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  • Elections anticipées: programme antilibéral s’impose d’urgence

    Dans les éditions précédentes de l’Alternative Socialiste, nous avons expliqué pourquoi il fallait s’attendre à des élections anticipées en novembre ou en décembre. La coalition violette est cliniquement morte. Après DHL et BHV, le gouvernement n’a pas pu faire davantage que produire une note d’orientation sur les fins de carrière. En mobilisant leur base, les dirigeants syndicaux peuvent lui donner le coup de grâce à tout moment. La CSC comme la FGTB ont déjà brandi la menace d’une grève générale. La seule chose qui les retient de mettre cette menace à exécution, c’est la peur de perdre le contrôle de la base comme à l’époque du Plan global.

    Eric Byl

    Le problème n’est pas de faire tomber le gouvernement, Que faire ensuite? Le PS, les dirigeants syndicaux et une partie du patronat sont convaincus que la violette est trop faible pour boucler avec succès le dossier des fins de carrière et les budgets pour 2006 et 2007. Il ne fait aucun doute qu’une coalition rouge-romaine, de par sa capacité à tenir en laisse les deux grands syndicats, en serait bien plus capable. Avec son Plan Marshall ultralibéral pour la Wallonie, le gouvernement régional rouge-romain a donné toutes ses assurances au patronat.

    La façon dont va tomber le gouvernement n’est pas une question sans importance. Si Verhofstadt jette lui-même le gant ou si le gouvernement tombe sur les vols de nuit, la nouvelle coalition rouge-romaine n’aura pas beaucoup de difficultés à poursuivre la politique de régression sociale quitte à la couvrir d’un vernis social. Verhofstadt s’accroche pourtant à son poste. Il réalise que la fin de son gouvernement pourrait signifier du même coup celle de sa carrière politique et le début d’une longue période d’opposition pour les libéraux. Ce faisant, il met les dirigeants syndicaux dans l’embarras. Ils savent en effet que si le gouvernement tombe suite à un mouvement de masse, cela donnera du fil à retordre à une future coalition rouge-romaine. C’est qu’on ne manipule pas la base syndicale aussi aisément qu’un chalumeau.

    Le MAS ne doute pas un seul instant que la violette et la rouge-romaine convergent sur l’essentiel, c’est-à-dire la casse de nos acquis sociaux. l’une et l’autre veulent nous imposer un programme néolibéral. L’époque où le néo-libéralisme passait pour efficace auprès de l’opinion publique a été balayée par le souffle de Katrina. Désormais, le sentiment général est que le néolibéralisme n’est pas fiable, bâti sur du sable, exclusivement dans l’intérêt des riches et antisocial. D’où notre appel à une liste qui soit en rupture avec le néolibéralisme et notre quête de partenaires pour porter ensemble un tel programme lors des prochaines élections.

    Les possibilités d’une telle liste – le résultat du Parti de Gauche en Allemagne en est l’illustration (bien qu’il s’agisse d’un tout autre ordre de grandeur) – ne sont hélas pas exploitées comme il le faudrait. Sans doute que le MAS devra propager seul cette idée lors des prochaines élections. Entretemps, nous voulons renforcer le MAS afin de pouvoir défendre nos vues avec plus de crédibilité.

  • C’est aux patrons de payer. Face à la division du sommet, il faut l’unité à la base

    Face à la division du sommet, il faut l’unité à la base

    Tract du MAS

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    Que veulent le patronat et les politiciens?

    Le patronat veut le plus de gains possible par un maximum de flexibilité. Le gouvernement les suit en créant encore plus de faux-emplois pour les jeunes. Ces jobs, que l’on peut refuser, nous coûtent nos revenus depuis que la chasse aux chômeurs est ouverte.

    Le patronat trouve que les travailleurs sont trop coûteux. Ils vont piller de préférence la sécurité sociale. Le gouvernement collabore avec le patronat en lui donnant des milliards de diminution d’impôts (5 milliards d’euros en 2005). Maintenir les travailleurs âgés plus longtemps assure d’avoir à sa disponibilité une plus grande offre de forces de travail. Les abus des patrons sont là pour démolir les conditions et les salaires des travailleurs.

    Cela explique pourquoi les gains des entreprises connaissent chaque année de nouveaux records. Ces gains sont maintenant de plus de 40 milliards d’euros ; dans les années ‘80, ils étaient encore de 40 milliards de francs belges ! Au Sommet de Lisbonne (mars 2000), il a été décidé que l’U.E., pour 2010, devait devenir le marché le plus compétitif du monde. Dans toute l’Europe, toutes sortes de mesures similaires sont prises. Les autres pays mènent avec autant d’ardeur la course à la démolition sociale, sans attendre d’être rattrapé par l’Europe. Résultat : sur le plan mondial, des super-profits pour les poches des mêmes patrons (avec des filiales dans différents pays) et un appauvrissement pour les travailleurs et leurs familles.

    32 heures semaine, sans pertes de salaire

    Il y a déjà 600.000 chômeurs en Belgique, mais le patronat et les politiciens veulent nous faire travailler encore plus longtemps. En réalité, ils veulent surtout s’enrichir. Pour cela ils veulent réformer le marché du travail. Non pas en répartissant le travail disponible entre tous ni en maintenant le pouvoir d’achat pour tous, mais en remplaçant les emplois à temps plein, stables et correctement payés par des jobs à temps partiel, instables et mal payés, comme en Suède ou aux Pays-Bas. Le patronat passe cependant sous silence le fait que les familles hollandaises sont sans cesse appauvries, par une forte augmentation du nombre de travailleurs précaires.

    Pas touche à nos pré-pensions

    Le gouvernement affirme que la sécurité sociale va à la banqueroute. “ Trop d’inactifs pour le nombre d’actifs “, disent-ils. Les jeunes et les vieux sont ainsi dressés les uns contre les autres. Le gouvernement a diminué sa participation à la sécu de 30 % en 1980 à 11 % aujourd’hui. La sécurité sociale n’a pas connu de déficit ces cinq dernières années, mais au contraire un excédent. Les pensions nous coûtaient 5,4 % du PIB en 1980, contre 5,2% à l’heure actuelle. Les pré-pensions sont un moyen pour soulager les restructurations et les fermetures; le gouvernement et le patronat veulent les supprimer. (*)

    Chiffres de la sécurité sociale: http://www.cnt-nar.be/

    Le sommet de la CSC se trahit, ainsi que sa base

    FGTB : que faire après le 7 octobre ?

    La CSC réfutait les arguments du gouvernement dans son livre “ 50 mensonges sur le vieillissement “. Pourtant, le sommet de la CSC refusait la participation à la grève du 7 octobre et a quand même annulé la grève du 10 car les pré-pensions à 58 ans, ainsi qu’un certain nombre de conditions secondaires, sont maintenues. La CSC se réjouit que le gouvernement veuille dépenser 400 millions d’euros provenant de l’augmentation des précomptes mobiliers pour les injecter dans la sécurité sociale, les patrons recevant pas moins d’1,2 milliards d’euros supplémentaires de baisse de charges. La FGTB veut -à juste titre- maintenir la pression, mais que faire si le gouvernement applique ses mesures ? Allons-nous retourner au travail la queue entre les jambes ? Y aura-t-il des réunions de militants ? Y aura-t-il des séances d’information dans les entreprises ? Discuterons-nous pour mettre en place un plan d’action ? Le sommet de la CSC, mis sous pression par sa base, prendra-t-il des initiatives ? Cela devra être discuté après le 7 octobre dans des réunions de militants.

    Un réseau démocratique de syndicalistes combatifs

    A quelques nuances près, tous les partis parlementaires veulent mener la même politique néo-libérale. Le MAS/LSP s’attèle à créer un réseau démocratique de syndicalistes combatifs. Ainsi nous voulons reconstruire un rapport de force dans les entreprises et les différents secteurs, et en même temps revendiquer que les prises de décisions se fassent démocratiquement. Le syndicat appartient à ses membres, mais ceux-ci sont hélas trop souvent mal informés et parfois ouvertement contrecarrés. Les appareils syndicaux sont aujourd’hui pieds et mains liés à la social-démocratie (FGTB) et aux chrétiens-démocrates (CSC), qui exécutent loyalement le programme du patronat. Les militants syndicaux ont besoin d’un parti qui traduit leurs points de vue politiques et qui soit entièrement indépendant du patronat.

    Le Parti de Gauche (Allemagne) illustre le potentiel d’un parti des travailleurs

    En Allemagne, le succès du Parti de Gauche (8,7%) démontre qu’un programme qui va à l’encontre du néo-libéralisme reçoit un bon écho. Nous pensons que ce potentiel existe également en Belgique. Le MAS veut aider à sa réalisation. En même temps le MAS plaide pour un programme de transformation socialiste de la société, dans laquelle la production sera organisée en fonction des besoins de tous et non pour les profits de quelques-uns.

  • Note du gouvernement sur les fins de carrière. Travailler plus longtemps à un salaire plus bas ?

    L’accouchement fut pénible. Le gouvernement est finalement parvenu à coucher sur papier ses propositions en ce qui concerne les fins de carrière. Excepté pour les patrons, les surprises agréables y font défaut. Nous en connaissons la teneur : notre système social doit être revu (comprenez plutôt : démoli). Non pour plaire aux patrons – même s’ils se sont déjà vus accorder 1,3 milliard d’euros de baisses de charges – mais soi-disant pour sauver le système. Voici un aperçu des propositions du gouvernement et les raisons pour lesquelles nous devons nous y opposer.

    Tract du MAS

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    En ce qui concerne les jeunes

    Les propositions de la coalition violette

    * Sous la pression syndicale, la note du gouvernement ne prévoit pourtant qu’une seule page (sur 14) sur l’embauche des jeunes.

    * Le patronat insiste de manière répétée sur le fait qu’un plus haut taux d’activité des aînés ne va pas nécessairement de pair avec un taux de chômage plus élevé chez les jeunes. Pour illustrer cela, on brandit les exemples des Pays-Bas et de la Suède qui connaissent un taux de chômage des jeunes plus bas et un taux d’activité des aînés plus élevé.

    * Le gouvernement ne va pas au-delà des jobs McDo dont les patrons rêvent, notamment des jobs de début de carrière, des avantages fiscaux pour les patrons qui engagent des stagiaires et l’activation des allocations d’attente.

    * Le patronat et le gouvernement veulent un changement fondamental du marché du travail : plus d’emplois flexibles et sous-payés en lieu et place de contrats fixes et de la sécurité d’emploi.

    La réponse du MAS

    * Les syndicats défendent à juste titre la position selon laquelle la prépension pour les salariés plus âgés est tout à l’avantage des plus jeunes.

    * La Suède et les Pays-Bas sont champions en matière de jobs bidons, à temps partiel, flexibles et sous-payés. Bien souvent, il faut cumuler plusieurs jobs en même temps dans ces pays pour avoir un revenu correct.

    * Le MAS plaide pour des jobs correctement payés et stables. Si c’était le cas, les secteurs qui manquent de bras seraient vite pourvus.

    Les travailleurs âgés

    Les propositions de la coalition violette

    * Même si les patrons bénéficient déjà depuis 25 ans de baisses de charges, le taux d’emploi reste bas. Le gouvernement augmente encore le nombre des salariés, ce qui accentue la concurrence pour les emplois disponibles. Les patrons utiliseront cela pour faire baisser les salaires.

    *Le gouvernement veut diminuer le rôle de l’ancienneté dans la rémunération. Les restructurations sont désormais appelées " nouveau départ pour les entreprises ". Les primes de départ individuelles qui ne tiennent nullement compte de l’ancienneté de celui qui quitte volontairement l’entreprise, doivent limiter le nombre de prépensionnés.

    * La prépension ne resterait concevable que si aucune solution convenable n’est trouvée, mais même dans ce cas-là, le prépensionné est obligé de participer à une cellule d’emploi. Celui qui, malgré tout, se retrouve encore dans un dispositif de prépension, devra rester disponible sur le marché du travail et court le risque de sanctions s’il refuse un job.

    * Le gouvernement veut insérer légalement les pensionnés dans le marché du travail pour le rendre encore plus flexible en élargissant les possibilités de combiner une pension avec un revenu du travail. En plus de cela, ils envisagent un système de bonus pour celui ou celle qui accepte de travailler jusqu’à ses 65 ans. En pratique, cela signifie que celui qui travaille moins longtemps se voit sanctionné. L’adoption d’un 2ème pilier de pension, qui sert souvent à compenser la pertes de revenu consécutive à la prépension, est relevé jusqu’à l’âge légal de la pension. La pause-carrière à temps plein, qui est aussi un moyen de départ anticipé, est restreinte à 1 an. Les salariés qui ont entre 50 et 55 ans auront la possibilité de racheter des jours de congé grâce à leur prime de fin d’année. On dissuade les mesures Canada-dry par des pénalités financières.

    * Le gouvernement veut soit relever l’âge de la prépension, soit étendre la durée de la carrière, soit faire une combinaison des deux.

    La réponse du MAS

    * Le MAS s’oppose à la casse de la Sécurité sociale par les baisses de charges.

    * Les restructurations engendrent des drames sociaux. Les emplois perdus sont rarement remplacés, ou alors par des jobs instables et sous-payés. Pas d’individualisation, mais des convention collectives. Non au détricotage du salaire des aînés, oui à l’augmentation du salaire des jeunes.

    * Les prépensionnés constituent 6% de la population entre 60 et 65 ans. Le gouvernement veut les culpabiliser alors qu’ils sont victimes des restructurations ou qu’ils sont totalement exténués. Les mesures Canada-dry ont été élaborées pour acheter la paix sociale lors des restructurations.

    * Le MAS plaide pour une baisse générale de l’âge légal de la pension à 58 ans, pour faire de la place aux 600 000 chômeurs. De plus, nous voulons la liaison de toutes les allocations aux salaires. Les soi-disant pièges à l’emploi ne sont pas dus au fait que les allocations sont trop élevées, mais au fait que les salaires sont trop bas.

    * D’après une étude de l’ONEm, le relèvement de l’âge de la prépension de 58 à 59 ans signifie que 85% des candidats à un départ anticipé ne pourront le faire qu’un an plus tard.

    Sécurité sociale

    Les propositions de la coalition violette

    * Le gouvernement considère la Sécurité sociale comme " un instrument pour développer une économie dynamique". Et plus loin: " Le gouvernement est convaincu que la Sécurité sociale et la fiscalité ont un rôle à jouer dans la création d’emplois… "Dans cette optique, le gouvernement veut soutenir l’emploi et la compétitivité des entreprises par de nouvelles baisses de charges (sociales et/ou fiscales) sur le coût du travail". Bref: le gouvernement entend bien continuer de piller notre salaire indirect pour couvrir les patrons de cadeaux.

    La réponse du MAS

    * Le MAS la considère comme un mécanisme de solidarité envers quiconque n’est pas en mesure de travailler. Les allocations doivent compenser la perte de salaire. Elles sont financées par la part indirecte de notre salaire qui se compose des cotisations des travailleurs et de cette partie de notre salaire que le patron verse directement à l’ONSS.

    Gouvernement: Prendre l’argent chez les travailleurs et leurs familles

    MAS: Prendre l’argent dans les poches du patronat

    Préparer la grève générale

    Les politiciens et les médias préparent le débat sur les fins de carrière depuis des années. Leur leitmotiv: le vieillissement compromet le payement des pensions. Et de multiplier les scénarios-catastrophe – statistiques sur le vieillissement à l’appui – dont il ressort à chaque fois que notre système social serait en péril. Les vrais chiffres leur donnent tort: la part des pensions dans le Produit intérieur brut a décru de 5,4% à 5,2% entre 1980 et aujourd’hui. En 25 ans, la Sécurité sociale a été 7 fois en déficit et 18 fois en excédent. Les 5 dernières années prises ensemble se soldent par un excédent. La part de la Sécurité sociale dans le PIB était de 16,7% en 2004 contre 16,2% en 1980. Dans le même laps de temps, la part de l’Etat dans le financement de la Sécurité sociale passait de 25% à 11% (tous les chiffres proviennent de rapports de la Banque nationale).

    FGTB: le 7 octobre?

    A la FGTB, on n’ignore rien des chiffres ci-dessus. S’ils le voulaient, ils pourraient balayer d’un revers de la main les arguments du gouvernement et du patronat. Hélas, le sommet de la FGTB a préféré se taire pour ne pas mettre dans l’embarras les "amis politiques" du PS et du SP.a au sein du gouvernement.

    En septembre, la FGTB déclarait dans une édition spéciale de Syndicats qu’elle était d’accord avec le gouvernement sur le fait que nous devrons tous travailler plus longtemps, mais qu’elle n’en avait pas moins des problèmes avec la note gouvernementale "Vieillir activement". A la FGTB, on sait pourtant fort bien que cette note n’était pas l’oeuvre du gouvernement, mais de la ministre SP.a Freya VdB. Même lors des grands meetings à Anvers et à Gand, les secrétaires Verboven et De Leeuw se sont bien gardés de prononcer les mots SP.a ou Freya. Les libéraux ont été chargés de tous les maux comme si la social-démocratie n’était pas dans le gouvernement.

    Sous la pression des militants et des centrales, le sommet de la FGTB a dû infléchir son attitude. Il appelle à une grève générale le 7 octobre. Mais il l’a fait sans tentative préalable de convaincre la CSC d’y participer et sans organiser de campagne d’information dans les entreprises.

    CSC: le 10 octobre?

    Jusqu’il y a peu, la CSC avait une longueur d’avance sur les fins de carrière. Son service d’étude a publié "50 mensonges sur le vieillissement", un argumentaire qui démonte le mythe selon lequel on ne pourra plus payer les pensions. La CSC a également multiplié les formations en son sein sur la question des fins de carrière. Si un syndicat s’y est préparé, c’est bien la CSC.

    La CSC a relevé 13 points de rupture dans "Vieillir activement" de Van den Bossche. Il y en a bien 6 qui subsistent dans la note d’orientation du gouvernement. La CSC n’en veut pas moins laisser une chance à la négociation et refuse de faire grève le 7 octobre. La CSC ne déciderait qu’après le 8 octobre si elle fait grève le 10 du même mois.

    Nombre de militants de la CSC n’approuvent pas ces tergiversations. Ils savent que le gouvernement et le patronat ne sont pas réellement disposés aux concessions, à moins qu’ils n’y soient contraints.

    La CSC-transcom se dit suffisamment réaliste pour réaliser que beaucoup de ses membres soutiennent l’action de la FGTB. Tout comme d’autres centrales de la CSC, la CSC-transcom couvrira ses militants qui se joindront à la grève.

    Face à la division du sommet, il faut l’unité à la base

    La population en a assez de la politique néolibérale. Jusqu’où devrons-nous être compétitifs? Jusqu’à ce que nos salaires soient au même niveau qu’en Inde ou en Chine? Cette politique est un drame sur le plan social. Mais même sur le plan économique, elle mène tout droit à la banqueroute: l’érosion du pouvoir d’achat plombe la consommation. Le crédit bon marché peut la stimuler artificiellement, mais il pousse toujours plus de gens dans la pauvreté. L’action contre le néolibéralisme peut compter sur une assise large. Il faut tenter de mobiliser ce potentiel dans les entreprises en y organisant des assemblées générales et en dressant un plan d’action. Le 7 octobre, il faut organiser des piquets persuasifs, de préférence en collaboration avec des militants de tous les syndicats.

    Le Parti de Gauche allemand illustre l’actualité d’un nouveau parti des travailleurs

    Les travailleurs et leurs familles ont beau être las de la politique néolibérale, le gouvernement comme l’opposition ne jurent que par plus de libéralisation, plus d’attaques contre la Sécurité sociale et plus de flexibilité. Ils suivent tous la logique du patronat.

    En Allemagne, le succès du nouveau Parti de Gauche (8,7%) démontre qu’un programme de rupture avec le néolibéralisme peut avoir un réel impact. Nous pensons que ce potentiel existe aussi en Belgique. Les militants de la FGTB et de la CSC n’ont aucune affinité avec les sociaux-démocrates et les sociaux-chrétiens. Leurs propositions ne sont tout au plus que des variantes du néolibéralisme de Reynders et Verhofstadt avec un emballage social.

    Nous sommes d’avis que les syndicats devraient rompre leurs liens avec ces partis pour leur substituer un instrument politique propre. Cela couperait du même coup l’herbe sous le pied de l’extrême-droite qui se présente frauduleusement comme la seule opposition. Le MAS aiderait loyalement à construire un nouveau parti des travailleurs et y plaiderait pour un véritable programme socialiste.

  • Pourquoi faire grêve? Pour tirer l’argent hors des poches des riches! Comment? Nous avons besoin d’Un plan d’action démocratiquement élaboré!

    Il y a 600.000 chômeurs, mais ceux qui ont un boulot devraient travailler plus longtemps. Il n’y a pas d’argent pour la sécurité sociale, mais il y en a pour de nouvelles baisses de charges pour les patrons. Il n’y a pas d’argent, mais les grandes entreprises font des bénéfices record. Décidément, ce gouvernement ne défend pas nos intérêts!

    Pour maintenir le budget en équilibre, il faudra des économies. Pour y arriver, le gouvernement compte faire payer les travailleurs et leurs familles. Dans le débat sur les fins de carrière, le gouvernement a tenté de nous dorer la pilule avec une note au contenu “vague”.

    Dans cette note, il est question de relever l’âge de la prépension et de la possibilité de faire dépendre la prépension d’une condition de carrière. Dans une première version antérieure à la note gouvernementale, la prépension n’aurait été accessible qu’après une carrière de 40 ans. Dans ce cas, 84% des femmes et 70% de hommes n’auraient plus accès à la prépension!

    La Ministre Van den Bossche a annoncé que l’âge de la prépension devrait passer de 58 ans à 60 ans d’ici 2012. Pour les pensions, on parle de “bonus” pour ceux qui travaillent plus longtemps, mais il est clair que ces “bonus” seront nécessaires pour arriver à une pension décente.

    La seule marge de négociation qui reste aux syndicats est de déterminer eux-mêmes où on va économiser. C’est inacceptable! La direction syndicale a réagi avec un appel à contraindre le gouvernement à revoir ses plans sous la pression d’une grève générale de 24 heures le 7 octobre.

    C’est un grand pas en avant, mais il en faudra davantage. Cette journée de grève doit être intégrée dans un plan d’action à long terme avec lequel on puisse faire table rase des propositions gouvernementales.

    Une action qui reste sans suite ne sert à rien. C’est la principale leçon à tirer des actions contre les propositions patronales pour l’Accord interprofessionnel. Une manifestation avait alores eu lieu, mais son ampleur a effarouché la direction syndicale et il n’y a pas eu de suite.

    Il faut éviter cela en élaborant un plan d’action où la base est impliquée active-ment. Il faut des assemblées d’information régionales et des actions. Le 7 octobre, il faut qu’un plan d’action soit soumis aux manifestants, avec des actions régionales et sectorielles qui doivent culminer dans une nouvelle grève générale de longue durée.

    C’est de cette façon que la grève peut avoir raison du gouvernement. Tous les partis traditionnels convergent pour faire des économies sur notre dos. Les mouvements de grève auront donc besoin d’un prolongement politique qui rompe avec la logique d’économie néolibérale. Dans plusieurs pays d’Europe, de nouvelles formations de gauche comme le Linkspartei en Allemagne font de bons résultats avec un programme antilibéral

    Ce potentiel existe aussi en Belgique. Le MAS veut populariser cette idée et trouver des relais. Aidez-nous, rejoignez-nous!

  • Géoroute, Poststation, “Cleaning“, attaques sur les prépensions,…. Agissons tous ensemble!

    Géoroute, Poststation, “Cleaning“, attaques sur les prépensions,….

    MODELE 9, Bulletin d’info et de discussion de postiers pour les postiers

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    Débat sur La Poste au Parlement

    Le 29 juin 2005 a vu la Chambre des Représentants débattre de la situation de La Poste. Johnny Thijs y a dit que la "situation de La Poste a évolué dans un sens positif depuis novembre 2003". On y a réalisé une ”rigoureuse maîtrise des coûts", principalement suite au "départ naturel de plus de 3.000 unités, de 38.630… à 35.760". Il concède que la "baisse attendue du volume de courrier", en revanche, "n’a pas eu lieu”.

    Il y a 3 "projets de modernisation” (lisez d’économies sur le personnel): Poststation dans 1300 bureaux, une réorganisation des 1432 bureaux dans le cadre du programme "Cleaning" et Géoroute qui doit entrer en vigueur dans tous les bureaux distributeurs. Ces "modernisations" ont été "couronnées de succès" d’après Johnny Thijs, un mensonge éhonté vu le mécontentement qui règne et les grèves qui éclatent dans tant de bureaux parce que la pression du travail devient intenable. Dans un bureau bruxellois, 2 postiers en sont venus aux mains pour un sac postal.

    Les "modernisations" ne se font pas dans l’intérêt des postiers et pas davantage dans celui du client. Les bureaux de poste qui ne rapportent pas, ça s’appelle "être rentable", doivent fermer. Thijs prétend que "seuls 300 des 1300 bureaux sont rentables". Il dit que "une large majorité des bureaux de poste sont déficitaires" et que "dans un marché libéralisé il n’est plus tenable que le secteur traitement du courrier supporte le poids des pertes des bureaux de poste". On va donc encore éliminer du personnel. Des bureaux de poste devront fusionner ou fermer, et des bureaux de poste mobiles seront mis sur pied. Cela démontre une fois de plus que les "modernisations" ne sont pas dans l’intérêt du client et du personnel. Mais ça ne s’arrête pas là: on annonce un Géoroute II et un Géoroute III!

    Johnny Thijs s’indigne de ce que "l’absentéisme progresse de façon incompréhensible de 10% à 30% dans certains bureaux". La pression du travail qui pèse sur le personnel ne lui a même pas effleuré l’esprit. De son point de vue, la question de la pression du travail se présente sous un autre angle: il a recruté ces 6 derniers mois quelque 130 managers qu’il paye grassement pour "l’assister" dans son oeuvre de "modernisation". C’est un vrai scandale! Un bureau de poste qui part en grève reçoit dès le lendemain la visite de quelques managers qui viennent mettre la pression. Des managers parés de titres pompeux à consonnance anglaise comme "human resources", etc.

    Et les syndicats?

    Les syndicats de La Poste rampent à plat ventre devant la direction. Ils n’ont pas obtenu la semaine des 36 heures en échange de Géoroute I. Mais quelques huiles syndicales ont reçu une promotion pour garder la base sous contrôle ou, s’il y a quand même des actions, pour veiller à ce qu’elles aient lieu en ordre dispersé – bureau par bureau – au lieu de dresser un plan d’action et de mener une lutte d’ensemble. Nous nous souvenons entre autres du bureau de Vilvorde qui a fait grève pendant 10 jours.

    Face à ça, il faut s’organiser et faire pression sur la bureaucratie syndicale. C’est la base qui a le pouvoir, mais elle doit encore être organisée. C’est la tâche des militants et des membres de base des syndicats.

    CCT 2005-2006

    On négocie actuellement la nouvelle CCT 2005-2006. Cette CCT devrait être soumise à la consultation de la base pour qu’elle sache les propositions scandaleuses qui sont sur la table. Aucune prépension n’est prévue pour 2005 et pour 2006, seulement pour ceux qui, à 57 ans, ont été nommés après 40 ans de service (dont 35 ans en distribution) et pour ceux qui, à 58 ans, totalisent 35 ans de service. Les contractuels et les intérimaires devront en principe travailler jusqu’à 65 ans. Tous les membres du personnel de La Poste devraient recevoir une pension complète à partir de 55 ans. Tout membre du personnel qui part à la retraite devrait aussi être remplacé par un jeune. Le chômage des jeunes est si élevé. Pourquoi retenir les aînés au travail jusqu’à ce que leur dos n’en puisse plus, alors qu’ils aspirent à un repos bien mérité, et laisser de côté ceux qui, dans la fleur de l’âge, aspirent à fonder une famille?

    Le système de classification des fonctions signifie la fin du statut des postiers. Les contractuels ne gagneront jamais la même chose qu’un agent statutaire nommé. Nous voulons le même salaire pour le même travail. Les contractuels devraient être nommés après 6 mois. La Poste doit appliquer l’article 29 de la Loi du 21 mars 1991. Sinon, les syndicats devraient prendre leurs responsabilités pour contraindre La Poste à appliquer cette loi. Pourquoi les membres du personnel devraient-ils respecter les lois si la direction de La Poste les foule sans cesse aux pieds? Les militants et les membres du personnel ne doivent pas se laisser diviser entre nuit et jour, entre contractuels et statutaires, entre tel ou tel syndicat, etc… mais doivent mener une lutte unifiée contre ce projet de CCT! Le MAS veut y participer. N’hésitez pas à prendre contact si vous voulez parler avec un postier du MAS pour faire avancer la lutte!

    Lors de la rédaction de ce tract, la convention collective était déjà rejetée à 77% par les militants syndicaux CGSP de Bruxelles, et à 89 % à Liège. Mais le désaccord était également majoritaire en Flandre Occidentale, à Anvers et au Limbourg. Le sommet syndical a donc reçu un signal clair et doit maintenant prendre sa responsabilité pour entammer une véritable lutte. Un plan d’action est nécessaire pour tous les travailleurs de la Poste, contre ces réformes et autres attaques sur les conditions de travail. Mais afin d’éviter l’épuisement, ce plan d’action doit être appliqué au même moment, et partout, et non de manière isolée bureau par bureau !

    Tract des postiers du Mouvement pour une Alternative socialiste (MAS)

    Contact: email: lspmas_post@yahoo.com. téléphone: 02/ 345 61 81

  • Débat fins de carrière. L’heure de vérité approche – il nous faut un plan d’action!

    Le débat sur les fins de carrière en question/réponse par Anja Deschoemacker

    De quoi s’agit-il?

    Il s’agit de ce que veut la bourgeoisie depuis les années 80 sans vraiment y parvenir jusqu’ici: le démantellement de la sécurité sociale. La sécurité sociale a été acquise après la seconde Guerre Mondiale, et fut élargie jusqu’à la moitié des années ’70. Depuis la fin des années ’70, ce système fut mis sous pression par la période de dépression qui s’ensuivit.

    Quelles sont les propositions du gouvernement ?

    La question devrait être: y-a-t-il encore un gouvernement? La Ministre du Travail Freya Van den Bossche (SP.a) a publié la note « Vieillir activement ». Dans cette note, figurent des propositions inacceptables pour les syndicats comme pour le PS, par exemple l’abolition de fait de la prépension, le système de malus pour les pensions (une amende de 4% sur la pension par année de départ anticipé),… Cette note n’est pas celle du gouvernement, mais un rassemblement de propositions élaborées par Van Den Bosche et Verhofstadt.

    Le conseil général de la CSC a depuis lors voté 13 points à problème, voire de rupture, dont pas mal de propositions de cette note. Si le gouvernement reprend telle quelle cette note comme base de négociation ou s’il reprend ces points de ruptures dans une nouvelle note, la CSC décidera le 20 septembre de ne pas négocier et commencera à mobiliser. Des dirigeants de la CSC se réfèrent à l’énorme mouvement de grève de 1977, qui fit alors tomber le gouvernement.

    Le ministre des affaires sociales Rudy Demotte (PS) a fait une autre proposition à titre personnel. Contrairement à « Viellir activement » , cette note est bien acqueillie par la FGTB et carrément applaudie par la CSC. Demotte s’oppose directement aux propositions des VLD, MR et SP.a (le financement alternatif par une hausse de la TVA), ce qui toucherait surtout les plus pauvres. Le Bureau du Plan – suivi par la Banque Nationale et la CNT – déclare de plus que cela plomberait fortement l’économie.

    En bref, Demotte propose une forte diminution des charges patronales, mais non-linéaire. Demotte veut baisser les charges sur les salaires les plus bas (et sur ceux des plus de cinquante ans), tout en augmentant celles sur les plus hauts salaires. En outre, il veut élargir l’assiette des charges à tous les revenus, y compris les revenus mobiliers et immobiliers, mais aussi la fameuse « taxe-robot ». En contradiction avec les autres partis, Demotte propose de lier les allocations au bien-être.

    Quelles sont les tendances internationales?

    Tous les pays européens ont subi une offensive de grande ampleur sur le système des pensions. On essaye d’augmenter « le taux d’activité des travailleurs les plus âgés », c-à-d augmenter l’âge de la pension. En Belgique, ce taux d’activité est bas, dû surtout à la haute productivité de l’économie, avec une pression de travail presque intenable qui use les travailleurs très rapidement.

    Il va de soi que la bourgeoisie belge ne veut pas pas être en reste. Mais le fait est que les pensions belges ont déjà été réformées, pas d’un coup, mais sur base des assainissements des 20 dernières années. Pour avoir une pension complète, il faut 45 années de travail (depuis 1997 également pour les femmes), condition parmi les plus hautes en Europe, alors que les allocations sont parmi les plus basses (plus de 60% des pensionnées ont une pension inféreieure à 1000 euros par mois).

    Est-ce que les pensions sont effectivement impayables?

    Pas du tout! Alors que les pensions pesaient 5,4% du produit intérieur brut (PIB) en 1980, ce n’est plus que 5,2% aujourd’hui. Les déficits dans la sécurité sociale sont négligeable comparés à la richesse produite : en 2003 un déficit de 0,5% du PIB, en 2004 de 0,1%. Ensuite, les cinq dernières années prises globalement dégageaienrt toujours un surplus (de 0,6% du PIB en 2000, de 0,7% en 2001 et de 0,3% en 2002). Enfin, les dépenses de sécurité sociale ne pèsent que 16,7% du PIB, malgré la hausse spectaculaire du chômage et des coûts des soins de santé, contre 16,2% en 1980.

    Que faire?

    Le MAS va, avec tous les moyens dont il dispose, participer à la lutte syndicale contre le démantèlement de nos droits acquis. Nos militants syndicaux vont défendre dans les deux grands syndicats la nécessité d’un plan d’action. Seule la construction d’un rapport de force par des manifestations, des actions, des grèves et des grèves générales nous permettra d’obtenir le maximum, de maintenir nos droits acquis et de les élargir avec une hausse plus que nécessaire des allocations et leur liaison au bien-être.

    De l’autre côté, nous n’allons pas défendre les propositions du PS. Le PS – et les directions syndicales – sont fondamentalement d’accord avec l’argument des « charges salariales trop élevées ». Nous pensons au contraire que la classe ouvrière est assez forte pour stopper l’offensive contre les salaires directs et indirects pour autant que les syndicats élaborent une stratégie de lutte appropriée.

    La sécurité sociale n’est pas impayable. Le « déficit » futur n’est pas causé par le vieillissement, mais organisé de façon consciente par la diminution continue de l’intervention de l’Etat et des charges soidisant patronales. C’est contre cela qu’il faut agir, sans entrer dans des négociations qui vont miner la structure même de la sécurité sociale.

  • Les leçons de la grève AGC-Splintex

    Lettre ouverte à tous les travailleurs

    Produit en commun par Gustave Dache, ex-délégué FGTB-métal & le MAS, Mouvement pour une Alternative Socialiste

    AVANT-PROPOS

    Camarades,

    Cette brochure est le résultat de la rencontre, au travers d’une lutte commune, de militants du MAS et de Gustave Dache. Militants qui luttent pour une certaine conception de la société, à savoir une société socialiste et d’une certaine conception du syndicalisme, à savoir un syndicalisme de combat. L’idée nous est venue de faire cette brochure non pas comme « un petit bout d’histoire du mouvement ouvrier », mais plutôt afin de tirer les leçons de cette lutte, pour ouvrir la discussion afin qu’elle serve aux futures générations d’ouvriers en lutte, que ce soient des travailleurs combatifs, des militants ou des délégués syndicaux sincères qui veulent défendre leur classe du mieux qu’ils peuvent.

    Nous sortons d’une période (les années 90’) qui a eu beaucoup de conséquences fâcheuses pour le mouvement ouvrier. Les représentants et défenseurs du Capital ont profité de la chute du Mur pour faire pencher la balance en leur faveur aux dépends du Travail. Le syndicalisme de lutte a apparemment perdu de sa vigueur sous les assauts de la pensée néo-libérale. De nombreuses traditions issues du marxisme, une longue expérience, a tendance à disparaître. Il en résulte une conception du syndicalisme qui trahit les intérêts des ouvriers, à savoir un syndicalisme de concertation, et une vision réformiste de la transformation de la société. Si nous voulons à l’avenir gagner les batailles, il va nous falloir tirer les leçons des victoires mais également des défaites. C’est dans cette optique que nous avons écrit cette brochure.

    Nous avions déjà posé les premiers jalons d’analyse du conflit au travers d’un entretien avec Gustave Dache qui est paru dans le n° 100 de l’Alternative Socialiste (avril 2005). Mais il nous fallait, vu les implications de cette lutte pour la classe ouvrière, y revenir de manière plus approfondie. Voilà qui est fait.

    Le Mouvement pour une Alternative Socialiste, organisation trotskyste, faisant partie du CIO, Comité pour une Internationale Ouvrière, s’est impliqué dans ce conflit, avec des moyens limités, mais en défendant une méthode de lutte qui lui semblait la meilleure pour arracher une victoire. Il se fait que nous partagions la même vision que Gustave Dache sur le déroulement du conflit et que nous avons dès lors unis nos forces. Gustave n’est pas un inconnu dans la région puisque par le passé il a participé activement à la grève générale de 60-61, à l’époque où il était responsable sur les plans local (Gilly), régional et national des Jeunes Gardes Socialistes (JGS) et militant syndical dans la verrerie (Glaverbel). Il a ensuite été délégué syndical dans le Métal (Caterpillar). Il a été également président du comité de grève aux Glaces de Courcelles pendant les six semaines de grève en 1973. Il a également participé à d’autres conflits comme la lutte de Clabecq à laquelle nous avions également pris part – à l’époque nous nous appelions Militant. Si cette brochure peut ouvrir certaines portes et discussions sur les méthodes syndicales et sur la nature des organisations dont la classe ouvrière a besoin, elle aura alors atteint son objectif.

    Juillet 2005.

    Pourquoi devons-nous tirer honnêtement mais fermement les leçons de la grève ?

    Il est certain que beaucoup de travailleurs de Splintex et, plus largement, de la région de Charleroi et du pays, s’interrogent sur l’origine de la défaite de cette grève qui a duré 105 jours.

    En effet il n’y avait pas de justification économique aux pertes d’emplois, bien au contraire, l’usine de Fleurus ‘’était performante’’ avec un personnel hautement qualifié dans le verre, un outil des plus modernes et un carnet de commandes rempli jusqu’en 2008. De plus, la multinationale japonaise ASAHI fait des bénéfices; en 2003 elle en a fait pour 1,3 milliard de dollars U.S. Evidemment, pour justifier son plan de restructuration, la direction d’AGC parle de pertes. Mais les syndicalistes savent qu’une multinationale peut toujours manipuler les comptes et bilans d’une filiale comme elle le veut et sans que l’on puisse la contrôler. La seule parade contre cela consiste à imposer aux patrons l’ancienne revendication qui est toujours d’actualité de l’ouverture des livres de comptes. Il ne faut pas oublier que l’entreprise est née grâce aux luttes ouvrières ; suite aux grèves de 1975 à Glaverbel, où un accord a été obtenu que les patrons s’étaient engagés à construire une unité de production verrière dans la région de Charleroi avec des investissements publics à la clé.

    Il faut tenir en compte que l’objectif de départ était un Non au plan de restructuration, non aux licenciements, non aux pertes d’emplois (284). Finalement, malgré certaines améliorations financières et les pré-pensions, tout le plan patronal est passé malgré l’énorme potentiel de combativité des travailleurs.

    Il y a comme un fossé, pour ne pas dire un gouffre, entre les déclarations triomphantes des responsables syndicaux qui, à l’issue de cette lutte, la considèrent comme une victoire, et le résultat final. Et ce, tant pour les travailleurs de Splintex que pour ceux des autres usines. Il faut tenir compte de toutes les conséquences pour les travailleurs de Splintex et leurs familles qui se retrouvent à la porte ainsi que de toutes les conséquences négatives pour ceux qui n’ont pas été licenciés. Il faut tenir compte du fait que les travailleurs sont rentrés battus dans l’usine, affaiblis et divisés du fait de l’élimination d’une grande partie de la base la plus combative et d’une partie importante des membres de la délégation syndicale. Il reste encore une base combative dans l’usine, mais la défaite lui rendra la tâche plus difficile.

    La durée et l’enjeu du conflit lui ont donné un impact national. Dès le début, les travailleurs de Splintex avaient pressenti avec leur instinct de classe que la lutte allait être longue et dure parce que la multinationale japonaise, représentée par la direction patronale de Fleurus, s’y était préparée en faisant des stocks. Elle était déterminée à engager l’épreuve de force pour briser une fois pour toutes la résistance ouvrière à l’intérieur de l’usine, afin d’y introduire des contrats intérimaires ainsi qu’une flexibilité et une productivité encore plus accrues.

    En ce sens le message du président Shinya Ishizu en novembre 2003 est très clair quand il déclare : « Notre objectif stratégique est d’obtenir un rendement hors pair, la stratégie d’AGC est d’augmenter sans relâche le profit des actionnaires ». Pour obtenir ces résultats les patrons devaient par tous les moyens, y compris la menace de délocalisation, détruire l’avant-garde ouvrière qui résistait dans l’usine, et ce au travers des listes noires et grises. Comme le souligne le délégué principal FGTB G. Bordenga dans Le Soir du 15 avril 2005 : « Les faits confirment qu’il s’agit d’une restructuration bidon masquant une opération de nettoyage ». Ce conflit, par ses objectifs et ses résultats, concernait l’ensemble de la classe ouvrière. Devant les pertes d’emplois à répétition, plus personne ne peut rester indifférent et fataliste. On ne peut plus subir les licenciements, les pertes d’emplois comme un fait accompli ; cette fatalité, les travailleurs de Splintex, par leur combativité et leur détermination, l’ont refusée. Car accepter le fatalisme de la crise capitaliste, cela se traduit toujours par des pertes d’emplois partout. En refusant ce fatalisme les travailleurs de Splintex ont montré la voie à suivre à toute la classe ouvrière. Il est évident que ce n’était pas le choix le plus facile à faire. Mais ils savaient par expérience que la situation d’aujourd’hui était similaire à celle de 2000. A l’époque, la direction s’était déjà débarrassée de 300 travailleurs avant de réembaucher peu après avec des contrats précaires pour en revenir au même volume d’emploi qu’avant la restructuration. Cette fois-ci ils ne voulaient plus être trompés, ils ne croyaient plus aux arguments de la direction qui disait que ce plan était nécessaire pour la pérennité de l’entreprise.

    Les espoirs que les travailleurs avaient mis dans la victoire de la lutte se sont finalement transformés en abattement et en colère avec beaucoup de questions restées sans réponse. L’expérience nous montre qu’une victoire des ouvriers en lutte à un impact positif sur toute la classe ouvrière. Cela entraîne une plus grande confiance de celle-ci face au patronat. Mais une défaite produit l’effet inverse avec un recul du moral et de la combativité. Une chute des conditions matérielles consécutive aux licenciements a souvent pour effet un engourdissement des luttes et la montée des sentiments et des forces réactionnaires avec comme conséquence la croissance de l’extrême droite. Les travailleurs qui se sont battus avec courage et abnégation ont le sentiment que ce sont les jaunes qui ont finalement eut raison sur eux.

    S’il est plus agréable de tirer les leçons d’une victoire, il est cependant tout aussi nécessaire de tirer les leçons d’une défaite, sans complaisance vis-à-vis des appareils syndicaux, afin d’armer la classe ouvrière pour les prochaines luttes qui ne manqueront pas de se produire dans un laps de temps relativement court.

    Une « lutte exemplaire » est-elle suffisante en soi pour gagner la grève ?

    La presse ouvrière, toutes tendances confondues, ne tarissait pas d’éloges au plus fort du conflit sur le caractère exemplaire de cette lutte, la conclusion logique voulant que la victoire était à portée de main. Cela n’a pas été le cas. Que les grévistes aient fait preuve d’un courage à toute épreuve est indéniable ; plus de trois mois de grève sous la pression du patronat, des cadres, des médias, de la police, du politique, des difficultés familiales et financières, tout cela montre l’énorme potentiel de combativité qui vit actuellement au sein de la classe ouvrière. Ceux de Clabecq et de Renault avaient fait preuve de la même détermination et de la même combativité, mais n’avaient pas davantage réussi à imposer leur volonté d’empêcher les licenciements du fait qu’ils sont également resté seul dans la lutte.

    Ce potentiel de combativité est présent et se développe partout, la manifestation nationale pour l’Accord Interprofessionnel en est un autre exemple. Alors que les prévisions les plus optimistes des syndicats oscillaient entre 25.000 et 30.000 personnes, c’est le double qui a déferlé sur Bruxelles malgré un laps de temps très court et sans grande préparation. Mais si la combativité est une chose importante, les méthodes de lutte et les moyens employés ont aussi leur importance.

    Cinq semaines avant la fin de la grève Gustave Dache avait proposé publiquement, en assemblée interprofessionnelle des délégués FGTB, une grève régionale interprofessionnelle de 24 heures pour appuyer et créer ainsi un rapport de force en faveur des grévistes de Splintex. Cette proposition a été très bien accueillie par les délégués présents et par les ouvriers de Splintex, mais le bureau de l’interprofessionnelle FGTB a fait la sourde oreille comme si rien n’avait été proposé.

    Ce genre de proposition d’étendre le mouvement aux autres usines de la région ne convient pas aux appareils syndicaux. Ils ont préféré l’ignorer bureaucratiquement, celle-ci n’a même pas été mise au vote des délégués présents, de peur qu’elle ne soit acceptée.

    Lors de diverses assemblées générales du personnel de Splintex qui ont suivi, plusieurs ouvriers ont repris cette proposition de 24 heures de grève qui a également été ignorée par la délégation syndicale. Une autre démarche a été faite aussi par une dizaine d’ouvriers de Splintex qui se sont rendus au siège de la FGTB pour demander à être reçus afin de faire également cette proposition de grève régionale mais ils n’ont même pas été reçus par la direction de la FGTB.

    Il ne faut pas perdre de vue que la direction d’AGC avait le soutien de la FEB, de la justice, de la police, des médias et du politique. Les travailleurs de Splintex n’avaient quant à eux pas un soutien équivalent. Dans ce conflit, aucun responsable syndical tant FGTB que CSC n’a exigé de la direction d’AGC Automotive le maintien intégral du volume de l’emploi ou le remboursement des aides financières qu’ils ont reçues de la collectivité pour l’installation de l’entreprise à Fleurus.

    Qu’est-ce qui n’a pas fonctionné?

    A l’annonce du plan de restructuration, les travailleurs – ouvriers et employés – sont partis spontanément en grève. Ils voulaient dès le début descendre à la Région wallonne pour interpeller les politiques, se rendre à la verrerie de Moustier en autocar afin de demander la solidarité, ils ont demandé de ne pas rester cantonnés à Fleurus, de bouger afin d’animer la lutte par des actions ponctuelles.

    Mais les appareils syndicaux tant FGTB que CSC, sous toutes sortes de prétextes, ont répondu NIET. Ils ont fait en sorte de verrouiller le conflit pour qu’il ne prenne pas une ampleur trop importante. Ils ont refusé d’organiser des actions au moment opportun et de profiter du temps disponible, lorsque les patrons refusaient de négocier. Ils ont constitué un comité de grève en désignant eux-mêmes paritairement un nombre restreint d’ouvriers sans pouvoir de décision et qui dans les faits était sous contrôle de la délégation syndicale. Un comité de soutien a aussi été créé, mais il s’est très vite révélé inefficace, tout juste bon à se placer dans l’ombre des appareils syndicaux sous prétexte de « Non-ingérence dans la grève ». Il n’a donné aucune autre perspective que de servir de soutien logistique, comme si c’était une fin en soi, et sans aucune efficacité pour la grève (mis à part une soirée de solidarité). Bien que les membres du comité de soutien considéraient comme juste la proposition de 24 heures de grève à Charleroi, ils n’ont même pas eu la franchise de l’appuyer et de la défendre ouvertement devant les appareils syndicaux. Pendant toute la grève, l’avant-garde ouvrière de Splintex a cherché le moyen d’étendre la lutte. Mais des pressions ont été faites par les appareils afin que les grévistes de Splintex qui le souhaitaient ne puissent pas faire partie du comité de soutien qui aurait alors pu avoir un autre impact sur le déroulement de la grève. Les déclarations de Christian Viroux, lors d’une conférence de presse, ne font que confirmer la justesse et la nécessité qu’il y avait à donner le mot d’ordre de grève interprofessionnelle de 24 heures à Charleroi. Notamment quand il déclare : « Depuis trois mois, sous sommes harcelés, critiqués par les responsables politiques, tant Van Cau que Marcourt et les autres. En disant que nous détériorons l’étiquette de la Wallonie, que nous faisons fuir les investisseurs financiers,…En plus nous sommes isolés dans la mesure où la CSC agit de concert et a accepté de négocier le plan dès le mois de janvier ». Il n’est pas bien difficile de répondre à C.Viroux que si la FGTB de Charleroi et la centrale générale étaient isolées, c’est parce qu’elles le voulaient bien. En effet en refusant de décréter une grève régionale interprofessionnelle de 24 heures à Charleroi, on se condamnait à l’isolement. Il y a même des responsables syndicaux ou autres qui vont jusqu’à motiver ce refus en disant : « Et si une grève interprofessionnelle était un fiasco, est-ce que cela suffirait à dissuader les patrons d’appliquer le plan ? » A tous ceux-là, nous répondons avec fermeté qu’à chaque fois que la FGTB régionale ou nationale à donné un mot d’ordre d’action ou de grève, il a été couronné de succès. Il n’y a aucun exemple qui démontre le contraire. Et ceux qui, par peur ou incompétence, prétendent le contraire démontrent sans équivoque qu’ils n’ont pas confiance dans la capacité de lutte de la classe ouvrière.

    S’il ne voulait pas rester isolé, tout l’appareil syndical interprofessionnel devait impérativement étendre le conflit. Mais il a refusé – se condamnant ainsi à rester isolé – et ce refus a gravement hypothéqué la réussite de la grève. Certains travailleurs et militants se posent aussi la question suivante : « 24 heures de grève aurait-elle été suffisante pour empêcher les patrons de licencier ? ». A ce genre de question personne ne peut répondre avec certitude. Mais ce qu’on peut affirmer avec certitude, c’est que les patrons des autres usines n’auraient pas apprécié que des grèves de solidarité aient lieu dans leurs propres entreprises. Ce faisant, on aurait pu briser la solidarité des patrons entre-eux. Mais pour ouvrir cette brèche dans le front patronal qui soutenait AGC, il fallait vraiment le vouloir.

    Les patrons eux aussi n’ont pas manqué de constater qu’il n’y avait pas cette volonté d’aller plus loin dans la lutte de la part des directions syndicales tant FGTB que CSC. C’est pour cela qu’ils sont restés fermes sur leurs positions.

    Encore une fois, il faut le dire, nous n’avons pas à inventer de nouvelles méthodes de luttes. Elles existent depuis toujours, elles sont restées les mêmes. C’est le rapport de force, la solidarité, la grève, l’occupation d’usine, la lutte de classe. Ce sont ces méthodes de luttes que les travailleurs eux-mêmes emploient tous les jours. C’est le seul langage que les patrons comprennent. Nous devons continuer à nous appuyer sur ces méthodes éprouvées de lutte qui ont jadis permis au mouvement ouvrier d’aller partout de l’avant.

    Pourquoi l’appareil a-t-il freiné l’élargissement de la grève ?

    Sous la pression de la base et vu l’arrogance patronale, c’est seulement après trois mois que la régionale FGTB annonce finalement dans un communiqué de presse qu’elle «se prépare à mettre en œuvre une réaction syndicale interprofessionnelle ». Mais ce n’étaient que des intentions, qu’une façade, car lors de la dernière assemblée interprofessionnelle FGTB du lundi 14 mars, Di Santo, président métal FGTB, a fustigé la nécessité de l’appel à une grève régionale de 24 heures. Cet appel venait d’être remis en avant pour la deuxième fois par Gustave Dache, avec sa critique par rapport au frein que constitue la position de l’appareil interprofessionnel dans le refus de l’élargissement de la grève. En réaction, A. Di Santo a notamment dit : « Je ne permettrai plus qu’on vienne critiquer le syndicat, ça, je le répète, je ne le permettrai plus et celui qui n’est pas d’accord avec ça il doit partir, il n’a plus rien à faire ici. Oui, Gustave Dache, c’est à toi que je m’adresse. Nous devons tous sortir d’ici la tête haute en chantant l’Internationale, parce que Splintex c’est une victoire ». L’attaque de Di Santo mettant à mal la liberté de critique et la démocratie au sein des instances syndicales a été désavouée. La salle ne l’a pas suivi, au contraire beaucoup de délégués ont été choqués par l’attitude autoritaire, anti-démocratique et bureaucratique de Di Santo. D’ailleurs quelques délégués et militants sont intervenus à la tribune pour défendre le droit à pouvoir continuer à exprimer un avis critique ou une position qui serait minoritaire. Certains pouvaient penser que cette attitude était un accident de parcours mais en réalité c’est le naturel bureaucratique qui revient à la surface dès que l’appareil est mis en cause. Ils sont très vite agacés quand ils sont critiqués et il n’a d’ailleurs pas été désavoué publiquement par les autres responsables du bureau syndical; ils se soutiennent mutuellement comme par réflexe. On aurait pu s’attendre à ce que certains permanents et délégués, qui se profilent à gauche, interviennent dans le débat pour défendre la liberté d’expression et de critique, mais ils ont préféré s’abstenir en considérant peut-être que ça ne les concernait pas.

    Si certains bureaucrates pensent qu’ils vont étouffer la liberté d’expression, ils se trompent. Nous allons continuer à nous exprimer avec encore bien plus de force la prochaine fois et cela dans le respect des principes démocratiques. La liberté de pensée, d’expression et de critique sont les bases fondamentales de la démocratie et ne peut en aucun cas être limitée ou étouffée. Toute tentative dans ce sens est contradictoire avec les principes et les statuts de la FGTB. Ceux qui dans la pratique, lors d’assemblées ou autres, ne respectent pas ces droits et principes démocratiques et tentent de les supprimer n’ont pas leur place au sein de la FGTB. Certains de ceux qui s’y sont essayés dans le passé, face à des délégués combatifs ayant une juste perspective politique et syndicale, s’y sont cassés les dents.

    Depuis de nombreuses années, la classe ouvrière est dominée par la politique social-démocrate réformiste des directions ouvrières comme celle du PS et de la FGTB. Tant qu’il s’agit de se placer sur le terrain du réformisme pour obtenir de petites améliorations, de petites mesures de rattrapage vis-à-vis de la hausse du coût de la vie, alors et alors seulement les appareils syndicaux poussés par la base répondent parfois positivement et sont disposés à des mobilisations limitées dans le temps. Mobilisations qui ne dépassent pas un certain cadre autorisé et toléré par la démocratie bourgeoise et qui n’est pas trop préjudiciable aux patrons. Mais comme on le constate, un demi-siècle de collaboration de classe prônée par la social-démocratie et les réformistes n’a pas adouci d’un iota le cœur des capitalistes. Les appareils réformistes tant syndicaux que politiques répugnent à poser le moindre acte qui aille dans le sens des méthodes traditionnelles de la lutte de classe employées depuis toujours par les travailleurs en grève. Les appareils syndicaux réagissent violemment et avec la plus grande détermination contre tous ceux qui veulent défendre et s’appuyer sur les méthodes traditionnelles de la lutte de classe sans compromissions pour arracher les revendications ouvrières et faire triompher les luttes. Il faut rappeler que les plus grandes conquêtes sociales ont été arrachées par la lutte de classe. La nature bureaucratique des appareils syndicaux revient régulièrement à la surface dès lors qu’ils sont un temps soit peu mis en cause. En effet à l’occasion de la soirée de solidarité avec AGC-Splintex qui a eu lieu à Lodelinsart, le camarade Silvio Marra, ex-délégué FGTB des Forges de Clabecq, a pris la parole pour apporter sa solidarité à la grève d’AGC et expliquer ce que les travailleurs de Clabecq avaient fait pour mobiliser 70.000 personnes pour la défense de l’emploi ; il a également exprimé son amertume de ne pas avoir reçu le soutien des instances nationales de la FGTB dans le conflit de Clabecq. Pour Christian Viroux, permanent verrier, c’en était trop ; il s’en est pris au camarade Marra en lui disant : « Il ne faut pas venir foutre la merde ici ». Les bonzes syndicaux en sont arrivés à ne plus permettre la moindre petite critique, où est donc le respect de la démocratie à la FGTB ? Bien que la centrale générale FGTB a soutenu les ouvriers en grève, étant plus proche d’eux et de leur volonté de lutte, le secteur du verre à d’ailleurs fait grève à plusieurs reprises également mais il n’a plus le poids qu’il avait dans le passé. Il n’empêche que sur le fond, sur l’essentiel, elle à aussi refusé d’étendre la grève à tous les secteurs de l’interprofessionnelle, seul moyen efficace de faire face à l’agressivité d’une multinationale. Face aux multinationales, il y a belle lurette que le temps du corporatisme est révolu. Il n’est pas possible non plus, à la longue, pour les grévistes de rivaliser financièrement avec les multinationales.

    L’absence de prolongement politique aux luttes syndicale et le rôle du PS.

    Beaucoup de permanents syndicaux FGTB ont leur carte au PS. C’est presque une obligation ; s’ils veulent faire carrière au syndicat, ils doivent être des fonctionnaires disciplinés et obéissants. Les liens entre le PS et la FGTB sont encore très forts. Avec un parti qui défendrait vraiment les travailleurs sur la base de la lutte de classe en les mobilisant, le problème ne serait pas pareil. Mais nous avons un PS qui se trouve en coalition permanente avec d’autres partis dans les gouvernements et qui est pourtant en position dominante; mais le PS, au lieu de défendre les revendications ouvrières, joue le rôle du médecin au chevet du capitalisme malade d’un cancer généralisé. Il gère la crise capitaliste en bon gestionnaire. Le PS qui prétend être le parti des travailleurs fait l’inverse de ce qu’il doit faire. Il gère une économie capitaliste au lieu de la combattre, cette économie qui est dans un état de développement où les contradictions ne cessent de s’accroître et où le chômage et la misère gagnent de plus en plus de terrain, où une partie importante de la population est en situation de pauvreté (15%) et est laissée au bord de la route. Dans ces conditions le PS ne veut certainement pas de conflits qui pourraient mettre à mal sa position au sein des institutions de l’Etat, il fait tout ce qu’il peut avec la collaboration de l’appareil syndical afin de limiter les conflits comme celui de Splintex. De même le PS veut circonscrire les conflits de peur d’éloigner les éventuels investisseurs à venir en Wallonie. Il joue ainsi le rôle du pompier au service du patronat. La tradition réformiste du PS qui touche de larges secteurs de l’appareil syndical FGTB, tradition qui ne conçoit l’amélioration de la société que par la voie parlementaire, s’accorde très mal avec des mots d’ordre de grève régionale ou nationale, car il existe toujours le risque qu’une grève régionale de 24 heures s’élargisse et prenne un caractère nettement politique surtout avec un conflit comme celui de Splintex qui reçoit un grand appui parmi l’ensemble des travailleurs.

    L’idéologie réformiste, qui prédomine au sein des instances syndicales FGTB qui considèrent toujours le PS comme leur relais politique, pèse également sur les délégations syndicales qui n’ont pas une longue expérience de la lutte de classe et qui sont facilement enclines également à accepter le réformisme parce qu’elles ne voient pas ou ne croient pas dans l’efficacité d’un syndicalisme combatif qui remet en cause le capitalisme. On peut encore citer l’exemple d’un ex-délégué verrier FGTB qui n’est pas membre du PS mais qui est depuis longtemps un électeur assidu du PS. Il n’est pas aveugle pour autant. Quand il intervient à la tribune, il critique le PS pour sa politique réformiste et son manque de soutien aux travailleurs en général et à la grève de Splintex en particulier et « estime que le MR n’a plus le monopole du libéralisme, le PS s’en chargeant lui-même » . Il lui est répondu par Marcel Bierlaire président de la FGTB de Charleroi « Si vous avez des critiques à faire au PS, vous devez aller les faire au PS mais pas ici ».

    Pourquoi avons-nous autant insisté pour que l’interprofessionnelle donne le mot d’ordre de 24 heures de grève avec piquets devant les usines à Charleroi ?

    1) Parce que d’une part, la direction d’AGC, filiale de la multinationale japonaise avait le soutien inconditionnel de la FEB et aussi de la police, de la justice, de la presse et du politique. Les plus hauts dirigeants du PS en particulier ne sont pas restés au balcon. Le 2 décembre le Ministre de l’Emploi Marcourt (PS) a réuni d’urgence le comité d’alerte pour faire libérer la direction afin qu’elle puisse négocier, mais quand la direction a bloqué les négociations, ne voulant pas dépasser les Conventions Collectives du Travail conclues dans les autres usines verrières, Marcourt n’est plus intervenu sauf pour déclarer qu’il « fallait sauver l’essentiel des 560 emplois restants et laisser éliminer les 249 emplois que la direction avait prévus. » Le Ministre-Président Van Cauwenberghe (PS) a dit à plusieurs reprises que « ce n’est pas à Fleurus qu’on gagne la bataille contre la globalisation ». Il a considéré la grève de Splintex « comme une tache noire pour la Wallonie ». Freya Van den Bossche (SP.a), Ministre fédérale de l’Emploi, a autorisé et permis l’intervention des robocops sans raison aucune – si ce n’est que pour impressionner les grévistes – vu que la police locale assumait le maintien de l’ordre normalement.

    Laurette Onkelinks (PS), Ministre de la Justice, n’a fait aucun commentaire quand le tribunal a infligé 7.500 euros d’astreintes aux grévistes, mettant à mal les libertés syndicales. Ces attaques patronales mettant à mal les libertés syndicales se répètent de plus en plus. Le conciliateur social A. Blaimont n’a pas eu non plus une attitude impartiale dans le conflit. Il a déclaré dans la presse qu’il était « estomaqué » par le résultat du vote négatif. « C’était un texte acceptable; évidemment il y avait 249 emplois perdus, mais on en sauvait 566 autres, on se retrouve maintenant dans une situation où je me demande si l’usine ne va pas être fermée ». Il ne voit pas ce qu’il va pouvoir encore apporter dans ce conflit pour aider l’entreprise à sortir de la crise.

    2) Et d’autre part, devant cette concentration de forces pour soutenir les patrons d’AGC, il était impératif et nécessaire – si les appareils syndicaux voulaient vraiment que la lutte soit gagnée – d’organiser un soutien équivalent afin de créer un rapport de force en faveur des grévistes et de mettre dans la balance, pour faire le contre-poids, toute la force, tout le poids de la classe ouvrière. Il n’y a pas d’autres moyens plus efficaces que d’étendre la grève aux autres usines et de commencer par une grève générale interprofessionnelle de 24 heures à Charleroi. Nous pensons que les patrons et une multinationale agressive ne plient que face aux grèves régionales et, s’il le faut, nationales. Ces 24 heures de grève proposées ne devaient pas être une fin en soi, mais le début d’actions plus dures. Je ne pense pas comme le sous-entendent certains camarades que ces 24 heures de grève soient « la panacée », mais l’histoire des luttes sociales du mouvement ouvrier nous enseigne que les patrons ne comprennent qu’un seul langage, le langage de l’action généralisée.

    Vote secret ou vote à main levée ?

    Dans le conflit, alors que les travailleurs réunis en assemblée générale pratiquaient le vote à main levée afin de prendre des décisions démocratiquement – il était question de la poursuite ou non de la grève – la direction d’AGC a tenté d’imposer et finalement obtenu l’application du vote secret.

    Il faut tenir compte du fait que les moyens d’information dont dispose le patronat sont beaucoup plus importants que ceux dont disposent les organisations ouvrières. Dans ces conditions, il est plus facile au patronat d’influencer les travailleurs à son avantage via les médias (qui manquent toujours d’objectivité dans les conflits). Les travailleurs, eux, ont comme moyen d’information principal les assemblées générales et la force combative qu’elles dégagent pour orienter la lutte dans le sens ouvrier. Les décisions prises collectivement en assemblée générale sont pour les travailleurs l’expression de la démocratie ouvrière de base la plus totale.

    Les méthodes de vote individuel à bulletin secret comme aux élections législatives n’ont rien à voir avec la pratique démocratique des méthodes traditionnelles employées depuis toujours par les travailleurs en lutte. Dans tous les mouvements sociaux, il y a toujours une partie des travailleurs qui sont plus conscients, plus décidés, plus combatifs et qui veulent agir collectivement pour le bien de l’ensemble où la solidarité collective est primordiale. C’est ce qu’on appelle l’avant-garde, qui tire le mouvement vers l’avant. Et l’autre partie, qui est moins consciente, moins décidée, plus hésitante, où l’individualisme est le plus important. Il prend souvent le dessus sur le collectif. C’est ce qu’on appelle l’arrière-garde, qui tire le mouvement vers l’arrière.

    Le vote à main levée va dans le sens de l’intérêt de la solidarité collective. Tandis que le vote à bulletin secret privilégie les intérêts individuels au détriment du collectif.

    C’est pour toutes ces raisons que les patrons – et souvent les appareils syndicaux – préférent les votes à bullletin secret car l’individualisme est synonyme de fatalisme qui se résume en fin de compte à accepter la crise capitaliste.

    Pourquoi les appareils syndicaux sont-ils un tel frein ?

    La peur des arguments patronaux n’a pas été absente dans cette lutte, la menace de fermeture a servi comme argument massue pour impressionner les permanents en charge qui y ont trouvé un faux prétexte pour accepter la reprise du travail et le plan patronal. L’argument sous-jacent pour accepter était « Nous ne voulons pas prendre le risque d’être responsables de la fermeture ». C’est pour cela qu’ils ont signé le protocole d’accord le soir du 13 mars 2005 à Namur. Protocole qui comprenait d’ailleurs au point 2.2 «Quelles que soient les modalités d’organisation de cette assemblée et l’issue de celle-ci, les organisations syndicales s’engagent à signer le préaccord joint au présent protocole »

    Le vote par les travailleurs de Splintex qui devait avoir lieu le 15 mars, pour se prononcer sur l’arrêt ou la poursuite de la grève, n’était pas encore connu que les appareils syndicaux en front commun FGTB-CSC avaient déjà signé deux jours plus tôt. C’est comme cela que les appareils syndicaux conçoivent en pratique la démocratie. Ils ont cédé à la pression et à l’ultimatum de la multinationale japonaise.

    Dès le début, la stratégie syndicale n’était pas à la hauteur de l’enjeu. Les appareils syndicaux ont emmuré et laissé pourrir le conflit au lieu d’organiser la solidarité à l’ensemble des autres usines de la régionale de Charleroi et de profiter du temps qui leur était disponible par le fait que la direction d’AGC, qui n’était pas pressée, faisait traîner les négociations. L’occupation de l’usine couplée à un élargissement de la lutte, proposition faite le 16 janvier, n’a pas été reprise non plus par la délégation syndicale, ni par l’appareil FGTB-CSC sous prétexte que les ouvriers auraient pu endommager l’outil. Alors que les ouvriers sont les premiers à défendre leurs outils de travail et que la police aurait eu beaucoup plus de mal à déloger les travailleurs qui occupent l’usine qu’à casser un piquet. Les patrons auraient eu également plus de mal à faire redémarrer partiellement l’usine avec les jaunes qui, suite à des pressions patronales et financières, ont cédé et repris le travail. Dans une situation qui s’enlisait, il était évidemment plus facile aux patrons d’organiser de l’intérieur de l’usine les non-grévistes afin de réclamer la reprise du travail et d’exercer des pressions sur les grévistes. Dès le début, la stratégie patronale était de briser la grève, d’organiser sous la conduite des cadres un comité anti-grève qui était comme un loup dans la bergerie; il n’est pas impossible que le patronat utilise ce genre de comité à l’avenir pour briser les futures grèves, voire constituer un embryon de syndicat corporatif jaune encore plus à droite que la C.S.C. Dans un conflit avec des objectifs importants comme c’était le cas à Splintex, il doit être constitué dès le début par les grévistes eux-même réunis en assemblée générale un comité de grève révocable par celle-ci ; Cette assemblée doit élire les ouvriers les plus combatifs et les plus déterminés indépendamment de l’affiliation syndicale. Ce comité de grève doit tenir une assemblée générale tous les jours afin que l’ensemble des travailleurs soient tenus au courant de tout et participent activement au développement de la lutte. Un plus grand nombre de travailleurs se sent alors plus concernés, plus impliqués, ils se sentent partie prenante et ce n’est pas toujours les mêmes qui se retrouvent au piquet. De plus, ils ne sont pas tenus par les éventuels accords précédents (par exemple des accords de paix sociale), ils n’ont qu’un seul objectif, la victoire de la grève.

    Pendant le conflit d’AGC à Fleurus, il y a eu trois manifestations à l’appel des syndicats :

    -La première le 13 décembre où 6.000 travailleurs manifestent dans les rues de Charleroi dans le contexte des négociations interprofessionnelles.

    -La deuxième le 25 janvier où 3.000 travailleurs manifestent contre l’intervention des tribunaux dans les conflits sociaux. Entre autres dans le conflit de Splintex où des astreintes sont d’abord fixées à 5.000 puis à 7.500 euros.

    -La troisième le 11 mars (à l’appel de la seule FGTB) où 1.500 travailleurs manifestent dans les rues de Fleurus. Il faut noter que c’est la première et unique manifestation qui était organisée directement et exclusivement pour la défense de l’emploi d’AGC et seulement après 100 jours de grève, quand le conflit était presque terminé. Comme d’habitude, les drapeaux rouge sont présents, mais cette fois on sentait bien que le cœur n’y était plus. On avait l’impression, après les remerciements des responsables syndicaux, que l’on assistait à un enterrement de première classe. Pourtant les grévistes n’avaient pas encore dit leur dernier mot. Ils croyaient toujours comme au premier jour de grève que la lutte qu’ils menaient pour la défense de l’emploi était et restait juste et n’était pas encore terminée. Ils étaient toujours disposés à continuer la lutte.

    Le témoignage d’Elise (nom d’emprunt), épouse d’un travailleur d’AGC avec 18 ans d’ancienneté, qui était souvent avec son mari au piquet, est sans équivoque. Il mérite d’être rappelé, car ce témoignage paru dans La Nouvelle Gazette du 11 mars 2005, cerne très bien le problème qui était posé par les travailleurs pour le maintien de l’emploi pour eux et leurs enfants. Elle y dit :

    « Pour l’emploi de nos enfants aussi. Cela fait trois mois que nous vivons des moments difficiles, sans plus de rentrées de salaires, nous avons trois enfants : 18, 17 et 13 ans. Ils sont malheureux de ce qui se passe mais ils savent que leur papa se bat pour l’emploi. Et s’il n’y a pas d’emploi pour nous, il n’y en aura pas pour nos enfants ».

    Quelques jours après la manifestation de Fleurus, le mardi 15 mars, les grévistes étaient venus en nombre devant l’usine pour connaître le résultat du vote; ils étaient impatients. Ils discutaient entre eux. Ils disaient, une fois de plus, qu’ils avaient manqué de soutien, y compris des instances supérieures de la FGTB. Un ouvrier gréviste disait : « A part la manifestation du début à Charleroi (pour les négociations interprofessionnelles) il n’y a pas eu pour nous une grande action, pourtant quand ils veulent mobiliser, ils le peuvent. C’est ce qu’ils sont en train de faire pour la manifestation de samedi prochain à Bruxelles. » (il s’agit des manifestations du 19 mars à Bruxelles à l’appel du FSE, de la CES et de la Marche des Jeunes) ». Ce témoignage exprime (même si comme on l’a vu par après, la FGTB n’a que très peu mobilisé pour cette journée du 19 mars et, par peur du potentiel que pouvait représenter la Marche des Jeunes, a freiné sa mise en place et la mobilisation) que les travailleurs sont conscients du fait que l’appareil a une capacité de mobilisation immense, mais qu’il ne s’en sert que pour ses propres intérêts.

    Quel rôle a joué la CSC ?

    L’appareil national et régional de la CSC pratique depuis toujours et partout une politique de collaboration de classe avec les patrons qui déteint sur les délégations syndicales CSC. Dans la pratique de tous les jours elle est le relais du patron dans l’usine, même si dans certains cas, poussée par la base, elle doit aller plus loin qu’elle ne le veut. Dans le conflit d’AGC elle est restée fidèle à elle-même. L’appareil de la CSC est toujours le premier à rompre l’unité à la base qui existe, même en pleine lutte. Dans la grève de Splintex cette attitude habituelle s’est confirmée. Le permanent régional CSC R. Wanty déclarait dans une conférence de presse que « la direction d’AGC s’installe dans le conflit; une délocalisation est à craindre » et il se disait « prêt à négocier, même seul s’il le fallait ». Alors que l’assemblée du personnel s’était prononcée le matin même et avait donné mandat aux délégués pour ne pas négocier si le patron ne revoyait pas sa copie, la CSC voulait négocier à tout prix et était fin prête à accepter le plan patronal sans grande discussion, ouvrant ainsi une brèche dans le front uni des travailleurs FGTB-CSC. Tout au long du conflit, une grande partie des affiliés CSC s’en sont pris à l’attitude de la délégation CSC. Mais au cours des dernières semaines, les travailleurs ont condamné la position de la CSC qui a fait ouvertement le jeu des patrons, renforçant ainsi la tendance des moins combatifs à reprendre le travail. Ils ont même demandé la démission du délégué principal CSC. Il ne faut jamais oublier qu’à l’origine de la naissance du syndicalisme, la CSC a été créée par les patrons pour combattre la FGTB. Il est incontestable que dans cette grève la CSC a joué un rôle néfaste et qu’elle porte une lourde responsabilité dans la défaite de ce conflit. Parfois, certains délégués CSC de base vont plus loin que leur direction, mais ça reste exceptionnel car dans la plupart des cas comme à Splintex, ils se sont alignés sur la direction régionale et nationale de la CSC.

    Le rôle du PTB

    Le PTB, parti stalinien, a été félicité publiquement par C. Viroux à la manifestation de Fleurus pour sa position de non-ingérence dans le conflit d’AGC. Le PTB a relayé dans ses tracts et dans sa presse les revendications des travailleurs de Splintex. Il est resté à la remorque de l’appareil syndical sans donner de perspectives autres que celles que celui-ci autorisait. Et surtout il n’a pas soutenu la proposition d’une grève de 24 heures à Charleroi qui avait été faite en assemblée interprofessionnelle des délégués. Cette attitude est curieuse vu que le PTB écrit dans son journal du 8 décembre 2004 : « Pour beaucoup, la victoire dans cette lutte sociale dépendra de la solidarité venant des autres entreprises ». Et plus tard, le 2 février 2005 dans Solidaire, il écrit : « Le PTB propose une grève de 24 heures dans toute la région » Mais si on est vraiment convaincu que c’était nécessaire, il ne suffit pas de l’écrire une fois pour toute dans son journal comme une proposition platonique. Il faut tout faire pour que cette proposition soit diffusée largement par des tracts afin qu’elle soit acceptée et imposée aux appareils syndicaux à travers la pression exercée par les travailleurs. Mais cela n’a pas été le cas ; au contraire, dans la pratique le PTB a préféré ne pas affronter les appareils syndicaux avec cette proposition de 24 heures de grève qui ne convenait pas aux bonzes syndicaux. Il y a là une contradiction évidente qui doit être considérée en fin de compte comme une attitude de suivisme, le PTB ne voulant pas entrer en opposition avec la position de l’appareil syndical. En plus lors d’une réunion dans le local du PTB, un ex-délégué qui critiquait le refus de l’interprofessionnelle FGTB d’étendre la grève a été prié de se taire ; comme respect de l’expression démocratique et de ceux qui ne pensent pas comme eux, ils sont très loin du compte. Ce parti opportuniste et sectaire n’exerce que très peu d’influence sur les ouvriers. En fin de compte, le PTB a eu comme position de suivre l’appareil syndical comme une fin en soi et on connaît le résultat pour les travailleurs qui se retrouvent sur le pavé.

    Le rôle du POS

    Le POS a distribué un tract où on pouvait lire: « l’interprofessionnelle doit passer à l’action en appelant à une grève générale régionale de 24 heures ». Mais ses militants et ex-délégué FGTB ne se sont pas battus dans les assemblées interprofessionnelles pour arracher ce mot d’ordre. Ils n’ont pas non plus appuyé la proposition quand elle a été faite dans l’assemblée, ils ont préféré suivre l’appareil syndical qui n’en voulait pas en disant comme A. Henry à la tribune syndicale : « C’est quand les robocops sont intervenus à Splintex qu’il aurait fallu faire une grève de 24 heures; ça n’a pas été fait mais ce n’est pas grave ». Si c’est grave parce qu’un mot d’ordre de 24 heures de grève générale régionale, bien qu’il soit correct de le proposer dans un tract comme l’a fait le POS, n’est pas suffisant en soi. Il faut que ses militants se battent contre l’appareil syndical pour l’obtenir si on ne veut pas que ce soit seulement de la propagande de parti. Dans certains conflits comme celui de Splintex il faut oser prendre ses responsabilités et affronter démocratiquement l’appareil syndical qui refusait de généraliser la grève de Splintex. Toujours revenir sur les grèves du passé, comme celle qui s’est déroulée en 1975 à Glaverbel-Gilly, même si elle a été importante, n’est pas une attitude correcte qui correspond à la réalité d’aujourd’hui, car le contexte de 1975 n’est pas du tout le même qu’en 2005. C’est pendant l’assemblée interprofessionnelle au moment où la discussion était très vive entre les bonzes syndicaux et certains délégués et militants de base qu’à choisi A. Henry pour dire à la tribune : « je pense personnellement que l’interprofessionnelle a fait son travail, elle s’est démenée pour trouver le matériel de projection pour projeter le film sur la grève de Glaverbel en 1975 ». Au lieu d’emboîter le pas et de couvrir les appareils syndicaux, les militants ou ex-délégués qui se revendiquent du marxisme doivent s’efforcer à chaque occasion de dénoncer les freins que constituent les appareils syndicaux réformistes. Comme cela a été le cas dans la grève de Splintex. Tous ceux qui n’agissent pas en conséquence n’ont pas du tout compris ce qu’il y a d’essentiel dans le marxisme, à savoir la lutte anti-capitaliste sans complaisance pour les directions du mouvement ouvrier qui freinent les luttes.

    S’il est exact de dire comme le fait A. Henry dans son article paru dans La Gauche d’avril 2005, n°12, où il écrit entre autres: « Car cette solidarité doit être plus que jamais une participation active au combat quotidien des grévistes, elle ne peut pas se limiter seulement à une aide financière épisodique. Elle doit au contraire être partie prenant et intégrale de la lutte et ce à l’échelle nationale, européenne, internationale ». Nous pouvons être d’accord avec cette prise de position, mais il est regretable qu’elle vienne quand le conflit est terminé. Alors que pendant la grève, dans la pratique, il a pris une position tout à fait contraire en empêchant toute initiative du comité de soutien sous prétexte de « non-ingérence dans le conflit ». Plusieurs militants du comité de soutien voulaient aller dans le sens qu’il indique dans son article. C’est-à-dire être partie prenante et intégrale dans la lutte, ces militants avaient comme objectif principal l’extension de la grève à la région. Mais cela n’a pas été possible car A. Henry a fait barrage. Il a refusé de rompre le lien qui le lie à l’appareil syndical réformiste. C’est suite à ces divergences fondamentales que le comité de soutien s’est coupé en deux tendances.

    Dans le contexte politique d’aujourd’hui, il ne suffit plus d’apparaître à gauche en lançant un appel à la création d’un forum syndical et en écrivant à juste titre d’ailleurs que : « les organisations syndicales sont sclérosées par une bureaucratie étouffante que les syndicalistes ont le devoir de combattre en luttant pour une véritable démocratie ». Et dans la pratique faire juste le contraire. Dans la grève d’AGC-Fleurus les initiateurs de cet appel se sont mis eux-mêmes dans une situation de refus de combattre l’appareil bureaucratique. Ils ont limité leur intervention dans le cadre autorisé par la bureaucratie sans jamais vouloir la critiquer sous prétexte qu’ils n’avaient pas à « s’ingérer dans le conflit ».

    Si c’est de cette façon qu’ils conçoivent le devoir de combattre pour une véritable démocratie, c’est qu’ils n’ont toujours pas compris ce qu’il y a de fondamental dans la pratique de la lutte de classe. Quand on écrit ce genre d’appel, il faut être conséquent avec sois-même si on veut éviter que ce soit des paroles en l’air. Toujours craindre de critiquer démocratiquement l’appareil syndical sous prétexte que sans lui nous ne somme rien, ça revient à dire qu’il faudra bientôt lui demander l’autorisation de respirer.

    Que manque-t-il pour gagner les luttes futures ?

    Tous les délégués et militants syndicaux combatifs doivent développer dans les usines une stratégie de lutte de classe sur base de la compréhension qu’un changement de la société est nécessaire, que sous le régime capitaliste tout acquis n’est que provisoire. Il reprend aux ouvriers de la main droite ce qu’il leur a donné de la main gauche. Mais il faut aussi avoir la compréhension du rôle de l’Etat dans cette société et de la nature du PS et des appareils syndicaux. Si nous ne voulons plus continuer d’aller de défaites en défaites, nous devons nous organiser à la base dans une tendance de gauche syndicale à l’intérieur de notre syndicat, il n’est nullement question de créer un nouveau syndicat, c’est une question de principe. Mais d’avoir pour objectif d’organiser les travailleurs en rupture avec les méthodes réformistes de collaboration de classe qui ne conduisent inévitablement qu’à des défaites successives. S’organiser afin de gagner les luttes qui se développent et contre les attaques répétées des patrons. Mais cela n’est pas suffisant, il faut aussi s’organiser afin d’avoir un prolongement politique qui s’appuie sur les méthodes traditionnelles de la lutte de classe. Pour cela il faut construire un grand parti ouvrier s’appuyant sur un programme anti-capitaliste, organe de combat de la classe ouvrière pour permettre la transformation socialiste de la société. Pour empêcher les délocalisations continuelles, il faut un programme qui empêche les multinationales de délocaliser en exigeant pour les entreprises qui menacent de fermer le remboursement des aides publiques qu’ils ont reçues ainsi que la nationalisation sans rachat ni indemnité sous contrôle ouvrier. Un grand parti ouvrier qui lutte contre le capitalisme et qui ne fait aucune concession politique, ni au PS ni aux appareils syndicaux, n’existe pas encore à ce jour. Le MAS est partie prenante dans cette construction; il est encore petit à l’heure d’aujourd’hui, mais ses militants agissent sur le plan syndical et politique avec des revendications et un programme qui va dans un sens anti-capitaliste et anti-réformiste.

    C’est aux travailleurs et à son avant-garde qu’incombe la tâche d’atteindre ce but. Le MAS veut contribuer à la construction d’un grand parti ouvrier. « L’émancipation des travailleurs sera l’œuvre des travailleurs eux-mêmes ». Nous, les syndicalistes, savons par expérience que le syndicat est le dernier rempart des travailleurs contre toutes les attaques patronales. Mais il ne faut pas pour autant se mettre un bandeau sur les yeux. Il faut toujours et en toutes circonstances savoir faire le bilan d’un conflit quel qu’en soit le résultat. C’est au travers de la lutte, de la discussion, de la critique que le mouvement ouvrier a progressé et certainement pas en voulant nous faire prendre des vessies pour des lanternes comme tentent de le faire depuis plusieurs années les bonzes syndicaux.

    Cette brochure ne va pas faire que des heureux mais si ceux qui osent critiquer l’appareil syndical sont considérés par les bonzes syndicaux comme des anti-syndicalistes, alors il faut se poser la question : le syndicat en 2005 est-il encore une organisation démocratique? Si ce n’est plus le cas, alors il faut le dire ouvertement afin que les travailleurs sachent à quoi s’en tenir. Dans la pratique de la lutte de classe, la vérité à ses droits. La ligne politique qui en découle doit être placé au dessus des éventuelles amitiés où camaraderies qui peuvent exister.

    LE SOCIALISME EST MAITRE DE L’HEURE,

    MAIS IL FAUT POUR CELA QUE TOUS CEUX QUI SE DISENT SOCIALISTES, SOIENT DIGNES DE CE NOM.

    OUI A LA LUTTE DE CLASSE

    NON A LA COLLABORATION DE CLASSE

    VIVE LA GREVE DES TRAVAILLEURS DE SPLINTEX


    P.S. : Il y a encore beaucoup de choses à dire sur la grève d’AGC. Mais nous allons nous arrêter ici pour le moment. Nous ne manquerons pas de revenir sur ce conflit qui restera dans les mémoires des travailleurs. En tout cas, tous ceux qui s’y sont investis resteront marqués pour toujours.

  • Vers des élections anticipées et une coalition rouge-romaine? Il faut un programme de rupture avec le néo-libéralisme!

    Une troisième défaite, après le psychodrame autour de DHL et la courbe rentrante sur la scission de BHV, signifierait la fin de Verhofstadt II. Les véritables défis sont pourtant encore devant lui: le débat sur les fins de carrière et des exercices budgétaires périlleux pour 2006 et 2007. Tailler dans notre système social et couvrir le patronat de cadeaux…. Verhofstadt voudrait bien, mais il faudrait pour ça que le sommet syndical tienne sa base en main. Une coalition rouge-romaine y arriverait mieux que le panier de crabes du VLD et du MR. Celui qui attend d’une coalition rouge-romaine une rupture avec la politique néo-libérale en sera pour ses frais.

    Eric Byl

    En inscrivant la “scission immédiate et sans contrepartie de BHV” dans l’accord de gouvernement flamand, les partis flamands s’étaient lié les mains au niveau fédéral. Les Francophones considèrent la scission comme une atteinte à leurs droits démocratiques. En revanche, les Flamands voient dans la non-scission une tentative de franciser le territoire flamand. On ne sort pas d’une telle impasse avec des mesures unilatérales, encore moins dans un contexte d’économies néo-libérales. Ce n’était pas le problème de Leterme. Il a lâché la bride à ses roquets De Crem, Van Rompuy et De Wever. Ils s’en sont donné à coeur joie. Le but était de pousser à la démission un Verhofstadt affaibli par DHL et le vaudeville du VLD sur le droit de vote des immigrés, le cordon sanitaire et les élections présidentielles.

    Le superministre flamand Frank Vandenbroucke, auteur de la chasse aux chômeurs, a senti que la fin était proche; c’est pourquoi il plaide depuis des mois pour une tripartite. Cela fait des années que le SP.a, le VLD et le MR s’entendent commes larrons en foire pour appliquer un dur programme néo-libéral à nos dépens. Vande Lanotte s’apprête à brader la SNCB et La Poste à ses copains du privé. Vanden Bossche peut annoncer sourire aux lèvres qu’elle veut dorénavant sanctionner les prépensionnés. Ils chargent le PS de tous les maux parce qu’il veut couvrir tout ce qui précède d’un vernis social. Vandenbroucke comprend bien que le SP.a serait mal desservi dans une coalition rouge-romaine. Le PS a déjà évincé le MR au profit du CDh aux niveaux régional et communautaire. Si Leterme et Di Rupo devaient s’entendre, le SP.a pourrait devenir le nouveau petit poucet du gouvernement. Vandenbroucke a dû se dire “mieux vaut une coalition à 6 qu’à 4”.

    Le 1 mai a vu le PS, la FGTB et la CSC se quereller avec le SP.a sur la Cotisation sociale généralisée (CSG). La FGTB flamande a fait le gros dos. En revanche, la CSC a mis Leterme en garde contre un cours trop libéral. L’avertissement n’est pas tombé dans l’oreille d’un sourd. Il ne faut pas chercher ailleurs l’ouverture du CD&V à l’idée d’une CSG. Cela pourrait servir de monnaie d’échange pour BHV. Le MAS n’était pas d’accord avec ceux qui prédisaient la chute du gouvernement en mai et des élections anticipées. Cela aurait enterré le débat sur les fins de carrière et le budget 2006. La montée du CD&V au gouvernement, avec la CSG et une solution pour BHV qu’on puisse présenter comme une scission, nous semblait plus plausible que des élections.

    Cela n’a finalement pas eu lieu. Verhofstadt a surpris tout le monde en reportant une solution pour BHV à 2007. Il sauvait ainsi provisoirement son gouvernement et son poste de Premier Ministre. Résultat: le VLD se traîne à 16% dans les sondages. Dans ces conditions, mener à bien le débat sur les fins de carrière et réaliser 4,6 milliards d’euros d’économies revient à danser sur la corde raide. Le PS n’a pas tellement envie de prolonger indéfiniment la vie d’un tel gouvernement. Cela donne un éclairage particulier à la proposition de Demotte sur le financement de la sécurité sociale. C’est bien à tort que le patronat l’a brocardée comme “un retour à l’économie planifiée” et du “communisme”. Plutôt qu’une véritable proposition de Demotte, il faut y voir un avertissement à Verhofstadt. Verhofstadt en sera peut-être réduit à annoncer la chute du gouvernement en octobre et à organiser des élections.

    Leterme a entre-temps remis leur laisse à ses roquets De Crem et Van Rompuy. De Wever a de nouveau retiré son projet de cartel bleu-romain (CD&V/NV-A + VLD) pour les élections communales de 2006 à Anvers. Officiellement “parce que le VLD a bradé la Flandre”, en réalité parce qu’une coalition rouge-romaine se profile à l’horizon. Leterme se dit désormais partisan d’un fédéralisme “responsable”. Di Rupo se dit soudain prêt à discuter entre gens raisonnables et, qui sait, peut-être à scinder BHV avant 2007. Des élections suivies de la formation d’une coalition rouge-romaine d’ici la fin de l’année sont donc le scénario le plus probable. Verhofstadt n’a plus qu’à espérer que les syndicats n’opposeront aucune résistance à la casse du système des pensions et aux coupes sombres dans les dépenses pour 2006. La CSC a pourtant déjà menacé d’une grève générale en faisant référence aux grèves du vendredi de 1977.

    Une coalition rouge-romaine ne manquera pourtant pas de poursuivre la politique néo-libérale. Le MAS est convaincu que nombre de familles de travailleurs en ont plus qu’assez de cette politique. En témoignent les référendums sur la Constitution européenne et la bonne tenue dans les sondages du nouveau Parti de Gauche en Allemagne. Le MAS veut tester ici aussi un programme qui rompe avec le néo-libéralisme. Nous sommes prêts à collaborer avec d’éventuels partenaires qui soient prêts à défendre avec nous un tel programme.

  • Les masses dans la rue en Bolivie. La question du socialisme à l’ordre du jour

    Les masses dans la rue en Bolivie

    Dix-neuf mois d’agitation dans le pays le plus pauvre d’Amérique latine ont abouti, le vendredi 7 juin, à la démission du président honni Carlos Mesa. Mesa a ainsi subi le même sort que son prédécesseur, l’ultra libéral De Lozada, appelé aussi "le bourreau". De Lozada avait en effet donné l’ordre à l’armée, en octobre 2003, de tirer sur les manifestants.

    Emiel Nachtegael

    Mesa avait hérité d’un pays disloqué où 5,6 millions d’habitants sur 8 millions vivent en-dessous du seuil de pauvreté. Les indigènes, la population indienne, sont considérés comme des citoyens de second zone. Trois millions d’habitants n’ont pas accès à l’eau potable. La population indienne est partie prenante de la mobilisation de masse (plus de 6.000 blocages de routes ou manifestations) des mineurs et des paysans.

    Revendication offensive de nationalisation

    La principale revendication était la nationalisation du gaz et du pétrole : un secteur qui, jusqu’à présent, est aux mains des multinationales espagnoles, françaises et britanniques. La Bolivie dispose de réserves importantes de gaz et de pétrole. Les réserves de gaz représentent à elles seules 100 milliards de dollars. Selon la multinationale espagnole Repsol-YPF qui a investit des millions en Bolivie, chaque dollar investi permet de faire un profit en rapporte dix. La deuxième revendication de la population indienne est l’élection d’une Assemblée constituante pour élaborer une nouvelle constitution plus démocratique qui donnera des droits à la population indigène. Felipe Quipe, porte-parole des Indiens Aymaras, qui ont paralysé les rues de la capitale La Paz et de la ville voisine d’El Alto (où un million d’Indiens vivent) a dirigé la fureur de la population contre Mesa en déclarant : " Mesa brade nos richesses. Il est du côté des multinationales et ne pense pas à son peuple. Il serait capable de vendre sa mère ! ".

    En juin dernier, le mouvement contre Mesa s’est durci. Une grève générale a paralysé l’ensemble du pays. Pendant plusieurs semaines les travailleurs et les paysans ont bloqué les voies d’accès à la capitale et ont occupé les champs pétroliers et gaziers. A El Alto et à Cochabamba, une ville industrielle à l’Est de La Paz, des assemblées populaires de travailleurs et d’habitants des quartiers ont eu lieu. Des milliers de manifestants ont fait le siège de La Paz aux cris de: "Mesa dehors! Tout le pouvoir au peuple!" Entre-temps, le parlement bourgeois et l’armée ont estimé que Mesa n’était plus en mesure de diriger le pays. Il a lancé à son successeur, le 7 juin dernier, les avertissements suivants: "La Bolivie est au bord de la guerre civile", "de nouvelles élections sont la seule issue pour le pays".

    Au bord de la guerre civile

    Après la démission de Mesa, le président du Sénat, Vaca Diez, a assuré l’intérim. Mais choisir Diez, un riche propriétaire terrien blanc soutenu par l’ambassade des Etats-Unis, c’était pour la bourgeoisie allumer une nouvelle mèche au tonneau de poudre. Afin de s’assurer de sa désignation en tant que président, il a déplacé la réunion du parlement de la capitale vers la ville de Sucre. Le mouvement redoutait que Diez ne rétablisse l’ordre par les armes, ce qui semblait être confirmé par la nouvelle selon laquelle un mineur avait été abattu le jour même. C’est la première victime après le départ de Lozada. La révolution a souvent besoin du fouet de la contre-révolution. Des milliers d’enseignants, de mineurs, de paysans, ont cerné la ville de Sucre. Entre-temps le personnel de l’aéroport s’est mis en grève et les parlementaires ne pouvaient plus accéder à la ville ou la quitter sans l’accord des grévistes. Par crainte d’une insurrection locale et d’une rupture avec l’armée Diez a renoncé à prendre la tête du pays. C’est Eduardo Rodriguez, président de la cour suprême, qui a finalement été choisi.

    Une voie sans issue?

    Eduardo Rodriguez est une personnalité en apparence "neutre". La bourgeoisie espère que la désignation de Rodriguez ainsi que la promesse de tenir des élections anticipées, peut rétablir le calme et lui permettre de gagner du temps pour rassembler ses forces. Rodriguez a reçu le soutien des patrons, de l’ambassade américaine et de l’Eglise catholique. A première vue il semblerait que la tempête se soit apaisée. Les mineurs et les paysans se sont retirés des rues de la capitale, mais ils ont promis de revenir si le nouveau gouvernement ne donnait pas satisfaction à leurs revendications.

    Rodriguez a déclaré de façon crue: "Je ne peux prendre aucune décision politique". Pendant les périodes où la domination de la bourgeoisie est menacée – et où une situation de double pouvoir entre les autorités et les masses auto-organisées persiste – la bourgeoisie essaie toujours de gagner du temps. L’intronisation de Rodriguez ne signifie pas la fin, mais plutôt une pause, de la "guerre du gaz" en Bolivie. La profondeur de la crise et la détermination des masses signifient que ce n’est qu’un répit et que le mouvement va reprendre.

    Le prolétariat ou la bourgeoisie au pouvoir?

    Malgré les mobilisations de masse exemplaires et la combativité de la classe ouvrière et des paysans indiens, il n’y a pas encore de mouvement conscient pour le renversement du capitalisme. Dans une telle situation, un parti révolutionnaire est une nécessité vitale pour traduire les aspirations des masses sur le plan politique; un parti capable d’orienter la lutte vers l’instauration d’un gouvernement ouvrier et paysan. Plus personne ne croit encore dans les partis traditionnels. Il y a un vide immense à gauche. Lors des élections municipales de décembre dernier, la principale organisation politique réformiste de gauche, le MAS (Mouvement vers le Socialisme), dirigé par Evo Morales, a recueilli le plus de suffrages : 18%.

    Le MAS occupe maintenant un cinquième des sièges au congrès. Morales, connu comme dirigeant des paysans planteurs de coca, est dépassé sur sa gauche par les secteurs les mieux organisés de la classe ouvrière et des paysans pauvres qui veulent aller plus loin. Malheureusement le MAS – malgré son nom ! – n’a pas la moindre idée sur la façon d’aller au socialisme. Au début de l’an dernier, Morales déclarait encore que la revendication de nationalisation était irréaliste, alors que les masses sont descendues dans la rue avec cette revendication, et que lors d’un référendum, la population s’est prononcée pour la nationalisation.

    Après le siège de Sucre, Morales a appelé à la fin de la grève et à la levée des barrages sur les routes afin de "donner du temps au nouveau président". Et ceci, au moment où les secteurs les plus combatifs du mouvement, notamment à El Alto, posaient un ultimatum au nouveau gouvernement pour satisfaire immédiatement leurs revendications. Si le MAS continue de faire des concessions à la bourgeoisie, il se produira immanquablement une rupture avec la base.

    Un potentiel révolutionnaire actuel

    Une période de statu quo entre les classes peut éventuellement exister, mais pas de manière durable. Un parti révolutionnaire doit concentrer l’énergie des masses et la canaliser comme un cylindre canalise la vapeur dans une locomotive à vapeur. Dans le passé de telles situations pré-révolutionnaires ont existé. Par exemple en Argentine en 2001. Elles peuvent toutefois être fatales. Fautes de perspectives, le découragement peut s’installer dans les couches intermédiaires de la société et gagner progressivement les secteurs les plus combatifs.

    L’appareil d’état, en Bolivie, (l’armée, le parlement, les tribunaux, les médias, …) ne maîtrisent pas la situation. La bourgeoisie est affolée, mais pas impuissante. Le long entretien de Rodriguez avec le chef de l’armée, Luis Aranda, doit être pris au sérieux. Incontestablement une partie de la caste militaire voudrait rétablir l’ordre de façon plus brutale. La seule chance de neutraliser rapidement la contre-révolution est de préparer la prise du pouvoir par les masses. Cela doit être combiné avec un appel aux soldats et aux sous-officiers de former des comités de soldats, d’élire les officiers et de les placer sous le contrôle de ces comités. Les officiers d’extrême-droite doivent comparaître devant des tribunaux populaires et être démis de leurs fonctions.

    Une assemblée nationale de représentants des organisations de lutte dans les quartiers, des ouvriers agricoles, des paysans, des mineurs doit être convoquée le plus vite possible. Elle devrait mener à la mise sur pied d’une assemblée constituante révolutionnaire appuyée sur des comités démocratiquement élus par les masses dans les entreprises, les quartiers, les écoles. Dans son livre Histoire de la Révolution russe, Léon Trotsky décrit de tels organes tels que les soviets de 1917, comme "des comités de grève à grande échelle".

    Les fonctions de ces organes révolutionnaires s’accroissent au fur et à mesure (contrôle du ravitaillement, remise en route des entreprises, contrôle des moyens de communication) et devraient conduire à la prise du pouvoir dans toute la société par un gouvernement ouvrier et paysan. Les nationalisations ne peuvent élever significativement le niveau de vie des masses que si le gouvernement est entièrement composé de représentants élus par les travailleurs et les paysans pauvres. Les richesses doivent être mises, sous le contrôle d’une économie démocratiquement planifiée, au service des besoins des masses. En outre, un parti révolutionnaire doit lancer un appel à l’extension de la révolution dans toute l’Amérique latine. Ce n’est qu’ainsi qu’on peut aller à la victoire. Les masses n’ont que leurs chaînes à perdre !

  • Stop au racisme. Tout ce qui nous divise, nous affaiblit

    La campagne contre les sans-papiers atteint de nouveaux sommets. Le « Plan Sécurité » de la Ville d’Anvers n’est rien d’autre qu’une chasse aux sans-papiers. La police organise des razzias de porte à porte. Le Vlaams Belang a exigé une première application de l’interdiction de pénétrer dans une rue à un sans-papier accusé d’intimider la clientèle des restaurants des environs de la gare. Il s’est avéré finalement que cet homme avait protesté auprès d’un patron de restaurant où il avait travaillé au noir sans que son salaire ne lui ait été payé. Les sans-papiers sont une aubaine pour les patrons qui font un maximum de profits à leurs dépens, mais dès qu’ils se lèvent pour défendre leurs droits, ils sont expulsés.

    Nikei De Pooter

    L’élargissement de l’Union européenne donne lieu à quantité d’évaluations du nombre de travailleurs polonais à bon marché qui affluent dans nos régions. Selon les derniers rapports, quelque 500.000 Polonais travaillent – légalement ou non – à l’extérieur, surtout comme main-d’oeuvre bon marché pour effectuer des travaux dangereux. En Belgique, on estime à 50.000 le nombre de travailleurs sans-papiers dans le secteur de la construction, le secteur avec le plus grand pourcentage d’accidents de travail.

    Depuis un certain temps, le secteur de la construction ressasse qu’il manque de bras, ce qui l’obligerait à recourir à de la main d’oeuvre étrangère. Rien n’est moins vrai. La vérité, c’est qu’on veut mettre les ouvriers du bâtiment d’ici en compétition avec les travailleurs illégaux. Concrètement, cela implique des salaires plus bas et des heures de travail plus flexibles. On connaît des cas où des travailleurs belges sur des chantiers belges ont été enregistrés comme polonais virtuels par leur entreprise via son siège polonais ! Le message du patronat est: si vous ne voulez pas travailler plus longtemps et plus durement pour un salaire plus bas, il y a des milliers de travailleurs polonais illégaux qui sont prêts à vous remplacer. La seule réponse des partis traditionnels et du Vlaams Belang, c’est le racisme. De cette façon, ils culpabilisent les immigrés, ils montent les travailleurs belges et immigrés les uns contre les autres et ils détournent l’attention de ceux qui tirent les marrons du feu: les patrons.

    Cette tendance n’est pourtant pas irr.ésistible comme le patronat, les médias et le gouvernement voudraient nous le faire croire. Si les syndicats en Europe unissaient leurs forces dans un plan d’action pour un salaire minimum en Europe – avec des actions nationales et européennes, des grèves et si nécessaire des grèves générales – on pourrait mettre le holà à la pression, à la baisse sur les salaires et les conditions de travail. Il faut lutter pour un nivèlement par le haut des salaires et des conditions de travail en Europe, et non par le bas, comme c’est le cas aujourd’hui. Mais ça signifierait une collision frontale avec le projet actuel de l’Union européenne et ses dirigeants politiques.

    Le MAS/LSP mène depuis des années – notamment avec sa campagne antifasciste Blokbuster – une lutte conséquente contre le racisme et l’extrême-droite. Dans nos campagnes, nous avons toujours mis l’accent sur l’unité d’intérêt et sur la nécessité d’une lutte unifiée des travailleurs belges et immigrés. Nous exigeons que les immigrés aient les mêmes droits et les mêmes salaires que les travailleurs du pays d’accueil. Avec le CIO, notre organisation internationale, nous luttons aussi en Europe de l’Est et dans le monde néo-colonial contre les multinationales et la soif de profits du patronat. Si vous voulez participer à cette lutte, n’hésitez pas à nous contacter.

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