Tag: Kshama Sawant

  • Comment les marxistes utilisent-ils leurs positions élues pour construire un rapport de forces vers un changement réel ?

    Ce 25 mai, des élus de gauche radicale ont été envoyés aux parlements régionaux de Bruxelles et de Wallonie ainsi qu’à la Chambre, pour la première fois depuis 30 ans. Cette percée remarquable du PTB assure que, désormais, une voix différente se fera entendre tant aux Parlements que dans le débat public.

    Les élus du PTB ont annoncé vouloir être le mégaphone de leurs électeurs. Certains ont rétorqué qu’avec seulement deux députés à la Chambre, quatre au Parlement bruxellois et deux au Parlement wallon, le PTB ne parviendra à rien concrétiser, que figurer dans l’opposition ne permet pas de ‘‘peser’’ sur la politique. Comment la gauche radicale peut-elle utiliser sa position pour, avec la classe des travailleurs, renforcer la lutte anti-austérité ? Comment quelques élus peuvent-ils déterminer le ton de l’agenda politique ? En guise de contribution à cet important débat, nous avons voulu aborder quelques exemples de la manière dont le Comité pour une Internationale Ouvrière (dont le PSL est la section belge) a utilisé et utilise ses positions élues.

    À Seattle, aux Etats-Unis, Kshama Sawant a frappé fort l’an dernier en recueillant 95.000 voix et en faisant son entrée au conseil de la ville, où ne siègent que neuf élus au rôle comparable à celui d’un échevin en Belgique. Notre camarade Bart Vandersteene a plusieurs mois à Seattle et livre ici un rapport de la manière dont la position de Kshama a été utilisée dans la lutte pour l’augmentation du salaire minimum à 15 $ de l’heure.

    En Irlande, nos camarades du Socialist Party n’ont pas su répéter leur succès des élections européennes de 2009, lorsqu’ils étaient parvenus à prendre l’un des sièges en lice à Dublin. Ces cinq dernières années ont toutefois clairement illustré ce qu’un élu de gauche radicale peut faire comme différence au Parlement européen. Notre parti frère irlandais possède une vaste expérience dans ce domaine. Lors des dernières élections législatives partielles de mai, Ruth Coppinger est d’ailleurs venue rejoindre Joe Higgins au Parlement irlandais. Ces cinq dernières années, Finghin Kelly était collaborateur au Parlement européen pour le Socialist Party, il nous parle ici de cette expérience.

    Enfin, nous tenons à revenir sur un cas plus historique, celui de la lutte de Liverpool où, entre 1983 et 1987, un conseil municipal de gauche radicale était au pouvoir. Que peuvent réaliser les marxistes lorsqu’ils disposent d’une majorité dans une grande ville ? Le contraste est frappant avec, par exemple, ce que fait actuellement le SP aux Pays-Bas, devenu partenaire de coalition des libéraux à Amsterdam.

     

    Ces contributions peuvent être d’une grande utilité afin de voir comment utiliser de la façon la plus optimale les positions que le PTB a obtenues aux Parlements.


    Seattle: Comment une élue socialiste a-t-elle pu faire la différence dans la lutte pour l’augmentation du salaire minimum ?

    Par Bart Vandersteene

    “La guerre du salaire”

    Pour la première fois depuis des décennies, un élu de gauche radicale se réclamant du socialisme est arrivé au Conseil d’une ville américaine majeure. L’élection de Kshama Sawant à Seattle en novembre dernier est loin d’être passée inaperçue… Depuis lors, le plus haut salaire minimum de tout le pays y a été instauré. Nul doute que l’élection de Kshama Sawant et le rôle joué par Socialist Alternative ont été décisifs dans ce domaine.
    Les lecteurs réguliers de Lutte Socialiste ou de socialisme.be ont déjà pu à de nombreuses reprises prendre connaissance de la situation particulière qui s’est développée à Seattle. Deux permanents du PSL s’y sont d’ailleurs rendus afin de profiter de cette expérience et d’aider à construire notre organisation-sœur, Socialist Alternative, qui connaît actuellement une croissance impressionnante.

    Sans exagérer le moins du monde, nous pouvons affirmer que l’élection de Kshama Sawant a constitué un véritable tournant pour la gauche américaine. Un intense débat a éclaté concernant les initiatives que la gauche devrait prendre aux Etats-Unis pour enfin être un réel joueur sur le terrain politique.

    L’élection d’une militante se réclamant du socialisme n’est pas passée inaperçue, c’est certain, mais ce qui a véritablement frappé les esprits, c’est que six mois plus tard à peine, la ville avait déjà accepté de relever le salaire minimum jusqu’à 15 $ de l’heure, même si ce n’est pas d’un seul coup. Avec cette victoire, Kshama Sawant et Socialist Alternative sont devenus un repère pour des dizaines de milliers de militants actuellement à la recherche d’une stratégie destinée à défendre une alternative au capitalisme. Même les médias internationaux ont couvert l’événement, qui a figuré dans les pages du Guardian, de l’Indian Times de même que dans des journaux allemand, français, danois, israéliens,…

    Mais avant le vote du Conseil sur les 15 $, seuls les journalistes locaux reconnaissaient l’importance de ce qui était en train de se passer. Le Seattle Times, journal difficilement soupçonnable de sympathies de gauche, écrivait déjà en avril : ‘‘Si le conseil décide d’établir le salaire minimum à 15 $ au cours de ces prochains mois, alors Sawant pourra à juste titre en prendre le crédit et commencer à déterminer l’agenda politique de la ville.’’
    Kshama n’a pas marqué de son empreinte l’agenda politique en convainquant les huit autres conseillers à l’aide de bons arguments ; elle a forcé l’establishment politique à accorder des concessions en mobilisant l’opinion publique et en construisant un mouvement par en bas. Sa campagne électorale avait pour revendication centrale l’instauration d’un salaire minimum de 15 $ et l’approche offensive de Socialist Alternative a forcé les deux candidats à la mairie à se prononcer sur la question. Le vainqueur, Murray, a été contraint de la soutenir du bout des lèvres.

    Une semaine après sa prestation de serment au Conseil, une réunion a rassemblé 250 participants et a lancé la campagne ‘‘15 NOW’’ (15 maintenant). Ces derniers mois, des dizaines d’activités et de réunions ont eu lieu en vue de consolider et de renforcer le large soutien à la revendication des 15 $, soutenue à 68% selon un sondage réalisé en janvier. En mars, il s’agissait de 72%.

    Tout en continuant à mener campagne, Sawant et ‘‘15 NOW’’ avaient averti le maire qu’il avait jusqu’au mois d’avril pour trouver une proposition concluante, faute de quoi ‘‘15 NOW’’ allait lancer une campagne de récolte de signatures pour obtenir l’organisation d’un référendum contraignant en novembre, sur base d’une proposition de ‘‘15 NOW’’.

    Le 1er mai, le maire a annoncé qu’il avait conclu un compromis avec les représentants des entreprises, des syndicats et une majorité des conseillers. Les 15 $ de l’heure seront bien introduits, mais sur une période de 2 à 6 ans en fonction de la taille de l’entreprise. Après deux ans, le montant sera ajusté pour tenir compte l’inflation. Pour 2025, le salaire minimum devrait être de 18 $ de l’heure (actuellement, le salaire minimum fédéral est de 7,25 $).

    Plusieurs conseillers ont, en concertation avec le patronat, tenté d’affaiblir la proposition initiale de ‘‘15 NOW’’. La seule raison pour laquelle ils n’ont pas osé y aller plus franchement est la menace des prochaines élections, où ils craignaient d’être trop largement considérés comme de vulgaires hommes de paille des 1% les plus riches.

    La proposition finalement retenue n’est pas conforme à 100% à celle défendue par Kshama, mais elle reste une avancée majeure ainsi qu’une grande victoire qui indique comment une position élue peut être utilisée pour renforcer la lutte et arracher des conquêtes sociales. Le journaliste indépendant Arun Gupta avait ainsi décrit la dynamique à l’œuvre : ‘‘C’était impressionnant de voir comment Socialist Alternative combinait efficacement ses tactiques à l’intérieur et à l’extérieur du Conseil. C’était un jeu d’échecs, chaque mouvement de la mairie et des entreprises recevait une réponse de ‘‘15 NOW’’. La position de Sawant à la table des négociations a été renforcée par des manifestations et des actions.’’

    Al-Jazeera América a écrit : ‘‘La victoire de Sawant a démontré qu’être socialiste n’est plus un inconvénient pour les élections. La campagne pour les 15 $ de l’heure a en outre fourni un modèle de démocratie par la base qui va à l’encontre du processus politique contrôlé par les entreprises. Les observateurs s’attendent à ce que la loi puisse passer fin mai. Si cela se produit, la victoire – même sans être complète – confirmera la méthode de Socialist Alternative, renforcera cette organisation et créera plus d’espace pour la politique socialiste aux États-Unis’’ (21 mai 2014).

    Lors du vote final au Conseil, le 2 juin, Kshama Sawant a clôturé son discours comme suit : ‘‘Le message d’aujourd’hui est clair : si nous nous organisons en tant que travailleurs avec une stratégie socialiste, nous pouvons combler le fossé des inégalités de revenus et nous attaquer à l’injustice sociale. Les 15 $ à Seattle ne sont qu’un début. Nous avons tout un monde à gagner.’’

    Plus d’infos sur le rôle joué par Kshama Sawant et Socialist Alternative à Seattle.


    Irlande. Des élus pour renforcer la résistance de terrain contre la politique antisociale

    Par Finghin Kelly

    Joe Higgins

    Le parti-frère irlandais du PSL a remporté son premier siège au Dáil (parlement) en 1997. En 2011, le parti a gagné deux sièges aux élections législatives et, récemment, en a obtenu un de plus lors d’une élection partielle. Le Socialist Party irlandais a également eu un député européen de 2009 aux récentes élections de mai.

    Le Socialist Party est également représenté dans des conseils locaux depuis 1991. Il est à la base de l’Alliance Anti Austérité (AAA) qui vient de remporter 14 conseillers municipaux (9 d’entre eux étant membres du Socialist Party) siégeant désormais dans les trois principales villes de la république irlandaise.

    Durant toute cette période, le Socialist Party a été confronté à de nombreux défis dans l’utilisation de ses élus. Les années ’90 et le début des années 2000 furent une période marquée par un dramatique tournant vers la droite au sein du Parti Travailliste irlandais (de même que dans le reste de la social-démocratie, comme le PS en Belgique), qui s’est transformé en un parti entièrement pro-capitaliste et appliquant le néolibéralisme. Un processus similaire avait également pris place dans la majorité des directions syndicales, qui ont abandonné l’idée de mener une lutte conséquente pour défendre les intérêts de la classe des travailleurs tout autant que celle qu’une alternative au capitalisme était possible.

    Ces dernières années, le capitalisme irlandais a connu une crise profonde. Les banques irlandaises ont été renflouées par le contribuable à hauteur de 64 milliards € et un vicieux plan d’austérité a été mis en place par l’ensemble des partis traditionnels. Les conditions de vie des travailleurs se sont effondrées tandis que l’émigration et le chômage ont atteint un niveau record.

    Dans ce contexte, les principales tâches qui nous faisaient face avec nos représentants élus étaient de défendre et de populariser les idées du socialisme en tant qu’alternative à la crise, d’entrer en confrontation avec l’establishment politique capitaliste et de s’en prendre aux conséquences de leurs politiques en organisant à la rage et l’opposition des travailleurs.

    L’histoire nous a démontré que toutes les conquêtes sociales acquises par la classe des travailleurs ont été obtenues grâce à l’organisation et à la pression exercée sur la classe capitaliste et ses partis. Chaque victoire obtenue au Parlement n’a été possible que grâce à ce genre de mouvement. Nous avons donc toujours visé à utiliser nos représentants comme bras politiques du mouvement à l’extérieur de la Chambre. C’est ce qui a constitué notre force : faire d’une part entendre la voix des travailleurs et défendre les idées du socialisme à l’intérieur du Parlement et, d’autre part, avant tout utiliser ces élus afin d’aider à organiser la lutte à l’extérieur du Parlement.

    Paul Murphy

    Dans le cadre du mémorandum de la troïka, le gouvernement irlandais a instauré une taxe injuste sur chaque maison, sans tenir compte des moyens de ses occupants. Une campagne de boycott de masse a suivi, soutenue et construite par le Socialist Party. Nos élus ont été une sorte de mégaphone pour la campagne. Notre député européen, Paul Murphy, a même déchiré son formulaire de taxe au Parlement européen au cours d’un débat avec le président de la Commission européenne José Manuel Barroso. Nos élus ont été d’une grande assistance pour la campagne. Nos ressources (bureaux, capacités d’impression, etc.) ont été utilisées pour construire une campagne nationale de masse. Le bureau de Paul Murphy à Dublin a par exemple été occupé par des volontaires de la campagne afin d’y organiser des réunions et des actions dans tout le pays, tout en servant de centrale téléphonique pour de la campagne.

    Nos élus n’ont jamais cessé leur activité dans le mouvement. En 2003, dans une campagne du même type, notre député Joe Higgins a même été emprisonné un mois après avoir défié une décision judiciaire interdisant les manifestations.

    Pour le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO), il est normal que les représentants des travailleurs n’aient pas un style de vie plus aisé que celui des travailleurs. Ses représentants vivent donc avec le salaire moyen d’un travailleur. Le député européen Paul Murphy a ainsi vécu comme un jeune travailleur irlandais; en gardant 1.800 euros par mois de son salaire de parlementaire de 6.300 euros. Le reste a été donné à des travailleurs en grève, des campagnes anti-austérité, etc.

    Beaucoup d’exemples peuvent encore illustrer comment des élus peuvent efficacement aider les travailleurs en lutte. En 2005, par exemple, Joe Higgins a fait entrer au Dáil la question de l’exploitation des travailleurs turcs et kurdes chez Gama Construction. En plein boom du secteur immobilier, ils ne recevaient qu’un salaire de 2 ou 3 € de l’heure ! Ces travailleurs se sont mis en grève, et notre travail au Dáil a permis d’exercer une pression politique sur le gouvernement irlandais et de faire débarquer la thématique dans les médias, jusque-là réticents. Ce fut un point tournant pour leur lutte.

    Plus d’infos.


    Liverpool : La ville qui a défié Thatcher

    Dès le printemps 1984, la ville de Liverpool a connu un mouvement de masse dirigé par les membres de notre parti-frère anglais, alors organisés au sein du Parti Travailliste autour du journal “Militant”. À Liverpool, leur tendance était même la force dirigeante du parti travailliste.

    À ce moment-là, les administrations locales se voyaient contraintes par le gouvernement central d’exécuter d’importantes coupes budgétaires. Mais il n’en a pas été ainsi à Liverpool grâce à un conseil communal dont la direction, le programme et les tactiques avaient été élaborés par l’organisation trotskyste ‘‘Militant’’. Même si les membres de Militant étaient en minorité au conseil, ce sont leurs propositions d’actions et idées qui étaient acceptées. Ils ont défendu la nécessité d’un budget basé sur la satisfaction des besoins des habitants. Les rentrées étaient insuffisantes face aux dépenses prévues, mais une large campagne a été initiée pour contraindre le gouvernement à accorder plus de ressources aux localités.

    La majorité travailliste à Liverpool, élue en mai 1983, est revenue sur les 2.000 licenciements de travailleurs municipaux effectués par la précédente administration travailliste. Elle a aussi décidé de lancer un plan de construction de 5.000 nouveaux logements sociaux en quatre ans. Plus de logements sociaux ont été construits à Liverpool sur cette période que dans toutes les autres communes du pays ! 12.000 emplois ont ainsi été créés dans le secteur du bâtiment à un moment où le taux de chômage était à plus de 25 % à Liverpool, voire même à 90 % parmi la jeunesse de certains quartiers. Le salaire minimum des employés communaux a été relevé de 100 livres par semaine, et le temps de travail est passé de 39 à 35 heures par semaine, sans perte de salaire.

    “Better break the law than break the poors” – “Mieux vaut briser la loi au lieu de briser les pauvres”

    Avec ses 30.000 travailleurs, la ville était le plus grand employeur de la région. Mais si Liverpool avait avalé la logique d’austérité que voulait lui imposer le gouvernement, le budget pour 1984 aurait dû être de 11 % inférieur à celui de 1980-81. 6.000 emplois auraient dû disparaitre pour que le budget soit à l’équilibre.

    Le gouvernement a lancé une campagne complètement massive contre Liverpool dans les médias, campagne plus tard suivie par la direction nationale du Parti Travailliste. Plus d’une fois, Thatcher a menacé d’envoyer l’armée pour expulser les élus locaux. Dans un courrier des lecteurs dans les pages d’un journal local, un homme avait réagi en disant : ‘‘Je ne sais pas qui était Léon Trotsky, mais à en juger par le nombre de maisons qui ont été construites à Liverpool, ce devait être un fameux maçon !’’

    Le 29 mars 1984, jour où devait être voté le budget d’austérité du gouvernement, une grève générale locale de 24 heures, une des plus grandes grèves jamais vues à l’échelle d’une ville, et 50.000 personnes ont manifesté en direction de l’hôtel de ville afin d’exprimer leur soutien au conseil ! Le 9 juin 1984, le gouvernement a fait toute une série de concessions d’une valeur totale de 16 millions de livres, entre autres parce que les mineurs étaient eux aussi partis en grève. Thatcher savait qu’elle ne pouvait obtenir aucune victoire en se battant sur deux fronts à la fois, et a décidé de tout d’abord se concentrer sur les mineurs.

    Finalement, les “47” de Liverpool (les 47 conseillers travaillistes qui ont mené la lutte jusqu’au bout) ont été démis de leurs fonctions par un tour de passe-passe juridique suite à une alliance conclue entre Thatcher et la direction nationale travailliste, horrifiée par le soutien que commençaient à gagner la ‘‘Tendance Militant’’. La section locale du parti à Liverpool a été dissoute puis placée sous un contrôle hiérarchique très strict. Ce n’était que le début d’une sorte de contre-révolution politique au sein du Parti Travailliste arrivée à sa conclusion logique sous Tony Blair, le parti devenant totalement pro-capitaliste.

    Version raccourcie d’un précédent article.

  • LGBTQI : Un mouvement uni est nécessaire pour la lutte vers l’égalité !

    Par Kshama Sawant, membre de Socialist Alternative, élue au Conseil de Seattle

    Cette année, la 40e « Pride Parade » (Marche des Fiertés) a lieu à Seattle, après des décennies de lutte héroïque de la part des militants LGBTQI (Lesbiennes, Gays, Bisexuel(le)s, Transgenres, Queers et Intersexes) pour l’égalité des droits. Comme pour toutes les autres victoires de justice sociale, ce n’est pas une poignée de politiciens qui a permis les avancées concernant l’égalité des LGBTQI, mais bien le courage de millions d’activistes.

    Ces dernières années, le droit au mariage pour les couples de même sexe a été obtenu dans 20 Etats des USA ainsi que dans le District de Columbia. Ces votes sont arrivés à la suite de l’instauration de lois pénalisant les discriminations basées sur l’orientation sexuelle dans 21 Etats – y compris à Washington DC et à Puerto Rico – et de lois contre les discriminations liées à l’identité ou à l’expression de genre dans 17 Etats. Ces victoires sur le plan légal ont pu voir le jour suite à un revirement considérable de l’opinion publique, grâce à des années d’activisme de militants de base revendiquant des droits égaux pour les personnes LGBTQI.

    L’actuel mouvement des droits LGBTQI est né de la rébellion de Stonewall (1), en 1969, à New York, lorsque les gens se sont soulevés avec succès contre le harcèlement de la police à l’encontre des homosexuels. Les évènements de Stonewall ont eu lieu dans un contexte où se développaient le mouvement des droits civiques et le radicalisme, ce qui a inspiré la naissance d’un large mouvement de libération gay avec lequel des centaines de milliers de personnes sont « sortis du placard » et ont organisé de grandes marches de libération à travers le pays. Le Gay Liberation Front fondé en 1969 avait explicitement des sympathies pour le socialisme révolutionnaire et se déclarait solidaire des mouvements anticoloniaux, du mouvement contre la guerre au Vietnam et des luttes des travailleurs.

    Cependant, une réaction s’est aussi développée et a instauré une pression sur le mouvement LGBTQI pour qu’il modère ses revendications afin de les adapter à l’ordre social traditionnel et à ce que pouvaient accepter le Parti Démocrate et ses sponsors. Aujourd’hui, des éléments conservateurs ont contaminé le déroulement des Pride dans de nombreuses villes.

    Le journaliste Glen Greenwald a parlé de ce changement dans un article paru en avril 2013 dans le journal britannique The Guardian sous le titre « Bradley Manning is Off Limits at SF Gay Pride parade, but Corporate Sleaze is Embraced » (« La Gay Pride de San Francisco ne veut pas de Bradley Manning mais accueille à bras ouverts les grandes entreprises, NDT »). Dans cet article, Greenwald parle du rôle des sponsors privés dans les évènements liés à la Pride de San Fancisco. Il s’agit entre autres d’AT&T (télécommunications), Verizon (télécommunications), Bank of America (finance), Wells Fargo (finance), Clear Channel (audiovisuel, publicité et événementiel) et Kaiser Permanente (soins de santé). Toutes ces entreprises ont soit été inculpées de corruption massive, avec de lourdes responsabilités dans la crise financière de 2007-08, soit répandu des idées conservatrices et homophobes. Greenwald explique comment les intérêts complémentaires de ces entreprises, des militaires et du Parti Démocrate ont fixé l’agenda de la Pride de San Francisco et ont notamment exigé le retrait de la proposition de faire de Chelsea Manning le « Grand Marshal » (la figure de proue) à la Pride Parade de 2013. [Chelsea Manning, née Bradley Manning, est une ancienne analyste militaire des Etats-Unis qui a transmis à WikiLeaks des documents militaires classifiés. Après sa condamnation à 35 ans de prison, elle s’est publiquement présentée comme transgenre et a entamé des démarches pour changer d’identité, NDLR]

    Sur le blog Shaping San Francisco, la chroniqueuse Caitlin Carmody a parlé de la Parade en ces termes : « Partout où je me retournais se trouvait un char d’une entreprise ou un employé avec la marque de l’entreprise (et l’arc-en-ciel sur le logo de cette entreprise) : Wells, Fargo, Google, Clear Channel, Kaiser Permanente, Bank of America, BMW, Facebook, Macy’s, Salesforce, JP Morgan Chase, Twitter,… Où donc était la colère dirigée contre la crise économique causée par ces banques qui défilaient dans la parade et dont des pratiques néfastes ont jeté beaucoup de LGBTQI à la rue ? »

    L’année suivante, une énorme pression publique a fini par forcer le Comité de la Pride de San Francisco à revenir sur ses décisions, à donner des excuses à Manning et à lui proposer d’être Marshal Parade d’honneur cette année – une victoire importante.

    Mais en dépit des récentes victoires comme le droit au mariage, il reste encore beaucoup à faire, particulièrement pour les LGBTQI de la classe des travailleurs et spécialement pour les personnes transgenres.

    Des études récentes démentent le stéréotype véhiculé par les médias selon lesquels les gays seraient riches. En réalité, le taux de chômage chez les lesbiennes, gays et bisexuel(le)s est 40% plus élevé que la moyenne nationale (Center for American Progress). Plus de 40% des jeunes sans abris sont LGBTQI (Huffington Post, janvier 2013).

    Les défenseurs des idées du socialisme comme moi ont toujours milité pour le droit au mariage des couples de même sexe, et nous croyons important de renforcer notre mouvement en joignant nos forces pour revendiquer une société où chacun(e) a les mêmes droits et où les besoins humains sont assurés. Nous devons revendiquer des réformes comme l’égalité des droits pour les LGBTQI concernant les visites de proches à l’hôpital, des logements abordables pour tou(te)s, la fin de l’écart salariale homme-femme et un salaire minimum de 15$/heure – réformes qui ne profiteraient pas seulement aux LGBTQI mais à tous les travailleurs qui lutteront côte-à-côte.

    Les LGBTQI sont régulièrement sujets au harcèlement et à la violence, même à Seattle. On a vu une escalade inquiétante des crimes de haine dans le quartier de Capitol Hill. Malgré sa réputation de ville gay friendly, Seattle a le 3e taux le plus élevé de crimes haineux envers les LGBTQI aux USA en 2013 (Seattle Times, 06/06/2014).

    Les personnes transgenres sont particulièrement touchées par des taux élevés de pauvreté, de chômage et de crimes haineux y compris de meurtres. Dans 29 Etats, il est toujours légal de licencier quelqu’un sur base de son orientation sexuelle. Et dans 33 Etats, être transgenre est une raison valable pour se faire licencier. Les transgenres ont 28% de risques supplémentaires d’être victime de violence physique, souvent de la part de la police, que tout autre lesbienne, gay, bisexuel(l)e ou queer (National Coalition of Anti-Violence Programs).

    Malgré tout cela, les principales organisations LGBTQI, telles que Human Rights Campaign et Gay and Lesbian Task Force, se sont concentrées sur des campagnes qui n’ont pas pour objectif de remettre en question les causes fondamentales de l’oppression des LGBTQI. Celles-ci échouent souvent à pourvoir aux besoins des LGBTQI qui font constamment face à l’injustice économique et sociale. Ces associations LGBTQI dépendent aussi du Parti Démocrate et, par conséquent, limitent leurs revendications à ce qu’elles jugent « acceptables » par l’establishment politique à la solde du patronat.

    Les défenseurs des idées du socialisme considèrent l’oppression des LGBTQI et le sexisme comme inhérents au capitalisme qui promeut des rôles de genre artificiels et restrictifs. La société capitaliste a besoin d’organiser des divisions parmi les travailleurs afin de préserver l’extrême inégalité sur laquelle elle est fondée. Elle cherche toujours à marginaliser et à opprimer les personnes et mouvements LGBTQI en les présentant comme une menace à la famille nucléaire patriarcale. Les politiques de division sont cyniquement utilisées par une partie de l’establishment – promotion de l’homophobie, sexisme, sentiment anti-immigrés et autres préjugés – afin de dévier l’attention loin de la colère profonde envers la pauvreté et l’injustice économique.

    Nous avons besoin d’une autre politique afin de cibler les causes de l’origine de l’oppression des LGBTQI. Les politiciens Républicains attisent l’homophobie, le sexisme et le racisme, mais le mouvement LGBTQI doit aussi couper les ponts avec le Parti Démocrate, auteur de réformes modestes et décousues. Il nous faut construire un parti politique indépendant qui luttera sans ambigüité pour nos intérêts.

    Obama et le Parti Démocrate ont pris de petites initiatives en matière de lutte pour les droits des LGBTQI. Les politiques antidiscriminatoires mises en œuvre dans les Etats par l’administration Obama résultent de luttes menées par les militants LGBTQI ces dix dernières années, lesquelles, par la construction d’une implacable pression des masses de la population, ont convaincu une majorité d’Américains à soutenir les droits fondamentaux des LGBTQI.

    Nous pouvons multiplier de façon exponentielle notre puissance collective en allant chercher l’unité du mouvement LGBTQI avec les syndicats, les organisations environnementales et les autres mouvements sociaux. Nous avons également besoin de nos propres candidats indépendants et de nos propres représentants politiques pour défier à la fois le Parti Républicain et le Parti Démocrate.

    Notre lutte est loin d’être terminée et nous ne parviendrons pas à en finir sans construire un large mouvement pour l’égalité des droits et la justice sociale, sans prendre audacieusement en charge les besoins des LGBTQI les plus opprimés comme les transgenres. Enfin, il nous est impossible d’obtenir une réelle victoire sans rejeter le système économique capitaliste, fondamentalement basé sur l’oppression et l’inégalité.

    (1) Le Stonewall Inn était le nom d’un bar à Greenwich Village, New York, fréquenté par des homosexuels. C’est suite à un contrôle de flics le 27 juin 1969, très fréquent et donc banal dans le milieu LGBTQI de l’époque, que les émeutes ont débuté. Cet ixième raid lancé par la flicaille new-yorkaise a été l’étincelle qui a mis le feu aux poudres.

     

  • USA : Une nouvelle révolte arrive !

    Aux Etats-Unis, les travailleurs en ont tout simplement marre. Après six années de chômage de masse et de coupes budgétaires colossales dans l’enseignement et les programmes sociaux, on leur déclare maintenant qu’une “reprise” est à l’œuvre. Mais la vérité, c’est que plus de 90% des nouvelles richesses créées ont fini dans les poches des 1% les plus riches. Les bénéfices atteignent à nouveau des niveaux record alors que la majorité des nouveaux emplois sont nés dans le secteur des bas salaires. Au niveau mondial, un ralentissement économique est d’ailleurs en cours en Chine, et les marchés européens ne sont pas prêts de sortir de la crise. Une nouvelle crise financière et même une dépression à grande échelle sont donc de l’ordre du possible. Et même aujourd’hui, avec l’actuelle « reprise », aucun sentiment de stabilité durable n’existe.

    Par Bryan Koulouris, Socialist Alternative

    Les travailleurs réclament leur part

    Ce n’est dès lors pas surprenant de voir les travailleurs exiger une plus grande part de la richesse créée au cours de cette « reprise ». Des groupes d’activistes regroupés autour de la revendication d’une augmentation des salaires se développent dans tout le pays, tandis que la campagne 15 NOW (une campagne exigeant l’imposition d’un salaire minimum de 15 dollars de l’heure initiée par Socialist Alternative et qui vient d’emporter une victoire historique à Seattle, NDT) à Seattle et à l’échelle nationale présente le brillant exemple d’une lutte déterminée pour les travailleurs à bas salaires. L’inégalité économique devient une discussion de masse dans la société américaine.

    Obama appelle à un l’imposition d’un salaire minimum fédéral de 10,10$, tout en sachant pertinemment bien que le Congrès ne laissera jamais passer une telle législation. Beaucoup de Démocrates peuvent bien aujourd’hui concentrer leur rhétorique sur l’inégalité économique, cela ne peut être qu’extrêmement limité en raison de la nature même du Parti Démocrate, un parti dominé par la défense des intérêts de Wall Street et des grandes entreprises américaines. Ce thème peut d’ailleurs bien vite être oublié au bout d’un moment, d’une part parce que les Démocrates n’ont aucune solution concrète à offrir, d’autre part parce qu’ils craignent de susciter trop d’attentes dans le monde du travail. Quoi qu’il en soit, un mouvement se développe sur cette thématique, il profondément enraciné dans la base de la société, et il n’est pas prêt de disparaitre.

    Une colère bouillonnante

    En plus des centaines d’actions organisées autour du thème de l’augmentation salariale, d’autres questions ont déclenché de larges protestations. Au cours des premiers mois de cette année 2014 uniquement, nous avons vu des manifestations et actions directes opposées à la destruction massive de l’environnement autour de BP et du pipeline Keystone XL (un oléoduc de TransCanada destiné à relier le Canada aux Etats-Unis – jusqu’au Texas ! – et long de 3.461 km, NDLR). À Albuquerque, au Nouveau-Mexique, on a vu naître des protestations déterminées contre la brutalité policière, sous l’impulsion de jeunes afro et latino-américains. Des groupes de femmes ont protesté contre les tentatives de dirigeants d’entreprises d’éluder leurs responsabilités dans certains programmes de l’Obamacare (principal volet de la réforme du système de protection sociale d’Obama, NDLR) au niveau des soins de santé. La colère est aussi de plus en plus grande parmi les travailleurs immigrés face aux expulsions massives sous la présidence d’Obama. L’offensive menée par les grandes entreprises contre l’enseignement public est en outre encore forte. Et alors que le mouvement syndical a subi une série de défaites et que le nombre d’affilié continue de baisser, une aile, inspirée par le mouvement Occupy, commence à s’affirmer et à se développer autour d’une approche plus combattive dans la lutte pour la défense des intérêts du monde du travail.

    Il ne faut y voir que des escarmouches annonciatrices des batailles massives qui vont éclore contre la domination des entreprises.

    Instabilité politique

    La récente décision prise par la Cour suprême permettant des dépenses individuelles illimitées aux élections fédérales confirme une fois de plus le sentiment partagé par une majorité d’Américains : les partis politiques actuels et tout le processus politique sont dominés par une poignée de d’individus richissimes. L’extrême désillusion ressentie par des dizaines de millions de personnes face au système, alimenté par le contraste entre les moyens gigantesques accordés aux banques dans un contexte de chômage de masse et d’austérité pour les travailleurs et leurs familles, crée une énorme instabilité politique dans la société.

    L’incertitude règne au sein des establishments politiques. Alors que les élections de mi-mandat approchent (fin de cette année), les deux partis du capital, Démocrates et Républicains, sont divisés et ne disposent d’aucune stratégie claire. Aucun de ces deux partis ne parvient à susciter d’enthousiasme dans leurs propres rangs. La capacité d’inspiration de Barack Obama est depuis longtemps révolue et le Tea Party est devenu une farce isolée dans la plupart des régions du pays.

    Le thème de l’Obamacare ne va pas disparaître en raison des attaques du Parti Républicain et de l’incertitude qui règne concernant la façon dont les divers aspects de la législation seront mis en œuvre. 7,5 millions de personnes ont pu s’inscrire pour bénéficier de soins de santé grâce à l’Obamacare, mais des dizaines de millions de personnes restent encore sans assurance, et seront même obligées de payer une amende pour le «crime» de ne pas être en mesure de payer leurs soins de santé ! Une petite majorité d’Américains se déclarent contre l’Obamacare, mais moins d’un quart des personnes sondées réclament l’abrogation de la législation. Après la débâcle du Shutdown de 2013 (l’arrêt des activités gouvernementales fédérales qui a duré du 1er au 16 octobre, et a mis 800.000 employés fédéraux en congé temporaire sans solde, NDT), même ceux qui doutent le plus de l’Obamacare ne veulent pas voir arriver une crise politique dirigée par les Républicain. Mais les Républicains trouveront une manière d’utiliser les élections de mi-mandat.

    Plus tôt cette année, les divisions présentes dans le camp républicain ont été dévoilées au grand jour alors que Boehner (actuel président républicain de la Chambre des représentants des États-Unis, NDT) a déclaré qu’il « n’aimait pas » ce que le Tea Party pensait de son accord conclu avec les Démocrates sur le budget fédéral afin d’éviter un autre Shutdown fédéral. L’agenda républicain est de plus en plus déconnecté de la grande majorité des gens, mais le faible taux de participation prévu pour les élections de mi-mandat de novembre favorise leurs chances. Ils auront cependant leurs propres batailles internes à gérer avec les PAC (Political Action Commitee, comités d’action politique chargés de recueillir des fonds pendant les campagnes électorales américaines, NDT) de l’aile la plus à droite qui s’apprêtent à défier les Républicains « modérés ».

    Les Démocrates ne sont pas non plus exempts de divisions. Alors que nombreux sont ceux qui soutiennent la candidature d’Hillary Clinton pour les élections présidentielles de 2016, les Démocrates les plus populistes lorgnent plutôt vers Elizabeth Warren (sénatrice Démocrate de l’Etat du Massachussetts, elle fut notamment interrogée par Michael Moore pour son film « Capitalism a love Stroy », NDT) ou même le sénateur de gauche du Vermont Bernie Sanders (qui se dit « socialiste » et est administrativement rattaché aux Démocrates au Sénat, NDT). Ces divisions pourront également être vues au cours des Primaires de cette année, et cela reflète la pression de la base de la société sur les Démocrates. Cela pourrait être de nature à énergiser une base électorale loin d’être excitée par la politique d’Obama et de l’establishment, amis de nombreux Démocrates préfèrent la stabilité et de faibles expectations à une base mise sous tension par des syndicalistes, des jeunes et des personnes de couleur. La plupart des Démocrates traditionnels sont favorables à une stratégie qui se limite à attaquer les Républicains comme des « extrémistes » afin de gagner les électeurs sceptiques à l’idée du « moindre mal ».

    Il est extrêmement révélateur de constater que les deux principaux partis politiques essaient de s’attirer un soutien essentiellement en attaquant juste le camp adverse plutôt qu’en proposant une politique concrète pour mobiliser les électeurs. L’establishment politique et le système qu’ils représentent n’ont fondamentalement aucune solution à proposer pour sortir de la crise économique inhérente à leur système.

    Toute la question est de savoir comment peut être forgée une alternative politique prenant à cœur la défense des 99%, des travailleurs et des pauvres. A Seattle, Kshama Sawant a montré la voie en se présentant aux élections en tant que candidate ouvertement socialiste, en refusant la moindre donation des entreprises et en parvenant ainsi à vaincre un puissant candidat Démocrate.

    La lutte contre la politique pro-capitaliste doit être liée au développement de la lutte sociale. Les grèves des travailleurs de la restauration rapide et l’élection de Kshama ont jeté les bases d’une lutte massive pour l’obtention des 15 dollars de l’heure comme salaire minimum à Seattle (une victoire qui vient juste d’être arrachée, NDT), alors que personne n’en parlait il y a un an à peine.

    Le système bipartisan américain est bien plus faible qu’il n’y paraît au premier regard. Les deux partis de Wall Street ont un soutien en perte de vitesse à travers le pays, et plus de la moitié des personnes sondées ont affirmé soutenir l’idée de l’émergence d’un nouveau parti dans le cadre d’une enquête réalisée durant le Shutdown de 2013. Ce soutien pour les Démocrate ou les Républicains diminuera encore au fur-et-à-mesure que la réalité économie percera leurs mensonges à jour.

    Et maintenant ?

    Obama veut éviter de vivre les deux dernières années de son mandat de la même manière que son prédécesseur George W. Bush, complètement discrédité après les élections de mi-mandat de 2006. La seule chose qui peut empêcher de voir cette situation se répéter, c’est la faiblesse des Républicains. L’élite, les 1%, est divisée face aux exigences des travailleurs. Il s’agit d’une formidable opportunité pour les défenseurs des idées du socialisme et pour le mouvement des travailleurs. Cela se reflète notamment dans le gigantesque intérêt suscité par la possibilité d’une candidature de Bernie Sanders à la présidence, peut-être de manière indépendante des Démocrates et dans le contexte de la croissance rapide du mouvement pour un salaire minimum de 15 $.

    Le succès de luttes, notamment autour de la question salariale, peut accroitre la confiance des travailleurs pour qu’ils entrent en résistance contre toutes les injustices du capitalisme. Nous devons nous rappeler que la victoire du mouvement des droits civiques a ouvert la voie à la radicalisation du mouvement contre la guerre du Vietnam, au mouvement de libération des femmes, aux luttes du Black Power et à la radicalisation générale du mouvement des travailleurs à la fin des années ‘60 et au début des années ‘70.

    De la même façon, de grandes victoires pour les travailleurs à faible revenu – parmi les plus opprimés de la société américaine – peuvent renforcer la confiance de plus larges sections de travailleurs pour s’organiser au sein des syndicats, transformer les syndicats existants, protester contre la discrimination et construire une alternative politique pour et par la classe des travailleurs pour contester la domination des deux partis du big-business.

  • USA : victoire pour les 15$ à Seattle !

    La lutte paie !

    Seattle est la première grande ville à adopter un salaire minimum de 15 $ de l’heure. 100.000 travailleurs vont ainsi pouvoir sortir de la pauvreté et des millions de personnes à travers le pays et au-delà vont être inspirées par cette lutte et cette victoire !

    Par Socialist Alternative

    Le 29 mai, le comité du conseil municipal en charge du dossier du salaire minimum a donc pris la décision d’élever le salaire minimum à Seattle de façon à ce qu’il soit le plus élevé du pays . Ce n’est toutefois pas encore une loi, ce ne sera le cas que lorsque le conseil municipal entier aura pu voter sur cette question, le lundi 2 juin.

    Selon la proposition de loi, à partir du premier avril 2015, tous les travailleurs des grandes entreprises comme McDonald’s, Starbucks, Macy’s et Target verront leurs salaires immédiatement augmentés jusqu’à 11 $ de l’heure. D’ici 2025, tous les travailleurs gagneront un minimum de 18 $ de l’heure. Selon diverses estimations, les entreprises de Seattle devront payer 3 milliards $ de plus sous forme de salaire au cours des dix prochaines années ! Voilà qui démontre que ‘‘la lutte paie’’, que les gens de la rue peuvent s’en prendre aux plus grandes corporations du monde et l’emporter pour autant qu’ils s’organisent et ripostent.

    Une véritable socialiste élue au Conseil municipal

    Le mouvement des travailleurs des fast foods, inspiré par le mouvement Occupy, a poussé la revendication des 15 $ de l’heure sur le devant de l’actualité dans tout le pays. Ensuite, la pression s’est accrue à Seattle lorsque le mouvement des travailleurs a réussi à gagner un vote sur les 15 $ en novembre dernier à SeaTac, une petite ville proche de Seattle. Mais c’est l’élection de la candidate de Socialist Alternative, Kshama Sawant, fin de l’année dernière qui a été décisive pour créer un véritable moment politique qui n’a su être brisé. Sawant avait fait campagne sur base d’un programme où figurait en bonne place la revendication des 15$ de l’heure, et cela a ouvert un large débat à travers toute la ville. Elle fut élue avec près de 100.000 voix en novembre 2013.

    ‘‘Sawant a démontré qu’être socialiste n’est plus un problème dans la gestion de la fonction publique. Plus important encore, la campagne des 15 $ de l’heure a nourri un modèle de démocratie par la base qui défie le processus politique contrôlé par les entreprises. Les observateurs s’attendent à ce que le projet de loi passe fin mai 2015. Si c’est le cas, la victoire – bien qu’imparfaite – validera l’approche de Socialist Alternative, gonflera ses rangs et ouvrira plus d’espace pour une politique socialiste aux Etats-Unis’’ Arun Gupta, Al Jazeera America, “Learning from a Socialist in Seattle,” May 21, 2014

    Il était important de gagner les élections, mais il l’était tout autant de voir comment Sawant et son parti, Socialist Alternative, allaient utiliser ce siège au Conseil municipal comme plate-forme pour les mobilisations sociales. Contrairement aux politiciens typiques de l’establishment, Sawant a utilisé sa position et l’attention des médias pour construire un puissant mouvement. Peu de temps après son élection, Kshama Sawant et Socialist Alternative ont lancé une campagne – 15 NOW – pour instaurer la pression la plus élevée autour de la revendication du salaire minimum de 15 $ de l’heure. 15 NOW a développé 11 groupes d’action de base dans divers quartiers de la ville afin de mobiliser, d’aider à faire descendre les habitants dans les rues et d’intervenir dans les forums publics. Avec ces groupes d’action de base et la tenue de conférences démocratiques, 15 NOW a donné la possibilité aux activistes d’avoir réellement en leurs mains propres la lutte pour les 15 $ de l’heure.

    Grâce à sa position publique, Kshama Sawant a été en mesure de contrer la propagande des médias dominants acquis aux grandes entreprises et de dénoncer les tentatives du monde des affaires de noyer le thème des 15 $ et de se cacher derrière l’impact que cette mesure aurait pour les petites entreprises et les petits commerces. Socialist Alternative a su démontrer comment un élu pouvait être utilisé afin de construire un mouvement et pour le renforcer. Socialist Alternative, la campagne 15 NOW et le mouvement syndical ont instauré une pression suffisante de la base pour forcer les grandes entreprises à concéder les 15 $ minimum de l’heure. Il s’agit d’une une réalisation historique aux Etats-Unis.

    Il nous faut un parti indépendant pour représenter les travailleurs et les jeunes

    Le mouvement des travailleurs et les défenseurs des idées du socialisme ont mis sur la table la revendication des 15 $. Le Parti Démocrate a quant à lui invité les grandes entreprises à cette table en cherchant à édulcorer cette exigence.

    Au départ, tous les politiciens du Parti Démocrate se sont opposés aux 15 $. Mais au vu du développement d’un gigantesque soutien public, les deux principaux Démocrates en lice pour le poste de maire se sont prononcés en faveur des 15 $ en septembre 2013. Après avoir remporté l’élection en novembre, le maire Ed Murray a déclaré qu’il soutenait les 15 $, mais qu’il voulait le faire de manière à ce que cela ‘‘fonctionne pour les entreprises aussi’’.

    Murray a ainsi mis en place un comité consultatif de dirigeants patronaux et syndicaux (mais surtout patronaux) pour négocier un compromis. L’establishment politique et patronal a bien dû reconnaitre qu’il était impossible de stopper les 15 $, mais il a cherché à utiliser le processus de négociation pour insérer un certain nombre de mesures favorables aux entreprises, comme d’appliquer l’augmentation sur une longue période de plusieurs années. Le monde des affaires s’est battu jusqu’au dernier jour pour diluer plus encore le projet de loi.

    Lors du vote du 29 mai en comité, une majorité des membres du conseil du Parti Démocrate a proposé de repousser la date d’application de la loi jusqu’à avril 2015 et d’inclure un sous-salaire minimum pour les adolescents ainsi qu’un ‘‘salaire de formation.’’ La campagne 15 NOW et Socialist Alternative appellent les syndicats, les activistes et chaque partisan des 15 $ à venir assister ce lundi 2 juin à la séance du Conseil municipal de Seattle, où le projet de loi sera finalisé, afin de se battre pour l’élimination des échappatoires pro-patronat ajoutés le 29 mai, y compris le délai de mise en œuvre et le ‘‘salaire de formation’’.

    Tout cela a illustré que même si le Parti Démocrate recourt à une rhétorique plus progressiste que les Républicains, ces deux partis sont fondamentalement soumis à la défense des intérêts des grandes entreprises. Alors qu’une seule élue socialiste authentique au conseil municipal de Seattle a été en mesure de construire un mouvement pour gagner les 15 $ en moins d’un an, les politiciens du Parti Démocrate n’ont pas ménagé leurs efforts pour assurer que le salaire minimum de 15 $ de l’heure soient le plus favorable possible aux patrons. Au niveau national, les Démocrates ne sont pas parvenus à organiser sérieusement la lutte pour un salaire minimum de 10,10 $ de l’heure, ils ne se servent de cette question que comme gadget électoral pour les élections de 2014.

    C’est pourquoi Socialist Alternative soutient, à l’instar de ce que nous avons fait durant la campagne électorale de Kshama, que les travailleurs ont besoin de leur propre alternative politique contre les partis Démocrates et Républicains. Compte tenu de l’énorme aliénation éprouvée face au Congrès, de la grande méfiance à l’égard des politiciens et de la nécessité de défendre les travailleurs et leurs familles, il existe une occasion unique de construire un nouveau parti large des travailleurs.

    Le travail de Kshama Sawant et de Socialist Alternative a démontré qu’il est possible de faire entendre une voix politique indépendante pour contester les deux partis du big-business. La victoire de Kshama et de Socialist Alternative peut se propager à travers le pays.

    Une stratégie combattive pour le mouvement des travailleurs

    Seattle a réussi à gagner le salaire minimum le plus élevé des États-Unis, mais le monde du capital est parvenu à affaiblir les 15 $ de diverses façons. Le délai pour que cette revendication soit pleinement d’application est déraisonnable, de 3 à 10 ans en fonction de la taille de l’entreprise, et il existe aussi une pénalité pour les pourboires et une déduction pour les soins de santé pour les 10 premières années. Ce n’était pas inévitable. Au cours des 6 derniers mois, Socialist Alternative s’est énergiquement engagé dans un débat au sein du mouvement syndical sur la meilleure stratégie à adopter. Nous exhortons les syndicalistes, les activistes et les dirigeants syndicaux à examiner l’expérience de cette lutte, à en discuter avec nous et à en tirer les leçons nécessaires pour l’avenir.

    À notre avis, la stratégie de ceux qui dirigent les principaux syndicats n’a pas été axée sur le renforcement du mouvement de la base, mais plutôt orientée vers le processus de négociation du maire avec les entreprises. Ils considéraient cette approche comme nécessaire en conséquence de leur manque de confiance envers la capacité du mouvement des travailleurs de pouvoir l’emporter dans le cadre d’un affrontement direct et ouvert avec les grandes entreprises.

    Après les décennies de recul des luttes que nous avons connues, cette faible confiance en les capacités de la classe ouvrière est compréhensible. Le débat autour des 15 $ a cependant été une énorme occasion d’essayer de mobiliser de nouvelles couches de travailleurs dans un mouvement de lutte, ce qui aurait instauré davantage de pression tout en permettant à une nouvelle génération d’acquérir l’expérience de l’organisation et d’en tirer les leçons politiques. Cela aurait été une manière de commencer à reconstruire le mouvement des travailleurs sur des bases combattives.

    C’est dans ce contexte que nous avons défendu de déposer un référendum pour les 15 $. Si les grands syndicats avaient soutenu cette menace, les entreprises auraient pu être forcées à faire des concessions plus grandes encore. La collecte des 100.000 signatures pour déposer ce référendum aurait été l’occasion de toucher de larges couches de la population et de les insérer dans l’organisation de la lutte tout en répondant aux arguments anti-travailleurs des entreprises et des médias (concernant le délai d’application, le salaire de formation, la question des pourboires,…).

    Les syndicats américains ont d’énormes ressources et disposent d’un grand poids politique. Ils ont des millions de dollars et des millions de membres qui pourraient être mobilisés derrière une campagne audacieuse pour augmenter le salaire minimum.

    Les grèves dans les fast foods ont joué un rôle crucial en attirant l’attention sur la question des salaires de misère, mais le mouvement pourrait être beaucoup plus fort si les syndicats en finissaient une bonne fois pour toutes avec leur dépendance à l’égard du Parti Démocrate et s’ils mobilisaient toute la force des travailleurs à travers la construction d’un mouvement de masse démocratiquement dirigé.

    Au cours des trois dernières décennies, la stratégie des syndicats a été de tenter de cajoler les grandes entreprises en espérant obtenir des concessions seulement. Cela n’a fait qu’accroitre la soif du monde des entreprises. Il est temps d’abandonner cet effort futile.

    Et nous devons nous rappeler qu’aucune réforme n’est garantie sous le capitalisme. Les grandes entreprises pourraient contester ce qui a été gagné à Seattle par un référendum ou d’autres moyens. Notre mouvement doit être prêt à se mobiliser et à défendre ce que nous avons gagné.

    Rejoignez la lutte pour le socialisme !

    “A la fin,” a écrit Arun Ivatury et Rebecca Smith pour CNN.com, “la percée réalisée à Seattle démontre (…) que lorsque les travailleurs sont bien organisés et qu’il existe un large soutien pour de meilleurs salaires, même les entreprises qui résistent à cette idée sont forcées de payer plus.” (15 mai 2014)

    Socialist Alternative soutient chaque réforme possible qui peut être obtenue sous le système capitaliste. La lutte pour les 15 $ a démontré que lorsque nous sommes organisés, nous pouvons vaincre.

    Mais cette lutte a aussi démontré que tant que nous restons à l’intérieur du cadre du capitalisme, les grandes entreprises vont se battre bec et ongles pour défendre leur pouvoir et leurs profits. La lutte pour de meilleurs salaires, pour un enseignement gratuit et de qualité, pour des soins de santé accessibles à tous, pour des logements abordables, pour la défense de l’environnement, et la justice sociale en général doit être une lutte pour une transformation socialiste de la société, basée sur une véritable égalité et sur la satisfaction des besoins de l’Humanité.

  • Socialisme 2014 : Message de Kshama Sawant

    Lors du meeting final de la journée “Socialisme 2014”, un message vidéo l’élue socialiste à Seattle Kshama Sawant a été projeté. Voici cette vidéo, avec sous-titres en français et néerlandais. Le texte intégral est également disponible en dessous.

    Salutations à tous,

    Merci aux gens du PSL/LSP de m’avoir invité à parler. Je suis Khsama Sawant et vous parle de la part de Socialist Alternative, la section américaine du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO).

    Fin de l’année dernière, j’ai été élue en tant que candidate de Socialist Aternative au Conseil de ville de Seattle, la première élue ouvertement socialiste à Seattle en un siècle.

    Notre campagne historique à Seattle fut un défi direct lancé au Parti Républicain et au Parti Démocrate, les partis du Big Business. Nous avons mené campagne pour un salaire minimum de 15 dollars de l’heure, pour taxer le riches afin d’investir dans l’enseignement ainsi que pour des logements abordables pour tous et pour un contrôle des loyers. Notre victoire a fait trembler l’establishment politique et a poussé des milliers de gens à travers le pays à entrer en action.

    Notre mouvement ici à Seattle avait été inspiré par les travailleurs des fast-foods qui avaient commencé une lutte nationale pour les 15 dollars de l’heure il y a tout juste un an. Les travailleurs à bas salaires démontrent un courage et des sacrifices phénoménaux à chaque fois qu’ils dénoncent, manifestent et font grève. Ces travailleurs inorganisés en lutte pour les 15 dollars de l’heure et pour le droit de se syndiquer savent très bien que les patrons peuvent et vont prendre leur revanche.

    Le mouvement a gagné une victoire partielle des 15 dollars de l’heure à Seatac, une ville voisine de Seattle, et nous a aussi aidés à remporter le siège au conseil de ville. Nous avons utilisé l’élan de ce moment pour lancer la campagne ‘‘15NOW’’, une campagne de base avec le soutien de la majorité des syndicats locaux et d’organisation communautaires.

    15NOW dirige la charge dans la rue et les quartiers et construit un mouvement de masse en organisant des groupes d’actions de quartier. Le weekend dernier, nous avons organisé la première conférence nationale de 15NOW avec la présence d’activistes de tous les Etats-Unis.

    Le ‘‘Seattle Times’’ a récemment écrit que nous avions déjà gagné le débat sur les 15 dollars. Gagner le débat public est un succès du mouvement, mais ce n’est pas suffisant. Le Big Business a commencé une offensive contre les ‘‘15’’. Puisqu’ils ne peuvent pas ouvertement faire campagne contre le nombre 15, ils essayent d’en noyer le contenu afin d’assurer que les ‘‘15’’ qui seront gagnés n’en auront que le nom et ne seront pas une réelle aide pour sortir les travailleurs de la pauvreté.

    Les travailleurs ont besoin d’une sécurité dans le cas où l’establishment politique de Seattle refuse de donner un réel et conséquent ‘‘15’’. Dans quelques semaines, nous allons lancer une campagne visant à récolter 50.000 signatures pour obtenir qu’une proposition de 15NOW soit soumise au vote direct des électeurs en novembre.

    Notre bataille à Seattle est une expression de la colère mondiale contre l’injustice et l’inégalité. Les commentateurs capitalistes les plus perspicaces craignent cette colère croissante à juste titre. Notre job est de pousser cette colère de l’avant et de la transformer en riposte massive ainsi qu’en organisations enracinées dans les luttes de la classe des travailleurs.

    Je sais que vous menez en ce moment une campagne électorale à Bruxelles. Le contexte politique est différent des USA, mais j’entends de nombreux rapports encourageant d’Europe au sujet de travailleurs ripostant contre l’austérité et ramenant cette lutte sur le terrain politique.

    Cette riposte n’est pas aisée, avec la puissance des médias capitalistes et l’hésitation continuelle des dirigeants syndicaux pour utiliser la force sociale de la classe des travailleurs afin d’avoir des victoires. Nous voyons cela aussi aux USA. Sans aucun doute, notre travail est parfois difficile. Et ici à Seattle, les patrons vont se battre avec la dernière énergie. Mais au même moment, les opportunités pour construire nos forces s’ouvrent aussi, et nous devons nous préparer à les saisir.

    Regardez la percée que nous avons faite aux USA. Regardons la lutte inspirante de la classe des travailleurs sud-africains. Le soulèvement des mineurs, le nouveau challenge électoral posé par le WASP et le NUMSA. Regardez les impressionnants mouvements de masse au Brésil, en Turquie, en Egypte et au sud de l’Europe. Je fais appel à vous pour regarder le travail mené par le Comité pour une Internationale Ouvrière. Le secret de nos succès, ce sont des idées clairement socialistes, le développement de perspectives, une audace pour se battre pour notre classe ainsi que la volonté de nos camarades de faire d’énormes sacrifices.

    Je suis certain que les meilleures années pour construire le mouvement des travailleurs et la représentation politique de la classe des travailleurs en Belgique, aux USA et à travers le monde sont face à nous.

    Bonne chance avec votre conférence aujourd’hui et avec votre campagne électorale.

    Solidarité !

  • [INTERVIEW] Bart Vandersteene, de retour des USA

    USA : La lutte pour un meilleur salaire minimum atteint un point critique

    Le 15 mars dernier, 750 habitants de Seattle manifestaient pour revendiquer du Conseil municipal l’instauration d’un salaire minimum de 15 dollars de l’heure. Bart Vandersteene, porte-parole du PSL, a séjourné deux mois durant à Seattle au début de cette année afin de soutenir le fonctionnement de nos camarades de Socialist Alternative. Nous avons discuté avec lui des USA et de la lutte pour le socialisme, deux thèmes qui, selon certains, sont diamétralement opposés.

    Kshama Sawant (membre de Socialist Alternative) vient d’accomplir ses premiers mois de conseillère à Seattle. Comment se sont-ils passés ?

    “Un mot : impressionnant ! Lorsque Kshama a prêté serment le 6 janvier, 800 personnes étaient présentes ainsi que les médias nationaux et même internationaux. Et au cours des deux premiers mois de son mandat, elle a su faire parler d’elle plus d’une fois… C’en est fini de la politique à laquelle était habitué l’establishment à Seattle.

    “Les médias locaux publient parfois plusieurs fois par semaine des reportages consacrés à Kshama. C’est à tel point que certains journalistes ont laissé entendre qu’ils reprennent goût à leur travail, qu’il y avait de nouveau des informations à couvrir. Plus prosaïquement, un autre journaliste a fait savoir que l’arrivée de Kshama était est une bonne chose pour les ventes de son journal.

    “Ces anecdotes illustrent ce qui se vit plus généralement au sein de la société. Pour la première fois depuis longtemps, une partie importante de la population active se sent à nouveau représentée au conseil.”

    En deux mois, on ne peut évidemment pas réaliser grand-chose…

    “Vous seriez bien étonnés. La présence d’une véritable socialiste parmi les neuf conseillers qui gèrent la ville renforce la confiance en soi de la population. Lors d’un discours en face de militants syndicaux Kshama a exprimé la manière dont elle voit son rôle comme suit : ‘‘Chez moi, pas besoin de faire du lobby. Il suffit de me dire comment je peux vous aider.’’

    “Certains prennent ça au pied de la lettre, c’est d’ailleurs ce qu’elle espérait. Ainsi, elle a reçu un jour la visite d’une quarantaine de travailleurs d’un hôpital. Ils lui ont expliqué qu’en tant qu’immigrés, ils étaient discriminés en permanence par leurs supérieurs et qu’ils n’avaient pas obtenu de prime entre autres à cause d’un examen linguistique proprement raciste. Kshama a pris le dossier à coeur, a écrit une déclaration, a appelé la direction de l’hôpital et a rapporté cette affaire au conseil municipal. Deux semaines plus tard, les travailleurs ont reçu leur prime avec effet rétroactif, la direction a présenté ses excuses et a promis une enquête interne sur la discrimination. Outre ces choses concrètes, Sawant pèse dans le débat politique de la ville.”

    La question du salaire minimum est-elle au centre de ce débat politique ?

    “Oui. La gigantesque inégalité de revenus et de richesses aux USA entraine une indignation profonde. La lutte pour un meilleur salaire minimum est le thème central autour duquel le mécontentement se manifeste. Comme Tom Morello, l’ancien guitariste de Rage Against The Machine, l’a récemment écrit : ‘‘All eyes are on Seattle’’, tous les yeux sont sur Seattle. La chance est réelle que le salaire minimum augmente drastiquement à Seattle. Ce serait un exemple inspirant pour tous les travailleurs à bas salaire du pays.

    “Le salaire minimum fédéral de 7,25 dollars (5,5 euros ou 880 euros bruts par mois) est un vrai salaire de misère. Dans l’Etat de Washington, le salaire minimum est de 9,32 dollars. Avec un coût moyen du logement de 1200 dollars par mois à Seattle, impossible de vivre d’un tel salaire. Cette revendication des 15 dollars de l’heure était le thème central de la campagne électorale de Kshama. Les 95.000 voix qu’elle a récoltées comme socialiste ouvertement déclarée ont placé le thème du salaire minimum en haut de l’agenda politique.”

    Où en est cette discussion aujourd’hui ?

    “Le maire déclare systématiquement dans les médias qu’un salaire minimum de 15 dollars de l’heure arrive, mais l’affaire est loin d’être gagnée. En coulisses, des grandes et moyennes entreprises font du lobby pour enterrer la question. Le maire Murray a récemment déclaré que les 15 dollars ne seraient complètement instaurés qu’à la fin de son mandat en 2017, mais avec probablement toutes sortes d’exceptions. Le secteur Horeca veut par exemple intégrer les pourboires dans le salaire et certaines entreprises veulent faire compter l’assurance-santé de leurs travailleurs. D’autres disent que les “petites” entreprises ne doivent pas y être forcées.

    “C’est une véritable guerre de propagande qui a éclaté. Les grandes entreprises aux bénéfices mirobolants peuvent évidemment difficilement défendre être incapables de payer un tel salaire minimum, elles se retranchent donc derrière les petites et moyennes entreprises. Kshama Sawant a quant à elle toujours plaidé pour une beaucoup plus grande imposition des grandes entreprises. Cet argent pourrait être utilisé pour accorder certaines réductions d’impôts aux petites entreprises
    qui prouvent qu’elles ont de réelles difficultés financières.”

    Les entreprises essaient-elles de créer un climat de peur ?

    “Absolument. Des emplois disparaîtraient, l’économie locale serait anéantie, etc. Toutes les études prouvent au contraire que dans les villes où le salaire minimum a été augmenté, des emplois ont été créés grâce à l’augmentation de la consommation. Si une grande partie de la population active voit ses revenus fortement augmenter, cela retourne intégralement dans l’économie. Mais c’est un fait que, dans l’économie capitaliste, les plus grandes entreprises bénéficient d’un énorme avantage concurrentiel du fait de l’échelle à laquelle elles opèrent, des matières premières qu’elles peuvent acheter, des frais qu’elles peuvent étaler,… Et elles paient aussi moins d’impôts, tout comme en Europe.

    “Mais quand une économie ne peut fonctionner qu’en condamnant les travailleurs à des salaires de misère, quelque chose cloche fondamentalement. Voilà ce que dit Socialist Alternative, en partant du principe que chaque travailleur a droit à la richesse qu’il produit et que si la structure économique actuelle ne le permet pas, il faut discuter d’une alternative. Cette prise de conscience se développe lentement aux USA.”

    Kshama Sawant a parlé, début de cette année, de la possibilité d’un référendum. Aura-t-il lieu ?

    “Fin avril, une campagne sera lancée pour récolter plus de 20.000 signatures. Entre-temps, nous laissons encore quelques semaines aux négociations.

    “Socialist Alternative et Kshama Sawant ont lancé, début de cette année, la campagne “15now” pour organiser les activistes au sein d’un mouvement de masse capable de faire pression sur le maire et les négociateurs. Si nécessaire, cela peut devenir une campagne de masse pour un référendum le 4 novembre 2014.

    “Un référendum est naturellement un instrument difficile. L’an dernier, une proposition a été faite d’indiquer clairement les produits comprenant des OGM. Le soutien à cette mesure bénéficiait d’un soutien de 90 % dans les sondages. Mais l’industrie agro-alimentaire, notamment Monsanto, a lancé une méga-campagne de 22 millions de dollars avec des spots télé, tracts,… en annonçant la fin économique de Seattle. Au final, les activistes ont perdu le référendum.

    “Il existe de meilleurs instruments. Si seulement les syndicats pouvaient renouer avec la fructueuse tradition de lutte du passé, avec une organisation solide sur les lieux de travail, des manifestations et des grèves. Hélas, une partie considérable de la direction syndicale est aujourd’hui intégrée à la structure sociale. Socialist Alternative a toutefois de bonnes relations avec plusieurs dirigeants syndicaux conscients que le soutien est énorme pour une forte augmentation du salaire minimum. Ils aident à faire de “15now” une campagne qui, espérons-le, arrachera une victoire cette année.

    “Cette année, le 8 mars, Journée Internationale des Femmes, qui tout comme le 1er mai trouve ses origines aux USA, une attention particulière concernant l’inégalité salariale a été soulignée. Deux tiers de tous les travailleurs qui travaillent au salaire minimum sont des travailleuses. Un salaire minimum plus élevé aurait un impact énorme sur le fossé salarial entre hommes et femmes. Dans un classement de l’égalité salariale entre hommes et femmes, les USA se trouvent à la 67ème place sur 133 pays, juste derrière le Yémen. L’augmentation du salaire minimum est donc aussi une question d’égalité hommes- femmes.”

    Quel impact a eu l’élection de Kshama dans le reste du pays ?

    “Cette élection a signifié un regain d’énergie pour beaucoup d’activistes dont certains étaient désillusionnés. Sawant est le symbole du renouveau de la gauche aux USA. Elle a donné une réponse socialiste au State of the Union d’Obama qui a été vue presque 90.000 fois sur YouTube. Socialist Alternative est toujours une petite organisation mais elle a attiré l’attention de beaucoup de personnes à la recherche d’une organisation socialiste efficace. Nous sommes dans le processus de création de nouvelles sections dans tout le pays. La victoire électorale a été une énorme prouesse. Mais avoir un impact réel sur la lutte à Seattle et obtenir des résultats, entre autres autour du salaire minimum, aurait encore plus d’écho et pourrait servir d’exemple pour le reste du pays.

    “Tout ceci est vraiment très encourageant pour les socialistes du monde entier. Kshama a reçu des félicitations du monde entier mais surtout d’Amérique du Sud et centrale, d’Afrique, d’Asie parce que les organisations de gauches y sont bien conscientes à quel point il est fondamental de voir une force socialiste solide se développer aux USA qui, à terme, puisse enchaîner le monstre impérialiste. C’est pourquoi le PSL a décidé de soutenir ce développement et d’aider dans cette tâche importante pour construire un mouvement socialiste fort aux USA.”

  • ‘‘10 objectifs d’un programme anticapitaliste d’urgence’’

    Nouvelle brochure  de la FGTB Charleroi & Sud Hainaut

    800×600

    Après les “8 questions en relation avec l’appel du premier mai 2012 de la FGTB Charleroi Sud-Hainaut”, cette régionale édite une nouvelle brochure à 15.000 exemplaires. ERIC BYL la passe en revue dans ce dossier. Il vous est possible de commander des exemplaires de cette brochure soit au PSL (info@socialisme.be) ou directement à la régionale de la FGTB de Charleroi & Sud-Hainaut (fgtbcharleroi@fgtb.be).

    Rompre avec les “amis” politiques

    Normal
    0

    21

    false
    false
    false

    NL-BE
    X-NONE
    X-NONE

    MicrosoftInternetExplorer4

    /* Style Definitions */
    table.MsoNormalTable
    {mso-style-name:”Table Normal”;
    mso-tstyle-rowband-size:0;
    mso-tstyle-colband-size:0;
    mso-style-noshow:yes;
    mso-style-priority:99;
    mso-style-parent:””;
    mso-padding-alt:0cm 5.4pt 0cm 5.4pt;
    mso-para-margin:0cm;
    mso-para-margin-bottom:.0001pt;
    mso-pagination:widow-orphan;
    font-size:10.0pt;
    font-family:”Times New Roman”,”serif”;}
    La brochure précédente remettait en question la politique syndicale de ces dernières années, celle qui veillait – et veille toujours – à éviter toute confrontation directe avec les patrons en assurant une compréhension réciproque quitte à ‘‘huiler’’ la concertation sociale via l’aide de l’Etat et/ou de notre sécurité sociale. Pour ce faire, il est fait appel aux ‘‘amis’’ politiques qui essaient de négocier des compromis ‘‘honorables’’ avec les politiciens des patrons. Les mobilisations interprofessionnelles ne servent dès lors plus à imposer un rapport de forces plus favorable dans l’opposition entre travail et capital, mais juste à appuyer ces ‘‘amis’’ politiques. Il en résulte que les appareils syndicaux sont de plus en plus profondément intégrés au système qui, pourtant, recherche les conditions les plus avantageuses pour le capitalisme, paix sociale incluse.

    Cela peut livrer des résultats en période de croissance économique et avec des syndicats forts, même si ce n’est que de manière limitée. Mais quand la crise vient rogner les marges disponibles, cette politique d’intégration et de soutien aux amis politiques n’est plus seulement insuffisante, elle devient carrément contre-productive. La FGTB Charleroi-Sud Hainaut est la première à plaider aussi ouvertement pour une autre attitude, plus combative, pour la construction d’un réel rapport de forces et pour la rupture avec les politiciens prétendument ‘‘amis’’. Cela reflète une tendance qui vit dans d’autres régionales et centrales et cela depuis la colère ressentie face au Pacte des générations de 2005 déjà. Dans la CGSP-ALRS (Administrations Locales et Régionales) de Bruxelles, au sein de la centrale des employés de la CSC, à la Centrale Générale d’Anvers,… couvent de semblables frustrations par rapport aux partenaires politiques. Pour l’instant, la régionale de Charleroi-Sud Hainaut est encore seule, mais ce n’est qu’une question de temps avant qu’il en soit autrement. Du côté patronal, certains ont d’ailleurs déjà unilatéralement fait sauter la politique de compromis. Mais la rupture de la digue sous les coups des attaques patronales est encore à venir… Ce sera le cas après les élections de mai 2014.

    Une prise de position offensive est nécessaire

    Les objectifs des patrons sont connus de tous. Ils sont déjà à l’offensive depuis le début des années ’80. Afin d’être compétitifs dans un capitalisme globalisé, ils réclament plus de flexibilité, un secteur à bas salaires, que l’on travaille plus longtemps et des allocations sociales plus faibles et limitées dans le temps pour accroître la concurrence entre travailleurs sur le marché du travail. Ils exigent de disposer de tout ce qui est rentable à coups de libéralisations et de privatisations. Tout ce qui ne génère pas suffisamment de bénéfices doit d’abord être assaini, puis vendu ou fermé. La voilà la stratégie de survie du patronat. Elle ne laisse pas beaucoup d’espace au compromis. Il ne peut, en effet, assurer sa survie qu’au détriment des travailleurs. Les politiciens, même les partenaires des appareils syndicaux, jouent des coudes pour prouver qu’ils sont la meilleure garantie de l’application de cette politique. Dans ces circonstances, une politique syndicale défensive est catastrophique. Du point de vue du mouvement ouvrier, les compromis sont de moins en moins ‘‘honorables’’ et de plus en plus ‘‘pourris’’.

    La seule stratégie de survie capable de sauver le mouvement ouvrier dans ces circonstances est une stratégie offensive. Le point de départ ne doit pas être ‘‘comment pouvons-nous aider les patrons à être plus compétitifs face à leurs concurrents étrangers ?’’ mais au contraire ‘‘qu’est-ce qui est nécessaire pour assurer une existence humaine à tous, travailleurs compris ?’’ La régionale FGTB essaie d’y répondre en 10 chapitres. Nous n’avons pas la place de publier ici ce programme anticapitaliste d’urgence dans son intégralité, mais le lecteur peut en commander un exemplaire soit au PSL (info@socialisme.be) ou directement à la régionale (fgtbcharleroi@fgtb.be). Elle n’est pour l’instant disponible qu’en français.

    Revendications centrales

    Nous souhaitons dans ce dossier relever les revendications les plus importantes, ne serait-ce que pour susciter l’envie d’en savoir plus. Au chapitre concernant le chômage massif, la régionale plaide, entre autres, pour la restauration en tant que norme du contrat à durée déterminée, pour la transformation des contractuels en statutaires dans la fonction publique et pour une réduction collective du temps de travail à 32 heures par semaine sans perte de salaire, avec embauches compensatoires et baisse des cadences de travail. La régionale souligne subtilement que cette diminution du temps de travail est déjà d’application maintenant – la durée de travail moyenne est en effet actuellement de 31 heures par semaine – mais sur base du travail à temps partiel involontaire et surtout via du salaire partiel. Entre ’53 et ’73, la durée du temps de travail avait également diminué, de 20%, en compensation de l’augmentation de productivité. Mais cela s’était alors fait sans perte de salaire.

    Dans le chapitre “redistribuer les richesses”, la régionale revendique l’abrogation de la norme salariale et le rétablissement complet de l’index. Elle plaide pour la gratuité des nécessités de base telles que l’enseignement, l’accueil des enfants, l’eau, l’électricité et la mobilité, jusqu’à un plafond de consommation socialement déterminé, avec une tarification progressive au-delà. Elle propose de renationaliser les secteurs qui ont été privatisés comme l’énergie, les transports, la poste, la téléphonie, mais alors sous le contrôle des travailleurs et des usagers. Elle veut un refinancement massif du secteur public via une réforme fiscale d’ampleur.

    La régionale se prononce contre une scission communautaire de la sécurité sociale, pour la suppression des “baisses de charges sociales” aux employeurs – qui sont en fait les salaires indirects des travailleurs -, pour l’individualisation des droits à la sécu et la suppression de l’activation des sans-emploi, ainsi que de la dégressivité des allocations de chômage. Au sujet du financement de son programme, la régionale souhaite la levée du secret bancaire, la suppression des intérêts notionnels et du précompte libératoire, un cadastre des patrimoines, une taxation des plus-values (sur la vente des placements) et les moyens techniques et humains nécessaires à la lutte contre la fraude fiscale. Elle veut toutefois surtout mettre toutes les institutions financières sous le strict contrôle de la société, par la socialisation des banques et leur fusion en un grand pôle bancaire public, sans indemnité ni rachat, sauf pour les petits actionnaires.

    La régionale revendique l’annulation de la dette publique. Elle refuse les diktats de l’Union européenne et veut soutenir les peuples grec, espagnol et portugais dans leur lutte contre ceux-ci. Les traités européens doivent être abolis. Une assemblée constituante doit être élue pour fonder une autre Europe, sur base de démocratie, de justice sociale, de solidarité, d’ouverture et d’écologie. Elle veut une action syndicale européenne plutôt que du lobbying.
    En matière d’environnement, elle revendique la suppression des productions inutiles et nuisibles avec reconversion sous contrôle des travailleurs afin de maintenir les acquis de ces derniers. Elle revendique aussi la création d’un service public de l’énergie, d’une entreprise publique d’isolation et de rénovation des logements, des transports en commun gratuits et de qualité et un plan public européen pour une politique énergétique efficace, 100 % renouvelable et décentralisée. Elle veut l’annulation de la dette des pays du tiers-monde, la suppression des droits de brevets dans le secteur pharmaceutique et des technologies vertes et une aide des pays développés les plus riches aux pays du Sud, pour qu’ils puissent s’adapter aux changements climatiques.

    La FGTB de Charleroi-Sud Hainaut déclare que le chômage de masse et la répartition inégale des richesses en Occident, ainsi que le réchauffement climatique et les catastrophes humanitaires dans le tiers-monde ne sont pas des phénomènes naturels qui nous tombent dessus par hasard. Il s’agit du résultat des caractéristiques qui fondent la société capitaliste : la soif de profit, la concurrence et le “libre” marché. ‘‘Il est illusoire de penser qu’on peut réformer le capitalisme pour qu’il devienne un ‘‘bon’’ capitalisme de relance. Il faut donc être clair : il faut une stratégie pour sortir du capitalisme et le remplacer par un autre système qui satisfait les besoins de la population et préserve notre planète”, telle est la conclusion de la brochure de la régionale.

    Le PSL est d’accord avec cette conclusion anticapitaliste. Nous préférions la formulation “[supprimer le système capitaliste et] le remplacer par un système socialiste et démocratique” de la brochure précédente en comparaison du ‘‘remplacer par un autre système qui…’’ Cela pourrait en effet être considéré comme un indice du fait que cet “autre système” reste encore à être complètement inventé, comme si l’Histoire ne nous avait rien appris à ce sujet. C’est inexact. Nous pouvons discuter du nom, mais seul un système dans lequel la production est essentiellement gérée collectivement et dans lequel une large majorité – la classe ouvrière, ceux qui produisent réellement les richesses – prend le pouvoir économique et politique entre ses mains peut remplacer le capitalisme. C’est ce que nous appelons le socialisme. De plus, l’expérience du stalinisme nous a appris que des directives bureaucratiques issues du sommet ne pourront jamais remplacer la planification démocratique par la base et que le socialisme démocratique commence bien entendu quelque part, mais qu’il ne peut être consolidé qu’à l’échelle internationale.

    La catastrophe économique, sociale et écologique vers laquelle fonce la société montre de quelle urgence nous parlons. Ce n’est pas pour rien que la régionale FGTB appelle son programme un ‘‘programme d’urgence’’. Quelles que soient l’insistance et la pression que la classe ouvrière et les mouvements sociaux exercent, aucun gouvernement capitaliste ne sera jamais prêt à appliquer ce programme d’urgence. La régionale essaie d’y répondre avec son appel à rassembler toutes les forces anticapitalistes à la gauche du PS et d’Écolo comme moyen de redonner espoir aux travailleurs. Le PSL soutient cet appel. Cela peut constituer un premier pas pour, à terme, populariser à nouveau l’idée d’un gouvernement qui veuille bien exécuter un tel programme, un gouvernement par et pour les travailleurs.

    Comment passer d’une position défensive à l’offensive ? L’exemple de Seattle

    Il semble impossible d’aller à l’encontre de l’offensive néolibérale. Ceux qui ne sont pas prêts à entrer dans la logique de la concurrence débridée passent pour des ringards, pour de dangereux utopistes, des populistes, etc. Mais, suivant cette même logique, nos enfants travailleraient toujours dans les mines dès 6 ans, le suffrage serait toujours censitaire, la durée de travail moyenne de 12 à 14 heures par jour et nous n’aurions pas de congé payé. A cette époque aussi, les patrons menaçaient de fermeture et de délocalisation. Pourtant, nos prédécesseurs ont pu inverser la tendance. Ils y sont parvenus parce qu’ils se sont mobilisés autour de quelques points centraux qu’ils ont lié à la vision d’une autre société, une société socialiste. C’est la crainte de cette société alternative qui a, alors, obligé les capitalistes à accorder de grandes concessions.

    Aujourd’hui, il se passe quelque chose de semblable dans l’antre de la bête, aux Etats-Unis, à Seattle, une ville plus grande qu’Anvers, le berceau de multinationales telles que Boeing, Microsoft et Apple. Les syndicats, avec les héritiers du mouvement Occupy et la membre du conseil communal Kshama Sawant (première élue véritablement socialiste et marxiste depuis des générations, voir en page 11) mènent la lutte pour le doublement du salaire minimum jusqu’à 15$ de l’heure. Cette campagne ne connaîtrait pas autant de succès si elle n’était combinée à une critique plus générale et à une vision alternative, démocratique et socialiste de la société. Beaucoup des partisans des 15$ de l’heure sont, en effet, bien conscients du fait que les patrons reprendront si possible de la main gauche ce qu’ils auront cédé de la main droite. Mais lorsque Boeing a menacé de délocaliser son implantation, Kshama a riposté à cette terreur patronale en menaçant – en pleine assemblée générale des travailleurs – de reprendre les installations et la connaissance des travailleurs avec la collectivité. Cette approche socialiste resterait toutefois lettre morte si elle n’était pas liée à la mobilisation autour d’un ou plusieurs points centraux. Depuis lors, presque chacun des 9 élus, y compris le maire, a dû se prononcer pour un salaire minimum de 15$/heure. Sawant, Occupy et le mouvement ouvrier sont parvenus à renverser le discours sur les baisses de charge et l’austérité ! Si Seattle obtient les 15$/heure, cela deviendra un point litigieux dans l’ensemble des Etats-Unis.

    Le Plan du travail et les Congrès de la FGTB de ’54 et de ’56

    A l’occasion de notre dossier consacré à la précédente brochure de la FGTB Charleroi-Sud Hainaut (dans l’édition de novembre 2013 de Lutte Socialiste), nous avions mis en avant la façon dont l’offensive patronale lors de la crise de ’29 avait conduit à une grève des mineurs de plusieurs mois, qui, en 1932, dans le Borinage, étaient en fait devenus les maîtres de la situation. Là non plus, il n’y avait pas de place pour le compromis.

    Le POB (Parti Ouvrier Belge, ancêtre du PS) et sa commission syndicale ont dû effectuer un virage à gauche. Le jour de Noël 1933, le POB a sorti son Plan du Travail, une alternative à la crise capitaliste. Le Plan prévoyait, entre autres, la nationalisation des secteurs du crédit, des matières premières et de l’énergie, la socialisation de la grande industrie monopolistique et enfin que la production soit soumise au Plan pour orienter l’économie vers le bien-être général plutôt que vers la chasse au profit. Ce n’était pas un plan socialiste, pas même anticapitaliste, mais un plaidoyer pour beaucoup plus de contrôle public. Ce Plan a été abandonné par le POB lorsque De Man et Spaak sont entrés dans le gouvernement Van Zeeland. L’initiative a toutefois indéniablement contribué à la grande grève générale de 1936 grâce à laquelle un million et demi de travailleurs ont imposé l’obtention de 6 jours de congé payés, une augmentation salariale de 8%, un salaire minimum et la semaine des 40 heures dans plusieurs secteurs.

    L’économie belge s’est relativement bien sortie de la seconde guerre mondiale. Directement après la libération, l’industrie tournait à plein régime. Mais cet avantage s’est vite transformé en inconvénient. Les patrons belges ont empoché les dividendes mais ont évité d’investir et de moderniser la production. Cinq ans après la guerre, les mines allemandes et britanniques étaient à nouveau opérationnelles et plus productives. La croissance stagnait, les entreprises capotaient et le chômage augmentait fortement. Sous l’impulsion d’André Renard, une commission FGTB travaillait à un rapport depuis ’51, “Situation économique et perspectives d’avenir”, qui a été adopté en 1954 lors d’un congrès extraordinaire. En ’56, il a été complété, de nouveau lors d’un congrès extraordinaire, par un rapport “Holdings et démocratie économique”. Les holdings financiers tiennent l’économie sous leur domination et empêchent le progrès, concluait-on. Comme dans le Plan du Travail, la FGTB voulait y remédier par une intervention publique poussée via des réformes structurelles. Les mines de charbon, le gaz et l’électricité devaient être nationalisés. Les institutions de crédit publiques comme privées devaient passer sous contrôle public. On plaidait pour une politique d’expansion afin de maintenir la demande à niveau, de sorte que l’augmentation de la production trouve des débouchés et que le plein emploi soit garanti à chaque moment. Mais il ne s’agissait à nouveau pas d’un programme anticapitaliste voire socialiste.

    Le sommet de la FGTB ne l’a d’ailleurs pas pris au sérieux. En 1954 encore, la FGTB et la CSC avaient conclu un pacte avec les patrons afin de garantir la position concurrentielle de l’économie belge, renouvelée en 1959. Mais à la base, le programme de la FGTB était considéré comme un programme de réformes structurelles anticapitalistes. La nécessité d’un tel programme a, chaque fois, été confirmée par deux semaines de grève. Une première dans le bâtiment et, ensuite, une autre dans le métal en 1957. En 1959, la grève des mineurs a suivi et, en janvier 1960, la FGTB a appelé à une grève de 24 heures pour des réformes économiques structurelles et obligatoires. Avec l’opération ‘‘Vérité’’ du PSB, de la FGTB et des mutualités socialistes, cela a contribué à lancer la Grève du Siècle en ‘60 -‘61. Bien que celle-ci n’ait pu empêcher l’imposition de la Loi Unique, elle a retenti pendant longtemps et a modéré pendant deux décennies l’offensive du patronat.

    Il est prématuré de supposer que le programme anticapitaliste d’urgence de la régionale FGTB Charleroi-Sud Hainaut aura un tel impact. Ce n’est, cependant, pas un hasard si les experts mandatés par le Forum Economique Mondial présentent l’inégalité croissante comme la plus grande menace pour le système au cours de la période à venir.

    Ce programme d’urgence est un excellent instrument pour préparer des syndicalistes combatifs à ce tournant.

    Le baromètre socio-économique de la FGTB illustre la pertinence d’un programme anticapitaliste d’urgence

    Chaque année, la FGTB compile les principales données économiques dans un document qui donne une bonne vue d’ensemble et se lit facilement, son ‘‘baromètre socio-économique’’. Il ressort de celui de 2014, aussi selon l’avant-propos de la Secrétaire Générale Anne Demelenne et du Président Rudy De Leeuw, “que les politiques d’austérité menées ont saigné les populations. Il faut maintenant essayer le changement”, concluent-ils. Mais qu’est-ce que cela signifie ?

    Le coût salarial par unité de produit dans l’industrie belge est plus faible qu’en France et en Allemagne. L’Etat belge consacre proportionnellement moins à la sécurité sociale que la France et l’Allemagne. Voici ce qui ressort du baromètre de 2013. Celui de 2014 nous apprend que le risque de pauvreté dans notre pays est plus élevé que dans tous les pays voisins. Il est de 38 % pour les familles monoparentales tout comme pour les chômeurs. De plus en plus de nos compatriotes reportent des soins médicaux pour raisons économiques et le nombre de mauvais payeurs atteint de records. La Belgique est pourtant un pays riche mais tandis que 20% des Belges les plus riches détiennent 61,2% de tout le patrimoine, les 20% plus pauvres n’en détiennent que 0,2%!

    Le changement dont le baromètre FGTB parle ne répond malheureusement pas au diagnostic, comme si on donnait une aspirine à un cancéreux. Dans la traduction de ses remèdes à la presse, le sommet de la FGTB plaide pour “travailler sur” le relèvement du taux de remplacement des pensions légales à 75% du salaire moyen sur la carrière complète, mais elle n’est concrète que pour la suppression des avantages fiscaux pour le 3ème pilier, l’épargne-pension. Cela rapporterait 700 millions. Entre-temps, 2,7 millions de personnes ont déjà été poussées vers l’épargne-pension. Cela concerne donc non seulement 20% des plus riches mais aussi beaucoup de salariés. Une bonne occasion pour la droite d’encore diviser le mouvement ouvrier. Et ce, tandis qu’il y a de nombreuses autres mesures qui rapporteraient beaucoup plus et ne concernent qu’une couche supérieure. Et juste après, nous apprenons que la Commission européenne incite le gouvernement belge à supprimer l’avantage fiscal sur l’épargne-pension ! Nous sommes quand même en droit d’attendre bien mieux de la part de la FGTB.

     Brochure au format PDF

  • Que signifie le socialisme pour Kshama Sawant?

    Sur cette vidéo, sous-titrée en français, notre camarade Kshama Sawant revient sur la signification du terme de socialisme après avoir été élue au conseil de Seattle.

  • Réaction de Kshama Sawant sur le discours de “l’état de l’Union” du président Obama

    Kshama Sawant, membre de Socialist Alternative et élue socialiste à Seattle, a réagi au discours sur “l’état de l’Union” du président Obama. Voici ci-dessous la vidéo de cette réaction qui a également été publiéee sur le site d’Occupy Wall Street en tant que riposte officielle face à la prise de parole présidentielle.

  • États-Unis : une colère politique énorme s’exprime par l’élection de Kshama Sawant

    Rapport du député irlandais Joe Higgins

    Qui aurait imaginé que, dans une grande ville américaine, l’élection d’une conseillère socialiste aurait totalement éclipsé le nouveau maire élu au suffrage direct ainsi que les autres membres du Conseil lors d’une cérémonie d’inauguration en présence d’un millier de personnes ? C’était pourtant la situation qui s’est présentée le 6 janvier dernier à Seattle.

    Joe Higgins, député du Socialist Party (CIO-Irlande)

    La conseillère Kshama Sawant, membre de Socialist Alternative, a vertement dénoncé dans son discours la crise du capitalisme et ses conséquences pour la classe des travailleurs. Elle a appelé les travailleurs à s’organiser, s’est déclarée favorable à la constitution d’un nouveau parti de la classe ouvrière pour faire face aux politiciens Démocrates ou Républicains et s’est proncé pour une changement socialiste de société.

    Kshama Sawant a été élue en novembre dernier, en obtenant le soutien remarquable de 93.000 suffrages et en remportant ainsi la course contre le précédent titulaire du poste de conseiller, un politicien de droite partisan du Parti Démocrate. Seattle, qui comprend une population de 634.000 habitants, n’a que neuf membres du Conseil, qui sont élus dans l’ensemble de la ville, qui ne compte donc pas de petites circonscriptions électorales. Les élections sont organisées sur une base échelonnée, quatre sièges en 2013 et cinq l’année précédente par exemple.

    J’ai eu le privilège d’assister à l’inauguration. C’était un événement extraordinaire en contraste flagrant avec les premières réunions des Conseils nouvellement élus en Irlande. La cérémonie a pris place dans l’immense hall de l’hôtel de ville et comprenait la prestation de serment du maire Ed Murray et de trois autres conseillers réélus après avoir déjà siégé au Conseil. Le public est invité au sens large à assister à l’événement.

    Les fonctionnaires m’ont affirmé que, normalement, cette cérémonie a lieu dans la salle même du Conseil, qui comprend des sièges pour 200 personnes. Cette fois, ce fut différente. Murray est le premier maire ouvertement gay élu à Seattle, ville dont l’establishment se considère comme progressiste en comparaison d’autres zones urbaines américaines. Ce candidat disposait du soutien de l’establishment du Parti Démocrate et a invité un grand nombre de représentants de l’establishment pour l’assister.

    La différence vraiment significative était cependant l’énorme bouleversement politique créé par l’élection de Kshama Sawant. Auparavant, il aurait été considéré comme impensable pour une candidate socialiste de parvenir à vaincre un candidat républicain ou démocrate dans une grande ville aux États-Unis. Mais Socialist Alternative a lancé une campagne massive abordant de front les questions cruciales qui touchent la classe des travailleurs de Seattle, avec notamment la revendication d’un salaire minimum de 15 $ de l’heure pour faire face à la flambée des loyers et des autres nécessités de base.

    La campagne de Kshama a initié une grande excitation parmi les gens ordinaires, parmi tous ceux qui sont malades du système bipartisan pro-capitaliste américain. Des centaines de personnes se sont portées volontaires pour travailler à cette campagne. Un soutien financier massif de 141.000 $ a été soulevé au travers de milliers de contributions de gens ordinaires, sans qu’aucune grande entreprise ne participe bien entendu.

    Lors de la cérémonie d’inauguration, la salle était véritablement comble. La première page du quotidien de l’establishment, le Seattle Times, a parfaitement résumé cet affrontement politique : ”Murray parle d’innovation, Sawant lève le poing et défie.” Dans un article titré “Sawant énerve Ed Murray” , l’hebdomadaire radical The Stranger a décrit la scène. ”La conseillère socialiste Kshama Sawant a attiré les applaudissements les plus nourris et les plus soutenus lorsqu’elle a dénoncé le ”capitalisme international” tout en proclamant du centre de ce bastion de la grande démocratie que ”les travailleurs ont besoin d’un nouveau parti politique qui ne rende des comptes qu’à eux-mêmes. Les partisans de Sawant, en T-shirt et agitant leurs bras n’ont fait qu’acclamer sa prise de parole alors que les sinistres partisans du Parti Démocrate bien habillés regardaient leurs pieds, se demandant quoi faire avec leurs mains. Sawant n’affiche pas cette incertitude, elle a ainsi clôturé son discours en levant un poing en l’air et en déclarant : ”Solidarité”.”

    Des comptes-rendus de cette inauguration sans précédent ont été livrés dans les médias partout à travers les Etats-Unis, et même plus loin. Cela présage de l’accroissement des luttes à venir ainsi que de la possibilité de construire un véritable mouvement pour un changement socialiste au cœur même du capitalisme mondial.

0
    0
    Your Cart
    Your cart is emptyReturn to Shop