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  • USA : Trois candidatures marxistes à Boston, Minneapolis et Seattle

    L’austérité et les coupes budgétaires se multiplient et s’abattent partout aux Etats-Unis. Au niveau local, ce sont les politiciens locaux qui appliquent loyalement l’agenda néolibéral des grandes entreprises et sabrent dans les services publics. Manifester contre ces attaques n’est pas suffisant, il faut également défier ces politiciens capitalistes aux élections dans le cadre de la discussion concernant la représentation politique de la classe ouvrière. Le 6 novembre prochain se dérouleront des élections locales aux USA, et nos camarades de Socialist Alternative déposeront trois candidats.

    Par Joshua Cohen, Socialist Alternative (CIO-USA)

    Des candidats de Socalist Alternative participeront aux élections des conseils communaux de Boston, Minneapolis et Seattle. Chacun d’eux base ouvertement son programme sur le socialisme, la construction des mouvements sociaux et le soutien aux luttes, en totale indépendance des Démocrates et des Républicains. Leurs campagnes aideront à populariser l’idée d’une politique indépendante de la classe ouvrière, basée sur la défense de ses intérêts propres, à développer le soutien en faveur d’une telle politique et à instaurer une pression sur l’establishment capitaliste local.

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    En novembre dernier, notre camarade Kshama Sawant s’était présentée dans le district de Seattle, dans l’Etat de Washington, contre le Président de la Chambre des Représentants de l’Etat de Washington. Elle avait obtenu le score historique de 27%.

    Les directions syndicales, les libéraux de gauche et d’autres estiment que de telles campagnes locales auraient plus d’impact en collaborations avec les Démocrates. Ils pensent donc que se présenter comme étant ouvertement séparés du Parti Démocrate en tant que candidats de Socialist Alternative est inutile.

    Pourquoi dès lors ne pas rechercher le soutien des diverses sections locales du Parti Démocrate ? Il est vrai qu’elles sont relativement démocratiques (et souvent largement progressistes) et que leur soutien pèse beaucoup dans la balance électorale car elles peuvent mobiliser des activistes dans chaque quartier tout en bénéficiant du soutien d’électeurs qui votent régulièrement aux élections locales.

    Mais ces sections locales n’existent qu’afin de fabriquer de futurs carriéristes. Elles fonctionnent sur le modèle du népotisme ; les rejoindre ne relève pas d’un choix politique mais d’un choix de carrière. Elles ouvrent des portes. Ces gens s’opposent avant tout aux candidatures indépendantes car elles menacent leurs connexions personnelles avec les candidats qui, en retour, leur offrent un emploi, un diplôme ou d’autres avantages.

    Un outil pour les grandes entreprises

    A l’échelle nationale, Obama et les Démocrates continuent de travailler en parallèle avec leurs alliés du privé, en s’attaquant à la sécurité sociale, à la santé et à l’éducation publique, en expulsant les immigrés (plus que n’importe quel autre président auparavant), et en cherchant à faire du profit dans les soins de santé.

    Le Parti Démocrate est dominé par les intérêts capitalistes. Des organisations telles que le récemment dissout Democratic Leadership Council existent avant tout pour soutenir des candidats favorables aux grandes entreprises face à ceux qui pourraient nuire aux résultats électoraux du Parti Démocrate et donc l’empêcher de promulguer ses mesures néolibérales.

    En parallèle avec les politiciens nationaux, les gouverneurs et les maires tant républicains que Démocrates appliquent les coupes budgétaires les plus violentes et immédiates. Dans le Massachusetts (où se situe la ville de Boston, NDT), le gouverneur démocrate Deval Patrick s’est ouvertement vanté d’avoir fait accepter des baisses salariales aux syndicats (Boston Globe, 18/12/2009).

    Seattle : Kshama Sawant

    Minneapolis : Ty Moore

    Boston : Seamus Whelan

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    Au niveau local, la majorité des districts sont sous le monopole d’un seul parti. La plupart des grandes villes comme Minneapolis, Seattle et Boston sont complètement dominées par le Parti Démocrate. A Seattle, par exemple, aucun Républicain n’a été élu au conseil municipal depuis 1991 !

    Quand des syndicalistes, des activistes ou des progressistes se présentent comme candidats ou décident de défier le statuquo aux primaires démocrates, ils se heurtent à un réseau de vieux potes qui repousse tout changement et menace les nouveaux candidats : ‘‘Si vous n’acceptez pas nos règles, on ne vous fera pas de quartiers.’’

    Malgré cela, certains militants ouvriers, dont des syndicalistes et des activistes progressistes, parviennent parfois à remporter des élections locales face aux Démocrates. Bien que Socialist Alternative ne soutienne pas les Démocrates, nous cherchons à œuvrer avec tout militant authentique de la classe ouvrière. Nous en appelons donc à ces progressistes au sein du Parti Démocrate : libérez-vous du piège de ce parti qui vous traque sans cesse, et œuvrez avec nous pour construire un nouveau parti indépendant de la machine électorale capitaliste et des pots-de-vin !

    Les candidats de Socialist Alternative se présentent ouvertement en tant que socialistes et marxistes pour donner un écho à la défense des intérêts de la classe ouvrière et instaurer un maximum de pression sur l’establishment pour décrocher des avancées en faveur des travailleurs et de la jeunesse.

    Cela demande que les candidats se démarquent des Démocrates et de leur programme néolibéral. Même dans des villes comme Boston et Seattle, où une longue histoire de monopole politique a mené à des élections non-partisanes, c’est-à-dire où les affiliations aux partis ne sont pas listées sur le bulletin de vote, il est nécessaire de revendiquer clairement notre indépendance face au Parti Démocrate qui contrôle totalement ces villes dans l’intérêt des riches et des puissants.

    Si une campagne vise vraiment à construire des mouvements, elle doit être sérieuse quant à son programme et à ses organisations. A Minneapolis, notre camarade Ty Moore est un militant bien connu d’Occupy Homes, et il utilise cette campagne pour donner plus de visibilité au mouvement Occupy Homes, en luttant ouvertement contre les politiciens responsables des expulsions et des saisies.

    Boston : cas d’école d’un monopole politique

    Pendant 20 ans, le maire de Boston Thomas Menino est resté au pouvoir grâce à une stratégie simple : récompenser ses amis, et attaquer sans répit ses adversaires. En 2009, le progressiste Démocrate Sam Yoon l’a défié. A la suite de sa défaite, il a dû quitter Boston pour trouver du travail. Il était considéré comme ‘‘radioactif’’ par les employeurs locaux, qui craignaient des représailles de Menino s’ils employaient son adversaire (Boston Phoenix, 27/06/2010).

    Boston est contrôlé d’une main de fer par le Parti Démocrate. La machine du parti est divisée en quartiers et en circonscriptions, et contrôle l’argent et les ressources humaines nécessaires pour faire élire n’importe quel politicien en ville. Ce pouvoir n’est pas échu aux branches locales de l’organisation, mais bien à ses dirigeants, et ce depuis les 20 ans au pouvoir de Tom Menino.

    L’Alternative Socialiste

    Le mouvement Occupy a été l’occasion pour de nombreux jeunes de participer à leurs premières actions. Il a révélé la colère que génère l’inégalité de la société américaine et a donné un nouveau souffle au militantisme et à la lutte contre l’injustice. Des sujets tels que la dette étudiante, les saisies de domicile, la destruction de l’environnement, le déclin des écoles publiques, le sous-financement des transports publics, les bas salaires, et d’autres préoccupations de la classe ouvrière ont été exposées et combattues.

    Trois candidats de Socialist Alternative se présentent aux élections municipales en 2013. Ces campagnes sont un outil pour mettre en avant les luttes pour les revendications soulevées lors du mouvement Occupy et pour répandre les idées du socialisme parmi des milliers d’autres personnes.

    Aucun acquis social ne nous a été cédé sans que la classe ouvrière se soit battue. Les week-ends, la semaine de travail de 40 heures (constamment menacée), l’assurance-santé à charge de l’employeur, l’enseignement public, l’abrogation des lois de Jim Crow (sur la ségrégation raciale) sont autant d’héritages des luttes de masse de la jeunesse et des travailleurs. Seule une stratégie impliquant des manifestations massives, des actions de désobéissance civile, des grèves et des occupations peut protéger et améliorer nos conditions de vie au travers de la lutte.

    Présenter des candidats ayant participé à ces luttes est une tactique utile pour construire des mouvements. Utiliser les campagnes électorales et, en cas de succès, nos élus comme des plateformes peut aider à diffuser les idées du mouvement au plus grand nombre, et à le maintenir lors des périodes creuses.

    En Irlande, Joe Higgins a d’abord été élu en tant que socialiste à un poste de représentant local à la suite d’une campagne contre une taxe sur l’eau, quand le gouvernement irlandais tentait d’étouffer la population sous les taxes. Depuis, il a été élu et réélu au Dail (parlement irlandais) en tant que membre du Socialist Party (CIO-Irlande) sur base de son combat ininterrompu lors de cette campagne et de bien d’autres. Sa position et son soutien affirmé aux luttes ont apporté une énorme visibilité aux mouvements.

    Socialist Alternative se bat pour la création d’un nouveau parti basé sur les mouvements sociaux et les travailleurs, et refuse l’argent du privé. Un tel parti devrait être contrôlé démocratiquement par ses membres et accepter l’alliance en son sein de différentes tendances de gauche.

    Tant que les travailleurs et les jeunes s’intéresseront aux élections, les militants devront s’engager activement dans cette arène limitée, sur la base de la lutte pour les intérêts de la classe ouvrière et de tous ceux exploités par le capitalisme. Le Parti Démocrate détient le plus abject record d’attaques sociales, autant aux niveaux local que national, et il devrait être jeté aux ordures pour lutter contre la dictature des marchés.

    En construisant l’opposition de gauche indépendante la plus forte possible pour défier les Démocrates aux élections locales de 2013, nous pouvons aider à tracer le chemin vers la création d’un nouveau parti qui représenterait les intérêts de la classe ouvrière et de tous les ennemis du capitalisme.

    Un tel parti, aux côtés de mouvements de masse dans la rue, représenterait un énorme bond en avant pour vaincre les forces de l’austérité et du capitalisme.

  • Économie : Les classes dominantes emprisonnées dans leur crise

    Récemment, la Banque Centrale Européenne (BCE) a pris la décision de baisser son taux d’intérêt directeur de 0,75% à 0,50%, ce qui signifie une ouverture encore un peu plus grande des vannes financières pour le secteur bancaire dans la zone euro. De quoi relancer l’économie ?

    Par Baptiste (Nivelles)

    Cela faisait plus d’un an que la BCE avait figé son taux à 0,75%. Durant cette période, la BCE s’évertuait à refuser d’abaisser encore plus ses taux, contrairement à la Fed dont les taux directeurs ont été mis entre 0% et 0,25% depuis 2009 (le minimum techniquement possible). La Fed va encore plus loin puisqu’elle recourt à toute une série d’armes ‘‘non-conventionnelles’’ comme l’assouplissement quantitatif (‘‘quantitative easing’’). Cette tactique consiste au rachat par la Fed de titres financiers pourris suite à la crise qui ne valent plus rien en pratique. Ce rachat massif de titres pourris revient donc à faire tourner la planche à billets et à injecter massivement de l’argent dans l’économie. Depuis 2009, la Fed en est déjà à son troisième plan d’assouplissement quantitatif !

    Bye-bye stagflation, vive les armes non-conventionnelles ?

    La raison pour laquelle la BCE refusait d’abaisser plus ses taux et de sortir des ‘‘bazooka financiers’’ était sa crainte de l’inflation. Aujourd’hui, cette crainte est écartée par les économistes de la BCE : l’austérité est telle dans la zone euro que les ménages ne sont pas en capacité de relancer la consommation et les entreprises postposent les investissements face à cette situation. La circulation de monnaie dans ‘‘l’économie réelle’’ restera donc quasi à l’arrêt malgré cette diminution des taux.

    La BCE a donc changé son fusil d’épaule. Déjà en décembre 2012, elle a commencé à goûter au ‘‘non-conventionnel’’ en mettant en place un plan de rachat illimité d’obligations d’Etat pour faire face à la spéculation vis-à-vis des pays dits ‘‘PIGS’’ (Portugal, Irlande, Grèce, Espagne). A présent, ce sont les taux directeurs qui sont donc diminués à 0,50% jusqu’en juillet 2014 au minimum. Sous-entendu : jusqu’à une relance économique, étant donné que les économistes de la BCE prévoient une stagnation de la zone euro d’ici là.

    A quoi tout cet argent va-t-il donc servir ?

    Ce qui est en apparence un virage stratégique est en réalité révélateur d’une impasse économique profonde pour le capitalisme. Cela a été dit : les ménages ne sont pas en capacité de relancer la consommation et les entreprises postposent les investissements face à cette situation. Les dirigeants capitalistes les plus sérieux n’ont jamais eu l’illusion de pouvoir résoudre leur propre crise de surproduction. Au mieux, ils ont été capables de postposer la crise de surproduction, à l’aide des crédits par exemple. Aujourd’hui, au vu de la situation du capitalisme, même cela est trop ambitieux !

    Pourquoi alors ouvrir les vannes financières encore un peu plus, à quoi tout cet argent va-t-il servir ? Dès l’annonce de la BCE, une série d’observateurs ont fait remarquer que ces liquidités allaient renforcer une tendance déjà bien présente : la spéculation et la constitution de montagnes de cash pour les milliardaires gestionnaires de holding financiers et les multinationales. Soit les mêmes politiques qui ont mené au désastre financier déclenché en 2007…

    Austérité d’un côté, dividendes records de l’autre !

    Cela n’allait pas tarder à être illustré… Ironie de l’histoire : de manière quasisynchronisée avec l’annonce de la BCE, une autre nouvelle a fait la une de la presse économique. Il s’agit de la décision d’Apple d’offrir un montant global de 100 milliards $ à ses actionnaires pour fin 2015… Soit un tiers du Produit Intérieur Brut (la totalité des richesses produites en un an dans un pays) de la Belgique. Du jamais vu en terme de dividendes. Un scandale pouvant en cacher un autre, on apprenait également que, sur les quelques 200 milliards $ de liquidités que possède Apple, 148 milliards $ se trouvent dans des paradis fiscaux. Pour graisser la patte à ses actionnaires, on supposait donc qu’Apple allait donc devoir rapatrier une bonne partie de ces liquidités… Faux ! Cela impliquerait le paiement d’un impôt ! Il a donc été décidé par Apple de laisser cette montagne de cash se dorer la couenne dans son paradis fiscal et de réaliser un emprunt pour récolter les liquidités nécessaires, les taux d’intérêt étant de toute façon à zéro…

    La stratégie d’Apple est partagée par toutes les autres multinationales : profiter des taux d’intérêt faibles pour emprunter gratuitement de l’argent, engraisser les actionnaires, garnir les comptes off-shore et attendre une amnistie fiscale pour en rapatrier une partie. La situation a pris une telle ampleur que les économistes de la Fed ont calculé le manque à gagner en cas d’amnistie fiscale : 90 milliards $ !

    ‘‘L’austérité, c’est à cause de la spéculation sur la dette…’’

    Un effet collatéral au rachat d’obligations d’Etat par la BCE et à la baisse de ses taux directeurs, c’est l’accalmie actuelle sur les intérêts que doivent payer les Etats de la zone euro pour financer leur dette. Ainsi, le taux d’intérêt sur les obligations belges à 10 ans est descendu à 1,9%, un niveau plancher historique. Moins d’un an et demi plus tôt, le même taux était à 5,9%, soit le record pour la Belgique depuis l’introduction de l’euro. Ce passage d’un record à l’autre est illustratif de l’hystérie spéculative à l’oeuvre…

    Ces deux dernières années, l’ensemble des gouvernements de la zone euro se sont évertués à nous expliquer que l’application de l’austérité, aussi brutale soit-elle, ne dépendait pas d’eux, qu’ils n’avaient pas le choix, qu’ils y étaient contraints à cause des taux d’intérêt élevés sur la dette. A présent que ces taux ont drastiquement diminué, l’austérité n’est donc plus nécessaire ?

    Que nenni ! Partout en Europe la guerre de classes continue et les gouvernements néolibéraux maintiennent leurs plans d’assainissements. En Belgique, après une réduction budgétaire initiale de 3 milliards € pour 2013 et un premier ajustement de 2,8 milliards € en mars, un nouvel ajustement de 500 millions € est à l’agenda pour le mois de juillet !

    Luttons pour un avenir, luttons pour le socialisme !

    Cette hypocrisie démontre à nouveau de quel côté de la barrière se trouvent le gouvernement et les partis qui le composent : celui des capitalistes. Organisons la résistance contre ce système sans avenir. Luttons pour une société socialiste dans laquelle l’économie est placée sous contrôle démocratique de la population, et où les choix économiques sont dictés par les besoins de tous et non par la soif de profits d’une minorité !

  • Comment vaincre la machine d’austérité européenne ?

    Depuis le début de la crise de la zone euro, les mobilisations de masse n’ont pas manqué contre la politique d’austérité, avec toute une série de manifestations et de grèves mais aussi de grèves générales. Mais même si ces explosions de colère et de rage ne peuvent plus tout simplement être passées sous silence – malgré le contrôle des médias dominants et de l’information par la classe dominante – le bulldozer de la casse sociale n’en a pas moins poursuivi sa course, une course d’ailleurs destinée à devenir plus meurtrière encore avec l’adoption du ‘‘Traité européen d’austérité’’ (le Traité sur la Stabilité, la Coordination et la Gouvernance, TSCG). Quelle contre-attaque organiser et comment (re)mobiliser les découragés de la lutte sociale ?

    Par Nicolas Croes

    A faux diagnostique, faux remède

    La logique austéritaire ne fonctionne tout simplement pas. Tout y est faux, du début à la fin. Cette politique de bain de sang social est basée sur une explication totalement erronée : la crise de la zone euro proviendrait non pas de la faillite du secteur bancaire et de la collectivisation des pertes du privé – elles-mêmes conséquences des contradictions du système capitaliste – mais des dépenses publiques ‘‘impayables’’. Banquiers et spéculateurs ont en fait bénéficié de la complicité active et enthousiaste des politiciens capitalistes et des médias dominants pour se cacher, eux et leurs responsabilités, derrière les fonctionnaires ‘‘fainéants’’, les travailleurs ‘‘privilégiés’’, les chômeurs ‘‘parasites’’ et les pensionnés ‘‘destructeurs de sécurité sociale’’. A cette liste se sont rajoutés – au gré des besoins – les immigrés, les homosexuels, les femmes, les syndicats,… et l’extrême-droite est loin d’être la seule à avoir tenu la plume.

    Il a toujours été clair que cette politique n’allait rien arranger pour les masses, que nous serrer la ceinture n’allait pas nous préparer des jours meilleurs et qu’il nous faudrait au contraire percer de nouveaux trous. La maîtrise relative de la dette publique avant 2008 n’avait d’ailleurs pas empêché les divers pays européens de sombrer profondément dans la crise. S’il en était encore besoin, un bref coup d’œil porté aujourd’hui sur cette Union Européenne dévastée suffit à illustrer la faillite totale de l’austérité.

    En Espagne, après des années de coupes dans les budgets des autorités, d’augmentations de taxes (pour l’homme de la rue, pas pour ceux qui nous regardent du haut de leur tour d’ivoire) et de destruction des conditions de travail et des salaires, l’avenir du pays reste plombé par la récession. Le taux de chômage vient d’y franchir un seuil historique lors du premier trimestre de cette année en atteignant les 27,16%. Derrière ce chiffre, il y a 6.202.700 personnes plongées dans la misère (pas moins de 237.400 de plus qu’au trimestre précédent). Dans cette course macabre, l’Espagne ne cède la place qu’à la Grèce (27,2% de chômage officiel en janvier). Quant à cette fameuse dette publique dont la réduction justifie tous les sacrifices (pour autant qu’ils ne touchent pas l’élite de la société), elle a elle aussi atteint un nouveau record au premier trimestre de 2013 : 923,31 milliards d’euros, soit 87,8% de la totalité des richesses produites en un an dans le pays (le PIB, Produit Intérieur Brut). La Banque centrale prévoit qu’elle poursuivra son ascension vers les 91,4% du PIB en 2013 et les 99,8% en 2016. Et quand ça ne marche pas on fait quoi ? Et bien on continue !

    La saignée est inefficace, allons-y à la hache !

    En Grèce, l’austérité massive n’a pas empêché la dette publique d’atteindre les 159,9% de son PIB fin 2012 (une croissance de 8,6% entre 2010 et 2012). Ce taux aurait d’ailleurs largement dépassé les 190% si le tiers de la dette grecque (100 milliards d’euros) n’avait pas été annulé en mars 2012. Fin 2012 toujours, la dette souveraine de l’Irlande représentait 117,6% de son PIB (+ 25,5% entre 2010 et 2012) et celle du Portugal 123,6% (+ 29,6% entre 2010 et 2012).

    Ces trois pays sont ceux à avoir subi le plus directement la dictature des marchés, par l’intermédiaire de l’action dévastatrice de la troïka européenne (qui réunit la Banque Centrale Européenne, la Commission Européenne et le Fonds Monétaire International). Afin de bénéficier de ‘‘l’assistance’’ du Fonds Européen de Stabilité Financière, puis du Mécanisme Européen de Stabilité, les gouvernements de ces pays se sont engagés à appliquer une politique antisociale extrêmement brutale. Le résultat de cette politique (explosion du chômage, des suicides, des expulsions de logements, de malades incapables de payer leurs soins,…) ne peut que faire froid dans le dos, notamment à la population chypriote dont le pays vient de rejoindre le club des Etats mis en coupe réglée par la troïka européenne. Il est pourtant question de mettre toute la population européenne au même régime à l’aide du TSCG, le ‘‘traité d’austérité’’ européen. Ce texte a été signé le 2 mars 2012 par 25 pays de l’Union Européenne (tous sauf le Royaume-Uni et la République tchèque) et prévoit de ‘‘renforcer le pilier économique de l’Union économique et monétaire en adoptant un ensemble de règles destinées à favoriser la discipline budgétaire au moyen d’un pacte budgétaire, à renforcer la coordination de leurs politiques économiques et à améliorer la gouvernance de la zone euro.’’ En gros, il condamne l’Union Européenne à une austérité permanente.

    TSCG : une dictature des marchés de plus en plus ouverte

    L’article 3 du Traité interdit de dépasser un ‘‘déficit structurel’’ de 0,5% pour le budget d’un gouvernement (doublé dans le cas où la dette publique se situe sous les 60% du PIB). Respecter cette règle signifiera d’opérer des coupes encore plus profondes dans les dépenses publiques à un moment où les investissements de l’Etat dans l’économie sont plus que jamais nécessaires. De plus, cette notion de ‘‘déficit structurel’’ est absolument arbitraire. En 2006, le Fonds Monétaire International avait par exemple estimé le déficit structurel irlandais à 5,4% du PIB, tandis que la Commission Européenne l’avait estimé à 2,2%. Et c’est la Commission Européenne – le quartier général européen de l’offensive antisociale – qui décidera du chiffre à garder, de même que des moyens à mettre en œuvre pour rester dans le cadre de la discipline budgétaire !

    Il ne s’agit là que d’un exemple, tout le reste du texte est du même acabit, uniquement basé sur une vision à court terme de l’économie capitaliste et sur la recherche du profit maximal le plus rapidement possible. L’élite européenne est tellement idéologiquement liée au néolibéralisme qu’elle est incapable de voir l’impact dévastateur qu’aura ce traité, même en considérant les intérêts des capitalistes à plus long terme.

    Ce traité est aussi une attaque anti-démocratique de taille. L’Union Européenne est déjà une institution anti-démocratique, ce n’est même pas une ‘‘démocratie parlementaire’’. Le pouvoir y est concentré dans la Commission Européenne et le Conseil Européen. Fin 2011, 6 mesures ont été adoptées (le ‘‘six-pack’’) pour transférer d’importants pouvoirs de décision des gouvernements élus vers la Commission Européenne non-élue, tandis que la prise de décision a été modifiée au sein du Conseil Européen afin de rendre les sanctions punitives quasiment automatiques en cas de non-respect des dictats néolibéraux.

    Le texte du Traité prévoit de considérer le néolibéralisme comme une obligation et non plus comme un choix économique. L’article 5 prévoit ainsi de placer un pays directement sous administration des autorités européennes. Actuellement, plus de vingt pays sur les 27 que comprend l’Union Européenne sont exposés à cette tutelle !

    Quel type de résistance ?

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    Pourquoi l’austérité ?

    Comme expliqué ci-contre, l’austérité ne vise pas à ‘‘rééquilibrer les budgets des autorités’’. Dans le cadre de la crise de surproduction dans laquelle est plongée la totalité du système capitaliste (et pas uniquement l’Europe), il s’agit pour ‘‘nos’’ élites de restaurer par la manière forte le taux de profits des capitalistes, les détenteurs des moyens de production. A la manière dont Naomi Klein l’avait développé dans son livre ‘‘La stratégie du choc’’ (également disponible gratuitement sous forme film-documentaire sur internet), le choc de la crise a servi de prétexte pour accroitre l’offensive contre les acquis sociaux que le mouvement des travailleurs avait pu obtenir par le passé grâce à sa lutte.

    Il s’agit de l’accentuation de la politique néolibérale de transfert de richesses de la collectivité vers le privé, initiée en leur temps par Pinochet au Chili, Reagan aux Etats-Unis et Thatcher au Royaume-Uni. Cette politique économique était devenue nécessaire suite à la crise économique des années ‘70 et a pris son plein essor suite à l’effondrement du stalinisme au début des années ’90. Depuis lors, les privatisations d’entreprises publiques, les réductions de moyens pour les budgets sociaux et les diminutions de taxes pour les grosses entreprises se sont suivies au pas de charge. Mais cela n’a pas pu empêcher la crise d’éclater.

    Quel programme contre l’austérité ?

    • Non à l’austérité ! Pour la défense des services publics et des pensions ! C’est aux patrons de payer pour leur crise !
    • Pour des syndicats combatifs et démocratiques et des partis larges de travailleurs combatifs !
    • Dans chaque pays : pour un plan d’action combatif, démocratiquement discuté à la base, afin de construire le meilleur rapport de force contre l’offensive antisociale et d’élever la conscience des masses par la discussion et l’action collective !
    • Pour un plan d’action vers une grève générale de 24 heures à l’échelle européenne !
    • Non à la dictature des marchés ! À bas les agences internationales de notation de crédit et le FMI ! Stop au paiement des dettes de l’État aux capitalistes ! Arrachons la richesse des mains des spéculateurs super riches !
    • Nationalisation des secteurs-clés de l’économie (finance, énergie, sidérurgie…) sous le contrôle démocratique et la gestion des travailleurs !
    • Non au chômage de masse ! Pour la réduction du temps de travail sans perte de salaire et avec embauches compensatoires !
    • Pour des programmes massifs de travaux publics afin de créer des emplois socialement utiles et de répondre aux besoins de la population
    • Non à l’Europe des patrons et des marchés ! Pour une Europe socialiste démocratique !

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    Les pétitions, cartes blanches, déclarations,… n’ont pas manqué pour dénoncer ce traité. Les positions défendues dans ces critiques étaient souvent très bonnes, mais les moyens exposés pour vaincre le TSCG n’ont pas été à la hauteur de l’attaque. Le TSCG n’a été soumis au référendum qu’en Irlande, avec une offensive patronale et un chantage extraordinaire qui ont réussi à faire passer le ‘‘oui’’ de justesse. Dans les autres pays, ce sont les parlements nationaux qui étaient responsables de l’acceptation du texte ou de son rejet. En Belgique, cela signifie de passer devant le Parlement flamand et le Sénat (où le traité a déjà été approuvé), à la Chambre du Parlement fédéral, au Parlement wallon, au Parlement bruxellois, au Parlement de la Fédération Wallonie-Bruxelles et au Parlement germanophone. Hélas, l’opposition à l’austérité européenne s’est limitée à un lobbying à destination de parlementaires qui appliquent quotidiennement la casse sociale…

    Ainsi, la centrale des employés de la CSC (CNE), malgré des prises de positions combatives ces derniers temps (notamment concernant la nécessité d’organiser une grève générale contre la politique des autorités belges ou face à la nécessité de construire un nouveau relais politique large pour les travailleurs aux côtés de la FGTB Charleroi & Sud-Hainaut), a appelé ‘‘tous les parlementaires belges à un sursaut de courage pour défendre notre démocratie. Ratifier ce traité serait comme choisir, en pleine mer, la ceinture de plomb plutôt que la bouée.’’ De même, le CEPAG (Centre d’Education Populaire André Genot, une ASBL d’éducation permanente liée à la FGTB et dont l’actuel administrateur général est Thierry Bodson, le président de la FGTB wallonne) a lancé une pétition déclarant notamment : ‘‘Nous devons agir pour que nos représentants élus ouvrent les yeux, refusent d’obéir à l’Europe de l’austérité et rejettent la Traité budgétaire. Mettons la pression sur les parlementaires afin qu’ils ne signent pas un texte en totale contradiction avec les intérêts de la population !’’ Ce lobbying est insuffisant, on ne peut convaincre les politiciens capitalistes d’agir dans nos intérêts que par la force. En ce sens, la manifestation appelée par la FGTB wallonne devant le Parlement Wallon le 29 mai dernier était un premier pas – tardif – dans la bonne direction, qui ne doit pas rester un acte isolé, doit être amplifié et être considéré dans le cadre de la lutte plus large contre l’austérité et les licenciements. Qu’attendre encore pour un vrai plan d’action avec grève(s) générale(s) ?

    Pas mal de gens se demandent comment combattre cette Union Européenne antisociale qui parait être si lointaine. De nombreux politiciens traditionnels se servent d’ailleurs de ce sentiment d’impuissance pour justifier leurs attaques, sur le mode ‘‘c’est pas nous, c’est l’Europe’’. Cette question est loin d’être neuve. Karl Marx répondait déjà à son époque que ‘‘la lutte de classes est internationale dans son contenu mais nationale dans sa forme’’. Il n’en va pas différemment aujourd’hui. La majeure partie des problèmes auxquels sont confrontés les travailleurs oppose directement ces derniers à la classe dominante de leur pays. Hélas, partout en Europe, nous sommes forcés de constater que les sommets syndicaux manquent d’audace et évitent soigneusement toute stratégie d’affrontement direct avec l’Etat capitaliste et les diverses bourgeoisies nationales.

    L’exemple de la Grèce est à ce titre des plus édifiants. Ces dernières années, les grèves générales se sont succédées comme nulle part ailleurs en Europe, mais décidées et stoppées d’en haut, sans aucun plan d’action, bien plus destinées à laisser échapper la pression de la base qu’à sérieusement bloquer l’économie pour aller chercher les moyens là où ils se trouvent : dans les caisses des grandes entreprises et des banques. Dans chaque pays, le mouvement des travailleurs doit lutter pour récupérer ses instruments de lutte de masse, ce qui signifie de lutter résolument pour une démocratie syndicale (entre autres parce qu’une lutte déclenchée par la base est plus difficile à stopper par le sommet syndical), pour la fin du syndicalisme de négociation et de concertation et pour le retour d’un syndicalisme de lutte.

    Pour nous, cette timidité dans la contre-offensive provient directement de l’absence d’idée concernant l’alternative à défendre contre la société capitaliste. ‘‘Nos’’ dirigeants syndicaux ont été tellement impliqués dans le ‘‘moindre mal’’ et dans la concertation avec les institutions capitalistes qu’ils refusent de sérieusement considérer qu’une voie de sortie existe en dehors du capitalisme. Revenir à un syndicalisme de lutte signifie donc aussi de s’armer d’un programme anticrise anticapitaliste basé sur la collectivisation des moyens de production et leur contrôle et gestion démocratiques. C’est la seule manière d’obtenir un plan de relance basé sur les nécessités sociales et écologiques et non pas sur la recherche de profit. Réclamer tout simplement une ‘‘fiscalité plus juste’’ est largement insuffisant, en plus de nier la possibilité de l’évasion de capitaux qu’il faut résolument saisir et donc exproprier. Cela nécessite aussi de disposer d’un prolongement politique large pour porter les exigences des travailleurs sur l’arène politique tout en étant un parti de lutte, qui ne se cantonne pas à l’activité électorale. Les PS, Partis Travaillistes, Pasok et autres sont totalement passés dans l’autre camp depuis belle lurette.

    Pour une grève générale européenne

    De même que la lutte internationale ne doit pas servir de prétexte à laisser sa propre classe dirigeante nationale tranquille, une coordination des luttes par-delà les frontières – et particulièrement au niveau européen – est absolument cruciale. A ce niveau aussi, la faiblesse de la direction du mouvement des travailleurs est criante : la Confédération Européenne des Syndicats (CES) reçoit ainsi une partie de ses subsides de la Commission Européenne, et a toujours considéré son action dans le cadre de la construction loyale d’une Union Européenne capitaliste ‘‘sociale’’. On en voit le résultat.

    Le mot d’ordre d’une grève générale européenne est aujourd’hui d’une extrême importance, et la journée d’action européenne du 14 novembre dernier en a illustré le potentiel. Cette action coordonnée de plus grande ampleur que par le passé était un reflet de la pression grandissante de la base syndicale sur les divers syndicats européens et sur la CES elle-même. En Espagne et au Portugal, des grèves générales de 24 heures ont eu lieu (ce fut la plus massive et militante depuis 1974 au Portugal tandis qu’un million de personnes avaient manifesté à Barcelone et à Madrid). Des actions de grève avaient aussi eu lieu en Italie, en Grèce, à Malte, à Chypre et en Belgique. Comme nous le disions à l’époque : ‘‘Le génie des actions de grèves internationales est sorti de sa lampe.’’

    La combativité nécessaire à la victoire est bel et bien présente. Mais toute cette énergie ne peut être que dilapidée si elle n’est pas canalisée au travers d’un plan d’action combatif, avec un échéancier clair capable de peu à peu (re)mobiliser tous ceux qui veulent se battre mais se rendent bien compte que nombre de responsables syndicaux ne sont eux-mêmes pas convaincus qu’il est possible d’inverser la tendance antisociale actuelle. Laisser cette situation perdurer équivaut à ouvrir grand la voie à la droite la plus réactionnaire et à l’extrême-droite. Avec les conséquences que cela implique.

  • Pour un véritable choix : Pour le droit à l’avortement et le droit d’avoir des enfants sans sombrer dans la pauvreté !

    Le dimanche 24 mars dernier s’est déroulé la ‘‘Marche pour la Vie’’, et il a été question un moment d’une ‘‘Marche européenne pour la Vie et la Famille’’ en avril. A côté de ces manifestations, les activistes du ‘‘Sinterklaasgroep’’ (Groupe Saint Nicolas) tiennent des piquets hebdomadaires devant le centre d’avortement de Gand. Les femmes qui s’y rendent sont culpabilisées et intimidées de manière scandaleuse. Cette poignée de fanatiques a, depuis leur première action, grandi jusqu’à rassembler maintenant une vingtaine de personnes, et le planning familial de Gand n’est plus le seul centre visité régulièrement par ce groupe dont la revendication est l’abolition du droit l’avortement.

    Par Anja Deschoemacker

    Il est grand temps de construire un contre-mouvement. Laisser passer la ‘‘Marche pour la Vie’’ sans contre-action signifie accepter que ces groupes réactionnaires occupent les médias sans aucune riposte. Au sein des plannings familiaux, il faut mener des campagnes qui pourront en finir avec leur présence. Mettre sous pression morale et émotionnelle des femmes à un tel moment n’est, en aucun cas, à considérer dans le cadre du droit à la libre expression : il s’agit clairement ici de harcèlements et de tentatives d’intimidation.

    Construire un mouvement de défense du droit des femmes à disposer de leurs corps nécessite de répondre également à l’instrumentalisation populiste des problèmes sociaux par le mouvement ‘‘pro-vie’’. Le constat que la voie libérale n’a pas conduit à l’égalité sociale mène à la recherche d’autres solutions. Les mouvements de type ‘‘pro-vie’’ offrent un retour au passé. En tant que militants marxistes, nous devons montrer le chemin vers un futur débarrassé des discriminations, de l’oppression, de l’exploitation,… un avenir où aucun citoyen de second rang n’existerait.

    Le démantèlement graduel de l’Etat-providence conduit à la pauvreté plus fortement encore pour les femmes

    La féminisation de la pauvreté est régulièrement illustrée par diverses études. Ainsi, une enquête, de mars 2010, réalisée conjointement par la plate-forme de défense des droits des femmes Comeva et par la Fondation Roi Baudouin, a mis en lumière que 22% des femmes éprouvent des difficultés financières (7% affirment ne pas s’en sortir et 15% éprouvent des difficultés). 40% d’entre-elles affirment pouvoir s’en sortir, mais sans se permettre d’extra. Seules 30% déclarent vivre ‘‘confortablement’’.

    Les bas salaires auxquels les femmes sont confrontées, liés au coût croissant de la vie (logement, énergie,…), assurent que les femmes célibataires risquent bien plus de sombrer dans la pauvreté que les femmes dont le revenu familial comprend un salaire masculin (généralement plus élevé). 60% des femmes qui ne s’en sortent pas, ou difficilement, sont célibataires (contre 25% des femmes qui s’en sortent) et 38% vivent seules avec leurs enfants (contre 11% pour celles qui s’en sortent).

    36% des parents isolés, dont 80% sont des femmes, courent le risque de devenir pauvre. Travail et diplôme n’offrent pas de garantie pour échapper aux difficultés financières : 38% des femmes qui s’en sortent difficilement ont un diplôme supérieur et 30% travaillent à temps plein. La moitié des femmes déclarent être financièrement dépendantes de leur mari/copain et 11% affirment même rester avec lui faute de ne pouvoir financièrement s’en sortir si elle le quittait (14% des femmes en pauvreté, 7% de celles qui s’en sortent).

    Cette étude montre qu’un gagne-pain masculin fait encore et toujours partie de la meilleure stratégie pour échapper à la pauvreté. Un constat pénible dans une société qui a longtemps affirmé que l’égalité entre homme et femme était à portée de main, pour ne pas dire complètement atteinte.

    La crise et l’austérité menacent le reste des acquis d’après-guerre

    L’austérité du gouvernement Di Rupo s’est déjà chiffrée à 18 milliards d’euros, et cela n’est pas près de finir. Il est à craindre que tout un tas d’attaques structurelles soient prévues après les élections de 2014. Après cela, pour la première fois depuis longtemps, il y aura quatre années sans élections.

    Les pertes d’emplois les plus spectaculaires ont beau se produire dans les secteurs industriels, essentiellement masculins, les femmes sont très durement touchées par la crise. Elles ont été frappées par des décennies de sous-financement des soins sous toutes leurs formes : enfants, malades, personnes âgées, personnes handicapées,… ont, de plus en plus, besoin d’être pris en charge par la famille, faute de places suffisantes dans les diverses institutions. Comme les femmes gagnent généralement moins que les hommes, si quelqu’un doit moins travailler voire quitter son emploi pour prendre le relais des structures déficientes, la plupart du temps, il s’agit de la femme.

    La poursuite de la destruction de nos services publics oblige de plus en plus de femmes à travailler à temps partiel et, donc, à perdre leur indépendance financière. Maintenant déjà, nombreuses sont celles qui doivent quitter, temporairement au moins, le marché de l’emploi à cause du manque de places abordables dans les crèches. La pénurie de places dans l’enseignement (ce qui implique qu’un nombre important d’enfants se rendent dans une école qui n’est pas dans leur voisinage) assure également que beaucoup de femmes éprouvent des difficultés à trouver un emploi à temps plein et à le conserver.

    Les femmes sont aussi plus durement touchées par une série de mesures générales telles que le démantèlement de la pension légale ou la dégressivité des allocations de chômage. Selon Femma (Vie Féminine en Flandre, communiqué de presse du 31/10/2012), les chômeuses isolées vont être durement touchées par la dégressivité : ‘‘Elles finiront bientôt à 1090 euros/mois. Loin en-dessous du seuil de pauvreté européen.’’ Les femmes sont aussi surreprésentées dans la catégorie des ‘‘cohabitants’’, qui finissent au plus bas à 485 euros/mois. Cette mesure instaure aussi une nouvelle pression à la baisse sur les pensions alors que 60% des femmes ont déjà une pension en dessous des 1000 euros/mois (contre 30% des hommes).

    “Les hommes doivent travailler moins d’heures, les femmes plus” (Monica De Coninck)

    Si la double tâche (travail et tâches ménagères) empêche les femmes de devenir socialement égales aux hommes, faudrait-il alors que les hommes s’impliquent plus dans le ménage ? Cela fait partie de la rhétorique des féministes bourgeoises. Il est vrai que la division traditionnelle des tâches ménagères limite la progression des femmes sur le marché de l’emploi. Mais se contenter de dire qu’il ne s’agit que du ‘‘choix’’ de la facilité par les hommes est une erreur. Et si la solution réside uniquement dans une meilleure répartition : que faire des mères célibataires ?

    Si l’homme âgé de 25 à 40 ans est le roi du marché de l’emploi, cela n’est pas suite à une décision des ‘‘hommes’’. En effet, les patrons les embauchent d’une part, parce qu’ils ne peuvent pas tomber enceints et d’autre part, parce que les patrons partent de l’idée que ces hommes ne vont pas être distraits de leur travail si leurs enfants tombent malades.

    Les patrons embauchent des hommes parce qu’ils peuvent faire des heures supplémentaires, ce qui est d’ailleurs encouragé par le gouvernement (notamment par la Ministre de l’Emploi Monica De Coninck, SP.a) avec les baisses de charges sur les heures supplémentaires. Nous nous dirigeons graduellement vers l’annualisation du temps de travail. Cela signifie de dépasser le temps plein par moment, situation évidemment impossible à combiner avec la semaine de 32 heures de l’enseignement. Si nous voulons que les hommes s’impliquent plus dans le ménage et l’éducation des enfants, il leur faut travailler moins d’heures et non plus.

    Si nous voulons que les femmes travaillent à temps plein, seule chance pour les femmes d’obtenir une réelle indépendance, le nombre d’heures pour un emploi à temps plein doit diminuer. Une diminution du temps de travail vers 32 heures par semaine sans perte de salaires avec des embauches compensatoires, ne serait pas seulement un pas important dans la résolution du chômage, mais permettrait aussi aux parents – hommes et femmes – de trouver un meilleur équilibre et une meilleure division d’une partie des tâches ménagères et des soins.

    Il faut surtout socialiser une partie des tâches domestiques. De bons repas frais et de qualité sur les lieux de travail et à l’école libéreraient les familles – et surtout les femmes – de nombreuses heures de travail non-payées (courses, cuisine, vaisselle,…). Des lavoirs et des ateliers de repassage publics, avec un personnel au statut de fonctionnaire, créeraient de nombreux emplois tout en libérant du temps dans chaque foyer. Les emplois actuellement compris dans le système des titres-services devraient tomber dans ce statut public afin que tout le monde puisse en disposer et afin que le personnel, en grande majorité des femmes, reçoive de bonnes conditions de travail et de salaire.

    Pour beaucoup de femmes, le temps partiel est une nécessité suite à la flexibilité du marché de l’emploi et de l’absence de services publics pour les tâches domestiques. Avec cette réalité, les paroles de De Coninck signifient de faire porter la responsabilité des bas salaires et des pensions sur les ‘‘choix’’ individuels des femmes et des hommes. Pourquoi? Parce qu’une telle ‘‘solution’’, en plus de ne rien coûter à l’État, rend les hommes responsables des bas salaires des femmes. Bref, la stratégie classique du diviser pour mieux régner.

    Le mouvement “pro-vie” présente le passé comme la solution aux problèmes actuels

    Que le mouvement ‘‘pro-vie’’ ne montre vraiment sa tête en Belgique qu’aujourd’hui n’est pas du tout étonnant au vu de l’insécurité sociale actuelle touchant une large couche de la population. Nous avons déjà vu que l’attrait de la famille traditionnelle est soutenu par le fait que les femmes s’en sortent généralement mieux avec un partenaire masculin. Nous avons également vu que la dégradation du marché de l’emploi amène de plus en plus de femmes (et surtout des mères) à ne plus gagner de revenus à part entière. Monica De Coninck affirme qu’il faut que plus de femmes travaillent à temps plein, mais elle refuse de créer les conditions matérielles pour y parvenir. De leur côté, les ‘‘pro-vies’’ disent qu’il faut en revenir à cette veille famille traditionnelle où la maman a du temps pour s’occuper des gosses. Ceux-ci passent, évidemment, sous silence que les femmes seront alors totalement dépendantes de leur mari et auront un horizon limité à leur famille.

    Beaucoup de jeunes femmes parviennent à la conclusion qu’au vu des bas salaires des femmes et des frais élevés de l’éducation d’un enfant, le jeu n’en vaut vraiment pas la chandelle. Elles revendiquent le droit de rester à la maison plus longtemps avec leurs enfants et de pouvoir travailler à temps partiel au moins provisoirement pour ne pas avoir une vie extrêmement épuisante pour un revenu ridicule. Nous partageons ces revendications, qui ne devraient d’ailleurs poser aucun problème au vu de la productivité d’aujourd’hui. Ces revendications reflètent le fait que ‘‘la famille’’ est également un ‘‘lieu de travail’’, même s’il n’est pas rémunéré. Les ‘‘pro-vies’’ instrumentalisent cette situation et revendiquent un salaire de femme au foyer.

    Notre alternative est fondamentalement différente : plus de flexibilité en faveur des parents qui travaillent, la reconnaissance de six mois minimum de congé parental obligé et le paiement du salaire complet (pour les mères et les pères), le droit de travailler au moins temporairement à temps partiel sans subir une grande perte de salaire au moment où les tâches familiale exigent plus de temps (enfants malades, soins aux personnes âgées,…), etc. Ces mesures faciliteraient grandement la vie de nombreuses femmes et permettraient aux hommes de s’impliquer plus fortement dans les tâches ménagères et des soins sans que cela implique une forte perte de revenus.

    L’élargissement de ce genre de possibilités dans le cadre de la sécurité sociale (il faudrait donc augmenter – et fortement! – les contributions patronales) protégerait beaucoup de femmes de la perspective de devenir femme au foyer permanente, avec tous les désavantages que cela comporte (dépendance et isolement, possibilités limitées de développement de soi, répétition infinie des même tâches simples,…).

    Dans la société capitaliste, ces solutions sont censées être ‘‘impossible à payer’’. Non pas que cela soit effectivement impossible à payer, mais bien parce que cela nécessite d’aller chercher l’argent là où il est : parmi l’élite de riches. Sur ce point au moins, la Ministre de l’Emploi rejoint le mouvement ‘‘pro-vie’’: leurs ‘‘solutions’’ ne touchent pas à cette élite.

    Pro-avortement ou pro-choix ?

    Nous ne pouvons pas laisser le moindre doute : le droit à l’avortement est un droit fondamental qui doit être défendu bec et ongles. Personne ne peut décider à la place de la femme de garder un enfant ou pas. Dans ce sens, la loi belge est toujours limitée : la période durant laquelle l’avortement est légalement possible est restreinte, sauf en cas de danger pour la mère ou l’enfant. Ceux qui en ont les moyens peuvent encore se rendre à l’étranger, les autres n’ont qu’à se débrouiller. Dans une société où les salaires des femmes baissent au fur et à mesure que les femmes ont plus d’enfants, où les mères isolées courent un énorme risque de pauvreté, où la violence conjugale est largement répandue,… le contrôle de ses propres capacités reproductrices est très important et nécessaire.

    Penser que l’abolition du droit à l’avortement conduit à une baisse de l’avortement est d’ailleurs une dangereuse illusion. L’interdiction légale ne conduit qu’à une augmentation des pratiques dangereuses, pouvant conduire à l’infertilité ou à la mort. Une étude de l’Organisation Mondiale de la Santé a démontré qu’en 2008, 49% des avortements à travers le monde étaient des avortements à risque où 1 femme sur 8 a perdu la vie.

    L’an dernier, la mort de la jeune Savita Halappanavar en Irlande nous a montré l’importance de rendre légal l’avortement. Sa vie était en danger suite à des complications lors de sa grossesse, son fœtus n’était plus viable. Un avortement aurait pu lui sauver la vie, mais cela est toujours illégal en Irlande. L’idéologie soi-disant ‘‘pro-vie’’ a du sang sur les mains ! La défense du droit à l’avortement doit être menée sur différents terrains. Dans beaucoup de pays et de régions, ce droit est mis sous pression à l’initiative des conservateurs. Mais des politiciens soi-disant ‘‘progressistes’’ mettent également ce droit en danger avec des coupes budgétaires dans les moyens des soins de santé, en limitant le financement de l’aide aux personnes, en rendant l’opération plus chère,…

    Mais la seule défense du droit à l’avortement n’offre pas de réponse au discours utilisé par les “pro-vies” dans le but de séduire des couches plus larges. Ce mouvement dénonce que la société ne soutient pas assez les familles nombreuses et impose ainsi aux femmes pauvres de pratiquer l’avortement. Ses membres affirment encore que du fait de l’absence de moyens mis en place pour les personnes handicapées, les femmes enceintes d’un enfant handicapé sont du coup mises sous pression pour avorter.

    Ce discours peut être considéré comme un peu plus social, mais leurs ‘‘solutions’’ sont loin de l’être. Leur alternative à l’avortement est de donner l’enfant en adoption, y compris pour des cas de viol ou de mère mineure. Et quelle est leur solution pour le manque de services de soins de santé ? La femme au foyer ! Et la contraception libre et gratuite ? Non, abstinence !

    Nous défendons le droit à un véritable choix, ce qui comprend le droit à l’avortement, mais ne s’arrête pas à ça. Il ne devrait pas y avoir de femmes qui, désireuses d’avoir des enfants, soient forcées à avorter pour des raisons financières ou parce que leur double tâche dépasse déjà leur force.

    Pour cela, il faut construire une société où avoir des enfants ne conduit pas à l’appauvrissement ou à la double tâche pour les femmes, une société où les allocations familiales couvrent les coûts réels d’un enfant, où chaque enfant a une place dans des structures accessibles et de qualité, où il existe des services de qualité qui allègent les tâches domestiques et qui offrent des soins à ceux qui en ont besoin,… et où personne n’est pas menacé de pauvreté à cause de bas salaires et de basses allocations.

    Avec la société actuelle régie par le capitalisme, les progrès des femmes sur tous ces terrains reculent depuis déjà un bon bout de temps, non pas faute de moyens, mais parce que ces moyens sont de plus en plus accaparés par une infime élite toujours plus riche.

    Cette élite maintient un système à son avantage, qui crée la pauvreté et qui refuse à toujours plus de monde de pouvoir décider réellement de l’orientation de sa vie. Ce système crée systématiquement de nouvelles crises et en fait payer la facture à la majorité de la population. Leur contrôle sur les richesses assure que celles-ci ne soient disponibles que pour ceux qui engrangent du profit, et tant pis pour le reste.

    La lutte pour une véritable liberté de choix ne peut parvenir à sa conclusion logique qu’avec la victoire de la lutte pour le socialisme démocratique, un système où la production sera démocratiquement planifiée pour satisfaire les besoins de la majorité de la population.

  • Property tax : Une attaque de plus envers les travailleurs irlandais

    Partout dans les médias traditionnels internationaux, la convalescence de l’économie irlandaise est mise en exergue. L’Irlande, après un ‘passage à vide’ (de 5 ans, faut-il le préciser ?!) se porterait mieux. Le 13 mars encore, Le Monde titrait son article ‘L’Irlande réussit son retour sur les marchés’ expliquant que le pays était un véritable modèle de redressement économique pour ses voisins européens. En se référant à la presse, on en viendrait presque à lancer un ‘fair play’ à Enda Kenny, Premier ministre d’un gouvernement formé de Fine Gael (centre-droite) et du parti travailliste.

    Par Stéphanie (Bruxelles)

    Pourtant, dans les faits, on observe que, face à ces fractions de croissance, les salaires, les conditions de travail et le niveau de vie sont en baisse constante. Selon une analyse du Credit Union irlandais, près 1,4 millions d’Irlandais seraient en train de survivre avec moins de 50 euros après le payement de leurs factures. Pire encore, 600.000 d’entre eux n’auraient plus rien après avoir payé leurs factures mensuelles. Et c’est en tenant compte de ces faits que le budget de décembre 2012 a pris place, projetant ainsi de soutirer 1000 euros de plus par famille et ce à l’aide d’attaques régressives comme les coupes dans les allocations familiale ou la récente taxe sur la propriété.

    C’est dans ce contexte qu’a pris place la manifestation de samedi dernier. Rassemblant près de 10.000 personnes à Dublin, cette marche contre l’austérité et la taxe sur la propriété coïncidait avec une réunion des ministres européens des finances pour discuter des futurs plans d’austérité à imposer à travers l’UE.

    Contrairement à la manifestation précédente appelée par le Congrès irlandais des syndicats (ICTU) en février, on a pu ressentir toute la colère et la combativité des Irlandais. En effet, deux mois plus tôt, on avait pu observer un manque flagrant d’alternatives proposées par l’ICTU qui n’avait donné aux gens aucune perspective d’action future après la protestation.

    La manifestation de samedi était différente dans le sens où elle était appelée par la campagne contre les taxes sur la maison et l’eau (CAHWT) combattant l’austérité depuis 2 ans et dans laquelle nos camarades du Socialist Party (SP, parti-frère du PSL en Irlande) jouent un rôle prépondérant. C’est d’ailleurs cette campagne qui a permis le boycott massif de la taxe sur les ménages de la part de 50% de petits propriétaires.

    A travers toute la manifestation, on a pu observer à quel point le gouvernement et en particulier le parti travailliste n’inspirait que le dégoût parmi la population. Slogans, pancartes, bannières, déguisements et cartes rouges ont démontré au Labour que les récents sondages où on voit le parti dégringoler à 7% nationalement étaient plus qu’avérés. (1)

    Ce sont nos camarades du SP qui ont principalement mis en avant le fait que la campagne devait mettre l’accent sur la pression nécessaire à imposer au Labour. Le SP a également mobilisé les gens à manifester de manière massive en organisant à travers tout le pays différents meetings, campagnes d’affichage (posters et autocollants) et ‘road-show’ (mégaphone sur le toit d’une voiture).

    Si jusqu’ici, le gouvernement s’est permis d’imposer les politiques d’austérité vicieuses concoctées par la Troïka, on a observé samedi que les Irlandais n’étaient plus d’humeur à jouer aux sages petits moutons. Et les directions syndicales n’ont qu’à bien se tenir.

    En effet, l’absence de ces dernières, sur le champ de bataille n’a fait qu’alimenter la colère des travailleurs.

    Autant dire que la campagne détient là une excellente opportunité pour mettre la pression sur le parti travailliste. Nos camarades appellent non seulement les gens à ne pas payer la taxe (29% des petits propriétaires disent qu’ils ne payeront pas la taxe) mais également à mettre une pression telle sur le parti travailliste qu’il se voit obliger de revoir ce véritable vol qui implique une déduction directe à la source (sur le salaire ou les allocations) en cas de non-paiement. Dans certains endroits, la campagne a ainsi pris une telle ampleur que ses militants font du porte-à-porte demandant ainsi aux gens de signer une pétition affirmant qu’ils ne voteront plus pour Labour.

    Le Socialist Party indique aussi qu’il est nécessaire que la campagne prenne les devants en présentant de futurs candidats anti-austérité lors des prochaines élections locales en juillet 2014.

    Les Irlandais sont clairement prêts à riposter contre l’austérité. ça a encore été prouvé ces deux derniers jours par les votes ‘anti-Croke Park II’ par les militants syndicaux. Une grande partie des différentes délégations syndicales irlandaises est entrain de voter ‘Non’ à 300 millions d’€ de coupes budgétaires dans le secteur public (principalement éducation et soin de santé) qui étaient censés ‘relancer l’économie’ et une fois de plus faire payer aux travailleurs irlandais la crise capitaliste. Mais ces derniers n’en peuvent plus et ont besoin de pallier au manque d’alternatives auquel ils font face.

    C’est face à cela que la campagne contre les taxes sur la maison et l’eau doit aller plus loin et s’imposer en réelle force politique représentant les travailleurs et leur famille et mettant ainsi en avant la nécessité d’une société égalitaire, une société socialiste.


    (1) Chiffres officiels, Sunday independant, qui n’équivaudrait plus qu’à 4% si on retire les gens votant pour le Labour sans aucune confiance. Dans certains endroits du pays où le parti obtenait 21% des votes, les sondages indiquent carrément une chute à 4,5% !


  • Résistance internationale contre l'Europe des banques et des multinationales !

    Pour une riposte anticapitaliste et socialiste contre l’austérité !

    La population chypriote est la plus récente victime de la crise brutale du projet capitaliste européen. La crise de l’Union Européenne est loin d’être terminée, contrairement à ce que certains avaient prétendu. Toute la zone euro est en récession économique. Pas moins de 120 millions d’Européens sont menacés de pauvreté. Un million de personnes sont venues rejoindre les rangs des chômeurs au cours de l’an dernier uniquement, portant le chiffre officiel à plus de 26 millions de travailleurs sans-emploi. Mais il y en a encore des millions d’autres dans les faits. Tout indique qu’un nouveau dramatique épisode de la crise est en cours.

    Par Bart Vandersteene

    Ce n’est nullement un hasard si les pays d’Europe du Sud sont les plus fortes victimes de cette crise. Le projet néolibéral européen a accru la concurrence entre les divers États-membres. Afin d’attirer les investissements, les pays d’Europe du Sud ont réduit l’impôt sur les sociétés et créé des paradis fiscaux. Les banques chypriotes étaient de véritables casinos, notamment pour les milliardaires russes. Le secteur bancaire chypriote a récemment été estimé représenter une valeur annuelle égale à huit fois le produit intérieur brut du pays, soit huit fois la totalité des richesses produites en un an ! La faillite d’une de ces banques peut infecter l’ensemble du secteur financier de l’Union Européenne.

    La logique de la politique dominante est un refrain désormais bien connu : c’est aux travailleurs chypriotes de saigner alors qu’ils ne sont pas responsables de la crise, à eux de supporter les pertes du casino de la spéculation. Mais sous la pression formidable du mécontentement et de l’opposition populaires, la mesure qui prévoyait de s’en prendre aux livrets d’épargne a été balayée. Les solutions de rechange du gouvernement chypriote reviennent toutefois aux mêmes conséquences à grands coups de privatisations, de vente des réserves de gaz, des taxes supplémentaires,…

    La situation sociale est très tendue dans tout le sud du continent. L’establishment politique a vu son autorité compromise par l’application de la politique d’austérité. Le 2 mars, 1,5 million de Portugais ont manifesté. En Italie, les partis établis ont reçu une claque monumentale de la part du comédien Beppe Grillo, qui a reçu un quart des voix à partir de rien. Ce n’est qu’une question de temps avant que de nouveaux dominos économiques ou politiques ne tombent dans la région.

    Les travailleurs et leurs familles à Chypre, en Grèce, au Portugal, en Espagne, en Irlande, en Italie,… n’ont qu’une seule option pour protéger leur niveau de vie des attaques vicieuses des autorités européennes et nationales: la lutte pour la nationalisation du secteur financier sous contrôle et gestion publics démocratiques. Tous les fonds spéculatifs et les profits monumentaux du passé doivent revenir à la collectivité. Aujourd’hui, ce sont les dettes de jeu des requins de la finance qui reviennent à la population, mais ce ne sont pas nos dettes. Le non-paiement des dettes publiques et la mise sous statut public du secteur financier et des autres secteurs-clés de l’économie peuvent poser les bases d’un programme d’investissements publics pour répondre aux besoins sociaux actuellement en souffrance tout en créant une masse d’emplois socialement utiles.

    Chaque dégradation du niveau de vie au sud de l’Europe sera utilisée comme argument pour s’en prendre à notre épargne, à nos salaires et à nos acquis sociaux. De la même manière, chaque victoire de nos camarades du sud renforcera la lutte chez nous. Nous sommes solidaires des luttes de la classe des travailleurs, de la jeunesse, des chômeurs et des pensionnés qui, dans toute l’Europe, s’opposent à l’offensive antisociale qui assombrit notre avenir !

  • Plus de 220 personnes présentes à SOCIALISME 2013

    Ces 13 et 14 avril, le souffle de la résistance internationale contre la crise du capital s’est fait sentir à Bruxelles, à l’occasion de la 13e édition du week-end "Socialisme" organisé par le PSL. Le succès fut au rendez-vous pour cet important événement de formation politique qui faisait suite à des semaines intenses de mobilisations (manifestation antifasciste, pour les droits des femmes, contre l’austérité, pour la régularisation des sans-papiers, contre la répression policière,…)

    Par Loïc (Liège)

    Parmi les plus de 220 participants se trouvaient quelques camarades venus de l’extérieur de la Belgique (Irlande, Allemagne, France, Grèce, Portugal, Grande-Bretagne, Luxembourg) que nous remercions d’ailleurs chaleureusement pour avoir accentué l’échange d’expériences politiques internationales au cours du week-end. L’enthousiasme et la combativité ont marqué ces deux journées, il nous reste maintenant à transférer dans la pratique les leçons de toutes ces discussions (3 meetings centraux et 19 commissions!)… En avant pour la lutte, la solidarité et le socialisme !

  • Socialisme 2013 et la lutte des femmes…

    Ces dernières années, le débat sur les droits des femmes est revenu au devant de l’actualité, y compris dans les médias de masse. Il y a eu l’affaire DSK, suivie par toute une série de dénonciations de comportements sexistes, de harcèlement et d’abus commis par de ‘‘grands’’ personnages, dans presque tous les pays européens. En Irlande, la mort de Savité Halappanavar, l’année dernière, et la lutte pour le droit à l’avortement qui a suivi ont donné une nouvelle impulsion au débat concernant le droit des femmes de décider de leurs corps. En Inde, une lutte de masse a explosé contre les viols extrêmement brutaux qui sont régulièrement commis, jusqu’ici dans la plus grande impunité.

    En Belgique, le gouvernement a réagi face à la prise de conscience croissante concernant le sexisme et la discrimination des femmes par une loi sur le sexisme basée sur le recours à des Sanctions Administratives Communales. Cela est-il de nature à aider l’émancipation des femmes ? Nous en doutons fortement. La crise et la politique d’austérité touchent très fortement la grande majorité des femmes au travers de la dégressivité des allocations de chômage, des mesures concernant le système de (pré-)pension, du gel salarial, du démantèlement continuel des services publics et de l’accès aux soins de santé,…

    Lors du week-end de formation et de débat ‘‘Socialisme 2013’’, deux commissions seront consacrées à la lutte pour les droits des femmes par le biais plus spécifique de deux thèmes :

    1. Les causes de la violence contre les femmes et comment les combattre ?Samedi 13 avril, 15-17h30

    En Inde, un viol extrêmement brutal ayant entraîné la mort de la victime, un nouveau cas à la suite de tant d’autres, a déclenché une colère massive. Des centaines de milliers de femmes et d’hommes sont descendus dans les rues pour crier que cela doit cesser. Il n’y a pas qu’en Inde que les formes les plus barbares de violence contre les femmes se produisent avec une régularité d’horloge. Les femmes sont frappées aussi bien par une violence d’Etat dans des pays comme l’Iran que par une violence domestique ou en rue. Dans presque tous les conflits armés, le viol est utilisé comme arme de guerre. Au Congo, les femmes subissent systématiquement cette violence depuis déjà plus d’une décennie.

    Mais la lutte se développe en réaction, en Inde et ailleurs. Afin de remporter la victoire, il faudra toutefois aller bien plus loin que l’instauration de lois et de punitions plus sévères. Dans un pays comme la Belgique, où la discrimination légale a presque totalement été détruite, une plainte pour un viol commis dans une école secondaire est déposée chaque semaine à la police. Et combien de cas sont-ils tout simplement inconnus ? En Europe, chaque jour, sept femmes trouvent la mort des suites de la violence conjugale.

    S’agit-il d’une inévitable guerre entre les sexes ? Beaucoup de féministes partent de ce point de vue. Les marxistes, par contre, considèrent que les causes de cette violence contre les femmes résident dans l’existence d’une société de classe, de systèmes qui créent et renforcent l’inégalité de façon systématique afin de maintenir les privilèges de l’élite au pouvoir.

    L’émancipation des femmes dans les pays capitalistes développés n’est pas tombée du ciel, il a fallu mener une lutte acharnée pour parvenir à ce résultat. Ce combat n’a pas été l’œuvre exclusive des femmes : la lutte pour des salaires décents, pour de bons services publics et pour la sécurité sociale – la lutte du mouvement ouvrier – a livré une énorme et décisive contribution à la création de conditions matérielles permettant aux femmes d’accéder à une position plus favorable dans la société. Ce constat est crucial pour parvenir à une stratégie correcte dans le cadre de la lutte contre la violence contre les femmes.

    Mandy Hurel et Mirre Vercoutere, toutes deux actives dans la commission femmes du PSL, prendront la parole et défendrons un point de vue marxiste concernant la violence contre les femmes et la manière dont la lutte doit être poursuivie.

    Le débat pro-choix sur le droit à l’avortement. Dimanche 14 avril, 10-12h.

    Depuis quelques années, un mouvement qui se prétend “pro-vie” a commencé ses activités en organisant chaque année une ‘‘Marche pour la Vie’’. Derrière ces termes positifs se cachent des militants qui tiennent de réguliers piquets aux portes de divers centres d’avortement pour y intimider et y culpabiliser les femmes qui s’y rendent.

    Comment réagir ? Ce débat est toujours en cours. Faut-il ignorer ce phénomène pour ne pas leur donner d’importance ou au contraire construire un contre-mouvement ?

    Les oratrices belges qui prendront la parole dans cette commission ont toutes été impliquées dans l’action qui s’est tenue en mars dernier contre la dernière édition de cette prétendue ‘‘Marche pour la Vie’’. Toutes pensent qu’ignorer le problème n’est pas une solution car cela revient à laisser à de tels groupes réactionnaires l’opportunité de se construire.

    Mais si nous parlons en Belgique de construire un contre-mouvement contre les piquets “pro-vie” aux centres d’avortement avant que ce phénomène ne prenne un caractère plus large, la lutte pour obtenir le droit à l’avortement est toujours en cours en Irlande. Une participante active à ce combat, Aine Nic Liam prendra la parole sur cette question. Aine est membre du Socialist Party, le parti-frère du PSL en Irlande.

    Orateurs: Aurore De Keyzer (représentante de JocF), Marita De Neubourg (Rood-Gand, impliquée dans la construction d’un comité de quartier contre les piquets pro-vie au centre d’avortement à Gand), Aine Nic Liam (Socialist Party Irlande, active dans le mouvement pour le droit à l’avortement), Aïsha Paulis (responsable de la Commission Femmes du PSL) et enfin une représentante de la Commission Femmes de la FGTB-Bruxelles.

  • Capitalisme et culture du viol

    En décembre 2012, l’horrible viol collectif d’une étudiante de 23 ans à Delhi, en Inde, suivi de sa mort, a placé le fléau du viol sur le devant de la scène. Ce cas particulier ne sort malheureusement pas du tout de l’ordinaire par sa nature ou sa gravité. Ce qui l’a rendu exceptionnel, c’est la réponse explosive du mouvement ‘‘rage against rape’’, qui a fait descendre dans la rue une foule de femmes aussi bien que d’hommes opposés aux viols et à la violence sexuelle extrêmement fréquents, commis surtout contre les femmes et les enfants.

    Par Emma Quinn & Laura Fitzgerald, Socialist Party (CIO-Irlande)

    ‘‘Rage against rape’’ en Inde – malgré la nature problématique des appels à la peine de mort et à la castration pour les auteurs de viols (en plus de ne pas répondre aux causes sous-jacentes du viol, cela donnerait encore plus de pouvoir à un Etat indien qui réprime et va continuer à réprimer les luttes des travailleurs et mouvements sociaux) -, le développement du phénomène ‘‘Slutwalk’’ ces dernières années, fer de lance de la montée de la remise en cause de la ‘‘culture du viol’’, sont autant de développements véritablement positifs.

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    Socialisme 2013

    Commission le samedi 13/04 : Les causes de la violence envers les femmes et comment la combattre

    Commission le dimanche 14/04 : Le débat pro-choix sur le droit à l’avortement. Avec des militantes pour les droits des femmes, notamment Aisha Paulis (commission femmes du PSL)

    Plus d’infos et programme complet

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    La ‘‘culture du viol’’ peut être décrite par le fait de réagir aux viols et à la violence sexuelle en culpabilisant les victimes et les survivantes en se demandant comment elles s’habillent, quel est leur passé sexuel, leur consommation de drogue ou d’alcool, etc. de façon à la fois subtile et ouverte. C’est ainsi que réagissent la police et la justice, à des degrés variables en fonction des divers pays du monde. Il s’agit d’une vulgarisation du viol. Au cours de cette dernière période, ce phénomène s’est développé dans un contexte où, de plus en plus, les femmes et leurs corps se voient rabaissés au rang d’objet dans la culture dominante.

    Le viol est une question de pouvoir

    Le viol n’est pas une question de désir sexuel, mais plutôt l’expression ultime du pouvoir, du contrôle et de la suprématie sur un autre être humain. La majorité des victimes et des survivantes sont des femmes et la grande majorité des auteurs de viols sont des hommes. Les hommes victimes d’un viol sont particulièrement stigmatisés, en partie parce que c’est considéré comme une expérience émasculatrice. L’exemple de femmes soldates participant à l’humiliation sexuelle de prisonniers hommes dans la prison d’Abu Ghraib, en Irak, montre comment le viol et l’abus sexuel sont fondamentalement une expression du pouvoir : les forces impérialistes ont utilisé les abus sexuels dans le but très conscient de dégrader et de démoraliser.

    Les milliers d’années d’oppression de la femme ont signifié des milliers d’années de soumission, et notamment de viol. Les viols fréquents sur les esclaves par les possesseurs d’esclaves dans le Sud des Etats-Unis avant la Guerre Civile sont un exemple parmi beaucoup d’autres du viol en tant qu’expression de cette soumission imbriquée dans l’oppression économique également subie.

    Le début de la société humaine divisée en classes sociales – il y a environ 10.000 ans – a constitué un moment crucial dans l’instauration des structures et de l’idéologie qui oppressent les femmes. L’idéologie de la famille nucléaire et patriarcale en particulier, qui a atteint son apogée dans la Rome Antique lorsque les pères avaient droit de vie et de mort sur leur femme et leurs enfants, est une idéologie façonnée et utilisée par le système économique actuel du capitalisme. Malgré les grandes luttes et les changements survenus depuis lors, la promotion de cette idéologie a contribué à pérennisé l’oppression des femmes.

    Ce n’est nullement une coïncidence si la plupart des viols et des abus sexuels sont perpétrés par une connaissance de la victime, souvent même un membre de la famille, un partenaire ou un ex-partenaire. Sous le capitalisme, l’idéologie de la famille patriarcale (soutenue depuis les débuts de ce système) a permis que les femmes soient des sources d’heures de travail non rémunéré – comme elles le sont encore aujourd’hui de bien des façons et dans bien des cas – en effectuant le travail domestique, en s’occupant des enfants et des membres âgés de leur famille ou des malades.

    Cette idéologie était en contradiction avec la nécessité d’intégrer la force de travail féminine dans le système de profit, mais elle a aidé à justifier les plus bas salaires des travailleuses, une réalité toujours d’application aujourd’hui dans les pays capitalistes développés. En Irlande, selon un récent rapport de l’OCDE, les femmes gagnent en moyenne 14% de moins que les hommes, et ce fossé s’élargit à 31% pour les femmes qui ont des enfants (en Belgique, l’écart moyen est de 24%, NDT).

    L’Ère de l’austérité et son impact sur les femmes

    Ces dernières décennies, l’entrée massive des femmes dans la force de travail – tout en augmentant souvent l’exploitation que les femmes subissent à la fois en tant que travailleuses et en tant que femmes – a eu un impact progressiste. En s’engageant dans la force de travail, les femmes ont pris confiance en elles et, en réalité, les idées réactionnaires concernant la famille patriarcale et le rôle subalterne des femmes ont été profondément ébranlées. Par exemple, la grande majorité de la population européenne, hommes et femmes, n’acceptent plus l’idée selon laquelle les femmes ne devraient pas être égales aux hommes.

    L’ère de l’austérité actuelle signifie concrètement une énorme destruction de nos emplois, de nos services publics et de nos conditions de vie. Les femmes sont plus particulièrement affectées par les attaques contre le secteur public parce qu’elles représentent la majorité des travailleurs de ce secteur (en particulier dans la main d’œuvre peu payée du secteur public) et en raison de la nature progressiste des services publics qui peuvent socialiser ce qui auparavant étaient des problèmes privés pour les femmes (comme de prendre soin des malades et des personnes âgés).

    Des services sont en train d’être complètement érodés, comme l’aide à domicile (un service qui a en fait commencé sur base volontaire et non payée – notons l’impact de l’idéologie patriarcale qui montre les femmes comme des ‘‘soignantes naturelles’’ -, et pour lequel on s’est battu pour qu’il devienne financé et développé par l’État). Les femmes, en particulier, vont porter le fardeau de cette érosion, avec comme résultat probable le retour réactionnaire aux rôles traditionnels de genre. L’élite au pouvoir a besoin de trouver des moyens pour justifier ce retour en arrière. La publicité et les autres moyens de propagande (particulièrement aux USA) ont été massivement utilisés pour mettre l’accent sur la ‘‘place naturelle des femmes au foyer’’ en tant qu’épouses, soignantes et domestiques non payées, de même que leur subordination aux hommes juste après la seconde guerre mondiale, alors que les femmes étaient massivement entrées dans les usines pendant la guerre.

    Cette propagande nous paraît aujourd’hui grossièrement sexiste et dépassée. Cependant, d’autres formes de propagande sexiste ont été de plus en plus développées, dans les médias en particulier. L’offensive s’est même intensifiée cette dernière décennie : rabaissement de la femme au rang d’objet, marchandisation du corps féminin et ‘‘pornification’’ de la culture.

    L’impact du ‘‘nouveau sexisme’’

    Le ‘‘nouveau sexisme’’, appuyé en grande partie par l’industrie cosmétique (très rentable), joue actuellement un rôle dans le renforcement des vieilles idées selon lesquelles la valeur d’une femme se mesure à son apparence et à son look, en dénigrant sa valeur en tant qu’être humain égale aux hommes. Cette attaque idéologique offre aux politiciens l’espace pour mener une politique sexiste et réactionnaire. Ainsi, lors des émeutes de Londres en 2010, certains politiciens ont tenté d’expliquer le phénomène par l’éclatement de la famille traditionnelle en reportant la faute sur les parents célibataires, afin de ne pas parler des causes sociales derrière cette explosion de colère (taux de chômage élevé, aliénation et pauvreté massive parmi la jeunesse).

    En Espagne et au Royaume Uni, des partis politiques au pouvoir souhaitent aujourd’hui revenir sur le droit à l’avortement : une véritable indication de l’instrumentalisation des femmes en tant que boucs émissaires de même qu’un cas concret de casse des droits des femmes et de leur liberté de choisir. Aux USA, le degré auquel le parti de droite Tea Party a influencé le discours et la politique représente à la fois une attaque idéologique et une menace physique contre les droits des femmes. Les restrictions à l’accès à l’avortement y ont tellement augmenté que certains États n’ont plus qu’une seule clinique pratiquant l’avortement ouverte ! Paul Ryan, le candidat républicain malchanceux à la vice-présidence américaine aux élections de 2012, a précédemment soutenu une loi qui tentait de permettre aux violeurs de poursuivre en justice les victimes qu’ils auraient mises enceinte pour les empêcher d’avorter ! Voilà le contexte dans lequel la ‘‘culture du viol’’ existe. C’est aussi le contexte dans lequel cette culture doit être remise en cause.

    Les violences sexuelles comme arme de guerre et de domination

    Le viol en tant qu’expression de la suprématie et de la domination est illustré par les abus commis par de nombreux prêtres en position de pouvoir, des cas systématiquement couverts par la hiérarchie de l’Eglise Catholique. On peut également parler du cas du célèbre présentateur de la BBC Jimmy Saville (un proche de Margareth Thatcher qui a été protégé par la véritable institution qu’est la BBC) qui a abusé d’enfants et de jeunes vulnérables et marginalisés en toute impunité, des décennies durant.

    La violence sexuelle est utilisée comme arme de guerre afin d’intimider et de dégrader l’ennemi ; en Syrie, c’est en fait la première raison pour laquelle il y a eu un exode massif de femmes et d’enfants dans des camps de réfugiés de Jordanie et du Liban. L’attaque de femmes et de filles par des hommes armés, parfois à plusieurs, est une caractéristique significative et problématique de la guerre civile syrienne. C’est globalement le cas des zones de guerre ; on estime à 200.000 le nombre de victimes de violences sexuelles en République Démocratique du Congo dans le cadre de conflits armés. Le viol y est décrit comme une arme ‘‘moins chère que les balles et les bombes.’’

    L’Afrique du Sud connait des statistiques parmi les plus alarmantes, le taux de viols d’enfants et de bébés y est le plus élevé au monde. 37% de la population masculine admet avoir commis un viol et plus de 500.000 attaques sexuelles ont lieu chaque année. Le problème est notamment enraciné dans la croyance très répandue qu’une relation sexuelle avec une vierge guérit du sida. Ce pays comprend le plus grand nombre de séropositifs : 11% des habitants sont affectés. La Zambie, le Zimbabwe et le Nigeria sont aussi infestés par les attaques sexuelles à cause de ce mythe dangereux.

    Attaques contre les femmes sur la place Tahrir

    L’un des exemples les plus frappants de ce que représente le viol et d’où il provient se trouve peut-être dans le contexte de révolution et de contre-révolution qui se déroule en Égypte actuellement, au cœur symbolique de la révolution, place Tahrir.

    L’héroïque révolution qui a renversé le dictateur Moubarak en 2011 n’était en fait qu’une demi-révolution : le dictateur corrompu a été renversé par une lutte de masse et une grève générale, mais les bases-mêmes du capitalisme et de l’impérialisme n’ont pas été abattues pour céder la place à un gouvernement représentant les travailleurs et les pauvres visant à placer les richesses sous propriété publique et démocratique. Sans une telle démocratie, les portes ont été ouvertes pour que l’armée et l’Islam politique reviennent à l’avant. Cependant, les femmes, les travailleurs et les pauvres qui se sont battus héroïquement pendant la révolution ne sont pas simplement rentrés chez eux. Les femmes ont été présentes durant tout le soulèvement révolutionnaire de ces dernières années en Égypte, et elles sont encore présentes dans le mouvement aujourd’hui.

    La participation des femmes à la lutte, dans les soulèvements révolutionnaires et dans la quête de changement de la société, n’est pas seulement essentielle, elle est aussi une indication positive de la lutte en elle-même. Les réactionnaires en Égypte comprennent fort bien cela et visent spécifiquement les femmes pour tenter de toucher le mouvement dans son ensemble.

    Le viol est un des outils de ces réactionnaires. Des rapports montrent que la Confrérie Islamique a organisé et payé des groupes d’hommes pour attaquer brutalement et agresser sexuellement les femmes militantes sur la place Tahrir. Les femmes s’arment déjà elles-mêmes pour réaffirmer qu’on ne les forcera pas à rentrer à la maison, et des groupes de manifestants – hommes et femmes – organisent la défense pour résister à ces attaques.

    Viol et violence sexuelle en Irlande

    En Irlande en 2011, plus de 2000 survivantes à la violence sexuelle se sont rendues au RCC (cellule de crise sur le viol, NDT). Des milliers d’autres cas ne sont pas rapportés et on estime que jusqu’à une irlandaise sur sept souffre de graves abus sexuels, physiques ou émotionnels. En Irlande, la question du viol et des abus sexuels est complexe. Historiquement, le pays a été dominé par le contrôle de l’Église et par ses idées tordues sur la moralité. La vision du sexe est empreinte de peur et de honte, surtout en ce qui concerne les femmes. Le sexe était uniquement considéré comme un outil de procréation et une fille considérée comme ‘‘légère’’ était ‘‘une femme déchue’’. Malgré un rejet de ces idées réactionnaires par la plupart des gens d’aujourd’hui, la ‘‘culpabilité catholique’’ et la poussée du sexisme ‘‘moderne’’ (les femmes rabaissées au rang d’objet et la commercialisation du sexe) ont contribué à développer une culture de culpabilisation des victimes d’abus.

    Un sondage récent a montré que 41% des gens pensent qu’une femme est partiellement ou totalement responsable si elle se fait violer en ayant bu de l’alcool, 37% pensent qu’elle porte une part de responsabilité si elle a excessivement flirté avec un homme et 26% pensent qu’elle est responsable si elle portait des vêtements qui révèlent son corps.

    Le sensationnalisme suscitant la peur qui est cyniquement appuyé par les tabloïds possédés par des milliardaires a aidé à perpétrer le mythe que le viol est quelque chose qui n’est commis que par des hommes louches dans des ruelles sombres. En réalité, une femme sur cinq est abusée par son partenaire actuel ou son ex, 39% par un ami ou une connaissance. Le lieu le plus courant des viols est la maison de la victime.

    Selon les estimations, seuls 7% de tous les viols en Irlande sont condamnées. La DPP (Director of Public Prosecution) ne poursuit qu’un tiers des cas reportés, ce qui signifie que 70 cas sur 100 sont déjà perdus à ce stade. ‘‘Le manque de preuves’’ est la première raison pour laquelle la majorité des dénonciations ne va pas plus loin. Il y a significativement plus de chances d’aboutir à une condamnation si l’attaque se produit dans un espace public par un inconnu de la victime, par rapport aux agressions bien plus courantes où l’auteur est connu d’elle. Depuis l’introduction en 1990 de la pénalisation du viol conjugal, il n’y a eu qu’une seule condamnation, ce qui est choquant lorsqu’on considère que 18% des agressions sexuelles sur les femmes sont commises par des hommes qui ont ou ont eu une relation intime avec elles par le passé.

    Une étude par le Rape Crisis Network Ireland a monté que jusqu’à 40% des victimes de viols retirent leur plainte en raison de la faible réaction de la police. Les cas sont souvent abordés de façon insensible et des incidents comme le scandale de la ‘‘rape tape’’ de Rossport n’est pas pour rassurer les victimes lorsqu’elles rapportent la violence sexuelle. Dans cette vidéo, des policiers menaçaient deux manifestantes arrêtées de les violer si elles n’obéissaient pas à leurs instructions. Une autre tendance alarmante dans le système judiciaire irlandais est l’augmentation du nombre de procès où des hommes riches donnent une compensation financière à leur victime au lieu d’être condamnés à la prison.

    Le viol en Inde

    Le viol collectif et le meurtre d’une étudiante en médecine de 23 ans à Delhi ont amené la question de la violence sexuelle dans les médias de masse, obligeant les gens à se rendre compte de l’impact de la ‘‘culture du viol’’ en Inde et à travers le monde. La façon sournoise dont ce cas a été géré par la police a mis en lumière l’attitude dédaigneuse envers le viol en Inde.

    Il s’agit du crime le plus répandu dans le pays : au moins 24 000 incidents sont rapportés chaque année et on estime que seuls 50% des viols sont rapportés. Cette culture est un arrière goût amer du système féodal dominé par les hommes en Inde. Il existe un énorme mépris des femmes dans tout le large et varié spectre politique et religieux du pays. En contradiction directe avec le système discriminatoire, il n’est pas exceptionnel qu’un homme d’une caste inférieure agresse une femme de la classe supérieure dans la rue. La propriété des femmes par les hommes dépasse le statut social même ici, ce qui indique à quel point l’oppression des femmes est enracinée.

    Les femmes des classes inférieures Dalit ou intouchables qui sont les plus vulnérables. La société indienne leur offre peu de protection ou de justice et la majorité du temps, les attaques contre ces femmes ne sont pas remarquées et restent impunies. L’idéologie de la domination masculine dans une période de changement social rapide et abrupt, avec les femmes et les castes inférieures qui entrent dans la force de travail en raison des investissements capitalistes en Inde, est le contexte dans lequel le viol est si endémique et répandu dans le pays.

    Remettre en cause la ‘‘culture du viol’’

    ‘‘Mon violeur ne sait pas qu’il est un violeur. Vous lui avez appris que ce n’est pas de sa faute. J’avais trop bu, j’ai flirté, et mes vêtements étaient trop courts. Je l’ai cherché. Il m’a laissée dans l’escalier d’un parking. Mon (ex) petit copain m’a craché à la figure. Il m’a traitée de pute, il n’a traitée de salope. Je l’avais mérité. Mes amies me jetaient des sales regards. Elles m’ont dit que j’étais un déchet, sans réaliser que ça aurait pu être elles. Cette culture, votre culture, leur a dit, m’a dit, que c’était de ma faute. Et j’ai souffert. Mais mon violeur ne sait pas que c’est violeur. Je n’ai pas honte. Je reste debout.’’

    Comme l’indique cette citation d’une participante à la slutwlak de Washington DC en 2011, une culture qui ramène les femmes au rang d’objet, qui promeut une vision bancale de la sexualité des femmes, qui culpabilise les victimes et non les agresseurs, qui encourage les femmes à ne pas sortir seules la nuit, à prendre des cours de self-défense, à s’habiller d’une certaine façon pour éviter le harcèlement et attaques sexuel mais n’apprend pas aux hommes et aux jeunes pourquoi ‘‘non, c’est non’’ – fait absolument partie du problème auquel on doit s’attaquer.

    La prolifération de l’industrie pornographique – généralement destinée aux hommes et centrée sur une vision des femmes, de leur sexualité et du sexe en général très étroite, dirigée par les hommes et souvent misogyne, qui lie de plus en plus le sexe et la violence – alimente cette culture. C’est aussi le contexte de la gueule de bois de la promotion idéologique des rôles traditionnels de chaque genre qui dénigre aussi les femmes et appuie la subordination des femmes aux hommes. Plus encore, c’est le contexte de la promotion de l’idée, propre au capitalisme, de la responsabilité individuelle et de l’individualisme, qui isole les femmes à leur détriment, et des normes sociales et culturelles arriérées, qui donne naissance à la ‘‘culture du viol’’. Les phénomènes Slutwalk et Rage Against Rape sont en opposition à cette culture, et sont en soi une politisation des questions du viol et de l’oppression. Cela joue un rôle dans l’éducation des masses à cette question.

    Les femmes et la lutte pour le socialisme

    Comme nous l’avons vu, l’ère de l’austérité est une énorme menace contre les conditions de vies et les droits de chacun. Les travailleuses, aux côtés de leurs collègues masculins, sont à l’avant-garde de la lutte contre les coupes budgétaires et les suppressions d’emplois. En Irlande, nous avons surtout vu les travailleuses des entreprises Thomas Cook et La Senza occuper leur lieu de travail lorsqu’elles étaient menacées de licenciement. Les attaques contre le secteur public dans toute l’Europe requièrent une lutte énorme et un mouvement d’opposition massif. Les femmes peuvent jouer un rôle central dans un tel mouvement.

    En plus d’un combat déterminé spécifique pour remettre en cause le sexisme, l’objectification, la violence et les agressions sexuelles, il est vital qu’un mouvement contre l’austérité mette aussi ces questions en avant et les relie afin d’assurer que les femmes puissent être au centre du mouvement, et aussi jouer un rôle dans l’éducation des hommes, qui eux-mêmes n’ont pas intérêt à ce que la situation actuelle perdure.

    Depuis le début de la ‘‘Grande Récession’’ de la crise capitaliste, il y a eu une baisse de 29% du nombre de filles qui finissaient leurs études primaires (le taux est de 22% pour les garçons). Dans le pays le plus riches au monde, les USA, 17 millions de femmes vivaient dans la pauvreté en 2011 (de même que 12,6 millions d’hommes). Ces inégalités sont abjectes, de même que l’énorme pauvreté et la destruction des conditions de vie que le système du profit fait subir à la majorité des femmes, des hommes, des enfants et des jeunes dans le monde.

    La lutte pour en finir avec ce monde de violence, d’oppression, de pauvreté et d’austérité doit mettre le socialisme à l’ordre du jour, c’est à dire la propriété publique démocratique des principales richesses et ressources, et la planification démocratique de l’économie en fonction des besoins de la population.

    Une lutte massive pour réaliser ce changement en Irlande, en Europe et partout dans le monde, et une société basée sur la solidarité humaine et l’égalité, pourraient poser les bases pour remettre en cause et mettre fin à l’oppression des femmes que le viol incarne.

  • 24 mars : Mobilisons-nous pour un réel choix !

    Droit pour tous d’avoir des enfants sans s’appauvrir – Droit des femmes de décider de leur corps

    Depuis plusieurs années déjà, un mouvement réactionnaire se construit contre le droit des femmes à décider de leur corps. Ses membres organisent chaque année une marche contre le droit à l’avortement, mais ne se limitent pas à ça. C’est chaque semaine qu’ils tiennent des piquets devant certains plannings familiaux qui pratiquent l’IVG dans des villes comme Bruxelles, Anvers et surtout Gand, accusant les femmes qui ont pris la décision d’avorter d’être des ‘‘meurtrières’’. En plus, ils se font appeler les ‘‘pro-vie’’. Nous ne pouvons pas l’accepter !

    Par Emilie (Namur)

    Tout d’abord, la mort de Savita Halappanavar, en Irlande, nous a rappelé que c’est l’interdiction de l’avortement qui tue. Cette jeune femme est décédée en octobre 2012 suite aux complications de sa grossesse. Sa vie aurait pu être sauvée si un avortement avait été pratiqué. Ensuite, légal ou non, l’avortement est un phénomène qui existe. Non sécurisée, cette procédure tue une femme sur huit. Enfin, a-t-on jamais vu un membre des ‘‘pro-vie’’ défendre des conditions de vie descentes pour tous ?! Se sont-ils même posé cette question ?

    Nous devons nous battre pour un réel choix : le droit pour tous d’avoir des enfants sans s’appauvrir, le droit des femmes de décider de leur corps. Pour cela, nous devons lutter contre l’austérité et réclamer un plan massif d’investissements publics.

    Tout d’abord, nous revendiquons la mise en place de réelles politiques de prévention. D’une part, pour que l’éducation sexuelle puisse se donner de manière sérieuse, nous avons besoin de plus de moyens pour l’enseignement, davantage d’enseignants, des classes plus petites. D’autre part, pour éviter des grossesses non désirées, la contraception devrait être gratuite, accessible à tous et de qualité. Aujourd’hui, la contraception coûte plus cher qu’un avortement.

    Ensuite, il est inacceptable qu’actuellement en Belgique un quart des femmes avorte pour des raisons principalement financières. Exigeons le droit d’avoir des enfants sans s’appauvrir. Cela commence par des emplois de qualité avec des salaires décents et des horaires fixes et raisonnables. Non aux heures supplémentaires ! On compte des milliers de chômeurs alors que les travailleurs subissent une charge de travail excessive. Nous exigeons un partage du temps de travail avec la mise en place des 32 heures/semaine sans perte de salaire et avec embauches compensatoires. Ensuite, il faut des allocations familiales qui couvrent le réel coût d’un enfant. Puis, la Belgique manque de crèches et ce n’est pas le « plan cigogne 3 » du ministre Nollet qui va résoudre ce problème! Par exemple, Schaarbeek compte 500 places de crèches communales, mais 500 autres bébés sont sur les listes d’attentes. Les 500 nouvelles places par an qui vont être créées pour l’ensemble des 19 communes de Bruxelles, ne couvriront de très loin pas la demande. Enfin, les logements capables d’accueillir une famille sont trop chers au regard des revenus et les listes d’attentes pour des logements sociaux débordent.

    Le droit à l’avortement doit être lié aux revendications sociales. L’émancipation des femmes passe par l’émancipation de l’ensemble de la classe des travailleurs. Ne laissons pas d’espace aux mouvements réactionnaires ! Mobilisons-nous !

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