chili était à la traine des développements révolutionnaires, mais désormais ses luttes sociales et politiques sont les plus avancées de la région. Celso de Socialismo Revolutionnario (CIO au Chili) a rappelé la perspective du CIO que l’élection du gouvernement néo-libéral de Pinera ne représentait pas un tournant à droite de la société chilienne, ce qui s’est confirmé par le soulèvement des étudiants et celui contre l’augmentation du prix du gaz dans le Sud.

    Dans les luttes les plus considérables depuis la chute de la dictature, les étudiants ont commencé par un mouvement pour l’éducation gratuite et contre les dettes écrasantes, gagné le soutien des travailleurs, culminé par un grève générale en Août et revendiqué la nationalisation de l’industrie du cuivre. Au cours de la lutte contre l’augmentation du prix du gaz, les travailleurs et les pauvres ont pris une ville du Sud du Chili et l’ont dirigé au travers d’une assemblée populaire (une tradition de la lutte contre le régime de Pinochet) jusqu’à ce que l’état envoie l’armée intervenir.

    Un thème de la discussion sur le Chili a été la faillite du parti Communiste qui n’a pas apporté de direction ni de stratégie à la lutte des étudiants. Celso a souligné que cela s’est reflété dans le développement d’un fort sentiment « anti-parti » chez les jeunes, un héritage du stalinisme et de la dictature. Il y a cependant besoin qu’une force authentiquement socialiste se développe, pendant que le capitalisme et ses institutions comme l’église, le parlement, les partis politiques, la police, perdent leur autorité par des décades de néo-libéralisme.

    Le Mexique, affaibli par la crise économique des USA, subit la pire situation économique de la région. Après plus de dix ans, le retour du PRI au pouvoir paraît probable, puisque des gouvernements néo-libéraux successifs sous Fox et Calderon ont créé une vague de mécontentement qui pourrait amener une marée de lutte des travailleurs et des jeunes. La guerre contre la drogue de Calderon était en réalité une guerre civile contre la population du Nord et contre tout mouvement social émergent, provoquant un mouvement des familles des tués qui prend de l’impulsion.

    Alec Thraves (Socialist Party – CIO-Angleterr et Pays de Galles) a fait un rapport de sa visite à la récente conférence du large parti de gauche brésilien PSOL. LSR, la section brésilienne du CIO, joue un rôle-clé dans le bloc de gauche du parti, qui s’oppose aux tentatives de la droite de faire des alliances électorales avec les partis qui défendent le marché et les coupes. LSR se bat aussi pour faire de Conlutas un centre syndical combattif dans tout le pays.

  • Kazakhstan: la répression continue contre les grévistes

    Natalia Azhikalieva, une activiste très connue à Zhenaozen qui avait fait une grève de la faim de 2 mois en soutien de la grève des travailleurs du pétrole, a été arrêtée. Selon les grévistes, elle a été emprisonnée pour 15 jours sans le moindre procès, uniquement sur base de déclarations d’un policier selon lequel elle l’aurait blessé lors de la violente attaque de la police du 8 juillet dernier, contre les travailleurs qui avaient entamé une grève de la faim. Natalia, qui pèse maintenant 45 kilos au maximum, aurait causé des blessures incurables au policier anti-émeute de deux mètres qui lui faisait face…

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    Actions de solidarité

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    En réaction à la charge de la police contre les grévistes de la faim, elle s’était couverte d’essence, en éclaboussant visiblement le policier face à elle. La menace de se mettre le feu a stoppé la charge. Mais la police est revenue le lendemain en plus grand nombre, et a arrêté des dizaines de participants à la lutte. Tout cela est aujourd’hui instrumentalisé pour imposer le silence à l’un des dirigeants de la grève.

    Cette attaque suit la déclaration du 9 septembre dernier de la part du magnat du pétrole Timur Kulibayev, à la tête du Fonds national d’investissement “Samruk-Kazyna”, qui a qualifié cette grève d’illégale et a réclamé des mesures plus répressives contre les grévistes. Ce fonds d’investissement est le principal actionnaire de KuzMunaiGaz, l’entreprise dont les travailleurs sont en grève depuis des mois maintenant. Timur Kulibayev est aussi le beau-fils du président du Kazakhstan, et ce n’est nullement une coïncidence…

    Pendant ce temps, la police continue de harceler Esenbek Ukteshbayev et Ainur Kurmanov, dirigeants du Mouvement Socialiste au Kazakhstan (une organisation large dans laquelle est présente notre section au Kazakhstan, Résistance Socialiste). Jeudi dernier, Esen a été interrogé six heures de suite, et Ainur l’a été durant dix heures la veille. La police utilise aussi d’anciens militants de la campagne “Laissez les maisons du people en paix’’ (une campagne contre les expulsions) qui ont maintenant conclu des arrangements avec les autorités pour jouer le rôle de ‘‘témoins’’. Selon ces derniers, les deux militants sont responsables d’avoir initié une campagne de suicide de masse (!). D’autres accusations plus mineures ont aussi été proférées au cas où celles-ci ne passeraient pas.

    Nul besoin d’expliquer à quel point ces accusations sont absurdes. Selon les récentes recherches de l’Université de Harvard, quelque 38.000 personnes se sont suicidées à travers le monde en conséquence de la crise bancaire. Les USA, la Chine, l’Allemagne, la Grèce, l’Espagne, l’Argentine, le Mexique et la Russie sont en tête de ce classement macabre. Le Kazakhstan ne fait pas exception. Au début de la crise, la banque BTA, qui accuse maintenant Ainur et Esen, a été frappe par divers scandales de corruption et a été sauvée par l’Etat, et partiellement nationalisée. Cette banque refuse maintenant d’offrir une aide similaire pour aider ceux qui sont actuellement incapables de rembourser leurs hypothèques. (voir l’article, en anglais, “More blood on the hands of Kazakhstan’s banks” sur www.socialistworld.net, 27/05/2011).

    Le besoin d’actions de solidarité est urgent. Que faire ?

    Soutenez la grève!

    Les grévistes ont demandé l’aide du député européen Paul Murphy (membre du Socialist Party, section du Comité pour une Internationale Ouvrière en République irlandaise), afin qu’il récolte de l’argent des syndicats et du mouvement ouvrier international. Paul a ouvert un compte en banque où les donations peuvent être envoyées pour aider les travailleurs en lutte et leurs familles.

    Vous pouvez trouverez ci-contre différents articles expliquant la situation au Kazakhstan. Demandez à votre syndicat d’aider les travailleurs du pétrole. Protestez contre les menaces d’arrestation contre les militants socialistes du Kazakhstan. Protestez devant les ambassades du Kazakhstan (vous pouvez voir ci-contre différents exemples de protestations). Envoyez des emails de protestation aux ambassades, ainsi qu’à la direction de la banque BTA, à Asel Tynyshbekova, à : tynyshbekova@bta.kz. Envoyez vos messages de solidarité à : Kazakhstansolidarity@gmail.com

  • Ecole d’été du CIO – Europe: Développement de la crise économique, sociale et politique

    Cette crise est la plus sévère depuis des décennies et la nouvelle génération qui participe maintenant aux luttes arrive au moment des mobilisations de masse en Tunisie, en Égypte, en Espagne, en Grèce,… Cette nouvelle génération peut aujourd’hui écrire l’histoire. Aucun pays d’Europe n’est pas affecté par ces évènements.

    Résumé de l’introduction à la discussion de Peter Taaffe

    La période que nous connaissons est faite de changements abrupts. Dans tâches qui, avant, se concevaient sur quelques années se produisent maintenant en quelques semaines, voire en quelques jours.

    Aujourd’hui, la Grande-Bretagne n’est pas le pays le plus avancé sur le terrain de la lutte des classes, mais ce qui se produit avec Rupert Murdoch intéresse les masses, et la situation est certainement plus profonde qu’au moment du Watergate aux USA à la fin des années ’60. Ce scandale touche le plus grand géant des médias au monde, et éclabousse le monde politique, il met à nu la conspiration capitaliste qui uni les médias, les politiciens et les grands patrons. Cela a bien entendu toujours existé mais, là, ce fait est démontré au grand jour, aux yeux de tous les britanniques et ailleurs. Cela peut entraîner la chute de l’empire Murdoch, mais aussi celui du gouvernement Cameron. Murdoch n’a même pas de considération pour son propre système. Il a dit au Parlement britannique que son modèle est celui de Singapour, un pays où la répression envers le mouvement ouvrier est très grande, et le salaire d’un parlementaire de un million de livres par an. C’est une véritable provocation. Murdoch a aussi été impliqué dans la surveillance de nos camarades à l’époque de la lutte contre la Poll Tax en Grande Bretagne, ainsi que dans la campagne contre le militant de gauche radicale écossais Tommy Sheridan.

    Le point le plus important de cette discussion, c’est la crise économique. Les bourgeois craignent énormément la généralisation de la situation de la Grèce, de l’Espagne,… à tous les pays d’Europe. Ces évènements valident une fois de plus la théorie de la Révolution Permanente du révolutionnaire russe Léon Trotsky. Nous avons vu les événements passer très vite d’un pays à l’autre. Nous aborderons le Moyen Orient et l’Afrique du Nord dans une autre discussion, mais il est clair que cela a influencé et enthousiasmé les luttes à travers le globe. Et alors que certains affirmaient que la lutte de classe n’existait pas en Israël, nous assistons maintenant à des luttes et à des occupations de place en Israël également. (Depuis lors, quelque 150.000 employés municipaux israéliens ont été en grève, en solidarité avec la contestation contre l’explosion des prix des logements. Le pays vient de connaître les plus grosses mobilisations de son histoire, NDT).

    Il n’y a pas de voie de sortie aisée pour la crise des capitalistes, et des mouvements tel que celui des Indignés ne vont pas stopper maintenant. La politique de la bourgeoisie n’a jusqu’à présent pas marché du tout. Les injections de liquidités ont pu stabiliser la situation, sans créer les conditions pour un nouveau développement sain. Obama avait comparé cela au débat avec le new deal de Roosvelt, mais ses injections n’ont eu pour but que de sauver les institutions financières et bancaires, alors que le New Deal était composé d’un minimum d’investissements dans l’économie réelle (infrastructure,…). Là, les plans de sauvetage ont entraîné des plans de licenciements un peu partout, ce qui a amplifié les problèmes.

    Cette crise n’est pas cyclique, elle est systémique. C’est le système lui-même qui est en crise. Bien sûr, il n’y a pas de crise finale du capitalisme tant que la classe ouvrière ne prendra pas le pouvoir. Le capitalisme trouvera toujours un moyen de sortie sans cela, y compris vers un scénario ‘‘à la Mad Max’’, comme on peut le voir actuellement au Mexique avec la ‘‘guerre de la drogue’’.

    Ce qu’on voit aujourd’hui en Grèce avec la destruction des conditions de vie sans que la situation ne s’améliore doit servir de modèle pour la classe ouvrière des autres pays: le capitalisme n’a rien d’autre à nous offrir.

    Plusieurs données permettent de voir que nous sommes dans une situation pire que dans les années ’30. Certains économistes disent d’ailleurs que le modèle à prendre en compte aujourd’hui n’est pas la crise des années ’30, mais la grande dépression de la fin du XVIIIe siècle. Certains salaires ont été descendus jusqu’à 600 voir 500 euros par mois.

    Aujourd’hui, la Grèce illustre le mieux la crise et le potentiel pour la classe ouvrière. On dit qu’il y a une rémission depuis 2009 au niveau économique, le problème, c’est que personne ne l’a remarqué, et certainement pas la classe ouvrière ! Partout en Europe, cette dernière subit des attaques. La production industrielle a à peine augmenté de 0,4% en Grande Bretagne, de 0,2% en France, et elle décroit en Grèce ou en Espagne. L’Allemagne constitue une exception, elle a encore une bonne base industrielle, et en termes de machines et d’outils, la Chine est une bonne destination pour les exportations, mais la Chine peut s’enfoncer dans la crise. Il n’existe aucune source de stabilité. Le capitalisme mondial va très certainement expérimenter une nouvelle chute de l’économie. Après avoir un peu remonté, la chute sera dure, et c’est déjà ce qu’expérimentent plusieurs pays européens.

    La dette mondiale est de 2,6 fois le PIB mondial, soit deux fois plus qu’après la crise de 29. Au niveau de l’emploi, on est face à un chômage de masse de longue durée. Aux USA, le nombre de chômeurs actuels est bien plus important que dans les années ’30 (en pourcentage, officiellement 10%, plus probablement 20%). Dans certains pays, comme l’Espagne, le taux de chômage chez les jeunes atteint les 40%. Même en grande Bretagne, on estime qu’il y a 800.000 travailleurs qui n’ont pas travaillé depuis au moins un an. Dans les entreprises, c’est l’occasion d’une offensive pour les patrons. Une entreprise a ainsi licencié tous ses travailleurs, pour les réengager de suite avec de moins bonnes conditions de travail. Un hôpital où nous avons des camarades, en Angleterre, connaît des contrats ‘‘O heures’’, où c’est le patron qui décide du nombre d’heurs de travail.

    Les bourgeois n’ont qu’une réponse: augmenter l’austérité et planifier la pauvreté. Le phénomène de l’appauvrissement constant de la classe ouvrière de Marx se vérifie. Marx n’a jamais dit que c’était linéaire, il reconnaissait que c’était possible pour la classe ouvrière de voir ses conditions de vie s’améliorer avec une croissance économique, mais que la tendance générale était à l’appauvrissement.

    La tendance générale est à l’inflation, avec une tendance à la hausse des prix de l’alimentation et du pétrole, ce qui alimente la colère des masses. La situation de paquets de stimulants, de plans de relance, vont accélérer cela, et l’on risque de se retrouver dans une situation de stagflation, où la stagnation économique se conjugue à une grande inflation.

    La Grèce est actuellement le maillon le plus faible du capitalisme européen, mais c’est l’avant-garde du mouvement ouvrier en Europe. Il y a eu 11 grèves générales depuis le début de la crise, et la jeunesse s’implique massivement. Au Portugal, il y a eu une manifestation de plus de 200.000 personnes sous le slogan ‘‘ce pays n’est pas un pays pour les jeunes’’, ça aurait été mieux s’ils avaient parlé du système, bien sûr, mais c’est un pas en avant. Le mouvement des indignés est clairement inspiré par les révolutions en Afrique du Nord et au Moyen Orient. La Grèce connaît pas mal d’éléments d’une situation prérévolutionnaire. L’Espagne et le Portugal aussi, mais peut-être pas à ce point. Pour l’Irlande, qui est en dépression constante, cela est moins le cas. La conscience des masses n’est pas gravée dans les esprits, elle découle de la situation générale, et des sauts de conscience sont à prévoir.

    Dans ce contexte, les opportunités qui s’offrent aux révolutionnaires marxistes vont augmenter. Nos camarades, partout dans le monde, ont préservé un noyau, un parti international qui va pouvoir sérieusement démontrer ce dont il est capable dans la période à venir. L’Irlande est un exemple de ce que nous pouvons faire quand la situation s’ouvre, avec les initiatives que nous avons prises, notamment autour de l’ULA (United Left Alliance, liste de gauche que nous avons initiée, et qui a remporté cinq élus aux dernières élections, dont deux de nos camarades, NDT). Comparons cela au NPA en France, ou au Bloco au Portugal. Durant des années, nous avons été à contre courant, c’était difficile mais, maintenant, la situation s’ouvre. La Grande Bretagne n’est pas immunisée à ce processus. En février, 750.000 personnes ont défilé dans les rues de Londres, et la grève du secteur public en juin était la plus grande depuis 20 ans. Même en Chine, l’augmentation des révoltes de masse pose la question de la révolution, mais dans un sens général et pas encore directement, dans un contexte de répression gigantesque. En Grèce aussi, la répression est aussi énorme. La facture de gaz lacrymogènes doit au moins être aussi grande que la dette du pays!

    Trotsky décrivait les bourgeois comme des gens aveugles, s’avançant vers le précipice. On est dans cette situation aujourd’hui, la bourgeoisie ne sait pas quoi faire. Les partis traditionnels bourgeois sont en crise profonde, ce qui affecte aussi les dirigeants syndicaux. Aujourd’hui, du point de vue social, pas encore politique, les masses sont massivement à gauche des organisations de gauche. Quand les politiciens bourgeois parlent de la crise de l’idéologie, c’est la crise de leur idéologie, mais le problème est qu’il n’y a pas encore d’alternative. En Grèce, 80% des sondés d’une étude ont dit que la société va dans le mauvais sens, mais 47% disent qu’aucun parti ne les représente.

    Mais même dans le pays le plus calme d’Europe, la Norvège, l’extrême droite peut faire des choses, comme nous l’avons vu avec les attentats d’Oslo. Il en va de même pour Marine Le Pen, qui a même apporté son soutien à la jeune immigrée victime de l’agression de DSK. Elle a aussi attaqué les syndicats, qui ne défendent plus les travailleurs selon elle. Cela veut dire que l’extrême-droite doit avoir un fort contenu social pour être capable de capitaliser sur la situation, et c’est en soi une indication intéressante, qui illustre la nécessité de construire de nouveaux partis larges pour représenter la classe des travailleurs, tout en défendant fermement les idées du socialisme.

    Le rejet de la politique dans le mouvement des Indignés, c’est le rejet de la politique bourgeoise. Des groupes de gauche radicale se sont cachés pour intervenir dans le mouvement, et ont stoppé de se présenter comme des organisations politiques, une attitude opportuniste. Cette haine est profonde, mais aussi saine dans le sens où elle s’exprime contre les politiciens, y compris des anciens partis de gauche, et contre les dirigeants syndicaux. Il fallait construire là dessus. Nous sommes toujours ouvertement intervenus, sans connaître de rejet complet, mais bien des difficultés.

    Pour la suite, le mouvement ne peut pas exister sans appui réel de la classe ouvrière. Le mouvement de la classe ouvrière ne va pas se développer de manière linéaire. Il y aura des défaites, des retraits, et une organisation révolutionnaire est également testée à sa manière de gérer les reculs. Il peut y avoir des éléments de désespoir dans la jeunesse aujourd’hui, certainement dans une situation de chômage de masse. ‘‘Soit on se bat, soit on s’enfuit.’’ Une partie de la jeunesse en Espagne ou en Grèce essaye d’ailleurs d’émigrer, mais dans une période de crise généralisée et globale, l’émigration ne constitue pas une véritable alternative.

    Concernant le défaut de paiement de la Grèce, c’est une discussion que nous avons depuis un moment au CIO. La classe capitaliste européenne fonce contre la classe capitaliste grecque. Dans la crise de l’Argentine, le choc entre les masses et l’élite a été très rapide. Le président s’est enfui en hélicoptère, un peu comme la fuite de Saigon en ‘75. Des éléments similaires peuvent se produire. L’Argentine était un des principaux pays dirigeants de l’Amérique latine, maintenant, ce n’est plus rien. Cette crise de la dette grecque est une crise d’une monnaie qui a refusé une fiscalité unique. Certains disaient que l’euro allait conduire à une sorte d’Etats-Unis d’Europe. Il est clair que les Etats capitalistes ont besoin d’être organisés collectivement, la production actuelle s’organise au moins à l’échelle d’un continent. Mais seule la classe ouvrière est capable d’organiser l’Europe sur une base socialiste et démocratique. Les contradictions entrent les différentes bourgeoisies nationales sont trop fortes.

    Il reste encore la question de l’environnement, qui est une part importante de nos actions, comme nous l’avons vu en Allemagne avec le mouvement contre le nucléaire ou ‘‘Stuttgart 21’’. Cette question est destinée à devenir plus importante. Nous avons beaucoup de chiffres sur les conditions de production de voiture en Chine par exemple, en 2018, la Chine se retrouverait à produire autant que le reste du monde en 2000.

    En France, la situation est plus calme. Sarkozy peut être battu par Hollande ou Aubry, et on a suggéré un moment qu’il aurait pu être dépassé au premier tour par Marine Le Pen, c’est une expression du chaos politique, un phénomène qui ne touche pas que la France. En Belgique, il n’y a toujours pas de gouvernement réel, mais toujours le gouvernement en affaires courantes. La question nationale est à l’avant-plan de la scène politique, ce que l’on a également pu voir sous l’effet de la crise en Pays basque ou en Écosse. Même en Italie, les forces contestant l’unification italienne se développent. Nous ne sommes pas opposés à la séparation. Mais nous ne devons pas mettre ça en avant tant que ce ne soient les masses qui le fassent.

    Cette période est une période clé pour le CIO. La classe ouvrière entre en action, une nouvelle génération entre en action, c’est à nous de les aider à tirer les leçons des victoires et des défaites du passés, tout en étant réalistes sur les possibilités actuelles. Avec les 30 dernières années d’ossification et de destruction des organisations du mouvement ouvrier, il faudra des années pour reconstruire la conscience suffisante pour clairement engager l’assaut contre le capitalisme.

    Aujourd’hui, 3 multinationales contrôlent 90% du commerce international de grains et 500 milliardaires dominent la planète. La misère et la pauvreté ne peuvent être stoppées sans lutter contre ce système pourri. Il en va aussi de l’intérêt de notre environnement. La lutte pour le socialisme et une économie démocratiquement planifiée est une nécessité de la plus haute importance. Sans cela, le genre humain va au devant d’une grande catastrophe.

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