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  • Mise à jour : Joe Higgins (CIO-Irlande) remporte une victoire sensationnelle lors des élections européennes !

    Un siège remporté sur base d’un programme clairement socialiste et de lutte, de même que 6 sièges aux élections communales

    Joe Higgins, du Socialist Party (le CIO en Irlande du sud) a été élu au Parlement européen par sa circonscription de Dublin, ce qui porte un énorme coup à l’establishment politique irlandais. Avec 50.510 voix de préférence, Joe a remporté le troisième siège attribué à sa circonscription, battant Eoin Ryan du Fianna Fáil (1), et Mary Lou McDonald du Sinn Fein (le parti nationaliste), qui perdent ainsi leur siège au Parlement européen. Cette victoire, une grande première pour le CIO, est le résultat d’une infatigable campagne menée par les membres et les sympathisants du Socialist Party, et reflète la colère vrombissante contre le gouvernement et la classe politique irlandaise.

    socialistworld.net

    La victoire de Joe Higgins illustre le potentiel présent pour les candidats qui mettent en avant une alternative socialiste claire. Son parcours de lutte pour les travailleurs – y compris un mois de prison pour s’être opposé aux taxes sur les sacs poubelles en 2003, la direction de la campagne victorieuse contre la taxe sur l’eau en 1997, et le rôle majeur qu’i la joué lors de la lutte contre la surexploitation des travailleurs immigrés lors du conflit à GAMMA en 2005 – lors de son mandat de TD (2) (Parlementaire), de 1997 à 2007, période durant laquelle il ne recevait que le salaire moyen d’un travailleur, lui a permis, ainsi qu’au Socialist Party, de gagner un respect et un soutien larges. Le Socialist Party a remporté six sièges lors des élections communales qui se déroulaient simultanément – deux sièges de plus. Plus d’analyses suivront bientôt.

    Extrait du Irish Times, 8 juin 2009

    «M. Higgins, qui a entre autres passé un mois en prison dans le cadre d’une campagne contre les taxes poubelles, a battu M. Ryan de plus de 7.000 voix pour le dernier siège de sa circonscription, tandis que l’aube se levait aujourd’hui.

    Il a été déclaré élu à 5h15 du matin, après que 400 assesseurs aient oeuvré toute la nuit au centre de comptage électoral de RDS. M. Higgins a remporté un transfert massif de 22.000 voix de la part de Mme McDonald, qui l’ont propulsé au devant de M. Ryan.

    M. Mitchell a été élu avant minuit, tandis que M. de Rossa a atteint le quota de 101 659 un peu avant 4h du matin.

    Entouré de sa vieille mère et de douzaines de jeunes partisans, M. Higgins a déclaré que : «Les pays européens sont dominés par des gouvernements de droite, qui mènent les mêmes politiques capitalistes qu’ici en Irlande, et font payer les travailleurs pour leurs propres erreurs.»

    Il a fait le serment d’unir les travailleurs d’Irlande et à travers l’UE. Lorsqu’on lui pose la question de savoir comment il s’arrangerait pour supporter le rythme effréné de voyages entre Bruxelles et Strasbourg, il répond : «J’ai déjà beaucoup voyagé dans les intérêts du socialisme, et je suis certain que je parviendrai à tenir le coup».

    Il a affirmé ne pas prendre plus que le salaire moyen d’un travailleur, et ses frais légitimes seront publiés. Mme Ellen Higgins, qui rendait régulièrement visite à son fils à la prison de Mountjoy en 2003, nous a confié ceci : «Je suis fière de lui. Je pense qu’il est très bien».

    Originaire du Comté de Kerry, M. Higgins, âgé de 60 ans, a d’abord étudié la prêtrise, pour devenir plus tard athée. Ses contributions incisives au Dáil (3) ont fait de lui une épine dans le pied de l’ancien Taoiseach Bertie Ahern, de 1997 à 2007.

    Sa campagne électorale a été financée sur base d’un budget extrêmement restreint, et ses affiches en noir et blanc affirmaient qu’il est «Le meilleur combattant qui ne puisse être acheté».»


    1. Le Fianna Fáil (prononcé Fyiënë fool) est le parti libéral irlandais, au pouvoir avec le parti écolo depuis l’an passé 2. TD = Teachta Dála (prononcé Tyakhtë daalë), càd un parlementaire irlandais 3. Le Dáil (prononcé dwaal) est la Chambre des Représentants irlandais 4. Le Taoiseach (prononcé Tiishëkh) est le Premier Ministre et chef du gouvernement irlandais (sous un président à titre honorifique)

  • Elections européennes de 2009 – Tour d’horizon

    Peu ou pas de confiance dans les gouvernements, mais pas de veritable alternative socialiste

    Ces élections européennes ont donné un instantané de l’atmosphère anxieuse et de la méfiance, ou même de l’hostilité, éprouvée face aux gouvernements. Dans certains pays, comme la Grande-Bretagne, la Grèce, l’Irlande et la Hongrie, les partis au pouvoir ont subi de dramatiques revers. Mais généralement, à quelques exceptions près, cette situation n’a pas bénéficié aux forces de gauche ou même aux verts. Le mécontentement est surtout illustré par une faible participation et un soutien accru pour les nationalistes de droite ou les formations d’extrême-droite.

    Par Robert Bechert, Comité pour une Intenationale Ouvrière

    L’Europe s’enlise dans une profonde récession, la pire depuis les années ‘30. Juste avant les élections, la Banque Centrale Européenne avait d’ailleurs encore revu à la baisse ses prévisions de croissance pour les 16 pays de la zone euro : une chute de 5.1% pour 2009.

    Voilà le contexte derrière la fonte du soutien de la plupart des partis au pouvoir et la recherche, parmi les électeurs, d’une alternative. Même le faible taux de participation illustre ce rejet des partis établis, au côté d’un rejet de l’Union Européenne et de la parfaite compréhension que le soi-disant Parlement européen est impuissant.

    Mais alors que les nationalistes de droite et l’extrême-droite ont pu capter une bonne partie des voix, la victoire de Joe Higgins, le candidat du Socialist Party (CIO-Irlande), qui a remporté un des sièges d’eurodéputé de Dublin, montre de quelle manière il est possible de construire un soutien conscient de la base profondément enraciné parmi la classe ouvrière, établissant ainsi une tradition de lutte revendiquant des politiques réellement socialistes. Malheureusement, cela ne constitue pas l’expérience générale de ces élections. Seul le Bloc de Gauche au Portugal et le Mouvement des peuples contre l’UE au Danemark, quoique sur base d’un programme politique plus faible, ont remporté des succès significatifs.

    Dès le début de cette crise, il a été absolument clair qu’elle était due au marché capitaliste lui-même. À aucune moment il n’a été possible pour la classe capitaliste de blâmer la classe ouvrière, les syndicats ou le ‘socialisme’. On se serait donc attendu à ce que cela débouche un soutien pour les partis qui se sont opposés au capitalisme, ou qui au moins ont offert une vision différente de la société.

    Nous avons déjà connu des protestations à une large échelle, avec des manifestations et des journées de grève générale ou nationale, dans une série de pays européens. En France, plus particulièrement, elles ont pris le caractère d’une marée croissante d’opposition à toute tentative des capitalistes et des gouvernements de faire payer la crise aux travailleurs et à la classe moyenne. Mais d’autres pays encore, comme la Belgique, la Grèce et le Portugal, ont également connu des actions significatives.

    Cependant, presque tous les dirigeants syndicaux à travers l’Europe n’ont en rien cherché à construire un mouvement plus large sur base de ces premiers pas. Au lieu de cela, les protestations ont été réduites à des actions isolées, employées souvent tout simplement pour laisser sortir la colère, et la pression, ou encore, comme avec certaines manifestations de la Confédération Européenne des Syndicats de ce mois de mai, pour tenter de soutenir les partis sociaux-démocrates.

    L’absence d’alternative pour les travailleurs ouvre la voie à la droite

    Ce frein sur les luttes s’explique par le fait que dans la grande majorité des pays de l’Union Européenne, il n’y a actuellement aucun grand parti ou parti de masse essayant de construire une opposition sérieuse face aux effets de cette crise. Ce fait n’est pas fortuit. Le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO – CWI) a expliqué depuis le début des années ‘90 que la plupart des pays n’ont plus aucun parti de masse ou de parti significatif qui s’oppose au capitalisme. C’est là le résultat d’une combinaison faite de l’offensive idéologique des capitalistes qui a suivi l’effondrement de l’Union soviétique et de la transformation de la plupart des anciens partis ouvriers bourgeois (des partis avec une base de classe ouvrière et une direction pro-capitaliste) en partis complètement capitalistes.

    C’est ce qui a jusqu’ici sauvé les capitalistes et qui a fait qu’il n’y a pas encore eu de d’opposition active à une large échelle contre le capitalisme lui-même en conséquence de la crise. Dans beaucoup de pays européens, les travailleurs, la jeunesse et des sections de la classe moyenne ont clamé : "Nous ne payerons pas votre crise". Cet appel est un bon point de départ pour construire une résistance contre les pertes d’emploi, la baisse du niveau de vie et les coupes dans les budgets sociaux. Mais ce n’est seulement qu’un commencement.

    Cette crise du capitalisme pose clairement la question de l’opposition au système capitaliste lui-même et de la lutte pour une alternative socialiste. Actuellement toutefois, mis à part le CIO, il y a en Europe très peu de forces présentes dans le mouvement des travailleurs qui lient activement la lutte contre l’impact de la crise et la construction d’un soutien pour une société socialiste. Cette lacune a ouvert la voie aux succès électoraux de la droite.

    Dans un certain nombre de pays, mais pas en Belgique, les partis de centre-droit ont gagné, ou ont moins souffert que d’autres partis. Souvent, comme dans le cas de Sarkozy en France, c’était aussi le résultat d’un changement de tactique, avec des critiques contre les excès du capitalisme ou, dans le cas d’Angela Merkel en Allemagne, sous l’effet d’une extension massive des fonds du gouvernement pour le chômage partiel afin de limiter les pertes d’emploi.

    Gains pour l’extrême droite

    Mais à travers l’Union Européenne, des partis plus à droite ont progressé, en pourcentage si ce n’est en nombre de suffrage. L’immigration est devenue une question clé, des partis de droite exploitant les craintes des travailleurs envers les immigrés, qu’ils soient issus de l’intérieur ou de l’extérieur de l’UE, vis-à-vis de l’emploi ou des services publics. Le racisme, l’hostilité contre les musulmans, les gitans et, en Autriche, un antisémitisme semi-voilé, ont été des éléments significatifs dans ces élections. De plus, il n’y avait souvent que les partis d’extrême-droite pour exprimer la colère populaire ressentie contre l’UE elle-même, son essence antidémocratique et la domination des grandes puissances européennes.

    En surface, cette élection semble illustrer une droitisation de l’Europe, et même un déplacement vers l’extrême-droite dans quelques pays. L’exemple le plus saisissant est constitué par les 769.000 voix (17%) remportées par le PVV d’extrême-droite aux Pays Bas, pour sa toute première participation aux élections européennes. Il s’agit maintenant du second parti du Pays. Mais les nationalistes de droite et les partis d’extrême-droite ont également obtenu des gains significatifs en Grande-Bretagne, en Finlande, en Grèce, en Hongrie, en Italie, en Roumanie et dans d’autres pays encore.

    En Allemagne toutefois, où Die Linke, en dépit de ses faiblesses, est encore regardé comme l’adversaire principal des attaques contre le niveau de vie des travailleurs, les suffrages de l’extrême-droite ont à peine changé, malgré quelques augmentations dans certaines élections locales qui ont eu lieu simultanément.

    Les commentateurs capitalistes peuvent partiellement décrire les résultats électoraux comme un décalage vers la droite parce que les ‘socialistes officiels’, qui ont souvent enregistré des pertes, étaient les anciennes partis ouvriers. Ces formations ont appliqué les politiques néolibérales et sont de plus en plus vues comme asssez similaires au centre-droit. Là où ces partis sont au pouvoir, comme en Autriche, en Grande-Bretagne, en Allemagne et en Espagne, ils ont enregistré des pertes. Dans les trois premiers de ces pays, les resultats ont été des baisses record, malgré le fait qu’en Allemagne, le SPD a essayé d’adopter une image légèrement plus ‘amicale’ envers les travailleurs. Dans d’autres pays, où ces partis sont dans l’opposition, les sociaux-démocrates ont gagné, sous l’étiquette du ‘moindre mal’. Ainsi, en Suède, ils ont réussi à obtenir 24.6% et même 36.6% en Grèce. Toutefois, en France, le Parti Socialiste a souffert des souvenirs qu’il a laissé derrière lui après son passage au pouvoir. Avec 16.48%, il n’est plus que 0.20% avant les verts (Europe-Ecologie).

    Dans trois pays, les principaux partis de droite au gouvenrement sont arrivé en tête des votes. En France, Sarkozy parle d’un succès de 28% des voix, ignorant cependant que 72% des électeurs se sont opposés à lui et que l’abstention a atteint des records. En Allemagne, le CDU d’Angela Merkel a reçu 1.343.000 voix de moins qu’en 2004, mais reste n°1. Le gouvernement polonais a reçu le taux le plus élevé, 44%, mais comme seulement 24% des gens se sont déplacés pour voter, cela ne représente qu’un soutien actif de moins de 12% de l’électorat…

    Très peu de gouvernements ont maintenu leur soutien. Le gouvernement italien en fait partie, avec 45% des voix. Le nouveau PdL de Berlusconi a peu gagné comparé à il y a cinq ans, et a perdu quand on regarde les élections générales d’avril 2008, mais la ligue du Nord, d’extrême-droite, a doublé ses voix à plus de 10%. L’Italie illustre bien le thème de cette élection : la faiblesse ou l’absence d’une véritable alternative socialiste, malgré la crise économique capitaliste qui fait rage.

    La force de Berlusconi est fondamentalement basée sur la déception éprouvée avec les gouvernements de centre-gauche, comme récemment la coalition Olivier, et sur l’échec du PRC (Parti de la refondation communiste). Fondé en 1991, le PRC avait précédemment reçu un soutien important, pas simplement du point de vue électoral mais aussi dans les lieux de travail et dans la société, mais cela a été gaspillé quand les dirigeants du PRC ont rejoint les gouvernements capitalistes au lieu de combattre pour gagner du soutien en faveur de politiques socialistes. En conséquence, le PRC est proche de l’extinction. Comparé à 2004, le suffrage ‘communiste’ est tombé de 2.757.000 voix à 1.032.000 (soit de 8.47% à 3.37%), alors que le suffrage ‘gauche/vert’ (une opposition très douce…) est tombé de 1.467.000 voix à 955.000 (soit de 4.51% à 3.12%). Mais un bloc de gauche significatif existe toujours en Italie. Le RPC lui-même, en alliance avec les Communistes Italiens et la Gauche Européenne, a gagné 1.032.000 voix alors que les Travailleurs Communistes en ont remporté 166.000. Ce soutien constitue toujours une base puissante pour un parti basé sur les idées véritables du marxisme en Italie.

    Des gains pour la gauche dans quelques pays

    A contre-courant de ce contexte général, la victoire du Socialist Party (CIO-Irlande) de Joe Higgins en Irlande a été un contraste marqué face à ce qui s’est produit dans le reste de l’Europe. Le SP a gagné 50.510 voix de préférence à Dublin (12.4%), plus DU double de ses 23.218 voix de 2004. C’était un vote conscient pour le SP basé sur son programme. Le SP était en concurrence avec les parti travailliste irlandais? dans l’opposition, dont la première voix de préférence à Dublin a également monté de 54.344 à 83.741 et avec le Sinn Fein dont le soutien au député sortant est tombé de 60.395 à 47.928 voix.

    Le résultat de Joe est seulement comparable au Bloc de Gauche au Portugal, qui a plus que doublé ses voix pour en atteindre 381.000 (10.7%), rattrapant tout juste le CDU, l’alliance menée par le Parti Communiste et ses 379.500 voix. Le "Mouvement des peuples contre l’UE", au Danemark, a augmenté ses voix de 97.986 à 168.035 (7.18%).

    Nouvelles formations de gauche

    Depuis le début des années ’90, le CIO a expliqué que la transformation des anciens partis sociaux-démocrates et ‘communistes’ faisait que, en même temps que la construction des forces en défense du socialisme véritable, il fallait argumenter que des étapes seraient nécessaires par la construction de partis indépendants de la classe ouvrière. De tels partis indépendants pour les travailleurs pourraient fournir à la fois un point de ralliement pour s’opposer à l’offensive capitaliste et un endroit où les idées socialistes pourraient être discutées.

    Ces dernières années, nous avons assisté à différentes tentatives de construire de nouveaux partis de gauche. Ces élections européennes ont d’ailleurs connu le passage d’une étape importante en Grande-Bretagne quand le principal syndicat des transports a lancé une initiative électorale, "No2EU, Yes to Democracy", à laquelle ont notamment participé le Socialist Party (CIO-Angleterre et Pays de Galles) et le Parti Communiste de Grande-Bretagne (PCGB). Cette liste a remporté 1% des suffrages.

    Mais plusieurs de ces nouvelles formations n’ont pas combiné une activité sérieuse et les revendications politiques claires nécessaires pour construire de vraies forces durables. C’est une véritable lutte que de construire de nouveaux partis, en particulier quand l’habitude de voter pour les anciens partis ouvriers existe toujours et quand joue l’effet du ‘moindre mal’ ou le fait que quelques petites concessions peuvent être gagnées. Toutefois, la combinaison de certains événements, d’expérience et de nouvelles activités pour ces partis peut élargir la base pour l’établissement d’une nouvelle force significative, ce que Dublin a illustré.

    Mais, de façon générale, les nouveaux partis de gauche n’ont pas connu de résultat dramatique. Les mauvais résultats peuvent s’expliquer en partie par le fait que beaucoup ont viré vers la droite, en refusant de faire campagne comme des socialistes et en ne présentant pas leur programme et leurs revendications de façon claire et déterminée.

    En Allemagne, Die Linke, en comparaison avec l’ancien PDS en 2004, a gagné 390.000 voix et a reçu un pourcentage de 7.5%, mais ce chiffre est autour de la moitié de ce qu’il avait dans les sondages d’opinion, et sous son objectif de "10 + X %". De même, en Grèce, l’alliance de gauche Syriza a obtenu 4.7%, comparé à 4.16% en 2004, mais des sondages d’opinion avaient parlé de 18% en 2008.

    Malheureusement, une situation semblable s’est développée avec le Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) en France, qui a reçu 4.8% des voix, chiffre qu’il faut comparer aux 9% des sondages lors du lancement de la formation en janvier 2009. Une force clé derrière le NPA est l’ancienne LCR, et les suffrages du NPA sont une augmentation par rapport aux 2.56% gagnés en 2004 en alliance avec LO (LO a remporté 1.2% dans ces élections). Mais ces 4.8% sont une déception comparés aux 4.25% que le porte-parole du NPA, Olivier Besancenot, avaient gagné pour la LCR aux élections présidentielles de 2002, élections auxquelles LO avait reçu 5.72%.

    Une partie des ‘anciennes’ nouvelles formations stagne, comme le Socialistische Partij aux Pays Bas, dans ce cas-ci partiellement en raison du mouvement vers la droite de la direction du parti, avec une opposition de type nationaliste face à l’UE et une participation aux coalitions gouvernementales locales avec des partis capitalistes. De tels développements peuvent handicaper l’avenir de ces nouvelles formations, soit en termes d’effondrement, comme cela semble se produire avec le PRC en Italie, soit en termes de transformation en petits partis avec peu de perspective de se développer en tant que forces de masse.

    Dans quelques pays, la faiblesse de ces nouveaux partis a donné un espace pour le développement de partis ‘verts’, particulièrement en France, où Europe-Ecologie a gagné 16.2%, mais également en Grande-Bretagne, aux Pays Bas et dans la région francophone de Belgique. Les 7.1% gagnés par le parti pirate en Suède, un parti contre la surveillance d’Etat et pour le téléchargment libre d’internet, est une indication de l’atmosphère anti-éstablishment, particulièrement parmi les jeunes.

    Des opportunité à venir pour les véritables socialistes

    De façon générale, ces élections donnent une indication de l’instabilité qui se développe en Europe. La victoire du Socialist Party à Dublin et le doublement des voix du Bloc de Gauche au Portugal, avec ailleurs des augmentations plus modestes de voix à gauche, donnent une idée du potentiel qui est actuellement présent. Le résultat du SP à Dublin prouve qu’il est possible de gagner du soutien pour des idées socialistes même lorsque beaucoup de travailleurs et de jeunes votent pour le ‘moindre mal’, tandis que le résultat du Bloc de Gauche montre ce qui est possible quand un ‘moindre mal’, le Parti Socialiste Portugais dans ce cas-ci, est au pouvoir et applique des politiques capitalistes.

    Beaucoup de travailleurs européens, de jeunes et de membres de la classe moyenne craignent pour leur avenir et espèrent que cette crise économique sera bientôt terminée. Malheureusement, ce ne sera pas le cas.

    Au fur et à mesure qu’il sera compris qu’un retour des hauts taux de croissance économique n’arrivera pas, que le chômage de masse demeurera et que les capitalistes exigeront d’autres coupes dans les budgets sociaux et le niveau de vie de la majorité, la nécessité de lutter commencera à être comprise. Cela donnera l’opportunité à l’établissement de forces significatives capables de lutter pour le socialisme. Mais ce ne sera pas automatique. Cela exigera un programme clair et une stratégie consciente. Les voix pour l’extrême-droite lors de ces élections sont un avertissement : les forces réactionnaires peuvent gagner du soutien sur base de l’agitation sociale faute d’alternative pour les travailleurs.


    Le Comité pour une Internationale Ouvrière, CIO

    Cette évaluation a été rédigée par le CIO.

    Le capitalisme est un système mondial et il doit être combattu à la même échelle. C’est pourquoi le Parti Socialiste de Lutte fait partie d’une organisation marxiste internationale: le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO), un parti mondial actif sur tous les continents. Notre lutte en Belgique s’inscrit dans le cadre d’une lutte des travailleurs du monde entier pour un société socialiste car si la révolution socialiste éclate sur le plan national, elle se termine sur l’arène internationale. La démocratie ouvrière et la planification socialiste de la production ne peuvent se limiter à un seul pays. C’est d’ailleurs l’isolement de la Russie soviétique qui a conduit à sa dégénérescence à partir de 1924.

  • Le Marché détruit la planète!

    300.000 personnes meurent chaque année directement à cause du changement climatique

    Un nouveau rapport du Global Humanitarian Forum tire la sonnette d’alarme : nous sommes au milieu «d’une crise silencieuse» : le changement climatique tue 300.000 personnes par an. Le changement climatique et ses effets sont déjà à l’oeuvre dans le monde. Ce rapport déclare que plus de 300 millions de personnes sont actuellement sérieusement affectées par le changement climatique, ce chiffre pouvant doubler au cours des 20 prochaines années.

    Par Stephen Boyd, Socialist Party (CIO-Irlande)

    Le rapport "Human Impact Report: Climate Change – The Anatomy of a Silent Crisis" a été publié six mois avant la conférence sur le changement climatique des Nations Unies qui se tiendra à Copenhague pour discuter du successeur au protocole de Kyoto, un cuisant échec.

    Les changements climatiques qui prennent actuellement place sont le résultat de deux cents ans d’industrialisation capitaliste, un système de production qui met la priorité sur les bénéfices des grandes entreprises avant la préservation de notre environnement.

    Naturellement, les premiers à souffrir du changement climatique ne sont pas les super-riches à l’avantage de qui fonctionne le capitalisme, mais bien les plus pauvres. Des 300.000 décès annuels, 99% sont basés dans les pays du monde néo-colonial et 90% sont des conséquences de la malnutrition, la diarrhée et la malaria, dont le développement est à voir en parallèle avec l’évolution du climat. Pourtant, ces pays ont contribué pour moins de 1% aux émissions mondiales de gaz carbonique. Un tel niveau de décès est équivalent à deux attaques comme celle du 11 septembre par semaine, mais s’il y a eu une «guerre contre la terreur», il n’y a pas de «guerre contre le changement climatique»!

    Depuis les années ’70, les «catastrophes naturelles» (loin d’être si naturelles que ça…) augmentent tant en fréquence qu’en sévérité. Les temêtes de la force de l’ouragan Katrina ont doublé. Entre 1996 et 2005, ce type de désastres ont causé 667 milliards de dollars de pertes, montant 20 fois plus élevé dans le monde sous-développé.

    La situation est amenée à empire encore. Le protocole de Kyoto et son commerce de carbone n’a été qu’une lamentable farce qui n’a pas eu le moindre effet pour s’en prendre aux causes du changement climatique. A peine 23 pays riches (14% de la population mondiale) ont produit 60% des émissions de carbone depuis 1850. Aujourd’hui, ces mêmes pays produisent 40% des émissions, émissions qui ont d’ailleurs augmenté depuis que le Protocole de Kyoto a été signé.

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    KYOTO

    Le protocole de Kyoto a été ouvert à la ratification en 1998 et est entré en vigueur en 2005.

    Il comporte des engagements absolus de réduction des émissions pour 38 pays industrialisés (à l’exception des Etats-Unis et de l’Australie, qui ne sont pas signataires), avec l’objectif d’une réduction globale de 5,2 % des émissions de dioxyde de carbone (responsable à 65% du changement climatique) d’ici 2012 par rapport aux émissions de 1990. Mais, pour limiter à un niveau "raisonnable" le changement climatique (inférieur à 2°C), il faudrait diviser par deux les émissions mondiales ! En réduisant les émissions de 70%, il faudrait même encore 100 ans pour que les effets du réchauffement aient disparu.

    De plus, chaque pays s’est vu octroyer un certain nombre de droits d’émissions contournables, puisqu’il est possible à un pays moins émetteur de revendre sa norme excédentaire à des pays plus pollueurs…

    Greenpeace avait dénoncé le bien maigre résultat de la conférence de Marrakech (2001) qui avait véritablement traduit juridiquement le protocole de Kyoto en termes juridiques. Quant à Olivier Deleuze (ECOLO), qui menait la délégation européenne, il a alors déclaré qu’il préférait "un accord imparfait mais vivant à un accord parfait qui n’existe pas". Sans commentaire…

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    L’économiste britannique Nicholas Stern (l’auteur du fameux rapport Stern) a déclaré «le changement climatique est le plus grand échec de la part du marché que le monde ait jamais connu». Le changement climatique s’est précisément produit en raison de l’existence du système de l’économie de marché capitaliste, et il continuera à menacer l’existence de la vie sur terre tant que nous permettons à ce système de marché anarchique de continuer à sévir.

    La décennie de 1998 – 2007 a été la plus chaude. Les 11 années les plus chaudes se sont d’ailleurs toutes produites ces 13 dernières années. Afin d’éviter une élévation catastrophique de 6° pour la fin de ce siècle, les émissions de gaz à effet de serre doivent absolument diminuer à partir de 2015 être réduite de 80% d’ici 2050. Ces changements cruciaux ne seront jamais acceptés par les multinationales ou par les principaux gouvernements capitalistes. Selon eux, seuls les bénéfices priment, aux dépens même de la vie sur terre.

    A travers l’Europe, les partis Verts ont toujours mis les intérêts du marché et des riches en avant lorsqu’ils ont participé aux gouvernements de coalition. Ces gouvernements n’ont produits que des «politiques vertes» minimales et purement symboliques. En Irlande le Parti Vert justifie sa participation à ce gouvernement tellement détesté en se référant aux politiques vertes mises en application. Pourtant, aucune politique environnementale de quelle importance que ce soit n’a été mise en application par ce gouvernement. Pire même, au lieu de cela, ce gouvernement a opéré des coupes budgétaires dans les services de transport en commun, renforçant ainsi l’utilisation des voitures! Ce que nous avons besoin est à l’opposé de cela : plus d’investissement pour développer un système moderne de transport en commun qui améliorera la qualité de vie et bénéficiera à l’environnement.

    Si nous n’en finissons pas avec la dictature du marché, avec la dictature du capitalisme, les conséquences pour l’humanité pour les 40 années à venir seront cauchemardesques. Au moins 250 millions de personnes seront forcées d’émigrer – ce qui sous un système tel que le capitalisme conduira à des guerres et à des conflits ethniques et racistes. D’ici 2020, jusqu’à 250 millions d’Africains et 80 millions de personnes en Amérique Latine devront faire face à des pénuries d’eau. Cinquante millions de personnes auront à faire face à la famine en Asie d’ici 2025 et le rendement des récoltes peut tomber de 50% en Afrique. Un tiers de toutes les espèces vivantes sont menacées d’extinction d’ici 2050.

    Le Global Humanitarian Forum parle d’une augmentation de la température mondiale de 2° d’ici2100. Durant la période du pliocène, quand le monde était plus chaud de 2° à 3°, le niveau des mers était supérieur de 25 mètres – cela pousserait un milliard de personnes à quitter leurs maisons et leurs villes!

    La seule manière de lutter effectivement et efficacement pour ralentir le changement climatique et amoindrir son impact sur la planète diminuée est de sortir du système capitaliste. Dans un monde réellement socialiste, basé sur une planification démocratique de la production, cette dernière servirait aux besoins de la majorité et pourrait être orientée de façon à assurer que les dommages causés à l’environnement soient choses du passé.

    En une seule journée, la lumière du soleil qui atteint la terre fournit assez d’énergie pour répondre aux besoins du monde pour huit ans. Le vent, les vagues et les technologies solaires et géothermiques peuvent fournir six fois plus de puissance que ce qui en est tiré actuellement. Les gigantesques ressources mondiales, les centaines de milliards qui sont gaspillés en armement – les dizaines de milliers de scientifiques et d’ingénieurs qui gaspillent leurs talents en développant des armes de destruction massive – tout cela pourrait à la place être utilisé pour que ces talents et qualifications produisent et développent des sources d’énergie renouvelables et stopper notre dépendance envers les combustibles fossiles.

    Le capitalisme détruit notre planète. Seule une économie planifiée socialiste et démocratique peut le sauver.


  • Résultats du Parti Socialiste de Lutte

    C’était la première fois que le Parti socialiste de lutte / Linkse Socialistische Partij participait à cette échelle aux élections. Il s’agissait très certainement d’un défi énorme au vu de nos moyens financiers restreints et de l’attention médiatique minimale qui nous a été accordée, plus particulièrement en Flandre. Notre campagne était surtout basée sur le contenu, sur la popularisation de revendications comme celle des nationalisations sous le contrôle des travailleurs, pour sauver l’emploi, ou encore pour diffuser largement l’idée de la construction d’un nouveau parti des travailleurs. En ce sens, nous ne nous attendions pas à un résultat spectaculaire. Cette campagne a cependant été réussie dans la mesure où nous avons pu renforcer le PSL/LSP. Cela ne signifie cependant pas que nous allons regarder les résultats des votes sans intérêt.

    Nous avons obtenus – sans encore connaître l’intégralité des résultats – 7.954 voix pour le parlement européen avec la liste commune LCR-PSL (0,32%). En 2004, à l’époque où le PSL s’appelait encore le Mouvement pour une Alternative Socialiste (MAS), nous avions obtenus 5.675 voix (0,23%). Pour le collège électoral néerlandophone, nous avons obtenu 9.000 voix (0,24%). Nous avons également eu 10.038 voix pour le parlement flamand (0,24%). Pour les régionales, la liste unitaire bruxelloise PC-PSL-LCR-PH a obtenu 2.042 voix (0,5%).

    Du côté francophone, pour les européennes, le PTB a obtenu 1,16%, le PC 0,31% et CAP-D’Orazio 0,31%. La division a joué un rôle dans ces résultats, mais il existait heureusement une liste unitaire, celle qui a rassemblé la LCR et le PSL. D’autre part, auprès d’une certaine couche, le PTB a pu être vu comme une forme d’alternative, dans les deux collèges linguistiques. Une partie des électeurs a hésité, pour voter en définitive le PTB. Du côté néerlandophone, nous avons reçu moins de suffrages que lors des élections européennes précédentes. Là aussi, la question du PTB a joué, et il existait encore une liste CAP. Le PTB y a récolté 1%, mieux qu’en 2004.

    Un aperçu de nos résultats:

      Élections Européennes:

    • Collège électoral francophone: LCR-PSL. 7.954 voix
    • Collège électoral néerlandophone: LSP. 8.985 voix

      Élections Régionales:

    • Bruxelles: (PC-PSL-LCR-PH): 2.042 voix | 0,5%
    • Liège (PSL): 792 voix | 0,24%
    • Mons (PSL): 411 voix | 0,29%
    • Nivelles (PSL): 305 voix | 0,14%
    • Flandre-Orientale: (LSP): 2.665 voix | 0,28%
    • Flandre-Occidentale (LSP): 2.023 voix | 0,26%
    • Anvers (LSP): 2.735 voix | 0,25%
    • Brabant Flamand (LSP): 1.592 voix | 0,24%
    • Limbourg (LSP): 1.023 voix | 0,19%

    Il est encore trop tôt pour faire un état des lieux des résultats de la gauche au niveau européen. En France, le NPA a obtenu 4,8% sur le plan national. En Irlande, notre camarade Joe Higgins, du Socialist Party, a obtenu un siège au parlement européen.

    Une analyse des résultats dans notre pays et sur le plan européen arrivera dans les prochains jours sur ce site.

  • L’histoire du Comité pour une Internationale Ouvrière

    Le capitalisme est un système mondial et il doit être combattu à la même échelle. C’est pourquoi le Parti Socialiste de Lutte fait partie d’une organisation marxiste internationale: le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO), un parti mondial actif sur tous les continents. Notre lutte en Belgique s’inscrit dans le cadre d’une lutte des travailleurs du monde entier pour un société socialiste car si la révolution socialiste éclate sur le plan national, elle se termine sur l’arène internationale. La démocratie ouvrière et la planification socialiste de la production ne peuvent se limiter à un seul pays. C’est d’ailleurs l’isolement de la Russie soviétique qui a conduit à sa dégénérescence à partir de 1924.

    Le CIO est une organisation socialiste internationale qui comprend des sections dans environ quarante pays sur tous les continents.

    Lors du Congrès de fondation du CIO en avril 1974, quatre sections existaient alors (Grande-Bretagne, Allemagne, Irlande et Suède) et des membres étaient présents de Belgique, d’Inde, d’Espagne et du Sri Lanka, des pays où aucune section n’existait encore.

    Au moment de notre neuvième Congrès Mondial (en janvier 2007), des représentants de sections du CIO de tous les continents étaient là : d’Allemagne, d’Angleterre et Pays de Galles, d’Australie, d’Autriche, de Belgique, du Brésil, du Cachemire, du Chili, de Chypre, d’Ecosse, des Etats-Unis, de France, de Grèce, d’Inde, d’Irlande, d’Israël, d’Italie, du Kazakstan, de Malaisie, du Pakistan, des Pays-Bas, de Pologne, du Portugal, de Russie, du Sri Lanka, de Suède, de Tchéquie, d’Ukraine et du Venezuela.

    Les origines du CIO sont ancrées dans la lutte menée par Léon Trotsky contre la progression du Stalinisme. L’isolement de l’Union soviétique combinée à l’arriération du pays héritée du tsarisme a permis l’émergence du régime totalitaire stalinien. La lutte de Trotsky et de ses partisans contre ce régime a conduit à la fondation de la Quatrième Internationale, organisation internationale créée pour la défense de la démocratie ouvrière et du socialisme. Peu de temps après la fondation de la Quatrième Internationale a éclaté la seconde guerre mondiale et de nombreux militants, dont Trotsky lui-même, ont été assassinés tant par les fascistes que par les staliniens.

    La dégénérescence de la Quatrième Internationale

    Après la guerre, les dirigeants de la Quatrième Internationale survivants ont été confrontés à d’énormes difficultés dans la compréhension des changements qui étaient survenus dans la situation mondiale. Ils n’ont pas réussi à saisir le caractère de la croissance économique d’après-guerre en Occident, ni à comprendre les raisons du renforcement du stalinisme en Russie et en Europe de l’Est. Cette incompréhension s’est également vue dans l’analyse des révolutions du monde néo-colonial ainsi que dans l’analyse du rôle décisif de la classe ouvrière dans le changement de société.

    En effet, la longue croissance économique exceptionnelle de l’après-guerre amena de substantielles améliorations dans le niveau de vie de la classe ouvrière, tout au moins dans les pays capitalistes développés. Beaucoup de ‘marxistes’ en tirèrent un peu vite la conclusion que les travailleurs salariés s’étaient ‘embourgeoisés’, et ne pouvaient dès lors plus constituer le moteur d’un changement socialiste de société. Ce fatalisme les poussa vers la recherche de nouvelles forces sociales pouvant se substituer au mouvement ouvrier.

    Sous l’impulsion des mouvements de libération nationale qui explosèrent dans le monde colonial et semi-colonial (Asie, Afrique, Amérique Latine) dans les années’50 et ’60, les dirigeants de la Quatrième Internationale glissèrent vers un soutien acritique à la direction – souvent fortement influencée par le stalinisme – de ces mouvements. Les mouvements à prédominance paysanne et les méthodes de guérilla furent ainsi érigés en modèles, tandis que l’épicentre de la révolution mondiale fut déplacé vers le monde colonial et semi-colonial. Mao Zedong (en Chine), Fidel Castro (à Cuba) ou Hô Chi Minh (au Vietnam) furent ainsi présentés comme des «trotskistes inconscients», pendant que le réveil de la classe ouvrière en Europe, exprimé à merveille par l’immense grève générale des travailleurs français en mai’68, prit de court les dirigeants de la Quatrième Internationale, aveuglés par des perspectives erronées.

    Une série d’erreurs politiques de ce type eurent comme conséquence l’effondrement de l’organisation et un fractionnement de celle-ci dans des dizaines de groupes différents.

    Le Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO) puise quant à lui ses racines chez des troskistes britanniques qui n’ont pas ignoré la nouvelle situation, mais n’ont pas cherché à l’exploiter de façon opportuniste pour obtenir des succès faciles ou chercher des raccourcis. Nous ne nous sommes pas non plus limités à l’analyse de la situation, mais avons cherché sans cesse à intervenir autant que possible dans les luttes pour diffuser les idées du marxisme parmi les travailleurs et la jeunesse.

    Notre organisation a pendant longtemps été très petite et uniquement active en Grande-Bretagne ; pour autant, nous avons toujours conservé et exprimé sur le terrain une attitude internationaliste intransigeante. Dès ses débuts, notre journal anglais «The Militant» consacrait un nombre significatif de ses colonnes à la couverture des luttes au niveau international. Nous avons ainsi gagné davantage de militants, établi des contacts successifs dans d’autres pays, et à la fin des années ‘60, la possibilité de mettre en place les fondations qui ont été à la base de la création et de la croissance ultérieure du Comité pour une Internationale Ouvrière.

    L’entrisme

    Pour construire ses forces, le CIO a appliqué différentes tactiques à différents stades de son évolution, en fonction des conditions objectives du moment, tout en maintenant à tout moment une orientation consciente vers le mouvement ouvrier, en particulier vers ses couches les plus combatives.

    Avant que la vague néo-libérale des années ’80, puis le tournant majeur représenté par la chute du stalinisme dans les années ’90, ne viennent affecter durablement la composition et le programme des partis sociaux-démocrates, ces derniers exerçaient encore une grande attraction sur un nombre important de travailleurs et de jeunes. Les partis sociaux-démocrates correspondaient typiquement à la définition que donnait Lénine de «partis ouvriers bourgeois» : des partis ouvriers de masse, bien que dominés par une direction réformiste et bureaucratique. A la base, les rangs de la social-démocratie comprenaient encore beaucoup de travailleurs activement engagés pour le parti, et étaient encore traversés de vifs débats politiques. Celui qui voulait être actif dans le mouvement ouvrier pouvait difficilement passer à côté de cette réalité.

    La tâche des révolutionnaires demande d’être en contact le plus étroit possible avec les travailleurs. Par conséquent, les militants du CIO étaient d’avis qu’il était préférable de militer à l’intérieur même de la social-démocratie, en défendant conséquemment et ouvertement un programme marxiste, plutôt que de s’isoler en dehors de ces partis. A l’inverse d’autres groupes, cette tactique d’«entrisme» dans la social-démocratie n’a jamais été pour nous une panacée, ou un prétexte pour succomber aux idées réformistes et masquer le programme révolutionnaire. Bien au contraire, nous avons toujours mené notre travail drapeau déployé, défendant nos positions marxistes dans le but de combattre l’influence exercée par la direction bureaucratique sur ces partis d’une part, afin de gagner les travailleurs et les jeunes organisés dans ces partis à nos positions d’autre part. C’est ainsi que nous avons par exemple acquis une solide base de soutien au sein des Jeunesses Socialistes du Labour Party en Angleterre dans les années ‘70, ou de celle du SP en Flandre dans les années ‘80.

    Pourtant, dès le milieu des années ’80, mais surtout après la chute du mur de Berlin, la situation a commencé à tourner. La chute des régimes staliniens a ouvert la voie à une offensive idéologique majeure de la part des représentants du capitalisme, et a servi d’excuse aux dirigeants des organisations de la social-démocratie pour retourner définitivement leurs vestes. Les idées de lutte, de solidarité et de socialisme furent mises de côté au profit d’une adhésion aux principes du libre-marché. La trahison des directions ouvrières traditionnelles a laissé place à un vide et à la confusion politique.

    Dans ces conditions, l’idée selon laquelle les travailleurs et les jeunes en lutte se dirigeraient en premier lieu vers la social-démocratie devenait de plus en plus invraisemblable. C’est pourquoi petit à petit, la plupart des sections du CIO ont opté pour la création d’organisations révolutionnaires indépendantes et ouvertes, tout en appelant, dès le début des années ’90, à la formation de nouveaux partis larges des travailleurs, sur base de l’analyse de cette bourgeoisification des anciens partis ouvriers.

    Liverpool et la lutte contre la Poll Tax

    Un élément important dans le développement de quasiment toutes nos sections est notre engagement dans les différentes formes de lutte. Notre rôle n’a d’ailleurs pas seulement été limité à une participation active aux luttes car dans beaucoup de cas, notre organisation a su jouer un rôle crucial.

    Les mouvements de lutte les plus importants que nous avons eu à diriger jusqu’à présent se sont déroulés en Grande-Bretagne, notamment contre Margaret Thatcher lorsqu’elle était Premier ministre. Au milieu des années ‘80, nos camarades (dont l’organisation s’appelait à ce moment-là Militant) ont dirigé la lutte de la commune de Liverpool contre les plans d’assainissement, une lutte accompagnée d’actions de grève et de manifestations massives. Plus tard, nous avons aussi été fortement impliqués dans la campagne contre la Poll Tax (un impôt introduit par Thatcher mais rejeté en masse par la population). Une campagne massive de désobéissance civile avait été organisée à tel point que 18 millions de personnes n’ont pas payé la Poll Tax. Les manifestations ont rassemblé jusqu’à 250.000 personnes. Grace à cela Thatcher a été contrainte de retirer cette taxe et même de prendre la porte.

    Cette lutte avait été organisée en opposition à la direction du Labour Party (le parti travailliste) et à la plupart des dirigeants syndicaux. A Liverpool, ils ont même appelé les Conservateurs en soutien pour combattre la protestation. Avec la Poll Tax, ils n’ont pas réussi à en faire autant. Notre lutte contre les dirigeants pro-capitalistes du mouvement ouvrier a toujours été une donnée importante dans le développement de notre organisation.

    Mais ce genre de lutte est bien plus difficile dans beaucoup de pays tels que la Grèce, l’Espagne, l’Afrique du Sud et la Suède. La direction des organisations ouvrières établies avait peur d’une répétition du succès rencontré en Grande Bretagne où, durant plus de 15 ans, nous avons pu diriger les sections jeunes du parti travailliste et où, dans les années ’80, nous avons pu faire élire trois camarades au parlement sous le slogan : «un parlementaire ouvrier à un salaire d’ouvrier».

    Le Comité pour une Internationale Ouvrière a toujours été impliqué dans différents domaines des luttes. Parfois, nous avons même été les précurseurs autour de nouveaux thèmes, comme pour une campagne contre la violence domestique. D’autres initiatives ont également été très importantes, comme la fondation de «Youth against Racism in Europe» («Jeunes contre le racisme en Europe», en Belgique : «Blobuster» et «Résistance Internationale»), une organisation anti-fasciste internationale qui avait organisé une manifestation européenne à Bruxelles en octobre 1992 à laquelle 40.000 manifestants avaient participé.

    À côté de nos campagnes sur les lieux de travail et dans les quartiers, les membres du CIO participent aussi aux élections. Dans se cadre là, nous insistons sur le fait que les élus du CIO participent activement aux mouvements de lutte et gagnent un salaire identique à celui des travailleurs qui les ont élus. En ce moment, différents membres du CIO sont élus dans des conseils communaux en Grande Bretagne, en Irlande, en Suède et en Allemagne. Jusqu’il y a peu, nous avons également eu un député au parlement irlandais, Joe Higgins.

    Lutter contre les dictatures et la division de la classe ouvrière

    Dans d’autres pays, nous avons activement contribué à la lutte contre les dictatures, comme lorsque nous nous sommes impliqués pour la construction de syndicats combatifs en Afrique du Sud à l’époque du régime de l’apartheid. D’autres camarades ont clandestinement milité au Chili contre le régime de Pinochet. Au Nigéria, après l’annulation des élections présidentielles de 1993 par les généraux, l’opposition démocratique a soutenu l’appel de nos camarades pour une grève générale.

    Dans certains pays, nous avons été confrontés à des situations extrêmement difficiles. Ainsi nos camarades d’Irlande du Nord et du Sri Lanka ont dû s’opposer à la division nationale ou religieuse. Nous avons toujours défendu la nécessité de l’unité des travailleurs dans les luttes et la résistance contre la répression d’Etat. Nous avons été les seuls dans la gauche à défendre une position constante et principielle à propos de la question nationale en partant des intérêts de la classe ouvrière dans son ensemble.

    La chute de l’Union Soviétique a conduit à une situation mondiale fondamentalement différente et a eu d’énormes répercussions sur toutes les organisations politiques. Face à ces évènements, bon nombre d’organisations et d’individus ont été désorientés, confus, et ont abandonné la lutte pour le socialisme en capitulant face à l’idéologie de la classe dominante. Le CIO a analysé et tenté de comprendre la signification de la chute du bloc de l’Est : entre autres le renforcement de la position de l’impérialisme américain et le virage à droite de nombreuses organisations ouvrières. Mais nous avons toujours défendu la nécessité du socialisme comme seule alternative au capitalisme et avons toujours cherché à l’expliquer le plus largement possible.

    Le CIO a utilisé la méthode d’analyse marxiste pour approfondir la compréhension des événements et des processus qui se sont développés depuis les années ‘90. Contrairement à beaucoup d’autres groupes de gauche, nous avons ainsi non seulement pu conserver nos membres au cours des très dures années ’90, mais nous avons en outre beaucoup renforcé nos organisations ainsi que gagné de nouvelles forces dans différentes régions du monde. La nouvelle période qui se trouve face à nous aujourd’hui va nous permettre de mettre bien plus en avant le précieux héritage que nous avons préservé dans ces années bien difficiles.

    Rejoignez le CIO !

    Mais la construction de nos propres forces ne nous a pas empêché d’avoir des discussions avec d’autres groupes pour, si possible, mener des actions en commun. Si ces discussions conduisent à un accord politique sur les principes fondamentaux, une organisation commune peut alors naître, comme cela s’est passé notamment en Belgique ou en France au cours des années ‘90.

    Le CIO est ouvert à toute personne qui veut lutter pour un monde meilleur, un monde socialiste, et qui est ouverte à discuter de nos idées. Nous avons toujours été préparés à discuter avec différents groupes et individus qui ont acquis une autre expérience que la nôtre dans les différentes luttes et qui veulent construire un mouvement socialiste.

    Alors si vous êtes intéressés par les idées du CIO, n’hésitez pas à nous contacter et à nous rejoindre!


  • La crise économique mondiale et les perspectives politiques pour l’Europe

    Commentaires et analyses du CIO

    Le texte ci-dessous est une proposition de thèse qui a été présentée à la réunion du Bureau Européen du CIO (Committee for a Workers’ International – Comité pour une Internationale ouvrière, l’internationale dont fait partie le PSL) qui s’est tenu dans la semaine du 27 mars.

    socialistworld.net

    Cela fait trente ans, mais bien plus encore depuis la chute du stalinisme en 1989, que le capitalisme néolibéral – dont le crédo a été résumé dans le «Consensus de Washignton» – s’est imposé comme idéologie pour l’ensemble du capitalisme mondial. De fait, les capitalistes et leurs idéologues, de même que la majorité des dirigeants syndicaux et «socialistes», se sont rangés à l’idée que le capitalisme débirdé était le meilleur système, le plus efficace possible pour la distribution des biens et des services à tous les peuples du monde. Toutefois, la dévastation causée par la crise économique en cours a complètement mis en pièces cet édifice idéologique qui paraissait pourtant si puissant. Les économistes et politiciens capitalistes se disputent pour savoir si leur système est soit déjà, soit au bord d’une «dépression» ou, à tout le moins, d’une «grande récession» (selon Dominique Strauss-Kahn, dirigeant du Fonds Monétaire International).

    Vitesse et ampleur de la crise

    Cette crise n’a pas encore révélé toute son ampleur, mais a déjà amené une destruction sans précédent de richesses et de ressources partout dans le monde.Selon le commentateur capitaliste britannique Hamish McRae, qui est l’éditorialiste économique du journal «The Independent» de Londres, le montant de tout ce qui a été détruit depuis le début de cette crise équivaut à un tiers du Produit Intérieur Brut (PIB) mondial. Il prévoit aussi qu’il faudra dix ans pour rebâtir tout ce qui a déjà été ainsi démoli.

    La Banque pour le Développement Asiatique (BDA) a été encore plus loin, faisant remarquer que «L’effondrement de la valeur des actifs mondiaux peut avoir atteint 50.000 milliards de dollars, ce qui équivaut à la valeur d’un an de production mondiale». Ceci est encore probablement une sous-estimation des dégâts infligés par la crise, puisqu’il semble que l’on n’y a pas pris en compte les dégâts infligés à l’économie «réelle». La Banque Mondiale a aussi déclaré que «avec le tarissement des sources de capitaux, les pays en développement sont confrontés à un trou financier de 270 à 700 milliards de dollars par an. Seul un quart des pays vulnérables ont été capables d’amortir l’impact de la récession mondiale.»

    La BDA estime les pertes totales en capital pour l’Asie, hors Japon, à 9625 milliards de dollars, soit 109% du PIB de la zone, alors que sur le plan mondial la moyenne de ces pertes équivaut à 80-85% du PIB. Pour l’Amérique Latine, l’estimation des pertes pour 2008 est de 2.119 milliards de dollars, soit 57% du PIB du continent. Le célèbre gourou capitaliste Schumpeter a un jour caractérisé le capitalisme selon les termes de «destruction créative». Il y a effectivement eu beaucoup de «destruction», comme le montrent les chiffres précédents, mais jusqu’ici très peu de «créativité» à l’horizon en ce qui concerne les masses des travailleurs et des pauvres à travers toute la planète. Et en plus de tout ça, l’Organisation Internationale du Travail a estimé à entre 30 et 50 millions pour l’année qui vient le nombre de travailleurs qui vont perdre leur emploi ou être plongés dans le tourbillon morose du «sous-emploi». De plus, le chiffre avancé en ce qui concerne l’augmentation du nombre de pauvres due à la crise est de 90 millions. Il ne faut donc guère s’étonner lorsque Martin Wolf du Financial Times écrit que le coût de la crise jusqu’à aujourd’hui est équivalent à celui d’une «guerre».

    Ces chiffres illustrent le caractère épique de la crise, qui a poussé la bourgeoisie et ses porte-paroles dans la panique la plus complète. Leur humeur est presque à la semi-démoralisation. C’est ce qu’on a vu dans une série d’articles du Financial Times, qui a de plus en plus pris sur lui un caractère de «bulletin international» pour le capitalisme mondial, plutôt que britannique.

    Ces articles définissaient des perspectives, aussi loin qu’ils en étaient capables, pour la bourgeoisie mondiale dans la période à venir. Leurs conclusions ? «Non seulement le système financier est infesté par des pertes d’une ampleur que nul n’avait prévu, mais les piliers de la foi sur lesquels reposait le nouveau capitalisme financier se sont maintenant quasi effondrés. A cause de cela, tout le monde, des Ministres des Finances aux responsable des Banques Centrales aux petits investisseurs ou pensionnés se retrouve sans aucun repère intellectuel, abasourdis et confus.»

    Le dirigeant de Meryll Lynch à Moscou a été encore plus loin : «Notre monde est brisé – et honnêtement, je ne sais pas ce qui va le remplacer. La boussole qui nous montrait la voie en tant qu’Américains a disparu… La dernière fois que j’ai vu quoi que ce soit qui ressemble à la situation actuelle, en terme de désorientation et de perte de repères, c’était parmi mes amis en Russie lorsque l’Union Soviétique s’est effondrée.» L’effondrement de la Russie, la contre-révolution sociale qui a suivi 1989, fut la plus grande contradiction des forces productives en un pays de toute l’Histoire, surpassant même la crise de 1929 à 1933 aux Etats-Unis.

    Les stratèges du capital sont si désorientés qu’ils ont même été cherché un peu de consolation dans les oeuvres de Marx, et même parmi les écrits de «Lénine le maudit». La phrase de ce dernier, comme quoi le capitalisme pouvait toujours trouver une issue, fut citée d’un ton approbateur dans le Financial Times par un idéologue du capitalisme! Ce commentateur avait oublié d’ajouter que Lénine avait précisé que cette renaissance du capitalisme ne pouvait s’effectuer qu’au prix d’une souffrance immense pour la classe ouvrière, ne pouvait s’édifier que «sur les cadavres» de la classe ouvrière et de ses organisations, comme l’écrivit Trotsky.

    Il ne fait aucun doute que si la classe ouvrière ne cherche pas une porte de sortie vers la révolution socialiste, le capitalisme pourra toujours se réétablir, bien que sur base d’un équilibre instable. Mais comme Trotsky l’a fait remarquer au début des années 30, la situation objective – en termes d’ampleur et de vitesse de la crise – à travers le monde entier peut déjà être qualifiée, «avec un certain degré de justification», de prérévolutionnaire. Ceci est correct à condition de la définir comme étant une période recouvrant plusieurs années de «flux et reflux partiels» qui peuvent se dérouler entre une situation prérévolutionnaire et une situation directement révolutionnaire.

    En d’autres termes, comme le CIO l’a toujours défendu, cette crise va avoir un caractère étendu ; ce n’est pas juste une crise, mais une série de crises. Elle a déjà introduit une instabilité extrême des devises, un empilement massif de dettes d’Etat – un «vol générationnel», comme l’a décrit le candidat présidentiel républicain McCain – et d’énormes problèmes pour le capitalisme, qui ne pourront en dernier recours se résoudre que par une attaque directe sur le niveau de vie de la classe ouvrière.

    Toutefois, la période précédente du capitalisme néolibéral, qui s’est développée pendant trois décennies, détermine encore en premier lieu les processus à l’oeuvre non seulement sur les plans économiques et politiques, mais également dans la conscience de la classe ouvrière. Tout ce qui garantissait le succès du capitalisme se transforme maintenant en son contraire. La mondialisation a inauguré une période de «démondialisation».

    L’expansion massive du commerce mondial, avec la baisse des barrières douanières, et un certain degré de dépassement de l’Etat-nation lui-même a alimenté la croissance. Mais maintenant, avec une nouvelle donne économique, ceci s’est transformé en protectionnisme et en un effondrement incroyable du commerce mondial, sur base de la contraction de l’économie mondiale, estimée ou sous-estimé par le FMI à entre -0,5 er -2% cette année. Cet élément signifie à lui seul que cette crise est pire que tout ce que l’on a connu depuis les années 30. Ce n’est qu’après le contrecoup de la crise de 1973-75 que l’on a été capable de percevoir que cette crise-ci ne provenait pas d’une réelle chute de la production mondiale, mais d’un fort ralentissement du taux de croissance.

    Malgré toutes les plaidoieries du FMI et les engagements qui ont été pris lors du dernier sommet du G20 ou qui le seront pieusement lors du sommet d’avril de cette année, le protectionnisme est inévitable. Les dirigeants capitalistes « parlent global, mais pensent national », selon le commentaire d’un « expert » économique à propos du sommet du G20 à venir. Cette montée du protectionnisme pourrait ne pas être de la même impotance que le Décret Smooth-Hawley qui augmenta les tarifs douaniers aux Etats-Unis pour 20.000 objets, mais elle est déjà considérable. La Grande-Bretagne ouvrant le bal, tous les gouvernements européens se sont battus pour savoir qui ferait le plus gros plan de renflouement de ses propres banques, le plus gros plan de subsides aux secteurs de l’industrie en difficulté, comme l’industrie automobile. Ceci a déjà eu un effet catastrophique sur les pays les plus dépendants du commerce mondial – tels que le Japon, l’Allemagne, la Chine et les pays industrialisés d’Asie.

    Les plans de relance peuvent-ils fonctionner?

    Combien de temps cette crise pourra-t-elle durer, et le régime Obama pourra-t-il voler à la rescousse du capitalisme mondial grâce à ses plans de relance? Le capitalisme mondial et les plus sérieux de ses représentants, lorsqu’on parle de perspectives, avouent leur confusion, leur incertitude et leur manque de vision quant à ce qui pourrait se produire sur le front économique. Par conséquent, les éléments les plus conscients du mouvement ouvrier, les marxistes, ne peuvent donner de réponses définitives. La valeur des plans de relance des divers gouvernements capitalistes dans le monde a été estimée à 2% du PIB mondial. En Europe, pour l’instant, la valeur de ces plans équivaut à 0,85% du PIB européen, avec une réserve de 2,1% du PIB encore disponible sous forme de crédits étendus et autres garanties. Aux Etats-Unis, le plan de relance voté par le Congrès est d’une valeur de 787 milliards de dollars (5,6% du PIB américain), et le renflouement des hypothèques et les garanties prises pour Fannie Mae et Freddie Mac totalisent un surplus de 275 milliards de dollars. Toutes ces mesures contribueront à un déficit budgétaire estimé à 1,75 trillions de dollars (1.750 milliards de dollars), soit 12,3% du PIB américain ! Au Royaume-Uni, qui a opéré un des plus grands plans de relance – à part celui de la Chine – en termes de pourcentage comparé au PIB du pays, pour une valeur de 5% de son PIB – le dernier «plan d’allègement» de la Bank of England – , s’élèvera à 150 milliards de dollars. Ceci est un signe du désespoir du capitalisme, de leurs idéologues et de leurs partis, qui tentent tant bien que mal d’éviter ou d’amortir les effets du crash.

    Le système financier – et en premier lieu les banques – est ruiné partout sur tout le système capitaliste mondial. Il ne fait aucun doute que la première et plus visible expression de cet état a été de critiquer le «modèle anglo-saxon» du capitalisme, surtout aux USA et au Royaume-Uni. C’est dans ces pays que le processus de «financialisation» a été poussé à son paroxysme, et c’est dans ces pays que les conséquences les plus catastrophiques se font maintenant sentir. Les banques en Grande-Bretagne et aux Etats-Unis – si pas dans le reste du monde – sont aujourd’hui techniquement insolvables. Elles ne sont en fait rien de plus que des «banques zombies». Ceci malgré le fait que, dans la plupart du secteur bancaire britannique, le contrôle majoritaire est exercé par l’Etat, tout comme c’est aussi en réalité le cas aux Etats-Unis. Et pourtant, Brown comme Obama résistent tous les deux à l’idée de mettre un terme à la «zombification» des banques, comme l’a appelé Paul Krugman, un économiste capitaliste keynésien. Et cela pour les raisons que nous avons esquissées ci-dessus. Une nationalisation complète représenterait une confession ouverte de la faillite de «l’entreprise privée». Mais pourtant, même les valets les plus droitiers du système, tels que James Baker, Secrétaire du Trésor sous George Bush père, et l’ex-gourou économique Alan Greenspan, se déclarent maintenant en faveur dune «nationalisation temporaire». Même les keynésiens considèrent la nationalisation comme une «mesure à court terme», c.-à-d. regrettable mais inévitable, nécessaire afin de renflouer le système, un peu comme le gouvernement suédois l’avait fait, à une bien plus petite échelle, au début des années ‘90. Ils sont tellement acharnés à convaincre le régime Obama adopter ces mesures, que des keynésiens comme Krugman ont décidé d’abandonner le terme de «nationalisation» pour employer celui de «préprivatisation», c’est-à-dire d’abord une prise en charge par l’Etat, avant de le remettre de nouveau entre les mains des mêmes criminels financiers qui avaient ruiné ces entreprises. Malgré toutes leurs hésitations, au fur et à mesure que la crise s’amplifie – avec 600.000 chômeurs par mois en plus pendant les trois derniers mois aux Etats-Unis, les pires chiffres depuis 1945 – la pression pour une prise en charge du système financier par l’Etat pourrait devenir irrésistible pour les capitalistes. En même temps, nous devons mettre l’accent sur la nécessité d’un contrôle et d’une gestion démocratiques et socialistes de ces étatisations, comme nous l’avons expliqué dans notre article sur le programme transitoire paru dans la revue Socialism Today et sur le site international du Comité pour une Internationale Ouvrière, le CIO (www.socialistworld.net).

    Les mesures d’Obama – de Brown et des autres gouvernements capitalistes – parviendront-elles à atteindre leur but, c’est-à-dire avant toutes choses amortir la chute du capitalisme mondial, afin de recréer la base pour un renouveau économique? La mise en oeuvre de la pompe étatique a été conçue afin d’éviter un piège déflatoire, ce que Keynes décrivait comme étant le «paradoxe de l’économie». Les taux d’intérêt sont proches de ou valent zéro, ce qui fait que les banques sont peu enclines à prêter, que les emprunteurs ne peuvent plus emprunter, et que les déposants sont peu enclins à déposer. Le problème du capitalisme en crise n’est pas tellement la question du crédit – bien qu’il y ait effectivement une «grève du crédit» opérée par les banques – mais un manque de « demande », comme l’ont fait remarquer de nombreux économistes pro-capitalistes. Qu’est-ce donc que cela, sinon une manifestation du phénomène de «surproduction» – ce qui était, comme Marx l’a bien expliqué, une absurdité lors des ères précapitalistes. Les classes dirigeantes d’Europe, d’Allemagne et du Japon ont tout d’abord attaqué le «modèle anglo-saxon» de financialisation, qui était selon eux responsable de la crise – se croyant eux-mêmes à l’abri de la récession. Mais en réalité, la crise de surproduction que nous connaissons actuellement était inévitable, avec ou sans crise financière. La combinaison mortelle de crise financière et de crise de «l’économie réelle» n’a servi qu’à renforcer, prolonger et approfondir la crise organique du capitalisme. Il est improbable que les mesures des gouvernements capitalistes entreprises afin de «stimuler» l’économie parviendront à accomplir leur objectif. Il n’est pas exclu, et il est même probable, qu’Obama sera capable d’amortir quelque peu la chute de l’économie américaine ; de même que Brown au Royaume-Uni. Nous devons cependant ajouter l’avertissement que la situation actuelle est unique de part son échelle, son ampleur et sa vitesse. Les mesures employées ou proposées sont elles aussi sans précédent, même en comparaison à la situation des années ‘30. Jamais au cours de l’histoire – pas même dans les années 30 – les capitalistes n’ont cherché de manière aussi désespérée qu’aujourd’hui à faire dévier la crise.

    Conséquences pour la Chine

    Comme nous l’avions expliqué à l’avance, la Chine n’est pas capable d’agir en tant que système de survie pour le capitalisme mondial. La relation entre les Etats-Unis et la Chine sur le plan économique ont été une variante de la «Destruction Mutuelle Assurée» entre le capitalisme et le stalinisme. La recette du cocktail qui consiste à payer les exportations chinoises aux Etats-Unis au moyen d’actifs dollarisés – pour un montant équivalent à 1.600 dollars pour chaque citoyen chinois – a permis de boucher le trou dans la balance commerciale américaine, et de garantir un marché pour les produits chinois. Mais aujourd’hui toutefois, si l’on en croit le journal londonien The Independant, la Chine serait «confrontée à sa pire crise financière depuis un siècle». En même temps, le FMI annonce que la croissance de l’économie chinoise sera bien inférieure aux 8% projetés par les autorités chinoises. Des milliers d’entreprises ont fait faillite, et le taux d’investissement direct est en chute, malgré «les garanties gouvernementales quant à l’annulation des barrières limitant le flux de liquidités étrangères» (International Herald Tribune). La quantité de capital américain déployé en Chine est tombée de moitié en janvier et février. Au même moment, la Chine utilise cette crise pour investir à l’étranger, rachetant des industries, en particulier en Afrique et dans d’autres parties du monde néocolonial.

    Confronté à la perte de débouché pour ses produits aux Etats-Unis comme ailleurs, le régime s’est tourné vers le développement du marché intérne. A cette fin a été proposé un plan de stimulation d’une valeur d’au moins 580 milliards de dollars, le «plus gros plan de stimulation fiscal que le monde ait jamais vu» (The Independant). Mais ceci ne vaut que sur papier ; personne n’est très clair sur la question de savoir en quelle proportion les mesures promises sont quelque chose de neuf, ou ne consistent qu’en un recyclage de «vieil argent». Néanmoins, il y a une certaine possibilité – peut-être plus de possibilité, à cause du rôle de l’Etat – de puiser dans les réserves financières et d’introduire un relativement gros programme d’investissement dans l’ifnrastructure. Même s’il ne «sauvera» pas le capitalisme mondial, ce plan pourrait effectivement parvenir à adoucir la récession en Chine. Cette éventualité est d’autant plus probable à cause du rôle que joue le secteur étatique, qui est toujours considérable. Sa place dans l’économie est bien plus importante que celle occupée par les secteurs d’Etat d’autres pays, même asiatiques, comparables par le fait que l’Etat y exerce toujours un certain contrôle économique, tels que la Corée du Sud, etc.

    La question de la part de l’économie qui demeure entre les mains de l’Etat ou qui se trouve au contraire dans le « privé » est toujours un sujet de discussion et de débat, y compris parmi les commentateurs bourgeois. Par exemple, dans un livre incisif basé «sur des extraits de données financières récemment découvertes», Ya Shin Wang, un des premiers critiques du «miracle économique» chinois, décrit comment, lors des dix dernières années, le pays est en réalité devenu «moins capitaliste et moins libre sur le plan économique». Il explique en effet que : «Au début des années ‘80, le gouvernement étranglait dans les faits les entrepreneurs privés qui commençaient à apparaître, et qui subissaient la concurrence à la fois des entreprises macro-étatiques, et des multinationales géantes». Ce sujet est toujours sujet de controverses en nos propres rangs, mais nous sommes d’accord sur le fait que l’Etat a commencé à s’affirmer – sous la pression immédiate de la crise, à la fois interne et externe, tandis que le secteur privé reste dormant. Le gouvernement et les élites privilégiées sur lesquelles il repose tentent d’éviter une explosion de colère populaire face à la hausse du chômage, du fossé immense entre riches et pauvres, etc. avec un mélange de «cooptation», surtout parmi la classe moyenne urbaine, et de répression. De telles méthodes n’ont que peu de chances de porter leurs fruits, et surtout pas sur les long et moyen terme. Mais nous devons suivre l’évolution de l’économie chinoise ainsi que la situation sociale et politique qui s’y développe, comme l’ont fait nos camarades.

    Colère de la classe salariée

    Le plongeon de l’économie américaine est tel que même Obama est en train de perdre sa position stratopshérique de départ dans les sondages d’opinion. Quelques mois à peine après avoir obtenu le pouvoir, sa popularité est moindre que celle de George W. Bush à la même période par rapport au moment où celui-ci était arrivé au pouvoir!

    Ceci est une illustration de l’extrême volatilité qui marque cette crise. Il est devenu difficile pour les capitalistes, et donc aussi pour nous, de prévoir avec précision le déroulement probable des événements et les effets sociaux et politiques de la crise. Dans de nombreux pays, malgré sa sévérité, la crise apparaît comme faisant partie d’une «fausse guerre». Lorsque les «bombardements» vont commencer, toutefois, à travers une hausse soudaine du chômage, alors ce sera une autre affaire. Les capitalistes ont consciemment cherché à émousser la résistance de la classe salariée en recourrant aux coupes salariales et au chômage économique, plutôt qu’à la fermeture brutale des usines, bureaux et industries. Il y a aussi le fait que la conscience des travailleurs est héritée de la période précédente : nombreux sont ceux qui croient que la crise actuelle et ses conséquences ne sont qu’un «mauvais moment», et que tout reprendra son cours normal bientôt. Toutefois, la crise a déjà provoqué des réactions «réflexes» de la part de la classe salariée, en particulier là où la classe capitaliste a cherché à attaquer des acquis passés, comme en Irlande, France et Italie et, à une plus petite échelle, dans d’autres pays européens comme la Belgique. C’est la tentative de saper les allocations de santé, surtout du côté des personnes âgées, qui a provoqué des manifestations de masse en Irlande à la fin de l’année passée, et qui a été suivie par une immense manifestation en février à Dublin, et la menace d’une grève générale en mars, bien que les dirigeants syndicaux fassent de leur mieux pour faire dérailler le mouvement. Nous avons été témoins du même phénomène en France, avec une grève colossale en janvier et le 19 mars, et plus de trois millions de manifestants. Sarkozy, qui fanfaronnait encore il y a peu sur le fait que la France semblait «immunisée» aux grèves, a recommencé à parler, dans les premiers mois de cette année, du danger d’un nouveau «1968». L’occupation par les étudiants de la Sorbonne pourrait constituer un avant-goût de ce qui va suivre, tout comme la grève générale en Guadeloupe et en Martinique et ses effets au Guyane française.

    Il y a aussi une hostilité de classe amère et généralisée vis-à-vis de ceux qui sont perçus comme étant les principaux responsables de la crise actuelle : les banqueirs et les financiers. Ceci a été énormément agravé par l’incroyable arrogance des banques et de compagnies d’assurance telles que AIG, qui a été renflouée par le gouvernement américain d’un montant de 170 milliards de dollars, et a maintenu sa décision de rétribuer ses actionnaires de 175 millions de dollars ! La levée de boucliers contre AIG et les banques a poussé Obama à accepter l’idée d’une taxe de 90% sur les «bonus de rétention» pour les banques qui reçoivent une aide étatique. Ceci a à son tour poussé les banques à dénoncer une «chasse aux sorcières McCarthyte» et l’odeur des échafauds et de la révolution française ! Tout cela, est un reflet de la polarisation de classe qui a déjà commencé à se développer, et un avant-goût d’un sentiment général d’opposition au système capitaliste dans son ensemble, et non plus seulement à une partie de celui-ci, et qui va prendre corps au cours de la prochaine période. Toute une couche de jeunes et de travailleurs sont déjà en train de tirer des conclusions socialistes et révolutionnaires, et se dirigent vers le CIO. Une autre couche observe le CIO et ses sections nationales, certains attendant de voir si nos pronostics sont fondés ou pas! Beaucoup d’entre eux peuvent et vont nous rejoindre sur base des événements et de notre travail.

    Effondrement des anciens pays staliniens

    C’est également ce qui va se passer dans les anciens Etats staliniens de Russie et d’Europe de l’Est. Par une ironie de l’histoire, l’implosion économique y est plus importante que quasi nulle part ailleurs, mais la conscience de masse y est toujours à la traîne, plus que nul part ailleurs. Le «capitalisme mafieux» a échoué, mais le «véritable capitalisme démocratique» doit encore être tenté, se disent de nombreuses personnes, et même des travailleurs. Ces illusions rose-bonbon vont être détruites par les événements tumultueux qui pointent à l’horizon, pas seulement dans cette région mais ailleurs. L’apparition de partis ouvriers de masse et de forces marxistes particulièrement puissantes en Europe occidentale, aux Etats-Unis, au Japon et dans le monde néocolonial va exercer une influence décisive au niveau de la vision des travailleurs, et paver la voie pour la croissance de nos forces dans la région.

    En même temps, il y a eu des explosions spontanées de colère dans les rues d’Europe de l’Est et de Russie. Nous avons vu des manifestations en Lettonie, à Vladivostok en Russie orientale et ailleurs, ce qui laisse présager un mouvement de masse encore plus grand étant donné l’aggravation catastrophique de la position des économies d’Europes de l’Est et de Russie elle-même. Plusieurs pays d’Europe de l’Est se trouvent « au bord du gouffre » : c’est le cas pour la Hongrie, la Roumanie, l’Ukraine et d’autres, ainsi que pour la Russie elle-même. Par exemple, on s’attend à ce que le chômage en Russie double cette année, passant de 6,3% à 12%. Ceci s’ajoute au fait qu’un demi-millions de Russes attendent des arriérés salariaux, et que l’économie connaît toujours une inflation à deux chiffres. L’effondrement du marché automobile en Europe et dans le monde va avoir un contrecoup extrêmement rude pour les pays d’Europe de l’Est et pour la Russie. La relocalisation dans la région d’usines par les multinationales de l’automobile suivait une logique de réduction des coûts salariaux, et donc d’augmentation des profits via l’exportation de voitures vers les pays d’Europe occidentale, le Japon et les Etats-Unis. Maintenant que le marché s’est effondré, il en sera de même pour des régions entières, qui dépendent de la production automobile. L’industrie domestique russe sera également affectée. Par exemple, 60% des habitants de la Volga sont impliqués dans la production de la Lada à l’usine Togliatti, alors que ses ventes se sont effondrées. La majorité de ces gens vont donc se retrouver au chômage. Selon un commentateur moscovite, la crise actuelle sera pire que celle de 1998, et « la situation est pire qu’au début des années 90 ». Et comme si ça ne suffisait pas, la liste des personnes les plus riches du magazine Forbes indique que le nombre de milliardaires russes est passé en un an de 87 à 32. Il ne faut donc guère s’étonner quand l’ancien président soviétique Gorbatchev – qui a lui-même servi de portier pour le retour du capitalisme en Russie – déclare que « le meilleur du socialisme et du capitalisme » est à venir. En fait, c’était là son slogan lorsqu’il est arrivé au pouvoir en 1985 et prônait un stalinisme « réformé ». L’Europe de l’Est et la Russie fourniront au cours de la prochaine période certains des pires exemples de l’absurdité capitaliste.

    Les répercussions de l’effondrement de toute une série de régimes d’Europe de l’Est, tel qu’en Hongrie, sont sérieuses, de même que les effets qui pourraient s’en faire sentir sur les banques de pays majeurs d’Europe occidentale. Par exemple, l’Autriche est menacée d’un effondrement similaire à celui qu’elle a connu en 1931 au cas où, comme cela est possible, les pays baltiques et d’Europe de l’Est devaient « boire la tasse » à cause de la crise. Les banques autrichiennes et suédoises reposent fortement sur des dettes massives, prêtant de l’argent dont elles ne disposent pas encore. Les banques autrichiennes et italiennes sont les plus exposées. Les prêts des banques autrichiennes aux pays d’Europe de l’Est sont à peu près équivalents à 70% du PIB autrichien. Ceci signifie que ni l’Italie, ni l’Autriche ne peuvent se peremttre de renflouer leurs propres banques, et recherchent désespérément un « plan de relance » européen qui puisse les renflouer. En fait, l’Europe est plus exposée à la « crise des subprimes » que même les Etats-Unis. La situatio nen Russie est identique. Les treize pays qui autrefois formaient l’Union Soviétique avaient accumulé ensemble une dette auprès de banques étrangères, en devises étrangères, d’une valeur dépassant le trillion de dollars (mille milliards de dollars). Une partie – minuscule – de ces emprunts ont été investis, mais la plupart, comme aux Etats-Unis, a servi directement à alimenter la consommation et le secteur immobilier. Le International Herald Tribune a exprimé ainsi l’inquiétude de la classe dirigeante européenne : « La crise de la dette en Europe de l’Est est bien plus qu’un problème économique. Le déchirement et le déclin du mode de vie causé par la crise y provoque des troubles sociaux. Les emprunteurs de subprimes américains qui ont vu leur maisons se faire ressaisir ne sont pas – du moins pas encore – en train de lancer des émeutes dans les rues. Mais les travailleurs d’Europe de l’Est bien. Les racines de la démocratie dans la région ne sont que peu profondes, et le spectre du nationalisme de droite constitue toujours une menace. »

    Ceci illustre comment l’intérgation du capitalisme – à un niveau jamais égalé, même en comparaison à la période d’avant la Première Guerre – signifie que la crise dans un secteur ou une région peut provoquer une réaction en chaîne qui se répercute dans les autres secteurs et régions. Nous avons vu cela dans les années 30, avec la faillite et la défaillance de la dette pour de nombreux pays en Europe et dans le monde néocolonial, surtout en Amérique latine, en conséquence de la dépression. Quelque chose de similaire se déroule de nos jours. Le PIB letton a dimuné de -4,6% l’an passé, et on estime qu’il chutera encore de -12% cette année ! Le chômage y dépasse maintenant 10%, ce qui laisse présager une période « d’instabilité » qui va « certainement créer une ouverture pour un dirigeant populiste » (Financial Times). Dans le langage codé de la bourgeoisie, ceci fait référence aux partis d’extrême-droite qui ont commencé à croître en Hongrie, en Lettonie et dans d’autres pays d’Europe de l’Est. Avec l’Irlande, l’Espagne, la Grèce et le Portugal, ce sont ces pays qui vont sans doute connaître le pire déclin dans la période à venir.

    Le capitalisme européen en crise

    On estime que l’économie irlandaise pourrait se contracter de -20% dans les prochaines années, ce qui produira des convulsions sociales et politiques d’une ampleur encore jamais vue même comparées au passé tumultueux de l’Irlande. De plus, l’euro, qui a agi au début de la crise comme un bouclier pour les pays économiquement exposés tels que l’Irlande, va maintenant jouer le rôle d’une grande camisole de force. Aucun plan de « réajustement » sur base d’une dévaluation de la monnaie n’est possible tant que l’Irlande demeure dans l’eurozone. Par exemple, on estime que le taux de change italien, lorsqu’on prend en compte l’inflation, est en réalité d’un tiers plus haut que ce qui serait requis au vu de la gravité de la situation à laquelle est confrontée son économie. Des données ahurissantes ont commencé à émerger, qui montrent l’implosion économique qui a traversé l’Italie dans la période récente. L’Italie est étouffée par une bureaucratie massive, avec des frais de « représentation politique » équivalent à ceux de la France, de l’Allemagne, du Royaume-Uni et de l’Espagne réunis ! Sous ce poids, et à cause de son manque de compétitivité avec ses plus proches voisins, l’économie italienne plonge de plus en plus loin sous la surface. Les dépenses pour l’éducation, qui ont dimuné chaque année depuis 1990, ne s’élèvent plus qu’à hauteur de 4,6% du PIB (au Danmark, on est à 8,4%). Seule la moitié de la population poursuit ses études après l’enseignement obligatoire, 20% de moins que la moyenne européenne. Le nombre de lits d’hôpital par habitant a dimuné d’un tiers sous la « nouvelle république », et vaut la moitié de ce nombre en France ou en Allemagne. L’encrassement colossal du système légal a eu pour conséquence que deux retraités septuagénaires qui demandaient un procès contre l’institut de sécurité sociale se sont vu répondre qu’ils pourraient avoir une audience en 2020 ! Le chômage, qui s’élevait à 12% dans les années 90, est « officiellement » tombé à 6%. Mais la plupart – la moitié en 2006 – de ces nouveaux emplois sont basés sur des contrats à court terme et sont extrêmement « précaires ».

    L’Italie, l’Espagne et les conséquences sur l’Eurozone

    Sur base du capitalisme, l’Italie, tout comme le Japon, n’est qu’une entreprise agonisante. Il n’y a pas si longtemps, lors de la « seconde république », l’Italie bénéficiait du deuxième plus grand PIB par habitant de tous les grands pays européens, mesuré en termes de pouvoir d’achat, ce qui la plaçait à cet égard juste derrière l’Allemagne – un niveau de vie en termes réels qui était plus élevé que celui de la France ou du Royaume-Uni. Aujourd’hui, ce niveau de vie est bien inférieur à la moyenne européenne (UE), qui a pourtant fortement baissé après l’adhésion à l’UE des pays d’Europe de l’Est, et l’Italie est « en train de se faire rattraper par la Grèce ». Une part de la responsabilité de cet état de fait repose bien entendu sur les épaules de la « gauche », surtout des ex-dirigeants du PC qui se sont retrouvés dans les DS (Démocrates à Gauche) et ensuite dans le PRC (Parti de la Refondation Communiste). Cette situation, toutefois, est en train de préparer des explosion de masse en Italie, et un renouveau de la tradition radicale et révolutionnaire du passé. Nos petites forces, opérant dans des conditions difficiles, avec un immense afaiblissement de la gauche, sont aujourd’hui bien placées pour jouer un rôle dans la renaissance du socialisme et du marxisme authentique en Italie.

    L’Espagne a vu une hausse colossale du chômage – 3,3 millions de travailleurs sans emploi. Le déficit budgétaire vaut au moins 6,5 du PIB, et l’économie va plonger de -3% cette année. La construction de logements – qui contribuait à 7,5% du PIB en 2006 – est presque à l’arrêt. Il ne faut donc pas s’étonner du commentaire d’un groupe de réflexion selon lequel « Ceci est le cadre parfait, en conjonction avec la crise financière, pour une dépression ». La réputation des principaux clubs de foot espagnols, renommés à travers l’Europe et le monde entier, a elle aussi été profondément affectée. Par exemple, David Villa, qui a marqué le premier goal espagnol lors d’une récente victoire contre l’Angleterre, est membre de l’équipe de Valencia. Son club croulant sous les dettes, son salaire a été postposé de manière « indéfinie » !

    Des manifestations de travailleurs ont éclaté ; les dirigeants syndicaux ont organisé des parades, mais aucune action décisive n’a encore été entreprise afin de mettre un terme à la spirale descendante. Un commentateur procapitaliste a déclaré dans le Financial Times que « L’économie espagnole ne va pas commencer à croître à 3% avant environ sept années. Les Espagnols vont perdre la moitié de leur richesse. C’est horrible. »

    A un moment, l’Espagne utilisait la moitié du ciment européen dans un boum de la construction massif et surprolongé. Ce boum s’est maintenant effondré au nez et à la barbe du capitalisme espagnol, laissant un million de maisons vides, et un chômage de 14%, qui menace de grimper à 20% dans la période à venir. Ces chiffres évoquent pour le futur proche le spectre d’une situation similaire, qui mena directement à la guerre civile espagnole. Marx décrivait l’effondrement de l’Espagne comme un « flétrissement long et sans gloire ». C’était lorsque l’Espagne faisait partie des nations les plus arriérées et reculées d’Europe. L’espagne « moderne » s’est développée à une vitesse pêle-mêle durant la phase de croissance, et menace d’un effondrement aussi rapide lors de la prochaine période. Le pays, comme c’est le cas pour certains autres pays d’Europe méridionale, est au bord de la catastrophe, et il est vital que le CWI cherche à aider le développement des forces révolutionnaires et marxistes authentiques qui vont émerger dans ce pays.

    L’Eurozone pourrait s’effondrer, à cause du désengagement de ses membres les plus pauvres et les plus assiégés. Mais l’initiative de la destruction de l’Eurozone pourrait provenir des « plus riches », comme l’Allemagne, qui est peu encline à renflouer les pays plus pauvres, et pourrait refuser de payer la facture du maintien de l’Eurozone. Le « point chaud » du marché immobilier européen qu’était l’Irlande s’est écroulé en quelques mois. Les répercussion politiques dans chaque pays varieront en fonction de l’histoire récente. En Irlande du Sud, le gouvernement de coalition Fianna Fáil-Verts peut chuter à tout moment. La résurgence des partis d’opposition, en particulier du Labour, indique un tournant important au niveau des consciences. Les forces socialistes et marxistes authentiques en Irlande du Sud, telles que le Socialist Party (CIO Irlande du Sud), sortiront renforcées de la prochaine période.

    L’extrême-droite et l’immigration

    Comme nous l’avons dit plus tôt, la droite,et en particulier l’extrême-droite, est elle aussi en marche. C’est le cas dans les pays d’Europe de l’Est qui incluent d’importantes minorités tziganes. Par exemple, Jobbik, un parti d’extrême-droite hongrois qui prend pour cible cette minorité, a remporté 8,5% des voix lors des élections communales de l’an dernier. L’hostilité vis-à-vis des « immigrés » et des autres minorités monte à travers toute la région, et en Europe dans son ensemble. Le danger du racisme et de l’extrême-droite est évident dans les pays plus développés aussi. En Espagne, les résidents et colporteurs de rue africains ont manifesté deux fois en février, à Madrid, contre le racisme et les descentes de police. On apprit ensuite par une fuite que la police avait reçu un « quota » hebdomadaire d’immigrés « clandestins » à arrêter. Dans le sud de l’Espagne, qui est une des régions les plus pauvres, comme en Andalousie, des milliers d’immigrés sans nourriture ni abri se sont déversés sur les villages au début de l’hiver, « chassant en vain des boulots dans la cueillette des olives, qui avaient déjà été pris par des chômeurs espagnols ». En conséquence, nous voyons déjà au moins le début de la formation de « bidonvilles », jusqu’ici une caractéristique des pays néocoloniaux, et que les Etats-Unis ont connus dans une certaine mesure dans les années 30. Même au Royaume-Uni, les travailleurs immigrés originaires d’Europe de l’Est, surtout de Pologne, et qui ont perdu leur emploi, ont maintenant commencé à habiter en marge des villes, formant des sortes de nouveaux bidonvilles. Le même désespoir face à la détérioration des conditions sociales a commencé à se manifester en Espagne. La faillite des petites entreprises a par exemple conduit le patron d’une société de construction ruinée par la crise à organiser cinq hold-ups dans des banques ! Un autre patron de la construction a menacé de s’immoler à moins que le Conseil municipal ne rembourse les emprunts qu’il lui devait. Un désespoir similaire pouvait être perçu dans d’autres pays où des accidents « terroristes » impliquaient parfois des travailleurs individuels ou en petit groupe. Par exemple, début mars, un travailleur turc s’est tiré une balle dans la tête devant le bureau du Premier Ministre turc, en guise de protestation contre l’aggravation de la situation économique.

    Les travailleurs français se mettent en action

    Un mouvement plus conscient de travailleurs devient véritablement évident, menaçant ou effectuant des occupations, en France, en Ecosse et en Irlande, et pourrait devenir la norme dans d’autres pays au fur et à mesure que la situation économique se détériore. The Economist décrivait ainsi la situation en France dans son édition du 19 mars :

    «Serge Foucher, chef de Sony en France, a été pris en otage le 12 mars par des ouvriers de son usine qui cherchait de meilleurs conditions de licenciement. Ils l’ont enfermé dans une salle de réunion et ont barricadé l’usine à l’aide d’énormes troncs d’arbres. Relâché le lendemain, M. Foucher semblait prendre les choses du bon côté : «Je suis heureux d’être libre et de voir à nouveau la lumière du jour», a-t-il confié.

    Les hommes d’affaires en France ne sont pas amusés. Ils remarquent que les autorités n’ont pas demandé à la police de libérer M. Foucher. Au lieu de ça, le vice-préfet local l’a accompagné lors des négociations suivantes avec les salariés, qui ont obtenu ce qu’ils désiraient : un meilleur contrat de licenciement. Tout ceci confirme le manque général de sympathie pour les affaires qui vit en France, se plaint un cadre.

    Prendre des cadres en otage est une tactique bien établie en France, un pays qui a toute une histoire de relations de travail conflictuelles. Mais cette tactique semble devenir de plus en plus courante. En janvier 2008, le dirigeant britannique d’une usine de crème glacée a été détenu toute une nuit après avoir annoncé un plan de licenciement de la moitié de ses salariés (à cette occasion, la police est intervenue). En février 2008, le directeur d’une usine de pièces détachées automobiles a été enfermé après que les salariés aient réalisé qu’il préparait une opération de délocalisation vers la Slovénie. Dix jours plus tard, les ouvriers d’une usine de pneus appartenant à Michelin ont enfermé deux cadres supérieurs pour protester contre le plan de fermeture de l’usine.»

    Le même journal craint que ces actions ne créent un précédent :«Il arrive aux salariés des autres pays d’enfermer leurs patrons, mais la France est la seule nation où cela se produit souvent. Cette pratique pourrait-elle se répandre ? « A cause de l’état de l’économie mondiale, je ne serais pas surpris si les patrons se voyaient plus fréquemment détenus par leur personnel », dit David Partner, expert en kidnapping et rançons à Miller Insurance, une compagnie d’assurances affiliée à Lloyd’s de Londres.

    Les occupations deviennent déjà plus courantes. En décembre, des ouvriers ont occupé une usine de vitres à Chicago pendant cinq jours afin de s’assurer de l’obtention de l’allocation de licenciement qui leur était due. En février, les ouvriers de Waterford Wedgwood, en Irlande, ont marché sur les bureaux de Deloitte, une firme de compatabilité, et ont refusé de partir jusqu’à ce qu’ils obtiennent une réunion avec le chef de cette entreprise. Selon Gary Chaison, professeur des relations industrielles à la Clark University du Massachusetts, les travailleurs aux Etats-Unis vont sans doute devenir plus militants, à cause du sentiment d’injustice par rapport au salaire. «Je verrais bien des captures de cadres se produire dans quelques mois», a-t-il dit.»

    Le Premier Ministre « socialiste » espagnol, Zapatero, est parvenu à maintenirla plupart du soutien pour son parti lors des récentes élections régionales, malgré l’effarante situation économique. Ceci est en partie dû à la peur du Parti Populaire (PP), qui tire son origine de la période franquiste, et à l’espoir répandu parmi les masses que la crise ne sera que «temporaire». De plus, la structure familiale – tout comme dans d’autres pays d’Europe méridionale, comme en Grèce – agit plus en tant que filet de secours en période difficile que ce n’est le cas en Europe septentrionale. Ceci amortit dans une certaine mesure les pires effets de la crise économique, mais il y a une limite à cela. Une fois que le caractère durable de la crise aura été perçu par la majorité de la classe salariée, les traditions militantes de la classe salariée espagnole – qui semble en surface être restée dormante pendant toute la dernière période – seront ravivées. Dans la situation explosive qui s’ouvre devant nous, il est urgent que le marxisme authentique puisse trouver son chemin jusqu’aux meilleurs travailleurs et jeunes d’Espagne. On peut dire la même chose du Portugal.

    La Grèce : le «maillon faible»

    En ce moment, la Grèce est toujours le maillon faible du capitalisme européen. Le CIO en Grèce a clairement exprimé, dans des articles sur le site du CIO, quels sont les processus à l’oeuvre dans le pays, et qui inclut les grèves générales et l’humeur parmi les salariés et les jeunes. Malgré le creux dans le mouvement actuel – ce qui est invitable après une telle explosion d’énergie et sans aucun résultat immédiat et tangible tels que la chute forcée du gouvernement – la situation objective sous-jacente contient toujours d’importants éléments de situation prérévolutionnaire. Plus encore, le statu-quo actuel est hautement instable, et une explosion de convulsions sociales est entièrement possible. La Grèce, avec son déficit budgétaire de 14%, pourrait bien se voir mettre « hors-jeu » par les agences de cotation de la dette gouvernementale. Ceci pourrait à son tour provoquer une «faillite nationale», qui serait suivie par de nouvelles coupes brutales au niveau des acquis sociaux, des salaires et des conditions des salariés grecs. Ceci provoquera de nouveaux incendies sociaux.

    La crise en Irlande

    L’Irlande n’est pas très loin derrière la Grèce ; en effet, avec le temps, elle est confrontée à une situation potentiellement pire encore que la situation grecque, parce qu’elle est tombée de bien plus haut. Jouissant d’un des plus hauts niveaux de vie dans l’UE – le plus haut même, selon une estimation – la vitesse de la chute irlandaise est, d’une certaine manière, égale à celle de l’Islande, avec laquelle elle a déjà été comparée. Le taux de croissance annuelle de 9% du passé ne sera bientôt plus qu’un souvenir lointain, avec une contraction annoncée d el’économie à hauteur de -6,5% rien que pour cette année. Ceci a à son tour forcé le gouvernement du Fianna Fáil à lancer des attaques brutales sur le mode de vie, avec l’imposition récente par l’Etat d’une coupe salariale de -7,5% pour les employés du secteur public. Ceci a provoqué une manifestation massive en février, la plus grande en Irlande depuis trente ans. La pression est montée en faveur d’un appel à une nouvelle manifestation pour le 30 mars, mais la structure chapeautant les syndicats officiels, le Congrès Irlandais des Syndicats (Irish Congress of Trade Unions – ICTU), a décidé de n’y convier que les syndiqués qui n’avaient pas reçu leur paye conformément à la Convention salariale annuelle. Notre parti a demandé de manière correcte que tous les syndicalistes soient appelé à manifester le 30 mars, puisque c’est l’ensemble de la classe salariée qui est confrontée à la catastrophe, avec le chômage qui monte en flèche, jusqu’à probablement déjà un demi million. Une grève des travailleurs publics bassement payés, et l’occupation de la verrerie Waterford Glass, montrent le mécontentement croissant parmi la classe salariée irlandaise. Le socialisme authentique pourrait maintenant grandement se répandre, au milieu de cette situation potentiellement explosive, en particulier parmi la classe salariée.

    Même le Labour Party irlandais, pourtant pro-marché, et qui s’est trouvé sur la paille depuis des décennies, connaît maintenant un renouveau, au fur et à mesure que les masses laborieuses partent en quête d’une alternative au Fianna Fáil et au Fine Gael, maintenant discrédités. Les anciens partis ouvriers – ce qui inclut le Labour Party irlandais – n’offrent que peu d’espace pour l’entrée et la radicalisation des salariés. Mais là où certains de ces partis n’ont pas été récemment associés avec les gouvernements au pouvoir, il n’est pas exclu qu’ils puissent de nouveau profiter d’une croissance électorale, mais aussi d’un certainflux de nouveaux travailleurs et de jeunes gens cherchant à lutter. Les marxistes n’ont pas de dogme bien arrêté sur quoi que ce soit, et encore moins concernant les perspectives pour des partis qui prétendent se tenir du côté du mouvement ouvrier. Il n’est pas exclu que le Labour Party irlandais puisse connaître une résurgence en termes de membres, ce que les marxistes chercheraient à influencer. Mais en même temps, la lutte industrielle est d’une importance cruciale sur le court terme, avec un scénario menaçant pour l’Irlande à l’horizon des quelques prochaines années, similaire à celles auxquelles à dû faire face la classe salariée irlandaise dans la période immédiatement avant la Première Guerre. Cette période a connu des batailles de classes caitales, qui ont culminé dans le Lockout de Dublin en 1913. Les grèves générales et partielles en Irlande en sont les annonciatrices. De la même manière, le plan électoral est vital, car le gouvernement irlandais du Fianna Fáil pourrait s’écrouler d’un coup sous le poids de ses propres contradictions et au milieu de la puanteur de corruption qui l’entoure. Au cours de la période dans laquelle nous entrons, un nouveauchapitre extrêmement important pourrait s’ouvrir pour le marxisme en Irlande.

    La grève générale en France

    De pareilles opportunités commencent à poindre au-dessus d’autres pays européens, parmi lesquels la France n’est pas des moindres. La grève générale de janvier 2009, suivie par la démonstration massive de puissance ouvrière en mars, avec jusqu’à trois millions de manifestants, a transformé la situation sociale et politique en France. Soixante-dix-huit pourcent des Français considèrent que la grève générale de mars était « justifiée ». Sur une affiche, on voyait «Les Français ont donné l’autorisation au mouvement syndical d’articuler leur opposition à Nicolas Sarkozy». Un grand homme d’affaires a averti que la France est confrontée à une «guerre de classes» qui pourrait saper les efforts de réformes de Sarkozy. Le chef de l’agence de sondages Publicis a déclaré : «Les gens sont vraiment fâchés». Il a aussi ajouté que le gouvernement «attisait le mécontentement». Au même moment, le Financial Times déclare que «Il est loin d’être clair si oui ou non, la tension sociale (manifestée dans les grèves et les occupations) va se cristalliser en un mouvement politique cohérent et capable de paralyser le gouvernement de M.Sarkozy». Le fait qu’ils aient une telle confiance en eux est entièrement dû à la corruption des dirigeants syndicaux qui sont prêts à laisser le mouvement se dissiper.

    Les patrons demandent des «sacrifices»

    A travers toute l’Europe, la politique que va suivre la bourgeoisie vis-à-vis de la classe salariée sera de « diviser pour mieux régner ». En Irlande, les médias bourgeois sont en train de mener une féroce campagne afin de tenter de liguer les travailleurs du privé contre les employés « privilégiés » du secteur public. Ces travailleurs « goulus » vivent aux dépens – d’autant qu’ils reçoivent apparemment de bien meilleurs pensions et salaires – des pauvres, des vieux et de tous ceux du secteur privé. Une campagne similaire a visé les employés communaux et les fonctionnaires en Grande-Bretagne, à un point tel qu’elle pourrait jouer un rôle particulièrement aigu lors de et après la prochaine campagne électorale. A l’avant-garde de cette campagne européenne, on retrouve la Banque Centrale Européenne : elle a appelé à « une reprise en main des salaires et des dépenses publiques ». Selon sa logique tortueuse, « les restrictions de payement aideront à prévenir le chômage qui affecte une grosse proportion de la population en âge de travailler… Les gouvernements devraient poursuivre une politique courageuse de restriction des dépenses, surtout dans le cas des salaires publics ». La réponse à cette politique distinctement « anti-keynésienne » a été donnée par les travailleurs allemands qui « sont partis en grève… cette semaine en réclamant une hausse de salaires – avec l’argument que de plus hauts salaires sont nécessaires pour renforcer l’économie européenne » (Financial Times). Les absurdités du capitalisme sont telles que ses représentants européens, alors que tout le monde est d’accord pour dire que nous sommes dans une situation de « chute de la demande », soutiennent des mesures « anti-demande ». Mais, bie nentendu, c’est la logique même du capitalisme, dont les points de départ et d’arrivée coïncident avec la nécessité de maximiser les profits et la part destinée à la classe dirigeante. Les profits se sont déjà contracté au cours de cette crise ; les dividendes – la quantité payée aux porteurs de coupons, qui vivent sur le dos des travailleurs – sont au plus bas depuis 1938. Il y a aussi une hausse de la « surcapacité » de l’industrie. Ceci est un autre indicateur de la crise généralisée du capitalisme.

    Au même moment, les travailleurs du public ne sont pas les seuls à qui on demande de faire un « sacrifice » ; des couches entières de travailleurs du privé, surtout dans l’industrie automobile, ont subi des coupes salariales de -10, -15, parfois -20%. Pour les ouvriers de Toyota au Royaume-Uni, qui viennent d’accepter une coupe salriale de -10%, ceci signifie une perte de revenu annuel de 2000£ ! Par conséquent, la possibilité de combiner la lutte des travailleurs du secteur public comme du privé n’a jamais été aussi grande, puisque ce sont toutes les sections de la classe salariée qui sont maintenant confrontées à la baisse de leur niveau de vie, à une érosion des acquis du passé, à un allongement de la semaine de travail dans les industries qui sont toujours viables, à des attaques sur les soins de santé et les pensions, etc. Ce processus affecte les pays les plus pauvres d’Europe aussi bien que ceux qui jusqu’il y a peu se trouvaient dans la catégorie des pays « riches ».

    L’Allemagne et l’Europe septentrionale

    L’Allemagne, moteur de l’Europe, plutôt que de se diriger vers les perspectives économiques ensoleillées établies par le gouvernement Merkel, est, comme nous l’avons mentionné plus tôt, confrontée à une autre implosion économique soudaine. Forcé d’introduire son propre « plan de relance » – après des mois de résistance obstinée –, le gouvernement Merkel parle toujours de sa crainte de voir s’accroître la dette publique et de créer un excédent de liquidités. Un « expert » économique déclarait que « Les banques centrales aux Etats-Unis et au Royaume-Uni sont maintenant littéralement en train d’imprimer de l’argent. Ceci crée un potentiel inflatoire qui est difficile à arrêter ». Les capitalistes, dans leur ensemble, ont décidé qu’une petite pincée « d’inflation » est la seule manière de se sortir du piège de la déflation dans lequel se dirige le capitalisme mondial en ce moment. Avec le souvenir de l’hyperinflation sous la république de Weimar – surtout en 1923 – la classe dirigeante allemande craint de devoir avancer sur cette pente. Mais l’alternative à cela, sur base capitaliste, est une énorme hausse du chômage, comme ça commence à être le cas en Allemagne.

    Les autres puissances en Europe sont elles aussi happées par le tourbillon économique. En Belgique, les salariés subissent le chômage économique et de grosses coupes salariales. Les Pays-Bas vont suivre la même voie, de même que la Scandinavie. La Suède est confrontée pour la prochaine période à son plus grand défi social et économique, sans doute plus grand que celui des années 90. Le pays est en ce moment « à la mode » dans les cercles économique capitalistes, à cause de l’expérience du début des années 90. Cette solution est maintenant considérée comme un modèle pour la politique qui pourrait être menée dans la crise actuelle par les plus gros pays. Nouriel Robini, le « M. Apocalypse » du capitalisme mondial, a déclaré, de même que beaucoup d’autres économistes, que « Nous sommes maintenant tous Suédois ». La nationalisation au moins des entreprises en faillite, telles que les banques : voilà la route à suivre, dit-il. Pourtant, le capitalisme suédois n’a nationalisé nque deux banques lors de cette période : Nordbanken, qui était déjà contrôlée par l’Etat, et Götabanken. Qui plus est, comme l’a fait remarquer Paul Krugman, la nationalisation n’est pas juste un phénomène suédois, mais est « Aussi américaine que la tarte aux pommes ». En effet, on nationalise en ce moment deux banques par semaine aux Etats-Unis – mais avec moins de tapage médiatique. Qu’est-ce donc qui paraît si attractif dans le « modèle suédois » aux yeux de la classe dirigeante ? La nationalisation était temporaire – bien qu’elle ait duré plus longtemps que quelques mois (plusieurs années, en fait) – et le lien entre les banques nationalisées et le gouvernement, comme c’est le cas au Royaume-Uni aujourd’hui, est resté plutôt lointain. Toutefois, la crise suédoise, bien que sérieuse, s’est déroulée juste avant le début de la reprise économique dans les années 90.

    Effets de la crise pour l’Union Européenne

    Un tel scénario de conte de fées n’est plus disponible pour le capitalisme mondial, pas plus pour le capitalisme européen. La crise, loin « d’approcher le fond », peut aller encore plus loin et durer encore plus longtemps que même les plus « pessismistes » des commentateurs capitalistes osent imaginer. Philip Stevens, l’éditorialiste politique du Financial Times (Londres), a récemment déclaré que le Royaume-Uni « n’a pas d’argent ». C’est une exagération puisque, comme le gouvernement l’a bien montré, il peut déjà recourir à la planche à billets – bien que cela se fasse de nos jours de manière électronique – afin d’amorcer la pompe. Mais cela montre l’incertitude et la confusion sous-jacentes des principaux commentateurs du capitalisme. Les Etats-Unis ont suivi les traces de Brown, avec une considérable injection d’argent. Ceci ne peut pas résoudre la crise, mais peut former un matelas qui, combiné avec d’autres mesures, pourrait amortir l’impact. Mais l’empilement colossal de dettes d’Etat signifie une collision inévitable entre les classes dans le futur. Le déficit budgétaire combiné des quatre plus grands pays de l’Eurozone – l’Allemagne, la France, l’Italie et l’Espagne – va atteindre les 6,4% du PIB en 2010 et vaut 5,8% cette année, alors qu’il ne s’élevait qu’à 2% du PIB l’an dernier ! On prévoit que cette dette publique grimpe à 83% du PIB l’an prochain, à partir de 79% cette année et de 71% en 2008. Les capitalistes vont tenter de faire repartir cette tendance en sens inverse, soit via des hausses de taxes – déjà prévues par le gouvernement Brown pour le futur – ou via des attaques directes sur l’emploi, les allocations sociales, etc. L’UE va à son tour se retrouver déchirée par ces développements. Déjà, la crise a vu la vengeance de l’Etat-nation, dont les commentateurs capitalistes et des groupes de gauche tels que la Quatrième Internationale (LCR en France et Belgique) avaient prophétisé l’enterrement par « l’intégration européenne ». Comme des criminels enchaînés à un chariot, les capitalistes ont été forcé de collaborer, mais les 27 membres de l’UE ne vont pas hésiter à se donner des coups les uns aux autres afin de protéger leurs intérêts « nationaux ». Les mesures protectionnistes extrêmes entreprises par Sarkozy pour promouvoir l’industrie automobile en France sont sagement acceptées par la Commission Européenne, avec le minimum de ronchonnements. Une chute de l’Euro – une possibilité distincte, qui dépend d’à quel point la crise sera sévère et profonde – renforcerait ces divisions.

    Opportunités à gauche

    Dans notre lutte contre capitalisme européen, nous ne tombons pas pour autant dans le nationalisme étroit, mais y opposons une alternative ouvrière et socialiste. A cette fin, la participation de tout un nombre de sections du CWI lors des prochaines élections européennes est très importante. En Suède, en Belgique, en Irlande, et surtout au Royaume-Uni, nous avons des opportunités de présenter notre programme, même si ce n’est pas pour obtenir un vote significatif. Au Royaume-Uni cependant, l’alliance électorale avec le syndicat du rail, le RMT, et avec le Parti Communiste de Grande-Bretagne (Communist Party of Britain – CPB), malgré les faiblesses exposées dans un article paru la semaine passée sur notre site international (www.socialistworld.net), constitue néanmoins un important pas en avant. Déjà, dans les conférences de presse et dans ses commentaires, Bob Crow, Secrétaire Général du RMT, a souligné l’idée d’une « Europe des travailleurs », en opposition à l’Europe capitaliste. Il ne fait aucun doute que cette avancée très importante en direction d’une voix indépendante de la classe salariée – malgré les objections stridentes de la plupart des groupes d’ultra-gauche – a la possibilité de faire passer une opposition ouvrière à l’UE. C’est aussi un point de ralliement important contre le BNP, parti d’extrême-droite, qui pourrait bien remporter des sièges au Parlement européen. L’article de la semaine passée explique avec grande clarté les raisons pour lesquelles nous pensons – malgré bien des hésitations – que ceci est une grande avancée. Il n’y a aucune garantie de succès, surtout si on parle de la lutte électorale, qui est le plus bas niveau de lutte de classe ; mais malgré d’immenses obstacles, cette alliance électorale a la possibilité de toucher les meilleurs parmi les travailleurs et les jeunes. Qui plus est, cette initiative pourrait être à la base d’un nouveau parti des travailleurs de masse en Grande-Bretagne, apportant par là une solution à un problème aigu de la situation actuelle.

    Le développement de nouveaux partis des travailleurs de masse est toujours une question cruciale en Europe, comme elle l’est d’ailleurs sur le plan mondial. Il n’est pas nécessaire ici de nous étendre à nouveau en long et en large quant au pourquoi de cette analyse. L’apparition de Die Linke (La Gauche) en Allemagne, de Syriza en Grèce, et maintenant du Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA) en France, n’est pas du tout accidentelle. Le leader du NPA, Olivier Besancenot, est déjà considéré comme étant la figure politique la plus importante en France après Sarkozy. De plus, selon un sondage récent, Besancenot, décrit comme « le leader trotskyste d’extrême-gauche », est maintenant aussi « crédible » que le Président. Malgré les faiblesses du NPA, à la fois en termes de programme et en termes de structure, ce parti représente un important pas en avant, et est soutenu par le CWI en général, et par notre section française, en particulier. La question de savoir, toutefois, si oui ou non, le NPA pourra grandir en termes de nombre d’adhérents, attirer de nouvelles couches et s’implanter dans la classe salariée, n’est pas encore tranchée. Il doit encore passer le test des élections. Mais, étant donné la situation sociale explosive en France – même Ségolène Royal, l’ancienne candidate du Parti Socialiste, a déclaré récemment « N’oubliez pas la Révolution française » – et le manque d’une alternative électorale viable à gauche, le NPA pourrait remplir le vide à gauche et gagner un soutien significatif. Ceci, cependant, ne ganrantirait pas son succès. La question du programme, de l’intervention dans les luttes sociales et industrielles, est vitale si le NPA veut trouver un écho significatif et durable parmi les nouvelles couches qui cherchent certainement une alternative.

    La question du programme du parti est cruciale pour le NPA, surtout la question d’une alternative gouvernementale à Sarkozy. Parce qu’il n’y a pas de parti des travailleurs de masse en France, et puisque le NPA doit encore être testé, nous ne pouvons pas désigner spécifiquement les partis qui devraient former cette alternative gouvernementale. Lorsque le Parti Socialiste et le Parti Communiste Français étaient encore des partis ouvriers-bourgeois, nous pouvions mettre en avant le slogan d’un gouvernement « socialiste-communiste ». Ceci n’est d’ailleurs qu’une variante de l’approche suivie par les Bolchéviks en 1917. Contre la coalition bourgeoise, les Bolchéviks proposaient « Tout le pouvoir aux soviets », alors que c’étaient les Menchéviks et les Social-Révolutionnaires qui détenaient la majorité au sein des soviets (conseils ouvriers). C’était un appel à un gouvernement Menchévik – Social-Révolutionnaire, excluant les partis bourgeois, et basés sur les soviets, avec les Bolchéviks dans une position « d’opposition loyale ». Dans la pratique, le gouvernement de coalition de Kérensky fut renversé par la révolution socialiste d’octobre 1917, lorsque les Bolchéviks prirent le pouvoir.

    La question d’une alternative gouvernementale prend un caractère différent aujourd’hui, avec une forme plus algébrique, à cause de l’absence de tels partis de travailleurs de masse. Mais la lutte contre le gouvernement Sarkozy, les salariés vont partir à la recherche d’un gouvernement à soutenir en opposition à Sarkozy. En plus de l’abolition de la présidence et du Sénat, et de demander une assemblée unicamérale, nous devons soulever la question d’un « gouvernement des travailleurs ». C’est la lutte qui déterminera quelles sont les forces qui occuperont une telle position. Ceci est une réponse que nous donnons aux travailleurs qui demanderont qui sera dans ce « gouvernement des travailleurs ».

    La formulation de revendications transitoires, de l’agitation et de la propagande prend une grande importance en cette période. Les marxistes vont chercher à intervenir dans de nouvelles luttes et, là où nous disposons de forces suffisantes, à apporter une direction aux luttes qui commencent à se développer. Au Royaume-Uni, nous avons lancé la campagne « Les Jeunes se battent pour l’Emploi ». Mais, sur le plan européen, d’autres mouvements de jeunes peuvent se développer, y compris sur base des grèves de lycéens. La gravité de la crise, qui affecte plus particulièrement la jeunesse, combinée avec les attaques sur l’éducation, qui vont en réalité restreindre les ouvertures vers la sphère de l’éducation supérieure qui existaient pour les générations précédentes, pose la question d’une contre-attaque par les lycéens. Ceci pourrait mener au développement de grèves lycéennes sur le mode des récentes grèves en Allemagne, et de celles qui se sont produites sous notre direction en 1985 et en Espagne en 1986.

    Les perspectives pour le CIO en Angleterre et Galles dans la prochaine période sont particulièrement pertinentes. Le capitalisme britannique est parmi les plus exposés à la crise, avec une situation quasi comparable à celle qui existe en Europe méridionale. Le gouvernement Brown ne tient plus qu’à un fil, et peut chuter d’un instant à l’autre. Les perspectives en ce qui concerne Brown sont sans nul doute qu’il tente de « bricoler » une « reprise » à court terme et qu’il espère que ceci pourra se lier aux mesures d’Obama afin de lui donner la possibilité de mener un quatrième gouvernement New Labour. Cependant, si jamais David Cameron et les Tories parvenaient au pouvoir, le scénario auquel serait confronté le Royaume-Uni serait similaire à celui qu’on voit maintenant se dérouler aujourd’hui en France sous le gouvernement Sarkozy. A cause de cela, l’idée d’un « gouvernement national », d’une coalition, s’est fait jour. Il ne peut être exclu que l’on aille vers un « parlement suspendu », sans aucun parti qui y remporte une claire majorité après les prochaines élections.

    A travers tout ceci, l’inadéquation des partis capitalistes sera de plus en plus évidente, et la probabilité de voir émerger un nouveau parti, de plus en plus grande. La participation du CIO dans Die Linke en Allemagne – malgré ses efforts futiles pour maintenir les camarades du CIO en-dehors –, dans Syriza en Grèce, et maintenant dans le NPA en France, justifie à la fois les perspectives du CIO quant à l’émergence de nouveaux partis des travailleurs de masse, mais inaugure aussi une période cruciale durant laquelle les idées marxistes seront mises à l’épreuve de nouveaux publics de travailleurs et de jeunes.

    Le capitalisme, y compris le capitalisme européen, est confronté à une crise de longue haleine, qui aura pour conséquence d’énormes explosions sociales, y compris la possibilité de grèves générales, de manifestations d emasse et d’occupations d’usines. Les événements vont développer encore plus loin la conscience de la classe salariée, surtout si celle-ci est combinée avec la croissance d’idées et d’organisations socialistes et marxistes, comme celles du CIO. Le CIO participera dans tous les mouvements authentiques de la classe salariée qui représentent une avancée, malgré des faiblesses de programme et d’organisation, y défendant notre programme et nos perspectives, en guise de préparation pour des forces marxistes de masse dans le futur.

    Le CIO est sorti renforcé idéologiquement et numériquement de la dernière période, surtout de celle des années 90 et de la première partie de cette décennie, et bien préparé à intervenir dans la nouvelle situation explosive. Sur cette base, nous pouvons faire progresser de manière notable les forces du marxisme authentique, appeler les nouvelles couches de la classe salariée qui se mettent en action à nous rejoindre, attirer les meilleurs militants de gauche au CIO. Le CIO peut jouer un rôle clé en rassemblant dans l’action les forces authentiques du marxisme en Europe, afin de fournir une réelle alternative pour les couches les plus développées de la classe salariée et de la jeunesse, en tant que premier pas vers la mise sur pied de partis marxistes de masse en Europe, en tant que membres d’une Internationale de masse.

  • Tract général du PSL – Devons nous payer pour leur crise?

    Les élections européennes et régionales sont les premières depuis l’arrivée de la pire crise économique en 60 années. Un chômage de masse nous attend. Ce qui se cachait derrière les contrats flexibles comme le travail intérimaire, les contrats temporaires et les chèques-services est maintenant clair : pouvoir nous jeter à la porte plus facilement. Nous, simples travailleurs et nos familles, n’avons pas provoqué la crise actuelle. C’est pourtant à nous de payer la note tandis que les vrais responsables disent que la crise nous tombe dessus comme un phénomène naturel. Quelle hypocrisie !

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    L’élite politique et économique a elle-même créé les «bulles» qui nous éclatent maintenant à la gueule. On nous a fait miroiter la richesse et le bien-être pour tous en nous incitant à contracter des dettes. Eux ont bien profité de la richesse, c’est une certitude. Par contre, nous, nous perdons nos emplois, notre pouvoir d’achat, nos retraites et nos épargnes.

    A QUOI S’ATTENDRE APRÈS LES ÉLECTIONS ?

    Après les élections viendront les règlements de compte. Il faut s’attendre à un plan d’austérité d’un calibre équivalent au Plan Val-Duchesse (1986), au Plan Global (1993) et au Pacte des Générations (2005) réunis, le tout concentré sur quelques années. Durant les deux dernières décennies, les partis traditionnels n’ont fait que jouer aux Saint- Nicolas pour les patrons et les riches. Les finances publiques ont subi un pillage en règle. Celui qui pensait encore qu’ils allaient changer leur politique en a maintenant pour son compte. Leur générosité envers les patrons, c’est nous qui allons la payer dans les années à venir.

    NATIONALISER pour sauver nos emplois, pas leurs profits

    En 2008, Arcelor Mittal a réalisé 6,7 milliards d’euros de profit. A présent, des centaines de leurs salariés sont foutus à la porte. Les actionnaires de Bayer ont été grassement récompensés par plus d’un milliard d’euros de dividendes, pendant qu’on demande aux travailleurs allemands de revoir leur salaire à la baisse de 6%. Pour sauver des emplois? Non, bien sûr. Pour sauvegarder leurs profits. Le capitalisme ne laisse aucune place pour une solution intermédiaire. Il faut choisir : leurs profits ou notre avenir. Leurs profits ou nos emplois, nos salaires, nos vies.

    Dans certaines entreprises, il est proposé de réduire collectivement le temps de travail. Autrement dit, éviter temporairement des licenciements secs. Traduction : accepter des baisses de salaire en échange du maintien des emplois, tout ça pendant que les profits restent intouchables! Pourquoi nos emplois et notre niveau de vie devraient dépendre des caprices et de l’avidité des capitalistes ? Le PSL veut que la collectivité prenne la production en mains dans le but de satisfaire les besoins de tous, et non les profits de quelques-uns. Il est pour cela nécessaire de nationaliser l’ensemble du secteur financier, entre autres.

    Des cadeaux pour les uns, la crise pour les autres

    Les 20 dernières années, la pauvreté en Belgique a doublé, grimpant à 15%. Le nombre de millionnaires aussi…mais en quatre ans seulement. Avec l’amnistie fiscale et les intérêts notionnels, les patrons ne paient que très peu d’impôts et la fraude fiscale est estimée à 30 milliards d’euros par an. Avec cet argent, nous pourrions augmenter toutes les pensions à un minimum de 1.500 euros et créer 100.000 emplois dans les services publics et les soins de santé. Il resterait encore de quoi faire monter le budget de l ’ e n s e i g n e – ment à hauteur de 7% du PIB et construire 25.000 logements sociaux. «Nous pourrions », parce que le gouvernement actuel, tout comme ses prédécesseurs, a choisi de protéger les bénéfices de ses riches amis.

    TOUT CE QUI NOUS DIVISE NOUS AFFAIBLIT

    Pour faire passer la politique néo-libérale, les victimes ont été systématiquement montées les unes contre les autres. Avec la surenchère communautaire, on veut nous faire croire que le problème provient de nos collègues flamands plutôt que du profit et de la cupidité des patrons. Une multitude de mécanismes sont mis en place afin de « diviser pour mieux régner » : ouvriers contre employés, travailleurs du privé contre fonctionnaires, jeunes contre vieux, sans-papiers contre ceux qui en ont, Belges contre immigrés,… Nous devons nous unir dans la lutte contre les effets de la crise. Ensemble nous sommes plus forts!

    NON à l’Europe du capital

    L’Union européenne est l’excuse favorité des gouvernements et entreprises: «Nous ne pouvons rien faire d’autre. C’est l’Europe.» Il suffit de penser à la libéralisation de la Poste : des centaines de bureaux fermés, le statut des postiers démantelé et les prix qui ont crevé le plafond. Si l’Europe n’est pas un projet social, pourquoi devrions-nous y adhérer? Aussi bien aux Pays-Bas qu’en France et en Irlande, la population a eu la possibilité de s’exprimer au sujet de la Constitution européenne. A chaque fois, une large majorité a voté contre. L’Union Européenne est un instrument au service des banques, des grosses entreprises et des néo-libéraux. CETTE EUROPE, NOUS N’EN VOULONS PAS.

    Pour une Europe SOCIALISTE

    • QUI AMÉLIORE LES CONDITIONS DE TRAVAIL ET LES SALAIRES, ET NON UNE EUROPE QUI LES SAPE EN MONTANT LES DIFFÉRENTS GROUPES DE TRAVAILLEURS LES UNS CONTRE LES AUTRES
    • AVEC UN SYSTÈME DE SÉCURITÉ SOCIALE QUI COMBINE LES MEILLEURS ÉLÉMENTS DES SYSTÈMES EXISTANTS
    • OÙ NOS SERVICES, NOS TRANSPORTS PUBLICS, NOS TÉLÉCOMMUNICATIONS, NOTRE POSTE, NOTRE ENSEIGNEMENT, ETC. SONT AUX MAINS DU SECTEUR PUBLIC

    STOP à la destruction de notre environnement!

    Notre avenir est mis en péril à cause des intérêts à court terme d’une petite minorité. Pour l’élite, le défi de la protection de notre environnement n’est un sujet de préoccupation que si cela constitue une menace pour leur vie et surtout pour leurs profits. Entre-temps, ils trouvent des zones vertes à l’air pur pour leurs habitations. Dans de nombreuses régions du monde, y compris dans nos grandes villes, l’environnement des pauvres ressemble de plus en plus à une poubelle. Il en va de notre santé, de notre qualité de vie et de l’avenir des générations futures.

    Les travailleurs ont besoin D’UN NOUVEAU PARTI

    Nous voulons participer à la création d’un nouveau parti pour et par les travailleurs et leurs familles: une nouvelle force d’opposition de gauche, où les divers courants et toutes les personnes désirant s’y engager pourraient collaborer activement, en vue d’offrir enfin une traduction politique aux luttes des travailleurs. Cette question ne se pose pas seulement en Belgique. En France s’est constitué le Nouveau Parti Anticapitaliste (NPA), où se retrouvent des milliers de personnes qui ont répondu à l’appel d’Olivier Besancenot et de la LCR française. Le NPA a d’ailleurs été rejoint par l’organisation-soeur du PSL en France: la Gauche Révolutionnaire.

    Les représentants des travailleurs doivent vivre avec un salaire de travailleur

    Les hommes politiques vivent aujourd’hui dans un autre monde, avec des salaires de plusieurs milliers d’euros. En tant que parlementaires, nos représentants n’accepteront pas plus que le salaire moyen des travailleurs et vivront ainsi dans les mêmes conditions que la classe qu’ils représentent. Le reste sera reversé au bénéfice du mouvement. Ainsi, nos membres ne pourront pas utiliser leur position en vue de satisfaire leurs intérêts personnels. Comment peut-on sinon avoir la moindre idée de ce que les politiques appliquées ont comme conséquence?

    LE SOCIALISME: pas seulement le 1er mai

    Pour le PSL, le socialisme n’est pas qu’un slogan de 1er Mai. C’est en même temps la conclusion logique de la lutte et le principal objectif de celle-ci. La crise sociale et écologique ne peut être résolue si les intérêts à court terme des grandes entreprises sont l’unique horizon de la société.Nous défendons une société socialiste où les besoins sont au centre des priorités. Les élections constituent une partie importante de notre lutte, mais une société socialiste ne peut être obtenue par le simple biais des élections. Il est nécessaire pour cela que la classe ouvrière prenne en main la lutte pour le contrôle et la gestion de la société.

    REJOIGNEZ LE PSL

    Le PSL est encore un petit parti au stade actuel. Nous disposons déjà de sections à travers tout le pays, mais nous voulons poursuivre notre développement. Une société socialiste ne tombera pas du ciel comme une pomme mûre : c’est un objectif que nous devons construire au jour le jour, et dans lequel chacun a un rôle à jouer.

  • III. NOTRE PROGRAMME

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    "Le PSL – LSP, un parti pour changer de société"

    Préface

    I. Histoire du PSL/LSP

    II. Perspectives, tâches et objectifs

    – IV. Notre fonctionnement interne

    Cette brochure peut être commandée via redaction@socialisme.be et revient à 3 euros (que vous pouvez verser sur le n° de compte 001-2260393-78 du PSL/LSP avec la mention "brochure PSL").
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    Idéologie

    Beaucoup de gens disent qu’ils n’adhèrent à aucune idéologie particulière, il est même devenu assez «tendance» de se dire pragmatique. Depuis la chute du stalinisme, à la fin des années ’80 – début des années ’90, la classe dominante et ses collaborateurs intellectuels ont déclaré avec grand fracas que le débat idéologique avait pris fin. Seul le marché «libre» était dorénavant considéré comme étant efficace. Pour reprendre la célèbre expression du philosophe Francis Fukuyama (qui a très peu fait parlé de lui par la suite) la «fin de l’histoire» a été explicitement proclamée.

    La raison pour laquelle peu de gens parlent encore de cette prétendue «fin de l’histoire» n’est pas compliquée à trouver: les contradictions de classes n’ont fait que s’accroître durant les années 1990 et 2000 et le clivage entre riches et pauvres est aujourd’hui gigantesque. De plus en plus de travailleurs et de jeunes se retrouvent sur le côté. Cette situation conduit inévitablement à de nouveaux questionnements ainsi qu’à la recherche d’une réponse générale contre le capitalisme ; autrement dit : une autre idéologie, capable de mieux expliquer les développements sociaux que l’ancienne.

    A travers l’histoire, les classes dirigeantes ont toujours essayé de présenter leurs idées comme «naturelles», «éternelles», et «normales». La bourgeoisie n’agit pas différemment au travers de ses partis, de son enseignement, de ses médias et de ses intellectuels. Attardons nous sur quelques clichés de la vision capitaliste :

    – «La société n’est pas constituée de différentes classes économiques, mais bien d’individus indépendants.»

    Cela est totalement faux. Il existe une classe dirigeante qui dispose de la propriété privée des machines, des ressources, etc. Cette propriété privée des moyens de production entraîne inévitablement l’exploitation de la majorité de la population et une compétition mortelle, contrairement à ce que permettrait une économie démocratiquement planifiée. Il y a donc bien des groupes aux intérêts divergents et irréconciliables dans la société capitaliste. Un tel système contradictoire conduit immanquablement à des crises de surproduction.

    – «Les restructurations et les licenciements sont déplorables, mais sont un phénomène temporaire, et nécessaire à la viabilité de l’économie.»

    Tout aussi faux. Le chômage a, en Belgique, augmenté de 70.753 personnes au début des années ’70 à plus d’un demi-million de personnes qui dépendent de l’ONEM aujourd’hui. Le licenciement des travailleurs est seulement «nécessaire» afin de garantir les profits des patrons et PAS pour maintenir une économie saine. Les profits d’une petite élite priment sur tout le reste.

    – «Celui qui est sans emploi l’est uniquement par sa propre faute. C’est un problème personnel, pas social.»

    Une fois de plus, c’est un mensonge. Le chômage structurel – alors que tant de besoins ne sont pas satisfaits dans la société (garderies à bon marché, facilités de loisir, enseignement de qualité,…) – est une maladie liée à la crise de surproduction capitaliste.

    Les frais salariaux sont seulement une excuse pour des capitalistes à la mémoire courte. Dans les années ’50 et surtout ’60, un système de sécurité sociale a été construit, et les salaires réels sont montés de manière significative. Mais ce processus a pris place dans une période de forte croissance capitaliste. Depuis la politique néolibérale, au début des années ’80, nos salaires directs et indirects (pensions, allocations, etc.) ont fortement diminué en termes de pouvoir d’achat. Cela n’empêche pas les patrons de systématiquement parler du coût salarial comme d’un facteur «destructif pour l’emploi». La seule chose destructive pour l’emploi est pourtant le système capitaliste qu’ils défendent.

    – «L’idée de redistribuer les richesses est le reflet d’une jalousie vis-à-vis de ceux qui ont réussi dans la vie. La position de quelqu’un dans la société correspond à ses efforts et à ses talents.»

    Faux. La redistribution des richesses signifie de réclamer aux grands actionnaires le travail non-payé, grands actionnaires dont l’activité ne consiste d’ailleurs qu’à s’asseoir sur leurs culs de fainéants, à remplir des coupons et à les commercialiser. Etre riche aujourd’hui signifie avant tout être né dans une «bonne famille». Les efforts et les talents de la majorité des travailleurs sont constamment niés par le capitalisme. Par la routine robotique, le manque de contrôle et de démocratie, ces talents sont à peine utilisés.

    – «Le socialisme ne correspond pas à la nature humaine, car la majorité des gens est égoïste.»

    Encore une autre désinformation. Dans la nature humaine, on peut indubitablement constater des éléments d’altruisme, par exemple dans la relation des parents envers leurs enfants. Mais la lutte pour le socialisme ne se base pas sur l’idée que nous devrons faire «plus avec moins». Bien en contraire. C’est dans la lutte pour les intérêts matériels de la majorité de la population que se trouve le fondement même des mouvements de lutte à venir.

    – «La révolution, c’est un coup d’Etat chaotique réalisé par une petite minorité, comme cela a été le cas en Russie en octobre 1917.»

    C’est quelque chose que l’on entend également très souvent, mais là encore, c’est très loin de correspondre à la réalité. Les révolutions ont lieu seulement quand les masses ne veulent plus vivre de l’ancienne manière : quand les masses laborieuses arrivent sur la scène de l’histoire. Nous parlons d’une intervention consciente et organisée des masses pour prendre la gestion de la société entre leurs mains. La révolution de 1917 était portée par la majorité des travailleurs et des paysans pauvres, organisée dans des conseils (soviets) démocratiquement élus.

    – «Une économie planifiée n’est pas réaliste. Qui voudrait encore travailler?»

    Cette idée rejoint la thèse sur la nature humaine «égoïste». La satisfaction du travail pour les masses trouvera sa source dans le fait qu’elles contrôleront elles-mêmes les produits de leur travail, et ce d’une manière démocratique. Ce sera un stimulant économique et social énorme. Les conditions de vie pourraient de nouveau augmenter sur toute la planète, avec des possibilités gigantesques pour les nouvelles technologies et les sciences, tout en tenant compte de l’environnement. C’est seulement sur base d’une économie démocratiquement planifiée que l’on pourra réellement respecter l’environnement, nécessité vitale pour chacun.

    Ce sera l’intérêt commun et non le profit d’une petite élite qui sera mis en avant par des discussions dans les conseils ou comités de travailleurs. La technologie, qui actuellement conduit à plus de chômage au fur et à mesure des progrès en entraînant des crises de surproduction, pourrait sous une économie planifiée élargir le temps libre, la liberté humaine et la connaissance de ce que la planète a à nous apporter de façon considérable.

    On pourrait encore aborder beaucoup d’autres questions. Est-ce que les travailleurs d’aujourd’hui sont encore exploités, comme au 19e siècle ? La majorité d’entre nous n’est-elle pas devenue heureuse grâce au capitalisme, à l’exception de quelques problèmes provisoires et marginaux ? En fait, la machine de propagande bourgeoise tourne tellement bien que certaines finissent pas la croire, malgré des statistiques qui prouvent le contraire.

    Il en va ainsi du «Quart-Monde», que beaucoup de gens considèrent comme ayant toujours existé, et destiné à disparaître à terme. En réalité, la notion de «Quart-Monde» est née dans les années ’80 suite aux économies opérées dans les services sociaux. Depuis quelques années, même ceux qui ont un emploi ne sont plus certain d’échapper à la pauvreté.

    En fait, les idées capitalistes sont quotidiennement diffusées par des milliers de canaux tandis que la réponse socialiste à ce flot de propagande ne dispose bien évidemment que de peu de moyens. Ainsi, quand la presse bourgeoise parle des grèves, elle parle essentiellement de la nuisance de celles-ci. Pourquoi n’entend-t-on jamais dire de leur part que sans les grèves, les grèves générales et les manifestations de travailleurs, nous n’aurions jamais eu le droit de vote ou la sécurité sociale? Ce n’est pas un fait objectif peut-être? Ou est-ce simplement parce que cela déplaît à l’idéologie dominante, celle de la classe dominante et de ceux qui servent ses intérêts?

    Et d’ailleurs, est-ce qu’il existe encore des idéologies? On prétend aujourd’hui facilement qu’au 19e siècle, à l’époque de Marx, il y avait encore de grandes contradictions de classes, mais que celles-ci ont entre-temps disparu. La raison avancée pour étayer cette thèse est que la classe ouvrière de l’époque de Marx n’existe plus aujourd’hui. C’est un argument auxquelles nos oreilles auraient à force presque tendance à s’habituer, alors qu’il n’y a pas la moindre parcelle de vérité là-dedans.

    Au 19e siècle, la classe ouvrière était une petite minorité largement désorganisée. Politiquement, elle était proche du parti Libéral, et on ne parlait même pas encore d’un parti ouvrier (de tels partis sont nés seulement vers la fin du 19e siècle). Une des tâches les plus importantes de Marx a consisté à donner une idéologie propre et globale à la classe ouvrière ainsi qu’à créer des organisations ouvrières indépendantes de la bourgeoisie. Marx parlait de transformer la classe ouvrière d’une classe «en soi» (qui existe) en une classe «pour soi» (conscience de son existence en tant que classe aux intérêts communs).

    Aujourd’hui, la classe ouvrière constitue la majorité de la population. Elle est bien éduquée, organisée dans des syndicats, possède un certaine degré d’indépendance politique et, depuis le 19e siècle, elle a obtenu le droit de vote, la liberté de la presse, le droit de grève, etc. Il est normal que la bourgeoisie essaie de s’en prendre à ces droits. Les patrons font bien entendu tout pour miner et diviser cette force potentielle en scissionnant des entreprises (la scission de Bayer à Anvers en Bayer et Lanxess, par exemple) ou à l’aide de la sous-traitance.

    C’est dans ce cadre qu’il faut replacer les attaques contre le droit de grève. Les patrons veulent limiter le pouvoir potentiel des travailleurs, avant que ce pouvoir ne se manifeste de manière trop évidente. En France, Sarkozy a fait voter une loi qui oblige les grévistes, dans le secteur des transports publics, à annoncer préalablement une grève à la direction. Ils veulent ainsi pouvoir anticiper les effets de la grève et soumettre les travailleurs à l’intimidation. Les politiciens et les patrons rêvent d’élargir cet exemple à d’autres secteurs.

    En Belgique, comme en France, la discussion sur le «service minimum» est lancée. A quoi sert une grève, si des remplaçants sont sur place? Les directions syndicales nationales de la CSC et de la FGTB n’ont pourtant pas émis de forte résistance contre une telle idée. Dans certains cas, ils ont même aidé la droite dans ses réflexions sur le sujet, tant leur peur des actions spontanées et des mouvements généralisés est profonde. Comme Trotsky l’a déclaré il y a quelques décennies, si les dirigeants syndicaux ne rejettent pas le système, alors ils s’y incorporent de plus en plus.

    Les dirigeants syndicaux ne portent pas juste une «petite» part de responsabilité sur leurs épaules dans l’absence de perspectives de toute une génération et d’une jeunesse immigrée abandonnée par le capitalisme. Aujourd’hui, dans beaucoup de villes européennes, on assiste à l’émergence de ghettos auxquels aucun politicien bourgeois ne s’intéresse. L’aliénation que ceci peut amener, nous avons pu la voir à l’œuvre dans les explosions violentes des banlieues françaises en 2005. Des voitures et des entreprises ont été incendiées. Des attaques ont été commises contre des bus dans lesquels se trouvaient des travailleurs ordinaires victimes de la politique néolibérale au même titre que les jeunes. On a pu voir également les attaques de la part de jeunes immigrés contre leurs compagnons d’âge pendant les manifestations et les grèves contre le CPE (Contrat Première Embauche), tout cela parce qu’ils faisaient selon les jeunes des banlieues partie des «riches». Ces exemples sont tous des signes d’une société malade. De nouveaux partis des travailleurs doivent, avec l’aide des syndicats, défendre toutes les couches de la population, même les plus opprimées. Ne pas le faire ouvre la porte aux islamistes radicaux, et, parmi la jeunesse blanche, à l’extrême-droite.

    Il y a encore de grands débats idéologiques en vue. Ni la classe ouvrière, ni l’exploitation n’ont disparu et, en conséquence, pas non plus la nécessité d’un fondement idéologique. Ce qui a disparu, c’est les idéologies réformistes des sociaux-démocrates, ainsi que des dirigeants staliniens.

    Ces derniers, après la chute des régimes staliniens, ont couru à toute vitesse vers le camp du marché libre, parfois avec quelques «corrections sociales» mais sans le plus souvent. A tel point que l’ancien premier ministre britannique Tony Blair prétend maintenant que le Parti Travailliste n’aurait jamais dû rompre avec les libéraux! En fait, ce que Blair demandait en disant cela, c’était un retour à la période qui a précédé Marx.

    C’est assez logique pour quelqu’un qui a intérêt à ce que l’idéologie capitaliste reste la seule en course, ce qui concrètement signifie que tout doit rester comme avant. «Pas d’idéologie» ou le «pragmatisme» néolibéral, ce ne sont rien d’autre que des formes revêtues par l’idéologie bourgeoise qui a entre autres conduit aux libéralisations, aux privatisations, à la chute du pouvoir d’achat et à une flexibilité croissante.

    Le fait que la discussion sur le «socialisme du 21e siècle» ait été lancée au Vénézuela et en Amérique Latine n’arrive pas au bon moment pour la classe capitaliste. Pour nous, ce n’est que le début du type de discussions qui vont gagner en intensité dans les années à venir, en Europe et dans les pays développés également. Très certainement dans le cadre de cette crise économique qui risque d’être la plus importante jamais connue et si la tendance à la formation de nouveaux partis des travailleurs se confirme.

    Chavez a mené une série de mesures positives pour la population pauvre en partie grâce au prix élevé du pétrole, dont le Vénézuela regorge. Nous soutenons bien entendu ces mesures (supermarchés spéciaux pour les pauvres, campagnes d’alphabétisation, meilleurs soins de santé avec l’aide de médecins cubains,…). Mais, malheureusement, Chavez n’est pas clair sur la nécessité d’opérer une véritable rupture avec le capitalisme. Il n’y a pas encore autant de nationalisations qu’il y en a eu au Nicaragua dans les années ’80, où d’ailleurs le processus révolutionnaire avait été renversé. Suite à la crise économique, au fur et à mesure de la baisse des revenus pétroliers, cela va fortement limiter l’espace dont dispose Chavez pour l’application de mesures sociales et le soutien pour le régime pourrait en sortir considérablement miné. De plus, le développement d’organes de classe indépendants (comités de lutte élus, partis, etc.) est freiné par l’approche «de haut en bas» du régime.

    Les références de Chavez au socialisme reflètent une pression de la base. Elles expriment la volonté des masses d’abandonner la misère du capitalisme pour construire un nouvelle société.

    IDEOLOGIE ET PROGRAMME

    Le mot «programme» est souvent compris comme «cahier de revendications». Mais un programme, c’est bien plus que cela. Le cahier de revendications n’est que la pointe de l’iceberg, autrement dit l’application concrète d’un programme sous certaines conditions.

    Par exemple, il est possible que l’on soit complètement d’accord avec le cahier de revendications du MR aujourd’hui, sans nécessairement souscrire à tout le parcours historique de ce parti, aux différentes réponses que les libéraux ont offert à travers l’histoire. Pour être un vrai libéral, il ne faut pas seulement souscrire à leur cahier de revendications actuel, mais aussi à la manière avec laquelle ils sont arrivés à cela.

    En d’autres termes, un programme signifie: un cadre idéologique consistant et historiquement construit, une analyse de la situation actuelle, une orientation générale, une stratégie et une tactique. Sans cela, on peut être d’accord avec le MR aujourd’hui mais être complètement en désaccord avec eux demain, lorsque les conditions auront changé. A l’inverse, il est possible d’être d’accord avec le populiste de droite Jean-Marie Dedecker sur un cadre historique libéral, mais avec un autre cahier de revendications.

    Dans un parti qui souscrit à l’idéologie dominante, l’idéologie bourgeoise, cela ne joue pas un rôle tellement important. Par contre, lors d’une révolution ou de grands mouvements de lutte, ces différences peuvent comporter des conséquences catastrophiques.

    C’est pour ça qu’un programme, au sens marxiste du terme, ne peut pas se limiter à un simple cahier de revendications. Le Manifeste du Parti Communiste, écrit par Marx et Engels comme proposition de programme pour la «Ligue des Communistes», était en premier lieu une analyse historique du développement du capitalisme, une perspective sur son futur développement, une orientation générale vers le mouvement ouvrier, et enfin une discussion sur la stratégie et la tactique à adopter vis-à-vis d’autres courants socialistes. Une page seulement sur les 80 à 100 pages du Manifeste (en fonction de l’édition), contient un cahier de revendications en 10 points.

    Les thèses d’Avril de Lénine, le document programmatique des Bolcheviks pour la révolution d’Octobre ‘17, ou encore le programme de transition élaboré par Trotsky en 1938 nous donnent la même image. Autrement dit : on n’est pas pour autant marxiste parce qu’on est d’accord avec une ou même toutes les revendications du cahier de revendications. On le devient réellement sur base d’une analyse historique et actuelle de l’évolution de la lutte des classes et des grandes tâches générales qui en découlent.

    Le PSL/LSP et le Comité pour une Internationale Ouvrière basent leur programme sur l’œuvre de Marx, Engels, Lénine et Trotsky; sur les textes des quatre premiers Congrès de la Troisième Internationale, sur le Congrès fondateur de la Quatrième Internationale et sur les textes du CIO (créé en 1974) et de ses pionniers depuis la Deuxième Guerre Mondiale. Cela n’est pas rien et cela ne signifie pas non plus que nous sommes d’accord avec ces textes à la virgule près. Nous utilisons ces documents comme référence, comme méthode d’analyse et comme fil rouge pour nos orientations et tâches pratiques.

    LE PROGRAMME DE TRANSITION

    Naturellement, nous comprenons que tous les travailleurs et les jeunes ne souscrivent pas à 100% de notre programme. C’est pour cela que Trotsky a développé la notion de programme de transition. Par «programme de transition», il entendait un programme qui part de ce qui est nécessaire pour les travailleurs et leurs familles à un moment précis et qui met en avant la transition socialiste de la société.

    Trotsky affirmait qu’il ne sert à rien d’élaborer un programme ou des revendications pour une gestion «plus humaine» du capitalisme, mais qu’il faut cependant offrir des solutions qui partent des besoins des travailleurs et de leurs familles. Trotsky a argumenté que le capitalisme ne sera jamais capable de satisfaire ces besoins, que seule une société socialiste pourrait offrir une solution durable.

    En fait, il n’a rien fait d’autre que d’exprimer sous une forme plus claire un concept que Marx avait déjà élaboré dans le Manifeste du Parti Communiste et Lénine dans ses Thèses d’Avril. Lénine utilisait le slogan «Terre, pain et paix» pour arriver à la conclusion que le gouvernement transitoire qui a succédé au tsarisme après la révolution de février 1917 ne pourrait jamais satisfaire ces revendications pourtant primordiales. A travers cela, il est arrivé au slogan «Tout le pouvoir aux soviets».

    De même, le PSL/LSP parle aujourd’hui de la «nécessité que la production soit basée sur les besoins de la population et pas sur les profits d’un petit groupe de capitalistes» pour arriver à la conclusion que cela n’est possible que par un changement socialiste de la société.

    Le programme du PSL/LSP exprimé ci-dessous n’est rien d’autre qu’une application actuelle de ce programme de transition. Il doit être lu en prenant en considération les remarques ci-dessus à propos de l’idéologie et du programme.

    LE PROGRAMME DE TRANSITION AUJOURD’HUI

    La classe ouvrière est soumise à un recul perpétuel sous le capitalisme. La «cathédrale» de la sécurité sociale et d’autres acquis sont sous attaque depuis des décennies par le patronat et leurs politiciens. Ce n’est pas un processus économique inévitable. Le passé nous apprend que lorsque les travailleurs s’organisent dans des syndicats et des partis, la situation peut se retourner.

    D’une lutte défensive visant à défendre nos intérêts par entreprise ou par secteur, nous devons reprendre tous ensemble l’offensive et réclamer la richesse que nous avons créée : pour créer des emplois décents, bien payés et stables; pour augmenter les allocations ainsi que les retraites et disposer d’un pouvoir d’achat digne de ce nom; pour initier un programme de construction massif de logements sociaux et plafonner les prix des habitations; pour renationaliser, sous le contrôle démocratique de la population, les services privatisés et libéralisés ; pour refinancer l’enseignement; pour organiser collectivement les tâches ménagères qui actuellement pèsent toujours sur les épaules des femmes ;… En bref, pour mettre réellement en avant les besoins de la majorité, au lieu de la soif de profit d’une minorité de grands actionnaires et de patrons.

    Tous ensemble, jeunes et vieux; Flamands, Wallons ou Bruxellois; Belges ou immigrés; hommes et femmes;… nous sommes plus forts !

    1. La technologie : un ami ou un ennemi ?

    Cette situation est navrante lorsque l’on considère que les possibilités n’ont jamais été aussi grandes qu’aujourd’hui.

    Un vol jusqu’en Amérique dure à peine 5 heures. Grâce aux ordinateurs, le boulot de centaines de milliers d’employés et de travailleurs peut être réalisé avec beaucoup moins de personnes. Internet, les e-mails et les GSM rendent la communication plus facile pour ceux qui y ont accès et créent pour beaucoup de jeunes et de travailleurs le sentiment d’appartenir à une communauté internationale. La médecine peut résoudre des problèmes dont nous ne pouvions que rêver auparavant. Mais, malgré toutes ces avancées, la chasse au profit joue un rôle extrêmement désastreux.

    Les fonds gouvernementaux pour la recherche scientifique sont drastiquement réduits. Seule la recherche servant directement les intérêts des entreprises et leur fournissant des bénéfices est encore subventionnée. Et quand les entreprises prétendent vouloir financer la recherche, ils la déduisent en réalité de leurs impôts.

    Les seuls qui en profitent sont les patrons. Les centres de recherches perdent ainsi leur indépendance. De plus, cela entraîne une concurrence entre les différents centres pour tenter d’obtenir des fonds. Les scientifiques sont isolés ; ils ne peuvent pas se concerter ni échanger des expériences, ce qui entraîne un gaspillage énorme d’énergie, de temps et d’argent.

    Et même si l’on fait de la recherche utile, et que l’on arrive à trouver des solutions – pensons aux différents traitements des problèmes cardio-vasculaires – les traitements sont pour beaucoup de gens inaccessibles à cause de leur coût.

    Pendant ce temps-là, les problèmes pour lesquels il faut urgemment trouver une solution continuent de s’empiler. Pensons au SIDA, aux catastrophes naturelles qui coûtent la vie à des millions de gens, aux traitements des cancers, à la production des déchets et à la pollution, à la famine dans de larges parties du monde,… Prenons plus particulièrement la famine. Un raisonnement logique serait: il y a une grave pénurie de nourriture, il faut donc produire plus. Et pourtant, les usines tournent au ralenti en craignant la surproduction, alors qu’une énorme quantité de nourriture est détruite tout simplement pour garder les prix à un certain niveau.

    L’écrasante majorité des scientifiques sont d’accord pour affirmer que le réchauffement de la planète aura des conséquences désastreuses pour de larges parties du globe si on ne commence pas à y remédier maintenant. Selon des centaines d’experts présents lors du sommet sur le climat à Bruxelles (en avril 2007) l’Antarctique, l’Afrique Subsaharienne, les îlots et les grands deltas asiatiques sont les régions qui souffriraient le plus du réchauffement de la planète. On parle d’inondations, de tempêtes et de glissements de terrain qui se produiront plus fréquemment. Les franges les plus pauvres de la population mondiale seront les plus touchées par ces catastrophes naturelles. Mais l’existence d’une quantité inquiétante d’espèces de la faune et de la flore est également menacée, entre autres, par le réchauffement de la planète.

    Une économie planifié à l’échelle mondiale et sous le contrôle démocratique de la population permettrait de prendre des mesures immédiates pour réduire «l’empreinte écologique» de l’Homme, notamment par un usage massif de transports publics gratuits mais également par des investissements massifs dans la recherche de sources d’énergie alternatives. Il est difficile de se rendre actuellement compte du potentiel de ces alternatives, du fait que l’industrie pétrolière et automobile leur mettent souvent des bâtons dans les roues.

    La question-clé est qu’aujourd’hui, la science et la technologie sont aux mains et au service des multinationales. Ainsi, les différents gouvernements bourgeois ne peuvent pas prendre les mesures qui s’imposent, ou alors uniquement de façon ambiguë quand il est déjà trop tard. Leur politique est destinée à satisfaire la soif de profit, et pas à satisfaire les besoins de l’Homme et de son environnement. Nous devons exiger le contrôle démocratique de la science, au nom des scientifiques et de la population mondiale.

    Aussi longtemps que les banques, les multinationales,… disposent du monopole de toutes les solutions possibles, nous sommes totalement impuissants. Ce n’est pas le développement de la science et de la technologie qui est en soi désavantageux, mais bien leur contrôle par les groupes mentionnés ci-dessus. Au service de la population, la technique et la science pourraient sauver et améliorer la vie de millions de personnes.

    2. Pour des emplois décents, stables et bien payés.

    • RETABLISSEMENT DE NOTRE POUVOIR D’ACHAT!
    • STOP A LA FLEXIBILISATION!
    • REDUCTION DE LA CHARGE DE TRAVAIL PAR LA REDISTRIBUTION DU TRAVAIL DISPONIBLE!
    • 32 HEURES PAR SEMAINE SANS PERTE DE SALAIRE ET AVEC EMBAUCHES COMPENSATOIRES!

    Les paroles du gouvernement contrastent de façon criante avec ses actes. Dans de larges parties de Bruxelles et de Wallonie, il y un chômage massif et structurel. En juin 2007, le chômage dans la région Wallonne était de 14,4% (allocataires au chômage complet et élèves ayant quitté le système scolaire). Presque la moitié de cette catégorie était au chômage depuis plus de 2 ans. Dans la région Bruxelloise, à la même période, le nombre de chômeurs était de 19,9%. Des générations entières sont exclues par l’économie de marché !

    En Flandre, certains essaient de donner l’impression que le chômage a baissé considérablement dans le courant de 2006-2007 et qu’il y a même une pénurie dans certains métiers. Beaucoup de ces métiers sont flexibles (nettoyage, construction) et ne sont pas toujours rémunérés convenablement pour les efforts supplémentaires demandés. Que veulent les patrons? Des travailleurs prêts à se faire exploiter pour une bouchée de pain? La soi-disant pénurie est utilisée pour importer, de façon sélective, des travailleurs bon marchés en Belgique. Des travailleurs qui disposent de moins ou, dans le cas des sans-papiers ou des travailleurs au noir, d’aucun droits sociaux du tout. Le PSL/LSP défend les droits égaux pour tous les travailleurs. Ce n’est que de cette façon que l’on pourra combattre la pression sur les salaires et la politique de diviser pour régner appliquée par le patronat. Tout ce qui nous divise nous affaiblit!

    Au niveau national, plus d’un million de personnes sont totalement ou partiellement dépendantes d’une allocation de chômage. Ce niveau est un record historique. Au début des années ’70, le taux de chômage officiel tournait autour des 70.000-80.000. En 1995, on comptait déjà 505.944 chômeurs : une croissance de 1,9% à 12,3% de la population active !

    Depuis la moitié des années ’80, les chômeurs les plus âgés (de + de 50 ans) ne sont plus comptabilisés dans les statistiques. C’était déjà le cas pour les prépensionnés, et depuis 1986, pour ceux qui sont en pause carrière. Aujourd’hui, tous ces groupes constituent ensemble plusieurs centaines de milliers de personnes, qui reçoivent une allocation de l’ONEM mais ne sont pas comptées dans les statistiques.

    Le chômage partiel et temporaire – pour ceux qui ont signé un contrat de travail mais qui, pour des raisons particulières, ne peuvent pas travailler – n’est pas non plus repris dans les statistiques. C’est également le cas pour les gens qui sont «activés», pour qui on utilise l’allocation de chômage comme une subvention salariale! Les patrons sont ravis! Depuis juillet 2004, les chômeurs entre 50 et 58 ans sont réinscrits comme demandeurs d’emploi à cause de la politique «d’activation» des chômeurs, sauf s’ils peuvent prouver au gouvernement que leur carrière a été suffisamment longue. Le gouvernement force les travailleurs à travailler plus longtemps à travers le Pacte des générations. Mais lorsqu’ils sont licenciés sur le tard, la réalité nous montre que peu d’employeurs acceptent de leur offrir une seconde chance!

    En septembre 2007, le chômage officiel en Flandre était de 6,43% (selon le VDAB). Il faut tenir compte qu’il y a plus de gens en pause carrière et de prépensionnés en Flandre qu’en Wallonie ou à Bruxelles. En outre, la politique d’activation et de suspension commence à «payer»: c’est-à-dire que des dizaines de milliers de personnes ont perdu leur allocation de chômage ces dernières années.

    A Ostende, suivant le modèle de «l’activation», les jeunes sont massivement soumis à des sessions intensives pour la recherche d’un emploi, afin de leur apprendre à solliciter collectivement. Il ne s’agit même pas de formations professionnelles, et il n’y a aucune garantie d’avoir un emploi à la fin du parcours. De cette façon, les statistiques du chômage peuvent être embellies. D’autre part, le système incertain et extrêmement flexible des chèques-services connaît un succès grandissant. En juillet 2007, 4,38 millions de chèques ont été utilisés. Le système s’est rapidement répandu, surtout en Flandre (66,2% pendant la première moitié de 2007). A Bruxelles (5,9%) et Wallonie (27,8%), c’est moins le cas.

    L’introduction d’emplois à 10, 20 ou 30% permet de beaucoup jongler avec les statistiques. Ainsi, si vous allez repasser ou nettoyer 3 à 4 heures par semaine grâce aux chèques-services, le gouvernement vous raie déjà des statistiques officielles de chômage. Ce genre d’emploi est largement subventionné par le gouvernement, et le système risque de devenir impayable. Sans parler du fait que les contrats flexibles, temporaires et intérimaires sapent de plus en plus la position des travailleurs qui bénéficient encore un emploi stable.

    Ceux qui plaident pour une limitation du paiement des allocations de chômage dans le temps afin d’obliger les gens à dépendre du CPAS vivent sur une autre planète ou se foutent tout simplement des conséquences sociales de telles mesures. S’il est vrai que les gens choisissent de vivre d’une allocation plutôt que d’aller travailler parce que la différence entre les deux est trop faible, alors il faut augmenter les bas salaires plutôt que de réduire encore les allocations.

    Les bureaux d’intérims sont devenus aujourd’hui des entreprises florissantes. Cela n’a rien d’étonnant. De cette manière, les entreprises n’ont plus à assumer la responsabilité d’un employé fixe. L’entreprise se dirige directement vers l’agence d’intérim qui lui fournit des travailleurs, parfois même avec des contrat à la journée! Vous n’avez plus besoin de travailleurs? Licenciez-les sans en subir les conséquences. Certains intérimaires travaillent depuis plus de 3 ans pour le même patron, ils fournissent à ce patron toute leur expérience, mais ne reçoivent ni la sécurité d’emploi, ni un salaire décent.

    Les Etats-Unis sont cités comme l’exemple à suivre en matière de lutte contre le chômage. Le taux de chômage y serait très bas (entre 4 et 5 %). Ce que l’on ne raconte pas, c’est que la majorité des gens sont obligés de prendre un deuxième boulot après avoir fini le premier pour pouvoir s’en sortir. Ce modèle est en réalité un champ de bataille social. Pourtant, on voit que notre marché du travail évolue vers une croissance des contrats à temps partiel et des chèques-services, de plus en plus comme le système américain.

    Un argument trop souvent cité est le manque de formation. Quelle hypocrisie! Les entreprises exigent que les élèves qui quittent l’école soient formés pour un job spécifique dans l’entreprise. La subvention des écoles par ces entreprises, pour pouvoir utiliser ces jeunes une fois sortis de leurs études, n’est plus un phénomène exceptionnel depuis longtemps. Une fois que le jeune – spécialement formé – n’est plus utile pour l’entreprise, il est mis à la porte.

    Le patronat exige d’assainir le financement de l’éducation. Le raisonnement est toujours le même : les écoles doivent fournir des travailleurs formés, alors pourquoi organiser une formation large quand il s’agit d’emplois précaires ou de rester au chômage? La revendication du mouvement ouvrier comme quoi l’enseignement doit fournir une formation générale est un luxe qui doit être réservé aux enfants de la bourgeoisie. Voilà les pensées cyniques qui se cachent derrière les chiffres et les plaidoyers des chefs d’entreprises et de leurs organisations.

    La crise du capitalisme mène de plus en plus à la croissance du chômage et des emplois précaires à bas salaires. L’ironie est que cela renforce la position des capitalistes, parce qu’ils peuvent menacer les travailleurs avec l’argument que si ces derniers n’acceptent pas les conditions qu’on leur impose, il y en a d’autres qui accepteront de travailler aux conditions imposées.

    Le PSL/LSP défend un rétablissement complet de l’index et un salaire minimal de 1.500 euros net; dénonce le démantèlement de la sécu et « l’érosion » des contrats de travail. Nous nous opposons à chaque fermeture d’entreprise car, dans le cadre du système capitaliste, chaque fermeture mène au chômage et à la pauvreté. La seule revendication capable de commencer à résoudre le problème du chômage est l’introduction de la semaine des 32 heures, sans perte de salaire et avec des embauches compensatoires.

    3. Stop aux libéralisations et aux privatisations ! Renationalisation sous contrôle démocratique de la population!

    Dans les années ‘90, après la chute du Bloc de l’Est, l’idée selon laquelle le marché libre était le seul système viable a été largement diffusée. Tant la social-démocratie que les dirigeants syndicaux ont cru à cette fable et ont refusé de continuer à résister à l’offensive idéologique de la bourgeoisie. En utilisant l’unification européenne comme excuse, nos services publics ont été attaqués les uns après les autres, libéralisés et préparés à la concurrence privée. Au vu de la croissance plus lente de beaucoup d’autres secteurs – en conséquence de la crise de surproduction – le capital a cherché de nouveaux créneaux pour faire du profit.

    Aujourd’hui, beaucoup de travailleurs commencent à percevoir les conséquences de cette politique – ou à la sentir dans leur portefeuille ! On pense par exemple à l’augmentation des prix de l’électricité en Belgique : "Test achat" a ainsi calculé que le prix pour un kilowattheure (kWh) chez Electrabel a augmenté de 50% entre janvier 2005 et décembre 2006.

    Peu après les élections de juin 2007, Electrabel a annoncé qu’elle augmenterait à nouveau ses prix de 13% à 20% ! Après d’énormes protestations, l’entreprise a donné l’impression qu’ils n’allaient finalement pas mettre en place cette décision. Mais en réalité, le CREG, la Commission de Régulation de l’Electricité et du Gaz, a publié un peu plus tard les résultats de sa recherche sur les augmentations des prix du gaz et de l’électricité. La commission a confirmé que, pour les particuliers, l’augmentation sera de 17% en 2008. Une famille moyenne va donc payer environ 172 euros de plus par an pour sa consommation d’énergie.

    Et ceci alors que, selon le VREG qui est le régulateur flamand des marchés du gaz et de l’électricité, le nombre de familles qui ne sont pas capables de payer leur facture d’énergie a augmenté pour atteindre 91.600 en 2006. Une augmentation de 50% par rapport a l’année passée ! Le nombre de « mauvais payeurs » en Flandre a donc atteint un niveau record en 2006. Déjà 4,5% des ménages flamands sont dépendants du tarif social pour leur électricité. Le VREG affirme, à propos de ce scandaleux bradage d’un besoin essentiel, que « Les clients sont seulement intéressants pour les fournisseurs s’ils rapportent quelque chose. Les mauvais payeurs sont donc mis plus vite à la porte par leurs fournisseurs. »

    Sur le marché du gaz, au début de la libéralisation, Electrabel a temporairement baissé ses prix pour attirer le plus de clients possible. Du moment que le marché a été divisé entre plusieurs concurrents, les prix ont augmenté assez vite pour assurer un maximum de profits pour les patrons et les gros actionnaires du secteur. C’est l’évolution naturelle à attendre de chaque forme de libéralisation et de privatisation d’un service public.

    Le PSL/LSP se demande pourquoi la collectivité n’a pas de contrôle sur le marché de l’énergie. Pourquoi le profit est-il central s’il s’agit de notre consommation d’énergie ? Le PSL/LSP exige l’abolition des 21% de TVA sur l’énergie, qui représente un besoin essentiel pour chaque famille et revendique un gel des prix de l’énergie comme première mesure dans le processus de mise sous contrôle démocratique de tout le secteur de l’énergie. C’est seulement sur cette base que seront pris en compte les besoins des travailleurs et de leurs familles (y compris les besoins écologiques).

    La libéralisation et la privatisation signifient toujours un drame social concernant le nombre d’emplois et les conditions de travail. A La Poste, 9.000 des 35.000 emplois ont été supprimés ce qui équivaut à la fermeture de deux grandes usines d’assemblage de voitures. Les travailleurs de La Poste qui sont restés ont été confrontés au système « géoroute » qui conduit à une augmentation perpétuelle de la charge de travail pour moins de personnel. Cela a mené, ces dernières années, à une vague de grèves spontanées dans de nombreux bureaux de poste à travers tout le pays. A quand un mouvement unifié pour jeter tout le plan « géoroute » à la poubelle et stopper net les pas « en avant » vers la libéralisation ?

    Au début des années ’90, 26.500 personnes travaillaient encore chez Belgacom alors que ce chiffre est descendu à 15.000 début 2007. Aujourd’hui, la direction veut encore éliminer 1.500 places. A la classe ouvrière de supporter drames sociaux et pertes d’emplois tandis que les profits exorbitants sont réservés aux patrons. En 2006, Belgacom a ainsi réalisé 6,1 milliards d’euros de profit. La même année, le top manager Didier Bellens a reçu 1,85 millions d’euros de salaire, en plus des 480.000 euros de dividendes pour ses actions. Il en avait d’ailleurs également vendu pour une valeur de 6 millions d’euros. Les ex-« services publics » sont de véritables « jackpots » pour les capitalistes. Et bien sûr, les libéraux, les sociaux-chrétiens et les sociaux-démocrates trouvent que ce genre de profits ne devraient surtout pas être attaquables. Pour eux, les profiteurs sont les chômeurs, dont il faut au plus vite suspendre les allocations ou limiter celles-ci dans le temps.

    Dans les chemins de fer, le transport de marchandises a déjà été libéralisé, et le transport de voyageurs est en train d’y être préparé. L’avenir en Belgique sera-t-il le même qu’en Grande-Bretagne ? Les divers accidents et autres misères qu’y ont connus les chemins de fer privatisés sont loin d’être des coïncidences pour l’opinion publique qui a, depuis, clairement changé d’opinion vis-à-vis de la privatisation. Aujourd’hui, la revendication de la renationalisation du secteur trouve de plus en plus d’échos en Grande-Bretagne, ce qui représente un sérieux changement par rapport aux années ’90.

    En Amérique Latine également, les ravages de la politique de privatisation ont provoqué un changement dans la conscience. Aujourd’hui, les « gouvernements de gauche » en Bolivie et au Venezuela sont mis sous pression pour nationaliser les richesses naturelles. Les pillages et les expropriations par les multinationales sont de moins en moins tolérés par les masses. Comme l’expliquait Engels, le compagnon de Marx, les nationalisations apparaissent déjà comme des «éléments de socialisme» qui s’imposent à la veille société en crise. Ils démontrent la faillite du capitalisme et du libre marché.

    Pendant que les gouvernements néolibéraux organisent la casse sociale, le nombre de personnes ayant besoin de services publics de qualité augmente de jour en jour. Par exemple, de nombreux parents qui travaillent ont un réel problème concernant la garde de leurs enfants. Ils seraient sans aucun doute enchantés d’avoir à disposition des crèches dignes de ce nom, et organisées par l’Etat.

    Chaque jour, des milliers d’ouvriers et d’employés vont au boulot en transport en commun. Quelqu’un est-il capable de nous expliquer pourquoi les transports en train, en tram et en bus sont de plus en plus chers ? Quelle est la logique derrière cela ? A Bruxelles, n’est-ce pas scandaleux de devoir payer 2 euros pour un ticket de la STIB si celui-ci n’a pas été acheté à l’avance à un guichet ? Est-ce comme cela que l’on pense pouvoir résoudre les problèmes des embouteillages ? Un gouvernement au service de la population rendrait directement tous les transports publics gratuits pour faire face au problème des embouteillages et à la pollution. Dans le secteur de transports, il existerait des règles beaucoup plus strictes pour éviter que la pression du travail – en réalité la pression des profits – n’impose à des chauffeurs fatigués de devoir prendre la route.

    Aujourd’hui, la destruction du système des soins de santé est une réalité flagrante et mène parfois à des situations dramatiques. Selon l’Organisation Mondiale de la Santé, les Belges doivent déjà payer eux-mêmes 33% de leurs coûts médicaux. L’OCDE estime ce pourcentage à 28%. Le sous-financement des hôpitaux devient une excuse pour les médecins pour commencer à organiser des consultations « personnalisées », pour lesquelles ceux qui paient le plus sont évidemment les plus vite servis. Les médecins sont rémunérés selon leurs prestations, ce qui favorise les abus.

    Le PSL/LSP veut mettre fin à la course aux profits dans l’industrie pharmaceutique, à la commercialisation rampante et aux abus de la médecine de prestation. Nous sommes pour la création d’un service de soins de santé public et national, avec des statuts fixes – qui sont de plus en plus minés dans les hôpitaux publics – et des salaires décents pour tout le personnel. Selon nous, des éléments tels que le profit ou le prestige de certains individus ou de multinationales ne peuvent intervenir dans le secteur des soins de santé.

    L’argument invoqué en permanence pour la privatisation est le manque de "rentabilité" des services publics. Mais comment un service public peut-il être rentable ? Un service public a pour objectif de rendre un certain nombre de services le plus accessible possible pour chacun, qu’il soit riche ou pauvre.

    Une prestation de services est par définition non rentable parce qu’elle ne peut générer de bénéfice. Ce qu’on oublie, c’est que le droit à des services publics – tout comme à la sécurité sociale – a été arraché par la lutte dans l’objectif de pourvoir à certains besoins sociaux.

    En réalité, la libéralisation et la privatisation signifie la vente de nos services, avec moins d’emplois disponibles et des conditions de travail diminuées, pour nous faire payer doublement le prix. Ainsi le gouvernement économise-t-il sur les dépenses publiques, mais au détriment de qui ? Nous ne payons pas un centime de moins d’impôts, tandis que les managers de nos ex-services publics s’en mettent plein les poches !

    Le PSL/LSP lutte contre la privatisation, pour la gratuité des transports publics, des soins de santé, de la distribution postale et de la collecte des déchets, parce que tous ces services doivent être accessibles a tout le monde, quelque soit l’âge, la situation professionnelle, le sexe,…

    L’argument selon lequel un service public fonctionne mal par définition est largement répandu dans les consciences. Les services publics ont toujours été victimes de ragots. Ils seraient "inefficaces", "bureaucratiques", "tout sauf ponctuels", etc. Et, au contraire, dans le privé, tout marche évidemment à merveille.

    Cette image est complètement fausse. Il y a toujours eu trop peu d’argent disponible pour les services publics, et ce même dans les "golden sixties". Mais même avec suffisamment d’argent, le problème n’est pas totalement résolu. Pour qu’un service fonctionne le plus efficacement possible, la participation de tous ceux qui l’utilisent ou y travaillent est également nécessaire.

    Par exemple, les chemins de fer seraient bien plus efficaces et accessibles en impliquant les travailleurs et les voyageurs dans le fonctionnement du service. Cela permettrait à beaucoup de travailleurs de laisser leur voiture chez eux pour se rendre sur leur lieu de travail en prévoyant suffisamment de correspondances aux heures opportunes. Ces services seraient gratuits et donc accessibles a tous. Les points de départ du PSL/LSP sont l’efficacité et l’accessibilité pour tous, et non pas la logique de privatisation pour le profit de quelques-uns.

    4. Et la concurrence alors ? Qui va payer tout cela ? Il n’y a pas d’argent pour cela ? Les patrons ne vont jamais l’autoriser…

    Une citation des ouvriers des Forges de Clabecq, à l’époque de leur lutte dans les années ’90 pour le maintien de leur usine : « Si tu mets une pile de briques sur le sol, elles ne vont pas se mettre l’une sur l’autre d’elles-mêmes pour former un mur une maison. C’est pour cela que l’intervention humaine est nécessaire. C’est le travail qui génère la richesse. ». Des richesses, il y en a assez. La question est : qui en bénéficie ?

    Si nous regardons à quel point la productivité a augmenté durant les dernières décennies, il apparaît que la durée du travail n’a pas augmenté aussi vite. Si c’était le cas, nous ne travaillerions qu’une paire d’heures par jour. Tous les profits que les patrons ont amassés, ils les ont gardés dans leurs poches.

    Pour résoudre le chômage, le travail disponible doit être partagé entre tous les travailleurs disponibles. Cela déterminera la durée hebdomadaire du travail, qui pourra ainsi être fortement diminuée. Mais attention, nous voulons que le salaire soit totalement conservé, car nous y avons droit.

    Naturellement, le patronat et le gouvernement vont refuser, car cela signifierait qu’une grosse partie de leurs profits leur échapperaient. Cela signifierait aussi que leur position concurrentielle serait menacée. Mais la concurrence est aussi vieille que le capitalisme. Les travailleurs doivent-ils tout avaler pour être « concurrentiels » ? Si on pousse la logique à l’extrême, cela peut être lourd de conséquences. Cela signifierait que nous devrons accepter à terme les mêmes salaires que les ouvriers chinois ou indiens surexploités.

    Si les travailleurs et leurs organisations avaient suivi le même raisonnement au début du 20e siècle, nous serions encore en train de travailler 12, 13 ou 14 heures par jour au lieu de 8. Lorsque la classe ouvrière a fait pression pour la journée des huit heures, après la 1ère guerre mondiale, il n’était pas question de pertes de salaire.

    Au lieu de partir de la question « Qu’est-ce qui est supportable et réaliste pour les entreprises », nous préférons nous demander « Qu’est-ce qui est nécessaire pour les travailleurs ». Nous trouvons simplement logique que la richesse produite par les travailleurs serve à subvenir à leurs besoins.

    5. Pour un syndicat combatif !

    Une des conditions pour atteindre les objectifs ci-dessus, c’est que les travailleurs puissent compter sur des organisations, tant sur le plan politique que syndical, avec lesquelles pouvoir mener le combat pour ces revendications.

    C’est certain, une bataille sera nécessaire à l’intérieur des syndicats, pour remettre en avant le syndicalisme de combat. Le modèle de négociation par lequel la direction des syndicats essaye de convaincre le patronat a échoué. La force des syndicats réside dans leur capacité à mobiliser les travailleurs dans la défense de leurs intérêts immédiats, comme l’histoire l’a démontré à mainte reprises.

    C’est de cela que les patrons ont peur. Au contraire, si le patron sait que la direction syndicale est prête à accepter un petit accord, il n’a aucune raison de faire des concessions. Si par contre, il comprend que le syndicat est prêt à se dresser comme un seul homme pour défendre les intérêts des travailleurs, il réagira de façon plus prudente. Ce qui importe, c’est que les travailleurs se lancent avec un peu plus de confiance dans la lutte, en sachant qu’ils ont la possibilité d’y gagner quelque chose.

    Les syndicats ne servent pas à aider les patrons dans leurs « restructurations », ils servent à défendre les intérêts des travailleurs. A la place du syndicalisme de concertation, nous défendons le syndicalisme de combat. Nous soutiendrons chaque lutte dans ce sens. Il est crucial de se battre pour chaque emploi et pour le maintien de tous les acquis.

    Un nouveau parti des travailleurs devra aussi organiser une aile gauche combative à l’intérieur des syndicats pour offrir une alternative à la « stratégie » d’enterrement des mouvements de lutte des directions syndicales. C’est la principale raison pour laquelle beaucoup de travailleurs sont aujourd’hui cyniques par rapport au rôle des syndicats. C’est aussi pour cette raison que les militants syndicaux ont du mal à convaincre les jeunes de s’engager dans un travail syndical.

    Pensons par exemple à l’arrêt du mouvement contre le Pacte des Générations en 2005. Au cours de cette lutte, la base a été « consultée », dans le meilleur des cas, au cours d’assemblées régionales sans avoir la possibilité de décider réellement. Le mouvement a été stoppé arbitrairement par la direction de la FGTB et de la CSC. Pourquoi les militants ne pourraient-ils pas décider eux-mêmes de la fin ou non d’un mouvement ? Nous avons besoin d’une réelle démocratie syndicale, fondée sur une base active et impliquée qui peut décider elle-même du déroulement de la lutte par des votes démocratiques. La force de la classe ouvrière est potentiellement présente mais nous avons besoin de leaders syndicaux qui osent utiliser leur force pour défendre nos emplois, nos salaires, nos pensions, etc. Et qui puissent concilier ce combat quotidien avec la recherche d’une autre société.

    6. Appel pour la formation d’un nouveau parti des travailleurs

    Mais la classe ouvrière a aussi besoin d’un parti capable de traduire cette stratégie politiquement. Il est clair que le PS et le SP.a sont toujours considérés par une majorité de travailleurs comme « leurs » partis. Mais ces partis ne sont plus prêts à mener la lutte.

    Au contraire, ils sont devenus parmi les meilleurs exécutants des politiques d’austérité. Leur participation aux gouvernements durant de nombreuses années – ainsi que la désorientation et la démoralisation qui ont suivi la chute des régimes dits « socialistes » avec comme conséquence le triomphe des dogmes du libre marché – ont totalement corrompu ces partis.

    Si nous voulons une traduction politique de nos revendications de travailleurs, nous devons en conséquence construire un nouveau parti, mais nous savons qu’un tel parti ne tombera pas du ciel. Comme le dit l’adage populaire, Rome ne s’est pas construite en un jour. Celui qui n’est pas prêt à se retrousser les manches pour franchir les premières étapes vers un nouveau parti oublie que le Parti Ouvrier Belge (POB, l’ancêtre du PS) n’est pas apparu du jour au lendemain.

    Nous sommes conscients qu’un tel nouveau parti des travailleurs ne sera vraiment viable que s’il est soutenu par une partie importante du mouvement ouvrier, et en particulier par des fractions syndicales, sur base d’expériences de mouvements et de luttes massives. Mais si nous devons attendre les directions syndicales, cela peut encore durer longtemps. C’est seulement s’il y a suffisamment de pression de la base que les meilleurs d’entre eux seront prêts à se mettre en avant.

    Ce parti doit être ouvert à tous ceux qui veulent lutter contre la casse sociale. Des discussions libres doivent être ouvertes pour les différents courants, syndicats, groupes d’actions,… qui veulent défendre leurs points de vue propres. Ce parti doit se battre contre chaque division des travailleurs, que ce soit sur base de la nationalité, de la race, du sexe, ou de la religion. Les seuls qui trouvent un intérêt quelconque dans ces divisions sont les patrons et leur système. Tous ensembles, nous sommes forts et, en luttant pour des droits égaux pour tous, nous renforcerons cette unité.

    Ce parti large doit aussi lier la lutte contre l’exploitation de tous les ouvriers, y compris ceux du monde néo-colonial. Les intérêts des travailleurs des autres pays sont souvent présentés comme étant opposés aux intérêts des travailleurs d’ici, mais c’est là une tentative de briser la lutte internationale. Les travailleurs de VW Forest auraient certainement été plus forts dans leur combat contre la restructuration s’ils avaient été capables de convaincre leurs collègues des autres sites VW de mener une lutte efficace à l’échelle internationale contre la fermeture. Mais la lutte internationale ne peut pas être une excuse pour ne pas mener le combat dans son propre pays. Les deux sont indissociablement liés.

    Un nouveau parti des travailleurs doit respecter le droit à l’autodétermination des Flamands, des Wallons et des Bruxellois, sans tomber dans le piège de ceux qui veulent affaiblir les travailleurs par la surenchère communautaire. Le PSL/LSP estime que chaque peuple doit avoir le droit de prendre ses propres décisions. Si un peuple veut vivre avec un autre peuple dans le cadre d’un Etat national, cela doit être possible. Mais sur un pied d’égalité et sur une base complètement libre.

    Être obligés de vivre dans un Etat où une partie de la population a moins de droits que l’autre, cela ne peut mener qu’à des situations désastreuses. Nous sommes par conséquent pour toutes les facilités susceptibles de mettre un terme aux sentiments d’oppression nationale. Donc également pour les facilités linguistiques.

    Beaucoup d’Etats capitalistes sont basés sur l’oppression de peuples ou de groupes de population. La Belgique a sur ce plan une mauvaise réputation. Les Flamands ont ainsi été empêchés durant 100 ans d’aller à l’école dans leur propre langue. Toute l’administration était francophone. Il était donc facile d’affaiblir les travailleurs en les divisant sur une base linguistique. On pouvait par exemple lire dans le journal wallon « Les Nouvelles », du 25 octobre 1904 : « Les Flamands de La Louvière ont reçu hier leur salaire et l’ont directement dépensé pour se saoûler et provoquer des bagarres pendant toute la nuit. Il faut relever qu’à chaque fois que des telles bagarres générales se déroulent à La Louvière, on y trouve des Flamands qui jouent avec des couteaux ».

    Entre temps, l’image s’est transformée. Selon le modèle propagé aujourd’hui, le Flamand est le travailleur courageux, le Wallon le profiteur et l’immigré celui qui sort son couteau. Fondamentalement, c’est toujours la même rengaine : les patrons empochent les profits tandis qu’ils dressent les travailleurs les uns contre les autres. C’est surtout la sécurité sociale qui constitue une épine dans le pied des patrons et du gouvernement. En brandissant la menace d’une scission, ils font du chantage sur les travailleurs wallons et, en même temps, ils nourrissent la Flandre de l’illusion que cela serait bon « pour tous les Flamands ».

    Les seuls qui tireraient avantage de la scission de la sécurité sociale sont les patrons, aussi bien les Wallons que les Flamands. Ils feraient pression sur nos salaires, nos pensions, nos pécules de vacances et nos prestations de santé en menaçant de déménager vers l’autre région. Aucun travailleur n’y a intérêt, ni les Wallons, ni les Flamands, ni les immigrés. Seuls les patrons y gagneraient.

    Un tel parti devrait agir pour la nationalisation des secteurs les plus importants de l’économie, sous contrôle ouvrier, car aux mains du privé, ces secteurs ne servent qu’à générer des profits pour les patrons et leurs actionnaires (banques, investisseurs, etc.).

    La seule manière pour que la population puisse profiter des revenus et/ou des services de ces secteurs (énergie, transport, banques…) est de les nationaliser. Mais il ne faudrait pas s’arrêter là. Dans les mains de l’Etat actuel, qui n’est ni plus ni moins qu’une marionnette aux ordres de la classe capitaliste, ces services devraient toujours être rentables et ne pas trop coûter à l’Etat. La même argumentation est actuellement utilisée pour privatiser les entreprises publiques.

    La participation et le contrôle des travailleurs et de leurs familles dans et sur la politique sont essentiels. En tant qu’utilisateurs et qu’employés, ils savent mieux que quiconque où se situent les déficiences et quelle est la meilleure manière d’y remédier.

    7. Révolution

    Au regard du fait que les multinationales travaillent main dans la main avec les régimes les plus sanguinaires ; que des guerres sont menées pour le pétrole en faisant des milliers et des milliers de victimes innocentes ; que ces multinationales dressent des populations entières les unes contre les autres pour qu’elles finissent, à la longue, par s’entretuer ; qu’elles préfèrent encore laisser les gens mourir de faim plutôt que de toucher à leurs profits et qu’au besoin l’armée choisit la solution militaire, il est clair que ce programme ne peut être atteint autrement que par une lutte résolue.

    Bien plus, pour avoir la possibilité de pouvoir décider nous-mêmes de ce qu’on veut faire de la richesse produite, un mouvement déterminé des travailleurs sera nécessaire pour arracher le pouvoir des mains de la petite minorité des capitalistes.

    Beaucoup feront remarquer que cette minorité est très puissante, car elle dispose de tous les instruments nécessaires pour maintenir les gens sous contrôle. Elle utilise tous les canaux pour diffuser son idéologie, comme l’enseignement, les médias,… afin de faire croire aux gens que le système capitaliste est le seul système qui peut fonctionner.

    Et si ce n’est pas suffisant, elle contrôle encore la police, l’armée et la justice pour faire respecter les lois capitalistes par la force. Les tentatives visant à briser le droit de grève se situent complètement dans cette logique, tout comme la tentative d’exercer un contrôle policier plus sévère au travers d’un appareil policier unifié. Comme nous le voyons à chaque grève, la justice et la police ne sont pas de notre côté.

    Mais cela ne peut pas nous arrêter. C’est le rapport de forces qui sera déterminant. Une classe ouvrière convaincue, dont le noyau le plus dynamique est décidé à ne plus se laisser berner, et déterminée à prendre le pouvoir ne peut pas être arrêtée, même par mille armées.

    Nous devons tenir compte du fait que le capitalisme en crise est continuellement pendu à un fil. Si le système ne parvient plus à convaincre dans ses propres rangs, ce qui est souvent le cas lors d’une révolution, alors il est pour ainsi dire mort.

    Le meilleur exemple est celui de la révolution russe, mais aussi de Mai 68 en France, ou plus récemment les révolutions en Serbie, Géorgie, Ukraine, etc. Ces révolutions ont montré comment une classe dirigeante peut perdre prise sur ses propres troupes face à un mouvement de masse qui se développe. On peut encore parler de la radicalisation énorme en œuvre en Amérique Latine avec les mouvements de masse au Mexique, en Bolivie et dans beaucoup d’autres pays ainsi qu’avec le processus révolutionnaire qui se déroule au Venezuela. Selon nous, c’est un avant-goût des mouvements révolutionnaires qui vont se développer en Europe et dans le monde industrialisé.

    Ce qui a manqué dans beaucoup de ces exemples, c’est une organisation prête à mener le combat contre l’impérialisme jusqu’au bout, en faisant clairement le choix d’un autre type de société. C’est à la construction d’une telle organisation que travaille le PSL/LSP.

    8. Que sera le nouveau système ? Cela ne va-t-il pas dégénérer de la même manière qu’en Russie ?

    Pour éviter une situation où l’élite bureaucratique tire tous les avantages vers elle et rend impossible toute participation démocratique comme cela a été le cas dans l’ancien Bloc de l’Est, nous devons veiller à ce que le système et son économie fonctionnent pour satisfaire les besoins réels de la population.

    La discussion sur le stalinisme n’est pas seulement une discussion historique. Nous ne pouvons pas simplement dire que des « fautes » ont été commises dans l’ancienne Union Soviétique. Trotsky et ses partisans sont les seuls à avoir expliqué l’avènement d’une élite bureaucratique en Russie sur base d’une analyse marxiste. Le stalinisme était la conséquence de l’isolement de la révolution dans un pays arriéré sur le plan industriel et culturel. Trotsky a laissé deux possibilités ouvertes : soit la nouvelle élite régnante était chassée par une révolution politique qui aurait préservé l’économie planifiée, mais qui aurait réinstallé les soviets (ou démocratie des conseils), soit la bureaucratie se réformerait d’elle-même pour devenir une nouvelle classe capitaliste, lorsque l’économie bureaucratiquement planifiée arriverait à bout de souffle. C’est malheureusement cette deuxième possibilité qui s’est produite. Une économie planifiée a besoin de démocratie ouvrière tout comme le corps humain a besoin d’oxygène.

    Le Socialisme suppose un système dans lequel le plus possible de travailleurs, ainsi que leurs familles, puissent participer et exercer un contrôle sur les prises de décision et ce tant sur le plan économique et social que politique. Un plan de production démocratiquement établi et contrôlé par des conseils composés de représentants des travailleurs, des syndicats nationaux et de la population dans son ensemble doit pouvoir faire une estimation correcte de ce qui est nécessaire et prioritaire. Chaque décision doit ensuite pouvoir être évaluée.

    Mais que se passera-t-il avec ceux qui seront au pouvoir ? N’est-il pas exact de dire que le pouvoir corrompt ? Si être au pouvoir signifie pouvoir rester à son poste sans aucun contrôle de la collectivité, cela pose effectivement un problème.

    Ce que nous défendons au contraire, et que nous mettons déjà en pratique dans notre organisation, c’est que chaque fonctionnaire doit être élu mais aussi révocable à tout moment, au cas où il n’a plus la confiance de ses électeurs. De même, il ne doit pas disposer d’un salaire plus élevé que la moyenne des travailleurs qu’il représente.

    La situation que nous connaissons actuellement, dans laquelle les parlementaires touchent des milliers d’euros par mois fait en sorte que ceux qui nous représentent vivent bien loin de notre réalité. Comment peuvent-ils savoir quels sont nos besoins ? Ils ne vivent pas dans les quartiers ouvriers, ils ne fréquentent pas les mêmes endroits, ils ne savent pas ce que c’est que d’arriver péniblement à payer toutes ses factures chaque mois, etc.

    Joe Higgins, jusqu’il y a peu notre parlementaire en Irlande, mais aussi nos parlementaires à l’intérieur du Labour Party dans les années ’80, ne gardaient comme salaire que l’équivalent d’un salaire moyen. Tout le reste était consacré aux campagnes et aux luttes des travailleurs, et non à la construction d’une villa dans le sud de la France…

    9. Pour le socialisme et l’internationalisme !

    Si les travailleurs d’une entreprise se mettent en grève, le patron fera tout pour briser cette grève. Il va proposer un accord aux leaders syndicaux, essayer par tous les moyens d’isoler le noyau dur de la grève et faire appel aux gardes de l’entreprise ou à la police et aux tribunaux pour briser les piquets.

    Il essayera, si la grève dure trop longtemps, de compenser ailleurs les pertes de production, si possible dans une société sœur à l’intérieur ou à l’extérieur du pays mais, s’il le faut, chez la concurrence. En d’autres mots, le capitaliste fera appel à sa classe, à ses représentants politiques, aux médias, et à l’appareil de répression pour briser la grève.

    A l’ère de la production internationale et des flux financiers mondiaux, le capitaliste fera de plus en plus appel à la « solidarité » des patrons à travers les frontières. Les travailleurs doivent en tirer les leçons. Ils doivent aussi faire appel à leur classe pour faire triompher leur lutte. Ils doivent aussi, et plus que jamais, s’appuyer sur leurs collègues à l’étranger.

    Aucune lutte n’éclate partout en même temps, chaque lutte commence quelque part. Les chances de réussite augmentent à mesure que la lutte s’élargit. Cela vaut pour les grèves, pour les mouvements de désobéissance civile, pour les marches de protestation… mais aussi pour la révolte et la révolution.

    Même une révolution socialiste éclate à une échelle nationale, mais sa réussite finale est déterminée par les événements internationaux. La solidarité a une importance majeure, mais avec un soutien moral ou même des collectes, etc. on ne remporte pas une victoire. C’est pour cela que le soutien actif des travailleurs d’autres entreprises, secteurs et pays et un élément d’importance cruciale. La révolution va donc débuter sur un plan local, mais sans élargissement national et international, elle est condamnée à l’échec. La démocratie ouvrière et la planification socialiste ne peuvent pas être limitées à un seul pays, comme cela a été démontré en Russie. L’isolement de la Russie soviétique a conduit à sa dégénérescence à partir de 1924.

    La Révolution russe, la seule dans laquelle la classe ouvrière a réussi à prendre le pouvoir pendant une courte période, a été l’événement le plus important de l’histoire. L’expérience n’a été que partiellement réussie, mais nous pouvons en tirer des leçons énormes et entre autres que nous devons nous organiser au niveau international, dans le cadre d’un parti mondial. C’est pourquoi le PSL/LSP fait partie du Comité pour une Internationale Ouvrière (CIO).

    Le CIO est actif sur tous les continents. Nous avons des sections aux États-Unis, mais aussi au Chili, au Brésil et au Venezuela. En Afrique, nous sommes présents au Nigeria et en Afrique du Sud. En Asie, nous avons des sections au Sri Lanka, en Inde, au Pakistan, au Kazakhstan et au Japon.

    En Europe, nous sommes présents en Belgique, en Suède, en Allemagne, aux Pays-Bas, en Angleterre, en Écosse, en Irlande (Nord et Sud), en Autriche, en Tchéquie, en Russie, en Ukraine, en Pologne, en Italie, en Grèce, à Chypre, en Espagne et en France. Au Moyen-Orient, nous avons des sections en Israël et en Palestine et des sympathisants au Liban. Le CIO a aussi une section en Australie. Le PSL/LSP voit donc sa lutte en Belgique dans le cadre de la lutte des travailleurs du monde entier, pour une société socialiste.

  • Luttons ensemble pour l’emploi

    32 h / semaine avec embauche compensatoire et sans perte de salaire !

    En quelques mois, la sauvegarde de nos emplois est devenue la principale préoccupation de beaucoup d’entre nous. Les licenciements se succèdent et la crise a maintenant un visage: chacun connaît quelqu’un dont l’emploi est menacé ou qui l’a déjà perdu. En réponse, les patrons veulent élargir le chômage économique aux employés… Certains dirigeants syndicaux sont prêts à en discuter. Mais quand vont-ils commencer à réfléchir à une stratégie syndicale offensive ? On ne va quand même pas devoir aller comme des moutons à l’abattoir?

    Par Peter Delsing

    Le nombre d’entreprises qui recourent au chômage économique partiel pour leurs travailleurs augmente. C’est une grosse morsure dans le budget des ménages, déjà bien amoché par le retard que les salaires ont pris sur l’évolution du côut de la vie ces dernières années. Les familles peuvent encore à peine épargner. Les factures, elles, continuent d’arriver.

    Les pertes d’emplois font les gros titres des journaux. Chaque jour amène sa fournée d’annonces. C’est par dizaines, voire par centaines, que les emplois sautent. Chez DAF à Westerlo (construction de camions), 753 emplois temporaires ont été supprimés, ce qui n’a pas empêché la direction d’annoncer une nouvelle vague de licenciements de 801 ouvriers et 73 employés. La Flandre paye le prix fort pour la grande flexibilité imposée à ses travailleurs par rapport à la Wallonie, où les syndicats sont plus forts et plus combatifs. Le chômage économique n’est pas une solution, les patrons peuvent abuser de cette mesure pour imposer encore plus de flexibilité aux travailleurs restants et aux “chômeurs” provisoires.

    Selon la KBC, 140.000 emplois seront tout bonnement rayés de la carte en 2009 et 2010 en Belgique. L’organisation patronale flamande Voka affirme de son côté que le gouvernement a sous-estimé la déglingue de l’économie et parle de 100.000 emplois en moins uniquement pour cette année. Au niveau européen, il serait question de 4,5 millions d’emplois perdus en 2009… Face a une telle vague de licenciements, il ne peut être question que de réponse collective.

    Dans d’autres pays, on a déjà compris que les travailleurs sont plus efficaces en action commune qu’isolés les uns des autres. En Irlande, 120.000 syndicalistes ont manifesté contre les attaques du gouvernement et pour la défense de l’emploi (la plus grande manifestation des syndicats dans ce pays depuis 30 ans.) En France, 3 millions de Français ont manifesté le 19 mars contre le gouvernement de Sarkozy. C’était la deuxième journée de grève nationale couplée à des manifestations dans tout le pays.

    Pourquoi donc les dirigeants syndicaux belges n’appellent-ils pas à suivre cet exemple ? Des actions symboliques ne vont pas mettre beaucoup de pression sur les patrons et le gouvernement… Le temps des discours est derrière nous! Nous avons besoin d’un appel pour une grève générale nationale de 24 heures, préparée par une sérieuse mobilisation dans la société et couplée à une manifestation massive pour l’emploi. Cela peut par exemple se faire dans le cadre de la mobilisation internationale de la Confédération Européenne des Syndicats de ce vendredi 15 mai à Bruxelles.

    Au lieu de laisser chaque jour apporter son lot de licenciements, nous devons tous ensemble descendre dans la rue ! Nous devons réclamer l’ouverture des comptes des entreprises qui licencient : qu’ont-elles fait de leurs bénéfices ? Il faut revendiquer la nationalisation des entreprises qui licencient collectivement et exiger la semaine de 32 heures avec embauche compensatoire et sans perte de salaire! Nos emplois et nos revenus, l’avenir de nos enfants, sont plus importants que leurs profits! Si le capitalisme ne peut pas garantir notre niveau de vie, nous devons lutter pour la gestion collective des richesses, lutter pour une autre société, une société socialiste.

  • Irlande : occupation de Waterford Crystal

    Des agents de sécurité avaient spécialement été engagés pour distribuer aux travailleurs de l’usine de cristal mondialement célèbre de Waterford des lettres individuelles annonçant qu’il n’était plus nécessaire de rejoindre son poste de travail, vu que l’usine allait fermer! Mais les travailleurs ont commencé à occuper l’usine…

    Kevin McLoughlin, Socialist party (CIO-Irlande), article publié le 11 février sur www.socialistworld.net

    Consternés, mais profondément mécontents de la cessation de la production, les ouvriers de Waterford Crystal se sont dirigés vers le centre des visiteurs. Là, un plus grand nombre d’agents de sécurité engagés à cet effet leur ont bloqué le chemin, certains réclamant même apparemment des battes de baseball. S’ils ont cru qu’une telle intimidation étoufferait la colère des travailleurs, ils se sont lourdement trompés. Des centaines d’ouvriers ont écarté les violents. Ainsi a commencé l’occupation de l’usine de cristal de Waterford le vendredi 30 janvier.

    Les travailleurs n’avaient pas d’autre alternative que l’occupation. Plus de 700 travailleurs sont employés chez Waterford Crystal, dans approximativement 500 fabriques de produits en verre de cristal. Si la fermeture de l’installation était effective, leurs droits et leur futur auraient été démantelés d’un coup.

    Sept cents postes sont directement en jeu, mais indirectement il y en a beaucoup plus. La fermeture aurait aussi signifié que les compagnies qui ont encerclé Waterford Crystal comme des vautours auraient été capables de plonger et de réduire substantiellement les salaires et les conditions de travail de n’importe quelle force ouvrière embauchée.

    Avec les continuels problèmes financiers de la société, un nombre considérable de travailleurs avaient été préparés à accepter le licenciement. Dans les conditions envisagées, les travailleurs détenant beaucoup d’ancienneté auraient obtenu plus de 150.000 € en guise de licenciement. Maintenant, avec la faillite, tout ce qu’ils auraient pu obtenir aurait été un paiement basique légal. La défense des pensions a aussi été un moteur crucial pour l’action des travailleurs.

    Les ouvriers de Waterford Crystal n’avaient donc pas d’autre choix que d’occuper l’usine et de prendre son contrôle effectif ainsi que celui de son matériel comme moyens de lutte pour la défense de leurs droits. Cette conclusion a été tirée extrêmement vite et a reflété ce qui était en jeu, mais aussi le fait que le militantisme et les traditions de gauche parmi les verriers ne s’étaient pas éteints.

    Les faillites ont doublé l’année dernière en Irlande. Cette année s’annonce pire encore, avec des estimations d’après lesquelles plus d’un tiers de toutes les entreprises sont insolvables. Dans ce cadre, la lutte de Waterford Crystal est extrêmement importante et regardée avec attention par de nombreux travailleurs.

    La verrerie Waterford a d’abord été fondée en 1783. Cette année, l’usine de Wedgwood aurait célébré son 250ème anniversaire si cette socité n’avait pas été rachetée par Waterford et avait fusionné avec elle en 1986 pour 323 millions d’euros (en monnaie actuelle).

    En quelques années de collaboration, toutefois, la valeur de leur fusion équivalait au moins à ce que Waterford avait payé pour l’acquisition de Wedgwood. Des dettes remontant à cette époque avaient atteint un point tellement critique qu’elles avaient paralysé la compagnie. En dépit de ces dettes, le patron a continué à collectionner les trophées, enrichissant Waterford d’encore plus de marques de renom, comme Royal Doulton, la porcelaine Rosenthal en Allemagne et All-Clad Metalcrafters aux États-Unis.

    Waterford Wedgwood employait plus de 8.000 personnes dans le monde. Ses dettes atteignaient le montant de 450 millions d’euros, à peu près la moitié de la valeur des ventes annuelles. Au commencement de cette année, Bank of America a nommé un receveur pour quelques compagnies, notamment pour l’usine de Waterford et celle de Wedgwood, mais d’autres secteurs de la société, employant 5.000 travailleurs, sont toujours en activité.

    Les travailleurs de Waterford paient le prix de l’instabilité financière, de la crise économique et de la mauvaise gestion flagrante. Les données sont que, si le remboursement des dettes est supprimé, l’usine de Waterford serait rentable et sa part dans le marché américain augmenterait actuellement.

    Quand on arrive au centre des visiteurs actuellement occupé, à la droite de l’entrée, on peut lire sur une banderole du syndicat UNITE «Nationalisons Waterford Crystal». Quand on entre à l’intérieur de l’usine, maintenant sous le contrôle des travailleurs, on peut voir que tout est très ordonné, les ouvriers accueillent chaleureusement tout soutien et vous êtes assailli de toutes parts par des propositions de thé, de café, de sandwiches ou même de crème glacée.

    Vous avez un aperçu des profondes capacités et du pouvoir de la classe des travailleurs. Ce qu’ils font, d’après la loi, est illégal, mais, comme une autre banderole l’affiche : «Les travailleurs unis ne seront jamais vaincus». L’État serait incapable de les chasser tant sont grands leur détermination et leur soutien dans la communauté. Waterford démontre qu’avec une action bien organisée et le soutien de la classe des travailleurs, on peut écarter les lois dirigées contre les syndicats ainsi que l’État.

    Les travailleurs montrent leur pouvoir

    Avec les travailleurs en occupation, le syndicat UNITE aurait dû immédiatement lancer une campagne pour la nationalisation, que plusieurs travailleurs soutiennent clairement. Cependant, le fait que les dirigeants syndicaux se sont exclusivement concentrés sur la recherche d’un acheteur privé démontre qu’ils ne pensent pas que la nationalisation est une option.

    Les travailleurs font confiance au syndicat et acceptent la focalisation sur la recherche d’un acheteur privé en espérant que le problème sera en quelque sorte résolu. Mais il y a clairement aussi du malaise et de la peur de ce que cette solution va obtenir. Comme un travailleur le faisait remarquer dans le Waterford News & Star, «Quelque choix que nous fassions, nous allons être battus, mais avec un bâton plus doux si Clarion (une entreprise japonaise, NDT) prend le contrôle de l’usine».

    La décision est au capital privé de la compagnie d’actions Clarion, l’option favorite du syndicat. Mais même les prévisions les plus optimistes sont que si Clarion prend le contrôle avec une assistance financière considérable, seulement 300 emplois peuvent être sauvés et les salaires et les conditions seront diminués. N’importe quel privé va aussi tenter d’éviter toute responsabilité pour les pensions et les coûts des licenciements.

    Il est possible que les conditions que les sociétés comme Clarion peuvent offrir en matière d’emploi, de licenciement ou de paiement des pensions ne seront pas acceptables pour les travailleurs. Toutes les tentatives tendant à diviser les travailleurs et à les contraindre à un accord doivent être rejetées.

    Nationalisation : la seule solution

    Mais il ne s’agit pas de choisir quelle défaite est la meilleure. La nationalisation n’est pas une pensée après coup sur laquelle méditer si on ne peut trouver aucun acheteur privé. Les arguments en faveur d’une nationalisation de Waterford Crystal sont très forts. La société est viable et c’est pourquoi aucun argument ne peut justifier pour quelle raison 400 emplois devraient être perdus.

    Si Clarion était sur le point d’en prendre le contrôle et même de garantir le fonctionnement de l’usine pour deux ou trois ans, il est plus probable qu’ils se seraient retirés bientôt après en laissant éventuellement un centre pour visiteurs, un magasin et juste assez d’emplois dans la construction pour l’approvisionner.

    On devrait se battre pour sauver les 700 emplois. Les travailleurs licenciés devraient être remplacés par de nouveaux travailleurs et on devrait défendre les salaires et les conditions de travail, résultat obtenu par des années de lutte. La nationalisation sous le contrôle démocratique et la gestion des travailleurs est la seule voie pour garantir un véritable avenir à Waterford Crystal et à ses travailleurs.

    L’idée que la nationalisation n’est pas possible est infirmée par les événements. Le gouvernement est actuellement occupé à finaliser ses 7 milliards de sauvetage de l’Allied Irish Bank et de Bank of Ireland. Ils viennent justement de nationaliser Anglo Irish Bank ! Une campagne pour demander que l’État intervienne et investisse pour défendre Waterford Crystal et l’économie du Sud-Est par une nationalisation recevrait une très large réponse publique.

    Le syndicat UNITE devrait saisir cette opportunité. En menant une lutte pour la nationalisation, ils pourraient défendre la classe ouvrière de Waterford, mais aussi transformer le débat engagé sur la manière dont la crise économique devrait être traitée. Tout ce que nous entendons est une propagande pour un pacte de solidarité sociale, dans lequel la population tire d’affaire l’État et les riches.

    Une lutte pour la nationalisation de Waterford Crystal pourrait être le départ d’un nouveau mouvement qui mettrait en évidence le besoin pour l’État de recourir à la richesse et aux ressources économiques pour défendre les emplois et le gagne-pain du peuple, plutôt que de tirer d’affaire les grosses entreprises et les riches.

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